Comportement Au Cisaillement Des BFUP
Comportement Au Cisaillement Des BFUP
Comportement Au Cisaillement Des BFUP
Résumé
Le cisaillement est un mode de rupture souvent déterminant pour assurer la résistance des structures
en béton armé ou précontraint. Pour des éléments ne comportant pas d’armatures transversales, ce
mode de rupture est généralement fragile entraînant l’effondrement de la structure sans signes
avant-coureurs. L’importante ténacité en traction des Bétons Fibrés Ultra-Performants (BFUP)
permet aux éléments d’atteindre des résistances ainsi qu’une capacité de déformation au
cisaillement nettement supérieures. Dans la majorité des cas, la résistance du BFUP seul est
suffisante permettant ainsi de s’affranchir d’une armature transversale.
A travers plusieurs études menées à l’Ecole d’Ingénieurs et d’Architectes de Fribourg
(EIA-FR) et ailleurs, cet article a pour objectifs de montrer le comportement au cisaillement
d’éléments de structure en BFUP d’une part, et présenter des méthodes de dimensionnement d’autre
part.
Mots-clés: Effort tranchant, poinçonnement, efforts concentrés, éléments armés,
éléments précontraints, dalles, poutres.
1. Introduction
Les Bétons Fibrés Ultra-Performants (BFUP) présentent des propriétés, en termes mécanique et de
durabilité, nettement plus élevées que les bétons conventionnels. Ces caractéristiques en font un
matériau adapté à la réalisation d’éléments minces et/ou aux formes complexes en permettant de
s’affranchir d’armatures conventionnelles. Quelques réalisations remarquables mettent en évidence
le potentiel des BFUP dans les domaines des ouvrages d’art et des bâtiments [1] [2].
Dès les premiers développements des bétons de fibres, une réduction voire la suppression totale des
armatures dites secondaires dans les éléments de structure s’est avéré être une application
parfaitement adaptée [3]. La distribution aléatoire des fibres permet, si elles sont en quantité
suffisante, un contrôle efficace de la fissuration. De nombreuses études expérimentales mettent en
évidence la capacité des bétons de fibres à diminuer voir à remplacer totalement les armatures
d’effort tranchant dans les poutres (fig. 1) [4] [5]. Au niveau de la résistance au poinçonnement le
constat est similaire [6] [7]. Les caractéristiques importantes en traction des BFUP permettent de
répondre pleinement à ce rôle.
a)
b)
99
Comportement au cisaillement des BFUP
100
Comportement au cisaillement des BFUP
3. Du matériau à la structure
Pour permettre le dimensionnement d’une structure, un ensemble de caractéristiques du matériau
doivent être préalablement déterminé par des essais ou fourni par le producteur.
Pour un pré-dimensionnement, les caractéristiques courantes des BFUP sont les suivantes :
- Densité : 2400 – 2800 kg/m3
- Résistance en compression fc : 130 – 250 MPa
- Résistance en traction de la matrice fct : 7 – 10 MPa
- Module d’élasticité Ec : 45 – 65 GPa
- Coefficient de Poisson : ~ 0.2
- Coefficient de dilatation thermique L : 10 - 12 m/m/°C
- Retrait total sans traitement thermique : ~ 600 m/m
Le comportement en compression des BFUP est linéaire environ jusqu’à la valeur maximale.
A contrario, des bétons à haute résistance qui sont fragiles, les BFUP ont un comportement post-pic
ductile dû à l’importante quantité de fibres (fig. 3). Au niveau du dimensionnement aux états limites
ultimes (ELU), la partie post-pic est négligée. Aux états limites de service (ELS), le comportement
peut être considéré linéaire.
[MPa]
fck
0.85fck
Ecm
0.85fck/Ecm 3.0
[‰]
Figure 3 : Loi de comportement en compression à l’ELU du BFUP selon [8] et comparaison à la
rupture de cylindres sans (à gauche) et avec fibres (à droite).
Le comportement en traction d’un béton fibré est dépendant de la formulation ainsi que de la
méthode de mise en œuvre. Au niveau de la formulation, la réponse en traction est principalement
dépendante de la quantité de fibres, la résistance de la matrice cimentaire, le rapport
longueur/diamètre de la fibre lf/f et la forme de la fibre [3]. Les bétons de fibres n’ont cependant
pas un comportement isotrope. Ils sont sujets à des orientations préférentielles des fibres dues aux
parois des coffrages et aux méthodes de coulage. Les BFUP sont généralement auto-plaçants. Dans
ce type de bétons, les fibres s’orientent parallèlement au sens des flux d’écoulement. Les éléments
en BFUP étant souvent minces, les effets de parois sont importants. Ces différents effets peuvent
être favorables ou défavorables suivant les cas en fonction de l’orientation des sollicitations dans
l’ouvrage. Ces facteurs sont à considérer avec attention lors du dimensionnement de structures en
BFUP, en particulier pour des éléments sans armatures passives.
101
Comportement au cisaillement des BFUP
Des BFUP avec Vf > 2% présentent généralement un comportement durcissant en traction directe,
c'est-à-dire que la résistance post-fissuration apportée par les fibres est plus élevée que la résistance
de la matrice cimentaire ce qui implique une multi-fissuration. Cette phase appelée pseudo plastique
peut directement être exprimée en relation ). A partir d’un allongement limite u, les
déformations se localisent sur une seule macro-fissure, par conséquent la relation devient w).
D’autres BFUP moins dosés en fibres, (1% < Vf < 2%), sont adoucissants. La résistance post-
fissuration apportée par les fibres est équivalente voire moins élevée que la résistance de la matrice
cimentaire ce qui implique une courte phase pseudo plastique ou directement une localisation sur
une seule macro-fissure (fig. 4). Cependant, il est intéressant de noter que des éléments de structure
réalisés avec un matériau de type adoucissant peuvent présenter un comportement durcissant en
flexion.
Les propriétés mécaniques (loi de comportement) sont déterminées par un ensemble d’essais
spécifiques. Le comportement est identifié soit par des essais de traction directe ou de flexion sur
des prismes. Si des essais de flexion sont choisis, les dimensions des prismes de caractérisation
seront déterminées en fonction de critère d’élancement de la structure et de la longueur des fibres.
Pour des éléments épais (poutres), des essais de flexion sur des prismes entaillés seront privilégiés.
Alors que pour des éléments minces, des essais de flexion sur des prismes d’épaisseur identique à
celles de ces éléments seront favorisés. Les essais de flexion, bien que plus aisés à réaliser, doivent
être traités mathématiquement afin de s’affranchir de l’effet de structure [7].
Depuis 2007, l’EIA-FR mène un important projet de recherche sur les BFUP en partenariat avec
Sigma béton (Vicat), Creabeton Matériaux et le bureau d’ingénieurs Mantegani & Wysseier.
Ce projet de recherche vise à analyser le comportement d’éléments de structure en BFUP avec et
sans armatures et à établir des modèles de calcul. Plusieurs études expérimentales sur des éléments
structuraux, poutres et dalles, ont été entreprises dans ce but. Les éléments d’essai ont été réalisé
avec du Béton Composite Vicat BCV®. Le BCV est développé par Vicat et appartient à la famille
des BFUP. Le dosage en fibres est adapté en fonction des caractéristiques en traction recherchées.
Ce béton a déjà fait l’objet de réalisation remarquable tel que le pont de la Chabotte sur l’autoroute
A51 en France (fig. 5).
102
Comportement au cisaillement des BFUP
Dans le cadre des différentes études expérimentales, le BCV a été utilisé avec différents taux et
types de fibres. Les quatre compositions suivantes avec leurs dénominations respectives ont été
analysées :
- BCV 0 sans fibres
- BCV 1%A fibres métalliques courtes, dosage Vf = 1% (79 kg/m3)
- BCV 1%B fibres métalliques courtes et longues, dosage Vf = 1% (79 kg/m3)
- BCV 2% fibres métalliques courtes et longues Vf = 2% (158 kg/m3)
- BCV 3% fibres métalliques courtes et longues Vf = 3% (237 kg/m3)
Le BCV a une résistance moyenne en compression sur cylindre fcm28 de 130 MPa et fcm90 de
150 MPa sans traitement thermique. Le module d’élasticité moyen Ecm est de 45 GPa.
Le comportement en traction est dépendant du dosage en fibres. Des essais de caractérisation ont été
menés à l’EIA-FR sur des prismes entaillés 100 x 100 x 400 mm ainsi que des plaques 200 x 700
mm d’épaisseurs 30 à 80 mm (fig. 6/7). Dans les figures présentées ci-dessous, la contrainte
équivalente de flexion eq correspond à une distribution élastique.
6M
eq (1)
b h2
eq [MPa] BCV-1%B eq [MPa] BCV-2%
40 40
35 35
30 30
25 25
20 20
15 15
10 10
5 5
0 0
0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0
Crack Mouth Opening Displacement [mm] Crack Mouth Opening Displacement [mm]
Figure 6: Résultats d’essais de flexion 3-points sur des prismes entaillés 100 x 100 x 400 mm.
eq [MPa] BCV-1%A eq [MPa] BCV-2%
35 35
30 30
25 25
20 20
15 15
10 10
5 5
0 0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10
Figure 7: Résultats d’essais de flexion 3-points sur des plaques 40 x 200 x 700 mm.
103
Comportement au cisaillement des BFUP
Les lois de comportement post-fissuration en traction ont été identifiées sur la base des essais de
flexion 3-points sur prismes entaillés à l’aide d’une méthode inverse [8]. Dans la suite de l’article,
les calculs d’éléments en BCV ont été effectués avec les lois de comportement suivantes (fig. 8).
[MPa]
10
9 BCV-1%
8 BCV-2%
7
6
5
4
3
2
Ecm
1 45 [GPa]
0
0 0.1 0.2 0 1 2 3 4 5 6
[mm] w [mm]
Les plaques minces sont particulièrement influencées par l’orientation préférentielle des fibres due à
la méthode de coulage et aux effets de parois. Par conséquent, les essais de caractérisation doivent
mettre en évidence cette éventuelle anisotropie. Les recommandations de l’AFGC-SETRA [8]
préconisent pour les éléments minces une loi de comportement en traction bilinéaire exprimée en
relation . Cette relation est identifiée pour chaque épaisseur à l’aide d’une méthode inverse.
Dans le but de simplifier le calcul d’élément minces et sur la base de la thèse de Spasojević [11] et
Readelli [12], les auteurs de la présente étude proposent d’adopter une loi simplifiée en considérant
un comportement en traction élastique – parfaitement plastique jusqu’à un allongement limite u. Le
moment résistant est déterminé en fixant le pivot de la fibre tendue égal à u. Pour les BFUP
analysés et les épaisseurs considérées, le modèle simplifié montre une corrélation satisfaisante (fig.
9).
mR [kNm/m] BCV_1%A mR [kNm/m] BCV_2%
90 120
ft = 5,5 MPa ft = 8,5 MPa
80 Ec = 45 GPa Ec = 45 GPa
u = 2.0 ‰ 100 u = 2.5 ‰
70
60 80
50
60
40
30 40
20
20
10
0 0
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
Depth h [mm] Depth h [mm]
Figure 9: moment résistant en fonction de l’épaisseur des corps d’épreuve et comparaison avec
les points expérimentaux.
104
Comportement au cisaillement des BFUP
Dans le but d’analyser le comportement en flexion et à l’effort tranchant de poutres en BFUP avec
et sans armatures passives, l’EIA-FR a effectué une série d’essais composée d’une vingtaine
d’éléments. Les paramètres principaux étaient : la quantité, le type de fibres et le taux d’armature.
Les poutres ont une section de 150 x 100 mm, pour une longueur de 1700 mm et 1500 mm suivant
la présence ou non d’armatures longitudinales. Les éléments avec armatures sont composés de deux
barres de haute adhérence 10 mm ou 16 mm avec une hauteur effective d de 120 mm, le taux
d’armature est respectivement de 1,31% et 3,35%. Pour tous les éléments d’essai, le BFUP a été
coulé dans les coffrages avec un mouvement de va-et-vient longitudinal afin d’éviter un écoulement
diminuant les risques d’anisotropie. Les poutres ont été testées en flexion circulaire sur une portée
de 1350 mm (fig. 10), 11, 12 et tab. 1, 2, 3). La mise en charge a été effectuée par paliers avec des
cycles de chargement – déchargement jusqu’à la rupture.
BCV-1%A_P_0
20
BCV-2%_P_0a
BCV-2%_P_0b
15
10
0
0 5 10 15 20 25 30
Deflection at centre [mm]
Figure 11: Courbes effort tranchant V – flèche au centre des poutres sans armatures
105
Comportement au cisaillement des BFUP
BCV-1%A_P_0 13.7 66
12.9
BCV-1%B_P_0 10.3 (Vf only)
flexion
BCV-2%_P_0a 19.3 102
17.5
BCV-2%_P_0b 18.5 (Vf only)
Tableau 1 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres sans armatures
Les quatre poutres sans armatures passives ont une rupture en flexion à des résistances différentes
suivant la quantité et le type de fibres. Au niveau de la fissuration, les éléments ne présentent
aucune fissure d’effort tranchant. Les éléments sans armatures passives ont une résistance en
flexion modérée, par conséquent la résistance au cisaillement n’est pas déterminante dans le cas
étudié.
Shear force V [kN]
40
35
30
25
20
15
BN_P_1.31
BCV-0_P_1.31
10
BCV-1%B_P_1.31
BCV-2%_P_1.31a
5
BCV-3%_P_1.31
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40
Deflection at centre [mm]
Figure 12: Courbes effort tranchant V – flèche des poutres avec armatures 2 10 mm.
Tableau 2 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres avec 2 10 mm.
106
Comportement au cisaillement des BFUP
60
50
40
30
20 BN_P_3.35
BCV-0_P_3.35
BCV-1%B_P_3.35
10
BCV-2%_P_3.35
BCV-3%_P_3.35
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40
Deflection at centre [mm]
Figure 13: Courbes effort tranchant V – flèche des poutres avec armatures 2 16 mm.
Tableau 3 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres avec 2 16 mm.
Les poutres en béton conventionnel (BN) et en BCV sans fibres (BCV-0) présentent des ruptures à
l’effort tranchant sans avoir atteint la limite élastique des barres d’armature.
La rupture de ces éléments est apparue de manière soudaine. Tous les éléments avec fibres ont
atteint la limite élastique de l’acier de l’armature. Pour de forts taux d’armature ou de faibles
dosages en fibres le réseau de fissures d’effort tranchant est bien marqué. Aucun des éléments avec
fibres n’a présenté de rupture par effort tranchant soudaine. Cependant, la capacité de déformation
peut être limitée par une rupture à l’effort tranchant après l’écoulement des aciers d’armature, (cas
de la poutre BCV-1%B_P_3.35).
Afin d’analyser si les contributions des étriers et des fibres peuvent être additionnées à la résistance
ultime à l’effort tranchant, une étude expérimentale sur 11 poutres a été entreprise à l’IFSTTAR (ex
Laboratoire Central des Ponts et Chaussées LCPC) [14] (fig. 14, tab. 4 et 5). Les paramètres
principaux étaient le type d’armature longitudinale (passive ou active), la formulation du BFUP et
la présence ou non d’armatures transversales. Les poutres ont une section en I de 380 mm de
hauteur pour une longueur de 3000 mm. La série d’essais est divisée en deux parties.
Dans la première partie (PC), les poutres sont précontraintes par 6 torons T15S avec une hauteur
effective d de 305 mm et une force initiale de mise en tension de 1'020 kN au total. Dans la seconde
partie (RC), les poutres sont armées par 5 20 et 1 25 mm avec une hauteur effective d de 305
mm. Les poutres ont été testées sur une portée de 2000 mm avec deux points de charges situées
symétriquement à 760 mm des appuis. L’armature transversale est composée d’étriers (un seul brin)
6 espacé de75 mm [11].
107
Comportement au cisaillement des BFUP
Tableau 5 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres avec armatures.
NS = sans étriers, WS = avec étriers, NF = sans fibres, OF = fibres organiques
Les calculs des résistances flexionnelles Vflex et au cisaillement selon [8] VAFGC ont été effectué en
adoptant une contrainte résiduelle de traction de 10 MPa pour les bétons A et B. Hormis les deux
poutres BFUP avec armatures passives et étriers (A_RC-WS et B_RC-WS), tous les éléments ont
subi une rupture par cisaillement. Par rapport aux poutres avec armatures passives et sans fibres, les
éléments en BFUP présentent des ruptures à des niveaux de charge nettement plus élevés et une
ductilité plus grande. Les éléments fibrés présentent un réseau de fissures diagonales bien réparti.
La différence de résistance des poutres précontraintes avec et sans étriers est de 117 et 122 kN
respectivement pour les mélanges A et B. Cette différence correspond à la contribution des étriers
démontrant ainsi le principe de superposition. Ces études mettent clairement en évidence la capacité
des BFUP à reprendre des efforts de cisaillement importants.
108
Comportement au cisaillement des BFUP
Pour des éléments épais (poutres), plusieurs approches de calculs sont possibles pour déterminer la
résistance flexionnelle de la section. Le principe général reste d’établir l’équilibre des efforts et des
moments. Les particularités par rapport au béton armé conventionnel proviennent de la prise en
compte du béton tendu et du fait que la loi de comportement du béton en traction est exprimée en
relation (w). La première approche proposée, dénommée approche discontinue, permet de décrire
l’évolution de la section fissurée en fonction de la courbure. La section est modélisée par deux
couches avec une partie fissurée et non-fissurée. La zone non-fissurée suit la théorie des poutres,
alors que la section fissurée est constituée de deux blocs rigides reliés par les fibres et
éventuellement des armatures [4].
L’équilibre de la section implique l’égalité des efforts normaux internes avec l’effort normal
externes ainsi que l’égalité des moments internes avec le moment extérieur appliqué.
N int N ext (2)
M int M ext (3)
Cependant, ces deux équations ne sont pas suffisantes pour résoudre le système.
Une troisième équation permet de relier la courbure de la partie non-fissurée à l’ouverture de la
fissure [4].
2 1 2 2
w0 2 m a 2 2 a (4)
3
Avec 1 représentant la courbure élastique de la section ;
12 M
1 (5)
Ec h 3
109
Comportement au cisaillement des BFUP
110
Comportement au cisaillement des BFUP
Vu Vc V f Vw (11)
111
Comportement au cisaillement des BFUP
L’angle d’inclinaison des bielles u est considéré à 45° pour des éléments avec armatures passives.
Pour des éléments précontraints l’angle des bielles u est défini par itération avec tan(2u)=2u/c.
K est un facteur d’orientation des fibres et γf est le facteur partiel de sécurité pour le BFUP en
traction (f = 1,3 en général). L’ouverture de la fissure est limitée aux valeurs suivantes :
wu max 2 3 h u , 0.3 avec u ≤ 3‰ (17)
A noter que pour des éléments précontraints, un critère de non fissuration au cisaillement à l’ELS
doit être vérifié.
4.4.2. Proposition
Bien que sécuritaire dans les cas étudiés, le calcul de la résistance au cisaillement selon les
recommandations AFGC ne se basent pas sur les derniers développements en la matière.
Selon le Model Code 2010 [15] la résistance au cisaillement est la somme des contributions du
béton VR,c et des armatures transversales VR,s. Le modèle proposé, basé sur le troisième niveau
d’approximation (3th LoA), fait intervenir en plus la contribution des fibres VR,f.
La résistance de la matrice est directement fondée sur les équations de la théorie des champs de
compression modifiée (MCFT) [17] et se définit de la manière suivante :
VR ,c kv b0 z fc
0.4 1300
kv si w = 0 (18)
1 1500 x 1000 0.7 z 48
16 d g
0.4
kv si w 0.08 fc f y (19)
1 1500 x
29 7000 x (20)
Où ܾ0 est la largeur participante, z le bras de levier de forces internes z = 0.9d, x est l’allongement
longitudinale à mi-hauteur dans la section de contrôle et dg représente le diamètre des plus gros
granulats, dans le cas des BFUP dg = 0. Pour les BFUP, les auteurs proposent d’utiliser l’équation
(19) définissant kv. L’ouverture de la fissure wx est le produit de l’allongement x et de l’espacement
des fissures s. Dans les cas étudiés, sx a été considéré égal à h/2.
wx x sx (21)
La contribution des fibres VR,f correspond à la composante verticale de l’intégrale des contraintes de
traction sur le plan de rupture Ap. Le plan de rupture est estimé par Ap = z bw/sin(). La distribution
de l’ouverture de fissure est considérée linéaire le long du plan de rupture. En connaissant la loi de
comportement (w), la distribution des contraintes de traction est définie le long du plan de rupture.
Afin de ne pas considérer deux fois la résistance de la matrice en traction, le comportement
adoucissant de la matrice est soustrait à la loi de comportement en traction.
VR , f f w dAp (22)
Ap
112
Comportement au cisaillement des BFUP
VR,c + VR,f 1%
0.6
0.4 VR,f 1%
VR,c éq.(18) dg = 16
0.2 VR,c éq.(18) dg = 0
VR,c éq.(19)
0
0 0.5 1 1.5 2
x [‰]
Figure 18 : Les courbes représentent les prévisions du modèle tenant compte des contributions des
fibres et de la matrice.
Les critères de rupture au cisaillement pour les éléments sans fibres en béton conventionnel BN et
BCV-0 montrent une bonne corrélation avec les résultats expérimentaux. Pour les éléments avec
fibres, les critères de rupture au cisaillement ne peuvent être vérifiés compte tenu d’un mode de
rupture flexionnel. Cependant, ce modèle montre une bonne corrélation avec des résultats
expérimentaux sur des poutres en béton de fibres (fig. 18).
5. Comportement au poinçonnement
113
Comportement au cisaillement des BFUP
pourvus de rotules axiales laissant libres la rotation (fig. 19). Le chargement a été effectué par
paliers jusqu’à la rupture.
Figure 20: Courbes effort appliqué V – flèche au centre des dalles 960 x 960 x h mm représentées
par rapport au dosage en fibres.
Pour des dalles en béton armé conventionnel sans armatures transversales, il a été montré que la
résistance au poinçonnement est inversement proportionnelle à la capacité de déformation [18].
Autrement dit, pour des dalles présentant les même caractéristiques (béton, épaisseur, système
statique), plus le taux d’armature augmente plus la résistance au poinçonnement augmente. Par
contre la capacité de déformation diminue. En observant les résultats le constat est similaire pour les
dalles en BFUP.
Les dalles sans armatures passives ont manifesté une rupture en flexion avec un développement
marqué de lignes de rupture. La distribution des lignes de rupture est toutefois aléatoire par rapport
au mécanisme envisagé (fig. 21). Après découpe et analyse de la fissuration interne, aucun cône de
poinçonnement marqué n’est visible. Le même constat que pour les poutres a été observé : la
résistance d’éléments sans armatures passives en flexion est modérée, par conséquent le
poinçonnement n’est pas déterminant dans le cas étudié.
114
Comportement au cisaillement des BFUP
V [kN] BCV_2%
200
ft = 8,5 MPa
180 Ec = 45 GPa
u = 2.5 ‰
160
Vpl = 6.623 mR
140
120
100
80
60
40
20
0
0 20 40 60 80 100
Depth h [mm]
Figure 21: Résistance plastique Vpl selon le mécanisme envisagé et points expérimentaux.
Load V [kN] h = 30 mm Load V [kN] h = 40 mm
45 55
BCV_1%A_30_0 BCV_1%A_40_0.98
40 50
BCV_1%A_30_1.31 BCV_1%A_40_1.92
BCV_2%_30_0 45 BCV_2%_40_0
35
BCV_2%_30_2.37 BCV_2%_40_1.92
40
30
35
25 30
20 25
20
15
15
10
10
5
5
0 0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70
Deflection at centre [mm] Deflection at centre [mm]
Figure 22: Courbes effort appliqué V – flèche au centre des dalles 960 x 960 x h mm représentées
par rapport à l’épaisseur.
115
Comportement au cisaillement des BFUP
Les dalles avec treillis d’armatures ont toutes atteintes la limite élastique des aciers d’armature
suivie d’un court palier et d’une rupture par poinçonnement. La chute de résistance est plus ou
moins brutale selon l’épaisseur de la dalle. Compte tenu de la disposition des treillis d’armature,
nous distinguons deux types de mécanismes de ruine. Dans le premier type, le cône de
poinçonnement intercepte les armatures, la résistance est élevée. Dans le second type, le cône de
poinçonnement n’intercepte pas les barres, le cône de poinçonnement est concentré, la résistance est
plus faible.
Les dalles BCV-2%_40_1.92 et BCV-2%_60_1.96 présentent une résistance inférieure aux dalles
BCV-1% respectives. L’analyse de la fissuration tend à mettre en évidence une localisation des
efforts plus importante pour les dalles BCV-2% (fig. 23). Les armatures du centre étant plus
sollicitées, elles atteignent plus rapidement la limite de plastification entraînant une rupture par
poinçonnement. L’analyse des résultats et de la fissuration interne est encore en cours dans le but
d’affirmer ces hypothèses.
a)
b)
Figure 23: Aspect de la fissuration à la rupture, a) dalles sans armatures, b) dalles avec armatures.
116
Comportement au cisaillement des BFUP
Sur la base de la théorie de la fissure critique et d’une proposition pour les bétons de fibres
développées par Muttoni et Fernandez [17], le modèle de résistance au poinçonnement a été adapté
au BFUP. Le modèle fait intervenir les contributions de la matrice VR,c et des fibres VR,f. Le modèle
assume que la résistance au poinçonnement de la matrice est fonction de l’ouverture et de la
rugosité de la fissure de cisaillement. L’ouverture de la fissure critique est assumée être
proportionnelle au produit de la rotation de la dalle avec la hauteur effective d. Basé sur ces
hypothèses, le critère de rupture est défini de la manière suivante [18]:
VR ,c 34
(23)
b0 d f c d
1 15
16 d g
Où ܾ0 est le périmètre de contrôle, situé à la distance ݀/2 du bord de la surface d’appuis, dg
représente le diamètre des plus gros granulats, dans le cas des BFUP dg = 0.
La part des fibres correspond à la composante verticale de l’intégrale des contraintes de traction sur
le plan du cône de poinçonnement Ap. La distribution de l’ouverture de fissure est considérée
linéaire le long du plan de rupture. En connaissant la loi de comportement (w), la distribution des
contraintes de traction est définie le long du plan de rupture. Afin de ne pas considérer deux fois la
résistance de la matrice en traction, le comportement adoucissant de la matrice est soustrait à la loi
de comportement en traction.
VR , f f w dAp (24)
Ap
Figure 24: Modèle mécanique de la contribution des fibres dans le plan de rupture.
V MPa
b0 d f c
1
BCV-0
0.9 VR,c + VR,f 2%
BCV-1%B
0.8 VR,c + VR,f 1% BCV-2%
0.7
0.6
0.5
0.4
flexural failure
0.3
0.2
VR,c
0.1
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3
d
dg0 dg
Figure 25: Critère de rupture et résultats expérimentaux de dalles en BFUP avec armatures.
117
Comportement au cisaillement des BFUP
V MPa V
h = 60 mm MPa h = 80 mm
b0 d f c b0 d f c
1 1
VR,c +VR,f
0.9 VR,c + VR,f 2% BCV-1%A 0.9
2%
BCV-1%A
0.3 0.3
0.2 0.2
VR,c
VR,c
0.1 0.1
0 0
0 0.1 0.2 0.3 0 0.1 0.2 0.3
d d
[ ] [ ]
dg0 dg dg 0 dg
6. Conclusions
Les études expérimentales menées à l’EIA-FR et ailleurs mettent en évidence une résistance au
cisaillement élevée des éléments en BFUP. La résistance et la ténacité en traction importantes des
BFUP permettent un contrôle efficace de la fissuration au même titre qu’une armature secondaire.
Dans le cas où, la sollicitation de cisaillement est trop élevée pour le BFUP seul, l’élément peut être
armé transversalement. Le principe de superposition de la contribution des fibres et des étiers a été
démontré.
Les études expérimentales mettent aussi en évidence qu’un élément en BFUP ne comportant pas
d’armatures passives ou actives a une résistance modérée en flexion, ce qui conduit à conclure que
la résistance au cisaillement n’est pas un critère dimensionnant.
Le comportement en traction d’un BFUP est dépendant entre autres de la géométrie de l’élément et
de la méthode de mise en œuvre. La détermination des lois de comportement doit prendre en
compte une éventuelle anisotropie du matériau et la mettre en évidence.
Le dimensionnement à la flexion suivant les différentes méthodes, discontinue ou continue,
montrent une bonne corrélation avec les résultats d’essais. Pour le cisaillement, les modèles des
recommandations AFGC sont sécuritaires mais n’intègrent pas les derniers développements en la
matière. Les modèles proposés par les auteurs vont dans ce sens mais demandent encore à être
validés et simplifiés pour être opérationnels dans un dimensionnement en bureau d’études [20].
118
Comportement au cisaillement des BFUP
Références
[1] TOUTLEMONDE F., RESPLENDINO J. Designing and Building with UHPFRC: State of the
Art and Development, Proceedings of UHPFRC symposium in Marseille (France), November
17-18, 2009, London, 2011, 814 pages.
[2] RESPLENDINO, Jacques. Structures en bétons fibrés ultra performants - BFUP, Journée
technique EFB "Utilisation des bétons de fibres métalliques dans le domaine des structures",
Paris, 2008, pages 69 à 96.
[3] ROSSI, Pierre. Les bétons de fibres métalliques, Paris : Presses de l’Ecole Nationale des Ponts
et Chaussée, 1998.
[4] CASANOVA, Pascal. Bétons renforcés de fibres métalliques du matériau à la structure. Paris
: Presses du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées, 1996.
[5] MOREILLON L., NSEIR J., SUTER R. Poutres précontraintes préfabriquées comportement
au cisaillement, Rapport des essais, Ecole d’ingénieurs et d’architectes de Fribourg, 2011.
[6] SUTER R., MOREILLON L. Bétons à hautes performances renforcés de fibres métalliques,
Rapport de synthèse, Ecole d’ingénieurs et d’architectes de Fribourg, 2009.
[7] MOREILLON L., LE ROY R., SUTER R. Punching shear strength of HPFRC slabs,
Proceedings of 8th fib PhD Symposium, June 20-23, 2010, Lyngby, page 201 à 206.
[8] AFGC-SETRA. Recommandations provisoires, Bétons fibrés à ultra-hautes performances.
Paris, 2002.
[9] JSCE , Recommendations for Design of UHSFRC Structures, Japan Society of Civil
Engineers, 2004.
[10] JSCE , Recommendations for Design and Construction of Ultra High Strength Concrete
Structures, Draft, Japan Society of Civil Engineers, September, 2006.
[11] SPASOJEVIC, Anna. Structural Implications of Ultra-High Performance Fibre-Reinforced
Concrete in Bridge Design, Thèse EPFL N°4051, Lausanne, 2008, 203 pages.
[12] REDAELLI, Dario. Comportement et modélisation des éléments de structures en Béton Fibré
à Ultra-Hautes Performances avec armatures passives, Thèse EPFL N°4298, Lausanne,
2009, 290 pages.
[13] SUTER R., MOREILLON L. Comportement à la flexion et au cisaillement d’éléments poutre
en BFUP, Rapport d’essai, Ecole d’ingénieurs et d’architectes de Fribourg, 2009.
[14] BABY, Florent et al. Shear resistance of ultra-high performance fibre-reinforced concrete I-
beams, Proceedings of FraMCoS-7, May 23-28 2010, Jeju, Korea, pages 1411 à 1427.
[15] FEDERATION INTERNATIONALE DU BETON (fib). Model Code 2010 – First complete
draft. Bulletin 56, Lausanne, 2010.
[16] NSEIR J., MOREILLON L., SUTER R. Flexural and punching shear strength of thin
UHPFRC slabs, Tests report, Ecole d’ingénieurs et d’architectes de Fribourg, 2011.
[17] FEDERATION INTERNATIONALE DU BETON (fib). Shear and punching shear in RC
and FRC elements – Workshop October 15-16, 2010, Salò. Bulletin 57, Lausanne, 2010.
[18] MUTTONI, Aurelio. "Punching Shear Strength of Reinforced Concrete Slabs without
transverse Reinforcement", ACI Structural Journal, 2008, V.105, No 4, pages 440 à 450.
[19] LARRARD (de), François. Structures granulaires et formulations des bétons. Paris : Presses
du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées, 2000.
[20] MOREILLON, Lionel. Shear and punching shear strength of high performance fibre
reinforced concrete structures. Thesis Université Paris-Est SIE, Champs-sur-Marne, 2012. (in
redaction)
119
120