Comportement Au Cisaillement Des BFUP

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Comportement au cisaillement des BFUP

Lionel MOREILLON Robert LE ROY René SUTER


Ph. D. candidate Directeur de thèse Dr. sc.techn. professeur
Université Paris-Est UR Navier Ecole d’ingénieurs et
Ecole d’ingénieurs et Structures Hétérogènes d’architectes de Fribourg
d’architectes de Fribourg ENPC / France

Résumé
Le cisaillement est un mode de rupture souvent déterminant pour assurer la résistance des structures
en béton armé ou précontraint. Pour des éléments ne comportant pas d’armatures transversales, ce
mode de rupture est généralement fragile entraînant l’effondrement de la structure sans signes
avant-coureurs. L’importante ténacité en traction des Bétons Fibrés Ultra-Performants (BFUP)
permet aux éléments d’atteindre des résistances ainsi qu’une capacité de déformation au
cisaillement nettement supérieures. Dans la majorité des cas, la résistance du BFUP seul est
suffisante permettant ainsi de s’affranchir d’une armature transversale.
A travers plusieurs études menées à l’Ecole d’Ingénieurs et d’Architectes de Fribourg
(EIA-FR) et ailleurs, cet article a pour objectifs de montrer le comportement au cisaillement
d’éléments de structure en BFUP d’une part, et présenter des méthodes de dimensionnement d’autre
part.
Mots-clés: Effort tranchant, poinçonnement, efforts concentrés, éléments armés,
éléments précontraints, dalles, poutres.

1. Introduction
Les Bétons Fibrés Ultra-Performants (BFUP) présentent des propriétés, en termes mécanique et de
durabilité, nettement plus élevées que les bétons conventionnels. Ces caractéristiques en font un
matériau adapté à la réalisation d’éléments minces et/ou aux formes complexes en permettant de
s’affranchir d’armatures conventionnelles. Quelques réalisations remarquables mettent en évidence
le potentiel des BFUP dans les domaines des ouvrages d’art et des bâtiments [1] [2].
Dès les premiers développements des bétons de fibres, une réduction voire la suppression totale des
armatures dites secondaires dans les éléments de structure s’est avéré être une application
parfaitement adaptée [3]. La distribution aléatoire des fibres permet, si elles sont en quantité
suffisante, un contrôle efficace de la fissuration. De nombreuses études expérimentales mettent en
évidence la capacité des bétons de fibres à diminuer voir à remplacer totalement les armatures
d’effort tranchant dans les poutres (fig. 1) [4] [5]. Au niveau de la résistance au poinçonnement le
constat est similaire [6] [7]. Les caractéristiques importantes en traction des BFUP permettent de
répondre pleinement à ce rôle.
a)

b)

Figure 1 : Aspect de la fissuration à la rupture de poutres précontraintes par pré-tension sans


armatures transversales, a) BHP sans fibres b) BFHP 60 kg/m3 [5].

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2. Des bétons de fibres aux bétons fibrés ultra-performants


Développés dans les années 1960, les bétons de fibres ont connu un développement important et
connaissent de plus en plus d’applications concrètes [3]. Un béton de fibres est composé d’une
matrice cimentaire et de fibres distribuées aléatoirement dans la masse. Les fibres sont incorporées
durant le malaxage du béton. La nature des fibres peut être métallique, synthétique ou naturelle.
Les fibres métalliques sont utilisées pour des applications structurelles alors que les fibres
synthétiques sont principalement destinées au contrôle de la fissuration au jeune âge et à
l’amélioration du comportement au feu. Dans la suite de cet article, nous parlerons uniquement de
fibres métalliques.
Dans ce paragraphe, les exemples d’applications et les chiffres sont donnés à titre indicatifs et
permettent une certaine classification. Les bétons de fibres (BF) de résistances ordinaires, destinés
par exemple à un dallage industriel, contiennent environ 30 à 50 kg/m3 de fibres métalliques de
longueur 50 à 100 mm avec une forme travaillée (crochets, ondulées etc.) afin d’assurer leur
ancrage. La composition et la résistance de la matrice cimentaire est identique à un béton
conventionnel. La résistance en traction post-fissuration des BF est modeste mais néanmoins
suffisante pour ce type d’application. Les bétons fibrés à hautes performances (BFHP), sont
principalement destinés à la préfabrication d’éléments de structure ou d’éléments spéciaux
fortement sollicités. Ils contiennent 40 à 100 kg/m3 de fibres en acier à haute résistance, lisses ou
avec ancrages et de longueur 20 à 60 mm. Les BFHP ont une matrice cimentaire optimisée et des
caractéristiques similaires aux bétons à haute résistance (BHR). La résistance en compression de ces
bétons est comprise entre 70 et 120 MPa. Le comportement en traction des BFHP est intéressant et
permet la réduction voire la suppression totale des armatures secondaires (contrôle de la fissuration,
cisaillement,…) [5] [6].
Par rapport aux BF et BFHP, les bétons fibrés ultra-performants (BFUP) présentent une
homogénéité et une compacité nettement plus élevée. Ceci se traduit par une résistance en
compression supérieure à 120 MPa ainsi qu’une faible perméabilité aux agents extérieurs [19].
Ces propriétés sont atteintes, en abaissant le rapport eau/liant à une valeur inférieure ou égale à 0,2,
valeur rendu possible par l’emploi de superplastfiants de dernière génération. La granulométrie des
BFUP ne comporte pas de granulats grossiers (dg ≤ 8 mm). Les granulats sont sélectionnés et
proviennent de roches mères de grande dureté et de fortes résistances. La quantité de liant est
souvent supérieure à 1000 kg/m3 et se compose de ciment et d’additions pouzzolaniques telles que
les fumées de silice. Ces additions ultrafines jouent un rôle important à l’état frais (effet filler) et ont
un coefficient d’activité supérieur à 2 (contribution à la résistance par rapport au ciment dont
l’activité est prise à 1).
Outre leur résistance en compression très élevée, les caractéristiques mécaniques principales des
BFUP sont une résistance en traction et une ténacité élevées. Les propriétés en traction sont
obtenues par l’ajout de fibres droites (5 à 30 mm) en grande quantité, de 160 à 800 kg/m3
(Vf = 2 à 10%). Les propriétés et la durabilité élevées permettent aux BFUP d’assurer
simultanément une fonction structurelle et de protection. Cependant, le coût élevé du matériau ne le
destine pas à des éléments massiques. Par conséquent, la conception d’un élément de structure en
BFUP est sensiblement différente d’un élément en béton armé conventionnel.
0 60 120 fc [MPa]

0,40 0,20 E/L [-]


Bétons ordinaires Bétons à hautes performances Bétons à poudres réactives
Bétons à fibres Bétons fibrés à hautes performances Bétons fibrés ultra-performants

Figure 2 : Classification des différents bétons en fonction de la résistance en compression fc et du


rapport eau sur liant E/L.
A l’heure actuelle, il n’existe pas en Suisse de recommandations ou de normes sur les BFUP.
Cependant, les recommandations BFUP de l’Association Française de Génie Civil AFGC-SETRA
[8] et de la Société Japonaise de Génie Civil JSCE [9] [10] offrent une excellente base aux
concepteurs.

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Comportement au cisaillement des BFUP

3. Du matériau à la structure
Pour permettre le dimensionnement d’une structure, un ensemble de caractéristiques du matériau
doivent être préalablement déterminé par des essais ou fourni par le producteur.
Pour un pré-dimensionnement, les caractéristiques courantes des BFUP sont les suivantes :
- Densité  : 2400 – 2800 kg/m3
- Résistance en compression fc : 130 – 250 MPa
- Résistance en traction de la matrice fct : 7 – 10 MPa
- Module d’élasticité Ec : 45 – 65 GPa
- Coefficient de Poisson  : ~ 0.2
- Coefficient de dilatation thermique L : 10 - 12 m/m/°C
- Retrait total sans traitement thermique : ~ 600 m/m

Le comportement en compression des BFUP est linéaire environ jusqu’à la valeur maximale.
A contrario, des bétons à haute résistance qui sont fragiles, les BFUP ont un comportement post-pic
ductile dû à l’importante quantité de fibres (fig. 3). Au niveau du dimensionnement aux états limites
ultimes (ELU), la partie post-pic est négligée. Aux états limites de service (ELS), le comportement
peut être considéré linéaire.
 [MPa]

fck

0.85fck

Ecm

0.85fck/Ecm 3.0
 [‰]
Figure 3 : Loi de comportement en compression à l’ELU du BFUP selon [8] et comparaison à la
rupture de cylindres sans (à gauche) et avec fibres (à droite).

Le comportement en traction d’un béton fibré est dépendant de la formulation ainsi que de la
méthode de mise en œuvre. Au niveau de la formulation, la réponse en traction est principalement
dépendante de la quantité de fibres, la résistance de la matrice cimentaire, le rapport
longueur/diamètre de la fibre lf/f et la forme de la fibre [3]. Les bétons de fibres n’ont cependant
pas un comportement isotrope. Ils sont sujets à des orientations préférentielles des fibres dues aux
parois des coffrages et aux méthodes de coulage. Les BFUP sont généralement auto-plaçants. Dans
ce type de bétons, les fibres s’orientent parallèlement au sens des flux d’écoulement. Les éléments
en BFUP étant souvent minces, les effets de parois sont importants. Ces différents effets peuvent
être favorables ou défavorables suivant les cas en fonction de l’orientation des sollicitations dans
l’ouvrage. Ces facteurs sont à considérer avec attention lors du dimensionnement de structures en
BFUP, en particulier pour des éléments sans armatures passives.

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Comportement au cisaillement des BFUP

Des BFUP avec Vf > 2% présentent généralement un comportement durcissant en traction directe,
c'est-à-dire que la résistance post-fissuration apportée par les fibres est plus élevée que la résistance
de la matrice cimentaire ce qui implique une multi-fissuration. Cette phase appelée pseudo plastique
peut directement être exprimée en relation ). A partir d’un allongement limite u, les
déformations se localisent sur une seule macro-fissure, par conséquent la relation devient w).
D’autres BFUP moins dosés en fibres, (1% < Vf < 2%), sont adoucissants. La résistance post-
fissuration apportée par les fibres est équivalente voire moins élevée que la résistance de la matrice
cimentaire ce qui implique une courte phase pseudo plastique ou directement une localisation sur
une seule macro-fissure (fig. 4). Cependant, il est intéressant de noter que des éléments de structure
réalisés avec un matériau de type adoucissant peuvent présenter un comportement durcissant en
flexion.

Figure 4 : Représentation schématique d’un comportement durcissant et adoucissant.

Les propriétés mécaniques (loi de comportement) sont déterminées par un ensemble d’essais
spécifiques. Le comportement est identifié soit par des essais de traction directe ou de flexion sur
des prismes. Si des essais de flexion sont choisis, les dimensions des prismes de caractérisation
seront déterminées en fonction de critère d’élancement de la structure et de la longueur des fibres.
Pour des éléments épais (poutres), des essais de flexion sur des prismes entaillés seront privilégiés.
Alors que pour des éléments minces, des essais de flexion sur des prismes d’épaisseur identique à
celles de ces éléments seront favorisés. Les essais de flexion, bien que plus aisés à réaliser, doivent
être traités mathématiquement afin de s’affranchir de l’effet de structure [7].
Depuis 2007, l’EIA-FR mène un important projet de recherche sur les BFUP en partenariat avec
Sigma béton (Vicat), Creabeton Matériaux et le bureau d’ingénieurs Mantegani & Wysseier.
Ce projet de recherche vise à analyser le comportement d’éléments de structure en BFUP avec et
sans armatures et à établir des modèles de calcul. Plusieurs études expérimentales sur des éléments
structuraux, poutres et dalles, ont été entreprises dans ce but. Les éléments d’essai ont été réalisé
avec du Béton Composite Vicat BCV®. Le BCV est développé par Vicat et appartient à la famille
des BFUP. Le dosage en fibres est adapté en fonction des caractéristiques en traction recherchées.
Ce béton a déjà fait l’objet de réalisation remarquable tel que le pont de la Chabotte sur l’autoroute
A51 en France (fig. 5).

Figure 5 : Pont de la Chabotte sur l’autoroute A51 France, portée 47.4 m.

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Dans le cadre des différentes études expérimentales, le BCV a été utilisé avec différents taux et
types de fibres. Les quatre compositions suivantes avec leurs dénominations respectives ont été
analysées :
- BCV 0 sans fibres
- BCV 1%A fibres métalliques courtes, dosage Vf = 1% (79 kg/m3)
- BCV 1%B fibres métalliques courtes et longues, dosage Vf = 1% (79 kg/m3)
- BCV 2% fibres métalliques courtes et longues Vf = 2% (158 kg/m3)
- BCV 3% fibres métalliques courtes et longues Vf = 3% (237 kg/m3)
Le BCV a une résistance moyenne en compression sur cylindre fcm28 de 130 MPa et fcm90 de
150 MPa sans traitement thermique. Le module d’élasticité moyen Ecm est de 45 GPa.
Le comportement en traction est dépendant du dosage en fibres. Des essais de caractérisation ont été
menés à l’EIA-FR sur des prismes entaillés 100 x 100 x 400 mm ainsi que des plaques 200 x 700
mm d’épaisseurs 30 à 80 mm (fig. 6/7). Dans les figures présentées ci-dessous, la contrainte
équivalente de flexion eq correspond à une distribution élastique.
6M
 eq  (1)
b  h2
eq [MPa] BCV-1%B eq [MPa] BCV-2%
40 40

35 35

30 30

25 25

20 20

15 15

10 10

5 5

0 0
0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0 0.0 0.5 1.0 1.5 2.0 2.5 3.0
Crack Mouth Opening Displacement [mm] Crack Mouth Opening Displacement [mm]

Figure 6: Résultats d’essais de flexion 3-points sur des prismes entaillés 100 x 100 x 400 mm.
eq [MPa] BCV-1%A eq [MPa] BCV-2%
35 35

30 30

25 25

20 20

15 15

10 10

5 5

0 0
0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10

Deflection  [mm] Deflection  [mm]

Figure 7: Résultats d’essais de flexion 3-points sur des plaques 40 x 200 x 700 mm.

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Comportement au cisaillement des BFUP

Les lois de comportement post-fissuration en traction ont été identifiées sur la base des essais de
flexion 3-points sur prismes entaillés à l’aide d’une méthode inverse [8]. Dans la suite de l’article,
les calculs d’éléments en BCV ont été effectués avec les lois de comportement suivantes (fig. 8).
 [MPa]
10
9 BCV-1%
8 BCV-2%
7
6
5
4
3
2
Ecm
1 45 [GPa]
0
0 0.1 0.2 0 1 2 3 4 5 6
 [mm] w [mm]

Figure 8: Loi de comportement identifiée pour des éléments épais.

Les plaques minces sont particulièrement influencées par l’orientation préférentielle des fibres due à
la méthode de coulage et aux effets de parois. Par conséquent, les essais de caractérisation doivent
mettre en évidence cette éventuelle anisotropie. Les recommandations de l’AFGC-SETRA [8]
préconisent pour les éléments minces une loi de comportement en traction bilinéaire exprimée en
relation . Cette relation est identifiée pour chaque épaisseur à l’aide d’une méthode inverse.
Dans le but de simplifier le calcul d’élément minces et sur la base de la thèse de Spasojević [11] et
Readelli [12], les auteurs de la présente étude proposent d’adopter une loi simplifiée en considérant
un comportement en traction élastique – parfaitement plastique jusqu’à un allongement limite u. Le
moment résistant est déterminé en fixant le pivot de la fibre tendue égal à u. Pour les BFUP
analysés et les épaisseurs considérées, le modèle simplifié montre une corrélation satisfaisante (fig.
9).
mR [kNm/m] BCV_1%A mR [kNm/m] BCV_2%
90 120
ft = 5,5 MPa ft = 8,5 MPa
80 Ec = 45 GPa Ec = 45 GPa
u = 2.0 ‰ 100 u = 2.5 ‰
70

60 80

50
60
40

30 40

20
20
10

0 0
0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200 0 20 40 60 80 100 120 140 160 180 200
Depth h [mm] Depth h [mm]

Figure 9: moment résistant en fonction de l’épaisseur des corps d’épreuve et comparaison avec
les points expérimentaux.

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Comportement au cisaillement des BFUP

4. Comportement à l’effort tranchant

4.1. Essais de flexion EIA-FR [13]

Dans le but d’analyser le comportement en flexion et à l’effort tranchant de poutres en BFUP avec
et sans armatures passives, l’EIA-FR a effectué une série d’essais composée d’une vingtaine
d’éléments. Les paramètres principaux étaient : la quantité, le type de fibres et le taux d’armature.
Les poutres ont une section de 150 x 100 mm, pour une longueur de 1700 mm et 1500 mm suivant
la présence ou non d’armatures longitudinales. Les éléments avec armatures sont composés de deux
barres de haute adhérence 10 mm ou 16 mm avec une hauteur effective d de 120 mm, le taux
d’armature  est respectivement de 1,31% et 3,35%. Pour tous les éléments d’essai, le BFUP a été
coulé dans les coffrages avec un mouvement de va-et-vient longitudinal afin d’éviter un écoulement
diminuant les risques d’anisotropie. Les poutres ont été testées en flexion circulaire sur une portée
de 1350 mm (fig. 10), 11, 12 et tab. 1, 2, 3). La mise en charge a été effectuée par paliers avec des
cycles de chargement – déchargement jusqu’à la rupture.

Figure 10 : Sections et configuration des essais de flexion sur poutres.


Shear force V [kN]
25
BCV-1%B_P_0

BCV-1%A_P_0
20
BCV-2%_P_0a

BCV-2%_P_0b

15

10

0
0 5 10 15 20 25 30
Deflection at centre  [mm]

Figure 11: Courbes effort tranchant V – flèche au centre des poutres sans armatures

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Comportement au cisaillement des BFUP

Spécimen Vtest [kN] Vflex [kN] VAFGC [kN] Mode de rupture


modèle discontinu

BCV-1%A_P_0 13.7 66
12.9
BCV-1%B_P_0 10.3 (Vf only)
flexion
BCV-2%_P_0a 19.3 102
17.5
BCV-2%_P_0b 18.5 (Vf only)

Tableau 1 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres sans armatures

Les quatre poutres sans armatures passives ont une rupture en flexion à des résistances différentes
suivant la quantité et le type de fibres. Au niveau de la fissuration, les éléments ne présentent
aucune fissure d’effort tranchant. Les éléments sans armatures passives ont une résistance en
flexion modérée, par conséquent la résistance au cisaillement n’est pas déterminante dans le cas
étudié.
Shear force V [kN]
40

35

30

25

20

15
BN_P_1.31

BCV-0_P_1.31
10
BCV-1%B_P_1.31

BCV-2%_P_1.31a
5
BCV-3%_P_1.31

0
0 5 10 15 20 25 30 35 40
Deflection at centre  [mm]

Figure 12: Courbes effort tranchant V – flèche des poutres avec armatures 2 10 mm.

Spécimen Vtest [kN] Vflex [kN] VAFGC [kN] Mode de rupture


modèle continu
BN_P_1.31 16.6 19.2 19.9 Effort tranchant
BCV-0_P_1.31 20.5 20.6 35.9 Effort tranchant
BCV-1%A_P_1.31 34.4 Flexion
32.1 110
BCV-1%B_P_1.31 32.2 Flexion
BCV-2%_P_1.31 40.5 37.6 151 Flexion

Tableau 2 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres avec 2 10 mm.

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Comportement au cisaillement des BFUP

Shear force V [kN]


70

60

50

40

30

20 BN_P_3.35
BCV-0_P_3.35
BCV-1%B_P_3.35
10
BCV-2%_P_3.35
BCV-3%_P_3.35
0
0 5 10 15 20 25 30 35 40
Deflection at centre  [mm]

Figure 13: Courbes effort tranchant V – flèche des poutres avec armatures 2 16 mm.

Spécimen Vtest [kN] Vflex [kN] VAFGC [kN] Mode de rupture


modèle continu
BN_P_3.35 23.1 38.6 19.9 Effort tranchant
BCV-0_P_3.35 28.7 49.8 35.9 Effort tranchant
BCV-1%B_P_3.35 61.9 59.2 110 Flexion -cisaillement
BCV-2%_P_3.35 62.9 63.8 151 Flexion

Tableau 3 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres avec 2 16 mm.
Les poutres en béton conventionnel (BN) et en BCV sans fibres (BCV-0) présentent des ruptures à
l’effort tranchant sans avoir atteint la limite élastique des barres d’armature.
La rupture de ces éléments est apparue de manière soudaine. Tous les éléments avec fibres ont
atteint la limite élastique de l’acier de l’armature. Pour de forts taux d’armature ou de faibles
dosages en fibres le réseau de fissures d’effort tranchant est bien marqué. Aucun des éléments avec
fibres n’a présenté de rupture par effort tranchant soudaine. Cependant, la capacité de déformation
peut être limitée par une rupture à l’effort tranchant après l’écoulement des aciers d’armature, (cas
de la poutre BCV-1%B_P_3.35).

4.2. Essais de flexion IFFSTAR (LCPC) [14]

Afin d’analyser si les contributions des étriers et des fibres peuvent être additionnées à la résistance
ultime à l’effort tranchant, une étude expérimentale sur 11 poutres a été entreprise à l’IFSTTAR (ex
Laboratoire Central des Ponts et Chaussées LCPC) [14] (fig. 14, tab. 4 et 5). Les paramètres
principaux étaient le type d’armature longitudinale (passive ou active), la formulation du BFUP et
la présence ou non d’armatures transversales. Les poutres ont une section en I de 380 mm de
hauteur pour une longueur de 3000 mm. La série d’essais est divisée en deux parties.
Dans la première partie (PC), les poutres sont précontraintes par 6 torons T15S avec une hauteur
effective d de 305 mm et une force initiale de mise en tension de 1'020 kN au total. Dans la seconde
partie (RC), les poutres sont armées par 5 20 et 1 25 mm avec une hauteur effective d de 305
mm. Les poutres ont été testées sur une portée de 2000 mm avec deux points de charges situées
symétriquement à 760 mm des appuis. L’armature transversale est composée d’étriers (un seul brin)
6 espacé de75 mm [11].

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Comportement au cisaillement des BFUP

Figure 14 : Sections transversales des poutres et configuration d’essai.

Spécimen Vtest [kN] Vflex [kN] VAFGC [kN] Mode de rupture


avec précontrainte modèle continu
A_PC_NS (1) 442
325
A_PC_NS (2) 441
(u = 33.8°)
B_PC_NS 516 706 Effort tranchant
A_PC_WS 558 394
B_PC_WS 638 (u = 35.6°)

Tableau 4 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres précontraintes.


NS = sans étriers, WS = avec étriers

Spécimen Vtest [kN] Vflex [kN] VAFGC [kN] Mode de rupture


avec armature modèle continu
A_RC_NS 462
235 Effort tranchant
B_RC_NS 455
529
A_RC_WS 545
297 Flexion
B_RC_WS 521
A_RC_NS-NF 184
436 54 Effort tranchant
B_RC_NS-OF 254

Tableau 5 : Récapitulatif des résultats et valeurs calculées des poutres avec armatures.
NS = sans étriers, WS = avec étriers, NF = sans fibres, OF = fibres organiques
Les calculs des résistances flexionnelles Vflex et au cisaillement selon [8] VAFGC ont été effectué en
adoptant une contrainte résiduelle de traction de 10 MPa pour les bétons A et B. Hormis les deux
poutres BFUP avec armatures passives et étriers (A_RC-WS et B_RC-WS), tous les éléments ont
subi une rupture par cisaillement. Par rapport aux poutres avec armatures passives et sans fibres, les
éléments en BFUP présentent des ruptures à des niveaux de charge nettement plus élevés et une
ductilité plus grande. Les éléments fibrés présentent un réseau de fissures diagonales bien réparti.
La différence de résistance des poutres précontraintes avec et sans étriers est de 117 et 122 kN
respectivement pour les mélanges A et B. Cette différence correspond à la contribution des étriers
démontrant ainsi le principe de superposition. Ces études mettent clairement en évidence la capacité
des BFUP à reprendre des efforts de cisaillement importants.

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Comportement au cisaillement des BFUP

4.3. Calculs en section fissurée

Pour des éléments épais (poutres), plusieurs approches de calculs sont possibles pour déterminer la
résistance flexionnelle de la section. Le principe général reste d’établir l’équilibre des efforts et des
moments. Les particularités par rapport au béton armé conventionnel proviennent de la prise en
compte du béton tendu et du fait que la loi de comportement du béton en traction est exprimée en
relation (w). La première approche proposée, dénommée approche discontinue, permet de décrire
l’évolution de la section fissurée en fonction de la courbure. La section est modélisée par deux
couches avec une partie fissurée et non-fissurée. La zone non-fissurée suit la théorie des poutres,
alors que la section fissurée est constituée de deux blocs rigides reliés par les fibres et
éventuellement des armatures [4].

Figure 15 : Modèle mécanique et paramètres de l’approche discontinue.

L’équilibre de la section implique l’égalité des efforts normaux internes avec l’effort normal
externes ainsi que l’égalité des moments internes avec le moment extérieur appliqué.
N int  N ext (2)
M int  M ext (3)
Cependant, ces deux équations ne sont pas suffisantes pour résoudre le système.
Une troisième équation permet de relier la courbure de la partie non-fissurée à l’ouverture de la
fissure [4].
 2  1   2  2
w0  2   m  a 2  2   a (4)
 3 
Avec 1 représentant la courbure élastique de la section ;
12  M
1  (5)
Ec  h 3

Et 2 étant la courbure de la section fissurée ;


c
2  (6)
x1

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Comportement au cisaillement des BFUP

La distribution de l’ouverture de la fissure sur la hauteur fissurée est considérée linéaire.


En connaissant la loi de comportement en traction (w), la distribution des contraintes peut être
définie sur la hauteur de la section fissurée.
w0
 (7)
a
En présence d’armatures, l’allongement de l’acier est défini par le prolongement du plan de
déformation de la partie non-fissurée au droit des barres. L’allongement s se définit de la manière
suivante :
 s   d  x1    2 (8)
En posant une valeur de w0, il est alors possible de résoudre le système d’équations au moyen d’une
feuille de calculs. Le moment résistant peut être déterminé en faisant varier w0 afin d’atteindre le
maximum.
La seconde approche, dénommée approche continue, consiste à transformer la loi de comportement
en traction (w) en relation () en introduisant une longueur caractéristique lc. Cette méthode
s’apparente au calcul du béton armé classique [8].

Figure 16 : Modèle mécanique et paramètres de l’approche continue.

Si la loi de comportement est exprimée en relation (w), la relation suivante permet de la


transformer en relation ().
f ct w
  (9)
E c lc
Pour des sections rectangulaires ou en T, la longueur caractéristique lc est définie de la manière
suivante selon [8] :
2h
lc  (10)
3
Le moment résistant de la section peut ensuite être déterminé en faisant varier la courbure  afin
d’atteindre le moment maximum.

110
Comportement au cisaillement des BFUP

4.4. Calculs de la résistance à l’effort tranchant


4.4.1. Vérification selon les recommandations de l’AFGC-SETRA
Selon les recommandations provisoires BFUP [8], la résistance au cisaillement Vu correspond à la
somme des contributions du béton Vc, des armatures transversales Vw et des fibres Vf. Ce modèle est
dérivé des normes françaises BAEL et BPEL et du modèle pour les bétons de fibres développé par
Casanova et Rossi [4]

Vu  Vc  V f  Vw (11)

La contribution du béton Vc à la résistance au cisaillement est définie de la manière suivante :


0.21
Vc  k  f ck  bw  d pour des éléments avec armatures passives (12)
c
0.24
Vc   f ck  bw  d pour des éléments précontraints (13)
c
Où le terme k considère l’effet d’un effort axial dans le cas d’un élément soumis à de la flexion
composée, k > 1 pour de la compression et k < 1 pour de la traction, bw est la largeur de la section, c
le coefficient de sécurité sur la résistance du béton (c = 1,5 en général), fck la résistance
caractéristiques en compression.
La contribution des armatures transversales Vw est définie de la manière suivante :
Asw f sk  sin   u  
Vw  z    (14)
s s sin  u 
Où l’angle u correspond à l’inclinaison des bielles et l’angle  à l’inclinaison des armatures
transversale, tous les deux considérant par rapport à l’axe horizontal.

Figure 17 : Paramètres du modèle proposé dans [4].


La contribution du BFUP en traction se base sur le modèle développé pour les bétons de fibres dans
[4]. La contribution des fibres correspond à l’effort transféré à travers une fissure diagonale pour
une certaine ouverture w, où (w) est la loi de comportement en traction du béton de fibres. Pour
une section rectangulaire ou en T, la surface d’action des fibres est estimée par S=0,9 d bw ou S=z
bw. L’ouverture de la fissure w est directement reliée à l’allongement des armatures longitudinales s
au moyen de la relation suivante w=0.9 d εs.
p 1
Vf    bw  z (15)
 f tan  u 

111
Comportement au cisaillement des BFUP

Avec p correspondant à la contrainte moyenne transférée à travers la fissure diagonale.


w
1 1 u
K wu 0
p     ( w)  dw (16)

L’angle d’inclinaison des bielles u est considéré à 45° pour des éléments avec armatures passives.
Pour des éléments précontraints l’angle des bielles u est défini par itération avec tan(2u)=2u/c.
K est un facteur d’orientation des fibres et γf est le facteur partiel de sécurité pour le BFUP en
traction (f = 1,3 en général). L’ouverture de la fissure est limitée aux valeurs suivantes :
wu  max  2 3  h   u , 0.3  avec u ≤ 3‰ (17)
A noter que pour des éléments précontraints, un critère de non fissuration au cisaillement à l’ELS
doit être vérifié.
4.4.2. Proposition
Bien que sécuritaire dans les cas étudiés, le calcul de la résistance au cisaillement selon les
recommandations AFGC ne se basent pas sur les derniers développements en la matière.
Selon le Model Code 2010 [15] la résistance au cisaillement est la somme des contributions du
béton VR,c et des armatures transversales VR,s. Le modèle proposé, basé sur le troisième niveau
d’approximation (3th LoA), fait intervenir en plus la contribution des fibres VR,f.
La résistance de la matrice est directement fondée sur les équations de la théorie des champs de
compression modifiée (MCFT) [17] et se définit de la manière suivante :
VR ,c  kv  b0  z  fc

0.4 1300
kv   si w = 0 (18)
1  1500   x 1000  0.7  z  48
16  d g

0.4
kv  si  w  0.08  fc f y (19)
1  1500   x
  29  7000   x (20)
Où ܾ0 est la largeur participante, z le bras de levier de forces internes z = 0.9d, x est l’allongement
longitudinale à mi-hauteur dans la section de contrôle et dg représente le diamètre des plus gros
granulats, dans le cas des BFUP dg = 0. Pour les BFUP, les auteurs proposent d’utiliser l’équation
(19) définissant kv. L’ouverture de la fissure wx est le produit de l’allongement x et de l’espacement
des fissures s. Dans les cas étudiés, sx a été considéré égal à h/2.
wx   x  sx (21)
La contribution des fibres VR,f correspond à la composante verticale de l’intégrale des contraintes de
traction sur le plan de rupture Ap. Le plan de rupture est estimé par Ap = z bw/sin(). La distribution
de l’ouverture de fissure est considérée linéaire le long du plan de rupture. En connaissant la loi de
comportement (w), la distribution des contraintes de traction est définie le long du plan de rupture.
Afin de ne pas considérer deux fois la résistance de la matrice en traction, le comportement
adoucissant de la matrice est soustrait à la loi de comportement en traction.
VR , f    f  w   dAp (22)
Ap

112
Comportement au cisaillement des BFUP

V  MPa  Beams BCV


b0  d  f c  
1.2
BN
VR,c + VR,f 2% BCV-0
1 BCV-1%B
BCV-2%
VR,f 2%
0.8

VR,c + VR,f 1%
0.6

0.4 VR,f 1%
VR,c éq.(18) dg = 16
0.2 VR,c éq.(18) dg = 0
VR,c éq.(19)
0
0 0.5 1 1.5 2
x [‰]

Figure 18 : Les courbes représentent les prévisions du modèle tenant compte des contributions des
fibres et de la matrice.
Les critères de rupture au cisaillement pour les éléments sans fibres en béton conventionnel BN et
BCV-0 montrent une bonne corrélation avec les résultats expérimentaux. Pour les éléments avec
fibres, les critères de rupture au cisaillement ne peuvent être vérifiés compte tenu d’un mode de
rupture flexionnel. Cependant, ce modèle montre une bonne corrélation avec des résultats
expérimentaux sur des poutres en béton de fibres (fig. 18).

5. Comportement au poinçonnement

5.1. Essais de poinçonnement EIA-FR


Dans le but d’analyser le comportement des dalles en BFUP avec et sans armatures passives, l’EIA-
FR a entrepris une vaste campagne expérimentale sur des plaques minces. L’étude expérimentale
est composée d’une vingtaine de dalles carrées 960 x 960 x h mm dans le but d’analyser le
comportement à la flexion et au poinçonnement. Les dalles ont été réalisées en usine par Creabeton
Matériaux SA. Les paramètres principaux de cette études étaient : l’épaisseur, le taux d’armature et
la quantité de fibres. En outre, une série de dalles, dénommée BCV-2%_h_0, a été réalisée avec 2%
de fibres et sans armatures passives [16].

Épaisseur Armatures Volume de fibres Hauteur effective


Dénomination
h [mm]  [%] / [mm] Vf [%] d [mm]
1.315 #100 
BCV-x_30_ 30 
2.577 #100 
0.985 #100 
BCV-x_40_ 40 
1.927 #100 
0.967 #100 
BCV-x_60_ 60 
1.9610 #100 
1.069 #100 
BCV-x_80_ 80 
1.8812 #100 
Tableau 6 : Caractéristiques des éléments d’essai avec armatures passives
Les essais de charges ont été réalisés à l’EIA-FR sur un banc d’essai spécialement conçu pour cette
étude. Les dalles sont chargées au centre par un vérin surmonté d’un poinçon de diamètre 80 mm et
retenues par 8 points d’appuis placés sur un cercle de diamètre 878 mm. Les points d’appuis sont

113
Comportement au cisaillement des BFUP

pourvus de rotules axiales laissant libres la rotation (fig. 19). Le chargement a été effectué par
paliers jusqu’à la rupture.

Figure 19: Configuration et points de mesures des essais de poinçonnement.


Load V [kN] BCV_1%A Load V [kN] BCV_2%
280 280
260 BCV_1%A_30_1.31 260 BCV_2%_30_0
240 BCV_1%A_40_0.98 240 BCV_2%_40_0
220 BCV_1%A_60_0.96 220 BCV_2%_60_0
BCV_1%A_80_1.06 BCV_2%_80_0
200 200
BCV_1%A_30_0 BCV_2%_30_2.37
180 180
BCV_1%A_40_1.92 BCV_2%_40_1.92
160 160
BCV_1%A_60_1.96 BCV_2%_60_1.96
140 140
BCV_1%A_80_1.31 BCV_2%_80_1.88
120 120
100 100
80 80
60 60
40 40
20 20
0 0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70
Deflection at centre  [mm] Deflection at centre  [mm]

Figure 20: Courbes effort appliqué V – flèche au centre des dalles 960 x 960 x h mm représentées
par rapport au dosage en fibres.
Pour des dalles en béton armé conventionnel sans armatures transversales, il a été montré que la
résistance au poinçonnement est inversement proportionnelle à la capacité de déformation [18].
Autrement dit, pour des dalles présentant les même caractéristiques (béton, épaisseur, système
statique), plus le taux d’armature augmente plus la résistance au poinçonnement augmente. Par
contre la capacité de déformation diminue. En observant les résultats le constat est similaire pour les
dalles en BFUP.
Les dalles sans armatures passives ont manifesté une rupture en flexion avec un développement
marqué de lignes de rupture. La distribution des lignes de rupture est toutefois aléatoire par rapport
au mécanisme envisagé (fig. 21). Après découpe et analyse de la fissuration interne, aucun cône de
poinçonnement marqué n’est visible. Le même constat que pour les poutres a été observé : la
résistance d’éléments sans armatures passives en flexion est modérée, par conséquent le
poinçonnement n’est pas déterminant dans le cas étudié.

114
Comportement au cisaillement des BFUP

V [kN] BCV_2%
200
ft = 8,5 MPa
180 Ec = 45 GPa
u = 2.5 ‰
160
Vpl = 6.623 mR
140

120

100

80

60

40

20

0
0 20 40 60 80 100
Depth h [mm]

Figure 21: Résistance plastique Vpl selon le mécanisme envisagé et points expérimentaux.
Load V [kN] h = 30 mm Load V [kN] h = 40 mm
45 55
BCV_1%A_30_0 BCV_1%A_40_0.98
40 50
BCV_1%A_30_1.31 BCV_1%A_40_1.92
BCV_2%_30_0 45 BCV_2%_40_0
35
BCV_2%_30_2.37 BCV_2%_40_1.92
40
30
35

25 30

20 25

20
15
15
10
10
5
5

0 0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70 0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 55 60 65 70
Deflection at centre  [mm] Deflection at centre  [mm]

Load V [kN] h = 60 mm Load V [kN] h = 80 mm


140 280
BCV_1%A_60_0.96 260 BCV_1%A_80_1.06
120 BCV_1%A_60_1.96 240 BCV_1%A_80_1.31
BCV_2%_60_0 BCV_2%_80_0
220
BCV_2%_60_1.96 BCV_2%_80_1.88
100 200
180
80 160
140
60 120
100
40 80
60
20 40
20
0 0
0 5 10 15 20 25 30 35 40 45 50 0 5 10 15 20 25 30 35
Deflection at centre  [mm] Deflection at centre  [mm]

Figure 22: Courbes effort appliqué V – flèche au centre des dalles 960 x 960 x h mm représentées
par rapport à l’épaisseur.

115
Comportement au cisaillement des BFUP

Les dalles avec treillis d’armatures ont toutes atteintes la limite élastique des aciers d’armature
suivie d’un court palier et d’une rupture par poinçonnement. La chute de résistance est plus ou
moins brutale selon l’épaisseur de la dalle. Compte tenu de la disposition des treillis d’armature,
nous distinguons deux types de mécanismes de ruine. Dans le premier type, le cône de
poinçonnement intercepte les armatures, la résistance est élevée. Dans le second type, le cône de
poinçonnement n’intercepte pas les barres, le cône de poinçonnement est concentré, la résistance est
plus faible.
Les dalles BCV-2%_40_1.92 et BCV-2%_60_1.96 présentent une résistance inférieure aux dalles
BCV-1% respectives. L’analyse de la fissuration tend à mettre en évidence une localisation des
efforts plus importante pour les dalles BCV-2% (fig. 23). Les armatures du centre étant plus
sollicitées, elles atteignent plus rapidement la limite de plastification entraînant une rupture par
poinçonnement. L’analyse des résultats et de la fissuration interne est encore en cours dans le but
d’affirmer ces hypothèses.

a)

b)

Figure 23: Aspect de la fissuration à la rupture, a) dalles sans armatures, b) dalles avec armatures.

116
Comportement au cisaillement des BFUP

Sur la base de la théorie de la fissure critique et d’une proposition pour les bétons de fibres
développées par Muttoni et Fernandez [17], le modèle de résistance au poinçonnement a été adapté
au BFUP. Le modèle fait intervenir les contributions de la matrice VR,c et des fibres VR,f. Le modèle
assume que la résistance au poinçonnement de la matrice est fonction de l’ouverture et de la
rugosité de la fissure de cisaillement. L’ouverture de la fissure critique est assumée être
proportionnelle au produit de la rotation de la dalle  avec la hauteur effective d. Basé sur ces
hypothèses, le critère de rupture est défini de la manière suivante [18]:
VR ,c 34
 (23)
b0  d  f c  d
1  15 
16  d g
Où ܾ0 est le périmètre de contrôle, situé à la distance ݀/2 du bord de la surface d’appuis, dg
représente le diamètre des plus gros granulats, dans le cas des BFUP dg = 0.
La part des fibres correspond à la composante verticale de l’intégrale des contraintes de traction sur
le plan du cône de poinçonnement Ap. La distribution de l’ouverture de fissure est considérée
linéaire le long du plan de rupture. En connaissant la loi de comportement (w), la distribution des
contraintes de traction est définie le long du plan de rupture. Afin de ne pas considérer deux fois la
résistance de la matrice en traction, le comportement adoucissant de la matrice est soustrait à la loi
de comportement en traction.
VR , f    f  w   dAp (24)
Ap

Figure 24: Modèle mécanique de la contribution des fibres dans le plan de rupture.
V  MPa 
b0  d  f c  
1
BCV-0
0.9 VR,c + VR,f 2%
BCV-1%B
0.8 VR,c + VR,f 1% BCV-2%
0.7
0.6
0.5
0.4
flexural failure
0.3
0.2
VR,c
0.1
0
0 0.05 0.1 0.15 0.2 0.25 0.3
 d
dg0  dg

Figure 25: Critère de rupture et résultats expérimentaux de dalles en BFUP avec armatures.

117
Comportement au cisaillement des BFUP

V  MPa  V
h = 60 mm  MPa  h = 80 mm
b0  d  f c   b0  d  f c  
1 1
VR,c +VR,f
0.9 VR,c + VR,f 2% BCV-1%A 0.9
2%
BCV-1%A

0.8 VR,c + VR,f 1% BCV-2% 0.8 VR,c +VR,f BCV-2%


1%
0.7 0.7
VR,f 2% VR,c 2%
0.6 0.6
VR,f 1%
0.5 0.5
0.4 0.4 VR,f 1%

0.3 0.3
0.2 0.2
VR,c
VR,c
0.1 0.1
0 0
0 0.1 0.2 0.3 0 0.1 0.2 0.3
 d  d
[ ] [ ]
dg0  dg dg 0  dg

Figure 26: Critères de rupture et résultats expérimentaux de dalles BFUP h = 60 et 80 mm.


Pour déterminer la charge de poinçonnement, le comportement Force – rotation  doit être calculé
préalablement. La relation V() peut être modélisée par différences finies ou éléments finis [18].
L’intersection de cette courbe avec le critère de rupture correspond à la résistance au
poinçonnement. Si la courbe ne coupe pas le critère, la résistance en flexion est déterminante. Dans
les graphiques de la figure 26, les courbes trait-tillés représentent la contribution des fibres sur
l’épaisseur h alors que les courbes trait-pleins représentent la somme des contributions de la matrice
et des fibres sur la hauteur effective d. Les différents critères montrent une bonne corrélation avec
les résultats expérimentaux et les mécanismes observés. Cependant, le poinçonnement étant un
phénomène local, des disparités dues à une mauvaise orientation des fibres peuvent avoir une
influence non-négligeable.

6. Conclusions
Les études expérimentales menées à l’EIA-FR et ailleurs mettent en évidence une résistance au
cisaillement élevée des éléments en BFUP. La résistance et la ténacité en traction importantes des
BFUP permettent un contrôle efficace de la fissuration au même titre qu’une armature secondaire.
Dans le cas où, la sollicitation de cisaillement est trop élevée pour le BFUP seul, l’élément peut être
armé transversalement. Le principe de superposition de la contribution des fibres et des étiers a été
démontré.
Les études expérimentales mettent aussi en évidence qu’un élément en BFUP ne comportant pas
d’armatures passives ou actives a une résistance modérée en flexion, ce qui conduit à conclure que
la résistance au cisaillement n’est pas un critère dimensionnant.
Le comportement en traction d’un BFUP est dépendant entre autres de la géométrie de l’élément et
de la méthode de mise en œuvre. La détermination des lois de comportement doit prendre en
compte une éventuelle anisotropie du matériau et la mettre en évidence.
Le dimensionnement à la flexion suivant les différentes méthodes, discontinue ou continue,
montrent une bonne corrélation avec les résultats d’essais. Pour le cisaillement, les modèles des
recommandations AFGC sont sécuritaires mais n’intègrent pas les derniers développements en la
matière. Les modèles proposés par les auteurs vont dans ce sens mais demandent encore à être
validés et simplifiés pour être opérationnels dans un dimensionnement en bureau d’études [20].

118
Comportement au cisaillement des BFUP

Références
[1] TOUTLEMONDE F., RESPLENDINO J. Designing and Building with UHPFRC: State of the
Art and Development, Proceedings of UHPFRC symposium in Marseille (France), November
17-18, 2009, London, 2011, 814 pages.
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technique EFB "Utilisation des bétons de fibres métalliques dans le domaine des structures",
Paris, 2008, pages 69 à 96.
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et Chaussée, 1998.
[4] CASANOVA, Pascal. Bétons renforcés de fibres métalliques du matériau à la structure. Paris
: Presses du Laboratoire Central des Ponts et Chaussées, 1996.
[5] MOREILLON L., NSEIR J., SUTER R. Poutres précontraintes préfabriquées comportement
au cisaillement, Rapport des essais, Ecole d’ingénieurs et d’architectes de Fribourg, 2011.
[6] SUTER R., MOREILLON L. Bétons à hautes performances renforcés de fibres métalliques,
Rapport de synthèse, Ecole d’ingénieurs et d’architectes de Fribourg, 2009.
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[10] JSCE , Recommendations for Design and Construction of Ultra High Strength Concrete
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[11] SPASOJEVIC, Anna. Structural Implications of Ultra-High Performance Fibre-Reinforced
Concrete in Bridge Design, Thèse EPFL N°4051, Lausanne, 2008, 203 pages.
[12] REDAELLI, Dario. Comportement et modélisation des éléments de structures en Béton Fibré
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[13] SUTER R., MOREILLON L. Comportement à la flexion et au cisaillement d’éléments poutre
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[14] BABY, Florent et al. Shear resistance of ultra-high performance fibre-reinforced concrete I-
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[15] FEDERATION INTERNATIONALE DU BETON (fib). Model Code 2010 – First complete
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[16] NSEIR J., MOREILLON L., SUTER R. Flexural and punching shear strength of thin
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[17] FEDERATION INTERNATIONALE DU BETON (fib). Shear and punching shear in RC
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[18] MUTTONI, Aurelio. "Punching Shear Strength of Reinforced Concrete Slabs without
transverse Reinforcement", ACI Structural Journal, 2008, V.105, No 4, pages 440 à 450.
[19] LARRARD (de), François. Structures granulaires et formulations des bétons. Paris : Presses
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[20] MOREILLON, Lionel. Shear and punching shear strength of high performance fibre
reinforced concrete structures. Thesis Université Paris-Est SIE, Champs-sur-Marne, 2012. (in
redaction)

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