Syllabus Communication Interculturelle CRIBW
Syllabus Communication Interculturelle CRIBW
Syllabus Communication Interculturelle CRIBW
INTERCULTURELLE
1. Introduction
2. Qu’est-ce que la culture ?
3. La question de l’identité et des appartenances
4. La question des valeurs
5. Le « Choc culturel »
6. Stéréotype et préjugé
7. Vers une démarche interculturelle
8. Conclusion
1. Introduction
La diversité culturelle prend de plus en plus d’importance au quotidien. Vivre ensemble est le
nouvel enjeu de nos sociétés qui sont multiculturelles et le deviendront encore davantage. Nous
croisons tous des personnes d’origines culturelles différentes, qu’elles fassent parties de notre
entourage familial, notre milieu professionnel (clients, utilisateurs, collègues..), nos amis, nos
voisins.
Les relations interculturelles, celles qui nous impliquent en tant que personne face à une autre,
sont parfois difficiles ou truffées d’embûches. Certaines situations et comportements suscitent
des sentiments d’incompréhension, d’inacceptation et même parfois de rejet.
Qu’est-ce qui rend difficile, voire dans certains cas impossible, la rencontre entre cet autre et soi ?
Comment se comprendre, s’accepter, communiquer et fonctionner ensemble plus
harmonieusement ?
La formation proposée va vous permettre de mieux comprendre les freins aux relations
interpersonnelles, d’en prendre conscience pour ainsi mieux gérer certaines situations et
renforcer vos capacités à la communication interculturelle.
2. Qu’est-ce que la culture ?
Pour vous aider à mieux comprendre la culture et pour décoder certains comportements, nous
vous proposons un bon symbole canadien : l’iceberg. Flottant à la surface de la mer, seule une
petite partie de l’iceberg est visible ; la plus grande partie est cachée sous la surface de l’eau.
Ce modèle est utile pour nous aider à comprendre les comportements des gens d’une autre
culture.
La petite partie émergée et donc visible est faite des manifestations extérieures d’une culture
spécifique que nous percevrons à travers nos cinq sens. Pour la majorité des occidentaux, porter
un sari ou le foulard, parler le russe ou l’arabe, écouter de la musique indienne sont des signes
extérieurs des différences culturelles.
La grande partie immergée et donc invisible de l’iceberg comprend les valeurs et modes de
pensée développées par chaque culture au fil du temps. Cela va de la façon dont les gens
appréhendent le temps aux motivations profondes de leur existence. Comme il est impossible
d’observer directement cette partie de la culture, on doit la comprendre à partir des paroles et
attitudes des autres personnes.
La culture n’est pas uniquement inhérente à une origine nationale ou ethnographique, mais aussi
à une classe sociale, à un milieu professionnel, une génération … Dès lors, dans un même pays,
certaines attitudes et normes sociales seront susceptibles d’être différentes selon que l’on soit
issu d’un milieu privilégié ou « populaire », que l’on soit « jeune » ou « vieux », que l’on travaille
dans une entreprise commerciale, une banque, un supermarché, un ministère, une école ou une
ONG…
Par ailleurs, la culture est en constante évolution. Les traditions sont inventées et/ou réinventées
au fil du temps. Des changements interviennent aussi dans une culture quand elle ne correspond
plus aux besoins ou va à l’encontre de la survie du groupe. Les mesures actuelles en faveur de
l’environnement en sont un exemple frappant.
Comment définir sa propre culture ?
Difficile à la définir car elle est d’une part très complexe avec ses multiples composantes, mais
aussi parce que « la culture est l’eau dans laquelle nage l’homme poisson », et le poisson ne voit
pas l’eau dans laquelle il baigne… Le poisson devrait donc se transformer en poisson volant pour
pouvoir voir cette eau.
Appartenances à une nationalité, un groupe linguistique, une religion, une famille, une
entreprise, une profession, un certain milieu social, une province ou un village, un syndicat, un
parti, une association, une communauté, etc.
Nous ne pouvons par réduire l’identité à une seule appartenance même si toutes ces
appartenances n’ont évidemment par la même importance, ou en tout cas pas au même moment.
Et selon aussi l’endroit où l’on se trouve à un moment donné ou le contexte, une telle
appartenance peut prendre le dessus sur une autre, la religion pour les uns ou l’appartenance à
un parti ou à un syndicat pour d’autres. Mais aucune n’est insignifiante et elles sont toutes les
éléments constitutifs de la personnalité.
L’identité n’est pas donnée une fois pour toute, elle se construit et se transforme tout au long de
l’existence.
Les valeurs font partie de la culture « subjective ». Elles ne sont pas visibles immédiatement, mais
bien au contact de la mixité culturelle quotidienne.
Elles façonnent notre « intime conviction » de ce qui est préférable. Ce sont ces valeurs qui sous-
tendent nos opinions, nos croyances, nos attitudes et nos comportements.
Elles se construisent au fur et à mesure de notre socialisation. Parfois, notre échelle de valeurs se
modifie, mais elle maintient toujours une cohérence interne.
Pour comprendre cette culture, il faut peler l’oignon couche par couche. Et quand on a enlevé ces
couches une par une, on arrive au cœur de la culture, là où la source de tous ces signes extérieurs
naît. Ces postulats de base comme noyau dur sont ce qui constituent des vérités admises dans
une culture, des choses considérées comme des évidences que plus personnes ne remet en
question. Ce sont donc des points qui, quand on les touche ou pose des questions que personne
ne se pose plus, provoquent chez la personne une certaine irritation ou incompréhension.
La rencontre entre des cultures différentes peut être source de conflits de valeurs. Certaines
semblent opposées ou incompatibles.
Mais nous avons aussi, en tant qu’êtres humains, certains besoins de base universelle tels que
jouir d’une bonne santé, vivre en paix, en sécurité, avoir droit au respect, etc.
Les différences culturelles et sociales se manifestent essentiellement dans les moyens que chaque
groupe culturel mettra en œuvre pour rechercher et réaliser ces aspirations fondamentales
partagées. Aussi, les valeurs partagées ne sont pas hiérarchisées par tous de la même manière.
5. Le « choc culturel »
« Le choc culturel est une situation conflictuelle qui se produit entre deux individus
culturellement différents placés en interaction dans une situation sociale » (boîte à outil Iteco)
Un tel choc, portant souvent sur des faits en apparence banals, est souvent à l’origine de
mésententes, d’incompréhension de l’autre et de malaise car il touche des zones sensibles, le
système de valeur de la personne et son cadre de références.
Le cadre de références est constitué notamment des valeurs, croyances auxquelles on est attaché
ou au contraire que l’on refuse, provenant de notre histoire familiale, de l’empreinte socio-
culturelle dans laquelle nous vivons, ainsi que de nos propres expériences personnelles.
Le cadre de références guide et donne sens aux perceptions de chaque individu. Mais il n’est pas
neutre, il agit comme un filtre et influence la perception des situations, des personnes, de soi-
même. Nous observons ce qui nous entoure au travers de nos « lunettes culturelles », ce qui peut
conduire à émettre des a priori, des stéréotypes, à préjuger et même à discriminer.
Les principales zones sensibles ou différences culturelles pouvant donner lieu à ces chocs
culturels :
Plus de 75% de la communication est non verbale. Il faut donc y être très attentif.
Etre sensible à la communication non verbale, c’est chercher le sens des signes indirects comme
l’intonation, le regard, la gestuelle, etc. et tenter de comprendre ces signaux en fonction du
contexte.
6. Stéréotype et Préjugé
Même si des différences entre les personnes existent et que certaines études montrent que la
zone géographique ou la culture dont ces personnes proviennent détermine certaines tendances
au niveau de leurs perceptions, du temps, de l’espace, etc… il ne faut pas pour autant tomber
dans le piège des généralisations.
Stéréotypes et préjugés constituent des filtres et des écrans cognitifs et affectifs, faisant obstacle
à une ouverture à la culture de l’autre, à la reconnaissance et à la tolérance des différences.
Définitions
STEREOTYPE (une image – un cliché)
Un stéréotype est une généralisation simplifiée appliquée à un groupe entier de personnes sans tenir
compte des différences individuelles. Même les stéréotypes positifs (par exemple, celui qui affirme que
les Asiatiques sont bons en mathématiques et en informatique) ont un impact négatif car ils enferment les
personnes dans une généralisation abusive. Ces images figées font partie des représentations sociales :
elles se fondent sur une catégorisation rigide et persistante de tel ou tel groupe humain ; elles déforment
et appauvrissent la réalité sociale en ne fournissant qu’une grille de lecture simplificatrice. Elles peuvent
aussi être basées sur des préjugés. Les stéréotypes servent souvent à justifier la conduite d’un groupe vis-
à-vis d’un autre groupe. Exemples : les femmes sont hystériques, les Méditerranéens ont beaucoup
d’enfants, les Africains sont pauvres…
Vient de pré/juger, c'est-à-dire formuler un jugement préalable définitif sur une personne ou un groupe
de personnes sans avoir de connaissances suffisantes pour évaluer la situation. Le fait d'avoir des préjugés
sur quelqu'un se fonde sur des stéréotypes. Le préjugé est une idée préconçue socialement apprise,
partagée par les membres d’un groupe. Dans le langage courant, le mot désigne surtout une attitude
négative, défavorable, voire hostile à l’égard de personnes que l’on réduit à une catégorie générale.
Exemples : la suspicion à l’égard des adolescents marocains en Belgique, le rejet des jeunes par les vieux
ou des vieux par les jeunes…
La discrimination est le comportement qui est induit par les stéréotypes et les préjugés. Elle consiste à
appliquer un traitement différentiel et inégal à des personnes ou des groupes en raison de leur origine, de
leur appartenance ou de leurs opinions, réelles ou supposées. La discrimination peut être positive (en
fonction d’un a priori valorisant) ou négative (en fonction d’un préjugé dévalorisant). Dans le langage
courant, la discrimination désigne un comportement préjudiciable aux personnes, qui affecte de
nombreux domaines de la vie sociale, tels que l'emploi, le logement, les droits politiques, l’accès aux
discothèques...
7. Vers une démarche interculturelle
La démarche interculturelle est un outil qui permet de définir chaque étape d’une communication
efficace entre des personnes de cultures différentes. Dans le cas d’une rencontre entre deux
personnes de cultures différentes qui se passerait mal, chacun peut savoir où il a le pouvoir d’agir
pour rétablir le contact et trouver une solution qui serait co-construite.
Selon le cadre théorique proposé par Margalit Cohen-Emerique (Docteur en psychologie qui s’est
spécialisée dans l’étude des relations interculturelles), la communication interculturelle suppose 3 phases :
Il convient cependant de ne pas oublier qu’il y a une différence énorme entre comprendre le point
de vue de l’autre et l’accepter.
1) La décentration
prendre conscience, distance de ses référents culturels pour arriver à une relativisation de ses
points de vue, pour accéder à une certaine mentalité culturelle qui n’est pas synonyme de négation
de son identité mais au contraire, une reconnaissance maîtrisée de son identité. (Cohen-Emerique,
1994)
Il s’agit donc d’apprendre à porter un regard sur soi-même et ses propres cadres de référence. La
notion d’identité est le concept clé de ce travail. L’identité d’un individu peut être comparée à un
prisme à multi-facettes qui comporte une part donnée par la culture et une part construite par
l’individu, par sa volonté et par les événements de sa vie.
Comme déjà évoqué précédemment, parfois, certains traits de l’identité peuvent passer au
premier plan. On parlera alors de zones sensibles. Il s’agit de régions de l’identité qui, lorsqu’on y
touche, provoquent des réactions affectives (agressives ou de tristesse) très fortes.
Les zones sensibles d’un individu peuvent changer, évoluer avec le temps et selon les
circonstances de la vie. Lorsqu’elles s’apaisent, elles passent alors au niveau subconscient.
Lorsqu’elles sont à vif, elles provoquent des réactions affectives qui peuvent empêcher la
communication. On se trouve alors dans une logique de conflit et non dans une logique de
compréhension et de négociation. Il est dès lors important de prendre conscience de ses propres
zones sensibles et de celles de ses interlocuteurs si l’on veut entrer dans une démarche
interculturelle.
Comprendre le système de l’Autre, consiste à faire preuve d’une attitude d’ouverture, un effort
personnel de curiosité pour découvrir ce qui donne sens et valeur à l’Autre, pour lui donner la
parole et exprimer ce qui fonde ses rôles, ses statuts, ses croyances, toujours interprétés de façon
unique par l’individu.
Il s’agit de s’approprier la culture de l’Autre en prenant en compte tous ses aspects, et ce dans
une perspective dynamique qui tente d’appréhender tous les changements provoqués par
l’ensemble des processus d’acculturation qui ont façonné la personne. L’objectif sera de
comprendre le cadre de références de la personne, c’est-à-dire le système de valeurs qui guide
ses comportements et ses réactions.
• L’information par la lecture ou par des stages concernant la culture de l’Autre : important,
mais pas suffisant, voire dangereux dans la mesure où cette approche peut renforcer les
stéréotypes et occulter la variable d’appropriation individuelle de la culture.
• S’informer auprès de son interlocuteur, car il est le premier et sans doute le meilleur
informateur possible pour expliquer son cadre de référence.
• Etre attentif aux comportements non verbaux et au langage utilisé par les personnes.
• Enfin "donner du temps au temps" car la découverte de l’univers de l’Autre, par intériorisation
de ses codes de référence tout en se décentrant des siens propres, ne peut se réaliser
rapidement. (Cohen-Emerique, 1994).
3) La négociation-médiation
Sans entrer de manière très approfondie dans les théories liées aux processus de négociation
médiation, il est nécessaire de reconnaître que :
Grille d’analyse des chocs culturels (d’après la grille de Margalit Cohen Emerique)
Dans le cas où une rencontre avec l’autre culturellement différent ne se passe pas bien, on parlera
d’incident critique, de choc culturel.
Un outil intéressant pour solutionner les chocs culturels est la grille de lecture (développée par
Cohen-Emerique) qui permet de décomposer l’incident en rencontre de systèmes différents, de
déterminer les acteurs, leurs valeurs et de trouver une solution de négociation.
Pour chaque incident critique, les participants doivent répondre aux questions suivantes :
1) Qui sont les acteurs en présence dans cette situation interculturelle, leur identité (âge, sexe,
origine, profession, etc.), leurs types de rapports et ceux qui relient leurs groupes
d'appartenance ?
2) La situation dans laquelle se déroule la scène (contexte physique, social, psychologique, etc.).
4) Les représentations, les valeurs, les normes, les conceptions, les préjugés, bref, le cadre de
référence de la personne qui a vécu le choc.
5) Les représentations, valeurs, normes, préjugés, idées, bref le cadre de référence de la personne
ou du groupe qui est à l'origine du choc, qui a provoqué le choc chez le narrateur.
6) Cet incident critique pose-t-il un problème de fond concernant soit la pratique professionnelle,
soit de façon générale le respect des différences en situation interculturelle ?
7) Quelles sont les alternatives ou pistes de négociation qu’on aurait pu ou qu’on pourrait mettre
en œuvre pour dépasser la situation de choc culturelle analysée ?
8. Conclusion
Tout au long de cette formation, nous avons pu voir l’importance de considérer la diversité de
culture comme une richesse et la gestion de celle-ci comme un véritable défi au vivre ensemble.
Effectivement, il est important de pouvoir mettre en place des stratégies qui facilitent le contact
dans un groupe de personnes issues de cultures différentes. Pour cela, nous sommes partis du
schéma de la communication interculturelle afin d’en définir les composantes et, de ce fait,
pouvoir agir dessus.
D’une part, les acteurs dans la communication interculturelle sont porteurs d’une culture, donc
de valeurs qui font en sorte qu’on se construit une manière de décoder ce qui nous entoure, et
qui forge nos lunettes de lecture. Par conséquent, il est impératif de pouvoir nous connaitre,
prendre conscience de nos zones sensibles, nos valeurs, les éléments qui nous tiennent à cœur
afin de prendre une distance par rapport à ces derniers dans la rencontre avec l’autre.
D’autre part, il est aussi important de considérer l’autre, et cela ne peut se faire sans une écoute
attentive de la personne mais également une analyse de ce qui correspond à son cadre de
référence, ses valeurs, ses lunettes de lecture. Plusieurs ressources sont disponibles, telles que
des livres, des articles publiés sur des sites d’organismes spécialisés dans l’interculturalité (ITECO,
CBAI,…) mais également des recherches d’informations sur les publics concernés et des
connaissances historiques sur les migrations. Cette démarche permet de mettre en lien les
valeurs universelles des deux parties et par ce biais, partir sur une base commune pour faciliter
le dialogue.
Néanmoins, il peut arriver que des rencontres se passent sous forme de choc culturel où chacun
arrive avec ses propres lunettes de lecture. Dans ce cas précis, nous avons vu comment nous
pouvons faire un « arrêt sur image » sur l’incident, en déterminer les composantes et arriver à
trouver un terrain de négociation. La grille de lecture de Cohen-Emerique est un des nombreux
outils qui permette d’aller vers cette médiation.
Quelques références pour en savoir plus
« Comprendre la culture arabo-musulmane », Remacle Xavière, Vie ouvrière, CBAI, Petite bibliothèque,
éd. L’Harmattan, 1989.
« Une brève histoire de l’immigration en Belgique » Marco Martinello et Andrea Rea, Fédération
Wallonie Bruxelles , 2012.
« Nos différences en dialogue… quelques pistes pour s’engager de manières avisée dans une relation
interculturelle », Alvarez Isabel, LLN, 2001
« Pourquoi des approches interculturelles en sciences de l’éducation », Dasen Pierre R., Perregaux
Christiane (EDS), Bruxelles, de Boeck, Université, 2000