Glaude 2006
Glaude 2006
Glaude 2006
Il se caractérise principalement par l’absence de corps verté- Il se caractérise par la présence du processus odontoïde, situé
bral, remplacé par un arc antérieur. Entre l’arc antérieur et à l’extrémité supérieure du corps de C2. Ce processus présente
C3 à C6
Le corps vertébral est aplati dans le plan frontal. Sa face inter-
vertébrale supérieure, concave vers le haut, se prolonge latéra-
lement par les uncus. Le corps vertébral se prolonge en arrière
par l’arc vertébral postérieur composé des pédicules, des mas-
sifs articulaires, des lames et du processus épineux, bifide et
horizontal. Le processus transverse se détache du corps verté-
bral et du massif articulaire. Il est composé d’un tubercule anté-
rieur et d’un tubercule postérieur qui délimitent le sillon du nerf
spinal. Le tubercule antérieur de C6 (tubercule de Chassaignac)
est un repère chirurgical du niveau C6. L’ossification du proces-
sus transverse est incomplète, délimitant un foramen transver-
saire qui livre passage à l’artère vertébrale à partir de C6.
Chez l’enfant, ces vertèbres présentent trois centres d’ossifi-
cation : un pour le corps et un pour chaque arc neural [4]. Les
arcs neuraux fusionnent entre eux vers l’âge de 2-7 ans [5] et
avec le corps vertébral vers 3-6 ans. Jusqu’à l’âge de 7 ans, on
peut donc retrouver sur le cliché de face un faux aspect de
spina bifida [5] et sur le cliché de profil une bande claire sépa-
rant la partie postérieure des corps vertébraux de l’arc posté-
rieur. Les uncus commencent à s’ériger de la partie latérale
des corps vertébraux à partir de l’âge de 9-10 ans. Ce ne sont
Figure 1. Centres d’ossification des vertèbres C1 et C2. pas des points d’ossification distincts, mais des excroissances
verticales issues d’un corps vertébral déjà ossifié.
Des centres d’ossification secondaires apparaissent plus tardi-
une facette articulaire antérieure et une facette articulaire
vement :
postérieure, cette dernière répondant au ligament trans-
verse. Le processus épineux de C2 est volumineux et souvent • en périphérie des plateaux vertébraux. Il s’agit de structu-
bifide. res cartilagineuses annulaires circonférentielles, les listels
marginaux supérieur et inférieur. Ceux-ci commencent à se
Chez l’enfant, C2 comporte 4 centres d’ossification principaux
calcifier à partir de l’âge de 6 ans et à s’ossifier au début de
(fig. 1) : un pour chaque arc neural, un pour le corps et un
l’adolescence, pour fusionner complètement avec le corps
pour le processus odontoïde [4]. Le processus odontoïde est
vertébral entre 18 et 25 ans. Ils peuvent parfois ne pas
en fait formé de deux centres secondaires longitudinaux qui
fusionner et il ne faudra pas les confondre avec des arrache-
fusionnent in utero. Un défaut de fusion à ce niveau peut être
ments osseux ;
confondu avec une fracture longitudinale, mais cette dernière
• au sommet des processus transverses et épineux (appari-
est rarissime. Un troisième centre secondaire apparaît à
tion vers la puberté, fusion vers 25 ans).
l’apex du processus odontoïde (ossiculum terminale) vers
3-6 ans et fusionne avec lui vers l’âge de 12 ans. Il ne faut
pas confondre l’ossiculum terminale avec l’os odontoïdeum,
C7
longtemps considéré comme une anomalie congénitale, mais Cette vertèbre se caractérise par la présence d’un volumineux
correspondant probablement à une pseudarthrose d’une processus épineux, oblique vers le bas et non bifide, et par
fracture de l’odontoïde passée inaperçue (cf. ch. spécifique) l’absence de tubercule antérieur sur son processus transverse.
[6, 7]. Le corps de C2 fusionne avec le processus odontoïde Ces éléments permettent d’identifier facilement C7 sur une
vers l’âge de 3-6 ans. Cette ligne de fusion (ou synchon- radiographie du rachis cervical de profil. Le développement
drose sous-odontoïdienne ou dentocentrale) peut être visible de C7 chez l’enfant est identique à celui des vertèbres C3-C6.
6
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Disques intervertébraux
et structures ligamentaires
Disques intervertébraux
À l’étage cervical, l’anneau fibreux de la partie antérieure
du disque est très épais, mais à sa partie postérieure, il n’est
représenté que par un très fin faisceau de fibres verticales,
quasiment absent en regard des uncus [8]. Les disques sont
également plus hauts à l’avant qu’à l’arrière, ce qui contribue
à la lordose cervicale [9]. AB
Figure 2. Schéma de profil (A) et de face (B) des structures ligamentai-
Structures ligamentaires res du rachis cervical supérieur.
1 : membrane atlanto-occipitale antérieure, 2 : ligament longitudinal
Les articulations occipito-atloïdiennes et atlanto-axoïdiennes antérieur, 3 : ligament apical du processus odontoïde, 4 : ligament
sont renforcées par un complexe ligamentaire puissant alaire, 5 : faisceau longitudinal du ligament cruciforme de l’atlas,
6 : ligament transverse (faisceau transversal du ligament cruciforme
comprenant, d’avant en arrière (fig. 2) :
de l’atlas), 7 : membrane tectoriale, 8 : ligament longitudinal posté-
• la membrane atlanto-occipitale antérieure, située entre rieur, 9 : membrane atlanto-occipitale postérieure, 10 : ligament jaune,
la partie basilaire de l’occiput et l’arc antérieur de C1 où elle 11 : ligament nucal.
transverse. L’inclinaison latérale est possible mais elle est très 40˚). Ce mouvement est toujours couplé à une rotation du fait
modérée. La rotation est faible en C0-C1, l’essentiel du mou- de la disposition des facettes des processus articulaires. La
vement siégeant dans C1-C2 avec le processus odontoïde rotation au rachis cervical inférieur est possible à chaque
pour axe. Le rôle du ligament transverse est essentiel dans étage (rotation unilatérale de 5˚ par étage).
la fonction de pivot du processus odontoïde. La rotation et
l’inclinaison latérale sont limitées par le ligament alaire contro-
latéral. La distraction est limitée par la membrane tectoriale Notion de stabilité
et les ligaments alaires [9].
La stabilité est définie comme la faculté du rachis à maintenir,
Rachis cervical inférieur lors d’une contrainte physiologique, un même rapport entre
les vertèbres afin d’éviter une lésion initiale ou ultérieure de
Les mouvements de flexion-extension sont contrôlés par la
la moelle ou des racines [10]. La déstabilisation, terme préfé-
partie postérieure du disque et le ligament longitudinal
rable à celui d’instabilité, correspond à la perte d’un ou de
postérieur dont le rôle est stabilisateur. L’amplitude du
plusieurs éléments de stabilité du rachis.
mouvement de flexion-extension est d’environ 82˚, soit une
La stabilité dépend de trois paramètres élémentaires :
amplitude globale d’environ 127˚ pour l’ensemble du rachis
cervical. Le rachis cervical inférieur possède l’inclinaison laté- • la vertèbre, composant statique, passif et indéformable ;
rale la plus importante, soit environ 27˚ (amplitude globale de • le segment mobile rachidien, composant discoligamentaire
élastique et déformable. Il comprend d’avant en arrière : le
ligament longitudinal antérieur, le disque intervertébral, le
ligament longitudinal postérieur, les capsules articulaires
zygapophysaires, les ligaments jaunes, les ligaments interé-
pineux et le ligament supra-épineux [11] ;
• la musculature rachidienne, composant actif dont le rôle est
fondamental dans la stabilisation et la mobilité du rachis. Au
rachis cervical, les muscles postérieurs sont extenseurs et les
muscles antérieurs (muscles long du cou, scalènes et sterno-
cléido-mastoïdiens) sont fléchisseurs.
De C0 à C2, la stabilité est assurée par les structures ligamen-
taires de la jonction occipito-cervicale définies ci-dessus et
dont les lésions sont génératrices de l’instabilité du rachis
cervical supérieur (tableau I).
Par contre, de C3 à C7 (et au niveau thoracolombaire égale-
ment), les éléments de stabilité sont organisés en colonnes
(fig. 3) [12, 13] :
• la colonne antérieure comprend le ligament longitudinal
Figure 3. Schéma des trois colonnes. L’atteinte d’une seule colonne est
considérée comme stable alors que celle d’au moins deux colonnes est
antérieur et les deux tiers antérieurs des disques interverté-
considérée comme instable. braux et des corps vertébraux ;
8
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
• la colonne moyenne comprend le ligament longitudinal contracture paravertébrale, tuméfaction douloureuse, héma-
postérieur et le tiers postérieur des disques intervertébraux et tome au fond de la gorge) ;
des corps vertébraux ; • recherche de déficit sensitivomoteur (testing des différents
• la colonne postérieure regroupe l’arc postérieur, les articu- groupes musculaires),
lations zygapophysaires, les ligaments jaunes, les ligaments • testing des différents réflexes ostéotendineux ;
interépineux et les ligaments supra-épineux. • recherche de signes de souffrance pyramidale en faveur
L’atteinte d’une seule colonne est considérée comme stable d’une lésion médullaire ;
alors que celle d’au moins deux colonnes est considérée • examen du périnée (motricité et sensibilité des sphincters
comme instable. Il faut savoir qu’il n’existe pas d’atteinte anal et vésical, réflexes bulbocaverneux et clitorido-anal).
isolée de la colonne moyenne. Ainsi, la visualisation de signes
radiographiques d’atteinte de la colonne moyenne traduit
obligatoirement une lésion instable. Imagerie du rachis cervical
D’autres auteurs [14-16] ont défini l’instabilité par l’associa- traumatique
tion de deux critères (critères de Yale) :
• un antélisthésis > 3,5 mm ; Radiographies standard initiales
• une angulation focale > 11˚.
On distingue les lésions stables à risque de déplacement nul Elles constituent souvent la première étape du diagnostic
(elles ne se déplaceront pas ou elles ne se déplaceront plus) chez un patient conscient et non polytraumatisé, dont le
et les lésions instables (à risque de déplacement progressif et rachis cervical est immobilisé par un collier ou une minerve.
régulier ou à risque de déplacement brutal) (tableau II) [10]. Elles comportent trois clichés : face, face bouche ouverte
Lorsque la solution de continuité est uniquement osseuse centrée sur le processus odontoïde, et profil incluant l’espace
(fracture), le risque potentiel de déplacement ne dure que 2 intervertébral C7-T1 (la traction sur les bras permet parfois
à 3 mois, jusqu’à consolidation de la fracture. Lorsqu’elle est de rendre visible la charnière cervicothoracique). Certains
discoligamentaire, il est indispensable de faire réaliser des cli- auteurs utilisent systématiquement les clichés de I, d’autres
chés dynamiques au 8e jour car le risque de déplacement seulement en cas de souffrance radiculaire clinique ou d’antélis-
secondaire peut persister des mois ou des années. thésis modéré sur le cliché de profil (< 3 mm) afin de mettre
en évidence un baillement (écart) uncovertébral unilatéral,
signe pathognomonique d’olisthésis rotatoire (tableau III).
Examen clinique L’utilisation de ces deux incidences supplémentaires présente
également un intérêt dans l’étude de la jonction cervico-
« Tout traumatisé est un traumatisé rachidien jusqu’à preuve thoracique si les dernières vertèbres cervicales ne peuvent
du contraire ». Le diagnostic doit donc être suspecté sur les être dégagées sur le profil [17]. Elles remplacent avantageu-
lieux de l’accident (mobilisation du patient en rectitude rachi- sement l’incidence du baigneur [18].
dienne et port d’un collier rigide lors du transport et de l’éva-
luation clinicoradiologique aux urgences). Les mesures de
réanimation respiratoire et cardiovasculaires priment. L’exa- Tableau III : Étiologies d’un baillement uncovertébral
men clinique doit être complet et simple : unilatéral.
Chez le patient conscient, des clichés radiographiques de bord antérieur du processus épineux de C2 peut être situé
bonne qualité technique permettent de détecter quasiment jusqu’à 2 mm en arrière de la ligne spino-lamaire.
toutes les fractures [2]. Par contre, chez le patient inconscient • La recherche d’un diastasis C1-C2 : la partie basse de l’inter-
ou polytraumatisé, ces clichés sont difficiles, voire impossi- ligne C1-C2 est normalement ≤ 3 mm chez l’adulte, ≤ 5 mm
bles à réaliser dans des conditions techniques optimales, chez l’enfant. Un diastasis C1-C2 doit faire évoquer une frac-
notamment aux charnières, ce qui explique le pourcentage ture de C1 ou du processus odontoïde, ou une rupture du liga-
élevé de faux négatifs (20 à 40 %, dont la moitié sont des ment transverse et des ligaments alaires [4].
lésions instables) [2]. Ceci explique leur remplacement actuel • L’analyse de l’anneau de Harris (projection de l’insertion
par une exploration TDM [19]. des masses latérales de C2 sur son corps). Une interruption
supérieure témoigne d’une fracture de la base du processus
Analyse du cliché de profil odontoïde, une interruption postérieure d’une fracture des
pédicules de C2.
Ce cliché permet (fig. 4) : • L’analyse du diamètre antéro-postérieur du corps de C2,
• L’analyse des lignes spinales, normalement harmonieuses identique à celui de C3. Son élargissement doit faire évoquer
et parallèles : ligne spinale antérieure (reliant les faces anté- une fracture de cette vertèbre. La partie antérieure du pla-
rieures des corps vertébraux), ligne spinale postérieure teau inférieur de C2 est normalement légèrement en avant
(reliant le bord postérieur des corps vertébraux), ligne spino- de celle du plateau supérieur de C3 mais le bord postérieur de
lamaire (reliant le bord antérieur des processus épineux), ces deux vertèbres est en revanche sur le même plan.
ligne des processus épineux (reliant la pointe des processus • L’étude des parties molles pré-vertébrales. En avant de C2,
épineux). L’interruption d’une ou plusieurs de ces lignes doit les parties molles sont toujours planes ou concaves vers
faire suspecter une lésion ligamentaire ou une fracture l’avant et leur épaisseur est toujours ≤ au diamètre antéro-
occulte [20]. On signalera cependant qu’à l’état normal, le postérieur de la base du processus odontoïde [21]. Entre le
coin antéroinférieur de C2 et le coin antéro-inférieur de C4,
les parties molles sont < 7 mm chez l’enfant comme chez
l’adulte. En dessous du coin antéro-inférieur de C4, les parties
molles sont < 14 mm chez l’enfant et 21 mm chez l’adulte.
Un épaississement des parties molles antérieures est un signe
important, et parfois la seule anomalie visible pouvant témoi-
gner de lésions osseuses antérieures et/ou de lésions disco-
ligamentaires. On signalera que chez l’enfant, les parties molles
pré-vertébrales peuvent apparaître faussement épaissies si le
cliché a été réalisé au cours d’une expiration. Il faut donc refaire
le cliché en légère extension et en inspiration.
• La recherche de signes d’entorse grave en flexion
(tableau IV).
10
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
flexion quel qu’en soit le type. Il peut être également présent nibilité limitée des scanners, l’augmentation considérable
dans les lésions par compression axiale [25]. des dépenses de santé et le risque d’augmentation des can-
Les uncus sont alignés sur un même plan para-sagittal et les cers radio induits [2]. Le scanner doit par contre être réalisé
espaces unco-vertébraux sont de même taille. en cas de polytraumatisme, de clichés anormaux, de mau-
Les colonnes latérales (région osseuse située entre les articu- vaise qualité technique ou de dissociation radio-clinique
lations unco-vertébrales et les bords latéraux du rachis cervi- (radiographies normales et cervicalgies disproportionnées).
cal) sont continues et leurs bords latéraux sont discrètement
ondulés. L’atteinte d’une colonne latérale témoigne d’un IRM
mécanisme de flexion-rotation, avec soit une fracture sépara- Indications
tion d’un massif articulaire (aspect carré du massif articulaire
L’IRM est le gold standard pour le diagnostic des lésions des
lié à son horizontalisation), soit une fracture uni-articulaire.
tissus mous (moelle épinière, racines nerveuses, structures
On se méfiera de la projection du défilé laryngotrachéal, pou-
disco ligamentaires). Elle doit être prescrite en urgence en cas
vant simuler une fracture verticale d’un corps vertébral.
de rachis neurologique (radiculalgie, syndrome médullaire,
déficit neurologique) à radiographie ou scanner normal, ou en
Radiographies standard dynamiques
cas de dissociation radio-clinique. Elle doit alors préciser
(profil en flexion puis en extension)
l’existence d’un élément compressif et sa nature (hématome
épidural, débord discal traumatique), rechercher des éléments
Elles ne sont indiquées que lorsque le bilan radiographique
d’instabilité et donner des renseignements sur le pronostic.
initial est normal ou ne montre pas de lésion instable. Elles
Les renseignements sur la nature de l’élément compressif
sont sans danger si elles sont pratiquées dans les règles de
sont essentiels pour le choix de la voie d’abord car la hernie
l’art : présence d’un médecin, mouvement actif et jamais
post-traumatique impose une voie d’abord antérieure. Elle
passif chez un patient assis et conscient à qui l’on demande
permet également l’exploration de lésions vasculaires (dis-
d’arrêter le mouvement en cas d’apparition de douleurs ou de
section carotidienne, insuffisance vertébro-basilaire). Pour
signes neurologiques. On demande au patient de fléchir la
certains auteurs, elle devrait être réalisée avant toute
tête au maximum jusqu’à ce que le menton touche le ster-
manœuvre de réduction ou de stabilisation afin de ne pas
num, puis d’étendre la tête jusqu’à ce que la nuque rencontre
méconnaître un fragment discal qui pourrait devenir compres-
le haut du dos [26]. Ces clichés sont réalisés à distance du
sif après ces gestes [28, 29].
traumatisme pour permettre la disparition de la contracture
Par contre, les performances de l’IRM sont inférieures à celles
musculaire et des phénomènes douloureux, lesquels limitent
des radiographies et du scanner pour la détection des lésions
la mobilité du rachis cervical, masquant ainsi parfois les signes
osseuses, notamment pour les fractures des arcs postérieurs
d’entorse grave. Le délai à partir duquel ils doivent être réali-
[30] et du processus odontoïde, dont seulement 50 % sont
sés varie selon les auteurs (entre 5 et 21 jours) [26]. Signa-
dépistées en IRM [31] et à celle des radiographies dynami-
lons que chez 20 % des enfants normaux, il peut y avoir un
ques pour la détection des instabilités ligamentaires [32].
déplacement vers le haut de l’arc antérieur de C1 par rapport
au processus odontoïde lors des clichés en extension [4].
Lésions médullaires
Scanner cervical Il peut s’agir d’une section, d’une élongation, d’une compres-
sion mécanique directe persistante (débord discal, héma-
Il présente une sensibilité de l’ordre de 100 % pour la détec- tome, fragment osseux, luxation) ou passagère (bombement
tion des fractures, même chez les patients inconscients ou disco-ligamentaire lors de traumatismes en hyperextension)
polytraumatisés. La réalisation des reconstructions multi- ou d’une atteinte vasculaire secondaire (fig. 6 et 7). L’IRM
planaires améliore l’analyse des traits de fracture et des permet de distinguer les lésions médullaires non hémorragi-
déplacements vertébraux [2, 27]. Devant la fréquence des ques (œdémateuses ou ischémiques) des lésions hémorragi-
lésions traumatiques cervicales associées (25 à 30 % des ques moins fréquentes mais au pronostic très péjoratif sur le
cas), l’acquisition spiralée doit systématiquement s’étendre plan de la récupération neurologique [33]. En revanche, les
des condyles occipitaux jusqu’à la deuxième vertèbre thoraci- patients ne présentant pas d’anomalies de signal du cordon
que [1]. La réalisation systématique d’un scanner devant médullaire ont un très bon pronostic neurologique [34]. La
toute suspicion de traumatisme cervical représenterait la sémiologie IRM des lésions médullaires est fonction du délai
solution idéale, mais elle est impossible en raison de la dispo- après lequel est réalisé l’examen.
12
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
A B
A B
À la phase aiguë, le signal de la moelle épinière est souvent l’étendue de plages hémorragiques intramédullaires, la pré-
normal en pondération T1. Un hyposignal traduit la gravité de sence d’une compression persistante par un hématome épi-
l’atteinte œdémateuse ou ischémique. La pondération T2 dural sont des éléments péjoratifs (récupération incomplète
révèle souvent des anomalies plus précoces. L’œdème se tra- ou absence de récupération). Une atteinte hémorragique
duit par une plage hyperintense qui peut s’étendre à la phase haute de plus de 10 mm est en général associée à une
subaiguë. La présence de sang se traduit par un hyposignal absence totale de récupération [35].
T2, plus évident en séquence écho de gradient T2*, en raison À la phase subaiguë, l’œdème et la tuméfaction médullaire
de la présence de désoxyhémoglobine (tableau V) (fig. 7). régressent avant une éventuelle atrophie secondaire. D’éven-
Cette plage hémorragique affecte surtout la substance grise tuelles plages résiduelles hypointenses en T1 et hyperintenses
centrale. L’étendue craniocaudale de l’œdème, la présence et en T2 traduisent une myélomalacie ou des phénomènes de
Tableau V : Variations du signal IRM du sang dans les lésions traumatiques de la moelle épinière (par rapport au signal de la moelle
épinière) d’après Pang D [68].
gliose. L’apparition de methémoglobine au sein de plages épiduraux plus volumineux secondaires à une rupture des
hémorragiques s’accompagne d’un hypersignal focal en T1 plexus veineux sont beaucoup plus rares mais ils peuvent être
[35]. responsables de phénomènes compressifs sévères. Ils sont
en général postérieurs ou postérolatéraux et peuvent s’éten-
Atteinte discale traumatique dre au foramen magnum [38]. À la phase aiguë, ils sont iso-
La rupture discale survient principalement lors des mouve- ou hyperintenses par rapport à la moelle épinière en T1
ments de grande amplitude (mécanisme en flexion ou en (tableau V). En T2, leur signal est hyperintense avec des pla-
extension). Elle peut s’accompagner d’une fracture d’un ges hypointenses. À la phase subaiguë, ils deviennent hype-
angle vertébral antérieur (très instable). Elle se manifeste rintenses en T1 et en T2.
par un bâillement de l’espace intersomatique avec hyper-
signal T2 du disque et/ou par une interruption des liga- Avulsion traumatique des racines nerveuses
ments longitudinaux.
Elle résulte d’un mécanisme de traction du plexus brachial. À
Le débord discal post traumatique présente une sémiologie
la phase aiguë, l’IRM objective des anomalies de la moelle
comparable à celle du débord discal non traumatique. Dans
(tuméfaction, modification de signal, composante hémorragi-
l’étude de Rizzolo, son incidence globale est de 42 % mais
que) et l’absence de racines antérieure et postérieure en cou-
elle passe à 80 % dans les luxations bilatérales, et à 100 % en
pes fines. À la phase chronique, elle met en évidence des
cas d’atteinte des motoneurones antérieurs [29].
pseudoménigocèles post-traumatiques (collections liquidien-
nes diverticulaires appendues au sac dural au niveau ds émer-
Lésions ligamentaires
gences radiculaires arrachées) (fig. 8).
Les structures ligamentaires visibles en IRM sont les liga-
ments longitudinaux, jaunes, interépineux, supra-épineux et
Lésions des artères vertébrales
le ligament nucal. Il en est de même des trois principaux élé-
ments stabilisateurs de la jonction crâniocervicale : mem- Elles seraient fréquentes (20 %), surtout lors de traumatis-
brane tectoriale, ligament transverse et ligaments alaires mes en flexion [39, 40], mais elles sont rarement responsa-
[36]. L’atteinte ligamentaire se traduit par une solution de bles de complications neurologiques médullaires (artères spi-
continuité ou une augmentation du signal du ligament et/ou nales postérieures et antérieure, artères radiculaires) ou de la
des parties molles adjacentes [36]. Toutefois, la sensibilité de fosse postérieure [33]. Un traumatisme en hyperflexion et
l’IRM dans la détection des lésions ligamentaires est relative- une fracture des foramens transversaires en TDM constituent
ment faible (huit ruptures ligamentaires détectées contre un signal d’appel d’atteinte des artères vertébrales. Des
14 ruptures en chirurgie dans l’étude de Weisskopf [37]). atteintes carotidiennes ont plus rarement été rapportées en
cas de traumatismes sévères. L’IRM permet de mettre en évi-
Espace épidural dence une amputation de la lumière par l’hématome pariétal
De petites lames hémorragiques épidurales antérieures sont (faux-chenal) sur les coupes axiales et des anomalies de flux
fréquentes en cas de traumatisme rachidien. Les hématomes en angioMR.
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E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
A B
Tableau VI : Critères NEXUS. Tous les critères énoncés dans ce chapitre ne font pas encore
l’objet d’une reconnaissance ou d’une utilisation internatio-
Absence de douleur cervicale médiane nale. Toutefois, ils sont d’invidualisation récente et l’intérêt
Absence de déficit neurologique focal
Conscience normale croissant qu’ils suscitent dans la littérature laisse à penser
Absence d’intoxication (alcool, drogue) qu’il ne s’agit que d’une question de temps. Par contre, aucun
Absence de douleur distrayante (fracture du fémur ou du bassin d’entre eux ne fixe avec précision la place de l’IRM dans la
par exemple)
stratégie diagnostique. Cet examen, du fait de son accessibi-
lité limitée, est à l’heure actuelle un examen de seconde
L’étude canadienne (Canadian C-Spine Rule : CCR) a été réalisée
intention (après réalisation de radiographies standard et/ou
chez 8 924 patients conscients et stables sur le plan hémodyna-
d’un examen tomodensitométrique).
mique [43] afin d’évaluer 20 paramètres cliniques regroupés en
3 items (tableau VII). Ces critères permettaient d’identifier les
traumatismes significatifs du rachis cervical avec une sensibilité Lésions traumatiques du rachis cervical
(100 %) et une spécificité (42,5 %) supérieures à celles des cri- supérieur (C0-C2)
tères NEXUS [44]. L’application des critères canadiens permet-
trait de réduire le taux de radiographies chez 55,9 % des Fracture des condyles occipitaux
patients contre 66,6 % pour les critères NEXUS.
C’est une lésion rare dont le diagnostic est souvent méconnu
car difficile en radiographie du fait des importantes superpo-
Quel premier bilan d’imagerie ?
sitions osseuses de la base du crâne. Le diagnostic est par
Une étude cas-témoin américaine a tenté de répondre à cette contre aisé en scanner. La classification d’Anderson et Monte-
question [45, 46]. Chez les patients devant être explorés par sano reconnaît trois types lésionnels (fig. 9) :
l’imagerie, ceux qui présentent au moins un facteur de risque • le type I : fracture impaction d’un condyle occipital secon-
élevé de lésion cervicale énoncé par Harborview daire à un mécanisme de compression axiale, responsable
(tableau VIII) doivent bénéficier d’emblé d’un scanner cervi- d’une comminution des fragments osseux, mais sans dépla-
cal. Les sujets polytraumatisés et les sujets nécessitant un cement. La lésion est stable car même si le ligament alaire
scanner cérébral bénéficient en fait actuellement d’emblée ipsilatéral peut être atteint, le ligament alaire controlatéral et
d’un scanner cervical. Chez les autres, les clichés standard sont la membrane tectoriale sont intacts ;
le premier examen à réaliser, et parfois le seul s’ils sont stric- • le type II : il s’agit d’une fracture de la base du crâne éten-
tement normaux. Cette attitude, en permettant de dépister due au condyle occipital. La lésion est stable si le condyle
plus rapidement et plus efficacement les lésions traumati- n’est pas séparé du reste de l’occiput. De plus, les deux liga-
ques, serait avantageuse en matière de dépenses de santé ments alaires et la membrane tectoriale sont intacts ;
[45]. • le type III : fracture-avulsion du versant médial d’un condyle
occipital par un ligament alaire lors d’un mouvement de rota-
tion ou d’inclinaison latérale (fig. 10). Le fragment osseux est
Tableau VII : Critères CCR. déplacé vers le sommet du processus odontoïde. Cette frac-
A : Présence d’un facteur de risque élevé de lésion cervicale ture est instable car le ligament alaire et la membrane tecto-
– âge ≥ 65 ans riale ipsilatéraux à la lésion sont lésés. C’est le type le plus fré-
– mécanisme lésionnel dangereux (chute de plus de 1 mètre quent (75 % des cas [29, 47]).
ou de plus de 5 marches, compression axiale sur la tête comme
lors des accidents de plongeon, accident de voiture à plus de
100 km/h ou avec des tonneaux ou avec éjection du véhicule, Tableau VIII : Critères à haut risque de lésion traumatique
accident à vélo ou à moto) du rachis cervical d’Harborview. La présence d’au moins
– paresthésies des extrémités un de ces éléments devrait faire pratiquer un scanner cervical
B : Présence de facteurs de risque faible de lésion cervicale comme premier examen d’imagerie.
– accident de voiture avec impact simple à l’arrière (à l’exclusion
« d’un impact à l’avant, d’une collision avec un bus ou un Mécanisme lésionnel – accident de voiture à vitesse élevée
camion, d’un « tonneau », ou d’un choc avec un véhicule circu- à haute énergie (> 50 km/h)
lant à grande vitesse) – décès d’un tiers sur les lieux de l’accident
– le patient tient seul en position assise dans le service des urgences – chute de plus de 3 mètres
– ambulation sans problème depuis l’accident
– début retardé des douleurs Éléments cliniques – coma ou hématome intra-crânien
– absence de douleur cervicale médiane à haut risque – signes ou symptômes neurologiques
C : Patient capable d’effectuer une rotation active de la tête de orientant vers une origine cervicale
45˚ vers la droite et vers la gauche – fracture du bassin ou des membres
16
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Luxation occipito-cervicale
Cette lésion est mortelle dans la très grande majorité des cas
par section bulbomédullaire [48]. Elle est 2,5 fois plus fré-
quente chez l’enfant que chez l’adulte, probablement pour
des raisons anatomiques (condyles occipitaux de petite taille, Type 1
articulations atlanto-occipitales situées dans un plan horizon-
tal, poids relatif de la tête par rapport au corps plus élevé que
chez l’adulte) [4, 9]. Il en existe trois types [49] :
• le type I (le plus fréquent) : déplacement antérieur des
condyles occipitaux par rapport aux surfaces articulaires cor-
respondantes de C1. Il existe une rupture des ligaments alai-
res, de la membrane tectoriale et des capsules articulaires
occipito-atloïdiennes ;
Type 2
• le type II : il existe un déplacement vertical de l’occiput par
rapport au rachis cervical. Soit les capsules articulaires occi-
pito-atloïdiennes se rompent et l’occiput seul se déplace vers
le haut (sous-type IIA), soit ce sont les capsules articulaires
zygapophysaires C1-C2 qui se rompent et l’atlas reste soli-
daire de l’occiput déplacé (sous-type IIB) ;
• le type III : déplacement postérieur de l’occiput (exception-
nel).
Malgré le caractère spectaculaire de la luxation occipito- Type 3
cervicale, le diagnostic n’est que rarement posé dans le cadre Figure 9. Schéma des trois types de fracture des condyles occipitaux.
de l’urgence sur les clichés radiographiques [48]. Pourtant, le Type I : fracture impaction d’un condyle occipital avec comminution
sans déplacement des fragments osseux. Le ligament alaire ipsilatéral
diagnostic est aisé sur le cliché de profil strict devant la mise peut être atteint ; Type II : fracture de la base du crâne étendue au
en évidence de trois signes (fig. 11) : condyle occipital. Le ligament alaire ipsilatéral est intact ; Type III :
fracture-avulsion du versant médial d’un condyle occipital par un liga-
• un épaississement majeur des tissus mous prévertébraux ;
ment alaire. Le fragment osseux est déplacé vers le sommet du proces-
• une rupture du cintre occipito-odontoïdien antérieur (ligne sus odontoïde.
régulière formée par la continuité de la ligne antérieure de la
base du crâne, des condyles et de la face antérieure du pro-
cessus odontoïde) ;
• un déplacement des condyles occipitaux qui sont normale-
ment à l’aplomb des masses latérales de C1.
La réalisation désormais systématique du scanner et de l’IRM
(fig. 12) dans ce genre de contexte permet actuellement de
reconnaître plus facilement ce type de lésion. Le traitement
est orthopédique par halo-veste puis, en cas de persistance
d’une instabilité, par une fixation chirurgicale occipito-
cervicale.
A B
Figure 11. Luxation occipito-cervicale de type IIA chez deux patients différents. Notez l’importance de l’épaississement des tissus mous prévertébraux
et le déplacement antérosupérieur des condyles occipitaux par rapport aux surfaces articulaires correspondantes de C1, avec rupture du cintre occi-
pito-odontoïdien antérieur (pointillés).
A B
d’un déplacement antérieur de C1 par rapport à C2. Les tra- • la section de tous les ligaments précédents et de la mem-
vaux expérimentaux de Argenson [51] et Roy-Camille [52] brane tectoriale entraîne un écart de 8 à 15 mm.
montrent que : Les signes cliniques d’appel sont peu spécifiques (cervical-
• l’écart radiologique normal entre le processus odontoïde et gies, contracture paravertébrale et névralgie d’Arnold). Cette
l’arc antérieur de C1 est toujours inférieur à 3 mm chez lésion est instable car il existe un risque de compression de la
l’adulte ; jonction bulbo-médullaire par le processus odontoïde et l’arc
• la section isolée du ligament transverse entraîne un écart de postérieur de l’atlas, notamment lors de la flexion. Le dia-
5 mm ; gnostic se fait sur le cliché de profil qui met en évidence un
• la section du ligament transverse et des deux ligaments diastasis C1-C2 > 3 mm chez l’adulte, et > 5 mm chez l’enfant.
alaires entraîne un écart d’au moins 8 mm ; Si ces clichés sont normaux, le diastasis C1-C2 peut être
18
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
recherché sur les clichés dynamiques (fig. 13). Le cliché de sujet, la luxation rotatoire atlanto-axoïdienne manque de
face « bouche ouverte » recherche une avulsion osseuse du définition et de critères diagnostiques précis [53].
bord médial d’une masse latérale de C1 témoignant de l’avul- On en distingue quatre types, selon l’axe de rotation et le
sion du ligament transverse, mais d’individualisation délicate type de déplacement (fig. 14) :
en raison de la superposition des dents. L’IRM peut objectiver • le type 1 ou luxation rotatoire à pivot central. Elle est stable
un hématome prévertébral et rétro-odontoïdien, mais surtout et fréquente (syndrome de Grisel) [5]. Il existe une luxation
une rupture du ligament transverse en plein corps ou à l’une rotatoire bilatérale des masses latérales de C1, le centre de
de ses insertions osseuses, notamment sur les coupes axiales rotation étant situé sur le processus odontoïde (fig. 15). Le
en écho de gradient [19]. ligament transverse et le processus odontoïde sont intacts.
Le traitement est chirurgical : fixation postérieure (greffe cor- Le traitement est fonctionnel (antalgiques, anti-inflamma-
ticospongieuse C1-C2 et crochets lamaires chez l’adulte, toires, myorelaxants, collier mousse, kinésithérapie dès que
laçage postérieur chez l’enfant). possible) ;
• le type 2 ou luxation rotatoire à pivot latéral. C’est le type le
Luxations et subluxations atlanto-axoïdiennes plus fréquent. Une seule des masses latérales de C1 se
rotatoires (instabilité rotatoire C1-C2) déplace en avant de la masse latérale correspondante de C2
(luxation unilatérale). Il existe donc soit une rupture du liga-
Cette lésion survient au décours d’un mouvement rapide de ment transverse (et un diastasis C1-C2), soit une fracture du
rotation de la tête (accident de la voie publique, gifle, sport processus odontoïde qui reste alors solidaire de C1 ;
de combat). Sa fréquence chez l’enfant s’explique par la • le type 3 ou luxation rotatoire à déplacement antérieur
laxité de l’appareil discoligamentaire et l’orientation horizon- associe une luxation antérieure d’une masse et une subluxa-
tale des facettes des processus articulaires. Certains facteurs tion antérieure de l’autre. Cette forme est rare et hautement
prédisposants ont été identifiés, notamment les infections instable ;
ORL et des voies respiratoires supérieures (syndrome de Gri- • le type 4 ou luxation rotatoire à déplacement postérieur.
sel) [5], les tumeurs de la moelle épinière, les lésions des Très rare et instable. Il s’agit d’une luxation postérieure d’une
muscles sternocleïdomastoïdiens et les suites de la chirurgie masse et une subluxation postérieure de l’autre, souvent
de la tête et du cou. Malgré une littérature abondante sur le associée à une agénésie du processus odontoïde.
20
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Autres fractures de C1
Fractures du processus odontoïde [5]. Pour certains auteurs, elle n’existerait pas (il s’agirait en
fait d’un centre d’ossification secondaire) ;
Ce sont les lésions les plus fréquentes du rachis cervical supé- • type II : fracture transversale du corps du processus odon-
rieur [24]. Elles résultent essentiellement d’un mécanisme en toïde, épargnant les masses latérales et le corps de C2. Elle
hyperflexion. Les lésions neurologiques immédiates sont représente le quart ou le tiers des fractures du processus
rares mais graves. Bien que certaines tétraplégies incomplè- odontoïde [24]. Elle est instable et à haut risque de pseu-
tes puissent régresser, les tétraplégies complètes à ce niveau darthrose en cas de traitement orthopédique (fig. 21 et 22)
sont immédiatement mortelles [24]. [49] ;
• type III : fracture de la base du processus odontoïde étendue
Classifications au corps ou aux masses latérales de C2 (fig. 23).
La classification de Roy-Camille (fig. 24) repose sur l’obliquité
La fracture est objectivée de profil et de « face bouche
du trait, introduit une notion de déplacement et d’instabilité.
ouverte ». Les reconstructions TDM sagittales et frontales pré-
Trois types de trait de fracture sont identifiés :
cisent les caractéristiques du trait de fracture et le déplace-
• type A (ou OBAR) : trait oblique en bas et en arrière, ten-
ment du fragment osseux. Deux classifications méritent
dance à glisser en arrière (fig. 22) ;
d’être retenues.
• type B (ou OBAV) : trait oblique en bas et en avant, ten-
La classification d’Anderson et D’Alonzo repose sur la topo-
dance à glisser en avant ;
graphie du trait de fracture (fig. 20) :
• type C (ou HTAL) : trait horizontal, glissement vers l’avant ou
• type I : fracture de la pointe du processus odontoïde par
vers l’arrière, voire alternativement dans les deux sens et par
arrachement des ligaments occipito-odontoïdiens. Le trait est
conséquent très instable, avec un risque majeur de pseu-
habituellement oblique, située au-dessus du ligament trans-
darthrose (fig. 21) [24, 56].
verse. Cette fracture stable est rare (moins de 5 % des cas)
[24]. Si elle survient chez l’enfant de moins de 8 ans, elle corres- Deux notions physiologiques sont nécessaires pour compren-
pond à un décollement apophysaire de l’ossiculum terminale dre l’évolution de cette fracture [24] : (1) la vascularisation du
processus odontoïde est difficilement interrompue car elle est
très riche, composée de deux courants verticaux antérieurs et
postérieurs anastomosés au niveau de l’apex du processus
odontoïde ; (2) en raison de la morphologie particulière de la
charnière occipitocervicale, le poids de la tête exerce une
pression physiologique vers le bas et l’arrière sur le processus
odontoïde. Cette contrainte explique la stabilité de certaines
fractures (trait oblique en bas et en avant) et l’instabilité des
autres (trait horizontal ou oblique en bas et en arrière). Le ris-
que de pseudarthrose et de cal vicieux est donc maximal avec
les fractures instables (types II et types A, C) (fig. 21 et 22).
Traitement
Les fractures stables relèvent du traitement orthopédique
(immobilisation par minerve Philadelphia et bandeau fron-
tal). Les fractures instables sont traitées chirurgicalement
(OBAR : vissage antérieur du processus odontoïde, OBAV :
fixation postérieure, HTAL en fonction du déplacement). On se
souviendra de la fréquence des lésions associées : fracture
bipédiculaire ou bi-isthmique de C2, fracture de l’arc posté-
rieur de C1, fracture de Jefferson, luxation rotatoire C1-C2 de
type 2, diastasis C1-C2 par rupture du ligament transverse.
Figure 20. Classification des fractures du processus odontoïde d’Ander-
son et D’Alonzo, basée sur la topographie du trait de fracture. Type I :
fracture de la pointe du processus odontoïde ; type II : fracture trans- Enfants de moins de 7 ans
versale du corps du processus odontoïde ; type III : fracture de la base
du processus odontoïde étendue au corps ou aux masses latérales de Les fractures du processus odontoïde, secondaires à une
C2. flexion brusque, passent par la synchondrose entre la base du
22
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Figure 21. Fracture du processus odontoïde de type 2C (trait passant Figure 23. Fracture de la base du processus odontoïde de type III (éten-
par le corps du processus odontoïde, de direction horizontale). Le due au corps de C2).
déplacement antérieur du processus odontoïde (flèches noires) est
responsable d’un rétrécissement majeur du canal rachidien (flèche
blanche).
Type A
Type B
Type C
Figure 22. Fracture du processus odontoïde de type 2A. Figure 24. Classification de Roy-Camille basée sur l’obliquité du trait
de fracture. Type A : trait oblique en bas et en arrière ; type B : trait
oblique en bas et en avant ; type C : trait horizontal.
processus odontoïde et le corps de C2 [4]. Le diagnostic diffé- • type I : fractures stables non ou très peu déplacées (anté-
rentiel avec une synchondrose non fusionnée n’est donc pas listhésis de C2 ≤ 3 mm ou angulation de C2 sur C3 ≤ 5˚), ce qui
toujours évident. On doit alors s’attacher à rechercher une traduit l’absence de lésion discale ou ligamentaire associée
angulation entre la face postérieure du processus odontoïde (ou simplement l’atteinte isolée du ligament longitudinal
et la face postérieure du corps de C2 sur le profil ainsi qu’un antérieur) (fig. 26) ;
épaississement de l’espace rétropharyngé. En cas de fracture, • type II : fractures instables très déplacées (antélisthésis
le processus odontoïde est généralement déplacé en avant et > 3 mm ou angulation de C2 sur C3 > 5˚) (fig. 27). Il existe une
basculé vers l’arrière. L’IRM présente un intérêt incontestable rupture du ligament longitudinal postérieur et une fracture du
pour diagnostiquer ce type de lésion. disque C2-C3 [9]. Le bâillement de l’espace intervertébral C2-
C3 peut être antérieur (traumatismes en extension) ou posté-
Fracture de hangman (« fracture du bourreau ») rieur (traumatismes en flexion) ;
• type III : fracture bipédiculaire avec luxation zygapophysaire
Cette fracture du « pendu » ou, plus exactement, du « bour- C2-C3. C’est une lésion très instable [9], souvent associée à
reau » (hangman), est secondaire à une hyperextension, une atteinte neurologique ;
celle-ci entraînant une fracture bilatérale des pédicules de C2 • type IV : fracture bipédiculaire avec fracture associée du pro-
et un antélisthésis du corps de C2 (par atteinte discoligamen- cessus odontoïde.
taire C2-C3) [57]. L’hyperextension forcée du cou se retrouve Quelques cas atypiques de fractures ont été rapportés [57] :
dans les accidents de la voie publique lorsque le visage entre détachement d’un fragment osseux corporéal postéro-inférieur
en premier en contact avec le pare-brise, avant le vertex. Par avec risque de compression neurologique, fracture asymétrique
contre, contrairement aux pendaisons, la distraction (qui est en raison d’une composante rotatoire associée emportant
responsable des lésions neurologiques) est remplacée par un d’un côté l’isthme radiologique de C2 et de l’autre, un coin du
phénomène de compression axiale due au traumatisme crâ- corps de C2, s’accompagnant d’un risque de lésion de l’artère
nien. Les lésions neurologiques ne sont donc pas fréquentes vertébrale [57].
du fait de la diffusion centrifuge des fragments osseux lors du Chez l’enfant de moins de 8 ans, le diagnostic radiographique
traumatisme. est parfois difficile en raison de la présence de la synchondrose
La fracture de hangman est peu fréquente (4 à 6 % des frac- [5]. La fracture bipédiculaire est considérée comme haute-
tures du rachis cervical) [57]. Dans la majorité des cas, il s’agit ment probable sur le cliché de profil strict si le bord antérieur
d’une fracture bi-isthmique, plus rarement d’une fracture du processus épineux de C2 est situé à plus de 2 mm en arrière
bipédiculaire ou biarticulaire (fig. 25) [24]. Ces fractures de la ligne spinolamaire. Rappelons que s’il est situé en avant
peuvent être stables ou non (tableau IX). Effendi classe ces de cette ligne, il s’agit d’une luxation C2-C3.
fractures en quatre types [58] : Les lésions associées sont fréquentes [57] : traumatisme crâ-
nien, fractures du rachis cervical moyen et inférieur, fractures
des membres et du rachis thoracolombaire. D’une manière
générale, le traitement est orthopédique (réduction par trac-
tion et immobilisation par minerve-corset) pour les lésions sta-
bles (type I) et chirurgical pour les fractures instables (types II
à IV), dont font partie les fractures à trait asymétrique.
Antélisthésis de C2 > 3 mm
Angulation de C2 sur C3 > 5˚
Luxation zygapophysaire C2-C3 associée
Figure 25. Différents types de fracture de hangman. Fracture associée du processus odontoïde
24
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Figure 26. Fracture de hangman de type I (non déplacée). Figure 27. Fracture de hangman de type II. Notez l’antélisthésis de plus
de 3 mm de C2 et le recul du processus épineux de C2 par rapport à la
ligne spinolamaire.
inférieur. Cette hyperextension est responsable d’une avul- Autres fractures du corps de C2
sion par le ligament longitudinal antérieur d’un coin vertébral
antéro-inférieur ou antéro-supérieur de C2 (et plus rarement Elles sont rares et n’ont rien de spécifique. Le scanner et
de C3). Celui-ci possède une forme de larme sur le cliché de surtout les reconstructions multiplanaires précisent les carac-
profil, d’ou le nom donné à cette fracture (fig. 28). Contraire- téristiques du trait de fracture et le déplacement du ou des frag-
ment aux « tear-drop » lésions en flexion, cette lésion est sta- ments osseux. On distingue les fractures à trait vertical frontal
ble car il n’existe pas d’atteinte des colonnes moyenne et dont l’image radiologique peut parfois faire évoquer une frac-
postérieure, donc pas de déplacement de la vertèbre atteinte ture de hangman, et les fractures à trait vertical sagittal.
[49]. Signalons que cette lésion peut survenir à tous les éta-
ges du rachis cervical mais est beaucoup plus fréquente en C2.
Lésions traumatiques du rachis cervical
inférieur (C3-C7)
26
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
A B
Figure 32. « Tear-drop » fracture de C4. Notez le rétrolisthésis de C4, le bâillement des articulations zygapophysaires C4-C5 (A) et, en scanner (B), la
fracture en T (association du trait de refend sagittal trans-corporéal et du fragment osseux triangulaire antérieur).
du disque intervertébral) (fig. 34). Elles sont secondaires à La clinique (cervicalgies) n’est pas spécifique. Par contre,
un mécanisme en hyperflexion et en compression (l’hyper- l’association d’un tableau d’entorse cervicale grave et d’une
flexion pure entraîne une luxation zygapophysaire bilaté- névralgie cervicobrachiale sensitivomotrice ou d’une atteinte
rale). Elles s’observent lors d’accidents automobiles, sportifs médullaire complète ou incomplète doit faire suspecter une
(sujets jeunes) et au décours de chutes domestiques (sujets hernie discale post-traumatique et conduire à la réalisation
âgés). Dans ce dernier cas, elles siègent électivement à l’étage d’une IRM. Cette complication peut d’ailleurs ne se révéler
immédiatement adjacent (sus- ou sous-jacent) à celui d’une qu’après le traitement chirurgical (abord postérieur ne per-
discopathie arthrosique car la mobilité est réduite à cet mettant pas de la détecter) [26].
étage. C’est l’atteinte de la colonne moyenne, laquelle n’a Sur le cliché de profil initial ou sur le profil en flexion réalisé à
aucune tendance à la cicatrisation spontanée, qui autorise la distance (25 % des cas), cette entorse grave se traduit par
subluxation vertébrale (antélisthésis) et fait la gravité de la des signes directs et indirects (tableau XI) (fig. 34 et 35) [59].
lésion. En fait, les deux signes les plus importants sont les critères de
Tableau XI : Signes radiographiques directs et indirects d’entorse cervicale grave en flexion. Les deux signes italiques sont les critères
de Yales. Leur présence témoigne d’un rachis déstabilisé.
28
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Figure 34. Entorse grave en flexion : antélisthésis > 3,5 mm (a), angu-
lation > 11˚ (b), découverture > 50 % de l’articulaire supérieure de la
vertèbre sous-jacente, augmentation de l’écart interépineux.
Lésions en extension
30
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
caractéristiques au sein des parties molles antérieures : importante car elle impose de débuter par un abord chirurgi-
hématome, rupture ligamentaire, discale ou même durale cal postérieur (ablation du massif articulaire fracturé puis
(fig. 7). Le traitement est chirurgical : arthrodèse par voie ostéosynthèse) qui permet de réduire le déplacement.
antérieure.
Lésions en rotation
Luxation-fracture biarticulaire en extension
Il s’agit d’une lésion rare (moins de 2 % des cas) et complexe, Les trois lésions en rotation ci-dessous présentent un aspect
mais importante à diagnostiquer d’un point de vue thérapeuti- radiologique univoque important à reconnaître : l’olisthésis rota-
que car elle doit obligatoirement amener à un abord chirurgical toire, qui traduit la rotation vertébrale unilatérale (voir ci-après).
initial postérieur. On peut observer deux aspects radiographi-
ques (fig. 40) : Luxation zygapophysaire unilatérale isolée
• (1) la poursuite du mouvement d’hyperextension est res-
Elle est secondaire à une flexion-rotation controlatérale res-
ponsable d’une atteinte sévère et bilatérale des massifs arti-
ponsable d’une atteinte unilatérale de la capsule articulaire
culaires qui se fracturent (fracture-séparation), donnant un
aspect radiographique évocateur de lésion en extension (exa- zygapophysaire et du complexe ligamentaire postérieur. Elle
gération de la lordose cervicale) ; siège de préférence en C6-C7. Le processus articulaire infé-
• (2) dans un second temps (après la fracture-séparation), il rieur de la vertèbre lésée vient se placer en avant (variante
peut se produire une flexion spontanée du rachis cervical dos à dos) (fig. 41) ou au-dessus (variante pointe à pointe) du
causée par le simple poids de la tête entraînant vers l’avant processus articulaire supérieur de la vertèbre sous-jacente.
les articulaires postérieures fracturées. Ce mécanisme est à Dans la luxation zygapophysaire unilatérale, il existe une
connaître car il explique l’aspect radiographique trompeur en rotation vertébrale de 30 à 45˚ [11]. L’atteinte discale est fré-
flexion de certaines de ces luxations-fractures en extension. quente (67 % des cas) [29].
Les éléments en faveur du mécanisme d’hyperextension sont Il existe donc un risque de rétropulsion de fragments discaux
la présence de lésions faciales cutanées, de lésions articulai- dans le canal vertébral lors de la réduction avec possible
res postérieures sévères et bilatérales, de multiples fractures aggravation neurologique brutale, faisant préférer par cer-
des processus épineux et la difficulté à réduire ces lésions par tains [48] l’exérèse discale par voie antérieure. Par contre, le
traction. En effet, les deux massifs articulaires postérieurs foramen intervertébral ipsilatéral à la luxation est fortement
sont isolés et ne peuvent, par conséquent, se réaligner. rétréci, expliquant la symptomatologie radiculaire fréquem-
Devant un aspect de luxation zygapophysaire ou de luxation- ment associée. Le diagnostic se fait sur les radiographies stan-
fracture, la constatation de lésions des massifs articulaires est dard. On retrouve :
A B
Figure 41. Luxation unilatérale C3-C4 avec signe du « bonnet d’âne » (dédoublement brutal des processus articulaires postérieurs) (flèches) et anté-
listhésis modéré en radiographie (A). Notez la perte de contact des surfaces articulaires en scanner ainsi que la rotation des processus épineux du côté
de la luxation (B).
• un signe du « bonnet d’âne » traduisant le dédoublement – fracture du processus articulaire supérieur de la vertèbre
brutal, sur le cliché de profil, des processus articulaires posté- sous-jacente à la luxation, dont le fragment supérieur est
rieurs (assimilés aux oreilles du bonnet) ; déplacé vers l’avant par le processus articulaire inférieur de la
• un aspect de I de l’ensemble des vertèbres sus-jacentes à la vertèbre traumatisée (cas le plus fréquent).
lésion sur le cliché de profil ; – fracture du processus articulaire inférieur de la vertèbre
• un olisthésis rotatoire [59] : déviation d’un processus épi- luxée, dont le fragment inférieur reste solidaire du processus
neux sur le cliché de face, antélisthésis modéré (voisin du articulaire supérieur de la vertèbre sous-jacente.
tiers du plateau vertébral) sur le cliché de profil, bâillement – association des deux fractures précédentes (fracture biarti-
uncovertébral unilatéral et homolatéral à la lésion sur les cli- culaire unilatérale).
chés de I. Parmi ces signes, seul le bâillement uncovertébral • La fracture-séparation du massif articulaire. Il existe un
unilatéral est pathognomonique de l’olisthésis rotatoire trau- double trait de fracture (fracture antérieure pédiculaire, frac-
matique ; ture postérieure lamaire) isolant complètement le massif arti-
– une projection du processus articulaire inférieur de la culaire du reste de la vertèbre. Ainsi libéré, le massif articu-
vertèbre sus-jacente en avant ou au-dessus du processus laire s’horizontalise en basculant de 30˚ vers l’avant et le bas
articulaire supérieur sous-jacent sur les clichés de trois- [11]. Le diagnostic (fig. 42) se fait sur le cliché de face (aspect
quart. de « massif carré de Judet » : massif horizontalisé, de forme
Le scanner retrouve la perte de contact des surfaces articulai- carrée, déplacé latéralement), de profil (signe du double
res ainsi que le bâillement uncovertébral unilatéral. Il précise contour résultant de l’absence de superposition des deux
le degré du rétrécissement foraminal et recherche les lésions facettes articulaires, le bord postérieur de l’articulaire fractu-
osseuses associées, parfois difficiles à mettre en évidence sur rée se projetant en arrière de celui de la vertèbre intacte) et
les clichés radiographiques. de I (baillement uncovertébral unilatéral, pathognomonique
de l’olisthésis rotatoire).
Luxation zygapophysaire unilatérale associée
La fracture simple et la fracture-séparation du massif articu-
à une fracture des processus articulaires
laire sont très fréquentes et peuvent s’observer de manière
Argenson et Saillant distinguent deux groupes lésionnels : isolée, sans luxation zygapophysaire associée. Leur mécon-
• La fracture simple du massif articulaire dont il existe trois naissance laisse évoluer une instabilité avec un risque neuro-
variantes : logique secondaire.
32
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
A B
34
E.-L. Glaude et al.
2 mise au point
Lésions traumatiques du rachis cervical susceptibles d’entraîner une apnée avec anoxie qui majore
chez l’enfant les lésions cérébrales. Ces lésions médullaires sont donc
généralement associées à des signes cliniques sévères et à un
À partir de l’âge de 10-12 ans, l’anatomie et les lésions trau- pronostic catastrophique sur le plan cérébral. Lors de l’évalua-
matiques du rachis cervical de l’enfant deviennent similaires tion IRM d’un enfant suspect de « shaken baby » syndrome, il
à celles de l’adulte. Par contre, avant cet âge, la majorité des importe donc d’étudier au moins l’étage cervical de la moelle
traumatismes concernent le rachis cervical supérieur en rai- épinière (fig. 43).
son notamment de la plus grande laxité ligamentaire de cette
région [4] : SCIWORA, luxation occipito-cervicale, fractures de Syndrome de l’enfant battu
C1, luxation rotatoire atlanto-axoïdienne, luxation atlanto- (syndrome de Silverman)
axoïdienne antérieure, fracture du processus odontoïde et
Dans le syndrome de l’enfant battu, le mécanisme est moins
fracture bipédiculaire de C2. En effet, chez l’enfant, le pivot de
univoque, mais l’énergie cinétique mise en jeu est souvent
la mobilité du rachis cervical est situé en C2-C3 alors que chez
majeure, avec projection de l’enfant à distance, et peut être
l’adulte, il se situe en C5-C6.
responsable de rupture ostéodiscale avec dislocation rachi-
Sur le plan histopathologique, les lésions corporéales attei-
dienne. Ici aussi, il s’agit de formes cliniques gravissimes,
gnent préférentiellement l’os sous-chondral, zone de crois-
voire de constatations autopsiques. Certaines lésions sont
sance à la fois fragile et très vascularisée (avec donc un bon
caractéristiques de ce type de traumatisme :
pronostic de consolidation). Ces lésions passent facilement
• arrachement d’un processus épineux ;
inaperçues sur les clichés standard mais sont très instables. Il
est donc d’autant plus important de s’attacher à évaluer l’har- • fracture des synchondroses neurocentrales ;
monie de courbure cervicale et de rechercher un gonflement • fracture-enfoncement d’un plateau vertébral avec réduction
des parties molles. de l’espace intervertébral ;
La réalisation pratique du bilan radiologique cervical chez • hématome épidural ou sous-dural cervical isolé.
l’enfant nécessite certaines précautions et son interprétation
se heurte au problème d’un rachis partiellement ossifié. Ainsi,
l’incidence de l’odontoïde de face bouche ouverte n’est pas
indiquée chez les enfants de moins de 9 ans car elle n’est pas
performante. En raison des limitations des radiographies
standard et de la nécessité courante de scanner cérébral, le
bilan du rachis cervical est le plus souvent réalisé au scanner.
L’IRM, qui nécessite généralement une sédation en dessous
de 7 ans, est précieuse pour diagnostiquer des lésions disco-
ligamentaires instables, non visibles sur les radiographies. À
l’inverse, il faut tenir compte de l’importante laxité physiolo-
gique chez l’enfant, majorée par les troubles de vigilance, qui
peut être à l’origine d’images impressionnantes de pseudo-
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