La Résolution de Structure

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Figure 5 - Monocristal vue en transmission sous lumière normale (a) et canne de réfrigération pour travailler à la fois à basse

polarisée (b). température et sous atmosphère inerte (figures 6b et 7).

Nous nous servons du phénomène de biréfringence pour


La résolution de structure
faire une première sélection parmi les cristaux synthétisés et
déterminer visuellement les monocristaux les plus adaptés à la Les taches de diffraction observées correspondent à
mesure. l’ensemble des directions des vecteurs k′ satisfaisant les
conditions de Laue (voir précédemment). Dans l’espace du
La technique réseau réciproque, on définit une sphère de rayon 1/λ centrée
sur le cristal, appelée sphère d’Ewald. Selon la direction de
Le cristal sélectionné est monté sur le diffractomètre,
diffraction par rapport au réseau du cristal, la sphère d’Ewald
soit à l’aide d’un lasso (figure 6a), soit à l’aide de pâte à
intercepte différents nœuds du réseau réciproque. À chaque
modeler pour les plus gros monocristaux (de l’ordre du
cm) (figure 6b). L’ensemble est fixé sur une tête coïncidence, le vecteur de diffusion K est égal à un vecteur n∗
goniométrique, ce qui va permettre de faire tourner le du réseau réciproque et il se forme alors une tache de diffraction
cristal dans les trois dimensions et ainsi de faire varier dans la direction correspondante (figure 8).
Le traitement numérique des positions observées des taches de
l’angle θ. Si le cristal est sensible à l’air, on l’insère dans
diffraction et de leurs intensités permet de remonter
un tube capillaire rempli de sa solution mère afin d’éviter
à la structure complète de la molécule. Il faut donc enregistrer un grand
tout contact avec l’oxygène et l’humidité de l’air. On peut
nombre de taches pour couvrir au maximum l’ensemble des directions
également envoyer un flux d’azote liquide grâce à une
de diffraction.
Enseignement et formation

1 mm

Canne de
réfrigération
Faisceau R X

Monocristal

Goniomètre

Caméra CCD
b

Figure 6 - Monocristal monté sur un lasso (a) ou sur de la pâte à modeler (b) sur le diffractomètre.

Rayons
émergents

k'
K
Rayons
incidents

1
k = k' =
λ

Figure 7 - Vue d’ensemble du dispositif. Figure 8 - Sphère d’Ewald et vecteur de diffusion K.


La distribution des taches de diffraction permet de directions de l’espace,
caractériser les paramètres de maille (a, b, c, α, β, γ), et donc de - déterminer la maille élémentaire en enregistrant
déterminer la nature du système cristallin ainsi que le groupe environ dix images,
d’espace. De l’intensité des différentes taches lumineuses, on - acquérir les données complètes,
déduit le module du facteur de structure, ce qui permet de - traiter numériquement les mesures,
remonter à la structure du motif de diffraction. Toutefois, - générer le fichier des informations cristallines («
l’information liée à la phase du nombre complexe est crystallographic informations file », appelé fichier CIF).
inaccessible en pratique, c’est ce que l’on appelle le problème L’avènement de l’informatique a permis de
des phases. La résolution n’est donc possible que parce que le considérablement optimiser cette technique. Là où il y a 40
système est surdimensionné, c’est-à-dire qu’il y a plus ans il fallait un an pour déterminer une structure
d’équations (qui sont ici les intensités diffractées) que relativement simple (une dizaine d’atomes), nous pouvons
d’inconnues (les coordonnées de chaque atome dans la maille et aujourd’hui résoudre une structure par jour pour des
leur nature). Dans le cas de petites molécules, la quantité molécules de plusieurs dizaines d’atomes. Les structures
d’informations mesurées (intensité et position des taches) est plus complexes comme les protéines nécessitent toujours
suffisante pour s’affranchir de ce problème via des calculs directs un travail plus approfondi et des diffractomètres présentant
ou la méthode de Patterson. Ces modes de traitements certaines spécificités.
permettent d’associer aux figures de diffraction observées des L’ensemble des étapes de résolution d’une structure,
cartes de répartition des densités électroniques qui reflètent la ainsi que différentes animations et illustrations en trois
topologie structurale sans qu’apparaissent les liaisons chimiques. dimensions sont disponibles en ligne*.
L’association de cette topologie à la nature et la position des
atomes présents dans la maille se fait grâce à des logiciels de
représentation graphique.
Conclusion
L’exemple présenté figure 9 montre comment on peut La diffraction des rayons X est une technique très
ainsi dessiner en trois dimensions la structure d’une puissante car elle permet de déterminer la position
molécule constituant un motif cristallin. atomique, mais très lourde car elle nécessite l’obtention de
Enseignement et formation monocristaux. À l’heure actuelle, différents groupes de
recherche dans le monde résolvent des structures à partir
de poudres cristallines et non de monocristaux. Cependant,
à l’inverse d’une mesure faite sur monocristal dont on peut
aisément extraire la structure, dans le cas des mesures sur
poudre le travail de traitement dépend de nombreux
paramètres dont l’issue n’est pas prévisible. Cette
technique n’est pas encore utilisable pour la résolution de
structures trop grosses, même s’il est aujourd’hui possible
de résoudre des structures comptant 55 sites
cristallographiques. Elle n’en est donc plus à ses
balbutiements mais en développement constant, ce qui
montre que la cristallographie, loin d’être une science morte
traitée de manière routinière, est au contraire une science à
part entière au service de différentes communautés de
scientifiques.
Une autre technique de diffraction est également employée sur
les poudres : la diffraction électronique à haute résolution. Dans ce
cas, il est possible de résoudre des structures à partir de
Figure 9 - Structure complète d’une molécule de type nanoparticules. Le problème de l’obtention de monocristaux se
catéchol.
En gris : atomes d’hydrogène ; en blanc : carbone ; en rouge :
pose donc de moins en moins, même si cette technique est
oxygène ; en bleu : azote. réservée à quelques spécialistes. C’est en tout cas une perspective
pour accéder à la structure cristalline des solides qui reste une
étape indispensable à tous pour comprendre des propriétés
Il faut alors avoir un avis critique sur la qualité de physico-chimiques.
la mesure en comparant les facteurs de structure Toutefois, cela ne s’applique qu’aux composés cristallins.
observés (Fo) et calculés (Fc). Pour ce faire, on Aussi, des techniques de résolution à partir de poudre amorphe par
cherche à minimiser l’écart R(F) qui doit atteindre mesure RMN sont en voie de développement mais nécessitent
environ 5 %. encore l’utilisation des paramètres mesurés par diffraction des
rayons X. De plus, les séquences RMN ne sont pas encore
∑ F0 – Fc systématiques et chaque nouveau composé est un nouveau défi à
R F( ) = -------------------------------- relever qui, là encore, reste l’affaire de spécialistes. La contrainte
∑ F0 est cette fois d’avoir au sein des édifices à caractériser de noyaux
détectables en RMN, et la restriction réside ici dans le fait que
Il est bien entendu nécessaire de toujours garder
seules les interactions à courtes distances sont prises en compte,
un sens chimique pour discuter de la vraisemblance
rien n’étant mesuré à longues distances.
des agencements de la structure déterminée.
Le développement de ces techniques, si pointues soientelles,
En résumé, les étapes de résolution complète permet aux utilisateurs de garder l’espoir d’avoir des résolutions de
d’une structure sont les suivantes : structure sur des systèmes de plus en plus complexes. Cependant,
- sélectionner un cristal de bonne qualité, elles ne permettront certainement pas au plus grand nombre de
- centrer le cristal pour pouvoir explorer toutes pouvoir résoudre seuls leurs problèmes structuraux.
les Aussi la détermination des structures par diffraction des rayons
X sur monocristaux peut être vue comme une étape vers des

l’actualité chimique - novembre 2010 - n° 346 27


techniques encore plus performantes, mais surtout, elle n’est
plus réservée aux seuls cristallographes. L’automatisation
des appareillages ainsi que leur puissance de détection font
qu’il est maintenant possible de se former à cette technique
avec un minimum de connaissances théoriques. Alors que
cette matière est trop souvent présentée comme ardue et
nécessitant une bonne vision dans l’espace, tous les
chimistes et physiciens peuvent actuellement se former à la
cristallographie et résoudre de manière autonome beaucoup
de leurs propres structures • ce qui est toujours très
satisfaisant.
Il est donc aujourd’hui possible pour ceux qui s’en
donnent la peine, d’apprendre comment en partant d’un
cristal, on arrive à une visualisation tridimensionnelle des
édifices atomiques.

*http://culturesciencesphysique.ens-lyon.fr/XML/db/csphysique/metadata/
LOM_CSP_Diffraction-rayons-X-techniques-determination-structure.xml
http://cdalpha.univ-lyon1.fr

Christophe Aronica
est enseignant en classe préparatoire intégrée de
l’École Supérieure de Chimie Physique
Électronique de Lyon*, ancien agrégé préparateur
de l’École Normale Supérieure de Lyon.

* Lycée des Chartreux, Classe préparatoire intégrée à


CPE Lyon, 8 place Abbé Larue, F-69005 Lyon.
Courriel : christophe.aronica@gmail.com

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