Cahiers Archeologiques 7 1954
Cahiers Archeologiques 7 1954
Cahiers Archeologiques 7 1954
ARCHÉOLOGIQUES
FIN DE L’ANTIQUITÉ ET MOYEN AGE
P U B L IÉ S PAR
v u
Contributions de :
C n . P ic a r d — A . G rabar — J. et O . P a c h t — B . de M o n t e s q u io u - F e z e n s a c
PARIS
IMPRIMERIE N A T I O N A L E
LIBKAI&IE C. K L I N O C S I E C K
M CM LIV
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Institut für Syrortffvttîk
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n o u ^ r 'a ü s c î i o r h i i o l d s 'a
LE TRÔNE VIDE D ’A L E X A N D R E
DANS LA CÉRÉMONIE DE CYINDA
CHARLES PICARD
(l) La cérémonie de Cyinda n’était pas connue de M M* Jeannine A v b o y e r , lorsqu’ elle fit paraître,
en 1 9 h 9, son im portante étude : Le cuite du trône et son symbolisme dans l ’Inde ancienne; cf. p. 6 9 -6 6,
notamment. J’ai signalé la lacune : Moissons de Vesprit, P. U. F ., novembre 1 9 5 o, à l’ occasion de la remise
à l'auteu r du livre d ’un des prix Paul Pelliot. Je ne pense pas, pour ma part, qu ’il y ait eu des
influences indiennes dans la cérémonie organisée à Cyinda (avec une mise en scène purement grecque),
malgré ce que dit M M* A l b o ï e r , Hist, gén, des civilisations, t. I, 1 9 5 3 , p. 6 0 a . Je croirais plutôt à un
mouvement d ’ influences inverse; on en jugera d ’après la longue histoire du trône vide en Grèce,
rappelée ci-après. Cf.. pour le culte du trône dans un tabernacle, A . A l f ö l d i , Die Gesch. des Throntaber~
,
nalcels, in La Nouvelle Clio, n. 10 , décembre 1 9 6 0 , p. 5 3 7 - 5 5 6 .
(ÎJ Hélène D a n t i u n e , Slèl. syriens li. Dussaud II, 1 9 8 9 , j). 8 5 7 -8 6 6 . On n’ oubliera pas, d ’ailleurs,
q u 'il s’agit d ’ un fait religieux prim itif assez général : cf. G. F r a z e r , Gold Bough, 3 * edit., I, 36 5 .
(3) Sur les Kudurru, par exemple. Cf. toute la documentation rassemblée par H. Danthine, /. L ;
et l'on ajouterait déjà beaucoup.
1
CA H IER S A l t a i KO LO G iO U KS
l ’n trône vide, par exemple, dans les hiéroglyphes hittites, paraît employé pour évo
quer le siège déposé dans le sanctuaire où l ’esprit de l’aïeul divinisé était censé trouver sa
demeure d éternité.
Nous n’avons pas ici à utiliser ce matériel asiali<|ue de documentation et d’études.
Non plus, au moins en détail, celui que nous fourniraient les siècles des Préhellènes
égéens.
Dans un traité récent j ’ai brièvement signalé, d’ailleurs, ce qu’eût pu fournir à
notre attention la religion créto-mycénienne. Il résulte des fouilles de Cnossos, par exemple,
q u ’on est tenté de faire remonter ju squ’à celte date certain symbolisme du trône. La
célèbre « Salle du trône” , à Cnossos (pl. L 1), n’a peut-être pas été seulement une simple
salle de réunion, pour le conseil des Minos, ainsi que le sera plus tard, en Grèce achéenne,
le megaron princier. Le local secret de Cnossos a des aspects significatifs d'adyton, avec ses
annexes, sa prétendue «salle de bains » aménagée en contrebas du niveau, où l’on accède
par un escalier coudé, dissimulant aux vues, dès l’entrée, l’intérieur du local. On a pu pra
tiquer là certains rites de purification, rites pour lesquels les Cretois restèrent spécialistes
en Grèce, ju sq u ’en pleine époque classique Jadis, la présence des griffons affrontés
autour du «Trône de Minos» — animaux de l’au-delà peints à la détrempe, et symétrique
ment, devant un paysage qu’on dirait «élyséen» — formait un encadrement révélateur, le
griffon pouvant passer pour gardien du trône vide, près duquel il est en faction sacrée,
comme il est enchaîné ailleurs à la colonne divine
Organisé ainsi peut-être, comme il semblerait, dès l’époque «minoenne», le symbolisme
du trône vide s’est transmis en Grèce, dans les pays «achéens^. On connaît à Mycènes et
ailleurs le culte des sièges sacrés, v des parfois, mais où les divinités viennent à l’occasion
s’asseoir pour recevoir des offrandes Les exemples pourraient être multipliés.
Or la religion continentale des Achéens, à l’époque dite «mycénienne», a utilisé fré
quemment les figurines en argile, ex-voto de piété populaire, qui représentent des divi
nités assises sur un vaste trône où leur image, trop petite, paraît parfois disproportionnée.
On constate que ces sièges monumentaux, à l’occasion, sont représentés aussi vides
(l) Lex religions préhelléniques, dans Mana : Introd. à Vhistoire des religions, II, 1, 19 A8. On se reportera
encore à W. R e i c h e l , Ueber vorhell. Goellerkulte, 1897, p. 3 et suiv.
ir> Mana, I. !.. p. i o 4 , p. i 5 8 .
<S) 1Mana, ibid., p. 8 5 . Le trône de Cnossos était encastré dans le m ur de la salle. Du culte sym bo
lique du trône semble pouvoir se rapprocher, chez les Cretois préhellènes, le culte des armes, l’ hoplo-
latrie d'Iîan os et des légendaires Dactyles, Telchines, etc.; cf. Mana, p. i 5 8 , 1 9 9 (cultes du sceptre
et du bouclier); sur le culte du sceptre, S. Eithkm, From the collect. Ny Carhbtrg Glypt., 3 , 19^12,
p. 1 8 9 - 2 0 1 . S u r les signes du trône et du sceptre associés, dans l ’écriture mînocnrte (linéaire ß),
cf. \. Evans, Palace, IV, 2, p. 6 7 0 et p. 6 8 6 et suiv.
(4) Mana, p . 1 î 2 : grand anneau d ’or de Tirynthe, avec un oiseau représenté derrière le trône de
la déesse assise: eel e-n, élevant le rhyton en cornet, s’apprête à recevoir les libations de quatre génies
anim aux; cf. Athen. Mitt., 5 5 , 1930., p. 1 2 1 , pl. 11, 1. De là dérivera à l'ép o q u e hom érique, déjà,
puis aux temps du classicisme, la coutume des offrandes placées d e w èv -yomnai, sur les genoux
des dieux et dans le giron des déesses ♦L. W e n i g e m , Sokrates, II, 1 9 1 4, I, a - 3 .
(5) Mana, I. I., p. 2 ^ 7.
J.B TRONE V IDK !)’\I,KX\NURB KT I.K CULTB »V Tlil')NK M D B
De telles figurations ont été certainement intentionnelles et divines, quoi qu’on ait voulu
prétendre
Il suffit, pour en être convaincu, de considérer les survivances retrouvées, à l’époque
préarchaïque, <;à et là : en Grèce, en Anatoüe, de la région de Troie à la Laconie. Le trône de
nierm ès Perphéraeos à Aenos (Thrace), sur lequel se dressait parfois, grêle et archaïque,
l’idole-pilier de l’Hermès vénérable dont l’auteur aurait été Ëpeios, le'constructeur célèbre
du Cheval de Troie, est parmi les premiers monuments de culte encore visibles, attestant la
persistance du symbolisme du trône - Nous en avons gardé de précieuses images, grâce
à la numismatique. On a pu légitimement penser à un trône analogue, qui aurait existé au
Sanctuaire des Gab ires de l’île sainte, à Samothrace, lieu sacré où la cérémonie du ßpoviTpos
faisait, semble-t-il, partie, comme peut-être ailleurs, des rites d’initiation locaux — .
Si l’on va du Vord au Sud jusqu’à la Laconie, le ?rTrône» monumental d’Amvclae, près
de Sparte — tout un vaste complexe d’édifices, sculpté d i haut en bas par Bathvclès de
Magnésie vers 53o av. J.-C., avec une profusion décorative très ionienne, orné spéciale
ment de merveilleuses et rares légendes d’immortalisation par enlèvements — constitue 1111
document des plus curieux sur la symbolique du trône vide. II s’agissait d’un vaste ensemble
architectural ; au centre se dressait la statue-xonaon de l’Apollon Amyclaeos, debout, armé,
dominant la tombe du jeune héros Hyacinth s, son favori, enseveli au secret du lieu
saint Mach tel d T. Mellink a montré le caractère symbolique et funéraire en général du
Sanctuaire et de l’association culturelle Apollon-Hyacinth s; pour eux ont été célébrées
sur place, très longtemps, les Hyacinthies, fête dorienne exportée aussi un jour en Grande-
Grèce, et d’une significative popularité chez les Doriens. Les papyrus magiques d'Egypte
font encore allusion à l’apprêt de trônes pour A pollonf,i.
Le trône de Danaos conservé pieusement à l’Agora d’Argos, selon Pausanias. celui
E,) En te sens, F r. P oilsen, Oraklet l Delphi, 1 9 18 , ]>. 6 1, qui exprime un a\is raisonnable. A tort,
contra, M. P. N i l s s o n , Gesch. gr. Religion, p. 2 6 6 , n. 1. On a trouvé au sanctuaire dit ctMarmariaw,
à Delphes, un dépôt de figurines de type mycénien, avec divinités trônantes, et trônes vides : ces
ex-voto d'aryile étaient rassemblés principalement sur une pierre plate, ou aux entours : R. Demangel,
Fouille* Delphes, Topogr. du Sanctuaire [d’Athéna Pronaia], 1 9 -26.
Ch. P ic a h d , Rev. numumat., 19 h 9, p. i et suiv. (avec étude du texte de Callim aque, R. Pfeiffer,
\ir}yij<T£ts, Oxford, 1 9 ^ 9 , sur le caractère m agique du xoanon d'E peios); J. Bousquet, MH. Ch.
Picard, Rev. arch., I, 19 ^ 8 , p. i o 5 - i 3 l ; CaUitiuiffite t Hérodote et le Trône de l Hermès de Samothrace ;
Léon L a c r o i x , Les reproductions de statues sur les monnaies grecques, Liège, 19/19, P- 4 4 - 6 8 , pl. I, II, III ;
en général, sur A. nos, J. M. F. May, Ainos, its history and coinage 674-361 B. C ., Oxford, 1 9 6 0 .
J. B o u s q u e t , I. I , ci-dessus, n. 3. — Bengt H e m b e r g , dans son excellent livre, Die Kabtren, i g 5 o,
n ’a guère apporté d ’ enseignements là-dessus (volontairement : cf. p. 8) : ce qu'on pou ira tout de
même regretter.
E . B u sc h r et W. v o n M a s s o w , Athen. Mitt., 5 a, 1 9 3 7 , p. i - a o 5 , pl. I-XX 1II ,e t B tiL , pl. I-XII (avec
la bibliographie des fouilles et trouvailles antérieures) : Ch. P ic a r d , Acropole, 1 9 9 9 , p. 2 0 6 -3 3 3 .
Pour les m onnaies, Léon Lacroix, ci-dessus n. s (monnaies d e S p a r te , p. 5 4 - 5 8 , pl. I, îG, etc.).
£j) Hyakinthos, 1 9 ^ 3 , U trecht; cf. p. 1/19 et suiv. — L ’Apollon des monnaies d'Am yclae est une
œuvre caractéristique de l’ époque géom étrique : F. M a t z , Gnomon, i 3 , 1 9 8 7 , p. /108.
(uî S. E itrkm, l. i , p. a o i . — Trônes vides des Dioscures : J. B a b e l o n , Mél.Ch. Picard, 19/48, I, p.a i
et suiv. (cf. % . 1, p. a ß , 09 : ibid., 11. a pour les suites byzantines).
CAHJKKS A H CH K O LO G IQ U K S
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xat noXXîjv evvotav êv rots nysfiicrt npbs êavrbv xarsa-xsjacrev. A fia Se xat rrjs x arà r ov
ßacrtkéa §s t<rtSatfxovtas è\‘tayvovvijs àyaQwv ekniSoJv dnavres ênXripoüvro, x a B d n e p Beov
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Kvfiévïjs rfSrj crvvteïs rüv àpyvpaant'Scov àpyofisw v vscorept%stv, àXXà firjv [xaï] *Avrtyêvovs
xai T evrdfjiov, o? a-rpanjyoi roirtov %<rav.> vixepr\^dws npbs aôrov Staxetfiévcov xat ßaSt%stv
ên\ rt)v (7xtjvyv avrov xaroxvouvrcov, <jvyxaXé<ras r ovs vye[xCvas êvvnvtov styri ^tovro SeCrepov
êcopaxevai SianetXo'Sfxevov, si fxt) neto-deiijyisv, xotvbv dnamv eaeaOat xtvSvvov. Hv Sè ’AXétjav-
Spos o ßaeriXevs êv fxéa-ù) crrparonéSa npoxaB^ycevos êv erxtivrj, axrjnrpov £x'xW> XP^fJLaTl'^'xW
dnatrt * xai Si) npo&era^e rots vyefx6<rt, (xv$èv rwv xotvtfv xai ßaatXixvv Sioixetv £$'*) rr}s
ßaaiAtxijs axtjvrjs xai xaXeîv ravrtjv \xôvr\v ’AAeÇdvSpov crxijvrfv.
ïlpocrexuvtiaav oi MaxeSôves rhv 3AXéçavSpov xat crweSovAsvaot.v êx r$v ßa<rikix$>v yjprtyidr^v
(7Xïfvj)v x a ra a x sv ia a t ßacriAixriv xai Bpovov yjpvaovv ßacrtktx^s xsxoafxrifisvov ênt Sè toutou
Xpv&ovv (Txétyavov iypvta $ta$ri(ia ßacrtAtxov, xai n apà rbv ôpôvov 6nXa xat fxécrov (jxijnrpov
xai n p j r ou Opôvou rpansÇav yjpvrjt\v ' ênt Sè r a lr rjs êcr^aptSa xai \i€avù>Ti$a ^pvarjv xat
Xi€avù>rbv xat dvfjudfiara ev'J^rj * àXXà fitjv xai SKppous dpyvpovs êv rrj axrjvî} * ê$? gov oi
nâvTES yys{i6ves ßovXeuotvro nept rvv xotvcov npayfxarwv. T aî/ra fxèv Sr) xare&xevda-avro.
JZCixévïjs Sè t r)v avrov axrjvt)v rjye.pe n apà rrtv AAe^dvSpov xat oi aXXot vyspi'ïvss èÇe^tjs.
Ourto t$ï) (Tvvé£atvev rbv Eyfxévrj si<rt6vra n avras êxetvovs ^yeyiôvas vnoSe^£TÔxtf fteô’ &v
*Avrtyévr}s xai Tevraytos, oi arparyyo) r$v àpyvpaant'Scov, ê€d$tZov, r ü pèv spyço n p ls
E ùfj.évtj, t i} Sè ripp npbs ’AXé^avàpov.
tlJ 1*. ex. : W . K b o ll, I*. \V. Suppl. R. E ., 5 , 5 i 8 ; Lily lïoss T a v lo r, J. //.£., Ä7, 193 7, p. 53 , el
suiv., qui lait remon 1er justement la jirosLi/nesis au culte des souverains hellénistiques; G. Mkavtis, REA,
k h , 19 4 -j , p. 3 oo-.‘i 08; A.-J. Festugièiie, Revue filtiioL, 19 6 7 , p. s 3 ; etc.
(ï) D io d o r e , 1 9 , i 5, 1- 4 ; Cornelius Nepos, E u m 7.
(5) M. Launey, qui avait rappelé le peu de temps pendant lequel dura la mise en scène (Eumène
et ses coalisés furent battus quelques mois après, Euinène capturé et exécuté), a signalé qu'en 3 1 7 ,
dans le banquet offert par Peukestès, satrape de Perse, à toute l’armée, il y avait eu une cérémonie
religieuse avec sacrifice «aux dieux, à Alexandre et à Philippe» (Dioimme, 1 9 , a a , t) . Au milieu des
cercles concentriques de banqueteurs, étaient dressés les autels ( D i o d o r e , 1 9 , a a , 3).
1 A.
8 CAIM KRS A I«;H K «L O (ïlo n îS
17, 116.
Alexandr. vita, 7 3 -7 4 . Cf. le commentaire de Ph. J. Derchain et J. Hubaux, L ’Antiquité classique,
19, 1950, fasc. 3 : Lefantôme de Babylone, p. 3 6 7 - 3 8 2 (cf. p. 3 7 1 et suiv.). Les interprétations des
deux auteurs n ’ont pas à être discutées ici, mais elles ne seront pas reçues sans réserves.
La mention du dieu de Memphis est peut-être un certificat d ’ origine pour la légende : elle aurait
fait partie du dossier de la propagande lagide. qui avait olliciellemenl accaparé, dès le transfert du
corps du conquérant en Ëgypte, ia Geste d ’Alexandre, et songeait légitim em ent à la magnifier.
Recherches sur les armées hellénistiques, p. 8 5 5 .
É dit. Ph. Legrand, coll. G. Budé, p. i 43 et suiv.
I.K T R O N K V IDK J)' AI,K\ANI>RK ET LB fULTK DU T H O M Î VlllB y
Parmi les manifestations du culte dynastique qui se faisaient aux en tours du trône, dans
les gymnases, nous sommes renseignés en tout cas, utilement et précisément, à Adoulis, en
Ethiopie; Cosmas Indicopleuslès a décrit là un trône orné de figures d’Héraclès et d’Her
mès, génies protecteurs des gymnases. Encore au temps de Cosmas (vie siècle de notre ère),
nous apprenons qu’on exécutait publiquement les condamnés devant ce trône, qui repré
sentait donc un symbole de la royauté
Ainsi, lorsque Cléopâtre faisait tenir secrètement à Octave — à l ’insu d’Antoine — mm
sceptre doré, une couronne d’or, et le trône royal (toi> Stÿpov riv ß aLaiXtxiv) n, ce sont
bien les insignes royaux, et les instruments essentiels du commandement qu’ elle lui
transmettait, comme au dominus et dem : ce que Dion a remarqué fort précisément
*
* *
Les empereurs romains n ’ont pas manqué de conserver la tradition de la présence idéale,
visible ou invisible, sur le trône : tradition consacrée officiellement à Cyinda au bénéfice
d’Alexandre, vainqueur dont ils essayaient volontiers d ’usurper la gloire On a déjà
rappelé que le trône vide de Caligula avait eu sa place au Capitole, et que les sénateurs y
venaient faire docilement l a proskynhis la plus orientale^). A son tour, Commode s’était
fait représenter par un trône d’or, orné de la léonté héracléenne et d’une massue évoquant
le héros néméen
Les trônes vides, emblèmes de souveraineté, tendirent, sous l’Empire romain, à multi
plier leur puissance, en se multipliant eux-mêmes. Nous avons mentionné ci-dessus la
paire de «sièges d’honneur», qui avait pu, sur les monnaies syriennes, correspondre à la
royauté jumelle de Démétrius et d’Eucratidès. Or, nous voyons, à l’époque de Septime
Sévère, vengeur de Pertinax, qu’on faisait porter ju sq u ’à trois trônes vides dans le théâtre,
en souvenir du prince d éfun t(6). L ’image du trône déjà polyvalente — puisqu’ on l’utilisait
Y,'jCS Tf}5 (JypLSpOV ŸfUSpZS, èv £X£lW T4> TÔ7T&), évÔX XStTlt b 5(^3p(», éftTTpO<J&SV 3VTOV, TOUS
xoLvxhiKOvs Çovsvovai : 108 D, p. 7 6 , édit. W in sted t; cité par M. L u n k y , l. h , p. 8 5 5 , n. 3 .
(î) Dion, 5 i , 6 , 5 : cite par S. E i t r e m , /. L (ci-;iprès, p . t î . n . i) .M .S . E i t r e m , L L , p. 19/1, a fait noter
d'autre part que les astronomes de la cour d ’Alexandrie, dociles, avaient un jo u r changé la constel
lation de Canope dite « Chevelure de Bérénice», en trône de César ( P l i n e , Nat. hist., I I , 1 7 8 ) .
A u temps d ’Auguste, le trône vide de César, le Divus Julius, était porté dans les jeu x : par exem ple
aux augustales : Dion, 5 6 , 2 9 , 1. L ’ usage fu t continué sous T ibère : Dion, 5 7 , i 5 , 6. Cf. A . A l f ü l d i ,
Insignien u. Tracht d. rem. Kaiseï1 (RCm. Mitt., 5 o , 1 9 3 5 , p. i 36 et suiv., et fig . i 5 [monnaies]). —
Comment expliquer l’appellation de 6povôfi%vris que l ’on rencontre dans la propagande isiaque? Faut-il
l ’entendre des devins vaticinant sur leur «trône», comme la Pythie sur son trépied : cf. R E G , 6 9 -6 0 ,
1 9 4 6 - i 9 A 7, p. 3 /i 3 ? Ce q u ’ il y a d e plus intéressant à rapprocher est l ’é J ra n ge r é c it de F . O s s e n u o w s k i ,
Beast, men and gods (p. î û , édit. française), pour les cérémonies divinatoires auxquelles il d it avoir
assisté (visions évoquées devant un trône vide), dans un m onastère des m ontagnes à l ’ Ouest de la
Mongolie, au Nord du T ibet.
S. E i t r e m , L L, p . 1 9 3 .
<S) Dio\, 7 2 , 1 7 .
(#) Dm\, 7 6 , h. Déjà, dès 5 o av. J.-C. environ, le roi Antiochus I*r de Commagène parle, sur un
monument commémoratif, de son royaume «qui obéit à se$ trônes» ; et il espère q u ’après sa m ort, son
I.E T H O S E VIDE D’ A I . E X A X D I I E ET l,E C U L T E »U THOSE VIDE II
aussi bien pour les morts que pour les vivants, qui n’étaient présents qu’idéalement — a
donc obéi à la tendance qui faisait diffuser, d’autre part, les portraits impériaux officiels, en
nombre partout croissant M.
A Rome comme ailleurs '2^, les sources pour l’étude du symbolisme du trône vide ne sont
pas seulement littéraires, mais à chercher parallèlement dans le domaine de la plastique, et
dans celui de la peinture. L ’étude générale sur ce thème dont M. A. Grabar a pris
1initiative, de façon fort méritoire, dans les Cahiers archéologiques, n’ayant pas encore
abordé le domaine de l’art et de la religion à Rome et en pays romains, nous mention
nerons ici en passant quelques documents intéressants, sans vouloir présenter — ce qui
nous entraînerait trop loin — une recherche approfondie, bien digne de tenter plutôt
un spécialiste des études latines.
Ln document très c u r i e u x est le relief de Rome (Villa Medicis) — jadis rapporté à
l’Ara Pacis — où l’on voit représenté, ainsi qu’il semble, le fronton du temple romain de
la Magna Mater, au Palatin; il s’agirait du temple construit d’abord une première fois, à
l’arrivée de la célèbre Pierre Noire de Pergame (ou Pessinonte), et qui fut ainsi édifié, peut-
on croire, entre s o i et 1 91 , puis brûlé en 1 1 1, rebrùlé en 3 av. J.-C. Enfin, Auguste le
fit restaurer. Le bas-relief de la Villa Medicis, récemment étudié par M. M. R. Bloch W et
âme montera «aux trônes célestes de Zeus Orom asdesu. La multiplication des trônes se faisait donc
ïtlm-s sur terre comme au ciel; cf. S. E i t r e m , /. p. 1 9 4 , et les remarques présentées à ce
sujet, ibid.
li) S. Eitrem a proposé de dater le «siège d'honneur» vide de la Glyptothèque Ny Carlsberg, sur le
relief dont il a repris l'interprétation, From the Collect., 3 , 19/13, p. 18 9 et suiv., de l'époqu e de
Septime-Sévère : «On croirait, ajoute-t-il, à une initiative officielle ou à un ex-volu gloriiinnl Caracalla
en qualité de César triom phant, ou de princeps juventutisv (p. aoo). On peut rappeler ici que Caracalla
s’est toujours soucié de paraître im iter Alexandre. — Ibid., M. S. Eitrem ad o n n é quelques indications
rapides sur le rôle du trône dans les textes m agiques des papyri (surtout du m ' au v* siècle ap. J.-C.)
trouvés en Égypte. C et aspect de la question ne concerne pas notre présente étude, et il suffit de signaler
ce qui est dit à propos du culte de Sarapis, à qui le mage, copiaut le culte officiel, demande à l’occasion,
de se retirer «à ses propres trônes et dans ses propres absides» (Papyri graecae magicae, IV, 1 0 6 2 ;
V II, 3 3 3 ; V, 4 i [celui-ci en onciales du iv* siècle ap. J.-C.]). S u r le rapport du trône, de l'autel et
de l ’abside dans les basiliques païennes et chrétiennes, cf. ci-dessus, à propos des trônes d ’ Egypte
et S. E i t r e m , L i , p. 2 0 0 -2 0 1 ; plus récemment, A. G r a b a r , Cahiers archêoi, 6 , 1 9 6 2 . p. 3 i- 4 i . —
Pour les trônes du stratège Sostratos dédiés à Thém is et Némésis, déesses associées, au îv* siècle av.
J.-C., cf.W . R e i c h e l , /. p. 2 a.
(1> J. A u b o ï e r , Cahiers archéol., 6, 1 9 5 2 , p. 1-9 : Le trône vide dans la tradition indienne. Je reste
hésitant sur la date haute (G o o - 4 oo av. J.-C. V) donnée là sous réserve (avec un point d ’ interrogation)
pour le texte (Kaushîtaki Cpanishad : cf. L. Resou, Les Upanishad,\II, 19 48 ), qui est considéré comme
le plus ancien document concernant le trône vide dans la tradition indienne. La ressemblance avec les
lamelles d ’or éleusiniennes, maintenant bien datées en Grèce (iv* siècle av. J.-C.) par la découverte
de l ’urne cinéraire de Pharsale (N. M. Vkrdeiis, Arch. Ephem., 1 9 5 0 - 1 9 0 1 , p. 80 et suiv.^ me parait
trop singulièrem ent caractéristique pour q u ’on ne puisse pas rem arquer, dans le texte indien, fort
approxim ativem ent daté, des inlluences occidentales, plus que vraisem blables.
(î) Raymond Blocii, Alél. arch. et hist. École Rome, 5 6 , 1 9 $ 9 , p. 1 0 1 et suiv. : cf. fig. 9 , à la p. 1 0 2 .
L ’étude de M. R. Blocii, qui datait de 1 9 3 9 , a été réimprimée (sans correction par l’auteur) en 1 9 5 1 ,
en tête du livre de M. M. C.uuaso dkAzkvkdo, Le antichità di Villa Medici, p. g-aJÎ, pl. A.-C. ; p. 5 6 - 6 4 ,
M. Cagiano de Azevedo a repris lui-mème, avec des conclusions qui s’écartent eu partie de celles de
1'2 CA H I K HS A I U 1H K P U M i i m KS
M. R. Bloch, l’étude des documents ((Iruppo di rilievi storici) ; il admet, en tou t cas, p. 5 6 , q u 'il s’agisse
bien du temple de la Magna Mater au Palatin (cf. H. G raillo t, l. L, pL V II, 2, où il est parié à tort d ’un
relief wde l'Ara Pacis»),
Référence (de M. R. Bloch), à H. G r a i l l o t , Le culte de Cybèle, p. 3 a 6 et suiv.
Deux Corybantes, dont celui de droite est seul antique, constituent, a-t-on d it, les acrotères
latéraux. S u r les k serviteurs» de Cybèle, Attis dits * funéraires», Galles, Corybantes, etc., cf. les
remarques très critiques, mais en partie seulement justifiées, de R .W ill, Lerelief cultuel gréco-romain, thèse
soutenue en Sorbonne le 16 mai 1 9 6 3 . — Ainsi que je l ’ai signalé lors de la soutenance, M. R. W ill
n ’avait pas fait état, alors, de la représentation du fronton du temple de la Magna Mater au Palatin,
document pourtant daté. Pour le trône vide, on peut rappeler que Pausanias avait signalé à l’Acroco-
rinthe (II, 4 , 7 ) un Trône de la Mère des dieux, placé hors du sanctuaire.
(a) En raison des discussions qui continuent (cf., p. ex., A. vok Gerkan, Oesterr. JahresL, 3 9 , 1 9 5 2,
p . 3 1 et suiv.) au sujet de l’authenticité du «Trône de B o sto n -, nous nous bornons à m entionner ici.
les ingénieuses remarques de M. J. Colin, Rev. arch., 1 9 4 6 , I, p. n ty et suiv. (cf. p. 1 6 8 - 1 7 1 , avec
la bibliographie ju sq u ’ en 1 9 6 6 ) , concernant le culte du trône vide à Home. De toutes façons, ces
rechercher conservent leur intérêt. Sur le trône de Boston, cf. aussi K. Krauss, Arch. Jahrb. ((53- 6 4 ,
19 4 8 -19 4 9 , p . 4 o-l)9).
^ N° 8 5 6 de la collodion : C. Ricci, Ausonia, 4 , 1 9 0 9 . p. 24 7-2# 9 : Marmi Ravennati erratici.
Il y ;i des mentions tie la construction d*un tem ple de Poseidon à Ravenne, et «le l’ institution de
Neplumlia aux frais de L. Publius Dalicus : dessin au trait dans Clarac: S. R e in a c h , Rép. stal., I, p. 10 8 et
uL, et Rép. rel., 3 , p. 1 27 ; cf. aussi W. R o s c h e r , Lexic. MythoL, y. r. A eplumts. Le relief reproduit par
S. R e i n a c h , Rép. rel., 3 , p . 1 3 7 , n" 2, est du même type que celui de notre figure, mais avec îles
variantes. Il comporte aussi un décor architectonique de fond (variantes) ; les petits génies apportent
cette fois des coquillages (à gauche), et un gros trident (à droite) ; un animal marin est couché au
devant du trône, vide aussi, et drapé. P ou r l ’histoire de là dispersion des morceaux de cette déco
ration. vers la fin du Moyen i*ge, cf. Ausonia, IV, 1 9 0 9 ^ , a 5 o ; cf. aussi Ch. D i e h l , Ravenne, p. 1 1 ; et
plus récemment, Maria S q u a r c ia p in o , Memtrie Accad. Lineei, 8 , 2, 2, 1 9 4 8 , p. 6 1 - 1 1 8 ; cf. fig. 1 7 à la
p. 1 1 3 , pour l’ un des documents de Ravenne.
LB TROISK VIl)K D’ALK VWDRK KT l,K Gt'LTH OU THONK VIDK
<IJ Cf. par exemple la série étudiée par M. Sven Risou, .l/e/. Holleaux, 1 9 i 3 , p. 3 0 7 - 3 6 3 , pl. V III-
XIII : trône du théâtre de Tégée, siège du prêtre de Zeus Eleuthereus au théâtre de Dionysos, Athènes;
siège trouvé près de l’ Olvmpieion, Athènes ; siège de la «Synagogue», à Délos. M. S. Risom n’a pas fait
état du trône de Ravenne, au Louvre, qui lui etU fourni un type apparenté.
J. C o l i n , Rev. archèol., 1 9 4 6 , I, p. 1 7 1 (d'après H. G r a i l l o t , Le culte de Cybèle, i g t a , p. 3 a 8 )
qui parle là d ’ une «Vénus pompéienne» orientale. Sur cette divinité protectrice des portos, R. C ar
r i n g t o n , Pompéi, p. s i 5 .
13J J. Colin, L L, p. 1 7 1 , n. A, qui signale aussi le palanquin de la statue de Cybèle: F. Cumont,
Relig. orientales dann le paganisme romain, À* édit., p. 5 3 , fig. 3 . Antécédents orientaux : Kdith Poraîh.
Archaeology, 6. A, 19öS, p. 308-310 (trône de Sargon II). — P ou r la peinture de la Via dell’ Abbon
danza, cf. maintenant Vittorio Swxazzola, Pompéi alla luce d 'g li scan mtovi di I ta dell Abbondanza (anni
1 9 3 0 - 1 9 3 3 ) , opera postuina a cura di Salvatore Aurigemma, 1 9 5 3 .
{!\ CAHIERS ARCHKOl.OGIQMiS
■*
* *
On peut ici int-errompre l’enquête générale entreprise — assurément encore bien pro
visoire — en pays grecs et latins.
C’est sur la cérémonie historique de Cyinda, sur la curieuse légende d’Alexandre invisible
et présent que nous avons voulu principalement attirer l ’attention. Mais il eût été
On a signalé des compositions comparables qui viennent des fouilles de Résina et se trouvent actuel
lement au Musée de Naples : Roux et B a k h é , Herculanum et Pompéi, 1 8 7 5 , 2 f série, pl. LXXIX et LXXX.
Lne de <*es peintures, formant paire en pendant, se rapporterait à un trône de Mars entouré de génies
ailés, parés de bracelets et colliers : sur le trône, voile, coussin, casque à cimier ; sur l’ une des repré
sentations, on voit une colombe posée sur le coussin, et l’ un des petits génies tient une guirlande de
myrte, plante d ’Aphrodite. On doit donc penser là à un trône de Vénus ; l ’ensem ble se référerait ainsi
à Vénus et Mars.
A. Levi, Sculpture del Palazzo Ducale, pl. J A W I Y ; Jd,, Jihtoria, 1J], 1 9 2 9 , p. 9 70 et suiv.:
cf. Camka, Roma antica, 6, pl. L X X I; C. Seltman, Cambridge ancient history, pl. û, p. t h h b. A
Diocaesarea, un foudre était posé aussi sur le trône de Zeus. Ailleurs, on a signalé des trônes portant
une couronne de laurier (A. Conzl, Ram. Bildw. in Oester r., U I, 1 8 7 7 , p. 8, pl. X 1V-XV).
H. Graeven, Monum. Piot, 6 , 1 8 9 9 , p. 1 5 9 - 1 7 3 et pl. XV : haut, o m. 0 7 , diam . o ni. 1 2 .
H. Graeven dit être tributaire pour cette interprétation des exégèses de son m aître W ilam ow ilz
von Müllcndojf. L ’interprétation parait plausible.
^ A, P lassart, Explor. arck. Délos, I. XI, 1928, p. iUi {Sanctuahis et cultes du Mont ( yutl.e).
L E TH OISE M D B D’ A L B W N D R B ET LE C l'L T E |)[J TH O N H V I D E 15
difficile et dangereux d’ isoler trop l’épisode; c’eût été peu instructif, au surplus. Dieux,
héros et princes, du temps des Préhellènes jusqu’à la décadence de l’Empire romain, ont eu
en commun le bénéfice du trône, siège d’apparat, tantôt environné de la vénération pieuse
des fidèles, tantôt considéré comme l’attestation muette d’une autorité terrestre souveraine.
Mais les chemins qui menaient du ciel à la terre étaient parcouru* en tous sens au temps du
paganisme déjà, si bien que c’est encore le trône-char qui est devenu parfois véhicule
d ’apothéose et d’ tt ascension » à l’empyrée : dans le cas d’Alexandre le Grand, précisément.
Le Roman d ’Alexandre a provoqué une bibliographie déjà surabondante, et il n’est pas
question d’y ajouter quoi que cesoitici *l).L e regretté Gabriel Millet a dû laisser sans suite
la première partie d une étude qu’il avait amorcée, où il avait versé minutieusement sa
science coutumière Beaucoup de questions seraient encore à reprendre, dès aujour
d’hui. Nous ne le tenterons pas ici.
On a souvent reproduit l’Ascension d’Alexandre, encastrée dans la façade Nord de
Saint-Marc, et qui fut, comme on sait, remployée (xe-xie siècle). On a l’impression que
Je Macédonien y est figuré «en buste» mais c’est que 1** sculpteur a tiré parti convention
nellement— et assez maladroitement d’ailleurs — d une image frontale assise, qui convient à
un Alexandre trônant plus qu’à un pèlerin du ciel, en char, enlevé in excels'$ par des
griffons. Comment ne pas remarquer, d’autre part, que ces griffons sont ceux mêmes qui
encadraient déjà le trône vide des Minos à Cnossos Le roman du Pseudo-Callisthène
n ’aurait pas eu besoin de recourir à des ksources orientales?, comme on dit aussi vague
ment que dogmatiquement, pour imaginer une ascension que faisait déjà, sur son escarbot.
le Trygée paysan d ’Aristophane; les animaux ailés, plus nobles, auxquels Alexandre
montant au ciel présente comme appât deux longs bâtons chargés de viande, à la manière de
deux torches, pour les amener à orienter leur vol vers le ciel, appartiennent déjà au
folklore hellénique et scythique, Alexandre jou mt entre eux, mutatis mulandm, un peu le
rôle de l’Arimaspe, escorté de griffons plus ou moins pacifiques '5^. C’est bien de la har
diesse de vouloir parler, comme on l’a fait, r de l’interprétation des ornements d’une étoffe
d ’origine persanes. Qu’en savons-nous? Le thème a été reproduit fréquemment en Orient
et en Occident. On le trouve utilisé sur les œuvres les plus diverses, ivoires émaux,
mosaïques, étoffes même, à l’occasion.
Beaucoup de ces représentations sont, fort connues; mais il nous a paru utile de com
menter ici sur images, en terminant, le décor de deux étoffes incomplètes qui sont con
servées dans le trésor de l’église de Montpezat, en France, et qui n’avaient été reproduites,
semble-t-il, jusqu’ici, q u ’à trop petite échelle pour pouvoir être appréciées et même exacte
ment décrites C’est la légende d’Alexandre qui est mise en œuvre là; et nous avons la
bonne fortune, non remarquée ju squ’ici, de voir, côte à côte, le trône terrestre du souverain
et le char destiné à son apothéose divine (pl. IV, i , 2). Sur un des deux fragm en ts— qui
semblent avoir appartenu à une même frise continue, où les thèmes, séparés par des colonnes
a torses à chapiteaux et d ’autres figurations en forme de tabernacles, alternaient aussi - -
on voit à gauche Alexandre, avec, semble-t-il, deux petits animaux — ou oiseaux — l’en
cadrant héraldiquement à ses pieds; il est couronné par deux allégories féminines assises,
tandis qu’il trône lui-même de face, mais tourne la tête vers la personnification placée à sa
droite. Ses bras étaient étendus. Il est donc possible qu’il y ait ou là un souvenir des groupes
allégoriques dérivés de PApofogue de Prodicos, récit d’après lequel Héraclès était repré
senté comme «choisissant» un jour entre Arété et Kafoa-Em lftnm nna M. Emile
Mâle, qui a signalé brièvement le document de l’église de Montpezat s’est rallié à l’ in
terprétation traditionnelle des deux allégories, qui auraient été fî) S c 'e n c e et H istoire. Mais
cela reste hypothétique. On voit aussi les préparatifs de l’ascension ; Alexandre paraît là
debout, de face, dans un char dont la caisse porte sur des roues visibles, véritable char
d’apothéose. Alexandre écarte le* bras, car il devait présenter un appât aux monstres, ses
serviteurs. Les grands griffons ailés qui entourent le char, et le prince, posent aussi encore
au sol; on voit nettement les becs d ’oiseaux des grillons, et leurs gros yeux naïvement
ronds. Leurs têtes convergent vers le char.
On peut notamment comparer une étoffe attribuée — sans certitude — par 0 . von Falke
à la production des ateliers de Regensburg (xiue siècle) ; elle offre aussi la représentation
de l’Ascension du prince f4-, et il est possible qu’il y ait eu là, comme à Montpezat, une
bordure de vêtement sacré.
sorte de panier, trainé par les griffons ailés encore; mais cette fois ce sont des génies ailés ou aptères
qui s’ occupent à faire m onter les monstres, en leur tendant une nourriture inaccessible. Malgré les
conventions propres à l ’épisode traité, on a gardé curieusem ent et naïvem ent ici un fond de scène,
avec baldaquins curvilignes soutenus, comme certains arcs cintrés, par des colonnettes, si bien que la
fcène a l ’air de se p a ssera te rre-, L. Bréhier croyait à «un travail d ’ origine arabe«. Ont serait bien
embarrassé pour l’établir.
(1) L e docum ent, non inédit, a été signalé par le Chanoine F. Galabert, curé-doyen de M ontpezat,
Le Trésor de r Église de Montpezat, a* éd it. Montauban, 19 3 5 ; cf. p. 1 8 , 3 : «Deux tissus de lin fin,
mesurant chacun o m. 06 X o m. oà ». L e chanoine F. Galabert se réfère là à la publication de M*r B a k -
bier de M ontait, Bullet. arehéoi du Tarn et-Garonne, 3 i , 1 9 0 2 , p. 280 et suiv., pl. X L (d’ où nos
figures, agrandies).
Plus ou moins oublié par IL Hinks, Myth and allegory, 1 9^9. J aî traité m oi-même récemment de
l ’Apologue de Prodicos, afin de constituer le dossier des représentations antiques qui s’ y rapportent
et qui avaient échappé aussi à E. P a n o f s k y , Ihraklez am Scheidewege : cf. C R A I, 1 9 0 1 , p. 'i 1 o- 3<ir>,
e t Rev. arch,, i g 53, If, p. to-^ii.
(S) Fin du paganisme en Gaule, p. 9 0 6 -2 0 7 .
M Édition abrégée 1 9 2 i , fig. 253 ; éd it, 1 9 1 3, p. 4 2, fig. 3 0 7 (est signalé là 1’ « inventaire d ’A n a gn i-,
LH T H O N B V I D B 1>’ A L K \ A M ) « B BT IÆ C t ' L T K Mi TROSK VfDB
De tels tissus reprenaient, semble-t-il, une tradition grecque, en assemblant les images
d ’Alexandre trônant et d’Alexandre s’élevant au cieL Le texte de Diodore 18, 26, qui
nous signale l’apparat pour le transfert des restes d’Alexandre, de Babylone à Alexandrie,
semble bien avoir fait connaître que le trône d’ or, carré, du conquérant macédonien, orné
de rpayéXaÇ>ot (boucs-cerfs) archaïques, était porté sur le char luxueux et monumental où
reposait aussi la dépouille royale
Ch. P icard .
i 3 oîî). L étoiïe aurait été un cadeau de Boniface V III ; cf. J. H rrzfkld , Der Thron des Khozro, Jahrb. d.
preussiachen KunstwmviL, 1 9 2 0 , p. i 3 o et ma note RA, 19/1/1, I, p. 1 7 5 - 1 7 6 , sur le symbolisme de
la Maison dorée de Néron. Le r panier» (caisse du char) est fixé par des chaînes au cou des griffons
ailés. Alexandre est vu de face et tient sym étriquem ent deux petits animaux embrochés, appât des
griffons. Il d oit s’ agit aussi d ’ une bordure, comme pour les pièces de Montpezat, d'après la description :
Dalmatien de samito viridi, cum paraturis in fimbriis ad historiam Alexandri élevait per griffon m aerem.
J. O v e r b e c k , Schrijtq., p. $ 7& , n" 1 9 8 ^ , 1. 1 9 . Les mss. portent MPIPXOÏ q u ’ on a corrigé
judicieusem ent, sem ble-t-il, en dpôvos, C’ est de Babylone que le char-ti-ône attelé de griffons,
véhicule d’Alexandre, passait pour s’ ètre élancé vers le ciel.
1
I.a salle dite -du trône" à Cnossos : |(* trône ville.
KnUdilement d'un temple présumé de la Magna Mater à Home, avec trône vide central: lenniini# an le queni :
le principal d’Aumiste.
■
2
Peinture «llleivulanu in (('nsa (Ici (.rrri\ : n 8.>l‘>. Musée «le Naples : liolomle «le Mars.
P l a n c h K III
1
1lime \ i«It; «In Palais ducal de Manlone
(A. IÆv i, Scull. Palazzo ducale, pi. 8'i : In.. Ilistoria, III. i 9 |, p. 270 el suiv.)
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ItoHluic d'élollc l.isluricc : église .le M»i.l|»rat ( W . urcltml., ««..a, |.l. 4 o) : A low ............................. l^ ia n l t*i . W i o n .1 M «a,,h-c
P uN C IIK \
'1
Ptjxia en os, «in Louvre : Naissance d ’Apollon à Délos : I«; hone vide de Zeus occupé pai un Amour.
II. («P.AEVKX )lon Pint, (>, p. 1 09 el sui\. el pi. 10 en haut.
LA «SED IA DI SAN M A R C O » A VEN ISE
PAR
ANDRÉ. GRABAR
Le Trésor de San Marco conserve un objet singulier qui, un peu moins remarqué
maintenant, était entouré autrefois d un respect unanime. C’est un siège en albâtre gris
clair qu on appelle la Se/lia di San Marco et qui au moyen Age depuis une date inconnue
jusqu'à une époque antérieure à i 53/j — s’élevait ni sacello pnncrpe post aram ma rimant 1 .
c’es!-à-dire derrière le maître-autel de l’église San Marco (pl. \ I. \ II. \ III. i. XI. i ).
Ce meuble; en pierre a un siège singulièrement bas (à 33 cm. du sol), ce qui a fait écrire
à un archéologue qu’il convenait puero potin* quam hommt 2 : observation pertinente
H sur laquelle nous reviendrons. La forme du trône est celle d’ un fauteuil en bois et osier,
tels qu’on les voit souvent sur les images de la lin de I Antiquité. Les peintres byzantins
quelquefois font asseoir les évangélistes sur ce genre de siège.
On reconnaît plusieurs détails propres à ces meubles en bois et osier : la forme générale
du siège, avec un dossier très haut et des sous-bras qui rejoignent le dossier par une série
de baguettes parallèles, légèrement inclinées 3 : imitation d une paroi tressée en bandes
d’osier, sur le devant du siège, et de grilles entre les pieds du siège, sur le côté gauche et
(1) Flaminio C o r n k i », Monumenti delle chiese di Venezia, \ . |>. i 3 o. I ne bibliographie détaillée «les
études anciennes consacrées à la Sedia di San Marco, dans Cmihoi,, Diet, archèol. chrét., s. \. -chaire
épiscopale», col. 5 4 . Depuis la publication du volume du Dictionnaire, la Sedia a été souvent mention
née, mais elle ne fut l’ objet d ’aucune étude nouvelle.
Molino, De vita el lipsanis S. Marci, édit. Pieralisi, Rome, i 8 6 4 , p. 200 (cité d ’après R. Garkucci,
Storia dell'arte er ist tana, \ I, Prato, 188 0. p. 1 G). (îarrucci consacre à la Sedia les pages 1 \ à 1 -j et la
planche C D X lll de sa Storia. On trouvera ci-dessous quelques mesures précises du meuble, que je dois
à la grande amabilité de M. Michelangelo Muraro, de la Sopraintendenza ai Monumenti de Venise. que
je suis heureux de pouvoir remercier ici de son concours eflicace et amical. Grâce à lui, j'a i pu examiner
la Sedia dans les meilleures conditions et illustrer cet article par les excellentes photographies que la
Sopraintendenza a fait prendre à l’ occasion de mon étude. Je tiens à «lire ici toute la reconnaissance
que je dois à M. Franco, Sopraintendente ai Monumenti à Venise, pour avoir favorisé ainsi mon travail.
Dimensions, en centimètres : hauteur du sol au siège, 3 3 ; du dossier (moins le disque), 4 4 , 8 ; hau
teur du disque, 3 a ; hauteur globale, 1 0 9 ,8 : largeur, 6 5 ; profondeur du siège, 3 9 ; épaisseur des
sous-bras, 6 , 5 ; ouverture latérale di* l’excavation (pour un dépôt de reliques) : hauteur, 1 1 ,5 ; lar
geur, 9 4 , 5 .
(3) On a reconnu q u e lq u efo is dans ces baguettes des cierges ou des torches allumés (ciiuj de chaque
côté du trône), à cause d ’ un m otif en amande qui en forme le sommet et qui ressemble à une flamme.
Mais ce m otif est répété sur l'épaisseur des sous-bras, devant les baguettes en question, et l’ ornement
gravé (as de pique avec deux volutes) «jui en décore ici le sommet exclut la représentation d 'u n e flamme
2 0 CAINKH S A H C H K 0I.0(J1Q I:KS
le côlé arrière, au bas du meuble. Ce motif reçoit une autre fonction sur le coté droit
du fauteuil (voir infra). A l’intérieur du siège, on trouve un autre souvenir d’ un meuble
en bois : je pense à ces courbes assez raides, qui forment le bord du dossier, à la base
du disque du sommet. Tandis que du côté postérieur deux volutes entourent le môme
disque, ici ces courbes se terminent en pointe, comme s'il s’agissait de baguettes en bois.
Les motifs en chevrons et en cannelures transversales, qui décorent 1épaisseur du dossier
et du disque, ne s’opposent pas à l’hypothèse d une imitation d ’un meuble en bois et
osier.
Le disque qui couronne le dossier n’est point typique pour des meubles de ce genre.
Mais c’est un motif qu’on voit sur d ’autres sièges en pierre, paléochrétiens et du haut
moyen âge. Je pense notamment à un trône de pierre qui s’élève au sommet d ’un escalier,
au monastère copte Saint-Jérémie, à Saqqara[l), et qui remonte probablement au vi° siècle
(pl. \ 111, 9.). II a du servir de siège t.u supérieur du couvent, pendant des réunions qui se
tenaient dans la cour intérieure. C’est là qu’il a été découvert par les fouilleurs. On retrouve
le disque du dossier sur le trône épiscopal de S. Maria in Cosmedin, qui est de 11 23
Des reliefs iconographiques recouvrent les deux côtés du dossier et les parois extérieures
du meuble. C’est la présence de ces fragments qui fait l’originalité de la Sedia di San Marco
en comparaison avec d’autres trônes anciens, dans les églises d’ Italie et d ’ailleurs, et la
rapproche, au contraire, des deux meubles exceptionnels de cette série : la chaire de Maxi
mien à Ravenne et une autre chaire dont on ne conserve que quelques fragments et qui
portait également des reliefs à sujets chrétiens13). Cependant, ces deux meubles sont o t i
étaient des sièges en bois revêtus de plaques d’ivoire sculptées. Tandis que \aSed adi San
Marco est faite en pierre monolithe, et les reliefs y font corps avec le m e u b l e R i e n ne
laisse supposer que ces reliefs furent ajoutés à une époque postérieure :,ï.
Or, s il on est ainsi, il faut considérer également comme initiale Tou ver lure coudée,
a section rectangulaire, qui s’ouvre au bas des parois postérieure et latérale de droite, au
bas du siège ( pl. \ I, t : \ 11, j ; \ 111, i ), Garrucci'1) croyait qu’il s’agissait d’une trans
formation, et il invoquait la présence sur la paroi postérieure d’ un motif scuplté qui aurait
été détérioré lorsqu'un \ aménagea cette excavation (la racine d’un arbre aurait été a m p u té e
à cette occasion). Cependant, il n’est nullement certain que cet arbre se prolongeait au-
delà du bord du trou, et, d’autre part, les reliefs qui entourent les deux ouvertures de
cette excavation semblent contemporains de ces ouvertures. Celle du côté postérieur est
encadrée de deux espèces de bandes verticales qui s’élèvent plus haut que le bord supé
rieur de l’ouverture (légèrement assymétrique) ; celle du côté latéral droit est entourée
d’un cadre qui s’élargit légèrement vers le bas; les deux ouvertures s’appuient en bas
sur une bande à grille, qui se prolonge aussi, on Fa dit, sur le côté latéral gauche. Mais
tandis que, sur le côté postérieur et sur le côté droit du siège, cette grille court tout le
long de la paroi (jusqu’aux angles du siège, qui imitent des pieds), elle ne va pas au-delà
de l’ouverture, sur la paroi gauche. La raison de cette dernière anomalie est évidente.
Le programme du décor sculpté prévoyait visiblement la représentation de deux palmiers
symétriques de part et d’autre de chacune des ouvertures. Or si la paroi postérieure était
assez haute, pour permettre au praticien de placer ces arbres à la hauteur du bord supé
rieur de la grille, la paroi latérale, moins haute, n’autorisait pas cette ordonnance : même
en les faisant moins élancés, il n’a pu les répéter de ce côté qu’en les faisant partir du
bord inférieur du meuble.
d ’accord ni sur le sens, ni sur l’âge de ce texte. A, Le Hir (La chaire de mint ■ Mare, dans Études religieuses
d’ histoire et de littérature, i 8 7 0 , h" série, t. V, p. 6 7 2 et suiv.') l’attribuait au siècle de saint Marc lui-
même et lisait : Cathedra Marei (qui) evangelimeit Dominum hic et ascendit e Roma. J. B.uuifcs (Dissertation
sur l'inscription hébra'que de la chaire de mini Marc à Venise, dans Annules de philosophie chrét., 3 * série,
t. M l, 18 8 0 , p. 29 2 et suiv.) datait l’inscription du x j v " siècle (*ic) et y reconnaissait la phrase cohé
rente : Cathedra Marei qui et'angelium stabilivit Alexandriae. Mon collègue, J.-G, Février, professeur
d’ hébreu à la fi‘ section de FÉcole des Hautes Études, à qui j ’avais soumis la photographie de l’ in
scription, a bien voulu me confirmer q u ’il s’agissait d ’ une inscription en langue hébraïque (et non pas
syriaque) écrite sous forme inversée, et suggérer qu elle a pu avoir pour auteur un Juif italien du
moyen Age. M. Février lit (en transcription) : M W Sß M RKW 'W ’N GLSTS ...ÏSÜRWH, soit : p Siège de
Marco (ou : Marcu) évangéliste... l’ont vo u é*. Il n’est pas im possible, ajoute M. Février, que le passage
douteux au milieu de l’ inscription doive se lire (en transcription) W Y (R \ )M , soit <?et dus ânes?*. Si
cette lecture pouvait être retenue, on aurait : «Siège de Marco (Marcu) évangéliste et des ânes Pont
voué«. «Ainsi s’expliquerait, conclut M. Février, l’ écriture inversée : l’auteur de l’ inscription tenait —
et pour cause — à lui conserver un certain caractère d ’ésotérisme». Tout en remerciant M. Février de
son précieux concours, je ne puis évidemment q u ’ enregistrer sa lecture de l’ inscription et retenir
q u ’elle aurait été gravée au moyen âge et en Italie (c’est ta forme du nom de Marc — Marco ou Marcu —
qui, selon M. Février, fait placer en Italie l ’origine de cette inscription). Autrement dit, elle serait
beaucoup plus jeune que le m euble et aurait été ajoutee après son transfert d Orient en Italie. Le
tracé de F inscription, peu soignée, nous invite également à séparer la date du meuble et celle de
ce graflite. Quant à l’ initiative qu’ on a pu prendre en Italie au moyen âge pour doter un meuble-
reliquaire d ’ une inscription hébraïque, elle s’expliquerait par le désir de faire remonter 1 objet à
l’ époque et au milieu auxquels I’attribuait ta tradition, qui en faisait un siège de F évangéliste saint Marc.
(l> G a r r u c c i , lor, cit., p. 1 7 .
CAH IERS AR CH ÉO LO G IQ U ES
Soulignons dès à présent le fait qui se dégage de cet examen : non seulement le décor
avait été composé en tenant compte de la présence des deux ouvertures de l’excavation,
mais il comprend des motifs qui, en se répétant autour des deux ouvertures, servaient à
évoquer un thème qui était lié à ces ouvertures (ou à ce qu’il y avait derrière elles). Je pense
naturellement aux deux paires de palmiers, auxquels il faut joindre sûrement l ’arbre à
feuilles rondes (sycomore ?) qui surmonte l’ouverture de la paroi postérieure (pl. \ III, i ).
Cet arbre semble pousser du bord même de l ’ouverture, comme si ses racines y étaient
plongées. L ’ouverture fait donc pendant, à ce titre, à l’Agneau™ symbole du Christ, qui
sur la face antérieure du dossier, se tient au pied d’un autre arbre de la même espèce,
quoique plus grand (pl. VI, i). Nous dirons plus loin, en parlant de la destination de la
Sedia, comment le sculpteur a pu être amené à établir un parallélisme entre l’Agneau et
ce que signifient du point de vue religieux les deux ouvertures flanquées de
palmiers.
Sur le disque du sommet du dossier, de chaque côté, on trouve la même figuration
(pl. VI, i : XI, i) : deux logali barbus et nimbés (petits points sur le nimbe) se tiennent
de part et d’autre et un peu en arrière d’une croix dont les branches s’élargissent vers
les extrémités (sauf la branche inférieure de la croix sur la paroi postérieure) et sont
décorées de «perles» aux angles et d’une sphère au sommet; tapissées de chevrons sur
toute la surface, ces croix sont prolongées vers le bas par une bande étroite et inégale qui,
après avoir atteinl le sol, se prolonge par deux rubans ondulés symétriques. Ces bandes
sont probablement les fleuves du Paradis qui naissent au pied de la croix.
Les quatre saints sont certainement les évangélistes. Ils ont lous les mêmes traits ou
presque : tête carrée, cheveux courts, front bas, gros nez, barbe très nourrie et large
au contour légèrement variable. Les quatre personnages appuient un évangile contre leur
bras gauche. Dans trois cas sur quatre, ils le soutiennent de l’autre main. Deux de ces person
nages tiennent un mouchoir plié dans leur main gauche ; un seul évangéliste soutient d ’une
main la croix. Les quatre figures sont trapues; leurs têtes et leurs pieds sont trop grands.
Tandis que leur corps est strictement frontal, l’un des pieds est écarté selon la formule
habituelle du contraposto. On connaît une couverture d’Evangile en argent sur laquelle
apparaissent, comme sur la Sedia, deux par deux de part et d’autre d ’une croix, les quatre
évangélistes (l’une seulement de ces images est conservée) (pl. XI, 3 ).
Le dossier, du côté intérieur sous le disque, offre une grande image unique : l’Agneau
se tient devant un sycomore (?). Vu de côté, la tête à gauche, il voit surgir à ses pieds et
descendre les flancs d’une colline quatre cours d ’eau qui sont les quatre sources ou fleuves
du Paradis. Sur la paroi gauche, le bœuf de Luc, un livre fermé derrière la tête, se détache
sur le fond de six ailes aux plumes fortement incurvées. Comme tous les :odin symboliques,
sur ce siege, le bœuf est représenté non pas par un protome, mais en entier. Vingt-deux
{l> Early Christian and Byzantine Art (Catalogue de l’ Exposition de Baltim ore). Baltim ore, 1 9 / 1 7 ,
n° L IV , p. 86. En 1 9 ^ 7 , cette couverture appartenait à l ’antiquaire Brum m er, à N ew -York;
on l ’attribuait au v* ou vie siècle. Cf. Exposition d ’ art byzantin, P aris, 1 9 3 1 , n° 3 9 5 . The Uarl. Ages,
Worcester, 1 9 8 7 , n° 8 5 , ill.
LA « S E D I A DI S A N M A R C O » À Y ESI SB n
croix Lesanges y remplacent donc les évangélistes ; la croix est d’ un dessin très semblable:
la sphère — étoilée sur le plut — est fixée sous la croix et non pas au-dessus, et à la place
des chevrons la croix y supporte des cabochons de pierres précieuses: enfin on aperçoit
les quatre lleuves sous la croix. Sur le plat, ils sont tous réunis, tandis que le sculpteur de
la Sedia a dû les séparer intentionnellement, pour mieux les mettre en pendant aux évan
gélistes, eux aussi répartis en deux groupes de deux. Celte interprétation, qui me semble
bien fondée, exclut les identifications des saints auprès de la croix, avec des apôtres, Pierre,
Paul, etc. Celle version de l’iconographie des sources paradisiaques qui les rapproche des
évangélistes souligne visiblement le lien qui les unit : les lleuves qui prennent naissance
au pied de l’Agneau-Sauveur sont bien les quatre évangiles. Et d ’aulre part, l’Arbre de
Vie qui s’ épanouit derrière l’Agneau n’est autre que la croix, puisque les mômes fleuves
partent à la fois de la base de l’ un et de Tau Ire. D’ailleurs, les deux images sont super
posées, dans l’axe de la Sedia, et l’Arbre du Paradis sous sa forme nouvelle, celle du Nou
veau Testament (c’est-à-dire la Croix ), est au-dessus de l’autre et domine toute l’ icono
graphie de la Sed a et la Sedia elle-mcme.
Autrement dît, on a voulu, d’ une pari, placer en quelque sorte ce siège lui-même au
Paradis et, d’autre part, rappeler que le Paradis chrétien est essentiellement œuvre de la
Croix de lu Redemption, dont le message salutaire est dans les sources vives des quatre
évangiles. L’iconographie de ce meuble d’église résume ainsi ce qu’on trouve par ailleurs,
dans les mosaïques des absides et les mosaïques des pavements de chœur, aux ve et vie siècles:
l’Agneau, l’Arbre (pl. X , 1 , 9) et les fleuves paradisiaques, et d’autre part, les symboles des
quatre évangélistes sur le ciel étoilé, et la croix(2). On y voit aussi sinon les portraits des
évangélistes, du moins les livres des quatre évangiles et les palmiers symétriques, comme
sur la Sedia, et ce procédé nous met probablement sur la voie d ’une définition de la fonc
tion de ce meuble. I n siège qui est décoré comme le chœur d’ une église a bien des chances
d’être lui-même un reflet du Trône de Dieu qui est au Paradis. Ce trône de Dieu apparaît
à Santa Maria Maggiore, à Rome, au-dessus de l’abside : une croix se dresse sur ce siège,
dont les sous-bras sont ornés des tètes des apôtres Pierre et Paul, tandis que les mêmes
(I) Bulletino di arch, crut., 1 8 7 1 , pl. IX. C.ikkol. D id . archéol. chrét., 1 3 , 2, s. t’. patène», fig. 9 9 7 0 .
D ikiil, Manuel d ’art byzantin, fig. 16 0 . O. W u l f f (Altchrhtl und. byz. Kunst, I, fig. s o i , p. 19 9 ) allrib u e
le plat à la Palestine.
Les mosaïques des absides du v* et vi* siècle, surtout à Rom e et à Ravenne, sont suffisamment
TheTow
B a g a tti, nofN
ebo
connues. Pour les m osaïques d^ pavement avec ces sujets, voir : Sylvester J. S a l l e r et Bellarm ino
The M e m o
rial o f Mo s es o n M o
(K hirbet el-Mekhayyat). Jérusalem, 19/19, pl. 8, 1. 2 : 14, 1 ;
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e'l,utva,
22 a :
23 , t ; .50, 1 ;
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3; 35), 1, a ; 40 ,
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Jérusalem, 19 /11, pl. t o 3 , 109.
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II.
I. Rom e, 19/10,
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% • 10 (P- 1 59 )i 29 (P- a 3 i) .
Justi
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(p. 3 9 6 ). Cf. E. KiTziNfiRR,
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infer», Rome, * 9 3 4 , fig. 6
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Studies LateAntiqueandEarlyByzantineFloorM
on
p. 83 - 12 /i,
dans. 4c/e*
osaics, D um bartonOaksPapers,
. IL Paris. 1 9 5 1, p. 9 0 9-3 2 3 . L e même,
dans n ° 6 , i o 5 i,
(S> Les quatre livres des évangiles poses chacun sur un trône, sont figurés aux quatre points cardi
naux, sur la mosaïque de la coupole, au Baptistère des Orthodoxes à Ravenne.
1-4 R S K I M A III S A N MAHCO» Â V K 3 JSK 2 5
apôtres et les symboles des évangélistes encadrent le meuble symbolique O . Dans l’ancien
Sain t-P ierre^ , le Trône de Dieu était représenté au milieu de l’abside, et l’Agneau en
occupait le siège, comme sur la Sedia, où l’Agneau est au centre du dossier. Même position
centrale (sur l’arc devant l’abside) et même iconographie (Agneau et croix sur le Trône),
à SS. Cosmo e Damiano, à R o m e^ .
Or, un siège assimilé à celui du Seigneur au Paradis peut avoir plusieurs fonctions diffé
rentes. Il peut servir de trône à l’évêque, comme celui de Maximien à Ravenne et un autre,
semblable, dont on ne conserve que les fragm ents^. Comme sur la Sedia di San Marco,
le décor de ces cliaises épiscopales insiste
sur le thème des quatre évangélistes, figurés
sur leur façade. Mais le parallélisme icono
graphique entre la Sedia, le siège de
Ravenne et ce qu’on sait de l’autre trône
episcopal en ivoire, ne va pas au-delà de ce
thème des évangélistes. Le siège de Maxi
mien déploie un cycle historique qui n ‘
trouve aucune analogie parmi les reliefs de
la Sedia de Venise, et il est peut-être utile
de rappeler que les sujets des images sur
les autres chaires épiscopales anciennes (là
où il y en a), la cathedra sancù Pétri et les
trônes du haut moyen âge, n’ont rien de
commun avec le thème des reliefs de la
Svdia. En effet, les ivoires de la cathe- . . . D, -, , ,
- ri«, l. — Behvo. Detail ue I million avec Imne,
ara de Maximien, s ils ont un rapport d'après Tehalenko.
quelconque avec la fonction de ce siège,
et les images sur les trônes du moyen âge, ne reflètent que l’idée du pouvoir
On aurait pu penser aussi à un trône-lutrin, comparable à ceux de la Syrie chrétienne,
à Bennaoui, Qirqbizé, Rehyo (fig. i et pl. \ III, 3), e t c . C o m m e on sait, ces lutrins en
pierre figuraient le Trône du Seigneur où la présence du Christ était symbolisée par le livre de
\\u/pEHT, Mosaiken und Malereien der rOni. Kirchen. pl. 70-7*2. A. (îrabar, L'Empereur dam l'art
byzantin, Paris. i( ) 3 6 , pl. XXXV, 1.
W ilp ert, Iw . cit., fig. 11 h.
Guglielmo M a t t h i a e , S S . Cos 11,0 e Damiano e S. Teodora. Rome, 19/18, p l . 18.
Vciir supra, p. -io, nole
(i) P our la chaire de Maxîmicn, voir en dernier lieu Meyer Schapiro, The Joseph Scenes on the
Maæimiamts Throne in fiavetma, dans Gazette des Beaux Arts, ju ille t 1 9 5 a , p. 3 7 -3 8 .
Quant aux trônes épiscopaux du moyen âge, voir ceux de l’ Italie méridionale qui reposent sur des
figures de prisonniers (Saint-Nicolas de Bari) ou d'animaux (Canosa, (-alvi, ete.) en s inspirant des
trônes princiers.
(4) J. Ia s s is , Sanctuaires chrétiens de Syrie, Paris, 1 9 û 4 , p. a i h, pl. LX, i - a . J. Lassiîs et <1. Tui\-
i.KNKO, Ambons syriens, dans Cahiers archéologiques, V, 1 9 6 1 ; p. 8 1 , 1 0 9 et iü. ; p. 1 o 5 et ill.: p. 1 a i el
ill.
C A H I li W S A H C H K O L O G I Q U I i S
loc. cil., f i g . U, 1 0 , a i .
<l} L a s s u s e t T c h a l e n r o ,
Cahierg arcliéoîogiques, V I, 1 9 5 2 , p. 3 1 -h 1.
P ar exemple, chez les Ktrusques : The Cambridge Ancient History, y al. of plates IV ( 1 9 3 4 ) , pl. 3 0 ,
c; *>7, d; sur ces urnes sépulcrales en forme de trône, le défunt est représenté par son buste
posé directement sur le siège. A ujourd’hui encore, à Arles-sur-Tech dans les Pviénées-O rieutales,
les bustcs-reliquair^s des saints locaux, Abdon et Sennen, sont posés sur un trône (commun), pendant
les processions.
Quelques exemples : A. G r a b a r , Martyrium, I, p. 8 2 , 17.0, /|5 6 . Comme souvent, il s ’agit d ’un
processus de sélection, les tom beaux des m artyrs, grands et petits (reliquaires), n ’ayant pas été les
seuls, d ’abord, à reproduire les formes d ’architectures funéraires monumentales. \ o ir les exemples
remarquables mais peu connus de monum ents cimetériaux courants qui reproduisent des basiliques
avec et sans voûtes, des basiliques à coupole, des édifices cubiques avec et sans croix inscrite : en
Nubie (ügo M onneret de V il l a r d , La Nubia Medioevale I, 1 9 3 5 , p. n h, 1 1 8 , 11 9, i 3 6 , 1 3 7 ,
fig* 9 D> 9 6 ’ 1 1 8 , 12 0 - 1 2 1 ) , en Armenie et en Crimee (A. L. J a k o b s o n , Srednevekovyj Chersones, \n*-
*ivc s. (Materialy i issledovamja po Archeologii S S S R , n° 1 7 . M oscou-Leningrad, 1 9 5 0 , % . 1 5 5 - 1 0 7 ,
a et b).
I.A ft S E D I A IH S A X M AItC O » À VEM SE
an importe quelle hauteur. Et, du même coup, se trouverait expliquée la présence d’ images
sur tous les côtés de la Sedia, car les trônes épiscopaux, appuyé contre le mur du chœur,
sont généralement dépourvus de décor sur leur côté postérieur, tandis que les lutrins
en forme de trône, dans les églises syriennes, ne reçoivent les ornements que sur ce côté
postérieur (pl. VIII, l\). Le reliquaire, lui, pouvait se dresser seul, probablement posé
sur un socle, et exposé de façon à ce qu’on puisse l’approcher et le voir de tous les côtés.
Dans notre étude sur le Trône des martyrs, nous avions cité des cas de martyria — ora
toires paléochrétiens — où l’on voyait le trône vide du saint, à côté du sarcophage avec
ses d ép o u illes^ . Nous ignorons remplacement primitif de la Sedia, mais on sait — je l’ai
signalé au début de cet article — qu’au moyen âge elle se dressait derrière le maître autel.
Cette place a pu lui être réservée, comme à îa cathedra s. Pétri, parce qu’on tenait la Sedia
pour le siège épiscopal de saint Marc à Alexandrie. Mais cet emplacement irait aussi bien
à un trône-reliquaire. N’appelle-t-on pas thronus sancti... le chœur de certaines églises de
martyrs? Et n’est-ce pas au même endroit, par rapport â l’autel et au chœur, que se trou
vait la statue-reliquaire de sainte Foy trônant dans son église de Conques
C’est au stade suivant dans l’évolution du culte des martyrs que correspondrait !«•
type du reliquaire en forme de trône, puisque le siège idéal et le tombeau du saint étaient
encore séparés, dans les martyria de Salonique et de Sébaste en Palestine que nous avions
pu citer, et qui reflètent des usages du v® et vi* siècle. Mais la Sedia, qui n’est pas sensi-
bltm ent postérieure (voir t«/ra), prouve que la réunion du reliquaire et du trône en un seul
objet a pu se faire déjà pendant les tout derniers siècles de l’Antiquité. En outre, l’icono
graphie des reliefs, autour des deux ouvertures de ce que nous supposons être le dépôt de
reliques, tendrait à confirmer de son côté cette supposition. Je rappelle qu’on y trouve,
les deux fois, les arbres du Paradis (qui manquent sur la paroi gauche de la Sedia dépourvue
d’une ouverture du « dépôt de reliques). Ce paysage paradisiaque signifierait que celui à qui
appartenait les reliques ci-contre séjourne maintenant au Paradis, ou si l’on veut, que
ce dépôt de relique est un domaine « exterritorial » dans ce bas monde, et appartient en
droit au Paradis. Et d’autre part, ce n’est pas par hasard, croyons-nous, que les deux
anges sonnant la résurrection des morts se trouvent fixés, avec 1 image du symbole de
Matthieu, du même côté que l’une des ouvertures du « dépôt de reliques«, et que de tous,
les sujets iconographiques qu’on aurait pu évoquer à côté des symboles des évangélistes,
on n’en ait retenu que celui-là. Le thème de la résurrection des morts est un thème funé
raire, et il convient donc a priori à l’iconographie d’un reliquaire. Résurrection des morts
et paysage paradisiaque sont d’ailleurs deux sujets complémentaires : une fois ressuscités,
les fidèles rejoignent les martyrs dans leur séjour paradisiaque. C’est là un complément
iconographique qui se développe en fonction du « dépôt des reliques» et autour des ouver
tures qui y conduisent. Ce complément s’ajoute au thème iconographique principal qui,
à cause de son caractère essentiel, occupe les grands panneaux de la Sedia : victoire par
la croix que répandent les évangiles. Tout comme remplacement de ces images centrales,
leur signification religieuse leur subordonne les thèmes de la résurrection des morts et
du séjour des justes (en commençant par les martyrs) au Paradis, répartis autour du
« dépôt de reliques n. Rappelons aussi que le thème funéraire des palmiers du Paradis a été
retenu par les décorateurs des reliquaires. On le voit, par exemple, sur le reliquaire de
C ra d o '1*.
- On notera, à propos de la Sedia, la curieuse unité de l'iconographie paléochrétienne qui,
très consciemment, applique les mêmes images à la décoration d’ un reliquaire et d ’une
église (ou d ’un chœur de basilique) : le jardin paradisiaque est le thème des peintures
du iv* au vie siècle, sur les murs des basiliques d’Aquilée et de Gaza, ainsi que de Concor
dia Saggittaria près de V en ise^ . Il sert de base à toutes les compositions triomphales des
absides paléochrétiennes et s’aftirme plus particulièrement dans quelques-unes d ’entre
elles, comme San Vitale et surtout Sant’ Appollinare in Chusse. Dans cette dernière, comme
sur la Sedia, la croix triomphale s’ajoute au thème du Paradis et vient même y prendre la
première place que, depuis le milieu du ve siècle, elle tenait déjà dans la décoration de
l’oratoire dit ceMausolée de Galla Placidias à Ravenne C’est là que pour la première fois
on voit la croix briller au sommet de la coupole et réapparaître, en pendant subordonné,
sur le panneau dédié à un martyr, saint Laurent. Nous savons par des textes que la croix
dominait aussi dans la mosaïque de Nola que saint Paulin y fit composer vers 4 o o , dans
la basilique de Saint-Félix Il est probable qu’en Palestine à la même époque, ou au
moins au vie siècle, on était allé aussi loin dans la mise en valeur iconographique de la
croix, et qu’on l’a figurée, là aussi, dans l’abside des églises. La mosaïque de l’abside de
Sant’ Appolinare in Classe, avec sa grande croix auréolée, procède peut-être de ces modèles
palestiniens supposés
Dans cette dernière église, mais aussi avant, à Nola q u ’on ne connaît que par une descrip
tion, et au «mausolée de Galla Placidia75, à Ravenne, la croix du Christ est déjà rapprochée
de Tœuvre d un martyr (saint Apollinaire, saint Félix, saint Laurent), comme nous croyons
le reconnaître sur la Sedia. En Palestine, pays d ’origine du culte de la Vraie Croix, il a dû
{l) Migne, P. G., 7 9 , 577 D. Certes, toutes les croix dans l'abside n’ ont pas à être liées à la croix,
de la P assion; les plus anciennes évoquaient le signe avant-coureur de la Deuxième Parousie : Eric
P e t e r s o n , La croce e îapreghiem verso Oriente, dans Epkemerides Liturgieae, L IX , 19/1 5 , p. 5 2 -6 8 .
<*) W. B a c h h a m , Kirchm und Moscheen in Armenien und Kurdistan, Leipzig, 1 9 1 3 , pl. 3 5 - 3 8 .
J. S t r z y g o w s k i , Die Baukunst der Armenier und Europa, Vienne, 1 9 1 8 , fig. 3 1 7 , 3 i 8 , 3 3 o, 3 3 a , 3 3 /i,
3 3 7 , ^ 7 4 , 5 7 4 , 5 8 o.
<■’> S. Der ftERSEssutr, Armenia and the Byzantine Empire, Cam bridge, Mass., t § k 5 , p. 90 et suiv.
(4) S trz y g o w s k i, loc. c it., fig . 3 3 o -3 3 Ä.
3
30 CA H IERS A R C H ÉO LO G IQ U ES
chœur des b a siliqu es^ , les parois de la Sedia, servaient ainsi, d une façon analogue, a
figurer le jardin paradisiaque; et l’on imaginait dans ces ras que rarchitecture peinte qui
abrite la Fontaine de Vie, ou le Saint-Sépulcre, ou la Concordance des textes évangéliques,
ou bien le corps d ’une église ou un siège en pierre (c’est-à-dire l’objet qu’enveloppent
ces images) se dressait au milieu du Paradis. Cet objet, qu’on fixait ainsi dans un paysage
idéal, était toujours un symbole de l’Église, que ce soit la Sion ou la Fontaine de Vie ou
le Saint-Sépulcre ou le Trône des martyrs. C’est ce qui explique évidemment le caractère
si semblable et à certains égards interchangeable de tous ces développements iconogra-
I1* En dehors des pavements, d ’autres objets pouvaient m ontrer que le chœur sym bolise le Paradis.
Ainsi, au couvent syrien de Q uart unin, il y avait, au début du vi* siècle, deux palmiers en métal qui
s’élevaient à l ’entrée du chœur. Cf. p. 3 3 , n. 3.
{î) G a r r u c c i , loc. cit., p . i 5.
Reproductions en dernier lieu : V o l b a c u , loc. cit. pl. 4 4 , h j .
U «SB b tA DI SA N MABCO V À V K N IS E 31
<l} Figures d ’évangélistes (ou d ’apôtres) debout, au Musée du Caire ( S t r z y g o w s k i , Koptische Kunst,
dans Catalogue général des Antiquités égyptiennes du Muséedu Caire, Vienne, 1 g o 4 , pl. V II, 8 7 7 6 , 8 7 7 6 ) ;
évangelistes debout, sur un relief du M etropolitan Museum et une icône de ia Freer Gallery à W ashing
ton (A. F r i e n d , The Paintingsof the Evangelists, dans Art Studies, 5 , 1 9 2 7 , p. 1 1 5 - 1 4 7, pl. Il, i i- i ;
M. Friend observe que la plupart des images anciennes (avant le x* siècle) des évangélistes debout
sont d ’ origine égyptienne. Cependant, comme les exemples de cette époque sont rares, cette obser
vation, si utile q u ’elle soit, ne prouve pas que ce type iconographique a été créé en Égypte. Il me semble
d ’ailleurs (pour l’époque ancienne) q u ’ il s ’agit moins d ’ un type défini, que d ’une attitude que l’on
donnait aux évangélistes dans certains cas, par exemple, en les figurant dans les niches et les intercolon-
nements, ou portant une croix, ou accompagnant une scène évangélique. Dans tous ces cas — et
il y en a d ’autres probablem ent — les évangélistes ne pouvaient évidemment pas être représentés
assis et écrivant. Or, s’il en est ainsi, toutes les images des évangélistes debout n’avaient pas à remonter
au même prototype ni au même pays.
(li La présence de cette Luna s'expliquerait si 011 admettait que son pendant habituel, le Sol, était
32 C A IIIKR S A R C H ÉO LO G IQ U ES
Fort curieusement, certains détails nous invitent à rapprocher nos reliefs non plus des
sculptures chrétiennes du Levant, mais des monuments sassanides ou de tradition sassa-
nide. Ainsi, la forme des ailes, fortement recourbées, rejoint la tradition iconographique
iranienne(l). Les plumes sont représentées par des écailles et des groupes de petites
courbes superposées qui trouvent également leur pendant dans les œuvres sassanides
C’est là aussi qu’on voit le corps des animaux couvert d ’un réseau de petits points, comme
le lion sur la Sedia^\ ou encore les petits cercles avec un point au milieu qui décorent le
collier de l’aigle sur notre relief et qui représentent des perles Le corps de l’aigle est
figuré d’une façon strictement frontale, comme sur les tissus de style iranien post-sassanide,
byzantins et musulmans ; c’est là aussi que la queue de l’oiseau est traitée avec une
rigidité absolue, en éventail de bandes identiques(0). Ces aigles des tissus orientaux, et
celui de la Sedia, imitent probablement des pièces d’orfèvrerie (voir sur la Sedia, les
plumes en forme de caniveaux concaves).
Ainsi, les représentations des évangélistes apparentent ces reliefs aux ivoires syro-
égyptiens du vi° siècle, tandis que les représentations autres que les figures des saints
se laissent influencer par un style de tradition sassanide. Il ne faudrait certes pas aller
trop loin dans ce dernier rapprochement, et faire observer au contraire, que le sculpteur
de la Sedia n’a point essayé d’imiter un modèle sassanide pour la figure du lion, quoique
ce thème soit un des plus typiques pour l’art iranien. Cependant, si cette figure n’est
vraiment pas « sassanide v, elle n’en est pas moins touchée par une influence orientale
certaine, mais que je ne puis préciser actuellement. Un fait d’ordre négatif pourrait contri-
remplacé par la croix, sym bole du Christ, Soi juslitiae. Comme tant de croix tardives au sommet des
églises, la croix de la Sedia se dresserait ainsi triom phalem ent sur le croissant de la lune, en soleil
noiueau qui règne sur tous les astres du firmament. Cependant, on connaît une fresque des catacom bes
romaines où, au-dessus du jardin paradisiaque, brillent dans le ciel — comme sur la Sedia — des
élniles et un croissant de la lune (sans q u ’ on aperçoive un soleil) : J. W ilî*ert, Malerien der Katakombe»,
pl. 2 1 8 , 2.
t '1 Exemples sassanides et iraniens post-sassanides : K. O r b e li et S . T r e v e r , Orfèvrerie sassanide,
M oscou-Léningrad, 1 9 3 5 , pl. 2 3 , 23 , 33 , 3 ô, 4 o, 4 **, 4 3 , 48 , 4 $. K. Erdm ann, Die Kunst Irans ttir
Zeit der Sassaniden, Berlin, 1 9 4 3 , fig. 7 7 . F . S a r r e , Die Kunst des alten Persien, Berlin, 1 9 2 2 ,
pl. <)4 , 90, 98, 99, 103 , 1 j 6, 130 , 1 2 1 , i 4 i , i 4 li (ibid., pl. 60, 4 i , exemples achém énides).
S ar re , Idc. cit., pl. 1 1O. O kbeli et T r ev e r , loc. cit., pl. 59.
S arre , loc. cit., pl. 1 o 4 , 1 0 7 , 1 0 8 . O rbeli et T reve r , Inc. cit., pl. 4, 1 o, 1 1 , 1 4 , 1 5 , 1 9 , etc. E rdmann ,
loc. cit., fig. 5 9 , 6 4 , 6 5 , 6 6 , 7 6 . Le m otif des petits points qui tapissent le corps de l ’anim al n’est pas parti
culier aux arts iraniens; on le retrouve dans l’ orfèvrerie d ’autres pay s et les peintures qui s’ en inspirent,
par exem ple, les miniatures irlandaises. Exem ples du m otif des touffes de poils, fixées le lon g des
contours de l’animal, comme sur l’image du bœ uf de laSw/ja : S arre , loc. cit., pl. 1 23. E rdmann, loc. cit.,
fig. 7 3 .
Q uelques exemples, parmi beaucoup d ’autres : S ar re , loc. cit., pl. 9 9 , i o 3 ; E rdmann , loc. cit.,
fig. 4 3 , 4 4 , 5 2 , 6 9 .
(!>) V. Falke, Kunstgeschichte der Seidenweberei', fig. 1 4 6 , 1 A 7 , 1 6 0 , 1 8 7 - 1 9 1. Tous ces exem ples,
très postérieurs à la Sedia, ne sont cités q u ’à titre indicatif, faute de spécim ens plus anciens d ’images
frontales d ’oiseaux sur les tissus. Il y a toutes les chances que le m otif soit beaucoup plus ancien que
ces exemples.
Ibid., où cependant le détail de la représentation de la queue est toujours différent.
LA ftSK IU A UI S A * M A R C O fl À V E M S B 33
buer à Je faire plus tard : l’absence de tout ornement sur le corps des animaux. Lorsqu’on
se souvient de la tendance des artistes musulmans, depuis le xe siècle, à tapisser le corps
des animaux — entièrement ou en partie (articulations, cuisses, crinières, oueues, etc.) —
d ’ornements indépendants, l’absence de ceux-ci doit être prise en considération. Les
sources orientales des reliefs de la Sedia, quelles qu’elles soient, ont beaucoup de chances
d être antérieures aux œuvres islamiques du x'-xi' siècle, ou tout au moins indépendantes
de celles-ci. Une école de sculpture chrétienne, en Egypte ou en Syrie, mais plutôt en
Egypte (voir supra), aurait pu produire la Sedia, vers le vic siècle ou un peu plus tard.
Comme le supposait déjà Garrucci, cil.' aurait pu être apportée à Venise, avec les reliques de
saint Marc, en 828.
Ces conclusions sont loin d’être définitives, et elles n’ont rien de catégorique. Cependant
l’origine orientale de la Sedia nous paraît à peu près certaine, étant donné le témoignage
convergent de plusieurs données archéologiques (voir supra). Je m’en voudrais cependant
de ne pas mentionner que les arguments en faveur de l’Orient ne réussissent pas à faire
disparaître entièrement une certaine tt marge de doute n en faveur de l’Occident latin.
L ’idée d’accompagner les images des évangélistes par leurs symboles et de réserver à ceux-
ci des emplacements de choix n’est-elle pas conforme aux usages d’Occident ? A la fin
de l’Antiquité et au moyen âge, n’est-ce pas sur les monuments latins que l’on aperçoit
les anges sonnant la trompette du Jugement Dernier'*2-? Si ces analogies occidentales, en
matière d’iconographie, 11e sont pas décisives c’est uniquement parce que l’absence de
contre-parties orientales connues repose sur le silence des monuments conservés. Ce
silence ne serait-il pas du au hasard? Des textes anciens ne laissent-ils pas entendre
que les symboles des évangélistes figuraient sur des monuments de Syrie, voire sur des
« trônes» (autels ?) des églises syriennes Et les anges avec la trompette, inspirés direc-
Etant donné la carence des monuments d ’ O rient, peut-on tirer un argum ent quelconque du
fait que les zodia des symboles des évangélistes sont représentés en entier (et non pas en protomes
et en buste, comme d ’habitude)? M. E. kitzinger qui veut bien attirer mon attention sur cette paiti-
cularité m ’en signale la rareté relati\e (en dehors de San Vitale de Ravenne, presque tous les
exemples pi-é-romans sont fournis par les miniatures des monuments latins). Mais les zôdia de laSe^iaonl
la particularité de se profiler sur un arrière-plan formé par six ailes déployées symétriquement. C’est
peut-être là la version orientale (cf. les ailes déployées d ’une façon sem blable sur les images des Séra
phins et des zodîas de la vision d ’ Ezéchiel, dans le Cosmas Indieoplensles du Vatican et 1"Évangile de
Rabula (Ascension). Exemple peu connu des ztklia représentés eu entier : dessins du vu* siècle sur le
cercueil de saint Culhbert à la cathédrale rie Durham. E. K itzin zer, The Coffin o f Saint Cuihbert, Oxford,
t()5o.
4 Par exemple, sur les miniatures de TÉvangile de Lindisfarne et de l’ Évangile irlandais de Saiut-
Gall.
Une description ancienne du grand monastère syrien de Quartamiu rapporte que, en 5 i a ,
l ’empereur Anastase y fit faire, entre autres, «un trône en marbre« qui avait six empans et demi de
longueur, et quatre et demi de largeur. Sur ces quatre faces, étaient peiutes des figures d ’ un lion,
d ’ un bœuf, d ’ un ai{jle et d ’ un homme... Il s’agit probablem ent d ’un autel, mais c’ est dans une autre
étude que je compte proposer un commentaire archéologique de ce texte im portant que veut bien me
signaler M. l’abbé Jules Leroy. En attendant : Fr. N u:, Notice historique sur le monastère de Quartamin
(A d es du XIV* Congrès des Orientalistes), Alger, 1 9 0 6 , I I e partie, p. 3 7 et suiv. P o g n o n , Inscriptions
3 4 C AH IER S A ltC IIK O I.O G IQ U K S
tement par l’é\angile de Matthieu et relevés par sainl Ephrem le Syrien, n apparaissent-ils
pas sur les toutes premières images byzantines du Jugement I)ernier (exemples connus à par
tir du i\ c siècle'1 ). Les miniatures arméniennes du moyen âge - . de leur cote, conservent
un autre souvenir de ce thème iconographique, en figurant, face au Jugement Dernier,
la croix entourée (l anges sonnant la tuba terribiln.
Ces témoignages indirects ne sullisent pas à faire disparaître les derniers doutes. Mais
ils viennent appuyer, malgré tout, les arguments assez nombreux que nous avons réunis
dans cette étude et qui étaient l’hypothèse d’une origine orientale de la Sedia.
A. G r a b a r .
sémitiques, p. 39 et suiv. Le même texte signale, devant 1 entrée du chœur, la présence de deux pal
miers en métal. Rien ne saurait mieux prou\er qu'on assimilait le chœur au Paradis.
fl) M iniatures dans l ’Ambr. /4Ç)-5 o, p. 6 6 k. pl. L\ I de ma publication : Les miniatures de Grégoire
de Yazianze de l'Ambrosientie, Paris, 19/48.
(i Exemples : F . M a c le r , Documents d'art arméniens, Atlas. Paris, 193/1, pl. XX\ I, fig. 5 7 ; L II, 1 1 9. ;
L X X III, 16 8 . En Arménie, ces images n'apparaissent pas avant le xiv* siècle, comme veut bien me le
certifier M11* S. Der Nersessian.
P l a n c h e IX
2 4 3
l.e Caire. Sculpture en I jo is . Pial en argent de l’anc. coll. Strojjanov. New W k . Brummer Gallery (1 9 ^ 7 ).
AN U N K N O W N CYCLE OF ILLUSTRATIONS
OF THE LIFE OF JOSEPH
sr
(1) The description of the MS. in the Robinson Catalogue as a « Child’ s Picture Book» is based on
a romantic interpretation of the words èv nôOw o f the colophon (Osov 7o Sapov, x n àtxxovov irovos
'/mini xwirpiov ■ )pà\[/zi’Tos êv iroOw) and bears no relation to fact.
(î) The Greek lext of the Joseph sermon has been published by Assemani in the second volume of
E}>hvtnm Syrus, Opera Omnia, Rome. 1 7 A3 , p. 21 If. On ^Ephraim G raecu s-see C. Emeread, Saint
Ephrem le Syrien, Paris. 1 9 1 8 . The Syrian original — if indeed it was the text from which the Greek
sermon derived — has been printed by T. J. L\mv, Saudi Ephraem Syri llymni et Sermonen, tomus 111.
Mechlen, 1 8 8 9 , p. ù h 7 IT. On the authenticity o f the Syrian Joseph Sermon see 0 . Bardeniiewer,
Geschichte der altkirchlichen Literatur. I \ . Freiburg. 1 93 p. 36 5 ff. The Syrian and the (ireek version
differ widely and not oidy in the literary presentation of the content : episodes told in the Syrian narra-
live do not occur in the Greek text and vice versa. The scene on Rachel’s tom b, for instance, which is
illustrated in our Creek MS. is not contained in the Syrian sermon. Emerf.au, op. cit., p. i 5 8 , says :
36 CAHIERS ARCHEOLOGIQUES
11 5) are covered with a copy of a treaty in Italian, between the King of France and the
Sultan of Turkey, dated Constantinople February i 535 (l).
The colophon, fol. 1 08, states that the MS. was written by the Deacon Luke the Cypriot.
A later note, fol. l i 5 t?., Tltpt rod ypafa'ws riis napivtrns ß fëkov quotes from the memoirs
of the Woivoda Michna family written by Matthew, Metropolitan of Myra, certain bio
graphical facts about this scribe who is apparently identical with Luke, the Metropolitan
of Hungro-Walachy, Bishop of Buzào (Rumania) and is supposed to have written for the
Woiyod Johannes Radoules a Gospel Book which once belonged to the Palriarchic church
in Constantinople. Another Gospelbook written by the same man is mentioned in a
Rumanian document in Greek language of i 5g 4 Two signed manuscripts are known
to have survived, one in ihe National Library of Athens dated * 6 7 7 and one at Mount
Athos dated 1 588 Since in both Luke styles himself Bishop of Buzao, the Phillipps
MS. would seem to have been written before 1 5 7 7 when Luke was still Deacon. Where
he was living at that time we do not know, but as the bishoprics of Rumania (Walachy)
were filled by the Patriarchate of Constantinople he may have come from the metropolis
or Mount Athos, from Asia Minor or Cyprus.
The Phillipps MS. (hereafter referred to as E) is written in an archaising style that
imitates the script of the 1 1til or 12th c e n t u r i e s T h e style of its miniatures too is,
" L ’Ephrem grec qui nous occupe ici est un inconnu... Q uant à la date de son apparition, on d o it la fixer
au iv* siècle». W e are deeply indebted to Prof. Paul Maas, Oxford, for generous advice and assistance
in matters concerning th e text. T h e text o f the Joseph and Asenath Romance (som etim es also called
th e Prayer of Asenath) has been printed b y P . Battifol in Studia Palnslicn, a* fascicule, Paris. 1 8 9 0 ;
an English translation, preceded by an introduction , has been published by E. W . Brooks, London
1 9 1 8 , in Translations o f Early Documents, Series II, Hellenistic-Jewish texts. B attifol dates this
Greek Apocrypha in the 4 th or 5 th century A. D. whereas G. D. K i l p a t r i c k (Living iswc in liiblicnt
srlinldrslnjt, The Laut Supper, in The Expository Times, 1 9 5 2 , Oct., p. h) recently proposed a much
earlier date ( i s t cent. B. C.), regarding the book as pre-Rabbinic and as a piece o f Hellenistic-Jewish
propaganda. T h e version of the text, however, which th e Phillipps MS. represents is certainly not
Pre-Christian, for it m entions a.o. the Trinity. In the MSS. the Joseph and Asenath Romance as a
rule follows Ephraim ’s Joseph sermon. W e are indebted to Mi*. C. H. R o berts, O xford, for draw ing
our attention to Prof. K ilpatrick’ s interesting study.
T he text of this «Prem ier Traité officiel de la France avec la P o rte r seems to have originally been
drawn up in French and Italian, see E. Charrière, Acgociationx de la France dam !e Levant, in Collec~
tions des documents inédits, sér. 1, vol. I, Paris. i 8 5 o , p. a 83 ff. The copy o f the treaty in the P hillipp s
MS. is w ritten in an Italian cursive which Mr. J. W ardrop, London, assigns to the m iddle o f the 1 6 th
century. The paper o f the Phillipps MS. has been certified by Mr. Dard H unter as Fabriano paper w ith
the Pietro Malano water mark (kind information of Col. D. Me. McKell). In spite of th is, there is no
sufficient reason for assum ing th at the MS. was either written in Italy or has left the Levante before
the 1 7 th century.
See E. l»b Hirmuzaki, Documente prwiloare îa I storia Romanilor X i V; Documente Grecesti de N. Jorga,
I, p. 100 : Aovxà t o w Kxmpiov èv $fxépot.t> t où e i i f f s f e o r c c T o u ttvOévroç Jfitùiv 1(aâvvov
with the exception of the landscape settings, not that of the time at which the book was
composed, but in this case the model whose appearance the 16th century illuminât >r
was out to preserve as best he could dates from the Early and not the Middle Byzantine
period. Its style unmistakably is the one so familiar to us from one of the few surviving
originals of Early Christian illumination, the famous purple Codex of the Vienna Genesis.
It may be added at once that hardly any stylistic difference can be detected between the
miniatures of the first (Ephraim Syrus) and the second tract (Joseph and Asenath) which
suggests that the style was uniform throughout in the model itself.
\Ve shall deal first wfith the iconographie aspect. The 63 miniatures illustrating
Ephraim Syrus’ Aiyos els ibv ttdyxxkov are by far the largest Eastern cycle
of Ihe Joseph story that has come to our knowledge, containing many (ca. i i ) scenes
which have no parallels elsew here^ . What distinguishes this cycle from all other sets
of Joseph scenes and gives it its special importance is the fact that the text it illustrates
is not Genesis, but a Bible paraphrase, a panegyric on Joseph in the form of a sermon,
sometimes described as a novel about Joseph. These miniatures are not simply illus
trations of the corresponding chapters of the Bible transferred to the pages of a non-
Canonical book; quite a number of compositions of this cycle has been invented expressly
for the text in which they stand (the particular narrative of Ephraim Syrus).
The same holds good, of course, of the illustrations of the Romance « Joseph and Asenath
the second item of the manuscript — comprising 1 7 miniatures — since here the whole of
the narrative is a Post-Biblical invention. Genesis simply records that Joseph married
Asenath, the daughter of an Egyptian priest.
1 . Jacob seated with Joseph between his knees, surrounded hy the brethren [pl. XII, 1]. (fol. 5 v.)
The only miniature with a kind offrante consisting of a simple coloured strip, red on the sides changing
to blue at the top. This peculiarity and the character of the representation suggests the possibility
must have been written in uncials. — A similar case of archaising w riting in the 16 th century is, for
instance, the interesting Barlaam and Josnphat m anuscript in the Library of the Senate of Athens
(MS. i 1), publ. by A. D e h ttk , Les urnmisent* à tutnialures et à ornements des Bibliothèques d’Athènes,
Bibl. de la Faculté Phil, et Lettres de (’ Université de Liège, Liège, 1 9 2 6 , p. 10 6 ff.
A W estern copy of a very extensive Eastern cycle of Joseph scenes, com prising ca. 60 episodes,
is contained in the Anglo-Saxon Heptateuch of the Iîrit. Mus., Cotton MS. Claud. B. IV, fol. 53 r", 7 a v".
10 The iconography of the story of Joseph has been dealt w ith repeatedly in th e last 5 o yeari and
alm ost every monograph on Early Christian monuments containing Old Testam ent illustrations has
a chapter devoted to this subject. To quote only some of the m ost im portant studies belonging to
that category : W . 111: Ghlkeisen, Sainte~Marie antique, Rome, l 9 1 1 , p. 3 6 o ff; H. Gkrstinger, Die W«e«i*r
Genesis, W ien. 1 9 3 1, p. 9 7 ff: 0 . Demus, Die Mosaiken von S. Marco in Venedig, Baden. J 9 3 5 , p. 5 A ff;
P. B l b e h l , Die Byzuntinisrhen Handschriften, Ï, Beschr. Verz. d. Ilium . Hsch. in Österreich, N. F. IV,
L eipzig, 1 9 3 7 , p. 6 7 ff; C. Gecctielli, La Cattedra di Massimiano IV-V, Roma, 19 A 0 , capitolo vm.
F urther, still indispensable, I he pioneer study of J. J. T ik k a n e n , Die Genesismosaihn vou S. \fareo, in
Acta soctetatis scientiarum Fenniciae, Helsingfors, 1889« A conspectus of the Joseph theme in literature
38 CA H IERS A R C H ÉO LO G IQ U ES
that this miniature was designed as a proper frontispiece and in the original was placed right at the begin
ning of the text, i. e. in the space now held by the decorative headpiece (fol. 1 r.) The miniature has no
exact parallel in the pictorial cycles illustrating the Joseph story of the Bible text. There the nearest
equivalent is the scene of Joseph telling his dreams to his parents in the presence of his brothers. In the
Vienna Genesis (Pictura 39) Joseph faces his parents and his brothers are seated behind Jacob. In
S. Marco (Cotton Bible tradition) Jacob is seated frontally, not unlike the figure in E, but again Joseph
is placed laterally expounding his dreams. A compositional arrangement of Jacob and his sons similar to
that in E is found in the illustration o f another incident in the Vienna Genesis, Picl. 38 . In E Joseph
stands between his father’s knees as if he were seeking or receiving protection from Jacob against the
accusations and hostile demonstrations o f his brethren who press forward from either side. The position
of Joseph in Jacob’s lap seems to echo the passage in Ephraim’s text which reads : tt As the Lord was sent
to our Salvation from the lap of the Father so Joseph was sent from Jacob’s lap to visit his brothers».
At any rate, the miniature is probably not meant to illustrate a particular incident in Joseph’s life ,
but to epitomise the relationship between Joseph, Jacob and the brethren. A peculiarity of E is the
absence of Joseph’s stepmother which constitutes a further parallel to the S. Marco iconography.
2 . Jacob sends Joseph to visit his brothers [p l. XVI. qJ. (fol. 6 v.)
Some similarities with the relief in Naples, Sta. Restituta (repr. by E. Bbrtaux, L'art dans VItalie méri
dionale, Paris, i g o i , pl. XXXIV) ; commanding gesture of Jacob, Joseph shouldering his staff, turns his
head back as he leaves. The selling, however, is different; E shows an open landscape whereas in the
Naples relief Jacob is seated in an aedicula.
and art is to b e found in P. F a b r e , Le dveloppcincnt de Vhistoire de Joseph duns l/i littérature et dans
Vart au cours des douze premiers siècles, în Mélanges d ’archéologie et d'histoire, XXXIX, 1 9 2 1 - 1 9 3 3 ,
p. 1 9 3 ff. New ligh t on th e symbolic significance of the Joseph theme in Early C hristian a rt has been
recently thrown by M. Schapiro, 1he Joseph scenes on the Maxiuiiatim Throne, in Gazette des Beaux-
Arts, July, 1 9 5 a , p. 3 7 ff.
AN U N K N O W N C Y C L E O F ILLU STR A T IO N S 39
8. The brethren feasting [pl. XIII, i], (fol. t i v.)
The scenes of miniatures 8 and 9 usually form a single whole : the brethren see the two Ishmaclite
merchants approaching while th«y are feasting (cf. S. Marco, Paris. Gregory, Octatcuchs). The division
into two separate (monoscenic) pictures is most certainly not the original version of the subject. Even
more significant is another deviation of E from the iconography of the known cycles : in E the brothers
are seated in a full and not in a half circle. They do not recline, but are in a kind of squatting posture
and half of them are seen from behind. Circular arrangements of figures with some of them given in back-
view are known to have existed in Late Classical painting as is attested by the author-portrait of the Agri-
mensores Codex (Carolingian copy from Fulda) and by the drawing of the church council in the illustra
tion of the Fides Catholica of the litrecht Psalter (fol. 90 v.), and further by an early Christian ivory in
Dijon with Christ and the Apostles (repr. in W. F. Vot.bwh, lüfenheinarheiten der Spit antike und des frühen
Mittelalter«, Mainz, 19 5 2 , 1 48). The closest parallel, however, to E. is afforded by one of the irwy
panels of the Sens casket [pl. XIII, «] representing the feast given by Joseph to Jacob and his sons
(A. Goldschmidt ol K. Weitzmans, Die byz. fenbeimkulpturen, Ï, Berlin, 1 g 3 o, n° 1 2 4 ,r).
9 . The Ishm aelite merchants arrive with their camels | pl. XIII, 1 J. (fol. 1 2 r.)
As in S. Marco the heads of the camels emerge from behind the hillock.
11 . Joseph sealed on one of the camels, led by the Ishmaelites, approaches Rachel’s tom b. (fol. t 3 r.)
Except for the introduction of the motif of Rachel’s tomb similar scenes in S. Marco and particularly
in the Paris Gregory.
12 . Joseph falls w eeping on Rachel's tomb [pl. XVI. 1]. (fol. i 3 v.)
Illustration of an incident found exclusively in the Ephraim text. Rachel's tomb has the shape of an
unadorned trough covered by a gabled lid. The episode at Rachel's tomb apparently reoccurs in Islamic
versions of the Joseph legend. Referring to GrCnbaüm, Yüssif und Sli.eika, Z. D. M. G., XIV, 1, The Jewish
Encyclopedia, p. a 5 a even claims an Arabic origin for ttThe story of Joseph at his mother’s tomb». But
Ephraim Graectis precedes, of course, the Islamic version and might, indeed, have been the source from
which the motif has been taken over. — Rachel’s tomb is mentioned among the landmarks of Palestine
in the Itiaerarium tiierotolyinitanum xtre flunliirateme of 333.
13 . T h e Ish m aelites b id Josep h to cease w eep in g and to tear h im se lf aw ay from the tom b. (fol. 1 5 r.)
The second episode of the incident at Rachel’s tomb.
14 . The brethren kill a goat to stain Joseph’s coat w ith its blood [pl. XIV, 1]. (fol. 18 r.)
The design in E, taken for itself, gives the impression that the first of the brothers was kneeling in the
air, but comparison with the Paris Gregory [pl. KIN . «], the Maximianus Cathedra and the Octateuchs
makes it clear that in the prototype the figure was thrusting one knee into the back of the animal he is
about to slaughter. For repr. of the Octateuch miniatures see Ta. Oi'spkssst, L'Oclateuqite de la Bibliothèque
du Sérail, Constantinople^ Solia, 19 0 7 and D. C. Hesseiing, Miniatures de rOctateuque gnxdeSmyrne, Leyden,
1 9 ° 9-
15 . The brethren show the bloodstained coat to Jacob [pl. X I\, 1]. (fol. 18 r.)
■At the sight of the bloodstained coat Jacob does not break into violent gestures of mourning as in
S. Marco or in the Maximinianus Cathedra, in E Jacob sits with his chin resting in his hand in an atti
tude denoting sadness, a motif which ultimately goes back to the mourning Heracles of Lysippus and is
frequently used in late classical art for the representation of mourning genii (for instance o f personifications
of Barbarian nations). Only the Paris Gregory [pl. XIV, 3] and the Smyrna Octateuch show Jacob in this
attitude.
17 The m ourning Jacob bending towards a cave [pl. W . ij. (fol. ao v.)
The cave towards which Jacob can be se;>n bending is probably meant to represent tlip grave referred
to in the text of Genesis : nl will go down into the grave unto my son mourning». In the upper corner
I ehind Jacob, a blue segment is visible with rays issuing from i t , a motif which may be compared to
the design nf tlie sun in pict. aft of the Vienna Genesis or that in the (lotton Bilde miniature «f tin»
promise of God to Abraham (Peircsc's copy, repr. by Ouont. op. rit.). The figure of Jacob resembles very
closely that of the Vatican Octateuch, Gr. 7A 7, in the scene of Rebecca’s death (reprod. by II. Gerstogeh,
Wiener Genesis, fig. 7 4).
18 . T he Ishm aelitcs and Joseph arriving in E gypt [pl. XV, 5 ]. (fol. a i r.)
Tiiis scene occurs nowhere else : neither is there anything in the accompanying text which would seem
to account for this illustration. In the Syrian original of the Ephraim sermon, however, the merchants
address Joseph when they approach Egypt describing it in alluring terms (sa slave in Egypt better off
than a free man elsewhere»). This passage of the Syrian text could concievablv be the source of our illus
tration, though the set of illustrations in E furnishes no other evidence that the Syrian Joseph sermon
had ever been illustrated. The relationship of the Greek Joseph sermon and the Syrian text — the two
differ widely — has not yet been investigated.
24 . P otiphar’s wife attem pts to draw Joseph towards her. (fol. a 8 r.)
25 Joseph leaves his garm ent in the hands o f P otiphar’ s wife. (fol. a 8 r.)
Potiphar is seated as in the Octatcuchs. There even reoccurs the motif of Joseph’s mantle with the
sleeve fluttering horizontally.
29 . The cup-bearer and the chief baker sent to prison. (fol. 3 i r.)
Potiphar seated as in S. Marco. A further similarity to S. Marco in the jailor and one of the prisoners
turning their heads back towards Potiphar.
!n r t ;t u t fLir B y z a n t in ls f f lt
urd
neu;,r^'ischo Philologie
cter U n iv o r s f t û t M ü n c t a a
AN 1 > K N O W N CYCLE OF lM .lS T n V M O N S /it
3 0 . Joseph expounding the dreams o f his fellow prisoners [pl. XV, 3]. (fol. 3 a r.)
The threo prisoners are sealed on the ground as in the Vienna Genesis and the Octateuchs and not
standing as in S. Marco. But the form of the prison has many points in common with that in S. Marco :
in both the building is articulated by a division in three arcades and the prison windows are indicated
by slit-like openings in the back wall. Practically the only major différence between the two settings
is the Hat alignment of the arcades in S. Marco as opposed to the angular, broken front in E. The tendency
to place buildings diagonally is noticeable throughout E.
31 . The cup-bearer’s dream. (fol. 3 a v.)
32 . The baker’s dream. (fol. 34 r.)
The dreams of the cup-bearer and the baker are represented as two separate scenes and the two dreamers
are not shown asleep as in S. Mnrco, but engaged in the action of their dreams.
33 . Joseph in prayer. (fol. 35 r.)
. Joseph is kneeling and praying in the manner of late medieval donor figures. The text speaks of Joseph
turning to the Lord in prayer, but does not mention the angel descending from heaven which we see in the
illustration. The whole representation looks suspect and rather suggests that the miniature which the
16th century copyist had had before him was damaged or, for some other reason, difficult to decipher.
The copyist, therefore, seems to have interpolated some details inadvertently couching them in terms
of his own artistic idiom. The text immediately preceding the miniature, speaking of the salvation of
the three ( .hildren from the furnace, slops abruptly in the middle of a sentence which also points to some
defect of the model at this point. It is extremely doubtful whether there is any relationship between the
miniature and this particular passage of the text, but it may be worthy of note that the Byzantine iconogra
phy of the three Children includes the appearance of an angel.
3 4 . The chief b u ller presenting the cup to Pharaoh. (fol. 36 r.)
Iconographically identical with S. Marco.
3 5 . Pharaoh’ s dreams. (fol. 36 v.)
As in S. Marco Pharaoh's bed can be seen behind drawn curtains; and as in S. Marco and in the Sens
casket (and contrary to the version in the Vienna Genesis and in other cycles), the lean and the fat cows
do not face each other, but follow each other.
3 9 . P otiphar sees Joseph sealed with Pharaoh [pl. XV, 0]. (fol. Ito r.)
This and the following two scenes illustrate an episode which is exclusively told in E. In the first minia
ture the situation is characterised in a masterly manner by the twisted figure of Potiphar glancing back
through an arch as he furtively leaves the scene, A diagonally placed, foreshortened doorway is a favou
rite stnge-properly of the illuminators of the Vienna Genesis, used to divide and at the same time to connect
parts of a scene. The complete twisting round od Potiphar’s head while he moves in the opposite direc
tion has an equally striking parallel in the Vienna Genesis, pict. 9 a, in the figure of Jacob’s servant. Poli-
phar’s «proskynesis’î in pict. 4 1 of E closely resembles Asenath’s wproskvnesis’j before Jacob in
pict. 78 of E.
40 . Potiphar tells his wife the news of Joseph’s rise to power. (fol. 4 o v.)
h.
CAHIERS ARCHEOLOGIQUES
4 2 . Jacob sends his sons into E gypt to buy corn. (fol. A a v.)
Jacob with halo as in the first two miniatures of our cycle. His gesture in sending liis sons to buy corn
similar in S. Marco. In E the sons of Jacob seem to hold a saddle, a m olif that is meant to suggest their
impending journey.
4 3 . The brothers arrive in E gypt. (fol. 43 r.)
On the left two brothers on horseback entering the scene. The first points to the cities of Egypt which
emerge on the right behind hills. The turning hack of his head and the way the frame cuts the hind part
of his horse makes us feel that the remainder of the brothers are following.
4 4 . Jacob’s sons protesting against the charge that they are spies. (fol. A 3 v.)
Joseph enthroned in the centre, the brothers in fours on either side vividly gesticulating. Behind
the figures a kind of wall enclosure with small windows, above apparently an open landscape. This
scene missing from the other cycles.
4 5 . Joseph orders Simeon to be bound. (fol. A A r.)
The text of the model seems here to have been corrupt. For the statement that Joseph ordered Simeon
to he bound is repealed, but it is not connected with the preceding or following phrases. Moreover,
it does not occur in the printed version of the text. The brothers are not present while Simeon is taken
as a hostage. The setting seems to denote an interior lfcith ceiling and curtains.
4 6 . Jacob’ s sons return to Canaan. (fol. A A v.)
While they are resting one of the brothers discovers the money in his sack; his discovery causes alarm
among his brothers. The animals are camels as in the Octateuchs and not asses as in the Vienna Genesis.
Otherwise the scene closely resembles that of pict. 38 of the Vienna Genesis where it is combined with
the episode told in E in the next miniature.
47 . T he brothers tell Jacob their adventures. (fol. A 5 r.)
Jacob, gesticulating, is facing his sons and not as in the Vienna Genesis imposingly enthroned between
them. This type of Jacob agrees more with the corresponding figure o f S. Marco.
54 . The brothers are overtaken and abused b j Joseph’ s steward. (fol. 5 o \.)
The steward, in Turkish costume, stops the brothers as they are leaving Egypt. We see the rear of
their caravan and as the steward catches up with them, the last of them turn their heads back.
61 . Benjamin kissing Jacob’ s knees and showing Joseph’s gifts. (fol. 5 7 v.)
This episode is exclusive to Ephraim. Benjamin receives Jacob's blessing in a humble altitude;
behing him, on the ground, a golden cup and a book — the presents sent by Joseph to Jacob.
The miniature illustrates the passage describing how Asenath fell to the ground and wept and
would not eat after she had heard the voice of God telling her that Joseph was destined for her.
6 7 . Asenath after dressing in m ourning throws her golden garments from the w indow [pl. X M , 3 ].
(fol. 65 v.)
This episode occurs in the printed version edited by Battifol, but at a later stage o f the narrative.
The tower in this scene is a square building.
68. Asenath by her tow er praying. (fol. 69 v.)
The miniature evidently illustrates the passage immediately following which says that Asenath turned
towards the East door of the tower and lifted her hands to heaven. She is actually represented with the
tower behind her, facing an ellipse from which rays emanate.
69 . Asenath falls to the ground w hen the Archangel appears. (fol. 7 5 v.)
The setting is contradictory in itself and contradictory to the text. Asenath appears to be out of
doors with the tower behind her, although the whole scene is framed by curtains. According to the
text the scene takes place high up in the tower.
70 . The archangel tells Asenath to lake uff her black garm ent and shake th e ashes from her head.
(fol. 7 7 v.)
The tower is visible behind.
71 . The archangel and Asenath before a table on w hich lies the m ystic honeycom b [pl. XX I, h \
( fo l. 8 a r.)
The archangel is seated in exactly the pose of the angel at the tomb of Christ; Asenath is standing behind
the table. To the right an architectural motif in the form of a tall square building placed diagonally on
the stage. The incident illustrated is the story of the honeycomb which the divine angel asks Asenath
to look for in the storehouse. After eating himself from it he gives Asenath a piece to eat and tells her,
that she has now eaten the bread of life and has drunk the cup of immortality and been anointed with the
unction of incorruption. According to K i l p a t r i c k , op. cit., p. 0, the symbolism o f this meal is closely related
to that of the Last Supper, a common pattern being the explanation of the similarity.
72 . Ascnath’ s maids bring her w ater to wash h er face before m eeting Joseph. (fol. 86 r.)
Asenath is attired in her wedding dress. On the left a chest is visible in which the dress was stored.
73 . Joseph embraces Asenath. (fol, 88 r.)
The scene has an elaborate architectural setting, but the exact meaning o f parts of it especially on the
left, is not clear. According to the text the scene takes place in the courtyard near Asenath’s tower.
74 . Joseph asks Pharaoh to give Asenath to him as his bride. (fol. 90 r.)
Pharaoh is seated on an elaborate throne the back o f which has a curiously convoluted shape.
AN U N K N O W N C Y U .R OF ILM STH A TIO N S
79 . Pharaoh’ s son tries to induce Simeon and Levi to kill Joseph. (fol. 9.5 r.)
Pharaoh’s son is seen drawing his sword to threaten"Joseph’s brothers who are unwilling to commit
the murder for him.
The story of Joseph has given rise to the most extrusive pictorial cycles of which we
have knowledge in Early Christian art. But none of the sets of Joseph illustrations has
survived complete, either in the original or in copies; what has come down to us are
only fragments of such cycles or more or less condensed extracts from them. It seems
that already at an early date there existed several iconographie traditions side by side,
their mutual relationship, however, — whether ultimately they all go back to a common
archetype or whether some of them have arisen independently from each other — is in
the present state of our knowledge quite impossible to define. Often the cycles agree
in the treatment of a considerable number of subjects and suddenly differ radically in
other scenes. Agreement with the still extant part of a cycle does not necessarily mean
that for the sections which are not preserved or included, the correspondences would be
equally close. That the iconography of E is, in two or three instances ( 46, k 7, /i 9),
very similar to that of the Vienna Genesis may not prove anything since representations
of these scenes happen to be preserved only in the Vienna Genesis cycle and we cannot,
therefore, be sure that for instance the Cotton Bible — S. Marco tradition showed in this
respect any appreciable differences. Suitable material for testing the iconographie
relationship are evidently only those scenes for wrhich we have representatives in several
cycles, and naturally this limits us to the main incidents of the story which occur even in
the most abbreviated cycles.
On the whole, there are remarkable iconographie resemblances between the illustrat
ions of E and the Cotton Bible — S. Marco tradition, hut some very significant diverg
ences in the treatment of three of the major incidents ( 3, i 4, i-5) suggest a dependence
of E on a pictorial cycle which is reflected in the Joseph scenes of the Paris Gregory.
The parallelism, however, of the Joseph cycle of the Paris Gregory and of E is not complete,
they differ in one important point : the feasting brothers are arranged in the Paris
h a.
46 CA H IBR S A R O H K O l.O filQ t-K S
STYLE
Before we can hope to form an idea of the style of the original which the illuminator
of the Phillipps MS. copied we must deal with the style of the copyist himself. The first
thing we notice is the discrepancy between the Eastern type of the figures and the style
of the landscape settings which is that of 1 6th century Western painting. The situation
is in fact not unlike the one wre meet in the illustrations of one of the Paris copies of t h i
Marciana Pseudo-Oppian (Paris MS. grec 2 ^ 36) which wras in all probability executed
in Venice about i 5oo , in as far as the accuracy of the copyist is confined to the figure
composition O . And like in the case of the Paris Oppian it is more than likely that the
miniaturist of E was brought up in the Western artistic tradition, if indeed he were
not of non-Greek extraction.
The modernised landscape settings of E are, however, by no means arbitrary additions
or entirely free phantasies of the copyist. The cave towards which Jacob bends in miniat
ure . 7 [pl. X V , , ] was most certainly there in the original and so were the various hillocks
or slopes behind which the asses or camels of wayfarers frequently emerge ( 3, 4, 9, 6 s).
It is only the general appearance of the landscape surface and of its vegetation which is
made to conform to the visual standards of eyes trained in the West.
W ith the architectural settings the situation is far more complicated. Except in
details (forms of roofs or shapes resembling spires) the buildings or groups of buildings
(representations of towns) show hardly any stylistic influence of contemporary architect
ure, certainly not of Renaissance forms of Western architecture. Nor can we find any
analogies to this kind of architectural setting or similar town views in the monumental or
miniature paintings of the Late Antique period in w hich — as we shall shortly see — the ori
ginal of the illustrations of E must have originated. The « walled cities » of the miniatures
of the Vienna Genesis, the Rossanensis, the mosaics of Gerasa, etc., consist of agglomera
tions of civilian buildings surrounded by a fortified wall of polygonal shape; in E the
(l) On the various copies o f the Oppian illustrations see A. W . B y v a n c k , De geillustreerde Hand
schriften van Oppùi nus' Cynegetica, in Mededeelingm van het Nederlandgeh Historisch Iuxtitunt te /tome, V ,
1 9 2 5 , p. 34 ff. ; further W . L a m e e r b , A pâmée de Syrie et les Cynégétiques du Pspudo-Oppien dans la
miniature byzantine, in Bull, de l'fnst. hist, belge de Home, XIX, 1 9 3 8 , p. i 4 1.
AN U N K N O W N CYCLE OP ILLU STR A T IO N S f\7
princely robes designed in the latest Byzantine fashion. They are variants of the Imperial
costume of the Paleologue Emperors and show the bell-shaped mantle already trans
formed into the close-fitting « caftan r-shaped dress (the <raxxos) with which one is more
familiar from the Russian court v e s t m e n t s T h e r e are a few other cases in E where
the costume is brought up to date: the Ishmaelite merchants wear Turkish costume and
turbans, Potiphar’s wife is dressed in the Veneto-Levantine manner of the i 6th century
In strange contrast to the modernising spirit which manifests itself in the various
changes we have just enumerated stands the astonishing fidelity of reproduction of the
prototype in rendering the design of the ordinary, undistinguished figure and in trans
scribing the style of the figure composition. In fact, few examples are known from East
Christian art where not only the general disposition and movement of the figures in the
original, but also the formal treatment has been preserved in the copy so perfectly. A
comparable case is perhaps the Paris Nicander (Suppl. grec. 2k 7) whose miniatures reflect
most faithfully the illusionist technique of the Late Classical model W. In our Joseph
cycle it is the style of the figures and of the narrative of the Vienna Genesis which is at
once recognizable as standing behind the 16t h century illustrations.
The figures are rendered in the same free painterly technique and no sign of the later
Byzantine linearisms can be detected in them. The squat proportions too are those of
the Vienna Genesis. If a middle Byzantine intermediary had been the model of E the
copy would most certainly have recorded a slenderer figure type. As in the Vienna Genesis
Joseph’s brethren have short tunics and a very distinctive type of shepherds’ — or hunters1
— boots, but they hardly ever wear a mantle (pallium) over the tunic which they always do
in the Vienna miniatures except when they are shown working in the fields or on a
journey. At first one may be inclined to see in this omission one more instance of simpli
fying copying, since, however, Joseph and his brethren wrear no mantles over their tunics
in a second and this time very trustworthy copy of an early Joseph cycle, namely in the
Paris Gregory, we ought perhaps to give the illustrator of E the benefit of the doubt.
Particularly since the cycle of the Paris Gregory and that of E are also iconographically
closely allied.
Perhaps the strongest argument in favour of a miniature cycle in the style of the Vienna
Genesis as the model for E lies in the identity of the language of gestures and of the form
of the narrative. In both, in the Vienna Genesis and in E, it seems to be the same race
of vehemently acting, swiftly moving and turning little figures, extremely lively in conver
sation and evidently of rather excitable nature. They are frequently seen lurching forward,
the arms stretched out and gesticulating with hands that seem to stretch themselves while
the fingers open widely. A comparison of the scene in E in which the brethren show
Jacob Joseph s coat and the one in the Vienna Genesis in which they show him the money
»
found in their sacks (pict. 3cj) leaves no doubt that the artists who invented the two
compositions spoke the same artistic dialect [pl. XIV, i, 3]. And it is important that the
miniatures which illustrate scenes particular to the narrative in Ephraim Syrus are
composed in exactly the same manner.
In the miniatures of the Vienna Genesis and also in E there is surprisingly little to
find of that frontalitv which is supposed to be a specific characteristic of Late Antique
pictorial representation and one of the elements which herald the art of the Middle
Ages. A strong inclination towards frontality of posture is, however, much in evidence
in the Cotton Bible,-S. Marco cycle. There is enough left of the miniatures of the Cotton
Bible itself — and the S. Marco copies confirm the impression one gets from the fragments —
to show that in the Cotton Bible cycle the whole conception of the narrative differed radi
cally from that of the Vienna Genesis paintings. The figures are mostly aligned frontally,
in dignified placid pose, and display as a rule little agitation. The gestures are not the
outcome of a movement which affects the figure as a whole, but are a kind of signpost
indicating vaguely the connection between the various actors of the scene. Since we
found earlier on that the iconography of E links up rather with the Cotton cycle than
with the Vienna Genesis, the stylistic discrepancy between the narrative of E and the
Cotton cycle (and close relationship with the Vienna Genesis) raises therefore an interest
ing problem whose discussion must be reserved for another occasion
The generally accepted date for the Vienna Genesis is the 6th century, Syria the most
likely place of origin. The same would apply to the model of E. If we are right in
assuming that the miniatures were directly copied from a Late Classical original this
manuscript must still have existed in the i 6th century. Two more manuscripts have
survived, one of the 16th (Mount Athos, Koutloumousiou Monastery), the other of the
early i 7th century (Oxford, Bodl. Libr., MS. Roe 5), which combine the Ephraim sermon
on Joseph with the Joseph and Asenath Romance and contain sets of illustrations of both
tracts(<2). Of the Mount Athos MS. which we have not seen nothing can be said except
that there the cycle numbers ah miniatures''3’. MS. Roe 5 is illustrated with 4 7 draw
ings, with 2 spaces left blanck for pictures. It was written in i 6 i 4 by Georgios Contis,
Retor of Ainos, not far from Constantinople. The style of the drawings is heavily orien
talising, but il is noteworthy that of the 28 illustrations of the first tract 9 3 agree icono-
graphically with the corresponding scenes in E. Among the drawings illustrating the
second tract there are a few subjects which are not illustrated in E. But here also the
text differs, the text of MS. Roe 5 is a translation of the Joseph and Asenath Romance
into Modern Greek W.
Oxford. Jeanne and Otto Pâchï.
<’) To mention only cne aspect of the very complex question : the new facts would seem to contradict
Prof. W eitzm ann’s theory of the developm ent from the column picture to the continuous frieze.
(4) II. 0 . C o x e , Gitttfafri CW . M SS. Hibl. HihII. I , O xford, 1 85 .Î . p . AG 1 1.
See P. L am Br o s , Catalogue of the Greek Manuscripts on Mount Athos, Cam bridge, 18 9 5 , p. a 8 3 .
The orientalising style of the miniatures conforms completely with the language of the text in
which the hero of the story is addressed as «Effendi Joseph-*.
RSMfcfc*.
V ^ T 00c j^ ayuuijjxJLoi W « ^
*A$«f<i4»u. < ^ c 5V(^o 5)
[ c o jç / x i x o f t <irpprAjJj\j<ztf
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OJc^T.cp.^W vrex, ^Ttxj • tm/^un'Ji^ßcafjjip^ -
^ •xxu '7T0/UXp tlTlop MU-lfJ4pjià.TBD0b
€/“ ^ f ^ * x ^««,pin-&^ioia afou Qopi CDOU^>QOK £(poic qo«C
■ (sujttÔ^oic rçxjm t • l^otmy^ 9a>fj “ . y
i,Ts
1
McKell MS. fol. 12 r.
3
McKell MS. fol. 4«) r.
2
Sens. Ivory casket. Detail.
P lanche XIV
n sp r’
ii M -V «v
n « ,* —
no
h m it- '
fi '
_o
/.
P unch r X V
1 2
Mckell VIS. loi. 90 v. ] Mckell MS. fol. 58 v.
4
3 V lck e ll V IS . f o l . «G v.
5 6
V lck e ll VISS. fo l. 'j i r.
V l c k e l l .VIS. f o l . /j o r.
P lanche X\ I
1
Mckell MS. fol. 1 3 v.
4 ' 5
McKell MS. fol. 82 r. Mckell MS. fol. G2 r.
«IN SEXTO LAPIDE»
L’ANCIEN AUTEL DE SAINT-DENIS ET SON INSCRIPTION
PAR
BLAISE DE MONTESQUIOU-FEZENSAC
Jacques Doublet nous apprend q u ’en i (> i o, au cours (les travaux effectués à I intérieur
de l’abbat iale de Saint-Denis en vue du couronnement de Marie de Médicis, l'ancien maître-
autel fut posté« et l'autel matutinal am is en sa place- 1 . Sur 1autel supprim é on ne sait
presque rien et cette absence de renseignements est d autant plus à regretter que celui-ci
passait pour remonter à une époque très ancienne et que de grands souvenirs y étaient
attachés. La tradition dionysienne voulait que cet autel, placé au-dessus de la confession
qui avait renfermé longtem ps les restes de Denis et de ses compagnons, fut celui-là même
que le pape Etienne II avait consacré en -jbh et au pied duquel il avait donné fonction
royale à Pépin et à ses deux fils, Charles et Carloman ^ . Dans la suite, Charles le Chauve
l’avait orné par devant d ’une table d ’or somptueuse, qui subsista jusqu’à la Révolution.
Plus tard encore, Suger, en souvenir de sa prise d ’habit monastique faite devant ce même
autel, q u ’ il nomme dans ses écrits le principale beati Diomjsii altare 3) et aussi Yantiquum
altare l’avait fait garnir de tables de métal précieux sur les trois autres côtés ru tto tu m
circum quaque appareret a u r e u m v 5 . Respecté et conservé à travers les multiples trans
formations de l'église, il aurait subsisté ju sq u ’au début du xvne siècle, époque où il fut
démoli, ses «matériaux qui étaient de marbre employés en la fabrique du bel autel des
Corps-Saints« q u ’on élevait alors au fond du ch ev e t'6'.
L ’inventaire de i 63/i, si précieux pour ses descriptions des objets du Trésor, même de
ceux qui avaient déjà disparu à cette date, parce qu il reproduit le texte des deux inven
taires précédents ne fait que mentionner cet autel sans le décrire : ctung autel nommé
Je grand autel, fondé de S. Pierre et de S. P a u l*, s’arrêtant seulem ent aux pièces
d ’orfèvrerie dont il était orné parce q ue seules elles offraient matière à pnV *e(,}. L ’autel
figure bien sur le célèbre tableau de la National Gallery de Londres, la Mette de Saint-Gille*,
mais l ’étofle de soie tendue devant lui nous en cache entièrem ent la structure. Tout au
plus peut-on voir q u ’il était de dim ensions m édiocres, ayant à peu de choses près la même
largeur que la Table d ’or de Charles le Chauve, qui lui servait alors de r e ta b le 12 . Con
naissant par Dom Germain Millet les dim ensions de la table d ’or, — cinq pieds et dem i de
long sur trois pieds d f haut — on peut en déduire q ue l ’autel m esurait en larg eu r
environ i m. 65. Q uant à sa profondeur, «Ile était égale à la m oitié de sa largeur, soit
approximativem ent o m. 8 2 . En effet quand, à une date antérieure à i 5o 5, on éleva
la table de Charles le Chauve au-dessus de l ’autel, il suffit p ou r constituer un nouvel
antependium d ’accoler et de ram ener sur le devant les deux tables d ’or des côtés qui
dataient du tem ps de S u g e r ^ . C’est même à cause de ces dim ensions m odestes q u e
l ’autel ancien fut condam né à disparaître.
Il fut remplacé, comme D oublet le précise, par l'au tel m atutinal, qui datait du xiv® siècle,
— «un autel de m arbre noir enrichi de personnages de relief de m arbre blanc, représen
tant le martyre de Saint Denysn — parce que ce dernier était et plus grand et plus p ro p re*
aux cérémonies royales dont l’abbatiale avait souvent l’ occasion d ’être le th é â tre (5 .
Comme conséquence de cette substitution d ’autel, il fallut agrandir la Table de Charles le
Chauve; on y ajouta deux bas-reliefs, un à chaque extrémité, représentant respectivem ent
l ’Adoration des Mages et la Présentation de Jésus au Tem ple, ces m orceaux nouveaux faits
aux dépens de l ’abbaye
Ces maigres renseignem ents ne fourniraient pas m atière à de plus longs développem ents,
si Jacques D oublet, qui avait connu cet autel avant sa dém olition, n’avait noté à son sujet
une particularité qui m érite de retenir l ’attention. Après avoir dit que l ’ancien m aître-
autel était de «m arbre blanc et noir», il ajoute un peu plus loin, q u ’il était soutenu de
r quatre piliers de m arbre blanc». Cela veu t dire, si je com prends bien, que l ’autel se com
posait d ’une table de m arbre noir supportée par quatre piliers de m arbre blanc. Dans
l ’absence de renseignem ents plus précis, il serait hasardeux de se prononcer sur l ’ép oque
de cette table L ’intérêt réside surtout dans une courte inscription, à peine q uelqu es
caractères, dont Jacques Doublet signale la présence sur lu n des piliers de l’autel : «quatre
piliers de marbre blanc, sur l’un desquels étaient gravées les lettres : M. P. V .IIII.» U).
Ln dépit d un point qui a pu être malencontreusement ajouté par D oublet ou même
par 1 imprimeur, 1 un ou 1 autre interprétant le troisième signe comme une lettre et non
comme le premier élément d ’ un chiffre romain, il me paraît difficile de ne pas voir là la der
nière ligne de l ’inscription d ’une borne milliaire :
M [^ H p[/m«tfi«] V U II (le chiffre romain correspondant au nombre 9).
Le m illiaire serait peut-être incomplet de sa partie supérieure, pour avoir été ramené à
la dimension d ’un support d ’autel, ce qui rendrait compte de l’absence de dédicace et
du nom de la ville à partir de laquelle la distance était calculée. Il ne manque d ’ailleurs pas
d exemples de milliaires en Gaule où le nom de la capitale de la cité ne figure pas et qui
portent seulement l ’indication de la distance, M. P. suivi d ’ un chiffre-2'.
L ’ objection qui se présente immédiatement à l ’esprit contre le remploi d’ une borne
m illiaire comme support d ’autel est que ces bornes étaient habituellem ent d ’un très
fort diamètre. Les milliaires, dit M. Grenier dans son M a n u e l, mesuraient en moyenne de
o m . 5o à 0 m. 80 de diamètre; niais il fait également remarquer q u ’ ils ont tendance à
décroître en diamètre comme en hauteur à mesure q u ’on avance dans le temps. Deux
milliaires de Caracalla ne mesurent que o ru. 00 et 0 m. 45 ; un milliaire de
Valérien seulement o n». 3a ^3K
Ajoutons q u ’à une basse époque on a très bien pu transformer en borne milliaire, à
l’occasion de la réfection d ’une route, un tronçon de colonne de marbre em prunté à
quelque ruine en y gravant l’ indication de distance En effet, dans la Gaule du Nord les
bornes milliaires originelles n’étaient pas en marbre mais en pierre. On peut enfin faire
une troisièm e hypothèse, celle d’une pseudo-borne milliaire, c’est-à-dire d ’ une colonne
où l’on aurait gravé l ’indication de distance, soit pour rappeler le souvenir d’ une borne
disparue, soit pour donner à croire q u ’on la possédait encore.
Quoi q u ’ il en soit, la présence de cette borne milliaire, ou de cette pseudo-borne mil
liaire, dans le sanctuaire de la basilique de Saint-Denis, est un fait digne d ’attention et
qui, on va le voir, n ’a peut-être pas de quoi surprendre. Rappelons tout d ’abord que
l ’abbaye s’élève sur un site antique. A diverses reprises, des fragments de pierres sculptées
noir du pape Hadrien I " à Saint-Pierre de Rome, envoyée par Charlemagne. Elle est de marbre noir et
proviendrait des carrières de Port-É troit dans la Sarthe (J.-B. d e R o ssi , Mélanges d'Arck. et d 'Ilis t.,
t . V l l I , p. 8 , 1888). Louis Bhéhier (Dirt. hist, et géogr. ecclésiastiques, s. v. lifasté) signale un a u tel
de marbre noir de la fin du ix* siècle à Blesle, Haute-Loire. C et autel aurait été rapporté de Rome par
la fondatrice du monastère, la comtesse Hermengarde, mais ce n ’est vraisemblablement qu'une légende
pieuse. L ’autel provenant de Brantôme, qui est conservé au musée de Périgueux (Congrès archéo
logique de Périgueux, 1 9 a 7 , p. 3k o- 34 1, fig.) est également de marbre noir.
(1> D oublet , loc. cit., p. a88. — C ette inscription est reproduite par Sir AV. Martin C onway, loc . c it..
p. 1 0 9 , mais il n ’en a pas proposé d'explication.
A. G renier , Manuel d Archéologie gallo-romaine, a* p a r t ie , p . 8 5 - 8 6 .
<S) A . G renier , id ., p . 7 1 .
|4) A . G renier , loc. ci»., p. 7 1 : «O n trouve so u ven t à cette ép o q u e [au iv* siècle] transform és en m il
liaires, des tron çons de colonnes p ro ven an t d édifices ru in és» .
5.
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B Y Z A N T I N E TILES
FROM THE BASILICA IN THE TOPKAPU SARAYI
BY
ELIZABETH S. ETTINGHAUSEN
The writer wishes to thank Professor Helmuth T h . Bossert o f the University of Istanbul for his
permission to study and publish the material from the basilica in the Topkapu Saravi. She also
likes to express her appreciation to the Turkish authorities of the Asari Atika Müzeleri, particularly
its director Aziz Ogan and to Professor A rif Müfid Mansel for giving her permission and facilities for
studying the material under their charge.
(î) The monastery of Patleina near Preslav, the Round Church and the tr palace* in Preslav. See
k rsto Mi v t k v , Die Keramik von Preslav, in Monumenta Artis Bulgariae, vol. X. Sofia, 19 36. All the
earlier literature on these sites is given there. P. N i k o v , Les troiumlles archéologiques les pim récentes
et leur importance culturelle historique, in Bulletin de la Société historique bulgare, X 1V-XV ( 1 9 3 7 ) .
<s> frZeuxippos Gymnasion» (Hath) on the Hippodrome. See D. T. R i c e , 77m» Byzantine fwtfery,
in British Academy, Second report upon the e x cu sio n s carried out in and near the Hippodrome in Constan
tinople in 1027 , London, 1 9 2 8 . The finds from the church of Constantine Lips (Fenari Isa Mesçidi),
often erroneously referred to as S t. Mary Panachrantos, have been discussed briefly in D. T. R i c e ,
Byzantine polychrome pottery, in Burlington Magasine, vol LXI, n° C C C L V It, December 19811, p. 9 8 1 ff;
and in K. Miatev, op. cit., p. i* n .
André Giubau, Becherches sur les influences orientales dans l ’art balkanique, London, 1 9 2 8 :
D. T. R i c e , Byzantine glazed pottery, Oxford, 1 g 3o, etc.
A few pieces that were found around the church of St. George in the Manganes and in the marlyr-
ion o f S i. Euphemia on the Hippodrom e have never been published. These fragments are now
in private collections. The finds from the church of St. John of Studios have not been published
eith er; they are now in the Asarl Atika Müzeleri, Istanbul. Tiles from the church of the Myrelaion,
now in the same museum, have been briefly mentioned by R i c e , op. cit., in Burl. Mag., p. a 8 i .
80 CAIUKRS ARCHEOLOGIQUES
is generally not known to archaeologists. ^l). This paper will try to rem edy this situation
and will discuss linds from two such sites.
D uring the investigations and clearing of the church of Saint John of Studios, built in
463 A.D. (from now on referred to as JS) by the Russian Archaeological Institute o f
Constantinople in 1 9 0 7 - 1 9 0 8 , many fragments with three patterns were found (pl. \ \ .\ l, 1 )
and after having been restored in 19 2 8 are now housed in the Asari A lika Miizeleri in Istan
bul as are all the other pieces here referred to (unless otherwise specified). A great mass of
material was found at the second site, a three-aisled transept basilica, probably from the
second half of the fifth century, which in the fall of 1 9 3 7 was excavated by II. Th. Bossert
in the second court of the Topkapu Sarayi in Istanbul (from now on referred to as TSB).
The excavation was sponsored by the University of Istanbul and the Türk Tarih K urum u.
The finds are of particular importance, since they brought to light not only variations of
designs already known from Bulgaria and from the rZ eu xip p os Gym nasion«, but also
present us with new patterns.
Since in many respects the tiles of both sites are closely related to one another, they
are here referred to together, but are also individually discussed where differences occur.
Moreover, wherever possible reference has been made to other u npublish ed material
from known or unknown sites.
There is a great variety of shapes. Flat tiles (of o , 5- o ,65 cm. thickness) occur only once
in large, square or rectangular units (sides i 8,65 cm. or 1 3,5 x 9 1 ,5 cm. respectively).
W hite or d a y color..................................
Y e llo w ...........................................................
R e d ................................................................
Green.............................................................
Dark b lu e ......................................................
Long, narrow strips (width, 2,/i-3,g cm., length, more than I o cm., thickness o , 5- o ,6 cm.),
are more usual and, in accordance with their small size, the designs are simple.
Certain patterns occur exclusively on them, like the various tvpes of the wjew eled border»,
such as strips with circles enclosing lozenges or circles alternating w ith squares (;j I.X X X I,ic),
etc. The great bulk of material consists either of straight tiles or arch-shaped ones. Both
types are curved in section, be it convex or, less often, concave. These tiles have the
shape of long, wide bands usually repeating the design twice in each slab, either as self-
contained units or as part of a continuous pattern. The sizes of the tiles vary consider
ably in both width and length (width : narrowest, 5 ,8 -7 cm-’ most common 7 - 1 1 ,5 cm .;
exceptional, 18,9 cm. — see half palmette on pi. X W I , 1 ; length never less than 10 cm.
and as long as 35 cm., thickness, o , 35- o ,6 cm., o , 5- o ,6 cm. being most common). The
patterns are adapted to the size and thus, for instance, such large compositions as the
half-palmette appear only on large plaques. In a class by themselves are the tiles lor
covering small half columns and also their bases and capitals (bases : height, 1 1-1 a cm.,
diameter at bottom, 1 3- i 4 cm., at top, <),5- i a cm. : half-columns : diameter 12 cm , length,
up to at least /10 cm .; capitals, height i/ i, 5- i 5,5 cm., diameter at bottom 1 1 - 1 2 cm.,
at top 1 3, 5-1 5 cm.; thickness of all three types, o , 5- o ,6 cm.). Not many such pieces
have been found so far, but all units are more or less of the same size and approximately
fit together. The patterns are adapted to the particular part of the curved surface;
there is a characteristic pattern for the half-columns, i. e., the peacock feather, which
occurs here in a more stylized and wfloral n form than on a piece of uncertain origin
published by I), T. R ice^ . In one unusual casi! it is com bined with a border design of
rosettes and leaves; this border runs around the top and both sides ol the m otif of the
field (pl. XXXII, 1 ) whether it also ran along the lower edge can no longer be established.
The decorations are almost always a mixture of floral and geometric patterns, that is,
consisting of highly stylized floral motifs often combined with geometric u n its; few tiles
have purely geometric decoration and only one design is purely floral, namely, the rinceau
(|.l. X \ \ I \ , 3), which is used mainly on narrow strips, straight or slightly curved, and in
which grapes and ivy leaves fill the interstices.
The palmette in its various forms occurs again and again. Joined half-palmettes set
into capital-like volutes form a bold design (pi. ,Y V \l, 1 o) used in several variations on
plaques curved in section from both sites (pl. XXXIV, 1) and also on a capital of the TSB
(pl. XXXII, *>). Sometimes the character of the half-palmette is nearly lost. Thus, ia a
frequently used pattern, intersecting circles (pl. XXXIII, 9) form the frame into which
the stylized half-palmettes (which look more like individual leaves) are fitted. But even
in this geometricized pattern the central roundel with its rosette, stylized as it may be,
introduces an additional floral note.
The rosette is another common pattern, either as a filling m otif (as we have ju st seen)
or as the main design. It occurs with six or eight petals, occasionally also with four,
which relates it to the cross; it is generally enclosed within a circular ribbon with a trefoil
in the spandrels (pl. XXXI, •?). The individual petal leaves usally have a darker core
and the center is specially marked. In one composition (pl. A W l l ( , 3) two interlacing
ribbons enclose the rosettes and thus Uike on equal importance.
The cross design appears on Hat plaques as well as on tiles curved in section. W hile
the rectangular plaque (pl. A W Y , i f . ) shows a typical iloral cross, the one on the square
piece (pl. XXXV, i a) is what one could refer to as the «jew elled« species. The cross
designs on the curved tiles reveal the same basic tendency : while palm ettos surround
some crosses, purely geometric features are found on others (pl. X X X \, ti)fl).
The egg-and-dart m otif appears in several variations. There is the succession of
«arches« (the «eggs«) with « balls« (standing for the « darts«) on high stems on a base
from the T S B 2^ or, on tiles from JS similar «arches« are com bined with what looks like
pillars with impost blocks carrying an «architrave« (pl. A W Ï , i «)(3). Architectural terms
are purposely used here, because connections with architecture seem evident. In a rather
different, third case (pl. AXX 1II, i) , we find a succession of sem i-circular «arches« held
together by a «keystone«. Here, as is often the case in these stylized forms, another
interpretation besides the one given is possible, namely, by com bining two adjacent
half-arches one recognizes a sequence of split palm ettes. One more form of the egg-
and-dart m otif is used in the TSB . The eggs take on the appearance of shells and
triangle 3 are substituted for the «darts« (pl. XXXIV, s ).
W hile the capitals of the half-columns covered with tiles are decorated w ith large volute
forms filled with palm ette leaves (pl. XXXII. ’9) and thus stili reveal a connection with a
classical prototype, the bases showr no relationship to the corresponding traditional
features ; instead they reveal a tendency to cover the whole architectural form with different
patterns. Some bases have ornamentation which still has classical connotations, be it
palmettes of various stylization or the egg-and-dart motif, b ut in the most advanced case a
sequence of lozenges arranged as in a four-petaled rosette, are the main m otif on the
lower part and hatched stylized leaf forms and chevrons in the upp er part (XXXIV, 4), all
dem onstrating a strong tendency toward an abstract decorative style far rem oved from
classical concepts.
Besides the floral and geometric designs on tiles, two fragments of figurai representations
have been found among the material from the T SB . The one, a flat plaque of fine, white
clay (pl. XXXVI, i) is an icon which, ju d g in g from the crude hole in the top, has at a later
time been used as a portable icon. It contains a representation of the V irgin Mary with
Like all other curved plaques, Ihese cross tiles w ere most p robably applied in a single ro w ; in
the illustration two row s are com bined to m ake the very fra gm en ta ry designs m ore in telligib le.
It occurs on the lower (flat) part of a base from the TSB and is so sim ilar to the decoration on
the fragments from Ilaydarpasa, now in the Asari Atika M iizeleri, Istanbu l, that it is unnecessary to
show it here. F or the latter see Jean E b e r s o lt, Catalogue des poteries byzantines et analoliennes du Musée
de Constantinople, Constantinople, 1 9 1 0 , fig. h à. (Ebersolt’ s description of the pieces — n°‘ 1 5 1, 1 5a,
p. 39 — is not correct.)
(S| Rice, Byz. gl. pott., pl. IX, A, 1. I do not agree with Rice’ s interpretation of the design on
p. 1 h.
BYZANTINK T IL E S 83
the Christ Child, possibly a representation of the H odegetria; of the child only part of
I he cross nimbus in golden orange remains at the lower right edge. The Virgin, who
is identilied by the writing on the left edge (of which only the P is preserved, to be completed
as u p $*y) is clad in a dark blue cloak covering her head and body. The orange lining of
the cloak is visible around her face, which is framed by a tight white cloth. The delicate
features of the face are drawn in black with m odeling in pink. The eyes are directed
toward the spectator. The background imitating a mosaic is in warm orange glaze
(substituting for gold) with a green frame around it. The original plaque was probably
square (approximately 18 cm.) showing a half-length figure of the virgin, analogous
to those of similar style in other media. A full-length figure seems unlikely, because
it would have made the tile too large. (The actual size of the fragment is : length,
j o 3//i cm. max., height, 6 i/10 cm. max.)
A second fragment of much smaller size, the only case known to the writer of an icon
on a tile curved lengthwise in section, represents a hand and part of a sleeve which, to
ju d g e frome the position of the hand, must have belonged to a saint (no longer identi
fiable) in orans position (pi. A W V I, 2). Here again, as also in the tiles from Bulgaria,
the m odeling of the hand is in pink, a color not used otherwise. Other colors used are white
and ligh t green, the latter unique in this basilica, though it is found am ong unpublished
fragments from the Church of the Myrelaion in Istanbul. The black outlines are, how
ever, not an unusual feature. Judging from the curved outline of the frame, it is likely
that we have here the fragment of a medallion with a bust, a composition common in
Byzantine art. (Th<3 actual size of the fragment is : length, 5 cm. max., height, 2 3/ft cm.
max.)
The execution of the tiles varies in technique, range of color, and workmanship. Two
types can be distinguished A careful execution goes with the use of glazes of distinct,
b right colors applied on the smooth surface of a white, well-sifted body, somewhat sandy
in texture. The palette is restricted to three colors applied as glazes : aubergine, bright
yellow, and grass green, in addition to the white ground which at times is part of the
design. The outlines are applied in thick aubergine glaze over a preliminary draw ing
in light purple, which in some other pieces, where it is used with another technique, is
all that remains of the outlines. A thin, colorless glaze covers the whole surface. This
technique is characteristic for the JS pieces, b u t it is also used in a tile w ith rosettes
within two interlacing ribbons (pi. XXXIII, 3) and still another rosette design from
the TSB. The preservation of the pieces executed in this technique is always very good
and the colors remain bright.
The second technical group comprises almost all of the pieces from the TSB. Here
mere colors are used with transparent glaze over the whole ; the yellow tends to be darkish,
at times a yellow-brown and rarely brilliant, as in the first technical typ e; the green is
often dull too, usually poorly preserved. The outlines are dark brown or black and tend
to run into the yellow. The workmanship in some of the more elaborate pieces is good ;
(1) T h e two typ es o f tech n iq u e have also been p o in ted o u t b y R ice, ibid ., p . i 4.
CAHIERS ARCHBOLÜGini:KS
this goes together with the use of more brilliant colors, of outlines anil areas occa
sionally in aubergine, which occurs always as a glaze and, in a few instances, the
sparing application of red bolus. O ther tiles, however, show poor, hurried execution
with dull colors and less fine body. The clay is light cream in most of the b etter pieces
or, at times, of a faint orange, rarely pinkish hue. Two fragments use a red, coarse
clay (0 ,7-0 ,8 cm thick), while the flat tile fragment with the Virgin is o f unique, very-
fine white clay with a smooth surface, and the fragm ent with the Saint in orans posit
ion is of somewhat pinkish clay. The m ajority of the flat and curved tiles, as well as
the two ju st m entioned, are of approxim ately the same thickness ( o , 5- o ,6 cm.), as are
the half-columns, bases, and capitals. The latter were all formed in m olds, into which
they were pressed from the back, as one can still see from the fingerprints on the reverse.
A type of its own, which stands between the two technical groups m entioned, is distin
guished by the use of a lapislazuli b lue enamel on a well-sifted, w hitish body, as in the
first group, although green and yel!owr occur, as colors with a transparent glaze over the
whole, ju st as in the second g ro u p ; the outlines are usually in black. Occasionally, white
is also used, as, e. g., in the case of the rosette within a circular band from the T SB
(pi. A A AI, a) Here, as in most examples of this group, both execution and preservat
ion of the pieces are good.
Identical technique and identical or similar patterns relate the tiles here m entioned
to those of other finds, mainly those of the «Zeuxippos Gym nasion» and link all the various
sites together. The egg-and-dart m otif of «arches» and « pillars» from JS (( I. X \A I, t a)
was also found at the «Zeuxippos G ym nasion ^ 2), and so were the half-palm ettes grow ing
out of v pillars »or «vases» (pl. XXXIV. i)fro m the TSB A third example (not illustrated)
from the TSB with a palmette design derived from the leaf-and-dart, occurs in identical
fashion on pieces from the «Zeuxippos Gymnasion * and u npublished tiles from the
church of the Myrelaion. Moreover, several similar designs further indicate the close
relationship betw een the finds from difT« rent sites. T he half-palm ettes w ithin volutes of
JS (pi. A A AI, 1 ^) are to be found in an almost identical form on a plaque from the TSB^5)
a n d in a similar way on a capital from the same site (pl. XXXII, ■>.). This pattern is also
used in a related fashion on a capital of unknown origin, probably from the region of
Istanbul, formerly in the Collection H iighenin, now in the Asarî Atika M üzeleri (pl. XXXIV, 5).
An egg-and-dart m otif on a base from the TSB occurs also on an u npublish ed base from
the «Zeuxippos Gym nasion»^) and, in similar form, on fragm ents from Haydarpasa (7).
T he white color which also a p p ea rs on the fragment w ith the Saint in orans position is one o f
the characteristic colors of th e unpublished pieces from the church of S t. George in the Manganes
and the church of the Myrelaion.
^ R ic e , ibid., p l. IX, h, i . A ls o , o n e u n p u b lis h e d fr a g m e n t o f s im ila r d e s ig n a n d id e n tic a l te c h
n iq u e c o m e s fro m th e r e .
w Ibid., p l. IX, k.
(M Ibid., p l. IX, c, d, e ,f.
[h) ('c a n , op. cit., lig . u .
R ic e , i b t d p . \k p r o b a b ly re fe r s to th is b a se .
p> E h e r s o lt, op. cit., fig . hit.
BVZAVnNK T lL B S 85
T h e egg-an d -d art m otif with the « egg« lo o kin g like a shell is found on pieces from
several sites b esid es th e T S B (pl. AXXIV, *_*) and thus constitu tes a lin k betw een its tiles
an d those of the church of C onstantine L ip s (l -, the church o f the M yrelaion (an un
pu b lish ed piece) and the church o f S a in t G eorge in the M anganes (also u n p u b lish ed ). The
rin ceau, too, occurs not only in the T S B (p l. AXXIV, 3), b u t also in alm ost identical form
on an u n p u b lish ed piece from St. E uphem ia on the H ip p od rom e and, sim ilarly, on an un
p u b lish ed fragm ent from the church o f the M yrelaion. T h e peacock feather links the finds
from the T S B to those from the « Z eu xip p o s Gvm nasion^ and St. E up h em ia, from b o th o f
w hich we have u n p u b lish ed fragm ents of the sam e p attern. F inally, the lozenge-sh ap ed
« ro sette« decoration on a base o f the T S B (pl. XAAIV, /i) is also the d esign o f a tile
cu rved in section (convex) from the ^ Z eu xipp os G y m n a s io n « ^ . M ore parallels could
b e m en tion ed , b u t these sh o u ld suffice to p o in t o u t the close conn ection betw een the ware
from the differen t places.
T h ese instances o f identical or very sim ilar pieces from variou s sites in Istan b ul su ggest
th at th ere was a central place of m anufacture. T h e fact that all h alf colum ns, bases, and
cap itals, even from different places o f origin , are o f app roxim ately the sam e size, w ou ld
ten d to corroborate this evidence. F in ally, it sh o u ld be rem em bered that a great m any
B yzan tin e tiles w ere fo u n d at many places in and near Istan b u l, nam ely — so far as is know n
to th e w riter — in and aro u n d seven c h u r c h e s ^ and one secular b u ild in g (n Z eu x ip p o s
G y m n a sio n r), w hile still o th ers can n ot be related to any p articu lar stru ctu re. Su ch w id e
u se o f tiles, th e great variety of patterns an d th e presence of the sam e or sim ilar d esign s
a n d the use o f the sam e tech n iqu e in different sites seem to ind icate th at the fayence
revetm en ts cou ld not have been m anufactured on th e spot, so to speak, für ju s t one b u ild
in g at a tim e (as was the case in Bulgaria), b u t th is evidence rath er p oin ts tow ard a central
place of m anufacture b y eith er one or several w orksh op s, p o ssib ly in or near Istanb ul W .
T h e d esign s o f the tiles from the T S B and JS, as all the o th ers so far fou n d in or near
Ista n b u l, are o f « orien talizin g « classical typ e. T h e ir closest p arallels occur in th e field
o f a rchitectu ral re lie f decoration executed in sto n e an d stucco, and in som e cases also
in th e m inor arts, b u t rarely in textiles or p ain tin g s (u nless th ey d ep ict p attern s that
are im itation s o f th ree-d im ensional form s). T h u s the choice o f m otifs (e. g ., e g g -
an d -d a rt, h alf-palm ettes in vo lu tes, etc.) an d th eir sp ecial execu tion in b ro a d o u tlin es
(a p ictorial translation o f the shadow s o f carved -ou t designs) relate the tiles to architect
u ra l d e c o r S u c h features as th e rosettes w ith th e p etals en closed w ith in an o th e r
It seems less likely to me that they were used sparingly, as it were, for the all-over wall decoration,
as suggested, am ong others, by R i c e , ibid ., p. 1 5 f.
(1) J. E b e h s o l t , Céramique et statuette de Comtantinople, in Byzantion, vol. V I ( 1 9 8 1 ) , p. 5 5 g f.,
j)l. XXII. See also the finds of individu;.! icons and icon friezes in Bulgaria. M i a t e v , on. cit.,
pis III a, IV, XX, etc.
i n z w r j M i Tii.KS 87
m aterial is too fragm entary to perm it a m ore detailed reconstruction o f the o rigin al use at
this tim e.
A s far as the date o f the tiles is concerned, there is for the T S B and JS no m ore defi
nite clue available than fo r those o f o th er sites in Istan b u l. D esigns and tech niqu e link
to g eth er th e finds from the different b u ild in g s, p o in tin g not only to a central place o f
m anufacture, b u t also to a lim ited tim e-span. Identical patterns w ou ld indicate a manufao-
turc w ith in one generation or, at the m ost, tw o ; identical tech n iqu e with the sam e range
o f colors an d h u es w ou ld be less lim itin g, b u t at least perm its th e d atin g w ithin one to
tw o cen tu ries. It was, how ever, p oin ted o u t above that th ere w’ere two tech n iqu es u sed
in the two ch u rches discussed here an d the qu estio n arises as to w h eth er th ey co-existed
or, if not, w hich was the earlier one. U nfortunately, the fact th at the two types o f tech niqu e
are to be found in the sam e sites (i. e., the T S B an d the « Z eu x ip p o s G ym n asion *) does
not give an y clu e, since a co-existence o f the two types w ith the use o f the fin er ware w ith
co lo red glazes for the m ost im portan t parts is as po ssib le as the app lication o f the two
at differen t tim es. A com parison o f the figurai rep resen tation s and o th er d esign s on
the tiles w ith those in o th er m edia p rovides no sure base o f d atin g eith er, since we can
lin k them to objects from the n in th to th e tw elfth cen tury. Y et certain som ew hat m ore
d efin ite in d ication s for the date of th e tiles can be given. A lth o u g h the origin al tran sep t
basilica in the co u rt o f the T o p k a p u Sarayi was p rob ab ly b u ilt in the secon d h a lf o f the
fifth cen tury, it was ren o vated later on w ith a newT floor raised above the old one. It is
q u ite lik ely th at the tiles w ere ap p lied in the course o f these renovation s. In d eed , th is
a ssu m p tio n is co rro b o ra ted by o th er facts : the sim ple p attern o f th e secon d floor w o u ld
date it approxim ately to the sixth to tenth cen tu ry an d o f all the coins fo u n d from th e
p eriod after the origin al fo u n d atio n o f th e church, those from th e tenth cen tu ry are m ore
nu m erou s. M eager as th is evidence is, th ere is a slig h t ed ge fo r th e tenth cen tury. A
ten th -eleven th cen tu ry d atin g was also assum ed b y Rice for the tiles o f the «rZeuxippos
G y m n a sio n ^ '}, w hich in tech n iqu e an d som e o f th eir p attern s are identical w ith those
o f the T S B . No archaeological evidence for the JS is available, b u t we have h istorical
dat'i w hich m ention rich decorations o f the ch u rch , given b y th e E m p eror Isaak k o m n e-
ikis (10 6 7 -10 5 8 ) an d h is wife, H aekaterina ''2). A n o th e r ren o vatio n took place
d u rin g the last years o f the th irteen th cen tu ry T h e second date seem s rath er late for
the tiles, w h ile the form er is m ore lik ely, especially since this agrees m ore o r less w ith the
evid en ce m en tion ed for the o th er tiles.
T h u s, e v ery th in g p o in ts to the fact th at the tiles d iscu ssed h ere w o u ld cover a p erio d
from the ten th to eleven th cen turies. T h is tallies also w ith th e early tenth cen tu ry date
o f the tiles from B u lgaria, a few o f w hich show d esign s that have parallels in the B yzantine
: /
. .«
8.
8 (S c, u i IK h s \ k c i i k o i . o g i o i i:s
capital. To date, 110 Byzantine fayence o th er than from the m id d le p eriod is know n
a n d p o ssib ly never existed . J u d g in g from the m aterial so far fou n d in B u lgaria and
Ista n b u l, we can, how ever, state that irresp ective of the p o ssib le use ol tiles b efore an d after
th a t p eriod , the> w ere certain ly in vo gu e in the tenth and eleven th ce n tu rie s 1 . T h is
date tallies w ell en ou gh w ith the use of tiles in the Islam ic w o rld , w h ere they a p p e a r first
in the n in th cen tu ry at Sam arra (used as the caliph al resid en ce from a b o u t 836 to 883 ) -
and at K airo u an , w here a b o u t 862 they were a p p lie d by a B agh d ad p o tte r to the m ihr.ib
o f the Great M osque o f S ld i 'I qba 1. \\ liile it is not know n w h ere tin; sq u a re and m ono
ch rom e-glazed tiles were u>ed in the D jausaq Palace a n d in one o f tin* m o sq u es o f Sam arra,
th eir sp ecial fu n ction in the o ld est and m ost ven erated m osqu e o f T u n isia is th e sam e as
th at here su g gested for the B yzantine tiles, nam ely, to d ecorate a sp ecially sig n ifica n t
unit in the focal part o f an im portan t stru ctu re. Sin ce m osaic d eco ratio n w as used in
the tenth century lor the mihn'ib o f a n o th e r G reat M osque o f the M aghrib, that o f C o r
d oba, it follow s that in Islam both o f these tech n iq u es were reg a rd e d as o f o u ts ta n d in g
d ecorative valu e.
It has been said that the B yzan tin e tiles are a p o or b ro th e r o f th ose o f o th e r civiliza tio n s
and th at they were n o th in g b u t a ch eap su b stitu te fo r th e co stly m osaic d eco ra tio n . E ven
thou gh this cannot be en tirely b ru sh e d a sid e, these tiles — m ore d iv ersified an d b o ld e r
in design and m ore varied in form than th eir co u n te rp arts in Islam — can rival those
of o th er co u n tries and they can hold th eir gro u n d next to th at o f anv o th er te ch n iq u e.
T h ey w ere not used as m ere im itation s o f so m eth in g b etter, b u t ra th er in th e ir own
rig h t, with th eir d esign s sk illfu lly a d a p ted from th e cu rren t fu n d o f d eco rative form s,
a n d then well execu ted in a b o ld and colorful tech n iq u e.
E liza b e th S. E t t in g iia u sk n .
\\ ashington.
2
Convex plaque from Ilu* <rTopkapu Sarayi Basilican (TSU).
Colors : while (sometimes used), yellow, blue, green, black outlines.
Pl.V N C lIK \ \ \ I I
1
One of several varielii's of-arch- design (T SB).
2
From Ilu» TSB.
3
From the TSB.
$I
3
Krom llic T S B . \ relied, Hat strip. D ull, dark colors.
1
Elaborate design, o f less line execution (TSB).
4 5
Fayence half base from Ilie TSB. Fragment ol lavence half capital of
d olors: yellow, green, Mack outlines. unknown origin. Colors : dull
2 yellow , green. Mack outlines;
From the TSB. Dull colors and execution. grayish clay.
I V anchk \\\\ I
1
Fragmentary liai plaque willi \irj;in and Child from llie TSB.
Colors : orange, j j r w n . <l:n-k hlue, pink, hlack outlines, (hin civainisli jjlaze.
2
Flagmen laiy convex file with Sain I, from llie TSH.
Colors : white, lijflil {jrecn, johlen yellow, pink, hlack outlines.
MEDIEVAL LEAD-GLAZED POTTERY
LINKS B E T W E E N EAST AND W E S T
PAR
ROBERT B. K. STEVENSON
VIready before the war certain technical sim ilarities su g ge sted to the w riter that Byzan
tin e lead -glazed p ottery m ight have been a factor in the o rig in o f B ritish m edieval. T h e
excellent glazed sherd s now know n d efin itely to occur in \nglo-Saxon contexts in S o u th
east E n glan d partly resolve som e of the tim e-lag d illiculties in the th eory, and also m ake a
general n ote on the su bject a p p rop riate, how ever tentative.
E xcavations in i ()36- i ()3 ÿ p rod u ced evidence for an o u tlin e ch ron ology fo r the d evelop
m ent of the Byzantine pottery of C o n stan tin o p le 1 . L ead glaze th ere can b e seen to
have varied m arkedly in appearance at different tim es, d ue to changes in the tech niques of
firin g and co lo u rin g, th e n atu re of w hich have not yet been exactly d eterm in ed . Begin
n in g w ith d ull greens an d brow ns on re d -b o d ie d pots the B yzan tin e potters in a burst
o f experim en tation in a w id ely creative period had by the early i\th cen tury produced
excellent glaze with a sligh tly p itted surface co verin g a w hite bo d y. T h e most refined
glaze was yellow . O th er colou rs were p ro d u ced b y traces o f iron in the glaze or in the
u n d erly in g clay, an d con trasts co u ld be o b tain ed by sp o ttin g ferrous grey-green w ith
(ferric) orange by som e trick o f firing. By im p reg n atin g clay a p p lie d as « petals *, som etim es
carefu lly sh aped b u t o ftener ju s t blobs, yellow and orange were contrasted, or yellow and
dark b ro w n (bovril), or lig h t grey-green and dark grey-green . V rare sh erd has little
circles im pressed on a streak and blob p attern . More elab orate p attern s w ere incised or
im pressed on the plain body. By late i\th cen tu ry the yellow glaze had reached its peak
o f canary-colou red clarity and o f sm oothn ess, w hile the ferrous grey-green h ad been largely
replaced by a m ore vivid green, which ap p ears to b e the clear yellow glaze with an
adm ixtu re o f copper, freq u en tly unevenly d istrib u ted th ro u gh the glaze so as to produce
m o ttlin g. In the \ t h a n d \ i t h cen turies o th er types o f glaze cam e into use. D evelopm ents
o f the fo rego in g co n tin u ed a lo n gsid e these, b u t a b an d on ed p u rity o f co lo u r and were in
general less p ain stakin g : instead o f petals streaks o f iron oxid e slip were com m on. D uring
(l) W v i.k e k T r u st ( S t. \ \ m ik h s ) E v c m itio x s . The Great Palace o f the Byzantine Emperors (Oxford,
19/17), Chapter 11, «The Pottery«, by II. B. k. S t e v e n s o n (with coloured illustrations).
Some coarse red-bodied glazed ware persisted through the i\th century.
DEUX ANC I E N NE S ÉGLISES BYZANTINES
DE LA CITADELLE D’AMASRA (PAPH LAG O N IE)
PAR
SEMAVI EYICE
Situation
Les murailles d ’Amasra datent de l’époque médiévale. Elles couronnent un îlot rocheux ainsi
que le versant méridional d ’ un autre, plus grand, situé plus au nord, qui est uni au précédent
par un pont. La citadelle ainsi constituée communique avec la terre ferme, qui s’étend vers
le sud, par deux portes dont l ’une est voisine du Büyükliman (Le grand Port ou Port de l’est)
et l ’autre proche de Küçükliman (Le petit Port ou Port de l’ouest). C’est par cette seconde entrée
que l'accès à Fatih Camii est le plus aisé. Elle n’a point de minaret et, faute de ce signe distinctif,
elle ne se fait remarquer que par ses dimensions et ses lignes extérieures. Quant au second monu
ment chrétien de la citadelle, il est situé au voisinage de l ’entrée orientale de la forteresse et,
comme ses murs dépassent le faîte des murailles ainsi que les maisons environnantes, il domine
le Büyükliman. Étant de dimensions plus restreintes que l ’édifice précédent, la Kilise Mescidi
peut être considérée comme une simple chapelle qui, au début, a du être affectée au service du
(i) Pour la bib liographie relative à Amasra, cf. G. Uihsi hpkld, dans Paüly-W issowa, Real Enxyklopâdit
(t. I, a) et R co r-B ittk l, Paphlagonîa, ibid. (t. XVHI, à , paru en 19 ^ 9 ) ; en outre, cf. S. Erics, Amasra Bûyükodastnda
li r Bizant kU iten(avec résumé en français), Belleten, i 5 ( 1 q 5 1) paru en t g 5a , p. 46g e tsu iv . Pour l'em placem ent
de cette localité, voir la carte accompagnant la rubrique Amasra, dans Turk Anstklopedùi.
98 GAIHKKS ARCHKOLOGHjUKS
Historique
Patrie de Georges d ’Amastris, dont la vie est retracée par Nicétas de Paphlagonie, Amastris
ne tarda pas à devenir, sous la domination byzantine, le centre d ’un évêché de Paphlagonie
Il semble que les forces turques l’avaient déjà occupée vers le m ilieu du xiv" siècle, mais, pour
des raisons encore non élucidées, on l'abandonna aux Génois qui en firent un entrepôt et un
comptoir constituant ainsi la petite colonie génoise d ’Amasra ou de Sam astrot2). Amastris, qui
était à l ’époque romaine une ville florissante et qui s’étendait sur la plaine et les collines environ
nantes, devait posséder à l ’époque byzantine bon nombre d ’églises et de monastères. Mais nous
savons par la relation de voyage de Ruy Gonzales de Clavijo, qui visita cette localité en i 4o 5,
qu ’à cette époque toute la population s’était groupée derrière les m urailles, que la plaine qui
se trouvait hors de l ’enceinte et où s’étendit jadis la ville, était parsemée de ruines d ’édifices et
d ’églises abandonnées, et que l’envoyé espagnol et ses compagnons de voyage assistèrent à une
messe célébrée dans l ’église de la citadelle P).
Vers i 46o, quand Amastris fut attaquée par l’armée et la flotte turques, sous le comman
dement du Sultan Ottoman, Mehmed II, les Génois ayant préféré livrer la place, les assiégés eurent
la vie sauve, et le Sultan se contenta de vider de ses habitants au profit de la capitale la petite
ville qui, à son tour, fut colonisée par les habitants d ’ une autre lo c a lité ^ . Selon un chroniqueur
turc du xv* siècle, Asikpa§azade, le Conquérant aurait fait «transform er une belle église en une
mosquée, et fait lire en ce lieu le premier kh u tb és ^ lors de l’annexion de la ville. Ainsi, il ne
peut y avoir aucun doute quant à l ’origine chrétienne de la mosquée de Fatih, qu i doit être pro
bablem ent l ’église mentionnée par Clavijo. En même tem ps, la chapelle fut égalem ent convertie
au culte musulman.
Les visiteurs venus de l'étranger qui, au cours des siècles, eurent la possibilité d ’étudier eu
toute liberté les vestiges extra-muros, ne purent pénétrer dans l ’enceinte dont l ’entrée était rigou
reusement interdite aux étrangers. En visitant Amasra, le voyageur turc Evliya Çelebi aurait vu
dans la citadelle, une mosquée et un oratoire, qui ne sont autres que les deux églises dont nous
(*) H. G elzb r, Ungedruckte und ungenügend veröffentlichte Texte der Notùiae episcopatum, ein Beitrag sur byzantin
ischen Kirchen-und Verwaltungsgeschichie, München, 1 90 M. R a m s a y , The historical Geography o f Asia Minor,
Lon don. 1 8 9 0 , p. 9 1 5 V . Scbultzb, Altchristliche Städte und Landschaften, II, Klemasien, I, G ütersloh, 19 2 2, p. a 1 a.
\V. Hbyd, Histoire du commerce du Levant au Moyen Age, L eipzig, 19 a 3 5 G. Bhatianu, Recherches sur le commerce
génois dans la Mer Noire au xtn* siècle, Paris, 1 9 3 9 .
C l a v ijo , Embassy to Tamerlane ( t /w 3 -t ùoOj, translated by G. Le S trange, Lon don, 1 9 2 8 , p . i o 5.
J . d e H a m m e r , Histoire de V Empire Ottoman, Paris, i 836, t. I l l , p . 6 8 ; p o u r la d ale de la con quête d ’Amasra,
cf. I. H. D a s i s m e k d , Izahh Osmanli tarihi kronolojisi, Istanbul, 1 9 ^ 7 , t. I, p . 2 9 0 .
Asik Pasazade ('Asik Pasa-zade), Tavarihal-i Osman, i 3a; su r l ’au teu r et les autres chron iques sim ilaires, ‘
cf. F. Babinc.er, Die Geschiehtsschreiber der Osmanen und ihre Werke, L eip zig, 1 9 2 7 ; F . Könu u , Axikpatazade, d-.ins
Islam Aimklopedisi. Une nouvelle édition de A s i k Pasazade a paru récem m ent (ÇirrçioïiLt! N. A t s i z , Osmanlt tarihleri,
Istanbul, 19 A 9 , t, I).
ftfïüX 4SC IK S M i S K W .IM iS BYZAYH NKS 99
Architecture
Les fondations des deux édifices reposent directement sur le rocher. Les murs ont été construits
selon la technique byzantine qui consiste à alterner les assises de pierres de taille et les bandeaux
de briques de o m. o 4 d épaisseur, et c’est aussi au moyen de briques que furent dessinés les
arcs en plein cintre des fenêtres. Mais deux linteaux qu’on remarque à Fatih Camii, et dont l’un,
mesurant 2 mètres de longueur, surmonte 1 entrée principale primitive, sont incontestablement
d ’origine antique, car quoique martelés, leurs surfaces sont encore ornées de tètes de bœuf,
des buennmm que relient des guirlandes surmontées de petites rosettes W. Ces restes antiques,
arrachés sans doute à des édifices païens, ont des répliques disséminées dans le village et les champs
d ’alentour, et se rattachent directement au culte d Apis, qui, au temps du paganisme, était par
ticulièrement en honneur dans cette ville de Paphlagonie. Outre ces remplois, les constructeurs
des deux églises utilisèrent d autres matériaux qui étaient empruntés à des édifices de l’époque
romaine. En effet, sur les façades de ces églises, on remarque dans l'intervalle laissé entre cer
taines rangées de briques, un opus rehcuîatum fait de pierres cubiques posées en losange. Comme
ces églises n’ont rien de luxueux ni d ’ambitieux, comment expliquer l’existence de cette maçon
nerie réclamant un difficile travail ? II se peut que les constructeurs byzantins aient trouve expé
dient d’utiliser ou plutôt de rassembler les matériaux fournis par quelque ruine romaine. Vopus
retimlatum, dont la vogue remonte au siècle d 'A u g u s t e a été employé dans un grand nombre
<*) Evuya <k l e b i (Aviiyi <alabà ), Seytihatname, Istanbul, i 3i 4 H., t. II. 71 ; el la petite édition publiée par
R. E. Koi.c, Evliyaçelebi seyahatnamen, Istanbul, 1 t. II. p. 3
(3) \Sptti\i, Ilpaj ft*«/* itcpi kpwnptos xi i tw 7T£pi£ akrjs, dans 1 JÀÀoyoÿ , 5 (187a),
p. à'j ot suiv.
W Lors de mon séjour à Amasra, j ’avais suggéré la possibilité de transformer la Kilise Mescidi en un dépôt
pour l«*s antiquités éparses. Ls cour du chàteau-fort qui est à proximité pourrait devenir à la rigueur une dépen
dant* de ce musée provisoire. Or nous apprenons que récemment, lors de la visite du ministre de l’éducation,
M. T. Ileri. à Zonguldak, un vœu identique a été émis par les délégués de in Société des amis d’Amasra (Amasra’yi
sevenler Dernegi). Cf. le journal local, Safranbolu-Karahiik gazrtrsi, n" 107 (19 juillet i 9 3a). lNous apprenons
en outre par le même journal (11” 137, 19 novembre tgSa), que ce vœu sera prochainement exaucé.
(M A Amasra. Vabundance des restes sculptés ornés par des 6nmuit»ii est surprenante. Au sujet de ce ’motif
antique, cf. la thèse de doctorat de A. E. N a p p , Bukranion und Guirlande, iç>33.
G. Mancisi, Villa Adriana, Roma, jq 38, pl. a6: 38.
9 a
100 CA III KRS AIICHM X.OfclQircS
5 m. ko de largeur et 7 mètres de longueur; en outre, l’édifice a conservé son narthex qui n’a
presque rien perdu de sa forme primitive. Couvert de trois voûtes d ’arête, le narthex commu
nique avec la nef au moyen de trois baies dont la plus haute est celle du milieu. Une des voûtes
étant partiellement détruite, on peut admettre que l'escalier du gynécée qui surmonte le nar
thex, passait primitivement par celte ouverture. Ce gynécée, qui devait avoir sa réplique, à
Fatih Garni, prend jour par- trois baies sur le nao
Actuellement, dans chacun des édifices, un toit en charpente couvert de tuiles (des plafonds
modernes masquent la structure de ce toit) s’appuie sur les murs extérieurs. Ceux-ci mesurent
o m . 80 à 0 m. 85 d’épaisseur à Fatih Camii, et o m. 60 à 0 m. 65 à Kilise Mescidi. On peut se
kn. 1 9 ^ 9 , près de Iskele Cam ii, dans une ruelle, nous avons rem arqué l ’existence de m urs en «opus reti-
culatum ». Ainsi nous pouvons affirmer que ce système de construction ne constituait pas une rareté à Amasra.
JHvlIX ANCIKMNES K «LISK S BYZANTINES 101
demander si, à l origine tout au moins, Falih Cainii no possédait pas deux rangées de colonnes
et si le toit n avail pas une forme différente ? Aujourd'hui, il est difficile de le savoir, mais nous
pensons que si cet édifice avait des bas-côtés et des tribunes, celles-ci ne pouvaient être que des
constructions de b o is^ .
Une grande abside de forme semi-circulaire termine à l ’est chacun des deux édifices. A cause
d ’un manchon de maçonnerie de plus de o m. 5o de largeur, et qui, à Fatih Camii, monte jus
qu’au niveau inférieur des fenêtres, les soubassements des absides sont devenus trop épais par
F ig. 2 . — Amasra. Fatih Garni. Amasra. Falih Camii. Amasra. Kilise Mescidi.
rapport aux autres murs. Quant au piédestal en maçonnerie qui est à l'angle sud de l'abside de
l ’égîise de Fatih Cainii, il fut construit récemment pour servir de base à un minaret demeuré à
l'état de projet. Les églises n’ont pas de protfwsis ni de dîaconicon; on note seulement à Kilise
C ) Les tribunes actuelles sont récentes. En outre, à F atih Camii, les arcs de la façade ouest m ontrent qu e les murs
n ’on t plus leu r hauteur primitive. Ainsi, noua pouvons affirmer que la toiture aussi a chaogé son aspect. Mais il
est certain que les églises d ’Amasra étaient couvertes de toits que supportaient les murs. Deux églises à nef
unique e t ayant des dim ensions plus étendues ont été trouvées en Roum anie. Celle de Sucidava en Dacie (n* s.)
a a o m. 90 de longueur et 10 m. a o de largeur, les murs n ’ayant q u ’une épaisseur de o m. 65 : 1. B a r n e a , Douze
ans d'archéologie chrétienne en Roumanie ( t g 36 - t g ù 8 ), Actes du V l‘ Congrès International d'Etudes Byzantines. Paris,
1 9 5 1 , t. II, p. 3 7 , fig. 1; cf. aussi la basilique de Dolojman, p . 3o, fig. H. On a signalé égalem ent à Hemma-
berge (Autriche) une église du v* siècle, à nef unique, d ’ une longueur de 18 m. 44, don t les murs ont une
épaisseur de o m. 5o, cf. R. E gger, Frühchristliche Kirchenbauten im südlichen Norikum, W ien, 1 9 1 6 , p. 83, fig. 7 7 .
<) À«
Mescidi, un amincissement du mur et une niche qui semblent répondre aux besoins de la lilui'-
g ie {1).
L ’intérieur des nefs était éclairé au moyen de fenêtres dont plusieurs existent encore, mais
murées. Actuellement, l ’entrée principale à Fatih Camii se trouve située au nord, tandis qu’à
l’origine, comme d ’ailleurs à Kilise Mescidi, les portes étaient au milieu de la façade occidentale.
A Fatih Camii, cette façace était percée de trois fenêtres qui devaient jadis éclairer le gynécée.
De ces fenêtres, celle du milieu a été murée, de même que les minces fenêtres géminées qui sur
montent l’arc de décharge de l’entrée principale du Kilise Mescidi. L ’hémicycle de 1abside à
Fatih Camii, olTre un aspect extérieur assez harmonieux grâce à trois larges fenêtres surmontées
d’arcs en plein cintre; par contre, à Kilise Mescidi les lignes verticales dominent, surtout à l ’exté
rieur de l’abside où les fenêtres actuellement en très mauvais état, ont été amincies et allongées.
Décoration intérieure
Lors de la construction de ces deux églises on réemploya, outre les matériaux antiques, des
restes appartenant très probablement à une église byzantine plus ancienne et plus riche. Nous
avons déjà mentionné les frises à biicranions, qui constituent actuellement l’unique décoration
plastique de Fatih Camii. Mais, exactement dans le prolongement de l ’édifice, à l ’extérieur, nous
avons rencontré quelques fragments de marbre sculpté qui pourraient avoir appartenu à l’église.
Parmi ces débris, il se trouvait également une frise à bucranions, un socle de o m. 89 de hauteur,
un tronçon de colonne, et un curieux siège de o m. 78 de hauteur et de 1 mètre de longueur,
taillé dans une seule pierre. Outre ces restes, d ’origine plus ancienne que l ’église, mais dont le
motif de remploi reste problématique, nous avons trouvé un ensemble de vestiges ayant un
cachet plus byzantin. Nous citerons d ’abord le montant de parapet d’une aile d ’un ambon
(fig. 9). Sa surface est richement moulurée sur les bords et ornée en son milieu de deux
compartiments contenant des reliefs devenus malheureusement indiscernables, une épaisse
couche de goudron les maculant et rendant impossible l ’identification des motifs Grâce aux
deux fragments existants, nous avons pu restituer un parapet en marbre (fig. i ) . Celui-ci avait
en son milieu un médaillon contenant probablement un chrisme. Ce médaillon surmontait un
nœud d’o j partent deux rinceaux de lierre qui se terminent par une croix latine. C’est une pièce
que l’on peut apparemment dater du vie siècle, et dont on connaît un grand nombre de
répliques(3>. Enfin, tout près de l’édifice, sont encastrés dans un mur deux fragments, dont
<') U ne disposition sem blable a été rencontrée dans i ’église d u m onastère de P oganovo en B ulgarie (fin du
XV* siècle), cf. A. Grabar, Poganovski Monastir, in Izvestija na Balgarski Arch. Institut, h ( 1 9 2 6 - 1 9 2 7 ) , p. 1 7 a et
su iv .; J. E bersolt, Monuments d'architecture byzantine, Paris, 1 g 34, p. 3 9 , 11g. a o .
Pour un autre fragm ent d ’am bon trouvé à Amasra, cf. S. E y i c e , T eu iv ta rtvà ßv^avrivys èitoyÿs iv kuâerpa, in
«ôpeoJogfc» ( 1 9 5 * ) . p 8 8 -9 5 . * ^ ^
<*) On peut citer un assez grand nom bre d ’exem ples p lu s ou m oins analogues, à Istan bu l, à Arab Cam ii (J. E b er
solt, Ârab-Djami et *’ * sculpture* byzantine*, dans Mission* Archéologiques, Paris, 1 9 2 1 , pl. 35, 36) e t au M usée
des A ntiquités, n® 55 1 6 ; à Izm it (ISicomédie) on a trouvé un parapet ayant le même m o tif central, sauf les croix
(R. Duyuran, Izmit ne Silivri'de yapilan arkeolojik arastirmar, in Belleten, i 5, ( i g 5 1). pl, i 5, fig. 7 ) ; à Parenzo, en
Istrie (C, D i e h l , La peinture byzantine, Paris, 1 9 3 3 , pl. i 5) ; à Ravenne, dans l ’église Saint-Jean-l’É vangéliste,
(H. H o i .t z i n g k r , Die Altchristlkhe Architektur, S tuttgart, 18 8 9 , f i g . 10 6 ) ; en G rèce, en différents end roits (X \ A . IV r. -
ptw , A i xp:aTiavixa} 0 î)£îi, dans kp^atoXoyix^i k@r,pepts, 1 9 2 9 , fig. 9 0 , 9 1 ) ; E. D y g v v e , Les traditions cul
tuelles de Delphes et Véglise chrétienne, in Cahiers archéologiques, 3, * 9 ^ 7 , pl. a (d ’après J. L a u ren t); enfin la pièce
n° i j à i à Berlin (O .W u lff, Allchristliche und mittelalterliche Byzantinische Bildwerke (catalogue du Friedrich-M useum .
B erlin 1 9 1 1 , t. II, p. à 2), Or, su r une des m osaïques de H osios-Lukas (xi* siècle), on distin gu e le m êm e m o tif
u tilisé comme ornem ent de sarcophages, dans la scène d ’Anastasis (E. D i e z , O . D e m u s , Byzantine Mosaics in Greece :
» K IX AÎSUKNISKS ÛtiM SKS BYZAIST1NES 103
1un, dispose horizontalement, reste caché, tandis que l ’autre est parfaitement visible. Ce der
nier a une surface légèrement bombée et divisée en compartiments carrés ou rectangulaires,
qui contiennent des motifs ornementaux en relief. Il est possible que ce fragment ait appartenu
à un mobilier liturgique, peut-être à un ambon*1* (pl. XXXVII, 2).
A Kilise Mescidi, il n’y a à signaler comme décoration sculptée, que l’encadrement de la porte
principale et le parapet d’une des baies du gynécée. L ’encadrement n’oiïre de particulier qu’une
rosette, ou plutôt un chrisme, formé de huit figures en forme de cœur, qui orne la douelle de
l’enlrée. Le parapet du gynécée est ajouré d’un motif très répandu dès le début de l’art chré
tien
Les deux églises étaient ornées de fresques. A Kilise Mescidi, on en distingue encore des restes
aux endroits où la couche de badigeon est tombée. Quoiqu’elles soient assez abîmées et encore
insuffisamment visibles, on peut identifier dans la demi-coupole de l’abside une série d’apôtres
alternant avec des arbres. Au-dessus de leurs têtes planent deux anges revêtus de tuniques
flottantes, de couleur verte, qui portent un médaillon. Cette composition, assez commune
dans l’art byzantin, doit représenter l’Ascension Enfin, dans le gynécée, à la douelle de la baie
centrale, on remarque une figure nimbée, et, sur les montants latéraux, des personnages,
probablement des saints. Malgré leur très mauvais état, ces fresques ont un caractère assez
original et semblent différentes des peintures que les écoles locales créèrent dans les autres
provinces Des traces de fresques sont également visibles sur les murs du narthex. La valeur et
aussi l ’époque des fresques de Kilise Mescidi ne pourront être déterminées qu’après l’enlève
ment de la couche de badigeon.
Conclusion
Les deux églises de la citadelle d’Amasra sont d’un type très répandu, celui de l’église à nef
unique. Ce type présentant ttla forme la plus facile à construire.. . , une multitude d édifices furent
construits, suivant ce modèle d une simplicité rudimentaire dans toutes les régions de l’orient
Hosios Lucas and Daphni, Cam bridge Mass, 1 9 3 1 ; O. Demus, Byzantine Mosaic decoration, L on don, i g 47 , fig.
1 3 A). Seion M. Lem erle, ce m otif ornem ental serait d ’ un «type ban al*. Cf. P . Lemerik, Philippes et la Maté-
dome orientale à l'époque chrétienne, Paris, i g 45, p. 5 1 1 , fig. 64.
(>) La form e légîren ien t bombée de celte pièce fait penser à la partie centrale des amhons. Cf. l’ambon de
l ’évêque Agnellus à Ravenne (C. D iehl, Ravenne, Paris, 1 9 0 7 , p. g o ).
O n connaît d ’autres exemples appartenant à l ’époque paléochrétienne : H. H o l t z i n g e r , /. c., fig. i o 4,
i o 5 (à Nola et sur une des m osaïques de Saint-Georges de Salonique), à la basilique de Saint-Alexandre, près de
Rome (C. K a u fm a n n , Handbuch der christlichen Archäologie, Paderborn, i g 13, fig. 53) ; à Olympie (L. B r e b i e h ,
Nouvelles rt cherches sur Vhistoire de la sculpture byzantine, in Nouvelles archtces des missions scientifiques, n . s., fas. g ,
Paris, i g i 3, p. 1 1 , fig. 8) e t au Musée de Berlin (O, W u l f p , / . c . , Ergänzurtgsband, Berlin, i g a 3, n* 6 7 6 4 et
bibl. ; voir aussi le sarcophage n° 6 7 1 1 ) . Le même motif, non ajouré, se rencontre aussi à Priene (T. Wiegasd,
H. Sen ad er, priene, Berlin, i g o 4, p. 48a , fig. 5g o , 6 9 7 ) et à Salonique, dans l'église du C hrist Latome (A. Xys-
Gopoiîtos. T à xaQnhxàv tjîï Movyf tov Aœtôfiou, dans À.pjf_aioXoytxà» A ê à ttov, î g s g , p. l 53, fig. l a ) .
(i) Dictionnaire d'archéologie chrétienne et de liturgie, s. v. Ascension et Assom ption; cf. L . Bréhier, L'art chrétien,
son développement iconographique, Paris, 19 9 8 . L ’Ascension — d'ailleurs très discutée — de Sainte-bophie de Salo
n iqu e, présente par sa com position une certaine analogie avec la fresque principale de Kilise Mescidi (C. D i e h l ,
L e T o u r n e a c , H. S a l a d in , Monuments chrétiens de Salonique, Paris, i g 18 , p. i à i . Cf. aussi P. M u h a t o ff , La Peinture
byzantine, Paris, 1 9 2 8 , p. 9 a , pl. 8 5 -8 7 ).
<*) A Kilise Mescidi, les figures animées des apôtres sont dessinées assez adroitem ent et nous pouvons y voir
une influence directe de l ’école de Constantinople. Cf. aussi G. de Jkrphanion, Les églises rupestres de Cappadoce,
Paris. i g a 5, à Geurémé (Güreme), pl. s g, 3 i , 3g , a Toqalt Küîsse (Tokali Kilise), p l. 80, a Tcharegü Kilisse
(Ç an k h Kilise), pl. i 3i.
CAIMKRS "ARCHKOI.OfilQCIiS
asiatique et européen» Type dont les plus anciens spécimens, du ivc au vi® siecles, se trouvant
en Svrie, et la chapelle de Babuda (vu0 siècle), avec son narthex surmonté d une galerie et sa
grande abside semi-circulaire saillante, constitue un des exemples les plus caractéristiques^.
De même, l’église primitive de Tabga à Genésareth (iv* siècle) était un édifice à nef unique ayant
une grande abside semi-circulaire saillante Dans la capitale de 1empire, le type est représenté
par plusieurs édifices comme ToMudede Mescidi, Isakapisi Mescidi, kefeli Camii, Manastir Mescidi
et Bogdan Sarayi qui doivent s’échelonner entre le xic et le xiv* siècle Tandis qu’en Asie
Mineure, dans le groupe des fondations ecclésiastiques de Latmos, près de Milet, on a rencontré
des chapelles à nef unique avec une abside saillante mais sans n arth ex^ , et d’autres spécimens,
qui étaient probablement voûtés, dans la série des églises de Binbirkilisse Les chapelles de
ce type furent surtout construites dans l’enceinte des châteaux et on connaît en Bulgarie en
Grèce et en Serbie ^ plusieurs exemples appartenant aux xp-xve siècles.
Par Paspect de leurs murs extérieurs, les églises d1Amasra rappellent les constructions byzan
tines qui commencent à apparaître au i\e siècle Les constructeurs des églises d ’Ainasra avaient
suivi la vogue de l ornementation extérieure, mais leurs ressources ne leur permettant pas sans
doute de composer des façades plus riches, ils eurent la bonne idée de se servir de matériaux
accessibles. Ainsi ils purent créer des édifices, certes un peu «archaïques * en leur simplicité,
mais où dominent la recherche des proportions harmonieuses et le désir de créer un effet de
couleur'1).
En se basant uniquement sur les monuments mêmes, on est invité à dater les églises de la
citadelle d’Amasra de la période allant du ix® au xin* siècle. Mais un fait historique assez impor
tant peut servir a préciser cette datation. On sait, en effet, grâce à la relation de Nicétas do Paphla
gonie W, que vers 860, à un moment où le péril arabe était le plus menaçant, la ville d’Amastris
fut saccagée et presque anéantie par un nouvel envahisseur jusqu’alors inconnu, qui était le
«Rhôs», c’est-à-dire les Varègues de la Russie méridionale Il ne paraît donc pas hasardeux
de dire que les deux églises furent construites après la destruction de 860, dans la seconde moi
tié du ixa siècle, par les habitants qui durent abandonner la ville et qui cherchèrent un refuge
contre les attaques futures derrière les murailles d’une citadelle.
Semavi Evicc.
concernant l ’ orne mentation des façades, cf. R. M e y b r - P l a t h , A. M. S c h n e id e r , Die Landmauer von Konslanlrnopei,
Berlin, 1 g 43, p. 9 9 (à propos de T ekfur sarayj). cf. égalem ent, S . B e t t i x i , O r ie n t nmano-ravenJiati délia decorazione
ceramaplastica bizantina, dans Attidel V Congresso di Studi Btzantini, Roma, 19 ^ 0 , p. a s et suiv.
0) N, Rrusov avait aflîrmé que la capitale de l’empire byzantin n ’avait connu les façades à décor q u ’à partir
du xiii* siècle et par l'influence de l ’art des Balkans. Or, les églises d ’Amasra m ontrent bien que ce go ût était parfai
tem ent « chez fiiin dans ce coin perdu d ’ une province byzantine. Comme aperçu général, cf. C. D ie h l , Manuel
d'art byzantin, Paris, 1 9 2 6 , t. II, p. 7 8 0 ; G. Mim-BT, L'école grecque dans ['architecture byzantine, Paris, 1 9 1 6 , p. a 5a
,
fît su iv .; Ph. S c h w e i n f u r t h , Die byzantinische Form Ihr Wesen und ihre Wirkung, Berlin, 19 A 3 , p , g d (Bulgarie)
et p. î o â (Serbie).
t*> K. Krhmmcher, Geschickte der byzantinischen Literatur, München, 1 8 9 7 , p. 1 9 9 , 1 1 O l. Nous devons signa
le r que l’édition de Nicétas, ainsi que différentes publications (surtout les publications russes) qui ont un rapport
avec le récit de cet auteur byzantin, sont inacessibles à Istanbul.
P o u r la date de cette attaque et la bibliographie, A. Yasiliev, Byzance et les Arabes. I. La dynastied'Amortum,
Bruxelles, 1 9 3 5 , p. ü 4 i , Æ33, h h h .
P lanche \ \ \ \ II
H t
Dans le précédent fascicule de cette revue, nous avons parlé des fouilles faites à Concordia
Sagittaria (Venise) en iq S o * 1). Les fouilles ont été reprises en t g S s au sud-ouest de l ’ensemble
monumental paléochrétien déjà découvert et elles ont donné des résultats très satisfaisants :
toujours au même niveau, c’est-à-dire à a m. 80 au-dessous du plan de la campagne, les substruc
tions des murs périmétraux d ’une autre église cimétériale ont été partiellement découvertes,
cette église étant en étroite relation avec la première église cimétériale, qui est constituée, comme
nous l avons déjà dit, de la trichora dans la partie absidaîe et de trois petites nefs (fig. i).
Dans cette nouvelle église, huit sarcophages à acrotères avaient été disposés. Quelques-uns,
de grandes proportions, sont alignés deux par deux, ou trois par trois, excepté l’un d ’eux qui est
posé obliquement comme s’il marquait le terme du groupe (fig. 2) ; deux sarcophages reposent
partiellement sur un linteau romain (ii°-ine siècle) réemployé qui est merveilleusement sculpté de
motifs décoratifs, oisillons et «amorini» dionysiaques. Les sarcophages sont en pierre du Carse
et en pierre d’Istrie et sont encore à leur place, bien que quelques-uns aient été cassés à la tète
et sur les côtés par des violateurs de sépulture La disposition des sépulcres de Concordia
rappelle beaucoup le système adopté à M arusinac^.
A Concordia une singulière inscription vient à l’appui de ce que nous avons précédemment
exposé. Elle est gravée sur le front du dernier des sarcophages alignés deux à deux ; elle est mal
heureusement mutilée, mais il est facile de la compléter :
(*) P. L. Z o v a t t o , Une nouvelle aire sépulcrale paléochétienne à lu lia Concordia Sagittaria ,m Cahiers archéologiques, VI,
195«, p. 1 ^ 7-155 ; M. G ra ba r { Concordia Sagittaria, ibid., p. 16 7-16 3) y a ajouté un commentaire du plus grand
intérêt et dont nous lui sommes très reconnaissant.
La violation des tombeaux à Concordia eut lieu quand la ville fut abandonnée et certainement avant que
l'alluvion (dernière partie du vi* siècle) n'ensablât entièrement la nécropole chrétienne. Les violations se poursui
virent, au moins ici, même plus tard, pour les sarcophages placés sur un socle et ainsi préservés d’une immersion
totale ; souvent la violation se fit alors avec de plus grands dommages.
(3) E. D t g g v b , History of Salonilan Christianity, Oslo, 1 9 6 1, p. 7 3 , 101 ; IV, 5 , 7; V, 5 .
D ISK N O O V B U E ÉG LIS E C IM ET ER IA LE 107
II faudrait s attendre à une autre inscription, gravée par exemple sur le couvercle, qui donne
rait le nom du défunt et la date de sa «depositio» (détails non habituels aux inscriptions
chrétiennes de Concordia jusqu aux découvertes actuelles), à moins que ce défunt n’ait voulu
demeurer anonyme et formuler sa prière même pour ceux qui avaient été déposés dans les autres
sarcophages anépigraphes.
P o u r ju stifie r les restitu tion s de l ’inscription que nous proposon s, il est nécessaire d e faire
les rem arq u es suivantes. La dernière lign e com ptant certainem ent 1 9 et la deuxièm e 20 lettres,
la prem iere et la troisièm e lign e sont de 20 lettres, la quatrièm e d e 2 i , et la cinquièm e de 1 9 .
ü après des verifications q u e j ’ai faites sur la pierre, les restitutions proposées doivent être lég i
tim es car elles d on n en t la lon gu eu r vou lu e. La cinquièm e lign e présente q u elq u e difficulté à
cau se d u g é ro n d if infanendo, po u r inferendo. S u r ce fait, m on excellent am i P. F erru a, q u e j ’ai
in terro g é a ce su jet et q u e je rem ercie cordialem ent, croit q u e le tailleur de pierres, su r le m odèle
q u ’ on lu i avait donné, a mal lu F A N au lieu d e F E R ; on pourrait penser à inponendo q u i éq u ivau t
à im poser, ou encore à infanando q u i équ ivau t à profaner, bien q u e le sens général, en ce der
n ier cas, en serait q u elq u e peu m od ifié; on d o it encore observer les form es incorrectes : une
p o u r hoc, aïium p o u r aliud et l’ om ission du p, temtet po u r templet.
Comme l ’on sait, à Concordia et ailleurs, la violation des tombeaux se faisait soit dans le but
d’y soustraire des objets de prix, soit pour y placer (inferendo ou imponendo) les corps d’autres
morts.
L ’expression corpora sanctorum de l ’inscription ne fait pas allusion à des saints, à des martyrs
ni à leurs reliques, mais aux âmes qui jouissent du bonheur éternel dans la patrie céleste où l’on
espère qu’elles font déjà un séjour O ; leurs corps habitantr c’est-à-dire qu’ils reposent dans la
basilique S ’il s’agissait de saints ou de martyrs faisant l’objet d ’un culte liturgique, Tinscrip-
tion aurait certainement indiqué leurs noms. L ’inscription de Concordia, qui, en raison de son
k ductus » est à rapprocher de plusieurs des inscriptions provenant de l’autre nécropole de sol
dats et de chrétiens et datant certainement du v®siècle, rappelle aussi d’autres monuments datés.
Elle doit appartenir au v* siècle avancé Elle a une singulière importance parce qu’elle donne
des indications certaines sur la disposition des tombes, parce qu’elle rappelle et confirme
Tinscription relative aux apôtres Pierre et Paul, jadis exposée par le pape Damase ( 366- 384) sur
remplacement de Factuelle église Saint-Sébastien adcatammbas, au 3" mille de la Voie Appienne,
c’est-à-dire que le texte controversé hic habitasse doit être entendu au sens cimélérial du mol
enfin parce qu’elle éclaire les fouilles en révélant à Concordia un groupement de sépulture ana
Jogue par plus d ’un trait à celui de Salone,
p a n
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m .
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QUELQUES IVOIRES
D ’ORIGINE SUPPOSÉE GAULOISE
PAR
HENRI STERN
L ’étu d e du style et de I iconographie des ivoires profanes et chrétiens du Bas-Em pire a fait
des p rogrès consid érables d ep u is un dem i-siècle. Stu hlfau th, G raeven, Strzygow ski, D elbrueck,
G old schm id t, ont proposé des groupem ents, des dates et des localisations, «pii. s ils n ’em por
ten t pas tou jou rs la conviction, ont néanm oins grandem ent contribué à d égager les traits carac
té ristiq u es de certaines écoles et à su ggérer des dates d origine plausible.
L ’ ou vrage de M. YY. F. Y olbach, Elfenbeinarbeiten der Sp itantike und des frühen Mittelalters,
M ayence, i ( ) 5 a, Römisch-germanisches Zentralmusenm zu Mainz, Katalog 2. Aullage, in - 4 °.
1 1 \ p., 6 8 pl. 1 . esl comme une somme de ces travaux antérieurs, enrichi par de nom breuses
ob servation s personn elles. L au teu r a fait un choix ju d icieu x parmi les d iptyq u es consulaires
<111i sont accessibles dans la grande publication de D elbrueck. Mais il a réuni presque tous
les autres ivoires profanes et su rtou t chrétiens, dont beaucoup 11 étaient conn us que par des
p u b lica tio n s peu répandues. Cette réunion des docum ents peut être considérée en elle-m êm e
com m e œ uvre neuve. Par le groupem ent des ph otographies (la plupart d une excellente q u a
lité) des rapprochem ents sont su ggérés et des com paraisons de style et d iconographie ren
d u s possibles.
Nous avons nous-m êm e cru pou voir tirer q u elqu es conclusions de 1 étu de de cet ouvrage qui
ne concorden t pas tout à fait avec celles de I auteur. Ce sont ces observations que nous vou
d rio n s soum ettre au lecteur.
M. Y o lb ach a su ggéré l’existence d un groupe d ivoires des v* et v ie siècles, d origin e gauloise,
q u ’il a d ailleu rs étu d ié de plus près par la suite * . Il nous sem ble q u e le style de ce groupe
dem ande à être précisé et son attribu tion à la Gaule réexam iné de près.
Deux pièces, dont l une se trouve à la B ib lioth èqu e nationale de Paris (plaque de reliu re d ’ un ma
n u scrit du ixc siècle, lat. [ pl. \ L I . 1 |. 1 autre au Musée Cluny (p l. \ L I . •’ ), où elle est
venue de la collection S pitzer, peuvent form er le point de départ de notre analyse. T outes deux
ont été a ttrib u ées par les devanciers de M. Yolbach à l'O rien t grec. On les a rapprochées des
reliefs de la chaire de Maximien et de la reliu re de 1 évangéhaire d Etschnnadzin, dont les
ressem blan ces iconograp h iqu es sont évidentes.
M. Yolbach est, sau f erreur, le prem ier à avoir insisté su r une différence d<* style m arquée entre
1o .
REMARQUES
SUR L’ARCHITECTURE LOMBARDE DU VII“ SIÈCLE
PAR
EDO AR DO ARSLAN
E n septem bre 56 9 , les Lombards occupent Milan sans coup férir, et trois ans plus tard
tom be Ticinum, l’actuelle ville de Pavie, qui deviendra, après la conjuration de Vérone, la
capitale du nouveau royaume. Nous avons, depuis longtemps déjà, des renseignements
sur les constructions édifiées par les Lombards dès les premières années de la conquête.
Nous savons q u ’une basilique a été fondée, par Autharis, à Fara d ’Adda entre 584 et 5 8 9 ,
et q u ’elle a été appelée justem ent Fara Autarena. L ’époque de la restauration catholique
de Théodelinde et d ’Agilulphe semble avoir marqué le début d ’une activité constructrice
plus intense à Monza, à Pavie et à Milan. En 59 5, Théodelinde fondait à Monza, sa rési
dence préférée, en même temps qu’un palais royal, une basilique consacrée à saint
J ea n -B a p tiste^ qui fut terminée en 6o 3 ou 6 o 4 Il ne reste rien de l ’architecture de
cette b asiliq u e; nous savons seulement, grâce à des érudits du xvm # siècle, que son dessin
était celui « d ’ une croix grecque parfaite« surmontée d’ une «rgrande coupole« et précédée
d ’un atrium à portiques. Il ne reste rien de Sainte-Julie de Bonate, fondée probablem ent,
elle aussi, par Théodelinde.
Les recherches, en ce qui concerne Milan, ne sont pas plus aisées. II est naturel de pen
ser que ce qui se bâtissait à Milan devait subir l’influence des constructions plus parfaites
et plus nom breuses de la capitale proche; aussi, pour obtenir quelques clartés sur les
rares bâtim ents milanais de l ’époque, faut-il étudier les édifices de l ’antique Ticinum.
M alheureusement, nous ne savons pas grand-chose de ceux-ci, et souvent rien de plus
q ue leur nom et leur situation.
A Pavie, naturellem ent, les églises furent tout de suite nombreuses. Paul Diacre parle
d ’une basilique de Saint-Pierre Apôtre apud Ticinum, et la donne comme existant en
l’année 6o 4 ^ ; et l’ on connaît, toujours à Ticinum, une église Saint-Bartholomé de
{1) Paolo Diacono, Hist. Lang , IV, a a ; G. Fiamma, Chron. maius, édit. Ceruti, dans Miscell. diStoria
ïtaliana, V II, Turin, 1 8 6 9 , p. 8 a ; le baptistère de Brescia aussi aurait été érigé par Théodelinde
(Troya, Codiee Diplom. Longo bardo, Naples, i 8 5 a et suiv., IV, p. 56g ) ; Cattaneo, L'architecture en
Italie du n* au x i' siècle, Venise, 1 8 9 1 , p. 5 i .
T r o y a , cit., IV, i , p. 5 5 5 .
(î) Hist. Lang., IV, 3 a ; M erkel, « L ’epitaffio di Ennodio e la basilica di S. Michele in Pavia», dans
Memorie deWAecademia dei Lincei, vol. III, p. r, 1 8 9 5 , p. 90.
j 1 i.
130 CAMIKAS ARCHÉOLOGIQUES
lion : 1 architecture du vu siecle apparaît chez nous en grande partie comme un prolon
gem ent de celle du vi°; tout ce que révelent peu à peu, avec parcimonie, ruines et monu
ments raisonnablem ent attribués à cette époque, atteste des méthodes, des idées de la
fin de I antiquité, paleochretiennes, ravcnnates; enfin ce caractère «rconservateur» du
siècle se trouve confirmé un peu partout en Occident : par la forme paléochrétienne ou
byzantine du chapiteau, qui ne disparaîtra qu au début du vin® siècle, pour faire place
aux créations toutes nouvelles des tailleurs de pierre lombards (l> ou v is ig o th s ^ ; par les
formes architecturales qui conservent exactement des proportions paléochrétiennes, à
Lom ello, a Brescia, a Torcello; par les caractères de la peinture (toujours paléochrétienne
ou hellénistique ou byzantine) à Ravenne et à Rome.
Laissant de côte le baplistere de Lomello, singulière construction du vu* siècle, qui garde
encore les caractères de l’architecture paléochrétienne, arrêtons-nous un instant sur un très
im portant m onum ent dont le plan a été dégagé il y a quelques années à Pavie, et qui
apporte de précieux renseignements sur ce que put être la conformation des églises lom
bardes les plus antiques de Ticinum (pl. ,\L 1I, i). On a d ’abord cru qu’il s’agissait de fonda
tions romaines, mais nous sommes certainement en présence d ’un plan très voisin de celui
de certaines églises grecques d’ Kpire [Dodone, Paramythie] (\L1I, a) communément attri
buées au v* siècle, et dont l’influence en Lombardie ne doit pas surprendre, vu la singu
lière iconographie de Sainte-Thècle à Milan. Ce plan révèle en effet un vaste transept aux
extrémités duquel s’ ouvrent deux petites absides, ainsi qu’une abside trilobée dont il est
superflu de signaler l’alïinité avec les structures semblables de la Sainte-Trinité de Yerceil
( \ L 1I, 3) et des églises d'Egara et de Cimitile (\LII, 4) ; et l’on sait que ce dernier groupe a
permis d ’identifier des rapports avec l’architecture paléochrétienne primitive de l’Egypte.
II n ’est pas impossible que l ’église dont il s’agit appartienne à la période de réaction
catholique de Théodelinde, Agilulphe et Adaloald. D’ailleurs, la présence de formes
et grecques» n ’est pas pour surprendre, dans une ville d ’où rayonnait, précisément
au vn e siècle, une très vive activité anti-hérétique, sous l’impulsion de missionnaires
orientaux envoyés par Rome, et que de nombreux autres indices m ontrent comme un foyer
très vivant de culture grecque.
Ce plan pourrait bien donner aussi une idée de la configuration de certains édifices
sacrés de Monza, de Ticinum et de Milan, qui se trouvait tout proche. On peut présumer
que la basilique de Monza, qui devait être un monument très important, reproduisait
les m odèles cruciformes dont nous rencontrons la présence sur tout le territoire du vaste
diocèse de Milan, pendant le vi* siècle et ceux qui l’ont précédée immédiatement. Certes,
les renseignem ents que nous avons sur cette église, transmis par des sources tardives, ne
doivent être reçus que sous bénéfice d’inventaire, car il ne serait pas impossible, qu ils se
{i) La profonde décadence du vu ' siècle est une opinion communément acceptée (Cf. R. de L asteyrib ,
L ’ architecture religifuse à l èpo<jue romane en France, Paris. 193 91 P- 3 o). \ o ir , à propos du caractère
conservateur du vu* siècle les observations nourries de K a u t z s c h (Kapiielhludien, Berlin-Leipzig,, 1 9 3 6 ,
p. 6 1 et suiv,) sur les chapiteaux de la zone méditerranéenne orientale. .
A. H a u p t , D ie aeîteste Kunst, insbesondere die Baukunst, der Germanen, Berlin, * 9 3 3 , flg. 69 (noter
les chapiteaux, encore antiquisants^. de la mosquée de Cordoue).
132 (.A.HIKIIS A RC H K O IO G IQ U ES
{ ) A. F. F risi (Memorie Storiche di Monza, Milan, i 79/1, I, p. 9) a observé que le plan en forme de
croix terminait hal primo colonnato ottagono, sut quale posano ancora gli awanzi dcll’antica facciala»
et comme «quattro colonne sostenevano la volta, o tribunal ; et ce n’est pas clair si l’ on entend ici le
presbitère ou l’abside. Cattaneo (cit., p. 5 a ) avait reconnu dans ces descriptions du xvin® siècle un
édifice roman.
(1) S avio, op. cit., I , p . 1 8 a .
‘ Sur l’église lombarde de B e rim e et, en général, sur le type à trois absides à cette époque, voir
surtout : B ognetti, etc., S . Maria d i Castelseprio, Milan, 19 48, p. 1 A7, p. e t passim.
U. M onneret de V illard, L ’ Isola Comacina, Côm e, t g i i , p. 7 3 et su iv.
RKUM QliKS SUM L’ARCHiTFXTURE LOMBARDS DU VU* S1KCLK 133
Par ailleurs, dans 1enceinte du castrum lombard de S ib riu m O s’élevait une basilique
Saint-Jean-l Evangéliste (XLIV, 2) qui revêt aujourd’hui à nos yeux, toute ruinée q u ’elle est,
un sens tout différent de celui qu y trouvait Porter, il y a plus de trente ans : il s’agit pro
bablem ent, la encore, d un édifice du v i i " siècle. La basilique, bâtie avec du matériel de
rencontre (cailloux, moellons de tuf, briques) qui dénonce une maîtrise déjà barbare, était
divisée par deux lignes de piliers, probablem ent carrés, en trois nefs, et dut être recouverte
d un toit à charpente apparente, quant à l’ espace qui va du mur de l’abside au premier
couple de piliers, il devait être plus grand que celui qui séparait les uns des autres les
couples précédents. L ’abside semi-circulaire adhérait directement au corps de la basilique;
elle était percée de deux séries superposées de grandes fenêtres en plein cintre, avec l’arc
en b riqu e, dont les proportions sont d ’inspiration encore nettement classique. En outre,
les restes d ’un baptistère octogonal à pilastres angulaires sont encore visibles dans l’axe
de la nef gauche, au nord de l’abside; il semble qu’on passait de la basilique au baptistère
par une ardica flanquée de deux absidioles. 11 reste aujourd’hui, outre les fondations
inexplorées, une partie du mur de l’abside, encore haut d ’une dizaine de mètres, qui
dépasse des broussailles.
L ’ichnographie de cette basilique doit probablem ent être rapprochée des modèles
orientaux. La distance qui sépare le dernier couple de piliers du mur de l’abside, remar
quée par M. Bognetti et le très regretté De Capitani d’Arzago, serait la marque très nette
d ’un transept, ou tout au moins d ’un espace auquel l’ampleur des arcs, supérieure à celle
des précédents, devait donner une physionomie propre et nettement distincte. Même sans
parler d ’exemples plus anciens et plus célèbres de ce type de transept dissimulé au dehors
par la continuité des murs extérieurs tels que la basilique C de Nicopolis l’église n" a
de B in b ir k ilis s e ^ , une des églises de P e r g e ^ , la basilique de M anastirine(5) et d ’autres
basiliques m ic r o - a s ia t iq u e s q u i attestent au moins le caractère nettement oriental de
ce type» d ’ailleurs réaffirmé récemment par M. G u yer(7), il faut reconnaître un précédent
exact dans l’église de Genesios à Gérase, dont on place la construction en 6 1 1 . Et en Orient
égalem ent, on rencontre des piliers à section carrée comme semblent bien avoir été ceux
de Saint-Jean-l’ Evangéliste. Le rythme grandiose des fenêtres de l’abside disposées sur
deux plans rappelle les ruines de Saranda, en Albanie (XL\ 1, t) , attribuées au vi* siecle
L ’ensem ble de l ’ardica et du baptistère est à rapprocher des prototypes milanais et raven-
nates. L ’attribution de Saint-Jean-l Évangéliste de Castelsepno au début du vu* siecle
(1) T o b te k , rit,, II, p . 3 7 3 . De Capitani d’ Arzago p en se à ia fin d u vi* o u au com m encem ent du
vu* siècle (dan s BoHettim d'arte, jan vier-m ars 19 /18 , p . 1 7 et p. a 3).
<4> G . A . SoTE R iou, dans Archatol. Ephem ., 1 9 3 9 , p. a o a , fig. 33.
J. S t r z y g g w s k i , K kinasien, p. 10&.
(4) R o t t , Kleinasiatische Kunstdenkmnler> 1 9 0 9 , fig. a i .
(*> V o ir : Atti del I V Congresso Intemazionale di Archeologia Cristiana, R om e, 1 9 4 0 , 1, p . h 0 0 , fig. 1 a .
S trzyg o w sk i, op. « / ., p . Ä9 e t p . 54.
<7> S. G u y e r , «Beitraege zur Frage nach dem Ursprung des kreuzförmig — basilikalen Kirchenbaus
des Abendlandes», dans Zeitschrift fü r schweizerische Archaeologie «. Kunstgeschichte, V II, 1 9 4 » , p. 9 6 .
<») A tti del I V Congresso Intemazionale d i Archeologia Cristiana, cit., p . Ä o 6 - 4 o 7 .
m CAnn;iis AnaiK0!.0(;iQi i:s
ne serait donc point trop risquée ; niais, naturellem ent, elie devrait être confirm ée par
les résultats de travaux plus poussés.
Ces constatations peuvent être utilisées pour une seconde église de Pavie, Sainte-M arie
in Pertica, édifiée vers 6 7 7 p a rla reine Rodelinde «opere m irabili», décorée «ornam entis
m irificis», et qui a été dém olie en 18 1 5 Nous dirons seulem ent que cette rotonde, déjà
connue par les travaux de MM. Balducci et Verzone, doit selon nous être rapprochée du
baptistère d e ‘Torcello, dont les traces ont été m inutieusem ent étudiées par M. Forlati
q ui en a reconstitué le plan (X IJ ll, 3) [circulaire, à huit colonnes entourant le bassin cen
tral, et à deux niches], et a donné une idée de ce que devait être l ’aspect de la construc
tion. Ce baptistère de Torcello, avec les restes de l ’autel de la basilique retrouvés et publiés
par le même Forlati, est aujourd’hui le seul élém ent sûr que nous connaissions de l ’église
de Torcello, dont la fondation rem onte à 6 & o, et qui présente avec Sainte-M arie in Pertica,
aux niches près, des affinités d ’autant plus rem arquables que ces deux constructions appar
tiennent Tune et l ’autre (nous le savons) au vu* siècle (XL 11I, 4). Néanmoins, étant donné
la, diversité des hypothèses sur la configuration exacte de Sainte-M arie in Pertica, il
serait im prudent de pousser plus loin les conjectures, et les plus grandes précautions
s’ imposent, surtout lorsqu ’ on cherche à préciser le véritable caractère de la coupole (XLV, 1 )
q u i n ’était certainement pas à l’origine égale à celle que nous voyons dans une gravure du
xvm e siècle.
Parmi les m onum ents milanais qui rem ontent aux premiers siècles du m oyen âge et
dont la forme, insolite p our nous, devait être alors, au contraire, des plus comm unes,
tém oins d’ un naufrage dont nous ne pourrons jam ais recueillir, et avec beaucoup de
chances, que quelques épaves, il faut citer la tour carrée du M onastère M ajeur (V L 1V, 1).
De patientes recherches de De Capitani lui ont permis d ’établir q ue les fondations et une
partie des murs, ju s q u ’à u ne hauteur de 1 m. 5o environ, sont d’ origine rom aine. La
partie supérieure de la tour, m édiévale, a été étudiée à son tour par M. Chierici qui attri
bue la loggia au ixc siècle, tout en adm ettant que les grandes fenêtres à trois parties,
appuyées aux pilastres d ’angles restés intactes, ont été refaites. E ntre ces pilastres il y avait
des colonnes dont on voit encore les bases dans un m ur de protection plus récent. La
partie médiévale la plus ancienne semble dater du débu t du v ie siècle au plus tard : sur
■son flanc Nord, elle porte encore une console de type classique et, dans le vif de la maçon
nerie, l’em preinte d ’un fronton classique triangulaire ; dans sa partie supérieure, elle a
certainem ent com porté de chaque côté une ouverture triple, attestée par les grandes bases
quadrangulaires m urées qui devaient supporter, comme nous l ’avons déjà observé, de
grands fûts aujourd’hui disparus. L e caractère antique apparaît clairem ent grâce aux
consoles (dont une est restée en place) qui soutenaient des colonnes portant un fronton
triangulaire dont la trace subsiste, ornem ent sem blable à celui de la fameuse Porta Aurea
de Spalato ; le même caractère antique des grandes fenêtres en trois parties, souvenir des
rythm es du palais de Théodorio à Havenne étudiés par M. Dyggve (\LV-, 9) et même du
nympheum de la maison d’Am our et Psyché à Ostie (XLVI, a), est égalem ent très net.
. Lang., V, 35. .
Cf. BolL d ’artes t p. a o i et suiv. ( B e c a t t i) .
REMARQUES SUR LURCHITBCTURB LOMBARDE IW VU* SIECLE 135
Il est possible que cette tour ait vu, au cours de l ’été 6 o 4 , Adaloald enfant proclamé
roi en presence de son pere Agdulphe, justem ent apud Mediolanum in circo. La c loggia »,
dans sa forme actuelle, date probablement de la fin du vm e siècle et jrlu début
du ix°.
Le rythme des arcades de cette tour a déconcerté successivement les quelques spécialistes
qui s y sont intéressés, et cela n a rien d ’étonnant : ils n’y trouvaient, et ne pouvaient y
trouver, aucune des marques qui permettent d ’identifier un style avec quelque précision.
Il est clair en elFet que ceux qui y ont travaillé plus tard ont du respecter les dimensions de
1 ouverture primitive. Les colonnes ayant été abattues ou enlevées, on a imposé aux
reconstructeurs de respecter la hauteur et le rythme originaux ; et probablem ent, comme
les grossières colonnettes et les chapiteaux d ’emprunt que I on employa n’avaient pas une
hauteur suffisante, on y suppléa par quelques fragments massifs de rencontre qui furent
ensuite remplacés par la bordure murale qui ferme actuellement, dans sa partie inférieure,
l ’ouverture de la loggia.
En conclusion, les exemplaires que nous possédons de l’architecture du vu* siècle en
Lom bardie, et qui ne sont plus si rares, permettent de reconnaître à la construction reli
gieuse des Lom bards à cette époque l’amorce d’une physionomie propre, et pas vraiment
« barbare». Nous croyons donc pouvoir affirmer : que l’architecture «lom barde» au
vu" siècle acquiert peu à peu des caractères nettement distincts de ceux qui se remarquent
chez les Goths et chez les Byzantins, dans le territoire de Ravenne, aux va et vie siècles ;
q u ’elle se développe différemment, et comme sur un autre plan ; qu’elle a eu des contacts
avec l ’art de Ravenne, mais plutôt limités, comme en témoigne le cas, encore sub judice, de
Sainte-M arie in Pertica ; que de toutes façons elle avait tendance à regarder, par dessus
Ravenne, vers la province byzantine. E t en effet, tandis que le domaine ravennate du
v ie siècle semble avoir été marqué par une unité et une homogénéité frappantes, nettement
inspirées par Byzance, les constructions ordonnées en « Liguria » par les nouveaux domi
nateurs, au vu® siècle, témoignent d ’un éclectisme évident et révèlent d’ une part, comme en
fait foi le baptistère de Lomello, une tendance conservatrice qui exploite le patrimoine de
la fin de l’antiquité, et d’autre part l’infiltration de modèles venus des provinces orientales,
sans que toutefois l ’on puisse reconnaître encore, dans tous ces thèmes discordants, le
prem ier fondem ent d ’un style nouveau.
Si ces observations sont fondées, elles peuvent être fertiles en conséquences. En premier
lieu, elles réduisent considérablement la part d’ une hypothétique architecture barbare
dont on ne voit aucune trace en Lombardie et qui, alléguée également pour d’autres
endroits de l’ Occident, a été démentie par la découverte de constructions des vu" et
vm e siècles, d ’inspiration typiquement méditerranéenne. Ainsi, il semble désormais inutile
de perdre son temps à imaginer à quelles sources pouvaient bien s’inspirer, pour leurs
édifices profanes, les Ostrogoths, les Francs, les Visigoths, les Vandales.
En second lieu, la thèse de la généralisation de l ’art ravennate se trouve invalidée et
l ’influence de cet art limitée aux territoires adriatîques, de l ’Istrie à la lagune vénitienne
et au P entap ole; et, par contre, on est amené à reconnaître, une fois de plus, dans la
plaine du Pô, une zone ouverte à des suggestions venues, plus que de Ravenne, de ces
136 ca h i i:ns A!i(;iii::oi.o(iiQti;s
provinces orientales qui ont tant contribué à la formation de l ’art européen du iroyen <ïge.
Pour mieux préciser la position de l’art de l ’exarquat en face de celui de la Lom bardia,
il convient de rem arquer que si l ’on surprend çà et là, dans l’art ravennate des v" et
vi* siècles, un effort d ’adaptation aux conceptions particulières de l ’O ccidcnt r roman »,
comme dans le cas de Saint-Vital, ses analogies de goût fondam entales avec l ’art byzantin,
les exigences politiques et historiques, enfin l ’identité indiscutée des m aîtrises et des
matériaux trahissent en lui, i n primis et ante omnia, une filiation directe de Byzance; aussi
cet art, au début comme à la fin de son apparition, se présente-t-il de plus en plus, comme
nettem ent circonscrit dans le tem ps au fur et à m esure que se dessine, à travers le travail
de révision critique entrepris ces dernières années, la physionom ie artistique de la région
lom barde; et celle-ci, aux v ie et vu6 siècles, c’est-à-dire à l’époque, aussi bien q u ’au iv%
reste fidèle à certaines tendances particulières.
Au iv" siècle en effet, reprenant p our ses basiliques les plans de vastes bâtim ents exé
cutés en Orient, et mieux encore, entrant en contact avec ces m odèles à un point de leur
développem ent que Rome, après Constantin, ignora à peu près com plètem ent, Mediolanum
avait élaboré des formes particulières, et le plus souvent différentes de celles qui se ren
contraient norm alement à Rome. Ainsi, les baptistères «am brosiensn, les basiliques de
Sainte-Thècle, de Saint-Laurent, des Saints-Apôtres, de Saint-Sim plicien reflétaient des
formes de l ’Asie M ineure, de la Grèce, de Byzance, de l ’A frique du Nord, peut-être même
de la S yrie; ces formes n’étaient pas du tout romaines, même si elles n’étaient pas entière
ment inconnues à Rome, où elles avaient été im portées, mais bien moins largem ent.
Ce fait m érite d ’être replacé dans un plus vaste ensem ble, à côté des rapports récem
m ent découverts entre l ’architecture de ce tem ps en Gaule (Autun, Glanfeuil), en Espagne
et ailleurs, et là Grèce, l ’Asie Mineure, l ’A frique du Nord. Ainsi, à notre avis, p ourrait être
trouvé un terrain d ’entente, un premier indice d ’équilibre acceptable entre la thèse des
partisans intransigeants de l ’ O rient et son opposée, celle des partisans intransigeants d
Rome. Il ne s’agit pas ici, en effet, de refuser au génie romain le m érite d ’avoir découvert
et répandu d ’im portantes nouveautés architecturales, mais p lutôt de reconnaître au
Proche-O rient celui de les avoir reprises et développées dans le cadre du nouvel Etat
d ’inspiration hellénistique, fondé par Dioclétien, qui rendit possible dans les nouvelles
capitales périphériques de l’Em pire, vierges d ’une tradition m illénaire, la floraison d ’idées
nouvelles.
C ’est donc sous cet angle q u ’ü conviendrait d ’envisager l ’étude des rapports artistiques
entre Milan et l’ Orient, entre l’art « périphérique », p lutôt q u ’oriental, que ces deux régions
(et pas seulem ent elles) représentent. En ce qui regarde Milan et l’ O rient, ces rapports ont
certainem ent été rendus plus intim es par la suprém atie que l’ on reconnaissait à l ’église
grecque, préceptrice de celle d ’Occident, au temps de saint A m b roise; et rien ne les fait
mieux ressortir que le contraste de Saint-Vital de Ravenne avec Saint-L aurent de Milan.
Le premier, quoique postérieur, ne dérive pas de l ’autre, justem ent parce que Saint-
Laurent représente une idée courante dans l ’Em pire au ivB siècle, alors q ue Saint-Vital
reflète une tendance byzantine précise : tous deux rem ontent à une source comm une, mais
par des voies différentes. Notons bien que ce patrim oine de formes architecturales éla
REUVRQCKS S IR 1/VUCIIITKI.TIUK l.OUDAHOR DU VII* S1KCLB 137
borées dans !a « Liguria r» romaine ne suivit pas la cour lorsqu’elle se transféra de Milan
à Ravenne, au debut du ve siecle : la region de Milan resta un carrefour des idées q u ’échan
geaient T Orient et l’ Occident.
Ainsi s explique, compte tenu des précédents du iv* siecle, qu'on ne réussise à trouver
ni à Pavie, ni à Mdan, ni ailleurs en Lombardie, aux vi* et vu* siècles, aucun rappel pro
bant de l’art de l’exarchat, à côté de tous ceux qui renvoient, comme on l’a vu, à Byzance et
à la province byzantine; de même, l ’accueil réservé en Lombardie au vu" siècle à fa culture
grecque et aux influences venues de Syrie et d'Egypte devient explicable.
L architecture paleochretienne, que nous connaissons mieux parce q u ’elle a été mieux
respectée par le temps, permet donc de se représenter ce que put être l ’architecture des
siècles qui la suivirent immédiatement; elle montre une fois de plus que les idées qui ont
fécondé T Occident et sur lesquelles a reposé l’architecture occidentale durant les siècles
qui se trouvent à cheval sur le premier millénaire passaient normalement par la Lombar
die, m anliquo déjà, et ensuite pendant les siècles les plus obscurs. La découverte — d’ une
portée incalculable — de Castelseprio, aussi bien que les dernières études sur les marbres,
les stucs, l’orfèvrerie du vu* siècle en Italie du Nord semblent confirmer ces apports essen
tiels de T O rient méditerranéen que mettent en lumière les traces de l’architecture et de la
peinture de cette époque. Kautzsch lui-même, tout en restant fidèle dans sa dernière étude
sur ce s u je t 'r) à la thèse de la présence de tendances germaniques dans les thèmes « lom
bards n de r ita lie du Nord, ne contredit pas l’apport oriental, que par ailleurs confirment
de m anière précise et éclatante les plus récents travaux de M. Aberg. Celui-ci voit, dans la
prem ière culture lombarde en Italie, la rencontre de ce qu’ il appelle le style nordique
prim itif zoom orphe avec l ’entrelac « brisé n dérivé de l ’art copte que les Irlandais placent
à l’origine de leur culture figurative, et il confirme l’origine byzantino-syriaque des pièces
d ’orfèvrerie de Monza.
Ces conclusions sur les rapports des thèmes décoratifs de l’art lombard au vu* siècle avec
ceux de la Méditerranée orientale (de l’ tigypte en particulier) ne pouvaient être amenées
que par une très vaste connaissance des cultures figuratives qui, aux vu* et vin* siècles,
peuplaient TO rient et l ’ Occident m éditerranéens; ainsi l’apparition, au siècle suivant,
de notables affinités entre les thèmes décoratifs utilisés en Lom bardie et ceux que l’on
retrouve en Northum brie fait ressortir leur provenance commune de la Syrie qui restait,
même après la conquête islamique, curieusement fidèle à son mode d expression parti
culier, dérivé de l ’antiquité classique. L ’art syriaque est justem ent, pour Aberg, celui qui a
provoqué, au vin* siècle, la transformation de la sculpture à entrelacs et en même temps
celui qui a inspiré, toujours au môme siecle, les stucs de C ividale; sur ce point, les refe
rences de style ne pourraient être ni plus précises ni plus convainquantes.
P o u r revenir au vu* siècle, les contacts avec Byzance, la Syrie et l Kgypte remarques dans
les constructions lombardes de ce temps ne doivent donc plus nous surprendre : la raison
en est évidente, après les nouveaux témoignages que nous avons reunis ici.
M ilan, avril 1 9 0 1 . Edoardp A rslan.
»H»a *
•m &
»**+
**<
1
Pa\ie. Plein <1 une iglise retrouvée dans le sous-sol. Dodonc. Basilique.
3 4
V erceil. É g lis e «le la T rin ité . C im ilile . B asili(|iie.
1
Mi hin. Sn in 1s-A poires.
îo im io - livo/uvziont lA in /m o
M L n I X - i ------------------ j ~ —
3
Torcello. Baptistère, d’après Forlali.
P lanch k  M V
1
M ilan. La lo u r c a rré e d u M o n a stè re M ajeu r.
2
Oislelscpi'io. SainUlean-i’ rivangelisle. Koines «le l’abside.
P lanche X L \ I
Com e è no to esisle su qu esti affreschi un graflito del tem po d i A rderico, ehe fu arci-
vescovo di M ilano su b ito prim a della metà del sec. x, ma ci;> non vale ehe com e un term ine
ante qu em 1 .
C e tra g li stu d io si una corrente che, richiam ando il fatto ehe M ilano (nella cui diocesi
è C astelsep rio ) si dirnostra durante i sec. iv e v un centro artistico notevole (m osaici;
a vorii paleoeristian i, etc.). inclina a ritenere ehe si tratti di un p rod otto di una continu ité
a r tistica locale 2).
Pii'i fonda ta pare pero i opinion e ehe si tratti di un pittore venuto dalle region i bizan-
tin e d i lin g u a greca, cioè da un m ondo ehe contava grandi città e continu ita effettiva della
società a n tica ; ma qu esto non orienta ancora circa la data d egli affreschi, perché la pre-
senza q u i di un artista bizan tin o, ben spiegabile pel sec. m i e vui 3; non sarebbe im pos-
sib ile nem m eno pel see. cioè in corrispondenza alla cos'i detta m-inascenza» verificatasi
sotto la d in astia «m acedone» degli im peratori d O riente ' .
M olto im p ortan d o , p er le ragioni di cui direm o, la scelta tra qu este due datazioni. si
d isp u ta principalrnente su questi tre elem enti : Jo stile d egli affreschi, l ’iconografia, e
i earatteri paleografici delle scritte in bianco ehe si leggevan su di essi (pl. \L \ II, 1, a).
G iova il con fron to con scrittu re su affreschi di S. Maria A n tiq u a di Rom a, del sec. vn
o dei prim i an n i del sec. \ m 5 .
Q ualcu n o p o treb b e pero scartare questo terzo elem ento, sostenendo ehe d u ran te la
12 v
140 CA HIK BS A BC El KO 1,0« IOU RS
«rinascenza macedone» come si imitavano le arti dei secoli m igliori, se ne potesse, da parte
di chi mostrava cos'i fervido ossequio al classicismo, in qualche caso riprodurre anche
la scrittura (I), al m odo che, nella «rinascenza carolingia», si era fatlo per i più eleganti
caratteri epigrafîci dell’antichita.
Ridotta cosi la discussione allo stile e a ll’iconografia, è naturale che essa si accanisca,
perche se gli aflreschi datassero dal sec. vu od vm senibrerebbe menomata una delle
caratteristiche che, per l ’alto medioevo bizantino, si ritengono esdu sive della «rina-
scenza m ecedone» cioè la diretta ricerca di modelli nelle opere d ’arte del periodo pagano o
tu tt’al più dei sec. iv e v, dai quali verrebbero, per imitazione, l’ iconografia e Jo stile
classicheggianti, che si ammirano, per esempio, nel Salterio greco 1 3<j della B. N. di Parigi.
Se, in altre parole, non si attribuisse Castelseprio al sec. x, non ci sarebbe che da afTer-
mare una inaspettata continuité d ell’arte classica in Oriente, accanto a stili diversi, di
cui ci son noti gli esemplari ; oppure da supporre l ’esistenza di una rinascenza, di forse
tre secoli anteriore a quella m acedone, sfuggita finora pel suo carattere parziale, per Ia
scarsità delle opere supersliti e per la sua breve durata (stroncata cioè da grandiosi avve-
nimenti poh’tici e religiosi), nonchè pel rapido degenerare di quello stile, subito dopo,
al contatto di altri stili e di am bienti artistici popolareschi.
Qualcosa di simile era veramente già stato sospettato o prospettato subito prima del
ritrovam ento di C astelseprio; ma era una polemica impostata in modo assai audace,
perche si partiva da una datazione al periodo preiconoclastico delle m iniature de! Salterio
parigino greco i 3g e del rotulo di Giosuè, alla Vaticana, le quali non si possono invece
togliere, nel giudizio dei p iù , al periodo della nrinascenza m a c e d o n e » L a m igliore
interpretazione di quest’ultim e opere d ’arte lie definisce, è vero, delle copie di opere
assai più antiche, alle quali pure, in modo pero più fram mentario e facendovi meglio
sentire la opacità e ineleganza dello stile del nuovo tem po, avrebbero attinto altre m iniature
di quel periodo, come il codice parigino del Gregoria di Nazianze, o la B ibbia di Leone.
Ma accettata l’idea che si trattasse di copie o che com unque si attingesse a dei m odelli,
non si era portata una prova sufliciente che quei m odelli potessero essere non già del sec.
iii-v, ma del vu e persin dell’ vm, cioè imm ediatam ente anteriori — per q u el ehe
riguarda l ’ iconografia sacra — all’arte iconoclastica.
Più disorientati ancora si potrebbe rim anere, a tutta prima, di fronte alla soluzione
proposta dal Grabar per la data/.ione di Castelseprio. Ma giacchè crediam o ehe egli abbia
individuato veramente Telem ento ehe perm ette di uscir dal soggettivo, dal punto m orto,
m cui si era ormai ridotta la questione, non si puo accennarvi senza prem ettere una parola
di ammirazione per la funzione sempre ch iarifica trice ehe adem pie la scuola francese.
{l) Im portante pero il parere dell’ illustre paleografo E. A. Low e, che escludercbbe una datazione al
sec. viii-x. Cf. M orey , Castelseprio and the Byzantine « Renaissante d, in The Art Bulletin, sett. 1 9 5 a ,
vol. 3 4 , n. 3 , p. 19 4 .
Per tutta questa questione, vedine l’ aggiom ata notizîa, in M o r e y , /«<*. rit. ; si aggiungano, in senso
contrario alla tesi del Morey, ma con sostanziale dissenso anche da quella delW eitzm ann, le osserva-
zioni di De I*r a m c o v i c h , U Arte siriaca e il suo inßusso sulla pittura medioerale nelVOriente e nelVOccidente ,
in CotHinentari, U , p. 8 a , n. 2.
IN MJOVO KI.KMENTO 1)1 DATAZIÜJ4B
•Si puo apprezzare il fatto d ie essa abbia tarda to a pronunciarsi fin tanto ehe, con acume
cartesiano, ha raw isato 1 argomento ehe put» far riesaminare ab i'.mis ogni posizione pre-
eoncetta. Se il risultato difFerirà in parte dalle provvisorie conclusion^ abbozzate dal
Grabar, il merito principale del progresso fatto dalla questions dipenderà egualmente
da lui.
II Grabar, adunque, non si sente di distaccare la r te di questo alfresco dalla corrente
della «rinascenza macedone» ; sol tanto, considerate le opere magistral!, eppur più fredde,
del Salterio parigino e del rotulo di Giosuè, vorrebbe assegnare a Castelseprio quasi
la funzione di avanguardia, di immediato p reced en te^ . L ’artista greco, anzi legato
alia scuola di Gonstantinopoli — perche tale rimane anche pel Grabar — sarebbe giunto
in Italia forse sul declino del sec. i\, e qui, se non interpreto male il suo pensiero, avrebbe
preso (dai suoi colleghi, pittori della tarda scuola carolingia, e forse dalla volontà del
comm ittente) non solo qualche particolare iconografico ehe al Grabar sembra tipicamente
occidentale (per eseinpio l’aureola del Gesù Bambino dietro la quale traspare e sporge
alquanto la croce, sottile e terminata quasi da una capocchia da chiodo; o le figure, come
il Sim eone della Presentazione, con una mano scoperta e l’altra velata da un lembo del
l ’abito) ma addirittura l’impiego del ciclo dell’Infanzia di Gesu come soggetlo di decora-
zione di un'abside di chiesa (cosa ehe il Grabar non escluderebbe, in linea di possibilité
anche per I’Oriente nella fase preiconoclastica, ma che egli non puij ivi ammettere per
l’ elé posticonoclastica)
II Meyer S ch a p iro ^ ha rivolto, mediante concreti esempi, alcune obbiezioni tanto
a ll’argom ento della o c c id e n ta ls dell’aureola, quanto a quello della mano svelata, e
dovremo più sotto considerare anche noi la cosa. Ma, frattanto, è piuttosto sulla deduzione
di carattere cronologico, ehe il Grabar ne ha tratto, che conviene brevemente ragionare.
Posto che tutte e tre quelle peculiarity « ocei den tali », ehe il Grabar ha segnalato, non
si lim itano all’eta carolingia ma soprawivono in quella ottoniana, quale ragione vi sarebbe,
da questo punto di vista, per pensare ehe l artista giunto dall’ Oriente e cosî inlluenzato
dall’am biente occidentale dovesse appartenere alia fine del sec. e non piuttosto ai
decenii più prossimi alla metà del sec. x f In quest’ ultima ipotesi egli potrebbe essere
non già un precursore ma piuttosto un contemporaneo o un perfezionatore dell arte dei
m iniatori del Salterio di Parigi e del rotulo di Giosuè.
p. i 5 6 .
CA H l RUS AHC, H KO LOG HJ 11ES
Ma se si insiste n ellan ticip are il classicismo di Castelseprio al sec. i\, si confula, con cio,
tutta la successione slilistica dei manoscritti ininiati délia rinascenza m acedone, cosi
come r h a prospettata, in base anche a solidi elem enti di datazione, il YVeitzmann, il quale
m ettendo in progressione successiva il Gregorio di Nazianze (ehe è degli ultim i decennii
del sec. i\) la Bibbia di Leone, pur essa di quel tempo, e infine il Salterio parigino ed
il Rotulo, ha fatto rilevare che dal punto di vista stilistico e ieonografico, il k classicismo»
ellenistico di quest’arte andrebbe aum entando e ralïinam losi man mano si procédé nel
tempo. Questo progressivo incremento andrebbe spiegato con m oïti fattori, non escluso
il gusto personale deU’im peratore Coslantino VII Porfirogenito e quel sem pre più con-
scio programma im perialista ehe, in armonia coll’ ideale d ell’antica potenza, faceva predi-
ligere le stesse figure d ell’arte antica, attinte persino si m onum enti pagani.
Ma è proprio quel non poter derivare da una im itazione fredda, calligrafica, come quella
deîle m iniature anzidette (lanto meno da quelFaltre ehe fan già sentire il peso del Medioevo),
quest’arte, pervasa <jal senso di spontaneo, vissuto classicismo, q u est’ellenism o alessan-
drino dello stile ehe si nota in Castelseprio (la testa d ell’angelo nel sogno di G iuseppe ;
gli sfondi architettonici ; la ispirata immediatezza delle sinopie di preparazione), quello
ehe costringe il Grabar a scorgere in Castelseprio piuttosto un precedente ehe una forma
più matura, rispetto aile m iniature più classicheggianti della scuola costantinopolitana.
Donde Pattribuzione alla fine del sec. ix.
Per aiutare a risolvere una contraddizione, che io vedrei im plicita, si vorreb b e;jri questo
caso poter rendere più concreta unrora la sua tesi, rivolgendogîi ulteriori dom ande.
Si tratterebbe di una resurrezione del classicismo avvenuta dapprim a tra i grandi deco-
ratori ad aiïresco, e passata poi, per stentata penetrazione, alla decorazîone del libro ?
Mi sembra ehe la funzione di necessaria ispiratrice, attribuita a îl’arte delPaffreseo in
confronto di quella délia m iniatura (funzione possibile allé origini Jontane e ancor possi-
bile nelParricchim ento dei particolari), verrebbe sm entita, in questo caso, da opere délia
stessa rinascenza come il rotulo di Giosuè, perche a parte il carattere intrinseco di illustrazione
di un testo, proprio di quella iconografia, l ’analogia del carolingio Salterio di Utrecht
(sec. ix) palesemente ispirato a lfan tico , ci conferma che simile genere di iîlustrazioni
cicliche a semplice tratto, o per le meno monocrom e, aveya, per i lib ri sacri, i suoi diretti
precedenti nel periodo preiconoclastico se non addirittura paîeocristiano. II rotulo del
sec. x doveva derivare da rotulo tardo antico o per le m eno del tem po di G iustiniano
o di Eraclio W e non da un recente affresco.
; 0 attribuendo ai dipinti di Castelseprio — nei quali ricorrono particolari occidentali —
una precedenza sull’arte del Salterio greco, il G rabar sospetta forse ehe, addirittura, la
resurrezione d ell’antica arte ellenistica abbia potuto ricom inciare nelle riconquistate
fifbvihcie bizantine deirO ccidentê, 'come ad esempio la Puglia, rioccupata da Basilio I,
dove: appunto sarrebbe stato più facile i ’incontro degli eb m en ti greci con le estreme
progaggini dell’arte carolingia (S. Vincenzo al V olturno, etc.) e dove Parte ccgreeaw*
' ■ '■ ■ ■r.:î h -ri : j, l
• P ef riscontri iconografici e stiü^tici di singoîe figure del rotulo in piatti argentei del sec. vi-v»
cf. De Francovich, op. cit., fig. 1 9 - 2 1 , tav. IV.
US ÎH’OVO BP.KMEJiTO 1)1 DtTAZIO^B
tipo Castelseprio, avrebbe p ercij assunto talune particolarita occidentali poi cadute nel
suo procedere u 'is > Oriente i Non saprei attribuirgli questa ipofcesi, poichè va tenuto
conto che la riconquista di Bari risale appena all 8 7 5 , e la rozza pittura «basilianan che
piu tardi vi fiorisce non qualificherebbe questa terra (secondaria, marginale, già occupata
da L ongobardi e da Arabi) come la culla appunto di u n arte ellenistica cosi rafllnata e
ca pace di tanto trasfigurare in senso classico le espressioni periferiche e già degeneri
deli’arte carolingia. II moto fu aliora da Oriente verso Occidente.
Vedrei quindi piu logico 0 di ridurre nuovamente l’ipotesi del Grabar entro gli «schemi»
per cosi dire della « ortodossia » tradizionale tra gli storici delKarte bizantina, e ben rap-
presentata dal W eitzmann e dal Nordenfalk, datando quindi gli affreschi di Castelseprio
il più tardi possibile (cioè fin dove lo consentono i gralliti men/ionanti Arderico), oppure
mi augurerei di vedergli svolgere fino in fondo quanto la sua fine sensibilité critica, a
proposito delle fonti deîl’arte carolingio, ha fatto intravedere a lui, e che, per citare un
altro em inente francese, mi sembra già risolto, nel senso da me condiviso, n ellop in ion e
espressa dall’H u b e r t^ .
Il Grabar stesso scrive : «Malgré leurs exagérations célèbres, les Carolingiens ont cultivé
avec em phase ce que Castelseprio contient en germe : la spiritualisation de l’image de
riiom m e, démarche qui plus tard sera « canonisée?) par l’art du moyen age en Occident
Non si è già molto innanzi, con questo, sulla via di ritenere ehe Castelseprio précéda
x Carolingi ? Due «dinamismi» simili, ma indipendenti? E se si trovassero tra loro coin-
cidenze iconografïche, ignote alla «rinascenza» bizantina?
Non a caso è stato il Grabar, espertïssimo a cogliere ogni variante rispetto all’ icono-
grafia bizantina, ehe si è accorto per primo di cio ehe, nelle pitture di Castelseprio, il
diligente trascrittore dei dipinti, il pittore Cavallari, aveva cosi esattamente rilevato :
cioè ehe il Bambino Gesù ha, in tutte e tre le immagini, un’aureola ehe lascia trasparire,
dietro di sè, una sottile croce, di colore s c u r o l e cui tre braceia visibili oltrepassano di
un b uon pezzo la circonferenza deliaureola stessa, e terminano con una specie di capocehia
da chiodo.
Il Grabar riscontra una simile croce, oltrepassante il nim bo, tanto neil arte carolingia
ehe in quella ottoniana. Soltanto pero per quest’ ultima egli dava un esempio : e si trat-
tava di una m iniatura di Salisburgo 0 di Ratisbona ehe — come a Castelseprio rap-
presentava una Presentazione al Tempio.
P u r trattandosi di arte occidentale si sente in quella miniatura un cerlo sapore bizan-
tino, derivato cioè da un modellô più tardo e diretto ; Simeone a differenza ehe a Castel
seprio —• ha am bedue le mani velate ; pero la crocetta —* in color chiaro, a dir vero, ma
forse p er eavare sul fondo ehe li è scuro — sporge dal nimbo, con braccia sottili, terminate
('■
' Bulletin de la Soc. nut. dus Antiquaires de France, 1948-19Ä9 (6 juin i g i g ) , p. t ga.
• <*> Non si traita délia sinopia, cioè del dîsegno di preparazioae, ehe sia divenuto traspareûte pel
rädere di una rifmitura a calee, in tono chiaro, giacchè, p. es., Taureota serba la circonferenza bianca,
di rifmitura, nello stesso spazio dove esiste l’esile braccio nero della crocetta.. In sis to su questo, perché
i 1 Meyer Schapiro ha pensato a derivazione da raggi luminosi.
CAHIERS A R C H K OL O CI Q t E S
con una capocchia, come a Castelseprio W . Q uella m iniatura, tardo ottoniana, è forse
assegnabile più al sec. xi ehe al x.
II Meyer Schapiro ha per suo conto cercato di concretare quel riferim ento del Grabar
a lfa rte carolingia, ed è riuscito ad elencare più m iniature dove il tipico nim bo ricorre.
Tra esse c’è una m iniatura del Salterio di Stuttgart, dove le braccia della croce presentano
q u e ll’elemento terminale trasverso ehe som iglia a una c a p o c c h i a ; m entre ben tre esempi
di croce oltrepassante si numerano n ell’Evangeliario di S. Medardo di Soissons, circa
d e ir 8 a 7 , di cui più difiusam ente ci occuperemo.
Ma, oltre gli esempi oecidentali, il Meyer Schapiro ne indica uno ehe addirittura è in
manoscritto greco sicuram ente orientale e ehe appartiene al sec. vi, cioè la Genesi di Cot
ton M.
Con questo sarebbe elim inata l ’idea ehe si tratti di una particolarità occidentale; se
mai si dovrebbe dire che essa, rara in O riente, non vi si è riprodotta nel periodo postico-
noclastico, m entre, pur non divenendovi diffusissima, aveva preso piede in Occidente.
Senonchè la cortesia di André G rabar mi sottopone una obbiezione a cui non si puô
forse trovar risposta ehe m ediante una più com plessa serie di osservazioni. II G rabar fa
notare ehe m entre le aureole di Castelseprio (del Salterio di Stuttgart, e di Ratisbona)
sono filiformi, quasi a raggio se si astrae dalla piccola capocchia in cui term inano, la croce
del Cotton ha carattere, per cosi dire, m onum entale. Dato che relativam ente sottili e aflatto
sempliei si presentan pure le croci del Cristo nelle tre vignette d ell’Evangeliario di Sois
sons, ehe sono, a quel ehe pare, la prima apparizione nelfieonogratia carolin gia, non si
dovrebbe dedurre ehe si tratta di due m anifestazioni indipendenti, aventi probabilm ente
una diversa base simbolica?
M algrado pero la loro sottigliezza, le croci di Castelseprio non possono essere m terpre-
tate come una deformazione di un sem plice raggio di luce<5). Ugualm ente, il nim bo del
Cristo con la Sam aritana, nell’Evangeliario di Soissons (pl. XUVIH, i) , è di tinta scura
e ha, rispetto ai personaggi, uno spessore, una robustezza ehe non va attribuita sol-
tanto ail’ im possibilité materiale del pennello di tracciare un tratto p iù sottile, visto ehe
di questi ne ricorron parecchi nelfom b reggiatu ra dei panneggi. Una croce solida
quindi ehe in uno stile più orientalizzante ed ornato puo b en trasform arsi in una
croce gemmata o «m onum entale».
Notiamo inoltre ehe nello stesso ciclo di Castelseprio il nim bo crueigero del Pantocra-
tore (sia pure, come diremo, derivato da altre fonte iconografica) ha, dentro la eireonfe-
renza, una croce larga, a doppio contorno, cioè partecipante, sotto questo aspetto, dei
caratteri délia croce m onum entale ; m entre è solo pel Gesù Ram bino, la croce sottile. E
>’ > G r a b a r , op. cit., 13 , fig. 7 (New York, Morgan Library, ms. 78 0).
p. 1
(î> M e y e r i 36, n . 5 3 .
S c h a p ir o , p .
M e y e r S c h a p ir o , p. i 5 6 , n. 5 6 . Qualche contatto iconografico tra questo Salterio e Castelseprio,
ma con diiïerenza sostanziale di intonazione e stile rileva il M. S., p. i 6 3 ..
Loc. cit., p. i 5 6 , n. 5 4 .
<s> Cf. n. 3 .
IS NISOVO ELKMBNTO 1)1 DATAZIO.'SE U5
cost pure il nim bo che circonda la stella, sopra la Katività, ha una grande croce luminosa
oltrepassante.
Analogam ente, se nel periodo ottoniano la miniatura di Ratisbona ci mostra ancora un
nim bo di Gesu Rambino con croce oltrepassante assai sottile, nello stesso periodo special-
mente gli avorii ci fan conoscere, per il Cristo adulto, croci oltrepassanti di carattere deci-
sarnente monumentale, o quanto meno richiamanti le gemmate croci votive sul tipo di
q uelle ehe si riscontrano nell’oreficeria bizantina ed in quella longobarda<‘ l
Non abbiamo quindi che da richiamare quanto si è n o ta to ^ pel ciclo iconografico
dell’arco trionfale di S. Maria Maggiore (sec. v) dove l’aureola del Rimbo ha la decora-
zione di una minuscola crocetta poggiante sul capo entro la circonferenza, laddove il
nim bo del Cristo adulto nell7 altra iconografia romana del tempo inscrive una croce assai
robusta ed a doppio contorno. Il Rettini nota nei mosaici di queir arco il legittimo antece-
dente délia pittura bizantina, concetto questo ehe ben risponde alla circolazione delle
forme prima ehe la depressione dell’Oceidente riducesse la cosa ad un semplice passaggio
da est ad ovest ; e del resto questo contrapporsi di une croce astiforme per il Bimbo appena
nato (Lavanda) ad una croce più ingrossata pel Bimbo dell’Adorazione dei Magi, ed infine
ad una croce normale e contornata da due righe di diverso colore, pel Cristo dell’ Ingresso
in Gerusalemme, è progressione simbolica ehe si riscontra anche nei mosaici délia cappella
di Giovanni VII, legati sicuramente airellenism o bizantino-siriaco del sec. vu, ed ai quali
dovremo più oltre far riferimento
Insom ma, valutando, da un canto, l’ellenismo ehe avremo a notare nelle ricordate
vignette del Soissons, e, dallaltro canto, la distintizione tra nimbo del Cristo infante
(Castelseprio, Ratisbona) e nimbo del Cristo adulto, non ci sentiamo di abbandonare
l ’opinione dei Meyer Schapiro ehe la croce oltrepassante il nimbo, negli affreschi di Castel
seprio, sia perfettam ente conciliabile — a parte ogni altro elemento — con la datazione
preiconoclastica e col carattere schiettamente « oltremarino v dei dipinti stessi.
*
* *
Es. Avorîo del sec. x, at Museo del Louvre. — Evangeliario di Cassel ( G o l d s c h m id t , German Illu
mination, tav. 81). , . TV v i t - \
Bocnetti, A g g io n a m m ti su Castelseprio, I, in Raw.gna S tonen del iv p n o , IX.-X
Varese, 1 9 5 1, p. 6 2 , n. 1 7 ( W i l p e r t , D ie römischen Mosa ken, III. tav. »7-08, b 3-b a t ub-bö).
Ib id ., B e ttim , p. i 4 sg., 53.
M6 l',A H IK HS A RC1I K O U H i K j U KS
Il Meyer Schapiro di fronte a questi eseinpi ehe più o meno si vorrebbero legare a ll’ico-
nografia occidentale ha addotto non solo il fatto ehe questo particolare ricorre nella cat-
tedra di Massimiano ma lo si trova in una m iniatura bizantina del sec. \m , che ha per
soggetto anche essa la Presentazione, e in un mosaico di S. Sofia del sec. xi, ove si vede
Giustiniano, oflerente al Cristo, con una soïa mano scoperta (ed è difficile supporre per
questa più tarda iconografia un procedere da ovest verso est). Il gesto di Sim eone non è
propriam ente di ndorazione; tanto meno di offerta; e, a togliere du b b i, il codice m iniato
dal siriaco Rabula nel monastero di S. Giovanni di Zagba in Mesopotamia, del 5 8 6 ,
mostra, in più tavole dei Canoni, apostoli e altre varie figure del ciclo della vita del Cristo,
con una mano scoperta e con Taltra cop erta; come per altro appaiono gli apostoli nella
«Traditio legis» di un lilievo del sec. iv a C o sta n tin o p o li^ .
*
* *
Le conclusioni, cui siamo giunti a proposito di questi due particolari iconografici
hanno pero, da sole, un valore puram ente perm issivo e non un valore cogente circa l ’at-
tribuzione del ciclo di Castelseprio al periodo vii-vm secolo.
Infatti, alio stato nostro delle conoscenze, 1’interrom persi dal sec. vj all’ vi delta docu-
mentazione, in O riente, pel particolare, quivi raro in ogni caso, della mano velata e della
mano scoperta, lascia il dubbio ehe esso vi sia riapparso per un fenonieno tardissim o di
pretta a rinascenza », di copia pedissequa di vecchi m odelli. Vecchi di quanto?
P er la croce oltrepassante il nim bo, le prove, in O riente, cessano addirittura col sec. vi ;
m entre a Castelseprio Tun ) e 1’altro particolare appaiono perfettam ente assim ilati, anzi
si dim ostrano «viventi» (quella splendida destra protesa di Sim eone! quel drappeggio
ehe cade elegantem ente dalla sua mano sinistra) in una opera ehe è tutta una spontaneità
di creazione.
Ci servirebbe pero, a tranquillarci sulla continuité, che qualcosa di simile noi riscon-
trassimo, per almeno vn o dei due particolari, in un’altra opera interm edia ehe, anche se
occidentale, attingesse direttam ente ad un opera ellenistica che avesse, a suo m odo, la
qualità d ell’arte di Castelseprio.
E questo appunto si verifica in una spéciale e m inore iconografia d ell’E vangeliario di
S. Medardo di Soissons.
P er discernere n ell’opera di quel m iniaturista il fondo iconografico e stilistîco ormai
tradizionale in Occidente (cioè anebe se non originariam ente occidentale, ormai del tutto
occidentalizzato) da quel ehe sarà un nuovo apporto ellenistico, scevro ancora di contam i-
nazioni, bisogna partire dalla comparazione di due m iniature, attribu ite alla m edesim a
scuola di Ada : una, appunto, deü’Evangeliario di Soissons (anteriore ma forse non di
molto ail 8 2 7 ), Taltra dell’Evangeliario di Godescalco, ehe è stato m iniato tra il 7 8 1
e il 7 8 3 ^ , cioè forse circa mezzo secolo prima (pl. L U , 3 , 3 ).
silhouettes si puo trovar riscontro non sol tan to nei Godescalco, ma un p o ’ in tutta la serie
affine delle m iniature da evangeliario. Viceversa se si mette sotto la lente, ad esem pio,
il galletto ehe sta suU’alto del cornicione delîa citata miniatura della « Fontana della Vita »,
oppure il fagiano, sul cornicione inferiore, si osserva nel pium aggio una densità e una
minuzie di pennellate, e nello stesso tempo una policrom ia ehe non esce sicuram ente dallo
s\iluppo della tradizionale iconografia di questo genere di evangeliari, ma mostra di essersi
arricchita ed anzi trasformata sotto l ’influsso di altri m odelli o ad dititlura per la dote per
sonale di questo pittore, di voler direttam ente ispirarsi al vero.
Ma c’è un altro genere di particolari, a spiegare i quali non varrebbe, appunto, questo
semplice e personale senso naturalistico : alludiam o cioè aile vignette evangeliche poste
sulla cornice, in alto, nelle m inature a piena pagina ehe rappresentano gli evangelisti,
nonchè nelle gemme (quasi a modo di cammeo o di pietra preziosa incisa ad uso di sigillo)
ehe — il motivo ha molti precedenti — adornan gli archi di quelle m anieristiche architetture.
Per far risaltare il carattere addiettizio, cioè il nuovo innesto ellenistico, osserviam o, a
m odo di esempio, anzitutto, un compless > nel quale queste figurazioni particolari sono
inserite : cioè il fol. 18 0 v° con la figura di S. Giovanni (pl. L).
Vi è indubbia la stilizzazione, in senso occidentale e surrealista, deU’insiem e délia
figura, come gliePha imposta una tradizione ormai formata. Dove il pittore è stato
costretto dal inodello, ehe lia 1111 suo valore liturgico convenzionale, ha delineato sopra
la testa di S. Giovanni un'aquila di rigido contorno, di eompatto e schematieo pium aggio,
ehe proprio non ha nulla a d ie fare con quegli altri volatili della figura della « Fontana
della Vita» di cui si parlava pocanzi. Ed anche il volto, le m ani, i piedi dell’Evangelista,
sono stilizzati seeondo una loro eleganza di linee ehe tutlavia volutam ente déforma la
realtà, ben presente ancora, invece, nelle figurine delle due piccole scene evangeliche
in m argine e quasi in It sia al l’o glio (pl. X L Y III, 3 ). Nè si dica ehe è questione di
dimensioni, perche faltro m iniatore d ell’Evangeliario di A quisgrana, ora nel tesoro
di Vienna, ha ben saputo m antenere nei tratti ed in tutta l ’anatomia ed il panneggio
dei suoi evangelisti, pur di grandi proporzioni rispetto al foglio, il gusto del realism o
cîassico.
Neppure si deve pero supporre ehe le scenette evangeliche e le figurine entro le gemm e
siano Topera di un artista differente dall’autore principale della m iniatura, perché una
osservazione delle minime rifiniture di ogni particolare della grande tavola persuade ehe
c’è dovunque la stessa mano. Si puo ad ogni m odo, e ad abbondanza, comparare le ana-
loghe vignette dei varii fogli e osservare qualche altro particolare « occidentalizzante » del
codice, come per esempio nelle due Tavole dei Canoni a fol. 9 y ° e 1 1 v°, i sim boli degli
evangelisti entro 1’ampie lunette sopra gli archi del portico, per convenire ehe non è possi
b l e fare dell’autore di questa parte della decorazione un pittore diverso dall’autore
delle minuscole scene della Samaritana al pozzo (pl. X LVIII, 1 ), delle Nozze di Cana
(pl. X L M 1I, 2), etc., anche se la stilizzazione è del tutto differente.
Aceertato questo, l ’indagm e stilistica si concentra da sè sui due ordini più piccoli di
figure : quelle m edie delle vignette e quelle m inime delle gemme ; ed a sua volta si arriva
a distinguere un aspetto iconografico ed un aspetto stilistico della cosa.
I N M O VO BLRMKNTO DI D m Z t O N K
Ddl punto di vista iconografico non pare dubbio ehe 1 autore abbia avuto d Tmnanzi
agli occhi dei m odelli che continuano I’iconografia paleocristiana secondo la tradizione
dell’ Oriente.
Prendiam o ad osservare le due vignette ehe dai due lati, in alto, del fol. 1 2 / 4
(pi. X LVIII, 3 , !\) compongono la scena della Annunciazione (ehe noî dovremo ben
tener presente per una comparazione con la scena d’ugual soggetto, dentro una della
gemme). Sono nella serie delle vignette del Soissons quelle ehe forse meno hanno
d ell’ ellenism o e del tardo antico. E tuttavia il tipo di angelo, ritto in piedi, lungilineo, elegan-
tem ente drappeggiato, di profita, non ha nolle varianti di angelo annunciante miglior
riscontro di q u ell’angelo, in una Annunciazione di S. Maria Antiqua (pl. L ll, 4 ), appar
tenante alla seconda metà del vu 0 al principio dell’ vm, ehe anche il W eitzmann giu-
dica di un buon pittore greco W.
Sem pre nella serie delle vignetta a episodio evangelico, si osservi la figura della Sama-
ritana al pozzo (pl. M A IN , 1 ) ; par tolta da una miniatura o da un mosaico antico,
rappresentante una mima teatrale : ed anche questa cura di rappresentare la peccatrice,
concubina di sei successivi amanti, corne una mima, conferma Tantichità del modello al
quale l’artista si attiene. Xel vestito del Cristo con lei conversante (già apparentato a
C astelseprio dalla forma deM’aureola) va pur notato il bracciale scuro, sull’omero, ehe
ha riscontro nel vestito di Simeone, sempre a Castelseprio. Sara dom ta alla piccolezza
di queste figure, ehe, ingrandite qui per esser visibili nei particolari, acquistan, nella
riproduzione ehe offriamo, una certa sommarietà, quasi compendiaria, di tratti: ma, pur
rim anendo più integra la snellezza e composlezza delle forme, se ne riceve impressione
analoga a quella ehe ci dà Ticonografîa di stile ellenistico passata n ell’esecuzione di
dittori siriaci del sec. v i D ’altronde una scena di triclinio, eome quella della
Cena di Emaus nel Soissons fol. 1 8 0 v° non sembra di averla più incontrata in occi-
dente dopo il mosaico della Gena di S. Apollinare Nuovo di Ravenna (sec, vi) a meno ehe
non si pensi allo sfondo di un mosaico votivo di Giovanni V U (a. 7 0 5 - 7 0 7 ) , di cui ripar-
lerem o, e ehe è legato a paesi transmarini.
M odelli antichi quindi, e, sotto certi aspetti, con una impronta non occidentale, sebbene
in lutte e tre le figure del Cristo (Nozze di Cana; Cena di Em aus; Samaritana al pozzo)
si abbia la u re o la con croce oltre passante. Il fatto stesso ehe questa aureola non ricorra
nella iconografia grande e stihsticamente tt occidentale d della prima arte carolingia, inclina
a concludere, anche in questo caso, per 1 origine orientale del particolare. ^
E poichè sembra questo il punto più opportuno per notare la cosa, richiamiamo l’ana-
logia tra la vignetta del Miracolo di Cana, in questo Evangeliario dipinto subito prima,
forse, d ell’ 8 2 7 , e l’analoga ma più compléta scena nella faeciata aurea del cosi detto
al tare d ’oro d ell’arcivescovo Angilberto II, in S. Ambrogio di Milano che, nella m igliore
<>> rt» rit lav XI fi? i k ' P. i * sg. l'asta con croce, lenuta dall angelo del Soissons è uguale a
quella dêl santo, in p’rimo piano a destra, neirAscenjione deU’ Evangeliario di Rabula.
i*) Alludo alla genesi di Vienna e aile figure dcll evang. di Rabula mean deformate dall mflusso
popolaresco e provinciale.
150 CAHI RRS ARCHE OL OGI QUE S
ipotesi, non puo essere posteriore all’anno 8 5 9 (visto che il diplom a d ell’ 8 3 5 , ad esso
relative è sospetto di adulterazione)
Siamo, in questo senso, ancora nella piena età carolingia. Generalm ente si ritiene che
le tre facce argentee dell’altare, con la storia di S. A m brogio, nonchè santi ed oflerenti,
opera di Volvinio, difleriscano per una più marcata originalité « carolingia » dalla facciata
d’ oro, con la storia del Cristo che qualcuno attribu'i persino ad un artefice b i z a n t i n o ),
ma che, com unque, pur rivelando in alcune figure l ’im pronta délia più tipica arte caro
lingia, si dimostra, nel complesso della iconografia, ancor vicina a quella preiconoclastica
bizantina.
Uno di quei riquadri aurei è dedicato, come dicevo, alia scena delle Nozze di Cana
(pl. XLIX, a). Qui l ’episodio non ha subito, come nel Soissons, una m utilazione (nella
miniatura tutto è limitato al Cristo, alla Vergine, ed ai sei orci. Invece nello sbalzo
milanese, a parte l’architettura, ci sono i due servi ehe versano l ’acqua negli orci e
quello ehe ha porto il nappo, per Tassaggio, al maestro di tavola, il quale nella scena è la
figura più prettam ente carolingia) ^ . Lim itandoci al Cristo ed alla V ergine si posson
notare notevoli coincidenze con la iconografia del Soissons, come ad esem pio il cap-
duccio della Madonna che le fascia tutto il sottogola; e l'affinité dei gesti n e iq u a li tutta-
via s’ha pur da notare una ulteriore elaborazion occidentale, rispetto a quello ehe si
puo osservare nel Soissons. Infatti m entre nella scena m ilanese il Cristo ha le tre dita
della destra tra loro accostate ad accennare un gesto di benedizione (consono alla più
recente religiosità occidentale per riguardo al miracolo) invece nel Soissons la mano
leggerm ente piegata ad accennare agli orci quasi in segno di un comando rivolto ai servi
(qui soppressi per ragion di spazio) risponde più testualm ente al dettato evangelico, ehe
certo era tradotto in maniera p iù fedele nella vecchia ieonografia dei cieli storici pales-
tinesi.
Q uindi, per riguardo all’opera d’arte milanese, c’ è influsso, ma già p iù indiretto e
rim aneggiato, della iconografia bizantina.
Tanto più interessante quindi ehe u n ’altra scena del paliotto, cioè l ’Annunciazione
(pl. XLIX, 1) risponda, non tanto nella irrequietudine d ell’atteggiam ento dei due perso*
naggi, notevolm ente diventati goffi, quanto nella architettura ehe sovrasta la Vergine,
al ben tipico arco dell’Annunciazione di Castelseprio, ehe è, di tu tti gli elem enti del
ciclo, il più discosto dal gusto e dalla tradizione iconografica occidentale^ ).
Insomma anche l ’artista carolingio d ell’altare m ilanese riecheggia un elem ento (archi
tettura) del ciclo originario ehe è comune con Castelseprio ; al quale fa riscontro, nel
Soissons, l’altro elemento dell’aureola con croce oltrepassante.
Passando ora a considerare I iconografia su Ile gemme del Soissons con la decorazione
monocrona (spesso in bianco; talvolta in tinla scurissima) va rammentato ehe, rispetto
alia m iniatura carolingia, la cosa non si presenta per la prima voita nella miniatura del
Soisson s; c era, evidentemente, in quegli archetipi comuni cui abbiamo a llu s o ^ ; e,
come per le figure dei volatili policromi, cosi per questa decorazione, la differenza deli’
Evangeliario di Soissons è piuttosto segnata dalla rara eflicacia naturalistica e rispettiva-
m ente dall impressionismo di quelle mmuscole figurine, oltrechè dall’evidente ispirazione
ellenistica di qualcuna delle scene.
Già nella tavola rap présentante S. Giovanni (pl. L) le figurine, ehe cavano sul fondo
euro, hanno una mirabile eleganza e nervosità di movimenti ; quasi perfetti i due piccoli
levrieri m entre, pur nel loro sapore più classico (nelT altro è più accentuato l’espressio-
nismo «siriaco») le due figure umane richiamano parecchio del sublim e disegno del
Salterio di Utrecht.
Ma quest’ ultimo richiamo si fa poi più vivo in altre tavole, dove le gemme hanno una
figurazione complessa (quale ad esempio la Trasfigurazione, a sei figure) di espressivo
disegno nonostante la minuscolissima dimensione.
A noi preme pertanto l’osservazione di due di esse : cioè una gemma ehe rappresenta
lo sgabello o trono delFEtimasia, e, pur nei semplici aceenni compendiari, chiaroscurali,
richiama quella in Castelseprio ; ed un’altra, al fol. 7 , dove è rappresentata 1’Annunciazione
(pl. X L V Il, 3 ), per la Vergine della quale non vedrei m iglior riscontro della grande
Annunciazione di Castelseprio.
Non è tanto, in questa Annunciazione, la coincidenza iconografica con lo sgabello
dell1 Annunciazione di Castelseprio, quanto il dinamismo ehe pervade ambedue queste conce-
zioni d ’arte e l ’impostazione generale della scena; sebbene le minime proporzionî
dell1 Annunciazione del Soissons devono afïidarsi al gioco delle lu cie delle ombre per rendere
tutta 1’eleganza della composizione che n e lf Annunciazione di Castelseprio si giova della
policrom ia e della ricchezza stessa dei particolari.
Facciamo u n ’ulteriore osservazione : sebbene il pittore del Soissons nproduca con
mano maestra le già piccole figure (laluna alessandrma ancor piu che suuaca) degli episodi
evangi'lici policromi, è solo in queste minuscole figure monocrome che egli attinge il
massimo deU’efïieacia e della spontanéité. È in questi schizzi minimi che egli non puo
dissim ulare la propria vera formazione stilistica.
Valutando Titer che, nello spazio di brevi decenni e per uno slesso lipo di illustrazione
liturgica, c è tra l ’Evangeliario di Godescalco e questi particolari microscopici dellE vange-
liario di Soissons, dovrei giudicare che, a parte l ’aggiudicazione tradizionale d'ambeduu
alla stessa scuola di Ada, in questo secondo caso ci troveremmo di fronte ad un pittore
che si adatta bensi a miniare un'opera dell altro stile, ma che lia la tipica formazione della
scuola di Reims, dove i richiami ellenistici si disposano ad un espressionismo che, senza
altrettale eleganza di forma, in Oriente appare piuttosto praticato dalla scuola siriaca.
Senonchè la vignetta monocroma dell’Annunciazione della gemma ci sem bra p iù Yicina
alio schema tradizionaîe d ell’iconografia evangelica elienistica di quel ehe non le si accosti
qualunque altra figurina del Salterio di Utrecht che è opera sicuram ente posteriore,
Sarebbe dunque questo il ponte, pel passaggio dall’arte elienistica a quella della scuola
di Reims?
Si è disputato altra volta sul carattere forestiero o nazionale, rispetto al territorio franco,
di questi iniziatori della più alta corrente d ’arte c a r o l i n g i a L a perfezione, l ’imm edia-
tezza di questo disegno farebbe pensare a persona addestrata in una scuola pienam ente
matura, anche se poi il pittore, dim ostrando in cio la propria «classe», riesce a tras-
formare lo stile ellenistico secondo il tem peram en to che si rivela peculiare, unico, presso
questi pittori carolingi e ehe si deve riconoscere come un dono della civiltà occidentale.
II confronto col Tolom eo greco degli anni 8 1 2 - 8 2 0 (pi. L IU , 1 ) nel cui Zodiaco le
svelte figure di animali, da paragonarsi con coeva figura carolingia (pl. L IIl, 2 ) ^ ,
sono delineate con una bravura di disegno paragonabile a quella del Salterio di Utrecht
e delle gemme del Soissons, lascerebbe liberi di pensare ehe 1’iniziazione a q u elle più
sciolta e saporita arte del disegno ehe distacca 1’Evangeliario di Godescalco dal Soissons
non sia venuta ai Carolingi soltanto da opere veeehie m agari di secoli, ma da contatti con
quest’altri disegnatori e m iniatori «greci».
(L ’ opinione del Ceccbelli ehe collocherebbe i dipinti di Castelseprio sulla fine d ell’ viu
secolo si accorderebbe con queste vedute)
II confluire, nel Soissons, di più serie di m odelli, in cui accanto ai classicismo alessandrino
0 costantinopolitano è presente Tinflusso delFespressionism o siriaco, e, da un lato,
Tapparirvi d ell’aureola a croce oltrepassante, dall’altro il richiam o ehe il disegno mono-
cromo delFAnnunciazione delle gemma suggerisce a ll’A nnunciazione di Castelseprio.
costituiscono altrettante riprove ehe gli artisti carolingi trovavan davanti a sè, già com pleto.
quel cbe per un momento si è p otuto dubitare fosse — appunto in Castelseprio “ il
risultato di incontri ehe sarebbero a w e n u ti dopo il fiorire d e lla r te carolingia, 0 per lo
meno al momento del suo declino.
E già un risultato im portante ; ma non bisogna spm gere le cose a ritenere ehe Castel
seprio segni il punto in cui 1a pittura sacra bizantina, fuor dalle terre gravate d all’icono-
Che arricchimenti dello schema tradizionale, sulla base di opere d ’arte antica, anche non necesea-
riamente orientali, avvenissero in quelle m iniature, è com provato dalTH ubert, il quale, a proposito
di un’ architettura ehe si riscontra in una scena della Bibbia di M outier Grandval (B ritish M useum , Ad.
i o 5 A 6 ) ha segnalato l ’identità del motivo delle cariatidi nelio spazio sopra le colonne del portico con
quello del palatium di Teodorico nel mosaico di S. Apollinare Nuovo di Ravenna ; e ha notato come
q u ell’architettura non figuri, per scena di ugual com posizione, nelle B ibbie di Carlo il Calvo e di S. P aolo
fuori le mura (Hull. Soc. Antiquaires, 1968-19/19, p. 1 6 7 sg.).
W e i t z m a n n , Die Byz. Buchmalerei, p, 1, <tLo zodiaco carolin gio*, p. i £ , è da ms. di Salisburgo,
d ell’ 8 i 8 ( G o l d s c h m i d t , op. cit., tav. i 4 ) .
<S) C e c c h e l u , Recens., ricca di ottim e osservazioni, al libro di W eitzm ann in Byzantinische Zeitschrift,
4 5 , a. 1962, p. 97 segg. Discuto in altra sede la datazione d ell’ edificio, prcferita dal Cecchelli, ancne
valendomi di un elemento cortesemente indicatom i dall’H ubert.
UN NUOVO ELEMBiSTO DI DATAZIOÎSE 153
clastia, si trovava al tempo di Carlomagno, cioè che costituisse, pei greci non iconoclasti,
lo rrstile del giorno».
Penserei che — dato il soggetto sacro che scorgiamo in Castelseprio — ne sarebbe stata,
in tal caso, più testualmente indettata Tarte carolingia, ehe è, invece, notevolmente eccletica
nelTattingere aile correnti costantinopolitane, siriache e orientali offerte dalle opere
d ’arte del passa to.
Non vanno persi d ’occhio, piuttosto, i chiarimenti ehe vengon facendosi a proposito
delTarte o maniera siriaca in confronto delTarte o maniera costantinopolitana. Che sia
questa la m igtior guida per circoscrivere, nel tempo, Tarte di Castelseprio?
II Piganiol, in occasione del primo mostrare, che fu fatto nella seduta della Société des
A ntiquaires, delle figure di Castelseprio, insistette nell’ indicare i mosaici di Giovanni V II
( 7 0 5 - 7 0 7 ) in S. Pietro al Vaticano, come il ciclo più affine^ \ E difatti la trascrizione del
Grim aldi indica sorprendenti analogie di iconografia, di sfondo paesistico e architetto-
nico, etc. (pl. LI)(2). Pero i frammenti ehe restano raflorzano questa impressione, sotto un certo
aspetto, per esempio per Tintonazione chiara, e per certe coincidenze di c o lo r i é , ma,
sotto altro aspetto, non rendono quella impressione di classicismo alessandrino, ehe
domina invece nel dipinto di Castelseprio. Nei mosaici, ellenismo si, ma piuttosto qua
e là, nella versione e deformazione subita nell’area siriaca 0 in altro ambiente periferico
E ppure c’è un elemento che non soltanto è comune tanto al ciclo di Castelseprio ehe a
quello del Vaticano, ma eostituisce la particolarità, la stranezza di entrambi, e percio si
pres ta a ragionarvi sopra.
E il fatto che, nell’uno come nelTaltro, il ciclo storico, a figure relativamente piccole e
— sia pure con la variante che ho detto — improntate ad uno sciolto ellenismo, abbia
invece nel centro una icone (a Castelseprio il Pantocratore; a Roma la Madonna inco-
ronata e orante) ^ ehe non lega col resto, non soltanto per le dimension! (ehe a Castel
seprio sono di tre volte Tal tre teste, e a Roma almeno di due), ma p eril tipo frontale, maies-
tatico, e di una intonazione cos'i «bizantinan (nel senso ristretto ehe gli storici dell’arte
danno a questa parola) che il Berenson, di fronte alle pitture di Castelseprio, avrebbe
voluto credere ad una ridipintura della figura del Pantocratore.
Questo prevalere della icone, in maestà, sul ciclo storico in cui vienedirettam enteim m essa
Bulletin, n ° c it., p . 1 0 a.
S i notino le architettura ad arco ribassato ; nella scena délia Presentazione e delFIngresso in
Gerusalemme le didascalie in latino. II paesaggio risulta megiio da una copia a memoria e dagli sviluppi
dello stesso Grim aldi, pubblicati dal W ilpert.
(S1 Si not! ehe gli angeli avevano la stessa aureola azzurrina ehe a Castelseprio (in contrapposto
alTaureola d ’oro della Vergine) come si pu6 osservare nel frammento trasferito in S. Maria in Cosmedin.
S i n oti ehe la scena delradorazione dei Magi, scostandosi dalla geniale sciolta composizione d i
Castelseprio, distribuita su più piani, vi si conforma perfettamente a quella della pare te sinistra della
tribun a di S . Maria Antiqua (in senso rovesciato, come spesso aw ien e nel cartone dei mosaici; ivi
Taureola dell’angelo è gialla) ; m entre il Bettini, La pittura bisantina, I. Mosaici, p. 5 a, raw iserebbero
nella crocefissione, trascritta dal Grimaldi, lo schema siriaco.
C f. Aggiorwnnrnh .«« Castelseprio , I, p. 5 5 , 6 5 , n. 5 k .
B ettin i , op. cit., p. 5 3 .
i3 .
C A H I K R S ARG H K O I.O (i iQ l'li S
, De F r a n c o v i c h , op. cit., p. 1 1 , che richiama analogo contraslo nel dittico di Areobindo (tav, III,
p. 16).
{4> Ivi, p. 8 a , n. a .
(n) Ivi, tav. I l l , p. 1 A ; v. fig. 2 9 .
ÜN NUOVO ELEMENTO Dl ÜATAZIONE 155
ISelta soi 10 dei pialli trovati a Cipro, quello (lei combattimento di Davide 6 Golia con
tient? già pero qualcosa di sim ile; ma, ad ogni modo, Tattribuzione esclusivamente a Cos-
tantinopoli di tutti i piatti a întonazione classica del sec. vi-vn non e giustificata ne dai
luoghi di ritrovamonto, ne da quel ehe si sa della importanza delle varie città da Tessa-
lonica ad Antiochia ad Alessandria.
La distruzione quasi totale delle opere d ’arte bizantina doltrem are dei sec. vu-vin,
rilevata gitistamente dal Weitzmann, puo, per esempio, render guardinghi dal fare dî
una città corne Alessandria l’eselusivo dominio delTarte copta, e dalTescludere, per la
chiesa melchita che in quei secoli si contrappone cosi rigidamente ai giacobiti, un’arte
sacra di intonazione classica.
Il 1-rancovich, nel suo studio sull’arte siriaca, ehe a nie pare tanto prezioso ed acuto,
persuade meno, ad esempio, quando egli vorrebbe determinare il principio di quest’arte
elassieheggianie dei cicli storici cristologici in Costantinopoli. Già gli avorii occidentali
palcocrisüani, quelli per esempio ehe il Volbach attribuirebbe a Milano, hanno versioni
di un ellenismo puro, e coincidenze iconografiche con questi cicli.
Il Francovich, associandosi al Jerphanion, osserva ehe nelTetà di Giustiniano le pubbliche
e più solenni basiliehe della capitale — per le quali quelTintonazione aulica sarebbe stata
naturale — non avrebbero conosciuto questo genere di decorazione ma ne avrebbero
avuto uno quasi interamente senza scene sacre: e per proprio conto stima che questi cicli
storici vi sarebbero stati bensi eseguiti, ma solo per le minori chiese m on astich e^ . Dati
i rapporti origînarii col monachesimo siriaco e palestinese sarebbe una spiegazione della
tessitura di base di questi cicli. É una ipotesi.
Ma parrebbe strano ehe se proprio alla capitale, e nelTetà di Giustiniano, esistesse
q uest’arte classicheggiante dei cicli storici, essa non riapparisse testualmente, per esem
pio, a Ravenna o a Parenzo, o magari a Roma, dove invece Tarte del mosaico segue stili
anche non indigeni, ma afTatto ignari di questa più alta elabo azione, ehe invece il
sec. \ avrebbe scovata e eosî testualmente rimessa in onore in taluni codici miniati.
Che Costantinopoli, intesa essa coma la Corte e la sua espansiva azione, abbia avuto
la sua parte nel fenomeno, non dubiterei. Ma forse, se essa continuava, nelT età giusti-
nianea, a preferire per le sue basiliehe la decorazione senza questi cicli, bisognerebbe
supporre piuttosto che artisti di Costantinopoli rilacessero in senso classico questa pit-
tura direttam ente nell’ambiente di Gerusalemme, dove Giustiniamo, ad es., ordinava la
ediiicazione della chiesa della Madré di Dio ; di modo ehe, piu che di una conliuuità dal
secolo iv, dovrebbe parlare di un fenomeno aulico di rinascenza di classicismo ales-
sandrino, appheato a questi cicli cristologici; e pel momento rimasto localizzato. Rina
scenza con Giustiniano e con Eraclio; non invece con gli im peraton « maeedom», perche
quest’ultima rinascenza non ha piu una tecnica e una audacia ereativa adeguate al cam^
pione della chiesetta lombarda e perché gli stessi indizi della miniatura carolingia, ap pa-
rentandosi a Castelseprio, rendono illogico di pensare a forme tanto ri tarda te.
( ') D e J e r p h a n i o n , L a décoration des églises en Orient du t r' au r f siècle, in Atti I V Congresw Inter
na (trchcol. cristuinu , Roma, i Q4 8 , p. a s i se g . ; F r a s c o v u .ii, p. 8 i .
•3 A
c a 111h n s \h c i i hoi.(X .loi: i:s
Ho altrove sviluppato I’opinione clio questa rinascenza, resa nccessaria dalla ricon-
quista di Eraclio nelle provincie dove i Persiani avevano distrutlo le chiese e disperso i
conventi del melchiti (lasciando j>el momento spadroneggiare i m onofisiti, cultori di
un’arte popolare e oriental izzante) l'u rinascenza attuata da elementi ben consci di Hover
contrapporsi ai Copti anche con nuovi istrumenti religiosi, quali appunto questi cicli d ie
sarebbero rimasti, esemplari, nella Palestina e nelle regioni ad ia ce n ti(l .
Il famoso piatto con Sileno e la Menade. e quello con Meleagro e Atalanta, datato dai
tempo di Eraclio (mentre i piatti di Cipro a soggelto sacro — intonati a un classicismo
più robusto ad antiocheno quasi una variante dell’ellenismo di Bisanzio — sono piut-
losto giustinianei) darebbero il metro dell alto classicismo di cui quella società dis-
poneva. Esso, applicato a questi cicli religiosi, vi avrebbe infuso quel tono crrinasci-
mentale» d ie a ragione il Grabar avv(*rte in Castelseprio.
Nello stesso tempo la sconcordanza del ciclo con lic o n e centrale e il fatto del suo coin-
cidere invece nella più tarda e già imbastardita versione dei mosaici di Giovanni VII,
si adatterebbero ai motivi psicologici di quella restaurazione religiosa, finita tragicam ente
dopo men di un decennio con la conquista araba, ehe taglio quasi del tulto per quelle
(ihiese i rapporti con Bisanzio imperiale, ma — il caso di Stefano di Dora insegna — li
mantenne invece con I Italia del sec. m i , cioè con la Roma dei papi «Siriaci^, pel cui
tramite questi artisti trovavano aperta la via del Nord.
(1 cit.; a l t r i e l e m e n t i a g g i u n g e r o n e l l a c o n t i m i a z i o n e d i ( j u c l l a r u b r i c a n e l 1 9 5 3 .
A g cio rn am b n ti,
F p. 1 5 . fig. 8 e 11 (secondo o terzo decennio del sec. \n). I piatti di Cipro sono asse-
rancovich,
1
S.-riI|;i in hianeo siiü'iiH resco della \ali\il. i «li C as le lse p rio : lOSKIMI.
3
\nn u n c iaz ion e in l i n e g e m m a «tell E w in g elia rio
ili S o is so n s , B ib l. Na1. . la!. 8 8 ô o . I ~.
2
Scrit ta in b ia n co sulI'alFresco de lla Natività
<li C a s te ls ep r io : S C A ( o r iz o n la le )
MARIA (verticale).
I 3 A.
I
Planche \ l . \ III
1 2
L a Sam aritana ;il pozzo. \ijjn e lla nm -giaale II miracolo di C an a. I d . , l a l ^ 8 8 5 o , I ii>o.
(lell'Kvano’eliario rli S oisson s. Bibl. Nat., lal. 8 8 ô o , f' 81
3
Angelo ddl'A nnunciazione, Nervine dell' Vnminciazione,
I d . , Bibl. N at., iat. 8 8 0 0 , f* a k . Id., Bibl. N a l., lat. 8 8 0 0 . f> 1 .
1
I /A n in m cia zio n e nell \ltare d ’o r o di S. A m b r o g i o di Milano.
jtlO S fP N
7T .R W
1’
tfc.NAt
[
P lanchk M I
1 2
E v a n g e iia r i o E t io p ic o , E v a n g e l iario di C o d e s o a lc o , lîilil. N a t., n o u v .
f 8 a (a. i h o ■>.), dal Nordenfalk. ac(|. lat. i2 o 3 , f° 'M> ( a . 7 8 1 - 7 8 0 ) , dal
Norden falk.
3
K v an ge lia rio di S o isson s, iS. Mai ia An tiro di Rfunn (sec. m i - m i i ).
Ril)l. Nat., lat. 8 8 0 0 , I" (j v°
L<>v>»uuua t- 'ï^ '1.■•■w;l'~
A PROPO S DU NIMBE C R U C IF ÈR E
À CASTELSEPRIO
PAR
ANDRÉ GRABAR
Dans un article publié par la Gazette des Beaux-Arls (XXXVII, 190 0 ), j ’ai fait observer,
p . i ! 2 , q ue la croix du nimbe du Christ enfant à Castelseprio (fig. 3 ) avait cia forme très
exclusive q u ’on ne voit que dans les peintures carolingiennes et ottoniennes. C’est, pour
chaque branche de la croix, un simple trait fin qui dépasse le disque du nimbe et qui, dans
la m iniature ottonienne et à Castelseprio, s’élargit aux extrémités».
Cette observation a été remarquée et maintenue par des critiques d ’art américains
(Meyer Schapiro, The Art Bulletin, XXXVI, 1 9 6 2 , p. 1 56 et n. 5 3 ; Charles R. Morev,
ibid,, p. 1 8 9 , n. 5 1), et M. Bognetti a bien voulu en faire autant, dans l’article qu'il publi '
dans le présent fascicule des Cahiers archéologiques (p. 1 h 1 et suiv.).
Cependant, après avoir signalé mes observations, M. Schapiro a pensé pouvoir en
réduire la portée en jo ign an t aux exemples carolingiens et ottoniens de ce genre de nimbe
crucifère deux exemples byzantins : dans les miniatures de la Bible de Cotton au British
Museum (vers 5 o o ) et d ’un Recueil d ’homélies de saint Jean Chrysostome à la Bibliothèque
nationale d ’Athènes (cod. 2 1 1 , du x8 siècle). Les archéologues favorables à une date de
Castelseprio antérieure au ixc siècle n’ont pas manqué de rappeler ces exemples byzantins
(MM. Morey et Bognetti, dans les articles cités plus haut), parce q u ils compromettent la
valeur du m otif du nim be crucifère de Castelseprio pour la datation de ces fresques. En
effet, si des m iniaturistes byzantins du vi* et du x® siècle connaissaient ce motif, celui-ci
n ’était point limité à l’art carolingien et ottonien, comme je le pense, et ne pouvait
donc servir à dater les peintures de Castelseprio.
O r, les deux exemples byzantins cités par M. Schapiro n*ont pas à être rapprochés des
nim bes crucifères de Castelseprio et des peintures carolingiennes et ottoniennes dont
j ’avais signalé la parenté. Un coup d ’œil sur la miniature de 1’Athen. 2 1 1 que nous repro
duisons (fig. 1) suffit pour écarter cette peinture sans autre forme de procès. Lorsque,
en 1 9 3 2 , j ’en ai donné Yêditio princeps (Senriaanum Kondahomtmum, V, 19 8 2 , p. 2D9 et
suiv., pl. XVIII et suiv.), j ’expliquai la singulière iconographie de cette miniature (un
hapax dans l ’art byzantin) en partant de l ’homélie sur les dix drachmes de saint Jean Chry-
Rostome q u ’elle accompagne. II s’agit, en effet, non pas d ’un nimbe crucifère (d autres minia
tures du même m anuscrit m ontrent des exemples — banales — de nimbe crucifère), mais
158 C AHI KKS AR CHEOL OGI QUE S
(l’une image de la croix en chandelier, qui fait pendant aux cierges que portent les anges
sur la même peinture. Ces anges figuren t les neuf drachmes de la p arab ole; le C hrist est
le dixième drachme et la Sagesse divine 75qui allume la lampe et, la posant dans le chandelier
de la croix, porte le flambeau et conduit le m onde entier vers la piété» ; ou bien, (le Christ
Sagesse divine) «vient du ciel, prend la lampe en argile q u ’est le corps, réclaire par la
lumière de la divinité, installe le chandelier de la croix n. La croix q u ’on voit derrière le
Christ et dont les branches s’étendent au-delà du disque de son nim be n ’a rien à faire avec
la croix des nim bes du Christ. Elle représente, conformément au texte, la croix en tant que
chandelier qui fait jaillir la lum ière du salut sur l’hum anité entière, et qui fait pendant —
en les dom inant — aux himint des neuf ordres angéliques. Mon commentaire de 1 9 3 2 m érite
rait d ’être complété et modifié sur bien des points (par exemple, je préfère m aintenant recon
naître dans l ’objet sur lequel se dresse le buste du Christ et q u ’Adam lient dans sa main
gauche, non pas une barque mais une lampe en argile : la lampe en argile q u ’est le corps
humain, et c’est pourquoi eile est mise entre les mains d ’Adam, ancêtre de tous ceux dont le
corps est argile). Mais l ’explication de la croix, reproduite ci-dessus, reste valable. C ’est
bien une croix à double traverse (cf. la même croix derrière une image du Saint-E sprit sur
un autel, fol. 1 1 0 v° du même manuscrit) qui sort d ’une lampe, comme la flamme ja illit d ’un
b rasier; on lui a superposé le buste du Christ « lumière vraie» et mis cette lam pe m ysté
rieuse entre les mains d ’Adam , lui-m êm e port * par la Terre. On ne saurait évidem m ent
tirer aucun argum ent en faveur de l ’origine du nimbe crucifère de Castelseprio de cette
image très spéciale. D ’ailleurs, la croix à double traverse q u ’on y voit ne rap p elle nullem ent
celle du nim be du Christ enfant, à Castelseprio.
En effet, cette croix n’est pas faite d*un simple Irait, comme la croix du nim be de
l’enfant Jésus à Castelseprio. C’est une croix m assive, confectionnée en une m atière com
pacte et solide, et il n’en va pas autrem ent — M. Schapiro l’observe lui-même — de la
croix des nim bes du deuxième exemple qu’il cite : les peintures de la Bible de Colton
(«s-4 . . . . ;
Quelle qu’ait élé la raison qui invita le miniaturiste grec du début du vi* siècle qui
illustra cette Bible de s’écarter de la règle — qui semble solidem ent établie en icono
graphie byzantine — en faisant dépasser le disque du nim be par les branches de sa
croix, la Bible de Cotton offre deux exemples de cette form ule qu’elle applique à la
figure de D ieu, dans les scènes de la Genèse. Une chose est certaine, iconographi-
quem ent, la croix large et •« m atérielle» du nim be, sur ces im ages, n’est pas compa
rable à la croix en traits simples de Castelseprio.
Force nous est, par conséquent, d ’écarter les deux exemples byzantins que M. Schapiro
a cru utile de citer à propos du nim be crucifère de Jésus enfant à Castelseprio. E t cela nous
autorise à m aintenir ce que nous disions dans l ’article de la Gazette des Beaux-Arts : ce
nimbe crucifère de Castelseprio a une forme exclusive q u ’on ne voit que dans les peintures
carolingiennes et ottoniennes.
Et cela veut dire que ce m otif ne perd rien de sa valeur en tant que tém oignage sur la
date possible de Castelseprio et les liens de son art avec les écoles de peinture occidentales.
Ce n est q u ’en essayant de minim iser ce tém oignage que MM. Morey, Schapiro et Bognetti
A P R O P O S DU S H I R K GRCCJ F KRK 159
ont cru pouvoir passer outre et proposer des dates sensiblement plus anciennes que l’époque
carolingienne : si précieuses que soient leurs contributions à la connaissance de Castelseprio,
et elles le sont à beaucoup d égards, a forme du nimbe crucifère de Jésus enfant à Castel
seprio continue à ne trouver d’analogies que dans l ’art carolingien et ottonicn.
Parm i les argum ents qui lui font supposer des origines plus anciennes que le ixe siècle
au m otif du nim be crucifère, M. Bognetti se sert d’une observation qui est très juste : à
Castelseprio, Ja croix ii trait maigre n’apparaît que dans le nimbe du Christ-enfant, tandis
que le Christ barbu du m édaillon (qu’il appelle rantoerj.il.ot) a un nimbe garni d’ une croix
large habituelle. Mais je ne puis suivre M. Bognetti lorsqu’il attribue la présence de ces
deux types de nimbe à une tradition ancienne. En tout cas, les deux monuments anciens
q u ’il cite ne le confirm ent point : la petite croix qui, à Sainte-Marie-Majeure de Rome,
surm onte la tête nim bée du Christ-enfant n’a rien de commun avec la croix du nimbe de
Jésus enfant à C astelseprio; quant à l’oratoire de Jean VII. c’est le même nimbe crucifère
du type banal qui s’y répète partout, et ce nimbe et sa croix ne font que grandir en même
tem ps que Jésus lui-même, de la scène de la Nativité à celle du Miracle des deux aveugles.
Par contre, le même procédé de la distinction de la croix dans le nimbe de l’enfant et dans
celui du Christ adulte, et les mêmes formes précises de cette croix se retrouvent dans les
peintures ottoniennes, comme M. Bognetti le signale lui-même. On serait donc plus ju s
tifié, me sem ble-t-il, en ajoutant cette observation à celles qui relèvent la parenté de Castel
seprio et des peintures occidentales du haut moyen âge.
J’ai eu à m ’arrêter plus longuement aux woccidentalismes v à Castelseprio dans une commu
nication présentée en septembre 19 0 1 à la troisième B encontre Internationale p o u rl etude
du haut moyen âge, en Suisse (séance tenue à Disentis). Malheureusement le retard apporte
à la publication des Actes de cette Rencontre, encore sous presse, m empeche de me référer
à cette étude de * 9 5 1 qui, à certains égards, on le verra, se rencontre avec les observations
et conclusions de l ’article cité ci-dessus de M. Schapiro paru en 1 9 a a .
A. G rabar .
q tliU c,J ^^norrvuTcyou'TxAvty’ •
1 - Cod. Athen, a n , f. 34 v
fois les travaux de ses prédécesseurs et les résultats des fouilles de 19 8 0 . Notre but est
beaucoup plus modeste. Sans embrasser le monument dans son ensemble, nous voudrions
proposer, sur la base de l’étude de M. Hubert, quelques comparaisons, une analvse du
monum ent et une interprétation de son plan.
élim inons d ’abord les comparaisons inefficaces. On a essayé de comparer notre église
à des édifices en quatre-feuilles, comme Saint-Laurent (vie siècle) de Milan - . Or, les deux édi
fices sont différents. A Germigny, le corps principal est un carré subdivisé en neuf compar
timents par quatre piliers portant une lanterne. Les quatre absides sont ajoutées de
l ’extérieur à ce corps carré. Saint-Laurent est, au contraire, un quatre-feuilles réel, c’est-à-
dire une ordonnance rayonnante par excellence. Le carré est englobé par les absides.
L ’intérieur n ’est pas subdivisé en neuf compartiments.
Les monuments arméniens sont plus proches de Germigny. A Bagaran ( 6 9 4-63 1 ) l es
quatre absides se projettent hors du corps carré (fig. 4 ), qui est bien visible comme à
Germ igny, et n ’est pas englobé par les absides, comme c’est le fait de Saint-Laurent de
Milan. Les compartiments d’angle, les absides, les pignons des bras de la croix et la cou
pole avec son tambour, créent une élévation pyramidale par degrés, si caractéristique de
Germigny. A l’intérieur, quatre piliers massifs, carrés, rappellent vivement les piliers
de Germigny.
Mais les ressem blances s’arrêtent là, et les dissemblances ne sont pas moins importantes.
A Bagaran, l ’espace sous la coupole domine l’ensemble. L ’intérieur n’est pas subdivisé
en neuf compartim ents. Les compartiments d’angle ne sont que des évidements dans des
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A. KHATCHATRIAN
M algré tou tes les d iscu ssion s q u ’elle a soulevées, l’église de G erm ign y-des-Prés (iig. 2)
n ’a pas a ttiré suffisam m ent l’atten tio n des chercheurs. La seule étude im portan te de son
arch itectu re est celle de M. J. H ub ert où F a u teu r soum et à une analyse scientifiqu e, à la
lois les travaux de ses préd écesseu rs et les résultats des fouilles de iC)3o. Notre bu t est
beau co u p plus m odeste. S an s em brasser le m onum ent dans son ensem ble, nous voudrions
p rop oser, su r la base de l’étu d e de M. H ubert, q u elq u es com paraisons, une analyse du
m on um ent et une in terp réta tio n de son plan.
É lim in on s d ’a b o rd les com paraisons inefficaces. On a essayé de com parer notre église
à des éd ifices en q u atre-feu illes, com m e Sain t-L au ren t (vie siècle) de M ila n J . O r, les deux édi
fices son t d ifférents. A G erm ign y, le corps principal est 1111 carré su bd ivisé en n eu f com par
tim ents par q u a tre p iliers p o rtan t une lan tern e. Les qu atre absid es sont ajou tées de
l ’ex térieu r à ce corp s carré. S a in t-L a u ren t est, au contraire, un qu atre-feu illes réel, c’ est-à-
dire u n e ord o n n an ce rayonnan te par excellence. L e carré est en glob é par les absid es.
L in térieu r n ’est pas su b d ivisé en neuf com partim ents.
L es m on u m ents arm én iens sont p lu s proches de G erm igny. A Bagaran ( 6 2 4-63 1) 3 les
q u a tre a b sid es se p rojetten t hors du corp s carré (fig. '1), qu i est bien visib le com m e à
G erm ign y, et n ’est pas en glob é par les a bsid es, com m e c est le lait de S ain t-L a u ren t de
M ilan. L es com partim en ts d ’an gle, les absid es, les p ign o n s des bras de la croix et la cou
pole avec son tam bo u r, créen t une élévation pyram idale par degres, si caractéristique de
G erm ign y. A l ’in térieu r, q u a tre p iliers m assifs, carres, rap p ellen t vivem ent les piliers
de G erm ign y.
Mais les ressem blan ces s ’a rrêten t la, et les dissem blances 11e sont pas m oins im p ortan tes.
A B agaran , l’espace sous la co u p ole dom ine 1ensem ble. L in térieu r 11 est pas su bd ivise
<‘ii n e u f com partim en ts. Les com partim en ts d angle 11e sont que des évidem ents dans des
piliers d’angle. Autre différence : à Bagaran le tam bour passe à l ’octogone au m oyen de
trompes, imm édiatement au-dessus des arcs dp décharge. A Germ igny, la lanterne s’érige
comme un puits, à une hauteur considérable au-dessus des arcs de décharge. Cette diffé
rence se reflète aussi à l ’extérieur. A Bagaran, la base carrée du tam bour ne se voit guère.
A Germ igny, la lour carrée s’élève bien au-dessus des pignons.
A Bagaran, les compartiments d ’angle et les absides entourent la coupole comme un
collier. Sur les façades de Germ igny, les absides ne sont pas liées avec les com partim ents
d ’an gle; elles sem blent ajoutées au cube principal.
Enfin, le tracé des deux m onum ents est différent. L ’église de Bagaran, avec ses absides
et le corps carré s’inscrit dans un cercle (fig. h). A Germ igny, le cercle ne jo u e aucun rôle
(fig- *)•
L ’édifice qui se rapproche le plus de Germ igny, est la cathédrale d'E djm iatsin (fig. 3 ) (l),
du vu® siècle. Ses quatre piliers subdivisent le carré principal en neuf com partim ents égaux,
comme à Germ igny. Quatre calottes recouvraient, probablem ent, les com partim ents d ’angle,
toujours comme à Germigny.
Il n ’en reste pas moins que, contrairement à Germ igny, la cathédrale d’ Edjmiatsin
s’inscrit dans un cercle comme l’ église de Bagaran.
Cette constatation est im portante. Deux m onum ents en apparence identiques, comme
Edjmiatsin et Germ igny, ont un tracé différent.
L ’inscription dans un cercle n’est pas une particularité des m onum ents arm éniens.
Saint-Satyre (vers 8 7 9 ) à Milan, qui pourrait être comparé à Bagaran par ses quatre colonnes
rapprochées des angles, s’inscrit aussi dans un cercle. Il est vrai q ue cet exem ple n ’a pas
à figurer dans notre étude. Comme l ’ont m ontré les dernières f o u i l l e s s o n pourtour
extérieur est non pas un carré, mais un octogone rayonnant, où les quatre com partim ents
d’angle sont confinés de l’ extérieur par des segm ents de cercle. Nous n ’ insisterons pas sur
l ’exemple des Saints-Apôlres d’A t h è n e s d u même genre que Saint-Satyre. P ar contre,
le reliquaire du trésor de Saint-M arc à Venise (fig. 5 ), qui, avec ses façades décorées de
figures et d ’animaux, et couronnées de créneaux, rep rod uit p lutôt un édifice palatin W , peut
présenter un certain intérêt pour nous. Ce reliquaire, avec son corps cubique, ses quatre
absides saillantes, sa coupole centrale et les quatre couvertures pyram idales des angles,
semble être une copie de la cathédrale d ’Edjm iatsin ou de l’église de G erm igny. Sans
pouvoir préciser le genre des supports sous la coupole, nous pouvons constater q ue l’ inté
rieur était subdivisé en neuf compartim ents. P ar conséquent, par son am énagem ent
Ibid., p. a 3 3 et 3 3 a.
(î) G. C hierici, L a Chiesa di S . Satiro, Milan, 1 9 4 a.
L ampakis, Mémoire sur les antiquités chrétiennes de la Grèce, Athènes, 1 9 0 3 , p. 1 3.
(i> A. G rabar , {jO succès des arts orienta ux à la cour byzantine sous les Macédonien*, dans Münchner
Jahrbuch der Bildenden K u m t, troisièm e série, vol. I ï, i g ô i , p. 5 1- 5 3 . Nous devrions prendre en consi
dération aussi le reliquaire d ’Aix, du x* siècle. Mais, d ’après les proportions des absides, ce m odèle
ne devait pas avoir de piliers intérieurs; nous l ’éliminons donc de notre étude, comme, d ’ailleurs,
beaucoup d'autres monuments moins directement apparentés à Germ igny. Nous en traiterons
ailleurs.
ÎNOTKS S I R I/A R C H IT E C H KP, DK L’ KUMSK DR IJKRM IGSY-HKS-PRHS 163
Kl A
CAHIERS AltCIIKOLOCIOUKS
Nous pouvons tirer de ces rem arques la conclusion suivante pour l’élude de G erm igny :
Saint-Pierre-de-Nave et Sainte Christine de Lena, qui ne sont pas strictem ent du type centra
lisé ou rayonnant, qui sont allongés, qui n’ont pas d ’éléments courbes, et où le quadrillage
et les angles droits sont plus accusés q u ’à Germ igny, s’ inscrivent dans un cercle, tandis
que l’église de Germigny qui est centralisée et a, semble-t-il, une ordonnance rayonnante,
ne s’ inscrit pas dans le cercle. Non seulem ent par rapport à l ’architecture de l ’ Orient,
mais aussi par rapport à celle de l’ Occident, Germ igny se présente ainsi comme une
exception.
Observons m aintenant le monument lui-même, pour com prendre les raisons de son
caractère exceptionnel.
Les absides de Germigny, dépassant en plan le demi-cercle sem blent rayonner autour
du carré principal. Mais ce rayonnem ent est illusoire. Les quatre absides ont des dim en
sions et des contours différents, et nous ne pouvons pas attribuer ces différences à une
simple négligence. Il serait étrange q ue les architectes carolingiens qui avaient élevé la
chapelle d’Aix n ’aient pu reproduire quatre absides identiques, m algré la régularité de
chaque abside, prise en elle-même. Les absides de Germ igny sont distribuées suivant un
système, mais ce système n’est pas celui du rayonnem ent. L ’abside Est est la plus
petite. S u r le même axe, du côté opposé, à l ’ou est, se trouve une abside plus grande.
Toutes les deux sont outrepassées en plan, entièrem ent curvilignes et constituent Taxe
principal. L ’autre axe est noué par les absides latérales. Nous avons ici au nord une
abside plus grande que l ’abside K st et, du côté opposé, au sud, l ’abside la plus grande
de l ’édifice, et qui semble même hors d’ échelle. Si les deux prem ières absides sont entiè
rem ent curvilignes, les absides latérales sont plus rigides par leur p la n 11). Deux paires
d’absides s’ entrecroisent, chaque paire ayant ses particularités.
La différence dans le traitem ent des absides s’observe ju sq u e dans les détails. Aux
quatre murs de l’église, de part et d ’autre des absides, sont adossées des colonnes sur des
hauts piédestaux, recevant les arcs qui viennent des quatre piliers. Ces colonnes appar
tiennent, par conséquent, au système des neuf com partim ents, et l ’architecte le fait sentir
par des détails. Ainsi, le décor du tailloir de chaque colonne est identiqu e au décor de la
face opposée du tailloir du pilier correspondant^2*.
Autre détail rem arqué par Bouet, «les dim ensions du tailloir ne s’accordent pas avec les
chapiteaux, mais avec les arcs q u ’ils portent 73. Les tailloirs sont, en effet, excessivem ent larges.
Par ce détail, Germ igny se rapproche de Saint-Pierre-de-Nave, où les colonnes portaient
de même des arcs très larges. La vraie fonction des colonnes de Germ igny est d ’épauler les
arcs venant des piliers. Mais, en plus, deux paires de colonnettes, placées très haut, por
tent l ’arc triomphal de l ’abside E. Les absides N. et S. n ’ont pas cet encadrem ent supplé
mentaire. D ’autre part, l ’espace des absides N. et S. est isolé de l ’espace central par des
antes saillantes, comme l’était, d ’après les fouilles, l ’abside 0 . Quant à l’abside E. son plan
La rigidité est particulièrem ent visible dans l’abside S ., dont l’ extrém ité E, est une droite e l
l’extrémité 0 M une courbe sans caractère.
B o u e t , dans B uî. mon., 1 9 6 8 , p. 5 6 9 -5 8 8 . J. H u b e r t dans C. A ., i g 3 o.
NOTKS S I H I.MRCJMTHCTMK UK I/K(»L(SH OK fiKRUIC.W-DKS-PRKS 165
outrepasse 1 isole aussi dans une certaine mesure. Mais la courbe du plan rejoint l’ouver
ture de 1 abside et atténue l’isolement. Les ouvertures des absides N., S. et E. étant les
mêmes, on peut s’ étonner de ces différences dans leur traitement.
Les différences ne s arrêtent pas la. Les absides latérales ont deux impostes superposées,
I une à la hauteur de 1 imposte des absidioles, l’autre, comme à l’abside E, k la hauteur du
tailloir des chapiteaux voisins et de l’imposte des piliers. L ’abside E. n’a pas d ’ imposte
inférieure (les impostes qu on voit actuellement sont dues à la reconstitution de Lisch).
Ces impostes inférieures sont sans utilité dans l’état actuel des absides latérales. Il faut
supposer dans 1 édifice prim itif une autre disposition où les impostes étaient à leur place,
m arquant, par exemple, la naissance d’ un arc, à un niveau plus bas, comme l’a supposé
Bouet. Par ce détail aussi, les absides latérales diffèrent de l’abside E.
Enfin, les absides latérales n’ont pas l’arcature aveugle qui orne l’abside orientale sous
la voûle.
Les particularités des absides de Germigny seront plus révélatrices si nous les compa
rons à d ’autres monuments. Dans tous les quatre-feuilles, que ce soit avec ou sans piliers,
les quatre absides sont traitées toujours identiquement. Elles sont toutes largement ou
vertes vers l’espace central et les détails de l’un sont reproduites sur les autres. Par exemple,
lorsque l ’abside E. est décorée d ’une arcature, aveugle ou ajourée, les autres absides le
sont de même (quatre-feuilles syriens à déambulatoires, type arménien deZvartnotz, baptis
tère de Venasque, l’église de la Vierge dite des Mongoles à Constantinople, etc.). Les
quelques écarts s’expliquent toujours par des particularités de l’ordonnance. Ainsi, dans
l’église Rouge de Peroustica du vi® siècle ^1\ l’abside E. est dépourvue d’arcature, tandis
que les trois exèdres en sont munies parce que le déambulatoire est supprim é du côté E.
Parfois, dans les quatre-feuilles, l’abside E. est flanquée de collatéraux. Mais pas un
de ces m onum ents n ’a le chevet très caractéristique de Germigny, dont les trois absides
outrepassées s’ajoutent comme une unité bien distincte sur le plan carré (fig. i , b ).
Nous avons aussi des exemples instructifs du motif des colonnes flanquant l’abside.
D ’une façon générale, l are porté par des colonnes flanque, dans l’architecture romaine,
un passage, une niche plate ou semi-circulaire.
A Saint-Jean de Jérusalem (4 5 o- 4 6 o)l î , des colonnes doubles portent des arcs devant
les absides latérales. Si ce m otif ne se répète pas devant l’abside principale, c’est que l’église
appartient non pas au quatre-feuilles, mais aux triconques, disposés transversalement.
Dans des quatre-feuilles purs, les encadrements par des arcs, lorsqu’ils existent, se répètent
devant toutes les absides, comme à Artik (Arménie), à Saint-Satyre ou à V enasq ue(3).
L ’oratoire funéraire (fin du vm “ ou début du ix* siècle) ^ de Greuoble est bien instructif
à cet égard. Cet édifice, malgré ses quatre absides, ne peut être attribué aux quatre-feuilles
l'i a .
CK II I K RS * HC H KO LOG l<H' KS
purs, à cause de son pian allongé. Malgré cela, toutes ses absides sont identiques en plan
et toutes sont encadrées par, des arcs.
Quelle que soit l ’explication, le fait reste lui-même indéniable : l ’abside E. de (ierm igny
est rehaussée par tous les m oyens, tandis que les absides N. et S. sont com plètem ent
négligées.
L ’ un des faits les plus troublants est que l ’abside N. est déplacée légèrem ent vers l’ Ouest
(fig. 2 et <)) par rapport à l ’axe de l ’édifice W , à cause de la proxim ité d ’une porte immé
diatem ent à l ’E. de l ’abside (contem poraine à la fondation, d ’après ses m oulures, cette
porte a été supprim ée lors de la reconstruction de 1 8 6 7 - 1 8 7 6 ) . Or, si la porte a nécessité
le recul de l ’abside, c’est que l ’abside a été construite après la porte. Dans le cas
contraire, si la construction de l’abside avait été prévue, la porte pouvait très bien être
déplacée plus à l ’Esl. L es absides N. et S. ayant, comme nous le verrons, les mêmes
irrégularités de construction, si l’abside N. est postérieure à la fondation, l ’abside S. l’ est
de même. Nous pouvons, du même coup, expliquer dans une certaine m esure la différence
des dim ensions des deux absides latérales. L ’abside S. a été imitée de l’abside O. L ’ abside
N. n ’a pas pu être réalisée d ’après les mêmes dim ensions, justem ent, du fait de la proxi
mité de la porte. En partie par le déplacem ent de l ’abside vers l ’O ., en partie par sa
réduction, on a pu tirer le m eilleur parti de la situation dilïicile causée par la présence
de la porte.
Autre fait troublant : d ’après les observations de Bouet, les absides N. et S. portent des
traces évidentes de reconstruction :
Bouet dit au sujet des pilastres à l ’entrée des absides N. et S. : « Tandis que d ’un côté
les quatre piliers et les arcs qui reposent dessus sont appareillés avec un certain soin, que
les claveaux, d’une grande longueur, présentent une rainure que nous avons déjà rencon
trée dans quelques édifices anciens, entre autre à l’église de Duclair, et que les join ts sont
d’ une épaisseur médiocre et assez réguliers, d’ un autre côté les arches et les pilastres qui
accom pagnent les absides [N. et S.] présentent la plus mauvaise construction q u ’on puisse
figurer. Les pierres sont taillées de la façon la plus grossière et toutes écornées, celles des
pilastres ne pénètrent dans le m ur et laissent des vides rem plis de la m anière la plus bar
bare par des briques, des m oellons et des tuiles à rebord ; tout cela constitue une maçon
nerie qui peut difficilement être surpassée en grossièreté et n ’offre aucune ressem blance
avec la manière dont est exécutée la partie centrale... les lits de pierre ne sont pas hori
zontaux, de grands claveaux, semblables à ceux des grands arcs, sont introduits dans la
construction des pieds-droits, contrairem ent aux plus simples principes de la statique ;
les arcs sont composés de pierres grossièrem ent taillées en claveaux de lon gueu r inégale.
quelqu(is-uns formés de grands claveaux à rainures mais raccourcis, et plusieurs de ces
pierres ont conservé les traces des peintures qui prouvent q u ’elles n ’occupent pas leur
place prim itive. Tout cela donne l ’idée de réparation faite avec des pierres provenant de
démolitions, à une époque de décadence, comme celle qui suivit le règne de Charlem agne v.
Bouet attribue lt?s démolitions aux Normands qui pillèrent le monastère voisin de Saint-
Benoît vers le milieu du ix* siecle (en 8 5 6 , 8 65 et 8 66). Le «Catalogue des abbés de
F leury » m entionne de son côté vers la môme époque, un incendie à Germigny. Mais Bouet
voit d autre part les points faibles de son hypothèse. Comment expliquer que les Normands
aient détruit exactement les deux arcs symétriques des absides latérales, sans toucher aux
autres éléments? Comme il le dit, lui-même, «il ne nous semble pas facile d’expliquer la
conservation de la m osaïque». Si les Normands voulaient détruire le monument, «il était...
plus simple de saper un des piliers de la tour que de détruire les murs du déambulatoire.
Mais la chute de ceux-ci eut entraîné la chute des arcs qui relient les murs aux quatre piles
centrales. Tout cela est, pour nous, une énigme».
Il faut penser que, si les destructions normandes ont nécessité des réparations, celles-
ci ont été plutôt des transformations.
11 découle de la description de Bouet, qu’aux murs N. et S. un arc, semblable aux grands
arcs, a été démoli et ses matériaux réemployés tant pour les pieds-droits que pour l’arc
de l ’abside. Comme le montre l’un des dessins de Bouet (lig. () ) ^ , cet arc remanié de
l’abside est appliqué à l ’intrados de l’arc formeret supérieur, resté intact et retom bant sur
les colonnes adossées, de même que les pieds-droits remaniés sont appliqués contre le
mur. Ne faut-il pas mettre l’arc prim itif démoli en liaison avec les impostes inférieures?
Les sommiers de cet arc prim itif commenceraient alors au niveau des impostes infé
rieures et sa clef serait beaucoup plus basse, notamment au niveau des chapiteaux des
colonnes (fig. 7). Seul l ’arc de l ’abside E. serait plus élevé, grâce aux colonnettes
accouplées, t n e pareille disposition, accentuant la différence entre les absides N,, S. et E.,
présenterait un argum ent de plus, pour ne pas mettre Germigny dans la catégorie des
quatre-feuilles purs et, d’autre part, montrerait une affinité plus étroite avec Grenoble.
Nous avons vu q u ’à Grenoble, les quatre absides étaient flanquées identiquem ent par
des colonnes. Mais, tandis que les trois absides latérales n’étaient encadrées que par des
arcs à un seul étage, devant les absides E. et 0 . les deux colonnes inférieures portaient
sur leurs chapiteaux deux paires de colonnettes, qui à leur tour portaient l’arc triomphal
de l ’abside. De ce fait les absides E. et O. étaient plus hautes que les absides latérales.
L ’intérieur se présentait comme une superposition de deux zones (fig. 8) : a. Zone infé
rieure de colonnes; ces colonnes portaient les arcs des absides latérales et servaient de
piédestaux pour les colonnettes accouplées de l’abside E . ; b. Zone supérieure; elle com
prenait les colonnettes accouplées de l’abside E. et les arcs latéraux.
Or, à Germigny, nous voyons le même système, évolué et appliqué a un monument a
neuf compartim ents. Les colonnes de Grenoble, portant des colonnettes accouplées se
sont transformées à (iennignv en piédestaux carrés concordant avec les piliers. Les colon-
nettes accouplées occupent une place autonome, au lieu de se superposer aux colonnes
inférieures. Les zones se présentent de la façon suivante : a. Zone inférieure de piédestaux
qui ont remplacé les colonnes de Grenoble ; b. Zone supérieure : elle comprend les arcs
latéraux prim itifs et les colonneltes accouplées, comme à G renoble mais en plus, les
colonnes de la structure à neuf compartim ents. Bien entendu, l ’identité du décor n ’im
plique pas un lien direct entre les deux m onum ents : la même idée des ordres super
posés est appliqué à deux monuments de type différent et transformée en conséquence.
Nous voyons que toutes les circonstances nous autorisent à accepter pour les absides
latérales l ’hypothèse des arcs reposant sur les im postes inférieures. Que se trouvait-il
derrière ces arcs? Des niches ou des passages? De toute façon ce n’était pas les absides
actuelles.
D’autres faits, révélés par les fouilles de i q 3 o, le confirment. Voici les faits :
1 . L ’abside E. et les deux absidioles qui la flanquent rem ontent à la fondation, et ont
le même m ortier brun, composé de sable de carrière et de chaux grasse, que les fondations
des murs du corps de l ’édifice.
2 . Les maçonneries des deux zones de l’abside 0 . (la zone inférieure en fer à cheval,
et la zone supérieure à pans coupés) sont hourdées, comme l’abside E. de m ortier brun.
Par conséquent, si la zone supérieure à pans coupés est due à une reconstruction, cette
reconstruction a eu lieu peu après la fondation, probablem ent vers le m ilieu du ix® siècle,
que nous pouvons appeller la seconde période constructive.
3 . Le pan de mur lié à l ’abside 0 ., parallèle à l ’axe de l ’église et appartenant au porche,
est contemporain, probablem ent, de la zone à pans coupés.
4 . Les absides N. et. S. sont assises sur des fondations anciennes. Les devis de l’archi
tecte Delton le disent, d ’ailleurs, expressém ent.
5 . Les quatre absides ont des contreforts. Mais ils sont de dates différentes. Les con
treforts de l’abside E. ont le même m ortier brun que l ’abside, mais ils ne sont pas liés
avec sa maçonnerie. Ils ont été construits, par conséquent, peu de tem ps après l’abside elle-
même. Les contreforts des trois autres absides sont liés avec les m açonneries des absides
Nous éliminerons de notre considération les quelques contreforts, beaucoup plus tardifs,
des absides N. et S. qui ne nous intéressent pas ici. Nous voyons que l ’abside E. rem ontant
sûrem ent à la fondation, n’avait pas de contreforts (à moins que ces contreforts n ’aient la
forme de pilastres, ce qui revient au même : à Tabsence de contreforts saillants). La zone
supérieure de l’abside 0 . en avait. La pensée que les absides N. et S., qui avaient égalem ent
des contreforts, sont contem poraines de la zone supérieure de l’abside 0 ., s’impose.
Au moment de la construction des absides N., S. et O. avec leurs contreforts, des contreforts
furent ajoutés d ’après notre hypothèse à l ’abside E. qui n ’en avait pas auparavant.
En éliminant les reconstructions tardives, nous pouvons distinguer deux périodes cons
tructives, distantes environ d ’une cinquantaine d ’années.
Première période (t'poque de la fondation de l’oratoire vers 80 6). L ’édifice se compose
de trois éléments, que nous énum érerons en allant du principal vers le secondaire (fig. i) .
Cet ordre d ’énumération correspond plus ou m oins à l ’achem inement de la pensée de
! architecte : i° corps carré divisé en neuf com partim ents par quatre piliers portant une
lanterne (fig. i , o). Su r ce corps carré s’ajoutent : 2° un chevet tripartite à TE. (fig. i , b)
Compte rendu des fouilles a u x Archives des Mon. h ist.; Hubert dans C. A ., 1 9 8 0 .
MITKS S i n I/AHOIMTBCTIRK OB L ' K fi lJ S K l>K CKRMHJJi V-DES-l’ RKS 169
ct 3 ° l i n e abside à l ’O. (fig. i , c). L ’addition du chevet est une nécessité liturgique et
n’ exige aucun commentaire. Quant à l’addition de l’abside 0 ., elle pouvait être nécessitée
par le fait que Germigny était en réalité une chapelle palatine, construite par l’évêque
Théodulphe, émule de Charlem agne; cette abside 0 . pouvait servir de loge pour Théo-
dulphe, exactement comme à Aix il y avait une loge pour l’empereur, face à l’autel.
Seconde période (environ 8 5 /i-8 6 6 ). Après la mort de Théodulphe, la loge-abside
ne parut plus nécessaire. La loge a été transformée en entrée principale, précédée d ’ un
porche. Le tracé curviligne de l’abside a été changé en pans coupés, pour un meilleur
placement de la porte. Simultanément ont été ajoutées ou complètement transformées les
absides latérales, peut-être dans le désir de gagner de l’espace dans l’oratoire de jadis,
devenu église prieurale. L ’image des quatre-feuilles rayonnants a inspiré les constructeurs
de la seconde période, d ’autant plus que la loge de Théodulphe faisant face au chevet
avait rom pu déjà l’équilibre du carré et pouvait suggérer un schéma complètement
rayonnant. Mais le quatre-feuilles obtenu grâce à ces transformations n est pas orga
nique. L ’oratoire de Germigny doit être surtout comparé aux édifices carrés à neuf com
partim ents et à lanterne ou à deux absides opposées. Mais cette comparaison soulève
d ’autres problèmes qui débordent le cadre de ces notes.
A. KnvrcHvrHUN.
P la n c h e L Y
11 1!
• 1 1 •
:-i- 1 1 •
A r c rïm et/r/'*,
A rc for*mere. \f
Is ri
A
n n
Porte prj'm/1 /Vé.
ANDRÉ GRABAR
(') J. IU reht, L ’art pré-roman, Paris, 1 q 3 8 , voir index, et surtout : Germigny-des-Prés, dans Congrès
archéologiques de France, XCIII* session, Orléans, 19 8 0 , p. 5 3 4 - 5 6 8 .
(î) H. E. d e l M e d i c o , La mosa'fjne de l ’abside orientale à Germigny-des-Prés, d a n s Mon. P io l, 19 A 1.
p. 81 el suiv.
Par Delton, en 18 & 1 *, par Fournier, en 1 8 6 9 ; par Lisch, en 1 8 7 3 : Hubert, /or. c't. (Congrès
archéologiques), fig. 10 , 1 1 , i a .
{4) M alheureusement, il s’ agit d’ une reconstilution. A ma connaissance aucun document graphique
ne fixe l ’état des mosaïques de i’arcade aveugle de l’abside, telles q u ’elles furent découvertes sous le
badigeon, en 1 8 6 9 .
C A I l J O S A H U IK O I. O C U JI K S
Les originaux de ces aquarelles sont conservés au Grand Séminaire d ’ Orléans. Nous saisis
sons cette occasion pour remercier M. le Supérieur du Grand Séminaire de nous avoir autorisé à
photographier ces documents et à reproduire ces clichés dans le présent mémoire.
LES MOSAÏQl KS DE GfcRVIJGNY-DES-l'RKS 173
figures angeliques plus grandes qui adorent l’Arche. Des eaux(?) s’étendent au-devant de
celle-ci (pl. LYIIl-LYIX ).
Une inscription versifiée, d un genre typique pour les tititlî des décorations d ’églises
carolingiennes, court le long du cadre de cette mosaïque principale, et centrale, topogra
phiquem ent. D une façon contournée, chère aux mécènes de cet art aristocratique, elle
pretend expliquer le sens des mosaïques et de la démarche pieuse de Théodulphe, leur
fondateur Mais comme, à mon avis, cette inscription se rapporte à l’ensemble du décor
en m osaïques et non pas seulement au panneau de la conque, rappelons d’abord les sujets
des m osaïques disparues après 1 8 7 3 , qui se trouvaient au-devant de cette voûte et de son
inscription. On y voyait, en effet, sur le tympan, des plantes alignées qui avaient la forme de
grandes feuilles dressées posées les unes sur les autres; et au-dessus de ces feuilles, sur
un fond clair (l’aquarelle le fait crémeux et rosâtre agrémenté de groupes de points foncés),
des rinceaux fins et — tout en haut — une couronne tressée suspendue ( pl. LX, 1 ). Quant
au berceau attenant, il était occupé par une paire de grands chérubins à six ailes
(pl. L Y , ‘ï ). Comme je l ’avais rappelé, l’aquarelle Fournier ne montre que la partie infé
rieure d ’une seule de ces figures de chérubins: mais comme il s’agit de l’extrémité de
î ’un des versants d ’une voûte en berceau dont l’axe coïncide avec l’axe de l’église, devant
son abside, on ne saurait reconstituer la mosaïque entière de cette voûte q u ’en admet
tant q u ’il y avait deux chérubins symétriques, qui devaient se toucher par leurs têtes, au
sommet du berceau, et qui posaient leurs pieds sur les deux bords inférieurs de la voûte;
la m ême ordonnance symétrique doit être admise pour les motifs floraux dont il sera
question maintenant. En effet, de part et d’autre des chérubins, deux rinceaux à grandes
feuilles sortent de vases ansés et se déploient symétriquement, dans le sens de la hauteur.
Ils occupaient probablem ent toute la surface de la voûte autour des chérubins.
Selon moi, toutes ces images, y compris les ornements, servaient à illustrer un seul et
même sujet, celui q u ’évoque le titulus : le Sanctuaire ou Temple idéal qui s’ élève au milieu
d ’un Paradis, et qui est une image de Dieu, comme le rappelle d ’ailleurs la présence des
anges et des chérubins qui montent la garde à ses côtés. Le litulus nous invite à adopter
cette explication, lorsqu ’il nous engage à reconnaître, dans le testamenti... area Dei, Yoracu-
lum sanctum, c’est-à-dire, le temple de Jérusalem et, par là, TEglise chrétienne. Tandis que,
dans sa deuxième partie, le même titulus nous fait comprendre que cette image sym bolique
figure Dieu : c’est en la regardant, dit-il, q u ’on pourrait adresser ses prières pour le fon
dateur de l ’église, Théodulphe, au tonaniem, c’est-à-dire au maître des cieux. Nul doute,
en effet, quant à la signification de ce terme qui désigne Dieu dans le langage précieux
des poètes carolingiens. Un peu avant Germigny, un autre titulus qui emploie cette même
expression fut tracé sur un m ur de l’église abbatiale de Gorze en Lorraine (7 6 5 ) [et rep ro
duit par Alcuin] auprès d ’ une mosaïque qui figurait une majesté divine : un C hrist-juge
trônant encadré par des séraphins et des chérubins : Hoc sedet arce Deus index, niloris
imago. Ilic seraphim fulgent, dotnini sub amove cahutes, IIoc inter cherubim vohlant arcana
lonantis II n est pas douteux que, à Germ igny aussi, le tornrn n’est autre que Dieu, et
étant donné l’emplacement de la mosaïque (dans la conque), où l’image anthropom orphe de
Dieu et de sa Majesté apparaît le plus souvent, c’est bien la Majesté divine q ue rem place
l ’Arche adorée par les anges ('JK
Cette équivalence iconographique est-elle particulière à la m osaïque de Germ igny?
Elle l’est dans la m esure où une image de l ’Arche est fixée dans une abside, pour y rem placer
une représentation habituelle de Dieu Mais en lui-même le procédé qui consiste à rem pla
cer l’image anthropom orphe de Dieu par une figuration sym bolique, dans le chœur des
églises, nous est connue d ’après plusieurs m osaïques de pavement du vie et vu* siècle,
en Transjordanie. Le pavement du chœur y a p our image principale, indifférem m ent, le
Temple de Jérusalem (pl. LXY, a ) , son autel et les animaux qui vont y être immolés
(pl. LX, 1 ) , l ’Arbre de Vie qui a ses branches pliées de façon à évoquer la croix, ou
l ’Agneau devant l ’A r b r e ^ .
Les arbres d ’un jardin paradisiaque encadrent cette image centrale, quelle qu’elle soit,
parce qu’elles ont toutes la même signification : ce sont des évocations de la Nouvelle
Jérusalem chrétienne. En Transjordanie, où l ’iconographie anthropom orphe d ’inspiration
grecque pénétrait difficilement et où l ’image de la croix en particulier sem ble avoir ren
contré une hostilité ouverte chez les Juifs, même convertis au christianism e, cette im agerie
un peu herm étique s’explique fort bien. Et cela d ’autant plus que les éléments de l ’icono
graphie moins compromettante dont on s’est servi en même temps, étaient em pruntés
principalem ent aux thèmes bibliques et p e u t-être' même à des types constitués de
l ’iconographie juive (images du Tem ple et des lum inaires qui l’encadrent, de l’autel,
des animaux destinés aux holocaustes, des plantes du Paradis) ( K
Mais dans la deuxième moitié du premier millénaire, (jui a vu la méfiance vis-à-vis des
images religieuses gagner tant de milieux différents, les représentations sym boliques de
1 hglise-Paradis n étaient point limitées a la Palestine, ni aux pays sémitiques en général.
Avant I intervention des Iconodoules de la fin du vm® ou du ix® siècle, le chœur de Sainte-
Sophic de Salonique n était decore que d ’une croix s e u le ^ . Les mosaïques du chœur
de 1 eglise de la Dorm ilion à INicee avaient été également transformées par les orthodoxes
après la victoire sur les Iconoclastes^ A l origine, là aussi, l’abside n’offrait que l’image
d une croix, tandis que dans la voûte du chœur, autour de Dieu remplacé par son trône
vide (Hetimasie), on ne voyait que des anges. Partout, dans ces exemples, orientaux et
grecs, les m osaïques du chœur (murales et de pavements) figuraient le royaume céleste
et, partout, celui-ci n était figuré que par des images symboliques et des représentations
d ’anges, ce qui rejoint, en principe, le programme iconographique des mosaïques du chœur
de Germ igny. Les tendances non pas iconoclastes, mais iconophobes (partiellement inspi
rées par un antagonisme politique à l’égard de lîyzance, qui, autour de 8 o o , sc faisait
cham pion de îa cause des images chrétiennes et de leur culte) de Charlemagne et de son
entourage ont pu contribuer au choix du thème et de l’iconographie des mosaïques de Ger
m igny. Mais on peut ne pas insister sur l’ hypothèse d’ une pareille intention, car — on vient
de le rappeler — le thème de l’iconographie de ces mosaïques rejoignent d ’autres monu
m ents de l ’époque qui n’étaient nullement carolingiens.
Le titulus parle de TArche, et sur la mosaïque on en voit une image certaine. On est donc
parfaitem ent justifié en disant que la mosaïque de l’abside figure l’Arche d ’alliance
bibliqu e. Mais le titulus assimile également l’Arche au Tem ple, et l’iconographie reflète
cette interprétation sym bolique du sujet. A preuve, la présence des difl’érentes images angé
liques. Deux seulem ent de celles-ci — les figurines très petites et dorées qui se tiennent sur
î ’Arche — appartiennent à l’Arche elle-même. Ce sont les chérubins qui en décoraient les
deux extrémités, et l ’Exode (a 5 , 17-2 0 ) n’en signale effectivement que deux. Aussi,
lorsque à Germ igny, on voit deux autres paires d ’anges et de chérubins (conque et voûte
devant Tabside), il est évident q u ’on se trouve en présence d’ un thème qui dépasse celui
de l ’Arche. Pour l ’identifier, il suffit de relire 3 Rois, 6, 2 3 et suivants, où il est question
de la décoration du Tem ple de Salomon. Selon ce texte, l’Arche fut fixée dans le Saint des
Saints et deux images de chérubins en bois doré (dix pieds de haut) furent confectionnées
p our encadrer l ’Arche (avec les deux autres chérubins plus petites qui la surmontaient)
[6, 2 3 ]. D ’autres chérubins, des palmiers et des fleurs furent peints sur les murs du Tem ple
(6 ,2 9 ), e l ces derniers sujets furent répétés sur les portes du Saint des Saints (6, 3 5 ).
C ’est là certainem ent la clé du programme iconographique des mosaïques de Germigny*
rapprocher du croissant et des étoiles sur la Sedîa (v. notre élude, dans ce même recueil). V oir
aussi la fresque de la calaeombe chrétienne (J. W i l p e r t , Malereien der Katakomben, pl. 318 , a) q u i
figure des orantsau milieu d ’ un jardin fleuri, sous un ciel où brillent le croissant de la lune et des etoiles.
C h . D ie h l , M . L e Toi’RNeau e t H . S aladin , Les monuments chrétiens de Salonique, Paris, 1 9 1 8 ,
p. 1 3 8 - i 39 , % . 5 9 , pl. XLIV.
T h. iS c h m i t , D ie Koimesiskirche von N ikaîa, Berlin-Leipzig, 1 9 3 7 5 pl* . ’ * G r ég o ir e, dans
Mélanges II. Pirenne, I, p. 1 7 1 et suiv. et Byzantion, V, 19 3 9 , p. 3 8 7 et suiv.
l.K
176 CA.ll IE RS A R C H É O L O G I Q U E S
dans leur ensemble : non seulement, l’Arche avec ses chérubins y est entourée de deux
anges d ’abord (conque), et de deux chérubins ensuite (voûte devant abside), pour im iter
le Tem ple de Salomon ou son Saint des Saints ; mais les plantes singulières qui s’élèvent
derrière les arcs du m ur de l ’abside, sur le tympan au-dessus de l’abside et sur la voûte
devant le tympan, c’est-à-dire tout autour de l ’Arche, évoquent sûrem ent les palm iers et
les fleurs de la décoration des murs et des portes du Saint des Saints au Tem ple de Salo
mon, qui est en même tem ps la Jérusalem nouvelle des Chrétiens
Dans une autre étude du présent recueil, nous traitons de certains m onum ents, pas
très éloignés chronologiquem ent de Germ igny, qui nous offrent des images du même thème,
distinctes mais apparentées. Je n ’ai donc pas à revenir sur ces œuvres, et il suffira q u ’en
renvoyant à mon article sur le Sedia di San Marco, je rappelle l’équivalence religieuse de
toutes ces images du Paradis-jardin au m ilieu duquel, à côté de plantes et parfois d ’ani
maux, et des quatre fleuves avec leur pendant chrétien, les quatre évangélistes, s’élève
l ’un des sym boles majeurs chrétiens qui, à cette époque, figuraient à la fois — non sans
nuances certes — soit l ’Eglise, soit Sion, soit la Jérusalem céleste. Les m osaïques paléo
chrétiennes de Transjordanie et de Grèce ^ nous ont m ontré ces images appliquées à la
décoration des pavements du chœ ur; Germ igny nous apprend que la G aule a suivi des
programm es iconographiques sem blables et a connu l ’usage d ’une localisation de ces
images dans le chœ ur; mais, au lieu du pavement, Germ igny les fixe sur les voûtes du
chœur, et c’est cela q u ’il convient d ’ajouter aux observations relatives à ce thèm e réunies
dans l ’article sur la Sedia. L e cas de Germigny ressem ble d ’ailleurs aux ordonnances de
la décoration du chœur de certaines églises byzantines du v ii* -ix * siècle que nous avons
citées (Salonique, IN'icée). On aperçoit cependant la différence q ue présentent les ver
sions byzantines : la Jérusalem ou le Paradis n ’y sont figurés que par des sym boles tels
que la croix ou le trône, et surtout par des figures d’anges (les sym boles qui se servent
des motifs architecturaux, animaliers ou floraux tendaient à disparaître à Byzance : le
Paradis ou la Sion des décorations du chœur des églises byzantines n ’est ni jard in , ni
architecture, ni objet de culte b ibliqu e (comme dans l ’art paléochrétien et à Germ igny),
mais la comm unauté des saints réunis et assimilés aux anges. La décoration du chœur,
dans les églises byzantines après le ixe siècle, ne connaîtra q ue cela mais cette ten
dance s’affirme déjà à Nicée, qui n’est postérieure à Germ igny que d ’un dem i-siècle (peu
l '5 A l’époque de Germ igny, Raban Maur a fait confectionner un reliquaire en bois doré qui im itait
l ’Arche d ’ alliance et ses chérubins (E. L e s n e , La propriété ecclésiastique en France, IIT» p. a 08, avec b ib lio
graphie) : cet épisode justifie l’extension au Nouveau Testam ent de la sym bolique de l ’Arche que nous
venons de proposer pour Germ igny.: les nombreuses reliques-que Raban Maur m it dans son coffret
figuraient l ’Eglise et le sang des martyrs ayant scellé la Nouvelle Alliance. Le canon 5 du synode pro
vincial de Braga tenu en 6 7 5 , compare les reliquaires à l ’Arche d ’ alliance : H e f e l e - L e c l e r c q , Ilist.
des conciles, 111, p . 3 i 5 . On noiera que. plus rigoriste que les artistes palestinien» et surtout que
les artistes occidentaux d’époque romane, le décorateur de Germ igny ne représenta aucun des animaux
qui, selon la Bible, complétaient la décorai ion du Temple de Salomon.
(ï) Voir E. K i t z i n g e h , dans Actes du V I * Congrès Internat . d'Etudes byzantines, II, Paris, 19 5 1, p. 209-
aa 3 , et dans Dumbarton Oak* Pa fe rs, n° 6, 1 9 5 1 , p. 8 3 - i a ü .
Je n ’ai pas à évoquer ici les sujets eucharistiques qui figurent égalem ent sur les m urs d u chœur
des églises byzantines.
I.ES MOSAÏQUES DK CERMHJNY-DES-PRÉS 177
âpres 8 A 3 ). Quant aux églises de 1 Occident, après les Carolingiens, je n ’y vois pas, dans
le décor des voûtes et parois du chœur, de prolongem ent au thème paradisiaque de
Germ igny Par contre, la mosaïque de pavement de Cruas (Ardèche), en 10 9 8
encore, situe au chœur de 1 église un thème spécifiquement paradisiaque : Enoch et Elie
dans le jardin de T E d e n ^ (pi LXIV, a ). Mais cet exemple est exceptionnel et, à en
ju g e r d après le style, il s’agit d un reflet de l ’art mozarabe et par conséquent d ’une image
d ’origine plus ancienne et d ’inspiration orientale.
Les considérations qui précèdent établissent certains liens de parenté entre les mosaïques
de Germ igny et d autres mosaïques, presque toutes plus anciennes et généralem ent orien
tales. Mais si les pavements de Palestine (Transjordanie) s’apparentent le plus à Germigny,
quant a leur programme religieux et à leur méthode d ’expression sym bolique, les œuvres
palestiniennes que nous connaissons sont fort différentes quant à la forme et à la technique
(ce sont des pavem ents!).
Du côté byzantin, la parenté des sujets et de l ’iconographie est certainement plus loin
taine, mais les quelques rapprochem ents que nous avons faits plus haut et que nous serons
en m esure de faire plus loin concernent des mosaïques m urales, et c’est ce qui fait leur
intérêt. M. Del Medico, qui n ’a pas procédé à ces rapprochements mais qui avait analysé la
form e et la technique des mosaïques de Germigny' avait conclu à une origine byzantine de
celles-ci. Mais la grande rareté des mosaïques byzantines contemporaines de Germigny
ne nous perm et pas de mesurer exactement le degré de parenté de l’œuvre carolingienne
et des m odèles byzantins supposés. Le seul domaine où une conclusion me semble permise,
celui de l ’iconographie, n ’est pas favorable à l ’hypothèse d ’une parenté étroite. En effet,
l ’art byzantin ne figure ni l’Arche d ’alliance ni les chérubins qui la surm ontaient de la
m anière adoptée par le mosaïste de Germigny. J’écarte les images narratives qui figurent
i’Arche portée par les Lévites (quoique là aussi la forme de l ’Arche est différente; voir
notam m ent le couvercle à dos d ’âne qui n’existe pas à Germigny ; sur notre m osaïque, l ’Arche
sem ble ouverte) et je compare à Germigny celles des images byzantines qui, comme notre
m osaïque, font de l ’Arche elle-même leur sujet principal. Dans l’art byzantin, il se présente
alors en forme de boîte rectangulaire développée dans le sens de la hauteur et couronnée
par un arc Il n ’est pas douteux que celte iconographie est d ’origine juive : on la trouve
(t) La décoration peinte du chœur dans les églises romanes relève surtout les images du Christ
en Majesté et des apôtres, c’est-à-dire le thème de la «communauté des saints » réunis autour du Sei
gneur (autre variante du thème central des décorations d’ église byzantines). A noter cependant les
fresques de Nohe-Dmnc-la-Grande à Poitiers, où le Christ est entouré d ’apôtres assis, et ce tri
bunal du Jugem ent Dernier est complété par deux images des anges encadrant les élus au paradis
(P . D e s c h a m p s et M. Thibodt, Les peintures murales en France, Paris, 1 9 0 1 , p. 9Û-9 7 , fig. 3 o). Le peintre
de P oitiers a dô s’inspirer d ’images paradisiaques du chœur des églises beaucoup plus anciennes.
^ K kyoil, À rchit. romane du M idi de la France, III, pl. 78.
Exem ples : m iniatures dans le Cosinas Indicopleustes de la Bibl. \ a tica re, p. i i g > dans les
Bibles illustrées : Pentateuque du Sérail, éd. Or.spensky, pl. XXIV, 1 3 7 , cf. pl. XXX\ I, 1 6 1 , et dans les
Psautiers illustrés : le type en sarcophage avec toit à dos d a n e apparaît seulem ent dans les scènes
narra lives (Arche portée par les Lévites), l i se généralise seulement au xiv* siècle : fresques à Curtea
de Arges, en V alachie; à Lesnovo et à Grat'anira en Macédoine ; N. B e l a e v , dans Mélanges Th. (Mu-
pen shj (I, a, 1 g 3 o, p. 3 15 el suiv., pi X LY 1). A Curtea de Arges, comme à Germigny, l’arche est repré-
j5 A
178 CAHI ERS ARCHÉOLOGI QUES
déjà sur les fresques de la synagogue de Doura, et sur plusieurs images juives citées
plus haut (p. 17/1, n. 5 ). Des m osaïques de pavement chrétiennes en Transjordanie
(pl. L \ V , 1) pourraient servir d ’interm édiaire entre les m odèles ju ifs et les figurations
byzantines.
Les chérubins qui se tiennent sur r Arche, à Germ igny (pl. L V 1IÎ, a ) , ne ressem blent
pas davantage aux chérubins qui figurent à la même place dans les peintures byzantines :
celles-ci m ontrent des êtres angéliques à six ailes sym étriques avec des tètes repré
sentées de face (voir les exemples ci-dessus).
L ’iconographie de l 1Arche, à Germ igny, s’approche davantage de la version carolin
g ie n n e ^ , sans que je puisse cependant y relever une image tout à fait analogue.
Il serait plus facile de trouver, à Byzance, des m osaïques qui par leur technique et leur
style rappelleraient les images angéliques de Germ igny. Ainsi, il existe une ressem blance
entre les visages — assez bien conservés — des deux grands anges de Germ igny (pl. L 1X,
1-9) et celui de l ’archange qui. à Sainte-Sophie de Constantinople, apparaît sur la
mosaïque au-dessus de l ’entrée principale, auprès de l ’em pereur anonym e agenouillé
Su r cette même image byzantine, et, m ieux, sur la m osaïque de la coupole de Sainte-
Sophie de Salonique on observe un autre détail q u ’on retrouve à Germ igny : des mains
trop grandes et d ’un dessin schém atique et sommaire. Le prem ier de ces m onum ents
byzantins se place aux environs de 9 0 0 ; le second est de date incertaine, mais il serait
du ixe siècle selon l ’hypothèse la plus vraisem blable.
Cependant on ne devrait pas insister sur cette ressem blance par les maladresses. Des
m osaïstes autres que byzantins ont traité la figure hum aine, et en particulier les bras
et les mains des personnages, de façon analogue. Ainsi, à Rome, où l ’on en relève des exem
ples, sur les m osaïques du ixe siècle : San la Maria in Domnica, Santa Prassede, San
Marco, etc. En d’autres termes, que les mosaïcistes qui ont travaillé à Germ igny aient été
appelés de Byzance ou de Borne, ils auraient pu se rendre coupables des mêmes m aladresses
que nous relevons sur notre mosaïque carolingienne. Par contre, j ’exclurais entièrem ent
Byzance comme lieu d ’origine d ’un procédé technique singulier de la m osaïque de Germi
gny : l ’emploi de fragm ents de m arbres polychrom es et de nacre beaucoup plus grands
que les cubes habituels des mosaïques (notamment pour les ornem ents de la bordure) :
le m élange de cet opus sectile et de la m osaïque proprem ent dite qui en résulte me parait
contraire à l’usage byzantin. Par contre, les praticiens d ’Italie connaissaient cet art abà-
senlee daas l ’abside du chœur. Je n’en connais p«ts d'au lie exemple* La com position y fait partie
d ’ une figuration m ariologique (Arche symbole de la Vierge).
L ’exemple le plus apparenté est probablem ent celui du Sacram cntaire de Metz (Paris, lat. 1 1 k 1 ;
Boiskt, lue, cil.} pl. C X X lll, 11) : comme à Germ igny, l’ Arche est un coffret posé de biais et muni de deux
barres pour les porteurs; mais il a un to it en dos d ’ âne, et au centre, on voit un séraphin avec six ailes.
T h . W iiiT T E M O R E , The Mosaics o f Sainte Sophia at h la m b u l, I, 1 9 3 3 , pl. X VI (ange), pl. X II el suiv.
(mains disproportionnées, d ’ un dessin schém atique et m aladroit).
D i k i i l , Lu T o ü r m î a ü et Inc. cil., pl. X LV II, I (saint Pierre, main énorm e), pl. X L Y 1, î - a
{diversapôtres, mains et surtout pieds disproportionnés), cf. fig. 6 3 * 6 7 .
W Pieds et mains disproportionnés et d ’un dessin m aladroit : V a n B e r c h e m et C l o u z o t , Mosaïques
chrétiennex, fig. 9 9 2 (Santa Prassede), 3 o 6 (San Zeno).
LES MOSAÏQUES DB GERMIGNV-DES-PBES 179
Une miniature mozarabe du xe siècle traite un sujet apparenté à celui des mosaïques de
Germ igny : c est une image (pl. LXIlf ), dans le Codex Vigilanm de l’Escorial (terminé à
Albe Ida dans la Rioja, en 9 76 ) ^ ' sous un arc qui figure le firmament, avec soleil, lune
et étoiles, un grand arbre se dresse au milieu de l’im age; il est flanqué de deux autres
arbres et de deux chérubins symétriques qui brandissent chacun un ram eau; au pied
de l ’arbre, partant d ’un lac circulaire, coulent quatre ruisseaux : ces ruisseaux se déver
sent dans deux cours d ’eau plus grands. Il s’agit probablem ent de la mer qui circonscrit
ainsi toute l ’image et longe l ’arc du ciel. Le texte q u ’accompagne la miniature, ainsi
q u ’une légende à côté de celle-ci spécifient conjointement q u ’il s ’agit d’ une image de
l Eden ou Paradis et de ses quatre fleuves. C’est un thème voisin de ceux de Germ igny
et des autres mosaïques dans les chœurs des églises que nous avons rappelées tout à
l’ heure, et on peut se demander si la miniature du Vlgïïamis ne s’inspire pas d ’ une
m osaïque d ’abside. Son témoignage nous est particulièrem ent précieux parce que, non
seulem ent le sujet, mais aussi deux motifs précis, y rappellent Germigny : l’ icono
graphie des deux chérubins, aux six ailes symétriques, et la présence de deux plantes
identiques, de part et d ’autre des chérubins. Aux deux plantes en candélabres de la
m iniature correspondent, à Germigny, deux rinceaux qui sortent de vases symétriques et
se déploient verticalement, eux aussi. De petites feuilles ou fleurs se détachent symétri
quem ent des grandes feuilles du rinceau, comme sur la miniature.
Voici par conséquent un deuxième monument de style mozarabe (cf. la mosaïque de
Cruas, supra) qui s’apparente à notre monument carolingien. D’autres motifs, à Germigny,
nous conduisent également en Espagne. C ’est d ’abord le cadre en marches d ’escalier qui
suit le bord inférieur de la mosaïque, sur le tympan Est, au-dessus de l ’abside (pl. I A ,
1 ). Il s’agit d ’une m oulure, en stuc ou en pierre, dont seul nous intéresse ici le tracé.
Dérivé des créneaux achéménides, le m otif du merlon en marches d ’escalier a connu un
succès durable dans l ’art sassanide puis musulman. En Espagne, des châteaux, des
enceintes de villes, des tours d ’églises et de m osquées, et des églises et leurs images
peintes et sculptées, sont couronnées fréquemment de créneaux de ce genre. Les décora
teurs des édifices sassanides et islamiques se saisissent également de ce motif, qui appa
raît ainsi au-dessus de la porte de San Esteban, sur la façade de la Grande Mosquee de
C o r d o u e ^ (pl. L X , 2). Quel q u ’en ait été l’usage décoratif initial, sur cette partie de
la m osquée, on y trouve aujourd’hui, répété deux fois, un cadre en marches d escalier
rempli d ’un tapis de rinceaux sculptés. Â Germigny, le même m otif délimité également
un champ ornem enté, avec cette différence cependant, que les ornem ents tapissent la sur
face non pas au-deçii, mais au-delà du cadre en marches d ’escalier.
Le champ ornem enté — nous l’avons dit — offre trois motifs : au m ilieu et en haut, c’est
une couronne suspendue (l’aquarelle de F ournier ne permet pas d ’ en distinguer la forme
précise ni la façon dont elle est suspendue) W . A cette couronne se rattachent, sym étri
quem ent, les tiges d ’un m aigre rinceau qui suit le bord du tympan. Un autre thème orne
mental s’étend entre le rinceau et le cadre m ouluré en marches d ’escalier. Il suit le tracé
de ce cadre et le reproduit même par un trait q u i sépare cet ornem ent du rinceau voisin.
Quant à cet ornem ent lui-même, il est composé de grosses feuilles à cinq et à sept lobes,
dressées les unes à côté et au-dessus des autres. Il s’agit sûrem ent d ’une transposition
en m osaïques d ’un m otif qui est fréquent sur les reliefs n lom bards» d ’ I t a l i e o ù des
feuilles dressées très sem blables rem placent les images d ’arbres entiers et notam ment, di*
palmiers et de cyprès (par exemple, de part et d ’autre d ’une croix) W . A Germ igny aussi,
c’est un « p arad is55 planté d ’arbres qui entoure l ’Arche sacrée de l ’abside, et cela nous
ramène au thème de l ’objet sacré (arbre, croix, tem ple, arche, tabernacle) installé au
Paradis. Tandis que d ’ordinaire, les arches paradisiaques voisinent avec l’image du sacrum
sur le même panneau, à Germ igny, ils se dressent sur les panneaux voisins (tym pan et
voûte devant l ’abside), mais cette ordonnance ne com prom et point l'u n ité du thèm e de
toutes les m osaïques de la chapelle.
C ’est le même jardin paradisiaque qui, sous une forme plus abstraite, est le véritable
sujet d ’une dernière partie de ce décor : les pRnneaux en m osaïque qui tapissent le m ur
de l ’abside sous une arcade aveugle. A ujourd’hui, on n ’y distingue que quelqu es pauvres
restes de cubes de couleur et d ’o r; mais l ’aquarelle de Lisch, qui rem onte à 1 8 7 3 environ,
permet d’im aginer les beaux ornem ents qui les décoraient (pl. L X I, * ). C ’était, sous
chaque arc, une grande palm ette rigide qui m ontre un som ptueux fleuron au b o u t d ’un
lo n g tronc vertical, et autour de ce m otif principal, quelques rinceaux m aigres, sem blables
à ceux du tympan. Ces palm ettes de Germ igny sont célèbres à cause de leu r caractère
oriental, dont nous pouvons m aintenant préciser l ’origine b ien m ieux q u ’autrefois. En
effet, c’est l ’art omeyyade, de Syrie, contem porain de Germ igny, qui offre les exem ples les
plus apparentés de ce m otif (mosaïques de la M osquée du Rocher, à Jérusalem (^} stucs de
Qasr el-H eir)^ \ et inversement, en dehors de la Syrie omeyyade, nul m onum ent ne
,l) Je crois reconnaître une couronne en forme d ’anneau assez large, q u i ressem ble peu à une
couronne m étallique et pourrait être plutôt tressée avec des feuilles.
Exemples de kfeuilles dressées» dans l’art lom bard, principalem ent du vm '-ix* siècle, sur les
cbapitaux et reliefs (toujours en sculpture) : R. C attakeo, VArchitecture en Italie du n * au x i ' siècle,
Venise, 1 8 9 1 , fîg. 3 6 , 7Ü, 7 8 , 7 9 , 9 3 a, 9 7 , 1 26 , 1 6 7 , etc. P. T oescà , Storia delVarte italiana, I, 1 927»
fig. 1 6 8 , 1 7 ^ , 1 7 5 , a 5 4 , ü 5 6 , 9 6 0 , etc.
Preuve que ces «feuilles dressées» rem placent des arbres entiers : dans bien des cas, on les voit
placées sous un arc, tou t comme la croix, par exem ple, C ittaivko , loc. cit., fig. 9 7 ; T oksca, loc. cit.,
fig. 1 7 5 . Dans l’art omeyyade égalem ent, des arbres-palm ettes se dressent sous des arcades (v. infret).
(4> Marguerite van B krchem, dans C keswell, Early Muslim Architecture, I, Oxford, 1 9 8 9 , pl. V et
suiv.
(S) D. Schlumberger, dans S y ria , XX, 1 9 8 9 , pl. X L Y I, 3 .
I.KS MOSAÏQl ES DE GERMIGNY-DES-IMIKS 181
tronc droit, et aucune n ’offre d ’ornem ent com parable à celui de la peinture de la
sacristie.
Lisch a-t-il observé attentivem ent les restes des m osaïques sur tous les panneaux de
l ’arcade? Y en avait-il un q u ’il n ’aurait pas relevé et qui offrait le m otif plus abstrait que
nous m ontre la peinture de la sacristie? Ou bien cette peinture reproduit-elle le décor
d’une autre niche quelconque, qui se trouvait en dehors de l’abside, par exem ple, dans
la tour? Nous ne pouvons répondre à ces questions, et nous ignorons même, au fond, si
la peinture conservée à la sacristie, au lieu d ’être une copie d ’une m osaïque disparue,
n’est pas un projet m oderne de m osaïque, pour une nichc quelconque? Cependant, sans
l’exclure entièrem ent, j ’écarterais cette dernière hypothèse, à cause du dessin ornem ental
que présente cette peinture. En effet, on y trouve rapprochés, des m otifs qui, les uns, appa
raissent sur les parties conservées du décor de Germ igny (étoiles-octogones, avec pétales
en amande, comme sur la m osaïque absidale), et les autres ne trouvent aucune analogie
parm i les ornem ents conservés de Germ igny (rinceaux d ’un type particulier, très abstrait).
On imagine difficilement un peintre-décorateur m oderne créant lui-m ême cette ornem enta
tion particulière. Il me paraît donc plus plausible de reconnaître en elle une copie-recons-
titution d ’une m osaïque du ix° siècle dont l ’original a disparu après 1 8 7 3 . Nous n ’avons
pas à revenir sur le m otif de l ’étoile qui se répète trois fois sur la peinture de la sacristie,
car nous l ’avons comparé, déjà, aux étoiles-octogones de la m osaïque absidale et, par
elles, aux figurations omeyyades. Quant aux rinceaux très schém atiques, en principe, c’est
une plante unique qui se déploie sym étriquem ent depuis la base, avec ses deux feuilles-
volutes, et ju sq u ’au sommet formé par un gros bouton pointu (sur lequ el se profilent
les bords superposés des pétales enroulés q u ’il renferm e). Sans pouvoir citer d ’exem ples de
compositions tout à fait semblables, je note parmi les reliefs plats, sur m arbre, de la M osquée
du Rocher à Jérusalem ( 6 9 1 -6 9 2 ) des ornem ents assez voisinsW (pl. L X II, 3 ), et
d ’autre part, une m osaïque du x ' siècle sur le m ihrab de la Grande M osquée de Cor-
doue qui combine les motifs de l ’étoile-fleuron (pétales en amande) avec u n rinceau
symétrique très schématisé
En récapitulant, on se rend compte du nom bre élevé des motifs d ’inspiration m usul
mane que nous avons pu relever à Germ igny. La plupart des m onum ents islam iques qui
nous ont permis de le constater sont omeyyades et par conséquent contem porains de
Germigny. Etant donné que la Syrie (avec la Palestine) conserve la m ajorité des œuvres
connues de l ’art omeyyade, il est naturel que ces analogies ont pu être observées en Syrie
arabe plus souvent q u ’ailleurs et notam ment en Espagne. Mais les m onum ents islam iques
anciens de l ’Espagne tiennent une bonne place, eux aussi, parmi les œuvres décoratives
apparentées aux motifs ornem entaux de nos m osaïques.
A elles seuls les données archéologiques ne nous perm ettent pas de décider si les nom
breux reflets de l ’art musulman à Germ igny tém oignent d ’une influence directe de la
Syrie omeyyade, foyer d ’art islam ique principal, à cette époque, ou de l’Espagne arabe,
autre loyer (1 art important et surtout voisin de îa Gauîe. Mais ce n’est pas l’origine
précise des mode!es islamiques des m osiïstes de Germigny qui im porte tellement, dans
i état présent de notre connaissance de 1 art du vine et ixe siècle. Car on ne connaît actuelle
m ent qu une faible partie de 1 œuvre omeyyade et de l ’œuvre artistique chrétienne de ce
temps, et on n a jamais relevé systématiquement les orientalismes dans le décor carolin
gien ni essayé d en préciser la nature et mesurer l’importance. C’est seulement après avoir
procédé à des etudes de ce genre et établi le bilan des rapports islamo-chrétiens dans
1 art du haut moyen age, q u ’on verra probablem ent de quelles parties du monde isla
m ique les arts chrétiens d ’Occident recevaient surtout des modèles, vers l’an 8 o o , et si
notam m ent l’Espagne a joué un rôle essentiel dans la transmission d ’ «islamismes» à
l ’art carolingien, avant d ’en fournir aux arts ottonien et roman. L e cas des mosaïques de
Germ igny se laissera éclaircir alors mieux q u ’il ne peut l’ètre maintenant, et on pourra dire
s’il est exact — comme cela semble actuellement — que ces mosaïques présentent plus
d ’orientalismes islamisants que n’importe quel autre monument chrétien de ce temps
(en dehors des œuvres mozarabes)? Car si cela devait se confirmer, on aura à faire valoir —
comme on l ’a fait déjà, mais prématurément — les raisons que le fondateur de Germigny a
pu avoir lui-même, pour m ultiplier les apports musulmans à l’art de sa v illa (1}. Nous
savons q u ’il avait à sa disposition des tissus de Perse et qu’il s’en servit pour enrichir des
m anuscrits précieux q u ’il faisait confectionner, telle la Bible qui est conservée au Trésor
de îa cathédrale du P u y (2). Les goûts et habitudes de Théodulphe ont pu contribuer,
évidem m ent, à m ultiplier les orientalismes islamisants et les échos des monuments
arabes d ’Espagne, dans le décor de Germigny. Mais ni les apports musulmans, ni les
influences arabes et mozarabes d ’Espagne ne se lim itaient à Germigny, à l’époque caro
lingienne. Et c’est pourquoi les orientalismes du décor en mosaïque que nous venons de
présenter ne seront expliqués véritablem ent que lorsqu’on sera mieux renseigné sur
l’apport général des arts contemporains de TO rient à l’œuvre de TEurope occidentale du
vn i# et ix6 siècle.
A. G rab ar.
2
Petits anges au-dessus de l’Arche. Mosaïque de la conque de l’ahside Est.
Gerinigny-des-Prés.
M osaïq ues d u m u r au-dessus .le l'a b s id e E s l ( d ’a p r è s F o u r n i e r ) .
ci
Mosaïques (fragm ents) dans la voûte devant l’abside Ksi (d ’après Fournier
Germigny-des-Prés.
Copie «l’une mosaïque, conservée dans la sacristie.
Germigny-des-Prés.
Planche IAN
1 2
Qasr el-Heir. Slues. Cordoue. (irande Mosquée. Reliefs.
16
1,V
PAR
HENRI STERN
(l) L . B r éh ier . Les mosaïques mérovingiennes (le Thiers, chins Mélanges littéraires publiés à l'occasion ilu
centenaire de la Faculté des lettres de Clermont-Ferrand, Pa ris , i 9 i o . p. 6 9 - 8 0 .
J. Q u ic h e r a t , d a n s Renie des Sociétés savantes des départements, 1 . 1, 1 8 6 5 , p. 1 8 9 , l ’ a b b é C r o s m e r ,
v o i r infra, p. 1 8 7 , n. 1 et E n l a r t , L'architecture religieuse en France, P a ris , 19 0 -2 . p . i 3 o et 7 0 7 .
C f. é g a l e m e n t Inventaire des mosaïques de la Gaule ( L a k .vve e t l li. w c i i k t , 1 9 0 9 ) , 11" 6 2 0 .
3 M. J. Ill Be r t , d a n s une c o m m u n ic a tio n faite à la S ocié té n at ionale «les Vntiq uaires «le F ra nce en
ma i 1 9 5 a , a a ttr ib u é c ette m osaïq u e, p o u r îles ra isons «le st y le , à la m ê m e é p o q u e q u e nous pro p oseron s.
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P lanciir L X A I V
TABLE DES MATIÈRES
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Cil. P i c a r d , Îa> trône vide d’Alexandre dans la cérémonie de Cymda et le cidte du trône vide à
travers le monde gréco-romain................................................................................................. .. .............. .. i
E . S . E t t i n g h a u s e n , Byzantine tiles from the basilica in the Tophajm Sarayi and Saint John o f
Studios......................................................................................................................................................................... 79
M elanges :