Cours de Droit Des Suretés
Cours de Droit Des Suretés
Cours de Droit Des Suretés
SURETES
PAR TRAORE TCHILOKELE DOMIAN
JURISTE PUBLICISTE SPECIALISTE EN DROIT DU MULTIMEDIA
A l’issue de ce cours, vous devez être à même d’identifier les suretés réelles et personnelles ainsi
que le régime applicable à chacune d’entre elles.
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TITRE 1 : LES SURETES PERSONNELLES
Une sureté personnelle est l’engagement d’une personne de répondre de l’obligation du débiteur
principal en cas de défaillance de celui ou à première demande du bénéficiaire de la garantie. L’on
distingue deux types : le cautionnement et la garantie autonome.
Objectifs spécifiques
Définir le cautionnement ainsi que ses caractères ;
Distinguer les sources du cautionnement ;
Déterminer les conditions de formation du cautionnement ;
Identifier les effets du cautionnement ;
Déceler les causes d’extinction du cautionnement.
I. Définition du cautionnement
Le cautionnement est un contrat par lequel une personne appelée caution s’engage envers le
créancier qui l’accepte, à exécuter l’obligation du débiteur en cas de défaillance de ce dernier. La
caution peut être une personne physique ou morale. On distingue plusieurs types de cautionnements :
le cautionnement simple, le cautionnement solidaire, le certificat de caution, le cautionnement réel et
le sous cautionnement.
A. Le cautionnement simple
Le cautionnement est dit simple lorsqu’à l’échéance le créancier est d’abord obligé de s’adresser au
débiteur et ce n’est qu’en cas d’insatisfaction qu’il se tourne vers la caution.
B. Le cautionnement solidaire
Le cautionnement est dit solidaire lorsque le débiteur principal et la caution sont tenus solidairement
de sorte que le créancier peut s’adresser à l’un ou à l’autre pour obtenir son paiement.
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C. Le cautionnement réel
Le cautionnement réel consiste pour la caution à limiter son obligation à la valeur de certains biens
précis donnés en garantie. Lorsque le bien donné en garantie est un immeuble, on parle de
cautionnement hypothécaire.
D. Le certificat de caution
Le certificateur de caution s’engage à l’égard du créancier à payer ce que doit la caution lorsque
celle-ci ne paie pas. Le certificat de caution s’analyse ainsi comme le cautionnement de la caution au
profit du créancier qui se prémunit par un cautionnement de second degré.
E. Le sous cautionnement
La sous-caution garantit, à la demande du débiteur, le recours que la caution aura contre celui-ci
après paiement. La sous caution est une caution comme les autres à la seule différence qu’elle n’a
aucune obligation envers le créancier
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B. Le cautionnement, un contrat unilatéral
Dans le cautionnement, seule la caution s’engage envers le créancier qui accepte, à payer la dette du
débiteur si ce dernier ne le fait pas. Le créancier quant à lui ne prend aucun engagement. Toutefois,
ce principe admet quelques aménagements. Conventionnellement, le cautionnement peut devenir
synallagmatique si les parties mettent des obligations à la charge du créancier. Légalement, le
créancier peut être tenu de certaines obligations.
1. Le consentement
Les parties au à la convention de cautionnement doivent manifester volontairement leur accord. Cet
accord doit être exempt de vices (erreur, dol ou violence) au risque de voir la convention frappée
d’une nullité relative.
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La caution doit avoir la capacité nécessaire pour se porter caution ce qui exclut le mineur non
émancipé et le majeur déclaré incapable.
S’agissant des pouvoirs, le cautionnement peut être souscrit par un mandataire dès lors que les
conditions du mandat sont réunies.
3. La solvabilité de la caution
La caution fournie doit être solvable ou au mieux présenter des garanties de solvabilité. Si elle ne
l’est pas, le créancier est en droit de refuser et dans ce cas, la loi permet à la caution de la remplacer
par une sûreté réelle.
La seule exception concerne le cas où le créancier a subordonné son consentement au contrat
principal à l’engagement d’une caution nommément désignée. Dans ce cas, la caution doit être
maintenue en dépit de son insolvabilité.
B. Conditions de forme
Le cautionnement ne se présume pas, quelle que soit la nature de l’obligation garantie. Il se prouve
par un acte comportant la signature de la caution et du créancier ainsi que la mention, écrite de la
main de la caution, en toutes lettres et en chiffres, de la somme maximale garantie couvrant le
principal, les intérêts et autres accessoires. En cas de différence, le cautionnement vaut pour la
somme exprimée en lettres.
Il en ressort que le cautionnement ne se présume pas et que l’écrit ne peut constituer qu’un moyen de
preuve à condition qu’il comporte la signature de la caution et du créancier ainsi que la mention
écrite de la main de celui-ci.
L’écrit peut être constitué par un acte sous seing privé ou par un acte notarié. Cet écrit comporte
généralement toutes les informations relatives aux parties et aux modalités du cautionnement.
Pour servir de moyen de preuve, l’écrit doit comporter les mentions exigées par l’article 14 précité :
la signature des deux parties et la mention manuscrite de la caution c’est-à-dire que la caution doit
écrire de sa main, le montant de la somme qu’elle a accepté de garantir. La mention manuscrite sert
de preuve pour tout type de contrat (conventionnel, légal ou judiciaire), quelle que soit la qualité de
la caution (civile, professionnelle, commerçante) et quelle que soit l’étendue de la dette garantie.
Dans aucun cas, elle ne constitue une condition de validité du cautionnement. Elle doit porter sur la
somme maximale garantie couvrant le principal, les intérêts et autres accessoires.
Lorsque la caution ne sait ou ne peut écrire, une formalité de substitution a été instaurée par l’article
14 alinéa 3. Elle sera assistée de deux témoins dont le rôle est non pas de porter la mention en ses
lieu et place mais de certifier son identité et sa présence et d’attester que la nature et les effets de
l’acte lui ont été précisés.
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En cas de non-paiement de la dette par le débiteur principal, le créancier a le droit de poursuivre la
caution pour se faire payer. La mise en œuvre des poursuites contre la caution est subordonnée à
certaines conditions.
a. L’exigibilité de la dette
Elle signifie que la caution ne peut être poursuivie que si la dette contractée par le débiteur principal
est arrivée à terme. Malgré ce principe, l’exercice des poursuites peut entraîner des difficultés
particulières en cas de déchéance du terme ou de prorogation de celui-ci.
La déchéance du terme : Il y a déchéance du terme si la dette du débiteur principal doit être
payée avant l’échéance convenue et ce, pour diverses raisons. Par rapport à la caution,
l’article 23 al.4 AUS prévoit que la déchéance du terme accordée au débiteur principal ne
s’étend pas automatiquement à la caution qui ne peut être requise de payer qu’à l’échéance
fixée à l’époque où la caution a été fournie. Cette règle est d’ordre public.
La prorogation du terme : elle est accordée au débiteur principal par le créancier et doit être
notifiée par ce dernier à la caution qui, informée, peut avoir deux attitudes différentes :
refuser la prorogation car elle n’est pas tenue d’accepter le bénéfice de la prorogation du
terme. Dans ce cas, elle peut poursuivre le débiteur en paiement ou obtenir contre ce dernier
des mesures conservatoires ou des garanties ou accepter la prorogation car contrairement à la
déchéance, la caution peut bénéficier des prorogations du terme accordé au débiteur principal.
Dans cette hypothèse, elle ne sera poursuivie en paiement qu’après l’écoulement du délai
supplémentaire accordé au débiteur principal sauf lorsque la prorogation du terme est
d’origine légale : moratoire légal, grâce accordée par le juge ou en cas d’ouverture d’une
procédure collective contre le débiteur.
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2. La mise en œuvre des poursuites
Le créancier ne peut poursuivre la caution, qu’elle soit simple ou solidaire qu’en appelant en cause le
débiteur principal. Lorsque la caution est poursuivie, c’est pour qu’elle paie. Elle peut donc réagir
positivement en payant la dette du débiteur principal ou négativement en opposant au créancier
certains moyens de défense.
a. Le paiement de la dette
La caution poursuivie est tenue de payer une somme inférieure ou égale au montant de la dette due
par le débiteur principal, intérêts et accessoires mais dans les termes de son engagement initial.
L’article 30 de l’AUS impose à la caution d’aviser le débiteur ou de le mettre en cause avant de
payer. La caution qui a payé sans avertir le débiteur ou le mettre en cause peut perdre son recours
contre lui.
A défaut de payer, la caution peut retarder le paiement en opposant certaines exceptions au créancier.
Le bénéfice de discussion
Le bénéfice de discussion est le droit reconnu à la caution d’amener le créancier à poursuivre d’abord
le débiteur principal. C’est l’une des conséquences du caractère accessoire de l’engagement de la
caution. A cet effet, l’article 27 al. 2 dispose : « la caution simple, à moins qu’elle ait expressément
renoncé à ce bénéfice, peut, sur premières poursuites dirigées contre elle, exiger la discussion du
débiteur principal, en indiquant les biens de ce dernier susceptibles d’être saisis immédiatement sur
le territoire national et de produire des deniers suffisants pour le paiement intégral de la dette ».
Son domaine est limité car seule la caution simple et le certificateur de caution qui est toujours
considéré comme une caution simple peuvent s’en prévaloir. Ce bénéfice est expressément refusé à
la caution solidaire et à la caution judiciaire. Il faut noter que la caution simple peut refuser de se
prévaloir de ce bénéfice par une renonciation expresse.
Le bénéficie de discussion produit des effets tant à l’égard du créancier qu’à l’égard de la caution.
S’agissant du créancier, il doit supporter les conséquences de sa faute s’il s’abstient de poursuivre le
débiteur alors même que les conditions de discussion sont réunies. S’il le fait avec retard ou
négligence, il est jusqu’à concurrence des biens indiqués responsable à l’égard de la caution de
l’insolvabilité du débiteur principal survenue par sa faute. A l’égard de la caution, l’exercice des
discussions suspend les poursuites contre elle jusqu’à la fin de la procédure. Elles ne seront reprises
que si la dette n’est pas intégralement payée. Mais la suspension totale des poursuites suppose que
les biens indiqués soient susceptibles de couvrir la dette entière.
Le bénéfice de division.
Le bénéfice de division est un moyen de défense en vertu duquel la caution peut demander au
créancier qui lui exige le paiement intégral de la dette de diviser sa poursuite entre les différentes
cautions lorsque plusieurs cautions simples garantissent une même dette.
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Le bénéfice de division suppose qu’il y ait plusieurs cautions pour un même débiteur. Il faut par
ailleurs qu’il n’y ait pas de solidarité entre ces cautions. De même, la caution ne doit pas avoir
renoncé à ce bénéfice.
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Lorsque la caution est poursuivie en paiement. Dans ce cas, la caution poursuivie par le
créancier va appeler en garantie le débiteur principal sauf si celui-ci est soumis à une
procédure de redressement judiciaire ou de liquidation des biens ;
Lorsque le débiteur est obligé de lui rapporter sa décharge dans un certain temps ;
Lorsque la dette est devenue exigible par l’échéance du terme. On suppose ici que malgré
l’arrivée du terme de la dette, le créancier n’a pas engagé de poursuites contre le débiteur
principal et la caution ne souhaite pas continuer à assumer le risque d’insolvabilité du
débiteur.
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causes classiques d'extinction de l'obligation se retrouvent dans l'extinction de l'obligation de
règlement qu’il s’agisse de l’extinction par le paiement ou de l’extinction par divers autres modes
tels que : remise de dette, compensation ou confusion. Il faut ajouter que la nullité du contrat de
cautionnement a pour effet la libération rétroactive et totale de la caution.
Quant à l’obligation de couverture, son extinction marque la date à partir de laquelle les dettes du
débiteur ne seront plus couvertes par la caution. Elle peut résulter du décès de la caution, de l'arrivée
du terme (exprès ou implicite) ou de la résiliation du cautionnement à durée indéterminée.
Objectifs spécifiques
Définir la garantie autonome ;
Déterminer les conditions de formation de la garantie autonome ;
Identifier les effets de la garantie autonome.
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demande de la part de ce dernier. Elle fait intervenir trois personnes que sont le donneur d’ordre, le
garant et le bénéficiaire.
A côté de la garantie autonome, le législateur a également réglementé la contre garantie définie
comme une convention par laquelle le contre garant s’engage à payer une somme déterminée au
garant, sur première demande de la part de ce dernier. Le contre garant garantit donc les
engagements du garant. Pour le reste, la lettre de contre garantie obéit exactement au même régime
que la garantie autonome.
Garantie autonome
A. Conditions de fond
La souscription des garanties et contre garanties autonomes est limitée uniquement aux personnes
morales. Il peut s’agir de personnes morales de droit public ou de droit privé, commerçantes ou non.
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Les garants sont généralement des banques, des établissements de crédit, des sociétés commerciales
ou des sociétés mères qui s’engagent pour le compte de leurs filiales.
B. Conditions de forme
La garantie et la contre garantie ne se présument pas et doivent être constatées par un écrit qui doit
comporter à peine de nullité, certaines mentions limitativement énumérées par les textes notamment
l’article 41 de l’AUS.
2. La présentation de documents.
Le bénéficiaire doit joindre à sa demande les documents prévus dans la convention de garantie. Ces
documents sont susceptibles de varier d’une convention à l’autre en fonction des engagements du
garant ou de la nature de la convention de base. Il s’agira par exemple de rapports d’expertise, de
décision de justice, de factures non réglées, etc. L’exigence des documents fait penser que la garantie
autonome OHADA serait une garantie documentaire et non une garantie indépendante ou autonome
au sens strict.
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B. Le paiement
Le garant doit payer la somme prévue au contrat de garantie et non la somme non éventuellement
payée par le donneur d’ordre puisque la garantie est autonome. Bien que le paiement doive être fait à
première demande, il ne doit pas pour autant être fait immédiatement, « les yeux fermés ». Certaines
mesures sont prévues.
D’abord, le garant doit disposer d’un délai de 5 jours ouvrés pour examiner la conformité des
documents produits par rapport à ce qui a été prévu dans le contrat. Il ne peut rejeter la demande qu’à
condition de notifier au bénéficiaire, au plus tard à l’expiration ce délai, les irrégularités justifiant le
rejet. Ensuite, le garant doit transmettre copie de la demande ainsi que les documents au donneur
d’ordre pour information. Enfin, le garant doit aviser le donneur d’ordre de toute réduction du
montant de la garantie ainsi que de tout acte ou évènement y mettant fin à l’exception de la date de
fin de validité.
V. Les recours
Il s’agit de l’un des aspects du régime de la garantie autonome qui le rapproche du cautionnement.
L’article 48 précise que le garant qui a fait un paiement conformément aux termes de la garantie
dispose des mêmes recours que la caution contre le donneur d’ordre.
Le garant ne paye pas la dette d’autrui mais sa propre dette. Pourtant, il doit être indemnisé par le
donneur d’ordre à condition que son paiement soit conforme aux termes de la garantie.
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TITRE 2 : LES SURETES REELLES
Une sureté réelle est une sûreté assise sur une chose (meuble corporel ou incorporel, ou un
immeuble); plus précisément une sûreté portant sur un ou plusieurs biens déterminés, meubles ou
immeubles, appartenant au débiteur ou à un tiers consistant à conférer au créancier, sur ce bien, un
droit réel (assorti d’un droit de préférence et un droit de suite) lui permettant de se faire payer en cas
de défaillance du créancier. On distingue deux types de suretés réelles : les suretés mobilières et les
suretés immobilières.
Les suretés mobilières sont celles qui portent sur des biens meubles. L’on distingue : le droit
de rétention, les privilèges mobiliers, le gage sur les meubles corporels, le nantissement et la
propriété retenue ou cédée à titre de garantie.
Les suretés immobilières sont celles qui portent sur des biens immeubles. Les suretés
immobilières portent essentiellement sur les hypothèques.
Objectifs spécifiques
Définir les différentes suretés mobilières ;
Déterminer les conditions de formation de chaque sureté ;
Identifier les effets de chaque sureté réelle.
I. Le gage
A. Définition
Le gage est le contrat par lequel le constituant débiteur accorde à un créancier le droit de se faire
payer par préférence sur un bien meuble corporel ou un ensemble de biens meubles corporels,
présents ou futurs.
b. L’objet du gage
Tout bien mobilier corporel, pourvu qu’il soit dans le commerce, qu’il ne soit pas inaliénable et
indisponible peut être donné en gage. Le bien peut être présent ou futur. Lorsque le gage porte sur
des biens présents, ces biens doivent appartenir au constituant. A défaut, le créancier gagiste de
bonne foi, peut, en application de l’article 95 AUS, s’opposer à la revendication du véritable
propriétaire dans les conditions prévues par l’article 2279 du code civil.
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Le gage peut porter sur un bien isolé ou sur un ensemble de biens. Le gage peut également porter,
aux termes de l’article 94 sur des sommes ou des valeurs déposées à titre de consignation par les
fonctionnaires, les officiers ministériels ou toute autre personne pour garantir les abus dont ils
pourraient être responsables et les prêts consentis pour la constitution de cette consignation.
2. Conditions de forme
Il s’agit d’une part de l’exigence d’un écrit et d’autre part de la dépossession du constituant ou de
l’inscription du contrat au RCCM.
a. Le droit de rétention
Le droit de rétention est reconnu expressément au gagiste qui lui permet d’opposer une rétention sur
le bien gagé, directement ou par l'intermédiaire du tiers convenu, jusqu'au paiement intégral en
principal, intérêts et autres accessoires, de la dette garantie. Le droit de rétention peut être opposé au
constituant même si le bien est entre les mains d’un tiers. Il peut l’être également aux acquéreurs de
la chose ou aux créanciers du constituant.
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b. Le droit de suite
Le créancier gagiste, en cas de dépossession, en bénéficie comme le créancier hypothécaire. En tant
que possesseur, il peut aussi opposer son droit aux acquéreurs successifs et, surtout, s’il est
dépossédé involontairement de la chose, il peut la revendiquer comme un possesseur de bonne foi.
c. Le droit de préférence
Le droit de préférence se reporte sur l’indemnité qui lui est substituée en cas de perte ou de
destruction de l’objet du gage. Il couvre non seulement le principal de la dette mais aussi les intérêts
et les frais. Il s’exerce conformément à l’article 226 AUS dont il ressort que les créanciers gagistes
sont classés en quatrième position sur le prix de vente des meubles après les frais de justice, les frais
de conservation et les créances de salaire super privilégiés. Entre les créanciers gagistes, l’ordre de
paiement dépend de l’ordre d’inscription du gage et, en l’absence d’inscription, de l’ordre de
constitution des différents gages.
a. Le non usage
Lorsque le gage emporte dépossession, le créancier gagiste ne peut user de la chose donnée en gage
ni en percevoir les fruits.
b. L’obligation de conservation
Elle pèse aussi bien sur le créancier gagiste ou le tiers en cas de gage avec dépossession que sur le
constituant en cas de gage sans dépossession. Le créancier gagiste ou le tiers doit conserver et en
bon état, le bien qui lui est remis (art. 108). Cela s’explique par le fait qu’à l’échéance et en cas de
paiement, il est tenu de restituer le bien au propriétaire. De ce fait, il est tenu responsable en cas de
perte ou de détérioration de la chose due à sa faute (ex. du fait de la négligence). Il doit conserver la
chose et lui apporter les soins qu’elle nécessite. Toutefois, il ne supporte pas en principe les frais qui
en découlent puisqu’il doit être remboursé des dépenses utiles et nécessaires faites pour la
conservation qu’on appelle aussi les impenses. La conservation n’emporte pas nécessairement
l’obligation de faire assurer la chose. La méconnaissance des obligations de conservation entraîne la
responsabilité du créancier gagiste.
c. L’obligation de restitution
Elle ne s’impose qu’en cas de gage avec dépossession. Le créancier gagiste ou le tiers convenu est
tenu de restituer la chose lorsque, à l’échéance, la créance garantie a été entièrement payée en
capital, intérêts et accessoires. Le défaut de restitution, la restitution incomplète ou le retard dans la
restitution entraîne la responsabilité contractuelle du créancier ou du tiers convenu. Le défaut de
restitution peut également être sanctionné pénalement pour détournement de gage par application de
certaines dispositions pénales.
3. La réalisation du gage
Lorsque le débiteur ne paye pas à l’échéance, le créancier peut continuer à exercer son droit de
rétention lorsque le gage a été constitué avec dépossession. Mais, pour obtenir paiement, il doit
réaliser le gage. Il bénéficie pour cela d’une option : faire vendre la chose ou en demander
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l’attribution judiciaire. Les parties peuvent également, dans certains cas, convenir de l’attribution
conventionnelle du bien au créancier.
D. L’extinction du gage
Le gage peut s’éteindre par voie principale ou par voie accessoire.
L’article 117 AUS prévoit l’extinction à titre principal du gage avec dépossession
indépendamment de l’obligation garantie dans trois hypothèses : restitution volontaire de la
chose au constituant par le créancier gagiste, perte de la chose du fait du créancier gagiste par
contre, la perte fortuite de la chose par ex. du fait d’un incendie survenu au local abritant les
biens gagés n’entraîne pas l’extinction du gage mais subrogation du créancier dans
l’indemnité d’assurance s’il en existe, lorsque la juridiction compétente ordonne la restitution
de la chose pour faute du créancier gagiste. Dans toutes ces différentes hypothèses, le
créancier gagiste devient un créancier chirographaire.
Accessoire d’une créance dont il garantit l’exécution, le gage s’éteint à titre accessoire
lorsque la créance est totalement éteinte en principal, intérêts et accessoires (article 116).
Cette extinction de la créance peut intervenir par le paiement, la compensation, la remise de
dette, etc. De même, l’anéantissement de la créance par annulation ou résolution devrait
emporter l’extinction du gage et donc la restitution du gage dans l’hypothèse où il est
constitué avec dépossession.
A. Le nantissement de créances
1. Définition
Le nantissement de créance est l’affectation en garantie d’une obligation d’une créance ou d’un
ensemble de créances présentes ou futures.
L’écrit est exigé à peine de nullité. Il doit contenir un certain nombre d’éléments énumérés à
l’article 127.
L’inscription du nantissement au RCCM a pour effet de le rendre opposable aux tiers à
compter de la date de cette inscription même si entre les parties le nantissement prend effet à
la date de sa conclusion.
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La notification au débiteur de la créance nantie a pour effet de rendre le contrat opposable à
son égard. Elle doit être faite par écrit, à défaut, le débiteur doit intervenir à l’acte. Il s’agit
d’affirmer les droits du gagiste sur la créance qui est affectée en garantie, d’interdire au
débiteur de se libérer entre les mains du créancier originaire sous peine de régler deux fois la
même dette, car qui paye mal paye deux fois. En l’absence de notification, le constituant a le
droit de recevoir valablement le paiement mais à l’échéance, il doit en verser le montant au
créancier nanti.
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D. Le nantissement de fonds de commerce
Le nantissement de fonds de commerce consiste à mettre garantie du paiement de sa dette un fonds
de commerce. Le nantissement peut être conventionnel ou judiciaire.
Le nantissement porte obligatoirement sur la clientèle, l’enseigne et le nom commercial qui sont les
éléments incorporels principaux du fonds de commerce. Mais, si les parties le souhaitent, le
nantissement pourra porter sur les autres éléments incorporels (droit au bail, brevets d’invention,
marques de fabrique, de service et de commerce, dessins et modèles et tous les droits de propriété
industrielle attachés au fonds) et sur le matériel professionnel.
Le nantissement est constaté par un écrit (art. 163). Cet acte doit comporter obligatoirement certaines
mentions : noms et domicile des parties (créancier, débiteur ou tiers constituant), numéro
d’immatriculation du débiteur au RCCM, désignation précise du fonds (siège et succursales),
désignation des éléments nantis, montant de la créance en précisant les conditions d’exigibilité et les
intérêts, élection de domicile du créancier. Le nantissement doit être inscrit au RCCM.
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Elles sont relatives à l’exigence de connexité, à la créance garantie, à la détention et au bien
susceptible de détention.
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matérielle de la chose; en cas de renonciation au droit de rétention. La renonciation peut se traduire
par exemple par la remise volontaire du bien au débiteur.
V. Les privilèges
Le privilège peut être défini comme un droit que la loi donne au créancier, en fonction de la qualité
de la créance, d’être préféré aux autres créanciers. Il se caractérise par deux éléments. Le premier est
son origine légale. Les privilèges ont une seule source qui est la loi ; il n’y a pas de privilège sans
texte. Le second est l’attribution en fonction de la qualité de la créance.
L’acte uniforme distingue essentiellement les privilèges généraux qui portent sur l’ensemble de
l’actif mobilier et immobilier du débiteur et les privilèges spéciaux qui sont essentiellement
mobiliers et portent sur un meuble déterminé de l’actif du débiteur.
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Ce privilège, encore appelé privilège des frais funéraires vise à assurer des inhumations – parfois
appelées enterrements, obsèques ou funérailles - décentes au débiteur insolvable dont les biens ont
fait l’objet de saisie avant le décès. Il profite à celui qui a avancé les frais ou fourni les services
nécessaires: frais de morgue, transport de la dépouille, services funéraires divers qui peuvent varier
suivant les us et coutumes. Il s’agit de mesures sociales accordées aux débiteurs indigents qui sont
décédés.
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L’article 180 4° prévoit le privilège pour les sommes dues aux auteurs des œuvres intellectuelles,
littéraires et artistiques. Il s’agit de toutes les œuvres de l’esprit c’est-à-dire aussi bien les œuvres
littéraires et artistiques (œuvres musicales, théâtrales, cinématographiques, dramatiques, etc.) que les
œuvres protégées par les droits de propriété industrielle : brevets d’invention, certificats d’utilité,
dessins et modèles, obtentions végétales, marques, etc. Il profite à tous les auteurs (artistes,
interprètes, producteurs, diffuseurs, etc.). Le privilège garantit le paiement des sommes dues (droits
d’auteurs et redevances diverses) pour la période de trois ans ayant précédé le décès du débiteur, la
saisie de ses biens ou l’ouverture contre lui d’une procédure collective.
2. Le privilège du transporteur
L’article 185 AUS dispose que « le transporteur terrestre a un privilège sur la chose transportée pour
tout ce qui lui est dû, à condition qu’il y ait un lien de connexité entre la chose transportée et la
créance ». Ce privilège est mis en œuvre par tout transport terrestre qu’il soit routier ou ferroviaire ce
qui exclut le transport aérien, maritime ou fluvial. Peu importe l’engin utilisé pour le transport. Par
contre, sont exclus le remorquage de véhicule, le cas où le transport est effectué par un
commissionnaire, le louage du véhicule et le contrat de déménagement lorsque les opérations de
déménagement sont plus importantes que le transport assuré. Peu importe également qu’une
rémunération soit ou non stipulée pour le transport.
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Quant à l’assiette, le privilège porte sur les biens remis en vue du transport, même s’ils appartiennent
à des tiers. Mais, il faut un lien de connexité entre la créance et la marchandise transportée ce qui
signifie que le privilège ne peut être exercé sur les biens transportés en vue du paiement d’une
créance relative à un transport antérieur. Relativement aux créances garanties, il s’agit des frais de
transport proprement dit et éventuellement des accessoires c'est-à-dire les frais de conservation de la
marchandise ou les droits de douane avancés par le transporteur.
C. Le privilège du commissionnaire
Le commissionnaire est un professionnel qui conclut des contrats en son nom, mais pour le compte
de quelqu’un d’autre, le commentant en vertu d’un mandat qui lui est donné. Son statut est organisé
par les articles 192 et suivants de l’AUDCG tel que récemment modifiés.
Tout commissionnaire bénéficie, aux termes de l’article 188 AUS, du privilège sur les marchandises
qu’il détient pour le compte du commettant qu’il s’agisse des marchandises déposées, consignées ou
expédiées, même si elles n’appartiennent pas au commettant ; il suffit qu’elles soient effectivement
détenues par le commissionnaire.
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et peu importe qu’ils aient été engagés sans le consentement du débiteur. Peu importe également que
le créancier n’ait pas la détention effective de la chose.
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CHAPITRE 2 : LES SURETES IMMOBILIERES : L’HYPOTHEQUE
Objectifs spécifiques
Définir les suretés immobilières ;
Appréhender le régime juridique des suretés immobilières.
I. Définition de l’hypothèque
L’hypothèque est une sûreté immobilière qui porte sur un immeuble ou généralement sur un droit
immobilier et qui confère à son titulaire un droit de suite et un droit de préférence. Elle n’emporte
pas la dépossession immédiate du propriétaire contrairement à l’antichrèse qui est une autre sûreté
réelle immobilière emportant dépossession du débiteur.
La spécialité quant aux créances garanties signifie que l’hypothèque ne saurait garantir n’importe
quelle créance du créancier à l’égard du débiteur. Toutefois, la créance garantie peut être déterminée
ou seulement déterminable.
1. Le créancier
La situation du créancier hypothécaire n’appelle pas d’observation particulière. Tout créancier peut
se faire consentir une hypothèque pour sûreté de sa créance. Il faut toutefois réserver les cas où la
demande de constitution est formulée alors que le débiteur est en difficulté. La sûreté constituée
pourrait être annulée pour constitution en période suspecte.
2. Le constituant
Le constituant est celui qui consent une hypothèque sur l’immeuble lui appartenant. Il peut s’agir du
débiteur ou d’un tiers, qui est alors appelé caution réelle.
Le constituant doit être titulaire du droit hypothéqué. L’article 203 de l’AUS dispose à cet effet que «
l’hypothèque conventionnelle ne peut être consentie que par celui qui est titulaire du droit réel
immobilier régulièrement inscrit et capable d’en disposer ». Lorsqu’il s’agit d’un droit de propriété,
il doit apporter la preuve de la propriété c’est-à-dire, en pratique, fournir le titre foncier qui constitue
la preuve de propriété dans la plupart des droits nationaux. L’hypothèque constituée sur la chose
d’autrui est nulle sauf si le tiers est détenteur d’un mandat donné par acte notarié lorsque cette forme
est exigée pour la constitution de l’hypothèque.
B. Conditions de forme
Le contrat d’hypothèque doit être établi par écrit et il doit être inscrit.
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Aux termes de l’article 205 AUS, l’hypothèque conventionnelle peut être établie sous diverses
formes mais dans tous les cas il s’agira d’un acte écrit dont la nature dépend des dispositions
nationales applicables et plus particulièrement de la loi du lieu de situation de l’immeuble. L’écrit
peut prendre suivant les cas, trois formes différentes :
Acte authentique établi par le notaire territorialement compétent ;
Acte authentique établi par une autorité administrative ou judiciaire habilitée à faire de tels
actes.
Acte sous seing privé dressé suivant un modèle agréé par la conservation de la propriété
foncière.
Quelle que soit la forme de l’écrit, il devra comporter les éléments relatifs à l’identité des parties,
notamment le constituant de l’hypothèque, à la créance garantie et à l’assiette de la garantie (tout en
notant que la sûreté peut porter sur les immeubles futurs).
En outre, le contrat doit être inscrit. L’inscription assure la publicité de l’hypothèque. Cette publicité
est utile pour les éventuels acquéreurs de l’immeuble qui, à travers elle, peuvent se renseigner sur la
situation de l’immeuble, pour les prêteurs de deniers qui peuvent s’assurer de la situation réelle de
l’immeuble que l’emprunteur leur donne en garantie et éventuellement pour tous les tiers.
B. Dans les rapports entre le créancier hypothécaire et les autres créanciers : le droit de
préférence
L’hypothèque confère à son titulaire un droit de préférence par rapport aux autres créanciers (art.
197). Aux termes de l'art. 225 3° de l’AUS, le créancier hypothécaire vient en troisième rang sur le
prix de vente de l'immeuble ; il est primé par le privilège des frais de justice et les créances de
salaires super privilégiées, mais il prime lui-même d'autres créanciers notamment les créanciers
chirographaires. Entre les créanciers hypothécaires, tous bénéficiaires d’une créance hypothécaire,
c'est la date d'inscription qui est prise en compte pour le classement des créanciers et non la date de
naissance de la créance garantie. En cas d'inscription de l’hypothèque le même jour, la préférence
devrait être accordée au titre le plus ancien. Mais, dans la pratique parfois, puisque l’on ne
mentionne pas l’heure de l’inscription, les inscriptions effectuées le même jour viennent en concours
sans considération de l’ancienneté du titre.
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Le droit de préférence s'exerce sur le prix de la vente de l’immeuble. Peu importe que la vente soit
amiable ou faite aux enchères. Il s’exerce aussi sur toute somme représentant la valeur de l’immeuble
telle qu’une indemnité d'assurance ou d'expropriation.
C. Dans les rapports entre le créancier hypothécaire et les tiers détenteurs : le droit de
suite
Le droit de suite prévu par l’article 197 de l’AUS signifie que le créancier hypothécaire inscrit, tant
qu’il n’a pas été payé totalement de sa créance, peut faire saisir l'immeuble entre les mains de celui
auquel il a été cédé pour le faire vendre et se faire payer sur le prix.
Aux termes de l'art. 223 al. 2 AUS, « le droit de suite s'exerce contre tout tiers détenteur de
l'immeuble dont le titre est publié postérieurement à l’hypothèque ». Le tiers détenteur est
généralement un acquéreur, c'est-à-dire un acheteur, un donataire ou un légataire particulier. Il peut
s'agir aussi d'un ayant cause à titre universel tel un héritier non tenu personnellement à la dette et
dont le droit est né après la constitution de l’hypothèque.
Si la cession a été faite à titre onéreux et que le prix n’a pas encore été payé c’est-à-dire dans
l’hypothèse d’une vente de l’immeuble faite à crédit, au lieu de saisir l’immeuble, le créancier
pourrait plutôt chercher à se faire payer en priorité selon son rang sur le montant qui est dû par
l’acquéreur au vendeur. Dans ce cas, c’est la mise en œuvre du droit de préférence qui lui permet en
réalité d’être payé.
V. La transmission de l’hypothèque
En sa qualité d'accessoire à la créance, l’hypothèque suit normalement le sort de cette dernière. Elle
est donc transmise en principe à titre accessoire mais elle peut l'être également à titre principal et
dans ce cas, elle permet d'affecter la sûreté à la garantie d'une autre créance.
3. La cession d’antériorité.
C’est la convention par laquelle deux créanciers inscrits sur le même immeuble décident d’intervertir
leurs rangs respectifs. Une telle convention qui ne saurait nuire aux tiers ne peut donc valoir que dans
la limite de la plus faible des deux sommes garanties. Ainsi, le cessionnaire n’est classé au rang
avantageux qu’il a acquis que dans la mesure où la créance du cédant n’est pas éteinte et seulement
dans la limite de son montant et dans la limite du montant de sa propre créance. Si la somme due au
cessionnaire est inférieure à la créance du cédant, ce dernier est colloqué au rang qu’il a cédé pour la
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différence. La cession d’antériorité n’est soumise à aucune formalité particulière sauf qu’elle doit
être passée dans la même forme que le contrat constitutif d’hypothèque et qu’elle doit être publiée
conformément à l’article 201 de l’AUS.
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