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Planification en vue
du développement économique

NATIONS UNIES
Département des affaires économiques et sociales

Planification en vue
du développement économique

Rapport du Secrétaire général


transmettant Vétude rédigée
par un groupe d'experts

NATIONS UNIES
New York, 1963
Les cotes des documents de l’Organisation des Nations Unies se com­
posent de lettres majuscules et de chiffres. La simple mention d'ime cote
dans un texte signifie qu’il s’agit d’un document de l’Organisation.

A/5533/Rev. 1

PUBLICATION DES NATIONS UNIES


№ de vente; 64. II.B. 3

Prix: 1 dollar (E.-U.)


(ou l’équivalent en monnaie du pays)
AVANT-PROPOS DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

Le présent rapport a été rédigé par un groupe d’experts nommés


par moi en application de la résolution 1708 (X V I) de l’Assemblée
générale afin de m’aider à faire une étude sur l’expérience acquise et
les techniques utilisées en matière de planification du développement
économique dans différents pays. Les experts ont été désignés au prin­
temps de 1962 et des dispositions prises pour qu’ils tiennent deux
sessions; la première s’est tenue en août 1962 et la seconde en mars-
avril 1963. Faute de temps, cependant, le groupe n’a pu achever la
rédaction de son rapport pendant ces deux sessions et une troisième
session a eu lieu en août 1963.
Les membres du groupe ont participé aux travaux à titre person­
nel et leurs observations et conclusions n’engagent qu’eux. Je suis
convaincu que ces observations et conclusions sont d’une grande im­
portance pour les tâches auxquelles la communauté mondiale doit
s’attaquer dans le domaine du développement économique. Je suis
donc heureux de soumettre ce rapport à l'Assemblée générale pour
qu’elle l’examine.
Le groupe se composait des experts suivants : MM. Z. Bor, direc­
teur de l’Institut de recherche scientifique en matière de planification
et de normes du Gosplan, Union des Républiques socialistes soviéti­
ques; Celso Furtado, directeur général de la SUDENE, Brésil; Borivoje
Jelic, directeur du Bureau fédéral de planification, Yougoslavie; Paul
Lemerle, inspecteur des finances, chargé de mission au Commissariat
général du plan, France; Max Millikan, directeur du Centre des études
internationales de l’Institut de technologie du Massachusetts (Etats-
Unis d’Amérique); A. M. El Morshidy, directeur général au Ministère
de la planification. République arabe unie; Tarlok Singh, membre de
la Commission de planification, Inde; Zdenek Vergner, directeur de
l’Institut de recherche en matière de planification économique natio­
nale, Tchécoslovaquie; Pieter de Wolff, directeur du Bureau central
de planification, Pays-Bas; Satoru Yoshiue, directeur de l’Institut de
recherches économiques de l’Office de planification économique,
Japon. M. Jacob L. Mosak, directeur à la Direction des tendances et
politiques économiques générales du Secrétariat de l’ONU a été
désigné par moi pour assumer la présidence du groupe.
M. Bor et M. Furtado n’ont malheureusement pas pu assister à la
troisième session, mais tous deux avaient apporté lors des précéden­
tes sessions leur précieux concours à l’élaboration des projets de rap­
port. Le texte ayant trait aux chapitres 2, 3, 4 et 5 que, lors de la
deuxième session, M. Bor avait présenté au groupe pour examen est
reproduit dans l’annexe II au présent rapport. M. Furtado, après
avoir étudié le rapport définitif — dont des exemplaires lui avaient été
envoyés ainsi qu’à M. Bor, un certain temps avant sa publication —
y a souscrit et a accepté de le signer.
Pour établir son rapport, le groupe s’est inspiré des études que
ses membres ont rédigées sur l’expérience de leur pays en matière de
planification ainsi que de celles que plusieurs gouvernements ont sou­
mises après en avoir été priés. Il a, en outre, bénéficié du concours de
fonctionnaires du Département des affaires économiques et sociales
au Siège et des commissions régionales. Des représentants des insti­
tutions spécialisées et de certaines organisations intergouvememen­
tales ont également participé aux travaux du groupe en qualité
d’observateurs. On trouvera dans le volume II du présent rapport les
études qui ont été rédigées par les membres du groupe et celles que
les gouvernements ont soumises.
Il est maintenant presque universellement admis que la plani­
fication nationale revêt une grande importance poiar le développement
économique. C’est ce qu’atteste le fait que, ces dernières années, de
nombreux pays ont eu recours à la planification sous une forme ou
sous ime autre. On est de plus en plus convaincu que, selon les termes
mêmes des experts, « la planification est un instrument de politique
extrêmement précieux. En permettant d’analyser et d’évaluer claire­
ment les solutions concrètes qui s’offrent à chaque pays, ainsi que de
déterminer les conséquences des diverses politiques possibles, la
planification facilite grandement l’adoption des décisions ». C’est dans
cet esprit pragmatique que de nombreux pays en voie de développe­
ment ainsi que des pays à économie plus évoluée se sont servis de la
planification comme d’im instrument pour atteindre leurs objectifs
économiques nationaux.
Bien entendu, ceci n’implique pas que la planification puisse se
faire partout de la même façon. Les méthodes adoptées varient forcé­
ment beaucoup; dans un monde où les pays se trouvent à des stades
de développement économique très divers et ont des systèmes éco­
nomiques et sociaux très différents, ces différences sont naturelles.
Je crois que les experts ont exposé brièvement et clairement les
aspects les plus pertinents de l’expérience acquise en matière de
planification du développement économique. Leur analyse devrait être
d’un grand intérêt pour tous ceux qui s’occupent de la planification
économique.
Au nom de l’Organisation des Nations Unies, je tiens à remercier
les membres du groupe de la tâche très utile qu’ils ont accomplie et
à exprimer ma gratitude aux institutions auxquelles ces experts prê­
tent leur concours et qui ont bien voulu les détacher pendant quelque
temps pour leur permettre d’élaborer cet important rapport.

Le Secrétaire général
U T hant
LETTRE D ’ENVOI

AU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL

Nous avons l’honneur de vous communiquer ci-joint, pour examen,


l’étude intitulée « Planification en vue du développement économique »
que nous avons été invités à établir en application de la résolution
1708 (X V I) de l’Assemblée générale. Conformément au mandat qui
nous a été conféré, ce rapport résume l’expérience acquise et les
techniques utilisées en matière de planification du développement
dans différents pays.
Le plan général en a été élaboré à notre première session qui s’est
tenue à l’Office européen des Nations Unies, à Genève, du 6 au
10 août 1962. Le texte du rapport a été établi au cours des deuxième
et troisième sessions, qui se sont tenues au Siège de l’Organisation
des Nations Unies à New York et à l’Office européen à Genève du
25 mars au 5 avril 1963 et du 5 au 16 août 1963 respectivement.
Dans un volume qui fera suite au présent rapport, figureront les
études rédigées par les membres du groupe ainsi que celles qui ont
été demandées à un certain nombre d’autres pays. Nous pensons que
ces études seront d’un intérêt pratique et qu’elles aideront les plani­
ficateurs.
Les membres du groupe tiennent à exprimer leur profonde recon­
naissance aux fonctionnaires du Secrétariat qui leur ont fourni une
assistance allant bien au-delà du service normal des séances et sans
laquelle ils n’auraient pu mener leur tâche à bien.

Nations Unies, Genève Veuillez agréer, etc.


Août 1963
Les études que les membres du groupe ont rédigées, ainsi que
celles qui ont été demandées à certains gouvernements, seront pu­
bliées séparément dans un additif au présent rapport (A/5533/Rev.l).
TABLE DES MATIÈRES
Pages

I t r o d u c t io n N a t u r e e t r ô l e d e la p l a n if ic a t io n ................................ 1

Chapitres

1. — L a f o r m u l a t io n d e s p l a n s ................................................................................... 7

2. — L ’ e x é c u t i o n d e s p l a n s .............................................................................................. 52
3. — O r g a n i s a t i o n e t g e s t i o n d e l a p l a n i f i c a t i o n ........................................ 96

4. — P l a n i f i c a t i o n n a t i o n a l e e t m e s u r e s i n t e r n a t i o n a l e s ............. 109

5. — Q u e l q u e s c o n c l u s i o n s ............................................................................................. 124

ANNEXES

I. — M andat.................................................................................... 128
IL — Projet concernant les chapitres 1, 2, 3 et 4 présenté par
le professeur M. Z. B o r ....................................................... 129


Introduction

NATURE ET RÔLE DE LA PLANIFICATION

1. Au cours de ces dernières années, on a enregistré un accroisse­


ment remarquable de l’intérêt porté à la planification économique
nationale. Les résolutions récentes de l’Assemblée générale et du Con­
seil économique et social recommandant une action internationale en
vue de renforcer les activités de planification témoignent du caractère
quasi universel de cet intérêt accru. L’aspect le plus frappant de cette
tendance n’est pas que le nombre des pays engagés dans des activités
de planification nationale a augmenté considérablement; c’est que la
planification est devenue un instrument de politique dans des pays
qui diffèrent beaucoup non seulement par leur degré de développe­
ment économique, mais aussi par leur régime économique et social.
2. Il ne fait aucun doute que le généralisation des mesures de
planification est due essentiellement à l’urgence que les pays en voie
de développement attachent à la nécessité de rattraper leur retard
dans le domaine économique et d’encourager le progrès social. Nombre
de ces pays n’ont pas hésité, ces dernières années, à assigner pour but
à leur politique la transformation à long terme de leurs structures
économique et sociale. Ils cherchent à créer les conditions favorables
à l’expansion économique et à jeter les fondations d’une société plus
équitable et mieux équilibrée. Face à des économies dont la rigidité
traditionnelle est souvent trop accusée pour être surmontée par le
simple jeu des forces du marché, et devant la nécessité de modifier
et d’adapter leurs institutions sociales, le gouvernement a assumé un
rôle prépondérant dans la vie économique et sociale de nombreux
pays. Ces pays — dont beaucoup possèdent des ressources considé­
rables en matières premières, en combustibles et en énergie, ainsi
qu’une main-d’œuvre abondante — ont estimé que l’élaboration et
l’exécution de plans étaient le moyen le plus efficace d’assurer le
développement économique et de relever les niveaux de vie.
3. Ces dernières années, il est devenu de plus en plus évident que,
lorsque doivent être prises des décisions économiques dont les consé­
quences dans le domaine social ou les effets à long terme seront
déterminants, la planification est un instrument de politique extrême­
ment précieux. En permettant d’analyser et d’évaluer clairement les
solutions concrètes qui s’offrent à chaque pays, ainsi que de déter­
miner les conséquences des diverses politiques possibles, la plani­
fication facilite grandement l’adoption des décisions. Son utilité à cet
égard a été particulièrement manifeste toutes les fois que la solution
des grands problèmes économiques qui se posaient à ceux à qui il
appartient de prendre les décisions appelaient des changements de
Structure. Et ce, d’une façon générale, quel qu’ait été le régime poli­
tique et social des pays intéressés. C’est ainsi que l’expérience des
pays à économie planifiée montre que la planification, telle qu’elle est
conçue dans ces pays, a été un instrument efficace d’évolution éco­
nomique et sociale rapide. Ce n’est pas non plus par hasard que, dans
certains pays d’Europe occidentale qui ont dû reconstruire de fond
en comble leur économie dans les années qui ont immédiatement suivi
la guerre, les gouvernements ont mis au point des méthodes de plani­
fication pour faciliter l'élaboration et l’application de la politique à
suivre. Il n’est donc pas surprenant que dans les pays sous-développés,
dont l’expansion économique dépend dans une très large mesure de
la solution des problèmes que pose l’adaptation des structures, les
gouvernements aient de plus en plus fréquemment cherché à appli­
quer des méthodes de planification.
4. Cela ne change rien au fait que les méthodes de planification
et leur importance politique diffèrent profondément d'un pays à
l’autre selon les systèmes économiques et sociaux. Bien que de nom­
breux pays aient eu recours à la planification, il n'en est pas résulté
une réduction des différences profondes qui les séparent pour ce qui
est des valeurs politiques et sociales et des caractéristiques essentiel­
les des systèmes économiques fondés sur ces valeurs. La notion de
planification change du tout au tout si l'on passe d'un régime à éco­
nomie planifiée à une économie reposant sur l'entreprise privée ou
à une économie mixte. En outre, la portée et la signification des mé­
thodes de planification adoptées dans un pays donné est nécessaire­
ment fonction du contexte politique, social et économique dans lequel
elles sont appliquées. Les buts assignés à la planification, de même
que les moyens choisis pour exécuter les plans sont étroitement liés
aux objectifs politiques et sociaux; de même, il n'est pas jusqu'aux
méthodes utilisées pour élaborer les plans qui ne dépendent des
objectifs de la planification et des moyens d'exécution.
5. Dans les pays avancés où l'économie repose sur l'entreprise
privée, les événements des dernières décennies ont amené l'Etat à
jouer un rôle accru dans la vie économique. Le chômage grave qui
a sévi en 1930 et pendant les quelques années suivantes a ébranlé la
confiance que l'on avait dans la capacité du système concurrentiel de
maintenir automatiquement et continuellement l'emploi à un niveau
élevé, et la conviction s'est répandue que c'était aux autorités centra­
les qu'il incombait d'arrêter une politique en vue du plein emploi.
Dans les années qui ont suivi la guerre, préoccupés d'abord du pro­
blème de la stabilité économique — et en partie pour le résoudre —
certains pays ont étendu et réorienté leurs efforts en vue d'entretenir
leur croissance économique à long terme. Dans le cadre d'un système
où prédominait la propriété privée des moyens de production et le
libre jeu du mécanisme des prix — soutenus, toutefois, par les acti­
vités économiques du secteur public qui s'exerçaient dans un domaine
de plus en plus vaste — plusieurs de ces pays ont élaboré des plans
visant à coordonner systématiquement la politique des pouvoirs
publics en matière de revenus, de salaires, de prix, etc., et à mobiliser
l’appui des entreprises privées en vue d’objectifs communs de carac­
tère social.
6. Par comparaison avec les pays où prédomine l’économie de
marché, il est bien évident que l’Union soviétique et d’autres pays
d’Europe orientale et d’Asie ont un système profondément différent,
non seulement sur le plan politique mais encore sur le plan écono­
mique et social. Dans ces pays, les principaux moyens de production
sont détenus et gérés soit par l’Etat, soit par des coopératives. Les
entreprises orientent leur production, non pas en fonction de la situa­
tion qui prévaut sur le marché, mais conformément au plan national.
Aussi les plans ont-ils, dans ces pays, un rôle tout différent de celui
qu’ils ont dans les économies de marché. Dans ces derniers, ils ont
pour objet d’orienter et de coordonner la politique des pouvoirs
publics et d’assigner des objectifs cohérents à la production et aux
investissements dans les principales branches de l’économie; ce n’est
que rarement qu’ils se substituent aux décisions particulières de la
direction des entreprises. Dans les premiers, au contraire, les plans
servent à déterminer et à diriger l’activité économique sur l’ensemble
du territoire.
7. La situation politique et sociale, ainsi que le niveau de dévelop­
pement, ne détermine pas seulement les objectifs et les buts généraux
de la planification; elle trace également les limites dans lesquelles
peut s’effectuer le choix entre les différents instruments d’application
de la politique. Cependant, les objectifs des plans et les moyens
retenus pour leur exécution ne sont pas de ces décisions qui peuvent
se prendre indépendamment l’une de l’autre. Si les méthodes d’exé­
cution doivent être appropriées aux objectifs, il est vrai également
que les objectifs doivent être choisis avec réalisme, en fonction des
moyens d’exécution dont les pouvoirs publics disposent. Par exemple,
dans les pays développés dont l’économie repose sur l’entreprise
privée, il y a nécessairement un rapport entre la nature des mesures
de planification et le fait que la plupart des décisions économiques
sont prises par les particuliers et que les pouvoirs publics n’exercent
qu’une influence indirecte sur ces décisions, principalement par leur
politique fiscale et monétaire générale; cet état de choses explique
que le but principal de la planification a été généralement l’utilisation
totale des ressources économiques accrues dont les pays disposent
grâce au progrès technique et à l’accroissement de population; dans
quelques rares cas également, ils ont eu pour but de modifier les
utilisations finales de ces ressources. En revanche, dans les pays à
économie planifiée, la gestion de la plupart des activités économiques
a été placée sous le contrôle direct des pouvoirs publics et, par suite,
l’Etat a joui d’une plus grande liberté pour choisir ses objectifs.
L’objectif économique principal a été de maintenir le taux d’augmen­
tation de la production et d’accroître le volume de la consommation;
mais on a également accordé beaucoup d’importance à un objectif
politique plus lointain: la transformation du cadre social dans lequel
s’effectuent la production et la distribution. Dans la plupart des pays
sous-développés, les moyens d’action à la disposition des pouvoirs
publics ont surtout été ceux qui existaient dans les économies fondées
sur l’entreprise privée ou dans les économies mixtes. Toutefois, l’en­
semble des mesures effectivement adoptées diffère considérablement
de celui qui caractérise les économies des pays développés, puisqu’il
a fallu avant tout adapter la structure économique et sociale existante
aux exigences du développement économique. Du point de vue de la
croissance économique de ces pays, ce sont les décisions relatives au
processus de formation de capital qui sont les plus importantes. Dans
les pays sous-développés, la nécessité de centraliser le processus de
formation de capital est due essentiellement au fait que le développe­
ment économique s’accompagne de changements structuraux rapides
et profonds. Les plans ont toujours eu pour but principal d’accélérer
le taux d’augmentation du revenu et de la production, seul moyen de
lutter contre la stagnation économique. Cela s’est traduit de façon
plus concrète par l’accélération de l’industrialisation, le développe­
ment de l’agriculture et la création d’une infrastructure économique
et sociale. Mais il existe d’autres objectifs auxquels il a fallu attribuer
une importance considérable; ce sont notamment l’augmentation de
la consommation par habitant, une répartition plus équitable du
revenu et des ressources, un développement régional mieux équilibré,
l’expansion des possibilités d’emplois et la création de conditions de
stabilité économique.
8. Il est clair que les différences que Ton constate entre les pays
dans leur expérience en matière de planification ne proviennent pas
seulement de celles qui existent entre leurs systèmes économiques et
sociaux. En effet, quel que soit le système social, la planification aux
stades avancés du développement diffère considérablement de ce
qu’elle était aux stades antérieurs. Même dans les pays ayant de nom­
breuses années d’expérience, les méthodes de planification ont dû
être modifiées parallèlement à l’évolution de la conjoncture écono­
mique et sociale. Dans de nombreux pays, des améliorations ont été
apportées tant aux méthodes de planification qu’à la politique éco­
nomique en fonction de l’expérience acquise et à mesure que les
services statistiques étaient renforcés.
9. Du point de vue des pays sous-développés, qui cherchent à pro­
fiter de l’expérience des autres en matière de planification, la diversité
même de cette expérience représente un avantage certain. Ce n’est pas
seulement que les pays sous-développés diffèrent entre eux tant par
leurs objectifs sociaux et la situation sociale dont ils doivent partir,
que par le stade de développement qu’ils ont atteint. C’est aussi que,
dans la plupart de ces pays, l’économie tout entière ne repose pas sur
une seule structure et un seul système économiques. Dans certains
d’entre eux, des secteurs tribaux ou semi-féodaux continuent d’exister
parallèlement à des secteurs organisés selon une économie de marché;
et, dans presque tous, l’action de l’entreprise privée et celle du secteur
public s’exercent concurremment. Ainsi, les mêmes méthodes de
planification ne sont pas uniformément applicables à tout le pays;
il faut nécessairement conserver une certaine souplesse dans le choix
des méthodes de façon qu’elles soient adaptées aux conditions qui
prévalent dans chaque secteur ou dans chaque région.
10. Dans de nombreux pays en voie de développement, les plans
ont tendu à mobiliser toutes les institutions existantes, publiques,
privées et coopératives, pour les tâches du développement économique.
On a considéré que l’action du secteur public et celle du secteur privé
ne s’excluaient pas mais au contraire se complétaient mutuellement;
on a donc cherché à donner au développement des activités économi­
ques dans le secteur privé une orientation qui corresponde à celle des
mesures nationales de planification de l’économie dans son ensemble.
Dans plusieurs pays où le secteur public s’est vu assigner un rôle de
plus en plus important dans l’expansion économique, le nombre et la
portée des possibilités offertes au secteur privé se sont accrus paral­
lèlement. En effet, pour être efficace, la planification présuppose la
participation plus ou moins active de toutes les diverses unités de pro­
duction qui composent l’économie, aussi bien que celles de la popula­
tion dans son ensemble. Quel que soit le pays, les plans ont peu de
chance d’aboutir s’ils ne bénéficient pas de l’approbation et de l’appui
du public. Dans les pays en voie de développement, le succès de la
planification dépend en fait étroitement de la façon dont la popula­
tion est disposée à répondre aux exigences du progrès économique.
Pour qu’un pays sous-développé puisse connaître une croissance éco­
nomique rapide, de nombreuses transformations structurelles et so­
ciales sont nécessaires. Or, dans les sociétés où certaines formes de
pensée et certains comportements traditionnels sont profondément
enracinés, le rythme de l’évolution est rarement suffisant sans l’inter­
vention active des pouvoirs publics. C’est pourquoi, en planifiant, on
a souvent voulu aller au-delà des facteurs purement économiques; on
a également prévu des mesures visant à assurer la coopération de
l’ensemble des citoyens et à accélérer les réformes sociales.
11. La volonté de poursuivre une politique de développement
économique efficace peut avoir en effet beaucoup plus d’importance
que la capacité technique de planifier. A la base, un plan est un en­
semble de mesures économiques exprimées sous forme d’objectifs
quantitatifs et de tâches définies. Des données insuffisantes et l’ab­
sence d'expérience technique lors de l’élaboration des plans peuvent
accroître la marge d’erreurs et rendre plus difficile l’établissement
de ces plans. Bien que de pareilles lacunes puissent compromettre le
choix de politiques efficaces permettant d’atteindre les objectifs na­
tionaux fixés, elles ne devraient pas porter atteinte à la volonté de
faire ce choix. L’un des principaux avantages du travail de planifica­
tion est justement qu’il aide à préciser et à formuler les idées quant
à la politique à suivre pour assurer le développement et, sans cet
effort pour identifier clairement ces mesures, tout ce que l’on entre­
prend pour lutter contre la stagnation ne peut manquer d’être grave­
ment compromis. De plus, la qualité des données et les compétences
techniques tendent à améliorer la planification. Mais il est plus im­
portant encore de comprendre que le processus de planification
lui-même peut faciliter le choix et l’application des politiques éco­
nomiques.
12. Dans le présent rapport, on n’a pas cherché à donner une
définition générale de la planification. Il s’agissait pour le groupe
d’entreprendre une étude sur « l’expérience acquise et les techniques
utüisées en matière de planification du développement économique
par les différents pays », proposition qui a été interprétée comme signi­
fiant qu’il convenait de procéder à un exposé des techniques de formu­
lation des plans et des méthodes d’exécution, ainsi que des aspects de
la planification qui sont liés aux questions d’organisation. Bien qu’il
soit plus facile, pour la clarté de l’exposé, d’examiner séparément la
formulation, l’exécution et l’organisation de la planification, il faut
reconnaître que ces différents aspects de la planification sont, en fait,
très étroitement liés. C’est seulement pour la clarté de l’exposition
que le présent rapport décrit et classe les pays comme pays d’entre­
prises privées ou d’économies mixtes d’ime part, et comme pays à
économies planifiées d’autre part, selon la coutume suivie dans les
documents des Nations Unies. On s’est toutefois efforcé, dans la
mesure du possible, d’insister surtout sur les aspects de la formula­
tion et de l’exécution des plans qui, malgré les différences de régimes
économiques et sociaux, présentent un intérêt commun.
Chapitre premier

LA FORMULATION DES PLANS

13. Si l'on élabore un plan, c ’est pour identifier et définir les po­
litiques qui permettront le mieux d’atteindre des objectifs économi­
ques et sociaux de nature générale. Tout plan fournit des principes
directeurs en traduisant ces objectifs généraux par des buts concrets
et des tâches précises assignés à des domaines d’activité économique
et sociale particuliers. Au moment de l’élaboration des plans, il y a,
dans tous les pays, des décisions à prendre au sujet de la réparti­
tion des ressources qui semble la plus efficace en regard des
objectifs généraux. D’autre part, les objectifs assignés à la produc­
tion et à la répartition des ressources doivent être compatibles
avec les possibilités économiques et techniques et ne doivent pas
exiger de la collectivité un effort au-dessus de ses moyens financiers.
Les techniques qui ont été mises au point pour formuler les plans
sont, en réalité, des instruments permettant de convertir les objectifs
généraux en programmes d’action concrets et réalisables.
14. Certes, ainsi qu’il ressort des analyses contenues dans le pré­
sent chapitre, les divers pays emploient, pour élaborer leurs plans,
des méthodes extrêmement différentes. D’une part, les techniques
utilisées sont généralement fonction des objectifs généraux de la po­
litique nationale; dans les pays qui cherchent à accélérer l’expansion
de la production et de la consommation et à introduire des modifica­
tions profondes dans la structure économique et sociale, les problèmes
à résoudre pour procéder à la planification et, de ce fait, les techni­
ques utilisées pour formuler les plans ne sont évidemment pas les
mêmes que dans les pays où la planification a pour objectif essentiel
d’assurer la meilleure utilisation possible des ressources accrues afin
de répondre aux besoins qu’ont fait apparaître les prévisions relatives
à l’évolution structurale de la demande. D’autre part, la nature des
plans qui ont été élaborés et les techniques utilisées dépendent de la
nature des instruments d’exécution qui sont à la disposition des pou­
voirs publics et qu’ils utilisent. Enfin, le choix des méthodes de plani­
fication dépend également dans une grande mesure du stade de déve­
loppement économique et subit l’influence de divers facteurs tels que
le degré d’intégration économique et les données disponibles pour
l’élaboration des plans.

L a p é r io d e d e p l a n if ic a t io n

15. Avant de pouvoir commencer réellement le travail de plani­


fication, il faut prendre une décision quant à la durée de la période
sur laquelle porteront les plans. Si la planification doit être continue.
elle doit s’appuyer sur un ensemble cohérent de plans de développe­
ment économique tant annuels qu’à moyen et à long terme. Les plans
à long terme de développement économique et social, portant à la
fois sur l’ensemble du pays et sur chaque région et secteur parti­
culiers, sont indispensables pour imposer l’orientation voulue au
développement économique, pour résoudre les problèmes graves qui
tendent à freiner le développement, pour créer de nouvelles branches
industrielles, pour assurer le développement d’ensemble de chaque
région et pour élever le niveau de vie général de la population.
16. Toutefois, les plans à long terme n’ont trait qu’à des tâches
et des objectifs extrêmement généraux et globaux. Ils doivent être
coordonnés avec des plans à moyen terme plus précis et plus concrets.
L’exemple de nombreux pays prouve que les plans de cette nature
sont généralement conçus pour des périodes de trois à sept ans. Cela
correspond approximativement au temps nécessaire pour construire
et mettre en service de grosses entreprises et des usines électriques,
pour réaliser des travaux d’irrigation et pour exécuter également des
programmes de reconstruction et d’aménagement de ports, de voies
ferrées et de routes. En outre, cette période permet de déterminer
avec assez d’exactitude l’orientation et les effets économiques proba­
bles du progrès technique. Enfin, la population peut trouver un en­
couragement à participer à l’exécution du plan dans les objectifs
assignés à celui-ci et les réalisations prévues pour une période de
moyenne durée, notamment : répartition des biens, amélioration des
services d’enseignement et de santé et augmentation du nombre
d’emplois et de la production individuelle.
17. En pratique, dans bien des pays sous-développés, la plani­
fication ne comprend pas encore un élément indispensable, à savoir
l’élaboration de plans à court terme annuels. Or, comme le prouve
l’exemple de certains pays, c’est en élaborant des plans annuels que
l’on peut relier de façon plus concrète les objectifs du développement
et les activités prévues en ce qui concerne les entreprises existantes
et l’exécution de nouveaux projets. En d’autres termes, les plans an­
nuels permettent de préciser les tâches envisagées dans les plans à
moyen et à long terme, en orientant de façon plus concrète le déve­
loppement de l’économie et en assurant la mobilisation de toutes les
ressources nationales.
18. Certains pays ont étudié la possibilité d’adopter des « plans
continus ». Ces plans consistent en plans à moyen terme de caractère
ininterrompu qui sont prolongés d’un an à l’achèvement de chaque
année du plan. Cette pratique a été suivie par quelques grandes entre­
prises et, en l’appliquant à un ensemble plus vaste, il serait peut-être
possible de l’adopter pour la planification nationale. On se rend
compte cependant que, dans un plan cohérent à moyen terme, les
principales grandeurs ont entre elles des rapports étroits et que, pour
prolonger le plan d’une année, il faut faire un examen complet et une
nouvelle formulation des hypothèses et des rapports fondamentaux.
Dans la pratique, on a donc cherché à assurer la continuité de la
planification par divers moyens. Ainsi, dans plusieurs pays, des plans
à long terme portant sur dix ans, par exemple, ont été établis pour
certains secteurs clefs de l’économie, dans lesquels la période de ges­
tation s’étend sur plusieurs années et qui nécessitent des investisse­
ments considérables. Dans certains pays en voie de développement,
bien avant l'achèvement d’un plan, on s'est efforcé d’élaborer de
nouveaux projets et de les approuver en principe, afin de faciliter les
mesures préliminaires nécessaires à l’établissement du plan suivant.
De cette manière, on peut assurer la continuité des avantages résul­
tant du plan et éviter qu’un trop grand nombre de projets se trouvent
reportés à la fin de la période sur laquelle porte le plan. Dans certains
pays, en même temps que chaque plan annuel, on a pris l’habitude
d’esquisser les grandes lignes du plan de l’année suivante, afin de
prévoir ou de prendre à l’avance les décisions requises les plus impor­
tantes. En fait, comme on peut s’y attendre, les principales décisions
prises au cours de la dernière phase d’exécution d’un plan ont trait,
pour une part, au plan suivant plutôt qu’au plan en cours. A mesure
que s’affermissent les méthodes appliquées pour l’établissement des
plans à long terme et des projections portant sur l’ensemble de l'éco­
nomie et ses différents secteurs, l'objectif fondamental des « plans
continus » devrait être réalisé plus complètement en tant que partie
intégrante du processus de planification.

Pays dont l’économie repose sur l’entreprise privée


et pays à économie mixte

1. — R appo rts e n t r e l e s plans g lo bau x e t l e s plans pa r se c te u r

19. Dans bien des pays sous-développés, la planification com­


mence par l’élaboration de plans par secteur. Il arrive, par exemple,
que l’on formule des plans intéressant le secteur industriel, le secteur
agricole ou le secteur des services publics essentiels parce que les
pouvoirs publics de ces pays estiment que le développement de ces
secteurs est devenu indispensable à la croissance économique dans
son ensemble. Le plus souvent, toutefois, il s'agit plutôt de plans
partiels, c’est-à-dire des programmes d’investissements dans le seeteur
public, qui permettent de coordonner les dépenses d’investissement
des divers départements gouvernementaux et d’y introduire un ordre
de priorité.
20. Ces plans par secteur ou plans partiels présentent un incon­
vénient: ils ne sont pas toujours formulés dans le contexte général
d’une évaluation judicieuse des besoins et des ressources de l'éco­
nomie tout entière et des possibilités qu'elle offre. Il est souvent im­
possible d’éviter cet inconvénient, surtout dans les pays les moins
développés, lorsqu’on ne dispose pas des renseignements nécessaires
pour procéder à une telle évaluation, notamment de données relatives
au niveau et à la composition de la production et des dépenses totales.
En pareil cas, on ne peut établir un rapport entre les plans par secteur
10 PLANIFICATION EN VUE DU DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE

et les ressources et les besoins globaux que sur la base de jugements


qualitatifs. Si ce défaut tend à aggraver la marge d'erreur inhérente
à tout travail de planification, il est à noter que, dans certaines des
économies les plus développées, la planification a également com­
mencé par l’élaboration de plans par secteur. C’est ainsi qu’en France,
pendant les années qui ont immédiatement suivi la guerre, on ne dis­
posait pas des statistiques nécessaires à l’élaboration d’un plan global
et que le premier plan se bornait à établir un ordre de priorité pour
certaines industries et pour certains secteurs clefs dont on estimait
le développement essentiel au relèvement de l’économie.
21. Cependant, il est généralement admis, semble-t-il, que si l’on
manque des données nécessaires à la formulation de plans globaux,
11 faut s’efforcer de combler cette lacune aussi rapidement que pos­
sible. Les plans par secteur indiquent le niveau prévu de la produc­
tion, et la composition de celle-ci, ainsi que les ressources productives
nécessaires pour que puissent être atteints les objectifs fixés à l’inté­
rieur de chaque secteur. Mais ces plans ne sont généralement réali­
sables que s’ils ne sont pas incompatibles avec certains facteurs
limitatifs, dont la nécessité de préserver l’équilibre entre les investis­
sements et l’épargne, l’équilibre entre l’offre et la demande de
main-d’œuvre et celui de la balance extérieure. Or, le seul moyen de
vérifier si cette condition est remplie consiste à opérer dans le cadre
d’un plan global.
22. Quant aux pays sous-développés qui formulent des plans glo­
baux, les plans relatifs aux principaux secteurs de la production sont
formulés au moment de l’élaboration du plan global. Tout d’abord,
les objectifs originellement assignés à la production dans chacun des
secteurs principaux sont, dans bien des pays, établis à partir de pro­
jections du niveau et de la structure du revenu et des dépenses,
obtenues au moyen d’un modèle global. Souvent, c ’est en recourant
à une série d’approximations successives que l’on peut élaborer alors,
les plans par secteur et vérifier qu’ils ne sont pas incompatibles les
uns avec les autres et n’excèdent pas les possibilités offertes par
l’ensemble des ressources disponibles. Tout au long des travaux de
planification, on doit donc procéder à un ajustement continuel des
plans globaux, des plans par secteur et des projets individuels jusqu’à
ce que l’on puisse enfin mettre au point un plan cohérent et viable;
de ce fait, la formulation d’un plan d’ensemble oblige à procéder à
une synthèse de tous les plans aux différents échelons.
23. Progressivement, les plans globaux et les plans par secteur
s’intégrent nécessairement en un plan unique d’ensemble, mais il n’en
reste pas moins que, dans tous les pays, les mesures préliminaires de
planification consistent à mettre au point un modèle général de l’éco­
nomie. A l’origine, ces modèles étaient conçus et utilisés de manière
à faciliter l’élaboration de politiques anti-cycliques dans les économies
développées fondées sur l’entreprise privée, où l’on se préoccupait
surtout de maintenir la demande réelle à un niveau suffisant. Ils ser­
vaient à construire des projections du niveau de l’activité économique
qui pourrait résulter de jeu des forces du marché à l’intérieur de la
stracture économique et institutionnelle existante. En considérant
comme données les équations de comportement et les relations tech­
niques principales, on cherchait à déterminer les niveaux de la de­
mande réelle et de l’emploi réel auxquels l’économie atteindrait un
équilibre stable. Si ces modèles, fondés comme ils le sont sur des
rapports globaux établis essentiellement en fonction de l’expérience
acquise en matière d’économie de marché, étaient les seuls éléments
servant à formuler, à moyen et à long terme, des plans matériels et
financiers plus détaillés, il y aurait évidemment lieu de mettre en
doute, pour la planification du développement économique, la valeur
des résultats obtenus. Toutefois, en formulant des plans d’exécution
de cette nature, on n’a pas manqué de procéder à une adaptation
judicieuse, afin que les modèles généraux se prêtent mieux à cette
nouvelle tâche. Certes, on a continué à se fonder surtout sur les équa­
tions de comportement et les relations techniques principales, telles
que la propension à l’épargne et à l’importation, qui sont importantes
pour l’établissement des modèles, qu’ils soient à long ou à court
terme. Mais on a aussi tenu dûment compte des relations typiques
à long terme, notamment du rapport global capital-production.
24. Il est évident que, dans les pays qui ont cherché à modifier
profondément la structure économique, les relations sur la base des­
quelles les modèles généraux ont été construits n’ont souvent pas pu
être déduites de l’expérience passée; il a fallu, pour les évaluer, user
de moyens plus appropriés, et tenir compte des modifications futures
de la structure de l’économie ainsi que des intentions des pouvoirs
publics. Par exemple, l’augmentation du niveau de l’épargne, qui est
un but commun à tous les pays sous-développés, dépend étroitement
en général des tendances probables de l’épargne publique. Les pou­
voirs publics doivent par conséquent se prononcer au sujet de la
politique qu’ils se proposent de poursuivre, en matière de fiscalité et
de dépenses publiques courantes. De fait, l’un des avantages parti­
culiers de la construction d’un modèle général est qu’elle aide à mon­
trer de façon concrète dans quelle mesure les politiques suivies doi­
vent être modifiées si l’on veut augmenter le niveau de l’épargne dans
une proportion donnée; les gouvernements, et le public qui supporte
leur action, peuvent comparer les avantages lointains qu’ils retire­
raient d’une augmentation du volume de l’épargne et les résultats
immédiats de cette augmentation: relèvement des impôts, ou limita­
tion des dépenses courantes. Pour estimer le niveau probable de
l’épargne globale, les pays sous-développés ont dû par conséquent
établir des projections détaillées des recettes et des dépenses publi­
ques et procéder à une analyse de l’épargne privée et de leur capacité
à emprunter et à rembourser des capitaux étrangers. En fait, il n’y
a qu’un petit nombre de ces pays qui ont entrepris un travail aussi
détaillé, mais la nécessité n’en est pas moins évidente. Ces études et
les décisions des pouvoirs publics en matière de politique fiscale et
budgétaire sont les seuls éléments qui ont permis d’évaluer avec une
certaine justesse le niveau global des investissements qui pourraient
être réalisés. De même, pour obtenir des estimations sûres du rapport
global capital-production ou de la fonction d’importation, on s'est
fondé non seulement sur la tendance antérieure de ces relations mais
aussi sur ime analyse détaillée des besoins en capitaux et en importa­
tions qui découlent de la composition prévue de la production et de
la demande intérieures.
25. C’est ce qui a progressivement modifié le rôle des modèles
généraux dans la formulation des plans. Il est vrai que la plupart des
pays ont entrepris la construction de ce genre de modèle pour édifier
un cadre général dans lequel ils fixeraient le niveau de la production
globale recherchée et sa répartition entre la consommation, les inves­
tissements et les exportations. Comme prélude à la répartition systéma­
tique des ressources, on a tout d’abord évalué le taux d’accroissement
possible de la production globale et des importations, la répartition
des revenus additionnels entre l’épargne et l’investissement et le
taux d'accroissement de la consommation et des exportations. Toute­
fois, lorsque la planification a été poussée au plus loin et les plans
matériels et financiers élaborés en détail, on a souvent été amené
à modifier sensiblement les objectifs fixés à l’origine à partir du mo­
dèle général. Ainsi, la planification globale a consisté moins à cons­
truire des modèles permettant de définir les modifications à apporter
à la composition de la production et à la répartition des ressources
qu’à vérifier la compatibilité et la viabilité générales des plans de
production par secteurs.

2. — P l a n if ic a t io n d e l a p r o d u c t io n e t r é p a r t it io n d e s r e s s o u r c e s

a) Eléments déterminants de la répartition des ressources

i) Planification des investissements et de la consommation


dans les pays sous-développés
26. La répartition des ressources entre les investissements et la
consommation est une décision essentielle dans l’élaboration des
plans. La politique constante des pays sous-développés tend à augmen­
ter la part des ressources allouées aux investissements afin d’accélérer
le rythme de la croissance économique. Cependant, les buts visés, en
matière d’investissements, sont nécessairement fixés en fonction des
possibilités. S’ils ne permettaient pas aux pouvoirs publics de main­
tenir un équilibre dynamique entre l'épargne et les investissements,
leur réalisation provoquerait une pression inflationniste intérieure ou
une aggravation de la balance extérieure. Bien entendu, dans beau­
coup de pays sous-développés, la possibilité d’élever rapidement le
taux de l’épargne et des investissements est strictement limitée par
le niveau généralement très bas du revenu par habitant. Il n’en de­
meure pas moins que la nécessité d'augmenter le taux de l’épargne
exige des politiques appropriées. De grands efforts ont déjà été
déployés dans ce sens, mais il reste plus à faire encore pour remanier
et renforcer les politiques gouvernementales et les institutions finan-
cières qui peuvent être utilisées à cette fin. Bien que les buts aient dû,
pour rester dans les limites des possibilités, être fixés en fonction des
instruments dont disposaient les gouvernements, il a aussi fallu, en
raison de l’importance que présente une augmentation du taux de
l'épargne et de l’investissement dans les pays sous-développés, adapter
ces instruments aux objectifs d’ime croissance économique accélérée.
27. Pour fixer les buts à atteindre en matière d’investissements,
on a dû d’abord déterminer jusqu’à quel point il est possible d’aug­
menter le taux de l’investissement et de l’épargne. L’on verra qu’il
a fallu pour ce faire procéder à une analyse des niveaux futurs pos­
sibles de l’épargne privée et publique, ainsi qu’à une estimation du
courant futur de capitaux étrangers. Dans la plupart des pays sous-
développés, on n’a pu estimer qu’approximativement l’épargne privée;
c’est dans le domaine de l’épargne publique qu’on a pu faire les esti­
mations les plus détaillées. Comme l'évaluation des possibilités
d’élever le niveau de l’épargne et des investissements dans les pays
en voie de développement dépend largement de la politique fiscale,
il était normal que la plupart des plans feraient une place considé­
rable aux recettes et aux dépenses publiques.
28. Dans les pays sous-développés cependant, le problème de
l’augmentation du niveau de l’épargne et des investissements n’a pas
consisté uniquement à accroître la part du revenu consacrée à
l’épargne. Le volume des investissements dépend aussi de la possibi­
lité d’obtenir des biens de production en quantité suffisante. Il est
vrai que presque tous les pays sous-développés produisent couram­
ment certaines catégories de biens d’équipement — plus particulière­
ment des matériaux de construction — et qu’il est souvent possible
de mettre davantage à profit la capacité de production existante et
d’utiliser certains outillages de l’industrie des biens de consommation
pour produire certains biens d’équipement. Dans l’ensemble cepen­
dant, les pays sous-développés n’ont pas d’industries productrices de
biens d’équipement ou ces industries n'ont commencé que récemment
à se développer. Dans la plupart de ces pays, la possibilité d’obtenir
ces biens est donc fonction, pour une grande part, de la mesure dans
laquelle ils peuvent les importer. Cependant, étant donné que les
investissements comportent une part beaucoup plus élevée d’importa­
tions que la consommation intérieure, un accroissement des investis­
sements intérieurs a entraîné une augmentation des besoins en de­
vises. Si Ton excepte les pays sous-développés relativement peu
nombreux qui jouissent d’une balance des paiements favorable, la
capacité limitée d’importer des biens d’équipement est un obstacle
de plus à la possibilité d’augmenter les investissements. Les efforts
tendant à accroître la fraction du revenu consacrée à l’épargne ont
donc généralement dû être accompagnés de mesures destinées à
rendre disponible un volume croissant de devises pour les importa­
tions de biens d’équipement ou à augmenter la production locale de
ces biens. En d’autres termes, il a fallu, du moins en partie, établir les
politiques destinées à diriger ou à influencer la répartition des res­
sources courantes entre les divers secteurs ou projets en fonction de
l’effet qu’auraient sur l’offre future de biens d’équipement, les modi­
fications de la composition de la production qui en découleraient.
29. Cela signifie simplement que, pour augmenter le niveau des
investissements, il faut non seulement augmenter celui de l’épargne
financièrement parlant, mais aussi faire en sorte de disposer des res­
sources physiques nécessaires pour réaliser un accroissement cor­
respondant des investissements. Dans les pays en voie de développe­
ment, où l’un de objectifs principaux a été d’augmenter le niveau de
l’épargne et des investissements, on a donc accordé une grande impor­
tance à la nécessité d’adapter la structure de l’économie afin d’obtenir
un volume croissant de biens de production, ce qui a considérable­
ment influé sur les plans de production et la répartition des res­
sources.

ii) Planification des investissement et de la consommation


dans les pays à économies plus évoluées
30. Dans les économies plus évoluées, où un taux d’épargne
relativement haut a déjà été atteint, la politique suivie n’a pas eu
d’habitude pour but prédominant un changement important de la
part des investissements; les politiques que les gouvernements ont
appliquées n’ont eu généralement qu’une influence marginale sur la
part du revenu réservée à l’épargne. Dans ces conditions, le volume et
la répartition des investissements sont considérés en grande partie
comme des variables liées au niveau et au taux d’accroissement de la
demande finale de consommation. Il est donc naturel que l’on ait pris,
pour point de départ principal dans l’élaboration de plans de produc­
tion et d’investissements, le niveau de consommation privée et pu­
blique que l’on pensait atteindre à la fin de la période de planification.
En général, on a commencé par projeter le niveau probable de la
demande de consommation, en se fondant souvent sur les premières
hypothèses fournies par les modèles généraux quant au niveau pro­
bable de la production et du taux de croissance. Une fois connue
l’augmentation projetée de la consommation totale, on a évalué la
composition probable de la demande de consommation en se fondant
sur ce que l’on savait de l’élasticité de la demande par rapport au
revenu et sur d’autres considérations pertinentes. Cette analyse de la
demande de consommation, avec les plans de consommation publique,
a permis de fixer les objectifs de la production des services et des
biens de consommation finals. A partir de ces objectifs, on a calculé
quelle serait l’augmentation de la production de biens intermédiaires
nécessaire en se fondant sur les coefficients « consommation » de
corrélation entre les industries de biens intermédiaires et les indus­
tries de biens finals, ainsi qu’entre ces diverses industries. On a en­
suite recherché la mesure dans laquelle il fallait accroître la capacité
de production pour réaliser l’augmentation prévue de la production
de biens de consommation finals et intermédiaires, ce qui a permis
d’obtenir des indications sur ce que devait être l’augmentation des
disponibilités en biens d’investissement. Enfin, on a aligné sur les
plans relatifs au commerce extérieur les modifications de la produc­
tion ou des disponibilités que l’évolution de la demande intérieure
faisait apparaître nécessaires; on a évalué la production aux fins
d’exportation et on a choisi entre l’importation des produits néces­
saires ou leur production sur place.
31. La récente planification effectuée en France offre im exemple
frappant de cette méthode. Lorsqu’il a élaboré tout dernièrement ses
plans, le Gouvernement français a d’abord examiné plusieurs taux
possibles de croissance globale, puis a choisi un taux qui lui semblait
le maximum compatible avec des conditions d’équilibre, notamment
avec le maintien d’un équilibre dynamique entre l’épargne et l’inves­
tissement, l’emploi et l’offre de main-d’oeuvre, les exportations et les
importations, et les recettes et les dépenses publiques. Sur la base du
taux choisi, on a élaboré une esquisse préliminaire de la demande
finale au cours de la dernière année du plan, esquisse qui consistait
en une analyse des dépenses de consommation et renfermait des
hypothèses sur le commerce extérieur ainsi que sur les investisse­
ments requis pour que la croissance se prolonge au-delà de la période
sur laquelle porte le plan. A l’aide de cette description du niveau et
de la structure de la demande finale, on a pu estimer les besoins en
biens et en services intermédiaires et obtenir ainsi une matrice des
relations entre secteurs pour l’ensemble de l’économie en ce qui con­
cerne la dernière année du plan. Les estimations figurant dans le plan
préliminaire ont ensuite été vérifiées en détail par les diverses com­
missions qui représentent les différents secteurs industriels et par
les ministères compétents. Après plusieurs revisions successives, une
version définitive du plan a été mise au point.

iii) Influence des objectifs de croissance à long terme et du commerce


extérieur sur la planification de la répartition des ressources
32. Il est évident que, dans tous les pays, une certaine proportion
des investissements effectués pendant la durée d’un plan à moyen
terme ne vise pas à augmenter la production courante de biens de
consommation et de services, mais obéit à d'autres considérations de
portée plus vaste et plus lointaine. Les plans cherchent, évidemment,
pour une bonne part, à répartir les ressources entre les divers secteurs
et industries, de façon à augmenter la production de biens de con­
sommation et de services selon les variations probables ou prévues
du niveau et de la composition de la demande de biens de consom­
mation finale pendant la durée du plan. Mais ils visent aussi à répartir
les ressources entre les secteurs et les industries de façon à maintenir
ou à élever les taux de croissance dans les années suivant immédiate­
ment la durée du plan. Il a fallu, dans les pays en voie de développe­
ment, mettre surtout l’accent sur ce dernier aspect de la planification.
Car le but essentiel, dans ces pays, n’est pas simplement de maintenir
le taux d’augmentation de la consommation à un niveau compatible
avec le taux courant de l'épargne, mais plutôt d'augmenter ce dernier
afin d’accélérer l’accroissement de la production totale et, par là.
d’améliorer en fin de compte le niveau de vie. Il faut à cette fin
qu’une proportion importante des investissements courants serve à
augmenter dans l’avenir la capacité d’épargne et d’investissement de
l’économie plutôt qu’à élever les niveaux courants de consommation
par habitant.
33. En principe du moins, la répartition de la partie des investis­
sement destinée à augmenter la capacité de production de biens de
consommation et de services après l’expiration d’un plan à moyen
terme s’opère selon des critères qui ne diffèrent pas de ceux auxquels
obéit la répartition des investissements en vue d’une production
accrue de biens de consommation et de services pendant la durée du
plan. Dans les deux cas intervient une certaine conception de la struc-
ture souhaitable de la consommation future. En pratique cependant,
les plans d’investissements destinés à élever le taux d’accroissement
de la production de biens de consommation dans un avenir plus
éloigné exigent souvent une conception assez différente. Car plus on
cherche à voir loin, plus on doit s’attendre à des changements des
ressources disponibles, du niveau des connaissances techniques et de
la structure de la production et plus il est difficile — puisque ces
facteurs influent à leur tour sur les coûts et les prix relatifs — de
déterminer d’avance ce que sera la demande dans l’avenir. En consé­
quence, les investissements destinés à augmenter la capacité de pro­
duction à longue échéance sont généralement basés moins sur une
analyse détaillée de l’évolution probable de la consommation que sur
des considérations générales touchant les secteurs qui ont une impor­
tance capitale pour la croissance de l’économie. Les plans relatifs à ce
genre d’investissements tiennent plus directement compte de l’inter­
dépendance des modifications structurelles de l’économie et de la
croissance économique à long terme.
34. Outre les objectifs tendant à modifier, à l’avenir, la part des
investissements dans la production, un autre facteur qui a eu ime
importance variable, dans l’établissement des plans de production et
de répartition des ressources, a été le rôle du commerce extérieur
dans l’économie. Quelle qu’ait été la politique nationale à l’égard de la
part du commerce extérieur dans l’économie, on a dû, pour établir les
plans, déterminer quels étaient les produits qu’il était plus avantageux
de produire sur place ou de se procurer à l'étranger grâce à l’exporta­
tion d’autres produits. De telles décisions n’ont pu être prises qu’après
une certaine analyse des possibilités de production intérieure et une
comparaison des coûts intérieurs et des prix étrangers.
35. Pour les pays développés, ayant des ressources naturelles
variées, l’intégration du commerce extérieur dans les plans de pro­
duction intérieure n’a pas représenté nécessairement un aspect im­
portant du problème de la planification de la production. Mais, dans
les pays en voie de développement, cette intégration a constitué un
élément essentiel de la planification. Dans les petits pays en parti­
culier, la question de la composition probable de la demande de con­
sommation intérieure a perdu beaucoup de son importance; c’est la
demande extérieure et non intérieure qui a surtout retenu l’attention.
Pour planifier leur production et la répartition de leurs ressources, ces
petits pays se sont fondés surtout sur les possibilités d'exportation
qui s'offraient à eux; ils ont donc dû prêter une attention particulière
à l’analyse de l’offre. Les ressources naturelles, la main-d’oeuvre
qualifiée disponible et les prix relatifs des facteurs ont été les élé­
ments les plus importants de la planification. Certes, les pays doivent
tenir compte également de la mesure dans laquelle ils peuvent accéder
aux marchés extérieurs; les obstacles que d’autres pays imposent au
commerce peuvent les obliger à renoncer à développer la production
de certains articles qui, autrement, du seul point de vue du coût,
serait préférable. Mais pour les très petits pays, il n’en est pas moins
vrai que c’est généralement l’offre intérieure plutôt que la composi­
tion de la demande intérieure qui régit la planification de la réparti­
tion des ressources.
36. La planification de la production et de la répartition des
ressources a donc toujours été fortement influencée par l’importance
attachée à l’accroissement de la consommation ou de l’investissement
d’une part, et par celle du commerce extérieur d’autre part. En raison
des niveaux très bas du revenu par habitant qui existent dans beau­
coup de pays sous-développés, il a été souvent difficile de modifier
sensiblement les taux d’épargne et d’investissement pendant la durée
des plans à moyen terme; c ’est plutôt d’une transformation à plus
long terme que l’on attend, dans ces pays, le passage d’un faible taux
d’épargne à un taux élevé. Il a donc fallu attacher une grande impor­
tance aux plans d’accroissement de la production courante des biens
de consommation, ne serait-ce que pour maintenir ou améliorer légère­
ment les normes actuelles de la consommation pour faire face à un
accroissement démographique rapide. Cependant, les plans définitifs
sont en général modifiés sensiblement en fonction de l’idée que l’on
se fait des transformations structurelles à long terme nécessaires au
développement économique, ainsi qu’à l’orientation permettant d’ob­
tenir comparativement les plus grands avantages sur le plan du com­
merce international. Une telle analyse, aussi bien de la composition
de la demande que des transformations structurelles nécessaires à la
croissance à plus long terme, n’indique pas nécessairement à quels
projets particuliers il convient de donner la préférence, mais permet
en général de déterminer dans ses grandes lignes la priorité à accor­
der aux principaux secteurs de la production: industrie, agriculture
et services de base, industries produisant des biens de consommation
et industries produisant des biens d’investissement, ou industries pro­
duisant des biens d’exportation et industries produisant pour le marché
intérieur.
b ) Répartition des ressources par secteur
37. Les buts précis fixés pour les investissements dans les diffé­
rents secteurs de l’économie, tels que l’agriculture, l’industrie, la
production d’énergie, les moyens de transports et les services sociaux,
varient forcément selon les conditions économiques existant dans
chaque pays. Les secteurs clefs de la croissance économique ne dif­
fèrent pas seulement d’un pays à l’autre, mais aussi, pour un même
pays, selon son degré de développement. Il convient d’étudier l’impor­
tance relative des investissements pour les différents secteurs et à
l’intérieur de chaque secteur afin de pouvoir déterminer la politique
de développement à adopter dans des conditions données et à un
stade déterminé du développement d’un pays. Cette étude doit s’ap­
puyer sur une analyse minutieuse de la structure économique existante
dans ses rapports avec les objectifs nationaux et les moyens disponi­
bles pour leur réalisation.

i) Objectifs des activités productives


38. Les objectifs qui peuvent être fixés dépendent dans une grande
mesure de la phase de développement dans laquelle se trouve le pays
en question. Par exemple, dans certains des pays en voie de dévelop­
pement les plus grands et les plus évolués, on a insisté, au cours des
dernières années, sur le développement de l’industrie lourde et des
industries mécaniques. Lorsqu’on avait largement exploité la possibi­
lité de produire des biens de consommation pour réduire les importa­
tions et que le commerce extérieur ne pouvait en aucune façon per­
mettre, à lui seul, de faire face aux besoins croissants en biens
d’équipement, le développement de ces industries a paru le meilleur
moyen de maintenir la croissance intérieure. Les gouvernements ont
donc adopté des politiques visant à favoriser le développement orga­
nique de groupes d’industries connexes, l’un des principes directeurs
étant l’utilisation maximum des ressources potentielles et l’exploita­
tion à long terme des économies externes.
39. Dans les pays les moins développés, les buts visés au stade
initial du développement ont dû être fixés différemment. Dans beau­
coup d’entre eux, les importations ont pu être réduites considérable­
ment grâce à la production industrielle et agricole de biens de con­
sommation finals ou intermédiaires. Les modifications à apporter,
dans un avenir prévisible, à la structure de la production ont dû être
conçues de manière surtout que celle-ci permette de faire face, grâce
à la production locale, à la demande intérieure de biens de consom­
mation finals et intermédiaires et d’accroître la capacité d’exportation.
Certaines possibilités se sont fait jour pour la production locale de
biens d’investissement, mais la plupart de ces biens ont dû être im­
portés pendant la période de développement initiale.
40. Quel que soit le type de développement industriel recherché
par tel ou tel pays sous-développé, on s’est rendu compte partout
qu’im rythme rapide d’industrialisation et de croissance économique
généralisée ne peut être maintenu longtemps sans une augmentation
de la capacité productive du secteur agricole. En fait, la modernisa­
tion de ce secteur a posé à la plupart des pays sous-développés l’un
des problèmes les plus ardus auxquels ils aient eu à faire face au
cours de la planification de leur développement économique. L’aug­
mentation constante de la quantité de produits alimentaires et de
matières premières agricoles offerte aux zones urbaines était l’une des
conditions du développement industriel, et il a fallu, afin d’éviter
l’inflation ou un accroissement des importations de produits agri­
coles, déployer des efforts soutenus pour accroître la productivité de
l’agriculture nationale. Outre les problèmes qui se sont posés dans
l’exécution des plans relatifs au secteur agricole, qui seront examinés
au chapitre suivant, l’élaboration de ces plans s’est invariablement
heurtée à des difficultés particulières. L’état des institutions agricoles
de beaucoup de pays, l’analphabétisme général et l’ignorance des
techniques modernes et la vulnérabilité des récoltes aux intempéries
sont des sources évidentes de difficultés. Mais de plus, la planification
du secteur agricole est souvent entravée par des difficultés d’organi­
sation. Comme de nombreux producteurs indépendants sont dispersés
sur l’ensemble des zones rurales, les liens par lesquels le gouverne­
ment central communique avec les divers producteurs sont souvent
ténus; ce fait, outre qu’il limite les possibilités d’exécuter les plans,
implique que les renseignements sur les conditions agricoles néces­
saires à l’élaboration de plans font souvent défaut.

ii) Objectifs des services sociaux


41. L'on s’est borné jusqu’ici à discuter de la répartition des in­
vestissements entre les secteurs productifs de l’économie, mais il ne
faut pas oublier qu’une croissance économique rapide dépend de la
réalisation de certaines conditions sociales préalables. On doit, en
répartissant les ressources, tenir dûment compte des rapports fonda­
mentaux qui existent entre le développement économique et le déve­
loppement social. Beaucoup d’activités rangées parmi les services
sociaux sont en fait directement liées aux objectifs économiques;
quelques-unes des plus importantes sont l’enseignement professionnel
et technique, le développement de l’enseignement élémentaire et se­
condaire, la recherche scientifique, le développement des services sani­
taires, la planification de la famille, l’urbanisme et l’aménagement des
campagnes, et le logement des travailleurs industriels. L’expérience
montre que, s’il faut insister dans les phases initiales sur certaines
activités productives, on atteint vite le stade où les progrès économi­
ques se ralentissent ou ne peuvent pas se poursuivre de façon adéquate
en raison de faiblesses inhérentes aux facteurs humains et sociaux du
développement.
42. La fraction des ressources qu’il convient d’allouer à l’expansion
des services sociaux doit être déterminée dans le cadre du régime
politique et social général. Il faut cependant, avant de prendre des
décisions de cet ordre, essayer de définir et d’évaluer les avantages
supplémentaires que l’on peut attendre d’un accroissement des dépen­
ses consacrées aux services sociaux; ces avantages sociaux doivent
être suffisants compte tenu des ressources limitées dont on dispose.
43. Les avantages résultant de l’accroissement des dépenses con­
sacrées aux services sociaux doivent être évalués à deux points de vue.
D’une part, l’amélioration des services sociaux, par exemple, des ser-
vices de santé ou d'enseignement, contribue directement à l'amélio­
ration du niveau de vie. D’autre part, les services sociaux aident à
augmenter la productivité de la population active et contribuent ainsi
indirectement à l’expansion de la production totale. On peut attendre
de presque toutes les dépenses consacrées aux services sociaux une
contribution positive à l’amélioration des conditions de vie. Cepen­
dant, si l’on veut maintenir un développement social et économique
équilibré, il faut que l’expansion des services sociaux reste dans un
rapport raisonnable avec l’accroissement de la production de produits
de base et d’autres services. Par exemple, les efforts tendant à amé­
liorer la santé de la population exigent, entre autres, une amélioration
des normes alimentaires grâce à l’accroissement et à la diversification
de la production agricole. En pratique, on tend de plus en plus depuis
quelques années à évaluer les programmes sociaux en fonction de
l’effet qu’ils peuvent avoir sur la productivité de la population active
et sur l’accroissement de la production totale. Dans le domaine de
l’enseignement, des travaux considérables ont été entrepris récem­
ment dans plusieurs pays en vue d’évaluer non seulement le nombre
de travailleurs qualifiés de chaque catégorie nécessaires à une crois­
sance continue, mais aussi l’importance du rôle de l’enseignement et
de la recherche dans cette croissance.
44. Sur le plan humain, la nécessité d’accroître les services so­
ciaux dans les pays sous-développés est évidente. Le nombre de
médecins, d’infirmières et d’hôpitaux est lamentablement insuffisant
dans beaucoup de pays. En même temps, il existe d’importants sec­
teurs de la population, dans des groupes à faible revenu, ou dans des
régions arriérées, qui ne pourront contribuer à la croissance écono­
mique que si l’on développe les services d’enseignement et de santé
et les autres services sociaux. On reconnaît cependant que les ressour­
ces globales étant limitées, il n’est pas toujours possible d’allouer des
fonds suffisants aux services sociaux et qu’il faut souvent, dans ce
domaine, établir des priorités. Ces considérations n’ont d'autre but
que de souligner la nécessité de relier aussi clairement que possible
les programmes éducatifs et sanitaires et les autres programmes so­
ciaux aux plans généraux de développement car c’est dans ce contexte
que l’élaboration et l’évaluation de programmes d’amélioration sélec­
tive des services éducatifs, sanitaires et autres peuvent être entre­
prises avec les meilleures chances de succès.

c) Choix des projets


45. La planification de la production et de la répartition des res­
sources doit permettre en fin de compte de déterminer les industries
ou les projets particuliers à instituer ou à développer. Les plans géné­
raux concernant la production et la répartition des ressources ont
pour objet d’indiquer les modifications à apporter au niveau et à la
structure de la production pour atteindre les objectifs fixés quant au
taux d’accroissement de la production totale et à sa répartition entre
l'investissement et la consommation. Mais, pour exécuter ces plans,
il faut procéder à une ventilation par industrie et par projet; lorsqu'on
passe des plans généraux aux projets particuliers, certains problèmes
d’exécution importants se posent.
46. Dans les économies essentiellement fondées sur l’entreprise
privée ou dans les économies mixtes, la planification suppose, de par
sa nature même, que les pouvoirs publics essaient d’obtenir un niveau
et une structure de la production différents de ceux qui résulteraient
des seules forces du marché. Dans les pays sous-développés notam­
ment, l’un des buts importants de la planification est de modifer la
répartition du revenu entre la consommation et l’investissement. Pour
des raisons fort connues, cependant, le critère de la rentabilité à
l’échelon privé ne permet parfois pas, à lui seul, d’obtenir une struc­
ture de la production compatible avec ces modifications souhaitées.
Un problème pratique important qui se pose dans ces pays est donc
l’application de mesures gouvernementales de nature à amener les
détenteurs de capitaux privés à faire des investissements qui répon­
dent aux objectifs fixés par les plans.
47. Dans un grand nombre d’économies fondées sur l’entreprise
privée ou d'économies mixtes, on peut considérer qu’il s’agit d’une
question d’application, plutôt que de formulation, des plans. Dans les
plans de ces pays, les objectifs concernant la production et la répar­
tition des ressomrces n’ont souvent été fixés que pour les principaux
secteurs de la production ou pour les principaux groupes industriels;
aucun objectif précis n’a été indiqué pour les diverses industries ou
les divers produits. Comme un grand nombre de décisions concernant
les investissements, notamment dans les secteurs de production, sont
prises par des entreprises privées, on a jugé inutile d’arrêter en détail
des plans de production et d’investissements. Cependant, cette ab­
sence d’objectif précis a du même coup rendu plus difficile la mise au
point de mesures gouvernementales visant à influencer l’orientation
des investissements privés. Les ministères chargés, par exemple, de
délivrer les licences d’importation ou les permis relatifs aux matériaux
de construction, ou d’arrêter la politique à suivre en matière de droits
de douane, d’impôts et de crédit n’ont pu se fonder à cet égard sur
un ordre de priorité établi pour les diverses industries ou les divers
produits; ils ont dû recourir à des critères plus généraux et plus
vagues. On a suggéré plusieurs critères ou formules de ce genre pour
faciliter l’évaluation sociale des projets. Mais il subsiste généralement
une difficulté tenant à ce que les avantages publics, par opposition
aux avantages privés, que l’on peut retirer d’un projet ne sont pas,
par définition, mesurables au moyen du système des prix. En pratique,
les ministères ont donc dû généralement interpréter les préférences
du public par leurs propres moyens et sans pouvoir recourir à un
ordre de priorité quantitatif.
48. Dans quelques pays, les plans ont été formulés de façon assez
détaillée pour diminuer considérablement ce problème. Les plans
nationaux fixent des objectifs détaillés pour les investissement dans
chaque secteur et chaque branche d'activité, évalués en fonction des
capitaux et des devises étrangères qui sont nécessaires pour réaliser
les modifications souhaitées de la structure de la production. Mais,
bien que la répartition des investissements par secteur et par branche
d’activité soit spécifiée dans le plan et puisse être réalisée par les
pouvoirs publics soit directement, soit au moyen de mesures indi­
rectes visant à influencer l’orientation des investissements, il reste
encore à choisir entre les divers projets conçus à des fins analogues.
Les pays doivent choisir entre plusieurs moyens soit de parvenir au
même niveau de production soit de se procurer ou d’économiser le
même montant de devises. En d’autres termes, il faut choisir, d’une
part, entre les méthodes permettant de combiner les ressources pro­
ductives dans des proportions différentes pour obtenir une marchan­
dise et entre l’importation d’une marchandise en échange de la pro­
duction et de l’exportation d’un autre produit.
49. On peut noter en passant que le problème se ramène bien, en
pratique, à ces deux séries de choix. Théoriquement, il est plus com­
plexe, car le choix entre plusieurs méthodes de production influe sur
les prix relatifs et, partant, sur la composition de la demande. Pour
résoudre entièrement le problème, il faudrait théoriquement établir
un modèle d’équilibre général dans lequel on connaîtrait la composi­
tion de la demande et de l’offre sur tous les marchés de produits et
de facteurs, ainsi que les fonctions de production de tous les produits.
Cependant, comme la planification s’effectue dans un contexte dyna­
mique où la composition de la demande, les ressources productives
disponibles et les techniques sont toutes variables, cette méthode est
inapplicable. En fait, le choix entre les divers projets a toujours été
effectué en fonction des ressources nécessaires soit pour obtenir la
même production matérielle ou une production à peu près équivalente,
soit pour se procurer ou économiser le même montant de devises.
Néanmoins, vu les données statistiques dont on disposait, l’effet des
différents choix sur les prix et la demande du produit a été souvent
difficile à évaluer; cela est encore plus vrai quand il s’agit de l’effet
des différents choix sur le reste de l’économie. Il est vrai que, dans
certains pays, les études sont allées jusqu’à comparer les profits et
les coûts, mais il faudra étudier ce domaine de façon plus systéma­
tique.
50. Dans les pays sous-développés, le choix entre les projets à
l’intérieur des divers secteurs a parfois été encore plus difficile du
fait que le coût des facteurs de production aux prix du marché ne
correspondent pas exactement à leur rareté relative. Cela s’applique
tout particulièrement au coût des principaux facteurs de production,
notamment aux taux d’intérêt, aux taux de change et aux salaires.
L’épargne, intérieure ou extérieure, est faible, mais elle est générale­
ment offerte à im prix très inférieur à sa valeur marginale pour la
production. Il en est évidemment ainsi de l’épargne du Trésor public,
mais également pour les emprunts étrangers qui, dans certains cas
tout au moins, sont consentis à des taux d’intérêt très modérés. De
même, le coût de change est rarement conforme à sa vraie valeur
marginale. Inversement, le niveau habituel des salaires aurait ten­
dance à surestimer le coût social de la main-d’œuvre, la main-d’œuvre
sans emploi ou peu employée étant relativement facile à se procurer
et peu coûteuse. Si l'on utilise le coût des facteurs de production aux
prix du marché pour juger de la rentabilité des projets et en faire
un des facteurs principaux de sélection, on risque donc de commettre
de graves erreurs; on risque de choisir, par exemple, des projets qui
dépendent trop des importations ou demandent trop de capitaux
compte tenu du stade de développement du pays. Cette conclusion
demeure valable même si l’on tient compte du fait que les prix devant
servir à comparer les divers projets sont ceux qui servent à évaluer
les facteurs de production tels qu’ils seraient une fois que le pro­
gramme d’investissement aurait produit tout son effet sur l’offre de
facteurs; généralement, ces prix ne permettent pas non plus d’évaluer
leur rareté relative. C’est pourquoi, on a souvent soutenu qu’il fau­
drait, pour évaluer les coûts publics, substituer aux prix du marché
des prix comptables ou des prix fictifs, qui permettraient d’estimer
avec plus d’exactitude cette rareté relative. Cependant, l’emploi de ces
prix a souvent été gêné par la difficulté d’estimer leur juste valeur.
Mais les valeurs exactes diffèrent souvent si nettement des prix prati­
qués sur le marché que même une approximation peut suffire à
améliorer nettement le choix des projets.
51. La question du choix entre plusieurs projets s’est posée égale­
ment, non seulement dans le cas où plusieurs moyens s’offrent pour
obtenir ime même production destinée au marché intérieur mais en­
core dans le cas du commerce extérieur. Dans ce dernier cas, quelques
pays ont essayé des méthodes de choix qui, en principe, équivalent
à l’emploi d’un taux de change comptable. Dans un pays en voie de
développement, par exemple, le coût en capital et le coût actuel de
chaque projet ont été ventilés en fonction de leurs éléments produits
sur place et de leurs éléments importés. On a également évalué les
recettes provenant de l’exportation des produits qui seraient fabri­
qués au titre du projet, ou la réduction des importations que l’on
pourrait ainsi réaliser. En combinant l’élément intérieur et l’élément
devises des coûts et des recettes, on a pu calculer le montant net des
devises que le projet permettrait d’obtenir ou d’économiser pour
chaque unité de coût intérieur. On peut ainsi classer les projets sui­
vant le rapport entre le produit net des recettes en devises ou des
économies de devises et les coûts intérieurs. Le choix des projets
s’effectue en descendant la liste des projets jusqu’à épuisement des
fonds disponibles pour les investissements. En principe, tout coût
indirect imputable à un projet est également inclus dans les calculs,
bien qu’il soit plus malaisé d’y parvenir en pratique. Par conséquent,
si l’exécution du projet exigeait un accroissement de la production
intérieure d’une matière première d’origine agricole, les coûts en ca­
pital et les coûts actuels imputables à la production de ladite matière
première seraient aussi ventilés entre leur élément intérieur et leur
élément devises.
3. — C o m p a t ib il it é d e s p l a n s

52. Durant tout le processus de la formulation des plans, il im­


porte de veiller constamment à ce que les nombreux objectifs maté­
riels et financiers soient mutuellement compatibles. En principe, les
équilibres principaux qu’un plan d’ensemble doit maintenir sont par­
tout les mêmes, mais la variété et la complexité des tests de compta­
bilité ont sensiblement varié selon que les plans avaient été formulés
plus ou moins en détail. Dans les paragraphes qui suivent, on a in­
diqué les caractéristiques essentielles des principaux tests de compta­
bilité qui ont été appliqués.

a) Equilibres entre les agrégats et les plans de secteurs

53. Les bilans les plus simples et les plus condensés sont ceux
qu’offrent les tableaux principaux d’une comptabilité nationale. La
plupart des pays en ont fait usage pour s’assurer que le montant total
des emplois — consommation, investissements et exportations — cor­
respond au total des ressources — production intérieure et importa­
tions. De façon plus détaillée, les trois principales balances dont la
plupart des pays ont essentiellement tenu compte lors de la prépara­
tion des plans ont été la balance épargne-investissement, la balance
externe et la balance demande-offre de main-d’oeuvre. Ces balances
ont eu pour rôle principal d’indiquer les limites probables des res­
sources disponibles pour l’investissement, des disponibilités d’impor­
tations et des disponibilités de main-d’oeuvre. C’est à l’intérieur de ces
limites que les plans de production et de dépenses ont dû être
élaborés.

i) Balance épargne-investissement

54. Dans les économies mixtes ou les économies reposant sur


l’entreprise privée, la planification en vue d’assurer un équilibre
dynamique entre l’épargne et l’investissement a été l’une des tâches
les plus importantes et les plus délicates des organes chargés d’établir
les politiques. L'évaluation de l’épargne intérieure, pour la période
couverte par un plan à moyen terme, a été faite à la fois en fonction
des tendances passées du rapport entre l'épargne privée et les diffé­
rentes catégories de revenus, en fonction du taux d'expansion et de
l'accroissement de la production pendant la dmrée d'exécution du plan
et compte tenu des modifications prévues ou attendues des recettes
et des dépenses courantes du secteur public. En ce qui concerne
l'épargne privée, on a généralement procédé à des évaluations distinc­
tes de l'épargne des sociétés et de l'épargne des entreprises non cons­
tituées en sociétés et des ménages. Dans les pays sous-développés
toutefois, les données disponibles sur l'épargne privée n'ont le plus
souvent permis que de déterminer très approximativement les ten­
dances probables; en élaborant leurs plans, ces pays sont toujours
partis de l'hypothèse que le taux marginal de l’épargne privée serait
quelque peu plus élevé que le taux moyen courant.
55. Les gouvernements des pays sous-développés ont dû recourir
dans une très large mesure aux moyens que leur offrait le budget
public pour augmenter la part de l’épargne globale dans les recettes’'
totales. Ainsi, l’excédent des recettes courantes par rapport aux dépen­
ses courantes qu’il a été possible d’obtenir dans le sectetu- public
a joué im rôle crucial en ce qui concerne le maintien de l’équilibre
général entre l’épargne et les investissements. En évaluant le niveau
probable des dépenses publiques courantes, on a fait une large place
à l’effet de ces dépenses sur la structure envisagée des dépenses publi­
ques d’investissement; pour cela, il a fallu procéder à une analyse
détaillée du programme d’investissements publics. Les pays en voie
de développement ont recouru à des méthodes diverses pour évaluer
le niveau probable des dépenses publiques renouvelables. Certains se
sont contentés d’une évaluation indirecte, reposant, par exemple, sur
l’hypothèse que la part de la consommation publique dans le revenu
national demeurait inchangée. D’autres pays, en revanche, ont procédé
à des évaluations annuelles détaillées après avoir fait la part de cer­
tains facteurs tels que l’augmentation normale de l’effectif du person­
nel, les effets, sur les dépenses courantes, de la création des nouveaux
services prévus par les plans de développement et, enfin, des modifi­
cations attendues des niveaux de salaires et des autres dépenses.
56. Etant donné que, dans beaucoup de pays sous-développés, les
recettes publiques sont dans une très large mesure fonction des droits
à l’importation et à l’exportation, la projection des tendances des
exportations et des importations a constitué un élément très impor­
tant de l’évaluation des recettes probables. De même, l’évaluation des
recettes provenant de l’imposition du revenu des particuliers et des
sociétés a été fondée sur les projections du revenu national.
57. En établissant leurs plans, la plupart des pays sous-dévelop­
pés ont également supposé qu’un apport considérable de capitaux
étrangers leur permettrait de combler le fossé entre l’épargne inté­
rieure et les investissements nationaux. Etant donné que le revenu
par habitant s’établissait à un niveau extrêmement bas, il n’a pas
semblé possible d’aboutir, pendant la durée d’un plan, à im niveau
d’épargne intérieure suffisant pour maintenir un taux d’expansion
approprié. Mais, de toute évidence, cette évaluation de l’offre probable
de capitaux étrangers, lors de la préparation de plans à moyen terme
ne peut être qu’extrêmement hypothétique. Quelques pays sous-déve­
loppés ont cependant essayé d’établir ime évaluation sommaire de ce
genre. Ils ont, par exemple, analysé le programme d’investissement
pour identifier les projets capables d’attirer des prêts d’institutions
internationales ou autres organismes financiers extérieurs. Ou bien ils
ont étudié leur balance des paiements pour voir quels emprunts sup­
plémentaires ils pourraient contracter à l’étranger sans dépasser leur
capacité d’en assurer le service. Il ne s’agit là, cependant, que d’éva­
luations ou de vérifications partielles. En général, les évaluations
relatives à l’aide extérieure qui figurent dans les plans n’ont pas été
établies directement mais en tant qu’élément résiduel de l’équilibre
entre l’investissement et l’épargne intérieurs.
58. Dans bien des plans de développement, l'évaluation de l'offre
globale d’épargne prévue pour la période d’exécution du plan ne cons­
titue pas le seul élément de nature approximative et provisoire; il en
est de même des évaluations portant sur les besoins en investisse­
ments. Dans nombre de pays, même si les objectifs assignés à la pro­
duction ont été définis de façon détaillée, l’évaluation des investisse­
ments nécessaires pour assurer les augmentations prévues de la
production a généralement été fondée sur des renseignements incom­
plets. Pour pouvoir procéder à des évaluations plus précises, il a
fallu attendre les résultats d’études détaillées portant sur les besoins
créés par certains projets précis. Fréquemment, aux stades initiaux
du processus de planification, cette évaluation a dû être faite à partir
des tendances antérieures du rapport capital-production pour les
principaux secteurs de production, voire pour l’économie dans son
ensemble. Et il est souvent arrivé que les résultats obtenus se soient
sensiblement écartés de ces prévisions. Le caractère provisoire des
évaluations initiales, qu’il s’agisse des investissements ou de l’épargne,
ne fait que confirmer qu’il est nécessaire de revoir constamment les
plans à la lumière de l’expérience acquise, si l’on veut assurer et main­
tenir un équilibre dynamique entre l’épargne et les investissements.

ii) La balance externe


59. Un autre élément important de la formulation des plans a été
l’évaluation des besoins en produits importés et des disponibilités
probables en devises. Dans la plupart des pays sous-développés, les
plans relatifs à la production, à la consommation et aux investisse­
ments intérieurs n’ont généralement pas été élaborés assez en détail
pour permettre d’évaluer avec précision les besoins en importations.
Il a fallu toutefois procéder à des évaluations, même très approxima­
tives de ces besoins afin de juger de la viabilité du plan d’ensemble.
Dans ce but, les importations ont en général été classées en trois caté­
gories : biens d’équippement, matériaux et combustibles nécessaires à
la consommation productive courante de l’industrie et de l’agriculture
nationales et, enfin, biens de consommation finals. Ainsi, il a fallu
concevoir les programmes d’investissements intérieurs en fonction
des importations de biens d’équipement qui seraient probablement
nécessaires à leur exécution. Toutefois, dans la mesure où ces pro­
grammes n’ont pas été convertis en projets précis, on n’a pu obtenir
que des évaluations grossières à partir de coefficients d’importation
intéressant les périodes précédentes. De même, on a souvent dû, étant
donné le manque de renseignements disponibles, se contenter d’éva­
luations limitées portant sur les besoins en combustibles et en maté­
riaux. Quelques pays ont néanmoins essayé d’évaluer ces besoins à
l’aide de matrices intersecteurs. Pour évaluer les besoins probables
en importations, on a utilisé les coefficients d’importation par secteur,
calculés pour une année de référence et modifiés pour tenir compte
des modifications que l’on envisageait d’apporter à la production
finale. Quant aux importations de biens de consommation finals, on
s’est fondé, dans la mesure du possible, sur les renseignements inté­
ressant révolution de la demande en fonction du revenu, ainsi que la
production intérieure prévue. Quelle que soit la nature des importa­
tions, il a fallu, en évaluant les besoins, tenir compte d’un facteur
important : la mesure dans laquelle l’expansion de la production inté­
rieure permettrait de substituer aux produits importés des produits
de remplacement.
60. Dans le but d’évaluer la quantité de devises dont ils dispose­
raient pour financer leurs importations, nombre de pays sous-dévelop­
pés ont cherché à projeter les tendances tant de la demande que de
l’offre intérieure de leurs principaux produits d’exportation. Ils ont
complété ces projections par une analyse des possibilités qu’offriraient
les exportations de nouveaux produits, en tenant compte de certains
invisibles tels que le tourisme. Enfin, ils ont également tenu compte
d'un apport éventuel de capitaux étrangers, bien que, comme on l’a
déjà vu, les évaluations, dans ce cas, n’aient parfois été que partielles.

iii) L'équilibre entre l’offre et la demande de main-d’œuvre


61. Dans l’élaboration des plans d’ensemble, on a également
recherché si les emplois créés par les plans de production correspon­
daient à l’offre de main-d’œuvre. On s’est notamment efforcé de définir
les types de main-d’œuvre qualifiée dont on aurait besoin pour réali­
ser les plans de production. D’une part, on a pu ainsi déterminer la
mesure dans laquelle les effectifs des diverses catégories de techni­
ciens et de travailleurs qualifiés qui deviendraient probablemet dispo­
nibles pendant la période envisagée, permettraient d’atteindre les
objectifs assignés à la production. D’autre part, ces données ont servi
à élaborer des plans pour la répartition des ressources entre les di­
verses catégories de services d’enseignement et de formation.
62. En général, toutefois, les plans relatifs à l’enseignement doi­
vent être établis pour de longues périodes. Certes, il est particulière­
ment nécessaire de tenir compte des besoins en différents types de
main-d’œuvre qualifiée créés par la mise en œuvre d’un plan à moyen
terme lorsqu’il s’agit de créer ou d’élargir les programmes de forma­
tion professionelle à court terme. Les programmes plus généraux
d’enseignement doivent cependant porter sur des périodes de dix à
quinze ans et ne peuvent donc être liés qu’aux plans de développe­
ment économique à long terme. Il est vrai qu’un programme d’en­
seignement ne doit pas seulement tenir compte des besoins futurs de
l’économie en main-d’œuvre qualifiée et en techniciens: il est générale­
ment admis que l’enseignement a une valeur intrinsèque qui ne sau­
rait être mesurée uniquement en fonction de la contribution qu’il est
susceptible d’apporter à la productivité économique. Toutefois, le fait
d’avoir une idée précise des effectifs de main-d’œuvre qualifiée dont
on aura besoin dans divers domaines spécialisés, pendant une période
donnée, permet à tout le moins de déterminer les sommes minimums
que la société devra, d’ime manière ou d’ime autre, investir dans l'en­
seignement si elle veut réaliser ses ambitions sur le plan économique.
Les capitaux que la collectivité décidera d’investir en sus de ces mon­
tants minimums dépendront de beaucoup d’autres considérations, en
particulier de considérations de valeur, qui n’ont pas leur place dans
le présent rapport. Le fait que de nombreux gouvernements consa­
crent à l’enseignement une fraction importante de leur budget indique
bien l’importance qu’ils accordent à ce domaine.
63. Dans maints pays en voie de développement qui souffraient
d’un sous-emploi généralisé, il a fallu, en formulant les plans relatifs
à la main-d’oeuvre, tenir compte d’un autre élément: la nécessité
d’évaluer les plans de production en fonction des possibilités qu’ils
offrent d’employer, à plein temps et à des travaux productifs, une
proportion croissante de la main-d’œuvre en expansion. En cherchant
à évaluer l’importance des risques de chômage ou de sous-emploi, on
a parfois été amené à étudier plus avant les plans de production et
d’investissements aux fins de déterminer si une nouvelle répartition
des investissements ne permettrait pas d’utiliser une plus forte pro­
portion de la main-d’œuvre et d’augmenter la production globale.

b ) Equilibres entre la demande et l’offre par secteurs

64. C’est à l’intérieur des limites imposées par les disponibilités en


main-d’œuvre, devises et capitaux d’investissement qu’ont dû être
élaborés les plans de production et de dépense intérieures. Les besoins
globaux découlant de ces plans ont dû être ajustés aux ressources
globales. L’évaluation minutieuse de ces besoins s’est fondée sur
l’analyse détaillée de la composition envisagée de la production et de
la demande; or, il n’y a que relativement peu de pays où les plans
aient été élaborés de façon assez détaillée pour permettre ime telle
évaluation. Mais, dans tous les plans, on a dû s’efforcer jusqu’à un
certain point de voir si la composition envisagée de la demande con­
cordait avec la composition probable de la production et des importa­
tions.
65. En ce qui concerne l’élément investissement de la demande
finale, les programmes d’investissement indiquent en général, même
si ce n’est que de façon très approximative, quelles sont les ressources
nécessaires. Dans un certain nombre de pays sous-développés, on a
étudié les projets d’investissement envisagés, afin de déterminer com­
ment la formation de capital probable se répartirait entre l’outillage
et la construction, et les ressources nécessaires en machines et en
matériaux de construction ont ensuite été comparées avec les plans
de production et d’importation.
66. En ce qui concerne la demande de consommation finale, lai
plupart des pays ont employé des méthodes analogues pour évaluer
sa composition future. Chaque fois qu’on disposait des données néces­
saires, on a analysé les élasticités-revenus et les élasticités-prix des
divers produits. A cet égard, on a fait beaucoup appel aux enquêtes
sur les ménages, aux prévisions démographiques et aux projections
de la répartition de la population active par professions et par salaires.
67. Dans la plupart des pays sous-développés, la demande de con­
sommation finale a dû être évaluée par des méthodes relativement
plus grossières, faute de données suffisantes. On y a cependant ef­
fectué un assez grand nombre d’enquêtes sur les ménages, notamment
parmi les groupes à faible revenu des régions urbaines, et on a pu
assez souvent procéder à certaines évaluations des élasticités-revenus.
A cette fin, on a parfois réparti les consommateurs en groupes urbains
et groupes ruraux, la structure de la consommation risquant d’être
différente dans chaque groupe. Les ressources et les connaissances de
la plupart des organismes de planification ne leur ont pas permis
d’examiner séparément chacun des biens et services très divers en­
trant dans la consommation, et l’analyse n’a en général porté que sur
des produits essentiels. Le plus souvent, il a fallu procéder à des
ajustements pragmatiques des résultats obtenus grâce à ces méthodes
d’évaluation, afin de tenir compte d’éléments tels que les variations
de prix ou les politiques visant à améliorer la nutrition ou à décou­
rager la consommation de produits de luxe.
68. Dans certains des pays les moins développés, il n’a été tenu
aucun compte des élasticités-revenus lors de l’évaluation de la de­
mande probable de biens de consommation finals, et ce, d’ordinaire,
faute de données. Mais l’impossibilité d’évaluer la structure de la
demande n’a pas eu forcément d’inconvénient grave pour la plani­
fication de la production car, dans quelques pays, il a suffi, pour fixer
les objectifs de la production, de savoir dans quelle mesure celle-ci
pouvait remplacer les importations. Dans ces pays, les chiffres des im­
portations ont parfois été ajustés pour tenir compte de l’accroisse­
ment de la population ou, dans le cas des produits alimentaires, d’une
certaine amélioration de la nutrition. On a par exemple fixé des nor­
mes nutritionnelles pour éliminer la carence diététique dont souf­
fraient certains groupes de la population.
69. Pour évaluer la demande intermédiaire, les pays sous-déve­
loppés n’ont généralement tenu compte que des relations intersecteurs
les plus importantes. Les relations intersecteurs sont d’ailleurs sou­
vent, surtout dans les pays les moins développés, assez simples et
évidentes. Les principales relations peuvent être ramenées à celles qui
existent entre la production agricole et les industries de transforma­
tion, ou à celles qui existent entre le niveau général d’activité éco­
nomique d’une région et des éléments fondamentaux de l’infrastruc­
ture comme l’énergie et les transports; en pareil cas, l’évaluation de
la demande intermédiaire n’est pas un problème capital.
70. Dans les pays industriellement les plus avancés, cependant,
les relations intersecteurs jouent un rôle beaucoup plus important.
Dans ces pays, on s’est efforcé parfois de construire des balances de
marchandises. On n’y est parvenu d’ordinaire que pour des produits
essentiels, ce qui n’a permis qu’une vérification partielle de la
cohérence des plans de production.
71. Pour permettre une vérification plus complète, un petit nom­
bre de pays ont essayé de compléter les balances de marchandises
grâce au tableau plus général des relations intersecteurs que donne
la matrice des consommations et des productions, ce qui a été en
général obtenu pour la dernière année de l’exécution du plan. Une
telle matrice offre, par rapport aux balances de marchandises, l’avan­
tage considérable d’indiquer, en un seul état, toutes les relations inter­
secteurs ainsi que la composition de la demande finale et des res­
sources importées; on est ainsi assuré de n’avoir négligé aucune
relation importante. Cette matrice permet en outre d’établir des
coefficients de consommation qui tiennent compte des besoins tant
indirects que directs; elle facilite ainsi l’évaluation de l’effet global,
sur l’économie, d’une modification de la production d’un secteur
donné.
72. Toutefois, l’établissement d’une matrice des productions et
des consommations présente de sérieuses difficultés d’ordre pratique;
avant tout, il faut connaître les coefficients techniques de corrélation
entre la consommation et la production pour chaque secteur. Dans les
quelques pays sous-développés qui se sont efforcés d’établir une ma­
trice des consommations et des productions pour la dernière année
de l’exécution du plan ou pour les années intermédiaires, on a d’ordi­
naire commencé par inclure dans cette matrice les données tirées
des balances de marchandises. Dans le cas des activités productives
pour lesquelles on n’avait pas construit de balance de marchandises,
les coefficients techniques ont été évalués en fonction d’une matrice
des consommations et des productions établie pour une année de
référence récente, les coefficients étant ajustés pragmatiquement pour
tenir compte des modifications structurelles prévues de l’économie.
On a ainsi établi la matrice en combinant diverses évaluations fondées,
d’une part, sur les modifications envisagées de la production et
des consommations et, d’autre part, sur les tendances passées de
l’économie.

4. — P r o c é d u r e s d e f o r m u l a t io n d e s p l a n s

73. L’établissement d’un plan d’ensemble réaliste a reposé dans


une large mesure sur la coordination harmonieuse des plans et des
projets des innombrables unités économiques de la nation. Dans les
paragraphes qui précèdent, on a donné une description des méthodes
qui ont été employées, lors de la formulation des plans pour réaliser
cette synthèse. Mais les possibilités d’utilisation de ces méthodes ont
été directement fonction des procédures institutionnelles qui ont été
mises au point aux fins de l’élaboration des plans; en fait, la nature
des plans élaborés dans les divers pays et les procédures effectives de
planification sont deux éléments indissociables.
74. Là où les plans n’ont guère consisté qu’en la formulation
d’objectifs généraux touchant le revenu, l’investissement, la consom­
mation, les exportations et les importations de l’ensemble du pays,
ou la production des principaux secteurs, les procédures d’élaboration
des plans ont été relativement simples. Ces plans ont été essentielle­
ment établis sur la base d’une analyse économique et statistique géné­
rale et leur élaboration n’a en conséquence guère débordé le cadre de
l’organisme planificateur lui-même. Il en est le plus souvent résulté
que les plans se sont essentiellement limités aux projections du taux
global de croissance, fondés sur l’analyse d’ensemble d’éléments
comme le rapport global capital-production, le rapport épargne-revenu
et la fonction importation.
75. On a déjà donné à comprendre que, pour les pays sous-déve­
loppés, la valeur opérationnelle de plans fondés sur une telle analyse
macro-économique est limitée. Il est vrai que ces plans ne visent par­
fois qu’à fournir des lignes directrices d’ensemble à l’action générale
des pouvoirs publics, par exemple en ce qui concerne les politiques
monétaires ou fiscales. Ces projections peuvent utilement signaler la
nécessité d’une action énergique — par exemple, pour élever le niveau
de l’épargne et celui de l’investissement — si l’on veut assurer un taux
de croissance satisfaisant. Mais si l’on veut pouvoir faire davantage
fond sur des plans globaux de cette nature, il faut leur donner une
base plus solide comme celle qu’offre une analyse plus fouillée de la
situation et des perspectives économiques.
76. L’élaboration de plans réalistes et leur bonne exécution dépen­
dent dans une large mesure de la qualité du système d’informations
économiques. Ceci signifie que de nombreux courants d’information
doivent être établis entre l’organisme de planification central et les
différentes branches d’activité si l’on veut pouvoir disposer de ren­
seignements détaillés sur les plans et les programmes des divers
secteurs de l’économie.
77. La nécessité d ’établir un double courant d’information entre
les planificateurs publics et privés découle de deux considérations.
Premièrement, les planificateurs publics doivent s’efforcer de procé­
der à une évaluation aussi exacte que possible des réactions du sec­
teur privé pendant la période du plan devant différents changements
de l’action gouvernementale. Deuxièmement, le secteur privé doit,
pour élaborer ses plans d’investissement, avoir à sa disposition des
renseignements aussi précis et aussi détaillés que possible sur les
conditions économiques qui existeront pendant la durée du plan.
Etant donné que les décisions de ces deux groupes sont interdépen­
dantes, il est essentiel qu’ils entretiennent des rapports étroits. Dans
un certain nombre de pays, par exemple, de grands progrès ont été
réalisés en ce qui concerne l’établissement de statistiques non seule­
ment sur l’attitude passée et présente des consommateurs et des pro­
ducteurs privés, mais sur leurs décisions probables dans l’avenir.
L’amélioration de ces projections est indispensable à la planification
dans les pays sous-développés d’économie mixte.
78. Un bon exemple de la conception selon laquelle l’élaboration
des plans doit résulter d’une action concertée de nombreuses unités
économiques, et non pas être le fait isolé d'un organisme planificateur
central, nous est fourni par l'expérience tentée en France après la
guerre. Dans ce pays, en effet, le premier stade de la planification
a consisté en l’établissement, par les soins de l’organisme planifica­
teur, de plusieurs schémas préliminaires traduisant l’incidence de
divers taux d’expansions de la production sur l’emploi, l’investisse­
ment, l’épargne, la balance extérieure et le budget de l’Etat. Après
avoir examiné les diverses solutions possibles, le gouvernement a in­
diqué à l’organisme planificateur le taux de croissance qui devait
constituer l’objectif à atteindre. Partant de là, l’organisme planifica­
teur a introduit dans son schéma les chiffres que la demande finale
devait atteindre au cours de la dernière année sur laquelle portait le
plan. On a donc été amené à entreprendre une analyse des dépenses
de consommation, des décisions se rapportant à la formation de ca­
pital publique et des hypothèses relatives aux échanges extérieurs et
aux investissements nécessaires pour assurer la croissance pendant la
période postérieure à la période d’exécution du plan. Sur cette base,
il a été possible d’établir une matrice des consommations et des pro­
ductions contenant des estimations des échanges de chaque seeteur
avec les autres secteurs.
79. Lors de la seconde phase de l’élaboration du plan, des consul­
tations approfondies ont eu lieu avec les représentants des diverses
branches d’activité économique, etc. Ces travaux se sont déroulés dans
le cadre des Commissions de modernisation. Un premier groupe de
commissions assure la représentation des divers secteurs de l’activité
économique: agriculture, industries manufacturières, enseignement,
logement, etc. Grâce à ce groupe de commissions, on a pu élaborer
des plans sectoriels plus détaillés et vérifier, aux fins de revision éven­
tuelle, l’exactitude des hypothèses initiales contenues dans le premier
schéma, telles que celles ayant trait aux coefficients techniques. Le
second groupe de commissions s’occupe de problèmes plus généraux
tels que le maintien de l’équilibre entre l’investissement et l’épargne,
et entre la demande et l’offre de main-d’œuvre, ou le développement
régional équilibré. Grâce au travail minutieux de ces deux groupes de
commissions, le plan initial a été soumis à des vérifications et revi­
sions d’où est finalement sortie une version définitive qui a pu être
soumise pour approbation aux organes politiques.
80. Des procédures comparables de formulation des plans ont été
suivies dans les pays sous-développés qui ont élaboré des plans rela­
tivement détaillés. Dans de nombreux pays, les organismes planifica­
teurs, en collaboration avec les ministères intéressés, ont établi des
contacts direct avec les différentes branches d’activité. Celles-ci peu­
vent être représentées par des associations d’employeurs et les entre­
prises les plus importantes, ainsi que les directeurs, ont également
participé aux discussions. Dans certains pays, comme l’Inde, on a créé
des conseils spéciaux pour le développement de certaines branches
d’activité. Les ministères du gouvernement central ont été chargés
d’entrer directement en consultation avec les diverses branches
d’activité ou les diverses entreprises par l’entremise desquelles l’orga­
nisme planificateur a fourni et reçu la majeure partie des données
nécessaires.
Pays à économie planifiée

81. Dans les pays à économie planifiée, le fait que l'Etat détient
la plus grosse partie des moyens de production a eu une influence
décisive sur les systèmes de planification utilisés. La gestion d’une
économie fondée sur la propriété publique exige et permet à la fois
une planification d’ensemble de tout le processus de développement
économique. Dans ces pays, la planification englobe tous les facteurs
tels que ressources naturelles, moyens de production et main-d’œuvre,
qui jouent un rôle dans la croissance économique. Elle s’étend aussi
à tous les aspects du processus économique; ainsi, elle affecte la créa­
tion du produit social et sa répartition entre les investissements et
la consommation, l’échange des produits à l’intérieur et à l’extérieur
du pays, la consommation de matières premières, de produits semi-
finis et de produits finis, le système des prix et les relations de crédit.
En outre, dans les pays à économie planifiée, la planification est une
planification d’ensemble en ce sens que les plans régionaux consti­
tuent un élément important du plan d’ensemble.
82. Dans ces pays, la planification est caractérisée aussi par le
fait que la plupart des objectifs sont traduits en directives, qui sont
obligatoirement suivies par les différentes unités. Partant d’indica­
teurs globaux fondamentaux et de projections par secteur, les plans
sont élaborés jusqu’au niveau des indicateurs précis valables pour
chacune des unités économiques; c’est ainsi que chaque unité éco­
nomique reçoit un cadre de directives dans lequel elle doit poursuivre
ses activités économiques. Pour compléter ces directives, cependant,
on prévoit, comme cela est indiqué ci-dessous, certains encourage­
ments matériels pour les entreprises et les travailleurs individuels. En
outre, un certain nombre de mesures relatives aux allocations de cré­
dits et ressources d’investissement, aux prix et au commerce extérieur
sont insérées dans ces plans et sont utilisées en vue d’atteindre les
objectifs fixés.
83. Les rapports étroits existant entre les plans à long terme, les
plans à moyen terme et les plans annuels constituent un autre trait
caractéristique de la planification dans les pays à économie planifiée.
A l’aide des plans à long et à moyen terme on a défini les objectifs
stratégiques généraux du développement et de la transformation de
la structure économique et sociale. Les plans annuels sont l’instru­
ment qui permet de traduire les objectifs généraux à long terme en
objectijFs pratiques à court terme et de donner un cadre à la gestion
courante de l’économie.
84. Ces traits généraux ont caractérisé de manière constante la
planification en Union soviétique et dans les autres pays à économie
planifiée; cependant, au cours des années, un certain nombre de
changements et d’améliorations ont été apportés à ces systèmes de
planification, pour tenir compte notamment de la croissance et de la
diversification des économies de ces pays, des modifications concomi­
tantes dans leurs structures et des changements institutionnels inter­
venus dans les domaines économiques et sociaux. Au cours de la
première phase de développement, dans de nombreux pays à économie
planifiée, les systèmes de planification et de gestion étaient sensible­
ment les mêmes, car les problèmes à résoudre et les conditions à
satisfaire pour la transformation économique et sociale des pays
étaient également les mêmes. Par la suite, cependant, alors qu’on a
conservé les mêmes méthodes fondamentales de planification et de
gestion, on les a adaptées progressivement aux conditions particuliè­
res d’ordre économique, social ou autre des différents pays.
85. Ces changements sont intervenus surtout au cours des six ou
sept dernières années. On a accordé de plus en plus d’attention et
d’importance aux plans à long et moyen terme. En même temps, on
a eu tendance à exprimer et définir le plan général simplement en
termes d’indicateurs globaux et à réduire la variété et le nombre des
directives très détaillées transmises aux entreprises; ceci a donné aux
entreprises une autonomie et une initiative opérationnelles plus gran­
des dans le cadre des objectifs planifiés. Dans certains de ces pays,
notamment en Union soviétique, on a renforcé considérablement
l’autorité des organes régionaux en matière de planification. D’une
manière générale, on a encouragé davantage un meilleur rendement
de la part des individus et des entreprises et une utilisation plus
rationnelle des ressources. Alors qu’au début la planification donnait
la priorité aux indicateurs physiques du développement, au cours des
dernières années on a accordé une attention croissante aux critères
d’efficacité économique et aux rôles des calcus économiques.
86. Ces changements, bien entendu, n’ont pas été indépendants
du degré de développement atteint par ces pays ou des exigences
qu’une économie plus développée et diversifiée impose à la planifica­
tion du développement économique quant au choix de méthodes plus
raffinées. Au fur et à mesure que l’économie se transforme, les métho­
des de planification et de gestion changent et s’améliorent également.

1. — C r it è r e s e t p r i o r it é s i n t e r v e n a n t d a n s l a f o r m u l a t io n d e s pl a n s

87. Il est évident que les méthodes d’établissement du plan ne


donnent pas, en elles-mêmes, la solution des problèmes de croissance
économique. Les plans doivent tenir compte de certains critères et de
certaines priorités qui découlent de la politique d’ensemble de déve­
loppement économique. Cependant, si en formulant les plans on ana­
lyse les possibilités réelles, on peut évaluer dans quelle mesure une
politique donnée est applicable. Les techniques analytiques utilisées
au cours du processus de planification permettent de dégager les
possibilités et les limites de croissance économique; elles peuvent,
ainsi, mettre davantage en lumière les critères de choix appropriés,
indiquer certaines priorités dans l’utilisation des ressources et d’une
manière générale contribuer à la formulation d’une politique de
développement.
88. Dans les pays à économie planifiée, les décisions relatives aux
choix macro-économiques tels que l’orientation du développement, la
portée et le volume des changements structuraux et Tordre général
des priorités, sont influencées par les objectifs généraux d'ordre éco­
nomique et social et par le niveau de développement atteint dans le
pays. Dans une définition d’ensemble des objectifs économiques com­
muns de la croissance et du développement, on inclurait sans aucun
doute la croissance rapide des moyens de production qui, à leur tour,
contribuent à l’élévation rapide du niveau de vie de la population.
Mais, pour atteindre de tels objectifs généraux, il est nécessaire
d’avoir une stratégie du développement économique. A côté des objec­
tifs donnés, il faut tenir compte du volume initial des ressources ma­
térielles, du niveau de développement économique atteint, des facteurs
qui facilitent de nouveaux progrès et de toutes les possibilités, tous
les problèmes et toutes les limites relatifs à la croissance. En outre,
dans la poursuite des objectifs généraux, la stratégie doit également
chercher à maintenir un équilibre dynamique entre les secteurs.
89. L’une des caractéristiques communes du développement dans
les pays à économie planifiée a été la tendance à la mise en place
d’une structure économique permettant une croissance rapide. C’est
la raison pour laquelle, dans les plans de tous ces pays, notamment
aux premiers stades, il y avait une tendance marquée à augmenter le
taux des investissements avec toutes les conséquences qu’une telle
politique doit avoir sur l’utilisation des ressources et la structure du
développement. Pendant longtemps, la priorité a été donnée à des
secteurs tels que l’énergie, les métaux de base, les industries mécani­
ques, la construction et les transports, c’est-à-dire aux secteurs parti­
culièrement susceptibles de contribuer à l’augmentation ultérieure
des investissements. Bien entendu, on a développé aussi, selon les
possibilités, d’autres secteurs industriels tels que ceux qui produisent
des biens de consommation; de même, on a accordé une attention
particulière au développement de l’agriculture, selon Tordre de prio­
rité déjà établi. Il est certain cependant que les secteurs mentionnés
d’abord ont bénéficié d’une priorité importante et joué un rôle fonda­
mental dans les changements structuraux ultérieurs des économies
de ces pays.
90. Au cours du développement, au fur et à mesure que le niveau
de la production s’élevait, la structure de ces économies s’est modifiée.
A un niveau de production plus élevé, comme des taux d’épargne et
d’investissement relativement importants avaient déjà été atteints, le
processus de croissance a nécessité une orientation différente des
changements structuraux dynamiques. En règle générale, la croissance
continue a demandé une plus grande diversification de l’économie et
une intégration plus poussée des différents secteurs. Cette situation
s’est accompagnée de modifications dans Tordre des priorités.
91. Dans ces conditions, les relations et les rapports dans la ré­
partition du produit social et des ressources disponibles ont été pro­
gressivement modifiés. De plus en plus, on a stabilisé le rapport entre
les investissements et la consommation; parallèlement, les change­
ments survenus dans la structure des investissements et l’augmentation
du revenu des consommateurs se sont traduits par une croissance
accélérée des industries de biens de consommation; en outre, ces
facteurs ont contribué à l’accroissement de la production agricole, au
développement du secteur des services et à la construction accrue
de logements et d’autres installations. Ainsi, tandis que les objectifs
généraux de la politique économique, notamment celui de la crois­
sance rapide des moyens de production, n’ont pas changé, on a mo­
difié progressivement les critères et priorités de développement, en
fonction du niveau de développement atteint, des changements struc­
turaux déjà réalisés et de l’intégration plus poussée des différents
secteurs. Au cours des dernières années, ces critères et priorités ont
été influencés de plus en plus par l’expansion générale du commerce
extérieur et une coopération plus étroite entre les pays à économie
planifiée et une meilleure coordination de leurs plans; dans le choix
des priorités, on a accordé une attention plus grande aux avantages
résultant d’une spécialisation internationale.
92. Il est évident que cette évolution, que ce soit dans ses aspects
substantiels ou son déroulement dans le temps, n’a pas été uniforme
dans tous les pays à économie planifiée. Des différences de niveau et
de structure économiques au départ ont donné à chacun des pays des
traits particuliers. En outre, un tel processus ne pouvait guère se
dérouler sans qu’il surgisse des difficultés passagères, dues à l’ordre
des priorités contenu dans le plan, ou à des événements imprévus ou
des défaillances dans l’application des plans. Ceci est facile à com­
prendre, notamment si l’on tient compte du fait que, dans les éco­
nomies planifiées, des changements importants ont été condensés et
réalisés en une période de temps relativement courte; ces change­
ments, dans des conditions différentes, ont généralement été étalés
sur une plus longue période de l’histoire.

2. — M é t h o d e s f o n d a m e n t a l e s d e p l a n if ic a t io n

93. Dans les pays à économie planifiée la préparation des plans


est une opération complexe impliquant la participation, à différents
stades, de l’important appareil des organes centraux de planification,
des services de planification des ministères, des organismes régio­
naux, des entreprises, des instituts de recherche scientifique, et
d’autres services. La participation d’une si grande variété d’organisa­
tions et de personnel est indispensable si l’on peut qu’il soit tenu compte
aussi exactement que possible des conditions locales du développe­
ment, des ressources disponibles pour ce développement et des
facteurs objectifs dont il dépend. L’organisation du travail de plani­
fication étant ainsi conçue, il a évidemment été impossible d’établir
en une seule étape l’ensemble du plan économique national; au con­
traire, il a souvent été nécessaire de se reporter à des indicateurs
calculés précédemment, et de les modifier. Dans ces conditions, il est
tout aussi évident que la mise au point d’un système d’indicateurs
coordonnés n’était pas possible si l’on procédait à l’élaboration du
plan par une série continue d’opérations, notamment parce que, dans
la pratique, ces indicateurs sont tous interdépendants. Les travaux de
planification ont donc porté à la fois sur des indicateurs sectoriels et
sur des indicateurs d'ensemble et ont été menés parallèlement par les
services centraux et par toutes les autres unités de l’organisation éco­
nomique. Ainsi, on peut dire que la méthode d’etablissement des plans
dans les pays à économie planifiée est une méthode d’approximations
successives effectuées en plusieurs étapes, jusqu’à ce que l’on par-
vieime à un plan cohérent qui représente une solution plus ou moins
optima.
a) Elaboration de directives générales
94. Il va de soi que toutes ces opérations, qui sont menées par un
grand nombre d’organismes, doivent être orientées dès le début vers
la coordination progressive du plan dans son ensemble. Dans ce but,
l’organe central de planification établit un cadre quantitatif du plan,
qui consiste en une série de chiffres dits de «contrôle». Ces chiffres
comprennent: a) des objectifs provisoires de production qui, à ce
stade initial, sont plutôt des indications que des directives; b ) définies
dans des limites plus étroites, les quantités de matériel, de main-
d’œuvre, de matières premières et d’autres éléments de la consomma­
tion productive, qui seront mises à la disposition des entreprises pen­
dant la période du plan. En vue de ces travaux préparatoires, l’organe
central de planification analyse des données relatives à la période
précédant celle du plan, et établit des modèles économiques provisoi­
res qui montrent, dans leurs grandes lignes, les rapports entre les
indicateurs d’ensemble; ces modèles sont ensuite complétés et vérifiés
à l'aide d’indicateurs sectoriels, d’indicateurs de branches d’activité,
et d'autres indicateurs, calculés avec plus de précision. On trouvera
aux paragraphes ci-dessous une brève description de ces méthodes
opérationnelles.
95. L’analyse de l’évolution au cours de la période précédente
permet de dégager tout d’abord, les indicateurs initiaux pour la
période du plan et, ensuite, des renseignements sur les principales
tendances et les principaux facteurs susceptibles soit d’accélérer, soit
de ralentir le développement. Il faut accorder une attention parti­
culière aux facteurs de ralentissement, étant donné que le rythme
général de développement pendant la période du plan dépend de la
façon dont seront résolus les problèmes qu’ils posent. Par ailleurs, les
renseignements tirés de l’analyse des tendances passées sont d’une
grande importance pour l’identification des industries dont la crois­
sance est considérée comme capitale pour l’expansion de l’ensemble
de l’économie. Ces industries sont souvent appelées les « éléments
essentiels » du plan, étant donné que leur incidence détermine, dans
une certaine mesure, l’ensemble des rapports d’interdépendance entre
les divers indicateurs du plan. Il va de soi que ces éléments essentiels,
de même que les facteurs de ralentissement, varient en fonction de la
conjoncture au cours de la période analysée.
96. Compte tenu du niveau de développement atteint au début de
la période du plan, ainsi que des tendances et des facteurs structu­
raux révélés par l’analyse on élabore un modèle général en vue de la
planification du développement pendant cette période. On utilise
notamment comme modèle général le système d’indicateurs de la
comptabilité nationale, appelé balance de l’économie nationale. Ces
indicateurs sont généralement calculés, au premier stade, par une
extrapolation — qui n’est, évidemment, pas seulement linéaire — les
résultats obtenus étant corrigés à l’aide de nouveaux coefficients
fondés sur l’analyse des changements dans les rapports d’interdépen­
dance observés au cours de la période du plan précédent.
97. Ces calculs ont été effectués à partir d’extrapolations des ten­
dances de la production, de l’emploi et de la productivité du travail,
des rapports capital-production, des investissements et de la consom­
mation; ces extrapolations sont souvent faites simultanément, et leurs
résultats sont comparés. Par exemple, on a procédé à des calculs
fondés sur la balance des ressources en main-d’œuvre. Cette dernière
est établie sur la base de données démographiques; ellé indique la
population totale en âge de travailler, la population active et la répar­
tition de la main-d’œuvre par secteur. Ces données permettent de
déterminer l’augmentation estimative du nombre total des travail­
leurs; les estimations sont établies séparément pour les secteurs pro­
ductifs, qui comprennent l’industrie, l’agriculture et les transports,
et pour les secteurs non productifs, c’est-à-dire les services. Le nombre
de travailleurs occupés dans le secteur productif, combiné avec l’ac­
croissement estimatif de la productivité du travail, sert à déterminer
l’augmentation générale du volume du produit social. Le volume et la
croissance du capital fixe et des investissements totaux qui sont né­
cessaires pour atteindre cet accroissement général estimatif sont en­
suite déterminés par l’analyse des tendances des investissements par
unité d’accroissement du produit social. L’accroissement des dépenses
réelles courantes est ensuite estimé d’après les tendances antérieures.
Les éléments fondamentaux de la balance du produit social et du
revenu national sont ainsi établis. Ces élément fournissent une base
qui permet d’étudier le potentiel de croissance de la consommation
et finalement de procéder à un ajustement réciproque de tous les
éléments de la balance. (Il y a lieu de noter que dans les pays en
question, le produit social est égal à la somme des valeurs brutes de
la production de tous les biens et des services productifs.)
98. La balance d’ensemble ainsi obtenue doit encore être vérifiée
et ajustée par l’analyse de certaines relations intersectorielles impor­
tantes qui peuvent influer de façon décisive sur la suite du dévelop­
pement et qui, au cours de la période précédente, ont pu limiter le
potentiel de croissance de l’économie. Par exemple, des secteurs tels
que l’agriculture et la sidérurgie et, dans les pays dont l’économie
nationale est étroitement liée au commerce extérieur, le volume des
exportations et des importations ont pu avoir cet effet à divers mo­
ments. Le volume des exportations et des importations est determiné
par l’analyse des coefficients d’importation et de l’évolution du rap­
port exportations-production. A l’aide de ces calculs et de ces analyses.
la balance d’ensemble du produit social et du revenu national est pré­
cisée, ce qui donne un meilleur aperçu de leur structure interne.
99. Ce système sommaire de planification et d’analyse entrepris
aux stades initiaux de la formulation du plan par l’organe central de
planification est, pour les organes supérieurs du parti et le gouverne­
ment, un des points de départ de l'élaboration de leurs directives
politico-économiques générales pour le plan. L’élaboration de ces di­
rectives commence par l’analyse générale des objectifs et des besoins
du développement de la société; il est tenu compte non seulement des
besoins économiques, mais également des besoins culturels et sociaux
ainsi que des besoins liés aux relations politiques internationales.
Toutefois, la possibilité matérielle d’atteindre ces objectifs et de
répondre à ces besoins ressort de l’analyse initiale entreprise par
l’organe central de planification. C’est ainsi que l’élaboration des
directives générales pour la préparation du plan est entreprise dès le
début, en même temps que la préparation du cadre quantitatif initial
du plan, et que l’établissement des conditions préalables et des direc­
tives est de bien des façons lié à ces travaux de planification, bien que
les deux choses ne soient pas identiques.
100. On notera incidemment qu’on accorde actuellement beau­
coup d’attention à l’étude des conditions préalables et des possibilités
d’utilisation des techniques entrée-sortie dans les travaux prélimi­
naires. Des premiers essais ont été faits dans un certain nombre de
pays; mais, comme ces techniques n’ont pas encore été utilisées de­
puis assez longtemps pour servir à l’étude de l’évolution passée de
l’économie nationale, et comme, en conséquence, on ne dispose pas
de données de base suffisantes pour établir des projections des
changements dans les coefficients techniques, il n’a pas été possible
d’utiliser cette méthode avec toutes les garanties nécessaires, et c ’est
pourquoi on n’a pas pu en généraliser l’emploi. Cependant, il est évi­
dent que, à mesure que les conditions préalables seront remplies,
cette technique d’évaluation de l’équilibre intersectoriel sera de plus
en plus largement utilisée comme trait d’union entre la planification
des agrégats économiques et celle des différentes branches d’activité
économique. En fait, des études ont déjà été entreprises sur les pos­
sibilités et sur les conditions d’utilisation de ces techniques, non
seulement au stade initial de la planification, lorsque les travaux se
fondent sur des données reflétant des relations existantes, mais en­
core aux stades ultérieurs, lorsqu’elles servent à vérifier si les objec­
tifs fixés pour les différentes industries sont cohérents.

b) Rôle des balances spéciales


101. Le premier stade des opérations de planification et d’adop­
tion des directives susmentionnées servent de point de départ pour
l’établissement de plans détaillés relatifs aux divers secteurs de pro­
duction, aux investissements fixes, à la main-d’œuvre et aux salaires,
aux coûts de production, aux niveaux de vie, au commerce extérieur
et à d’autres éléments de la vie économique.
102. En vue de maintenir un lien continu entre les divers facteurs
du développement économique, un certain nombre des balances sont
calculées pour la préparation du plan. Elles jouent un rôle décisif
dans la détermination des rapports d’interdépendance entre les diffé­
rents secteurs de production, et des relations entre la production et
la consommation des produits finis. Le contenu de l’ensemble du
système de balances varie en fonction d’estimations détaillées, établies
sur le plan technique et sm le plan économique, des besoins en matiè­
res premières et en énergie, de l’emploi de matériel, de terres, et
d’autres ressonrces. Les estimations se fondent à la fois sur l’expé­
rience pratique des entreprises et sur les résultats de la recherche
scientifique. Le système le plus souvent utilisé est celui des balances-
matières, qui traite de la production et des besoins d’articles finis et
semi-finis.
103. Un instrument fort important dans la formulation des plans
de production est la balance de la capacité de production des princi­
paux secteurs et .brançhes de l’économie; cette balance comprend
des indicateurs pKysiqüès de la capacité existante au début de la pé­
riode, de la capacité mise en et hors service, de la capacité estimée
à la fin de la période et de la capacité moyenne utilisée tout au long
de la période. Dans la pratique, les résultats des calculs de la capacité
productive ont été utilisés essentiellement pour donner une forme
concrète aux plans provisoires relatifs à la production industrielle,
poiu: planifier les investissements fixes et pour établir des balances
et des plans aux fins de répartition des machines et du matériel.
104. La planification et la construction de nouvelles entreprises
ainsi que l’agrandissement des entreprises existantes appellent la
création d’un stock correspondant de matières premières. Les plans
relatifs à ce secteur sont élaborés à l’aide de balances des minéraux.
Ces balances sont calculées d’après les données relatives à la capacité
planifiée des entreprises, au volume des réserves révélées par la pros­
pection, au volume des matières premières minérales extraites au
début et à la fin de la période de planification, et aux possibilités
d’importation.
105. Pour la planification du développement de l’agriculture, on
établit une autre balance de ressources, elle aussi importante, à savoir
la balance des terres. Celle-ci indique la superficie cultivée, et donne
un aperçu général de l’utilisation de toutes les terres du pays. Par
l’analyse de cette balance, on détermine la possibilité d’améliorer
davantage l’utilisation des terres et de mettre en culture les terres
inoccupées, les terres vierges et les terres temporairement maréca­
geuses.
106. En plus de ces balances qui traitent de la capacité, de la
main-d’œuvre et des ressources matérielles, la préparation du plan
se fonde sur un système de balances des courants monétaires. Au
nombre de celles-ci figure la balance des revenus et des dépenses
monétaires de la population. Cette balance sert à fixer des objectifs
destinés à assurer l’élévation du niveau de vie de la population, et elle
est utilisée pour égaliser les liquidités de la population et l’offre de
biens et services. Les renseignements tirés de cette balance sont com­
plétés par des indicateurs de l’élasticité de la demande par rapport
au revenu, établis d’après les résultats d’enquêtes sur les budgets des
familles entrepris parmi les divers groupes sociaux de la population.
L’ensemble de ces calculs sert de base à la formulation de mesures
relatives aux niveaux de vie, telles que les mesures touchant les ni­
veaux des salaires nominaux et des prix de détail, et la fourniture de
services gratuits.
107. En ce qui concerne la planification des niveaux de vie, il y a
lieu d’attirer l’attention sur la différence entre les méthodes utilisées
pour les plans annuels et à moyen terme d’une part, et les plans à long
terme d’autre part. Dans ce dernier cas, les estimations de la consom­
mations établies à la lumière du volume total des ressources disponi­
bles se fondent principalement sur des considérations relatives à la
structure et au volume les plus rationnels de la consommation qui tien­
nent compte des normes de nutrition et du résultat d’autres recher­
ches effectuées dans ce domaine, et sur la détermination des moyens
les plus économiques de répondre aux besoins de consommation ainsi
définis, soit par la vente de biens de consommation ou de services
à la population, soit par la fourniture de services gratuits. Il est possible
de procéder ainsi parce que tous les facteurs influant sur le choix de
la structure de la consommation, tels que le revenu et les prix, sont
également déterminés par le plan et peuvent être considérablement
modifiés au cours d’une aussi longue période. En revanche, pour les
plans quinquennaux et plus encore pour les plans annuels, il faut
tenir compte de la structure réelle des revenus et des prix et des élasti­
cités correspondantes de la demande, car ces facteurs ne peuvent
guère être modifiés au cours d'aussi brèves périodes.
108. La planification financière a également joué un rôle impor­
tant dans le système de planification économique national; elle a pris
la forme de balances financières résumées établies par les organes
centraux de planification, et comprenant le budget d’Etat préparé
par le Ministère des finances, les plans relatifs aux liquidités et aux
crédits, préparés par les banques d’Etat, et les plans de financement
des entreprises. Etant donné que le volume physique du développe­
ment planifié a déjà été fixé dans le plan économique national d’après
divers calculs, et que la fourniture des matières premières nécessaires
pour atteindre le volume et la structure de la consommation intermé­
diaire et finale est un des objets essentiels et déterminants de la plani­
fication dans les pays à économie planifiée, le but principal des plans
financiers est d’assurer que le volume des moyens financiers circulant
dans l’économie nationale corresponde étroitement aux données du
plan physique. En conséquence, les plans financiers jouent un rôle
essentiellement secondaire dans la planification économique natio­
nale. Il en est d’autant plus ainsi que dans un système où la quasi-
totalité des moyens de production sont propriété publique et où les
prix sont fixés par les pouvoirs centraux, le financement des investis­
sements fixes, par exemple, ne pose aucun problème particulier, autre
que celui de la fourniture des moyens physiques nécessaires. Cepen­
dant, comme ils expriment les échanges de biens et de services en
termes monétaires, ces plans sont utilisés comme moyens de vérifier
la cohérence générale du plan économique national.
109. Les plans financiers jouent cependant un rôle très important
dans l'exécution des plans généraux; le flux planifié des moyens moné­
taires soutient la circulation planifiée des marchandises, ou influe direc­
tement sur elle lorsqu'elle n'a pas été fixée en détail dans le cadre du
plan. Les instruments de la planification économique tels que la fisca­
lité, l’octroi de crédits et le système de « comptabilité économique »
des entreprises, ont contribué de façon substantielle à inciter les
entreprises à atteindre les objectifs du plan en matière de production
et d’échanges de marchandises.
110. Les méthodes décrites ci-dessus donnent un aperçu général
de la manière dont est préparé un plan dans les pays à économie
planifiée, mais cet exposé ne rend certainement pas compte de tous
les travaux que comporte cette préparation. L’ensemble de ces tra­
vaux aboutit à l’élaboration de plans détaillés pour toutes les bran­
ches ainsi que pour les principales catégories d’activité. Etant donné
que la méthode des balances est utilisée directement au stade des
travaux relatifs à des objectifs particuliers du plan, et que les chiffres
de contrôle général sont établis au début de l’opération d’après des
calculs et des analyses d’agrégats, tous les objectifs particuliers du
plan devraient théoriquement être reliés entre eux dans le cadre d’un
système équilibré. Toutefois, en pratique, il est généralement impos­
sible à ce stade de parvenir à un résultat aussi parfaitement cohérent,
et cela pour deux raisons. Tout d’abord, les chiffres de contrôle tirés
du modèle d’ensemble initial ne peuvent tenir compte du détail des
rapports structuraux, si bien que, fort souvent, les plans détaillés
qui ont été élaborés ne correspondent pas exactement à leurs cadres.
En outre, lors de l’élaboration de plans détaillés, il est généralement
impossible de tenir compte de tous les rapports entre les éléments
en jeu, étant donné qu’il existe entre eux des corrélations extrême­
ment compliquées. C’est pourquoi il est nécessaire de vérifier à nou­
veau les plans spéciaux après qu’ils ont été élaborés, et de les modifier
pour les mettre pleinement en harmonie.

c) Rôle des balances générales

111. Les balances spéciales décrites ci-dessus ont trait à certains


secteurs particuliers, aux ressources et aux courants financiers. Ces
balances sont intégrées dans un système de comptabilité nationale
appelé balance de l’économie nationale. La balance de l’économie
nationale est utilisée à la fois pour mettre en harmonie les plans par­
tiels et s’assurer que les changements structuraux qu’impliquent ces
plans sont conformes aux objectifs d’ensemble. Les comptes natio­
naux comprennent:
i) La balance de la production et de l’utilisation du produit social,
qui reflète, sous ime forme générale, les changements intervenant
dans le volume et la structure du produit social, et qui est, par consé­
quent, calculée en prix constants. Elle est subdivisée en balances plus
détaillées — les moyens de production, d’une part, et les marchan­
dises entrant dans la consommation finale, d’autre part; ces dernières
sont à leur tour subdivisées en production industrielle, construction
et production agricole. Dans certains pays dont la structure indus­
trielle est plus complexe, la balance planifiée de la production indus­
trielle est établie séparément pour les branches qui relèvent de tel
ou tel ministère; lorsqu’un déséquilibre général se fait jour, cette
méthode permet d’en découvrir plus facilement la source.
ii) La balance de la production, de la distribution et de l'utilisa­
tion finale du revenu national, qui reflète, également sous une forme
générale, la variation des revenus, et qui, pour cette raison, est cal­
culée aux prix courants. Cette balance reflète les rapports inhérents
à la distribution des revenus entre le secteur de la production, le sec­
teur des services et la population; ces rapports sont déterminés par le
budget de l’Etat et par la balance des crédits, la balance financière
des entreprises et des institutions, et la balance des revenus et dépen­
ses monétaires de la population. On détermine les recettes nettes des
secteurs productif et non productif et de la population d’après l’en­
semble de ces opérations de distribution et de redistribution. Ces
recettes sont ensuite rajustées en fonction de la répartition planifiée
du revenu national net, calculée sur la base de plans détaillés relatifs
à des éléments tels que le commerce de détail, les investissements
fixes et la consommation matérielle du secteur non productif.
iii) La balance des ressources en main-d’œuvre, qui a déjà été
mentionée au début de la présente section.
iv) La balance du capital fixe, qui reflète les changements inter­
venus dans le volume d ^ biens de capital entre le début et la fin de la
période et permet ainsi"df’analyser des facteurs tels que les modifica­
tions du taux d’accroissement du capital fixe, son taux de dépréciation
par rapport au volume des investissements, et les changements dans
le volume de la construction inachevée.
112. L’ensemble de ces balances permet de vérifier la cohérence
générale du plan. En outre, l’analyse des rapports entre leurs indica­
teurs fait ressortir les tendances en ce qui concerne l’intensité d’utili­
sation de la main-d’œuvre et du capital et d’autres conditions structu­
rales préalables, ainsi que les mouvements prévus par les plans partiels.
Ces balances fournissent donc un moyen de déterminer dans quel sens
les plans partiels doivent être ajustés. Toutefois, dans la pratique, les
ajustements et les améliorations ne peuvent être effectués en se fon­
dant seulement sur ce système de tableaux équilibrés de l’économie
nationale, étant donné que les indicateurs qu’il contient sont trop
généraux. L’ensemble du système des balances des ressources naturel­
les, de la capacité de production, et, en particulier, les balances des
besoins en matières premières et en énergie, doivent être utilisées
dans ce but.
113. A ce sujet, comme on l’a indiqué plus haut, les pays à éco­
nomie planifiée envisagent la possibilité d’utiliser les techniques
entrée-sortie, notamment pour ce qui est du système des balances-
matières. L'utilisation des balances-matières est particulièrement com­
pliquée et la liste des matières et produits sélectionnés qui sert a l’éta­
blissement des balances n’est pas assez complète pour que les change­
ment intervenus dans une balance se répercutent pleinement et uni­
formément sur toutes les autres balances. Cependant, l’utilisation des
techniques d’entrée-sortie dans ce domaine se heurte à certaines diffi­
cultés. On a déjà mentionné, à propos des modèles d’agrégats, le pro­
blème de la variabilité des coefficients techniques dans un plan por­
tant sur une période plus ou moins longue. Or, comme une matrice
de ce genre comporte inévitablement un grand nombre d’éléments
dans une économie planifiée, il faut en outre disposer d’un très grand
nombre de données fondamentales, et celles-ci doivent être très
exactes, car des inexactitudes dans une partie du tableau affectent la
validité des indicateurs de l’ensemble de la matrice. Les balances dont
disposent actuellement les organismes centraux de planification ne
contiennent pas de données classées de façon suffisamment détaillée
pour être utilisées dans une matrice. Lorsqu’elles sont utilisées dans
des buts opérationnels, ces balances classent souvent les utilisateurs
non pas selon les produits particuliers qu’ils fabriquent, mais par
grands complexes industriels produisant chacun toute une gamme de
produits; de plus, les balances n’énumèrent séparément que les be­
soins des utilisateurs les plus importants et ne contiennent que des
estimations approximatives des besoins des utilisateurs de moindre
importance considérés en tant que groupe. Par ailleurs, les utilisateurs
énumérés séparément ne sont pas les mêmes dans chaque balance.
C’est pourquoi les matrices établies jusqu’ici dans les pays à économie
planifiée ont été utUisées pour effectuer des calculs approximatifs aux
stades initiaux du plan, ou pour déterminer approximativement les
ajustements à effectuer dans ce dernier. Elles ne peuvent pas encore
remplacer le système des balances pour ce qui est de la distribution
des matières premières et des produits.
114. Par tous ces moyens, un plan économique national coordonné
est finalement établi, et la liste correspondante des indicateurs fonda­
mentaux est déduite de ce plan. Après ratification du plan par le gou­
vernement et par le parlement, ces indicateurs sont transmis aux
exécuteurs directs du plan, à savoir aux entreprises et autres organisa­
tions. On comprendra que le plan ne peut être absolument cohérent.
Cela tient non seulement à l’imperfection relative des méthodes utili­
sées jusqu’ici pour sa préparation et à l’impossibilité de prévoir dans
le plan toutes les conditions particulières dans lesquelles les tâches
qu’il prescrit seront exécutées. Cela provient également du fait que le
plan central ne détermine pas jusqu’au plus infime détail tous les
aspects de la vie économique du pays; ses indicateurs sont plus ou
moins globaux et laissent par conséquent le soin aux administrateurs
d’adopter des solutions indépendantes pour les problèmes de détail
en vue de sauvegarder la production et de répondre aux besoins des
consommateurs. En conséquence, le plan doit permettre une certaine
souplesse; cela est rendu possible dans le plan par la constitution de
certaines réserves de biens essentiels destinées à faire face à des cir­
constances imprévues.

d) Critères d’efficacité dans la planification des investissements


115. Le calcul de l’efficacité économique des investissements fixes
joue un rôle de plus en plus important dans la préparation des plans
d’investissement et de la balance du capital fixe mentionée ci-dessus,
en particulier lorsqu’il s’agit de l’efficacité d’investissements qui vi­
sent à introduire de nouvelles techniques ou à mécaniser et automati­
ser des processus de production. Ces calculs, qui sont effectués à tous
les stades de la projection et de la planification, permettent de déter­
miner les méthodes les plus efficaces de développement des techni­
ques de production, d’établir un ordre de priorité des opérations et
de déterminer l’effet de ces opérations sur les indicateurs du plan
économique national. Les calculs ne sont pas utilisés pour déterminer
la répartition des investissements par secteur, mais plutôt pour choi­
sir entre divers projets qui diffèrent quant à l’intensité d’utilisation
du capital. Pour opérer ce choix on applique un critère qui ne permet
de choisir de projets à plus grande intensité de capital que moyennant
certaines conditions. En résumé, le choix entre deux projets compor­
tant une utilisation plus ou moins intensive de capital pour un volume
égal de production ne se fixe sur le premier projet (utilisation plus
intensive) que si le capital additionnel utilisé pour son exécution peut
être récupéré grâce à des économies sur les frais courants pendant
une période égale ou inférieure à la période type de récupération du
capital fixée par les autorités. Pour évaluer l’efficacité de chaque
projet, on tient compte non seulement des dépenses directes de ca­
pital, mais encore des investissements corespondants dans les bran­
ches de production connexes, ainsi que de la durée de la période de
construction et de la durée utile du projet. En pratique, sinon en
théorie, le rôle que joue la période type de récupération du capital —
ou, plus exactement, sa réciproque, que l’on appelle le coefficient
d’efficacité — est dans un certain sens analogue à celui d’un taux
d’intérêt fictif. Ainsi, si l’on considère les économies réalisées sur les
frais courants comme le revenu du capital additionnel, le projet com­
portant une utilisation plus intensive de capital n’est choisi que si son
taux de rentabilité dépasse le taux d’intérêt fictif.
116. En Union soviétique, on a établi différentes périodes types
de récupération ou, pour utiliser la réciproque, différents « coefficients
types d’efficacité» pour chacune des diverses branches de la produc­
tion. Dans quelques autres pays, cependant, le même coefficient a été
appliqué à tous les secteurs. Le coefficient type a été déterminé
d’après les résultats d’enquêtes sur la possibilité de réduire les dépen­
ses courantes en remplaçant les moyens de production existants par
du matériel qui permet d’accroître la production du travail par les
méthodes les plus récentes ou de réaliser des économies sur les
matières premières.
117. A propos du problème de l’efficacité économique des inves­
tissements fixes, les pays à économie planifiée ont également étudié
la question des prix utilisés dans ces calculs. Le but visé dans ce cas
étant d’accroître la productivité d’ensemble, il a été nécessaire d’uti­
liser des prix qui reflètent le plus exactement possible la proportion
de ressources utilisées pour la production de telle ou telle marchan­
dise. En réalité, cependant, les prix se sont écartés de ces niveaux
relatifs. On étudie par conséquent la mise en place d’un système con­
ventionnel de prix comptables pour calculer l’efficacité économique.

3. — M é t h o d e s d e p l a n if ic a t io n

118. La préparation d’un plan pour l’ensemble de l’économie


nationale nécessite le travail coordonné de toutes les unités de l’ap­
pareil de planification. La participation des unités de planification
à tous les niveaux garantit que la version finale du plan est fondée
sur des renseignements exacts tant en ce qui concerne les besoins de
l’économie qu’en ce qui concerne la main-d’œuvre et les ressources
matérielles, financières et autres, nécessaires pour faire face à ces
besoins.
119. Comme on l’a déjà mentionné, le travail de préparation des
plans est effectué presque simultanément dans tous les départements
de l’appareil de planification. Les plans à moyen terme sont formulés
en tenant compte des plans à long terme, et les objectifs de ces plans
sont répartis par année, secteur individuel, région économique, entre­
prise et organisme de construction. Les plans courants annuels sont
élaborés à partir des objectifs fixés pour chaque année dans le plan
à moyen terme, modifiés selon les progrès accomplis dans l’exécution
de ce plan et selon les changements intervenus dans les besoins de
l’économie et dans les relations économiques.
120. Les organes directeurs fixent à l’avance la procédure à suivre
et les limites imposées dans le temps pour la préparation du plan
économique national. Le travail de préparation du plan peut être
divisé en plusieurs étapes, de le manière suivante; préparation de la
forme des tableaux, des indicateurs et de leur mode d’emploi; estima­
tion des résultats et analyse des réalisations du plan précédent; éla­
boration de directives et de chiffres de contrôle pour la préparation
du plan; préparation et confirmation du plan; transmission des objec­
tifs du plan national sous la forme de directives aux entreprises et
autres unités directement intéressées à son exécution. En pratique,
cependant, il est souvent difficile de séparer les étapes les unes des
autres. Par exemple, on commence à analyser l’exécution du plan pré­
cédent avant la fin de celui-ci tout en fixant à l’avance les indicateurs
à utiliser pour le plan suivant; d’autre part, le travil de préparation
du nouveau plan s’effectue en même temps que l’on revise et corrige
continuellement les données que l’on possède sur les résultats anti­
cipés du plan précédent.
121. Le choix de la présentation des tableaux et l'élaboration des
indicateurs et de leur mode d’emploi ont pour but d’assurer la pré­
paration uniforme du plan dans tous les organes de planification. Des
tableaux, des indicateurs et des méthodes de calcul uniformes per­
mettent de comparer les plans et d’additionner les éléments concernant
des domaines particuliers de l’économie ou les régions différentes.
122. Etant donné que l’élaboration du nouveau plan commence
avant la fin de la précédente période de planification, il devient essen­
tiel de déterminer par anticipation les résultats obtenus au cours de
cette dernière. Les renseignements fournis sont utilisés pour la partie
écoulée de la période, mais, pour la partie restant à courir, il faut
évaluer par anticipation les réalisations de l’ancien plan.
123. La préparation véritable du nouveau plan économique natio­
nal commence avec l’élaboration de normes chiffrées pour la période
considérée. Ces normes indiquent les objectifs de développement pour
les différents secteurs de l’économie, fixent les principales étapes de
la période de planification et prescrivent les mesures les plus impor­
tantes à prendre pour assurer que les objectifs seront atteints. Les
chiffres de contrôle provisoires sont préparés par les organismes cen­
traux de planification avec l’aide des ministères et des services et, en
Union soviétique, des organismes planificateurs des Républiques, du
Conseil économique national de l’URSS et d’autres organismes. Dès
ce stade, on utilise abondamment un système de balances économi­
ques pour s’assurer que toutes les étapes et tous les indicateurs du plan
sont bien coordonnés. Une fois les chiffres de contrôle confirmés à
l’échelon du gouvernement, ils fournissent la base sur laquelle l’en­
semble du plan est bâti.
124. Le nombre et le type des principaux indicateurs exprimés
dans les chiffres de contrôle varient considérablement selon les pays.
Dans tous cependant, à ce stade de la formulation du plan, on fixe
des limites aux moyens dont on disposera pour le développement ou
on les confirme. Ces limites concernent les ressources en matériaux
essentiels, investissements et main-d’œuvre; les entreprises doivent
observer ces limites lorsqu’elles élaborent leurs propres plans. D’au­
tres indicateurs, contenus dans les chiffres de contrôle et relatifs au
volume de la production et des ventes, sont donnés à ce stade à titre
indicatif plutôt qu’en tant que directives.
125. Le travail de planification propre des entreprises est fondé
sur les chiffres de contrôle qui leur sont transmis. Chaque entreprise,
dans la préparation de son plan, consulte ses fournisseurs et ses
clients, de sorte que le plan est déjà coordonné en principe avec les
plans des entreprises connexes. Cette coordination entre les entre­
prises, bien entendu, ne couvre pas toutes les exigences en ce qui
concerne les fournitures matérielles, les importations et d’autres res­
sources.
126. Pendant tout le travail d’élaboration du plan, les problèmes
qui se posent et les objectifs fixés font l’objet de discussions et de
consultations avec les travailleurs des entreprises et d’autres organi­
sations, avec les organismes syndicaux et, lorsque le plan intéresse le
développement économique d’une région particulière, avec la popula­
tion locale. L’important de tout ceci est que, plus les individus com­
prennent le contenu des plans et plus ils se considèrent comme étant
responsables de leur exécution, plus il est vraisemblable qu’ils s’ef­
forceront de les appliquer activement et plus leur initiative sera
grande au cours de la période considérée.
127. Les plans des entreprises sont contrôlés et modifiés dans les
ministères, puis les plans généraux concernant les différents secteurs
de l’économie sont soumis à l’organisme planificateur central, qui
reçoit en même temps les indicateurs financiers, les plans provisoires
des unités régionales, et d’autres renseignements pertinents. Le rôle
de l’organisme planificateur à ce stade est de fondre les plans partiels
et de s’assurer que les exigences du plan économique national dans
son ensemble sont satisfaites. Généralement, les imperfections sont
découvertes à ce stade: elles sont étudiées et corrigées en coopération
avec les ministères et, lorsqu’un problème particulier l’exige, avec les
entreprises elles-mêmes. Une fois équilibré et vérifié, le plan écono­
mique national est soumis par l’organisme planificateur central au
gouvernement; après approbation du gouvernement et du Parlement,
le plan devient obligatoire. Les plans quinquennaux et les plans à long
terme, ou les directives qui les concernent, sont généralement exa­
minés par le Comité central du Parti.
128. La préparation des plans à long terme ne se fait générale­
ment pas de la même manière que celle des plans annuels et à moyen
terme. Les plans annuels et à moyen terme, dont les méthodes de
planification viennent d’être décrites, fournissent la base du contrôle
direct du développement de l’économie. Par contre, un plan à long
terme couvrant une période de 15 à 20 ans n’est pas un instrument
permettant de contrôler l’économie mais une base servant à la pré­
paration des plans annuels et à moyen terme. La recherche scienti­
fique et l’évaluation des ressources sont les éléments essentiels de la
préparation des plans à long terme; les travaux concernant ces plans
sont donc organisés de manière sensiblement analogue aux grands
travaux de recherche scientifique, en utilisant les services de nom­
breux spécialistes et savants éminents. Ce travail ne se fait que dans
les services centraux, où l’organisme planificateur central collabore
avec les ministères, et les indicateurs pertinents ne sont pas transmis
aux entreprises.
129. Dans les dernières années, on a beaucoup discuté et étudié,
dans les pays à économie planifiée, le problème de la continuité de la
planification. A cet égard, on a émis, et quelquefois appliqué, diverses
idées concernant des plans quinquennaux mobiles ou des plans an­
nuels prolongés. Par exemple, dans certains pays comme la Tchéco­
slovaquie, lorsqu’on élabore le plan annuel fondé sur le plan quin­
quennal, on fixe en même temps les directives de planification pour
l’année suivante. Ceci permet aux entreprises, notamment dans les
secteurs qui ont un cycle de production long, d’avoir une perspective
plus claire de l’avenir.
130. Il est très important de résoudre ce problème de la conti­
nuité de la planification pour assurer un développement économique
plus harmonieux. L’amélioration des plans à moyen terme, qui a ré­
sulté de l’intensification de la planification à long terme et de la prise
en considération constante des résultats des développements en cours,
est une étape vers la solution de ce problème. En même temps, on
a constaté une tendance à étendre la période de planification pour les
plans opérationnels eux-mêmes, qui sont encore établis annuellement.
L’expérience des prochaines années devrait monter quelle solution est
la meilleure.

a) Coordination internationale des plans

131. Dans les dernières années, les pays à économie planifiée ont
fait des efforts considérables au Conseil d’assistance économique
mutuelle (CAEM) en vue de coordonner plus étroitement les plans
nationaux. Le processus de coordination des plans de développement
des pays du CAEM est actuellement le suivant: une fois établis les
projets de plans nationaux, les pays membres du CAEM tiennent des
consultations multilatérales. Les ressources et les besoins totaux sont
pris en considération et des modifications sont apportées aux plans
provisoires des différents pays. Les organes du CAEM émettent des
recommandations sur les questions qui nécessitent un examen com­
mun. Ces recommandations, présentées par des comités spécialisés
permanents, sont adoptées au cours des sessions du Comité exécutif
et des sessions annuelles du CAEM. En vue de faciliter la coordina­
tion internationale, on a recherché la solution d’un certain nombre
de problèmes. Parmi ceux-ci, les plus importants ont été les problèmes
de normalisation, les méthodes de formation des prix, la mise au point
de méthodes de comparaison internationale des coûts relatifs et l’amé­
lioration des méthodes d’évaluation de l’efficacité des investissements.

4. — F o r m u l a t io n d e s p l a n s e n Y o u g o s l a v ie

132. La Yougoslavie est le seul pays à économie socialisée qui ait


mis au point des méthodes entièrement nouvelles de planification et
de gestion. Pendant les premières années qui ont suivi la deuxième
guerre mondiale, le système d’organisation et de gestion de l’économie
en Yougoslavie était analogue à celui qui était appliqué dans les autres
pays à économie planifiée. Mais, durant les années cinquante, ce système
a subi une série de modifications. Celles-ci ont surtout consisté à con­
fier la gestion de l’économie, dans tous les domaines d’activité, à des
conseils de travailleurs. Cette réforme s’est accompagnée d’une décen­
tralisation très poussée dans la gestion des activités économiques,
sociales et administratives. On a accordé une large autonomie non
seulement aux entreprises, mais aussi aux organes politiques régio­
naux (communes, régions, républiques) et aux services sociaux, tou­
jours selon des principes d’autogestion. Les plans nationaux ont donc
revêtu un caractère plus global; on a voulu établir des rapports glo­
baux entre le taux de croissance des différents secteurs, la répartition
du revenu, la structure des investissements, le commerce extérieur et
la balance des paiements. Ces rapports impliquent nombre d’autres
relations, prévues pour résoudre les problèmes dynamiques et structu­
raux essentiels du développement économique. Ils constituent ainsi
un groupe d’éléments cohérents et harmonieux. Les plans, de ce fait,
n’assignent plus aux entreprises individuelles des objectifs détaillés.
133. La politique suivie en matière de planification, qui vise à
atteindre des objectifs dynamiques dans l’orientation de la produc­
tion, la répartition du revenu, le volume et la structure des investisse­
ments et de la consommation et la balance des paiements, est mise en
vigueur essentiellement par la fixation de normes légales générales, qui
règlent la répartition des revenus des entreprises, par des mesures
fiscales, par une politique de crédit à long terme, qui influence la
dynamique et la structure des investissements, et par une politique
de crédit à court terme, et une politique des prix et du commerce
extérieur. La réglementation générale, fixée par des lois, ou par des
arrêtés du gouvernement, est conçue pour inciter les entreprises à
parvenir à un certain degré de rentabilité et à tenter d’augmenter la
productivité générale.
134. Pour la formulation des plans, on effectue des analyses
macro-économiques et sectorielles des possibilités de développement,
en utilisant un ensemble de bilans et de modèles agrégatifs; ceux-ci
couvrent les principaux facteurs dynamiques et structuraux de la pro­
duction, des investissements, de la consommation, de l’emploi, de la
productivité, du revenu et des prix. Ces analyses, même lorsqu’elles
sont très poussées, ne servent qu’à déterminer les rapports globaux
du développement économique, le rôle des divers facteurs économi­
ques et les objectifs généraux.
135. Les méthodes utilisées dans la formulation des plans en
Yougoslavie tiennent compte également de l’autogestion dans les acti­
vités économiques et les services sociaux et de l’autonomie des auto­
rités régionales. Comme les entreprises socialisées sont des unités
autonomes, il n’existe aucune relation administrative entre les entre­
prises et les organes gouvernementaux pour la formulation des plans.
Mais les entreprises sont souvent consultées par l’intermédiaire des
conseils de planification régionaux, des chambres et associations indus­
trielles et d’autres organismes. Pour la préparation des plans, l’orga­
nisme fédéral de planification coopère étroitement avec les conseils
de planification des républiques et des régions, et consulte également
les organismes tels que les associations industrielles, les syndicats, les
banques, les associations d’entreprises et les instituts de recherche.
Dans la première phase de l’élaboration des plans, on fixe un cadre
global offrant plusieurs options en ce qui concerne les objectifs et la
politique et on demande aux organismes politiques et professiormels
à différents niveaux d’en discuter. Lorsqu’ime position a été adoptée
et qu’on a choisi les diverses solutions fondamentales possibles, on
commence de manière plus concrète la formulation du plan. On con­
sulte alors à plusieurs reprises les différents organismes profession­
nels et politiques. Lorsque le texte final du plan a été élaboré et ap­
prouvé par le gouvernement, on le soumet au Parlement pour décision
définitive.
Chapitre 2

L’EXÉCUTION DES PLANS

Économies d’entreprise privée et économies mixtes

136. La façon de concevoir l’exécution des plans est nécessaire­


ment déterminée par le cadre social et institutionnel. Le niveau de
développement d’un pays et la nature même de la planification et son
évolution créent des situations diverses. Dans les pays de libre entre­
prise et d’économie mixte les plus avancés, la planification a souvent
commencé au lendemain même de la deuxième guerre mondiale, car
il s’agissait alors avant tout de relever et de reconstruire l’économie.
Dans ces conditions, les objectifs désignés se présentaient générale­
ment sous la forme d’allocations prioritaires de ressources destinées
aux secteurs essentiels; les gouvernements s’efforçaient d’atteindre
ces objectifs en utilisant des méthodes qui, en principe du moins,
n’étaient pas très différentes de celles employées dans les économies
de guerre. Par la suite quelques-uns de ces pays ont commencé à pré­
parer une expansion équilibrée de tous les secteurs de la production
et des services publics au moyen d’une méthode coopérative de plani­
fication; les représentants de tous les groupes qui partagent le pou­
voir de décision dans le domaine économique ont pris une part effec­
tive à l’élaboration des plans. Cette méthode, là où elle a été appli­
quée, a eu pour effet d’encourager assez vivement les particuliers à
orienter leurs décisions vers la réalisation des objectifs définis
collectivement et les plans ont pris le double caractère d’un pro­
gramme d’action concertée et d’une étude globale du marché. Après
avoir établi leur budget d'équipement en fonction des objectifs du
plan, les autorités ont également exercé en général un certain con­
trôle sur les investissements privés au moyen de mesures d’encourage­
ment appliquées à cet effet. Dans certains pays, il s’agissait surtout
d’une planification économique à court terme et l’on s’attachait essen­
tiellement à utiliser les institutions et la législation existantes pour
éviter ou corriger des perturbations qui auraient pu avoir une influ­
ence défavorable sur le taux de croissance. Dans d’autres pays, les uns
développés, les autres sous-développés, où la préparation des plans
était, dans une large mesure, l’œuvre d’un groupe de spécialistes rele­
vant du gouvernement, les plans comportaient des objectifs précis
à plus long terme. Dans presque tous les cas, l’exécution des plans
se faisait en application de directives générales et de décisions de
principe; mais celles-ci n’étaient souvent liées que de manière assez
lâche aux objectifs du plan et entre elles car il fallait laisser au sec­
teur privé xme grande liberté de choix dans le cadre des objectifs du
plan. Par conséquent, les politiques visant à influer sur le secteur
privé ont généralement consisté à créer l’infrastructure et à modifier
le système des mesures d’encouragement et de dissuasion. Le seul
secteur de l'activité économique où le lien entre les objectifs du plan
et les mesures nécessaires pour leur réalisation ait été direct et étroit
est le secteur public. Dans une très large mesure, il s’est agi, pour
exécuter les programmes du secteur public dans ces pays, de coordon­
ner les programmes dudit secteur avec le budget et de fournir l’appa­
reil administratif permettant de mener à bien les projets.

1. — C o m m e n t s o n t a t t e in t s l e s o b j e c t if s f i x é s e n m a t iè r e d 'é p a r g n e
ET DE r é s e r v e s DE DEVISES ÉTRANGÈRES

137. Les plans de développement des pays sous-développés fixent


des taux relativement élevés d’accroissement du revenu national. Pour
atteindre cette cadence rapide d’expansion économique, on a prévu
une augmentation sensible de la formation de capital. Pour augmenter
l’investissement dans d’aussi fortes proportions, il a fallu prévoir un
accroissement parallèle de l’épargne, afin d’atteindre les objectifs
fixés sans provoquer l’inflation dans le pays ou de graves difficultés
de balance des paiements. Par conséquent, on a envisagé une augmen­
tation très forte de l’épargne tant extérieure qu’intérieure.

a) Epargne intérieure

138. Les plans de développement reposent invariablement sur


l’hypothèse que l’augmentation voulue de l’épargne intérieure se pro­
duira grâce en partie à l’accroissement spontané de l’épargne privée
et de l’épargne publique, mouvement qui va généralement de pair avec
l’augmentation du revenu. On se fie aussi beaucoup aux mesures pri­
ses par le gouvernement pour augmenter la proportion de l’épargne
par rapport au revenu global. En fait, la politique gouvernementale
a été considérée comme un facteur indispensable de l’augmentation
voulue de l’épargne totale.
139. L’augmentation de l’épargne publique est un facteur clef
dans la plupart des plans de développement. L’importance que l’on
accorde généralement à une plus forte contribution du gouvernement
à l’épargne totale est peut-être une façon de reconnaître tardivement
que le niveau de l’épargne publique était insuffisant ces dernières
années. Pendant les années 1950 et suivantes, par exemple, le rapport
entre l’épargne publique et le produit national n’a guère ou aucune­
ment augmenté dans la plupart des pays sous-développés. Cela était
attribuable pour beaucoup à l’augmentation rapide des dépenses de
consommation de l’Etat, conséquence de l’évolution économique et
sociale.
140. Dans la plupart des pays, les planificateurs comptent, pour
augmenter l’épargne publique, sur les efforts visant à limiter l’acrois-
sement de la consommation de l’Etat et sur les mesures destinées
à augmenter les recettes publiques. Cependant, étant donné la de­
mande toujours plus forte de services publics très divers et les fac­
teurs qui poussent l’Etat à accroître ses dépenses de consommation,
il n’est pas surprenant que dans de nombreux pays l’augmentation
des ressources de l’Etat escomptée dans les plans de développement
soit étroitement subordonnée à im accroissement considérable des
recettes publiques. On admet généralement aujourd’hui que la ré­
forme du système fiscal est essentielle pour l’exécution des plans de
développement. Les gouvernements des pays sous-développés ont
toujours eu tendance à compter beaucoup sur les impôts indirects, en
particulier sur ceux qui frappent le commerce extérieur, pour accroî­
tre le volume des recettes publiques. On a fréquemment eu recours
à l’impôt sur les biens de consommation importés, qui a l’avantage
d’être facile à administrer, d’avoir un rendement considérable et, en
même temps, de décourager les importations superflues ou concur­
rentielles. Dans certains pays, les droits d’exportation constituent ime
source importante de recettes publiques; ces recettes proviennent de
sources différentes, notamment les taxes à l’exportation, les mono­
poles commerciaux d’Etat et les offices de commercialisation. Dans
quelques cas, les bénéfices découlant de l’application d’un système
de taux de change multiples procurent également des recettes sub­
stantielles au gouvernement. L’imposition des produits et services à
l’intérieur du pays a généralement pris de l’importance; en effet, bien
des pays ont récemment majoré la taxe sur les articles de luxe et
étendu à un plus grand nombre de produits le champ d’application
des taxes intérieures.
141. Bien que les pays sous-développés aient en général compté
plus sur les impôts indirects, ils ont également fait appel dans une
mesure appréciable aux impôts directs, notamment à l’impôt sur le
revenu des particuliers et des entreprises. Les impôts sur le capital,
bien que très répandus, ont en général grossi relativement peu les
recettes publiques. Bien souvent, on n’a pas exploité au maximum la
possibilité d’accoître les recettes publiques provenant du secteur
agricole. Mais il faut reconnaître que la capacité fiscale d’importantes
fractions de ce secteur est peu élevée en raison de bas niveaux de
revenus et de productivité. En même temps, la valeur des terrains est
en général incorrectement estimée aux fins de l’impôt et si un certain
nombre de pays ont pris des mesures pour appliquer rm régime fiscal
réaliste au secteur agricole, il reste que dans l’ensemble le besoin
d’vme réforme générale des impôts agricoles se fait sentir. Ces réfor­
mes ont visé notamment le régime fiscal et ont eu pour but d’accorder
des dégrèvements suffisants aux petits exploitants agricoles et d’insti­
tuer un impôt progressif frappant davantage les gros revenus agricoles.
142. Devant la nécessité d’accroître d’urgence l’épargne publique,
de nombreux pays ont pris des mesures pour augmenter les recettes
fiscales en modifiant à la fois l’assiette et le taux de l’impôt. Les ré­
formes fiscales comprennent le relèvement de l’impôt sur le revenu
des particuliers et la création d’impôts sur les gains de capital, la for­
tune, les dépenses des particuliers et les dons. Ces dernières années,
la plupart des pays ont également fait des efforts pour éliminer toutes
les échappatoires légales, rendre plus stricte l’administration des lois
fiscales et combattre l’évasion fiscale.
143. Si les gouvernements ont cherché en général à accroître le
produit de l’impôt sur le revenu des particuliers, ils,ont souvent fait
des progrès plus lents dans leurs efforts pour tirer des bénéfices plus
élevés de la gestion des entreprises publiques. Comme ces entreprises
vendent leiurs biens et services à bas prix, un bon nombre d’entre elles
non seulement ne réalisent pas de bénéfices mais encore sont en dé­
ficit. Il ne faut cependant pas oublier que des entreprises publiques
doivent bien souvent être lancées à très grands frais et sont souvent
bien longtemps en gestation avant de devenir rentables.
144. Dans leur programme de financement des plans, quelques
pays ont fait une place importante à une politique de financement
sans contrepartie budgétaire. D’une manière générale, quand les dé­
ficits sont ainsi prévus, on compte sur l’accroissement de l’épargne
privée intérieure ou sur le transfert des ressources étrangères pour
porter l’épargne au niveau nécessaire рош: atteindre les objectifs
fixés en matière d’investissement. On cherche généralement à prati­
quer pendant quelque temps une politique de dépenses publiques
sans contrepartie budgétaire dans des limites sûres et « non inflation­
nistes », en tenant dûment compte du gonflement de la masse moné­
taire nécessitée par une économie en expansion. Cependant, en dépit
des efforts déployés pour augmenter l’épargne publique, la tendance
à l’accroissement des dépenses et les difficultés rencontrées pour
augmenter les recettes fiscales ont amené un certain nombre de pays
à pratiquer cette politique d’une manière que l’on pourrait considérer
excessive et improvisée. Pour financer ces déficits budgétaires, on
a souvent eu recours à l’emprunt auprès des banques; très fréquem­
ment, toutefois, l’importance de ces emprunts par rapport aux res­
sources disponibles dans l’économie a provoqué de fortes poussés
inflationnistes.
145. En élaborant les politiques fiscales destinées à augmenter
l’épargne publique, les gouvernements ont dû tenir compte de l’effet
des mesures adoptées sur l’épargne privée et celle des sociétés. On s’est
préoccupé de ce que la charge fiscale peut réduire l’épargne privée, ce
qui fait qu’en fin de compte l’épargne intérieure globale n’atteint pas
le niveau voulu. L’importance que les gouvernements attachent à
l’augmentation de l’épargne privée s’est traduite directement par des
mesures visant tout particulièrement à encourager l’épargne des
entreprises et des particuliers. Le contrecoup immédiat de la politique
des pouvoirs publics sur l’épargne privée est évidement atténué par
le fait que, dans une large mesure, l’épargne privée est déterminée
par des facteurs sur lesquels la politique gouvernementale n’a qu’une
influence indirecte. Cependant, la politique gouvernementale peut
exercer une certaine influence sur l’épargne privée et contribuer à
l’orienter vers les investissements souhaités.
146. Parmi les mesures que les gouvernements ont adoptées pour
augmenter l’épargne des entreprises, on peut citer l’exonération
temporaire d’impôts sur les bénéfices réalisés par les nouvelles entre­
prises. Un certain nombre de pays ont accordé l’exonération de l’impôt
sur les bénéfices réinvestis, tandis que certains cherchaient à faire
augmenter l’épargne des entreprises en accordant des concessions
généreuses en matière d’amortissement. Dans divers pays, on a fait
des efforts spéciaux pour encourager les petites entreprises à épar­
gner en les faisant bénéficier d’un traitement fiscal favorable. Pour
encourager l’épargne des particuliers, on a accordé des dégrèvements
au titre de certaines formes d’épargne comme les primes d’assurance
sur la vie, ainsi que l’exonération de l’impôt sur le revenu des obliga­
tions de l’Etat. L’épargne sous forme de placements de portefeuille
a été encouragée par certains pays qui ont accordé une exonération
de l’impôt sur les dividendes. D’autres ont institué des impôts sur les
dépenses de consommation pour encourager l’épargne. En plus des
mesures fiscales, plusieurs pays ont employé divers moyens pour
encourager l’épargne des particuliers. On peut citer notamment les
campagnes de vente d’obligations de l’Etat et l’assistance fournie pour
la création ou l’extension des moyens d’épargne comme les caisses
d’épargne locales, les caisses d’épargne postales, les caisses de pré­
voyance et les coopératives. Ces mesures et d’autres destinées à déve­
lopper les institutions et à encourager la création de marchés de capi­
taux visent aussi bien à accroître et mobiliser l’épargne qu’à l’orienter
vers des voies productives.

b ) Epargne extérieure et devises étrangères


147. Jusqu’à présent, presque tous les pays sous-développés ont
compté sur les capitaux étrangers pour financer une fraction plus ou
moins grande de leurs dépenses d’investissement. Cette conception se
retrouve dans les plans de développement récents, qui partent en
général de l’hypothèse que, pour financer les programmes d’investis­
sement, ces pays pourront faire appel à l’épargne extérieure aussi bien
qu’à l’épargne intérieure pouf accélérer leur développement écono­
mique. L’apport que l’on peut attendre de l’épargne extérieure s’est
montré variable, mais dans la majorité des pays il représentait au
moins le cinquième du montant global des dépenses d’investissement.
Il est particulièrement important que les pays sous-développés dispo­
sent des devises étrangères nécessaires pour financer leurs plans.
Ainsi donc, même si les ressources globales fournies par l’épargne
sont suffisantes, la pénurie de devises indispensables à l’achat de cer­
tains biens d’équipement et de matières premières essentiels peut
empêcher ou ralentir l’exécution des plans dans quelques secteurs
clefs de l’économie. La bonne marche du plan exige une progression
satisfaisante non seulement de l’accroissement de l’épargne, mais
aussi des réserves de devises.
148. Etant donné le rapport étroit qui existe entre la balance
intérieure et la balance extérieure et l’importance des réserves de
devises étrangères, la planification du commerce extérieur en tant
que partie intégrante du plan d’ensemble revêt une importance parti­
culière, surtout dans les pays sous-développés. En pratique, un petit
nombre de pays sous-développés seulement ont arrêté des program­
mes détaillés d’exportation et d’importation dans le cadre de leur plan
de développement. Les raisons pour lesquelles de nombreux pays
semblent ainsi négliger la planification du commerce extérieur sont
faciles à comprendre. La planification des exportations est nécessaire­
ment sujette à des risques d’erreurs importants en raison des varia­
tions fréquentes et imprévisibles de la demande mondiale de produits
primaires. Outre la tendance constamment défavorable depuis quel­
ques années des termes de l’échange pour les pays sous-développés,
les prix de leurs exportations ont subi des fluctuations considérables
causées par des perturbations cycliques dans les pays dévéloppés à
régime d’entreprise privée aussi bien que par les caprices du temps
dont on ne peut prévoir les répercussions sur l’offre de produits agri­
coles pour l’exportation et la consommation intérieure. Ces divers
éléments d’incertitude réunis rendent plus difficile la tâche de plani­
fier le secteur du commerce extérieur. De plus, l’insuffisance des ren­
seignements statistiques et le manque de personnel qualifié ont fré­
quemment entravé les efforts faits pour préparer des programmes
d’ensemble pour le secteur extérieur. C’est pourquoi les gouverne­
ments, lorsqu’ils préparent des plans de développement, se sont
souvent bornés à indiquer leurs objectifs généraux en matière d’ex­
portation et à évaluer de façon approximative leurs besoins en
importations. Ces objectifs et ces évaluations ont dû se conformer
aux caractéristiques de la balance des importations, mais bien sou­
vent on n’a pas vérifié leur concordance avec les plans de dépenses
et de production. -
149. Bien que la politique d’encouragement des exportations
repose souvent sur la simple hypothèse que les augmentations systé­
matiques de la production agricole permettront d’intensifier les ex­
portations, certains gouvernements ont agi de façon plus directe. Un
certain nombre de pays ont fixé des objectifs pour divers produits
d’exportation particuliers et inscrit dans leurs plans nationaux des
projets concernant la production de nouveaux produits d’exportation.
Plusieurs pays ont également essayé de combiner leurs plans de déve­
loppement industriel avec des programmes d’encouragement des ex­
portations en créant des industries dont la production trouverait des
débouchés à l’extérieur. Les ventes à l’exportation ont aussi été en­
couragées au moyen de mesures telles que l’octroi de primes à
l’exportation, la réduction des taxes d’exportation, l’élimination des
restrictions sur les exportations, l’octroi de conditions spéciales de
financement pour les industries qui travaillent pour l’exportation et
la conclusion d’accords de troc ou d’autres accords commerciaux
bilatéraux. Les politiques de contrôle des changes et surtout les sys­
tèmes de taux de change multiples ont également servi à encourager
le exportateurs.
150. Si les politiques d’encouragement des exportations n’ont pas
toujours donné les résultats espérés, c’est également à des circons­
tances échappant au contrôle des pays sous-développés qu’il faut
souvent attribuer le fait que les objectifs fixés pour les exportations
n’ont pas été atteints. Parmi ces circonstances, on peut citer notam­
ment plusieurs facteurs économiques qui exercent une influence sur
les exportations de produits primaires et aussi les politiques commer­
ciales des pays développés à régime d’entreprise privée. C’est ainsi
que les recettes d’exportations de produits primaires ont souffert de
la grande instabilité qui caractérise le marché de ces produits. De
même, la lenteur du rythme d’accroissement de la demande de nom­
breuses denrées et les changements technologiques tels que les éco­
nomies réalisées dans l’emploi de matières premières industrielles et
la mise au point des produits synthétiques ont limité les possibilités
d’augmentation des exportations. Bien que de nombreux pays déve­
loppés à régime d’entreprise privée aient pris des mesures pour
assouplir leur politique commerciale, le çontigentement des importa­
tions de produits alimentaires et de certains minerais et métaux, les
tarifs protecteurs et les restrictions sur les importations de textiles
et de certains autres produits manufacturés des pays sous-développés
sont, en fin de compte, restés en viguer et ont considérablement
entravé l’augmentation des exportations des pays sous-développés. Les
perspectives défavorables des exportations, en particulier des exporta­
tions de produits manufacturés vers les pays industriellement déve­
loppés, ont amené un certain nombre de pays à chercher dans leur
propre région d’autres débouchés pour leurs produits d'exportation.
151. Les politiques d’importation des pays sous-développés mon­
trent que ces pays accordent une priorité élevée à l’augmentation de la
production intérieure des produits destinés à remplacer les importa­
tions. Le remplacement des importations a un double objet : réduire
les importations des biens qui pourraient être produits économique­
ment dans le pays et augmenter la proportion des recettes en devises
étrangères qui pourraient être affectées à l’achat de biens d’équipe­
ment. Les programmes de remplacement des importations ont porté
notamment sur l’augmentation de la production intérieure de denrées
alimentaires, le développement des industries manufacturières pro­
duisant des articles de grande consommation et la création d’au moins
quelques industries de biens de production. La plupart des plans
comprennent plusieurs de ces programmes, dont l’importance relative
dépend de la situation de l’offre au moment considéré, des ressources
disponibles, de la dimension du marché et du degré de développe­
ment.
152. Afin d’atteindre plus facilement les objectifs fixés en matière
d’importations, on a adopté diverses mesures relatives au commerce
extérieur et aux paiements. A part un nombre relativement faible de
pays qui ont maintenu la libre convertibilité, les pays sous-développés
ont imposé des restrictions, plus ou moins sévères selon le pays, sur
les transactions en devises étrangères. Dans bien des cas, ces restric­
tions ont été combinées avec un système de licences d’importation et
de contingentement des importations. Le contrôle des changes a géné­
ralement amené le gouvernement à répartir les devises entre les im­
portateurs en fonction de priorités fixées par lui. Certains pays ont
également combiné le contrôle des changes avec l'utilisation de taux
de change multiples.
153. En exécutant leurs plans, de nombreux pays ont constaté
qu’ils avaient fixé des objectifs trop ambitieux pour les exportations
ou que les importations tendaient à dépasser les estimations initiales.
Les possibilités d’intensifier les exportations étant en général relative­
ment limitées, ces pays avaient le choix entre réduire leurs importa­
tions ou augmenter les emprunts à l’étranger. Comme il leur était
souvent impossible de se procurer des capitaux étrangers supplémen­
taires, ils ont dû en général réduire les importations. Dans bien des
cas, ils ont renforcé les restrictions aux importations de biens de
consommation non essentiels, mais très souvent aussi les importa­
tions de biens d’équipement et de matières premières industrielles
ont été restreintes. Il a fallu alors comprimer les programmes d’in­
vestissement ou sous-utiliser la capacité réelle de production, ce qui
a ralenti les progrès vers les objectifs du plan.
154. Dans l’impossibilité de financer les plans de développement
uniquement par l’épargne intérieure et le commerce extérieur, les
gouvernements font des efforts concertés pour accélérer l’afflux de
capitaux étrangers. Bien que les gouvernements aient en général
accordé la préférence à des capitaux officiels de l’étranger plutôt qu’à
des capitaux privés en tant que source extérieure de financement, on
dénote dans certains pays im changement récent d’attitude à l’égard
des investissements privés de l’étranger. L’une des causes importantes
de ce changement est le besoin d’obtenir non seulement des capitaux
mais aussi les services de techniciens et de cadres étrangers. Les poli­
tiques visant à attirer les capitaux privés ont consisté notamment
à relâcher l’ensemble des restrictions sur les mouvements de capi­
taux, à étendre les garanties relatives au rapatriement des capitaux
privés et du revenu des placements et à assouplir la législation qui
restreint la participation de capitaux étrangers à certaines entreprises
du pays. Certaines nouvelles entreprises étrangères ont également
obtenu, dans bien des cas, des avantages fiscaux spéciaux. Cependant,
en dépit des efforts déployés pour attirer les capitaux étrangers vers
des activités qu’on avait décidé de développer, la majeure partie des
capitaux privés a continué de s’orienter vers les industries travaillant
pour l’exportation et vers les services publics, tandis que les investis­
sements dans l’industrie manufacturière restaient relativement faibles
et se concentraient surtout dans quelques pays sous-développés
relativement industrialisés.
155. Quelques pays ont pu obtenir des capitaux étrangers en
plaçant des valeurs sur les marchés de capitaux des pays développés
à régime d’entreprise privée, mais ces transactions ne représentent
qu’une très petite partie du mouvement global de capitaux étrangers
à destination des pays sous-développés. Les crédits à l’exportation
consentis par des banques ou des bailleurs de fonds dans ces pays
développés représentent une fraction bien plus importante du volume
des capitaux privés étrangers. Toutefois, ces crédits sont en général
remboursables dans un laps de temps relativement bref et le service
de la dette constituée a fait peser dans certains cas une charge très
lourde sur la balance des paiements.
156. Les pays sous-développés comptent beaucoup sur les orga­
nismes intergouvemementaux bilatéraux et multilatéraux pour leur
fournir une assistance en vue du financement de lemrs plans de déve­
loppement. Si la plupart des pays sous-développés ont cherché à
obtenir l’aide d’organismes nationaux et internationaux, beaucoup ont
montré une préférence pour les sources multilatérales de finance­
ment. Cependant, bien que le nombre des organismes multilatéraux
d’assistance ait augmenté ces dernières années et que leurs opérations
se soient intensifiées, leurs ressources totales continuent d’être faibles
par rapport au montant des crédits consentis dans le cadre de pro­
grammes bilatéraux d’assistance.

2. — E x é c u t io n d e s p r o g r a m m e s d t n v e s t is s e m e n t s p u b l ic s

157. Dans la section précédente, il a été question des politiques


gouvernementales visant à accroître le volume de l’épargne publique.
La nécessité de cet accroissement découle de la fixation d’objectifs
exigeant l’augmentation des investissements, en particulier dans le
secteur public. Le recours aux investissements publics comme moyen
d’atteindre les objectifs du plan a été rm des traits principaux des
plans de développement des pays sous-développés, mais il a également
tenu une grande place dans la politique économique des pays indus­
trialisés.
158. Au cours de ces dernières années, la proportion des investis­
sements publics par rapport aux investissements totaux a varié de
20 p. 100 environ à 40 p. 100 dans les pays développés à régime d’entre­
prise privée. La limite supérieure a été déterminée en partie par le
fait que l’activité économique est essentiellement entre les mains du
secteur privé. Un autre facteur qui a contribué à limiter le volume
des investissements publics dans ces pays est l’opinion que l’on s’y
fait du rôle de ces investissements, opinion qui est souvent très diffé­
rente de celles qui influent sur la formation publique de capital dans
les pays sous-développés; ce qui ne veut pas dire, cependant, que les
divers pays développés à régime d’entreprise privée ont des idées
identiques sur l’étendue des responsabilités qu’il convient de confier
au secteur public ni que leurs opinions sur ce point n’évoluent pas
avec le temps. Elles varient d’un pays à l’autre et de temps à autre
à l’intérieur des pays eux-mêmes. C’est ce qui explique en partie les
variations considérables du pourcentage des investissements publics
par rapport aux investissements totaux entre les différents pays.
159. Dans les pays développés à régime d’entreprise privée, on
considère souvent — encore que cette opinion, elle aussi, ait pu évo­
luer avec le temps — que les dépenses publiques doivent permettre
uniquement de fournir des services de caractère social, tels que les
services de santé et d’enseignement, ainsi que certains services éco­
nomiques essentiels, notamment ceux qrd se rapportent à ce que l’on
appelle les « monopoles naturels », comme les services publics. Toute­
fois, le seul fait de fournir ces services a entraîné un volume substan­
tiel d’investissements. En outre, à court terme, le volume des dépenses
publiques a été déterminé en grande partie par le souci de maintenir
la stabilité économique.
160. La part des investissements publics a été relativement élevée
dans les pays où l’on estime que c ’est le rôle de l’Etat de fournir une
gamme comparativement étendue de services publics traditionnels,
voire de s’occuper d’activités économiques clefs telles que l’extraction
minière et d’autres branches de l’industrie lourde. En outre, dans
plusieurs pays, le contrôle ou la gestion, par le gouvernement, de cer­
taines industries ont été motivés, au moins partiellement, par l’inten­
tion des pourvoirs publics de ne pas se borner à fournir la gamme
ordinaire des services publics, mais, en outre, de susciter des change­
ments structuraux souhaitables ou d’encourager l’expansion écono­
mique.
161. Dans le souci d’orienter l’évolution future de l’économie, les
politiques et les plans actuels des pays développés à régime d’entre­
prise privée accordent une importance considérable à la nécessité
d’étendre les services publics et, dans de nombreux pays, l’on a en­
visagé, pour les investissements publics, un rythme d’expansion plus
rapide que pour les investissements privés. Toutefois, l’accent a conti­
nué d’être mis principalement dans ces pays sur le rôle déterminant
de l’entreprise privée dans l’économie.
162. Alors que ces pays développés, comme nous venons de le
voir, considèrent l’entreprise privée comme la principale source d’ex­
pansion économique et que beaucoup d’entre eux jugent que la tâche
principale des pouvoirs publics est d’assurer la stabilité économique
et d’établir un climat économique favorable au secteur privé, les pays
sous-développés considèrent généralement le secteur public comme le
principal instrument du développement économique. Les plans de
développement des pays sous-développés ont mis l’accent sur la né­
cessité d’introduire des changements structuraux importants et
d’élever le taux de la formation de capital. Vu la lenteur excessive
de l’accroissement de l’épargne privée et la nécessité de fournir une
gamme étendue de services qui ne présentent pas d’attrait pour l’entre­
prise privée, le secteur public a été appelé à jouer un rôle dynamique
dans le développement. En particulier, les investissements publics
ont été considérés comme étant à la base de toute croissance écono­
mique, principalement en ce qu’ils permettent de fournir des services
sociaux et économiques fondamentaux qui manquent actuellement,
mais aussi du fait que, souvent, ils servent à produire des biens
essentiels.
163. Bien que pratiquement tous les pays sous-développés aient
donné aux investissements publics un rôle primordial dans la réalisa­
tion des objectifs des plans de développement, la part des investisse­
ment publics dans les investissements totaux a beaucoup varié d’un
pays à l’autre. En général, cette part a été plus petite dans les cas où
des progrès considérables avaient été réalisés précédemment en ma­
tière d'infrastructure, par exemple dans de nombreux pays d’Amé­
rique latine. Elle a été particulièrement élevée dans un certain nombre
de pays d’Afrique et d’Asie. L’importance accordée aux investisse­
ments publics dans toutes les régions ressort du fait que la part de
ces investissements dans les investissements totaux s’est fortement
accrue au cours de la dernière décennie. De plus, les plans de déve­
loppement actuels des pays sous-développés prévoient, à quelques
exceptions près, la continuation de la tendance passée à un accrois­
sement de la part des investissements publics. Comme les années pré­
cédentes, la part des investissements publics planifiés tend souvent
à être la plus élevée dans les pays où le volume des investissements
privés est relativement faible et où, dans le passé, le développement
de l’infrastructure a progressé avec lenteur.
164. Le rôle assigné aux investissements publics peut être en­
visagé non seulement sous l’angle de l’importance de ces investisse­
ments par rapport aux investissements totaux, mais aussi sous l’angle
de leur répartition entre les divers secteurs économiques. Cette repar­
tition a varié considérablement d’un pays sous-développé à l’autre
Cette diversité est due à un certain nombre de facteurs, notamment
à l’orientation qui a été donnée au développement dans les différents
pays, au degré de priorité qui a été assigné aux divers secteurs, à la
nature des goulots d’étranglement existant dans les services publics
ou la fourniture de produits clefs et aux différences entre les dépenses
d’investissement nécessaires pour fournir divers services et produire
certaines marchandises. La majorité des pays sous-développés ont
consacré la plus large part des investissements publics au développe­
ment des transports et des moyens de communication. L’énergie élec­
trique a, elle aussi, donné lieu à des dépenses importantes. Le déve­
loppement de ces éléments de l’infrastructure a été considéré comme
une mesure préliminaire indispensable pour le développement de
secteurs plus directement productifs. Dans un certain nombre de pays,
une part importante, bien que plus petite, des fonds publics a été con­
sacrée à des dépenses d’administration générale, à l’hygiène publique
et à l’enseignement. En Asie surtout, les programmes d’investisse­
ments publics ont accordé une grande importance aux investissements
dans l’agriculture, en particulier dans des travaux d’irrigation et dans
la mise en valeur de nouvelles terres. Dans bon nombre de ces pays,
l’expansion de l’agriculture a été considérée comme ayant une impor­
tance capitale pour le développement de l’économie, en raison du rôle
joué par ce secteur, qui procure une grande partie de l’épargne et des
devises étrangères ainsi qu’un grand nombre d’éléments matériels de
la consommation productive nécessaires à la croissance économique.
Les niveaux élevés d’investissements dans l’agriculture s’expliquent
également, dans une très large mesure, par le souci d’assurer un ap­
provisionnement adéquat en produits alimentaires à des populations
en rapide accroissement, ainsi que par la nécessité d’atténuer les
pressions exercées sur les maigres réserves en devises étrangères de
ces pays. Les investissements publics dans l’industrie ont atteint des
niveaux moyens. Ces investissements ont notamment été consacrés
à des produits clefs tels que les engrais, le ciment, l’acier et les com­
bustibles. Dans les pays en question, ils ont été effectués soit parce
que le secteur privé n’avait pas pu répondre aux besoins du dévelop­
pement, soit parce qu’ils s’inscrivaient dans le cadre de programmes
conçus pour augmenter la participation des pouvoirs publics à la
production industrielle.
165. Bien que les investissements publics aient généralement
augmenté, dans bien des cas les objectifs des plans d’investissements
publics n’ont pas été atteints. Une des raisons de ce retard a été l’in­
suffisance des crédits budgétaires consacrés au financement des pro­
grammes de développement du secteur public. Dans certains cas, le
retard s’explique par l’insuffisance des ressources disponibles, due
à une évolution défavorable imprévue de la situation économique. On
constate souvent, en effet, que les coûts intérieurs et extérieurs sont
plus élevés qu’on ne l’avait prévu initialement au moment de l’élabo­
ration du plan. Lorsqu’il y a pénurie de devises étrangères, en parti­
culier, la sous-estimation des coûts extérieurs crée des difficultés. Ce
sont ces difficultés qui ont mis en lumière la nécessité d’introduire
une certaine souplesse dans la planification; un certain nombre de
pays ont cherché à obtenir ce résultat en établissant, dans le cadre
des plans à moyen terme ou à long terme, des plans et des program­
mes d'exécution annuels. Ces plans annuels permettent de modifier
la portée des projets qui font partie des plans à moyen terme ou à
long terme, compte tenu des derniers renseignements obtenus, et de
mettre à profit les possibilités nouvelles de développement qui peu­
vent apparaître au fur et à mesure de l’exécution des plans.
166. Une autre raison pour laquelle les objectifs des plans n’ont
pas été atteints est que les projets envisagés n’ont pas été assez bien
mis au point et échelonnés, outre que les coûts effectifs ont été sous-
estimés. La minoration du coût des projets a souvent été due non
seulement au fait que les dépenses d’investissements fixes nécessaires
à leur exécution ont été sous-estimées, mais encore au fait que l’on
n’avait pas prévu les dépenses qu’entraînent l’exploitation et l’entre­
tien après la mise en service.
167. A cause de ces difficultés, il arrive souvent que les demandes
de crédits budgétaires pour ces projets ne soient pas formulées de
façon réaliste ni avec suffisamment de précision. Parfois, tout en indi­
quant les grandes lignes des objectifs de développement à atteindre,
les plans ne font pas la correspondance entre ces objectifs et les
mesures concrètes à prendre ou ne fournissent pas de directives assez
claires quant aux mesures de programmation plus détaillée qui doi­
vent suivre. Il est difficile de réussir à coordonner les projets et les
programmes connexes, lorsque les plans ne précisent pas quelles sont
les tâches que les divers services doivent exécuter, dans quel ordre
elles doivent se succéder et quelles sont celles qui sont prioritaires.
Ce sont ces facteurs qui expliquent, en grande partie, le manque de
cohésion que l’on constate parfois, au stade de l’exécution, entre les
activités des divers départements.
168. Une autre difficulté couramment rencontrée lorsqu'il s'agis­
sait d’établir un lien entre le budget fiscal et les plans de développe­
ment est celle qui découle de l’insuffisance des méthodes tradition­
nelles de préparation du budget, qui ont tendance à mettre l’accent
sur l’objet des dépenses plutôt que sur leur fonction ou leur but
compte tenu des programmes gouvernementaux. Pour résoudre cette
difficulté, un certain nombre de pays sous-développés ont récemment
adopté le système du budget-programme, qui suit un système de clas­
sification de caractère économique et fonctionnel. Outre les efforts
qu’ils ont faits en vue de coordonner la planification et l’établissement
du budget au niveau technique, certains pays ont tenté de resserrer
les liens entre ces deux processus au moyen d’une participation accrue
des autorités de planification à la préparation du budget. C’est ainsi
que dans un pays, les difficultés soulevées par l’ajustement des dépen­
ses aux plans au cours du premier plan quinquennal ont entraîné la
création de groupes de travail composés des représentants de la Com­
mission de planification et du Ministère des finances ainsi que des
représentants des autres autorités intéressées, qui décident des dé­
penses à effectuer. Dans un autre pays, l’autorité chargée de la plani­
fication prend part à toutes les phases de l’élaboration du budget,
depuis le stade des projets jusqu’au contrôle de son exécution.
169. De nombreux gouvernements ont également eu des difficul­
tés à assurer que les dépenses publiques se traduisent effectivement
par la production, dans les proportions voulues, de biens physiques
et de services publics. L’une des raisons qui expliquent ces difficultés
est l’absence d’un organisme technique spécialisé capable d’établir
les objectifs exprimés sous forme de réalisations matérielles, lorsque
la chose est possible, et d’en surveiller l’exécution. Pour établir de
tels objectifs, un certain nombre de pays ont adopté le système du
budget fonctionnel, en vertu duquel l’aspect physique et l’aspect
financier des activités du gouvernement sont liés par l’imputation sur
le budget du coût final de la réalisation des projets exprimés en termes
physiques. Plusieurs pays d’Amérique latine ont eu recours aux
budgets-programmes et aux budgets fonctionnels pour faciliter l’exé­
cution du plan, tandis qu’un grand nombre de pays d’Asie et d’Amé­
rique latine ont introduit cette technique sur une échelle limitée, à
savoir dans les cas de programmes et de projets particuliers.
170. Par ailleurs, l’exécution des programmes d’investissements
publics a souvent été rendue difficile par des facteurs tels que l’in­
suffisance de coordination entre les services d’exécution et la néces­
sité d’obtenir chaque année l’approbation du Parlement pour les
dépenses à engager au cours de l’année suivante. La réalisation des
programmes relatifs au secteur public a aussi été entravée par le
manque de personnel expérimenté. Parfois, la capacité nouvellement
installée de certaines entreprises publiques n’a pas été pleinement
utilisée faute de personnel qualifié. Les compétences de chef d’entre­
prise et d’administrateur sont rares dans les pays sous-développés, et
les entreprises publiques ont éprouvé de sérieuses difficultés à recru­
ter le personnel de ce genre dont elles ont besoin. De plus, pour des
raisons de mauvaise administration, les offres de contrats ainsi que
les autorisations nécessaires pour pouvoir entreprendre les travaux
sont souvent communiquées avec retard.

3. — E x é c u t io n d e s p r o g r a m m e s s o c ia u x

171. Dans les pays sous-développés, l’exécution des programmes


sociaux tend de plus en plus, depuis quelques années, à s’intégrer dans
les plans généraux de développement économique. Certains de ces pro­
grammes sont considérés comme indispensables pour la réalisation des
plans d’ensemble. Ce sont, notamment, les programmes qui concernent
l’éducation, la formation technique, l’éradication des maladies et
l’amélioration générale des conditions de vie.
172. Chacun de ces programmes sociaux implique évidemment
l’exécution de tâches particulières mais leur réalisation à tous pose
des problèmes communs. Tout d’abord, l’accroissement démographi­
que, l’intensification de l’urbanisation et de l’industrialisation ainsi
que l’apparition chez les masses d’exigences toujours plus élevées
augmentent constamment la demande de services sociaux. En même
temps, l’évolution des techniques met constamment à l’épreuve la
capacité d’adaptation de la main-d’oeuvre. Cependant, les ressources
prévues dans les plans et effectivement disponibles sont toujours in­
suffisantes pour satisfaire même les besoins urgents et hautement
prioritaires. En second lieu, l’exécution des programmes sociaux con­
tinue à se ressentir du manque de personnel qualifié, notamment de
personnel enseignant, de médecins, d’infirmières et de travailleurs
sociaux. En troisième lieu, c ’est essentiellement aux administrations
locales, aussi bien dans les villes que dans les régions rurales, qu’il
appartient d’assurer l’exécution des programmes sociaux. Ces adminis­
trations n’ont, le plus souvent, que de faibles ressources à leur dis­
position; elles n’ont pas assez de personnel ayant l’expérience et les
qualités nécessaires et elles sont insuffisamment organisées. En qua­
trième lieu, la formation du personnel « intermédiaire », comme les
travailleurs qualifiés et les cadres moyens, est assurée en grande
partie par des institutions privées qui ont besoin d’être encouragées.
Enfin, l’exécution de tout programme social exige dans chaque com­
munauté locale une direction, de l’initiative, une conscience de plus
en plus grande des problèmes et un effort de coopération, toutes
qualités qui ne se développent pas en un jour. En fait, la formulation
et l’exécution des programmes sociaux, compte tenu des moyens
disponibles, la réalisation d’une bonne coordination entre ces pro­
grammes et les plans de développement économique et les disposi­
tions à prendre pour que la masse de la population bénéficie réelle­
ment de ces programmes sont des tâches complexes dont l’accomplis­
sement exige une bonne organisation et des rouages appropriés
capables d’évaluer les résultats à l’échelon national aussi bien qu’aux
échelons de la région et de la localité. II est également indispensable
qu’il y ait dans chaque ministère ou dans l’administration de chaque
Etat (dans les Etats fédéraux) et dans chaque administration locale
une section de planification qui puisse élaborer les programmes rele­
vant de la compétence de chaque administration et se charger, en
permanence, d’analyser et d’évaluer les divers programmes par rap­
port aux plans d’ensemble.

4. — E x é c u t io n d e s p l a n s a g r ic o l e s

173. Dans la plupart des pays développés à régime d’entreprise


privée ou à régime d’économie mixte, les plans agricoles ont été con­
çus pour permettre d’atteindre un ensemble d’objectifs. D’une part,
ils devaient permettre d’augmenter la contribution que l’agriculture
apporte à la production nationale, grâce à une utilisation plus efficace
des facteurs de production; mais, d’autre part, ils visaient à atteindre
certains objectifs particuliers en ce qui concerne le niveau de vie de
la population agricole. Dans la plupart des cas, ces pays ont cherché
à établir une certaine parité entre l’augmentation du revenu moyen
par habitant dans l’agriculture et dans les autres secteurs. C'est ainsi
qu’ils ont souvent été amenés à offrir de nouvelles possibilités d’em­
ploi dans l’industrie ou dans le secteur des services à une partie de la
main-d’œuvre agricole de manière à atteindre les objectifs prévus
dans les plans pour ces deux secteurs. Cette transformation a presque
toujours exigé une modification de la tendance existante en ce qui
concerne l’expansion des diverses cultures de manière à favoriser le
développement de celles qui avaient le plus de chances de trouver
des débouchés sur le marché intérieur ou à l’étranger à des prix suf­
fisamment élevés pour que Ton obtienne l’augmentation souhaitée des
revenus.
174. Les méthodes employées pour atteindre ces objectifs, qui
sont parfois contradictoires, comportent généralement l’application
des mesures suivantes ou de certaines d’entre elles:
a) Diverses mesures de soutien des prix, telles que soutien sélec­
tif des prix par le moyen d’achats du gouvernement, subventions à
l’exportation, accumulation de stocks, restrictions quantitatives pour
certaines cultures, ou, parfois, contrôle direct des ventes;
b) Programme d’investissements devant permettre de fournir
l’équipement nécessaire pour que la production atteigne le niveau fixé
dans le plan et pour augmenter le bien-être dans les régions rurales;
c) Assistance financière et technique du gouvernement, lorsque
cela est nécessaire, pour assurer le remembrement, afin d’augmenter
la superficie moyenne des propriétés;
d) Assistance financière et technique du gouvernement accordée
aux coopératives de divers types.
175. Dans la plupart des pays sous-développés, l’agriculture est
organisée surtout sur une base traditionnelle et ne fait que répondre
aux besoins élémentaires des agriculteurs et de leur famille. La pro-
ductivité est très faible et la production est très peu sensible aux
variations du marché qui, de toute manière, sont relayées d’une ma­
nière très imparfaite, si même elles le sont, aux producteurs agricoles.
C’est surtout le cas en ce qui concerne les cultures vivrières de base
et l’élevage du bétail traditionnel. Pour les cultures de produits pri­
maires destinés à l’industrie locale ou à l’exportation, les circuits de
distribution sont généralement mieux établis et la production agricole
est organisée selon des méthodes plus commerciales. L’accroissement
de productivité dans le secteur alimentaire et, en particulier, l’augmen­
tation des stocks destinés à la vente a constitué un problème essentiel
sur lequel se sont penchés les gouvernements des pays en voie de
développement. L’accroissement de la production pour l’exportation
a été également un objectif important dans bien des pays.
176. Les obstacles à l’expansion agricole que les gouvernements
des pays sous-développés ont cherché à éliminer sont, en gros, de trois
types principaux : en premier lieu, l’absence des ressources matérielles
et des services constituant les facteurs essentiels du développement
agricole; en second lieu, l’existence d’un cadre institutionnel et de
conditions économiques refusant aux agriculteurs les stimulants qui
pourraient les encourager à accroître leur production agricole; enfin,
l’insuffisance — obstacle lié aux deux autres — des organismes et des
institutions qui s’adressent aux producteurs des villages et diffusent
auprès d’eux des connaissances techniques.
177. Le problème fondamental que pose le faible niveau de la
productivité dans la majorité des pays sous-développés rend néces­
saire de fournir certains intrants à l’agriculture. Dans la plupart des
plans de développement agricole, on a tenu compte du fait que, pour ac­
croître la productivité, il fallait introduire des méthodes agricoles plus
perfectionnées. Les gouvernements ont dû s’efforcer de trouver la meil
leure combinaison possible d’intrants et de techniques pour obtenir
une augmentation de la production agricole grâce à des innovations
techniques. De fait, leur choix a été influencé par un certain nombre
de facteurs, notamment le montant et la nature des ressources dispo­
nibles, l’ordre de priorité reconnu au secteur agricole et la nature
des besoins de chaque pays dans le domaine de l’agriculture. L’évo­
lution de la situation dans de nombreux pays indique qu’ils ont eu
tendance à sous-estimer les investissements et autres conditions né­
cessaires pour assurer le développement du secteur agricole. Cepen­
dant, le rythme décevant de la croissance économique, dû en partie
aux insuffisances de la production agricole, a amené un grand nombre
de pays à augmenter dans leurs plans les plus récents le pourcentage
de leurs investissements publics destiné à l’agriculture.
178. Sauf dans les pays où le pourcentage des dépenses publiques
consacrées à l’agriculture est très faible, les gouvernements se sont
efforcés récemment d’assurer l’exécution des plans de développement
en jetant diverses bases, utilisées selon des combinaisons différentes:
installations d’irrigation; projets à fins multiples pour la production
d’énergie, l’adduction d’eau et la lutte contre les inondations; octroi
de subventions pour l’achat d’engrais et de semences; crédit agricole;
mise en valeur de nouvelles terres cultivables; approvisionnement en
outillage et matériel agricoles, amélioration des moyens de transport,
en particulier construction de routes de raccordement; installations
et moyens de transformation, de commercialisation et d’entreposage;
extension des services coopératifs et programmes de formation.
179. La mise en place d’instalations d’irrigation permettant de
protéger les récoltes contre la menace de précipations trop faibles et
d’augmenter la productivité tient ime place importante dans l’exécu­
tion des plans agricoles d’un grand nombre de pays. Elle revêt une
importance particulière dans les plans des pays du Moyen-Orient, où
la pénurie d’eau constitue souvent un sérieux obstacle à l’accroisse­
ment de la production agricole. Dans certains pays, l’irrigation doit
être assurée en même temps que d’autres services au moyen de grands
projets hydrauliques à fins multiples. D’autres pays cependant ont
entrepris à la fois des projets à fins multiples et des travaux d’irriga­
tion de moyenne et petite ampleur dans leurs plans les plus récents.
Ces deux catégories d’activités répondent à des besoins différents:
les projets à fins multiples offrent toute une série de services et de
facteurs de production agricole, alors que les projets plus modestes
satisfont les besoins en eau rapidement et aisément, d’une manière
adaptée aux conditions et aux besoins locaux. Comme l’aménagement
de grandes installations d’irrigation prend beaucoup de temps, les
pays ont intérêt à entreprendre simultanément des projets de
moyenne et de petite envergure qui permettent de satisfaire, en atten­
dant, une partie des besoins. Dans les pays sous-développés où les
besoins dans ce domaine sont très grands, les petits ouvrages que
peuvent construire les cultivateurs par leurs propres moyens ont un
rôle important à jouer en raison de leur utilité propre et parce qu’ils
peuvent être reliés aux grands réservoirs.
180. Un grand nombre de gouvernements ont insisté sur la néces­
sité d’augmenter l’offre et de généraliser l’utilisation des engrais et
des semences ou plants améliorés, et d’en faire des éléments impor­
tants des plans visant à atteindre les objectifs agricoles par l’élévation
des rendements. On a souvent encouragé l’emploi de ces intrants au
moyen de prêts agricoles ou de subventions généreuses. Un certain
nombre de pays industriels à régime d’entreprise privée ont eux aussi
recouru à cette méthode avec beaucoup de succès. Pour augmenter
ces ressources, divers pays ont créé ou aidé à financer des pépinières
et des fabriques d’engrais.
181. L’absence de crédit à des conditions raisonnables, notam­
ment pour les petits cultivateurs, a beaucoup contrarié l’expansion
des investissements et de la production agricoles. S’il existe, dans
beaucoup de pays sous-développés, des sociétés de crédit rural ou des
associations qui accordent des prêts aux agriculteurs, ces organismes
n’ont souvent que de maigres ressources financières à leur disposition.
Pour remédier à cet état de choses, les gouvernements ont de plus en
plus recouru à la création d’établissements de crédit agricole (ban­
ques de développement agricole et coopératives d’exploitants agri­
coles). Dans certains pays, des liens étroits ont été établis entre la
Banque centrale et les établissements de crédit agricole. Pour que les
petits exploitants aient facilement accès au crédit, les prêts accordés
sont souvent gagés sur la récolte et non sur la propriété immobilière,
de manière à ne pas exiger une condition qu'un grand nombre d’agri­
culteurs ne pouvaient remplir. Bien que le volume du crédit agricole
accordé par les établissements d’Etat soit relativement faible par
rapport au crédit privé, il a, ces 10 dernières années, augmenté très
rapidement dans beaucoup de pays. On reconnaît de plus en plus la
nécessité pour le gouvernement de prendre des mesures en vue
d’étendre le crédit à moyen et long terme aux exploitants, aux fins
d’investissements.
182. Pour que le crédit consenti par les établissements d’Etat
joue un rôle plus efficace dans l’exécution des plans de développe­
ment, il a fallu le fournir parfois en nature, sous forme d’engrais par
exemple, plutôt qu’en espèces. En outre, il a été fréquemment lié de
façon étroite à l’obligation pour le bénéficiaire de commercialiser
ses produits, notamment par l’intermédiaire de coopératives de crédit
ou de vente, ce qui facilite le remboursement des prêts. D’autres fois,
mais moins souvent, l’octroi du crédit a été lié, grâce aux services de
vulgarisation agricole, à l’établissement de plans en vue de l’amélio­
ration des méthodes d’exploitation agricole, un contrôle étant exercé
sous diverses formes. Cette coordination des moyens mis en œuvre
est pratiquée avec beaucoup de succès depuis de nombreuses années
au Japon et on y a depuis peu recours dans d’autres pays d’Asie ainsi
qu’en Amérique latine.
183. Une des mesures les plus efficaces pour résoudre un certain
nombre des problèmes auxquels se heurtent les agriculteurs est le
développement des coopératives. Les coopératives ont servi de base,
dans une certaine mesure, pour organiser la production mais le plus
souvent, elles n’ont été utilisées que pour améliorer la répartition des
approvisionnements et du crédit, fournir des installations d’entre­
posage et des rouages de commercialisation, orienter l’activité des
services de vulgarisation. Dans certains pays, les bénéficiaires des
mesures de redistribution des terres ont été tenus d’adhérer à des
sociétés coopératives. D’une manière générale, cependant, les coopéra­
tives ne sont pas encore entrées dans la tradition des pays sous-
développés.
184. Il est indispensable que le producteur dispose des intrants
matériels et des services décrits ci-dessus si l’on veut que s’opère la
transformation des méthodes et des techniques agricoles qui s’im­
pose dans les pays sous-développés. Toutefois, les agriculteurs ne sont
pas tentés d’adopter des méthodes plus perfectionnées dans un grand
nombre de pays où le cadre institutionnel et économique ne les en­
courage pas à accroître leur production. Parmi les éléments peu favo­
rables du cadre, on peut citer l’insécurité de jouissance et les loyers
élevés, l’ampleur des fluctuations des prix, l’insuffisance des commu­
nications et la désorganisation des circuits de vente des produits
agricoles, ainsi que l’endettement persistant des exploitants. Comme
ces dettes sont contractées surtout à l’égard des propriétaires et des
commerçants dans un grand nombre de pays en voie de développe­
ment, le pouvoir de négociation économique des petits exploitants
agricoles est souvent très faible. Pour résoudre ces problèmes, les
pouvoirs publics ont fait porter une bonne partie de leur effort sur
la réforme agraire, sur rétablissements de prix plus rémunérateurs
pour les récoltes et sur l'amélioration des rouages de commercialisa­
tion agricole.
185. Une des principales raisons qui expliquent le peu d’empres­
sement à accroître les investissements et la productivité a été le
régime de la priorité foncière qui prévaut à peu près partout. Dans
la plupart des pays sous-développés, on a entrepris ou l’on se propose
d’éliminer, par exemple, l’extrême disparité de superficie des terres,
les loyers prohibitifs et les contrats de location peu équitables. Une
caractéristique commune à maints pays d’Amérique latine et d’Asie
est que la propriété foncière est très inégalement répartie, c’est-à-dire
que la grande majorité des producteurs n’exploitent qu’une petite
partie de la superficie totale cultivable. Dans nombre de pays d’Afri­
que du Nord et du Moyen-Orient, les terres sont souvent trop morce­
lées pour pouvoir être judicieusement cultivées et, d’autre part, les
loyers sont souvent très élevés. Pour remédier à cet état de choses,
on a notamment exproprié certaines terres, les propriétaires étant
généralement indemnisés au moyen d’obligations à long terme, on a
redistribué aux paysans les terres ainsi acquises pour qu’ils les ex­
ploitent soit à titre individuel soit collectivement, sous une forme ou
une autre, on a baissé les loyers et on les a réglementés, on a protégé
les droits du locataire et remembré progressivement les terres.
186. La mise en œuvre de la réforme agraire a rarement pu s’opé­
rer rapidement et aisément; cela tient en partie aux difficultés d’ordre
politique, mais aussi à la complexité des problèmes soulevés par
l’application des mesures de réforme agraire et à la nécessité de créer
des institutions capables de procurer des services, des crédits par
exemple, fournis jusque-là par les propriétaires. Une autre raison,
étroitement liée aux précédentes, a été la nécessité de rattacher la
réforme agraire à l’amélioration de la productivité agricole, ce qui
implique la fourniture de services consultatifs techniques aux nou­
veaux propriétaires, la formation du personnel de gestion des exploi­
tations coopératives et une plus large distribution d’approvisionne­
ments agricoles de meilleure qualité. Pour que les terres soient mieux
mises en valeur, certains pays ont prévu des pénalités pour les grands
domaines insuffisamment exploités; d’autres pays ont entrepris de
remembrer les fermes dont la faible superficie est im obstacle à leur
rentabilité. Des mesures ont été prises récemment non seulement
dans les pays sous-développés, mais aussi dans un certain nombre de
pays développés à régime d’entreprise privée, afin de donner aux ex­
ploitations agricoles une superficie qui les rende plus rentables. Ainsi,
dans les pays de la Communauté économique européenne, le remen-
brement des exploitations de faible superficie a été encouragé en tant
que moyen d’accroître la rentabilité agricole.
187. Outre les très grands efforts qu’ils déploient pour encourager
l'expansion agricole, en réformant la propriété foncière et l’exploita­
tion des terres, les gouvernements se sont également efforcés d’assurer
l’exécution des plans de développement agricole en adoptant une po­
litique des prix qui garantisse un profit satisfaisant. Certes, dans
plusieurs pays, on s’en est tenu comme précédemment à la pratique
courante consistant à contrôler le prix des denrées alimentaires de
base grâce à diverses mesures tendant à protéger les consommateurs
et à contrecarrer les tendances inflationnistes. Mais, l’accent étant mis
de plus en plus sur l’expansion agricole, beaucoup de pays ont révisé
leur politique des prix afin d’offrir aux producteurs des stimulants
tangibles qui les incitent à faire des investissements plus importants.
Les nouvelles mesures ont souvent revêtu la forme de garanties par
lesquelles l’Etat s’engage à acheter certaines récoltes à des prix inté­
ressants. Dans certains cas, ces mesures de soutien des prix ont été
intégrées dans les programmes de stabilisation des prix intérieurs
impliquant la constitution de stocks de régulation. Le succès des po­
litiques de prix garantis nécessite l’existence d’un réseau de bureaux
d’achat officiels facilement accessibles aux producteurs, d’installa­
tions d’entreposage adéquates et d’un système efficace de contrôle de
la qualité. D’une manière générale, les insuffisances du réseau de com­
mercialisation ont eu pour effet de limiter l’efficacité des politiques
de prix à la production, notamment en ce qui concerne les produits
alimentaires de base.
188. En ce qui concerne l’insuffisance des services fournis par les
institutions aux producteurs, on a déjà signalé les efforts que font les
gouvernements pour y remédier, en créant des coopératives, des orga­
nismes de crédit et de vente et en instituant des prix garantis. Une
autre mesure, tout aussi importante, consiste en l’établissement d'un
vaste réseau de services de vulgarisation destiné à élever la producti­
vité avec la coopération des familles paysannes afin d’atteindre les
objectifs du plan agricole. A la différence des travailleurs industriels,
les agriculteurs des pays en voie de développement restent fortement
soumis aux influences de la société traditionnelle, de sorte qu’une
politique d’enseignement et de conseils est un élément essentiel de
l’exécution de plans agricoles. Cette nécessité est admise de plus en
plus par les gouvernements qui développent leurs services de vulgari­
sation agricole et intensifient les efforts de recherche qui doivent
servir de base à la vulgarisation. On a davantage recours dans de
nombreux pays à des démonstrations dans les champs mêmes des
exploitants, car ces démonstrations sont le plus sûr moyen de faire
adopter plus largement de meilleures méthodes agricoles telles que
l’emploi d’engrais et de semences améliorées et la lutte contre les
parasites et la maladie. On remédie progressivement à la pénurie
d’agents qualifiés de vulgarisation et de recherche en entreprenant à
tous les niveaux des programmes d’enseignement et de formation
agricole. Deux facteurs contribuent puissamment à ouvrir les régions
rurales aux idées nouvelles : l’amélioration des moyens de transport.
notamment la construction d’embranchements vers les villages, et
l’électrification des campagnes.
189. Dans les pays sous-développés, le chômage déguisé ou sous-
emploi de la main-d’œuvre rurale est généralement trop important
pour que la perspective d’un accroissement de la demande globale
suffise pour l’éliminer. Mais ce problème constitue, à la fois un
obstacle qu’il faut surmonter et une occasion que l’on peut mettre
à profit. Le recours à la main-d’œuvre rurale sous-employée pour faire
des aménagements matériels indispensables au développement de
l’économie rurale peut, en effet, jouer un grand rôle dans l’exécution
des plans établis pour le secteur agricole. Il est possible notamment
d’accroître la productivité de la terre dans de nombreuses régions en
exécutant certains travaux que l’on peut confier à une main-d’œuvre
non qualifiée (aménagement de fossés de drainage et d’irrigation,
conservation du sol par la construction de terrasses et de digues, pro­
grammes de reboisement, etc.). Plusieurs gouvernements, notamment
en Asie, mettent au point actuellement des méthodes d’organisation et
de compensation qui permettent d’affecter les travailleurs sans emploi
à l’exécution de projets productifs. De nombreux gouvernements
s’intéressent à d’autres méthodes destinées à utiliser au maximum la
main-d’œuvre rurale: diversification de la production agricole par la
pratique, en particulier, de la double récolte et l’expansion de l’éle­
vage, accès plus facile à un plus grand nombre d’emplois non agri­
coles dans les régions rurales pour les membres des familles paysan­
nes, etc. L’électrification des campagnes et l’installation des petites
industries capables de traiter les produits agricoles ou de fabriquer
des articles nécessaires aux agriculteurs sont des aspects importants
de l’exécution de quelques plans agricoles. En fin de compte, pour
résoudre le problème du sous-emploi dans les régions rurales, il faut
éloigner de façon permanente du secteur agricole, à mesure que la
productivité augmente, les travailleurs qui ne sont plus nécessaires
à l’agriculture. En ce sens, le progrès du secteur agricole dépend du
développement de l’économie dans son ensemble.
190. Dans nombre de pays, les politiques de prix avantageux ont
fait une large place à l’encouragement des exportations de produits
agricoles. Un certain nombre de pays ont entrepris de stimuler les
exportations agricoles en supprimant les taux de change multiples
défavorables ou en réduisant les droits d’exportation qui freinaient
jusque-là l’accroissement des exportations en question. Pour que les
producteurs soient assurés de tirer un bénéfice assez stable de leurs
produits d’exportation et donc pour éliminer un des principaux fac­
teurs freinant la production, on a adopté plusieurs types de mesures.
Dans divers pays d’Afrique, on a eu recours à des caisses de stabilisa­
tion. Dans un grand nombre de pays d’Amérique latine, des droits
d’exportation variables ont été l’un des moyens employés pour pro­
téger dans une certaine mesure les producteurs contre les fluctua­
tions des prix mondiaux.
191. L’expérience a clairement montré qu’il est indispensable
d’adopter toute une gamme de mesures pour pouvoir développer
l’agriculture. Une des raisons pour lesquelles on ne parvient pas, bien
souvent, à atteindre les objectifs fixés est que, si l’on a pris soin
d’éliminer un ou deux facteurs défavorables, on en a négligé d'autres.
Si l’on ne s’attaque qu’à un nombre trop limité de problèmes c ’est, en
partie, parce que les rouages et l’organisation nécessaires font défaut,
et, en partie, parce que les ressources disponibles sont insuffisantes.
Dans un certain nombre de cas récents, toutefois, des programmes
d’ensemble ont été entrepris sur le plan régional ou pour la mise en
valeur de nouvelles terres. L’accès aux terres domaniales non encore
utilisées a souvent constitué un aspect important des mesures de
réforme agraire; ces terres ont fréquemment servi aux programmes
de réinstallation destinés à aider les exploitants agricoles ne possé­
dant pas de terre. D’importants programmes de colonisation rurale
ont été entrepris dans de nombreux pays. Dans le cadre de ces pro­
grammes, des services gouvernementaux ont fourni une assistance de
formes diverses, notamment : construction de routes, exploitation des
ressources hydrauliques, orientation technique, équipement, crédit et
moyens de commercialisation.
192. Des programmes d’ensemble de ce genre, que l’on désigne
souvent sous le nom de programmes de développement communau­
taire, ont été adoptés dans un certain nombre de pays. Ces program­
mes ont permis de mettre plusieurs services et installations essentiels
à la disposition de vastes régions, d’amener la population rurale à
mieux prendre conscience des problèmes et de stimuler les efforts de
la population sur le plan local. Ils n’ont pas permis, par contre, bien
souvent, de fournir les ressources nécessaires et un personnel suffi­
sant pour pouvoir assurer un développement intensif de l’agriculture,
surtout dans les régions où toutes les conditions sont réunies pour
une augmentation rapide de la production agricole. Certains pays,
comme l’Inde, l’Indonésie et le Pakistan, cherchent à remédier à cet
inconvénient, inhérent à tous les programmes de développement com­
munautaire, en s’efforçant de fournir toute une gamme de ressources
à des districts particuliers choisis comme centres ou zones pilotes de
développement intensif de l’agriculture. C’est ainsi qu’en Inde on a
choisi, pour commencer, un district dans chaque Etat pour y appli­
quer l’intensive Agricultural District Programme. En outre, on a aussi
choisi des régions pour y déployer des efforts plus intenses en vue
d’augmenter la production de certaines cultures, comme celles du riz,
du coton et des graines oléagineuses. Toutes les campagnes possédant
désormais un minimum de services de vulgarisation et de développe­
ment communautaire, on a de plus en plus souvent recours à la mé­
thode qui consiste à créer des zones de développement intensif de
l’agriculture. Dans un certain nombre de districts des Etats du Pakis­
tan occidental, on a eu également recours à la concentration des
ressources pour augmenter la production. Des sociétés de développe­
ment agricole ont été créées dans chaque région. Elles serviront à
fournir des produits de consommation productive, des services de
vulgarisation et du crédit agricole dont l’utilisation est supervisée.
Ultérieurement, ces fonctions seront assumées par des coopératives
au niveau des villages.
193. L’exécution de tous les programmes de développement agri­
cole pose des problèmes complexes en matière d’organisation et
de mobilisation des ressources. Pour que l’on puisse retirer de
ces plans tous les avantages que l’on peut en attendre, il faut
qu’il y ait une bonne coordination et ime bonne répartition des
tâches entre les divers services, d’une part, les communautés lo­
cales et les agriculteurs, d’autre part. Il faut constamment adapter
les méthodes et techniques de vulgarisation aux besoins et aux
conditions des différentes régions et les améliorer sans cesse, compte
tenu de l’expérience acquise. Pour obtenir ces résultats, il faut
procéder, en permanence, à l’évaluation des différents aspects du
développement agricole et rural. En Inde, par exemple, les évaluations
objectives et impartiales des résultats qui ont été faites au cours des
dix dernières années par les agents locaux de l’Organisme d’évaluation
des programmes de la Commission de la planification ont permis
d’apporter des modifications importantes aux programmes et aux
mesures de développement rural.

5. — E x é c u t io n d e s p l a n s d ’in d u s t r ia l is a t io n

1 9 4 . Dans les pays développés à régime d’entreprise privée où Ton


a de plus en plus recours à la planification pour stimuler la crois­
sance économique, les objectifs établis pour le secteur public concer­
nent non seulement l’enseignement, l’infrastructure et les services de
santé, mais aussi les industries placées sous le contrôle de l’Etat. En
outre, des objectifs ont été fixés pour l’industrie privée dans son en­
semble et pour un certain nombre de branches d’industrie. On s’est
beaucoup préoccupé, à cet égard, de la question de l’emplacement des
entreprises et du développement régional de l’industrie. Les objectifs
prévus pour l’industrie privée sont établis sur la base d’une étude
sérieuse des ressources disponibles et du volume probable de la de­
mande interne et de la demande externe de biens et de services. Ces
objectifs n’ont pas un caractère obligatoire; leur intérêt réside en ceci
qu’ils indiquent la voie à suivre, du fait qu’ils forment un essemble
cohérent, qu’ils reposent sur une analyse de haute qualité et que les
plans sont établis après des consultations avec les associations d’em­
ployeurs et les syndicats. En outre, les pouvoirs publics prennent
souvent des mesures appropriées, telles que dégrèvements fiscaux et
octroi de subventions, pour aider l’industrie à atteindre les objectifs
prévus dans les plans.
1 9 5 . Dans beaucoup de pays sous-développés, l’industrialisation est
depuis un certain nombre d’années un important objectif de la poli­
tique générale, au point que l’adoption de mesures destinées à favo­
riser la création d’entreprises industrielles y a souvent précédé la
mise en œuvre de plans d’ensemble. Dans les pays où les programmes
d’industrialisation font partie intégrante des plans généraux de déve­
loppement, comme c'est souvent le cas à l’heure actuelle, l’expérience
a montré combien il était important de coordoner aussi étroitement
que possible l’exécution des programmes intéressant l’industrie et
celle des programmes intéressant des secteurs connexes comme ceux
des transports, de l’énergie et de la planification de l’utilisation de la
main-d’œuvre. L’expérience a aussi mis en lumière l’interdépendance
des divers secteurs de l’économie et la nécessité d’assurer une expan­
sion rapide de l’agriculture et des services sociaux en même temps
que l’on entreprend un programme d’industrialisation.
196. Les moyens par lesquels les gouvernements se sont employés
à appliquer leurs plans de développement industriel sont de deux
ordres. Les uns consistent à assumer la responsabilité directe de
l’exécution et de la gestion des projets industriels et il en a été
question plus haut à propos des politiques d’investissements publics.
Les autres consistent à aider le secteur privé en mettant à sa disposi­
tion des ressources limitées et en adoptant des mesures destinées à
encourager les investissements dans l’industrie. Dans la pratique, les
gouvernements ont souvent recouru à ces deux types de moyens pour
exécuter leurs plans intéressant l’industrie. Indépendamment des
quelques pays qui, pour des raisons de principe, ont préconisé le
régime de la propriété d’Etat dans certaines branches d’activité, tous
les pays sous-développés ont prévu, dans leurs plans, la création
d’entreprises industrielles publiques ou semi-publiques afin d’assurer
la production de certains produits essentiels. D’un autre côté, même
les pays qui ont donné la préférence à la propriété d’Etat pour des
raisons de politique nationale ont laissé aux intérêts privés le soin de
développer certains secteurs industriels.
197. A l’inverse des programmes industriels du secteur public qui,
dans la plupart des cas, ont été conçus en fonction d’objectifs assez
précis concernant les investissements et la production, les buts as­
signés à l’industrie privée varient beaucoup — dans l’ensemble et dans
les détails — d’un pays à l’autre et d’un secteur à l’autre, même quand
il s’agit de pays industrialisés. Dans nombre de ces derniers, les gou­
vernements ont principalement compté sur la réaction du secteur
privé à des mesures indirectes relevant par exemple de la politique
monétaire et fiscale. Le contrôle financier exercé sur les dépenses
d’équipement et l’assistance financière accordée sous forme de crédits
et de subventions par les pouvoirs publics ont parfois joué un rôle
important, notamment dans la modernisation des industries à coûts
élevés ou dans le développement des industries jugées d’intérêt
national.
198. Dans les pays sous-développés, les pouvoirs publics se sont
généralement gardés, sauf par le biais des régimes de licence, d’inter­
venir directement dans les activités du secteur privé. Ils ont plutôt
compté pour l’influencer sur des mesures visant à encourager l’inves­
tissement, à créer des conditions favorables au développement des
industries nationales, à procurer aux industriels les ressources néces­
saires et à éliminer les obstacles s’opposant à l’exécution des projets
jugés souhaitables. L’action des pouvoirs publics s’est surtout traduite
par l’adoption, en matière de commerce et de devises, de politiques
propres à accélérer l’expansion de l’industrie nationale, par l’adoption
de mesures financières favorables aux investisseurs et par l’octroi
d’avantages fiscaux. De plus, quelques pays se sont particulièrement
intéressés au développement de la petite industrie et à la formation
de personnel de direction.
199. Les gouvernements conjugent généralement ces mesures,
l’importance relative de chacune d’entre elles dépendant du stade de
développement, de facteurs institutionnels et de la nature des obsta­
cles s’opposant à l’expansion industrielle. En général, les mesures les
plus efficaces se sont révélées être les attributions de devises et l’assis­
tance financière. Sauf dans les plus industrialisés des pays sous-
développés, les mesures fiscales, telle que taux d’imposition favorables
et amortissement accéléré, ont nécessairement eu une portée limitée,
car elles ne peuvent être efficaces que dans la mesure où les chefs
d’entreprise ont des ressources suffisantes pour faire des investisse­
ments et où les perspectives du marché sont assez favorables pour les
inciter à réinvestir leurs bénéfices dans le secteur industriel.
200. Les programmes d’industrialisation ont en général visé à
encourager d’une part la production de biens destinés à remplacer
certaines importations et d’autre part la consommation de matières
premières d’origine locale. A cette fin, on a recouru à des mesures
relatives au commerce et aux devises pour assurer une position privi­
légiée sur le marché aux produits nationaux et consacrer les réserves
limitées de devises au financement des importations de biens d’équi­
pement. La plupart des pays sous-développés ont, d’une manière ou
d’une autre, réglementé les conditions d’utilisation des devises. A cet
effet, ils ont notamment eu recours au contingentement des importa­
tions, au contrôle des changes et aux taux de change multiples. Ils ont
le plus souvent combiné ces mesures, encore qu’une certaine désaffec­
tion se soit manifestée ces dernières aimées à l’égard du système
des taux de change multiples. Les barrières douanières, traditionnelle­
ment utilisées pour protéger l’industrie nationale contre la concur­
rence étrangère, ont été aussi très fréquemment employées mais ont
joué un rôle secondaire dans la plupart des pays en raison du recours
généralisé aux contrôles directs sur les échanges et les paiements.
201. Si ces mesures ont généralement beaucoup encouragé la pro­
duction destinée au marché intérieur, il convient de noter que les
possibilités de recourir à des produits de substitution pour remplacer
certaines importations tendent à se réduire au fur et à mesure que la
production nationale augmente. Au début de la période d’industriali­
sation, l’élimination progressive de la concurrence exercée par les
importations de biens de consommation essentiels contribue puissam­
ment à l’expansion de l’industrie manufacturière nationale. Mais dans
les plus industrialisés des pays sous-développés, l’industrie nationale
a déjà atteint un degré de développement lui permettant de faire face
à la majeure partie de la demande de biens de consommation essen­
tiels. Dans ces conditions, l’effet que les restrictions à l’importation
pouvaient avoir sur l’expansion des industries nationales de biens de
consommation s’est fait de moins en moins sentir; en fait, ces indus­
tries ne peuvent continuer à se développer que si la demande interne
s’accroît. En même temps, du fait de la diversification croissante de
l’économie, il devient nécessaire de développer l’industrie des biens
d’équipement.
202. Les ressources nécessaires pour financer l’investissement
privé étant généralement insuffisantes dans les pays sous-développés,
la plupart des gouvernements ont fourni des capitaux publics pour
faciliter le financement de l’investissement industriel. Pour mettre des
fonds publics à la disposition des emprunteurs éventuels, ils ont sou­
vent créé des établissements de crédit spécialisés (sociétés de déve­
loppement et banques industrielles par exemple). Certains de ces
établissements non seulement ont servi à mettre les fonds publics à la
portée des intéressés, mais encore ont été autorisés à se procurer des
ressources supplémentaires soit auprès des banques et autres établis­
sements financiers, soit parfois au moyen d’émissions d’obligations
dans le public. Dans un certain nombre de cas, ces établissements
spécialisés ont pu obtenir et mettre à la disposition des intéressés
des prêts en devises à des fins déterminées. Leur taux d’intérêt
était sensiblement plus bas que le taux officiel. La plupart d’entre
eux ont, en outre, participé à la création et à la gestion d'entre­
prises, en fournissant non seulement des capitaux mais aussi les ser­
vices d’experts et des cadres directeurs. Dans le cas des projets haute­
ment prioritaires exigeant d’importantes mises de fonds, certains pays
ont créé des entreprises mixtes mi-publiques, mi-privées, avec parti­
cipation financière directe de l’Etat. Dans les pays limitant les droits
de propriété des étrangers sur les entreprises locales, les pouvoirs
publics ont eu de plus en plus tendance à s’assurer, soit directement,
soit par l’entremise d’organismes spécialisés, une certaine participa­
tion aux entreprises constituées au moyen de capitaux étrangers.
203. Dans certains pays sous-développés où se sont créées des
industries nationales de biens d’équipement et de biens de consom­
mation durables, le financement des ventes de ces biens a posé un
problème. A l’un des premiers stades du développement national,
quand il faut importer le matériel industriel, les crédits à moyen
terme nécessaires pour en financer l’achat proviennent de sources
étrangères. Comme l’impossibilité de trouver sur place les ressources
permettant d’acquérir les biens d’équipement produits dans le pays
peut arrêter l’expansion des industries qui les fabriquent, il est impor­
tant que les politiques qui visent l’exécution des plans de développe­
ment contiennent des dispositions prévoyant les moyens et institu­
tions de financement nécessaires.
204. Le gouvernement peut également — et c ’est là une forme
relativement nouvelle d’assistance, recommandée dans les plans les
plus récents de plusieurs pays — accorder sa garantie aux prêts
d’origine privée consentis à l’industrie. Les banques commerciales, en
effet, par tradition le plus souvent, et parfois parce que les opérations
industrielles leur sont peu familières et parce que le lancement d’en­
treprises industrielles comporte des risques relativement élevés, se
bornent à accorder des crédits à court terme. Dans ces conditions, les
garanties accordées par le gouvernement peuvent contribuer à abais­
ser le loyer de l’argent en réduisant les risques et aider à vaincre les
hésitations des banques peu enclines à immobiliser des fonds pour
consentir des prêts industriels à long terme.
205. Parfois aussi, l'assistance financière a été octroyée sous
forme de subventions pour l’achat d’équipement industriel. Ces sub­
ventions ont, par exemple, été accordées au titre de plans régionaux
de développement, en vue d’inciter les entrepreneurs à installer leurs
exploitations industrielles dans des régions déshéritées. Les petites et
moyennes entreprises ont souvent été favorisées de ce point de vue,
surtout dans les cas où l’on a cherché à encourager la création d’entre­
prises de cette nature en vue de l’exécution de programmes de résorp­
tion du chômage dans les zones peu développés.
206. L’assistance financière des pouvoirs publics a certes nette­
ment favorisé le développement industriel, mais elle s’est souvent
révélée moins efficace qu’on ne l’espérait. Comme on l’a déjà indiqué
au chapitre l^r, le fait que les prix courants des facteurs de produc­
tion ne reflètent pas leur rareté relative peut amener à choisir, en vue
du développement, des industries qui ne présentent pas un caractère
économique du point de vue national. Ce risque devient encore plus
grand lorsque l’on fournit certains facteurs de production à des prix
bien inférieurs aux prix courants. Il s’ensuit que la possibilité de se
procurer du crédit à bon marché peut entraîner et, en fait, a entraîné
le recours à des techniques qui exigent trop de capitaux. Cette
remarque ne s’applique pas seulement au coût du facteur capital;
elle est valable dans tous les cas où les prix diffèrent des prix
« comptables ». Ceci est particulièrement vrai lorsqu’il s’agit du taux
auquel on peut se procurer des devises étrangères. Là aussi, grâce aux
diverses mesures adoptées par le gouvernement, les intéressés peu­
vent se procurer des devises à un taux inférieur à celui du marché,
lequel peut être déjà inférieur au taux qui correspondrait à la pénurie
de devises. Il ne faut pas oublier non plus que ces facteurs ont parfois
provoqué une expansion de la capacité de production trop importante
pour que celle-ci puisse être effectivement utilisée, du fait que la de­
mande était insuffisante ou que le personnel qualifié nécessaire
faisait défaut.
207. La troisième des formes principales d’intervention des pou­
voirs publics en faveur de l’industrie privée consiste dans l’octroi
d’avantages fiscaux divers. Les dégrèvements fiscaux ont servi à atti­
rer les capitaux privés dans les secteurs industriels auxquels ils s'ap­
pliquaient et à augmenter les ressources que les entrepreneurs peuvent
consacrer à l’investissement. Ces stimulants fiscaux ont été largement
utilisés comme moyens d’exécution de la politique dans les pays indus­
trialisés d’entreprise privée, ainsi d’ailleurs que dans les pays sous-
développés, bien qu’ils y revêtent une importance pratique moindre.
Dans ces pays, on a eu fréquemment recours à une autre forme d’en­
couragement fiscal, a savoir l’exonération fiscale partielle ou totale
pour certains types d’investissement nouveaux pendant une période
donnée. D’autre part, quelques pays ont permis aux entreprises nou­
vellement créées de faire la moyenne de leurs bénéfices sur un certain
nombre d’années aux fins de l’établissement de l’assiette de l’impôt.
Des dispositions relatives à l’amortissement accéléré, du type de celles
qui ont été largement utilisées en vue de favoriser l’investissement
dans les pays industrialisés, ont également été, à une date récente,
adoptées ou proposées dans certains pays sous-développés. Enfin, les
pouvoirs publics ont parfois proposé de faire bénéficier certains pro­
jets hautement prioritaires d’un régime de forfait fiscal pendant une
période déterminée.
208. Il ne faut pas surestimer l’effet des mesures fiscales. D’une
part, en effet, le taux de l’impôt dans les pays sous-développés n’a pas
été fixé à un niveau assez élevé pour qu’il risque de décourager les
capitaux de s’orienter vers des investissements intéressants et, d’autre
part, l’effet des avantages fiscaux sur les marges bénéficiaires n’a pas
été suffisamment appréciable pour amener les capitaux à s’investir
dans des entreprises qui antérieurement ne permettaient d’escompter
que des revenus modérés. Les avantages fiscaux ont encouragé l’in­
vestissement dans le secteur industriel dans la mesure non seulement
où la technique choisie répondait aux exigences de la situation mais
aussi, pour une large part, dans la mesure où les pouvoirs publics ont
réussi à créer de nouvelles formules d’investissement et où la struc­
ture du secteur des entreprises avait la solidarité voulue. Dans la
mesure où l’investissement dans le secteur industriel n’a pas acquis
un caractère auto-entretenu, les avantages fiscaux accordés aux entre­
prises industrielles n’ont souvent abouti qu’à subventionner les entre­
preneurs et n’ont guère servi les fins pour lesquelles ils avaient été
établis. De plus, en l’absence de contrôles appropriés, ils ont eu ten­
dance à encourager l’inefficience.
209. Il est arrivé que des avantages fiscaux spéciaux soient offerts
aux capitaux étrangers s’investissant dans certains secteurs. Combinés
à une politique cambiaire appropriée, ces avantages ont permis, dans
quelques cas, d’amener les entreprises étrangères à jouer un rôle dans
le développement et la diversification de l’industrie. Il convient toute­
fois de souligner qu’en dépit des efforts déployés tant par les pou­
voirs publics de certains pays importateurs de capitaux que par ceux
de pays exportateurs de capitaux, les capitaux privés ont eu tendance
à se concentrer sur les industries travaillant pour l’exportation plutôt
que sur les industries manufacturières produisant pour le marché
local.
210. Plusieurs pays ont fait une large place dans leurs plans au
développement des petites entreprises, parce qu’elles contribuent à
relever le niveau de l’emploi, à répandre l’activité industrielle dans le
pays et à favoriser un meilleur équilibre de l’économie rurale. Du fait
des avantages découlant de la spécialisation, elles peuvent en effet
apporter un complément bien nécessaire aux grandes organisations
industrielles; elles peuvent fournir toute une série de produits et de
services divers qui peuvent être produits tout aussi avantageusement
ou même plus avantageusement dans des établissements spécialisés
distincts que dans des complexes entièrement intégrés. Mais les petites
entreprises sont particulièrement désavantagées dans les économies
sous-développées. Elles sont bien souvent incapables de se procurer
l'énergie, les transports et autres moyens nécessaires; le crédit, les
devises étrangères et les licences et autorisations officielles ne leur
sont pas aussi facilement accessibles qu’aux grandes entreprises; elles
peuvent rarement assurer la formation de leur personnel, payer les
frais d’entretien et de réparation du matériel et elles ont besoin de
services consultatifs très variés qui n’existent généralement pas dans
les pays sous-développés. Plusieurs moyens ont été employés pour
remédier à ces difficultés, notamment la création de services officiels
spéciaux, chargés de conseiller et d’aider les petites entreprises, et
d’institutions spéciales de crédit et de formation, l’adoption de me-
simes destinées à faciliter leurs achats, la fourniture de matériel et de
matières premières, et, dans quelques pays, la formation de domaines
industriels. Ces derniers sont des zones exclusivement affectées à la
petite industrie où le gouvernement fournit les bâtiments, les installa­
tions, les transports et l’énergie, des conseils techniques et commer­
ciaux, des crédits et une assistance sous d’autres formes.
211. Dans un certain nombre de pays où le développement vient
à peine de commencer, l’absence de personnel de direction et d’admi­
nistration et de techniciens qualifiés et expérimentés, tant dans les
entreprises publiques que privées, est un des problèmes qui limitent
sérieusement le taux d’industrialisation. Dans les pays développés, on
reconnaît de plus en plus, depuis quelques années, qu’en formant du
personnel de direction et en perfectionnant celui qui est en place, on
mettra les cadres à même de mieux résoudre, par l’analyse rationnelle
et logique, les problèmes de gestion qu’ils peuvent rencontrer. Pour
atténuer cette pénurie critique, un certain nombre de pays sous-
développés créent actuellement des centres de formation de personnel
de direction.

Pays à économie planifiée

212. Dans les pays à économie planifiée, l’exécution des plans


économiques nationaux pose un problème très différent, à bien des
égards, de celui que connaissent les pays de libre entreprise ou à éco­
nomie mixte. Dans ces pays, les organismes d’Etat qui gèrent directe­
ment la plupart des activités économiques jouent un rôle capital
lorsqu’il s’agit d’organiser l’exécution des plans. Quand on ramène les
objectifs visés par le plan au niveau de chaque entreprise, on spécifie
en détail non seulement les buts assignés à chaque unité économique,
mais aussi les moyens nécessaires pour atteindre ces buts. Les direc­
tives qui traduisent ces buts indiquent généralement les chiffres pré­
vus en ce qui concerne la production, les intrants matériels, l’investis­
sement, la main-d’œuvre, les charges salariales, les taux de salaire
moyens par industrie et d’autres indicateurs importants. Il convient
de noter que les plans nationaux n’énoncent que les objectifs géné­
raux assignés aux différents secteurs et branches d’activités; ces plans
ne précisent pas les tâches dévolues à chaque entreprise. Ce sont les
ministères et les services économiques qui, sur la base de ces indica­
teurs généraux, répartissent entre chaque entreprise les tâches à ac­
complir. Les indicateurs figurant dans les plans nationaux sont plus
ou moins détaillés ou plus ou moins généraux selon les pays à éco­
nomie planifiée; dans certains pays, par exemple, la liste des articles
produits et des matières fournies se limite à quelques centaines de
groupes généraux tandis que dans d’autres la liste établie est beau­
coup plus détaillée. Il en est de même d’autres indicateurs qui revê­
tent un caractère plus ou moins général. A partir de ces indicateurs,
les entreprises élaborent leurs propres plans détaillés, dans lesquels
elles indiquent les objectifs qu’elles doivent atteindre, concernant par
exemple la production, les intrants matériels, l’emploi, la production
par unité de main-d’œuvre, les salaires, la réduction des coûts, les
ventes, les bénéfices et leur répartition, l’investissement et son mode
de financement.

1. — M é t h o d e s e t m o y e n s e s s e n t i e l s p e r m e t t a n t d 'a t t e i n d r e
LES o b j e c t i f s DU PLAN

213. Comme les plans des entreprises et autres unités économi­


ques ont un caractère obligatoire; les autorités administratives supé­
rieures qui contrôlent directement les entreprises jouent un rôle
fondamental dans l’exécution des plans d’ensemble. Parmi les princi­
paux moyens auxquels on a recours pour exécuter les plans, il faut
citer la négociation d’accords entre les entreprises — qui, une fois
conclus, deviennent obligatoires — l’emploi de stimulants matériels,
la politique en matière de crédit et d’opérations bancaires et la po­
litique des prix. Ces différents mojœns peuvent exercer leur effet, car
chaque entreprise existe en tant qu’entité juridique distincte fonction­
nant sur la base de la rentabilité économique. Autrement dit, chaque
entreprise, après avoir reçu de l’Etat un actif fixe et un fonds de
roulement doit couvrir ses dépenses courantes à l’aide de ses res­
sources et faire des bénéfices. Dans les limites imposées par le plan, les
entreprises sont, jusqu’à un certain point, libres de régler les ques­
tions d’exploitation comme bon leur semble.
214. Les objectifs que le plan assigne aux entreprises présuppo­
sent qu’il existe entre elles des liens mutuels en ce qui concerne la
production et les approvisionements; ces liens s’établissent entre elles
soit directement, soit par l’intermédiaire d’organisations chargées des
approvisionnements et des achats. Sur cette base et compte tenu des
plans plus détaillés qu’elles établissent elles-mêmes, les entreprises
passent entre elles des contrats afin de s’assurer que tous leurs pro­
duits seront fabriqués et écoulés dans les proportions fixées par les
plans nationaux. Le plan tout entier devient ainsi un système d’obliga­
tions mutuelles ayant force légale. L’exécution de ces contrats liant
les entreprises les unes aux autres est assurée par des dispositions
détaillées qui peuvent comprendre des sanctions; il existe également
un tribunal d’arbitrage pour le règlement des litiges.
215. Un autre moyen important auquel on a recours pour exé­
cuter les plans est l’application du principe des stimulants matériels.
En fait, bien que les plans revêtent le caractère d’un ensemble de
directives, les entreprises n’exécutent pas simplement des ordres se rap­
portant aux tâches prévues dans leurs plans. Les entreprises n’attei­
gnent leurs objectifs concernant la production, la réduction des coûts,
les économies de matières premières, les innovations et même la mo­
dernisation de leur équipement que dans la mesure où leur direction
et leur personnel font preuve d’une grande initiative. A l’obligation
d’exécuter les plans et directives administratives des autorités de
contrôle s’ajoutent donc des encouragements de toutes sortes dont
l’objet est d’inciter les entreprises à atteindre ou dépasser les objec­
tifs du plan. Ces stimulants tiennent une place importante même au
stade de l’élaboration des plans parce que les organes planificateurs
doivent dans une large mesure se fier aux renseignements et aux de­
mandes qui leurs parviennent des directeurs et qui peuvent être in­
fluencés par le système des encouragements.
216. Dans les pays à économie planifiée, le principe des stimulants
matériels, qui joue un rôle important dans l’exécution des plans, est
appliqué sous diverses formes. Dans ces pays, en dehors des traite­
ments et salaires liés à la productivité des travailleurs et constituant
la principale forme de rémunération, il existe des encouragements
supplémentaires sous forme de primes accordées au personnel de
direction, aux ingénieurs et aux techniciens lorsque, par exemple,
l’accroissement de la production est égal ou supérieur aux chiffres
prévus, la qualité des produits amélioré et le prix de revient unitaire
réduit. Des primes peuvent être accordées, en outre, à l’ensemble du
personnel d’une entreprise qui a réussi à lancer un matériel très per­
fectionné permettant d’alléger le travail ou d’économiser les ressour­
ces de main-d’œuvre. Dans la plupart des cas, ces primes ne sont
accordées que lorsque la production combinée des entreprises est
conforme au plan, que les objectifs fixés en matière de productivité
des travailleurs ont été atteints et que les entreprises se sont acquit­
tées de leurs obligations de livrer certaines marchandises à d’autres
entreprises. Un des stimulants utilisés pour encourager les entreprises
à augmenter leur rentabilité consiste à créer des caisses dont les
fonds servent à élever le niveau de vie des travailleurs et à améliorer
la production. Ces caisses sont alimentées à mesure que les objectifs
du plan concernant le volume et la gamme des articles produits, la
réduction des coûts ou les bénéfices sont atteints ou dépassés.
217. Les fonds servant au règlement des primes ne sont pas cons­
titués de la même façon dans les différents pays; ils sont soit fixés
directement par l’organisation supérieure, soit subordonnés à la qua­
lité du travail de l’entreprise telle qu’elle est mesurée, par exemple,
par l’accroissement des bénéfices. Les modalités de la répartition de
ces fonds sont également précisées par. l’autorité administrative supé­
rieure, de sorte qu’une certaine partie seulement des fonds destinés
à être versés sous forme de primes reste à la disposition du directeur
de l’entreprise.
218. Parallèlement aux primes qui sont versées lorsque les objec­
tifs du plan sont atteints ou dépassés, il est prévu également diverses
sanctions qui sont appliquées en cas de non-exécution des plans et des
engagements, ou lorsqu’il y a violation de la réglementation en matière
de crédit ou des dispositions d’ordre économique prises entre entre­
prises ou organisations, ou encore lorsque les produits sont de fabri­
cation défectueuse. Par exemple, une sanction est infligée lorsque les
obligations contractuelles n’ont pas été respectées ou que les produits
ne remplissent pas les conditions voulues du point de vue qualité. En
outre, lorsque les conditions en matière de crédit ne sont pas obser­
vées, les banques d’Etat s’adressent généralement à l’organisation de
contrôle pour obtenir des garanties, ce qui amène cette dernière à
resserrer son contrôle sur l’entreprise en cause et à adopter des me­
sures appropriées à son égard.
219. Le régime des primes et le mode d’utilisation des fonds des
entreprises varient d’un pays à l’autre. D’autre part, les méthodes
adoptées évoluent et s’améliorent à mesure que chaque pays pro­
gresse. Cette amélioration vise surtout à mettre au point des métho­
des de nature à stimuler autant que possible l’esprit d’initiative des
directeurs d’entreprises et à l’orienter vers l’intérêt général de l’Etat
tel qu’il s’exprime dans les plans économiques nationaux.
220. En général, l’encouragement le plus courant a pris la forme
du montant du profit laissé à la disposition de l’entreprise. Etant
donné que les prix des intrants et des extrants sont imposés et que
son profit est prévu, le profit réel reflète normalement la qualité du
fonctionnement de l’entreprise. Toutefois, il n’indique pas exactement
si les objectifs de production fixés ont été atteints, puisqu’il reflète
les modifications non seulement de la production, mais aussi des
coûts. Aussi les prévisions de profit peuvent-elles être dépassées sans
que les objectifs de production fixés par les plans soient atteints. Il
a donc été décidé que l’entreprise ne pourrait conserver une certaine
proportion de son profit, à titre de prime pour les ouvriers et les
cadres ou, par exemple, pour son fonds d’investissements, que si elle
avait atteint les buts fixés par le plan en ce qui concerne la produc­
tion totale et ses éléments principaux ainsi que la réduction du coût
et le profit. Dans certains pays, la part du profit conservée par l’entre­
prise est plus petite lorsque le profit atteint la somme prévue et plus
grande lorsqu’il la dépasse. Dans d’autres, ce système a été écarté de
crainte qu’il n’incite les entreprises à minimiser leurs possibilités lors
de la formulation des plans afin d’obtenir un profit plus élevé en dé­
passant les objectifs fixés par les plans. On a donc mis au point divers
dispositifs qui, d’une part, font dépendre la proportion des profits
conservés par l’entreprise de l’augmentation du profit par rapport à
Tannée précédente et, d’autre part, laissent à l’entreprise une plus
large part des profits prévus et une plus petite part des profits dépas­
sant les niveaux prévus. Les entreprises sont ainsi encouragées à faire
très exactement connaître leur capacité lors de l’établissement des
plans, ce qui crée les conditions nécessaires à un développement plus
rationnel durant la période de planification.
221. La réalisation des objectifs du plan est fortement influencée
par le système qui veut que les prix soient fixés par les organes cen­
traux de l'Etat. Le système général des prix couvre les prix de gros et
les frais de transport applicables aux transactions effectuées entre
entreprises, les prix à l’achat des produits agricoles réservés à l’Etat
et les prix de détail. Dans les pays à économie planifiée, un impôt sur
le chiffre d’affaires est généralement prélevé, surtout lorsqu’il s’agit
de biens de consommation. Dans la plupart des cas, cet impôt repré­
sente la différence — compte tenu d’une marge normale pour frais
commerciaux — entre les prix de gros et les prix de détail, chacun de
ces prix étant fixé séparément par l’Etat. L’impôt n’est généralement
pas un pourcentage fixe du prix de gros. Les prix de gros sont, en
règle générale, fixés en fonction des coûts de production majorés
d’une petite marge de bénéfice, tandis que les prix de détail sont fixés
de façon à équilibrer l’offre et la demande de biens de consommation.
222. Le règlement des transactions entre entreprises est fondé sur
le système des prix prévus. Le prix auquel une entreprise écoule sa
production (prix de gros sortie d’usine) couvre le prix de revient
prévu et garantit un bénéfice fixe à chaque entreprise opérant dans
des conditions normales. Les prix de gros sont identiques pour un
produit donné qui est fabriqué par différentes entreprises. Toutefois,
le prix n’est pas fixé simplement en fonction des conditions moyennes
de production, mais de façon à stimuler l’amélioration de la produc­
tion tout en évitant, autant que possible, que les entreprises opèrent
à perte. Dans certains cas, lorsque les différences dans les conditions
de production entre entreprises d’un secteur donné ne peuvent être
rapidement annulées (par exemple, dans les industries extractives ou
dans certaines branches de l’industrie lourde), on établit des prix de
vente différents pour la production de certaines entreprises, mais les
entreprises consommant le produit en question paient le même prix
d’achat; la différence est généralement compensée par l’organisation
chargée de commercialiser la production du secteur.
223. On modifie fréquemment les prix tant pour régulariser le
volume des articles produits ou consommés que pour améliorer leur
qualité. On fixe les prix des matières qui font défaut de façon à en­
courager les producteurs à accroître la production de ces matières
tout en en limitant la consommation d’autre part. Les prix des pro­
duits interchangeables sont établis de manière à stimuler la consom­
mation du produit le plus économique. Pour encourager les entre­
prises à améliorer la qualité, on vend les produits de haute qualité
à des prix plus élevés. Les prix des nouveaux produits de haute qua­
lité revêtent une importance spéciale. Pour les établir, on se fonde
normalement sur le prix des produits analogues existants que l’on
ajuste pour tenir compte des différences de qualité. Des mesures
systématiques sont également prises pour modifier les prix de gros
de façon qu’ils soient davantage en rapport avec les conditions dans
lesquelles les produits sont fabriqués et vendus et avec les objectifs
qui ont été fixés en vue d’améliorer les bases matérielles et techniques
de l’industrie.
224. Les organismes centraux ne fixent pas seulement les prix des
produits, ils arrêtent aussi d'autres normes qui déterminent les condi­
tions dans lesquelles les entreprises ou d’autres unités économiques
doivent atteindre les objectifs fixés par les plans économiques régio­
naux. Une des plus importantes de ces normes est la classification des
postes et des taux de salaires qui lie la rémunération du travail au
degré de compétence et aux conditions de travail ainsi qu’à l’impor­
tance que les plans nationaux attachent à certains secteurs. Cette clas­
sification a pour effet non seulement d’inciter les travailleurs à amé­
liorer leur compétence, mais aussi de faciliter l’affectation de la
main-d’œuvre dans les secteurs les plus importants du point de vue
de la planification du développement.

2. — C o n t r o l e a d m in is t r a t if d ir e c t d e l 'e x é c u t io n d e s p l a n s

2 2 5 . Les mesures adoptées par les autorités administratives obli­


gent les unités économiques à procéder à l’exécution du plan dans
certaines conditions. Mais il n’y a pas là une garantie automatique de
réalisation du plan. D’autre part, les conditions qui déterminent l’exé­
cution des plans dans une entreprise dépendent à bien des égards du
travail accompli par d’autres entreprises. Au surplus, les conditions
dans lesquelles un plan donné est exécuté peuvent varier par rapport
à celles que posait le plan lui-même. Il est donc indispensable que les
organes administratifs à tous les niveaux suivent attentivement et
minutieusement la façon dont l’exécution du plan progresse afin de
veiller au maintien ou au rétablissement de l’équilibre économique et
d’atteindre les objectifs généraux du plan.
2 2 6 . Tous les organes chargés de l’exécution des plans, c ’est-à-dire
tous les échelons de l’administration pour ce qui est des activités
économiques dont ils sont responsables procèdent périodiquement à
ce contrôle de l’exécution du plan d’une façon globale et en le faisant
porter sur tous lès indicateurs du plan. Généralement, ce contrôle est
plus ou moins fréquent pour telle ou telle branche selon la variabilité
des conditions de travail et l’importance de la branche en question
par rapport à l’ensemble de l’économie. Tous les mois, on analyse
approximativement les résultats de l’exécution du plan et tous les
trimestres, on procède à une analyse plus approfondie de ces résul­
tats. Les analyses sont faites à partir de données relatives au degré
d’exécution du plan qui ont été réunies par les services de statistiques
et de comptabilité et à partir de données fournies par les banques
d’Etat (dont le rôle est décrit plus loin).
2 2 7 . Le contrôle a surtout pour but de faire apparaître les
facteurs qui contrarient l’exécution du plan et de révéler les besoins
en ressources supplémentaires, c’est-à-dire ceux dont il n’a pas été
tenu compte à l’origine. Une fois que l’on a analysé ces facteurs et ces
besoins, on prend des mesures appropriées en ce qui concerne les
moyens de financement, le crédit, les importations et les exportations.
ainsi que les approvisionnements en matériel et en matières, afin
d'assurer un développement équilibré.
228. Pour agir sur l'exécution du plan, les organes centraux ont
à leur disposition un important moyen : ils peuvent créer des réserves
de matières et de devises compte tenu des plans. Ces réserves sont
constituées par les autorités centrales et sont distinctes des réserves
dont les entreprises se servent pour leur production courante. Les
réserves de matières sont de deux types. D’une part, il y a ce qu’on
appelle les réserves d’Etat, qui sont surtout des réserves de matières
brutes importantes et d’autres matières ne pouvant être utilisées
qu’en cas de nécessité et sur décision expresse du gouvernement.
D’autre part, il y a ce qu’on appelle les réserves administratives, que
les organes centraux prévoient dans leurs plans de distribution de
matières premières et autres matières et qu’ils répartissent pour
couvrir les besoins créés par la progression du plan.

3. — Le systèm e b a n c a ir e e t la r é a l is a t io n des o b je c t if s du plan

229. Le système bancaire dans les pays à économie planifiée est


suffisamment souple pour qu’il soit possible d’exercer des contrôles
préventifs sur les entreprises, basés sur les flux de monnaie passant
par les banques. Grâce aux fonctions spéciales qui leur sont attri­
buées, les banques ont la possibilité d’exercer un contrôle permanent
sur les activités des entreprises; et en contrôlant les finances des
entreprises, elles peuvent prévenir des dérogation illicites au plan. En
effet, tous les flux de monnaie entre les entreprises, l’Etat et ses divers
organismes doivent passer par l’intermédiaire des banques d’Etat. En
outre, les entreprises sont tenues de conserver pratiquement tous
leurs capitaux dans des banques. Cela étant, l’examen des comptes en
banque des entreprises permet aux autorités bancaires de savoir dans
quelle mesure l’exécution des plans se rapproche de tel ou tel objectif
avant que les autorités administratives ne connaissent les renseigne­
ments définitifs. D’une part, les prix, le taux du profit prévu et son
affectation au budget central son déterminés d’avance; d’autre part,
le profit doit au fur et à mesure être transféré aux comptes budgé­
taires des banques. Des changements dans le flux de monnaie entre
les entreprises et les organismes bancaires signifient donc nécessaire­
ment que la production, le coût des matières ou le montant des salai­
res payés par les entreprises se sont modifiés. En outre, aucune entre­
prise n’est autorisée à virer des fonds aux comptes d’autres entreprises
sans fournir les pièces justificatives voulues et, le cas échéant, ces
virements peuvent être bloqués pour empêcher les entreprises d’utiliser
des fonds à des fins qui ne sont pas conformes aux dispositions des
plans économiques et financiers les concernant. De même, des retraits
de fonds pour le paiement des salaires ne sont autorisés que sur pré­
sentation de pièces justificatives aux autorités bancaires. Les autorités
administratives peuvent ainsi être immédiatement informées de toute
dérogation au plan.
230. Un autre moyen tout aussi important de surveiller l’exécution
des plans est le contrôle exercé par les banques sur les fonds investis
en capital fixe et en capital de roulement. La majeure partie de l’in­
vestissement en capital fixe est financée par des subventions budgé­
taires dont s’occupent les banques. Etant donné que le transfert de
ces fonds ne peut s’effectuer qu’à des intervalles fixés conformément
au rendement réel des organisations ou des entreprises qui les inves­
tissent, les banques savent à tout moment où en est l’exécution des
plans et quels sont les besoins nouveaux créés par sa progression.
231. Des crédits, utilisés presque exclusivement comme fonds de
roulement à court terme, sont alloués par les banques conformément
aux plans nationaux. Ces crédits sont accordés moyennant un intérêt
destiné à encourager leur utilisation judicieuse par les entreprises. Si
le rendement d’une entreprise n’a pas atteint les chiffres fixés par le
plan ou si elle les a dépassés, le montant du crédit est ajusté en con­
séquence. Comme les crédits sont accordés à des fins précises et ne
peuvent être utilisés pour des règlements à moins que l’on fournisse
la preuve écrite du transfert de biens ou de services, les banques peu­
vent contrôler les échanges de biens entre les entreprises et prévenir
une nouvelle répartition illicite de matières premières et de ressources
financières.
232. En dehors des crédits à court terme, des crédits sont accor­
dés dans certains pays pour une durée de deux à trois ans, pour cou­
vrir les dépenses à engager afin de mécaniser, moderniser et perfec­
tionner les techniques de production, et pour un an au maximum
lorsqu’il s’agit de dépenses nécessaires pour organiser et développer
la production et pour améliorer la qualité des biens de consommation.
Pour pouvoir obtenir un crédit, il faut avant tout que l’action qui va
être entreprise soit efficace et qu’elle garantisse le remboursement
du crédit dans les délais prescrits grâce aux nouveaux fonds qu’elle
aura permis d’accumuler. Des crédits à long terme sont également
accordés pour aider les entreprises qui se sont lancées dans des in­
vestissements financés à l’aide de leurs propres ressources.

4. — E x é c u t io n d e s p l a n s a g r ic o l e s

233. En principe, les méthodes d’exécution des plans sont les


mêmes dans tous les secteurs de la production où les entreprises
d’Etat ont un rôle prépondérant. Mais en agriculture, les problèmes
posés par l’exécution des plans diffèrent sensiblement de ceux que
l’on rencontre dans d’autres secteurs. Ces différences proviennent en
partie de ce que la production dépend des caprices du climat et en
partie de ce que les entreprises agricoles sont en majorité des exploi­
tations collectives ou privées, et non des entreprises d’Etat. Il en ré­
sulte que les plans de production agricole sont considérés comme des
prévisions plutôt que comme des directives à communiquer aux diver­
ses entreprises. Les exploitations agricoles d’Etat reçoivent en fait
des directives des autorités chargées de les surveiller au sujet de la
production de certains produits et d’autres aspects de leur activité.
Mais les exploitations collectives sont libres de fixer leur production,
et leur politique en matière d’utilisation de la main-d’œuvre, du vo­
lume des investissements et des conditions régissant la rémunération
du travail. Hormis le paiement d’impôts et l’obligation de constituer
des réserves d’investissement et d’amortissement, elles sont unique­
ment tenues de vendre les contingents de certains produits que leur
ont fixés les pouvoirs publics; ces contingents sont ou bien établis par
accord entre les unités de production agricole et les organismes
d’achat de l’Etat, conformément aux plans, ou bien fixés par l’Etat.
Les ventes de ces produits subissent l’influence des mouvements des
prix. Par le truchement de sa politique des prix et de sa politique
fiscale, l’Etat influence le montant des recettes que les exploitations
agricoles tirent de la vente de divers produits et, partant, la structure
de la production et des ventes.
234. Les plans d’achat, ainsi que la politique des prix et la poli­
tique fiscale, sont accompagnés d’autres mesures visant à assurer
l’exécution des plans agricoles. C’est l’Etat qui se charge d’établir les
plans du développement de la production et de la fourniture de trac­
teurs, de machines agricoles, de moyens de transport, d’engrais chimi­
ques et minéraux et de parasiticides, d’entreprendre les programmes
d’irrigation et de récupération des terres, de mettre en culture les
terres vierges ou en jachère, d’organiser la production de semences de
qualité et d’élevage de bestiaux à grand rendement ainsi que leur
vente aux exploitations collectives, de constituer un réseau de stations
d’élevage et de médecine vétérinaire et d’exécuter les plans de forma­
tion ou de réorientation de spécialistes et de diffusion des progrès
techniques.
235. Contrairement aux entreprises d’Etat, les exploitations col­
lectives ne reçoivent aucune directive directe au sujet des éléments
de la consommation productive ou des investissements. En consé­
quence, les plans d’investissements dans le secteur libre de l’agri­
culture sont fondés, d’une part, sur l’évaluation de la demande d’in­
vestissement des exploitations agricoles qui ne dépendent pas du
secteur public et, d’autre part, sur l’estimation de fonds investis dans
les exploitations collectives et des crédits prévus à cette fin par le
gouvernement. Les instruments essentiels qui permettent de contrôler
les investissements dans le secteur libre de l’agriculture sont donc les
allocations de crédits et les prix fixés par le gouvernement pour les
biens d’investissement agricoles, ainsi que les plans de livraison de
matériel et d’autres ressources. Par ces mécanismes, les autorités
centrales peuvent contrôler le volume des investissements agricoles
conformément aux nécessités de la politique gouvernementale.

5. — E x é c u t io n d e s p l a n s r e l a t if s au c o m m e r c e e x t é r ie u r

236. L’exécution des plans relatifs au commerce extérieur, qui


représente un monopole d’Etat, est assurée par des méthodes analo­
gues à celles qui sont en usage dans la plupart des autres secteurs.
Les plans d'ensemble pour le commerce extérieur sont mis en œuvre
par des directives communiquées aux organismes d’importation et
d’exportation de l’Etat. Ils sont également intégrés aux plans d’achat
et de répartition des diverses organisations d’approvisionnement et,
dans bien des cas, aux plans de production et de vente des entreprises
travaillant pour l’exportation. L’exécution de ces plans est garantie
par l’existence du monopole d’Etat pour le commerce extérieur et par
les accords commerciaux à long terme conclus avec d’autres pays à
économie planifiée. Ces garanties ne sont cependant pas entièrement
efficaces, le commerce avec les pays de libre entreprise ou à économie
mixte étant sujet aux fluctuations de la demande extérieure et des
prix; ce fait peut influer sur l’exécution des plans commerciaux et
autres. D’autre part, le monopole du commerce extérieur assure
l’équilibre entre les prix intérieurs et les prix du marché étranger, si
bien que les fluctuations des cours sur le marché mondial sont sans
effet direct sur les entreprises de production. En outre, les fluctua­
tions des ventes et achats de produits sur le marché mondial peuvent
également être absorbées grâce aux réserves des organisations d’Etat
pour le commerce extérieur ainsi qu’aux stocks et aux réserves en
devises constitués par le gouvernement.
237. Bien que le monopole d’Etat du commerce extérieur et les
accords bilatéraux à long terme constituent un important mécanisme
pour l’exécution des plans relatifs au commerce extérieur, leur effica­
cité dépend de la capacité de mener à bien les plans de production.
Le monopole du commerce extérieur fait que si ces plans ne sont pas
réalisés, l’exécution des plans relatifs au commerce extérieur n’en
souffre pas nécessairement. Mais, le plus souvent, elle est en fait mo­
difiée sensiblement par l’écart entre la production réelle et les contin­
gents prévus. Ce phénomène revêt naturellement la forme la plus
aiguë dans les cas où une grande proportion d’une production donnée
est destinée aux exportations. Comme ces écarts par rapport au vo­
lume prévu et à la composition des importations et des exportations
se produisent sous contrôle du gouvernement, ils n’entraînent pas
nécessairement de changements significatifs dans la balance prévue
des paiements. Les accords bilatéraux ne comportant que des marges
limitées de crédit, l’impossibilité d’exécuter les plans d’exportation
s’est accompagnée généralement d’une réduction des importations
prévues, sauf lorsqu’on a pu obtenir des crédits supplémentaires à
long terme.

6. — E x é c u t i o n d e s p l a n s d 'e n s e m b l e

238. Comme les objectifs globaux des plans, tels que les taux de
croissance de la production totale et sectorielle, la répartition du
revenu national entre l’accumulation et la consommation et l’alloca­
tion par secteur des investissements, sont obligatoires, il est évident
que l’exécution des plans de production et des plans financiers des
divers établissements et entreprises se confond pratiquement avec
celle des plans d’ensemble. En conséquence, les politiques d’exécution
portent surtout sur la direction et le contrôle des activités des entre­
prises par l’application des mesures déjà décrites. En général, on ne
doit recourir qu’à im petit nombre de mesures complémentaires de
caractère global pour assurer l’exécution des plans. En fait, ces me­
sures ne se révèlent nécessaires que dans les secteurs airxquels ne
s’appliquent pas directement les plans des établissements et entre­
prises. En d’autres termes, il s’agit principalement du revenu dispo­
nible de la population et de l’usage qui en est fait. Toutefois, même
dans ce cas, on n’a guère besoin d’adopter de mesures spéciales tant
que les plans financiers et les plans de production des entreprises
sont respectés.
239. Comme il n’existe pas de bénéfices privés et que l’Etat se
charge des assurances sociales et des pensions de vieillesse, l’épargne
provenant du revenu privé ne représente qu’une fraction relativement
peu importante de l’épargne totale. De ce fait, il est beaucoup moins
nécessaire d’adopter des mesures complémentaires pour puiser ail­
leurs que dans les entreprises les ressources qu’exigent les investisse­
ments. Il en résulte aussi que la consommation personnelle équivaut
à peu près au revenu disponible. On prévoit le volume des ventes au
détail en fonction de la demande anticipée de consommation, qui est
à son tour déterminée par le montant prévu des salaires, par les re­
venus perçus par la population au titre du budget national et par les
revenus monétaires de la population rurale. La planification des prix
de détail contribue à assurer l’équilibre du marché intérieur, tant
dans son ensemble que pour les produits individuels. En cas de be­
soin, on peut prélever sur les stocks ou les réserves financières prévus
par les plans nationaux.

7. — E x é c u t io n d e s p l a n s e n Yo u g o s l a v ie

240. Ainsi qu’il ressort du chapitre précédent, les changements


apportés au système de planification en Yougoslavie ont radicalement
modifié les méthodes d’exécution des plans. La gestion indépendante
des entreprises et des services sociaux ainsi que la large autonomie
de l'administration régionale se sont accompagnées d’une décentrali­
sation considérable des ressources financières. Comme la planifica­
tion, telle quelle est conçue en Yougoslavie, a pour objet de fixer des
objectifs d’ensemble et d’équilibrer la structure du développement
économique, on a cessé de procéder par la voie de directives détaillées
destinées aux entreprises individuelles. Les objectifs et l’équilibre en
question sont atteints grâce à un système de conditions et de règles
générales gouvernant l’activité économique des entreprises, auquel
viennent s’ajouter des mesures de politique générale. Cet ensemble de
conditions et de mesures peut être adapté de façon à établir une dif­
férenciation plus ou moins grande dans le traitement réservé aux
divers secteurs ou aux divers phénomènes du développement éco­
nomique.
241. L’ensemble des dispositions relatives à la répartition du
revenu des entreprises constitue un élément important du système.
Les entreprises sont tenues de mettre à la disposition de la collectivité
ime partie de leurs recettes sous forme de droits, contributions et
taxes qui représentent la source principale des recettes des budgets
et fonds d’investissement et autres du gouvernement fédéral et de
ses services, ainsi que des républiques et des communes. L’intérêt sur
le capital payé par les entreprises et les taxes sur la valeur ajoutée
dans les entreprises industrielles, établis d’après des barèmes et des
critères déterminés, jouent un rôle important. Le reliquat des recettes
est entièrement laissé à la disposition des entreprises, qui le répartis­
sent entre leurs fonds de traitements et salaires, d’investissement et
de réserve. Les entreprises ont le droit d’augmenter la rémunération
de leur personnel en proportion de l’augmentation de la productivité
de la main-d’œuvre et de leur propre prospérité. Pour calculer le mon­
tant des salaires, les entreprises se servent de certains indicateurs
spécialement recommandés, tels que les augmentations réalisées de la
valeur ajoutée par travailleur et par unité de capital. De cette façon,
le système en question exerce une influence considérable sur la répar­
tition des revenus entre les investissements (fonds d’investissement
des diverses institutions et entreprises), les dépenses sociales (fonds
réservés aux budgets publics, aux assurance sociales, etc.) et la consom­
mation personnelle (salaires et traitements). Ce système permet égale­
ment de régler la question de la centralisation ou de la décentralisation
des fonds mis à la disposition des divers organismes. Toutefois, ce
serait une erreur de croire que ce système a surtout des répercussions
d’ordre fiscal. Certains des moyens mis en œuvre ont pour objet non
seulement d’influer sur la répartition des revenus, mais aussi de servir
d’encouragement ou de critère économique en vue d’évaluer ou d’in­
fluencer les décisions prises par les organes autonomes.
242. Outre les dispositions générales touchant la répartition des
revenus et les normes juridiques définissant le statut des entreprises
et le cadre dans lequel s’exercent les pouvoirs des organes autonomes,
on trouve dans les méthodes de planification en usage en Yougoslavie
divers aspects des politiques à long terme et à court terme en matière
de crédit, de prix, de commerce extérieur et de change auxquels on
peut avoir recours en vue d'atteindre les objectifs prévus par les
plans. Ainsi, la plus grande partie des fonds d'investissement réservés
aux crédits à long terme est attribuée par les banques conformément
à certains principes et à certaines règles. Les ressources d’investisse­
ment centralisées sont attribuées aux divers secteurs conformément
aux dispositions des plans. L'attribution à l’intérieur des secteurs se
fait par les banques sur la base des demandes soumises au titre de
projets concurrents. Il arrive cependant que le gouvernement inter­
vienne en pratique, lorsqu’il s’agit de décider de l’attribution de cré­
dits d’investissement pour de grands travaux (construction de che­
mins de fer, construction de routes ou grands projets de récupération
des terres) ou pour des projets nécessitant un large appoint financier
de l’étranger. Le plan national comporte également des dispositions
spéciales concernant le volume et la structure des investissements
fournis par le fonds central aux régions sous-développées du pays en
SUS de leurs propres ressources. Ces transferts se font sous forme de
subventions aux organes régionaux et territoriaux intéressés. Outre
les crédits à long terme destinés à l’expansion des moyens de produc­
tion, on se sert de façon très sélective de crédits à court terme pour
maintenir au niveau souhaitable les différentes branches de la pro­
duction et les échanges commerciaux. Il faut également citer les me­
sures intéressant les prix, notamment la fixation de prix plafond pour
certains produits intermédiaires de base, de prix garantis pour les
produits agricoles les plus importants et d’un contrôle des prix pour
certains produits de consommation importants, lorsque les conditions
du marché le justifient. Toutefois, pour la plus grande partie de la
production, les prix se forment librement sur le marché, bien que
l’impôt sur le chiffre d’affaires serve à influer sur le niveau des prix
des produits finis. En revanche, la réglementation administrative
relative au commerce extérieur et aux devises étrangères demeure
importante, la situation de la balance de paiements n’ayant pas permis
jusqu’à présent de faire preuve d’une plus grande souplesse.
243. Contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays à éco­
nomie planifiée, les entreprises individuelles yougoslaves sont des uni­
tés autonomes dont les activités de production ne sont pas assujetties
a des obligations individuelles précises vis-à-vis des autorités. Chaque
entreprise est libre d’adopter la politique de production, de vente, de
prix et d’investissement de son choix. On part du principe que l’intérêt
bien compris des administrateurs et des conseüs de travailleurs les
conduira à accorder leurs activités aux besoins de l’économie, tels
qu’ils se manifestent dans la situation du marché. Les autorités natio­
nales peuvent cependant exercer une influence considérable sur les
décisions des entreprises par le truchement de leur politique dans les
domaines des finances publiques, du crédit et des prix. Bien que l’on
ait surtout voulu éviter l’adoption de mesures particulières et limiter
l’intervention de l’Etat à l’application de mesures générales, on a eu
recours, dans la pratique, aussi bien à des mesures particulières qu’à
des mesures générales. En d’autres termes, on a appliqué des poli­
tiques différentes aux diverses branches de l’activité industrielle ou
à certains produits afin d’assurer que les activités des entreprises
soient conformes au plan national. On a, par exemple, pu faire varier
les impôts indirects frappant certains produits pour modifier la de­
mande et amener les entreprises en cause à ajuster leur production.
De même, on a fait fluctuer le taux d’imposition appliqué à certaines
industries. Enfin, en remaniant sur une base sélective aussi bien que
générale la politique de crédits à court terme, on a pu stimuler ou
limiter l’activité des entreprises. Jusqu’à une date récente, le système
de taux de change multiples pour les importations et les exportations
a constitué un autre instrument régulateur important.
244. Si l’on a surtout eu recours à ces mesures indirectes pour
faire en sorte que les activités des entreprises correspondent aux
plans nationaux, les autorités régionales et d’autres organisations éco­
nomiques ont également influencé les décisions des entreprises. Bien
que les entreprises ne relèvent pas de l’autorité juridique des corn-
munes ou républiques où elles sont situées, elles ne sauraient entière­
ment négliger leurs opinions, d'autant plus que les administrations
exercent un contrôle sur l'allocation de crédits prélevés sur leurs pro­
pres ressources, ainsi que sur certains impôts. De plus, les communes
et les républiques sont obligées d'aligner leurs plans et politiques
économiques sur les plans nationaux; elles constituent donc un chaî­
non de plus qui permet de raccorder les activités des entreprises aux
plans nationaux.
245. Si l'on a fortement décentralisé le mécanisme de décision en
ce qui concerne les activités courantes des entreprises, les autorités
gouvernementales n’en continuent pas moins d’être largement respon­
sables du montant et de la répartition des investissements pour l'en­
semble de l’économie. Il est vrai que les autorités n'ont pu influencer
la politique d'investissement des entreprises existantes que lorsque
ces dernières avaient besoin de prêts pour exécuter leurs plans. Mais
c’est une caractéristique importante du système que les entreprises
existantes n’ont en général décidé de faire d'investissement que dans
la modernisation et l'expansion des services existants. Dans la pra­
tique, ce sont les autorités régionales, notamment les communes, qui
ont généralement lancé de nouveaux projets. Ces organes gouverne­
mentaux ont un intérêt financier dans la création de nouvelles entre­
prises sur leur territoires, puisque, à la longue, celles-ci assurent
l’accroissement de leurs recettes. Fait plus important encore, la créa­
tion de nouvelles entreprises représente l’un des aspects principaux
de leurs attributions et, comme ces organismes s’inspirent des mêmes
considérations générales dans les domaines politique et économique
que les autorités nationales, leurs activités d’investissement tendent
à se conformer aux plans nationaux. En fait, les plans d'investisse­
ment fixent des objectifs pour chacun des secteurs de base de l'éco­
nomie, bien qu’ils ne prévoient d’objectifs détaillés ni pour des projets
d’investissement déterminés ni pour les régions.
246. La mobilisation de l’épargne relève surtout des autorités
fédérales, des républiques et des communes. Au cours des dernières
années, par exemple, environ un tiers des investissements totaux a été
financé par des fonds d’investissement fédéraux et un autre tiers par
des fonds d’investissement des républiques et des communes; seul le
dernier tiers a été financé par les fonds laissés à la disposition des
entreprises. Les ressources des fonds d’investissement fédéraux, de
républiques et des communes proviennent surtout des impôts prélevés
sur les entreprises.
247. Sans doute est-il vrai, encore une fois, que la proportion du
revenu que les entreprises peuvent garder en réserve est déterminée
non par les autorités gouvernementales mais, en toute indépendance,
par les conseils de travailleurs. Les conseils répartissent les bénéfices
entre la rémunération des travailleurs et les fonds affectés à l’inves­
tissement ou à la consommation collective, en observant la règle
générale que l’augmentation des salaires et traitements doit corres­
pondre à l’augmentation de la productivité et de la prospérité des
entreprises. Dans la pratique cependant, comme la rémunération
dépend du revenu net, le personnel aussi bien que la direction ont
intérêt à accroître l’efficacité des entreprises en modernisant ou en
rénovant les installations et le matériel. De plus, leurs décisions sont
influencées également par la politique fiscale et la politique de crédit.
Abstraction faite d’autres impôts, les sommes destinées aux fonds
d’investissement des entreprises et à la rémunération du personnel
sont aussi assujetties à des taux d’imposition différents, dont les va­
riations peuvent influer sur la façon dont les entreprises décident de
répartir leurs ressources.
248. Le soin d’exécuter les plans de répartition des investisse­
ments incombe principalement aux banques qui gèrent les fonds
d'investissement des autorités fédérales, des républiques et des com­
munes. Contrairement à ce qui se passe dans les autres pays à éco­
nomie planifiée, les entreprises yougoslaves ne reçoivent pas de sub­
vention en capitaux du budget de l’Etat mais doivent financer leurs
investissements par leurs propres moyens ou grâce à des prêts
accordés par les fonds d’investissement. Pour encourager les entre­
prises à réduire leurs dépenses en capital, ces prêts portent intérêt.
249. La politique suivie par les banques pour répartir les prêts
entre les divers secteurs ou industries s’inspire largement des plans
d’investissement de leurs administrations régionales respectives, qui
sont eux-mêmes préparés conformément aux plans nationaux. Dans le
processus d’exécution, le fonds d’investissement fédéral peut, en mo­
difiant de la façon voulue la répartition de ses crédits, compenser les
dérogations à un plan national qui sont enregistrées dans certains
secteurs à la suite de décisions autonomes des fonds d’investissement
régionaux. De même, les fonds d’investissement des républiques et
des collectivités locales tiennent compte, dans l’élaboration de leur
politique de crédit, des décisions prises en matière d’investissement
par les entreprises situées dans leurs territoires.
250. Mais grâce au fonds d’investissement fédéral, les autorités
fédérales ont pu également exercer un contrôle plus direct sur la
répartition des investissements par secteur. Il est vrai que ce fonds
central ne représente qu’un tiers des ressources financières totales
utilisables à des fins d’investissement, mais le lancement de nouveaux
projets dépend le plus souvent de la faculté d’emprunter au fonds
fédéral une partie des capitaux nécessaires; en fait, environ les trois
quarts des investissements productifs suivent ainsi les grandes lignes
des plans nationaux. La banque d'investissement qui gère le fonds
fédéral a stipulé qui les organisations économiques désirant emprun­
ter au fonds fédéral doivent être à même de financer une certaine
partie de leurs besoins d’investissement grâce à leurs propres ressour­
ces locales. La participation requise de l’emprunteur va de 5 à 80 p.
100 du coût du projet, selon la priorité accordé par le plan national
à l’investissement dans les différents secteurs de production. L’ajuste­
ment de ces conditions de participation a constitué un instrument
important que les autorités centrales ont utilisé pour mobiliser les
fonds décentralisés en vue d’atteindre les objectifs nationaux d’inves­
tissement. Cette méthode d’exécution n’a pas été absolument sûre
et Ton a parfois enregistré des écarts entre des investissements finan­
cés exclusivement par des ressources décentralisées et les objectifs
du plan. Néanmoins, ces écarts, qui peuvent parfois donner naissance
à des déséquilibres temporaires, n’ont pas eu une ampleur suffisante
pour porter sérieusement atteinte à l’exécution des plans nationaux.
251. L’évolution récente du système d’investissement yougoslave
indique une décentralisation accrue des ressources d’investissement
ainsi qu’un rôle élargi des fonds bancaires et des fonds d’entreprises.
Cette évolution reflète la tendance qui se manifeste dans la nouvelle
Constitution yougoslave en faveur d’un relâchement du contrôle de
l’Etat sur la direction de l’économie et sur le processus des investisse­
ment.
Chapitre 3

ORGANISATION ET GESTION DE LA PLANIFICATION

252. Les principaux éléments de la planification sont les suivants:


évaluation des possibilités et des objectifs, élaboration des plans et
des politiques à suivre en vue de leur réalisation, formulation de pro­
grammes d'action déterminés, exécution des plans et revision et mise
au point périodiques de ces plans. La nature de l’appareil établi à
cette fin varie considérablement d’un pays à l’autre selon l’importance
du rôle assigné à la planification, le stade de développement, la na-
tm e du système politique et économique, la structure des pouvoirs
publics, etc.

Pays dont l’économie repose sur l’entreprise privée


et pays à économie mixte

253. Dans certains pays où l’économie repose sur l’entreprise


privée et dans certains pays à économie mixte, l’exécution des diverses
tâches de planification a été confiée à des organismes gouvernemen­
taux existants; dans d’autres pays, elle a été confiée à des organismes
nouveaux. L’organisme planificateur national et son organe directeur
ont généralement été chargés d’établir les plans et de formuler la
politique à suivre. La mise en œuvre des politiques permettant d’exé­
cuter le plan a été d’ordinaire confiée aux divers ministères ou à des
organismes publics autonomes. La coordination des politiques est
assurée par les divers ministères, selon leur compétence et, si ces po­
litiques ont des rapports entre elles, par l’organisme de planification
lui-même, agissant sous l’autorité et la direction générale du Cabinet
ou du Conseil des ministres. De même, l’évaluation des progrès est
assurée par les divers ministères dans le cadre de leurs fonctions et
sur un plan plus général, par l’organisme de planification. A l’intérieur
de l’organisme de planification, c’est au secrétariat technique qu’ont
nécessairement été confiés les principaux travaux relatifs à l’éva­
luation.
1. — L ’a p p a r e i l d e p l a n i f i c a t i o n

254. Dans les pays où l’économie repose sur l’entreprise privée et


dans les pays à économie mixte, l’organisme planificateur se compose
généralement d’un conseil supérieur et d’un secrétariat technique. Ce
conseil est l’organe consultatif supérieur en matière de planification.
Il est en général chargé de préparer des projets de plans et d’élaborer
des politiques qu’il recommande aux plus hautes autorités politiques
et qu’il soumet à leur approbation. Dans quelques pays, l’organisme
planificateur a deux organes chargés d’élaborer les recommandations
au sujet de la politique à suivre: un conseil supérieur, qui fixe les
objectifs généraux et définit les grandes lignes de la politique à suivre
et un conseil subsidiaire, de composition plus large, chargé d’examiner
de plus près les diverses questions soulevées.
255. La partie technique de l’élaboration des plans est générale­
ment répartie entre le secrétariat de l’organisme planificateur et les
divers ministères, le premier s’intéressant plus spécialement à l’éla­
boration d’un plan d’ensemble, les seconds s’occupant de domaines
déterminés. Il s’agit des diverses analyses économiques, statistiques,
techniques et autres qui sont nécessaires à la formulation du plan de
développement. Le secrétariat technique, travaillant dans le cadre des
objectifs fixés par le gouvernement ou le parlement, ne formule pas
seulement le plan provisoire; souvent, il analyse aussi les diverses
politiques que l’on peut adopter pour l’exécution du plan afin d’aider
l’organe directeur à prendre des décisions ou à formuler des recom­
mandations.
256. Comme on Ta signalé, le mécanisme de consultations avec
divers groupes extérieurs à l’organisme planificateur joue un rôle
important dans la formulation des plans; la coopération de ces grou­
pes est nécessaire si Ton veut obtenir leurs avis spécialisés sur la
qualité des plans et des instruments de politique proposés. Ces con­
sultations s’opèrent par l’intermédiaire des organes législatifs, d’orga­
nes consultatifs représentant divers intérêts économiques privés, ou
d’institutions non gouvernementales comme les établissements techni­
ques et les instituts de recherche. Certains organismes planificateurs
désignent également des groupes d’experts chargés de donner des avis
dans certains domaines. Dans les pays où il existe des organismes
régionaux de développement ou de planification ceux-ci font parfois
intégralement partie de l’appareil national de planification, et parti-
cipient ainsi directement à la formulation de plans nationaux. Dans
d’autres pays, ces organismes ont constitué des organes autonomes.
Dans ce dernier cas, la liaison institutionnelle entre l’organisme plani­
ficateur national et les organismes planificateurs régionaux est as­
surée en pratique par un service distinct de l’organe directeur de
l’organisme planificateur national. Mais le problème que pose l’éta­
blissement d’une coordination permanente entre les activités de
l’organisme planificateur national et celles des organismes planifica­
teurs régionaux n’a pas encore reçu de solution satisfaisante dans tous
les pays.

2. — D is p o s it i o n s a d m i n i s t r a t iv e s p o u r l ’e x é c u t io n e t l ’é v a l u a t io n

257. Dans les pays qui ont des plans de développement, l’exécu­
tion de ces plans a toujours été confiée aux divers ministères. La co­
ordination de l’activité des ministères entre eux et avec l’organisme
planificateur est d’ordinaire assurée par des comités interministériels;
dans certains pays, on a créé des services de planification distincts
dans chaque ministère pour améliorer la coordination avec l’orga­
nisme planificateur central. En dernière analyse, cependant, la mesure
dans laquelle les ministères ont orienté leurs activités en fonction du
plan national a varié selon l’importance accordée à l’exécution du plan
à l’échelon politique le plus élevé. Il convient également de noter qu’il
a souvent été nécessaire d’opérer des réformes dans l’administration
publique, notamment en ce qui concerne les procédés et méthodes
budgétaires, pour assurer l’exécution efficace des plans.
258. Si la pratique a varié d’un pays à l’autre, c’est généralement
le Conseil des ministres qui est l’autorité la plus élevée en ce qui con­
cerne l’exécution des plans. Sous la direction du Conseil, les divers
ministères sont chargés d’exécuter les plans relevant de leur compé­
tence. Dans les pays où il existe des gouvernements régionaux ou
d’Etats avec les administrations correspondantes, ces autorités sont
chargées de l’exécution des plans qui relèvent de leur compétence. La
tâche qui consiste à assurer une coordination d’ensemble sur une base
permanente est ordinairement assumée par une autorité désignée par
le Conseil des ministres. Il peut s’agir du Ministère des finances, doté
d’un service spécial de planification, ou de l’organisme planificateur
lui-même. Souvent, les objectifs d’ensemble en ce qui concerne
l’épargne et l’investissement ont été proposés par l’organisme plani­
ficateur et le Ministère des finances agissant de concert et soumis
ensuite à l’approbation du Conseil des ministres.
259. Le Ministère des finances, qu’il soit ou non directement
chargé de la planification, joue habituellement un rôle extrêmement
important dans l’exécution du plan. Il a notamment pour tâche d’éla­
borer des mesures et des politiques en vue d’atteindre les objectifs
fixés en ce qui concerne l’épargne et l’investissement et de préserver
l’équilibre de la balance extérieure. Le Ministère des finances est di­
rectement responsable de la politique fiscale; en outre, il coopère
généralement étroitement avec la banque centrale en vue de définir
la politique monétaire; de son côté, la banque centrale consulte le
ministère, conformément à une convention établie, pour formuler la
politique à suivre, ou bien elle est tenue, de par la loi, de se conformer
aux instructions du ministère.
260. Grâce à son rôle traditionnel de gardien du trésor national,
le Ministère des finances peut souvent exercer un contrôle sur les
programmes d’investissements publics, dont l’application relève di­
rectement d’autres ministères. En outre, dans les pays où existe un
contrôle des changes, c’est souvent le Ministère des finances qui est
chargé de se prononcer en dernier ressort sur l’allocation des devises,
bien que l’organisme d’exécution soit habituellement la banque cen­
trale.
261. La plupart des autres ministères sont chargés d’exécuter des
plans dans certains secteurs particuliers de la production; industrie,
agriculture, transports et communications, etc. Dans quelques pays,
ces ministères sont appelés principalement à exécuter, dans les sec­
teurs relevant de leur compétence, les programmes d’investissements
publics OU les programmes de dépenses courantes ayant trait au déve­
loppement. Cependant, dans la plupart des pays sous-développés, où
l’investissement ou les activités de production courantes du secteur
privé sont réglementés, ces ministères sont généralement chargés de
délivrer les autorisations. Dans xm certain nombre de pays, par
exemple, la construction de nouveaux établissements industriels n’a
pu être entreprise qu’avec l’assentiment du Ministère de l’industrie.
Quelques pays ont même chargé des comités composés de représen­
tants de l’industrie et d’autres groupes intéressés d’examiner les pro­
jets avant qu’ils soient soumis au ministère pour approbation. Ces
permis autorisant la mise en œuvre d’un projet devaient être joints
à toute demande tendant à acquérir des matériaux locaux ratioimés,
comme le ciment, ou à obtenir une licence pour l’importation d’outil­
lage. En outre, les banques de développement n’accordent des prêts
que si le projet est approuvé par le ministère; sans cette approbation,
il est également impossible d’émettre des valeurs sur le marché inté­
rieur.
262. L’efficacité du contrôle, de la coordination et de l’évaluation
de l’exécution du plan exige un examen continu de l’état des travaux,
tant en ce qui concerne la réalisation des objectifs d’ensemble que
l’achèvement de nouveaux projets et de tâches déterminés. Pour per­
mettre une étude d’ensemble, certains pays ont jugé utile d’entre­
prendre des évaluations plus vastes des plans chaque année et une
fois l’exécution du plan achevée. Les évaluations sont d’ordinaire
effectuées soit par l’organisme planificateur national, soit par des
commissions créées spécialement à cette fin. Les évaluations annuel­
les jouent un rôle important en ce qu’elles permettent de reviser les
objectifs particuliers ou l’ordre de priorité des diverses parties du
plan.
263. Le contrôle et l’évaluation de l’état des travaux concernant
certains projets ou tâches est, dans le premier cas, nécessairement
confié aux ministères ou autres organes chargés de l’exécution des
programmes. On leur demande souvent, également, de soumettre à
l’organisme planificateur des rapports d’activité sur l’état d’avance­
ment des projets dont ils sont chargés.
264. En outre, l’exécution des projets est surveillée périodique­
ment, soit par les services d’inspection de l’organisme planificateur,
soit par des organes indépendants, extérieurs à cet organisme, qui
sont chargés spécialement d’examiner l’état d’avancement de projets
donnés. Ces activités de surveillance consistent essentiellement à véri­
fier si les travaux sont exécutés dans les délais fixés et si les dépenses
effectives restent dans les limites des coûts prévus, et à évaluer les
résultats économiques et financiers des projets dont l’exécution est
achevée. Les rapports d’activité périodique et les évaluations des pro­
jets en cours d’exécution qui sont communiqués à l’organisme plani­
ficateur national, lui permettent de déceler les problèmes particuliers
et de vérifier les progrès relatifs accomplis dans l’exécution des diver­
ses parties du plan, afin de synchroniser les opérations. Il faut que
ces renseignements soient complets, exacts et fournis à temps pour
que l’on puisse prendre les mesures voulues pour éviter tout goulot
d’étranglement ou tout retard dans l’exécution des plans. Si, par exem­
ple, les ressources financières dont on dispose sont moins importantes
qu’on ne l’avait prévu, il est facile aux planificateurs de décider des
ajustements qui conviennent le mieux s’ils ont en permanence une vue
d’ensemble de l’état d’avancement des diverses parties du plan.
265. Certains pays suivent les progrès d’exécution des projets et
procèdent à des évaluations périodiques de l’efficacité du plan, jugent
utile de prendre également des mesures spéciales sur le plan national
ou dans le cadre de l’organisme planificateur pour obtenir des rapports
et des renseignements à de courts intervalles — un mois ou 15 jours
— sur certains aspects essentiels des projets importants, tels que la
circulation des matériaux bruts et des produits finis, l’approvisionne­
ment en énergie, la disponibilité de matériaux rares et l’utilisation des
allocations en devises. Ces mesures ont pour but d’aider à prévoir les
difficultés et les goulots d’étranglement ou à prendre ou suggérer les
dispositions qui s'imposent dès que ces problèmes apparaissent. D’une
façon plus générale, on peut dire qu’à mesure que les activités de
planification se développent et que les opérations économiques devien­
nent plus complexes, la gestion de la planification exige une plus
grande variété des mesures techniques et institutionnelles telles que
celles qui ont été décrites ci-dessus.

3. — P l a c e d e l ’o r g a n i s m e p l a n i f i c a t e u r
DANS LA h i é r a r c h i e ADMINISTRATIVE

266. Bien que l’organisme planificateur soit invariablement un


organe consultatif, la place qu’il occupe dans la hiérarchie administra­
tive et l’efficacité de la coordination avec les autres organismes pu­
blics et privés jouent un rôle considérable dans la formulation et
l’exécution du plan. Dans l’intérêt du développement et de l’efficacité
des activités de planification, il est indispensable que l’organisme
occupe une place suffisamment élevée dans la hiérarchie et qu’il soit
reconnu comme un instrument important du gouvernement.
267. Dans quelques pays l’organisme planificateur est rattaché
à un ministère, comme le Ministère des finances ou celui des af­
faires économiques. Si l’organisme est rattaché parfois au Minis­
tère des finances, c ’est que ce dernier est souvent chargé de
mobiliser les ressources financières nécessaires aux investissements
dans le secteur public et d’appliquer les politiques monétaires et
fiscales qui influent sur l’orientation des investissements dans le
secteur privé. Dans d’autres pays, on a créé un ministère ou un organe
spécial pour la planification du développement. On a constaté fré­
quemment que le rattachement de l’organisme planificateur au ca­
binet du Premier Ministre donne des résultats satisfaisants. L’exécu­
tion des plans a été souvent entravée lorsque la structure institution­
nelle du gouvernement y faisait obstacle. Il est important de s’assurer
que les modifications que différents ministères proposent d’apporter
au plan restent conformes à ses objectifs généraux et ne sortent pas
des limites des fonds disponibles pour le réaliser.
268. Dans de nombreux pays, l’organisme planificateur national
a été rattaché au cabinet du chef de l’exécutif, ou le chef de l’exécutif
placé à la tête de l’organisme, qui peut alors disposer d’une autorité
suffisante et avoir des liens administratifs efficaces avec d’autres
organismes gouvernementaux. L’organisme planificateur a donc ainsi
accès aux ministères par les voies administratives existantes. En fait,
il est fréquent que certains membres de l’organe directeur de l’orga­
nisme planificateur fassent partie du cabinet ou du conseil des minis­
tres ou que le conseil exécutif en soit un sous-comité. Cet arrange­
ment facilite la coordination des plans prévus pour les divers secteurs.
On peut aussi favoriser la coordination en créant un dispositif de
consultation entre le personnel technique des divers ministères et le
personnel de l’organisme planificateur. Dans de nombreux cas, notam­
ment en Amérique latine, le directeur de la banque centrale est
membre de l’organe directeur; on reconnaît ainsi le rôle important
que joue la banque centrale dans la formulation de la politique à
suivre, ainsi que son rôle consultatif.
269. Comme il est nécessaire de disposer de statistiques satisfai­
santes pour formuler le plan et évaluer les progrès accomplis, on s’est
efforcé, dans de nombreux pays, de rattacher les services de statisti­
que existants à l’organisme planificateur. Dans quelques pays où
l’écart existant entre les services fournis par le bureau central de sta­
tistique et les besoins de l’organisme planificateur a donné lieu à un
certain mécontentement, le bureau de statistique a été rattaché admi­
nistrativement à l’organisme planificateur. Dans d’autres pays, le
bureau de statistique et l’organisme planificateur ont été rattachés au
même ministère afin d’assurer entre eux des consultations et une co­
ordination étroites. Quelques pays ont estimé qu’il était préférable de
séparer le bureau de statistique et l’organisme planificateur, étant
donné que le bureau joue un rôle d’information et devrait être indé­
pendant des autres organes chargés de formuler les politiques à
suivre.

Pays à économie planifiée

270. Dans les pays à économie planifiée, où les moyens de produc­


tion essentiels appartiennent à la société et sont détenus par l’Etat et
les coopératives, la coordination est poussée beaucoup plus loin qu’ail­
leurs entre la gestion des activités économiques et le développement
d’ensemble de l’économie. Malgré les différences que présente l’appareil
planificateur d'un pays à l’autre, les analogies l’emportent générale­
ment de beaucoup. La Yougoslavie, toutefois, constitue une exception
notable : comme on le verra plus loin, l’appareil de planification mis
en place au cours des années 1950 diffère sensiblement de celui des
autres économies planifiées.
1. — L e s ORGANES PLANIFICATEURS

271. L'autorité suprême en matière de décision et d'organisation


de la planification, sous réserve de l’approbation du Parlement, appar­
tient au Conseil des ministres. Le Parlement approuve le plan éco­
nomique national et le budget de l’Etat, examine périodiquement
l’état d’avancement du plan, adopte les normes législatives régissant
la vie économique du pays, définit la structure des organes adminis­
tratifs et planificateurs, et fixe les principes de gestion des entre­
prises, le système monétaire et le crédit.
272. Le Conseil des ministres est chargé d’exécuter et de mener
à bien les plans économiques nationaux et de les adapter de temps
à autre pour tenir compte de l’évolution de la situation. Il examine
les plans économiques et le budget de l’Etat et les soumet à l’approba­
tion du Parlement; il organise le contrôle de leur exécution; il prend
des mesures pour renforcer la monnaie et le crédit; et, d’une façon
générale, il décide des questions importantes relatives au développe­
ment de l’économie.
273. L’organisme planificateur central a toujours été responsable
devant le Conseil de ministres. Ce sont les directives générales arrê­
tées par ce conseil qui servent à orienter l’élaboration des plans, bien
qu’en pratique, de telles décisions soient influencées par diverses sug­
gestions des organismes planificateurs et des divers comités du Con­
seil des ministres. Ces échanges de vues, qui se poursuivent continuel­
lement tout au long de l’élaboration et de l’exécution des plans, se
trouvent grandement facilités du fait que les membres du gouverne­
ment participent directement aux travaux des organes de planification.
L’appareil de planification comprend cependant bien autre chose que
les organismes planificateurs centraux. Chaque administration éco­
nomique, c’est-à-dire non seulement le gouvernement central, mais
aussi les ministères des diverses branches d’activités, les conseils in­
dustriels centraux, les administrations régionales et locales et les
entreprises elles-mêmes, possède son propre service de planification.
274. A chacun de ces échelons, les organismes planificateurs sont
en principe conçus comme des organes consultatifs subordonnés à
l’administration dont üs relèvent. Tous les membres des organes
planificateurs, à l’échelon ministériel, régional et local, sont nommés
par l’organe administratif correspondant, qui dirige leurs travaux et
approuve leurs plans avant de les soumettre aux autorités administra­
tives supérieures. Les organes planificateurs, aux échelons inférieurs,
ne sont donc pas officiellement rattachés aux organes planificateurs
supérieurs; ils ne sont pas juridiquement responsables devant eux et
ne font pas partie d’un ensemble unique et homogène de services de
planification. En pratique, cependant, les organes planificateurs infé­
rieurs ont toujours travaillé en coopération étroite et directe avec les
services de planification des organes administratifs supérieurs.
Comme il fallait intégrer tous les plans particuliers dans un plan
unique pour chaque région et pour chaque secteur, puis finalement
dans im plan national, des liens de coopération et de consultation se
sont établis directement entre les organismes planificateurs aux di­
vers échelons.

2. — A t t r ib u t io n s d e s o r g a n is m e s p l a n if ic a t e u r s

275. Les organismes planificateurs ont en général pour princi­


pales attributions d'élaborer les plans, de surveiller leur exécution et
de conseiller les organes exécutifs sur les questions de principe que
soulèvent la préparation et l’exécution des plans. L’exécution des plans
et la gestion de l’économie incombent au gouvernement central, aux
ministères et à leurs organes subsidiaires, ainsi qu’aux administra­
tions régionales et locales. En règle générale, les organes planifica­
teurs centraux ne disposent pas de pouvoirs de décision. L’Etat, toute­
fois, leur a délégué celui d’apporter au plan des modifications secon­
daires ou de réallouer les réserves de matières au cours de son exécu­
tion. En principe, cette délégation ne porte que sur les modifications
qui ne changent pas les grandes lignes du plan national.
276. En Union soviétique, l’organisation et les attributions des
organismes planificateurs sont largement déterminées par l’étendue
du pays et le fait qu'il s'agit d’une union de plusieurs républiques. Les
traits caractéristiques du système de préparation et d’exécution des
plans en Union soviétique on été très fortement accusés par les change­
ments intervenus au cours des dernières années. C’est pourquoi, dans
les paragraphes qui suivent, les systèmes appliqués à l’Union sovié­
tique et dans les autres économies planifiées sont présentés séparé­
ment.
277. Le système de planification en Union soviétique comprend
les organes suivants:
a) Les organes généraux de planification de l’Union, des républi­
ques et des collectivités locales, chargés de la planification d’ensemble
dans leurs territoires respectifs;
b) Les organes planificateurs des ministères et départements,
chargés des activités économiques de leur ressort;
c) Les organes planificateurs des sovnarkhozes et ceux des con­
seils de production agricole, respectivement chargés de la production
industrielle et agricole dans leurs territoires;
d) Les services de planification des entreprises.
278. Depuis 1957, d’importantes modifications sont intervenues
dans les attributions des divers organismes chargés de la planification
d’ensemble. La plus importante a été une extension notable des tâches
incombant aux commissions du plan d’Etat, dites Gospîans des répu­
bliques fédérées. Tandis que ces commissions s’occupaient jusqu’alors
surtout de cette partie de l’industrie des républiques qui produit des
biens de consommation, des matériaux de construction et des bois
d’œuvre, elles dressent maintenant des plans portant sur le développe­
ment de toutes les branches d’activité. Ainsi, les conditions ont été
créées pour la planification du développement intégré de l'économie
et pour l’utilisation maximum des ressources naturelles et humaines
de chaque république.
279. En même temps, de nouveaux organes chargés de l’adminis­
tration et de la planification des industries ont été créés dans les
régions d’administration économique: ce sont les conseils économi­
ques territoriaux ou sovnarkhozes. Il n’en existe pas dans les régions
où l’industrie n’est pas assez développée. Les sovnarkhozes travaillent
exclusivement dans les limites des plans d’Etat dressés par les orga­
nes de planification des républiques et de l’Union. Le contrôle des
constructions leur appartenait au début, mais il a été attribué ensuite
aux commissions de construction des républiques, responsables de­
vant la commission des constructions de l’URSS.
280. Les plans destinés aux sovnarkhozes et aux républiques
fédérées sont dressés d’après les tâches assignées à l’ensemble du pays
par le plan de développement économique unifié, approuvé par le
Gouvernement central. Les Gosplans des républiques fédérées travail­
lent en contact avec les sovnarkhozes, les ministères et administra­
tions des républiques et les organes régionaux et locaux de plani­
fication.
281. Les services de planification qui relèvent des conseils exis­
tant à chaque échelon des divisions administratives dans les républi­
ques fédérées jouent également un rôle important. Ces services appor­
tent leur concours aux Gosplans des républiques pour les travaux
d’intérêt économique général, comme la préparation de la balance
d’énergie pour l’ensemble de la région ou du territoire, l’élaboration
de projets de plans pour la production de toutes les entreprises indus­
trielles de cette région ou territoire, et rétablissements d’une balance
de main-d’œuvre.
282. Les plans pour les activités économiques générales, comme
les finances, le commerce extérieur ou les transports, qui ne dépen­
dent pas exclusivement ou directement des républiques fédérées, sont
préparés par les ministères de l’Union et autres organismes centraux.
Avec l’aide de leurs divisions du plan, les ministères préparent ces
projets de plans pour les soumettre au Gosplan de l’URSS.
283. Les organes de financement et de crédit prennent une part
active à la planification économique. Chaque année, le Ministère des
finances de l’URSS prépare, d’après les objectifs fixés par le plan éco­
nomique national annuel, un projet de budget public de l’URSS,
qu’il présente au gouvernement. La Banque d'Etat de l’Union établit
de même des projets de plans des crédits et encaisses. Le Ministère
du commerce extérieur dresse un projet de plan annuel d’exportations
et d'importations, ainsi qu’un projet de plan des devises pour les
opérations de commerce extérieur. Le Gosplan de l’URSS étudie la
coordination de tous ces plans avec le plan national annuel, et pré­
sente à l’Etat ses observations y relatives. Bien que les plans finan­
ciers se fondent à l’origine sur les plans économiques nationaux, leur
examen peut indiquer la nécessité d’apporter certaines modifications
à ces derniers.
284. En 1962 et 1963, la structure administrative de la gestion de
l'économie nationale a subi une nouvelle modification touchant l’orga­
nisation des organes planificateurs. Un Conseil supérieur de l’économie
nationale, nouvellement créé et directement responsable devant le
Conseil des ministres, est maintenant chargé de la gestion de l’indus­
trie et de la construction et de la planification d’ensemble. La gestion
de l’agriculture relève d’une commission distincte, qui est également
directement responsable devant le Conseil des ministres. Le Conseil
supérieur de l’économie nationale a sous son autorité la Commission
centrale de planification, le Conseil économique national de l’URSS
chargé de gérer l’industrie, la Commission de construction de l’URSS,
la Commission centrale de coordination de la recherche scientifique
et les commissions centrales de production qui s’occupent d’un petit
nombre d’industries déterminées.
285. Le Conseil supérieur de l’économie nationale a pour rôle
principal de coordoner les activités de tous ces organes. Ses décisions
en matière d’exécution des plans font loi. Le Conseil économique na­
tional de l’URSS est chargé de l’exécution des plans économiques
nationaux autres que ceux qui se rapportent à l’agriculture et à la
construction. Il s’en acquitte par l’intermédiaire des conseils écono­
miques de République et interrépubliques, qui, à leur tour, dirigent
les activités des sovnarkhozes, quand il en existe plusieurs dans ime
république donnée. Le Conseil s’acquitte également de ses tâches
d’exécution des plans économiques par l’intermédiaire des ministères
et administrations de l’Union. En même temps, il remplit certaines
fonctions de planification, surtout en matière de répartition des ap­
provisionnements, dans le cadre des plans annuels. La Commission
de construction du Conseil des ministres de l’URSS est chargée
d’administrer les constructions essentielles. Les commissions centra­
les de production, dont la plupart relèvent directement du Conseil
supérieur de l’économie nationale, s’occupent de la gestion des entre­
prises dans quelques industries déterminées placées sous le contrôle
direct du Conseil supérieur.
286. Le Gosplan de l’URSS et le Conseil économique national de
l’URSS travaillent en rapports étroits avec les commissions industriel­
les centrales, dont les présidents siègent à leurs conseils. Ces commis­
sions ont pour attribution principale d’élaborer des projets en vue de
l’élaboration d’une politique technique unifiée et de dresser les plans
de recherche scientifique et de travaux expérimentaux. Ce sont elles
qui sont responsables de l’adoption rapide, dans les entreprises, des
nouvelles machines et techniques.
287. Dans les républiques fédérées, les Gosplans, les conseils éco­
nomiques nationaux et les comités de la construction relèvent d’une
double autorité: celle des organes correspondant du gouvernement
central et celle des gouvernements des républiques. Le Gosplan de
l’URSS est chargé de préparer les plans à long et moyen terme ainsi
que de les répartir en plans annuels; il lui incombe également de cor­
riger ces plans annuels d’après l’expérience et d’après le propositions
faites par les Gosplans des républiques fédérées.
288. Dans d’autres pays à économie planifiée, les liens institution­
nels entre les divers organes de planification ont été tout à fait ana­
logues à ceux qui existaient en Union soviétique, mais l’appareil de
planification s’est révélé différent à bien des égards, ce qui était dû
en grande partie à des différences dans l’organisation de la gestion.
En Union soviétique, la gestion de l’économie est passée des ministè­
res centraux aux collectivités locales, alors que, dans d’autres pays
à économie planifiée, les ministères centraux ont, en principe, con­
tinué à diriger l’activité des entreprises. Par suite, les organismes
planificateurs qui se trouvent directement au-dessous des organes
centraux de planification sont des organes ministériels qui s’occupent
d’une branche donnée de l'activité économique; on trouve ensuite, en
descendant l'échelle, les services de planification des associations
d’entreprises et les services de planification des entreprises elles-
mêmes.
289. Les plans des entreprises relevant des ministères centraux
sont élaborés sous la surveillance des organismes planificateurs minis­
tériels. Contrairement à ce qui se passe en Union soviétique, où toutes
les entreprises situées dans un territoire donné relèvent des services
de ce territoire, dans d’autres pays, les organes régionaux et locaux
de planification s’occupent surtout de la planification d’activités d’in­
térêt local : logement, services publics, et production pour les besoins
locaux. Dans certains pays, toutefois, les attributions de ces organes
sont plus étendues. D’ailleurs, cette répartition des fonctions n’est pas
absolue. Comme les entreprises qui relèvent des ministères vendent
sur place une partie de leur production, utilisent des marchandises
produites sur place et recrutent sur place la main-d’œuvre, leurs acti­
vités ne peuvent jamais être complètement indépendantes des plans
et des politiques des autorités locales. Par suite, les services régionaux
et locaux de planification n’ont pu se contenter d’incorporer dans
leurs plans les tâches que les ministères avaient assignées aux entre­
prises relevant d’eux, et ils ont dû élaborer des plans régionaux ou
locaux en coopération directe avec les divers ministères et avec l’orga­
nisme de planification central.

3. — S t r u c t u r e in t e r n e d e s o r g a n is m e s p l a n if ic a t e u r s

290. La structure interne de l’organisme planificateur central est


identique sur les points essentiels dans tous les pays à économie
planifiée. L’organisme s’est toujours composé d’une commission et de
son secrétariat. Dans quelques pays, ses travaux courants sont dirigés
par un présidium composé du président et des vice-présidents de la
commission; dans d’autres, comme en Union soviétique, les chefs des
départements de l’organisme siègent également à l’organe directeur.
Le secrétariat se compose généralement de deux groupes principaux
de départements: ceux qui sont chargés de l’élaboration des plans
pour tel ou tel secteur ou pour telle ou telle branche d’activité, et ceux
qui sont chargés de coordonner ces plans et de les intégrer dans des
plans d'ensemble. Le nombre des départements de la première caté­
gorie a en général varié selon que les objectifs fixés à l’échelon central
avaient un caractère plus ou moins général et selon l’importance
attachée à telle ou telle branche d’activité.
291. Les activités de planification ne se limitent cependant pas,
dans les pays à économie planifiée, aux travaux des organismes plani­
ficateurs. La planification fait aussi appel à un grand nombre d’insti­
tuts de recherche s’occupant de l’analyse économique, d’études des
problèmes méthodologiques et d’études techniques des diverses bran­
ches d’activité. Certains de ces instituts sont directement subordonnés
aux organismes planificateurs. Mais les organisations de planification
sont aussi autorisées à faire appel à des institutions autonomes,
comme les instituts de recherche de l’Académie des sciences, les imi-
versités ou les instituts créés par des ministères ou de grandes entre­
prises. Le caractère très vaste de la planification et la subordination
de toutes les institutions de recherche à l’Etat facilitent la mobilisa­
tion de toutes les compétences en vue de la solution des problèmes
techniques et économiques qui se posent aux organes de planification.

4. — L ’APPAREIL d e p l a n i f i c a t i o n e n YOUGOSLAVIE

292. En Yougoslavie, le cadre institutionnel de la planification est


assez différent de celui des autres pays à économie planifiée, consé­
quence directe des méthodes de gestion et de planification propres
à la Yougoslavie, qu’on a déjà décrites. La conséquence immédiate de
ces méthodes a été l’absence de liens administratifs hiérarchiques
étroits entre les organismes planificateurs et les entreprises. Toute­
fois, la consultation et la coopération sont actives entre les organes
planificateurs aux différents échelons, ainsi qu’entre les entreprises,
soit en particulier, soit collectivement, comme encore entre les syndi­
cats d’une part et les organismes planificateurs de l’autre.
293. En Yougoslavie, l’organe planificateur suprême est l’Institut
fédéral de planification, qui a été chargé de l’élaboration du plan fédé­
ral soumis au gouvernement et aux assemblées législatives. L'Institut
n’a aucun pouvoir exécutif; ses attributions sont techniques et consul­
tatives. Outre l’élaboration des plans à long terme et des plans annuels,
l’Institut analyse le développement de l’économie et ses perspectives
d’avenir, formule des recommandations sur la politique à suivre pour
l’exécution des plans et met au point des méthodes de planification.
Des organismes locaux de planification existent dans les républiques,
dans les districts et dans les circonscriptions administratives locales
(« communes »); mais, dans les communes les moins développées, il
n’y a pas d’organisme planificateur distinct et ce sont des sections de
planification de l’administration économique qui ont élaboré les
plans les concernant. Les organismes planificateurs des républiques
ont élaboré les plans concernant le territoire de leur ressort en procé­
dant de la même manière que l’Institut fédéral, et les ont soumis aux
autorités des républiques pour approbation.
294. Les organismes planificateurs des républiques coopèrent
étroitement avec l’Institut fédéral de planification à l’élaboration des
plans. En même temps, des consultations sur la politique de planifica­
tion se poursuivent à l’échelon politique, c’est-à-dire au gouvernement
fédéral, où les républiques ont des représentants permanents. Ainsi,
bien que les républiques ne soient nullement tenues en droit de sou­
mettre leurs plans à l’approbation des autorités supérieures ou des
organes de planification, ces plans s’élaborent selon les mêmes poli­
tiques générales que le plan fédéral. Des méthodes analogues de co­
opération existent entre organismes planificateiurs des communes et
des républiques, de même qu’entre communes et entreprises. Ainsi,
aux divers stades d’élaboration des plans, les organes de gouverne­
ment se trouvent consultés sur les idées directrices, les objectifs prin­
cipaux et les instruments de la politique de développement. Cette
coopération assure, dans l’élaboration des plans, un accord mutuel
sur les principaux problèmes et buts du développement économique,
de même que sur les objectifs et les instruments de la politique éco­
nomique. Les grandes lignes de la politique économique, une fois
fixées par le plan fédéral et approuvées par le Parlement, fournissent
le cadre des plans de tous les organes inférieurs.
Chapitre 4

PLANIFICATION NATIONALE
ET MESURES INTERNATTONAT.e s

295. Il ne fait aucun doute que l'intérêt de plus en plus grand


que l’on porte à la planification vient de ce que tous les pays du
monde désirent accélérer leur croissance économique, améliorer les
niveaux de vie, diversifier leurs structures économiques et élever leur
niveau de productivité. Dans les pays sous-développés, la planification
est même devenue un des principaux moyens de mobiliser toutes les
ressources disponibles en vue du développement économique, de re­
modeler les institutions économiques et sociales et de lutter contre
les maux tenaces d’une indigence largement répandue. L’orientation
précise que chaque pays donne à son expansion dépend nécessaire­
ment des circonstances, des besoins et des aspirations qui lui sont
propres. Au fur et à mesure qu’un nombre croissant de pays — sous-
développés aussi bien que développés, pays ayant ou non une éco­
nomie de marché — adoptent la planification, le monde prend mieux
conscience de l’interdépendance des Etats et de la nécessité de trou­
ver des moyens et des institutions qui expriment cette interdépen­
dance d’une façon plus concrète et plus définie, pour le plus grand
bien de toutes les nations. La conscience aiguë du rôle et des possibi­
lités de la coopération économique internationale s’est manifestée
dans toutes les assemblées mondiales de même que sur le plan régio­
nal. La diversité croissante des activités de l’ONU et de ses institu­
tions spécialisés, dans de nombreux domaines, et d’autres évolutions
récentes en témoignent clairement.
296. Extirper la pauvreté et refaire leur structure économique et
sociale, c ’est, pour les pays sous-développés, une entreprise ardue et
de longue haleine. La nature de la tâche diffère certes selon les con­
ditions de chaque pays, notamment ses dimensions, sa population, ses
ressources naturelles et humaines, la structure de ses institutions et
son stade de développement; mais certains problèmes sont commtms
à la plupart des pays sous-développés, par exemple le besoin urgent
de techniques et de connaissances nouvelles, le besoin d’équipement,
et celui de débouchés pour les produits, primaires et autres. En s’ef­
forçant d’exécuter leurs plans — qui sont d’ailleurs modestes par
rapport aux besoins — les pays sous-développés se voient contraints
d’accélérer leur croissance économique et de répondre à des exigences
accrues dans toutes les directions, exigences qui souvent dépassent
leur capacité d’épargne actuelle. Ils ont un besoin à la fois urgent et
crucial de ressources en devises tout en devant faire face, de temps
à autre, à des problèmes à court terme dus à leur balance des paie­
ments. De plus, les conditions actuelles des échanges mondiaux font
que la demande de leurs produits primaires, de la part des pays déve­
loppés, est soumise à des fluctuations considérables en prix et en
volume, et que les produits manufacturés qu’ils seraient à même d’ex­
porter sont difficiles à écouler. Tout ceci a pour effet de rendre leur
commerce extérieur plus incertain, de réduire leur capacité de gagner
des devises et, en augmentant leur dépendance à l’égard de l’étranger,
de rendre plus difficile l’exécution de leurs plans de développement.
En d’autres termes, pour que les plans nationaux des pays sous-déve­
loppés puissent atteindre leurs objectifs et pour que le processus de
développement et de reconstruction puisse être accéléré au maximum,
il faut que ces plans soient appuyés par une série de mesures éclairées
prises sur le plan international et par tous les Etats. Les enquêtes
économiques annuelles de l’Organisation des Nations Unies et d’autres
études ont révélé les dimensions mondiales du problème de la pau­
vreté. L’évolution économique de la dernière décennie indique des
disparités croissantes entre pays riches et pays pauvres, lesquelles ne
peuvent qu’intensifier et prolonger la lutte actuelle des nations sous-
développées. Renverser cette tendance et créer les conditions sociales,
économiques et autres, nécessaires à la croissance rapide des pays
sous-développés a donc été considéré à juste titre comme im objectif
majeur de la Décennie des Nations Unies pour le développement et
comme le but commun à toutes les nations.

1. — E v o l u t io n e t in s t a b il it é d u c o m m e r c e e x t é r ie u r

297. Pour les économies d’entreprise privée et les économies


mixtes. Tune des tâches les plus difficiles et les plus importantes de
la planification a été de faire entrer le commerce extérieur dans les
plans nationaux et d’exécuter ces plans en tenant compte de l’évolu­
tion de ce commerce. La raison essentielle en est que les tendances
du commerce extérieur sont difficiles à prévoir, car elles dépendent
non seulement de la situation intérieure, mais aussi des conditions et
de l’évolution économique dans d’autres pays. Dans les pays d’éco­
nomie planifiée, les plans de commerce extérieur sont partie inté­
grante des plans nationaux et, depuis quelques années, une coopéra­
tion économique plus poussée, tant entre ces pays eux-mêmes qu’avec
les pays sous-développés, exerce une influence accrue sur le volume
et la structmre du commerce extérieur et sur les plans correspondants.
298. On peut noter à cet égard que les accords commerciaux à
moyen terme ont été un élément important des relations économiques
entre les pays à économie planifiée et les pays à économie mixte ou
à économie d’entreprise privée, notamment les pays sous-développés.
D’une part, ces accords ont permis aux économies planifiées de mieux
intégrer leur commerce extérieur dans leurs plans à moyen terme;
d’autre part, ces accords ont également profité, à bien des égards, aux
pays sous-développés, en donnant plus de stabilité à leurs échanges
et en facilitant la mise en œuvre de leurs plans de développement.
299. Dans presque tous les pays, le commerce extérieur absorbe
une importante proportion du produit intérieur et constitue aussi une
source importante de l’offre sur le marché intérieur; aussi, malgré les
difficultés, la planification nationale ne peut être vraiment menée à
bien si l’on ne tient pas un compte exact du commerce extérieur. La
chose est déjà vraie des économies développées d’entreprise privée;
elle l’est encore plus pour les pays sous-développés. Ce n’est pas seule­
ment que, dans nombre de ces pays, le volume de la demande exté­
rieure conditionne le taux de croissance économique intérieure, en
raison de l’étendue du secteur d’exportation. Un fait d’importance
plus générale est que, dans la plupart des pays sous-dévelc^pés, à leur
stade actuel de développement, l’essentiel des biens d’investissement
n’est pas produit sur place, mais acheté aux pays avancés. Quelque
progrès a certes été réalisé par un certain nombre de ces pays, tou­
chant l’accroissement de la production intérieure de ces biens, mais
les besoins se sont accrus rapidement aussi. En général, ces pays sont
restés relativement aussi tributaires des importations; souvent, ils le
sont devenus davantage. Les besoins en devises se sont également
accrus, car il fallait répondre à certaines exigences courantes de ca­
ractère essentiel; c’est ainsi que, pour pouvoir utiliser à plein la capa­
cité disponible, il fallait souvent être sûr que l’on disposerait d’appro­
visionnements suffisants en matières premières importées ou encore
en pièces de rechange pour l’équipement. Ainsi, quelle que soit la part
des exportations dans la vie économique, ce sont les disponibilités en
devises qui ont surtout limité le taux de développement économique
planifié dans les pays sous-développés.
300. C'est cette constatation qui a poussé nombre de pays sous-
développés à placer l’évolution escomptée des disponibilités en devises
à la base de leurs plans économiques. Dans la préparation des plans,
on s’est notamment préoccupé de libérer des ressources croissantes
de devises en vue du développement, par exemple pour l’importation
de biens d’investissement et de matières premières essentielles. Les
programmes d’investissements ont donné la priorité à la création
d’industries destinées à remplacer des importations ou à développer
les exportations. Si, dans une certaine mesure, ces politiques ont pro­
duit les résultats escomptés, l’évolution défavorable de leur commerce
d’exportation est demeurée une source de grave préoccupation pour
les pays en voie de développement. En ce qui concerne les produits
d’exportation de ces pays, la structure de la demande mondiale a subi
de profondes modifications pendant les dernières décennies. La de­
mande de la plupart des denrées alimentaires étant assez peu élasti­
que par rapport aux revenus, elle a augmenté beaucoup moins vite
que ne l’ont fait les revenus dans les pays avancés. Parallèlement, les
progrès techniques ont permis d’utiliser plus économiquement les
matières premières et de mettre au point des produits synthétiques
de remplacement. Sous l’action combinée de ces forces, le taux de
croissance des exportations traditionnelles des pays en voie de déve­
loppement s’est trouvé ralenti. D’autre part, la capacité de production
de nombreux produits de base a été fortement développée à la suite
des pénuries éprouvées au cours des années antérieures. Cet accroisse­
ment a contribué, à son tour, à élargir l’écart entre les mouvements
des prix mondiaux des produits primaires et ceux des prix des articles
manufacturés. La détérioration des termes de l'échange, en réduisant
leur capacité d’importation, a encore augmenté les difficultés des pays
sous-développés. D’autre part, certains des plus industrialisés d’entre
eux ont accordé une attention croissante à la nécessité d’accroître les
exportations d’articles manufacturés afin de compenser cette évolu­
tion défavorable.
301. Sans compter la très lente croissance à long terme de la
demande extérieure pour leurs exportations traditionnelles, les pays
sous-développés connaissent, à court terme, une instabilité marquée
dans leurs recettes d’exportations, ce qui fait qu’ils ont encore plus
de peine à adapter leurs plans à une évolution rapide. Certains pays
ont cherché à atténuer l’effet de l’instabilité extérieure sur leur éco­
nomie intérieure en faisant passer les exportations par des offices de
commercialisation, tandis que d’autres recouraient à des droits d’ex­
portation mobiles. Là où l’on a instituté le contrôle des changes,
l’emploi de budgets en devises, sujets à revision périodique au bout
de quelques mois, compte tenu de la situation de la balance des paie­
ments, a également aidé à assurer un ajustement ordonné des moyens
aux besoins. Par diverses mesures nationales, on a cherché à atténuer
les fâcheux effets de cette instabilité, mais ce que peuvent faire séparé­
ment les pays sous-développés se heurte à d’étroites limites. Dans quel­
ques cas, im pays sous-développé a réussi à conclure avec son principal
client im contrat à long terme pour la vente d’une quantité fixée d’un
produit majeiu- d’exportation, à un prix garanti. Mais ces cas sont rares.
C’est cette constatation qui a fait conclure au cours de l’après-guerre,
plusieurs accords internationaux sur les produits, prévoyant des con­
trats multilatéraux d’achat et de vente, des contingents d’exportation et
des stocks tampons et qui a fait créer des organes de délibération et de
consultation internationales sous forme de conseils et de groupes
d’étude de produits. Mais, sur le plan pratique, le progrès a été assez
lent et la question se pose aussi de savoir si la méthode des accords
par produit suffit à répondre aux exigences du développement éco­
nomique d’ensemble. A ce propos, le Conseil économique et social
a noté avec satisfaction les nouvelles dispositions prises par le Fonds
monétaire international pour venir en aide aux pays membres dont
les exportations connaissent un recul temporaire, de même que le
fait que toute la question du financement compensatoire doit figurer
à l’ordre du jour de la prochaine Conférence des Nations Unies sur
le commerce et le développement.
302. Ce n’est pas seulement par leur montant et leur instabilité
que les échanges extérieurs ont posé des problèmes particulièrement
difficiles aux pays sous-développés. Comme on l’a vu dans un chapitre
précédent, incorporer le commerce extérieur aux plans nationaux
oblige également à décider quelles industries d’exportation ou quelles
industries de remplacement des importations il vaudra mieux déve­
lopper. Pendant les débuts du développement, les plans ont tendu à se
concentrer sur la croissance équilibrée dans les limites du marché
intérieur, surtout à cause des possibilités limitées d’une spécialisation
internationale. Il y a, certes, des exceptions, par exemple les pays qui,
disposant de ressources spéciales, sont capables de produire des biens
industriels intermédiaires sur une échelle qui dépasse de beaucop
leurs besoins intérieurs actuels. A la longue, toutefois, le processus de
développement économique entraîne nécessairement des changements
dans la structure traditionnelle du commerce extérieur. A mesure que
les pays accèdent à des stades plus évolués, il devient souhaitable, et
même économiquement nécessaire, d’accorder plus d’attention aux
possibilités d’accélérer la croissance en se spécialisant dans des bran­
ches nouvelles de production. Ceci est d’autant plus important que,
comme on l’a déjà relevé, bien des pays sous-développés ont eu de la
peine à accroître leurs exportations primaires, la demande extérieure
étant limitée. Dans certains cas, en outre, sous le coup du développe­
ment économique, et de la hausse des revenus intérieurs, les surplus
exportables de matières premières ont été réduits par l’expansion de
la demande intérieure de ces produits. Les changements dans la struc­
ture du commerce extérieur ne s’opèrent d’ailleurs pas sans soulever
des problèmes et des difficultés pendant la période de transition. De
gros obstacles doivent être surmontés par le pays sous-développé qui
veut pouvoir affronter la concurrence sur les marchés mondiaux de
produits manufacturés. Depuis quelques années, on cherche, dans les
pays développés, des marchés pour certains des articles manufacturés
que plusieurs pays sous-développés sont de plus en plus aptes à ex­
porter; cette recherche a montré la nécessité, pour les pays avancés,
de pratiquer une politique plus libérale qui facilite l’accès à leurs
marchés. L’opinion s’est également fait jour que les pays avancés
devraient réserver délibérément des débouchés aux articles manufac­
turés que les pays sous-développés sont en mesure de produire ren-
tablement.

2. — L e s b e s o in s e n c a p it a u x é t r a n g e r s

303. Il apparaît que, dans les pays sous-développés, même les


efforts les plus acharnés d’augmentation des ressources en devises par
le développement des exportations et le remplacement des importa­
tions n’ont pas suffi à fournir les montants nécessaires à l’exécution
des plans. Ces plans reposaient d’ailleurs généralement sur l’hypothèse
qu’aux sommes en devises gagnées par les exportations ou économi­
sées par le remplacement des importations s’ajouterait un courant
croissant de capitaux étrangers, privés ou publics. Les capitaux de ce
genre s’accompagnent d’ailleurs souvent d’un apport important de com­
pétences techniques et de connaissances, qui, elles aussi, sont rares
dans les pays sous-développés.
304. Ayant besoin de fonds étrangers, les pays sous-développés
ont généralement adopté toute ime série de mesures pour en augmen­
ter le courant. Ils ont recherché la collaboration de capitaux privés
étrangers avec des entreprises privées aussi bien que publiques. La
tendance qu’ont les capitaux privés étrangers, dans certains cas, de
limiter leur participation au secteur privé a tendu à réduire leur rôle
dans l'exécution des plans de développement des pays sous-développés.
Aussi est-il souhaitable que, dans leur politique générale, les institu­
tions internationales et les pays exportateurs de capitaux adoptent
des vues plus larges, en harmonie avec les plans nationaux. Afin d’at­
tirer les capitaux privés étrangers, la plupart des pays ont donné des
assurances relatives aux droits de propriété, comme à l’exportation
des bénéfices et au rapatriement du capital; en outre, divers types
d'avantages fiscaux ont été offerts aux investisseurs étrangers. Malgré
ces mesures, les capitalistes étrangers s’abstiennent souvent à cause
des risques politiques qu’ils attribuent à des entreprises qui les tente­
raient par ailleurs. Diverses propositions ont été avancées pour sur­
monter ces difficultés. On a songé à un système d'assurance multi­
latérale pour couvrir les risques en question. Mais comme ces risques
sont très difficiles à évaluer, un système de ce genre se heurte à de
grandes difficultés pratiques. Une autre solution, qui semble avoir de
meilleures chances de réussir, serait de formuler un code des investis­
sements internationaux qui soit largement acceptable et qui pose des
règles touchant les relations entre les autorités publiques d’un pays
et les investisseurs étrangers. Ces règles fixeraient le statut général
des capitaux privés étrangers et donneraient le même genre de garan­
ties que celles qui sont accordées actuellement par beaucoup de pays
sur une base bilatérale. Elles énonceraient, en outre, les conditions aux­
quelles les investisseurs devraient se plier, par exemple, quant à la
publicité et aux vérifications nécessaires. D’autres règles pourraient
s'appliquer aux entreprises mixtes associant le capital privé étranger
au capital national d’origine privée ou publique, comme on l’a vu plus
haut. Il faudrait s’entendre sur les institutions de conciliation et d’ar­
bitrage destinées à régler les différends qui pourraient surgir entre
les autorités publiques et les capitalistes privés étrangers. Le code en
question ne lierait pas les partenaires en train de négocier, mais son
existence même serait de nature à faciliter les négociations et à ré­
duire les incertitudes qui, à l’heure actuelle, empêchent souvent
d’aboutir à des résultats positifs.
305. On doit admettre, néanmoins, que la meilleure des réglemen­
tations n’empêchera pas ime distribution inégale du courant internatio­
nal des capitaux privés. Les capitaux privés sont allés et iront princi­
palement aux pays dotés des ressources qui font l’objet d’une demande
mondiale active. Plusieurs pays souffrent même d’une fuite de leur
épargne privée nationale. Un contrôle efficace des échanges ne suffit
pas toujours à enrayer ce mouvement. Ces faits ont conduit certains
observateurs à suggérer que les gouvernements des pays exportateurs
de capitaux devraient chercher activement à mettre au point des
mesures visant à encourager le courant des capitaux privés, et à
l’adapter aux exigences des plans des pays sous-développés. La Société
financière internationale pourrait encore développer ses efforts de
garantie afin de stimuler le flot des capitaux privés et elle pourrait
relier plus largement ces efforts aux plans de développement des
divers pays. D’autres suggestions ont été avancées en ce qui concerne
la nécessité d’encourager les institutions financières appropriées des
pays en voie de développement à émettre des emprunts sur les mar­
chés de capitaux des pays développés. Ces suggestions doivent prendre
une forme plus concrète, grâce aux efforts des institutions internatio­
nales et à ceux des pays avancés, et il convient de s’employer prompte­
ment et sérieusement à faciliter l’accès des grands marchés de capi­
taux aux gouvernements et aux institutions des pays sous-développés
qui ont entrepris le développement planifié de leur économie.
306. Du fait de la répartition inégale et de l’incertitude des ap­
ports de capitaux privés, l’assistance économique officielle a joué un
rôle grandissant dans l’accélération de la croissance économique des
pays sous-développés. Cette assistance comprend celle des institutions
internationales aussi bien que l’aide accordée sur une base bilatérale
tant par les économies avancées d’entreprise privée que par les éco­
nomies planifiées. Les dons et prêts publics ont, en règle générale,
tendu à compenser la concentration marquée des courants de capitaux
privés. De fait, sans cette aide officielle, les plans de nombreux pays
qui, ces dernières années, n’ont que peu ou aucunement bénéficié du
courant international de capitaux privés, se seraient trouvés compro­
mis. D’autre part, à mesure que le rythme du développement s’accroît
grâce aux efforts plus poussés des pays sous-développés et grâce à une
assistance extérieure plus substantielle de la part d’autres gouverne­
ments et des institutions internationales, le courant des capitaux
privés pourra également s’en trouver stimulé.
307. L’assistance bilatérale offerte par les économies avancées
d’entreprise privée a joué un grand rôle dans l’aide au développement
de nombreux pays, et elle semble devoir continuer à le faire pendant
un certain nombre d’années. On admet généralement qu’elle est de
grande valeur et qu’il est nécessaire de l’élargir encore. Néanmoins,
ces dernières années ont mieux mis en lumière certaines limitations
inhérentes aux méthodes et à la conception actuelles de l’assistance
économique bilatérale, et, à l’heure actuelle, les préférences vont net­
tement à l’octroi d’une part croissante de l’assistance économique sur
une base multilatérale et internationale. L’assistance prêtée par un
pays à un autre a tendu de plus en plus à limiter les achats au pays
donateur; cette pratique a, dans l’ensemble, tendu à rendre le déve­
loppement plus coûteux. Les difficultés de balance des paiements des
pays donateurs se sont souvent réfléchies dans les modalités et condi­
tions des crédits qu’ils accordaient aux pays sous-développés. L’aide
s’étant limitée presque exclusivement à des projets déterminés néces­
sitant des biens d’équipement, l’emploi des ressources en devises s’est
trouvé soumis à des règles assez rigides, de sorte que la balance des
paiements de bien des pays donataires s’est détériorée. On peut même
penser que la part trop large faite à l’assistance bilatérale a retardé une
attaque concertée, de la part des pays avancés, contre les problèmes
de balance des paiements; ce retard a été préjudiciable aux pays sous-
développés. De plus, on ne saurait nier que l’assistance bilatérale
puisse être facilement influencée par des considérations ou des vues
non économiques.
308. Dans ces conditions, les efforts déployés par la Banque inter­
nationale pour la reconstruction et le développement en vue d'aider
les pays donateurs à coordonner leur assistance économique en for­
mant des consortiums ou des groupes consultatifs pour une aide
multilatérale aux pays sous-développés, et en vue d’élargir le champ
d’application de ses propres emprunts et de ceux qui sont accordés
à des conditions plus avantageuses par l’Association internationale
pour le développement, sont les bienvenus et méritent d’être appuyés
davantage par les pays membres. De son côté, le Fonds spécial des
Nations Unies est l’amorce importante du vaste système d’assistance
économique internationale par le canal des Nations Unies qui est pré­
conisé depuis longtemps par les pays sous-développés et en leur nom.
Dans ce domaine, certains ajustements seront nécessaires, pendant
quelque temps, mais il n’y a guère de doute que l’extension des méca­
nismes multilatéraux ou internationaux d’assistance économique aux
pays sous-développés est destinée à accroître l’efficacité de l’aide, â
accélérer le développement de ces pays, et même à faciliter la solution
de problèmes importants qui se posent entre les pays avancés. D’ail­
leurs, sans une action internationale considérable en matière d’assis­
tance économique, les conditions de l’aide risquent de rester trop
onéreuses pour les pays sous-développés et il pourrait être difficile
d’élaborer une politique intégrée et conséquente au regard des divers
plans nationaux pris dans leur ensemble.
309. L’accroissement du potentiel économique de plusieurs éco­
nomies planifiées, au cours des dernières années, leur a également
permis d’accorder un volume croissant de crédits d’investissement à
un certain nombre de pays sous-développés. Jusqu’ici, fait caractéris­
tique, ces crédits ont été presque toujours liés à la fourniture
d’équipements par le pays créditeur; leur remboursement a été géné­
ralement prévu sous la forme de livraisons de produits de base par
le pays bénéficiaire. Jusqu’à présent, le taux d’intérêt de ces crédits
a été notablement moins élevé que les taux couramment pratiqués
sur les marchés de capitaux. La durée pour laquelle ces crédits sont
accordés diffère selon les cas. En gros, elle est plus longue que celle
des prêts accordés par les institutions commerciales de crédit, mais
plus courte que celle des prêts consentis par certaines organisations
financières internationales.
310. La nécessité de fixer les modalités de l’assistance économique
de telle manière qu’elle facilite le développement dans toute la mesure
du possible est reconnue de plus en plus, et elle a été soulignée en
particulier dans les organes de l’ONU et dans ses institutions spécia­
lisées, notamment la Banque internationale pour la reconstruction et
le développement. On fait valoir à cet égard, tout d’abord, qu’en
« liant » les crédits à des projets déterminés on risque parfois d’altérer
les priorités du plan et de négliger les besoins courants de l’économie
en pièces détachées et en matières premières, destinées notamment
à assurer la pleine utilisation des capacités de production. En
deuxième lieu, l’opinion unanime des pays sous-développés est qu’ils
atteindraient bien plus facilement les objectifs de leurs plans d’inves­
tissement et de production si l'assistance extérieure leur était as­
surée autant que possible pour la durée de leurs plans, et assez long­
temps à l’avance, au lieu d’être accordée sur une base annuelle et avec
des retards considérables, comme cela a été le cas jusqu’ici. Ces der­
nières années, en raison du fardeau de plus en plus lourd que représente
le service des empnmts étrangers, ces pays ont senti fortement le be­
soin de recevoir plus de dons en même temps que plus de prêts con­
sentis à des conditions (taux d’intérêt et durée de l’amortissement)
favorables au développement. Dans la situation actuelle, chaque plan
successif comporte des charges plus lourdes pour le remboursement
du capital et le service des intérêts, et laisse de moins en moins de
devises utilisables pour le développement. De ce fait, la reconstitution,
actuellement envisagée, des ressources de l’Association internationale
pour le développement constitue une étape essentielle dans la crois­
sance économique équilibrée des pays sous-développés. Pour ce qui est
du développement à long terme des pays sous-développés, les excédents
alimentaires de certains pays ont déjà joué un rôle important, et les
nouveaux efforts, bilatéraux ou internationaux, envisagés dans le Pro­
gramme alimentaire mondial pourraient apporter une contribution
précieuse à l’intensification du développement, notamment au regard
de l’agriculture, des programmes sociaux et d’une meilleure utilisation
des ressources en main-d’œuvre.
311. Etant donné que les plans de développement économique des
pays sous-développés dépendent dans une très large mesure de res­
sources croissantes en devises, provenant à la fois des recettes d’expor­
tation et de l’assistance extérieure, il importe que ces pays évaluent
exactement les besoin futurs en devises qui sont implicites dans ces
plans. Or, comme on l’a relevé plus haut, il s’en faut que tous les pays
aient été en mesure de surmonter les difficultés inhérentes à cette
évaluation. Les raisons en sont nombreuses. Même si toutes les don­
nées nécessaires étaient disponibles, c’est là une tâche longue et dif­
ficile, car elle exige une analyse détaillée de la composition, aussi bien
que du volume du produit et de la dépense intérieurs. Très souvent
d’ailleurs, les données nécessaires manquent dans une large mesure.
Les renseignements concernant le développement d’avant la planifica­
tion n’offrent qu’une base assez chancelante, puisqu’ils ne tiennent
pas compte de l’effet des nouveaux projets sur les besoins en devises. Il
est difficile de calculer cet effet à part, car il dépend de la forme
exacte que l’investissement lié à ces projets prendra dans le temps, de
la partie de cet investissement qui pourra être fournie par le pays
lui-même, des fluctuations imprévisibles du niveau des prix des biens
d’équipement étrangers, et de quantité d’autres facteurs variables. Il
est plus ardu encore d’évaluer les effets indirects de la mise en œuvre
des nouveaux projets. Néanmoins, les devises requises pour les pro­
grammes d’investissement et de production intérieure sont un élé­
ment essentiel du succès de ces programmes dans les pays sous-déve­
loppés, et il y a donc intérêt à tenter au moins une évaluation
approximative des besoins en devises. En effet, d’une part on risque
de ne pas atteindre les objectifs d’investissement si les besoins en de­
vises dépassent les prévisions, et, d’autre part, une meilleure estima­
tion initiale de ces besoins aurait pu faire envisager un volume moins
élevé d’investissement intérieur, et même peut-être, dans une certaine
mesure, une autre structure de cet investissement, ce qui aurait moins
pesé sur la balance des paiements. Là où l’effort de développement
envisagé représente déjà le minimum indispensable au regard des be­
soins, ce qui est souvent le cas, une évaluation plus exacte des besoins
en devises pourra permettre aux institutions internationales et aux
pays plus avancés de prendre une idée plus claire des dimensions du
problème et, par conséquent, d’entreprendre une assistance plus large
qu’ils ne se sentiraient tenus de le faire normalement.

3. — C o o p é r a t io n m u l t in a t io n a l e e t c o o r d in a t io n r é g io n a l e
DES PLANS ET DES POLITIQUES ÉCONOMIQUES

312. Une tendance, qui s’est affirmée ces dernières années, porte
des groupes de pays qui ont atteint sensiblement le même stade de
développement économique à resserrer les liens commerciaux et éco­
nomiques à l’intérieur du groupe. Le souci accru des avantages que la
spécialisation peut offrir pour l’expansion économique ordonnée a
ainsi conduit les pays sous-développés non seulement à chercher des
débouchés pour leurs produits manufacturés dans les pays avancés,
mais aussi à explorer plus largement les possibilités d’augmenter les
échanges entre eux. Ce mouvement a déjà donné deux résultats impor­
tants: la constitution de l’Association latino-américaine de libre-
échange, et la création, par cinq pays d’Amérique centrale, d’un mar­
ché commun qui a commencé à coordonner la politique commerciale
de ces pays. Entre les Etats membres des commissions économiques
de rONU pour l’Afrique, d’une part, et pour l’Asie et l’Extrême-Orient,
d’autre part, il y a eu également des débats prolongés sur les possibi­
lités de resserrer leurs liens et de développer les échanges intra-
régionaux.
313. L’action concertée de groupes de pays sous-développés sou­
cieux d’accélérer leur développement économique et de faciliter la
planification nationale ne s’est nullement limitée au commerce exté­
rieur. L’effort de coopération multinationale a également porté, par
exemple, sur l’aménagement de bassins fluviaux communs à plusieurs
pays, sur le développement intégré de certaines exportations de mine­
rai de fer et des ports et autres facilités de transport qu’elles utilisent
et sur la spécialisation dans la production de certaines denrées agri­
coles. La coopération en matière financière a conduit à créer des ban­
ques régionales de développement. Plus récemment, des mesures ont
été prises pour créer, en Afrique, en Amérique latine et en Asie, des
instituts régionaux de développement, qui constitueront des centres
régionaux de formation aux méthodes de planification ainsi que de
recherche et de diffusion de renseignements et qui, dans certains cas,
aideront à la préparation de plans nationaux. De même, on semble de
plus en plus conscient de la nécessité de coopérer davantage dans la
création de nouvelles capacités de production industrielle. Des gou­
vernements, en particulier dans les pays économiquement peu impor­
tants, où le marché intérieur est trop restreint pour permettre des
capacités de production rentables, envisagent une planification multi­
nationale, et non plus nationale, de l’industrie, afin de tirer parti des
économies d’échelle. Une telle spécialisation n’aboutit pas nécessaire­
ment à une évolution nettement divergente de l’industrialisation dans
les pays qui coopèrent; elle peut tout aussi bien s'appliquer à des
branches différentes d’une même industrie. Les pays d’Amérique cen­
trale ont déjà entrepris des travaux en vue d’une coopération de ce
genre. On voit ainsi que des forces sont à l’œuvre qui préparent
l’extension de la coopération régionale à tous les domaines de la plani­
fication économique.
314. Du côté des pays avancés à économie d’entreprise, l’Organi­
sation européenne de coopération économique (OECE), créée peu
après la seconde guerre mondiale, a été la première organisation im­
portante chargée de faciliter la coordination des politiques économi­
ques des pays d'Europe occidentale. Sa première tâche a été d’aider
à répartir entre les pays membres l’aide étrangère reçue dans le cadre
du Plan Marshall, afin qu’ils pussent mener à bien leurs programmes
de reconstruction et leurs plans de développement. Par la suite,
l’OECE a apporté une contribution substantielle à la libération des
échanges entre les pays membres et elle a préparé leur retomr à un
système de paiements pleinement multilatéral. Par ces mesures et par
d’autres, l’OECE a été un facteur majeur dans l’expansion considérable
du commerce entre les pays d’Europe occidentale. Récemment, elle
est devenue l’Organisation de coopération et de développement éco­
nomiques (OCDE), avec la participation du Canada et des Etats-Unis.
Les nouvelles entreprises de l’OCDE comprennent l’organisation d’une
aide multilatérale aux pays sous-développés et des études qui servi­
ront de base à la coordination des politiques économiques des pays
membres. Ces études fournissent notamment une comparaison et une
analyse critique des projections à moyen terme et à long terme, ainsi
que, le cas échéant, des plans de développement. Ces études sont par­
ticulièrement utiles aux pays membres qui planifient dans quelque
mesure leur économie nationale, notamment pour ce qui est du com­
merce extérieur.
315. De son côté, la Communauté économique européenne (CEE)
établit des liens beaucoup plus étroits entre six des membres de
l'OCDE. D’une part, la CEE établit entre les six pays un marché in­
tégré sur tous les produits et tous les facteurs de production, en sup­
primant les restrictions quantitatives et les droits de douane entre
eux, en instituant un tarif douanier commun au regard du monde ex­
térieur, et en prévoyant la libre circulation de la main-d’œuvre et des
capitaux à l’intérieur du groupe. En second lieu, elle tend à instaurer
une politique économique commune en ce qui concerne le plein em­
ploi, la limitation des fluctuations économiques, la croissance écono­
mique à long terme et l’établissement de conditions égales pour les
entreprises concurrentes à l’intérieur du groupe. La coordination des
mesures de développement à moyen terme doit se fonder sur des pro­
jections communes. Celles-ci seront établies principalement à partir
des projections déjà faites dans les pays membres, mais on examinera
également des variantes fondées sur d'autres hypothèses; les projec­
tions comprendront les études relatives au commerce extérieur de la
Communauté, et elles seront coordonnées avec les travaux entrepris
par l’Organisation des Nations Unies à l'échelle mondiale. Les projec­
tions communes devraient aider à coordonner les politiques de déve­
loppement des pays membres, ce qui en augmentera beaucoup le
rendement.
316. La tendance croissante qui porte des groupements régionaux
de pays à intégrer leurs politiques commerciales et leurs politiques
des investissements conduit à poser la question de l’influence de cette
évolution sur le volume et les mouvements du commerce mondial. Il
n’y a pas de raison péremptoire pour que l’intégration régionale con­
duisant à une répartition plus rationnelle des ressources entre les
pays d’ime région donnée, telle que l’envisagent la Communauté éco­
nomique européenne, les pays d’Europe orientale et l’Association
latino-américaine de libre-échange, ait pour conséquence une réduc­
tion du commerce avec les autres régions. En fait, ce genre d’intégra­
tion régionale, en permettant de mieux tirer parti des économies
d’échelle, peut mener à une meilleure division internationale du tra­
vail pour l’ensemble du monde. Il reste que les groupements régio­
naux peuvent poursuivre une politique propre à restreindre leurs
échanges avec d’autres groupements. Une telle politique aurait des
conséquences fâcheuses, notamment pour les pays sous-développés
qui connaissent des difficultés de change particulièrement graves. Il
faut donc souhaiter qu’on donne aux accords régionaux une structure
qui permette d’éviter ces effets néfastes.
317. Le processus de consultation mutuelle et d’échange de ren­
seignements qu’on vient de décrire sur le plan régional a récemment
pris une importance mondiale à la suite des mesures prises par l’As­
semblée générale des Nations Unies. La résolution 1708 (X V I) de
l’Assemblée générale a prévu, outre la rédaction du présent rapport,
la création d’un Centre des projections et de la programmation éco­
nomique au Siège de l’ONU, avec des bureaux auxiliaires dans les
commissions économiques régionales. Ce centre a entrepris d’élaborer
un modèle de la croissance à long terme de l’économie mondiale qui
permettra, par l’examen des rapports économiques sous-jacents, d’eva-
luer la compatibilité des plans et des programmes nationaux, qui
aidera les pouvoirs publics des différents pays à mettre au point des
politiques appropriées dans le cadre d’une structure internationale.
Un travail analogue sera entrepris par les sous-centres régionaux. Le
Centre a également commencé des études sur les problèmes et les
techniques de la planification économique dans des systèmes écono­
miques et sociaux différents. Ces études ne seront pas seulement
utiles aux instituts nationaux et régionaux de développement et de
planification économiques; les conceptions ainsi dégagées et la diffu­
sion active des informations par l’Organisation des Nations Unies
permettront de répandre les bienfaits de la recherche internationale.
Un autre avantage de la nouvelle entreprise est que le Centre pourra
fournir ime aide organique aux opérations d'assistance technique des
Nations Unies, pour ce qui est de la planification économique.
318. A l'heure actuelle, plusieurs institutions internationales, no­
tamment celles du système des Nations Unies, prêtent leur appui aux
efforts de développement des pays sous-développés. Cet appui prend
différentes formes, telles que l'assistance technique et le transfert de
fonds. Comme ces diverses institutions abordent les problèmes sous
des angles différents, leurs décisions ne sont pas toujours coordon­
nées avec les priorités et les plans des pays sous-développés. Il y au­
rait donc grand intérêt à mieux ajuster ces activités aux plans des
pays sous-développés.
319. Dans les économies planifiées de l’Europe orientale, la co­
opération internationale, avec coordination des plans nationaux, a
atteint un stade avancé. La coordination a été facilitée par le fait que
tous ces pays ont adopté un régime économique et social analogue,
entretiennent des rapports politiques étroits et planifient à long terme
le développement de leur économie.
320. La coopération et la coordination économiques entre ces
pays sont passées par deux stades distincts. Durant le premier, de la
fin de la seconde guerre mondiale jusque vers 1955, les plans écono­
miques étaient dressés sans coordination directe avec ceux des autres
pays. Pendant cette période, les problèmes de la division internatio­
nale du travail n’ont guère joué de rôle dans la planification du
développement économique, ni dans la politique commerciale des
divers pays. Le développement des économies n’était coordonné que
d’une façon indirecte, par les échanges extérieurs et les octrois de
crédit. Cette coordination indirecte était assurée principalement par
des accords bilatéraux pour l’échange de biens déterminés, des ac­
cords de crédit et des accords prévoyant des échanges scientifiques et
techniques.
321. Depuis 1955 environ la coordination internationale des plans
nationaux des économies planifiées s’est beaucoup élargie et ren­
forcée. L’expansion substantielle de la production et la diversification
des économies nationales ont permis aux économies planifiées de
l’Europe orientale de coopérer directement en matière de production.
Alors que durant le premier stade, il concentrait ses efforts sur le
commerce extérieur, le Conseil d’entraide économique a entrepris
d’influer sur l’établissement des plans nationaux en partant de con­
sidérations telles que les économies d’échelle réalisées grâce à la pro­
duction de masse et la réduction des prix de revient par la spéciali­
sation.
322. La coordination ne s’étend pas seulement aux plans de pro­
duction, mais aussi aux plans du commerce extérieur, aux transports,
à la balance des paiements et au progrès technique. Sur la base de la
coordination des plans économiques nationaux, on détermine les prin­
cipales directions dans lesquelles s’exerceront les efforts de spéciali­
sation et de coopération dans la production, pour les branches indus­
trielles connexes et pour l’utilisation en commun des matières
premières, des combustibles et de l’énergie; des décisions concertées
sont prises pour l’exécution en commun de grands projets économi­
ques intéressant plusieurs pays; on règle d’un commun accord les
problèmes relatifs au développement et à l’exploitation des divers
modes de transport et de communication; des décisions sont prises
touchant les progrès de la science et de la technique, y compris la
formation, initiale et avancée, des cadres. De cette manière, on cher­
che à réaliser une division internationale rationnelle du travail entre
les pays membres du Conseil d’entraide économique.
323. La coopération entre les pays à économie planifiée qui s’oc­
cupent de développer ces secteurs de l’industrie revêt diverses formes:
attribution de prêts, fourniture de matériel et établissement des
documents scientifiques et techniques nécessaires. Les installations
construites en coopération sont la propriété du pays sur le territoire
duquel elles sont établies. Les comptes résultant des crédits accordés
pour ces projets sont normalement réglés par des livraisons de biens
produits dans les entreprises construites en commun.
324. La tendance à la coordination des plans nationaux s’est ac­
compagnée d’une tendance à l'expansion des échanges entre les pays
du Conseil d’entraide économique. Au premier rang des mesures pro­
pres à favoriser cette évolution, figure la récente décision d’instituer
un système de règlements multilatéraux entre les pays membres et
d’établir une banque internationale à cet effet.
325. Les recommandations du Conseil d’entraide économique re­
latives à la coordination des plans nationaux ne prennent effet qu’avec
l’accord des pays membres. Les principes et les procédures du Conseil
en la matière ont été consignés dans les « Principes fondamentaux de
la division sociaUste internationale du travail », adoptés en juin 1962.
Selon ce document, le Conseil d’entraide économique vise à accroître
le rendement global de l’économie du groupement, tout en tenant
dûment compte du développement économique général et diversifié
de chacun des pays membres. Il s’efforce également de réduire encore
et d’éliminer graduellement les différences dans le degré de dévelop­
pement de ces pays. Ainsi, les membres moins industrialisés pourront
être favorisés dans l’attribution des crédits d’investissement et dans
la fixation du prix de certains produits d’exportation, pendant la phase
initiale de la production. La coordination internationale des plans
fondés sur ces idées directrices doit, d’après les « Principes », s’appli­
quer aux branches fondamentales de l’industrie et permettre de réali­
ser le développement d’ensemble de chaque pays en même temps que
la spécialisation internationale par branche. La coordination portera
principalement sur les plans à long terme, vu le temps nécessaire pour
effectuer les changements de structure et de technique voulus. Les
plans coordonnés doivent constituer des engagements fermes pour les
pays participants, afin de prévenir l’apparition de déséquilibres.
326. L’évolution du commerce mondial et des relations économi­
ques internationales en général ne dépend pas seulement des consi­
dérations économiques évoquées dans le présent chapitre; elle est
fortement influencée par certains facteurs non économiques, notam­
ment ceux qui affectent les relations entre les économies planifiées,
d’une part, et les économies avancées d’entreprise privée, d’autre part.
L’expérience a montré que la solution de ce problème doit être recher­
chée, pour une large part, dans la réduction progressive des tensions
qui empreignent l’ensemble des relations internationales. D’autres
difficultés peuvent tenir aux techniques commerciales différentes des
deux groupes. Il est certain, en tout cas, que dans un climat amélioré,
la normalisation des relations économiques internationales contribue­
rait au progrès de tous les pays et renforcerait les principes sur les­
quels repose l’Organisation des Nations Unies.
Chapitre 5

QUELQUES CONCLUSIONS

327. Dans les chapitres qui précèdent, on a présenté un large


exposé des méthodes et techniques adoptées par des pays de systèmes
économiques différents pour élaborer leurs plans et politiques de
développement et pour en assurer l’application efficace. Les diffé­
rences que l’on constate dans les méthodes de planification peuvent
provenir de nombreuses causes : parmi les plus importantes figurent
le système économique, les buts et valeurs économiques et sociaux,
le niveau de développement et le type de problèmes qui se posent à
chaque pays par suite des conditions historiques, de l’étendue du terri­
toire, du chiffre de la population et de la situation économique du
moment. Parmi toute cette diversité, un fait saillant se dégage : la plu­
part des pays en voie de développement acceptent la nécessité de la
planification, comme principal moyen d’assurer une croissance éco­
nomique rapide. Les plans de développement peuvent fournir à ces
pays la base de politiques et programmes économiques d’ensemble qui
soient cohérents et réalisables et contribuer ainsi à déterminer l’ordre
pertinent des priorités, compte dûment tenu des besoins tant à court
qu’à long terme. De même, ils peuvent constituer le moyen qui per­
mettra aux pays développés d’apporter un concoxurs continu et régu­
lièrement croissant à leur développement. Du point de vue des pays
en voie de développement, il peut être souhaitable de rappeler cer­
tains aspects généraux de l’expérience acquise dans la planification
qui peuvent être d’un intérêt particulier pour leur effort de développe­
ment et d’indiquer certains des principaux domaines où des mesures
de leur part s’imposent spécialement pour assurer l’exécution des
plans.
328. Dans l’élaboration des plans, surtout au stade initial du déve­
loppement, les pays considérés se trouvent dans une situation où les
besoins et priorités du développement sont assez évidents et ils peu­
vent être définis avec une exactitude suffisante, sans recours à des
instruments analytiques de précision. Mais, au cours de la croissance,
ces priorités perdent d’ordinaire de leur netteté et gagnent en com­
plexité; l’absence de connaissances pertinentes et précises sur les
ressources humaines, naturelles et autres dont on dispose, ainsi que
de données statistiques fondamentales relatives aux caractéristiques
essentielles de l’économie, peuvent alors opposer un grave obstacle
à une appréciation objective des problèmes du développement.
Comme il faut beaucoup de temps pour se donner les moyens statisti­
ques appropriés, il importe que chaque pays prenne, dès le début de
son développement, des mesures systématiques pour améliorer les
renseignements statistiques et autres nécessaires au cours de la plani­
fication.
329. La préparation d’un plan de développement doit être tenue
pour la première d’une série de démarches liées entre elles tendant
à résoudre des problèmes économiques et sociaux rebelles, par une
croissance économique rapide et soutenue. Le plan doit donc prévoir
les instruments économiques nécessaires à la politique considérée, par
exemple les mesures pour augmenter le volume de l’épargne et pour
assurer l’application des ressources, notamment en devises, aux prio­
rités voulues; il doit également fournir l’appareil administratif et
technique qui permettra d’atteindre ses principaux objectifs. La con­
quête de ces objectifs s’étend nécessairement sur une longue période
et il faut donc une continuité dans la planification. Les buts fixés dans
les plans à moyen et à long termes doivent être liés, par l’inter­
médiaire de plans annuels, aux diverses décisions de politique et à la
gestion courante de l’économie. Parfois, peut-être, on ne pourra
atteindre complètement certains des objectifs partiels dans des sec­
teurs déterminés par suite des difficultés rencontrées dans les phases
initiales de la croissance. Mais ces quelques écarts ne doivent pas être
une cause de déception et faire douter de la planification. C’est le
mouvement même du développement, tel qu’il se manifeste dans la
création de nouvelles institutions, le meilleur emploi des ressources
humaines et autres, le changement de perspectives parmi les masses
et le large concours de la collectivité, qui constituent l’essence du
concept de planification et qui lui donnent son ressort.
330. Au cours des années récentes, la planification a été entreprise
dans des conditions si variées et sur une telle échelle qu’on dispose
déjà d’un riche fonds d’expérience où les pays en voie de développe­
ment peuvent puiser. De plus, dans tous les pays et notamment ceux
de planification déjà ancienne, on fait maintenant des efforts parti­
culiers pour en adapter les techniques aux exigences d’économies
changeantes et toujours plus complexes. Les pays en voie de dévelop­
pement ont donc l’occasion d’élaborer des méthodes de planification
convenant à leurs conditions particulières et de les appliquer à ré­
soudre leurs propres problèmes. A un degré variable, leurs plans pré­
voient l’extension du secteur public tout en cherchant, simultanément,
à profiter des possibilités de développement offertes par le secteur
privé. L’expérience des techniques de planification adoptées, tant dans
les économies planifiées que dans certaines des économies de libre
entreprise les plus avancées, présente donc une grande valeur pour
tous ces pays.
331. Plus encore que des méthodes de formulation et d’élabora­
tion des plans, la réussite dans la planification dépend des techniques
et instruments d’exécution et des dispositifs adoptés dans la structure
administrative et politique, ainsi que dans les diverses institutions
économiques et dans les entreprises elles-mêmes, pour prévenir les
défaillances dans l’exécution et la réalisation du plan. On ne saurait
trop souligner ce point. A ce propos, il faut également marquer l’im­
portance qui s’attache à suivre de façon systématique et critique
l’avancement du plan et à rapporter la conquête de ses buts et objec­
tifs à une estimation constante des conditions et possibilités écono­
miques du moment.
332. Ce sont nécessairement les pays se trouvant dans la nécessité
d’élever au plus vite les niveaux de vie de leurs populations et de
développer leurs ressources et aptitudes qui doivent fournir le gros
de l’effort de développement. Mais, pour le succès de leurs plans na­
tionaux, des politiques et mesures éclairées sont également essentiel­
les sur le plan international. En particulier, l’attention a été attirée
dans le présent rapport tant sur l’état critique des ressources en de­
vises nécessaires pour assurer la croissance économique et indus­
trielle, que sur les écrasantes difficultés rencontrées par de nom­
breux pays en voie de développement pour étendre leur commerce
extérieur et augmenter leur capacité de se procurer des devises.
333. Outre leurs propres efforts pour mobiliser les ressources, les
pays en voie de développement attribuent à juste titre dans leurs
plans un rôle important à l’assistance extérieure. On a attiré l’atten­
tion dans le présent rapport sur les graves faiblesses des arrangements
actuels et, en particulier, sur l’incertitude qui persiste quant aux res­
sources extérieures disponibles, sur le bouleversement des priorités
du plan et les autres inconvénients qu’entraîne le fait d’imposer l’af­
fectation de certains crédits, ou celui de les verser dans une monnaie
déterminée ainsi que sur la lourde charge que représente le service
des emprunts qui, à son tour, vient encore augmenter les difficultés
du développement. Tout en reconnaissant la valeur de l’assistance
bilatérale — pour autant qu’elle existe — le présent rapport a sou­
ligné certains problèmes qui lui sont inhérents, et a insisté pour une
extension des arrangements multilatéraux et internationaux pour
l’assistance économique aux pays sous-développés. On pense qu’on
rendrait ainsi plus efficace l’aide fournie à ces pays et que l’on hâte­
rait leiar développement, en créant des conditions plus satisfaisantes
pour tous les intéressés, ainsi qu’une méthode mieux intégrée et plus
suivie pour aborder dans leur ensemble les plans nationaux de tous
les pays. Un dispositif international se développant selon ces principes
faciliterait un courant accru de capitaux privés des pays développés
vers les pays sous-développés, dans des conditions qui serviraient au
mieux les intérêts à long terme des uns et des autres. On a également
indiqué certains moyens de stimuler ces mouvements de capitaux.
334. L’intégration du commerce extérieur dans un plan économi­
que national pose, comme on Ta vu, des problèmes difficiles. Des
questions importantes, relatives aux conditions du marché pour les
produits primaires et aux possibilités d’absorber les importations
d’articles manufacturés et semi-finis provenant des pays en voie de
développement, font actuellement l’objet d’une étude approfondie et
seront débattues plus en détail à la Conférence des Nations Unies sur
le commerce et le développement qui doit se tenir en 1964. En plus de
souligner d’urgence des mesures larges et pratiques sur ces questions
et celles qui s’y rattachent, on peut rappeler ici deux autres considé­
rations. D’abord, les problèmes du commerce et du développement
doivent être considérés ensemble, sur le plan tant national qu’inter­
national. Ainsi, les pays développés devraient délibérément formuler
leurs propres plans et politiques de façon à réserver, pour ainsi dire,
certaines possibilités prometteuses de production et d’échange aux
pays en voie de développement. De même, ces derniers pays devraient
concevoir leurs propres plans de développement pour profiter pleine­
ment des possibilités offertes ainsi ou autrement. Deuxièmement,
comme la réalisation de ces possibilités demanderait des mesures
soutenues au moyen de plans nationaux et par des programmes d’in­
vestissement et de développement technique, les pays développés
devraient s’efforcer, à l’occasion de la Conférence sur le commerce et
le développement ou autrement, d’élaborer des mesures et des politi­
ques pour mettre à la disposition des pays en voie de développement
l’asistance économique et technique qui leur est nécessaire pour
pouvoir réaliser leurs plans au cours des années à venir.
335. On sait maintenant que les problèmes qui se posent aux pays
sous-développés sont bien plus complexes et difficiles qu’on ne le sup­
posait communément voilà quelques années. Les progrès possibles
sans modification profonde des politiques et méthodes appliquées sur
le plan international restent très limités. Cette constatation ne sous-
estime pas l’importance des efforts que les pays sous-développés doi­
vent faire eux-mêmes, ni n’oublie le concours que les institutions
internationales et les pays plus développés ont déjà commencé à ap­
porter. Il n’en reste pas moins que l’ampleur et le rythme des efforts
de développement actuellement entrepris, tant à l’échelon national
que sur le plan international, sont loin d’être suffisants, et que des
efforts accrus des différents pays considérés doivent être bien plus
fortement soutenus par des mesures et des politiques hardies et clair­
voyantes sur le plan international. En particulier, en ce qui concerne
la Décennie des Nations Unies pour le développement, il faut insister
pour que les diverses institutions internationales des Nations Unies
examinent de nouveau comment mieux intégrer les programmes en
cours et la politique suivie dans les plans nationaux de développe­
ment, de façon à hâter la réalisation des objectifs prioritaires et à
accélérer le progrès économique et social dans son ensemble.
ANNEXES

ANNEXE 1

Mandat

E x t r a i t d e l a r é s o l u t i o n m s ( x v i ) , a d o p t é e p a r l ’A s s e m b l é e g é n é r a l e
A s a 1084e SÉANCE PLÉNIÈRE, LE 19 DÉCEMBRE 1961

Planification en vne du développement économique


L’Assemblée générale,
Convaincue de la nécessité urgente pour les pays peu développés d'éta­
blir et d’exécuter des plans nationaux de développement complets et cohé­
rents, afin de construire leur société selon leims principes propres,
Considérant qu’à cet effet il est nécessaire de poursuivre l’élaboration
de techniques de planification qui puissent s’adapter aux besoins et pro­
blèmes particuliers des divers pays.
Considérant la tendance croissante à recourir à diverses formes de
planification qui se manifeste dans la politique économique des pays en
voie de développement,

III
1. Invite le Secrétaire général à préparer, avec l’aide d’im groupe d’ex­
perts choisis en raison de leur connaissance des diverses techniques de
planification dans différents systèmes économiques et en collaboration
avec les instituts intéressés de divers pays, une étude d’ensemble sur l’ex­
périence acquise et les techniques utilisées en matière de planification du
développement économique par les différents pays, et en même temps
exprime l’espoir que les gouvernements des Etats Membres aideront à
exécuter l’étude en question;
2. Prie le Conseil économique et social d’examiner l’étude susmention­
née à sa trente-sixième session et de présenter à l’Assemblée générale, lors
de sa dix-huitième session, des recommandations concernant l’utilisation,
au profit des pays en voie de développement, de l’expérience qui se dégage
de la planification économique;
3. Invité également le Secrétaire général à inclure dans l’étude sur
l’économie mondiale, pour une des années à venir, un chapitre spéciale­
ment consacré aux questions de planification du développement écono­
mique.
ANNEXE II

Projet concernant les chapitres 1®’’, 2, 3 et 4


présenté par le professeur M. Z. Bor

CHAPITRE PREMIER
LA FORMULATION DES PLANS

P a y s s o c ia l is t e s

F o r m u l a t io n d e s p l a n s d e s t in é s a a c c é l é r e r l a p r o d u c t io n e t l a c o n s o m ­
m a t io n AINSI QUE l a t r a n s f o r m a t i o n DE LA STRUCTURE ÉCONOMIQUE ET SOCIALE

1. L’accroissement des taux de croissance économique, principal objec­


tif des pays sous-développés, ne, peut être obtenu par la simple analyse de
la structure de la demande et des conditions qui permettent la pleine
utilisation des ressources disponibles. La solution consiste à créer les con­
ditions nécessaires à l’accroissement rapide de ces ressources productives,
ce qui présuppose des transformations radicales dans leur structure et le
développement prioritaire de ceux des éléments de cette structure qui
pourront stimuler l’augmentation rapide de l’ensemble de la production et
de la consommation. Ces objectifs ne peuvent être atteints que par des
méthodes combinant l’économique et le politique.
2. Des objectifs de ce genre ont été atteints dans le passé et sont at­
teints de nos jours avant tout par les pays socialistes qui, ce faisant, ont
accumulé un vaste fonds d’expérience touchant les méthodes de plani­
fication. Cette expérience comprend une série d’éléments et de conceptions
qui peuvent être utilisés avec profit par d’autres pays, notamment les pays
sous-développés du monde.
3. Lors de la préparation des plans, on procède d’abord à une étude
minutieuse des besoins de l’économie et de la population en biens maté­
riels et en services, en moyens d’enseignement, en services sanitaires, etc.
En même temps, on détermine les ressources nécessaires à la satisfaction
de ces besoins, en fonction du niveau de développement atteint ainsi que
des possibilités du pays.
4. Le développement rapide et équilibré de l’économie présuppose
l’activité coordonnée et délibérée de tous les secteurs de l’économie natio­
nale et le respect constant des principes de la démocratie, qui garantissent
la pleine concordance des tâches économiques avec les intérêts de la popu­
lation et qui assurent la confiance inconditionnelle du peuple dans les
autorités d’Etat qu’il a élues et dans les directives économiques qui en
émanent.
5. La combinaison de la gestion centralisée de l’Etat et de l'initiative
créatrice des autorités locales et du personnel des entreprise assure l’unité
des objectifs des plans généraux d’Etat qui fixent les directions fondamen­
tales du développement économique, et des projets contenus dans les plans
des entreprises, des districts et des régions. Dans ces projets, on tient
compte à tous égards de toutes les possibilités et de toutes les ressources
en vue de l’expansion continue de la production et de la construction. En
même temps, lorsqu’elles établissent leurs projets de plans, les autorités
locales doivent aborder les questions sous l’angle de l’économie nationale
et sauvegarder avant tout les intérêts de l’Etat dans son ensemble.
6. Les principes majeurs de la planification économique sont la locali­
sation correcte et rationnelle de l'industrie, le développement proportionné
de toutes ses branches, une large spécialisation et la coopératisation. Un
élément particulièrement important est le développement complexe de
l’économie des diverses régions, compte tenu de leur spécialisation ration­
nelle.
7. Deux méthodes fondamentales sont utilisées en URSS pour l’élabora­
tion des plans économiques nationaux:
à) La méthode des estimations techniques et économiques, qui sont
orientées vers les objectifs du plan. Pour les établir, on fait un large usage
des déductions et des conclusions générales de disciplines comme la sta­
tistique, la comptabilité et l’économie pratique. Les méthodes mathéma­
tiques faisant appel aux techniques modernes de calcul électronique pren­
nent une importance croissante dans l’établissement des estimations
techniques et économiques;
b) La méthode des balances, pour la coordination de toutes les divisions
et de tous les indicateurs du plan. Cette coordination assure le maintien
des proportions voulues dans le développement des divers secteurs et
branches de l’économie, dans tous les maillons de la planification, et à tous
les stades de la préparation, de l’exécution et du contrôle du plan.
8. Toutes les projections concernant l’accroissement de la production
dans les diverses branches sont fondées sur des estimations techniques et
économiques détaillées portant sur la demande des divers produits et sur
les quantités qu’il est possible de produire.
9. Les estimations techniques et économiques reposent essentiellement
sur les normes de planification. Celles-ci sont tirées d’un examen minu­
tieux des résultats obtenus par les entreprises dont le rendement est au-
dessus de la moyenne, et en particulier par les entreprises d’avant-garde.
D’autre part, afin que les normes soient suffisamment différenciées et con­
formes à la réalité, toutes les entreprises, les kolkhozes, les chantiers, etc.,
sont divisés en groupes selon la similarité des conditions d’exploitation.
10. Les normes de planification forment le lien qui unit la méthode des
estimations techniques et économiques et la méthode de planification dite
des balances. D’ime part, on utilise des normes techniques et économiques
pour déterminer les besoins de l’économie nationale touchant les divers
types de produits, de travaux et de services, ainsi que l’importance de la
production de chacun; d’autre part, on se sert de balances-matières pour
coordonner les besoins avec les ressources. Enfin, les normes de plani­
fication d’après lesquelles sont calculés les besoins et les ressources sont
elles-mêmes le résultat d’estimations techniques et économiques.
11. Ainsi, les objectifs fixés pour les opérations essentielles des bran­
ches de l’économie nationale (production, construction, transports, etc.)
sont fondés sur les estimations techniques et économiques de la capacité
de production et sur l’évaluation des approvisionnements en matériaux
industriels, ainsi que de la main-d’œuvre et de sa productivité. Il importe
particulièrement que les objectifs de production s’appuient sur des res­
sources financières suffisantes.
12. Parmi les diverses estimations techniques et économiques utilisées
dans la planification économique nationale, une place particulière revient
à celles qui concernent l’efficacité économique des nouvelles techniques,
de la mécanisation et de l’automatisation. Des estimations de ce genre sont
établies à tous les stades de la projection et de la planification. Elles per­
mettent de déterminer l’orientation à donner au progrès technique dans
la production industrielle, d’établir l’ordre des opérations, de connaître le
montant des économies réalisées annuellement et de faire apparaître
l’effet de ces opérations sur les indicateurs du plan économique national.
13. Les problèmes que présente l’évaluation de l'efficacité économique
sont résolus au moyen d’une comparaison entre les indicateurs de la va­
riante à adopter et une base initiale. Le choix correct de cette base dé­
termine dans une grande mesure l’exactitude des estimations de l’effica­
cité, lesquelles doivent fournir une réponse à deux questions. Première­
ment: quel est le progrès que représente la mesure en question, et son
adoption est-elle possible? Deuxièmement: quel sera son effet sur l’éco­
nomie nationale?
14. Pour répondre à la première question, on prend comme base ini­
tiale les indicateurs des meilleurs exemples de la technologie nationale et
étrangère, et pour répondre à la seconde, les indicateurs de la technique
à remplacer. Si les exemples retenus doivent être généralisés, les indi­
cateurs choisis comme base initiale pour le calcul de l’effet économique
peuvent être ceux de la technique la plus répandue dans la branche en
question.
15. L’indicateur de base pour l’efficacité économique de mesures
tendant à l’adoption d’une nouvelle technique est l’effet économique
annuel.
16. Pour le choix des variantes, on emploie également des indicateurs
tels que le capital investi par unité de capacité nouvelle, les variations de
la consommation de matières premières, de combustible et d’énergie, ainsi
que de la dépense de travail et l’utilisation du matériel et des surfaces de
production par unité de production ou de travail achevé.
17. L’expression méthode des balances, telle qu’elle est utilisée dans la
planification, la statistique et la comptabilité, signifie la combinaison des
procédés utilisés pour coordonner et accorder des indicateurs interdépen­
dants. Aussi variés que puissent être les indicateurs, ces procédés ont un
seul et même objet, qui est de « mettre en équilibre », c’est-à-dire en con­
cordance, ces indicateurs interdépendants.
18. Dans la planification de l’économie nationale, l’emploi de la mé­
thode des balances permet d’assurer les proportions et les taux de crois­
sance nécessaires au développement économique, de mobiliser les ressour­
ces nationales et de constituer des réserves.
19. Pour éviter toute interruption dans la production, il faut veiller à
établir une corrélation entre la demande de moyens de production éma­
nant de certaines branches et le volume de la production des moyens en
question, laquelle est assurée par d’autres branches. Aussi établit-on des
balances économiques nationales de divers types.
20. Le système des balances comprend:
1) Les balances des éléments matériels de la production, de la con­
sommation et de l’accumulation;
2) Les balances de la main-d’œuvre;
3) Les balances financières.
21. Les balances des éléments matériels de la production, de la con­
sommation et de l’accumulation comprennent:
a) Les balances des ressources naturelles;
b) Les balances des capacités de production;
c) Les balances des fonds fixes;
d) Les balances matières.
22. Les balances des ressources naturelles indiquent Tétat et les varia­
tions des facteurs naturels les plus importants de la production sociale.
Les balances des terres, des superficies agricoles et des champs labourés,
et les balances des ressources hydrauliques offrent un point de départ
pour l’élaboration de plans perspectifs de développement agricole, tandis
que les balances des minerais et des réserves minérales non métalliques, du
bois d’œuvre, etc., servent de base aux plans de développement des indu­
stries extractives.
23. Les balances des capacités de production font ressortir l’état des
capacités de production par branches de l’économie nationale et leur évo­
lution pendant la période du plan; elles offrent un moyen de coordonner
les capacités de production avec les besoins de l’économie nationale en
grands produits industriels, ainsi que les capacités énergétiques avec la
demande de l’économie en énergie.
24. Les balances des fonds fixes indiquent les principaux éléments
d’actif productifs et non productifs du pays, par branches de l'économie
nationale. Elles permettent de donner une réponse aux questions concer­
nant le mode et le rythme de renouvellement des fonds fixes, leur déprécia­
tion, le rapport par branches de l’économie entre la part de fonds fixes
consommés et la part mise nouvellement en activité, etc.
25. Les balances matières se répartissent en deux groupes selon leur
objet économique:
1) Balances matières des moyens de production;
2) Balances matières des biens de consommation.
Le premier groupe comprend:
a) Les balances des produits industriels nécessaires aux activités de
la production courante: métaux, charbon, pétrole et produits dérivés, pro­
duits chimiques, énergie électrique, etc.;
b) Les balances des machines et de l’équipement: machines-outils,
turbines, génératrices, bateaux, locomotives, automobiles, tracteurs, mois-
sonneuses-batteuses, équipement métallurgique et chimique, etc.;
c) Les balances des produits industriels nécessaires à l’exécution des
projets de construction: ciment, carton bitumé pour toiture, ardoises,
briques, bois et autres matériaux de construction;
d) Les balances des matières premières agricoles destinées à un traite­
ment industriel: coton, lin, laine, autres matières premières d’origine ani­
male, graines oléagineuses, betteraves, etc.
Le second groupe comprend:
a) Les balances des produits industriels destinés à la consommation:
tissus, chaussures, vêtements, sucre, conserves, confiserie, etc.;
b) Les balances des produits agricoles destinés à la consommation:
viande, lait et produits laitiers, pommes de terre, légumes, fruits, etc.
26. La classification qui précède est naturellement arbitraire. Divers
produits industriels et matières agricoles sont utilisés en même temps
dans la production courante et dans la construction (métaux et bois de
construction) ou appartiennent à la fois à la catégorie des moyens de pro­
duction et à celle des biens de consommation (lait, viande, sucre, légumes,
fruits, etc.).
27. Pour la portée et le contenu, on distingue trois sortes de balimces
matières:
1) Les balances matières de l’économie nationale.
2) Les balances matières régionales,
3) Les balances matières individuelles.
28. Les balances de la main-d’œuvre sont utilisées largement dans
l’élaboration des plans économiques nationaux. Si l’on veut exécuter les
programmes de production et atteindre les buts quantitatifs et qualitatifs
fixés par le plan, il faut que chaque branche de l’économie ait l’effectif
nécessaire de travailleurs qualifiés.
29. Les balances de la main-d’œuvre permettent de coordonner et d’ac­
corder les besoins des diverses branches de l’économie nationale et des di­
vers districts avec les disponibilités en main-d’œuvre et en cadres qualifiés.
Le système des balances de la main-d’œuvre comprend, d’une part, les ba­
lances des réserves de main-d’œuvre, qui indiquent l’état de ces réserves et
leur évolution pendant la période du plan et, d’autre part, les balances de
la main-d’œuvre proprement dites qui établissent les besoins en main-
d’œuvre, coordonnent ces besoins avec les ressources et fixent la réparti­
tion de la main-d’œuvre conformément aux objectifs économiques et
politiques visés pour la période en question.
30. Enfin, le troisième des principaux groupes de balances utilisés dans
le plan économique national est celui des balances financières. Celles-ci
servent à assurer une coordination générale entre la production, la distri­
bution et la circulation des biens produits par l’économie nationale sous
leur forme naturelle ou physique, d’une part, et la formation et l’utilisation
des revenus des entreprises, des kolkhozes et de la population, d’autre part.
31. Les principales balances financières sont le budget de l’Etat (qui
est le plan financier principal du pays), les balances des recettes et des
dépenses des entreprises, des départements et des ministères, les plans de
liquidités et de crédit de la banque d’Etat et des banques spéciales, la
balance des recettes et des dépenses en espèces de la population, et le plan
financier général de l’Etat.
32. La plupart des pays sous-développés ont commencé la formulation
de leur plan par l’établissement d’agrégats destinés à servir de cadre
général à la fixation des objectifs de la production totale et de sa réparti­
tion entre la consommation, l’investissement et l’exportation. Pour pré­
parer la planification de l’allocation des ressources, quelques pays ont
commencé à faire des estimations touchant le taux potentiel d’accroisse­
ment du volume total de la production et des importations, la fraction des
revenus additionnels à épargner et à investir, et les taux d’accroissement
de la consommation et des exportations. Les pays qui ont poursuivi
avec vigueur la planification et qui ont élaboré dans le détail des plans
matériels et financiers ont dû souvent modifier sensiblement les objectifs
initiaux dérivés du modèle agrégé. Aussi, la planification au niveau des
agrégats a-t-elle consisté moins à construire des modèles à partir desquels
on pourrait déterminer les changements à apporter à la composition de
la production et à l’allocation des ressources qu’à tester la cohérence et la
possibilité générale d’exécution des plans sectoriels de production.
33. On pourrait soutenir, d’un point de vue formel, que cette différence
dans l’utilisation des modèles agrégés n’est qu’une différence de degré;
après tout, dans une économie avancée d’entreprise privée, les modèles
agrégés servent également, dans la pratique, à indiquer les changements
de politique nécessaires pour obtenir un niveau d’activité élevé et croissant.
Mais, sur le plan opérationnel, cette différence est vraiment importante.
En effet, pour évaluer les relations entre agrégats, on ne peut se fonder
aussi étroitement sur l’expérience du passé; il faut partir d’une analyse
détaillée des changements qui affecteront la structure de l’économie, et.
ce qui est plus important encore, des intentions de la politique gouverne­
mentale. L’accroissement du niveau de l’épargne, par exemple, qui est
communément recherché par les pays sous-développés, dépend générale­
ment dans une grande mesure de l’évolution probable de l’épargne publi­
que. Les gouvernements doivent donc prendre des décisions quant à la
politique qu’ils entendent appliquer en matière de finances et de dépenses
publiques courantes. En fait, l’un des intérêts que présente l’établissement
d’xm modèle agrégé est de fournir des indications concrètes sur la mesure
dans laquelle il faudra changer la politique afin d’obtenir une augmenta­
tion donnée de l’épargne; les gouvernements peuvent ainsi mettre en ba­
lance les avantages qu’offrira, à longue échéance, un accroissement de
l’épargne, et les inconvénients à court terme résultant d’impôts plus élevés
ou d’ime limitation des dépenses courantes. Pour estimer le niveau futur
de l’épargne globale, les pays sous-développés ont donc dû établir des pro­
jections détailléss des recettes et des dépenses publiques et ils ont dû
analyser dans une certaine mesure l’épargne privée ainsi que leur capacité
d’obtenir des capitaux étrangers et d’en assurer le service. Ce travail est
loin d’avoir été entrepris par tous les pays, encore que le besoin en ait été
évident. C’est seulement grâce à de telles études et sur la base des déci­
sions gouvernementales en matière financière et budgétaire qu’on a pu
arriver à une estimation réaliste du montant global d’investissement que
l’économie peut supporter. De même, pour obtenir une estimation sûre du
rapport global capital/production ou de la fonction d’importation, on n’a
pas seulement tenu compte de l’évolution de ces relations dans le passé,
mais on a effectué une analyse détaillée des besoins en capitaux et en
importations découlant de la composition escomptée de la production et
de la demande intérieures.
34. L’élaboration d’un plan implique: a) une analyse de l’état actuel de
l’économie et de la culture; b) la détermination de leurs possibilités réelles
de développement (c’est-à-dire des ressources et des besoins); c) la fixa­
tion des objectifs fondamentaux du plan; d) le choix des méthodes à suivre
pour résoudre les problèmes de planification.
35. L’analyse de la situation économique antérieure au plan a pour
objet principal de faire apparaître de nouvelles réserves économiques dont
l’utilisation permettra d’accélérer le développement économique du pays.
L’analyse des taux relatifs de développement des divers secteurs écono­
miques et la détermination des tendances constituent un processus com­
plexe, car le développement de chaque secteur ou région est étudié en
fonction des intérêts et des besoins de l’économie dans son ensemble et
des résultats obtenus dans les régions ou secteurs voisins et interdépen­
dants. Cette analyse a pour but d’assurer l’utilisation des ressources dispo­
nibles en vue de répondre aux besoins particuliers de chaque région ou
secteur et du pays dans son ensemble, c’est-à-dire qu’elle vise essentielle­
ment à déterminer dans quelle mesure la production est adaptée à la con­
sommation.
36. L’analyse du développement économique comprend une étude des
rapports existant, dans chaque secteur économique, entre des secteurs
connexes à l’intérieur des diverses républiques et régions économiques, et
entre les régions économiques. Il faut mentionner, parmi les rapports
économiques essentiels qui font l’objet d’une analyse minutieuse, les rap­
ports entre les divers taux de croissance: celui de la production des moyens
de production et celui de la production de biens de consommation, celui
de l’industrie et celui de l’agriculture, celui des industries d’extraction et
celui des industries de transformation, etc.
37. Pour l’analyse des rapports économiques, il ne suffit pas d’évaluer
les éléments matériels de la production. Le fonds des salaires et les autres
revenus personnels doivent être comparés au volume de la production de
biens de consommation, au fonds d’articles du marché et au volume des
services payants offerts au public. Le volume des grands travaux est mis
en balance avec les crédits ouverts pour les financer. Le volume de la pro­
duction est comparé au volume des grands travaux, de la construction
d’installations collectives et culturelles et de la construction de logements,
à la circulation totale de marchandises et aux indicateurs financiers et
budgétaires.
38. L’analyse des rapports économiques permet de déterminer les ten­
dances générales et particulières du développement économique et facilite
les efforts entrepris pour orienter ces tendances dans la direction voulue:
il peut s'agir, par exemple, d’intensifier le développement de telle branche
de l’industrie lourde, de l’agriculture ou de la production de biens de con­
sommation, d’accélérer l’expansion économique de certaines régions, etc.
39. Une grande importance est attachée à l’analyse comparative des
indicateurs interdépendants des opérations de production dans des sec­
teurs économiques voisins et dans des entreprises analogues, ainsi qu’à la
recherche de nouveaux moyens d’améliorer l’utilisation des capacités de
production, d'augmenter la productivité de la main-d’œuvre et de réaliser
des économies sur les matières premières et le combustible.
40. L’analyse ne se borne pas, bien entendu, à l’examen d’indicateurs
moyens, de résultats moyens, de taux effectifs moyens, etc. Des analyses
distinctes sont effectuées pour des groupes d’entreprises de types donnés,
des groupes de coopératives, etc. L’expérience acquise dans les entreprises
d’avant-garde qui ont atteint des résultats supérieurs est étudiée de très
près en vue de l’emploi d’indicateurs progressifs dans l’élaboration du
nouveau plan. On fait largement usage à cet égard de la méthode dite de
« groupage » et de l’analyse comparée des indicateurs économiques pour
des entreprises analogues. L’analyse de la dynamique de processus écono­
miques s’étendant sur plusieurs années est utile pour la détermination des
règles qui doivent être observées dans la préparation des plans écono­
miques.
41. Il est très important, en fixant les objectifs du plan pour l’indu­
strie, la construction et les transports, de faire l'analyse des niveaux de
production maximaux qui ont été maintenus sans fléchissement.
42. L’analyse de la situation économique antérieure au plan est com­
plétée par une évaluation générale du niveau de développement écono­
mique du pays et du niveau de vie de la population. Cette évaluation repose
sur les ressources naturelles et le potentiel économique réel du pays et
sur une comparaison entre les indicateurs soviétiques et les indicateurs
comparables d’autres pays (en principe ceux qui sont le plus avancés
économiquement). L’évaluation du potentiel, par exemple, suppose une
comparaison des matières premières disponibles et des autres ressources
naturelles avec le degré de leur utilisation, des capacités de production
avec le niveau de la demande des produits en question, et de l’offre effec­
tive de biens avec le niveau de la consommation nationale. L’autre phase
de l'évaluation implique la comparaison en chiffres absolus du volume de
la production et d’autres indicateurs économiques. Des comparaisons ana­
logues des volumes, des taux et des facteurs, effectuées à des stades plus
tardifs de la planification, permettent d’arrêter des critères plus précis et
des limites optimales pour certains objectifs particuliers des plans.
D e t e r m in a t io n d u p o t e n t ie l d e d é v e l o p p e m e n t é c o n o m iq u e

43. Pour élaborer un plan de développement économique qui soit


viable, il convient, après avoir analysé le niveau de développement déjà
atteint, de déterminer les possibilités qui s’offrent réellement pour la suite
du développement. Dans cette détermination interviennent, entre autres
facteurs, l’accroissement de la population, les changements de la structure
démographique, les disponibilités en main-d’œuvre qualifiée, les réserves
existantes et latentes de matériel de base, de matières premières et d’autres
ressources naturelles, et la possibilité d’augmenter la productivité de la
main-d'œuvre.
44. Toute planification économique vise en fin de compte à satisfaire
aussi entièrement que possible les besoins de la société. Elle doit donc
avoir pour objectif d’assurer l’utilisation la plus complète et la plus ration­
nelle des ressources humaines du pays et d’élever constamment le niveau
de vie.
45. L’accroissement de la population et les changements de la structure
démographique jouent un rôle important dans la détermination du poten­
tiel de développement économique d'un pays. Il convient, à cet égard, de
ne pas perdre de vue les objectifs suivants:
a) Plein emploi de toute la population capable de travailler;
b) Répartition correcte des ressources en main-d’œuvre entre les di­
vers secteurs et branches de l’économie nationale, ainsi qu’entre les régions
géographiques;
c) Augmentation constante du niveau productif et technologique gé­
néral de la population.
46. L’analyse des ressources du pays en main-d’œuvre sert à déterminer
ce que sera le total de ces ressources pendant la période du plan, ainsi que
les possibilités d’augmenter ce total en chiffres absolus et relatifs, et à
s’assurer que le coût total de la main-d’œuvre est réparti dans l’économie
nationale conformément aux besoins de la société.
47. L’analyse à long terme des tendances démographiques de l’ensemble
de la population et de la fraction qui est employée dans l’économie natio­
nale, ainsi que des rapports les plus importants de la répartition des res­
sources en main-d’œuvre du pays, offre une base pour la projection, en
termes absolus et relatifs, de l’augmentation possible des ressources en
main-œuvre pendant la période du plan et pour la détermination de la
tendance générale de la répartition de ces ressources par catégories
d’emploi, secteurs économiques et groupes sociaux.
48. Afin d’assurer une répartition convenable de la main-d’œuvre et
l’utilisation la plus judicieuse des ressources du pays en main-d’œuvre, on
établit des balances prévisionnelles globales des ressources en main-
d’œuvre.
49. Ces balances indiquent aussi la répartition des ressources en
main-d’œuvre selon les principales catégories de professions (répartition
effective pendant la période sur laquelle porte la balance et répartition
prévue pour la période du plan).
50. Les balances prévisionnelles globales des ressources en main-
d’œuvre sont préparées pour l’ensemble de l’URSS ainsi que pour les di­
verses régions administratives et économiques.
51. Comme on l’a déjà fait remarquer, le potentiel de développement
économique d’im pays est déterminé non seulement par ses ressources en
main-d’œuvre, mais aussi par ses ressources matérielles (équipement, ma­
tières premières, etc.) et ses possibilités d’augmenter la productivité du
travail social.
52. Pour déterminer dans quelle mesure la capacité de production
d’un pays lui permettra d’augmenter la production, il est essentiel de sa­
voir a) quelles sont les capacités utilisées, b) jusqu’à quel point les capa­
cités dont disposent les entreprises actuelles peuvent être accrues par
l’adoption de nouvelles techniques et l’amélioration des procédés techniques
existants, et c) quelles capacités nouvelles doivent être créées par la con­
struction de nouvelles entreprises et l’expansion des entreprises existantes.
53. Le plus important des instruments utilisés dans l’élaboration d’un
programme de production industrielle est la balance des capacités de pro­
duction pour les principales branches industrielles.
54. La balance de la capacité de production est dressée sur la base d’une
nomenclature préétable de produits (fonte, acier, métal laminé, charbon,
pétrole, etc.) et comprend les indicateurs suivants: capacité en service au
début de la période; capacités nouvellement installées; pertes de capacité;
capacité en service à la fin de la période, et capacité annuelle moyenne.
55. Dans la planification économique, les résultats des estimations de
la capacité de production servent essentiellement de base aux plans de
production industrielle et aux plans d’investissement, à l’élaboration des
balances et des plans relatifs à la répartition de l’équipement, à la plani­
fication d’une spécialisation économiquement rationnelle, ainsi qu’aux
plans tendant à accroître la coopération intrarégionale et interrégionale.
56. Les plans et la construction de nouvelles entreprises et l’expansion
des entreprises existantes exigent la constitution d’une réserve suffisante
de matières premières. C’est pourquoi le plan économique national fixe des
objectifs pour le développement de la base de matières premières et de
minéraux et pour la formation de la réserve nécessaire de gisements
connus.
57. Les plans concernant la prospection de minéraux utiles à l’industrie
tiennent compte des besoins des entreprises industrielles qui sont en acti­
vité ou en construction, ou qui doivent être construites pendant la période
du plan.
58. La nature et la portée des opérations de prospection et des études
relatives à xm minéral particulier sont déterminées par les facteurs essen­
tiels suivants: a) les besoins à long terme de l’économie en ce qui concerne
le minéral en question; b) la richesse probable des gisements; c) les con­
ditions économiques existant dans les régions à prospecter.
59. Les besoins à long terme d’un minéral particulier sont calculés sur
la base de données concernant la capacité prévue des entreprises, l’impor­
tance des réserves connues, ainsi que sur le niveau de production prévu
pour le minéral en question au début et à la fin de la période du plan.
60. Le développement de l’agriculture, comme celui de l’industrie,
dépend dans une large mesure de l’état de sa base matérielle et technique,
c’est-à-dire essentiellement de la présence de terres arables et d’autres
terres.
61. L’étendue des surfaces d’ensemencement est déterminée sur la base
de la balance des terres, laquelle donne im tableau général de l’utilisation
des terres du pays. L’analyse de cette balance permet de juger des possibi­
lités d’améliorer encore l’utilisation des terres et de mettre en culture des
terrains en friche, des terres vierges, des zones temporairement maréca­
geuses, etc.
62. L’évaluation des possibilités d’expansion de la production agricole
ne peut être fondée uniquement sur des facteurs naturels comme la super­
ficie totale des terres arables et des autres terres, l'effectif du bétail et de
la volaille; un autre facteur extrêmement important intervient, à savoir les
disponibilités en tracteurs, en machines agricoles et en autre matériel.

F ix a t io n d e s p r in c ip a u x o b j e c t if s é c o n o m iq u e s e t s o c ia u x
À ATTEINDRE PENDANT LA PÉRIODE DU PLAN

63. L’analyse de l’état réel de l’économie du pays pendant la période


antérieure au plan et la mise en lumière des possibilités de développement
économique préparent le terrain poiu- la fixation des principaux objectifs
économiques et sociaux.
64. Au cours du processus de développement des pays socialistes, les
principaux objectifs de la planification économique étaient les smvants:
assurer l'indépendance technico-économique du pays; assurer le développe­
ment maximal du secteur socialiste dans toutes les branches de l’éco­
nomie nationale; prévenir les déséquilibres de l’économie et accumuler des
réserves pour l’accomplissement efficace de toutes les tâches. Chaque pays
fixe ses objectifs en fonction de son degré de développement.
65. C’est ainsi que les objectifs du plan perspectif de l’Union soviétique
pour la période de 1961 à 1980 sont les suivants;
a) Créer la base matérielle et technique du communisme;
b) Prendre la première place dans le monde pour la production par
habitant, en augmentant le volume du produit national et le revenu natio­
nal d’environ cinq fois, la production industrielle de plus de six fois, et la
production agricole de 3,5 fois;
c) Réaliser le taux de productivité du travail le plus élevé du monde;
d) Atteindre le niveau de vie le plus élevé du monde pour l’ensemble
de la population, en multipliant par 3,5 le revenu réel par habitant.
Les objectifs du troisième plan quinquennal de l’Inde (1961-1966) sont
les suivants:
a) Obtenir une augmentation du revenu national de 5 p. 100 par an;
b) Suffire aux besoins en céréales alimentaires et augmenter la pro­
duction agricole de manière à satisfaire les besoins de l’industrie et de
l’exportation;
c) Développer les industries de base telles que la sidérurgie, les indus­
tries chimiques, la production de combustibles et d’énergie, ainsi que les
constructions mécaniques, afin que les exigences de l’industrialisation
ultérieure puissent être satisfaites, pour l’essentiel, grâce aux ressources
propres du pays;
d) Utiliser au maximum les ressources en main-d’œuvre du pays;
e) Rédmre les disparités de revenu et obtenir une répartition plus
égale de la puissance économique.
66. Quelles que soient les conditions d’un pays, le principal objectif de
la planification sera toujours, d’une façon très générale, d’utiliser les res­
sources productives et la main-d’œuvre disponibles de manière à assurer
au mieux la reproduction élargie des forces productives du pays, en vue
de la satisfaction maximale des besoins de la société aux moindres frais.
67. Un objectif majeur de la planification du taux de croissance éco­
nomique est d’atteindre un rythme de développement plus élevé pour l’in­
dustrie que pour la production agricole et, dans l’industrie, une expansion
accélérée des branches progressives: production d’énergie, constructions
mécaniques, produits chimiques. Une économie prospère n’est possible
dans aucun pays sans une industrie hautement développée.
68. L’exploitation maximale du potentiel total d’un pays aux fins du
développement industriel crée les conditions objectives nécessaires à la
pleine utilisation des ressources en main-d’œuvre et à l’élévation rapide du
niveau de vie matériel et culturel.
69. Pour fixer la mesure quantitative des objectifs les plus généraux
du plan pour une période donnée, les pays socialistes établissent à présent
la balance prévisionnelle de l’économie nationale. Cette balance indique;
a) La reproduction élargie du produit social, sur la base du développe­
ment plus rapide de l’industrie lourde par rapport au reste de l'économie;
b) La reproduction élargie de la main-d’œuvre, sur la base d’une élé­
vation constante du niveau de vie des travailleurs et d’une augmentation
des effectifs des cadres qualifiés;
c) La reproduction élargie des rapports socialistes de production.
70. La balance de l’économie nationale est établie d’abord sous la
forme d’une balance comptable. Cette balance constitue le point de départ
pour l’élaboration de la balance prévisionnelle de l’économie nationale,
laquelle sert à déterminer les dimensions et les taux de croissance géné­
raux du produit social pendant la période du plan et à établir entre le sec­
teur d’Etat et le secteur coopératif, ainsi qu’entre les diverses branches du
produit social, les proportions dont la société a besoin pour se conformer
aux lois économiques objectives et pour réaliser les tâches concrètes de la
construction économique. Les parties essentielles de la balance prévision­
nelle sont:
1) La section de synthèse, qui comprend le tableau de synthèse, les
balances de la reproduction pour les principaux secteurs de production, la
balance des fonds fixes et le tableau des niveaux, des proportions et des
taux du développement de l’économie nationale;
2) La balance de la production, de la répartition et de l’utilisation du
produit social, ainsi que les balances des moyens de production et des
biens de consommation;
3) La balance de synthèse de la production, de la répartition et de
l’utilisation finale du revenu national, ainsi que la balance des rapports
comptables entre l’Etat, les coopératives, les kolkhozes et la population, et
la balance des recettes et des dépenses en monnaie de la population;
4) La balance des ressources en main-d’œuvre.
71. L’expérience acquise par les pays socialistes dans l’élaboration des
balances comptables et des balances prévisionnelles permet d’établir une
balance provisoire du produit social et de déterminer ainsi, d’une façon
approximative, les principaux indicateurs du processus de la reproduction
socialiste élargie pour la période à venir. La balance prévisionnelle provi­
soire du produit social est fondée sur les indicateurs des balances comp­
tables, sur l’analyse des proportions et des interrelations constatées effec­
tivement, sur l’inventaire minutieux des réserves et des possibilités non
exploitées (en particulier de celles qui sont liées au progrès technique, à
l’augmentation de la productivité du travail social et à une répartition plus
rationnelle des ressources en main-d’œuvre).
72. Lorsque les principaux indicateurs du plan ont été remplacés par le
« plan provisoire », c’est-à-dire lorsque les balances matières, les balances
de la main-d’œuvre et les balances financières ont été établies et que les
indicateurs de la production et de la distribution des biens produits dans
les divers secteurs ont été déterminés sur la base des estimations techni­
ques et économiques, la balance de l’économie nationale (et en particulier
la balance du produit social) joue un rôle nouveau. Elle sert alors d’instru­
ment pour la vérification et la correction des rapports internes du plan.
73. Résoudre les problèmes pratiques que pose la détermination des
possibilités réelles de développement économique, c'est avant tout évaluer
les besoins et les possibilités en termes comparables et les mettre en équi­
libre.
a) Moyens de production

74. L’expansion relativement plus rapide de la production des moyens


de production peut entraîner des marges variables entre les taux de crois­
sance des subdivisions 1 et 2 du paragraphe 70. Cet indicateur ne donne
par conséquent que le sens du changement dans le rapport entre les deux
subdivisions de production sociale. Le rapport effectivement fixé doit être
celui qui permet le mieux d’accélérer le taux de croissance de la produc­
tion et celui de la consommation.
75. Outre que la production sociale se divise en production des moyens
de production et en production des biens de consommation, elle se répartit
en deux grands groupes de secteurs productifs: les secteurs d’extraction et
les secteurs de transformation. La première catégorie comprend l’extrac­
tion de matières premières industrielles, la production agricole primaire
et la production de ressources énergétiques, parmi lesquelles l’extraction
de combustible a une importance décisive; le second groupe comprend
tous les autres secteurs qui transforment les matières premières.
76. La corrélation entre les secteurs d’extraction et les secteurs de
transformation est l’une des principales proportions caractérisant la pro­
duction matérielle. Elle exprime sous forme d’agrégat la somme des rap­
ports concrets entre les diverses branches de l’extraction et de la trans­
formation.
77. Pour déterminer les besoins de la société en moyens de production,
il faut d’abord établir la quantité de moyens de production livrés par l’in­
dustrie.
78. A cet égard, on tient compte des besoins en équipement, énergie, com­
bustibles et matières premières tant de l’industrie elle-même que des autres
secteurs de l’économie: les grands travaux, l’agriculture, les transports, le
commerce et les divers secteurs du développement social et culturel.
79. La détermination de la production industrielle nécessaire à l’éco­
nomie pose un problème extrêmement complexe, car les différents secteurs
de l’industrie sont étroitement liés entre eux dans les processus de repro­
duction et dépendent les uns des autres.
80. Ces rapports multiples peuvent être correctement déterminés et
incorporés dans les plans économiques par l'application du principe du
chaînon conducteur. En d’autres termes, on choisit, pour l’élaboration du
plan, un groupe de secteurs essentiels de l’industrie; on établit d’abord des
projections préliminaires pour ces secteurs, d’après lesquels des projec­
tions sont construits pour tous les autres secteurs de l’industrie. Naturelle­
ment, les projections préliminaires peuvent être modifiées considérable­
ment au cours de l’élaboration du plan global. Comme le principal facteur
de l’accroissement de toute la production est l’augmentation de la pro­
ductivité du travail social, due surtout à l’augmentation de l’outillage
technique dont dispose la main-d’œuvre, tous les plans concernant la
production des moyens de production prévoient im accroissement plus
rapide des instruments de travail et, d’une façon générale, de tous les
grands moyens de production. Comme, d’autre part, les instruments de
travail dont l’importance est décisive sont ceux qui servent à la production
de nouveaux instruments de travail, les plans fixent ime cadence parti­
culièrement rapide pour la production des maclünes destinées à produire
des machines.
b) Biens de consommation

81. Les plans relatifs à la production de biens de consommation n’ont


pas seulement pour objectif d’assurer ime croissance constante et rapide
de cette production, à un rythme dépassant celui de l’accroissement de la
population; ils établissent aussi un certain rapport entre la composition
de cette production et celle de la demande de la population. Comme la
composition de cette demande, qui a sa source dans les divers besoins
humains, est extrêmement complexe, la règle suivie généralement dans la
planification de la production de biens de consommation consiste à établir
des rapports corrects entre le développement de la production alimentaire
et celui de la production non alimentaire. Les taux de croissance les plus
élevés sont fixés pour la production de produits non alimentaires et, dans
cette catégorie, la part des articles à usage ménager et culturel s’accroît
avec une rapidité toute particulière.
82. A mesure que les forces productives de la société se développent,
la composition de la demande de la population change considérablement.
Certaines demandes sont entièrement satisfaites; d’autres commencent à
se faire sentir. Ce fait exige un développement constant de la production
de biens de consommation et une adaptation continuelle de sa composi­
tion. En même temps, la structure de la production des biens de consom­
mation doit être de nature à assurer un certain équilibre dans le dévelop­
pement des différents secteurs de la production, en particulier de ceux qui
sont étroitement liés et interdépendants (l’industrie du vêtement, l’industrie
textile, les industries alimentaires et l’agriculture, etc.).
83. Le fonds d’achat de la population est calculé d’après la balance des
recettes et des dépenses en monnaie de la population. Celle-ci offre un
moyen d’assurer la coordination nécessaire entre le fonds d’achat, d’une
part, et les ressources en marchandises et le plan de circulation des mar­
chandises, d’autre part; elle permet également de déterminer plus facile­
ment les mesures nécessaires pour accroître les services payants fournis
par le réseau des établissements de services personnels, les entreprises
municipales et de transport, les cinémas, les théâtres et les moyens de
communication.
c) Produits agricoles

84. Déterminer la demande de produits agricoles est le problème cen­


tral de la planification de la production agricole. De la solution correcte
dépendent la satisfaction des besoins de la population en biens de con­
sommation, les proportions entre l’industrie et l’agriculture, les taux de
développement des diverses branches de l’agriculture et les rapports entre
ces branches.
85. Les prodmts agricoles, on le sait, sont utilisés pour la consomma­
tion personnelle, comme matières premières dans l’industrie et pour la
consommation productive dans l’agriculture.
86. Le volume des produits agricoles nécessaires à la satisfaction di­
recte des besoins personnels de la population et à la production de biens
de consommation est déterminé sur la base des normes de la demande.
Une méthode particulière est employée pour fixer les besoins de l’industrie
en produits agricoles servant de matières premières pour la production des
biens de consommation: on détermine d'abord, d’après les normes, la de­
mande de la population en produits industriels (tissus, chaussures, etc.), et
on établit ensuite le volume des matières premières agricoles nécessaires
à la production de ces biens. Les besoins en matières premières agricoles
sont calculés d’après les normes de la consommation de matières premiè­
res dans la production de tel ou tel article de consommation, ou d’après
les normes de rendement en produits finis à partir de la matière première.
87. La demande de produits agricoles à l’intérieur du secteur agricole
est déterminée à partir des données concernant, d’une part, les surfaces
à ensemencer et l’effectif du cheptel, et, d’autre part, les normes de la
consommation de semences et de fomrage.
88. Afin de fixer les besoins de l’économie en produits agricoles et de
coordonner ces besoins avec les capacités de production, on établit des ba­
lances pour les principaux genres de produits agricoles.

d) Transports

89. Les besoins de l’économie en transports s’expriment par le volume


du trafic marchandises, qui est mesuré en tonnes-kilomètres.
90. Le volume du trafic marchandises est l’indicateur le plus impor­
tant du plan des transports, car il détermine au fond les besoins du pays
en matériel roulant et en combustibles, la longueurs des voies de communi­
cation, etc. Le volume du trafic marchandises dépend à son tour, première­
ment, du volume des marchandises transportées et, deuxièmement, des
distances couvertes.
91. Le volume prévu du trafic marchandises dépend de celui de la pro­
duction industrielle et agricole. Cela ne signifie pas que le premier soit
une fonction directe du second. Le volume du trafic varie également selon
la structure de la production et pour les diverses marchandises selon le
rapport de la production non transportée à la production totale.
92. L’évaluation du volume du fret d’après son rapport avec la pro­
duction matérielle est, bien entendu, toujours approximative. Elle ne peut
avoir de valeur pratique que dans les cas où une très grande exactitude n’est
pas nécessaire, par exemple aux stades initiaux de l’élaboration du plan
des transports de marchandises. Il faut se rappeler cependant que les
évaluations même approximatives doivent correspondre d’assez près à la
réalité. Les coefficients comptables de transport ne peuvent donc pas faire
l’objet d’une extrapolation automatique. Ils ne peuvent être utilisés avec
succès que s’ils ont été analysés soigneusement et corrigés en fonction des
particularités de la reproduction pendant la période du plan.
93. Pour déterminer les besoins en transport de l’économie nationale, on
recoxut essentiellement à la méthode des balances. Pour connaître le volmne
des chargements à expédier, tant pour les divers types de marchandises que
pour la production dans son ensemble, il faut établir des balances matières
pour les types de marchandises qui représentent une proportion impor­
tante du trafic.
94. Ce sont les balances régionales de la production et de la consom­
mation des différents types de marchandises qui permettent de fixer avec
la plus grande précision le volume des marchandises à transporter. Une
tâche importante à cet égard est de déterminer la variante optimale pour
relier telle région de consommation aux régions de production.
95. Le principal moyen permettant de déterminer la quantité et l’as­
sortiment des marchandises à produire, ainsi que de planifier les livraisons
de marchandises, est l’étude approfondie et systématique de la demande.
Les demandes de biens des millions d’acheteurs soviétiques sont aujourd’hui
des plus variées. Les organisations commerciales doivent déterminer le
volume de la demande pour les différents articles, en tirer des conclusions
générales et porter celles-ci à la connaissance des entreprises qui fabri­
quent les biens de consommation; elles doivent tenir compte de l’étude de
la demande lorsqu’elles passent leurs commandes et lorsqu’elles dorment
leur avis quant à l’assortiment (couleurs, modèles, dimensions, emballage,
etc.) des produits livrés.
96. L’évaluation détaillée de la demande de biens de consommation est
une condition essentielle de la répartition correcte des marchandises entre
les diverses régions et les divers districts du pays.
97. Pour déterminer le volume des transports du commerce de détail,
on commence par déterminer le montant du fonds d’achats de la popula­
tion (les moyens monétaires dont elle dispose pour l’acquisition de mar­
chandises). On utilise à cet effet les méthodes de la programmation liné­
aire, en tenant dûment compte des critères suivants (pris séparément ou
ensemble): la distance la plus courte, le prix de revient le plus bas et le
tarif de transport le plus bas.

e) Mise au point de nouvelles techniques

98. Le progrès technique et les investissements, entre lesquels existe


un lien direct, sont les principaux moyens d’accroître et d’améliorer la
production; ce sont des éléments importants du programme de production
du plan économique.
99. Le but essentiel du plan technique est d’assurer l’utilisation la plus
économique du travail social, d’alléger ce travail et de parvenir ainsi à des
taux de croissance élevés pour le produit social. Un grand nombre de me­
sures variées sont prises chaque année à cette fin dans l’industrie, la con­
struction, l’agriculture et les transports. On peut les classer en plusieurs
groupes, dont chacun représente une orientation particulière du développe­
ment technique: mécanisation, automatisation, électrification des processus
de production et application de méthodes chimiques. Ces dernières années,
d’autres aspects du développement technique ont pris une importance
croissante, par exemple l’électronique, la propulsion à réaction et la
technologie atomique.
100. Les plans d’Etat arrêtent des objectifs précis pour chacun de ces
aspects du progrès technique.
101. En raison de l’influence décisive du progrès technique sur le vo­
lume et les rapports de la production sociale, il convient de coordonner le
plan de mise au point et d’implantation de nouvelles techniques avec le
programme de production et de construction, avec le programme relatif
à la main-d’œuvre et avec d’autres parties importantes du plan économique
national.
102. Les liens qui existent entre le plan de mise au point de nouvelles
techniques et le programme de production du plan général sont récipro­
ques. Les indicateurs du plan de progrès technique (perfectionnement des
machines, introduction de nouveaux types de matériel, et modernisation
des procédés techniques) déterminent dans une large mesure les normes
technico-économiques de l’utilisation des matières premières, des maté­
riaux, des combustibles, de l’énergie et de l’outillage. Sur la base du plan
technique, on détermine la nomenclature et l’assortiment des produits à
fabriquer, on revise les nonnes et on relève les exigences concernant la
qualité de la production.
103. D'autre part, une condition essentielle du progrès technique est le
développement prioritaire de branches industrielles telles que la construc­
tion mécanique, la fabrication d’instruments, l’industrie électronique, l’in­
dustrie énergétique et la fabrication de matières synthétiques, de résines
et de matières plastiques.

f) Main-d’œuvre

104. Le nombre des ouvriers et des employés occupés dans des bran­
ches et dans des organisations auxquelles sont assignés des objectifs quant
au volume d’opérations et à la productivité du travail est calculé en fonc­
tion de ces objectifs.
105. Dans les branches et les organisations dont l’activité répond aux
besoins culturels et ménagers de la population, ou qui fournissent des ser­
vices, et poin- lesquelles il n’est pas fixé d’objectifs touchant l’augmenta­
tion de la productivité du travail, le nombre des travaillées est établi
d’après le plan de développement du réseau d’institutions et d’organisa­
tions en question; il est tenu compte de la date à laquelle les institutions
et les organisations doivent entrer en activité, de l’ampleur de leiurs opéra­
tions et du nombre de personnes à desservir, les calculs étant fondés sur
les normes d’emploi approuvées et sur les effectifs réels du réseau exi­
stant.
106. Par exemple, le nombre des travailleurs employés dans les établis­
sements et services de santé est fixé d’après les dispositions du plan qui
concernent le nombre de lits d’hôpital et de maison de cure, le nombre de
places dans les crèches et les garderies d’enfants, et l’effectif normal du
personnel par centaine de lits (ou de places), en tenant compte de l’effec­
tif réel du réseau existant, du nombre de médecins et d’auxiliaires médi­
caux achevant leur formation, et de la proportion du personnel occupant
plus d’un poste. L’effectif des maîtres dans les établissements d’enseigne­
ment général est fixé d’après le nombre des classes prévues et le pro­
gramme scolaire.
107. Pour déterminer le nombre des travailleurs, on étudie la composi­
tion actuelle des cadres et la mesure dans laquelle celle-ci correspond aux
besoins. On vise à obtenir une utilisation plus efficace des cadres, à sim­
plifier la structure des organisations et à réduire encore l’appareil admini­
stratif.
108. En calculant l’effectif des ouvriers, on s’attache à déterminer les
besoins en personnel occupé aux travaux auxiliaires: transports et manu­
tentions à l’intérieur de l’entreprise, entretien du matériel, préparation de
l’outillage, contrôle technique, etc. Il est possible d’augmenter considé­
rablement la productivité de la main-d’œuvre en général en relevant celle
de ces travailleurs auxiliaires.
109. L’industrialisation du pays et l’élévation du niveau technique de
la production sociale ont amené un changement notable dans la répartition
des ressources en main-d’œuvre entre les diverses branches. La proportion
des travailleurs industriels s’est fortement accrue, tandis que celle des
travailleurs employés dans l’agricultiure s’est réduite.
110. En même temps, les grands programmes destinés à accroître le
bien-être des travailleurs et à satisfaire au maximum les besoins culturels
et ménagers de la population se traduisent par une augmentation considé­
rable du nombre des travailleurs employés dans l’enseignement, les ser-
vices sanitaires, l’économie commimale et l’habitat, ainsi que dans les ser­
vices culturels et ménagers.
111. Des plans sont en cours d’élaboration pour simplifier la formation
professionnelle et pour attirer les jeunes gens vers l’industrie.

g) Spécialistes
112. Les plans de formation de spécialistes dans les différents domai­
nes de la vie économique et culturelle sont établis d’après la demande de
ces spécialistes dans chaque branche de l’économie. Pour évaluer cette
demande, on tient compte de la proportion entre les spécialistes possédant
de hautes qualifications et ceux qui ont des qualifications moyennes et
des variations que cette proportion doit subir selon les besoins de l’éco­
nomie nationale.
113. Le nombre des étudiants admis annuellement dans les établisse­
ments d’enseignement supérieur et secondaire spécial est déterminé, pour
chaque catégorie, en fonction des besoins supplémentaires des différentes
branches de l’économie et des différents domaines d’activité culturelle. Ces
besoins sont calculés sur une base annuelle.
114. Les besoins supplémentaires de spécialistes sont établis d’après
les plans perspectifs arrêtés pour le développement de la production et des
divers secteurs non productifs. On tient compte à cet effet de facteurs tels
que l’élévation du niveau technique de la production, les changements con­
cernant la technologie et la structure de la production, l’augmentation de
la charge de travail des bureaux d’études, etc.

M é t h o d e D’é t a b l is s e m e n t du plan

115. L’élaboration d’un plan économique d’ensemble exige les efforts


réunis de tout l’appareil de planification. Toutes les parties du plan et ses
indicateurs doivent être justifiés en détail en ce qui concerne tant la dé­
termination des besoins économiques que leur satisfaction en fonction des
ressources matérielles et financières et des disponibilités en main-d’œuvre.
116. Les travaux d’élaboration du plan se poursuivent presque simul­
tanément dans tous les départements de l’appareil de planification. La pla­
nification repose sur des plans à long terme, dont les objectifs sont éche­
lonnés d’année en année, par secteurs particuliers, régions économiques,
entreprises et organismes de construction. Les plans annuels actuels sont
fondés sur la décomposition annuelle des objectifs du plan à long terme,
compte tenu de l’état d’avancement de l’exécution du plan et des modi­
fications survenues dans les besoins de l’économie et dans les relations
économiques.
117. Le plan de l’Etat est fondé sur les plans préparés par les entre­
prises, les organismes de construction, les sovnarkhozes, les ministères et
les services. La méthode à suivre et les délais à respecter pour l’élabora­
tion des plans économiques nationaux sont fixés à l’avance par décision
des organes directeurs.
118. L’élaboration du plan comprend les opérations suivantes:
Détermination de la forme des tableaux, des indicateurs et de leur
mode d'emploi;
Récapitulation et estimation des résultats du plan en cours;
Etablissement des directives (chiffres de contrôle) pour l’élaboration
du plan;
Mise au point et approbation du plan;
Communication des objectifs du plan d’Etat aux organes directement
chargés de sa réalisation — entreprises, organismes de construction, etc.
119. Dans la pratique, il est très souvent difficile de distinguer chacune
de ces opérations. Ainsi, en analysant les travaux d’exécution du plan pen­
dant la période précédente, on établit les indicateurs de base pour la pé­
riode planifiée; mais, ce faisant, on précise en même temps les résultats
attendus de l'exécution du plan à la fin de la période précédente.
120. La détermination de la présentation des tableaux, des indicateurs
et de leim mode d’emploi assure l'uniformité de l'élaboration du plan dans
tous les organes de planification.
121. Une présentation des indicateurs et un mode d'emploi uniformes
permettent d’établir les plans sous une forme comparable et schématique
dans tous les domaines économiques (ainsi qu’à l’intérieur de chacun de ces
domaines), tant à l’échelon national que dans chaque territoire.
122. Pour les entreprises, les tableaux et les indicateurs sont fixés de
façon à pouvoir s’inscrire aisément dans le cadre des projets de plans
établis par les ministères, les services, les républiques fédérées, les sov­
narkhozes, ainsi que dans l’ensemble du plan d’Etat unique.
123. Après avoir établi les formulaires de tableaux, les indicateurs et
les modes d’emploi, on procède à l’organisation des travaux directement
liés à l’élaboration du plan. Au stade initial, ces travaux consistent à ré-
siuner et à analyser les résultats du plan pendant la période de base en
cours.
124. Etant donné que les travaux relatifs au plan futur sont commen­
cés avant la fin de la période en cours, il y a lieu de déterminer le niveau
de réalisation prévu. A cette fin, on utilise les données connues relatives au
temps déjà couru, et le niveau d’exécution du plan prévu pour la partie
qiu reste à courir est déterminé grâce à une analyse rigoureuse et à des
méthodes de prévision scientifique.
125. L’élaboration proprement dite du plan économique national dé­
bute par l’établissement de directives ou de chiffres de contrôle pour la
période de planification. Ces données indiquent les objectifs du développe­
ment économique pour chaque secteur, déterminent les domaines de base
où les objectifs sont fixés en priorité pendant la période de planification
et comprennent également l’exposé des principales mesures à prendre en
vue de leur réalisation. Des chiffres de contrôle provisoires sont établis par
les organes centraux de planification, avec l’aide des républiques, des minis­
tères et des services, compte tenu des indications fournies par l’analyse
des données d’exécution pendant la période précédente. En même temps,
on fait largement appel au système des balances économiques, afin d’as­
surer la coordination de toutes les parties du plan et de ses indicateurs
à ce stade d’élaboration. Les chiffres de contrôle approuvés par les organes
administratifs nationaux constituent une base indispensable pour l'élabora­
tion d'un projet de plan détaillé.
126. Les directives (chiffres de contrôle) des plans à long terme sont
décomposées en fractions annuelles.
127. Outre les chiffres de contrôle provisioires, les organes centraux de
planification élaborent et soumettent à l’approbation du gouvernement im
projet de balance d’ensemble dans les domaines suivants: métaux ferreux
et non ferreux, combustibles, produits pétroUers, énergie électrique, pro­
duits chimiques, bois d’œuvre et matériaux de construction, principaux
types de matériel, matériel agricole et principaux produits de l’industrie
légère et de l’industrie alimentaire.
128. Sur la base des chiffres de contrôle, des projets de plans sont
élaborés dans tous les secteurs du système de planification. En URSS par
exemple, ce travail se fait comme suit:
129. Les entreprises et les organismes de construction mettent au point
des plans en se servant des chiffres de contrôle comme point de départ et
en tenant compte des rapports économiques directs déjà établis et de leur
extension ultérieure. Les plans sont examinés par les assemblées collecti­
ves des entreprises et des organismes de construction et entrent en vigueur
après avoir été approuvés par le sovnarkhoze.
130. Les sovnarkhozes élaborent les plans d’ensemble à long terme
pour chaque région compte tenu des rapports directs avec les autres ré­
gions économiques. Les conseils des ministres des républiques veillent à ce
que les plans établis par les sovnarkhozes correspondent aux chiffres de
contrôle et approuvent le plan d’ensemble à l’échelon de la république.
L’élaboration des plans s’effectue à peu près de la même manière pour
toutes les branches de l’économie, qu’elles relèvent de la compétence de
l’Union, des républiques fédérées ou des ministères et des services des
républiques.
131. Les organes centraux de planification s’assurent que les plans des
républiques, des ministères et des services sont conformes aux chiffres de
contrôle approuvés et décident dans quelle mesure les modifications que l’on
propose d’y apporter sont justifiées; ils élaborent ensuite un plan d’ensemble
pour toute l’URSS qu’ils soumettent à l’approbation du gouvernement.
En même temps, une liste des investissements destinés aux projets de con­
structions les plus importants lui est soumise. Le volume de capitaux et les
travaux de construction et de montage qu’exige chaque projet de construc­
tion sont également fixés pour toute la période de préparation et les maté­
riaux nécessaires sont prévus.
132. Dans l’examen des projets de plans des républiques, des ministères
et des services, on s’attache particulièrement à assurer des rapports satis­
faisants entre les républiques dans chaque secteur économique.
133. En ce qui concerne l’agriculture, les plans de production des fer­
mes collectives se distinguent par certaines particularités. C’est à la ferme
collective qu’il appartient de déterminer la superficie des terres à ensemen­
cer pour chaque culture, ainsi que la productivité de l’élevage du bétail et
le nombre de têtes de chaque espèce, en se fondant sur les objectifs qui
lui ont été fixés pour la vente à l’Etat des produits de l’agriculture et de
l’élevage et en tenant compte des besoins en produits agricoles des travail­
leurs des fermes collectives.
134. Les projets de plans d’ensemencement pour les différentes cultu­
res et les plans relatifs au développement de l’élevage du bétail sont discu­
tés et approuvés lors des réunions générales des travailleurs des fermes
d’Etat; ils sont ensuite approuvés par les services de production agricole
des fermes collectives du territoire, qui recommandent d’effectuer les
remaniements nécessaires.
135. En vue de contrôler et d’assurer l’exécution du plan de production
et d’achat par l’Etat des produits de l’agriculture et de l’élevage, ainsi que
la répartition satisfaisante des machines, de l’énergie électrique, des in­
vestissements et des autres ressources, les organes centraux de planifica­
tion analysent les plans de développement agricole qui leur sont soumis
par les républiques fédérées.
136. Les divergences d’opinion qui peuvent se faire jour au cours des
travaux d’élaboration du plan sont tranchées lorsque le plan est examiné
et approuvé par le gouvernement.
137. Il convient de souligner que le projet de plan économique unique
de l’Etat n’est pas ime simple juxtaposition des plans des républiques et des
services. Au cours des travaux relatifs au plan, les plans provisoires des
ministères et des républiques sont vérifiés, corrigés et entièrement co­
ordonnés. Afin de s’assurer qu’ils sont conformes aux intérêts générapx de
l’Etat, le Gosplan de l’URSS établit un projet de plan provisoire qui sert
de critère pour évaluer les plans des républiques, des ministères et des
services. Les organes locaux et les organes des républiques procèdent de la
même façon pour vérifier les plans des organisations qui relèvent de
leur compétence. La coordination des plans des ministères, des départe­
ments et des républiques, qui représentent les parties d’im plan économi­
que national unique, est effectuée à l’aide du système des balances, notam­
ment de la balance d’ensemble de l’économie nationale.
138. En déterminant les objectifs, on prévoit également, dans le cadre
du plan, les conditions et les mesures fondamentales destinées à assurer
leur réalisation dans chaque secteur de l’économie et de la production.
139. Le Conseil des ministres de l’URSS, puis le Soviet suprême de
l’URSS, examinent et approuvent le plan économique national, en fonction
duquel les ministères, les services, les républiques fédérées, les sovnar­
khozes, ainsi que les organes locaux et les entreprises directement intéres­
sées mettent au point leurs plans particuliers.
140. Lors de l’établissement des plans annuels, on effectue les remanie­
ments qui peuvent s’imposer dans les objectifs des plans à long terme en
raison de la découverte, au cours de l’exécution du plan, de nouvelles réser­
ves et possibilités, de l’apparition de besoins nouveaux, des modifications
survenues dans les rapports économiques, etc.
141. Pour chaque entreprise, les indicateurs du plan d’Etat tiennent
compte de facteurs concrets: capacité de production et mesure dans la­
quelle elle est utilisée, délais nécessaires pour la modifier, fourniture de
matériaux bruts et autres, de combustible, d’énergie électrique, de person­
nel, etc.
142. Sur la base des objectifs qui leur sont tracés, les entreprises éta­
blissent des plans de production détaillés. Dans les entreprises d’Etat, ces
plans sont approuvés par les directeurs. Dans les fermes collectives, les
plans de production et les évaluations chiffrées sont approuvés lors des
réunions générales des travailleurs des artels.
143. Les objectifs communiqués aux entreprises et les plans détaillés
établis sur la base de ces objectifs doivent correspondre aux objectifs
d’ensemble du plan d’Etat.
144. Sur la base des plans approuvés, des accords économiques sont
conclus entre les foumissems et les entreprises consommatrices. Ces
accords définissent les obligations précises qui incombent aux foumisseims
et aux consommateurs et indiquent exactement la quantité, le degré de
finition et la gamme des produits à foiunir, le prix unitaire des produits
et le montant total des fournitures, ainsi que les méthodes de comptabilité
et la procédure à suivre pour imposer des pénalités.
145. L’accomplissement exact et ponctuel des obligations contractuel­
les est xme condition indispensable pour assurer la croissance continue de
la production et prévenir l’apparition de déséqxiilibres et de disproportions
dans le développement économique.
146. Afin d’obtenir une croissance continue de la production, la société
socialiste crée et utilise, au cours de l’exécution du plan économique, les
réserves nécessaires de matières, de main-d’œuvre et de capitaux. Il est
impossible de gérer une économie planifiée sans disposer de réserves. En
réservant une partie de la capacité de production, en constituant des ré­
serves de grains, de matières premières, de marchandises et de capitaux,
ü devient possible de surmonter à coup sûr les difficultés qui peuvent se
produire au cours du développement économique du pays, d'éviter les
déséquilibres temporaires et partiels et d’assurer le fonctionnement con­
tinu des entreprises en toute circonstance ainsi que l’essor régulier de
l'économie.
147. La coordination et l’intégration des plans de développement des
entreprises, des secteurs et des régions économiques permettent de s’as­
surer que l’unité nécessaire est maintenue dans le développement de
l’ensemble de l’économie conformément à une politique unique. En l’ab­
sence de cette coordination et de cette intégration, on ne saurait concevoir
une économie planifiée à l’échelle nationale.
148. Coordonner et intégrer les opérations des secteurs mixtes de
l’économie et des districts économiques revient, pour l’essentiel, à harmo­
niser les besoins particuliers d’un district ou d’un secteur, ou de l’ensemble
du pays, avec les ressources dont on dispose pour y faire face. En dernière
analyse, il s’agit d’adapter la production à la consommation et les besoins
aux ressources.
149. Les rapports qu’il convient d’observer entre les divers secteurs de
production matérielle sont détemiinés en premier lieu par la division so­
ciale du travail et la nature des rapports de production entre les secteurs.
En outre, le maintien de rapports convenables entre les secteurs mixtes
implique l’établissement de proportions satisfaisantes en ce qui concerne
la capacité de production et la répartition de la main-d’œuvre. Il est essen­
tiel que l’interdépendance des rapports intersecteurs soit déterminée avec
précision dans le plan, afin que toutes les entreprises puissent fonctionner
régulièrement, efficacement et sans interruption.
150. Les modifications qui se produisent dans les proportions de la
production matérielle n’affectent pas seulement les secteurs directement
intéressés, mais l’ensemble de l’économie nationale.
151. La coordination des plans ne consiste pas seulement à équilibrer
et à intégrer les facteurs physiques et matériels. La hausse des salaires et
autres revenus individuels doit aller strictement de pair avec l’accroisse­
ment de la production des biens mis en vente (stocks des marchés), le
rythme d’écoulement des marchandises et le barème prévu pour les divers
services payants; l’accroissement du volume des travaux d’équipement
doit correspondre au montant total des investissements qui y sont affectés.

R appo rt e n t r e l e s plans an n u els e t le bu d g et

152. La planification financière fait partie intégrante de la planification


économique. Il faut élaborer et approuver non seulement un plan d’Etat,
mais aussi un budget national et les plans de la Banque d’Etat relatifs au
crédit et aux paiements au comptant. La planification financière est fondée
sur les plans financiers des divers secteurs et entreprises économiques et
se traduit par un plan financier global qui porte sur l’ensemble des recet­
tes et des dépenses de l'Etat.
153. La planification financière a pour but de déterminer le montant
des fonds nécessaires pour exécuter le plan économique, des les répartir
entre les divers secteurs économiques et les différents types de construc­
tion à usage social et culturel, conformément aux objectifs du plan, et de
réaliser des économies de matériaux et de capitaux.
154. Le budget national est à la base de l'ensemble du système finan­
cier. Dans le processus de reproduction, le budget national a pour fonction
économique principale de constituer une réserve financière générale plani­
fiée destinée à l’exécution du plan économique. Le budget constitue le prin­
cipal plan financier de l’Etat et sert à condenser les divers plans financiers
en un système unifié de planification financière. Il tire ses ressources des
divers secteurs et entreprises économiques qui influent sur le budget, d’ime
part par les versements qu’ils effectuent au titre de la taxe sur le chiffre
d’affaires et de la taxe sur les bénéfices, et d’autre part, par les sommes
qu’ils reçoivent aux fins de la création de capital fixe et de la reconstitu­
tion des fonds de roulement. Le plan relatif au crédit est alimenté par des
fonds budgétaires. Le plan relatif aux paiements au comptant intéresse le
budget de l’Etat dans les domaines suivants: paiement des rémunérations
aux travailleurs des secteurs non productifs, versements de pensions et de
subventions, effectués grâce aux recettes fiscales et à d’autres types de
paiement. Le budget national comprend environ les trois quarts de l’en­
semble des ressources financières.
155. Les recettes du budget national proviennent surtout des revenus
du secteur socialiste de l’économie (taxes sur le chiffre d’affaires et les
bénéfices), de recettes fiscales (taxes perçues sur les particuliers, impôts
frappant les fermes collectives et les coopératives et taxes sur les opéra­
tions non commerciales) et des fonds d’assurance sociale de l’Etat.
156. La planification du volume des recettes du budget national pro­
venant du secteur socialiste de l’économie est fondée sur le programme de
production, sur les plans visant à augmenter la productivité du travail et
à réduire les coûts de production, et sur les mesures envisagées pour réa­
liser de nouvelles économies et obtenir un meilleur rendement dans l’utili­
sation des ressources matérielles et financières.
157. Une partie des fonds provenant de l’ensemble de la population
(impôts, emprunts et dépôts dans les banques d’épargne) passe dans le
budget de l’Etat et est destinée à faire face aux besoin généraux. La partie
des fonds du budget qui provient des impôts versés par les particuliers
diminue régulièrement et, dans quelques années, l’augmentation de l’accu­
mulation socialiste en URSS permettra la suppression de toutes les formes
d’impôts versés par ces contribuables.
158. La planification des dépenses du budget national est fondée sur
les objectifs du plan visant l’augmentation de la production et de la con­
struction, la réduction des coûts et l’accroissement des bénéfices, sur les
mesures sociales et culturelles et les dépenses consacrées à l’administra­
tion et à la défense.
159. Le financement des activités économiques au titre du budget na­
tional revêt notamment les formes suivantes: formation de capital fixe,
qui assures la reproduction élargie des avoirs fixes; capitaux de roulement
versés aux entreprises et aux organisations financièrement autonomes
ainsi qu'aux nouvelles entreprises (fonds destinés aux entreprises socia­
listes et aux organisations économiques en vue d’accumuler des stocks de
matériaux de production, des articles finis et semi-finis et d’autres mar­
chandises, et de faire face aux autres besoins en matière de production et
d’écoulement); réparation d’avoirs fixes dans certains secteurs économi­
ques; assistance fournie aux nouvelles entreprises pendant la période ini­
tiale de fonctionnement. Pour financer les diverses opérations décrites
ci-dessus, on utilise, outre les fonds fournis par le budget national, ceux
dont disposent les entreprises et les organisations économiques.
160. Dans le cadre de la planification des dépenses concernant l’en­
seignement public et la culture, il convient de fixer des objectifs en vue
d’augmenter le nombre des établissements sociaux et culturels et leurs
effectifs, ainsi que de contingenter les fournitures nécessaires à ces établis­
sements. Ces dépenses sont financées à l’idde de fonds provenant du budget
national et d’autres sources. Les fonds provenant du budget de l’Etat ser­
vent également à couvrir les dépenses imputables aux assurances sociales
des travailleurs. En outre, un fonds d’assurance sociale de l’Etat est con­
stitué à l’aide des sommes perçues sous forme de déductions par les entre­
prises, organisations et institutions socialistes.
161. Les fonds du budget national sont fournis par les entreprises
socialistes. Les plans financiers des secteurs économiques sont établis en
fonction de la production des entreprises d’Etat, de leurs dépenses de
production, de l’accumulation des recettes provenant des taxes sur le
chiffre d’affaires et les bénéfices et des dépenses afférentes à la formation
de capital, à l’augmentation des stocks courants, etc.
162. Les rapports entre les entreprises d’Etat et le système financier
se traduisent dans le budget par des recettes (versements aux organismes
d’assurance et intérêts versés sur les crédits bancaires) et par des débours
(reconstitution des fonds de roulement, formation de capital et répara­
tions).
163. L’Etat participe au financement des investissements des fermes
collectives et des coopératives sous forme de crédits.
164. L’octroi de crédits permet d’absorber les fonds excédentaires des
entreprises et les fonds disponibles du budget national conformément au
plan prévu.
165. Le système des crédits bancaires, tel qu’il est utilisé par l’Etat,
joue im rôle important pour contrôler l’exécution du plan et influer sur le
processus de reproduction. Les opérations de la Banque d’Etat font l’objet
d’un plan de crédit, directement lié à la planification de la production,
des services de distribution et de la circulation des produits. Dans la partie
du plan qui a trait aux dépenses tous les crédits sont classés par béné­
ficiaires (républiques fédérées, ministères, etc.), et par catégorie (crédits
destinés à constituer des stocks saisonniers de matières, avances consenties
aux expéditeurs de marchandises en cours de transport en attendant la
réception des paiements, etc.). Le plan de crédit permet d’établir la balance
des dépenses destinées au secteur socialiste de l’économie.
166. Le plan de la Banque d’Etat relatif aux opérations au comptant,
qui est directement lié à la balance des revenus et des dépenses des parti­
culiers, permet de réglementer la circulation monétaire. Conformément
aux indicateurs du plan économique et au budget, le plan au comptant fixe
le volume des espèces que la banque reçoit de diverses sources, des dé­
bours à des fins diverses et, si nécessaire, le montant des espèces à émettre
ou à retirer de la circulation.
167. En vue de coordonner l’ensemble du système de planification
financière et d’exercer un contrôle plus étroit sur les fonds destinés à
l’exécution du plan économique national, on établit un plan financier
synoptique, qui couvre toutes les recettes et les dépenses de l’Etat pendant
la période d'exécution du plan. Il n’est pas nécessaire que ce plan soit
directement approuvé par le gouvernement; c’est un bilan qui sert à éla­
borer le plan d’Etat et à donner une base économique rationnelle à la
planification financière.
168. Le plan financier synoptique comprend les postes de recettes sui­
vants: taxes sur le chiffre d’affaires, bénéfices, provisions pour amortisse­
ment, recettes provenant des fermes collectives et des coopératives, fonds
provenant des assurances sociales de l'Etat, fonds perçus par l'Etat sur les
particuliers, dépôts dans les banques d’épargne, recettes provenant du
commerce extériem:, etc. Les postes de dépenses du plan sont les suivants:
travaux d’équipement, réparation des avoirs fixes, augmentation des fonds
de roulement des entreprises et organisations d’Etat, augmentation des
réserves de cheptel dans les fermes d’Etat et les parcelles annexes, mesures
d’ordre social et culturel, augmentation des stocks de matériaux détenus
par l’Etat, dépenses afférentes à la défense, à l’administration, à la recon­
stitution des réserves bancaires, etc.
169. Si le plan financier synoptique fait ressortir un déficit, cela dé­
montre que les objectifs du plan économique en ce qui concerne la pro­
duction, la consommation et l’accumulation ne sont pas suffisamment
coordonnés avec les indicateurs de qualité et de quantité. Pour combler ce
déficit, il faut trouver de nouveaux moyens d’accroître la production ou de
réduire les dépenses de l’Etat. Si les disponibilités excèdent les dépenses
de l’Etat, il convient de prendre, le cas échéant, des mesures pour accroître
les fonds alloués aux banques.

CHAPITRE 2

EXÉCUTION DES PLANS

P a y s s o c ia l is t e s

170. En principe, le problème de l’exécution des plans ne se pose pas


de la même façon dans les pays socialistes que dans les pays à économie
de libre entreprise ou à économie mixte.
171. Aucun plan, quel qu’il soit, ne peut parer à toutes les éventualités
du développement économique, ni prévoir toutes les difficultés qui peuvent
se présenter pendant l’exécution du plan. Etant donné que la plupart des
activités économiques sont dirigées directement par l’Etat, les pouvoirs
publics jouent xm rôle primordial dans l’organisation de l’exécution du
plan. L’activité économique étant planifiée jusqu’au niveau de l’entreprise,
les plans stipulent non seulement les objectifs de chaque imité économi­
que, mais encore les moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs. Par
exemple, le plan type d’une entreprise fixe des objectifs non seulement
pour la production, mais aussi pour la consommation matérielle, l’emploi,
le rendement individuel, les salaires, la réduction des coûts, les ventes, le
profit et sa répartition, ainsi que l’investissement et son financement.
L’organisation de l’exécution du plan comporte le contrôle systématique
de l’exécution, l’institution de stimulants visant à améliorer les indicateurs
de fonctionnement, et la fourniture d’équipement et de matières premières
et autres.
172. Le contrôle systématique a pour but d’assurer que tous les sec­
teurs de l’économie nationale, toutes les entreprises et tous les sovnarkho­
zes exécutent régulièrement et conformément à tous les indicateurs quanti­
tatifs et qualitatifs les tâches fixées par le plan; de faire respecter la
discipline du plan d’Etat; d’éviter tout esprit de clocher; de déceler et
d’exploiter les possibilités latentes de croissance de la production; de
donner une large diffusion aux résultats des innovations, et de tirer parti
de ces innovations pour préciser et corriger les objectifs annuels des plans
à long terme; de prévenir tout déséquilibre temporaire ou partiel dans le
développement des industries et des régions économiques; enfin, d’éliminer
rapidement tout goulot d’étranglement dans la production grâce à une
utilisation appropriée des ressources matérielles et financières.
173. Le contrôle de l’exécution des plans ne peut être organisé comme
il convient que s’il est entrepris de façon systématique. Cela signifie qu’il
doit s’effectuer selon un programme déterminé qui a été soigneusement
élaboré. Des contrôles sont exercés non seulement dans les industries et
les entreprises qui, pour une raison quelconque, sont en retard sur le pro­
gramme qui leur a été assigné poim une période donnée, mais encore dans
les industries et les entreprises novatrices, afin d’étudier et de diffuser les
résultats d’expériences nouvelles.
174. Le contrôle de l’exécution du plan vise principalement les secteurs
et les industries clefs dont dépend le développement satisfaisant de l’éco­
nomie nationale tout entière. Il a pour but de favoriser la réalisation des
objectifs du plan non seulement au niveau des diverses régions économi­
ques ou administratives, des sovnarkhozes et des républiques, mais encore
au niveau de chaque entreprise, car il peut arriver que des moyennes stati­
stiques satisfaisantes masquent le fait que certaines entreprises n’ont pas
exécuté le plan.
175. Les vérifications au niveau de l’entreprise ont pour objet de
mettre en relief les facteurs qui influent sur l’application du plan. On
prend grand soin de rendre le contrôle efficace et pratique, et d’y dormer
suite: en d’autres termes, on complète le contrôle par des mesures desti­
nées à éliminer tous les facteurs qui entravent la bonne exécution des
plans.
176. Dans les pays socialistes, le contrôle de l’exécution des plans éco­
nomiques est l’affaire de toute la collectivité. Il est organisé à la fois par
les autorités de planification du gouvernement central et des républiques
et par les autorités administratives de l’Etat, les sovnarkhozes, les mini­
stères et les départements.
177. La nature du contrôle et les moyens employés varient selon l’orga­
nisme en cause et le niveau auquel s’exercent ses activités.
178. Les autorités de planification du gouvernement central et des
républiques contrôlent principalement les indicateurs généraux des plans
d’Etat, en se fondant sur les dormées fournies par les services de stati­
stique et les sovnarkhozes et en procédant à des vérifications sur le plan
local. Elles vérifient soigneusement si les directives et les ordres du Parti
et du gouvernement sont exécutés, afin que des mesures puissent être
prises rapidement dans les secteurs qui accuseraient xm certain retard.
179. Les organismes financiers, les banques et les services statistiques
de l’Etat participent à la sxmveillance de l’exécution des plans économi­
ques exercée par les autorités de planification et les autorités de contrôle.
Les organismes financiers, qui tiennent xm compte exact des recettes en­
registrées par les entreprises socialistes et de l’utilisation des fonds budgé­
taires, parvieiment à remplir leurs obligations budgétaires tout en mettant
à jour les lacunes dans l’exécution des plans de production et dans la
réalisation des objectifs en matière de coûts de production, ainsi que les
violations des règles d’économie.
180. Les organisations locales volontaires du Parti et des syndicats
jouent xm rôle actif dans le processus de contrôle, en surveillant au jour
le jour l’application des plans.
181. Les travailleurs, les ingénieurs et le persoimel technique, le per-
soimel de bureau, les cadres et les travailleurs des fermes collectives parti­
cipent à la surveillance de l’exécution des plans. Par l’intermédiaire de
leim Parti, de leurs syndicats et des organisations des jeunesses commu­
nistes, ou à l’occasion des conférences tenues régulièrement au niveau de
l’entreprise ou des réunions générales de kolkhoziens, ils dénoncent les
insuffisances dans le travail de tel ou tel directeur ou personnel de pro­
duction et proposent des améliorations.
182. L’exécution des plans est contrôlée conformément à im programme
préétabli portant sur les problèmes fondamentaux et sur les problèmes
supplémentaires qui se posent en cours d’exécution.
183. Dans la pratique, la méthode fondamentale de contrôle consiste
à comparer les données des plans avec les chiffres des relevés. On procède
ordinairement à l’analyse des travaux des entreprises ou des sovnarkhozes
en comparant les indicateurs réels avec les indicatems moyens correspon­
dants рош- l’ensemble de l’industrie et les chiffres contenus dans les rap­
ports des principales entreprises.
184. L’exécution du plan est vérifiée par l’analyse des relevés et des
statistiques et par des enquêtes directes sur place. Ces deux systèmes de
contrôle sont complémentaires. La surveillance est organisée en fonction
des rapports quotidiens que, dans la pratique, les autorités de planification
et les autorités économiques entretiennent avec les entreprises, les projets
de construction, les fermes collectives et les fermes d’Etat; elle comporte
l’application, pendant le processus même de vérification, de mesures parti­
culières permettant d’atteindre les objectifs de production, et la fourniture
d’vme assistance en vue de l’exécution du plan.
185. Le système de surveillance n’est pas le seul des moyens admini­
stratifs dont on dipose pour assurer l’exécution des plans. Les Etats socia­
listes recoшent également à de puissants moyens d’action économique
tels que le système autonome de comptabilité interne (khozrastchot), les
traitements et les salaires, les prix, le crédit, les profits, etc.
186. Un des moyens les plus efficaces d’encourager l’exécution et le
dépassement des plans de production est de faire appel dans toute la me-
5ше du possible au principe des stimulants matériels.
187. L’Etat socialiste applique le principe de l’intéressement des tra­
vailleurs des entreprises au produit de leur travail à l’aide de deux types
de stimulants matériels: les traitements et les salaires, qui sont la princi­
pale forme de rémimération du travail, et des stimulants matériels supplé­
mentaires offerts, sous forme de primes, aux ingénieшs et aux techniciens
ainsi qu’aux employés lorsque la production atteint un niveau conforme
aux besoins de l’économie nationale. Des primes peuvent être accordées,
en outre, à l’ensemble du personnel d’une entreprise qui a réussi à lancer
un matériel très perfectionné permettant d’alléger le travail ou d’écono­
miser les ressources de main-d’œuvre, qui a enregistré des résultats re­
marquables dans la compétition socialiste, etc. Un des moyens matériels
de stimuler la qualité du travail de chaque entreprise consiste à créer, dans
chaque usine, un fonds d’entreprise dont les ressources servent à élever le
niveau de vie des travailleurs et à améliorer la production.
188. Cependant, l’intéressement personnel n’est pas le seul moyen em­
ployé pour stimuler le développement économique du pays. Les stimulants
moraux sont largement utilisés, soit qu’ils fassent pendant aux stimulants
matériels, soit qu’ils soient combinés avec eux de diverses manières.
189. Des primes sont accordées aux directeurs, aux ingénieurs, au per­
sonnel technique et aux employés de l’industrie lorsque le plan relatif à la
réduction des coûts de production a été exécuté ou dépassé, et, dans cer­
taines industries, également lorsque la qualité de la production a été amé-
liorée et les objectifs des plans de production (ou de construction, ou de
transport) atteints pour une série donnée de produits, lorsque les plans
relatifs à la productivité du travail ont été exécutés, ou lorsque le person­
nel a atteint les objectifs qui lui ont été fixés en ce qui concerne la livrai­
son des produits de leurs entreprises à des entreprises situées dans
d’autres régions économiques ou administratives.
190. Dans im certain nombre d’industries (charbonnages, industrie pé­
trolière, mines, métallurgie, industrie chimique, etc.), des primes supplé­
mentaires sont accordées aux directeurs, aux ingénieurs et au personnel
technique lorsque le plan de production a été dépassé.
191. Les travaux susceptibles d’améliorer le progrès technique sont
encouragés par l’octroi de primes aux travailleurs de l’industrie qui ont
inventé de nouvelles machines, ou de nouveaux mécanismes, appareils, dis­
positifs ou autres éléments plus perfectionnés et plus rentables, ou mis au
point de nouveaux types de matières premières et de fournitures, et en ont
introduit l’emploi dans la production; aux travailleurs qui ont découvert
des procédés de fabrication très rentables qu’ils ont introduits dans la
production; et à ceux qui ont effectué des recherches théoriques et des
expériences utiles.
192. Afin d’élever le niveau de vie des travailleurs et d’améliorer la
production, des fonds d’entreprise sont établis dans toutes les unités indus­
trielles jouissant de l’autonomie financière.
193. Un fonds d’entreprise est alimenté chaque fois que le plan d’Etat
dûment approuvé est exécuté et dépassé quant au volume et à la diversité
de la production, à la réduction des coûts de production, aux bénéfices ou,
dans le cas d’entreprises dont les pertes sont prévues par le plan, chaque
fois que des économies sont réalisées grâce à la réduction des coûts de
production.
194. Le fonds d’entreprise est géré par le directeur de l’usine de con­
cert avec le comité syndical d’entreprise.
195. Parallèlement au système qui consiste à encourager la pleine exé­
cution des plans, il est prévu également diverses sanctions qui sont appli­
quées en cas de non-exécution des plans et des contrats, ou lorsqu’il y a
violation de la réglementation en matière de crédit ou des dispositions
d’ordre économique prises entre entreprises ou organisations, ou encore
lorsque les produits sont de mauvaise qualité. Les directeurs d’entreprise
sont tenus responsables, tant matériellement qu’administrativement, de
l’insuffisance des résultats.
196. Le principe qui consiste à intéresser personnellement les travail­
leurs à la production est appliqué à l’aide du système autonome de compta­
bilité interne, qui est un des principaux moyens d’action économique uti-
tisés dans le cadre de la planification. Ce système assure une juste inter­
dépendance entre les intérêts de la société et l’intéressement personnel des
travailleurs des entreprises socialistes. La balance entre les mises de fonds
et les résultats de la production doit être établie avec précision, les recet­
tes de l’entreprise doivent couvrir ses dépenses, et la rentabilité maximale
doit être obtenue avec un minimum de dépenses en matières premières, de
frais de main-d’œuvre, et de capitaux. Dans cet esprit, il est fourni aux
entreprises d’Etat des capitaux fixes et un fonds de roulement, et im cer­
tain degré d’autonomie leur est accordé dans les limites du plan.
197. Le système autonome de comptabilité encourage les cadres et les
travailleurs de l’entreprise à faire preuve d’une plus grande initiative en
découvrant et en exploitant de nouvelles réserves productives; il stimule
la réduction systématique des coûts de production, l’accroissement de
l’accumulation de capital, et l’exécution du plan selon les normes.
198. La comptabilité autonome exige l’établissement de rapports con­
tractuels entre les entreprises. Les contrats donnent ime forme concrète
au plan et sont un moyen efficace de contrôler son exécution. Ils stipulent
le volume, la variété et la qualité des articles à produire, les dates de
livraison, les conditions de paiement et les responsabilités des fournisseurs
et des cosignataires en cas de non-exécution (amendes, confiscations ou
autres sanctions).
199. Une des principales exigences qu’impose le système de compta­
bilité autonome aux entreprises est la rentabilité. On entend par là que
les fonds provenant de la vente de la production doivent non seulement
couvrir les coûts de production, mais encore rapporter im certain bénéfice.
Une des principales tâches de toute entreprise est d’assurer la rentabilité
de ses activités en réduisant systématiquement les coûts de production.
200. L’accroissement de la rentabilité de certaines entreprises ne doit
pas être réalisé aux dépens d’autres entreprises; il doit tendre à améliorer
la rentabilité de l’ensemble de l’économie.
201. L’application d’une politique des salaires bien conçue constitue
im des principaux moyens de stimuler l’exécution et le dépassement des
plans de production. Les salaires sont plus élevés dans les industries de
base (charbonnages, métallurgie, etc.) et dans les entreprises situées dans
des régions éloignées ou sous-peuplées. Il est également tenu compte des
qualifications professionnelles et d’autres éléments d’appréciation.
202. La planification des prix d’achat en gros et de vente au détail et
des tarifs des transports joue im rôle extrêmement important en tant que
moyen économique d’encourager le dépassement du plan.
203. Le régime des prix industriels comporte notamment: des prix de
gros sortie d’usine, des prix de gros pour l’ensemble de l’industrie et des
prix de détail. En outre, pour certaines catégories de produits industriels,
il existe ce que l’on appelle des prix comptables et des prix provisoires.
204. Le prix auquel une entreprise fonctionnant de manière satisfai­
sante écoule sa production (prix de gros sortie d’usine) couvre le prix de
revient prévu et permet de réaliser le profit prévu par le plan.
205. L’entreprise qui réussit à ramener ses coûts au-dessous du niveau
planifié obtient im profit plus élevé que celui prévu par le plan. En règle
générale, ce profit est suffisant pour permettre la création d’un fonds dont
une partie sert à offrir des stimulants collectifs et individuels aux travail­
leurs de l’entreprise, et le reste à accroître la production. De plus, l’entreprise
verse directement au budget une partie des profits réalisés en dépassement
du plan.
206. Une des caractéristiques des prix de gros planifiés est qu’ils sont
stables et exempts des fluctuations auxquelles ils sont sujets dans une
économie de marché.
207. Une autre caractéristique essentielle des prix de gros est qu’ils
sont identiques pour un produit qui est fabriqué par différentes entre­
prises. Le système des prix de gros est étroitement lié à celui des stimu­
lants matériels visant à inciter les travailleurs à réduire les coûts et à
accroître la production.
208. Les piix sont également tm moyen important d’encomager la pro­
duction de marchandises de haute qualité. Les produits de bonne qualité
sont vendus à des prix supérieurs. Dans l’industrie chimique, les prix des
livraisons de matières premières varient selon la teneur de ces dernières
en telle ou telle matière utile. Les prix des nouveaux produits de haute
qualité revêtent une importance spéciale. Pour les établir, on se fonde
normalement sur les prix des produits analogues existants, qu’on ajuste
pour tenir compte des différences de qualité. La différence entre le coût
provisoirement plus élevé de la production d’un nouveau produit et son
prix est compensée à l’aide d’un fonds pour les nouvelles productions con­
stitué par prélèvements sur les recettes de la vente de toutes les autres
marchandises que fabrique l’entreprise intéressée.
209. Les prix sont souvent utilisés pour réglementer la variété des
marchandises produites ou consommées. On fixe les prix des matières qui
font défaut de façon à encomrager les producteurs à en accroître la pro­
duction, tout en en limitant la consommation. Les prix des produits inter­
changeables sont établis de manière à stimuler la consommation du pro­
duit le plus économique.
210. La réglementation des prix de détail pose des problèmes analogues.
211. Des mesures systématiques sont prises pour modifier les prix de
gros sortie d’usine, de manière à assurer que les prix de diverses marchan­
dises et les rapports de prix entre elles correspondent mieux aux conditions
actuelles de la production et du commerce et aux buts qui ont été fixés en
ce qui concerne l’amélioration des bases matérielles et techniques de l’in­
dustrie.

L e c r é d it e t l a r é a l is a t io n d e s o b j e c t if s d u p l a n

212. Le système du crédit joue un rôle important dans la bonne exécu­


tion des plans économiques; ce système prévoit l’octroi et l’utilisation
planifiés d’avances temporaires non productrices d’intérêt, et remboursa­
bles dans les délais fixés afin que les ressources financières ainsi dégagées
puissent être remises au service de l’économie.
213. Les entreprises et les organismes économiques approvisioiment leurs
comptes auprès de la Banque d’Etat (Gosbank) en y versant le produit de la
vente de leur production, leurs amortissements, leurs bénéfices et d’autres
sommes; les fonds ainsi constitués sont utilisés à intervalles réguliers. Les
revenus croissants des travailleurs qui deviennent disponibles sous forme
de dépôts d’épargne sont également une source importante de fonds pou­
vant être utilisés pour des avances gratuites. Par ailleurs, les besoins
temporaires des entreprises et des organismes économiques en crédits
d’appoint (aux fins du règlement de dépenses saisonnières, ou pour se
procurer des matières, accumuler des réserves de production, couvrir les
dépenses effectuées en vue de la production et de la circulation des pro­
duits finis, etc.) peuvent être satisfaits par la Banque.
214. La Banque d’Etat consent des crédits à des fins particulières et
pour des périodes déterminées — généralement à court terme. Elle peut
ainsi exercer un contrôle efficace en vue d’assurer que les délais impartis
pour le remplacement des fonds de roulement seront respectés, que la
production sera vendue à temps, et que les plans relatifs à la production
et à l’écoulement des marchandises seront exécutés de manière satis­
faisante.
215. Non seulement, le système de crédit comporte le consentement de
prêts d’appoint aux entreprises à des fins d’agrandissement et de progrès
technique ou pour leur permettre d’accorder des primes et d’améliorer le
niveau de vie des travailleurs, mais il prévoit aussi diverses sanctions
frappant les entreprises qui n’ont pas atteint les objectifs de production
qui leiur ont été fixés.
216. Les entreprises qui n’atteignent pas les objectifs qui leur sont
imposés en matière de réduction des coûts ou qui n’exécutent pas pleine­
ment leur plan d’accumulation de capital, qui subissent des pertes i>our
un montant excédant celui prévu par le plan et qui ne réussissent pas à
gérer convenablement leur propre fonds de roulement ne peuvent obtenir
des crédits de la Banque d’Etat qu’à des condition spéciales, notamment
en ce qui concerne les modalités de remboursement. La Banque ne peut
accorder des crédits à court terme qu’aux entreprises qui ont obtenu la
garantie d’im organisme supérieur. Elle refuse tout crédit aux entreprises
qui ne peuvent obtenir cette garantie et réclame le remboursement anti­
cipé des prêts qu’elle leur a accordés précédemment.
217. L’entreprise qui, deux ou trois mois après avoir été rangée dans
la catégorie soumise aux conditions spéciales de crédit, améliore l’économie
de son fonctionnement, mène à bien son plan d’accumulation de capital,
supprime la part des déficits qui dépasse les prévisions du plan et reporte
son fonds de roulement au niveau prévu par le plan, est replacée dans la
catégorie soumise aux conditions générales de crédit.
218. Les entreprises efficientes qui remplissent leur plan d’accumula­
tion de capital, évitent de subir des pertes en excédent des prévisions du
plan et maintiennent leur fonds de roulement au niveau voulu, jouissent
d’im certain nombre de privilèges en matière d’assistance financière
temporaire.
219. Le système qui consiste à modifier les conditions dont sont assor­
tis les crédits accordés aux entreprises industrielles permet à la Banque
d’Etat de contrôler plus eficacement l’activité économique de ces entre­
prises, augmente la responsabilité morale et matérielle des travailleurs à
l’égard de l’exécution des plans de production et stimule la recherche de
nouveaux moyens d’accroître la productivité du travail et d’améliorer
l’emploi des ressources en matières premières.
220. En dehors de ce système de crédits différenciés, la Banque d’Etat
consent des crédits à échéance de deux à trois ans destinés à couvrir des
dépenses efectuées à des fins de mécanisation et de modernisation ou
d’amélioration des techniques de production, ainsi que des crédits à court
terme à échéance d’un an au maximum destinés à couvrir des dépenses
effectuées en vue d’organiser et de développer la production et d’améliorer
la qualité des biens de consommation. Pour obtenir un crédit, la condition
fondamentale à remplir est que les mesures que l’on envisage de prendre
seront efficaces et permettront de rembourser le crédit dans les délais
prescrits grâce à l’accumulation supplémentaire de capital qui sera réalisée.
221. Ces dispositions de crédit donnent l’assurance que le matériel le
plus productif et les techniques les plus avancées seront utilisés le plus
rapidement possible dans la production.
222. Le système de crédit permet donc d’employer rationnellement les
ressources des entreprises socialistes, tout en assurant l’accroissement du
voliune et de la rentabilité de la production.
223. Les organismes d’approvisionnement jouent un rôle important
dans la mise en œuvre des plans. Les fournitures livrées aux entreprises
proviennent soit des entrepôts des organismes d’approvisionnement, soit
d’autres entreprises auxquelles les organismes d’approvisionnement les
invitent à s’adresser. Les entreprises qui ont établi des relations commer­
ciales directes entre elles sont tenues d’informer les organismes d’approvi­
sionnement des termes de leurs contrats ou des opérations commerciales
qu’elles envisagent de réaliser; en cas de besoin, ces contrats ou ces opéra­
tions peuvent être invalidés. Les organismes d’approvisionnement jouissent
d'une certaine latitude dans l’exécution de leurs plans. Par exemple, un
sovnarkhoze a le droit de redistribuer les matières premières et autres res­
sources entre les entreprises qui relèvent de sa compétence. Cependant, il
ne peut, sans l’approbation du gouvernement, modifier le plan d'allocation
des ressources destinées à des entreprises relevant de la compétence
d’autres sovnarkhozes. De même, en Union soviétique, les services d’appro­
visionnement des républiques ne sont pas habilités à modifier les plans de
livraison interterritoriaux sans l’approbation des autorités centrales. De
plus, les organismes d’approvisionnement ne jouissent pas pour tous les
produits de la même latitude en ce qui concerne la mise en œuvre des
plans d’allocation. D’un côté, il y a les produits rares pour lesquels les pou­
voirs centraux fixent parfois des plans d’allocation très détaillés, qu’aucun
organisme ne peut modifier sans l’approbation expresse des autorités cen­
trales; à l’autre extrême, il y a les produits abondants dont les orgimismes
d’approvisionnement peuvent, en cas de nécessité, allouer à discrétion aux
entreprises productives des quantités dépassant les contingents initiale­
ment prévus.
224. La politique de l’emploi et des salaires des entreprises est définie
par des plans relatifs à la main-d’œuvre, qui fixent les objectifs en ce qui
concerne le nombre des travailleurs, la productivité du travail et le fonds
des salaires. Les objectifs planifiés concernant les effectifs de la main-
d’œuvre ne peuvent être modifiés sans l’autorisation expresse de l’autorité
de surveillance. La nécessité d’accroître les salaires au-delà des limites
fixées par le plan peut se présenter non seulement en cas de dépassement
des objectifs de production, mais aussi dans le cas où il n’a pas été pos­
sible d’atteindre le niveau planifié de productivité du travail. Dans les
deux cas, la Banque n’accorde les crédits nécessaires que sur instruction
directe des autorités économiques supérieures.
225. En règle générale, on a cherché à atteindre les objectifs des plans
relatifs à la production par ouvrier à l’aide de systèmes de rémunération
du travail à la pièce et d’autres stimulants, de l’introduction de nouvelles
techniques, etc. On a également eu recours à la revision des normes de
rémunération par unité de production, afin de stimuler l’accroissement de
la productivité.
226. En principe, les méthodes d’exécution des plans ont été les mêmes
dans tous les secteurs de la production où les entreprises d’Etat ont un rôle
prépondérant. Mais en agriculture, les problèmes posés par l’exécution des
plans diffèrent sensiblement de ceux que l’on rencontre dans d’autres sec­
teurs. Ces différences proviennent en partie de ce que la production dépend
des caprices du climat et en partie de ce que les entreprises agricoles sont
en majorité des exploitations collectives, et non des entreprises d’Etat. Les
exploitations agricoles d’Etat reçoivent en fait des directives de planifica­
tion au sujet de la production de certains produits et d’autres aspects de
leurs activités. Mais les exploitations collectives sont restées libres de
fixer leur production et leur politique en matière d’utilisation de la main-
d’œuvre, du volume des investissements et des conditions régissant la
rémimération du travail. Hormis le paiement d’impôts et l’obligation de
constituer des réserves d’investissement et d’amortissement, elles ont été
uniquement tenues de vendre les contingents de certains produits que leur
avaient fixés les pouvoirs publics. La mesure dans laquelle ces ventes
obligatoires ont influé sur le volume et l’orientation de la production des
exploitations collectives a dépendu de la part de leur production totale que
ces ventes représentaient. En règle générale, les autres ventes de marchan­
dises n’ont pas été planifiées, si bien qu’elles ont évolué en fonction des
mouvements des prix. Par le truchement de sa politique des prix et de sa
politique fiscale, l’Etat a influence le montant des recettes que les exploi­
tations agricoles tirent de la vente de divers produits et, partant, la struc­
ture de la production et des ventes.
227. Les plans d’achat, ainsi que la politique des prix et la politique
fiscale, ont été accompagnés d’autres mesures visant à assurer l’exécution
des plans agricoles. C’est l’Etat qui se charge d’établir les plans du déve­
loppement de la production et de la fourniture de tracteurs, de machines
agricoles, de moyens de transport, d’engrais chimiques et minéraux et de
parasiticides, d’entreprendre les programmes d’irrigation et de récupéra­
tion des terres, de mettre en culture les terres vierges ou en jachère,
d’organiser la production de semences de qualité et l’élevage de bestiaux
à grand rendement ainsi que leur vente aux exploitations collectives, de
constituer un réseau de stations d’élevage et de médecine vétérinaire et
d’exécuter les plans de formation ou de réorientation de spécialistes et de
diffusion des iimovations.
228. Contrairement aux entreprises d’Etat, les exploitations collectives
n’ont reçu aucune directive directe au sujet des éléments de la consom­
mation productive ou des investissements. En conséquence, les plans d’in­
vestissement dans le secteur libre de l’agriculture ont été fondés, d’une
part, sur l’évaluation de la demande des exploitations agricoles qui ne
dépendent pas du secteur public et, d’autre part, sur l’estimation des fonds
investis dans les exploitations collectives et des crédits prévus à cette fin
par le gouvernement. Les instruments essentiels qui permettent de con­
trôler les investissements dans le secteur libre de l’agriculture ont donc été
les îdlocations de crédits et les prix fixés par le gouvernement pour les
biens d’investissement agricoles, ainsi que les plans de livraison de maté­
riel et d’autres ressources. Par ces mécanismes, les autorités centrales
peuvent accroître ou réduire les investissements agricoles conformément
aux nécessités de la politique gouvernementale.

E x é c u t io n d e s p l a n s r e l a t if s au c o m m e r c e e x t é r ie u r

229. L’exécution des plans relatifs au commerce extérieur, qui est un


monopole d’Etat, a été assurée par des méthodes analogues à celles qui
sont en usage dans la plupart des autres secteurs. Les plans d’ensemble
pour le commerce extérieur ont été mis en œuvre par des directives com­
muniquées aux organismes d’importation et d’exportation de l’Etat. Ils ont
également été intégrés aux plans d’achats et de répartition des divers
organismes d’approvisionnement et, dans bien des cas, aux plans de pro­
duction et de vente des entreprises travaillant pour l’exportation. L’exécu­
tion de ces plan a été garantie par l’existence du monopole d’Etat pour le
commerce extérieur et par les accords commerciaux à long terme conclus
avec d’autres pays à économie planifiée. Ces garanties ne sont cependant
que partiellement efficaces, le commerce avec les pays capitalistes étant
sujet aux fluctuations de la demande extérieme et des prix; ce fait peut
influer sur l’exécution des plans commerciaux et autres.
230. Bien que le monopole du commerce extérieur et les accords bilaté­
raux à long terme constituent un important mécanisme pour l’exécution
des plans relatifs au commerce extérieur, leur efficacité a dépendu de la
capacité de mener à bien les plans de production. Le monopole du com­
merce extérieur fait que cette incapacité n’influence pas nécessairement
toujours l’exécution des plans relatifs au commerce extérieur. Mais, le plus
souvent, l’exécution de ces plans a été en fait modifiée sensiblement par
l’écart entre la production réelle et les contingents prévus. Ce phénomène
a naturellement revêtu la forme la plus aiguë dans les cas où une grande
proportion d’une production donnée était destinée aux exportations.
Comme ces écarts par rapport au volume prévu et à la composition des
importations et des exportations se sont produits sous contrôle du gou­
vernement, il n’ont pas nécessairement entraîné de changements significa­
tifs dans la balance prévue des paiements. Les accords bilatéraux ne com­
portant que des marges limitées de crédits, l’impossibilité d’exécuter les
plans d’exportation s’est accompagnée généralement d’une réduction des
importations prévues, sauf lorsqu’on a pu obtenir des crédits supplémen­
taires à long terme.
E x é c u t i o n d e s p l a n s d ’e n s e m b l e

231. Comme les objectifs globaux des plans, tels que les taux d’en­
semble et sectoriels de la croissance de la production, la répartition du
revenu national entre l’accumulation et la consommation, et l’allocation
par secteur des investissements sont des agrégats des plans de production
et des plans financiers obligatoires des divers établissements et entreprises,
il est évident que l’exécution de ces derniers plans se confond pratique­
ment avec celle des plans d’ensemble. En conséquence, la politique d’exé­
cution porte surtout sur la direction et le contrôle des activités des entre­
prises. En général, on n’a dû recourir qu’à im petit nombre de mesures
complémentaires de caractère global pour assurer l’exécution des plans.
En fait, ces mesures ne se sont révélées nécessaires que dans les secteurs
auxquels ne s’appliquaient pas directement les plans des établissements
et entreprises. En d’autres termes, il s’est principalement agi du revenu
disponible de la population et de l’usage qui en était fait. Toutefois, même
dans ce cas, on n’a guère eu besoin d’adopter des mesures spéciales tant
que les plans financiers et les plans de production des entreprises ont été
respectés.
232. Comme il n’existe pas de bénéfices privés et que l’Etat se charge
des assurances sociales et des pensions de vieillesse, l’épargne provenant
du revenu privé n’a représenté qu’une fraction relativement peu impor­
tante de l’épargne totale. De ce .fait, il est beaucoup moins nécessaire
d’adopter des mesures complémentaires pour puiser ailleurs que dans les
entreprises les ressources qu’exigent les investissements. Il en résulte aussi
que la consommation personnelle équivaut à peu près aux revenus dispo­
nibles. On prévoit le volume des ventes au détail en fonction de la demande
des acheteurs, qui est déterminée par le montant prévu des salaires, par
les revenus perçus par la population au titre du budget national et par les
revenus monétaires de la population rurale.

CHAPITRE 3
ORGANISATION ET GESTION DE LA PLANIFICATION

P a y s s o c ia l is t e s

233. Dans les pays socialistes, où le droit de propriété et les moyens


essentiels de production appartiennent à la société et sont détenus par
l’Etat, les fermes collectives et les coopératives, la coordination est poussée
beaucoup plus loin qu'ailleurs entre la planification et la gestion des acti­
vités économiques.
234. Des différences dans l’appareil de planification existent bien d’un
pays à l’autre, mais les points commims l’emportent de beaucoup. Seule,
la Yougoslavie constitue une exception notable. Comme on le verra plus
loin, l’appareil de planification qui y fonctioime diffère sensiblement de
celui des autres pays socialistes.
235. L’autorité suprême en matière d’administration et de planification
appartient au Parlement et au Cabinet, ou Conseil des ministres, constitué
par lui.
236. Les pouvoirs du Parlement comprennent l’approbation du plan
économique national et du budget de l’Etat, l’adoption de normes législa­
tives régissant la vie économique du pays, la fixation de principes pour la
gestion des entreprises dans tous les secteurs de l’économie, la direction
du système monétaire et du crédit, la désignation des membres des institu­
tions d’administration et de planification, etc.
237. Pour l’examen préliminaire des projets du plan économique natio­
nal et du budget de l’Etat, le Parlement établit des commissions perma­
nentes.
238. Le Conseil des ministres examine les plans économiques de l’Etat
ainsi que le budget et le soumet à l’approbation du Parlement, organise le
contrôle de leur exécution, adopte des mesures de renforcement du sys­
tème monétaire et du crédit, prend des décisions sur les questions impor­
tantes relatives au développement de l’économie socialiste, etc.
239. Dans toutes les républiques fédérées et autonomes, qui forment
l’URSS, la planification est dirigée par le Conseil des ministres de la ré­
publique et, dans les territoires, régions, villes et districts, par les soviets
locaux et leurs comités exécutifs.
240. Les divers organes de planification, moyens d’action de Torgane
exécutif correspondant, s’occupent directement de la planification écono­
mique.
241. Le système des organes de planification englobe tous les éléments
économiques et culturels. Il comprend:
a) Les organes centraux et locaux de planification générale;
b) Les organes de planification des ministères, départements, sov­
narkhozes et entreprises.
242. Le Comité du plan d’Etat du Conseil des ministres de l’URSS (ou
Gosplan) est l’organe national de planification économique.
243. Le Gosplan est chargé de préparer les plans d’Etat pour le déve­
loppement de l’économie nationale. Il lui incombe également d’assurer la
continuité de la planification et des objectifs du plan et l’amélioration con­
tinue de la planification, d’après la généralisation scientifique de l’expé­
rience acquise dans la construction du communisme.
244. Les organes de planification générale des républiques fédérées de
l’URSS sont les commissions du plan d’Etat de leur Conseil des ministres
(ou Gosplans des républiques fédérées).
245. Dans chaque république fédérée, le Gosplan se compose d’un pré­
sident nommé par le Soviet suprême de la république, et de vice-présidents
nommés par son conseil des ministres. Une administration, formée de divi­
sions et secteurs tant généraux que spécialisés, l’aide dans l’accomplisse­
ment de ses fonctions. Les vice-présidents des Gospîans et les directeurs
des principales divisions peuvent être des ministres et des membres du
Conseil des ministres de la république.
246. Depuis 1957, les tâches des Gosplans des républiques fédérées ont
été profondément modifiées. Sous le nouveau régime, leurs activités rela­
tives à la planification industrielle ont été considérablement élargies. Tandis
que ces commissions s’occupaient jusqu’alors surtout des branches d’acti­
vité des républiques produisant les biens de consommation, les matériaux
de construction et les bois d’œuvre, elles préparent maintenant des plans
portant sur le développement de toutes les industries. Ainsi, les conditions
ont été créées pour la planification d’im développement intégré de l’éco­
nomie et pour l’utilisation maximale des ressources naturelles et humaines
de chaque république.
247. Les républiques fédérées jouent maintenant un bien plus grand
rôle dans les plans d’implantation de l’industrie, tant pour le choix des
emplacements des constructions nouvelles que pour l’agrandissement des
entreprises existantes. Les sovnarkhozes travaillent exclusivement dans les
limites des plans d’Etat dressés par les organes de planification des répu­
bliques et de l’Union.
248. Les plans destinés aux sovnarkhozes et aux républiques fédérées
sont dressés d'après les tâches assignées à l’ensemble du pays par le plan
de développement économique unifié, approuvé par le gouvernement
central.
249. Les Gosplans des républiques fédérées travaillent en contact étroit
avec les sovnarkhozes, les ministères et administrations des républiques,
ainsi qu’avec les Gosplans des républiques autonomes, et les organes de
planification régionaux (ou territoriaux).
250. Les organes généraux de planification sont: dans les républiques
autonomes, les comités du Plan qm relèvent du Conseil des ministres (Gos­
plans des républiques autonomes); et dans les régions (ou territoires) les
commissions de planification des comités exécutifs régionaux (ou terri­
toriaux).
251. Les commissions de planification régionales et territoriales com­
prennent de cinq à sept membres, choisis chacun par les comités exécutifs
des soviets des députés des travailleurs, parmi les principaux planifica­
teurs, savants et spécialistes de l’industrie, de l’agriculture et d’autres
secteurs de l’économie.
252. Les commissions de planification locales sont organisées de telle
façon que la planification effectuée par les secteurs porte sur toutes les
branches d’activité à l’échelon local.
253. Les commissions de planification locales tiennent une place im­
portante dans l’ensemble des organes de planification économique en
URSS. Ce sont des commissions permanentes des comités exécutifs des
soviets des députés des travailleurs dans les différentes divisions admini­
stratives (république socialiste soviétique autonome, territoire, région, zone,
ville, district). Leurs fonctions portent non seulement sur la planification,
mais aussi sur la coordination du développement de toute l’économie de
leur division.
254. Les soviets locaux administrent les écoles qui dispensent un ensei­
gnement général, les institutions culturelles, la santé publique et les as­
surances sociales, le logement et les aménagements communautaires, les
routes locales, le commerce, etc.
255. Les commissions de planification locales apportent leur concours
aux Gosplans des républiques pour les travaux d’intérêt économique géné­
ral, comme la préparation de la balance d’énergie pour l’ensemble de la
région, du territoire ou de la RSS autonome, l’élaboration de projets de
plans pour la production de toutes les entreprises industrielles de cette
région ou territoire, l’établissement de la balance de la main-d’œuvre, etc.
256. Dans les villes et districts existent des commissions de planifica­
tion permanentes et directement responsables devant le Comité exécutif
des soviets de députés de travailleurs pour la ville et le district. Elles com­
prennent un président et de quatre à six membres nommés par le Comité
exécutif. Outre leur personnel permanent, elles occupent des spécialistes
qui travaillent dans diverses organisations, entreprises et institutions de la
ville ou du district.
257. Les ministères et départements jouent im rôle important dans la
planification du développement économique. Avec l’aide de leurs divisions
du plan, ils préparent des projets de plan pour les secteurs correspondant
de l’économie et les sections du plan national, qu’ils soiunettent au Gos­
plan de l’URSS.
258. Les organes de financement et de crédit prennent une part active
à la planification économique. Chaque année, le Ministère des finances de
l’URSS prépare, d’après les objectifs fixés par le plan économique national
annuel, un projet de budget public de l’URSS, qu’il présente au gouverne­
ment. La banque d’Etat de l’Union établit de même des projets de plan des
crédits et encaisses. Le Ministère du commerce extérieur dresse un projet
de plan annuel d’exportations et d’importations, ainsi que le projet de plan
des devises pour les opérations de commerce extérieur. Pour assurer la
coordination de ces plans avec le plan économique national annuel, le
Gosplan de l’URSS présente au gouvernement ses observations y relatives.
259. Le Ministère des finances et la Banque d’Etat de l’URSS organi­
sent le contrôle de l’exécution du plan économique national et s’assurent
qu’il est fait usage le plus économique et le plus approprié des ressources
matérielles et financières.
260. Dans les républiques, régions et districts, des organes du Ministère
des finances et de la Banque d’Etat de l’URSS dressent les plans financiers
correspondants et organisent le contrôle de leur exécution.
261. Le contrôle de l’exécution des plans d’exportations-importations
incombe au Ministère du commerce extérieur.
262. Les conseils économiques, ou sovnarkhozes, sont de nouveaux
organes chargés de l'administration et de la planification de l’industrie et
de la construction.
263. Les sovnarkhozes ont été créés dans les régions économiques. Il
n’en existe pas dans celles où l’industrie n’est pas assez développée; les
entreprises industrielles et du bâtiment de ces régions qui sont assez im­
portantes pour intéresser la république dont ces régions font parties sont
placées sous l’autorité des sovnarkhozes, régions et territoires voisins.
264. Par décision prise, en novembre 1962, du Plénum du Comité cen­
tral du PCUS, les sovnarkhozes ont été élargis pour correspondre à l’agran­
dissement des régions économiques. On augmentera ainsi leur souplesse en
ce qui concerne la production; on améliorera l’emploi des ressources en
matières premières et on accroîtra les possibilités d’appliquer le système
coopératif de production. Dans la RSFSR, on trouve maintenant 24 grands
sovnarkhozes au lieu des 67 précédents; dans la RSS d’Ukraine, 7 au lieu
de 14; et dans les républiques d’Asie centrale, 1 seul sovnarkhoze de
république au lieu de 4.
265. Des changements profonds ont été apportés à la gestion de l’agri­
culture depuis mars 1962.
266. Dans les régions, territoires et républiques, on a créé des conseils
de production territoriaux kolkhozes-sovkhozes (ou sovkhozes-kolkhozes.
selon le mode de faire-valoir prédominant dans la zone considérée), pour
diriger la production agricole.
267. Les conseils de production territoriaux sont subordonnés aux con­
seils de production et d'approvisionnement agricoles de régions (ou de
territoires), qui disposent de départements spécialisés pour les questions
telles que l’élevage du bétail et de reproducteurs sélectionnés, l’agriculture
et la production de graines, la mécanisation et Télectrification de la pro­
duction agricole et pour d’autres questions relevant des conditions locales.
268. Les conseils de production et d’approvisionnement agricoles pour
la région (ou le territoire) sont, à leur tour, subordonnés aux comités
agricoles de régions (ou de territoires) qui exercent un contrôle général
sur l’agriculture de la région (ou du territoire).
269. On a également créé un comité agricole de l’Union, dont la fonc­
tion principale est d’organiser la vérification pratique de l’exécution des
directives agricoles du parti et du gouvernement à l’échelon tant central
que local, et de veiller aux progrès de la production ainsi qu’à l’exécution
des tâches fixées pour l’approvisionnement en produits agricoles par les
républiques, territoires et régions.
270. Dans l’état actuel, la cellule essentielle de gestion de l’agriculture
est le conseil territorial de production kolkhoze-sovkhoze (ou sovkhoze-
kolkhoze). Leur nombre dépend de celui des fermes collectives et de fer­
mes d’Etat, du volume de la production et de l'approvisionnement, et
d’autres facteurs économiques et territoriaux.
271. Les conseils de production territoriaux ont été chargés des ques­
tions suivantes: contrôle de l’exécution des décisions du parti et du gou­
vernement en matière agricole; organisation de la production et réalisation
du plan pour les achats par l’Etat de produits agricoles; planification,
comptabilité et rapports relatifs à la production et à l’approvisionnement;
examen de la production, des plans financiers et des comptes annuels des
fermes collectives et des fermes d’Etat; établissement et adoption de
systèmes rationnels de culture et d’assolements productifs, emploi efficace
du matériel; création d’une saine base fourragère; renforcement adminis­
tratif et économique de la production des fermes collectives et des fermes
d’Etat et augmentation de sa rentabilité; conclusion de contrats à terme
avec les fermes collectives et les fermes d’Etat pour la livraison de pro­
duits agricoles et de matières premières, etc.
272. Les organisations suivantes sont largement répandues: bureaux
publics d’études et de projets, qui mettent en forme et font adopter les
propositions et inventions en vue de la rationalisation et traitent de divers
problèmes techniques complexes; conseils d’inventeurs, qui s’occupent de
nombreuses questions relatives à l’amélioration de la technologie et à l’or­
ganisation de la production; instituts de recherche des travailleurs, qui
familiarisent les travailleurs avec le travail d’expérimentation scientifique
et de recherche sur les méthodes, la technologie, et l’organisation de la
production et du travail; bureaux publics d’analyse économique, qui s’oc­
cupent surtout à la recherche des moyens de faire des économies dans
l’emploi des matières et de la main-d’œuvre, des meilleures méthodes pour
planifier et organiser la production, etc.
273. Bien qu’il n’existe pas de liens hiérarchiques directs entre eux, les
divers organes de la planification dans les pays socialistes n’en constituent
pas moins un système unifié qui permet à la planification d’embrasser
l’ensemble de l’économie nationale. L’unité qu’ils obtiennent dans leurs
travaux est due essentiellement au fait qu’ils sont guidés par la politique
économique du Parti communiste et l’appliquent uniformément. Cette
unité tient encore au fait que la planification de l'économie nationale
s’effectue selon les principes généraux de la planification et, dans toute la
mesure du possible, d’après le principe de centralisation démocratique.
Tous les organes appliquent la même méthodologie dans la formulation
des plans. L’imité du système de planification est conditionnée par la né­
cessité de respecter celle du plan économique national.
274. Dans la planification de l’économie nationale les autorités compé­
tentes s’assurent le concours de l’Académie des sciences de l’URSS, des
Académies des sciences des républiques fédérées, de l’Académie agricole
fédérale V. I. Lénine, de l’Académie des bâtiments et de l'architecture, de
l’Académie des sciences médicales, de l’Académie des sciences pédagogi­
ques, des instituts de recherche scientifique et des établissements d’ensei­
gnement supérieur. En outre, un grand nombre de chercheurs et de spé­
cialistes appartenant aux organisations de planification et d’étude, aux
sovnarkhozes, aux ministères et administrations, sont appelés par leurs
collègues à travailler sur des problèmes précis. Les résultats de l’activité
scientifique apparaissent dans les plans économiques de l’Etat.
275. A la fin de 1962 et au début de 1963, les organismes centraux de
planification de l’URSS ont été réorganisés. On a créé un Conseil supérieur
de l’économie nationale du Conseil des ministres de l’URSS, un Conseil
économique national pour les républiques fédérées de l’URSS, un Gosplan
pour les républiques fédérées de l’URSS, un Comité central de la construc­
tion pour les républiques fédérées de l’URSS, des comités de secteur et des
comités de production.
276. Le Conseil supérieur de l'économie nationale coordonne les acti­
vités du Gosplan de l’URSS, du Conseil économique national pour les
républiques fédérées de l’URSS et du Comité central de la construction de
l’URSS, régit toute l’activité économique relative à l’industrie et à la con­
struction, étudie les problèmes relatifs au développement de ces secteurs
et à l’exécution des plans et prend des décisions exécutoires sur ces
questions.
277. L’autorité du Gosplan de l’URSS a été étendue aux républiques
fédérées; en conséquence, les Gosplans de ces républiques relèvent d’un
double contrôle: celui du Gosplan de l’URSS et celui du gouvernement de
la république considérée. Le Gosplan de l’URSS est chargé de préparer les
plans à long et moyen terme et de corriger les plans annuels d’après l’ex­
périence, comme d’après les propositions faites par les Gosplans des
républiques fédérées.
278. Le Conseil économique national de l’URSS a pour principale attri­
bution d’assurer l’exécution des plans de développement économique de
l’URSS, d’obtenir l’utilisation la plus rationnelle et la plus efficace des
matières, de la main-d’œuvre et des crédits, la croissance générale de la
productivité du travail, l’abaissement des coûts et l’amélioration de la qua­
lité de la production, ainsi que la découverte et l’utilisation des ressources
économiques inemployées.
279. Le Conseil économique national s’acquitte de ses tâches relatives
à l’exécution des plans économiques par l’intermédiaire des sovnarkhozes
républicains et interrépublicains, ainsi que des ministères et administra­
tions de l’URSS.
280. En même temps, le Conseil remplit des fonctions de planification
en divers domaines.
281. Le Comité central de la construction du Conseil des ministres de
l’URSS est chargé d’améliorer l’administration des constructions essen­
tielles, d’obtenir une utilisation plus efficace des investissements, d’assurer
l’introduction des nouvelles capacités de production selon le programme,
d’appliquer ime politique technique uniforme dans la construction et
d’apporter une amélioration sensible à la qualité des travaux.
282. Les comités centraux pour les secteurs de l’industrie et les comités
centraux de production sont responsables devant le Gosplan de l'URSS, le
Conseil économique national pour les républiques fédérées de l’URSS, ou
le Comité central de la construction de l’URSS. Leurs chefs sont membres
des conseils de ses organismes et du Conseil économique national pour
les républiques fédérées.
283. Les comités centraux ont pour fonction de dresser les plans de
développement du secteur considéré, d’appliquer une politique technique
unifiée et de préparer les plans de recherche et d’expériences scientifiques.
Ils sont seuls responsables de l’adoption rapide des nouvelles machines et
méthodes dans les entreprises.
284. Les Comités centraux de la production exercent également un con­
trôle direct sur toutes les activités des entreprises de leur ressort.

CHAPITRE 4
PLANIFICATION NATIONALE ET MESURES INTERNATIONALES

E c o n o m i e s d ’E n t r e p r i s e p r i v é e e t é c o n o m i e s m i x t e s

285. Pour les économies d’entreprise privée et les économies mixtes,


tant développées que sous-développées, l’une des tâches les plus difficiles
de la planification est de faire entrer le commerce extérieur dans les plans
nationaux et d’exécuter ces plans en tenant compte de l’évolution de ce
commerce. Essentiellement, cette difficulté tient au fait que les tendances
du commerce extérieur dépendent non seulement de la situation intérieure,
mais aussi des conditions économiques régnant dans d’autres pays.
286. Dans presque tous les pays, le commerce extérieur absorbe une
importante proportion du produit intérieur et constitue aussi une source
importante de l’offre sur le marché intérieur; de ce fait, la planification
nationale ne peut être réaliste si, malgré les difficultés, elle ne tient pas
un compte exact du commerce extérieur. La chose est déjà vraie des éco­
nomies avancées d'entreprise privée; elle l’est encore plus pour les pays
sous-développés. Ce n’est pas seulement que, dans nombre de ces pays, le
volume de la demande extérieure conditionne le taux de croissance éco­
nomique intérieure, en raison de l’étendue du secteur d’exportation. Un fait
d’importance plus générale est que dans la plupart des pays sous-dévelop­
pés, à leur stade actuel de développement, l’essentiel des biens d’investisse­
ment n’est pas produit sur place, mais acheté aux pays avancés. Quelque
progrès a certes été réalisé par un certain nombre de ces pays, touchant
l’accroissement de la production intérieure de ces biens, mais les besoins
se sont accrus rapidement aussi. En général, ces pays sont restés relative­
ment aussi tributaires des importations; souvent, ils le sont devenus
davantage. Ainsi, quelle que soit la part des exportations dans la vie éco­
nomique, ce sont les disponibilités en devises qui ont été le principal frein
au développement économique planifié dans les pays sous-développés.
287. C’est cette constatation qui a poussé nombre de pays sous-déve­
loppés à placer l’évolution escomptée des disponibilités en devises à la
base de leurs plans économiques. Dans la préparation des plans, on s’est
notamment préoccupé de libérer des ressources croissantes de devises en
vue du développement, par exemple potir l’importation de biens d’inves­
tissement et de matières premières essentielles. Les programmes d’inves­
tissements ont donné la priorité à la création d’industries destinées à
remplacer des importations ou à développer les exportations. Les plus
industrialisés des pays en voie de développement ont, en fait, accordé une
attention croissante à la nécessité d'accroître leurs exportations d’articles
manufacturés pour compenser le faible taux de croissance des exportations
traditionnelles et l’aggravation des termes de l’échange de produits pri­
maires contre articles manufacturés.
288. Mais, comme on l’a indiqué dans les chapitres précédents, il s’en
faut que tous les pays aient cherché à évaluer exactement les besoins fu­
turs en devises qui sont impUcites dans leurs plans. Certes, c’est là une
tâche longue et difficile, car elle exige une analyse détaillée de la compo­
sition, aussi bien que du voliune, du produit et de la dépense intérieurs.
Néanmoins, les besoins en devises des programmes d’investissement et de
production intérieurs importent trop au succès de ces programmes dans
les pays sous-développés pour qu’on puisse les négliger. En effet, d’une
part, on risque de ne pas atteinre les objectifs d’investissement et de pro­
duction si les besoins en devises dépassent les prévisions, et, d’autre part,
une meilleure estimation initiale de ces besoins aurait pu faire envisager
une autre structure de l’investissement intérieur, laquelle aurait moins
pesé sur la balance des paiements.
289. Il apparaît, toutefois, que dans les pays sous-développés même les
efforts les plus acharnés d’augmentation des ressources en devises par le
développement des exportations et le remplacement des importations n’ont
pas suffi à fournir les montants nécessaires à l’exécution des plans. Ces
plans reposaient d’ailleurs sur l’hypothèse qu’aux sommes en devises
gagnées par les exportations ou économisées par le remplacement des
importations s'ajouterait un courant croissant de capitaux étrangers.
Ayant besoin de fonds étrangers, les pays sous-développés ont générale­
ment adopté toute une série de mesures pour en augmenter le courant.
Afin d’attirer les capitaux privés extérieurs, la plupart des pays ont
donné des assurances relatives aux droits de propriété, comme à l’exporta­
tion des bénéfices et au rapatriement du capital; en outre, divers types
d’avantages fiscaux ont été offerts aux investisseurs étrangers. Malgré ces
mesures, le courant international de capitaux privés reste très inégalement
distribué. Il va surtout aux pays dotés des ressources naturelles qui font
l’objet d’une demande mondiale active et il se montre très sensible aux
changements politiques intervenant dans les pays sous-développés.
290. Dans ces conditions, l’assistance économique officielle a joué un
grand rôle dans l’accélération de la croissance économique des pays sous-
développés. Les dons et prêts publics ont, en règle générale, tendu à com­
penser la concentration marquée des courants de capitaux privés. De fait,
sans l’aide intergouvemementale, les plans de nombreux pays qui, ces der­
nières années, n’ont que peu ou aucunement bénéficié du courant inter­
national de capitaux privés, se seraient trouvés compromis. Pour permettre
de relier l’assistance économique à l’ensemble du plan national d’un pays,
on préfère de plus en plus nettement une aide coordonnée, soit par le
système multilatéral des organisations internationales, soit selon la for­
mule du consortium, adoptée par les pays qui viennent en aide à l’Inde et
au PaMstan. Les pays sous-développés sont en outre presque unanimes à
penser qu’ils atteindraient plus facilement les objectifs de leurs plans
d’investissement et de production si l’assistance extérieure leur était as­
surée pour la durée de leurs plans, et non sur une base annuelle comme
cela a été le cas jusqu’ici. Ils sont également unanimes à penser que les
prêts ou subventions de l’étranger ne doivent être subordonnés à aucune
condition politique, militaire ni idéologique, mais qu’ils doivent être ac­
cordés uniquement sur la base de considérations économiques. On fait
observer, dans les pays sous-développés, que, sans parler de la difficulté
d’obtenir des prêts, surtout pour une période tant soit peu longue, le taux
d’intérêt élevé et l’obligation du remboursement en monnaie non locale
représentent de lourdes charges pour l’économie de ces pays.
291. Le recours au commerce extérieur, pour développer les pays sous-
développés, se heurte à de grosses difficultés. La tendance à la hausse des
prix des matières premières, qu’on a pu observer pendant la guerre et
l’après-guerre n’a pas duré. En 1951, les prix des matières premières ont
commencé à baisser et ceux des biens industriels à monter, de sorte que
les termes de l’échange des unes contre les autres se sont détériorés consi­
dérablement, et il y a eu des fluctuations graves dans les cours de certaines
matières premières, ainsi que dans le volume de leur commerce. La po­
litique de discrimination appliquée par certains pays dans leims relations
commerciales avec d’autres a provoqué des difficultés sérieuses pour les
pays sous-développés. L’instabilité à court terme dont les recettes d’expor­
tation de la plupart des pays sous-développés souffrent de façon marquée
fait que ces pays ont beaucoup de peine à adapter leurs plans à l’évolution
rapide des circonstances. Certains ont cherché à atténuer l’effet de l’insta­
bilité extérieure sur leur économie interne en faisant passer leurs exporta­
tions par des offices de commercialisation, tandis que d’autres recouraient
à des droits d’exportation mobiles. Là où l’on a institué le contrôle des
changes, l’emploi de budgets en devises, sujets à revision périodique au bout
de quelques mois, compte tenu de la situation de la balance des paiements,
a également aidé à assurer un ajustement ordonné des moyens aux besoins.
Par diverses mesures nationales, on a cherché à atténuer les fâcheux effets
de cette instabilité, mais ce que peuvent faire séparément les pays sous-
développés se heurte à d’étroites limites. C’est cette constatation qui a fait
conclure, au cours de l’après-guerre, plusieurs accords internationaux sur
les produits, prévoyant des contrats multilatéraux d’achat et de vente, des
contingents d’exportation et des stocks tampons, et qui a fait créer des
organes de délibération et de consultation internationales sous forme de
conseils et de groupes d’étude de produits. Mais, sur le plan pratique, le
progrès a été assez lent et la question se pose aussi de savoir si la méthode
des accords par produit suffit à répondre aux exigences du développement
économique d’ensemble. Récemment, on a d’ailleurs commencé à envisager
des mesures complémentaires plus larges, telles que le système de finance­
ment compensatoire qui est à l’étude à l’ONU ou un recours plus étendu
aux ressources du Fonds monétaire international.
292. Ce n’est pas seulement par leur montant et leur instabilité que les
échanges extérieurs ont posé des problèmes particulièrement difficiles aux
pays sous-développés. Comme on l’a relevé dans un chapitre précédent,
incorporer le commerce extérieur aux plans nationaux oblige également
à décider quelles industries d’exportation ou quelles industries de rem­
placement des importations il vaudra mieux développer. Pendant les pre­
mières armées de l’après-guerre, les plans de développement économique
ont tendu à se concentrer sur la croissance équilibrée dans les limites du
marché intérieur et à négliger les avantages d’une spécialisation internatio­
nale. Plus récemment, toutefois, on en est venu à accorder plus d’attention
aux possibilités d’accélérer la croissance en se spécialisant dans des bran­
ches particulières de production. Pour une part, cette évolution a fait cher­
cher, dans les pays développés, des marchés pour certains des articles
manufacturés que plusieurs pays sous-développés sont de plus en plus
aptes à exporter; cette recherche a montré la nécessité, pour les pays avan­
cés, de pratiquer une politique plus libérale qui facilite l’accès à leurs
marchés. Mais le souci accru des avantages de la spécialisation a égale­
ment amené à explorer plus largement les possibilités d’augmenter les
échanges entre les pays sous-développés eux-mêmes. Un résultat important
de ce mouvement a été la constitution de l’Association latino-américaine de
libre-échange; un autre, le création, par cinq pays d’Amérique centrale,
d’un marché commun qui a commencé à coordonner, non seulement la
politique commerciale de ces pays, mais aussi les travaux relatifs à la ré­
partition régionale de telle ou telle industrie. Entre les Etats membres des
Commissions économiques de l’ONU pour l’Afrique, d’une part, et pour
l’Asie et l’Extrême-Orient, d’autre part, il y a eu également des débats pro­
longés sur les possibilités de resserrer leurs liens et de développer les
échanges intrarégionaux.
293. L’action concertée de groupes de pays sous-développés soucieux
d’accélér leur développement économique et de faciliter la planification
nationale ne s’est nullement limitée au commerce extérieur. Une coopéra­
tion multinationale pour aménagement de bassins fluviaux a, par exemple,
été réalisée dans plusieurs régions; les principales entreprises commencées
ou menées à bien concernent l’Indus, le Mékong et la Volta. La coopération
en matière financière a également conduit à établir des banques régionales
de développement. Plus récemment, des mesures ont été prises pour créer
en Afrique, en Amérique latine et en Asie et Extrême-Orient, des instituts
de développement régional qui constitueront des centres régionaux de for­
mation aux méthodes de planification et qui réuniront et diffuseront des
renseignements sur la planification.
294. Si la coordination internationale des plans nationaux a fait défaut
entre les économies avancées d’entreprise privée, les politiques commer­
ciales, aussi bien que d’autres pohtiques économiques, ont été concertées
dans une large mesure entre les pays de la Commimauté économique
européenne, et l’Organisation de coopération et de développement écono­
miques a permis d’élargir le cercle des échanges de renseignements et des
consultations sur les mesures à prendre. Récemment, les pays en cause ont
entrepris un échange de prévisions et d’opinions concernant leurs plans.

P a y s s o c ia l is t e s

295. Dans les économies planifiées d’Europe orientale, la coopération


internationale, avec coordination des plans nationaux, a atteint un stade
avancé. La coordination a été facilitée par le fait que tous ces pays ont
adopté un régime économique et social analogue, entretieiment des rap­
port politiques étroits et planifient à long terme le développement de leur
économie.
296. La coopération et la coordination économiques entre ces pays sont
passées par deux stades distincts. Durant le premier, de la fin de la se­
conde guerre mondiale jusque vers 1955, les plans économiques étaient
dressés, sans coordination directe avec ceux des autres pays. Pendant cette
période, les problèmes de la division internationale du travail n’ont guère
joué de rôle dans la planification du développement économique, ni dans
la politique commerciale des divers pays. En fait, une tendance autarcique
s’affirmait dans la plupart de ces pays, qui se dotaient simultanément
d’industries produisant des biens analogues, sans tenir suffisamment
compte de l'efficience de la production, de la dimension du marché natio­
nal ni des autres facteurs qui déterminent les économies d’échelle. Cette
politique procédait de la nécessité de reconstruire l’économie et de sup­
primer les pénuries de l’après-guerre, communes à tous ces pays. En effet,
les pénuries de matières essentielles, d’articles semi-finis et de biens
d’équipement constituaient un puissant motif, pour les gouvernements, de
développer la production nationale de tout ce dont le pays avait besoin.
Le développement de l’économie n’était coordonné que d’une façon indi­
recte par les échanges extérieurs et les octrois de crédit. Cette coordi­
nation indirecte était assurée principalement par des accords bilatéraux
pour l’échange de biens déterminés, des accords de crédit et des accords
prévoyant des échanges scientifiques et techniques.
297. Depuis 1955 environ, la coordination internationale des plans na­
tionaux des économies planifiées s’est beaucoup élargie et renforcée.
L’expansion substantielle de la production et la diversification des écono­
mies nationales ont permis aux pays socialistes d’Europe de coopérer
directement en matière de production. Alors que durant le premier stade
il concentrait ses efforts sur le commerce extérieur, le Conseil d’entraide
économique a entrepris d’influer sur l’établissement des plans nationaux
en partant de considérations telles que les économies d’échelle réalisées
grâce à la production de masse et la réduction des prix de revient par la
spécialisation.
298. La coordination des plans économiques nationaux permet de tenir
un compte plus exact des intérêts du développement économique de cha­
que pays, de ses ressources naturelles et économiques et de ses ressources
en main-d’œuvre. Le processus de coordination n’englobe pas seulement les
plans de production des pays socialistes, mais aussi l’écoulement de leurs
produits, leurs moyens de transport, leur balance des paiements, ainsi que
les progès techniques modernes.
299. Sur la base de la coordination des plans économiques nationaux,
on détermine les principales directions dans lesquelles s’exerceront les
efforts de spécialisation et de coopération dans la production, pour les
branches industrielles connexes et pour l’utilisation en commun des ma­
tières premières, des combustibles et de l’énergie; des décisions concertées
sont prises pour l’exécution en commun de grands projets économiques
intéressant plusieurs pays; on règle d’un commun accord les problèmes
relatifs au développement et à l’exploitation de divers modes de transport
et de communication; des décisions sont prises touchant les progrès de la
science et de la technique, y compris la formation, initiale et avancée, des
cadres. De cette manière, on établit une division internationale rationnelle
du travail pour le système mondial du socialisme.
300. La coordination des plans de développement et l’assistance mu­
tuelle complète que les pays se fournissent entre eux ont donné aux pays
sous-développés un taux de croissance bien plus élevé, et ont permis à tous
les pays membres du Conseil d’entraide économique, de se rapprocher d’un
niveau commun de développement.
301. La coopération entre les Etats qui s’occupent de développer ces
secteurs de l’industrie revêt des formes très diverses: attribution de prêts,
fourniture de matériel, établissement des documents scientifiques et tech­
niques nécessaires, etc. Les installations construites en coopération sont
la propriété du pays sur le territoire duquel elles sont établies. Les
comptes résultant de cette assistance amicale sont normalement réglés par
des livraisons de biens produits dans les entreprises construites en
commun.
302. Dans le cadre de la division socialiste internationale rationnelle
du travail, la spécialisation et la coopération entre Etats créent les condi­
tions nécessaires à la formation graduelle d’entreprises complexes de pro­
duction qui supposent la coopération de plusieurs Etats. A cet égard, on
tient évidemment compte de leurs intérêts, de leurs ressources naturelles
ainsi que de leurs conditions économiques et de leurs moyens de transport.
(L’oléoduc de l’Amitié peut servir d’exemple; on est en train d’installer
un réseau unifié de lignes à haute tension pour tous les pays européens
membres du Conseil d'entraide économique; plusieurs pays s’associent
pour établir des entreprises d’extraction du charbon et du minerai de fer
en Pologne, un combinat de cellulose en Roumanie, et ainsi de suite.)
303. Les progrès et l’intensification de la coordination des plans se
reflètent dans la consolidation organique et l’intensification des activités
du Conseil d’entraide économique. Celui-ci a nommé un Comité exécutif
au sein duquel chaque pays membre est représenté par le vice-président
de son Conseil des ministres. Sous l’autorité du Comité exécutif, un bureau
est chargé de préparer les projets préliminaires de plans et de recomman­
dations à soumettre à l’adoption. La charte du Conseil a été modifiée pour
permettre la participation des pays non européens qui souscrivent aux
buts et aux principes du Conseil. Outre les tâches relatives à des industries
déterminées, comme la normalisation de la production et la spécialisation
à l’intérieur de telle ou telle branche, le Conseil d’entraide économique a
entrepris de coordonner des plans pour 1956-1960 et 1961-1965. Il a égale­
ment fixé les principes et les modalités de la coordination des plans à venir
jusqu’en 1980. Des consultations ont eu lieu sur les objectifs de production
d’industries données. Par la suite, on compte coordonner les objectifs d’in­
vestissement et les plans d’ensemble.
304. La tendance à la coordination des plans nationaux s’est accom­
pagnée d’ime tendance également marquée à l’intégration économique des
pays membres du Conseil d’entraide économique. Au premier rang des
mesures propres à favoriser cette évolution figure la récente décision
d’instituer un système de règlements multilatéraux entre les pays membres
et d’établir une banque internationale à cet effet.
305. Les mesures destinées à mieux coordonner les plans et les efforts
d’intégration économique ont le même objet fondamental; accroître la
productivité et élever le niveau de la consommation par une division plus
rationnelle du travail entre les pays membres du Conseil d’entraide éco­
nomique. Le but final dans ces pays est de créer une économie unique ainsi
que d’établir un organisme planificateur unique, chargé de préparer un
plan commun à tout le groupe de pays.
306. Les plans nationaux de développement économique des pays mem­
bres du Conseil d’entraide économique sont désormais coordonnés d’une
façon différente.
307. Chaque pays établit un projet de plan national de développement
économique. Les pays membres du Conseil d’entraide économique procè­
dent ensuite à des consultations multilatérales sur leurs plans. On prend en
considération les ressources et les besoins globaux et on ajuste en consé­
quence les projets de plans. Les organes du Conseil d’entraide économique
rédigent des recommandations appropriées sur les points qui doivent être
examinés en commun.
308. Ces recommandations sont adoptées lors des sessions annuelles
du Conseil d’entraide économique, sur le rapport de la commission perma­
nente compétente.
309. Pour faciliter le processus de coordination, on a recherché des
solutions à un certain nombre de problèmes techniques, dont les princi­
paux sont ceux que posent la normalisation des méthodes de formation
des prix, rétablissement de méthodes pour la comparaison internationale
des coûts relatifs et l’élaboration de méthodes perfectionnées pour évaluer
le rendement des investissements.
310. Les principes et les procédures du Conseil d’entraide économique
concernant la coordination des plans nationaux ont été consignés dans les
« Principes fondamentaux de la division socialiste internationale du tra­
vail », adoptés en juin 1962. Selon ce document, le Conseil d’entraide éco­
nomique vise à acroître le rendement global de l’économie du groupement,
tout en tenant dûment compte du développement économique général et
diversifié de chacim des pays membres. Il s’efforce également de réduire
encore et d’éliminer graduellement les différences dans le degré de déve­
loppement de ces pays. Ainsi, les membres moins industrialisés pourront
être favorisés dans l’attribution de matières rares ou de crédits d’investis­
sement et dans la fixation du prix de certains produits d’exportations pen­
dant la phase initiale de la production. En d’autres termes, certains sacri­
fices de la part des pays plus avancés sont considérés comme un facteur
important du développement économique de tous les pays du groupement.
La coordination internationale des plans fondés sur ces idées directrices
doit, d’après ces principes, s’appliquer aux branches fondamentales de
l’industrie et permettre de réaliser le développement intégré et complet de
chaque pays, en même temps que la spécialisation internationale par
branche. La coordination portera principalement sur les plans à long
terme, vu le temps nécessaire pour effectuer les changements de structure
et de technique voulus. Les plans coordonnés doivent constituer des en­
gagements fermes pour les pays participants, afin de prévenir l’apparition
de déséquilibres.
A D R ESS ES OU LES P U B L IC A T IO N S DES N A TIO N S UNIES
ET DE LA COUR INTERNATIONALE DE JUSTICE SONT EN VENTE

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