Thèse Ponts ParisTech Natation
Thèse Ponts ParisTech Natation
Thèse Ponts ParisTech Natation
Composition du jury:
The objective is to better understand the physics of the different phases of a swimming race. We separate the
pool into two zones : the zones close to the edge, where it is tolerated to be completely immersed, and the zones
in the centre of the pool where the swimmer must be at the interface. The first part deals with the swimming
phases. After a study of the resistances and the propulsion force, we give a model for the frequency-velocity
relationship for swimming with aerial return, extensible to rowing sports such as kayaking. The second part
deals with the non-swimming phases : the start and the turns. We analyse the different phases of the start :
pushing on the pad, flying, passive aquatic phase, undulations and swimming on the surface. Following this
separate analysis, we seek to optimise the complete start trajectory according to the individual parameters of
each athlete. The same work is conducted for the turns, where we look for the optimal distance to the wall to
perform the somersault, as well as the best underwater trajectory.
Résumé
L’objectif est de mieux comprendre la physique des différentes phases d’une course de natation. Nous séparons
le bassin en deux zones : les zones proches du bord, où il est toléré d’être complètement immergé, et les zones au
centre du bassin où le nageur doit se situer à l’interface. La première partie porte sur les phases nagées. Après
une étude des résistances et de la force de propulsion, nous donnons un modèle pour la relation fréquence-
vitesse pour les nages avec retour aérien, extensible aux sports à rame comme le kayak. La seconde partie porte
sur les phases non nagées : le départ et les virages. Nous analysons les différentes phases du départ : poussée
sur le plot, vol, phase aquatique passive, ondulations et nage à la surface. A la suite à cette analyse distincte,
nous cherchons à optimiser la trajectoire de départ complète en fonction des paramètres individuels de chaque
athlète. Le même travail est conduit pour les virages, où nous cherchons la distance optimale au mur lors de
la culbute, ainsi que la meilleure trajectoire de coulée.
Je souhaite d’abord remercier tous les membres du jury. Merci à François Gallaire et
Frédéric Moisy d’avoir accepté d’être rapporteur et d’avoir soulevé les points qui mériteraient
d’être approfondis pour poursuivre les travaux de cette thèse. Je tiens également à remer-
cier Paola Zamparo d’avoir fait le déplacement d’Italie. Merci Caroline Martin d’avoir d’ac-
cepté d’être dans ce jury également. Enfin, merci à Céline d’avoir accepté de représenter la
Fédération Française de Natation.
Merci à l’ANR NePTUNE et la Fondation EDF pour le financement d’une partie de ces
travaux.
Un immense merci à Rémi. Accepter un thésard sans jamais ne l’avoir rencontré était un
pari que tu as accepté de faire, et je t’en remercie une nouvelle fois. Ces quelques lignes
ne suffiront pas à souligner l’importance que tu as eu dans ces travaux. Et merci d’avoir
sacrifié un mois de vacances pour développer un réseau de neurones qui a tant servi pour
cette thèse.
Merci Sébastien d’avoir accepté d’être le directeur de thèse officiel, et pour ton aide lors
de la préparation de la soutenance.
Merci à tous les membres du préfa que j’ai pu cotoyer. Ambre, Pierre, Thibault, pour
l’accueil lors des premiers mois. Hector et Alice, j’espère que votre fin de thèse se déroulera
bien. Merci à Antoine pour ces trois ans de voisinage de bureau, et désolé de tévoir fait subir
nos goûts musicaux discutables.
Merci à Benjamin et Juliette pour le soutien mental lors de ces trois années. Même dans
les moments difficiles de la thèse (cliquer sur des articulations pendant une semaine), vous
étiez là pour choisir la musique qui allait me redonner de la motivation.
Merci à tous les stagiaires que j’ai pu encadrer. Kémil, Vincent, et Loup, vous avez chacun
contribué à cette thèse. Mention spéciale à Thomas qui prendra la suite de ces travauw et
à qui je souhaite tout le meilleur.
iii
Merci à Guilhem pour la confiance dans l’encadrement de l’équipe de l’X lors de l’IPT.
Année après année, nous avons progressé avec Mylène, jusqu’à remporter le tournoi en
Colombie la dernière année, ce qui restera un souvenir important de mes trois années de
thèse. Merci aux élèves pour leur motivation et leur implication. Merci également à Fabian,
pour les discussions lors des trois années.
Merci à tous les membres du laboratoire Saint-Venant pour l’accueil lors de mes (trop
rares) visites à Chatou. Merci à Baptiste pour ton soutien précieux lors des manips aux
quatre coins de la France.
Merci au LadHyX pour l’accueil pendant ces trois années. Merci Caro pour toutes nos
discussions vélo et biathlon. Merci à Pierre et Tom pour ces trois années communes de
doctorat. Merci à tous les autres personnes que j’ai pu croiser, doctorants, stagiaires ou
permanents.
Merci à tous les membres du club d’athlétisme d’Orsay. La course à pied, malgré les
quelques blessures, m’a permis de garder un équilibre physique et mental pendant ces trois
années. Mention spéciale au coach Patrick Moro qui m’a proposé de préparer un marathon
pendant la rédaction du manuscrit, et à Romain et Nico avec qui j’ai beaucoup couru.
Merci à tous mes amis pour les différents moments partagés. Merci Juliette et Seb pour
les week-ends ski de fond. Merci Louise, Camille, Alice, Arnaud, Raphaël pour les vacances
à Font-Romeu. Luc, Clément pour tous les bons momemnts à Besançon, et à Lausanne.
Merci à ma famille pour son soutien sans faille. Merci à mes parents et mon frère. Le
confinement aura eu le mérite de nous redonner l’occasion de vivre à 4, et cela restera
comme un bon moment en famille. Merci à mes grand-parents ainsi que tous mes cousins,
cousines, oncles et tantes pour les moments de partage en famille. Merci Samuel et Claire
pour l’accueil lors des nombreux week-ends passés à Bures sur Yvette.
iv
Table des matières
Introduction 1
v
Conclusion 143
Annexes 147
Bibliographie 177
vi
Intro
INTRODUCTION
1
Intro
Le sport de haut-niveau peut se jouer sur des détails. Aux Jeux Olympiques de 2008, Mi-
chael Phelps a remporté le 100 mètres papillon avec une avance de 0.01 secondes sur Milorad
Čavić, soit un écart de 0.02 % sur le temps final (figure 1). La moindre amélioration du na-
geur est bonne à prendre et peut permettre de passer d’une quatrième place à une médaille
de bronze, ou d’une médaille d’argent à une médaille d’or. Intro
Figure 1 – Arrivée du 100 mètres papillon des Jeux Olympiques de Pékin en 2008. Michael
Phelps (à gauche) l’emporte avec 0.01 secondes d’avance devant Milorad Čavić (à droite)
[1].
Le physicien peut aider les sportifs dans cette quête d’amélioration. En établissant les
modèles physiques qui décrivent le mouvement sportif, il est possible ensuite de chercher des
optima, et de les comparer aux stratégies utilisées en compétition. La physique du sport lie
deux univers a priori opposés. Les sportifs (entraı̂neurs et athlètes) observent la concurrence
et se regardent finement. Ils tentent des innovations régulièrement. Quand cela fonctionne,
ces innovations répétées voire appliquer à d’autres athlètes. Le physicien cherche en plus à
l’expliquer, le mesurer, le modéliser à partir de lois (les plus simples possibles). Cela permet
d’identifier les paramètres importants, de comparer, d’adapter et d’optimiser. Initialement,
entraı̂neurs et physiciens ne parlent pas le même langage. Il est donc indispensable de partir
du terrain, identifier une question, la traduire en question physique et définir un vocabu-
laire commun. De plus, les temps caractéristiques des deux milieux sont très différents. Pour
établir un modèle physique, il est nécessaire d’analyser les résultats et de prendre du recul,
ce qui nécessite plusieurs mois voire années. En revanche, les entraı̂neurs et sportifs ont des
échéances très régulières, et leur statut peut être remis en cause en cas de saison blanche
(perte du statut de sportif de haut-niveau, changement d’entraineur). Malgré ces diver-
gences, la collaboration entre sportifs et physiciens peut être la source de progression pour
chacun. Les modèles physiques permettent de trouver des optima potentiellement éloignés
des stratégies observées en compétition, qui prennent en compte la spécificité de chaque
athlète (modèle sur-mesure). Cela peut être la source de nouvelles idées pour les entrai-
neurs. Réciproquement, les expériences réalisées avec les sportifs ainsi que l’expertise des
entraineurs permettent de guider le physicien dans sa modélisation, afin de se concentrer
sur les paramètres intéressants.
Suite à ce constat, Sciences2024 a été lancé le 1er septembre 2018 [2]. Ce programme re-
groupe 11 établissements d’enseignement supérieur français parmi lesquels l’École des Ponts
et l’École polytechnique, membres fondateurs. Près de quinze fédérations sportives sont
également impliquées dans le projet. La Fédération Française de Natation et la Fédération
3
Handisport en font partie. Cette thèse vise à utiliser les lois de la physique pour aider les
athlètes français dans les épreuves de natation aux Jeux Olympiques et Paralympiques.
Intro
La natation aux Jeux Olympiques
Figure 2 – Disciplines présentes aux Jeux Olympiques pour lesquelles il est nécessaire de
nager. (a) Natation artistique [3] (b) Water-Polo [4] (c) Natation course [5] (d) Pentathlon
moderne [6] (e) Triathlon [7] (f) Natation en eau libre [8].
La natation est présente aux Jeux Olympiques depuis les premiers Jeux Olympiques mo-
dernes (1896). Actuellement, d’après la liste officielle du Comité International Olympique
[9], il est nécessaire de nager dans 6 sports : la natation artistique, le water-polo, la natation
course, le pentathlon moderne, le triathlon et la natation marathon. (figure 2). Comme nous
nous concentrons sur les sports de course, le water-polo et la natation artistique ne seront
pas concernés par nos travaux. Les pentathlètes doivent nager un 200 mètres nage libre
en bassin (les autres épreuves sont l’escrime, l’équitation, le tir et la course à pied). Les
triathlètes nagent 1.5 kilomètres en eau libre, avant d’effectuer 40 kilomètres de cyclisme
sur route puis 10 kilomètres de course à pied. La “natation marathon” est une course en
eau libre de 10 kilomètres.
Sur la table 1, nous listons les 35 épreuves de “natation course” aux Jeux Olympiques.
En comparaison, la somme des épreuves en triathlon (3), en pentathlon moderne (2) et en
natation marathon (2) correspond à 7 épreuves. Compte tenu de la différence de médailles
potentielles, nous étudierons en priorité les courses en bassin, sachant que les épreuves
combinées dépendent également des autres disciplines. Nos travaux sont transposables à la
course de natation du pentathlon, qui s’effectue en bassin. Nous n’étudions pas la nage en
peloton, donc la partie natation du triathlon et la course de 10 km en eau libre ne seront
pas notre priorité. Certains éléments concernant la dynamique de nage peuvent s’appliquer
pour les épreuves d’eau libre.
Les différents styles de nage sont illustrés sur la figure 3. Sur les 35 épreuves, on compte 23
4
100 Dos 200 Dos 100 Papillon 200 Papillon 100 Brasse 200 Brasse
50 NL 100 NL 200 NL 400 NL 800 NL 1500 NL
4 × 100 NL 4 × 200 NL 200 4 Nages 400 4 Nages 4 × 100 4N
Intro
Tableau 1 – Distances (en mètres) et styles de nage des courses de natation en bassin au
programme des Jeux Olympiques 2024. Il existe une épreuve homme et femme pour chaque
distance. Le relais 4 × 100 mètres 4 nages a également une version mixte depuis 2020. On
compte donc 35 épreuves, dont 16 exclusivement en crawl et 23 avec au moins une partie en
crawl.
épreuves avec au moins une partie en crawl et 16 épreuves exclusivement en crawl (table
1). Pour cette raison, nous nous focaliserons en priorité sur cette technique de nage, en
élargissant aux autres styles de nage quand cela est possible.
(a) (b)
(c) (d)
Figure 3 – Illustration des quatre styles de nage lors des compétitions de natation. (a)
Papillon [10]. (b) Dos [11]. (c) Brasse [12]. (d) Crawl [5].
Le bassin mesure 50 mètres (figure 4). Il est découpé en 10 lignes d’eau, chacune d’une largeur
de 2.5 mètres. Pour éviter les réflexions de vague contre le mur, les deux lignes extérieures
sont laissées libres. Suivant les styles de nage, les règles du départ et du virage diffèrent.
D’après le règlement international [13], les nageurs sont autorisés à rester sous l’eau pendant
les 15 mètres qui suivent le départ et le virage. La distance est jugée au niveau de la position
de la tête. Dans notre volonté de décrire la course de natation du départ à l’arrivée, nous
séparons donc le bassin en deux zones : les zones proches du mur qui concernent le départ
et le virage et les zones au centre du bassin, où le nageur reste à la surface.
Objectifs de la thèse
5
Intro
D (m)
0 15 35 50
La seconde question est plus large et concerne les phases “non nagées” (départ et virage).
L’objectif est de travailler spécifiquement ce point en vue des Jeux Olympiques de Paris.
La méthode pour évaluer un départ est généralement de mesurer le temps pour effectuer
les 15 premiers mètres. On mélange ainsi la poussée sur le plot, la phase d’ondulation et
la reprise de nage. Le premier objectif est donc de mesurer précisément une trajectoire de
départ. Ensuite, on peut séparer la trajectoire en différentes phases, et donc évaluer le nageur
phase par phase. Ces évaluations permettent de décrire le nageur par un certain nombre de
paramètres. Ces paramètres doivent ensuite être les variables d’entrée d’un modèle d’opti-
misation du virage et du départ.
État de l’art
Hay a étudié les relations fréquence-vitesse dans différents sports dont la natation [14]. Les
résultats présentés montrent une diminution de la distance par cycle avec l’augmentation
de la vitesse, sans donner de justification théorique à cela.
Nous recensons dans la littérature scientifique sur la natation deux indices qui évaluent
la technique d’un nageur (et donc son efficacité). Un premier est l’indice de nage (IdN),
défini par Costill et al. en 1985 [15]. Il s’agit du produit de la vitesse de nage moyenne (V )
et de la distance par cycle (SL) (IdN=V SL). D’après Costill, il s’agit d’un indicateur de
6
l’économie de nage (quantité d’énergie consommée à une vitesse donnée) puisqu’il représente
la capacité d’un athlète à nager à une certaine vitesse avec le moins de coups de bras possible.
Plus récemment (en 2000), Chollet et al. ont défini un indice de coordination qui permet
Intro
de quantifier la proportion des phases de glisse du nageur en fonction de sa vitesse [16]. Ce
nombre sans dimension s’écrit :
−tc
IdC = , (1)
T
où T est la période du cycle et tc est le temps de glisse. En cas de mode de coordination “rat-
trapé” (figure 5-A), il existe un temps de glisse entre la propulsion de chaque bras. Le temps
de glisse tc est positif et l’indice de coordination est donc négatif. En cas de “superposition”
(figure 5-B), la propulsion d’un bras commence avant que l’autre bras ne sorte de l’eau. En
écrivant td et tg les temps de propulsion à droite et à gauche, on définit un temps de glisse
négatif tc tel que tR + tL + tc = T . L’indice de coordination est donc positif. Le cas limite
entre le rattrapé et la superposition (IdC=0) est appelé la nage en opposition : le bras i+1
commence sa propulsion à l’instant où la propulsion du bras i se termine. D’après Chollet et
al., l’indice de coordination augmente avec la vitesse. De plus, il permet d’évaluer le niveau
d’expertise d’un nageur. Il est techniquement difficile d’atteindre des indices de nage positifs.
Départ et virages
Vantorre a effectué une revue de littérature sur les études biomécaniques existantes sur le
départ en natation en 2014 [18]. Le départ est souvent découpé en trois phases : la poussée
sur le plot, la phase de vol et la phase aquatique.
La phase de poussée sur le plot permet au nageur d’acquérir sa vitesse. Il faut trouver un
compromis entre ne pas perdre trop de temps et avoir une vitesse de décollage suffisante
[19]. Takeda et al. ont travaillé sur l’angle de décollage, en comparant la vitesse de décollage
et la distance de vol des nageurs entre leur départ naturel et un angle “plus vers le bas”
[20]. Diminuer l’angle de décollage augmente la vitesse de décollage et réduit la distance de
vol. L’influence sur le temps final n’est pas discutée.
Ensuite, la phase de vol commence au décollage du pied avant et se termine lorsque les mains
rentrent dans l’eau [21]. La distance de vol est l’une des variables les plus déterminantes
dans la performance d’un départ [22]. Toutefois, l’objectif lors de la phase de vol ne doit pas
être d’aller le plus loin possible, mais de préparer une entrée dans l’eau propre [23].
En entrant dans l’eau, le nageur doit rester le plus profilé possible pour minimiser la perte
de vitesse [18]. La glisse du nageur lors de cette phase passive peut être évaluée en tractant
le nageur à différentes vitesses [24]. Passée une certaine vitesse, le nageur doit “activer” ses
ondulations. Lyttle et al. ont travaillé sur la vitesse d’activation optimale de ces ondulations
[25]. Le résultat est une gamme de vitesses d’activation optimale moyenne sur l’échantillon
de nageurs testés (autour de 2.5 mètres par seconde). La vitesse d’activation fournie est
valable pour une trajectoire en ligne droite, alors que les trajectoires de virage et de départ
sont courbées.
Les études sur le virage sont moins nombreuses. La plupart se concentre sur des comparai-
sons de performance en virage (longueur de coulée, temps du virage) [26, 27, 28, 29]. Il est
difficile de comparer ces études entre elles puisque la définition du début du virage et de sa
7
Intro
(A)
(B)
Les travaux cités étudient des phases séparées du départ ou du virage. Toutefois, les différentes
phases sont dépendantes les unes des autres. Suivant l’angle de décollage, la vitesse et l’angle
d’entrée dans l’eau seront différents. En fonction de la vitesse d’entrée dans l’eau et de la
vitesse d’activation, la profondeur maximale peut varier également. Il serait donc souhai-
table d’avoir un modèle global qui couvre la totalité du départ (les quinze premiers mètres)
ou du virage.
Méthode générale
Partant du constat que chaque athlète possède ses propres caractéristiques (taille, masse,
vitesse de coulée, force de propulsion), nous cherchons un modèle “sur-mesure” qui s’adapte
aux caractéristiques de chaque athlète. Par exemple, on ne donnera pas la trajectoire de
départ optimale pour tous les nageurs mais une trajectoire optimale par nageur. Il s’agit
8
d’identifier les paramètres “physiques” pertinents et d’établir des méthodes simples pour les
évaluer afin de s’adapter à chaque athlète.
Pour ces raisons, nous nous efforcerons de présenter les résultats individuels. L’objectif est
Intro
de prendre en compte les singularités de chacun. Comme les athlètes ne sont pas regroupés et
moyennés, il faut se soucier de deux points principaux. D’une part, il faut être le plus précis
possible. D’autre part, le geste sportif doit être maı̂trisé et répétable. Les athlètes que nous
étudions sont pour la plupart des athlètes de haut-niveau (internationaux, finalistes aux
Jeux Olympiques, médaillés aux championnats d’Europe et du Monde). Cela nous assure
de la maı̂trise du geste sportif. Notre échantillon de nageurs reste faible. Nous ne recourons
pas à des outils statistiques mais cherchons à développer des modèles physiques le plus
généralisables possible.
Structure du manuscrit
Dans un premier temps, nous définissons nos méthodes d’analyse du mouvement. Pour les
deux questions posées, avant de chercher une quelconque modélisation, nous devons être
capable de mesurer le mouvement (vitesse de nage, de bras, trajectoire aquatique). Cette
étape est incontournable pour valider les modèles ensuite. Comme tous les chapitres sui-
vants nécessitent ces outils, nous commençons par les présenter. Nous détaillons à la fois
les méthodes pour connaı̂tre la vitesse du centre de masse du nageur ainsi que celles qui
permettent de décrire les mouvements internes (cycles de bras, battements de jambes).
Le second chapitre traite de la dynamique de nage. Nous évaluons séparément les forces de
propulsion et de résistance. Nous caractérisons précisément la trainée passive du nageur à
la surface et donnons son évolution avec la profondeur. La fin du chapitre est consacrée à
l’étude de la trainée active. Cette étude dynamique est nécessaire à la suite des travaux.
Ainsi nous posons les bases des modèles qui seront établis plus tard.
Les trois derniers chapitres traitent des phases proches des bords du bassin. Dans le chapitre
4, nous étudions le départ étape par étape : poussée sur le plot, vol, phase aquatique passive,
ondulation, nage de surface. Pour chaque phase, nous déterminons les paramètres nécessaires
pour décrire le mouvement du nageur, ainsi que la manière d’évaluer ces paramètres pour
chaque nageur.
Le chapitre 5 utilise les modèles mis en évidence dans le chapitre précédent afin de chercher
la trajectoire de départ optimale. Nous répondons aux questions suivantes : Quel est l’angle
de décollage optimal ? Quand le nageur doit-il activer ses ondulations ?
9
Enfin, le dernier chapitre traite du virage. Le travail effectué sur le départ peut être adapté
au virage. La question supplémentaire pour le virage concerne la distance optimale au mur
pour effectuer la culbute.
Intro
10
1 Chp 1
Mesure et capture du mouvement
en natation
Dans ce chapitre, nous détaillons les moyens de mesure utilisés : mesure de la vitesse instan-
tanée, centrales inertielles, dispositif de caméras fixes permettant l’analyse du mouvement.
Ces différents outils nécessitent une phase de calibration avant de pouvoir être utilisés.
Sommaire
1.1 La capture du mouvement dans le sport : revue de littérature . . . 12
1.2 Mesure de la vitesse instantanée : le capteur fil tendu . . . . . . . 15
1.3 Utilisation des centrales inertielles pour la reconstruction du mou-
vement des bras . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20
1.4 Tracking et intelligence artificielle . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28
11
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Chp 1
1.1.1 Vitesse et fréquence
Les outils d’analyse du mouvement ont des coûts et des précisions très variables. Ainsi,
avec un chronomètre et un mètre, il est possible d’analyser la fréquence et la vitesse d’un
mouvement humain (vitesse et fréquence de pédalage en cyclisme, vitesse et cadence de bras
en natation, en aviron ou en kayak). C’est ainsi que la majorité des entraı̂neurs mesure la
vitesse de leurs athlètes (le mètre est souvent remplacé par des repères connus, tels que des
lignes au sol sur une piste d’athlétisme, ou des marques sur les lignes d’eau en natation).
Cela fonctionne pour mesurer la vitesse moyenne sur plusieurs cycles de locomotion. L’uti-
lisation de radars permet quant à elle de mesurer la vitesse instantanée. Ce signal de vitesse
instantanée peut ensuite faire l’objet d’une analyse spectrale pour déterminer la fréquence
du mouvement. Cela fonctionne très bien pour des mouvements à faible fréquence comme
la marche ([31, 32]).
Certaines analyses nécessitent des données plus fines que la vitesse et la fréquence globale
du geste. On veut par exemple les vitesses angulaires au niveau de certaines articulations,
ou la vitesse d’un segment. Pour cela, il est donc nécessaire de connaitre les positions des ar-
ticulations. En d’autres termes, nous devons être capable d’avoir l’évolution du “squelette”
de l’athlète.
Les systèmes optoélectroniques. Il s’agit du système le plus précis. Les athlètes sont
équipés de marqueurs réfléchissants. On utilise plusieurs caméras (8 caméras pour un vo-
lume de 5 mètres par 5 mètres). Après une phase de calibration du volume (il faut connaı̂tre
la position des caméras dans l’espace), chaque caméra détecte les marqueurs réfléchissants.
Comme chaque marqueur est vu par plusieurs caméras, il est possible de connaı̂tre la po-
sition de chaque marqueur dans l’espace. C’est de cette manière que sont réalisés certains
films en image de synthèse, comme le film Avatar (figure 1.4).
Comme mentionné sur la figure 1.1, les volumes couverts par les systèmes optoélectroniques
sont petits. On ne pourra pas couvrir la totalité d’une course de natation : ces systèmes
12
1.1. La capture du mouvement dans le sport : revue de littérature
Chp 1
Figure 1.1 – Analyse des différents moyens d’analyse du mouvement humain dans le sport
par Van der Kruk et Reijne ([33]) .
Figure 1.2 – Tournage du film Avatar [34]. Les marqueurs réfléchissants sont fixés sur la
combinaison et sur les gants des acteurs.
L’analyse est très longue. En effet, il faut labéliser chaque marqueur a posteriori. Au moment
de la capture, le logiciel n’est pas capable de distinguer si le marqueur reconnu correspond à
la cheville ou au genou. De plus, il faut placer tous les marqueurs sur l’athlète, et les retirer
à l’issue des expériences.
13
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Enfin, ce système est très sensible aux réflexions de la lumière du soleil. Les expériences sur
les mouvements terrestres peuvent souvent être faites dans des salles closes sans lumières
extérieures. Pour la natation, ces conditions ne peuvent pas toujours être réunies, ce qui
rend l’utilisation des systèmes optoélectroniques difficile.
L’analyse vidéo sans marqueurs. Les marqueurs réfléchissants sont facilement détectables
par la caméra optoélectronique. Le cerveau humain arrive à détecter la position et l’orien-
Chp 1
tation des articulations en regardant un mouvement humain. Grâce à des méthodes de
vision par ordinateur (ou Computer Vision), nous pouvons donc envisager apprendre à un
ordinateur à comprendre où se placent les différentes articulations à partir d’images de mou-
vement humain. C’est le principe des analyses sans marqueurs (ou markerless). Parmi les
outils principaux, nous pouvons citer Openpose [35] et Theia (figure 1.3).
Les centrales inertielles ou IMU (Inertial Measurement Unit) Il est également en-
visageable d’équiper l’athlète de centrales inertielles. Une centrale inertielle donne l’accélération
instantanée sur 3 axes, ainsi que les 3 vitesses angulaires. Grâce à des filtres de fusion, il est
ensuite possible d’intégrer les données afin de trouver la position des différents segments au
cours du temps.
Cela permet de couvrir un plus grand volume que les deux systèmes précédents. De plus, il
n’est pas nécessaire d’installer de caméras : ce système est donc beaucoup plus facilement
transportable.
Pour mesurer des vitesses angulaires, il est aussi précis de directement utiliser des centrales
inertielles que de dériver la position obtenue grâce aux systèmes optoélectroniques [36]. En
revanche, pour obtenir la position, l’intégration fait perdre en précision.
Après cette introduction sur les principales méthodes d’analyse du mouvement existantes,
nous détaillons désormais les dispositifs de mesure que nous utiliserons au cours de nos
travaux pour mesurer les différentes grandeurs physiques en jeu.
14
1.2. Mesure de la vitesse instantanée : le capteur fil tendu
Pour étudier la dynamique de la nage, il est nécessaire de mesurer la vitesse de nage. Les
entraı̂neurs ont l’habitude de mesurer les vitesses uniquement avec un chronomètre, sachant
que les piscines sont équipées de repères (figure 1.4). Cette méthode est peu précise. Il peut
également être envisagé de filmer les passages et de mesurer les vitesses grâce aux vidéos a
posteriori. Cette méthode est plus précise mais chronophage, puisqu’il faut agir manuelle-
ment sur chaque essai. Chp 1
0 5 15 25 35 45 50 D (m)
Figure 1.4 – Différents repères observables sur les lignes d’eau d’un bassin de 50 mètres.
Nous nous sommes inspirés d’un système de mesure plus précis, avec un système de calcul
de la vitesse automatique : le Speedometer ([37]). L’athlète nage attaché à un fil grâce à
une ceinture. Grâce à un léger frein dans le système, le fil reste toujours tendu. La ceinture
étant proche du centre de masse du nageur, nous pouvons estimer la vitesse de déplacement
instantanée du nageur.
L’objectif est de mesurer des vitesses sur des longueurs atteignant 25 mètres. Nous avons
donc un fil d’une longueur de 30 mètres, enroulé sur un cylindre de stockage (voir figure 1.5).
Le fil passe par un second cylindre, qui permet de mesurer la vitesse. Le fil étant enroulé
sur une unique épaisseur, le rayon apparent R1 du cylindre ne fluctue pas, ce qui serait le
cas si l’enroulement était sur plusieurs épaisseurs. Nous pouvons donc écrire la vitesse de
nage Vnage en fonction de la vitesse de rotation du cylindre de mesure ω1 : Vnage = R1 ω1
La vitesse de rotation est mesurée grâce à une photodiode et des obstacles qui coupent la
photodiode (voir figure 1.5). Un anneau composé de n = 8 obstacles est placé sur le cylindre
de mesure, faisant face à une photodiode. Grâce à une carte d’acquisition MCC USB-1608G,
la tension aux bornes de la photodiode est mesurée avec une fréquence d’acquisition f =
30 kHz. Si la photodiode reçoit son maximum de lumière, la tension vaut 0 V. Au contraire,
lorsque la lumière reçue par la photodiode est très faible, la tension vaut 5 V. Lorsque le
cylindre tourne, le signal électrique est en “créneau”, avec des plateaux hauts lorsqu’un
15
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
𝑒𝑓𝑖𝑙 𝑅1
𝑅2
Chp 1
Figure 1.5 – Photo vue de dessus du dispositif et schéma latéral. 1 : carte d’acquisition -
2 : cylindre de stockage - 3 : cylindre de mesure - 4 : obstacle - 5 : photodiode - 6 : fil . La
carte d’acquisition est reliée à un ordinateur. Le fil quant à lui est accroché au nageur via
un mousqueton.
obstacle passe devant la photodiode, et des plateaux bas sinon. Ce signal est illustré sur
la figure 1.6. L’instant auquel l’obstacle passe devant la photodiode est défini comme le
milieu entre le front montant et le front descendant. La tension seuil que nous choisissons
est Useuil = 3.8 V. Nous définissons t = (tM + tD )/2, où tM est l’abscisse de la première
intersection entre la courbe de tension et la droite U = Useuil . tD correspond à l’abscisse de
seconde intersection entre la courbe de tension et la droite U = Useuil (voir figure 1.6).
Le premier traitement consiste donc à transformer le signal électrique en un tableau de
temps [t1 , t2 , t3 , ..., tN ] associés chacun au passage d’un obstacle. Ensuite, il faut convertir ce
tableau de temps en vitesse. Pour cela nous raisonnons modulo 8 (8 est le nombre d’obstacles
sur un tour) afin d’éviter les éventuelles dissymétries de révolution de l’anneau. En notant
i ∈ [[1; N − 8]] le i-ème passage d’obstacle, la vitesse angulaire ω1 du cylindre de mesure est
donnée par :
ti + ti+8 2π
ω1 = .
2 ti+8 − ti
Nous présentons le dispositif que nous mettons en place en piscine sur la figure 1.7. Le
nageur porte une ceinture sur laquelle est attachée le fil. Comme le montre cette figure, la
vitesse de déroulement du fil dl/dt ne vaut pas exactement la vitesse du nageur dyG /dt. En
16
1.2. Mesure de la vitesse instantanée : le capteur fil tendu
𝑈𝑠𝑒𝑢𝑖𝑙
Chp 1
// //
𝑡𝑀 𝑡𝐷
𝑡𝑖−2 𝑡𝑖−1 𝑡𝑖 𝑡𝑖+1 𝑡𝑖+2 𝑡𝑖+3 𝑡𝑖
Figure 1.7 – Définition de l’angle αF , qui mesure l’écart entre la direction du fil et la
direction de nage.
effet, on a :
dyG dl h
= cos αF avec sin αF = . (1.1)
dt dt l(t)
17
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Dans un système sans frottement, si la tension dans le fil devient nulle, le cylindre continuera
de tourner en raison de l’inertie. Il faut donc un frein suffisamment fort pour limiter les effets
inertiels et suffisamment faible pour ne pas perturber la nage. On place un système de frein
contre le cylindre de stockage grâce à un ressort réglable.
Chp 1
On fait l’hypothèse d’un frottement solide Fs entre le cylindre et le frein et on confond les
coefficients de frottement statique et dynamique.
Tant que Fs < Fc , le cylindre ne bouge pas. Sinon le cylindre bouge et Fs = Fc . On écrit le
théorème du moment cinétique appliqué au cylindre de mesure :
J1 θ̈ = R1 (Tf il − Fs ) , (1.2)
où J1 est le moment d’inertie du cylindre de mesure autour de son axe de rotation et R1
le rayon de ce cylindre. Pour mesurer la force de frottement solide, on accroche des masses
de calibration au bout du fil avec un système de poulie pour que la gravité joue son rôle. Si
le fil ne bouge pas, on augmente la masse, si le fil bouge, on diminue la masse. Finalement,
on obtient la masse critique de mise en mouvement avec une précision de 1 gramme. On
trouve mc = 167 g ± 1 g. D’après l’équation 1.4, Fc = mc g. On en déduit que le nageur est
freiné par le système avec une force Fs = 1.64 N. Morouço mesure une force de propulsion
moyenne de 92.3 ± 30 N sur des tests de 30 secondes. On en déduit que la force de freinage
vaut environ 2 % de la force de propulsion totale. Pour la suite on prendra Fs = Fc .
Le système étant composé de 2 cylindres, il faut évaluer l’inertie des deux cylindres pour
vérifier si les frottements solides calculés dans le paragraphe précédent sont rapidement
atténués. Pour évaluer l’inertie des cylindres, on fait chuter des poids de musculation de 500
g à 4 kg d’une hauteur de 2 mètres. Les poids sont reliés au fil grâce à un mousqueton. Une
poulie permet de limiter les frottements lors de la chute. On mesure l’évolution de la vitesse
et on calcule l’accélération moyenne lors de la chute. La variation d’énergie du système 2
cylindres + fil + masse s’écrit :
d 1 1 2 1 2
mV 2 + mgh + J1 θ˙1 + J2 θ˙2 = −Fs V, (1.3)
dt 2 2 2
dV
(m + m1 + m2 ) = (m − mc ) g. (1.4)
dt
Le fil fait plusieurs tours sur le cylindre 2. Le rayon apparent R2 varie au cours du temps.
On suppose que l’épaisseur de fil ef il est petite devant le rayon du cylindre R2 . Ainsi, la
masse m2 est constante. Pour le cylindre, le fil ne fait qu’un tour, donc R1 est bien le rayon
du cylindre. Si on note a = dV /dt l’accélération lors de la chute, et qu’on définit une masse
équivalente m⋆ = m − mc , la formule suivante doit être vérifiée,
m⋆
a= g. (1.5)
m⋆ + m1 + m2 + mc
18
1.2. Mesure de la vitesse instantanée : le capteur fil tendu
a(m/s2 )
4
2
Chp 1
m1 + m2 = 1485 g
expériences
0
0 1000 2000 3000 4000
m? (g)
Tant que le nageur accélère, le fil reste tendu. La question se pose uniquement pendant
les phases de décélération. Dans ce cas, il faut que le nageur décélère moins vite que les
cylindres. En effet, si le nageur décélère trop fort, les cylindres tournent et le fil se détend.
On se place dans la limite où Tf il = 0 et on vérifie que |af il | > |anageur |. La décélération du
fil vaut :
Fs
af il = − ,
m1 + m2
grâce aux deux paragraphes précédents, on connaı̂t Fs et m1 + m2 . On en déduit que
af il = 1.1 m/s2 . On écrit ensuite la décélération classique du nageur lors des phases non
propulsives ([38]),
1
ρSCD V 2
anageur = − 2 ,
M + MA
où M est la masse du nageur, MA sa masse ajoutée, S sa surface frontale et CD son coefficient
de traı̂née. Les valeurs typiques de ρSCD /2 sont de l’ordre de 25 kg/m. ([38])
Finalement, l’inégalité |af il | > |anageur | définit une valeur de vitesse maximale pour laquelle
le fil reste tendu. En effet :
s
Fs (M + MA )
Vlim = 1 . (1.6)
2 ρSCD (m1 + m2 )
Avec les valeurs numériques calculées précédemment, pour un nageur tel que M + MA =
100 kg, nous obtenons Vlim = 2.09 m/s. Sachant que les vitesses moyennes maximales me-
19
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
surées sont de V = 2 m/s, il est possible que la vitesse instantanée dépasse cette vitesse
limite par moments. On ne peut donc pas assurer que le fil reste tendu sur les phases de
sprint. Cependant, nous nous sommes placés ici dans la limite extrême dans laquelle le na-
geur ne se propulse pas du tout. Si le nageur se propulse, la décélération du nageur sera
moins forte et le fil restera donc tendu. Quand bien même le fil se détende par moments, la
vitesse moyenne reste correcte. En conclusion, le fil reste tendu dans la plupart des cas, il
faut seulement être vigilant sur les variations de vitesses intra-cycle en sprint, qui peuvent
en partie être des artefacts dus au fil qui se détend et se retend.
Chp 1
1.2.6 Limitations
Ce système est relativement simple et peu onéreux. Il permet d’avoir une mesure tous les
centimètres. En effet, la résolution du système de mesure s’exprime en espace puisque c’est
l’intervalle entre deux passages d’obstacle devant la photodiode. L’inertie des cylindres ainsi
que les frottements solides sont certes faibles mais ils peuvent quelquefois perturber les
nageurs. La plus grosse perturbation sur le nageur est le fil, qui peut potentiellement se
prendre dans les pieds du nageur.
Au-delà de la vitesse obtenue grâce au Speedometer, il est nécessaire dans notre analyse de
la dynamique de nage, d’avoir accès à la fréquence du mouvement ainsi qu’au trajet effectué
par la main dans l’eau. Les systèmes optoélectroniques nécessitent un temps d’installation
très lourd pour pouvoir faire du suivi sur le long terme (il faut une demi-journée pour
installer les caméras) et la zone de capture du mouvement ne permet de reconstruire qu’un
unique cycle de nage. Nous choisissons donc d’utiliser des centrales inertielles (1.9). Nous
plaçons une centrale inertielle sur le bras et une sur l’avant-bras. Les mouvements du poignet
seront négligés (aucune centrale inertielle ne figure sur la main). Ces centrales inertielles sont
reliées par un fil à un boı̂tier Maxiphyling, qui contient une carte d’acquisition et une capacité
de stockage des données. Une centrale inertielle est placée dans le boı̂tier également. Une
fois les essais terminés, les données sont récupérées en se connectant au boı̂tier en Wi-Fi.
L’utilisation de centrales inertielles filaires permet une synchronisation parfaite des données,
et l’augmentation de la fréquence d’acquisition par rapport à des centrales inertielles sans
fil.
La référence de nos centrales inertielles est LSM6DS3TR, fournie par la société STMicroe-
lectronics. Ces centrales inertielles sont composées d’un accéléromètre 3 axes ainsi que d’un
gyroscope 3 axes. Les champs magnétiques en intérieur sont très irréguliers, pour cette rai-
son l’utilisation de magnétomètre n’est pas pertinente.
Le câblage et la réalisation du boı̂tier étanche Maxiphyling sont confiés à l’entreprise Phyling
[39], spécialisée dans la réalisation de capteurs dans le monde du sport. Nous disposons de
2 chaines de 2 IMU chacune. Une cinquième centrale inertielle se trouve dans le boı̂tier.
Le boı̂tier est alimenté par une batterie, rechargeable via un câble micro-USB. À ce stade,
notre dispositif nous donne trois valeurs d’accélération et trois valeurs de vitesse angulaire
20
1.3. Utilisation des centrales inertielles pour la reconstruction du mouvement des bras
(a) (c)
(b)
Chp 1
Figure 1.9 – Dispositif du mouvement des membres supérieurs. (a) Centrale inertielle
(b) Boı̂tier maxiphyling (c) Dispositif complet. On a une chaı̂ne de 2 centrales inertielles
sur chaque bras. Une centrale est placée sur le poignet, l’autre est sur le bras. Le boı̂tier
maxiphyling est embarqué avec le nageur grâce à une ceinture.
par centrale inertielle, à une fréquence de 100 Hz. La première étape est la validation des
données brutes.
D’après la documentation technique des centrales utilisées [40], il est nécessaire de calibrer
la sensibilité et l’offset de chacun des axes des accéléromètres et des centrales inertielles.
Nous notons U le signal renvoyé par les capteurs (accéléromètre ou vitesse angulaire), et G
la grandeur physique réelle. D’après la documentation technique, G = αU + β. Nous devons
trouver la sensibilité α et l’offset β. Pour chaque axe, il faut donc vérifier deux valeurs de
U pour lesquelles G est connu pour être certain de la bonne calibration.
Pour l’accéléromètre, les valeurs retenues pour la calibration sont 0 et g. Quand l’axe est
aligné avec la verticale, G=g. Si c’est un des deux autres axes qui est aligné avec la verticale,
alors G=0.
Concernant les gyroscopes, en dehors du cas G=0 assez simple à traiter, il faut une autre
valeur de G. Pour cela, on utilise une plate-forme rotative (figure 1.10). Nous faisons tourner
cette plate-forme en mesurant la vitesse angulaire grâce à un logiciel d’analyse d’images
(Tracker ). Ainsi, nous calibrons un axe par centrale inertielle. Pour les axes suivants, il
n’est plus nécessaire de passer par l’analyse d’image, en utilisant une centrale inertielle
comme référence, et en pivotant les autres.
L’hypothèse forte que nous faisons concerne l’alignement des axes. Nous considérons que les
3 axes sont parfaitement orthogonaux, ce qui n’est pas toujours strictement le cas dans les
centrales inertielles de premier prix.
Avant de chercher l’orientation du bras complet, on cherche l’orientation d’un IMU au cours
du temps. On appelle orientation les coordonnées de l’axe yI de l’IMU dans le référentiel de
21
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Chp 1
Figure 1.10 – Dispositif de calibration des vitesses angulaires données par les IMU. (a)
Photo vue de dessus (les centrales inertielles sont sous les scotchs vert et bleu). (b) Schéma
vu de côté.
Figure 1.11 – Nous cherchons les coordonnées du vecteur yI dans le référentiel R0 =(x0 ,
y0 , z0 ). Nous choisissons le vecteur yI plutôt que xI ou zI puisqu’il s’agit de l’axe le plus
proche de celui du segment quand l’IMU est fixé sur le bras ou l’avant-bras.
22
1.3. Utilisation des centrales inertielles pour la reconstruction du mouvement des bras
L’utilisation des quaternions pour retrouver l’orientation d’une centrale inertielle au cours
du temps se trouve facilement dans la littérature ([41, 42]). Dans l’annexe A, nous montrons
comment l’orientation de l’IMU S(t) (vecteur à 3 dimensions) est obtenue à partir des
trois vitesses angulaires dans le repère de l’IMU (ωx , ωy , ωz ). En revanche, une fois cette
orientation obtenue, il est plus difficile de trouver comment remonter aux mouvements des
segments à partir de S(t). Chp 1
Nous proposons ici notre propre protocole pour obtenir le trajet de la main au cours du
temps.
Dans un premier temps, l’épaule est considérée comme immobile par rapport au tronc du
nageur. Nous modélisons le bras comme deux liaisons rotule (épaule et coude), et nous faisons
également l’approximation du “poignet verrouillé”. En effet, nous considérons que la main
est alignée avec l’avant-bras. La première centrale inertielle est placée au milieu du bras,
entre le biceps et le triceps. Notre objectif est d’éviter au maximum les mouvements de la
centrale inertielle quand le muscle se contracte et se rétracte (cela perturberait l’intégration
du mouvement). La seconde centrale inertielle est placée sur la partie plate de l’avant-
bras, légèrement plus haut que le poignet (voir figure 1.9). Grâce à ce qui a été montré
précédemment, nous sommes capables de connaı̂tre l’orientation de l’IMU par rapport à
une position initiale. Nous voulons désormais connaı̂tre l’orientation des segments au cours
du temps.
On se donne un segment (bras ou avant-bras) sur lequel est fixé un IMU. On cherche les co-
ordonnées du “vecteur directeur” Y de ce segment. Dans le référentiel local, les coordonnées
sont triviales : YSeg = (0, 1, 0). Ce choix de la deuxième coordonnée comme axe du segment
vient de l’alignement avec les axes des centrales inertielles utilisées : le bras et l’avant-bras
sont quasiment alignés avec l’axe y des centrales.
Nous supposons que l’IMU est solidaire du bras et dans ce cas, la matrice de passage d’un
repère à l’autre ne dépend pas du temps. Nous posons ainsi P = PbrasIM U la matrice de passage
Nous avons illustré les différentes étapes pour l’obtention de l’orientation des segments au
cours du temps figure 1.12. Les différents changements de base sont notamment représentés.
La formule 1.7 est vraie uniquement si les axes du segment sont initialement alignés avec
les axes du référentiel absolu à t=0. Pour cette raison nous introduisons la rotation R qui
permet de se ramener au cas général. R représente ainsi la rotation du repère du segment
vers le repère absolu à t=0 :
23
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Chp 1
𝑞(𝑡) 𝑺0
Orientation de
l’IMU au cours du S(t)
temps
Orientation du
segment au cours 𝒀𝑎𝑏𝑠 (t)
du temps
Les IMU sont fixées grâce à du strap résistant à l’eau (Leukotape K). Avant que le nageur
n’effectue les expériences dans l’eau, nous lui demandons d’effectuer des mouvements “à
sec”, afin de connaı̂tre la matrice de passage P définie précédemment. La relation entre le
24
1.3. Utilisation des centrales inertielles pour la reconstruction du mouvement des bras
vecteur rotation dans le repère de l’IMU ωimu (les données brutes de la centrale inertielle)
et le vecteur rotation dans le repère du segment ωseg est la suivante :
ωseg = P ωimu .
Flexion de l’épaule Dans le repère du segment, il s’agit d’une rotation “pure” autour
de l’axe x. La position initiale correspond au bras parfaitement vertical, le poignet étant
sous l’épaule et la paume de la main tournée vers l’arrière. L’athlète monte son poignet
devant lui en gardant le bras tendu jusqu’à ce que le bras atteigne la verticale. Ensuite, il
baisse le bras en le gardant tendu devant lui toujours. Une illustration de ce mouvement est
présentée figure 1.13-a. Ce mouvement est répété entre 5 et 10 fois. En théorie, au cours de ce
mouvement, on a ωseg = (ωx , 0, 0). On va donc chercher les coefficients de P qui minimisent
les composantes ωy et ωz en valeur absolue. L’objectif est le suivant :
Z T
min (P ωimu,y )2 + (P ωimu,z )2 dt. (1.9)
P ∈SO3 0
SO3 est l’ensemble des matrices de rotation. On remarque que si P minimise la fonction de
coût, -P la minimise également. Il est assez facile de savoir laquelle choisir, en regardant le
sens de la rotation et donc le signe de ωx .
. .
x z
z
x
y
y
Figure 1.13 – Mouvement de calibration de la position des centrales inertielles sur les
segments. (a) Flexion de l’épaule (b) Abduction de l’épaule. Chaque mouvement est effectué
bras tendu.
Abduction de l’épaule Dans le repère du segment, il s’agit d’une rotation “pure” autour
de l’axe z. La position initiale correspond au bras parfaitement vertical, le poignet étant sous
l’épaule, et la paume de la main tournée vers l’arrière. L’athlète monte son poignet sur le
côté, en gardant le bras tendu jusqu’à ce que le bras atteigne la verticale. Ensuite, il baisse le
bras en le gardant toujours tendu. Une illustration est donnée figure 1.13-b. Ce mouvement
25
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Z T
min (P ωimu,x )2 + (P ωimu,y )2 dt. (1.10)
P ∈SO3 0
Recherche de la matrice P Les essais sur les rotations suivant le troisième axe ont été
Chp 1
moins concluants. Il faut décomposer ces mouvements de vrille suivant l’axe du segment
entre la vrille du poignet et celle du bras. De plus, l’avant-bras étant conique, il n’est pas
évident que la vrille du poignet se produise suivant l’axe recherché. Pour cette raison, nous
ne cherchons la matrice P qu’avec la flexion et l’abduction de l’épaule. Les coefficients px,y ,
py,y et py,z interviennent 2 fois plus que les autres coefficients dans le calcul du minimum.
Pour garder un poids équivalent lors de la minimisation, on va réaliser l’objectif suivant :
Z Z
2 1 2 1 2 2
min (P ωimu,x ) + (P ωimu,y ) dt + (P ωimu,y ) + (P ωimu,z ) dt, (1.11)
P ∈SO3 IF 2 IA 2
où IF et IA sont les intervalles de temps sur lesquels sont effectués les mouvements de
flexion et d’abduction. Ces intervalles doivent avoir environ la même taille. On pourra tou-
tefois pondérer chaque composante de la fonction de coût si les intervalles ont des tailles
trop différentes.
Nous pouvons calculer grâce à l’équation 1.8 l’orientation du bras Yb et de l’avant-bras Yab .
On suppose que le bras est tendu initialement à l’horizontal :
Xc = Lb Yb + Xe .
26
1.3. Utilisation des centrales inertielles pour la reconstruction du mouvement des bras
le plan du tableau.
Les résultats de cette expérience sont satisfaisants. Cependant, nous observons que le texte
intégré est étiré dans la direction horizontale. Cela provient certainement d’une translation
de l’épaule, qu’il est difficile de maintenir immobile. L’épaule est en fait une articulation qui
permet des mouvements de translation, ce qui sera très problématique également pour les
mouvements de natation.
Chp 1
(c)
Figure 1.14 – Validation de l’intégration des données de centrale inertielle pour la recons-
truction du trajet de la main. (a) L’acquisition est lancée dans une position de référence
(b) Le sujet écrit les lettres ”hyx” au tableau, avec le poignet verrouillé. (c) Photographie
du tableau après l’expérience. (d) Trajectoire intégrée de la main à partir des données de
vitesses angulaires
Le dernier élément à déterminer est l’orientation initiale des segments. Dans le cas de
l’écriture au tableau, le délai est assez court entre la position de référence (figure 1.14-
a) et le mouvement. De plus le mouvement est assez fluide, il n’y a pas de problème majeur.
En revanche, les cycles de bras du nageur interviennent après une poussée au mur et des
ondulations, qui peuvent générer du bruit dans le signal. Nous avons deux solutions avec
des avantages différents.
La première solution consiste à prendre une position parfaitement connue (par exemple une
pose en T, ou T-pose) hors de l’eau, puis de se mettre à l’eau et de nager. Cette solution per-
met certes de connaı̂tre parfaitement l’orientation initiale des segments. Cependant, pendant
l’intervalle de temps qui relie la position de référence, au mouvement, nous allons intégrer le
signal des gyroscopes, qui contient une partie de bruit. Ce bruit est particulièrement impor-
tant au moment de l’entrée dans l’eau ou de la poussée sur le mur, en raison des vibrations.
Pour cette raison, nous préférons retenir la deuxième solution, qui a donné des résultats plus
concluants. Cette solution consiste à prendre comme référence un instant du cycle de bras
dont on postule l’alignement des segments. Nous perdrons moins d’informations en intégrant
du bruit. Dans les faits, nous allons chercher le moment où le nageur a le bras tendu devant
lui. Les détails d’intégration seront donnés dans le chapitre 3 consacré à l’étude de la nage.
27
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Les dispositifs précédemment cités sont relativement précis mais ils présentent plusieurs
inconvénients. Il s’agit de système intrusif : les conditions de nage sont donc différentes
de la compétition puisque le nageur possède une ceinture et les centrales inertielles sont
directement collées sur sa peau. De plus, l’électronique peut s’avérer capricieuse, d’autant
plus lorsqu’elle est placée dans l’eau. Il arrive donc de devoir faire attendre le nageur pour
Chp 1 des problèmes d’ordre technique. Comme nous travaillons avec des athlètes de haut-niveau,
cela peut s’avérer problématique. Pour cette raison, nous devons également développer des
solutions d’analyse de mouvement non intrusives et fiables. Nous utilisons donc l’analyse
vidéos.
Nous disposons d’un système de caméras fixes, installé dans le bassin olympique de l’INSEP
(Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance). C’est dans cette piscine
que s’entraı̂ne un des meilleurs groupes d’entraı̂nement français, ce qui facilite l’organisation
de tests expérimentaux. Les caméras sont placées tous les 5 mètres, en commençant à 2.5 m
du bord du bassin. On a donc 10 caméras aériennes et 10 caméras sous-marines. Les caméras
sous-marines sont placées derrière des hublots.
Pour analyser le mouvement, nous souhaitons que la conversion pixel-mètres soit la même en
tous points de l’image. Pour cela, il faut corriger la perspective de l’image, pour se ramener
à une vue parfaitement latérale ([44]). De plus, il faut que l’image d’une ligne droite reste
une ligne droite, on doit donc corriger la distorsion radiale.
Figure 1.15 – Calibration de la distorsion à l’aide d’un damier placé devant la caméra. Les
coins sont détectés automatiquement, et sont représentés par des points colorés ([47]).
Pour l’implémentation de cette correction, nous utilisons la bibliothèque open source Open-
CV [47] en Python. À partir de plusieurs images d’un damier sur l’écran (figure 1.15), l’al-
gorithme reconnaı̂t les lignes censées être droites et recherche les paramètres de distorsion.
28
1.4. Tracking et intelligence artificielle
1.4.1.2 Perspective
Télémètre laser
y=0 Chp 1
D = 1.2 m
Nous cherchons à projeter l’image brute sur le plan d’intérêt (le plan médian de la ligne
d’eau). D’après [48], la matrice de passage est une matrice 3 x 3 à 8 degrés de liberté (le
neuvième est un coefficient de normalisation) : 4 paires de coordonnées suffisent donc. C’est
ce que demande la bibliothèque Open-CV [47], qui contient une fonction de correction de
perspective que nous utilisons. Nous obtenons les coordonnées en pixels d’un rectangle de
dimensions et de positions connues dans le plan médian de la ligne d’eau grâce à un flotteur
de calibration (voir figure 1.16). Nous déplaçons en fait le flotteur muni de boules jaunes
facilement identifiables sur les images. Grâce à un télémètre laser, nous sommes en mesure
de connaı̂tre la distance du flotteur au bord du bassin. La hauteur du rectangle est donnée
par la distance entre les boules jaunes que nous mesurons.
Finalement, la combinaison de la correction de perspective et de la correction de distorsion
nous permet d’avoir une image prête à être analysée. La figure 1.17 présente les différences
entre une images avant correction et une image après correction. Nous observons une perte
de certains pixels en périphérie. Ce n’est pas un problème puisque les champs des caméras
se recoupent suffisamment pour ne pas avoir besoin d’utiliser les bordures d’image.
Chaque caméra étant individuellement calibrée, il faut désormais construire une unique
image à partir des différentes vues. Pour cela le flotteur sert à nouveau. En effet, grâce au
télémètre laser, nous connaissons la position absolue de nos rectangles de calibration. Nous
pouvons donc placer nos différentes vues corrigées les unes par rapport aux autres dans
notre image finale. Nous choisissons une échelle de 300 pixels pour un mètre. Sur la figure
1.18, nous pouvons voir le recollement des 4 premières caméras. Ces caméras suffisent pour
les analyses que nous souhaitons faire, qui s’étalent sur un maximum de 20 mètres.
Ce recollement statique ne suffit pas pour garantir une analyse correcte. En effet, si les
caméras sont mal synchronisées, le nageur peut artificiellement accélérer, ou ralentir au
changement de caméra. Les caméras que nous utilisons ne pouvant pas être démarrées si-
multanément, nous utilisons un signal lumineux visible de toutes les caméras au début de
chaque essai pour donner une référence de temps.
Le recollement n’est toutefois pas toujours parfait. En effet, si le nageur ne nage pas au
29
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Chp 1
(a) (b)
Figure 1.17 – Comparaison entre l’image avant (a) et l’image après (b) les corrections de
distorsion et de perspective. La correction permet d’obtenir des lignes droites au fond du
bassin. Nous perdons toutefois quelques pixels sur les bords de l’image
Figure 1.18 – Recollement des quatre caméras aériennes et des quatre caméras aquatiques
les plus proches du bord du bassin. Les aberrations de perspective et des distorsion ont été
corrigées. Chaque caméra couvre 5 mètres.
centre de la ligne d’eau, ce qui est le cas pour certains nageurs de dos majoritairement, alors
le recollement n’est plus bon. Il faut dans ce cas corriger la perspective différemment, en
réalisant une calibration en 3D de la ligne d’eau d’étude.
Nous considérons désormais que nous avons une image du bassin parfaitement calibrée, avec
la même conversion pixel-mètre en tout point (300 pixels / mètre). Nous pouvons donc
commencer l’analyse du mouvement.
1.4.3 Tracking
Pour analyser la nage, nous avons besoin des mouvements des bras et des jambes. En effet,
la position des bras permet de remonter à la fréquence de bras et lors des coulées, l’analyse
des mouvements des jambes permet de compter les ondulations et déterminer leur fréquence.
Inspirés de la bibliothèque OpenPose [35] et du jeu de données (dataset) COCO fourni, nous
définissons 14 marqueurs (keypoints), qui permettent de superposer un squelette (voir figure
1.19) sur le nageur. On remarquera que les mouvements du poignet et de la cheville ne sont
pas détectés.
30
1.4. Tracking et intelligence artificielle
Chp 1
images par secondes. Pour un passage de 6 secondes, cela représente 4200 clics.
Les deux solutions possibles sont donc de réentrainer OpenPose avec nos propres données
ou de créer notre propre réseau de neurones, permettant le tracking automatique. Estimant
qu’un algorithme spécifique est meilleur qu’un algorithme général, nous optons pour la
seconde solution. Nous entraı̂nons le réseau grâce à 10 départs de nageurs différents, ainsi
que des passages dans les 4 nages.
Lorsque nous écrirons les équations du mouvement du nageur, ces équations concernent la
vitesse et l’accélération du centre de masse du nageur. Nous devons donc trouver la position
de ce centre de masse pour évaluer la dynamique du mouvement. Si le nageur était un corps
indéformable en simple translation, il suffirait de suivre un point remarquable du nageur
pour avoir la vitesse du centre de masse. Ce n’est malheureusement pas le cas, et il a été
montré que même en prenant comme référence la hanche qui est proche du centre de masse
(en position debout les bras le long du corps), les erreurs réalisées sur l’évolution intra-cycle
sont significatives ([51] et [52]).
Il est également possible pour chaque position prise par le nageur, de rechercher la position
du centre de masse correspondante. Hochstein ([53]) a par exemple étudié les variations
de positions du centre de masse au cours d’un cycle d’ondulation, en cherchant le point
d’équilibre d’un triangle sur lequel est allongé le nageur (voir figure 1.20). Cette méthode
est assez lourde à implémenter pour chaque position différente et difficilement adaptable
pour la position d’attente sur le plot.
Nous choisissons plutôt d’utiliser les quatorze marqueurs que nous donne le réseau de neu-
rone pour estimer la position du centre de masse à partir de tables de pondérations. En
effet, pour un sexe donné, la répartition de masse entre les différents segments est relative-
ment constante au sein de l’espèce humaine et fait l’objet de plusieurs modèles qui diffèrent
31
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Chp 1
Figure 1.20 – Images extraites de l’étude de Hochstein [53]. Il propose une expérience où
le nageur se place dans différentes positions, et les coordonnées du centre de masse sont
déduites des forces exercées sur chaque extrémité du triangle.
Figure 1.21 – Tableau issu des travaux de De Leva [49]. Ces tables comportent les masses
relatives de chaque segment ainsi que la position du centre de masse de chaque segment.
légèrement dans la répartition. Nous retenons la table de Zatsiorsky, adaptée par De Leva
[49], qui est la plus utilisée dans le domaine de la natation ([54], [55] et [56]). Comme montré
sur la figure 1.21, ces tables nous donnent la masse relative de chaque segment, ainsi que la
position du centre de masse sur le segment, en pourcentage de la longueur du segment. À
partir de la position des marqueurs, nous trouvons le centre de masse de chaque segment et
nous lui affectons sa pondération dans le calcul de la position du centre de masse global. Ce
centre de masse est calculé en prenant le barycentre de tous les segments listés.
Il faut noter que pour la tête, le marqueur pointé est considéré comme le centre de masse
associé. Pour les pieds et les mains, toute la masse est localisée au marqueur le plus éloigné
(cheville ou poignet). Cette approximation peut être justifiée par le faible poids relatif du
pied et de la main. En effet, une erreur de 1 cm de la position du centre de masse du tronc est
équivalent à une erreur de 33 cm (d’après la figure 1.21) sur la position du centre de masse
du pied. Notre pointage n’étant pas précis au centimètre, il n’est pas nécessaire d’affiner la
position du centre de masse du pied et de la main, pour lequel l’erreur ne dépasse pas les
10 centimètres.
Nous comparons (figure 1.22) les positions du centre de masse obtenues manuellement avec
32
1.4. Tracking et intelligence artificielle
Réseau de neurone
Pointage manuel
Chp 1
Figure 1.22 – Trajectoire du centre de masse sur un départ plongé. Nous comparons la
position du centre de masse calculée à partir des 14 marqueurs pointés manuellement avec
la position du centre de masse calculée à partir des marqueurs obtenus avec le réseau de
neurone. Il s’agit d’images qui ne font pas partie du jeu de données d’entraı̂nement du réseau
de neurone.
celles obtenues grâce au tracking automatique, sur un passage qui ne correspond pas au
jeu de données d’entraı̂nement du réseau de neurones. Nous observons que le réseau de
neurones donne les mêmes résultats que notre pointage manuel, signe que nous pouvons
l’utiliser pour la suite. Chaque pointage automatique sera toutefois vérifié avant de faire
l’objet d’une analyse.
33
Chapitre 1. Mesure et capture du mouvement en natation
Résumé du Chapitre 1
2. Les centrales inertielles (ou IMU) permettent d’obtenir les accélérations et les
vitesses angulaires de chaque segment des membres supérieurs (bras et avant-bras).
Il est nécessaire que le nageur effectue des mouvements de calibration pour évaluer
la position de la centrale inertielle par rapport au segment. Ensuite le mouvement
est intégré grâce à un algorithme basé sur les quaternions.
34
2
Force de propulsion et forces de
résistance en natation
Chp 2
Ulysse séduit par les sirènes, Roman de Troie, Benoit de Sainte-Maure,1340-1350, BNF.
Sommaire
2.1 Équation du mouvement et motivations théoriques . . . . . . . . . 36
2.2 Étude des résistances : le test de traction . . . . . . . . . . . . . . 39
2.3 Évaluation de la propulsion : la nage attachée . . . . . . . . . . . 49
2.4 Traı̂née active et force de propulsion : le départ arrêté . . . . . . . 53
35
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
(a) (b)
(c) (d)
Chp 2
Figure 2.1 – Illustration des quatre sports de course en ligne aquatique olympiques à
propulsion humaine. (a) Canoë [57] (b) Kayak [58] (c) Aviron [59] (d) Natation [60].
La natation n’est pas le seul sport de course en ligne aquatique olympique. En mettant
de côté la planche à voile, qui n’utilise pas la force humaine comme source de propulsion,
l’aviron, le kayak et le canoë sont les autres sports présents aux Jeux Olympiques (figure
2.1). Il existe 2 différences notables entre la natation et ces 3 sports. Les nageurs n’ont pas
de bateau, ce qui augmente largement leurs résistances. De plus, contrairement aux autres
sports de course aquatique, la seule rame que les nageurs possèdent est constituée de leurs
bras. Ils ont donc un bras de levier plus faible, et surtout une surface propulsive beaucoup
moins importante, et poreuse. L’autre avantage d’utilisation d’un bateau concerne les me-
sures et la capture du mouvement. L’électronique est mieux protégée dans un canoë que sur
un nageur. L’encombrement est aussi moindre puisqu’il est possible de stocker du matériel
dans le bateau, sans que cela ne gêne l’athlète. Enfin, la mesure de la force de propulsion est
plus facile. On peut placer des jauges de contraintes sur la pagaie ou la rame, ce qui n’est
pas le cas pour le bras. Nous avons eu l’occasion pendant ces trois ans, d’accueillir pendant
4 mois un stagiaire pratiquant le kayak à un niveau international. Nous avons donc réalisé
en plus de nos expériences sur les nageurs, des expériences de kayak. Dans ce chapitre et le
suivant, nous effectuerons régulièrement des comparaisons entre le kayak et la natation. Les
détails techniques des expériences réalisées figurent quant à elles en annexe C.
Nous nous plaçons dans le référentiel du nageur et nous observons l’écoulement autour de
lui. Le nombre de Reynolds quantifie le rapport entre les forces d’inertie et la viscosité du
fluide [61]. Il s’écrit Re = L V /ν, où L est la taille du nageur, V la vitesse du fluide et ν
la viscosité cinématique du fluide. Pour un nageur de taille L = 2 m, nageant à la vitesse
V = 2 m/s dans une eau à 25◦ C, le nombre de Reynolds associé vaut :
Re = 4.5 × 106 .
36
2.1. Équation du mouvement et motivations théoriques
Lorsqu’il nage à la surface, le nageur évolue quasiment en ligne droite. L’équation 2.1 peut
donc être projetée selon l’axe d’avancée du nageur. En revanche, lors des phases immergées
qui suivent le départ et le virage, la profondeur du nageur change et le mouvement n’est
plus rectiligne. Dans ce chapitre, nous supposons que le mouvement s’effectue à profondeur
z constante. Toutefois nous chercherons à faire varier z et observer la dépendance de z sur
les résistances.
Nous projetons donc l’équation 2.1 selon l’axe d’avancée du nageur (axe y) :
dV
(M + MA ) = FP (t) − FD (t). (2.2)
dt
MA correspond au coefficient de masse ajoutée dans la direction de nage (axe pied - mains).
FP (t) et FD (t) correspondent aux projections de la somme des propulsions et des résistances
selon l’axe d’avancée du nageur. Dans ce chapitre, nous cherchons à évaluer chacun des
termes de l’équation 2.2.
D’après Caspersen [63], la masse ajoutée d’un nageur est environ 25 % de sa masse. On
prendra donc Kma = 0.25 dans la suite de nos travaux, sachant que le dispositif pour la
mesurer est assez lourd à mettre en place. Comme montré sur la figure 2.2, il faut en effet
faire osciller le nageur accroché à une barre, tout en mesurant la force dans la barre et la
vitesse de la barre.
Nous pouvons toutefois estimer la masse ajoutée en utilisant les données anthropométriques
des nageurs. Pour un nageur dont la hauteur bras tendus (distance cheville-poignet, voir
figure 2.2) vaut b = 2.33 m, de masse M = 92 kg et la largeur d’épaule est a = 0.39 m,
on a un rapport d’aspect b/a = 6. D’après Patterson [64], le coefficient de masse ajoutée
d’une ellipsoı̈de de rapport d’aspect b/a = 6 vaut Kma = 0.045 alors que le coefficient de
masse ajoutée d’un parallélépipède de même rapport d’aspect vaut Kma = 0.29. Les valeurs
expérimentales se situent donc entre l’approximation de l’ellipsoı̈de, beaucoup plus profilée
que le nageur et le parallélépipède, légèrement moins profilé.
En gardant l’approximation de parallélépipède, nous pouvons estimer la masse ajoutée quand
les bars se situent le long du corps. Dans cette situation, le nageur voit son rapport d’aspect
passer de 6 à 5. En utilisant toujours les tables de [64], nous obtenons Kam = 0.37 =
1.27 × 0.29. Nous nous attendons donc à une augmentation du coefficient de masse ajoutée
de l’ordre de 25 % si l’on effectuait l’expérience de Caspersen avec les bras le long du corps.
37
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
a
b
Chp 2
Figure 2.2 – Image tirée de l’étude de Caspersen [63]. Le nageur s’accroche a la barre qui
oscille verticalement. Un capteur de force est placé sur la barre afin de mesurer la force
nécessaire pour mettre le nageur en mouvement. La masse ajoutée mesurée est de l’ordre
de 25 % de la masse totale du nageur, avec une masse ajoutée relative plus faible pour les
nageuses (23.6 ±1.6 %) que pour les nageurs (26.8 ±2.3 %) .
FD (t) correspond à l’ensemble des résistances subies par le nageur. FP (t) est la force pro-
pulsive du nageur, elle comprend aussi bien la propulsion des jambes que la propulsion des
membres supérieurs, toutes deux projetées dans la direction d’avancée. Si l’on se restreint
au cas du crawl, les jambes contribuent à 30 % de la force totale [65]. Deschodt [66], quant à
lui, remarque une diminution de la vitesse de 10 % sur des sprints effectués sans propulsion
des jambes.
Finalement :
δV 1 δFP
∼ .
V 2 FP
Une augmentation de vitesse de 10 % nécessite donc une augmentation de force de 20 %.
Dans notre étude, nous nous concentrerons sur le crawl, et nous ferons l’hypothèse que les
jambes assurent 25 % de la force de propulsion, juste milieu entre les données de Morouço
(30 %) et de Deschodt (20 %).
Notre objectif est de modéliser chaque terme de l’équation 2.1, en annulant le terme d’accélération.
Nous allons d’abord tracter le nageur à vitesse constante et mesurer la force de traction
nécessaire pour égaliser la force de traı̂née FD en fonction de la vitesse et de la profondeur.
Ensuite nous mesurons la force nécessaire pour retenir le nageur lors de tests de propulsion
en nage attachée, et donc sans traı̂née. Enfin, nous réaliserons des tests de départ arrêté en
nage complète pour discuter de cette approche décomposée.
38
2.2. Étude des résistances : le test de traction
Dans cette section nous répondons à la question suivante : Quelle est la contribution des
forces de résistance FD en fonction de la profondeur z et de la vitesse du nageur V ? Chp 2
Nous réalisons les tests sur 3 nageurs différents. Leurs caractéristiques sont rappelées dans
le tableau 2.1. Nous effectuons les essais sur deux nageurs A1 et A2. A1 est un nageur, de
masse M = 71 kg. Sa taille bras tendus vaut L = 2.55 m. A2 est une nageuse, de masse
M = 51 kg, et de taille L = 2.3 m lorsqu’elle a les bras tendus.
Nous nous tournons donc vers un système inspiré de Karpovich [24], qui en 1933, était ca-
pable d’évaluer la résistance passive des nageurs (figure 2.3).
Figure 2.3 – Image tirée de l’étude de Karpovitch [24] : le nageur est tracté grâce à une
corde C qui s’enroule autour d’un moteur D. La tension dans la corde est mesurée grâce au
ressort S et la poulie P2. L’allongement du ressort au cours du temps est enregistré grâce
au kymographe P. Les rotations de D sont également enregistrées (incrustation en haut à
droite).
Les ordinateurs ayant remplacé les kymographes, nous utiliserons un capteur de force relié
39
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Chp 2
(d)
Figure 2.4 – Dispositif utilisé pour évaluer la résistance des nageurs lors d’essais réalisés
à la surface. On utilise un système de renvoi de poulies ainsi qu’un capteur de force pour
évaluer la tension dans le fil. (a) Système vu du bord du bassin, le moteur est en bas de
l’image (b) Système vu depuis le bassin. (c) Zoom sur le système d’enroulement du moteur.
Un guide en laiton placé sur une vis sans fin assure l’enroulement sur le cylindre en une
unique épaisseur. (d) Nageur tracté en position flèche.
Descendre sous 1 m/s est compliqué pour des questions de stabilité. Aller au-delà de 3 m/s
pose des problèmes de sécurité liés au moteur. Pour cette raison nous nous restreignons à
40
2.2. Étude des résistances : le test de traction
dF
F
Chp 2
Figure 2.5 – Signal de force enregistré pour différentes vitesses. Après un pic dû à
l’accélération du nageur, le signal présente un plateau. La force associée à la vitesse de
traction est définie comme la moyenne de ce plateau, et l’incertitude correspond à l’écart-
type.
des vitesses allant de 1 m/s à 3 m/s. Cela couvre largement les vitesses de nage observées
en compétition. Après un pic dû à l’accélération du nageur, on observe un plateau de force,
correspondant à la durée pendant laquelle le nageur est tracté à vitesse constante, puis une
chute brutale de la force au moment où le moteur s’arrête. La force de traction associé à
une vitesse donnée est définie comme la moyenne de ce plateau de force. Nous définissons
notre incertitude comme l’écart-type de la série de données constituant le plateau de force.
Sur la figure 2.5, quand la vitesse passe de 1 m/s à 2 m/s, la force passe de 25 N à 100 N.
Cela suggère une loi quadratique entre la force de résistance et la vitesse de nage, comme
évoqué sur la loi d’échelle 2.3. Nous traçons donc les forces de résistance en fonction de la
vitesse de traction, et comparons cela avec une courbe F ∝ V 2 .
Sur la figure 2.7-a est représentée l’évolution de kb en fonction de la vitesse pour les nageurs
A1 et A2. Sur la figure 2.7-b, les mêmes données adimensionnalisées sont tracées. L corres-
pond à la taille de l’athlète bras√tendus, alors que M correspond à sa masse. Nous choisissons
le nombre de Froude Fr = V / gL pour adimensionnaliser la vitesse, en observant que les
vagues sont de plus en plus hautes au fur et à mesure que la vitesse augmente.
Pour Fr < 0.41, le coefficient kb est constant.
Pour Fr > 0.41, nous observons une évolution de kb en forme de cloche non symétrique, avec
un maximum autour de Fr = 0.5.
Pour un nageur de taille adulte, on a L ≈ 2.5 m. La vitesse correspondant à Fr = 0.41
correspond à une vitesse V = 2 m/s. Sur des courses de 50 mètres, les meilleurs mondiaux
nagent à 2.1 m/s. Pour une nageuse avec L = 2.3 m, cette vitesse chute à 1.9 m/s. On a un
41
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Figure 2.6 – Force de traction nécessaire pour tracter les athlètes A1 et A2 à la surface en
fonction de la vitesse de traction. Les traits pointillés correspondent au modèle F = kb V 2 .
(a) Athlète A1 (b) Athlète A2.
(a) (b)
Toutefois dans les phases non nagées, qui suivent la poussée sur le plot de départ ou la
poussée au mur, les vitesses de nage se trouvent dans la zone de Froude [0.41, 0.8]. Il est
donc nécessaire d’avoir un modèle capable de prendre en compte les variations du coefficient
de kb en fonction de la vitesse.
42
2.2. Étude des résistances : le test de traction
F = kb (z, V )V 2 . (2.4)
La figure 2.7 représente l’évolution kb (0, V ). Nous observons un plateau pour Fr < 0.41.
Notre objectif est d’évaluer la hauteur de ce plateau en fonction de la profondeur du nageur.
Pendant les phases de coulée, qui suivent le départ ou la poussée au mur suite à un virage, la
profondeur du nageur varie sensiblement (les nageurs peuvent atteindre une profondeur de
1.5 m). Il est donc utile de connaı̂tre les variations de traı̂née en fonction de la profondeur.
Lyttle a évalué l’influence de la profondeur sur la résistance du nageur [67]. Nous avons
essayé de reproduire de telles expériences avec un système de poulies placées à différentes
profondeurs, afin de tracter le nageur horizontalement à profondeur constante. Maintenir
le nageur à profondeur constante n’est pas évident, et nous observons en pratique une Chp 2
différence entre la profondeur de la poulie et la profondeur du nageur. Nous filmons les
essais et mesurons donc la profondeur grâce aux images de l’essai.
1
1 2
3
0.27 m
2
4
0.41 m
3
1m
4
(a) (b)
.
Figure 2.8 – Évolution du coefficient de traı̂née kb (calculé sur des valeurs de nombre de
Froude Fr < 0.41) en fonction de la profondeur. Les points rouges sont extraits de [67].
Les points noirs correspondent aux expériences sur A1 montrées en (a). La courbe noire
correspond au modèle présenté équation 2.9.
2.2.4 Modèle
43
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
contributions pour un nageur [70]. Nous nous intéressons donc en priorité à la traı̂née de
forme.
Nous supposons d’abord que le nageur est immergé loin de la surface. Dans cette gamme
de Reynolds, une analyse dimensionnelle [61] permet d’exprimer la résistance de forme FF
subie par le nageur :
1
Chp 2 FF = ρ S CD (Re) V 2 , (2.5)
2
où S est la surface frontale du nageur, ρ la masse volumique de l’eau, et CD est un coefficient
adimensionné qui dépend de la géométrie du nageur, ainsi que du nombre de Reynolds a
priori. La surface frontale correspond à la surface minimale qui englobe la totalité du corps
du nageur. Sur la figure 2.9-a, nous donnons les coefficients CD pour différentes géométries.
Sur la figure 2.9, nous estimons la surface frontale de l’athlète A1. Sachant que les vitesses
que nous observons vont de 1 à 3 m/s, la gamme de Reynolds est 2.2 × 106 − 6.6 × 106 .
Nous nous situons donc après la crise de traı̂née, dans une zone où le coefficient CD varie
peu ([71]).
(a) (b)
Figure 2.9 – Estimation de la traı̂née de forme (a) Coefficient CD pour différentes
géométries [72]. (b) Estimation de la surface frontale S chez l’athlète A1.
44
2.2. Étude des résistances : le test de traction
(a)
Hg Eg
P1g Cg
Gg P2g Mg
𝑤(𝑦)
Cd
(b)
P1d Gd P2d Md Chp 2
Hd Ed
Figure 2.10 – (a) Illustration des différents points de mesure de la largeur du nageur. (b)
RL
Nageur simplifié vue de dessus. La surface mouillée est estimée avec Swet = 0 w(y)πdy.
Figure 2.11 – Image tirée de [69]. Évolution du coefficient de traı̂née de peau Cs d’une
plaque plane en fonction du nombre de Reynolds, suivant le régime de l’écoulement (lami-
naire ou turbulent). Dans la gamme de Reynolds impliquée en natation (rectangle rouge),
l’écoulement est turbulent et Cs ∝ Re−1/7 .
où Swet est la surface mouillée, Cs un coefficient adimensionné qui dépend de la vitesse a
priori et ρ reste la masse volumique de l’eau. Pour le corps humain complètement immergé,
la surface mouillée correspond à la surface du corps. Nous estimons cette surface comme
montré sur la figure 2.10. Nous mesurons la largeurR L du corps en 7 points et nous estimons
que le corps a une section circulaire. Ainsi Swet = 0 w(y)πdy. Pour le nageur A1, on obtient
Swet = 0.91 m2 . On montre sur la figure 2.11 l’évolution du coefficient Cs pour des plaques
planes en fonction du coefficient de Reynolds, pour les régimes laminaires et turbulents. Nous
sommes au-delà de Re = 106 , donc le régime est turbulent. Dans ce cas, on a Cs ∝ Re−1/7
[69], comme illustré sur la figure 2.11. Avec Cs = 3 × 10−3 , on obtient kS = 1.37 kg/m.
45
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Nous obtenons une estimation de kF + ks = 18.6 kg/m pour l’athlète A1. Sur la figure 2.8,
nous observons que quand z → −∞, kb → 20.8 kg/m. Dans cette limite, il n’y a pas de
traı̂née de vague donc kb = kF + ks . Nous obtenons le bon ordre de grandeur. L’estimation
de CD pour la traı̂née de forme n’est pas assez précise pour espérer une meilleure prédiction.
Pour la nage en surface, une nouvelle source de dissipation apparait. En plus des traı̂nées de
peau et de forme, les vagues créées par le nageur transportent de l’énergie à l’infini [74]. La
profondeur à laquelle les nageurs effectuent leurs ondulations (autour de 1 mètre) ainsi que la
Chp 2
visualisation d’ondes à la surface laissent penser que la traı̂née d’onde n’est pas négligeable.
La traı̂née de vague a été√très étudiée dans l’architecture navale [75, 76, 77, 78, 79]. Le
nombre de Froude Fr = V / gL permet de comparer l’énergie cinétique à l’énergie potentielle
de pesanteur. L représente la longueur du bateau (ou du nageur), alors que g représente
l’accélération de la pesanteur. De la même manière que pour les deux formes de traı̂nées
précédentes, nous utilisons une analyse dimensionnelle pour exprimer la traı̂née de vague
Fw de la manière suivante [68] :
1
Fw = ρ Ω2/3 Cw (Fr) V 2 . (2.6)
2
Le nageur est un bateau à coque déformable, nous nous attendons donc à des différences
avec les valeurs de Cw trouvées dans l’architecture navale. Nous allons utiliser les données
expérimentales pour estimer Cw (Fr). À notre connaissance, peu d’études ont été effectuées
pour mesurer l’influence des vagues sur la traı̂née d’un nageur.
1
FD = ρ(SCD + Swet Cs + Ω2/3 Cw )V 2 . (2.7)
2
FD = kb V 2 . (2.8)
46
2.2. Étude des résistances : le test de traction
−z/D k∞ = 12 ρ(S CD + Swet Cs )
kb (z, Fr) = k∞ + kw (Fr) e avec . (2.9)
kw (Fr) = 12 ρ Swet Cw (Fr)
Avec nos données expérimentales (figure 2.8), on trouve k∞ = 20.8 kg/m et kw (Fr < 0.41) =
5.1 kg/m. On a donc une augmentation de 25 % de traı̂née entre une coulée loin de la sur-
face et une coulée à la surface pour des nombres de Froude Fr < 0.41. Pour la suite, nous
prendrons kw /k∞ = 0.25. Nous pouvons reprendre l’équation 2.6 pour estimer Cw . Pour
l’athlète A1, on estime Cw (Fr < 0.41) = 5 × 10−3 .
À partir de la figure 2.7, nous pouvons tracer l’évolution kw (Fr), grâce à notre hypothèse
kw /k∞ = 0.25. En effet, pour des essais à la surface, nous avons :
C’est ce que nous faisons sur la figure 2.12. En pointillés, nous montrons le modèle que nous
retenons pour l’évolution kw (y = 0, Fr).
Pour Fr < 0.41, kw est constant. Pour Fr > 0.41, nous effectuons un ajustement polynomial
de degré 3, dont les coefficients sont explicités sur la figure 2.7. La zone Fr > 0.8, n’est pas
pertinente en natation, nous ne nous y intéressons donc pas.
0.8
19.7 F r3 − 40.9 F r2 + 27.1 F r − 5.4
A1
0.6 A2
Lkw /M
0.4
0.2
0.0
0.0 0.2 0.4 √ 0.6 0.8
F r = V / gL
Nous définissons la fonction kw,0 (Fr, k∞ ) pour des valeurs de Froude dans [0, 0.8] :
kw,0 (Fr, k∞ ) = 0.25 k∞ si Fr < 0.41
(2.10)
kw,0 (Fr, k∞ ) = 19.7 Fr3 − 40.9 Fr2 + 27.1 Fr − 5.4 sinon.
Le coefficient de traı̂née d’onde Cw varie donc de 0.006 (Fr < 0.41) à 0.016 (Fr = 0.55) pour
l’athlète A1 (d’après l’équation 2.6). Les ordres de grandeur pour Fr > 0.41 sont cohérents
avec les valeurs des bateaux ([68]). En revanche, pour un bateau, on a Cw (Fr < 0.4) ≪
Cw (Fr = 0.5), ce qui n’est pas le cas ici.
47
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Cette formule sera réutilisée lors de l’étude de la coulée. À la surface, nous supposons que
le coefficient kb ne dépend pas de la vitesse et donc du nombre de Froude.
La position privilégiée dans les tests de traction est la position en flèche, c’est-à-dire les 2
bras tendus devant (figure 2.13-a). Cela permet de tenir une poignée confortablement avec
les deux mains, et cela limite les résistances. Cette position n’est en fait utilisée en natation
que pendant les phases de coulée. Pendant les phases nagées, le nageur a soit un bras
Chp 2 devant (figure 2.13-b), ou soit aucun bras devant (figure 2.13-c). Nous allons donc évaluer
le coefficient de résistance dans ces trois positions. Le ou les bras qui ne sont pas devant
seront laissés le long du corps. Cela ne correspond pas exactement aux positions observées
pendant la nage. Cependant, quand le bras n’est pas devant, il ne freine pas le nageur : soit
ce bras est dans l’air, ou soit il est dans l’eau, en allant dans la direction opposée à celle
du corps du nageur. Il est difficile d’effectuer les tests avec un bras hors de l’eau pour des
questions de stabilité. Les positions étudiées montrent l’influence de la position et encadrent
les positions réelles.
(d)
(a)
(b)
(c)
Figure 2.13 – Relation force de traction - vitesse pour le nageur A3 dans trois positions
différentes. (a) En rouge : la position flèche. (b) En bleu : la position un bras devant. (c) En
vert : la position bras le long du corps.
On représente l’évolution de la force en fonction de la vitesse pour les trois positions (figure
2.13-d). On observe une augmentation de la traı̂née de 40 % entre la position flèche et la
position un bras devant. La position bras le long du corps génère 56 % de traı̂née en plus que
la position flèche. On comprend ainsi que la position utilisée pendant les phases de coulée
est plus hydrodynamique que celles correspondant aux phases de nage. De plus, la position
avec un bras devant permet de réduire ses résistances par rapport à la position avec les deux
bras le long du corps. Cela justifie les phases de glisse des nageurs de crawl. Pendant ces
phases-là, le nageur choisit de ne pas engager son bras pour se propulser afin de réduire ses
résistances. Carmigniani et al. [17] ont modélisé ces alternances de phases propulsives et de
phases de glisse, et ont montré que ce type de stratégie permet, pour un nageur donné, de
minimiser l’énergie consommée pour une vitesse fixée.
48
2.3. Évaluation de la propulsion : la nage attachée
Dans la partie précédente, nous avons évalué la contribution FD dans l’équation du mou-
vement du nageur 2.1. Nous étudions maintenant la contribution FP . Mesurer la force de
propulsion d’un nageur n’est cependant pas évident. Si on compare par exemple avec la
mesure de la puissance en cyclisme, les obstacles sont nombreux : le fait d’être en milieu
aquatique pose de sérieux problèmes de fiabilité liés à l’électronique. Il faut donc un disposi-
tif parfaitement étanche. De plus, les ondes traversent difficilement l’interface eau-air. Il est
donc difficile d’utiliser des systèmes sans fil, pourtant beaucoup moins encombrants. Enfin,
le nageur se propulse avec son propre corps, sans outil ”passif” annexe tel qu’une rame ou
un pédalier sur lequel on pourrait placer des jauges de contraintes pour mesurer la force
développée.
Chp 2
Nous retenons deux solutions qui possèdent chacune leurs qualités et leurs défauts. D’abord,
il est possible de revêtir des gants tels que ceux développés par Takagi [80] (figure 2.14). À
partir de la différence de pression entre la paume de la main Pa (figure 2.14-a) et le dos de la
main Pb (figure 2.14-b), il est possible de déduire la force de propulsion Fp = (Pa −Pb )Σmain ,
où Σmain est la surface de la main. Ce calcul n’est pas immédiat puisque les valeurs de pres-
sion sont obtenues en quelques points uniquement. Il faut donc interpoler ces valeurs afin
d’avoir une carte de pression sur la main. Ensuite, la partie couverte par le gant n’est pas
la seule partie propulsive du bras. En effet les dernières phalanges ne sont pas couvertes et
l’avant-bras non plus. Il faut donc déterminer la part de propulsion de la mitaine, et sup-
poser que cette proportion ne varie pas en fonction de la fatigue du nageur. Toutefois cette
technique a l’avantage de pouvoir être utilisée dans des conditions proches des conditions
écologiques, sous condition de pouvoir enregistrer les données de pression.
𝑷𝒂 𝑷𝒃
(a) (b)
Figure 2.14 – Dispositif de mesure de force de propulsion imaginé par Takagi [80]. La
pression est mesurée en quatre points sur la paume de la main (a) et le dos de la main (b).
La force de propulsion est déduite de la différence de pression entre le dos et la paume de
la main.
La seconde solution consiste à mesurer la force de propulsion lors de tests en nage attachée
(figure 2.15). Le nageur est relié au bord du bassin par un fil inextensible lui-même relié
à un capteur de force. L’athlète nage sur place et l’on enregistre la tension dans le fil au
cours du temps. Dans notre cas, θ ≪ 1, et on suppose donc que cos θ = 1. Il y a donc
équilibre entre poussée d’Archimède et poids du nageur, ce qui correspond à l’équilibre dans
les conditions de nage. Cependant, les conditions sont différentes de la nage réelle. Le nageur
49
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
fait du sur-place et nage dans ses remous. De plus, le fait d’être attaché au niveau de la
surface modifie l’angle du corps dans l’eau car il est plus facile de sortir le torse de l’eau.
Cependant, ce dispositif permet d’obtenir une mesure immédiate de la force de propulsion
dans l’eau. Plutôt que d’utiliser des évaluations de force maximale en salle de musculation
sur des mouvements de traction ou de développé couché très éloignés d’un cycle de bras
dans l’eau, le test de nage attachée peut être pertinent. Comme le nageur reste sur place,
cela facilite également le dispositif expérimental, que l’on place au bord du bassin.
Chp 2 𝐹𝑃
𝑒Ԧ
cos 𝜃 𝑟
𝜃 Π𝐴
𝐹𝑃
𝑚𝑔Ԧ
Figure 2.15 – Schéma extrait de l’article de [81]. Le nageur est attaché à un fil fixé au plot
de départ. On enregistre la tension dans le fil grâce à un capteur de force placé au niveau
du plot (1), par l’intermédiaire d’une carte d’acquisition (2). L’évolution du signal de force
est enregistrée sur l’ordinateur (3).
50
2.3. Évaluation de la propulsion : la nage attachée
Chp 2
𝑡0
Figure 2.16 – Exemple de signal de force en nage attachée pour le nageur A3. Chaque pic
correspond à la propulsion d’un bras. Les traits pointillés rouges matérialisent les 3 cycles
sur lesquels sont calculés la période moyenne T ainsi que la force moyenne Fm . Ici T = 1.27
s et Fm = 159 N.
notre connaissance.
Pour varier la force du nageur, nous utilisons des plaquettes (ou palettes), utilisées par les
nageurs à l’entraı̂nement. Nous avons trois tailles différentes (figure 2.18) auxquelles il faut
ajouter la nage mains nues.
Pour chaque taille de plaquettes, nous mesurons une force et une fréquence. Pour conserver
l’homogénéité de la courbe de Hill (on veut que le produit des abscisses et des ordonnées soit
homogène à une puissance), il faut soit une courbe force-vitesse, ou soit une courbe couple-
fréquence. On préférera la courbe force-vitesse qui est plus explicite pour les entraı̂neurs,
puisque la force en kilogrammes peut être comparée aux poids utilisés en musculation. Nous
définissons une vitesse à partir de la fréquence vm/c = 2πLB /T , où LB est la longueur
du bras. Cette vitesse correspond à la vitesse de la main dans le référentiel du corps, avec
un modèle schématique de nage bras tendus à vitesse angulaire constante. Comme décrit
précédemment, nous calculons la force de propulsion Fm en moyennant la force sur 3 cycles,
et la période T est obtenue à partir de la période moyenne sur ces mêmes cycles.
Les résultats sont présentés sur la figure 2.18. On remarque que les points sont alignés. Il
existe donc une relation force-vitesse en natation. Toutefois, cette relation ne porte pas sur
la vitesse du centre de masse comme cela peut être le cas pour la course à pied (voir figure
2.17). Cette différence provient du mode de propulsion, puisque la main n’est pas ancrée
dans l’eau, la norme de la vitesse du centre de masse n’est donc pas égale à la norme de la
vitesse de la main dans le référentiel du corps, ce qui est le cas du pied en course à pied. Nous
obtenons toutefois une estimation de la force maximale et de la vitesse maximale du bras.
F0 = 246 N signifie que le nageur peut maintenir 24.6 kg bras tendu. L’ordre de grandeur
est cohérent. Nous trouvons une vitesse maximale de 9.1 m/s. Cela semble un peu faible par
rapport à la vitesse d’un penalty de handball (20 m/s [88]). La vitesse que nous définissons
est une vitesse moyenne sur la rotation alors que le tir de handball est lâché au moment de
la rotation qui maximise la vitesse, ce qui peut en partie expliquer cette différence.
Cependant, nous ne parvenons pas à avoir une gamme de vitesse et de force très importante.
51
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Chp 2
Figure 2.17 – Extrait de la thèse de Caroline Giroux [84]. Relations force vitesse dans 5
mouvements différents. (A) Presse horizontale (B) Mouvement de squat (C) Mouvement de
pédalage [85] (D) Saut vertical [86] (E) Course à pied [87].
Les essais visant à réduire la surface propulsive (nage poings fermés) n’étaient pas concluants.
Pour augmenter la vitesse de la main, on peut également imaginer faire de la nage ”semi-
attachée” en utilisant le moteur présenté dans la section sur les résistances.
Il est également difficile de réduire la vitesse de la main. La taille des palettes noires est
déjà élevée, il est difficile d’augmenter encore la surface propulsive sans prendre de risque de
blessure. On peut toutefois imaginer tracter le nageur à contre-sens pour augmenter encore
les résistances.
Ces travaux sur la relation force - fréquence sont embryonnaires. Ils vont donner suite à
une étude plus exhaustive, avec notamment l’utilisation de plaquettes instrumentées afin de
mesurer la force de propulsion de la main, ainsi que son orientation.
52
2.4. Traı̂née active et force de propulsion : le départ arrêté
Chp 2
Figure 2.18 – Relation force-vitesse en natation pour le nageur A1. Les quatre points
correspondent aux quatre tailles de plaquettes. Pour le nageur représenté, nous trouvons
F0 = 246 N et v0 = 9.1 m/s.
Après avoir étudié séparément les forces de résistance et de propulsion, nous proposons un
test simple afin de vérifier si les expressions trouvées sont pertinentes pour prédire l’évolution
de la vitesse dans des conditions de nage réelles. Pour le nageur A3, on réalise le test de
traction puis le test de nage attachée. Les valeurs de résistance sont données sur la figure
2.13. En nage attachée, ce nageur possède une force moyenne de 159 N et une fréquence
moyenne de 47.1 cycles par minute. Nous réalisons un test de départ arrêté, à intensité
maximale. La consigne donnée au nageur est d’effectuer 15 mètres le plus rapidement pos-
sible. Nous mesurons ensuite l’évolution de la vitesse, qui a l’avantage de couvrir toute la
gamme de vitesse atteignable. Grâce au réseau de neurones décrit dans le chapitre 1, nous
avons l’évolution de la vitesse du centre de masse au cours du temps. Sachant que l’on
raisonne sur des valeurs moyennes de propulsion, nous moyennons la vitesse brute instan-
tanée sur une fenêtre glissante, dont la taille correspond à la période mesurée sur le test
attaché. L’évolution de la vitesse moyenne au cours du temps est présentée sur la figure
2.19. Nous utilisons maintenant l’équation du mouvement 2.1, et discutons sa compatibilité
avec l’évolution de la vitesse mesurée. Pour l’évaluation de la résistance, comme évoqué sur
la figure 2.13, la position du nageur évolue au cours du temps. De plus, le fait qu’il soit
actif engendre une traı̂née plus forte, liée aux mouvements parasites. On suppose donc que
la résistance s’exprime comme FD = ka V 2 . Nous comparerons ce coefficient avec les valeurs
passives. L’équation du mouvement intégrée sur un cycle de période T s’écrit :
Z t+T /2 Z t+T /2
1 dV 1
(M + MA ) dt = (Fp − ka V 2 ) dt. (2.12)
T t−T /2 dt T t−T /2
53
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
(a) (b)
Chp 2 Figure 2.19 – (a) Position du nageur à t = 0. (b) Évolution de la vitesse du centre de masse
du nageur pour un départ arrêté. En rouge : la vitesse mesurée lors du test. La vitesse passe
de 0 à 2 m/s en 2 secondes. En noir : on fait varier le coefficient de traı̂née active ka afin
de trouver l’évolution de vitesse théorique la plus proche de la vitesse expérimentale. Sur la
courbe noire, V∞ = 1.93 m/s et τ = 1.35 s.
r
t F0 M + MA
V (t) = V∞ tanh où V∞ = et τ = √ . (2.14)
τ ka F0 ka
Sur la figure 2.19, on réalise un ajustement sur la valeur de ka sur la phase d’accélération
(en rouge). On trouve ka = 42 kg/m. Cette valeur est plus élevée que les valeurs passives
exhibées sur la figure 2.13. Toutefois, le nageur effectue des mouvements parasites (roulis,
lacet, tangage) qui accentuent les frottements. Le rapport kb /ka permet ainsi d’évaluer les
mouvements parasites du nageur. Ces mouvements ne peuvent pas être complètement sup-
primés, le roulis permet en effet d’allonger le trajet du bras sous l’eau ([89]). Malgré cette
différence de coefficient de résistance actif et passif, notre modèle permet de capter la dyna-
mique du départ arrêté. Cela nous conforte dans l’utilisation du test de nage attachée, qui
reflète bien la force de propulsion du nageur. Toutefois, la cassure observée après 4 secondes
de nage nous pousse à être vigilant sur le plateau de vitesse, et à se focaliser en priorité sur
la phase d’accélération (pour éviter les effets de la fatigue).
Ce test de nage attaché est en fait suffisant pour estimer F0 et ka . En cherchant les valeurs
de τ et V∞ qui correspondent le mieux aux valeurs expérimentales, F0 et ka s’obtiennent de
54
2.4. Traı̂née active et force de propulsion : le départ arrêté
la manière suivante :
M + Ma V∞
ka = et F0 = (M + Ma ) . (2.15)
τ V∞ τ
Il faut toutefois être vigilant sur la fenêtre glissante pour la moyenne de vitesse, en mesurant
par exemple la durée des cycles sur le départ arrêté.
Utiliser un test de traction passive en kayak est compliqué, sachant que les vitesses de course
sont plus élevées, il faudrait une longueur de fil plus grande pour atteindre un plateau. De
plus, nous avons besoin d’une zone stable au bord du plan d’eau pour bien fixer le moteur. Chp 2
Enfin, le moteur doit être branché sur le secteur, ce qui peut compliquer la tâche lors
d’expériences en plein air. Pour toutes ces raisons, nous choisissons une autre méthode. Dans
l’équation 2.1, nous avons annulé le terme d’accélération et mesuré la force de propulsion
nécessaire pour équilibrer les résistances.
En kayak, nous allons annuler le terme de propulsion, et mesurer la décélération. L’athlète
pagaie le plus rapidement possible puis arrête de se propulser. On mesure alors V (t) lors de
la phase de décélération. L’équation du mouvement vaut donc :
dV
(M + MA ) = −kb V 2 , (2.16)
dt
en notant M la masse du kayakiste et de son embarcation, et MA la masse ajoutée. Si on
suppose que SCD est constant, on peut intégrer l’équation précédente :
V0 t (M + MA )
=1+ où τ = . (2.17)
V (t) τ kb V0
(a) (b)
Figure 2.20 – Utilisation des tests de décélération pour évaluer la résistance des bateaux
des athlètes B1 et B2. (a) Évolution de la vitesse en fonction du temps. (b) Mise en évidence
de la recherche du coefficient τ . Les traits pointillés correspondent à τ = 5.56 s.
Comme pour le nageur, il faut estimer la masse ajoutée. Pour cela, on estime cette masse
ajoutée grâce au volume de l’ellipsoı̈de approchant la géométrie du bateau [64], comme
55
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Tableau 2.2 – Différences entre le kayak et la natation. Dans ce tableau figurent les
différences de propriétés hydrodynamiques entre le système {kayak+athlète} et un nageur.
montré dans l’annexe C. Nous trouvons un coefficient de masse ajoutée de 0.017, beaucoup
plus faible que celui des nageurs (0.25). Sur la figure 2.20, nous montrons comment le
Chp 2 coefficient τ est déterminé. Pour les deux athlètes, τ = 5.56 s et V0 = 4.7 m/s. Pour
l’athlète B1, sachant que M + MA = 77.3 kg (masse du bateau comprise), on obtient
kb = 2.96 kg/m. Pour B2, on a M + MA = 86.8 kg et donc kb = 3.32 kg/m. Dans le tableau
2.2, on compare les coefficients SCD de l’embarcation (corps ou bateau) ainsi que les masses
ajoutées. Nous définissons un SCD équivalent, prenant en compte les trois contributions de
traı̂née : SCD = 2 kb /ρ. On obtient SCD = 5.9 × 10− 3 m2 pour B1 et SCD = 6.6 × 10− 3 m2
pour B2. B2 a un bateau plus large donc cela est cohérent. Dans le tableau, nous reportons
la moyenne de ces deux valeurs.
Grâce à l’utilisation du bateau, le coefficient de traı̂née est réduit d’un facteur 10.
Il est également possible de réaliser également des départs arrêtés en kayak. Il s’agit d’ailleurs
d’un exercice mieux maı̂trisé par les kayakistes puisque c’est la manière dont est donné le
départ des courses. L’équation du mouvement est semblable à celle trouvée en natation.
Toutefois, il n’est pas nécessaire de passer par un test de nage attachée pour évaluer la force
de propulsion puisque nous la mesurons directement grâce à des jauges de contraintes sur
la pagaie. Nous montrons la propulsion d’un coup de pagaie sur la figure 2.21, et tous les
détails de l’expérience figurent en annexe C. On mesure la force normale à chacune des deux
pâles FN,d (t) et FN,g (t) pour les mains droite et gauche. Pour obtenir F P (t), il faut ensuite
projeter et moyenner cette force. Ainsi
Z t+T /2
F P (t) = [FN,d (t) sin θ − FN,g (t) sin θ] dt,
t−T /2
où θ est l’angle entre la pagaie droite et la verticale (défini figure 2.21). FN,d (t) et FN,g (t)
valent 0 quand la pagaie est hors de l’eau. En définissant FN (t) = FN,d (t) + FN,g (t), on peut
contracter l’équation précédente :
Z t+T /2
F P (t) = FN (t)| sin θ| dt. (2.18)
t−T /2
56
2.4. Traı̂née active et force de propulsion : le départ arrêté
Chp 2
Figure 2.21 – Mesure de la force de propulsion en kayak. (a) Décomposition d’un coup de
pagaie (une image toutes les 0.05 s). (b) Définition de l’angle de la pagaie θ. (c) Évolution
de l’angle θ et de la force de propulsion en fonction du temps.
57
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Chp 2
𝐹0
𝐹0
(a) (b)
Figure 2.22 – Évaluation expérimentale du coefficient de traı̂née active en kayak. (a) Force
de propulsion moyenne projetée dans la direction d’avancée du bateau en fonction du numéro
de cycle (b) Évolution de la vitesse : les traits pleins correspondent à une force de propulsion
constante (mesurée en (a)) et un coefficient de traı̂née de 1.3 kb pour B1 et 1.2 kb pour B2.
58
2.4. Traı̂née active et force de propulsion : le départ arrêté
Résumé du Chapitre 2
La force de propulsion FP peut être évaluée grâce à des tests en nage attachée.
L’utilisation de plaquettes de différentes tailles permet d’établir une relation force-
vitesse similaire à d’autres sports comme le cyclisme où la course à pied.
59
Chapitre 2. Force de propulsion et forces de résistance en natation
Chp 3
60
3
Relation fréquence - vitesse en
natation et en kayak
Dans ce chapitre, nous mesurons expérimentalement l’évolution de la vitesse de nage V en
fonction de la fréquence de bras f grâce à un test de 10 × 25 mètres progressif. Aux faibles
√ est proportionnelle à la fréquence : V ∝ f . Aux plus hautes vitesses,
vitesses, la vitesse V
nous trouvons V ∝ f . Grâce à un modèle de propulsion simplifiée, nous sommes obtenons Chp 3
l’équation des deux régimes observés expérimentalement. Ce modèle fonctionne pour les
nages avec retour aérien (crawl, dos, papillon) mais pas pour la brasse. Dans une dernière
partie, ce modèle est étendu au kayak, où nous trouvons une relation V ∝ f 1/3 .
L’Art de nager démontré par des figures avec des avis pour se baigner utilement, Mel-
chisédech Thévenot, 1646, BNF.
Sommaire
3.1 Les relations fréquence-vitesse dans les sports de course . . . . . . 62
3.2 État de l’art en kayak et natation . . . . . . . . . . . . . . . . . . 63
3.3 Dispositif expérimental : Le test de 10 × 25 mètres progressif . . 65
3.4 Résultats expérimentaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 70
3.5 Modélisation physique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 75
3.6 Discussion sur l’efficacité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 82
3.7 La relation fréquence-vitesse dans les autres styles de nage . . . . 83
3.8 La relation fréquence-vitesse en kayak . . . . . . . . . . . . . . . . 84
3.9 Conclusion et perspectives . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 87
61
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
Dans ce chapitre, nous ne nous préoccupons pas des variations intra-cycle de vitesse et donc
nous appellerons V la vitesse moyenne sur un cycle. On a ainsi par définition de la vitesse
V = λf . Étudier la relation fréquence-vitesse revient donc à étudier le comportement de la
période spatiale λ, également appelé SL pour stroke length (en natation) ou stride length
(en course à pied). Il faut être attentif à ne pas confondre f et 2f quand la propulsion est
alternée entre droite et gauche. Ainsi, nous considérerons qu’une période correspond à un
mouvement de propulsion à droite et un mouvement de propulsion à gauche. SL est donc la
longueur correspondant à 2 pas en course à pied, et à 2 coups de bras en natation (en dos
et en crawl).
En cyclisme sur piste (figure 3.1-a) , le braquet G = Zp /Zc est fixé. Zp correspond au
nombre de dents du plateau et il n’y a pas de roue libre, c’est-à-dire que le cycliste ne peut
pas s’arrêter de pédaler tant qu’il n’est pas à l’arrêt. La fréquence est usuellement mesurée
en tour par minute, on rappelle donc que 1 Hz correspond à une fréquence de 60 tours par
minute. À chaque tour de pédale, l’athlète parcourt la même distance qui vaut SL = 2πRG
où R est le rayon de la roue. La relation fréquence-vitesse est donc linéaire. On montre la
relation fréquence vitesse pour une roue classique de rayon R = 350 mm sur la figure 3.2.
Le cyclisme est très différent de la natation dans son mode de propulsion. D’une part, les
appuis ne sont pas fixes en natation, on a ainsi un dérapage de la main dans le référentiel
absolu (la main recule). De plus, les phases de propulsion peuvent être entrecoupées de
phases de glisse en natation alors que, les cyclistes n’observent pas de pause entre deux
tours de pédale.
62
3.2. État de l’art en kayak et natation
𝑍𝑐
𝑍𝑝
(a) (b)
Figure 3.1 – Exemple de sports de course terrestres : (a) Cyclisme sur piste [91] . Le cycle
correspond à un tour complet de pédale. (b) Course à pied [92]. Le cycle correspond à un
appui du pied droit et un appui du pied gauche.
Chp 3
Mesurer une fréquence et une vitesse étant assez peu coûteux en terme d’équipement, de
nombreuses études présentent des résultats de vitesse en fonction de la fréquence ([94, 95,
96, 16, 97]). Keskinen et Komi ont réalisé un test de 10 à 14 × 100 m progressif [98].
En superposant les données de fréquence et de vitesse de tous les sujets, aucun lien clair
n’est établi entre fréquence et vitesse. Hay a analysé les relations fréquence-vitesse dans
12 formes de locomotion, dont la natation et le kayak [14]. D’après ses travaux, dans les
sports aquatiques, la distance par cycle est décroissante décroit quand la vitesse augmente.
Les données sur la course à pied sont cohérents avec ce que nous avons observé, avec une
distance par cycle constante aux vitesses élevées. D’autres études sur le kayak analysent le
lien entre fréquence et vitesse, mais seulement à des allures de compétition ([99, 100]).
63
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
20
G = 52/13
G = 52/25
G = 34/34
V (m/s)
10
0
0 1 2
f (Hz)
Figure 3.2 – Relation fréquence-vitesse en cyclisme. En rouge : le plus gros braquet sur
un vélo de route, braquet typique en cyclisme sur piste. En bleu : un braquet moyen en
Chp 3
cyclisme sur route. En vert : le plus petit braquet d’un sprinteur sur une étape de montagne
en cyclisme sur route.
Nous allons décrire ici les tests pour l’évaluation des profils fréquence-vitesse des nageurs,
réalisés à l’INSEP (Institut National du Sport, de l’Expertise et de la Performance) avant
le début de notre collaboration, afin de mieux séparer ce qui existait déjà de ce que nous
avons apporté.
Il est demandé aux nageurs de l’INSEP tous les six mois environ de réaliser un 10 x 25
mètres progressif. Le premier 25 mètres est nagé le plus lentement possible, alors que le
dernier 25 mètres est nagé le plus vite possible. Chaque départ entre deux passages est
espacé de trois minutes, afin de laisser le nageur récupérer, ce qui est nécessaire pour les 25
mètres les plus rapides. Le nageur a pour consigne d’être le plus progressif possible au cours
des dix passages. Être capable de produire dix vitesses différentes n’est pas évident, et cela
demande une grande expertise. L’athlète est “livré à lui-même” pendant les trente minutes
du test, c’est-à-dire qu’il n’obtient aucun retour sur ses passages.
Ces tests sont filmés, mais l’analyse est souvent faite en direct avec deux chronomètres. Le
premier chronomètre permet de mesurer le temps T5m entre le 15 mètres et le 20 mètres, en
prenant la tête comme référence. Le second chronomètre permet de mesurer le temps par
cycle Tcycle , mesuré sur trois cycles. La vidéo permet de vérifier les temps a posteriori.
Les valeurs de Tcycle et T5m sont ensuite rentrées dans un fichier excel qui génère une courbe
telle que montrée figure 3.4-a. Ces courbes ne sont pas très explicites pour un observateur
extérieur. On observe systématiquement deux zones : les premiers essais où les points rouges
suivent les points bleus, puis une deuxième zone où les points s’écartent. L’échelle qui permet
de superposer les points est empirique. Le point d’ouverture est le point d’efficacité maxi-
male pour l’entraı̂neur. L’objectif de l’entraı̂nement est ensuite de refermer la courbe vers la
droite. T5m reflète la vitesse de l’athlète alors que Tcycle correspond à l’inverse de la fréquence.
Notre objectif est d’abord de traduire cette courbe en relation fréquence-vitesse. Nous trans-
posons les résultats de la figure 3.4-a en une courbe fréquence-vitesse (figure 3.4-b). Les
64
3.3. Dispositif expérimental : Le test de 10 × 25 mètres progressif
Figure 3.3 – (a) Définition d’un cycle en course à pied. λ est la distance parcourue par Chp 3
le centre de masse pendant le cycle. (b) Relation fréquence-vitesse en course à pied pour
deux athlètes de niveau national en sprint et demi-fond. En orange : un premier régime très
vertical, avec une fréquence qui varie peu. En noir : un second régime linéaire, à longueur
de foulée constante.
traits pointillés séparent les points en deux zones. Aux faibles vitesses, la pente est élevée.
Aux hautes vitesses, la vitesse semble saturer. Notre objectif est de comprendre ce qu’il
se passe au changement de régime. Nous nous intéressons en priorité au crawl et au dos.
Dans un dernier temps, nous évaluerons l’efficacité de propulsion en fonction de la fréquence.
3.3.1 Protocole
Nous avons différents moyens de mesure que nous détaillons dans cette partie. Dans tous les
cas le principe est le même. On définit un intervalle I sur lequel nous mesurons la fréquence
et la vitesse. Le début de la zone de mesure dépend de la longueur de la coulée du nageur. En
règle générale, le nageur est en “régime permanent” au passage des 10 mètres, c’est pourquoi
nous commençons les mesures après y = 10 m (y est la distance au bord du bassin). Même
si la consigne est de nager 25 mètres, il est fréquent que les nageurs relâchent leur effort
65
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
(a) (b)
Figure 3.4 – (a) Évolution de la période Tcycle (en bleu) et du temps pour parcourir 5
mètres T5m en fonction du N-ième passage sur le test de 10 × 25 m progressif. Jusqu’à
Chp 3
N=5, les points rouges et les points bleus se superposent. Pour N > 6, les points s’écartent.
Pour l’entraı̂neur, la fréquence d’efficacité maximale est celle du passage N=5. L’échelle qui
permet de superposer les points rouges et bleus est empirique et donnée par les entraı̂neurs.
(b) Transposition des résultats en profil fréquence - vitesse.
avant de franchir la ligne des 25 mètres. Pour cette raison l’intervalle de mesure est souvent
I = [10m − 20m].
On définit la fréquence f = 1/Tcycle et V = DI /TI où I est l’intervalle choisi. (Si I =
[10m − 20m], DI = 10 m et TI représente le temps pour aller de y = 10 à y = 20). Tcycle
correspond à la moyenne des périodes dans l’intervalle choisi, en prenant en compte les deux
cycles aux frontières.
Nous pouvons mesurer Tcycle et TI de différentes manières.
66
3.3. Dispositif expérimental : Le test de 10 × 25 mètres progressif
𝒚 = 𝟏𝟎 𝒎 𝒚 = 𝟏𝟕. 𝟓 𝒎
Figure 3.5 – Mesure de la vitesse moyenne grâce au speedometer. La zone grisée correspond
à la zone entre y=10 m et y=17.5 m. C’est sur cet intervalle que nous réalisons la moyenne
de vitesse pour obtenir la vitesse du passage.
On détecte les cycles grâce à la sortie du bras droit de l’eau en fin de poussée (changement
de signe de vitesse angulaire selon l’axe x sur l’IMU placé sur l’avant-bras). Pour calculer
la fréquence moyenne, on réalise la moyenne des périodes de tous les cycles de la zone de
mesure de la vitesse, en prenant en compte les cycles aux deux frontières. L’incertitude sur
la fréquence est obtenue en calculant l’écart-type de ces valeurs de période. Dans ce cas, la
mesure est plus précise que le nageur, qui n’est pas répétable au centième de seconde sur
ses temps de cycle.
3𝑇
Sur la figure 3.6, on présente un exemple de courbe de vitesse sur un 25 mètres ainsi que le
signal du gyroscope d’un IMU situé sur le bras (axe de rotation principal).
Réseau de neurones Le bassin de l’INSEP est équipé de caméras qui ont été calibrées et
nous avons également entraı̂ne un réseau de neurones à reconnaı̂tre les marqueurs du corps
humain, qui nous permettent ensuite d’avoir un squelette du nageur, puis de déterminer sa
fréquence de bras, et la vitesse de son centre de masse (section 1.4). Il s’agit du meilleur
compromis précision / encombrement. Ce dispositif est beaucoup plus précis que l’entraı̂neur
avec son chronomètre et nécessite moins de temps d’installation que les centrales inertielles
(compter 30 minutes dans le meilleur des cas). Le plus gros avantage est l’aspect non intrusif
d’une telle méthode. Le nageur évolue dans ses conditions normales d’entraı̂nement, ce qui
est appréciable dans un sport comme le natation où le ”toucher” d’eau est très important. Ce
système a toutefois été installé un an après le début de nos travaux, c’est pour cette raison
que de nombreux essais ont été effectués avec les centrales inertielles. Le seul inconvénient
67
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
est la sédentarité de ce dispositif : l’athlète doit nager à la ligne d’eau numéro 7 du bassin
de l’INSEP. De plus, il est plus difficile d’avoir une estimation de la trajectoire 3D de la
main avec des caméras latérales uniquement. Il est cependant possible de le faire avec des
méthodes de vision par ordinateur et de tracking dit 2.5D .
Les résultats présentés dans la suite du chapitre ont été collectés avec le dispositif “Speedo-
meter + centrales inertielles”.
Dans la section 1.3, nous avons montré comment nous intégrons le mouvement de la main
lors de mouvements hors de l’eau, à partir des 3 vitesses angulaires données par les deux cen-
trales inertielles placées sur le bras et l’avant-bras, en partant d’une position initiale connue.
Nous cherchons désormais à connaitre la trajectoire de la main lors des mouvements de nage.
Comme montré sur la figure 3.6, nous découpons le signal en cycles. À partir des différents
Chp 3
cycles, nous calculons un cycle moyen : les vitesses angulaires en fonction du temps adi-
mensionnalisé t/T sont moyennées afin d’obtenir pour chaque 25 m une valeur de vitesse
angulaire moyenne (figure 3.7-a). Nous cherchons ensuite à intégrer la trajectoire à partir
de ces valeurs moyennes.
(c)
(a) (b) 1
Retour aérien Propulsion
Glisse
2 3 2 𝒂𝒛 𝒄
𝒈
3
1 𝝎𝒙
Figure 3.7 – Recherche du début de la phase de propulsion grâce aux signaux de vitesses
angulaire et d’accélération. (a) Vitesses angulaires autour de l’axe épaule droite - épaule
gauche pour le bras droit et l’avant-bras droit. (b) Signal d’accélération normal à l’avant-
bras droit. (c) Images des trois zones définies sur la figure (a).
Pour se ramener au cas décrit dans la section 1.3, nous devons trouver l’instant du cycle où
le bras est tendu devant le nageur, pendant la phase de glisse (image 2 sur la figure 3.7-c). La
signature la plus forte de cet instant dans le signal s’observe sur le signal d’accélération du
poignet. Quand le bras est fixe et tendu devant le nageur, l’axe z confondu avec la verticale
doit afficher une accélération de g. Sur le signal d’accélération (figure 3.7-b), on observe
un plateau légèrement supérieur à g pendant le temps de glisse. On définit le début de la
68
3.3. Dispositif expérimental : Le test de 10 × 25 mètres progressif
poussée comme l’instant où la courbe d’accélération normale à l’avant-bras croise la courbe
a = g. On cherche le début de la poussée puisqu’en intégrant la phase de glisse, on perd de
l’information en intégrant du bruit.
Une fois l’instant de début de poussée bras tendu trouvé, nous redéfinissons l’instant t=0
dans le cycle puis nous intégrons la trajectoire de la main.
E
P
C M
(a) 𝑉𝑚/𝑐 (b)
Chp 3
E E C
𝐶𝑚 C
P P
M 𝐶𝑚 M
Figure 3.8 – Reconstruction de la trajectoire de la main. (a) Vue de dessus (b) Vue latérale.
En bleu, nous représentons les portions de trajectoire où la main recule dans le référentiel
du corps.
Les trajectoires de la main dans le référentiel du corps sont représentées sur la figure 3.8. La
forme de ces trajectoires est très similaire à celles représentées par Cohen [101]. La différence
principale concerne l’orientation dans l’espace. La trajectoire aérienne de la main sur la figure
3.8-b devrait être à altitude constante. Cela provient de notre difficulté à détecter le début de
poussée, mais également au fait que le nageur commence sa poussée avec le bras légèrement
incliné dans l’eau, ce que nous ne parvenons pas à corriger de manière convaincante. Nous
pouvons définir le trajet aquatique de la main Cm (Cd pour la main droite et Cg pour la
main gauche) et le temps de propulsion tp (td pour la main droite et tg pour la main gauche)
de la manière suivante :
Z Z
Cm = ⃗m,c (t)∥dt et tp =
∥V dt, (3.1)
Vy/c <V0 Vy/c <V0
où Vy/c est la vitesse de la main par rapport au corps projetée dans la direction de nage
et comptée négativement quand la main recule (voir figure 3.8). L’intégration se fait sur un
⃗m,c (t) correspond au vecteur vitesse instantanée de la main. On fixe V0 = −0.1 m/s,
cycle. V
pour éviter de compter des temps de glisse comme de la propulsion. On parlera de Cm , tp
et Vm/c pour parler à la fois de la main droite et de la main gauche. Pour la main droite,
les grandeurs correspondantes sont Cd , td et Vd/c . Pour la main gauche, il s’agit de Cg , tg
et Vg/c .
69
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
Tableau 3.2 – Caractéristiques des 4 nageurs handisport testés. Dans la colonne handicap,
nous donnons le nom du handicap ainsi que la catégorie du nageur (S4, S10...). Les catégories
Chp 3
S1 à S10 correspondent aux handicaps physiques, où S10 est le plus proche d’un athlète
valide. La catégorie S13 est celle des déficients visuels.
4 nageurs du pôle de l’INSEP entraı̂nés par Matthias Mercadal ont suivi ce protocole. Tous
sont des nageurs de crawl, spécialistes du 200 mètres. Leurs caractéristiques sont rappelées
dans le tableau 3.1.
Grâce à la coopération du directeur scientifique de la natation handisport Sami El Gueddari,
4 nageurs membres de l’équipe de France handisport ont aussi réalisé ce protocole. Ces tests
ont été effectués en crawl et en dos. Leurs caractéristiques sont données dans le tableau 3.2.
Les figures 3.10 et 3.9 présentent les 8 profils fréquence - vitesse des nageurs testés.
Indépendamment du fait que ces athlètes soient valides ou non, on distingue quasi-systématiquement
sur ces courbes deux régimes. Aux basses vitesses, la relation fréquence-vitesse est linéaire,
ce qui signifie que la distance parcourue par cycle est constante. Aux hautes vitesses, la
pente de la courbe vitesse-cadence est plus faible. L’augmentation de fréquence génère une
plus faible augmentation de la vitesse.
Si nous reprenons la figure de l’entraı̂neur (figure 3.4), nous observons également deux
régimes. Dans le premier régime, vitesse et fréquence augmentent de la même manière
(Tcycle = 1/f et T5m = 5/V diminuent). Dans le second régime, la fréquence continue
d’augmenter de la même manière que dans le premier régime. En revanche, la vitesse aug-
mente moins rapidement. Nous retrouvons donc également ces deux régimes avec la méthode
de visualisation de l’entraı̂neur.
70
3.4. Résultats expérimentaux
Figure 3.9 – Profils fréquence vitesse des nageurs de l’INSEP. Les quatre courbes corres-
pondent à du crawl. (a) A3 (b) A4 (c) A5 (d) A6.
Figure 3.10 – Profils fréquence vitesse des nageurs handisport. (a) A7 (crawl) (b) A8
(crawl) (c) A9 (dos) (d) A10 (crawl).
Sur la figure 3.11, nous représentons les valeurs de Cm pour les athlètes A3 et A4. N cor-
respond au numéro de passage dans le 10 × 25 m. Chez A4 les valeurs de Cd et Cg sont
constantes sur les 10 passages. Chez A3 en revanche, on observe une dissymétrie à partir du
5ème passage : le chemin à droite augmente alors qu’il diminue légèrement à gauche. Les
valeurs trouvées correspondent à environ 2 fois un trajet rectiligne de la main (la distance
épaule - main vaut environ 75 cm, soit un trajet de 1.5 m pour passer de la position bras
tendu devant à la position bras tendu derrière).
Sur la figure 3.12, nous représentons l’évolution du temps de propulsion tp en fonction des
passages. tp est relativement constant pour A3. Pour l’athlète A4, le temps de propulsion
est constant pour la main droite, mais nous observons de fortes variations pour la main
gauche. Il est intéressant de comparer ce temps de propulsion à la période du cycle, afin de
caractériser les temps de glisse.
71
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
(a) (b)
Chp 3
Figure 3.11 – Distance parcourues par chaque main dans le référentiel du corps en fonction
du N-ième 25 m. (a) A3 (b) A4.
(a) (b)
[16]. À γ fixé, les temps de glisse couvrent la même part du cycle de nage.
L’évolution de γ en fonction de N, le N-ième 25 mètres, est présenté sur la figure 3.13. Sur les
passages du premier régime observé sur la figure 3.9, γ est constant pour l’athlète A3. Pour
l’athlète A4, γg est constant et γd varie peu. Cela signifie que la part de glisse dans le cycle
ne varie pas ou très peu. Dans le second régime, γ augmente de manière assez irrégulière.
72
3.4. Résultats expérimentaux
(a) (b)
Chp 3
(a) (b)
Figure 3.14 – Vitesse moyenne absolue de la main dans le référentiel du corps Vm/c = Cm /tp
en fonction du N-ième 25 m. On compare les valeurs de la main droite Vd/c et de la main
gauche Vg/c (a) A3 (b) A4.
73
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
(a) (b)
Chp 3
Pour comparer cette vitesse de main avec la vitesse de nage, nous définissons β = V /Vm/c .
L’évolution du β est donnée sur la figure 3.15. β augmente légèrement au fur et à mesure
du test. Les valeurs mesurées varient entre 0.25 et 0.45. La main recule environ 3 fois plus
rapidement que le corps avance. Cela est cohérent avec les valeurs données par Zamparo
(0.45 pour un nageur élite) [102].
74
3.5. Modélisation physique
FP est la somme des forces de propulsion du nageur. On écrit FP (t) = Fj + Fd (t) + Fg (t). Fj
correspond à la force de propulsion des jambes et ne dépend pas du temps. Fd (t) (respective-
ment Fg (t)) correspond à la force de propulsion de la main droite (respectivement gauche).
Le temps de propulsion pour le bras droit (respectivement gauche) est td (respectivement
tg ) et on définit Fd comme la force moyenne de propulsion sur le temps de propulsion : Chp 3
Z T
1
Fd = Fd (t) dt. (3.2)
td 0
𝑭𝑷
𝒕𝒅
𝒕𝒈
𝑭𝒅
𝑭𝒈
𝑭𝒋
𝑻 𝒕
Figure 3.16 – Répartition schématique des trois forces de propulsion : jambes (violet), bras
droit (bleu) et bras gauche (rouge).
La répartition des forces de propulsion est montrée schématiquement sur la figure 3.16. Les
espaces entre les rectangles rouge et bleu correspondent aux temps de glisse. En sprint, les
rectangles peuvent se superposer légèrement [16]. On prend comme coefficient de traı̂née le
coefficient actif ka discuté dans la section 2.4. Nous avons observé que le coefficient passif
ne dépend pas de la vitesse pour Fr < 0.41 (section 2.2). Sur les figures 3.9 et 3.10, nous
observons que les vitesses ne dépassent pas 1.9 m/s. Nous sommes donc dans le cas où le
75
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
coefficient kb ne dépend pas de la vitesse. Nous supposons qu’il en est de même pour le
coefficient actif.
On suppose ensuite que la force de propulsion de la main résulte uniquement de la force de
traı̂née de la main (on néglige les effets de masse ajoutée). Nous estimons cette force avec
un modèle unidimensionnel. En notant km = 12 ρSM CD,M avec SM la surface de la main et
CD,M son coefficient de traı̂née :
Fd = km (Vd/c − V )2 , (3.4)
où V est la vitesse moyenne du nageur est Vd/c est la vitesse moyenne absolue de la main
droite dans le référentiel du corps pendant la phase de propulsion. Ce modèle est très sim-
plifié. En réalité, des forces de masse ajoutée contribuent également à la propulsion. De plus,
nous utilisons une valeur de vitesse Vm/c qui est absolue alors que la contribution Fd est
projetée selon l’axe y.
De la même manière on peut écrire la relation entre Fg et Vg/c pour la main gauche. On
Chp 3 suppose que les 2 mains sont identiques et donc km est le même.
L’égalité entre forces de propulsion et forces de traı̂née s’écrit donc :
2 km td 2 k m t g 2 Fj
V = Vd/c − V + Vg/c − V + . (3.5)
ka T ka T ka
Pour rendre cette égalité symétrique, nous partageons la force de propulsion des jambes en
2:
" 2 2
#
2 km 2 V V Fj T 2 V V Fj T
V = td Vd/c 1 − 2 + 2 + 2 + tg Vg/c 1 − 2 + 2 + 2 .
T ka Vd/c Vd/c 2td km Vd/c Vg/c Vg/c 2tg km Vg/c
(3.6)
On pose
T Fj V
αd = et βd = . (3.7)
2td Fd Vd/c
Quand β → 0, la vitesse du corps peut être négligé devant celle de la main. Quand β → 1,
la main est ancrée dans l’eau : un observateur extérieur ne voit pas la main bouger. Nos
observations sur la vitesse de la main par rapport au corps nous montrent que β varie de
0.3 à 0.45 (voir figure 3.15). Nous définissons la fonction G(α, β) de la manière suivante :
76
3.5. Modélisation physique
2 2
V V T Fj V
G(αd , βd ) = −2 + 2 + 1− . (3.8)
Vd/c Vd/c 2td Fd Vd,c
Chp 3
Figure 3.17 – Valeurs de G(α, β) sur l’intervalle [0, 1] × [0, 1]. Le rectangle vert matérialise
les valeurs de (α, β) observées en natation. Dans la zone bleue, on a un boost par rapport
à l’approximation G = 0 (gain des jambes). Dans la zone rouge, on a un frein par rapport
à l’approximation G = 0.
On représente G(α, β) sur la figure 3.17. G(α, β) peut atteindre -0.5 pour des faibles vi-
tesses de main. Si β ≈ 1/3, nous obtenons G(α, β) ≈ −0.4. Nous faisons l’approximation
|G(αd , βd )| ≪ 1 et |G(αg , βg )| ≪ 1. Sachant que nous allons prendre la racine carrée de
l’équation 3.9, nous aurons une erreur inférieure à 20 %. Nous remarquons que plus le na-
geur utilise ses jambes, plus notre approximation est bonne. Suite à cette approximation
l’équation 3.9 devient :
2 km h 2 2
i
V ≈ td Vd/c + tg Vg/c . (3.10)
T ka
77
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
de coordination est constant dans ce premier régime. Nous avons également observé que Cm
est constant (voir figure 3.11). L’équation 3.11 s’écrit :
" #
2 km Cd2 Cg2
V = + f 2. (3.11)
ka γd γg
V = L0 f. (3.12)
Dans ce premier régime, la vitesse est linéaire en la fréquence. La distance parcourue par
Chp 3 cycle (SL) est constante et vaut L0 . Qualitativement, cette distance par cycle augmente
avec la taille de la main (km ) et le chemin parcouru par la main dans l’eau Cd et Cg . Cette
distance diminue si le coefficient de traı̂née active du nageur ka augmente. Enfin, L0 est
une fonction décroissante de γ : plus le nageur se laisse glisser, plus il parcourt de distance
pendant un cycle (toutes grandeurs égales par ailleurs).
Pour l’athlète A3, la régression linéaire des données fréquence-vitesse dans le premier régime
donne L0 = 2.99 ± 0.1 m. Or Cd = 2.97 ± 0.2 m ; Cg = 3.00 ± 0.2 m ; γd = 0.31 ± 0.02 ; et
γg = 0.36 ± 0.02 (figures 3.11 et 3.13). Ces valeurs supposent donc que km /ka = 0.17 ± 0.04,
et donc que le coefficient SCd du bras soit 6 fois plus faible que celui du corps.
Nous avons mesuré le coefficient ka du nageur A3 lors du test de départ arrêté dans la
section 2.4 (ka = 42 kg/m). Cela donne donc km = 7.1 kg/m. Il s’agit du même ordre de
grandeur que les 10 kg/m trouvés par Martin et al. [103].
Pour l’athlète A4, avec L0 = 3.11 ± 0.1 m ; Cd = 3.19 ± 0.2 m ; Cg = 3.11 ± 0.2 m ;
γd = 0.32 ± 0.02 ; et γg = 0.44 ± 0.02, on trouve km /ka = 0.18 ± 0.04. On retrouve des valeurs
similaires. Notre modèle est cohérent avec les valeurs mesurées et celles de la littérature,
bien que nos incertitudes soient importantes.
Nous pouvons ensuite décrire l’évolution de la force de propulsion moyenne Fd sur le temps
de cycle grâce aux équations 3.4 et 3.12, en remarquant que td = γd /f :
Cd Cg
Fd = f 2 km ( − L0 )2 et Fg = f 2 km ( − L0 )2 . (3.13)
γd γg
Nous pouvons également l’écrire sous la forme force - vitesse :
2 Cd 2 Cg
Fd = V km ( − 1)2 et Fg = V km ( − 1)2 . (3.14)
γ d L0 γg L0
78
3.5. Modélisation physique
td tg 2
Fd (1 + αd ) + Fg (1 + αg ) = ka V . (3.15)
T T
Nous cherchons à exprimer td en fonction de βd et des constantes du mouvement. En utilisant
la définition de β (équation 3.7) et l’équation 3.4, on obtient :
s
1 Fd,max
Vd/c = . (3.16)
1 − βd km
On rappelle que α représente le rapport entre l’impulsion des jambes et l’impulsion des Chp 3
bras. En utilisant la relation Cd = Vd/c · td , et en adaptant l’équation 3.16 à la main gauche,
l’équation 3.15 devient :
h p p i f
2
V = (1 + αd )(1 − βd )Cd Fd,max km + (1 + αg )(1 − βg )Cg Fg,max km . (3.17)
ka
Figure 3.18 – Valeurs de H(α, β) sur l’intervalle [0, 1] × [0, 1]. Le rectangle vert matérialise
les valeurs de (α, β) observées en natation. Dans la zone bleue, on a un boost par rapport
à l’approximation H = 0 (gain des jambes). Dans la zone rouge, on a un frein par rapport
à l’approximation H = 0.
2 X p f
V = (1 + Hi ) km Fi . (3.18)
ka
i∈(d,g)
Sur la figure 3.18, nous représentons l’évolution de H(α, β). Sur la gamme de valeurs ob-
servées en natation, les valeurs de |H(α, β)| sont plus faibles que pour la fonction G que
79
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
nous avons utilisée pour le premier régime (H(1/3, 1/3) = −0.1). De la même manière que
précédemment, nous faisons l’hypothèse |H(αd , αd )| ≪ 1 et |H(αg , αg )| ≪ 1. En définissant
la constante I0 de la manière suivante :
1 h p p i
I0 = Cd Fd,max km + Cg Fg,max km , (3.19)
ka
qui est indépendante de la vitesse par hypothèse, nous obtenons la relation fréquence-vitesse
dans le second régime. La relation fréquence vitesse s’écrit donc :
p p
V = I0 f . (3.20)
Dans ce second régime, la vitesse est en racine de la fréquence. On trouve ici une signification
physique à l’indice de nage. L’indice de nage a été défini par Costill et al. en 1985 [15]. Il
s’agit du rapport entre le carré de la vitesse et la fréquence de nage. Nous venons de montrer
que dans le second régime, les nageurs gardent un indice de nage constant.
Costill l’a défini comme un indice d’efficacité, en cherchant des corrélations entre V O2 et
indice de nage. Le terme entre crochets dans la définition de I0 caractérise la propulsion alors
Chp 3 que le terme ka caractérise les résistances, nous pouvons donc voir I0 comme un indicateur
d’efficacité.
Sanchez et Arrelano ont pour leur part remarqué que l’indice de nage était plus élevé chez
les nageurs de haut niveau [104]. À fréquence donnée, le nageur avec l’indice de nage le plus
haut va plus vite, cette observation est donc plus liée à la définition de I0 qu’à un critère
d’efficacité.
Pour A3, qui a effectué le test de nage attachée, on prend Fd = Fg = 159 ± 10N ; Cd =
3.29 ± 0.2 m ; Cg = 2.9 ± 0.2 ; km = 7.1 ± 2 kg/m (déduit du régime 1) ; ka = 42 ± 2 kg/m.
On obtient I0 = 4.95 ± 1 m2 /s contre I0 = 4.64 ± 0.10 m2 /s avec les données expérimentales.
A4 n’a pas effectué le test de nage attachée, ni le départ arrêté, on peut par contre estimer
l’ordre de grandeur de Fd et Fg si on suppose γ ≈ 0.5 (nage en “opposition”) et αd = αg =
2 . On a ensuite :
1/3 : (1 + αd )Fd = (1 + αg )Fg = ka Vmax
p 1
I0 = km /ka (Cg Vmax + Cd Vmax ).
1+α
En mesurant Cd = 3.15 ± 0.2 m et Cg = 3.13 ± 0.2 m, Vmax = 1.95 ± 0.05 m/s, et grâce à
l’estimation km /ka = 0.18 ± 0.04 du premier régime, on estime I0 ≈ 3.9 ± 0.6 m2 /s contre
I0 = 4.4 ± 0.1 m2 /s obtenu expérimentalement.
Les ordres de grandeur sont cohérents. Notre erreur est de l’ordre de 10 à 15 %, sachant que
notre incertitude est du même ordre. Compte tenu des hypothèses faites, cela est satisfai-
sant : nous sommes capables de déterminer la dépendance de I0 en fonction des paramètres
du nageur, ce qui peut guider les entraı̂nements afin de développer I0 .
√ √
V = I f est une borne supérieure de la vitesse tant que H est négative. Le nageur ne
peut pas faire mieux à moins d’avoir des palmes (ce qui lui permet d’augmenter α).
On applique la théorie de ces deux régimes aux nageurs de l’INSEP et de l’équipe de France
80
3.5. Modélisation physique
handisport.
Dans le premier√régime, on cherche L0 tel que V = L0 f . Dans le second régime, on cherche
I0 tel que V = I0 f . Les résultats sont présentés figures 3.20 et 3.19.
Chp 3
Figure 3.19 – Application du modèle aux nageurs
√ de l’INSEP. En bleu : le premier régime
V = L0 f . En noir : le second régime V = I0 f . Les quatre courbes correspondent à du
crawl. (a) A3 (b) A4 (c) A5 (d) A6.
Notre modèle correspond aux données expérimentales collectées. Les profils fréquence-vitesse
des nageurs testés sont bien décrit par notre modèle à deux régimes.
Chez les nageurs valides, la distance par cycle atteint 3 mètres dans le premier régime.
Nous remarquons que la fréquence critique de changement de régime se trouve généralement
autour de 30 cycles/minute. Les nageurs valides de haut niveau ont une vitesse de change-
ment de régime autour de 1.5 m/s, ce qui correspond à une allure de course de 5 km. Les
courses en bassin sont donc nagées dans le second régime.
Quand les nageurs commencent le test à des fréquences trop hautes, nous n’observons pas
de premier régime. C’est le cas des nageurs A9 et A10. De plus, le premier régime étant un
régime de glisse, les nageurs handicapés au niveau des membres inférieurs n’ont peu d’intérêt
81
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
Il arrive que le dernier point (la plus haute fréquence) s’écarte de la courbe du second régime.
Il s’agit souvent d’athlètes non spécialistes du sprint, qui ne parviennent pas à s’organiser
aux hautes fréquences.
L’objectif pour un nageur de demi-fond voire de fond est de nager à une vitesse élevée
tout en gardant suffisamment d’énergie pour terminer la course. L’efficacité de la propulsion
est donc primordiale. En discutant avec les entraı̂neurs, nous nous rendons compte que la
méthode pour déterminer l’efficacité optimale de nage est d’observer la cassure dans le profil
fréquence-vitesse. Cela revient donc à utiliser la distance par cycle (SL) comme indicateur
d’efficacité. La fréquence critique de changement de régime, correspondant à l’efficacité
Chp 3 optimale serait donc :
fc = L20 /I0 . (3.21)
Costill et al., en définissant l’indice de nage, prétendent que c’est cet indice qui permet de
caractériser l’efficacité. Nous proposons dans cette partie de questionner ces indicateurs d’ef-
ficacités. Nous nous intéresserons ici uniquement à la propulsion des bras. Nous définissons
l’efficacité η comme le rapport entre la puissance utile au déplacement du nageur et la
puissance mécanique consommée par le nageur pour se propulser. On regarde la propulsion
d’un bras spécifiquement (le bras droit), mais tout est transposable pour le bras gauche.
L’efficacité de propulsion du bras droit vaut :
PU
ηd = , (3.22)
Pd
V
ηd = (3.23)
Vd/c
La formule 3.23 porte uniquement sur les temps de propulsion. Or la distance par cycle est
la somme de la distance parcourue pendant les phases de propulsion et de glisse. Comme
les temps de glisse sont de plus en plus réduit dans le second régime, il est donc normal que
82
3.7. La relation fréquence-vitesse dans les autres styles de nage
(a) (b)
Chp 3
En revanche, l’indice de nage, bien qu’il ne soit défini que par des paramètres macrosco-
piques (vitesse et fréquence), semble bien décrire l’évolution de l’efficacité de propulsion du
nageur.
La fréquence de cassure dans le profil fréquence - vitesse n’est donc pas la fréquence d’ef-
ficacité maximale pour un nageur. Pour estimer l’efficacité sans connaı̂tre la cinématique
intra-cyclique, il semble préférable de calculer l’indice de nage correspondant à chaque pas-
sage.
Ce test a également été réalisé par des athlètes du CAF (Centre d’Accession et de Formation)
Île de France. Cela nous a permis d’obtenir des profils fréquence-vitesse dans les différents
styles de nage. Nous montrons un profil fréquence-vitesse par style de nage sur la figure 3.22.
Le modèle développé s’applique très bien au dos (figure 3.22-a). Cela est cohérent puisque
rien dans les équations ne change si le nageur est sur le dos, par rapport à de la nage en crawl.
En papillon (figure 3.22-b), même si les fréquences mesurées sont plus élevées, le modèle
décrit encore bien la relation fréquence-vitesse. Le fait que la nage soit simultanée ne pose
pas de problème dans la description de la force, puisque rien n’oblige à ce que Fd et Fg
83
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
Chp 3
Figure 3.22 – Profils fréquence-vitesse et application du modèle à deux régimes aux trois
styles de nage différents du crawl : (a) dos [105] (b) papillon [106] (c) brasse [107]. Les images
sont illustratives de la technique de nage et ne représentent pas le nageur testé.
soient séparées. On observait d’ailleurs des phases de superposition en crawl (γ > 0.5). En
revanche, l’hypothèse de force de propulsion constante des jambes est discutable. De plus,
le corps se déforme plus en papillon, ce qui peut impliquer une évolution de ka au cours du
temps. Malgré tout, nous observons un second régime proche de celui observé en crawl et
en dos.
En brasse (figure 3.22-c), nous n’observons plus les deux régimes. Le corps se déforme beau-
coup, et le retour des bras est effectué dans l’eau. Dans les nages avec retour aérien, l’aug-
mentation de la vitesse de retour de bras permet d’augmenter la fréquence sans pénalisation
sur la traı̂née. En brasse, l’accélération du retour des bras génère une force de traı̂née
supplémentaire. Ainsi ka augmente avec la vitesse. Malgré l’augmentation de la fréquence,
la vitesse augmente donc très peu en fonction de la fréquence. Empiriquement, on trouve
V ∝ f 1/4 . Cette puissance 1/4 doit être comparée avec la puissance 1/2 dans les autres
styles de nage. En échelle logarithmique, la pente du profil fréquence-vitessee est donc deux
fois plus faible en brasse que dans les autres styles de nage.
Comme dans le chapitre précédent, pour compléter notre étude et mieux comprendre la
physique des courses, nous adaptons le test de 10 × 25 mètres au kayak. Grâce à la pagaie
instrumentée, il est possible d’avoir directement accès à la force de propulsion normale à la
pagaie. Cela permettra donc de discuter de notre modèle du second régime en natation, où
nous supposons la force constante.
84
3.8. La relation fréquence-vitesse en kayak
Les vitesses étant environ deux fois plus élevées en kayak qu’en natation, le test proposé est
un 10 × 50 mètres. Nous gardons le même protocole concernant le temps de récupération, à
savoir un départ toutes les trois minutes. La vitesse et la fréquence sont mesurées grâce aux
vidéos, prises depuis la rive. Le temps de propulsion et la force de propulsion sont mesurés
grâce aux jauges de contrainte. Tous les détails expérimentaux figurent dans l’annexe C.
Les deux athlètes qui effectuent le test sont les mêmes que ceux qui ont fait les tests de
décélération et de départ arrêté (B1 et B2).
où θ a été défini sur la figure 2.21 (angle entre la pagaie et l’horizontale). On a donc
F P = (tp Fd + tg Fg )/T . Nous mesurons Fd et Fg sur chaque 50 mètres.
(a) (b)
1/3 𝐹0
1/2
Figure 3.23 – Résultats du test de 10 × 50 mètres pour les kayakistes B1 et B2 (a) Relation
fréquence-vitesse en échelle logarithmique (b) Évolution de la force projetée moyenne sur le
temps de propulsion pour l’athlète B1.
Sur la figure 3.23-a, nous présentons les profils fréquence-vitesse des athlètes B1 et B2. Nous
choisissons l’échelle logarithmique pour insister sur la différence avec la natation dans le
second régime. Ces résultats nous montrent que dans le régime de force maximale, qui est
très majoritaire, V = A f 1/3 , avec A ≈ 4.6 m/s2/3 . La figure 3.23-b présente l’évolution des
forces de propulsion projetées moyennées sur les temps de propulsion pour l’athlète B1. On
observe que Fd et Fg varient peu à partir du troisième 50 m. Une légère augmentation se
produit toutefois lors des trois essais les plus rapides.
85
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
D’après nos observations sur la figure 3.23, la force de propulsion est quasiment constante à
partir du troisième 50 m, nous adaptons donc notre modèle de propulsion en natation dans
le second régime. Nous repartons de l’équation 3.15, sachant que les jambes de propulsent
plus, donc α = 0 :
X ti 2
Fi = ka V . (3.25)
T
i∈d,g
3 X ti
ka V = Fi βi Vi/c . (3.26)
T
i∈d,g
3 X f
Chp 3 V = βi Ci Fi . (3.27)
ka
i∈d,g
𝐿𝑚
pagaie droite
pagaie gauche
Sur la figure 3.24, nous montrons expérimentalement que V · tp est une constante à partir du
troisième 50 m. Cm β = Cm V /Vi/c est donc constante. On pose Ld = βd Cd et Lg = βg Cg
avec Lg = Ld = 1.64 m. La relation fréquence-vitesse devient donc :
3 X f
V = Li Fi . (3.28)
ka
i∈d,g
D’après la figure 3.23-b, sur les essais 3 à 10, les forces de propulsion Fd et Fg ont une valeur
moyenne Fd = 91.7 N et Fg = 88.9 N (on négligera les variations de force sur les 3 derniers
essais). La relation fréquence-vitesse est donc :
1/3
1/3 Ld Fd + Lg Fg
V = Af avec A = . (3.29)
ka
86
3.9. Conclusion et perspectives
Pour l’athlète B1, nous avons les valeurs suivantes : Ld = Lg = 1.64 ± 0.45 m ; Fg = 92 ± 10
N ; Fd = 89±10 N ; ka = 3.55±0.10 kg/m. On obtient ainsi A = 4.4±0.2 m/s2/3 , à comparer
avec A = 4.6 ± 0.1 m/s2/3 obtenu par régression linéaire sur la courbe 3.23-a. Nous sommes
donc capables d’expliquer la relation fréquence-vitesse obtenue expérimentalement grâce à
notre modèle inspiré du second régime des profils fréquence-vitesse de natation. L’équation
3.17 est en fait une relation fréquence-vitesse commune aux deux sports. Schématiquement,
la natation correspond à la limite β → 0 (en négligeant l’effet des jambes), et le kayak
correspond à la limite β → 1. En natation, la vitesse du corps est petite devant la vitesse
de la main. En kayak, la pagaie est “plantée”, la vitesse de la pagaie dans le référentiel du
bateau égale quasiment la vitesse du bateau.
Nous avons établi un modèle de propulsion qui décrit les profils fréquence - vitesse observés
en natation (pour les styles de nage avec retour aérien). Si ce modèle est nouveau, il peut Chp 3
être relié à des indices déjà défini dans la littérature. Dans le premier régime, le nageur
évolue à un indice de coordination constant [16]. Dans le second régime, l’indice de nage est
constant [15]. Pour compléter cette étude, il pourrait être intéressant d’effectuer la même
étude en aviron. On s’attend également à une relation V = a f 1/3 . Pour comprendre la
relation observée en brasse, il faudrait être capable de décrire précisément comment varie
ka avec la fréquence et la vitesse.
87
Chapitre 3. Relation fréquence - vitesse en natation et en kayak
Résumé du Chapitre 3
Dans les styles de nage avec retour aérien (crawl, papillon, dos) on observe
systématiquement deux régimes dans les profils fréquence - vitesse :
Le modèle qui permet de décrire le second régime en natation peut être adapté pour le
kayak, où la vitesse de la pagaie est moins importante en raison de sa taille plus grande.
Dans ces conditions, on montre que la relation fréquence-vitesse vaut V = af 1/3 , ce
qui correspond aux observations de terrain.
88
4
Étude des différentes phases du
départ
Dans ce chapitre, nous étudions le départ (15 premiers mètres) des courses de crawl et de
papillon. Nous séparons la trajectoire du départ en cinq phases distinctes : la poussée sur
le plot, le vol, la phase aquatique passive, les ondulations et la nage à la surface. Nous
modélisons chaque partie du départ, et mesurons les paramètres du modèle pour chaque
nageur testé.
Chp 4
Sommaire
4.1 Le départ, instant clé des courses de sprint . . . . . . . . . . . . . 90
4.2 Étude de la partie aérienne . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 93
4.3 Phase aquatique passive . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 99
4.4 Ondulations et reprise de nage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 106
4.5 Modèle sur la phase aquatique complète . . . . . . . . . . . . . . . 112
89
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
Contrairement à la plupart des courses (athlétisme, kayak, aviron, cyclisme sur piste) ou
le départ consiste en une accélération la plus rapide possible, le départ de natation vise à
conserver la vitesse acquise suite à la poussée sur le plot. En effet, les vitesses de décollage
sont de l’ordre de 4.5 m/s [108] quand les vitesses de nage ne dépassent pas 2.5 m/s (le
record du monde du 50 mètres nage libre est de 20.91 s soit une vitesse moyenne de 2.4
m/s). Le nageur atteint donc sa vitesse maximale en moins d’une seconde, ce qui n’est pas
le cas dans les autres sports de course. On appelle départ les 15 premiers mètres d’une course
de natation. Le choix de cette distance est dicté par le règlement FINA. En effet, l’article
SW5.3 stipule “Il est permis que le nageur soit complètement immergé pendant le virage,
et sur une distance de 15 mètres au plus après le départ et chaque virage. À partir de ce
moment-là, la tête doit avoir coupé la surface de l’eau.” [13]. Pour les mêmes raisons nous
considérerons la position de la tête comme repère au passage des 15 mètres.
Chp 4
Figure 4.1 – Vitesse moyenne par tranche de 10 mètres sur quatre courses de 50 mètres.
Alexander Popov a été champion olympique en 1992 et en 1996. Florent Manaudou a été
champion olympique en 2012 et vice-champion olympique en 2016. Caeleb Dressel a été
champion du monde en 2017.
Le départ est primordial sur les courses de sprint (il représente 26 % du temps de la course
sur un 50 mètres [109]). Les capacités mobilisées sont très différentes de celles qui permettent
de nager rapidement (explosivité des jambes lors de la propulsion sur le plot, souplesse ar-
ticulaire lors de la phase d’ondulation), ce qui favorise la diversité des stratégies lors des
départs des différents nageurs : différence de profondeur maximale, de longueur de coulée,
du nombre d’ondulations... Sur la figure 4.1, nous comparons l’évolution de la vitesse du
champion olympique de 1992, Aleksander Popov, dit le Tsar, avec celle des meilleurs sprin-
teurs des années 2010, Caeleb Dressel, champion du monde en 2017, et Florent Manaudou,
champion olympique en 2012. La vitesse dans les 10 derniers mètres n’a pas évolué en 25
ans de compétition. En revanche les différences de vitesse sont très importantes sur les 15
premiers mètres. La marge de progression semble donc se situer majoritairement dans le
départ.
On se propose dans ce chapitre d’analyser le départ étape par étape. L’objectif est d’établir
les bases nécessaires à une optimisation globale de la trajectoire.
Description du départ On décrit ici les départs de papillon et de crawl. Les différences
avec la brasse et le dos seront données à la fin de ce paragraphe. Le nageur est placé sur un
90
4.1. Le départ, instant clé des courses de sprint
Figure 4.2 – Plot utilisé en compétition depuis 2010. Images extraites de [110]. (a) Vue
latérale du plot et positionnement par rapport au bord du bassin. (b) Dimensions du plot
(vue latérale) (c) Dimensions du plot (vue de face) .
plot de départ tel que montré sur la figure 4.2. Depuis 2010, les plots ont une partie arrière Chp 4
réglable, qui permet au pied arrière de pousser plus fort. Avant cette amélioration du plot,
on distinguait deux techniques de départ : les pieds joints (grab start) ou les pieds décalés
(track start). Depuis le changement de plot, le track start s’est imposé.
Un long coup de sifflet indique au nageur de se placer sur le plot. Au signal “À vos marques”,
le nageur se met en position de départ. Puis, après un laps de temps d’environ 1 seconde,
un signal sonore universel donne le signal de départ. C’est à cet instant que nous définirons
la référence de temps t=0. Nous représentons les 15 premiers mètres du départ d’un na-
geur sous forme de chronophotographie sur la figure 4.3. Chaque image est espacée de 0.5
secondes. Le nageur pousse d’abord avec la jambe arrière, qui décolle avant la jambe avant.
Après une phase de vol de l’ordre de 0.3 secondes, le nageur arrive dans l’eau en position
“flèche”. La première partie de la phase sous-marine est passive. On peut toutefois observer
une mini-ondulation afin de réorienter le corps. Après cette phase passive, le nageur com-
mence à onduler, jusqu’à atteindre la surface. Une fois à la surface, il se met à nager dans
la technique choisie (papillon ou crawl). Le règlement stipule que la tête doit avoir percé la
surface au passage des 15 mètres. C’est ici que s’arrête la phase de départ.
En dos, la différence concerne uniquement la position de départ, puisque le nageur est face
au mur, juste au-dessus de la surface de l’eau. Le déroulement est ensuite le même que
pour le crawl et le papillon. En brasse, la position de départ est la même qu’en crawl ou
en papillon mais le règlement diffère pour la partie sous-marine. La limite des 15 mètres
n’existe pas, mais le règlement n’autorise qu’une unique ondulation, suivie d’une traction de
bras et d’un ciseau de brasse. Pour la suite, on étudiera les départs de crawl et de papillon.
Les nageurs qui ont participé aux expériences de ce chapitre figurent dans le tableau 4.1.
On représente sur la figure 4.4 une trajectoire mesurée lors de départs réalisés avec l’athlète
A11. Nous découpons la trajectoire en différentes parties, correspondant à des mouvements
différents de la part du nageur : la phase de contact avec le plot (block time), la phase de vol
(ou plus précisément de chute libre), la phase aquatique passive, la phase d’ondulation puis
91
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
Temps (s)
0 0.5 1
Temps (s)
1.5 2 2.5
Chp 4
Temps (s)
3 3.5 4
Temps (s)
4.5 5 5.5
Figure 4.3 – Chronophotographie des 15 premiers mètres de A11. Chaque image est espacée
de 0.5 secondes. Le code couleur utilisée sur la frise est le même que pour les différentes
phases de la trajectoire schématisées sur la figure 4.4.
92
4.2. Étude de la partie aérienne
Entrée
Décollage Activation
Reprise de nage
Figure 4.4 – Trajectoire du centre de masse du nageur A11 lors d’un départ. Les couleurs
représentent les différentes phases. Le code couleur utilisé est le même que sur la frise
chronologique des chronophotographies de la figure 4.3.
la phase de nage. Cela définit naturellement les transitions associées : le décollage, l’entrée
dans l’eau, l’activation des ondulations, et la reprise de nage. Ces transitions de phase sont
très importantes puisqu’elles sont techniquement exigeantes, demandant le bon timing. La
suite de ce chapitre permet l’analyse et la modélisation de chaque phase séparément.
Chp 4
4.2 Étude de la partie aérienne
Nous étudions d’abord la première phase du départ : la poussée sur le plot. La référence t=0
est prise au moment du signal de départ. On doit donc pour analyser le départ donner un
signal réglementaire de compétition. Cela peut être justifié par plusieurs arguments. Cela
permet d’abord de prendre en compte le temps de réaction dans l’évaluation du nageur
(on appelle temps de réaction l’intervalle de temps entre le signal de départ et le début de
poussée du nageur sur le plot). De plus, le début de poussée du nageur, même avec un plot
instrumenté est assez flou : le centre de masse bouge très peu à cet instant et les variations
de force sont assez “plates”. Enfin, pour que le départ se rapproche le plus d’un départ de
compétition, il faut que le nageur soit le plus proche possible des conditions d’un départ
réel. En donnant les mêmes ordres et le même signal de départ, nous le plaçons dans les
conditions de compétition.
Le nageur réalise un départ de compétition sur un plot instrumenté par la société Kistler
(Plot Kiswim). Ce plot est composé de trois plate-formes de forces indépendantes qui per-
mettent d’obtenir la contribution du pied avant, du pied arrière ainsi que des 2 bras sur 3
voies séparées. Les nageurs poussent sur le plot entre le signal de départ et le décollage du
pied avant (figure 4.5). Les signaux de force sont représentés sur la figure 4.6. On constate
que le temps de contact avec le plot est de l’ordre de 0.6 s. Entre t = 0 et t = trec , les signaux
sont stationnaires : la somme des forces compense le poids de l’athlète. Ensuite, le nageur
tire sur les bras et se propulse avec son pied arrière. Il faut souligner que la force des bras
est dirigée vers le bas, alors qu’on pourrait plus s’attendre à une force vers l’avant. C’est
d’abord le pied arrière qui assure la plus grande part de la force totale jusqu’au décollage
93
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
1 2 3 4 5
6 7 88 99 10
Figure 4.5 – Chronophotographie de la phase de poussée. L’écart entre chaque image est
de 0.07 secondes. Le signal de départ est donné à t = 0 (image 1). Le nageur décolle à
t = tdec (image 10).
Le nageur se propulse sur le plot avec ses jambes, mais également avec ses deux bras. Un
Chp 4 bilan des forces est présenté sur la figure 4.7. On écrit l’équation du mouvement 2D lors de
la phase de poussée :
dV⃗
M = F⃗av + F⃗ar + F⃗bras + M⃗g . (4.1)
dt
L’équation du mouvement peut être adimensionnée par le poids :
⃗
1 dV
= f⃗av + f⃗ar + f⃗bras − ⃗ez , (4.2)
g dt
où l’on note f⃗ = F⃗ /(M g) et f⃗prop = f⃗av + f⃗ar + f⃗bras . Dans cette analyse, trec le temps de
réaction du nageur, c’est-à-dire que le nageur commence à pousser sur le plot à t = trec (figure
4.6-d). En pratique, on estime trec en définissant un seuil de variation de la force totale. On
nomme tdec l’instant où le pied avant décolle et tP = tdec − trec le temps de poussée. Enfin,
on définit la vitesse adimensionnée ⃗v = V ⃗ /(gtp ), et l’intégration de l’équation 4.2 permet
d’obtenir :
Z tdec
1
⃗vdec = f⃗prop − ⃗ez dt. (4.3)
tP trec
On comprend par cette équation que ∥⃗vdec ∥ est liée à l’angle de propulsion. L’athlète décolle
d’autant plus vite que la direction de poussée est alignée avec −⃗ez . Cela a déjà été observé
par Takeda, qui remarquait une augmentation de la vitesse de décollage quand l’angle de
décollage diminue [20]. Dans notre démarche visant à définir un problème d’optimisation
pour le départ, nous ne pourrons donc pas définir une vitesse de décollage propre au nageur
et chercher un angle de décollage optimal comme cela peut être fait sur certains problèmes
balistiques classiques. Il nous faut ainsi un modèle de poussée pour faire varier l’angle de
décollage. Dans le but de ne pas multiplier les paramètres, on définit une force de propulsion
f0 = F /(M g) que l’athlète génère dans la direction de son choix pendant l’intervalle [trec ,
tdec ]. F représente la force moyenne de poussée des jambes et des bras (figure 4.6-d). Nous
supposons que cette force ne dépend pas de la direction de poussée.
On note θ l’angle entre la direction de cette force et l’horizontale. La force de propulsion
94
4.2. Étude de la partie aérienne
(a) (b)
(c) (d)
𝐹 Chp 4
𝑀
𝐹𝑧
𝐹𝑦
𝑡𝑃
𝑡𝑟𝑒𝑐 𝑡𝑑𝑒𝑐
Figure 4.6 – Signaux de force horizontale (Fy ) et verticale (Fz ) des 3 plateformes du plot
instrumenté lors d’un départ du nageur A11 : bras (a), pied arrière (b) et pied avant (c).
Les courbes noires correspondent à la norme de la force.
adimensionnée s’écrit donc f⃗prop = f0⃗eθ . L’angle θ peut être mesuré expérimentalement.
R tdec R tdec
Ainsi, en définissant Fy = trec Fy (t)dt/tP et Fz = trec Fz (t)dt/tP (figure 4.6-d), on a :
Fy
θ = arctan . (4.4)
Fz
Il nous faut également limiter la longueur sur laquelle le nageur peut pousser. Ainsi, on
définit la longueur DP que le centre de masse peut effectuer avant le décollage. Le nageur
est “groupé” (figure 4.7) sur le plot à t=0 et décolle jambes tendues, ce paramètre DP
représente donc la longueur qu’effectue le centre de masse pendant la phase de poussée.
L’équation du mouvement sur le plot s’écrit donc :
95
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
𝐌𝒈
𝑭𝒂𝒓
𝑭𝒃𝒓𝒂𝒔
𝑭𝒂𝒗
Figure 4.7 – Bilan des forces lors de la phase de poussée. Le nageur est en contact avec le
plot via ses deux pieds et ses mains. On regroupe ici la force de propulsion des 2 mains.
Z t Z tdec
1 DP
⃗v (t) = (f0⃗eθ − ⃗ez ) dt et ∥ ⃗v (t)dt∥ = . (4.5)
tP trec trec gtP
Les équations 4.6 et 4.7 nous donnent 3 équations scalaires qui relient les paramètres du
modèle DP , f0 et θ aux grandeurs évaluant la poussée Vy,dec , Vz,dec , et tP . Ainsi si on connaı̂t
DP et f0 , ces équations nous permettent de chercher le meilleur angle de poussée θ pour avoir
des valeurs de tP , Vy,dec , Vz,dec qui donnent la trajectoire la plus rapide. Mais à l’inverse,
connaissant tP , Vy,dec , Vz,dec , on peut trouver DP , f0 et θ. C’est de cette manière que nous
allons déterminer les paramètres du modèle DP et f0 pour chaque nageur.
96
4.2. Étude de la partie aérienne
(a) (b)
Figure 4.8 – Comparaison entre les prédictions du modèle et les valeurs expérimentales
pour les nageurs A3, A11, A12, A13 et A14. (a) Force de propulsion totale moyenne adi-
mensionnée. (b) Angle de poussée.
Chp 4
nous utilisons est très simplifié, avec une force de poussée constante dirigée toujours le long
d’un même axe, il est donc satisfaisant d’observer que les paramètres du modèle peuvent
être reliés à des grandeurs physiques mesurées avec une aussi bonne précision.
Valeurs numériques Les résultats numériques pour les 5 nageurs sont répertoriés dans
le tableau 4.2. La force de poussée varie entre 1.15 et 1.45. Si f0 avait été grand devant 1,
d’après l’équation 4.3, la norme de la vitesse pouvait être prise indépendante de l’angle de
poussée. Cela n’est pas le cas, ce qui valide la nécessité d’un modèle qui prend en compte
l’influence de l’angle de poussée sur la norme de la vitesse de décollage.
L’angle de poussée varie entre 41 et 49 ◦ . Les nageurs avec la plus faible force de poussée
adimensionnée f0 ont l’angle de poussée le plus élevé. Pour combattre la gravité, ces athlètes
doivent compenser leur manque de force. Malgré cela, la nageuse A13 décolle avec un angle
de −10±3 degrés contre des angles variant entre −5 ◦ (A14) et 1 ◦ (A3) pour ses homologues
masculins. Il faut noter que les incertitudes de le tableau 4.2 concernent le paramètre θ du
modèle, obtenu par propagation des incertitudes de mesure des vitesses de décollage et du
temps de poussée.
Les valeurs de distance de poussée DP varient entre 1.09 et 1.20 m. Sur la figure 4.4, le
nageur décolle en y = 1 m. Les valeurs de D mesurées sont donc cohérentes avec le sens
physique que nous lui donnons.
La phase de vol est définie comme la phase entre le décollage du pied avant et l’entrée dans
l’eau du centre de masse. L’équation du mouvement dans cette phase est très simple :
97
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
Tableau 4.2 – Caractéristiques des 5 nageurs testés lors de la phase de poussée. Les
vitesses de décollage ainsi que le temps de propulsion sont mesurés grâce à la vidéo. f0 , θ et
DP sont obtenus grâce aux équations 4.6 et 4.7.
Chp 4
Figure 4.9 – Comparaison entre la trajectoire du centre de masse (cdm) obtenue grâce à
la vidéo et le modèle balistique décrit dans l’équation 4.8. Les points noirs correspondent
à la trajectoire du centre de masse pendant la phase de vol. La courbe rouge correspond à
l’intégration de l’équation avec les conditions initiales (Vy,dec , Vz,dec ) qui minimisent l’écart
aux points noirs (le couple de points (ydec , zdec ) est obtenu expérimentalement). Ici, Vy,dec =
4.7 ± 0.1 m/s et Vz,dec = −0.1 ± 0.1 m/s .
dV⃗
M = M⃗g . (4.8)
dt
On néglige la force de traı̂née aérodynamique. En effet, du chapitre 2, on déduit que
SCD =0.1 m2 . Pour une vitesse de décollage qui vaut au maximum 6 m/s, cela fait une
force de traı̂née de Fdrag = 2 N, ce qui représente 0.2 % du poids d’un nageur de 100 kg. On
néglige également les forces hydrodynamiques qui s’appliquent sur le haut du corps juste
avant que le centre de masse n’arrive dans l’eau. Nous reviendrons plus tard sur cette hy-
pothèse. On superpose la trajectoire du centre de masse à l’intégration de l’équation 4.8 sur
la figure 4.9.
On cherche les valeurs de vitesse de décollage (Vy,dec , Vz,dec ) qui permettent une intégration
de la trajectoire la plus proche possibles de la trajectoire expérimentale. Cela est plus précis
que de dériver la position au moment du décollage, qui peut être bruitée (notre mesure de
la position du centre de masse par les tables de De Leva n’est pas infiniment précise). Nous
observons que l’approximation balistique est satisfaisante, si l’on excepte les deux derniers
points pour lesquels les trajectoires s’écartent légèrement. Nous modéliserons la traversée
de l’interface dans la partie consacrée au modèle passif aquatique.
98
4.3. Phase aquatique passive
Une fois entré dans l’eau, les nageurs observent une période passive avant d’activer leurs
ondulations. Cette section permet de comprendre la physique sous-jacente à cette phase
passive, et de voir comment le nageur parvient à courber sa trajectoire.
La phase passive est très courte lors d’un départ de compétition (généralement autour de
0.5 secondes). Il s’agit d’un intervalle de temps très court pour analyser la dynamique de
cette phase du départ. Pour cette raison, nous demandons au nageur d’effectuer un départ
“glissé”. L’objectif est d’aller le plus loin possible en restant passif. Ainsi nous obtenons une
trajectoire d’environ 10 mètres, qui peut être plus facilement analysée.
(a) (b)
Chp 4
(c)
Figure 4.10 – Test de départ passif (nageur A12) : le nageur pousse sur le plot puis reste
passif une fois entré dans l’eau. La consigne est d’aller le plus loin possible sans ondulation.
(a) Évolution de la vitesse verticale et horizontale en fonction de la position y. (b) Position
du nageur pendant la phase aquatique passive. (c) Trajectoire du centre de masse du nageur.
Nous représentons une trajectoire ainsi qu’une courbe de vitesse (figure 4.10). Nous avons
une zone d’environ 10 mètres (entre y = 4 m et y = 14 m) dans laquelle le nageur est passif.
Notre objectif est de comprendre l’évolution de la vitesse du nageur et sa trajectoire.
Comme montré sur la figure 4.11-a, on considère que le nageur est une plaque, dont la
longueur correspond à la distance des poignets aux chevilles (il s’agit des marqueurs extrêmes
que nous détectons). L’équation du mouvement s’écrit :
dV
⃗
M A + M I2 ⃗ A + F⃗t + F⃗n .
= M⃗g + Π (4.9)
dt
99
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
ΠA F𝑛
(a)
Ft
𝑀𝑔Ԧ
(b) 𝑉
𝛼𝑃 𝛽𝑃 𝑒𝑧
𝑒𝑦
Chp 4
Figure 4.11 – Modèle retenu pour les forces s’appliquant sur le nageur, assimilé à une
plaque. (a) Le nageur est soumis à son poids (rouge), la poussée d’Archimède (orange),
et une force hydrodynamique avec une composante parallèle à la plaque (en jaune) et une
composante orthogonale à la plaque. (b) Définition des angles sur notre modèle de plaque.
αP est l’angle entre la plaque et l’horizontale. βP est l’angle entre la vitesse du centre de
masse V⃗ et l’horizontale.
Masse équivalente. I 2 est la matrice identité alors que M A est la matrice de masse
ajoutée. Dans le repère lié à la plaque (⃗t, ⃗n) , cette matrice est diagonale. On note :
MA = Ct M et MA = Cn M.
1,1 2,2
D’après les expériences de Caspersen [63], on a Ct = 0.25. Pour la valeur de la masse ajoutée
orthogonale, on prend la valeur correspondant à un cylindre : Cn = 1 [111].
Forces hydrodynamiques. On écrit la force parallèle à la plaque comme F⃗t = −kt V Vt⃗t.
kt = ρSCD /2 correspond au coefficient de traı̂née parallèle à la plaque (on regarde le coef-
ficient SCD associé à la surface jaune sur la figure 4.11-a). kt est en fait le kb utilisé dans
les chapitres 2 et 3. Nous reprenons l’équation 2.9 pour prendre en compte la dépendance
100
4.3. Phase aquatique passive
de kt en fonction de la profondeur :
z/D kt,∞ = 21 ρ(S CD + Swet Cs )
kt (z, Fr) = kt,∞ + kt,w (Fr) e avec .
kt,w (Fr) = 12 ρ Swet Cw (Fr)
D’après les résultats expérimentaux de la section 2.2, on a kt,w (Fr < 0.41)/kt,∞ ≈ 0.25.
De la même manière, on écrit F⃗n = −kn V Vn⃗n où kn est le coefficient associé à la surface
violette. Ce coefficient dépend également de la profondeur :
Pour mesurer proprement kn,∞ et kn,w (Fr), il faudrait réitérer les tests de la section 2.2, avec
le nageur en position debout plutôt qu’allongé. La stabilité de ce dispositif reste à prouver.
Pour la suite nous ferons l’hypothèse suivante :
Pour |z| ≫ D, cette approximation est exacte. Les erreurs éventuelles concerneront l’entrée
dans l’eau ainsi que la phase proche de la reprise de nage. Nous pouvons estimer kn,∞ grâce
aux travaux de Hoerner (figure 4.12) [112]. La première position nous donne le coefficient
kn,∞ = ρ/2(SCD ). La dernière position nous donne kt,∞ . Avec ces valeurs on estime kt,∞ ≈ Chp 4
50 kg/m et kn,∞ ≈ 400 kg/m. Nous observons que kt,∞ est deux à trois fois plus important
que celui que nous avons mesuré (voir 2.2). Nous retiendrons également que d’après ces
travaux, kn,∞ /kt,∞ ≈ 7.5.
Figure 4.12 – Travaux de Hoerner [112]. Les surfaces correspondent à 2k/ρ. Elles sont
données en unités “impériales”.
dV
⃗
M A + M I2 ⃗ · ⃗t) ⃗t − kn (z, Fr) V (V
= (1 − CA )M⃗g − kt (z, Fr) V (V ⃗ · ⃗n) ⃗n. (4.11)
dt
On nomme αP l’angle entre la plaque et l’horizontale (voir figure 4.11). Ainsi ⃗t = (cos αP , sin αP )
et ⃗n = (− sin αP , cos αP ). On projette ensuite l’équation 4.11 selon ⃗t et ⃗n :
(1 + Ct )M dV dt − α˙P Vn
t
= −(1 − CA )M g sin αP − kt (z, Fr)V Vt ,
(4.12)
(1 + Cn )M dV dt
n
+ α˙ V
P t = −(1 − C A )M g cos αP − k n (z, Fr)V V n .
101
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
.
a = − (1 − C )M g sin α − k (z, Fr)V 2 cos(β − α ) (1 + C )M ,
t A P t P P t
. (4.13)
an = − (1 − CA )M g cos αP − kn (z, Fr)V 2 sin(βP − αP ) (1 + Cn )M .
Nous avons donc une équation pour la trajectoire, en supposant connue l’orientation du
corps au cours du temps αP (t). Pour un objet inerte, il est théoriquement possible de
calculer αP (t), en calculant le couple exercé par les différentes forces décrites sur la figure
4.11-a. Malheureusement, nos observations laissent penser que le nageur exerce un couple
qui vient modifier la dynamique de αP (t). L’inclinaison de la plaque sera donc une donnée
de notre problème. Grâce au réseau de neurone, on mesure l’angle entre le segment cheville-
Chp 4 poignet et l’horizontale. Nous montrons l’inclinaison mesurée αP (t) pour le nageur A12 sur
la figure 4.13. Nous observons une forte variation de l’angle au moment de l’entrée dans
l’eau (de l’ordre de 2 radians par seconde). Après y = y0 , les variations sont beaucoup plus
faibles, et αP est proche de 0. On pourra donc considérer L|α̇| ≪ V .
15
y = y0
0
α P (◦ )
−15
−30
−45
2 4 6 8 10 12 14
y (m)
Pour un nageur donné, on cherche les valeurs de CA , kn,∞ et kt,∞ qui permettent de trouver
la trajectoire (y, z)(t) la plus proche possible de celle observée. On commence l’intégration
(t = t0 ) un mètre sous le niveau de la surface, pour limiter les effets de la traversée de
l’interface Lorsque le nageur n’est pas complètement immergé, il faut effectivement modifier
102
4.3. Phase aquatique passive
le modèle, ce que nous tâcherons de faire par la suite. Comme pour la vérification de la
trajectoire parabolique en phase aérienne, il est risqué de mesurer Vy (t = t0 ) et Vz (t = t0 )
en dérivant la position du centre de masse et de les prendre comme conditions initiales du
problème. Ces valeurs feront donc partie des paramètres à rechercher. On mesure donc y(t =
t0 ) et z(t = t0 ) (qui vaut −1 m a priori). Grâce à la fonction minimize de la bibliothèque
scipy.optimize [43], on cherche les paramètres Vy,0 , Vz,0 , CA , kn,∞ et kt,∞ qui permettent
de minimiser la distance entre les points expérimentaux (yexp , zexp )(t) mesurés par le réseau
de neurones, et la trajectoire (ymod , zmod )(t) obtenue en intégrant l’équation 4.14 avec les
conditions initiales [y(t = t0 ), z(t = t0 ), Vy,0 , Vz,0 ]. Ainsi nous cherchons à réaliser l’objectif
suivant :
Z Ti +t0 q
min (yexp − ymod )2 + (zexp − zmod )2 dt. (4.15)
Vy,0 ,Vz,0 ,CA ,kt,∞ ,kn,∞ t0
(a) (b)
Figure 4.14 – Intégration du modèle passif minimisant l’écart avec la courbe expérimentale
(Nageur A12). (a) Comparaison des trajectoires expérimentales et intégrées. (b) Com-
paraison des vitesses verticales et horizontales. Malgré un bruit certain dans la vitesse
expérimentale horizontale, le modèle permet de capter l’évolution de la position et de la
vitesse du centre de masse du nageur.
Les valeurs trouvées pour les nageurs du groupe de l’INSEP sont représentées dans le ta-
bleau 4.3. Pour déterminer l’incertitude, il faut regarder deux phénomènes distincts : le
choix de la fenêtre de mesure et la répétabilité entre les essais. Nous observons que c’est
la répétabilité entre les essais qui génère la plus grande dispersion des valeurs. On utilise
donc 4 départs différents pour chaque athlète, réalisés quatre jours différents, afin d’observer
les paramètres moyens de chaque athlète. L’incertitude est obtenue en calculant l’écart-type.
103
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
Tableau 4.3 – Paramètres du modèle calculés grâce aux trajectoires passives. Vf corres-
pond à l’estimation du volume d’air dans les poumons, il est calculé grâce au paramètre
CA .
bien que la trajectoire et l’évolution de la vitesse correspondent aux valeurs mesurées dans
le test passif. Cet écart peut venir d’une moins bonne stabilité du nageur lors du test de
glisse maximale que pour le test de traction, où le nageur s’appuie sur la poignée.
Les valeurs de kn,∞ et CA sont plus dispersées. C’est la combinaison de ces deux paramètres
qui permet d’établir l’équilibre vertical du nageur, associées aux valeur de l’angle αP . Ainsi,
de petites erreurs sur la mesure de αP peuvent engendrer des grandes différences sur les
valeurs de kn,∞ et CA . De plus le nageur peut être plus ou moins gainé entre les différents
passages, sachant qu’il s’agit d’un exercice qu’il ne pratique pas régulièrement.
Enfin, nous pouvons comparer les valeurs de kt,∞ et kn,∞ mesurées par Hoerner (figure
Chp 4 4.12). Nos valeurs de kt,∞ sont 2 à 3 fois plus faibles alors que nos valeurs de kn,∞ sont deux
fois plus faibles. Enfin, notre coefficient kn,∞ /kt,∞ varie entre 9 et 14. Cela est plus grand
que la valeur mesurée par Hoerner (7.5). Les ordres de grandeur sont cohérents avec ceux
mesurés par Hoerner sans que les valeurs ne coı̈ncident parfaitement.
Figure 4.15 – Répartition du nageur schématique entre l’air contenu dans les poumons, et
l’eau dans tout le reste du corps. Cela permet d’estimer le volume Vf à partir du coefficient
du modèle CA .
Nous pouvons toutefois discuter les valeurs trouvées de CA . Supposons que le nageur est
constitué d’eau, et d’une poche d’air de volume Vf dans les poumons (figure 4.15). Alors
la poussée d’Archimède vaut ρeau (Vf + Vnageur )g. Sachant que M = ρeau Vnageur , on obtient
Vf = (CA − 1)M/ρeau . En suivant ce raisonnement, les nageurs ont un volume d’air dans les
poumons allant de 1.6 à 3.3 litres (voir tableau 4.3). D’après la ligue pulmonaire suisse [113],
la capacité des poumons totale est de 3.5 à 4 litres, sachant que les poumons ont toujours
un volume d’air d’au minimum 1 litre même en fin d’expiration. On constate donc que les
valeurs que nous estimons pour Vf sont cohérentes avec les valeurs d’air contenues dans les
104
4.3. Phase aquatique passive
Nous avons désormais un modèle fiable loin de la surface. En course, la phase passive se
produit cependant proche de la surface, puisqu’elle succède à l’entrée dans l’eau. Il est donc
nécessaire de corriger notre modèle pour rendre compte de la physique en jeu lors de la
traversée de l’interface et relier ainsi la trajectoire aérienne à la trajectoire aquatique.
𝐿𝑖𝑚 𝑒𝑧
𝛾𝑃 = 𝑒𝑦
𝐿
Gx
z=0 𝛼𝑃
Chp 4
Figure 4.16 – Illustration des notations utilisées lors de la phase d’entrée dans l’eau du
nageur. Nous définissons la part de volume immergé γP .
105
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
partir du moment où le centre de masse du nageur est immergé. On décrit l’évolution des
coefficients kn et kt en fonction du volume immergé γP :
kn (γP , z, Fr) = kn (γP = 1, z, Fr)fL (γP ),
(4.18)
kt (γP , z, Fr) = kt (γP = 1, z, Fr)fL (γP ),
où l’on définit la fonction fL , fonction de lissage de la manière suivante :
fL (γP ) = 1 si γP > 0.6,
fL (γP ) = 0 si γP < 0.4, (4.19)
fL (γP ) = (γP − 0.4)/0.2 sinon.
Massesajoutées.
La masse immergée
du nageur vaut γP M , on prend donc une masse
ajoutée M A = γP Ct M et M A = γP Cn M . Cela revient donc à remplacer Ct par
1,1 2,2
γP Ct et Cn par γP Cn dans les équations 4.12.
Chp 4
.
an = − (1 − γP CA )M g cos αP − kn (γP , z, Fr)V 2 sin(βP − αP ) (1 + γP Cn )M .
(4.20)
Pour valider ce modèle, nous reprenons la trajectoire de départ passif en changeant le point
de départ de l’intégration (on prend z0 = 1 m). Les vitesses initiales sont obtenues en faisant
une régression sur toute la phase aérienne, afin d’éviter le bruit de mesure.
La trajectoire ainsi que les évolutions de vitesses du modèle sont comparées aux données
expérimentales (figure 4.17). Le modèle développé rend bien compte de la trajectoire du
nageur, si l’on excepte un léger écart au moment de l’entrée dans l’eau, où les courbes de
position et de vitesses verticales s’écartent légèrement.
Nous disposons donc d’un modèle capable de prédire la trajectoire à partir de la vitesse et
de l’angle de décollage du centre de masse.
106
4.4. Ondulations et reprise de nage
(a) (b)
Figure 4.17 – Comparaison du modèle présenté équation 4.20 avec les données
expérimentales. (a) Trajectoire du centre de masse. (b) Évolution des deux composantes
de la vitesse en fonction de la position. La trajectoire est intégrée à partir de zG = 1 m.
Chp 4
Figure 4.18 – Chronophotographie d’un cycle d’ondulation lors d’un départ arrêté. L’in-
tervalle de temps entre chaque image est 0.06 s.
Un ajustement de la courbe (figure 4.19-a) permet ensuite de déterminer les valeurs de V∞,c
et τc . Le raisonnement est différent de la section 2.4 : nous cherchons à trouver simultanément
107
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
(a) (b)
Figure 4.19 – Évolution de la vitesse lors des deux départs arrêtés pour le nageur A3. (a)
Départ arrêté en ondulation. (b) Départ arrêté en nage complète à la surface. Les courbes
rouges correspondent aux vitesses expérimentales. Les courbes noires correspondent au
couple (V∞ ,τ ) donnant l’évolution de vitesse la plus proche de la vitesse expérimentale. Nous
déduisons ensuite la force de propulsion et le coefficient de résistance grâce aux équations
4.23 et 4.30.
Athlète Sexe M (kg) τc (s) V∞,c (m/s) Fc (N) ka,c (kg/m) Vact (m/s)
Chp 4 A3 M 89 1.11 1.66 166 61 2.1
A11 M 86 1.41 1.81 138 42 2.5
A12 M 76 1.74 1.75 95 31 2.6
A13 F 72 1.95 1.34 62 35 2.3
A14 M 82 1.50 1.83 125 37 2.6
Fc et ka,c alors que précédemment, nous mesurions Fprop en nage attachée et nous cherchions
la valeur de ka qui donnait les valeurs de V∞ et τ les plus proches des valeurs expérimentales.
Finalement, on obtient la force de propulsion en ondulation Fc et le coefficient de traı̂née
en ondulation ka,c :
V∞,c M + Ma
Fc = (M + Ma ) et ka,c = . (4.23)
τc V∞,c τc
dV
⃗
M A + M I2 ⃗ A + F⃗ a + F⃗ a + F⃗prop .
= M⃗g + Π (4.24)
t n
dt
108
4.4. Ondulations et reprise de nage
Le poids et la poussée d’Archimède ne sont pas modifiés par rapport au modèle passif.
Les forces normales et tangentielles à la plaque ont toujours la même forme, mais le coeffi-
cient est différent. Ainsi, kt,∞ est remplacé par ka,c (ka,c a été évalué loin de la surface). On
suppose que le rapport entre coefficient de traı̂née active et passive est le même pour le coef-
ficient orthogonal à la plaque que pour le coefficient tangentiel. Les deux forces tangentielles
s’écrivent ainsi :
a ka,c
Ft = − kt,0 kt (z, Fr)V Vt ,
(4.25)
F a = − ka,c k (z, Fr)V V .
n kt,0 n n
.
ka,c 2
a
t = Fc − (1 − CA )M g sin αP − kt,0 kt (z, Fr)V cos(βP − αP ) (1 + Ct )M ,
.
an = ka,c 2
− (1 − CA )M g cos αP − kt,0 kn (z, Fr)V sin(βP − αP ) (1 + Cn )M .
(4.26)
dV
(M + Ma ) = −ka,c V 2 + Fc .
dt
La vitesse d’activation optimale est donc :
s
Fc
Vact = . (4.27)
ka,c − kt,∞
On représente une illustration graphique de cette vitesse d’activation (figure 4.20). L’activa-
tion des ondulations à V = Vact permet de minimiser la décélération. Nous sommes capables
de déterminer Vact pour les nageurs à partir de nos essais. kb est obtenu grâce au test de
traction (section 2.2) ou grâce au départ glissé (section 4.3). Pour déterminer le coefficient
de trainée actif en ondulation et la force de propulsion, nous utilisons le départ arrêté en
ondulation.
Une méthode expérimentale a également été proposée par Lyttle [25]. Cela consiste à tracter
le nageur à différentes vitesses, de la même manière que ce qui est fait dans la section 2.2
109
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
𝑉∞,𝑐 𝑉𝑎𝑐𝑡
Figure 4.20 – Comparaison de l’accélération subie par le nageur dans le cas passif (en rouge)
et dans le cas actif (en noir). On prend les valeurs suivantes (athlète A11) : kt,∞ = 20 kg/m,
ka = 42 kg/m et Fc = 138 N. Pour les vitesses supérieures à Vact , le nageur doit rester passif.
Quand sa vitesse atteint Vact , il doit commencer à onduler pour décélérer moins rapidement,
et atteindre V∞,c . Ici, Vact = 2.46 m/s.
concernant l’évaluation des résistances. Pour chaque vitesse, le nageur réalise un passage
passif et un passage en ondulation et on mesure la tension dans le fil. Cela permet de me-
surer −kt,∞ V 2 et −ka,C V 2 + Fc en fonction de V. On obtient ainsi la vitesse pour laquelle
Chp 4 ces deux termes sont égaux, qui correspond à la vitesse d’activation optimale.
Ce raisonnement unidimensionnel ne peut pas être utilisé dans notre cas pour connaı̂tre la
vitesse d’activation optimale pour un nageur. En effet, la trajectoire est à 2 dimensions (en
négligeant les fluctuations latérales), et l’activation des ondulations peut permettre de moins
plonger vers le fond du bassin. Nous avons donc mis en évidence pourquoi il est intéressant
d’observer une phase passive, mais il faudra attendre l’optimisation globale pour connaı̂tre
la vitesse d’activation optimale.
Figure 4.21 – Premier mouvement de bras lors de la reprise de nage. L’intervalle de temps
entre chaque image est 0.06 s. On remarque que le nageur effectue une ondulation pendant
le mouvement de bras, puis commence des battements.
Si l’instant d’activation, transition entre la phase passive et active, résulte d’un choix du
nageur, cela est moins le cas pour la transition suivante, à savoir la reprise de nage. La
transition d’un mode de propulsion par ondulation à la nage de surface est opérée lorsque
110
4.4. Ondulations et reprise de nage
dV
(M + Ma ) = Fs − ka,s V 2 . (4.28)
dt
Nous ne nous intéressons pas aux variations de vitesses intra-cycles, et nous considérons Fs
comme la force de propulsion moyenne à la surface. Le coefficient ka,s étant un coefficient
de résistance à la surface, il n’est donc pas nécessaire de prendre en compte sa variation en
fonction de la profondeur. Chp 4
Nous avons donc 2 paramètres à déterminer : Fs et ka,s . Nous allons réutiliser le test de
départ arrêté pour déterminer ces deux paramètres. L’intégration de l’équation 4.28 s’écrit :
s
t Fs M + MA
V (t) = V∞,s tanh où V∞ = et τs = p , (4.29)
τs ka,s Fs ka,s
sachant que la minimisation de l’écart entre la courbe théorique et la courbe expérimentale
permet d’obtenir les valeurs de τs et V∞,s (voir figure 4.19-a). Nous pouvons ensuite déterminer
nos paramètres Fs et ka,s :
V∞,s V∞,s τs
Fs = (M + Ma ) et ka,s = . (4.30)
τs M + Ma
Fs peut également être évaluée grâce au test de nage attachée. Comme nous devons faire le
test de départ arrêté à la surface pour estimer le coefficient actif, nous choisissons d’évaluer
également la propulsion grâce à ce test, pour faciliter le protocole expérimental.
111
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
Reprise de nage
Activation
𝐿𝐺𝑇
𝒚0 𝒚𝑎𝑐𝑡 𝒚𝑟 𝒚𝑓
Figure 4.22 – Trajectoire du centre de masse du nageur A11 lors d’un départ. Nous illus-
trons ici les notations utilisées au moment des transitions.
Sur la figure 4.17, nous avons montré que notre modèle décrivait la trajectoire du départ
de la poussée jusqu’à la phase passive. Nous évaluons maintenant notre modèle de la phase
passive à la reprise de nage. Nous commençons l’intégration une fois que le nageur est
complètement immergé (z0 = −1 m). La trajectoire aquatique est séparée en trois phases
Chp 4 (figure 4.22) :
1. Pour y ∈ [y0 , yact ], le nageur reste passif. L’équation du mouvement est donnée par
l’équation 4.13. Cette phase se termine quand ∥V ⃗ ∥ < Vact .
2. Pour y ∈ [yact , yr ], le nageur réalise des ondulations. Le mouvement est régi par
l’équation 4.26. Cette phase se termine quand zf ≥ −0.2. Pour z > −0.35, on ajoute
une force de propulsion horizontale Fs . En effet, le nageur commence à se propulser
avec les bras avant d’être parfaitement à la surface (figure 4.21).
3. Pour y > yr , le nageur est à la surface. L’équation du mouvement est donnée par
l’équation 4.28. y correspond à la position du centre de masse. Les temps aux 15
mètres étant généralement mesurés à la tête, nous définissons LGT la distance entre la
tête et le centre de masse. Le temps aux 15 mètres correspond à y = yf = 15 − LGT .
Pour vérifier que notre modèle est pertinent, nous mesurons l’angle αP (t) entre le segment
poignet - cheville et l’horizontale. Cet angle varie pendant les ondulations du nageur et nous
souhaitons l’inclinaison moyenne de la plaque. Pour cette raison nous réalisons une moyenne
de phase (figure 4.23). Sur la figure 4.23, nous comparons l’angle cheville-poignet brut, la
moyenne de phase de cet angle et la valeur discrétisée (cette valeur discrétisée sera discutée
dans le prochain chapitre). Avant que l’ondulation ne commence, il y a un écart de 3 degrés
maximum entre αP et αP , ce qui est un écart acceptable.
Nous comparons ensuite la trajectoire réelle du nageur et celle obtenue grâce aux simulations
sur la figure 4.24-a. Les trajectoires sont très proches. La trajectoire réelle est légèrement
moins profonde que la simulation. Sur les temps aux 15 mètres, on constate un écart de
0.05 s, soit 1%. Sur la figure 4.24-b, nous comparons les vitesses horizontales. Sur la phase
d’ondulation (entre t = 0.65 s et t = 2.90 s), notre simulation sous-estime légèrement la
vitesse, et c’est pour cette raison que le temps aux 15 mètres est moins bon dans notre si-
mulation. Au moment de la reprise de nage, nous observons une accélération due à la double
112
4.5. Modèle sur la phase aquatique complète
20
10
α P (◦ )
0
Pour une inclinaison αP mesurée, notre modèle décrit fidèlement la trajectoire observée
dans les différentes phases du départ (figures 4.17 et 4.24). Nous pouvons donc désormais
chercher la trajectoire optimale.
Conclusion
Nous avons défini et modélisé les cinq phases du départ. Nous devons faire pratiquer 4
tests au nageur afin d’évaluer tous les paramètres nécessaires : un départ de compétition,
un départ “glissé”, un départ arrêté en nage complète à la surface et un départ arrêté en
ondulation, à un mètre de la surface. Le départ de compétition permet de déterminer les
paramètres de poussée. Les intentions du nageur peuvent être différentes pour le départ
glissé, c’est pourquoi nous mesurons le temps de propulsion et la vitesse de décollage sur
un départ “complet”. Ensuite, le départ glissé permet de déterminer les dimensions de la
“plaque équivalente” que représente le nageur. Les deux départs arrêtés permettent quant
à eux l’évaluation de la force de propulsion et du coefficient de résistance en ondulation et
en nage complète. Nous avons également vérifié que le modèle reste valable en enchainant
les différentes phases. Les paramètres de la coulée sont représentés dans le tableau 4.6 afin
de rappeler au lecteur les paramètres des différentes phases et comment ils sont obtenus.
Dans le tableau 4.7, nous rappelons les valeurs des paramètres estimés, et communs à tous
les nageurs.
113
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
𝑦𝑎𝑐𝑡 𝑦𝑟
(a)
Chp 4 (b)
Figure 4.24 – (a) Comparaison entre la trajectoire mesurée et la trajectoire simulée à
partir de notre modèle et de l’angle αP mesuré. Le temps pour arriver aux 15 mètres vaut
T15,r − t0 = 4.35 ± 0.01 s sur la trajectoire réelle et T15,s − t0 = 4.39 s sur la simulation. (b)
Comparaison des vitesses horizontales mesurées et simulées.
Tableau 4.6 – Paramètres du modèle qui sont évalués par un des quatre tests. On rappelle
ici leur définition, leur dimension et quelle expérience permet de les déterminer.
114
4.5. Modèle sur la phase aquatique complète
Tableau 4.7 – Paramètres du modèle communs à tous les nageurs. Nous rappelons leur
définition et leurs valeurs.
115
Chapitre 4. Étude des différentes phases du départ
Résumé du Chapitre 4
Nous étudions les 15 premiers mètres des courses de natation, que nous appelons
“départ”. Le départ est découpé en 5 phases :
2. La phase de vol est une chute libre. La vitesse de décollage est donc facilement
reliée à la vitesse d’entrée dans l’eau.
Nous avons modélisé chacune des cinq phases citées. L’objectif est désormais de cher-
cher la trajectoire optimale du nageur.
116
5
Optimisation globale du départ
Dans ce chapitre, nous cherchons la trajectoire optimale des 15 premiers mètres des courses
de crawl et de papillon. Nous cherchons d’abord la trajectoire optimale à partir des conditions
d’entrée dans l’eau (angle, vitesse et position) mesurées expérimentalement pour discuter
la vitesse d’activation optimale. Ensuite, nous cherchons la trajectoire optimale depuis la
poussée sur le plot afin de trouver l’angle de décollage optimal. En relais, les contraintes
sont différentes et le modèle de poussée est modifié.
Chp 5
Sommaire
5.1 Observations préliminaires . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 118
5.2 Définition de l’optimisation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 119
5.3 Optimisation de la phase aquatique . . . . . . . . . . . . . . . . . 120
5.4 Recherche de l’angle de décollage optimal . . . . . . . . . . . . . . 127
5.5 Modification de l’angle de décollage en relais . . . . . . . . . . . . 128
117
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
2
A3 (6.30 s)
A11 (5.80 s)
A12 (6.26 s)
A13 (7.32 s)
z (m)
A14 (5.96 s)
0
−2
0 5 10 15
y (m)
Figure 5.1 – Superposition des trajectoires des athlètes testés. Le nageur A14 nage le
papillon alors que les autres nagent le crawl. Les caractéristiques des athlètes figurent dans
le tableau 4.1. Les temps entre parenthèses correspondent aux temps où la tête de l’athlète
est en y = 15 m. Ce temps est donné avec une précision de 0.02 s.
Sur la figure 5.1, nous comparons les trajectoires de départ des 5 nageurs testés. Nous ajou-
tons le temps aux 15 mètres correspondant à chaque trajectoire. Nous observons des formes
différentes, avec des distances de vol différentes, des profondeur maximales différentes et
des longueurs de coulée différentes. Dans le tableau 5.1, nous donnons pour chaque na-
geur, l’angle de décollage, la vitesse d’activation des ondulations ainsi que le temps aux
15 mètres mesurés expérimentalement. Une nouvelle fois, tous n’adoptent pas la même
stratégie. L’échantillon de nageur est certes réduit, mais nous n’observons pas de corrélation
claire entre les temps aux 15 m et les différents choix des nageurs (sur l’angle de décollage
Chp 5 et la vitesse d’activation).
Tableau 5.1 – Caractéristiques des trajectoires des 5 nageurs. On donne le temps aux 15
mètres, l’angle de décollage ainsi que la vitesse d’activation mesurés sur la trajectoire de
chaque nageur.
Quelques études ont déjà cherché à optimiser la trajectoire du départ. Sur la partie aérienne,
la majorité des études se consacrent aux différentes techniques de départ [118, 119, 120].
Depuis l’arrivée des nouveaux plots en 2010 (figure 4.2), la technique de départ ne fait plus
de débat [121].
Concernant la partie aquatique, Tor et al. ont réalisé deux études statistiques sur la forme
des trajectoires de coulées [122, 123]. D’après ces études, le nageur doit activer ses ondula-
tions après y = 6.6 m. Les trajectoires qui donnent le meilleur temps aux 15 mètres sont
celles dont la profondeur maximale vaut z = −0.92 m. Ces conclusions s’appuient sur une
étude statistique.
118
5.2. Définition de l’optimisation
Dans le chapitre précédent, nous avons montré que chaque nageur possède des caractéristiques
différentes. Notre objectif dans ce chapitre est de chercher la trajectoire de départ optimale
théorique qui correspond aux paramètres individuels d’un nageur. Nous cherchons également
l’angle de décollage optimal ainsi que la vitesse d’activation optimale en fonction des ca-
ractéristiques individuelles.
Nous avons validé notre modèle sur les différentes phases du départ dans le chapitre 4. Nous
allons maintenant chercher la trajectoire optimale pour les quatre nageurs de crawl. Dans
un premier temps, nous cherchons simplement la trajectoire la plus rapide, sans prendre en
compte la consommation d’énergie, ce qui a du sens pour les épreuves de sprint.
Pour déterminer le temps d’arrivée aux 15 mètres pris à la tête alors que la trajectoire
concerne le centre de masse, on définit LGT , la distance entre le centre de masse et la tête
du nageur. Ainsi : Z 15−LGT
dy
T15m = .
0 Vy
Nous avons défini les différentes transitions entre les phases du départ dans le chapitre 4 :
décollage du plot, entrée dans l’eau, activation des ondulations et reprise de nage. La plupart
de ces transitions sont “subies” par le nageur : il décolle du plot lorsqu’il a la jambe avant Chp 5
tendue, il rentre dans l’eau quand l’altitude de son centre de masse devient négative (z = 0
correspond à la surface), et il reprend la nage quand son centre de masse est proche de la
surface. La seule transition choisie par le nageur est donc l’activation des ondulations. On
définit Vact la vitesse absolue du nageur au moment de l’activation des ondulations.
Le nageur “choisit” également son angle de poussée. Nous avons fait l’hypothèse forte que
la force de poussée ne dépend pas de l’angle. Nous veillerons donc à chercher à la fois des
trajectoires optimales qui font varier θ et des trajectoires optimales où θ est celui mesuré
sur les trajectoires.
Enfin, le nageur choisit comment il oriente son corps au cours du temps. Contrairement à θ
et Vact , il s’agit d’une fonction du temps αP (t) (figure 5.2). C’est le choix de cette orientation
au cours du temps qui va réellement permettre au nageur de choisir la forme de sa trajectoire.
( )
min T15m zf ≥ −0.2 . (5.1)
θ,Vact ,αP
119
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
𝛼𝑃
Figure 5.2 – Définition de l’inclinaison du nageur αP (t). C’est cet angle sur lequel joue le
nageur pour modifier sa trajectoire. Nous mesurons cet angle expérimentalement grâce au
segment poignet-cheville.
Nous cherchons d’abord la trajectoire optimale après la traversée de la surface. Cela permet
de se concentrer sur la trajectoire aquatique, qui est certainement plus facilement modifiable
par l’athlète. De plus, nous avons montré dans le chapitre précédent que le modèle capture
Chp 5
bien la traversée de l’interface pour des inclinaisons mesurées (on mesure l’angle αP entre
le segment poignet-cheville et l’horizontale comme montré sur la figure 5.2). Rien ne nous
assure que le modèle reste valable si l’inclinaison de la plaque est modifiée au moment de
l’entrée dans l’eau. De la même manière que dans la section 4.3, nous définissons (y0 , z0 ) les
coordonnées du centre de masse au moment où zG = −0.8 m (voir figure 5.3. Les vitesses
correspondantes (Vy,0 , Vz,0 ) sont obtenues en réalisant un ajustement de la trajectoire sur
les 10 points expérimentaux suivant l’instant t0 , afin d’être plus précis qu’avec une dérivée
instantanée de la position.
Reprise de nage
Activation
(Vy,0 , 𝑉𝑧,0 )
𝒛0 𝐿𝐺𝑇
𝒚0 𝒚𝑎𝑐𝑡 𝒚𝑟 𝒚𝑓
Figure 5.3 – Trajectoire du centre de masse du nageur A11 lors d’un départ. Nous illustrons
ici les notations utilisées au début de l’optimisation (t = t0 ).
Pour commencer, nous ne cherchons pas à faire varier la vitesse d’activation. Nous prenons
120
5.3. Optimisation de la phase aquatique
Les valeurs numériques sont rappelées dans le tableau 4.3. L’objectif d’optimisation 5.1
devient donc :
(Z )
15−LGT
dy
min zf ≥ −0.2 . (5.3)
αP y0 Vy
Nous devons déterminer l’orientation optimale du corps αP (t) au cours du temps. Nous nous
plaçons toujours dans l’approximation quasi-statique (la rotation de la plaque est faible de-
vant la vitesse de translation), et supposons que le contrôle du nageur se fait sur la dérivée
α̇P (t). La fonction α̇P (t) est discrétisée en intervalles de temps dt. La stratégie du nageur
est représentée par un tableau de valeur [α̇1 ,α̇2 ,...,α̇n ] où α̇i est la valeur de vitesse angulaire
du corps sur l’intervalle [t0 + (i − 1)dt, t0 + idt]. Les valeurs typiques utilisées sont dt = 0.02
s et n = 300.
On discrétise ensuite les valeurs possibles de α̇. Nous avons mesuré au chapitre précédent
que |α̇max | ≈ 2 rad/s. Sachant que nous commençons l’intégration après le maximum de
vitesse angulaire, nous fixons |α̇| ≤ 1 rad/s. À chaque pas de temps, α̇ peut prendre des
valeurs entre -1 rad/s et 1 rad/s. Les algorithmes génétiques fonctionnent avec des valeurs
discrètes (l’ADN est composé de 4 nucléotides de base), il faut donc discrétiser les valeurs
α̇i . On fixe ω0 = 0.2 rad/s et on définit ki = α̇i /ω0 . ki prend donc des valeurs entre -5 et 5.
On modélise chaque solution par une suite d’entiers de -5 à 5 [k1 ,k2 ,...,kn ]. Finalement, la Chp 5
valeur de α au pas de temps i vaut :
i
X
αi = kj ω0 dt. (5.4)
j=1
Sur la figure 4.23, nous observons que le choix de ω0 permet de suivre parfaitement l’évolution
de αP .
Nous ne cherchons pas à optimiser la valeur de quelques paramètres mais d’une fonction
temporelle. Les méthodes classiques de descente de gradient ne peuvent pas s’appliquer ici.
Nous nous tournons naturellement vers un algorithme génétique [125, 126]. De tels algo-
rithmes permettent d’obtenir une solution approchée dans un temps raisonnable. Il s’agit de
méthodes inspirées de l’évolution des espèces vivantes. Chaque solution [k1 ,k2 ,...,kn ] corres-
pond à un individu. L’ensemble des individus constitue une population (de taille N = 400
environ). On fait évoluer la population sur un certain nombre de générations (ngen = 500).
On représente sur la figure 5.4 le déroulement de l’algorithme génétique.
121
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
Chp 5
où T15m correspond à l’intervalle de temps entre le signal de départ et le passage de la tête
au niveau de la ligne des 15 mètres. En intégrant avec un pas de temps dt, avec un test en
entrée de boucle, on trouve i tel que yi < 15 − LGT et yi+1 > 15 − LGT . On définit
15 − LGT − yi
T15m = t0 + i dt + .
Vy,i+1
Ainsi nous obtenons une précision meilleure que dt pour comparer deux trajectoires (figure
5.5).
P1 correspond à la pénalité des trajectoires qui ne reviennent pas à la surface. Pour favoriser
les solutions proches de respecter cette contrainte, la pénalité dépend de la profondeur finale.
Une solution qui se termine à zf = −2 m est deux fois plus pénalisée qu’une solution qui
se termine à zf = −1 m. On prend P1 = 1000 s/m. L’objectif est de toujours favoriser une
trajectoire qui remonte à la surface par rapport à une trajectoire qui termine sous l’eau,
aussi rapide soit-elle.
122
5.3. Optimisation de la phase aquatique
𝑦𝑖+1 x
15 − 𝐿𝐺𝑇
𝑦𝑖 x
Figure 5.5 – Interpolation de la position y(t) afin d’obtenir T15m avec une meilleure
précision que dt.
Sélection Pour se ramener au cas initial, on sélectionne les N meilleurs individus dans la
population de taille 2N où figurent la population précédente ainsi que les nouveaux enfants.
On retourne ensuite à l’étape “Sélection des parents”.
123
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
4.80
4.78
4.76
Figure 5.6 – Évolution du meilleur score (en noir) ainsi que du score moyen (en rouge) en
fonction du nombre de générations pour un essai avec les paramètres du nageur A3.
Chp 5
Solution optimale Pour le nageur A11, on compare la trajectoire réelle ainsi que la
trajectoire résultant de l’optimisation (figure 5.7). Les trajectoires sont assez proches. La
trajectoire réelle remonte à pente constante alors que la trajectoire optimale est plus courbée.
Cela peut paraı̂tre surprenant puisque la trajectoire est plus longue que la trajectoire réelle.
Toutefois, la stratégie optimale permet de mieux diriger la force des dernières ondulations
dans la direction de nage. La trajectoire optimale donne un temps T15m − t0 = 4.32 s. C’est
0.03 secondes plus rapide que la trajectoire mesurée et 0.07 secondes plus rapide que la
trajectoire simulée à partir des inclinaisons αP réelles.
On peut ensuite comparer les inclinaisons du corps optimales et réelles (figure 5.8). Les angles
coı̈ncident jusqu’à l’activation des ondulations. Ensuite, la solution optimale est plus inclinée
pendant les premières ondulations. Enfin, proche de la surface, l’algorithme d’optimisation
préconise une inclinaison plus faible que ce qui est observé en réalité. Avec la stratégie
préconisée par l’algorithme d’optimisation, le nageur est proche d’une position horizontale
lors des dernières ondulations. Cela lui permet de diriger la force de ses ondulations dans la
direction de la course (axe y).
Nous faisons ensuite varier Vact . Nous avons évalué théoriquement la valeur de vitesse d’ac-
tivation optimale sur des trajectoires unidimensionnelles. Pour le nageur A11, nous étudions
le temps aux 15 mètres des solutions obtenues en fonction de la vitesse d’activation, pour
des vitesses qui varient entre 2 et 3 m/s. Nous observons que les différences de temps sont
124
5.3. Optimisation de la phase aquatique
Figure 5.7 – Comparaison entre la trajectoire expérimentale et celle donnée par l’algo-
rithme d’optimisation. Les points sont espacés de 0.08 secondes. La trajectoire optimale est
plus rapide de ∆t = 0.03 ± 0.01 s.
30
15
α P (◦ )
inclinaison optimale
inclinaison réelle
−15 activation des ondulations (y = yact )
début de propulsion des bras (z = −0.35)
nage de surface (y = yr ) Chp 5
−30
0 1 2 3
t − t0 (s)
assez faibles (0.04 s). La courbe est assez plate autour de l’optimum : si le nageur se trompe
de 0.3 m/s (soit environ 0.3 s d’après les courbes de décroissance de la vitesse), la perte est
de l’ordre de 0.01 s. La vitesse optimale théorique unidimensionnelle était de 2.5 m/s. Nous
observons donc que le caractère bidimensionnel de la trajectoire tend à favoriser les vitesses
d’activation légèrement plus élevées (les meilleurs temps sont obtenus entre Vact = 2.5 m/s
et Vact = 2.7 m/s). Pour les valeurs plus grandes que Vact,théo , l’augmentation des résistances
est compensée par une trajectoire plus directe. Activer les ondulations plus tôt (à une vitesse
plus élevée) permet en effet de réduire la profondeur maximale en courbant davantage la
trajectoire.
Nous appliquons l’algorithme d’optimisation en faisant varier la vitesse d’activation pour les
quatre nageurs de crawl. Les résultats figurent dans le tableau 5.2. Nous donnons la vitesse
d’activation expérimentale, les vitesses d’activation optimales pour des trajectoires à une et
deux dimensions. Nous ajoutons le gain potentiel en adoptant la trajectoire optimale, par
rapport au temps mesuré expérimentalement. Les vitesses expérimentales sont toutes plus
faibles que les vitesses d’activation optimales (2D). L’explication vient certainement de la
125
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
4.38
Vact
4.36
T15m − t0 (s)
4.34
4.32
4.30
2.2 2.4 2.6 2.8 3.0
Vact (m/s)
Figure 5.9 – Temps entre la position (y0 , z0 ) et le passage de la tête aux 15 mètres en
fonction de la vitesse d’activation pour le nageur A11. La vitesse d’activation théorique
unidimensionnelle pour ce nageur était de Vact = 2.5 ± 0.1 m/s.
Chp 5 Tableau 5.2 – Vitesses d’activation des quatre nageurs de crawl. Nous comparons les
valeurs expérimentales avec les valeurs optimales unidimensionnelle et bidimensionnelle.
Nous ajoutons également le gain potentiel ∆tG entre la trajectoire optimale et la trajectoire
expérimentale. Pour tous les nageurs, la variation de temps aux 15 mètres en fonction de la
vitesse d’activation est relativement faible (0.01 secondes pour une variation de 0.3 mètres
par seconde autour de l’optimum). Le gain provient surtout du changement de trajectoire.
L’ordre de grandeur du gain estimé ∆tG ≈ 0.1 s peut faire la différence entre une première
et une deuxième place, ou entre une médaille de bronze et une quatrième place. Toutefois, il
faut également regarder le gain potentiel en travaillant certaines qualités du nageur (vitesse
en ondulation, glisse lors de la phase passive), qui peut permettre au nageur de gagner plus
que la variation de la trajectoire.
126
5.4. Recherche de l’angle de décollage optimal
Sur l’exemple donné figure 5.11, on observe que la trajectoire optimale est proche de celle
du nageur A12. On constate que la trajectoire optimale est plus courbée que la trajectoire
réelle, comme dans le cas de l’optimisation depuis z = −1 m.
Grâce à ces simulations, nous pouvons ensuite faire varier l’angle de poussée sur le plot et
rechercher la vitesse de décollage optimale. Nous faisons varier l’angle de décollage de −25◦
à 15◦ . Les temps aux 15 mètres sont représentés sur la figure 5.12. L’angle de décollage
optimal se situe autour entre −10◦ et −5◦ pour le nageur A12 alors que ce nageur décolle
127
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
avec un angle compris entre −5◦ et 0◦ d’après nos mesures. Le nageur est donc proche de
notre optimum théorique. Nous pourrions lui conseiller de décoller légèrement plus vers le
bas.
Sur la même figure, nous représentons aussi les temps aux 15 mètres avec un modèle de
poussée “sans gravité” (la vitesse de décollage ne dépend pas de l’angle de décollage). On
constate un écart de 25◦ entre l’optimum avec prise en compte de la gravité et l’optimum
sans prise en compte de la gravité. Cet écart est très important, il est donc indispensable
de corriger la vitesse de décollage en fonction de l’angle.
6.6
6.5
6.4
T15m (s)
6.3
Figure 5.12 – Temps aux 15 mètres en fonction de l’angle de décollage pour le nageur
Chp 5
A12. En rouge, nous utilisons le modèle de poussée sur le plot décrit dans la section 4.2, qui
prend en compte l’effet de la gravité sur la vitesse de décollage. En bleu, nous utilisons un
modèle de poussée sans gravité (vitesse de décollage indépendante de l’angle de poussée). En
noir, nous représentons les valeurs de temps aux 15 mètres et d’angle de décollage mesurés
expérimentalement pour le nageur A12.
En relais, la phase de poussée est différente du départ individuel. Le nageur au départ doit
être toujours en contact avec le plot lorsque le nageur qui arrive touche le mur. Le temps
passé sur le plot n’est plus important, le nageur peut prendre le temps qu’il souhaite, à
condition de ne pas anticiper le départ, sous risque de disqualification. Ainsi, comme le
montre la figure 5.13, les nageurs partent de l’arrière du plot pour prendre plus d’élan. Sur
notre modèle de poussée, cela correspond à une augmentation du trajet du centre de masse
DP avant que le pied ne décolle. Il y a donc deux manières de gagner du temps en relais :
décoller plus vite grâce à un élan plus grand et commencer la poussée sur le plot avant que
le nageur qui arrive touche le mur.
128
5.5. Modification de l’angle de décollage en relais
Figure 5.13 – Départ de relais. Le nageur se place en arrière du plot puis effectue 2 pas
avant de décoller. Les images sont espacées de 0.09 s.
10
θdec(◦)
0
DP = 1.08 m
DP = 1.15 m
DP = 1.22 m
−10 individuel
relais
4 4.5 5
Vy,dec (m/s) Chp 5
Sur la figure 5.15, nous représentons le temps entre le décollage et l’arrivée aux 15 mètres
en fonction de l’angle de décollage et de la distance de poussée DP . On observe que l’aug-
mentation de la distance de poussée permet de gagner 0.1 seconde. Cela est cohérent avec
les données de la Fédération Française de Natation, qui observe des gains aux 15 mètres
pouvant atteindre 0.2 secondes pour les nageurs de relais qui utilisent la technique décrite
sur la figure 5.13.
L’angle de décollage optimal change avec la distance de poussée DP . Plus DP est grand,
plus le nageur doit décoller vers le haut. Cela est d’autant plus vrai en relais. Le temps de
propulsion est plus important en poussant vers le haut (puisque la distance de poussée est
fixe et la vitesse diminue). Dans le cas des départs de relais, sachant que la poussée peut
être anticipée, le temps de contact avec le plot n’est plus handicapant. Si nous reprenons la
figure 5.14, nous observons que les deux départs de relais sont effectués autour de l’angle de
129
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
6
DP = 1.08 m
DP = 1.2 m
5.9
5.8
T15m (s)
5.7
5.6
5.5
−20 −10 0 10
θdec (◦ )
décollage optimal. En revanche, l’angle de décollage individuel est trop vers le haut. Au lieu
de conserver l’angle de décollage constant, il vaudrait mieux conserver la vitesse de décollage
horizontale constante.
Il existe un second gain de temps lors des départs de relais. Comme mentionné précédemment,
le temps passé sur le plot n’est plus important puisque le nageur peut anticiper le départ,
Chp 5 à condition de toujours avoir un pied en contact avec le plot lorsque son coéquipier touche
le mur. Le gain potentiel est donc de 0.6 secondes, soit le temps de contact du nageur avec
le plot. En gardant une marge de 0.2 secondes pour éviter la disqualification, on obtient
un gain de temps ∆tant = 0.4 secondes, quatre fois plus grand que le gain de temps par
augmentation d’élan. On conseillera donc de privilégier l’entraı̂nement de l’anticipation de
poussée à celui d’augmentation de la distance d’élan.
Tableau 5.3 – Comparaison entre les relais australien (champion olympique) et américain
(vice-champion olympique) en finale du relais 4 × 100 mètres 4 nages féminin aux Jeux
Olympiques 2020. RT1, RT2 et RT3 correspondent aux délais entre la touche du mur par le
nageur arrivant et le décollage du plot par le nageur partant pour les trois passages de relais.
Ce délai est appelé “temps de réaction” par la Fédération Internationale. Nous donnons le
temps officiel ainsi que le temps fictif si toutes les nageuses avaient parfaitement anticipé le
départ.
Dans le tableau 5.3, pour illustrer l’importance de cette anticipation de poussée, nous com-
parons les relais des deux équipes championne et vice-championne olympiques de relais 4 ×
100 mètres 4 nages féminin en 2020. Individuellement, les États-Unis ont été plus rapides.
Le titre leur a toutefois échappé en raison de prises de relais moins bonnes que celles de
l’équipe d’Australie.
130
5.5. Modification de l’angle de décollage en relais
Résumé du Chapitre 5
Nous cherchons la trajectoire optimale de chaque nageur afin de la comparer avec les
trajectoires expérimentales. Cela permet également de discuter la vitesse d’activation
optimale ainsi que l’angle de décollage optimal.
La vitesse d’activation optimale est légèrement plus élevée que la valeur obtenue
pour une trajectoire unidimensionnelle. Elle peut être évaluée à partir du coefficient
de traı̂née passive, du coefficient de traı̂née active et de la force de propulsion en
ondulation.
L’angle de décollage optimal n’est pas universel. Moins le nageur est puissant,
plus il doit décoller vers le bas pour maintenir une vitesse de décollage suffisante.
Chp 5
131
Chapitre 5. Optimisation globale du départ
Chp 6
132
6
Étude du virage
Dans ce chapitre, nous étudions les virages en crawl. En partant du constat que les records
du monde sont meilleurs en bassin de 25 mètres qu’en bassin de 50 mètres, nous cherchons
à quantifier les différents gains lors d’un virage. Nous proposons ensuite un modèle pour
estimer la position idéale pour effectuer la “culbute”. Enfin, la longueur de coulée est discutée
grâce à l’algorithme d’optimisation détaillé au chapitre précédent.
Chp 6
Sommaire
6.1 Déroulement d’un virage de crawl . . . . . . . . . . . . . . . . . . 135
6.2 Les différentes composantes du “Boost du virage” . . . . . . . . . 136
6.3 Position optimale pour enclencher le virage . . . . . . . . . . . . . 138
6.4 Optimisation de la trajectoire de virage . . . . . . . . . . . . . . . 139
133
Chapitre 6. Étude du virage
Si le départ est primordial dans une course de sprint, les virages deviennent importants
quand la distance de course s’allonge. Ainsi, un nageur de 1500 mètres effectue 1 départ
et 29 virages alors qu’un nageur de 50 mètres effectue 1 départ et 0 virage. Le virage est
d’autant plus important en bassin de 25 mètres, bien que les Jeux Olympiques se disputent
en bassin de 50 mètres. Pour un virage de crawl, la règle est similaire à celle du départ : la
tête doit avoir coupé la ligne de surface au passage des 15 mètres. Les stratégies peuvent
donc varier, entre des coulées courtes ou des coulées plus longues. Comme le virage concerne
les courses de plus longue distance, la gestion de l’énergie va également être un paramètre
important. Dans ce chapitre, nous étudions exclusivement le virage de crawl, sachant que
les règles sont différentes dans les autres styles de nage.
Tableau 6.1 – Records du monde masculin et féminin en nage libre en bassins de 25 mètres
et de 50 mètres. On calcule le gain de temps par virage ∆tvirage en divisant l’écart de temps
Chp 6
par le nombre de virages de différence. Enfin, le gain de distance par virage ∆yvirage est
obtenu en multipliant le temps gagné par la vitesse moyenne.
Il faut toutefois être prudent avec les records du monde en petit bassin, puisque les compétitions
les plus importantes se disputent en grand bassin. Cela peut donc sous-estimer le gain en
virage, puisque les records du monde en petit bassin sont réalisés avec des athlètes en moins
bonne forme. Dans ce chapitre, nous allons expliquer et comparer les différentes origines du
gain en virage, en fonction de la distance au mur lors du virage. Ensuite, nous discuterons
des trajectoires optimales.
134
6.1. Déroulement d’un virage de crawl
1 2 3 4 5
6 7 8 9 10
Figure 6.1 – Chronophotographie d’un départ : deux images sont séparées de 0.4 s. Le
nageur effectue une culbute (1-2-3) puis une vrille (3-4-5). Il effectue ensuite des ondulations
(6-7-8) avant de commencer à nager à la surface (9-10). Pour certains nageurs, la vrille peut
commencer pendant la culbute (les 2 pieds sont l’un au-dessus de l’autre sur le mur) et les
ondulations peuvent démarrer avant la fin de la vrille.
Sur la figure 6.1, nous montrons les différentes phases d’un virage de crawl. Le nageur
effectue une culbute, puis une vrille. Il effectue ensuite des ondulations jusqu’à remonter à
la surface. Certains nageurs poussent vers le haut et n’effectuent pas d’ondulation.
(a) (b)
𝑽𝒅𝒆𝒄
Chp 6
𝑽∞,𝒔
𝒚𝑹
La position horizontale du centre de masse du nageur pendant cette phase est représentée
sur la figure 6.2-a, avec le temps en ordonnée. On observe que l’annulation de vitesse se
produit à yR ≈ 0.8 m. Nous définissons t = 0 à cet instant. La figure 6.2-b représente
l’évolution de la vitesse en fonction du temps pour le même virage. Le nageur commence à
ralentir à une distance y = 2 m du mur. Après l’annulation de vitesse, le nageur accélère
fortement lors de la poussée au mur. Ensuite, le nageur décélère lors de la coulée.
135
Chapitre 6. Étude du virage
En observant la figure 6.2 ainsi que le déroulement du virage (figure 6.1), nous pouvons
donner trois origines au gain de temps du virage.
D’abord, la culbute ne s’effectue pas à yR = 0. Le centre de masse n’effectue donc pas exac-
tement 25 et 50 mètres lorsque le nageur parcourt une longueur mais 25 − 2yR et 50 − 2yR
où yR est la distance entre le centre de masse et le mur au moment de la culbute (voir figure
6.2-a). Nous appelons la distance gagnée pendant cette phase ∆yculbute .
Ensuite, en fin de poussée, le nageur décolle du mur avec une vitesse Vdec qui est supérieure
à la vitesse de nage V∞,s , ce qui va augmenter la vitesse moyenne également. La distance
gagnée par rapport à la nage à une vitesse V∞,s est appelée ∆ypoussée .
Enfin, il est autorisé de réaliser des ondulations pendant les 15 mètres qui suivent le virage.
Les nageurs plus rapides en ondulation qu’à la surface vont donc aller plus vite. La distance
gagnée pendant cette phase est notée ∆ycoulée Comme nous l’avons vu dans la section 4.4.4,
les nageurs de crawl testés vont plus vite à la surface qu’en ondulation. Ce gain sera donc
marginal. On supposera donc ∆ycoulée ≪ ∆yculbute + ∆ypoussée . Dans la section 6.2, nous
utilisons un modèle à une dimension. La profondeur sera étudiée par la suite.
𝒚𝒊𝒏𝒄
𝑽𝒄𝒖𝒍𝒃𝒖𝒕𝒆
𝑽𝒅𝒆𝒄
𝚫𝒚𝒄𝒖𝒍𝒃𝒖𝒕𝒆
𝒕𝒊𝒏𝒄 𝑽∞,𝒔 𝚫𝒚𝒑𝒐𝒖𝒔𝒔é𝒆
𝑽∞,𝒔
𝑽𝒅𝒆𝒄
𝒕𝒅𝒆𝒄
Chp 6 𝚫𝒚𝒄𝒖𝒍𝒃𝒖𝒕𝒆
(a) (b)
Figure 6.3 – (a) Distance du centre de masse du nageur au mur en fonction du temps lors
d’un virage (trait plein rouge). En pointillés noir, on extrapole y(t) pour obtenir la position
du centre de masse s’il devait atteindre y=0 puis “rebondir” sur le mur. En pointillés rouge,
on illustre la vitesse Vculbute = (ydec + yinc )/(tdec − tinc ). Il s’agit de la vitesse équivalente du
nageur pendant la phase de culbute. (b) Comparaison entre la vitesse équivalente du virage
(en rouge) et la vitesse de nage loin du mur (en noir). Le gain en position de la culbute vaut
(tdec − tinc )(Vculbute − V∞,s ). Pour t > tdec , l’évolution de vitesse est donnée par l’équation
6.2. Le gain de distance total pour le virage vaut ∆yculbute + ∆ypoussée .
Nous définissons Vculbute = (yinc + ydec )/(tdec − tinc ). ydec est la position du centre de masse
au moment où les pieds décollent du mur, et tdec est l’instant associé. tinc correspond à
l’instant où le centre de masse commence à décélérer et y = yinc est la position associée.
136
6.2. Les différentes composantes du “Boost du virage”
Avec yinc = 1.52 m, ydec = 1.31 m, V∞,s = 2.05 m/s et tdec − tinc = 0.87 s, nous obtenons
∆yculbute = 1.05 m.
Le nageur “décolle” du mur avec une vitesse Vdec à t = tdec et nous cherchons le gain
de distance par rapport à une vitesse constante V∞,s . Nous sommes dans un modèle uni-
dimensionnel où le nageur reste à la surface. On suppose que le nageur se met à nager
immédiatement après que ses pieds décollent du mur, l’équation du mouvement est donc :
dV
(M + Ma ) = Fs − ks V 2 . (6.2)
dt
Fs est la force de propulsion à la surface, ks est le coefficient de traı̂née active à la surface
(voir section 4.4.4). Nous souhaitons évaluer le gain de distance par rapport à de la nage à
la vitesse V∞,s . L’équation 6.2 nous donne :
t − tdec
V (t) − V∞,s = (Vdec − V∞,s ) tanh −1 ,
τs
où V∞,s et τs sont définis dans la section 4.4.4. Comme illustré sur la figure 6.3-b, on a :
Z ∞
∆ypoussée = (V (t) − V∞,s ) dt. (6.3)
tdec
Chp 6
Finalement le gain en position obtenu grâce à la poussée au mur est :
Avec Vdec = 3 m/s, V∞,s = 2.05 m/s, et τs = 1.15 s, nous trouvons ∆ypoussée ≈ 0.76 m.
Dans le cas où le nageur décolle du mur avec une vitesse plus faible que sa vitesse de nage
loin du mur (Vdec < V∞,s ), ce gain est négatif, et le nageur perd du temps par rapport au
scénario de référence à vitesse constante.
Nous pouvons désormais évaluer le gain de distance pour le virage grâce aux équations 6.4
et 6.1, toujours avec l’hypothèse ∆ycoulée ≪ ∆yculbute + ∆ypoussée :
∆yvirage = yinc + ydec + Vdec τs ln(2) − V∞,s (tdec − tinc + τs ln(2)). (6.5)
Avec les données du nageur A11, on trouve yvirage = 1.81 m. Pour un nageur de 50/100
mètres nage libre, l’écart est cohérent avec les ordres de grandeur relevés en comparant les
records du monde (tableau 6.1). On constate donc que la part la plus importante (58 %)
provient du raccourcissement du chemin parcouru par le centre de masse. L’accélération due
à la poussée sur le mur n’est cependant pas négligeable (42 %).
137
Chapitre 6. Étude du virage
L’équation 6.5 fait intervenir yinc , la distance à laquelle le nageur enclenche le virage. Cette
distance est liée à la vitesse de décollage Vdec . En effet, si le nageur enclenche son virage trop
loin du mur, il a déjà les jambes tendues au moment du contact avec le mur. La vitesse de
décollage sera donc plus faible que si le virage est enclenché plus proche du mur, et que le
nageur peut pousser plus longtemps. Mais un virage effectué loin du mur permet de réduire
la distance parcourue. Quand le nageur doit-il déclencher son virage ? Comment évolue le
gain ∆yvirage si le nageur rate sa position optimale ?
𝒚𝒊𝒏𝒄
𝒅𝒇𝒓
𝒅𝒎𝒖𝒓
𝒚𝑹 𝒚𝒅𝒆𝒄
Figure 6.4 – Définition des différentes longueurs en jeu dans le virage. yinc correspond à la
position du centre de masse au moment d’enclencher le virage. yR est la position du nageur
quand sa vitesse horizontale s’annule. df r = yinc − yR est la distance parcourue par le centre
de masse pendant la phase de freinage. dmur = ydec − yR est la distance parcourue par le
centre de masse pendant la phase de poussée au mur. Dans notre modèle, ydec et df r sont
fixés (ydec = 1.31 m et df r = 0.68 m pour le nageur A11).
Chp 6
Phase de poussée La phase de poussée s’étend de y = yR à y = ydec . ydec est fixé par
la géométrie du nageur (il décolle du mur quand ses jambes sont tendues). Pendant cette
phase l’équation du mouvement est :
dV
(M + Ma ) = fm M g − kb V 2 ,
dt
où fm est la force de poussée adimensionnée des jambes du nageur. On mesure la valeur
moyenne de fm grâce à une plaque instrumentée posée sur le mur. Pour le nageur A11, on
mesure fm = 2, ce qui est plus que la force de poussée sur le plot (fm = 1.45). kb est le
coefficient de traı̂née du nageur. La valeur de kb , ainsi que l’expression de la force de traı̂née
n’est pas évidente. En effet, le nageur entraı̂ne de l’eau pendant son mouvement. Après avoir
fait demi-tour, le nageur doit donc lutter contre le courant qu’il a créé avant le virage. Nous
138
6.4. Optimisation de la trajectoire de virage
V (t) = Vf tanh (t − tR )/τf et y(t) = yR + Vf τf ln cosh(t − tR ) . (6.6)
On en déduit que :
yR = ydec − Vf τf ln cosh(tdec − tR ) . (6.7)
On note le temps de poussée au mur ∆tmur = tdec − tR , et dmur la distance effectuée par le
centre de masse pendant la phase de poussée au mur. L’équation 6.5 peut être explicitée :
Grâce à l’équation 6.8, nous traçons le gain de distance du virage en fonction de yR /ydec ,
l’équation 6.7 nous permettant d’exprimer ∆tmur en fonction de yR /ydec . Si yR /ydec < 0, le
nageur traverse le mur. Si yR /ydec > 1, le nageur rate le mur en faisant le demi-tour trop
tôt. On trace ∆yvirage pour kb = 20 kg/m et kb = 30 kg/m.
Chp 6
Pour répondre à la question qui était posée, A11 doit enclencher son virage à yinc = yR,opt +
df r , soit yR = 1.45 m. L’optimum est assez plat. D’après notre modèle, si le nageur se
trompe de 10 cm sur la position d’enclenchement du virage yinc (par rapport à la position
optimale), la perte serait de 1 cm sur ∆yvirage . L’augmentation du trajet est compensée
par une plus forte vitesse de décollage. Ce modèle nécessiterait une meilleure estimation du
coefficient kb en situation de poussée au mur pour individualiser la position optimale du
virage. La phase de freinage pourrait également être mieux modélisée.
139
Chapitre 6. Étude du virage
1.5
∆yvirage (m)
1
kb = 20 kg/m
kb = 30 kg/m
0.5
yR /ydec mesuré
yR /ydec optimal
0
0 1/2 1
yR /ydec
Figure 6.5 – Gain en distance lors du virage en fonction de la distance au mur minimale
adimensionnée par la distance au mur lors du décollage. Nous traçons ∆yvirage pour deux
valeurs différentes de coefficient de traı̂née.
Chp 6
la fatigue). Nous nous arrêtons donc à y = 10 m. Les deux trajectoires sont assez proches
spatialement. La trajectoire optimale atteint la surface pour y = 7 m alors que yr = 8 m
pour la trajectoire expérimentale. Ces valeurs sont cohérentes avec celles de la littérature :
Veiga et Roig ont étudié la longueur des virages pour des nageurs de 200 mètres de niveau
mondial [27]. Le premier virage a une longueur moyenne de 7.35 ± 0.9 m. Le troisième virage
du 200 mètres a une longueur moyenne de 6.69 ± 1.2 m. La trajectoire optimale est plus
rapide de 0.4 secondes aux 10 mètres. Cette perte de temps semble provenir plus d’un choix
du nageur de baisser son intensité de nage, plutôt que d’un mauvais choix de trajectoire.
Pour aller plus loin, il faudrait prendre en compte la dépense énergétique. En effet, si le
départ est effectué avec les réserves pleines, le virage intervient à un moment de la course où
le nageur est déjà fatigué. Le coût de l’apnée doit donc être évalué. De plus, la vitesse de nage
de surface n’est plus la vitesse maximale. En conclusion, l’algorithme d’optimisation peut
140
6.4. Optimisation de la trajectoire de virage
être adapté au virage mais nécessite des améliorations sur la prise en compte de l’énergie.
Chp 6
141
Chapitre 6. Étude du virage
Résumé du Chapitre 6
Chp 6
142
CONCLUSION
Ccl
143
Ccl
Conclusions et principaux résultats
Notre objectif était de répondre à deux questions. La première concernait la relation fréquence-
vitesse ainsi que la recherche d’une fréquence d’efficacité optimale. La seconde question
concernait la trajectoire optimale en départ et en virage.
En répondant à ces deux questions, nous avons établi des résultats originaux sur les thématiques
suivantes :
1. Relation force - vitesse : Nous avons mis en évidence la loi de Hill en natation. Ces
travaux embryonnaires sont prometteurs pour des études futures, avec l’utilisation de
plaquettes instrumentées.
2. Relation fréquence - vitesse : Nous avons établi un modèle qui explique les deux
régimes observés et qui les relie à des indices déjà existants dans la littérature. Le pre-
mier régime est effectué à indice de coordination constant. Le second régime correspond
à un indice de nage constant. Ces deux régimes permettent aux entraineurs d’obtenir
des indicateurs sur leurs nageurs (les paramètres de chaque régime, la fréquence de
Ccl
transition), et d’observer l’évolution de ces indicateurs au cours du temps (suivi longi-
tudinal). Ce même modèle appliqué au kayak permet également d’expliquer le régime
de force maximale dont la loi de puissance est différente de la natation (V ∝ f 1/3 ).
3. Protocoles d’évaluations de paramètres : Nous proposons des tests simples afin
d’évaluer les paramètres pertinents des nageurs. Les départs arrêtés permettent de
mesurer les forces de propulsion et la résistance active en ondulation et à la surface.
Le départ “glissé” permet d’évaluer la traı̂née passive du nageur ainsi que la force de
poussée sur le plot. Chaque test dure au maximum 10 secondes et engendre peu de
fatigue pour le sportif.
4. Optimisation du départ et du virage : Nous montrons que la courbure de la
trajectoire a un faible impact sur la vitesse d’activation optimale. L’angle de décollage
optimal dépend de la puissance du nageur. Plus le nageur est puissant, plus il doit
décoller vers le haut. Notre modèle de poussée sur le plot peut être adapté aux départs
de relais, qui permet une augemntation de la distance de poussée. Enfin, nous discutons
les différentes composantes du “boost” de virage, ainsi que de la position optimale du
centre de masse pour effectuer le virage.
145
Perspectives et commentaires
Nous avons étudié les différentes étapes d’une course de natation (départ, nage à la surface,
virage). Les modèles présentés peuvent toutefois encore être améliorés sur certains points.
Pour poursuivre ces travaux, il existe d’après nous trois pistes principales.
D’abord, la force de propulsion pourrait être mieux évaluée. Nos essais se sont limités à de la
nage attachée. L’utilisation de plaquettes instrumentées devrait permettre de mieux établir
la relation force-fréquence. Elle devrait également venir appuyer notre modèle fréquence-
vitesse. En effet, à la manière de ce qui a été fait en kayak, cela permettrait de montrer
que la force de propulsion moyenne sur le temps de cycle atteint un plateau dans le second
régime, hypothèse que nous ne sommes pas en mesure de vérifier à l’heure actuelle.
Cela nous permet de faire la transition avec la troisième piste de prolongation du travail : il
serait intéressant de réaliser une optimisation globale de la course avec les différentes étapes
étudiées dans cette thèse (départ, nage, virage). Une telle étude doit prendre en compte la
réserve en énergie. L’objectif est d’atteindre l’arrivée le plus rapidement possible, à condition
d’avoir un stock d’énergie positif en tout moment de la course à la manière de ce qu’a fait
Keller en course à pied [127]. Une telle étude permettrait de discuter ensuite des stratégies
de course (départ rapide, accélération progressive) afin de comparer l’optimum théorique
avec les stratégies observées en compétition. Behncke a proposé une adaptation des travaux
de Keller pour la natation [128]. Il propose notamment un modèle de dépense énergétique en
Ccl virage, qui prend en compte l’effet de l’apnée et l’économie d’énergie à se laisser glisser. À la
manière de ce qu’a fait Keller, les paramètres de ce modèle sont ceux d’un “super-nageur”
et d’une “super-nageuse” capables d’effectuer tous les records du monde, du 50 mètres au
1500 mètres. Il s’agit d’un point de départ intéressant pour développer ensuite un modèle
prenant en compte les paramètres individuels de chaque nageur.
146
ANNEXES
Ccl
147
Ccl
A
Utilisation des quaternions pour
l’intégration du mouvement
Dans cette annexe, nous présentons le contexte mathématique qui permet d’intégrer le mou-
vement en utilisant le corps des quaternions.
An. A
149
Annexe A. Utilisation des quaternions pour l’intégration du mouvement
Nous introduisons ici le corps des quaternions, que nous utilisons ensuite pour intégrer les
rotations. Ce qui est fait dans cette annexe est inspiré de [41, 42]. De la même manière que
les nombres complexes x + yi et le cercle unité x2 + y 2 = 1 représentent les rotations à un
degré de liberté, les quaternions w + xi + yj + zk et l’hypersphère unité w2 + x2 + y 2 + z 2 = 1
représentent les rotations à 3 degrés de liberté.
Le corps des quaternions est un corps de dimension 4. On peut donc voir les quaternions q
comme la somme d’un scalaire et d’un vecteur. Un quaternion q s’écrit
On peut également voir un quaternion comme une partie réelle à un degré de liberté et une
partie imaginaire à 3 degrés de libertés :
Ainsi les quaternions imaginaires purs sont les quaternions à partie réelle nulle. On peut
donc également définir le conjugué de q que l’on nomme q* :
q ⋆ = a − bi − cj − dk = a − ⃗u
Une rotation d’un angle α autour de l’axe ⃗u est représentée par le quaternion unitaire
q = cos(α/2) + sin(α/2)⃗u. Ce quaternion est bien unitaire si on normalise ⃗u.
An. A Réciproquement, étant donné un quaternion unitaire q = a + (b, c, d)⊤ , on définit un angle
α = 2 arcsin(b2 + c2 + d2 ).
Dans cette partie, nous établissons l’équation différentielle qui permet d’intégrer le mouve-
ment grâce aux quaternions. On nomme S(t) l’orientation de l’IMU au cours du temps, et
on nomme S(t = 0) = S0 . On appelle q(t) le quaternion unitaire correspondant à la rotation
150
A.3. Intégration du mouvement
de S0 vers S(t). La dérivée temporelle de ce quaternion sera nommée q̇. S est un vecteur,
on peut donc le considérer comme un quaternion imaginaire pur. On a [129] :
S(t) = q ⊗ S0 ⊗ q ⋆ , (A.3)
dS
= ω ⊗ S. (A.4)
dt
Si on dérive l’équation A.3, on a une deuxième expression pour dS/dt :
dS
= q̇ ⊗ S0 ⊗ q ⋆ + q ⊗ S0 ⊗ q̇ ⋆ . (A.5)
dt
En dérivant cette identité, on montre que q̇ ⋆ = −q ⋆ q̇q ⋆ . On combine les équations A.4 et
A.5, en injectant l’identité précédente, et sachant que qq ⋆ = 1,
Se souvenant de l’équation A.3, nous montrons que : ω ⊗ S = q̇q ⋆ S − Sq̇q ⋆ . Pour simplifier
cette expression, on souhaiterait faire commuter q̇q ⋆ et S. La dérivation de l’identité qq ⋆ = 1
donne q q̇ ⋆ = −q̇q ⋆ . Or qq ⋆ = (q̇q ⋆ ))⋆ . On en déduit que :
(q̇q ⋆ )⋆ = −q̇q ⋆ .
q̇q ⋆ est donc imaginaire pur, tout comme S. Nous obtenons donc :
En revenant à l’équation A.6, nous obtenons : ω ⊗ S = 2q̇q ⋆ qS. On la multiplie à droite par
le quaternion S −1 q, où S −1 est le quaternion inverse de S. Finalement, nous obtenons une
équation différentielle sur q : An. A
1
q̇ = ω ⊗ q. (A.7)
2
Comme à t=0, q représente une rotation nulle, d’après la section A.2, q(t = 0) = 1 + ⃗0. On
peut donc calculer l’évolution du quaternion q(t), grâce aux vitesses angulaires données par
la centrale inertielle. Nous pouvons désormais revenir au calcul des coordonnées de S(t). On
nomme M(q) la matrice de rotation associée au quaternion q. On peut montrer ([129]) que :
a2 + b2 − c2 − d2 2bc − 2ad 2ac + 2bd
2ad + 2bc a2 − b2 + c2 − d2 2cd − 2ab
M (q) =
(A.8)
2bd − 2ac 2ab + 2cd a −b −c +d
2 2 2 2
151
Annexe A. Utilisation des quaternions pour l’intégration du mouvement
Nous avons donc une méthode pour connaı̂tre l’orientation de l’IMU au cours du temps,
en connaissant son orientation initiale. Cette condition initiale n’est pas immédiate, et doit
faire l’objet d’une calibration.
An. A
152
B
La relation fréquence - vitesse
en course à pied
Dans l’annexe suivante, nous détaillons la relation fréquence-vitesse en course à pied. Ce
travail a été effectué pendant le stage de Vincent Trémolières.
An. B
153
Annexe B. La relation fréquence - vitesse en course à pied
B.1 Contexte
Les relations fréquence - vitesse peuvent être définies dans tous les sports de course (voir
chapitre 3). En natation et en kayak, la pagaie et la main ne sont pas “ancrées” dans l’eau.
Nous avons donc souhaité observer la relation fréquence - vitesse dans un mode de locomotion
avec des appuis fixes. En course à pied, les coureurs alternent des phases de propulsion avec
le pied au sol et les phases de vol quand les deux pieds sont en l’air. Contrairement à la
natation, la première phase de l’appui freine le coureur ([130]). Bailey et al. ont aggrégé
les données fréquence - vitesse de plusieurs études pour les regrouper sur une même courbe
(figure B.1) [93]. Quand V → 0, la fréquence (SF) ne tend pas vers 0. Cela définit donc
une fréquence de sur-place naturelle, qui se situe autour de 1 Hz. Aux vitesses élevées, la
distance par cycle (SL) atteint un plateau (qui vaut entre 4 mètres et 4.5 mètres). Toutefois,
ces données concernent des études et donc des athlètes différents. Dans cette annexe, nous
proposons un protocole pour établir la relation fréquence - vitesse d’un athlète donné et de
comparer nos résultats avec ceux de la figure B.1.
Figure B.1 – Évolution de la fréquence (SR) et de la distance par cycle (SL) en fonction
de la vitesse en course à pied d’après les travaux de Bailey et al. [93].
154
B.3. Résultats
mètres sont repérés par les plots bleus. Ces plots sont décalés par rapport au marquage au
sol afin de prendre en compte les effets de perspective.
20 m
Deux athlètes effectuent ce test : un sprinteur de niveau national sur 400 mètres haies, ainsi
qu’un coureur de demi-fond, de niveau national sur 10 kilomètres et semi-marathon.
B.3 Résultats
Les résultats sont présentés sur la figure B.3. Comme attendu, le sprinteur a une vitesse
maximale plus élevée que le coureur de demi-fond. Les courbes sont toutefois très proches.
Comme observé sur la figure B.1, la fréquence n’est pas nulle quand la vitesse est nulle.
Ici, la fréquence de surplace vaut f (V = 0) ≈ 1.15 Hz. De plus, la vitesse est linéaire en la
fréquence à partir d’une fréquence critique fc ≈ 1.45 Hz. Pour f > fc , la distance par cycle
est donc constante et vaut SL ≈ 4.2 m. Nos résultats sont donc fidèles à ceux observés dans
la littérature.
En revanche, l’évolution de la distance par cycle est différente. En natation, la distance par
cycle est une fonction décroissante de la vitesse : aux hautes vitesses, le temps de glisse
155
Annexe B. La relation fréquence - vitesse en course à pied
Figure B.3 – Relation fréquence - vitesse pour les deux athlètes testés.
diminue et la distance par cycle est donc plus faible. En course à pied, la distance par cycle
maximale est atteinte dans le second régime.
Il serait intéressant de mesurer la force de réaction au sol sur les essais en course à pied.
Contrairement à la natation, on s’attend à ce que la force de propulsion augmente dans le
second régime. Dans le cas contraire, il parait difficile de maintenir une distance par cycle
constante en augmentant la fréquence.
An. B
156
C
Etude physique du kayak
Dans l’annexe suivante figure notre article sur l’étude du kayak. Cet article fait suite au
stage de Loup Hasbrouq, kayakiste de niveau national. L’article présente les dispositifs
expérimentaux lors des tests réalisés (départ arrêté, décélération, 10 × 50 mètres progressif ),
les résultats expérimentaux, ainsi que les modèles qui permettent de décrire le mouvement
d’une part et la relation fréquence - vitesse d’autre part.
An. C
157
applied
sciences
Article
On the Physics of Kayaking
Charlie Prétot 1,2 , Rémi Carmigniani 1 , Loup Hasbroucq 2 , Romain Labbé 3 , Jean-Philippe Boucher 3
and Christophe Clanet 2, *
Abstract: The propulsion force of a kayaker can be measured thanks to sensors placed on the paddle.
This article aims at linking this force to the evolution of the velocity of the boat. A general model
is proposed to describe the motion of a K1 kayak. To validate the model and evaluate the relevant
physics parameters, three on-water kayaking trials are proposed: a pure deceleration, a standing
start, and 10 × 50 m with two athletes at the national level. These trials were performed with a force
sensor on the paddle and video recording. We used the deceleration to evaluate the drag of the boat.
Then the standing start showed that there was an active drag coefficient while kayaking. Finally,
the 10 × 50 m exhibited a power law of one-third between the velocity and the stroke rate. The
acceleration during the standing start together with the relationship between the velocity and stroke
rate were well captured theoretically. This approach enabled us to evaluate the important parameters
to describe a kayak race: the drag of the boat, an active drag coefficient, the mean propulsive force,
and a propulsive length. It can be used to characterize athletes and monitor their performances.
where S is the wetted area, Csj = 0.0028, the turbulent skin drag coefficient, Ω is the
immersed volume, Cwj = 11, the wave drag coefficient. Since the wetted surface is related
√
to the immersed volume by the relation S ≈ 2.5 ΩL, one deduces for an athlete and
boat mass of 90 kg at V = 4.8 m/s, a drag force FD ≈ 75 N, which means a dissipated
power PD = FD · V ≈ 360 W. In this example, the wave drag (second term in Equation (1))
accounts for 22% of the total drag.
Figure 1. (a) K1 women’s kayak race, (b) K2 women’s kayak race, (c) K4 women’s kayak race,
(d) presentation of the 9 Olympic events in kayaks at the Rio 2016 Olympic games with corresponding
boat characteristics. The time of the winner is indicated in red and the corresponding mean velocity
in blue.
To our knowledge, in the existing literature on kayaking, few have directly measured
the propulsion force in the paddle. Bjerkefors [7] studied the power output but on an
ergometer whereas Klitgaard [8] showed that there are significant kinematic differences
between the ergometer and the ecological situation. Most of the on-water trials focus on
the kinematic measurements of the instantaneous velocity [9], or of the average stroke
rate, stroke length, and velocity per 50 m [10]. The force on the paddle was evaluated for
kayaking [11–14] and canoeing [15] but was not linked to the kinematics directly. On the
contrary, Delgado [16] proposed a model for the evolution of the velocity of a kayak without
experimental measurements of the force and the velocity.
In the present paper, we propose an on-water study with kinematics and dynamic
measurements thanks to an instrumented paddle. Our goal here was to quantify and model
the dynamics of the kayak through simple physics parameters. We could then compare
the measured force and the evolution of the velocity thanks to the equation of motion. The
paper is organized as follows. In the first section, we detail the experimental set-up and our
theoretical motivations. Then we present three trials to validate and interpret our model: a
pure deceleration trial, a standing start, and a 10 × 50 m with a progressive increase of the
velocity between the trials. The first trial characterizes the drag of the boat. The last two
trials validate the model in the transient regime and the steady regime.
where Me = Mt + Ma is the sum of the total mass Mt = Mk + Mb (Mk is the mass of the
kayaker and Mb is the mass of the boat) and of the added mass Ma , which accounts for the
mass of the water entrained by the boat. In Equation (2), the force Fm (t) is the propulsive
force exerted by the blade on the water in the direction of motion and FD (t) is the total drag.
We wanted to evaluate the different contributions of this equation and find a simple
model of the evolution of the velocity in the kayak. In the first experiment, we set Fm (t) = 0.
This pure deceleration trial allowed us to evaluate the drag of the kayak. In the second
experiment, we performed a standing start, measuring Fm (t) and linking this force to
the evolution of the velocity. Finally, we set Me dV/dt = 0 in steady motion at different
velocities to exhibit a velocity–stroke rate relationship thanks to the balance of forces.
Figure 2. Main characteristics of the athletes, boats, and paddles used in the experiments.
An. C
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 4 of 18
Figure 3. Calibration of the instrumented paddle used for the experiments. The mass “m” symbolizes
the mass of calibration. On the right bottom corner, we show the waterproof box MaxiPhyling placed
on the boat.
The coordinates ( x, y) are in pixels. We used this formula to correct the effect of
perspective along the trajectory. We checked that the length of the boat in pixels did not
vary in the interval of time [t − ∆t, t + ∆t]. Depending on the experiment we performed, we
used different values of ∆t. This was a trade-off between filtering the noise of measurement
and capturing the fast evolution of the velocity.
Figure 4. Description of the notation used to compute the velocity of the boat. The coordinates ( x, y)
are in pixels whereas Lboat is in meters.
An. C
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 5 of 18
Quantitatively, the time evolution of the velocity during the deceleration is shown
in Figure 6a. We observed that the decrease was not linear and that it took typically 5 s
for the velocity to decrease by a factor of 2 from its initial value V0 ≈ 4.5 m/s to V0 /2. To
describe this deceleration, we use the no-propulsion limit (Fm = 0) in Equation (2), which
reduces to:
dV 1
Me = − ρ SCD V 2 , (4)
dt 2
where SCD is the total drag area. Assuming that SCD remains almost constant, the theoreti-
cal solution deduced from Equation (4) is:
V0 t 2Me
= 1+ where τ = . (5)
V (t) τ ρ SCD V0
In this expression, τ is the characteristic time over which the velocity decreases
(V (t = τ ) = V0 /2). The corresponding time evolution of the velocity ratio V0 /V (t) is
presented in Figure 6b for Athlete A1 (black squares) and for Athlete A2 (red squares). In
both cases, the theoretical affine relationship expected from Equation (5) was observed; we
measure 1/τ ≈ 0.180 ± 0.005 s−1 . Thus, the velocity decreases over the characteristic time
τ ≈ 5.55 s.
Figure 6. (a) Time evolution of the velocity V (t) for Athlete A1 (black squares) and Athlete A2 (red
An. C squares). (b) Time evolution of the velocity ratio V0 /V (t) for Athlete A1 (V0 = 4.76 m/s) and Athlete
A2 (V0 = 4.98 m/s).
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 6 of 18
Figure 7. (a) Presentation of the ellipsoid. (b) Added mass factor Kam as a function of the aspect
ratio a/b.
4. Standing Start
In this section, we analyze the results of the standing start trial and recovered the
evolution of the velocity thanks to the force measurement and the estimation of drag
obtained in the previous section. Before analyzing the first couple of strokes, we analyzed
a single stroke.
An. C
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 7 of 18
Figure 8. (a) Time sequence of a single paddling stroke performed by Athlete A1. The time lapse be-
tween each image is ∆t = 0.05 s. (b) Definition of the paddle angle θ and the normal force F. (c) Time
evolution of the paddle angle θ (black squares) and the normal force intensity F (blue squares).
The time evolution of θ and F = k F k during the stroke is shown in Figure 8c. Focusing
on the paddle angle, we observe that this angle starts at θin ≈ 50°, quickly increases to
60°, and then evolves with an almost constant slope of ω P = 3.2 rad/s up to the exit angle
θout ≈ 160°. Concerning the force, it increases during the entrance of the blade (first 0.1 s)
and decreases during its exit (last 0.1 s) and exhibits a mean value of the order of 155 N
in between. We observe little variations of θin and θout between the stroke cycles and the
athletes between the different tests (less than 5° on the typical variation of 100°).
An. C
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 8 of 18
Figure 9. Time evolution of the velocity (solid black line with units on the left vertical axis) and the
forces (solid colored curves with units on the right vertical axis) corresponding to the chronopho-
tography presented in Figure 10. (a) Data for Athlete A1. The blue arrow indicates the cycle that is
detailed in Figure 8. (b) Data for Athlete A2. The blue color is used for the force measured on the
right paddle while the red color is used for the left. The quantity F is the intensity of the force exerted
in the direction normal to the paddle surface.
Figure 10. Chronophotography of a standing start. The time lapse between images is ∆t = 1.67 s:
(a) Athlete A1. The length scale is given by the length of the boat (5.2 m). (b) Athlete A2. The length
scale is given by the length of the boat.
The corresponding time evolution of the velocity is presented with black solid lines in
Figure 9 for the two kayakers. The grey squares underline that the velocity was measured
every 0.16 s at a frequency of 6 Hz. Qualitatively, the velocity build-ups were similar
for the two athletes and we first analyzed the one obtained with Athlete A1 (Figure 9a).
The velocity increased from 0 to 5 m/s over a characteristic time of the order of 5 s.
The associated acceleration is thus of the order of 1 m/s2 . The fluctuations observed on the
velocity signal are associated with the periodic motion of the paddle. This is shown with the
force signal reported in blue for the right blade and in red for the left blade. The maximal
values of the blade force are of the order of 200 N.
Even if the maximal forces were larger for the second kayaker (Figure 9b), the same An. C
features were observed in the time evolution of his velocity. This observation reveals that
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 9 of 18
even if the boat and kayaker specialties are different, as underlined in Figure 2, the dynamics
of the boat during a standing start are characterized by generic features, which need to
be studied.
We define the period T as the time needed for a blade to perform a full cycle, from one
water entry to the next. The stroke rate f is defined as 1/T. In Figure 9, we show for the
first stroke the different time markers. A period corresponds to T = t5 − t1 . We observe
in Figure 9 that the first cycle was longer than the subsequent ones for both kayakers.
We also observe that there was a delay with no force between the end of a propulsive
phase and the beginning of the next one. This corresponds to the recovery time t0 during
which both paddles were in the air. During all of those phases, the velocity of the boat
systematically decreased due to the friction with the water and air. For the first cycle,
t0 = ( t3 − t2 ) + ( t5 − t4 ).
Quantitatively, the evolution of the (period T) and of the recovery time t0 are presented
in Figure 11 as a function of the cycle number n: for the first kayaker, the period decreased
quickly from 2 s in the first cycle to 1 s in the fifth cycle. The decrease was quick in the
sense that, in the second cycle, the period was already 1.34 s (Figure 11a). Concerning
the recovery time t0 , it remained almost constant and equal to t0 ≈ 0.31 s. In the last
cycles, 2/3 of the period was dedicated to the propulsive phase and 1/3 to the side-change
(aerial phase).
Figure 11. Evolution of the period T and of the recovery time t0 as functions of the cycle number n
during the two standing starts presented in Figure 9: (a) Athlete A1, (b) Athlete A2.
For the second kayaker, the evolution is presented in Figure 11b. The period also
decreased by a factor of 2 between the initial cycle (T = 1.6 s) and the sixth cycle (T = 0.8 s)
but the evolution was slower. The recovery time t0 remained almost constant and equal
to t0 ≈ 0.28 s. Again, in the last cycles, we recover the 2/3–1/3 proportions between the
propulsive and the aerial phases.
dV 1 t − tin
Me = F (t)nθ (t) − K ρSCD V 2 with θ (t) = θin + (θout − θin ) (6)
dt 2 tout − tin
An. C For the standing starts presented in Figure 9, this equation was solved with the initial
condition V (t = 0) = 0 together with the measured force F (t). The paddling dynamics are
accounted for via the entrance (θin ) and exit angles (θout ) together with the corresponding
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instants (tin and tout ). In the above Equation (6), we also introduced a constant K ≥ 1 in
front of the total drag FD = 1/2ρSCD V 2 in order to account for the increase in the drag
associated with the perturbed motion of the boat (surge, heave, sway, pitch, yaw, roll) that
appeared once paddling started [1,20]: an active drag coefficient.
We compare in Figure 12 the velocity V (t) obtained by the numerical integration of
Equation (6) to the value measured experimentally. The comparison for Athlete A1 is
presented in Figure 12a and the one for Athlete A2 in Figure 12b. In both cases, the zero
perturbation limit (K = 1) is shown with a blue solid line and the best fit with a red solid
line. We obtained K = 1.25 for Athlete A1 and K = 1.1 for Athlete A2, which means
that the drag while paddling was 25% larger than the one measured with no paddling
for Athlete A1 and 10% larger for Athlete A2. This difference is probably associated with
the stability of the boat, which was larger for Athlete A2. Indeed, the boat for Athlete
A2 was wider (w = 61 cm) than the boat of Athlete A1 (w = 41 cm). This hypothesis is
confirmedq by the gyroscope placed in the boat. The average norm of the angular velocity
R
1 T
ω= T 0 ωx2 + ωy2 + ωz2 dt reached 43◦ /s for Athlete A2 and ω = 33◦ /s for athlete A1 at
high velocities. This shows the lack of stability of the most narrow boat of A1; however, this
higher angular velocity can also be caused by a less efficient technique of A1. There should
be an optimal width of the boat for a given kayaker, minimizing the coefficient KSCD .
Figure 12. Comparison between the velocity measured experimentally and the one obtained by the
numerical integration of Equation (6), for Athlete A1 (a) and for Athlete A2 (b).
An. C
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 11 of 18
Figure 13. (a) Evolution of the mean total force F and mean propulsive component F m = Fnθ over
the first n cycles of the standing start are presented in Figure 9 (b).
The equation of motion for the average quantities can be obtained by averaging
Equation (6):
dV 1 2
Me = F m − K ρSCD V (7)
dt 2
2
In this equation, we used the approximation V 2 ≈ V , which is valid if period T was
small compared to the characteristic time in which the velocity changes 1/τc = 1/VdV/dt.
In the present application, the period is typically 1 s while the velocity changes over τc ≈ 5 s.
Both values justify the approximation. Since F m is shown in Figure 13a to also be constant,
Equation (7) can be integrated and lead to the algebraic solution:
s
2F m Me V max
V (t) = V max tanh(t/τ ) with V max = and τ = , (8)
KρSCD Fm
where τ is the characteristic time needed to reach the maximal velocity V max . Using the val-
ues obtained for Athlete A1 (F m = 89.6 N, Me = 77.3 kg, K = 1.25,
SCD = 5.85 × 10−3 m2 ) we have τ = 4.2 s and V max = 4.95 m/s. The same evalua-
tion for Athlete A2 (F m = 112 N, Me = 86.8 kg, K = 1.1, SCD = 6.38 × 10−3 m2 ) leads to
τ = 4.4 s and V max = 5.6 m/s.
The comparison between the time evolution of the mean velocity V (t) measured ex-
perimentally and the algebraic solution (8) is presented in Figure 13b with a fair agreement
for both kayakers.
An. C generated by the left arm and by the right arm. The evolution θ (t) was obtained thanks to
the movie of the trial, whereas F (t) was given by the sensor on the paddle. We plotted the
mean value of FeL and F fR in the zone between 25 and 45 m. The values of the propulsive
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force for the right arm and the left arm were close. After an increase in the three first
trials, Fe remained almost
constant during the seven lasttrials. We can express the mean
force over a cycle F = f FeL (tout − tin ) + F
fR ( tout − tin )
L . By assuming that the kayaker
R
propelled symmetrically, which is in fair agreement with the data, we can simplify the
previous expression: F = 2 Fe(tout − tin )/T. We only present the results for kayaker A1, but
the results are similar for A2.
Figure 14. (a) Velocity–stroke rate relationship in the steady state regime for the two kayakers.
(b) Evolution of the average propulsion force in the direction of paddling with trial N for Athlete A1.
The force is averaged over the propulsion time.
As observed in Figure 14, the mean projected force along the axis of the motion
R tout
Fe = tin F ( t ) n ( θ ( t ))dt/t P is approximately constant, except for the first two trials. There-
fore, we define Fe0 as this constant value. As the stroke rate f is the inverse of the period,
we obtain:
1 2
f · t P Fe0 = K ρSCD V . (11)
4
At this stage, we need to find an expression for the evolution of t P as a function of
the velocity V. The ratio between the hydrodynamic coefficients SCD of the boat and the
paddle is small (SCD = 6 × 10−3 m2 for the boat and SCD = 1.2 × 10−1 m2 for a paddle).
For this reason, we expect little drift of the paddles in the water compared to the boat during
the propulsion. In the limit where the paddle is anchored in the water, the velocity of the
paddle in the frame of the boat VP/B equals the velocity of the boat V. Defining L p as the
An. C
length of the propulsive path of the paddle in the frame of the boat, it comes VP/B = L p /t P .
Therefore, the relationship between V and t P should be close to 1/t P = V/L p . We used the
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data of the 10 × 50 m of Athlete A1 to analyze the evolution of the inverse of the propulsion
time and the mean velocity (Figure 15).
In Figure 15, the relationship between 1/t P and V is linear for velocities larger than
2 m/s for both arms. We found a propulsive length of L p = 1.64 m for Athlete A1. This
length can be compared to the arc length described by the center of a paddle, where we
expect the force resultant to be applied. For Athlete A1, the distance between the two
paddle centers was ` ≈ 1.76 m and we measured paddle angles going from 50◦ to 160◦ . This
corresponds to a traveled distance L p ≈ 0.5` × ∆θ ≈ 1.69 m. This represents a 3% difference
with the previous measurement. Using the relation between t P and V, Equation (11) can
be simplified:
!1
4L p Fe0 3 1
V= f 3. (12)
KρSCD
This equation is compatible with the experimental data presented in Section 5.1. We
found A = 4.2 for Athlete A1 ( Fe0 = 86 N, L p = 1.64 m, K = 1.25, SCD = 5.85 × 10−3 m2 ).
This value must be compared to A = 4.4 found experimentally. Thus, we recovered the
experimental behavior with a precision of 5%. In this section, we assumed symmetry
between the left and right propulsion. In the standing start experiments (Figure 9), we
observed a difference in the patterns between the left and right propulsion. However,
if we focus on Figures 14b and 15, we observe that the propulsion time is the same for the
left arm and the right arm and there is no significant difference in the mean value of the
propulsion force between the left and right. As this model is averaged on a cycle, this is
no issue that the force distribution over a cycle is not symmetric, while there are similar
average values of the propulsion force and propulsion time.
However, we can also adapt the model in the case of a non-symmetric propulsion.
In this case, in Equation (12) we replace 2L p Fe0 with Lr Fer + Ll Fel , where Lr and Ll are the
right and left propulsive lengths and Fer and Fel are the right and left mean projected forces.
This model has two additional parameters, which are not compatible with our wish to have
a model as simple as possible. For this reason, we showed the model with the assumption
of symmetry.
6. Conclusions
An. C In the present paper, we provided methods to quantify and model the dynamics of
kayak races. Three tests were used to evaluate the important physics parameters: a pure
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Author Contributions: All the authors contributed equally to the paper. R.C. developed the model
for the progressive test and wrote part of the paper, L.H. was in charge of analysing the data and
collected part of the data, C.P. conducted the experiments, collected the data and wrote part of
the paper, R.L. and J.-P.B. constructed the instrumented paddle and collected part of the data, C.C.
developed the model for the standing start and wrote part of the paper. All authors have read and
agreed to the published version of the manuscript.
Funding: This research was funded by Agence Nationale de la Recherche (ANR) grant number
ANR-2020-STHP2-0006.
Institutional Review Board Statement: Both athletes volunteered for this study and gave their
written consent to participate. Measurements were done as part of their usual training with no
added task.
Informed Consent Statement: Informed consent was obtained from all subjects involved in the study.
Data Availability Statement: This article has no additional data.
Acknowledgments: We deeply thank the two athletes for taking part in the field experiments. We
also thank Commandant Marc Mander for his interest in the Sciences 2024 program and for letting
the kayakers use the Ecole Polytechnique rowing facility center. We finally thank Alexandre Rosinski
for his technical help during the different test sequences.
Conflicts of Interest: The authors declare no conflict of interest.
Appendix A
The objective of this section is to theoretically recover these experimental values and
to estimate the relative contributions of the three forces Fs , Fw , and Fa .
Figure A1. (a) Scheme of a prismatic hull. (b) Evolution of the wave drag coefficient Cw with the
Froude number calculated with Equation (A4).
For a given load Ω = Mt /ρ, since the log term remains almost constant, we deduce
that the skin friction increases with the square root of the length L and almost quadratically
with the velocity. For a typical load Mt = 76 kg, a boat length L = 5.2 m, and a boat speed
V = 5 m/s the above Equation (A1) leads to SCs = 4.08 × 10−3 m2 or Fs = 51 N for Athlete
A1. The same calculation for Athlete A2 (Mt = 84 kg, L = 4.5 m, V = 5 m/s) leads to
SCs = 4.38 × 10−3 m2 or Fs = 54.8 N.
1
Z
128 4 ∞ 2 2
2 λ dλ
Fw = ρV 2 w2 Fr 1 − e−λ /( βFr ) n4 2
√ (A4)
2 π 1 4Fr λ λ2 − 1
4
where β = L/d is the ration between the length of the boat L and the draft d. For the
An. C simplified prismatic hull presented in Figure A1a, Ω = 1/2Lwd so that β = 1/2L2 w/Ω.
Using the values of the parameters L, w, and Mt presented in Figure 2, we calculate the
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wave drag coefficient Cw = Fw / 1/2ρV 2 w2 and present its evolution as a function of the
Froude number in Figure A1b.
The non-monotonic evolution is classical for the wave drag as well as its maximum
value achieved for Fr ≈ 0.5 [19,26]. Quantitatively for a 5.2 m long boat moving at
V = 5 m/s one finds Fr = 0.70 and deduces Cw = 6.1 × 10−3 , which leads to Fw = 12.8 N
with w = 0.41 m (these values correspond to the one of Athlete A1 in Figure 2).
This value for the wave drag can be compared to the one proposed by Jackson using
Equation (1): Fwj = 1/2ρV 2 Cwj Ω5/3 /L3 . For the same velocity, V = 5 m/s one finds
Fwj = 13.3 N, which is in fair agreement.
The corresponding wave drag area w2 Cw is 1.02 × 10−3 m2 for Athlete A1 (or
Fw = 12.75 N). The same calculation for Athlete A2 leads to w2 Cw = 2.09 × 10−3 m2 (or
Fw = 26.1 N), the main difference being the width of the boat.
1
Fa = ρ a ( gma1 CD1 + gma2 CD2 )V 2 , (A5)
2
where ρ a is the air density and CD1 (respectively, CD2 ) is the drag coefficient associated
with the frontal area gma1 (respectively, gma2 ).
Figure A2. (a) Identification of the two bluff-emerged surfaces gma1 for the kayaker and gma2 for
the unshadowed part of the paddle. (b) Anthropometric figure with data extracted from the work by
Drillis and Contini; [27].
The frontal area of the body gma1 can be estimated using the anthropometric data from
Drillis and Contini (Figure A2b) as the blue area, which leads to gma1 = 0.101H 2 where H
is the size of the kayaker. The associated drag coefficient is CD1 = 0.7 [28]. For the paddle,
we measure gma2 = 0.08 m2 . Using CD2 = CD1 we thus estimate for V = 5 m/s, Fa ≈ 3.9 N
for Athlete A1, and Fa ≈ 4.3 N for Athlete A2. The tables that we used correspond to
the average distribution of mass for the population. The kayakers have more developed
muscles in the upper body than in the lower body, which is why we should have slightly
underestimated the aerodynamic force.
Appendix A.4. Comparison between the Theoretical Drag and the One Measured by Deceleration
An. C
The theoretical total force at V = 5 m/s is thus FD = Fs + Fw + Fa = 51 + 12.75 + 3.9 =
67.7 N for Athlete A1, which corresponds to SCD = 5.4 × 10−3 m2 . This value is 7.5%
Appl. Sci. 2022, 12, 8925 17 of 18
smaller than the one measured via the deceleration (SCD = 5.85 × 10−3 m2 ). Considering
the relative importance of the different contributions of the drag, we find here 75% for skin
friction, 19% for the wave drag, and 6% for the air drag. Even if we slightly underestimated
the aerodynamic force in the last section, this is not the major part of the total drag.
For Athlete A2, the theoretical total force at V = 5 m/s is FD = Fs + Fw + Fa =
54.8 + 26.1 + 4.3 = 85.2 N. This corresponds to SCD = 6.8 × 10−3 m2 . This value is 6.7%
larger than the one measured via the deceleration (SCD = 6.38 × 10−3 m2 ). The proportions
of the three contributions are 64% for skin friction, 30% for the wave drag, and 6% for
the air.
The main difference with Athlete A1 is associated with the shape of the boat, which is
larger for Athlete A2 (w = 61 cm instead of w = 41 cm) and, thus, induces a much larger
wave drag.
We conclude that the theoretical drag is able to estimate the drag measured experi-
mentally at ±8%, which is fair considering the different approximations that we have used,
especially concerning the shape of the hull.
Concerning the evolution of these different drag contributions with the velocity, we
present in Table A1 their values in the range V ∈ [1 m/s–5 m/s]. Equations (A1), (A4) and
(A5) are, respectively, used to estimate Fs , Fw , and Fa using the parameters associated with
Athlete A1: L = 5.2 m, w = 0.41 m, H = 1.70 m, and Mt = 76 kg.
Even if the different force contributions increase with the velocity, we observe in the
last column of Table A1 that the total drag area remains almost constant throughout the
whole velocity range SCD = 5.7 ± 0.3 × 10−3 m2 .
Table A1. Evolution of the different drag contributions with the boat velocity estimated using the
parameters associated with Athlete A1: L = 5.2 m, w = 0.41 m, H = 1.70 m and Mt = 76 kg.
V Re L Fr SCs Fs Cw Fw Fa FD SCD
(m/s) m2 (N) (N) (N) (N) m2
1 0.57 × 107 0.14 5.4 × 10−3 2.7 12 × 10−4 0.1 0.16 2.95 5.9 × 10−3
2 1.04 × 107 0.28 4.7 × 10−3 9.5 26 × 10−4 0.9 0.62 11.0 5.5 × 10−3
3 1.56 × 107 0.42 4.4 × 10−3 20.0 77 × 10−4 5.8 1.4 27.2 6.0 × 10−3
4 2.08 × 107 0.56 4.2 × 10−3 33.8 76 × 10−4 10.2 2.5 46.6 5.8 × 10−3
5 2.60 × 107 0.70 4.1 × 10−3 51.0 61 × 10−4 12.8 3.9 67.2 5.4 × 10−3
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Annexe C. Etude physique du kayak
An. C
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