MARTINI - 2015 These Encre
MARTINI - 2015 These Encre
MARTINI - 2015 These Encre
Présentée par
Thibaut MARTINI
M. Stéphane DANIELE
Institut de recherches sur la catalyse et l’environnement de Lyon, Rapporteur
M. John KESSLER
Université de Nantes, Rapporteur
Mme. Anne DAVIDSON
UPMC - Laboratoire de Réactivité de Surface, Examinatrice
Mme. Anne KAMINSKY CACHOPO
IMEP-LAHC, Examinatrice
M. Konstantin TARASOV
CEA Grenoble, Examinateur
M. Georges BREMOND
INSA Lyon, Examinateur
Mme. Anne BLAYO
Laboratoire génie des procédés papetiers, Directrice de thèse
Mme. Céline MARTIN
Laboratoire génie des procédés papetiers, Co-Directrice de thèse
M. Alain RICAUD
Screen Solar, Invité
ii
Remerciements
Je souhaiterai tout d’abord remercier les encadrants de ce travail de thèse. En tout premier
lieu, un grand merci à Anne Blayo d’avoir accepté de diriger cette thèse. Anne, merci,
malgré un emploi du temps plus que chargé, de m’avoir guidé, encouragé, conseillé. Merci
pour ta patience et la rigueur que tu m’as enseignée pour présenter mes résultats. Merci
aussi de m’avoir aidé à préparer l’après thèse et notamment une certaine présentation.
Merci à Céline Martin : Céline tous mes remerciements pour ta gentillesse, ta patience
et tes précieux conseils à mon égard durant ces trois années de thèse. Je profite de
cette page pour te remercier également de ton encadrement lors de mon apprentissage
d’alternance des deux dernières années d’école d’ingénieur à Pagora. Je remercie vivement
Alain Ricaud : merci de m’avoir accordé ta confiance pour ce projet CIFRE, de m’avoir
accueilli dans la famille des ≪ Cytheliens ≫ et de Screen Solar. Je pense que famille est le
bon terme pour décrire ces deux sociétés tant les valeurs humaines de ces entreprises furent
agréables à découvrir et à côtoyer. Konstantin Tarasov, merci de t’être passionné pour ce
sujet dès le premier jour où t’a été confiée la tâche (pas toujours facile) de me superviser.
Merci pour ta disponibilité sans limite, pour les nombreuses manips effectuées à mes
côtés et pour ta gentillesse. J’ai appris énormément en travaillant avec toi. Je souhaiterai
remercier Amélie Revaux, ayant encadré le début de cette thèse, d’avoir suivi mon travail,
malgré un changement d’affectation. Merci également à Lise Bilhaut et Jérôme Garnier
de Screen Solar pour avoir supervisé ce travail dans sa partie industrielle. Enfin merci à
Olivier Raccurt pour avoir initié ce sujet de thèse.
Je tiens à remercier tous les membres du jury d’avoir accepté d’évaluer mon travail de
thèse. Je remercierai tout d’abord les rapporteurs John Kessler et Stéphane Daniele pour
leurs nombreuses remarques et suggestions. Merci aux examinateurs Anne Davidson et
Georges Brémond pour l’intérêt qu’ils ont porté à ce travail. Enfin, je remercie Anne
Kaminsky-Cachopo d’avoir présidé ce jury de thèse. Mes remerciements vont également
à tous les membres du projet Novacez au sein duquel s’est déroulée cette thèse : en
particulier à Sebastien Delbos et Romain Bodeux pour leur accueil à l’IRDEP et l’accès
au spectromètre Raman. Un grand merci à Denis Rouchon du CEA Grenoble d’avoir
réalisé de nombreuses analyses Raman ainsi que d’avoir développé un protocole spécial
pour nos échantillons.
Je remercie le laboratoire LCRE du CEA Grenoble pour l’accès au four de recuit sous
atmosphère de soufre et sélénium.
Enfin, je remercie François Tardif et Jean-Pierre Simonnato pour leur accueil au sein du
LSIN, anciennement LCSN. Travailler au sein de ce laboratoire pendant mon apprentis-
sage et pendant ma thèse a été un réel plaisir. Je commencerai par remercier Caroline
Chubilleau qui a développé la synthèse des particules et l’analyse ICP-MS. Caroline,
merci pour tout le travail que tu as fait et qui m’a permis de beaucoup progresser et
ce même après la fin de ton postdoc. Je tiens à remercier tout particulièrement Olivier
Renard, qui a été le premier à m’accueillir au sein de ce laboratoire, à me transmettre
le virus de la recherche ; si j’ai continué jusqu’au doctorat c’est aussi grâce à toi. Olivier
Poncelet, merci pour les innombrables discussions scientifiques et non scientifiques de la
Table des matières iii
Ces trois années ont passées bien vite aussi grâce à mes amis. Je commencerai par les
plus anciens : Greg, Nico, Romano, Chor, William, Alex, Anthony et Solène. Merci d’être
venus m’encourager lors de ma soutenance. Merci aussi aux papetiers Romain, Kevin,
Mathieu, Arthur, Seb, Marjo, Celia, Laure, Aurore. . . Mention spéciale à Fred, Phiphine,
Valou, Natoche, Claire et Thomas :-). Je remercie aussi Sarah, Adrien, Maud, Gaelle,
Bruno Baptiste, Alexandra et tous les autres. . .
A l’heure où j’écris ces remerciements, la page du doctorat est presque tournée et une
nouvelle page professionnelle s’ouvre à Lausanne. Je tiens à remercier Fréderic Bodino,
chef du département inkjet de Sicpa pour m’avoir laissé du temps afin de préparer la
soutenance dans les meilleures conditions.
Enfin, j’aimerai remercier mes parents et ma famille pour leur amour et leur soutien
inébranlable durant ces années, le côté corse, comme le côté breton et d’avoir toujours
été à mes côtés.
Table des matières
Abréviations xvi
Introduction générale 1
iv
Table des matières v
4 Synthèses de nanoparticules 78
4.1 Les enjeux de la synthèse de nanoparticules de CZTS . . . . . . . . . . . 78
4.1.1 Le contrôle de la composition chimique . . . . . . . . . . . . . . . 78
4.1.2 Pureté des particules . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 85
4.1.3 Rendement de synthèse et vitesse de réaction . . . . . . . . . . . 86
4.2 Influence des réactifs : ligands et sels métalliques . . . . . . . . . . . . . 88
4.2.1 Synthèse à base d’acide mercapto-acétique et de sels acétates . . . 90
4.2.1.1 Réaction sans traitement micro-ondes . . . . . . . . . . 91
4.2.1.2 Influence du traitement micro-ondes . . . . . . . . . . . 97
4.2.1.3 Variation de composition . . . . . . . . . . . . . . . . . 100
4.2.1.4 Synthèse en réacteur continu . . . . . . . . . . . . . . . 104
4.2.1.5 Pureté . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 108
4.2.2 Complexant éthylène diamine . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 110
4.2.3 Synthèse “thiourée” . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 117
4.2.4 Procédé de purification . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 125
Bibliographie 196
viii
Liste des Figures ix
6.10 Cartographie EDX d’une couche mince recuite 180 minutes à 540 ◦ C . . 177
6.11 Formules chimiques des stabilisants dodecanethiol (gauche) et dodécyle
pyrrolidone (droite) . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 178
6.12 Diffractogrammes DRX des couches minces de nanoparticules avec stabi-
lisation DDT recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C . . . . . . . . . . . 179
6.13 Spectres Raman des couches minces de nanoparticules avec stabilisation
DDT, recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C . . . . . . . . . . . . . . . 180
6.14 Diffractogrammes DRX des couches minces de nanoparticules avec stabi-
lisation DDP, recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C . . . . . . . . . . . 181
6.15 Spectres Raman des couches minces de nanoparticules avec stabilisation
DDP, recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C . . . . . . . . . . . . . . . . 182
6.16 Clichés MEB des couches minces obtenues avec stabilisation DDT et DDP,
de gauche à droite : DDT 120 minutes, DDT 180 minutes, DDP 120 mi-
nutes, DDP 180 minutes . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 182
6.17 Dépôt d’encre 3 par spray après séchage à 400 ◦ C . . . . . . . . . . . . . 183
6.18 Spectre Raman d’une couche mince séchée à 400 ◦ C . . . . . . . . . . . . 184
6.19 Diffractogrammes DRX de couches minces recuites 180 minutes à 500 ◦ C 185
6.20 Spectre Raman sous excitation 532 nm (gauche) et 365 nm (droite) de
couches minces recuites 180 minutes à 500 ◦ C . . . . . . . . . . . . . . . 185
6.21 Clichés MEB de couches minces recuites 180 minutes à 500 ◦ C . . . . . . 186
6.22 Mesure optique de la largeur de bande interdite d’une couche mince CZTS 186
3.1 Propriétés des trois liquides sondes utilisés pour les mesures d’angle de
contact . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 67
xiv
Liste des Tableaux xv
4.14 Compositions élémentaires mesurées par EDX sur des poudres synthétisées
selon le protocole thiourée avec différentes quantités de thiourée . . . . . 119
4.15 Compositions chimiques mesurées par EDX sur des poudres synthétisées
selon le protocole thiourée avec différentes compositions de précurseurs . 123
4.16 Composition chimique mesurée par EDX pour des nanoparticules
synthétisées avec différentes compositions de précurseurs . . . . . . . . . 124
4.17 Composition chimique de nanoparticules mesurée par EDX après purifica-
tion par les solvants Sulfolane et Pyrrolidone . . . . . . . . . . . . . . . . 126
4.18 Composition chimique de nanoparticules mesurée par EDX après purifica-
tion par les solvants Propylène carbonate et DMSO . . . . . . . . . . . . 127
6.1 Liste non exhaustive des conditions de recuit utilisées dans la littérature
en fonction des procédés de dépôt . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 170
Abréviations
Ac Acétate
Acac Acétylacétonate
ATG-DSC Analyse Thermogravimétrique
BSE Électrons rétrodiffusés
CEA Commissariat à l’Energie Atomique et aux Energies Alternatives
CIGS Solution solide Cu(In,Ga)(S,Se)2
CIJ Continuous Inkjet
CIS CuInS2
CTS Cu2 SnS3
CZTS Solution solide Cu2 ZnSn(S,Se)4
DC Courant continu
DDT Dodecanethiol
DEDTC Diethyl Dithiocarbamate
DLS Diffusion dynamique de la lumière
DMSO Diméthyl sulfoxide
DOD Drop on demand
DRX Diffraction des rayons X
DSC Dye sensitized solar cells
EDX Energy dispersive X
EN Ethylène diamine
FR-IR Spectroscopie infrarouge à transformé de Fourier
FWHM Full Width at Half Maximum
HSP Paramètres de solubilité de Hansen
ICP-MS Couplage plasma induit par haute fréquence -spectrométrie de masse
xvi
Abréviation xvii
Qu’on le veuille ou non, notre civilisation est construite sur la consommation d’ énergie,
base de notre croissance économique, de notre développement et de notre mode de vie.
Malgré les crises économiques successives, la demande d’énergie reste en constante aug-
mentation dans le monde et l’IEA (Internationnal Energy Agency) prévoit même que
celle-ci augmentera de 56 % entre 2010 et 2040. Comment peut-on envisager une telle
croissance alors que notre empreinte annuelle sur l’environnement dépasse déjà les ca-
pacités de la planète ? Un paradigme énergétique basé sur les énergies fossiles, sources
de gaz à effet de serre et dont le marché est sous contraintes constantes du fait de leur
épuisement n’est pas envisageable. Outre l’efficacité et la sobriété énergétique, principaux
modérateurs, toutes les sources d’énergies alternatives sont donc appelées à se développer
dans les années à venir, l’Europe vise même à 20 % la proportion d’énergie d’origine
renouvelable d’ici à 2020. L’irradiation solaire annuelle sur l’ensemble de la planète au
niveau de la mer (754 million de TWh) représente plus de 5 000 fois l’énergie que nous
consommions en 2010 (environ 12 Gtep ou 139 000 TWh 1 ). Sur le long terme - environ
50 ans - le potentiel extractible des différentes sources d’énergies renouvelables pourrait
en pratique couvrir la consommation mondiale : 2
1
Introduction générale 2
• L’ Asie est désormais l’atelier de monde : Chine, Asie du Sud Est, Japon concentrent
44 des 48 plus gros sites de production, avec des investissements sans rapport avec
les capacités européennes, voire américaines.
• La production cumulée mondiale (180 GWc à fin 2013) ainsi que la base installée
(environ 135 GWc) montrent que le photovoltaı̈que a été victime d’une bulle et
Introduction générale 3
est encore en surcapacité. Elle a eu des conséquences sévères sur les acteurs indus-
triels les plus fragiles, comme en témoignent les nombreuses faillites ou rachats ces
dernières années, mais aussi sur les leaders du secteur, qui ne retrouveront pas les
marges exceptionnelles de 2010.
• Le silicium cristallin domine encore largement, mais les couches minces peuvent
prendre une part significative du marché mondial, jusqu’à 35 %, du fait de la
pression sur les prix et des avantages amenés par ces technologies.
• La parité réseau selon les zones géographiques est soit déjà atteinte soit envisa-
geable à court terme et changera profondément le paradigme énergétique jusqu’ici
en vigueur, basé sur la centralisation des sources énergétiques.
• Le silicium amorphe hydrogéné (a-Si :H), dont les meilleurs rendements sont de 13
% en laboratoire et de 8 % en module. Cette technologie est notamment présente
sur le marché du support flexible et pour les gadgets.
• Le tellurure de cadmium (CdTe) dont le meilleur représentant industriel est
l’américain First Solar présentant des modules de plus de 12 % de rendement
et un record à 20.4 % sur cellule.
Introduction générale 4
Malgré une forte croissance des deux dernières technologies, les prévisions de marché an-
noncent une perte de part de marché à cause d’un silicium cristallin dont le prix continue
de diminuer grâce aux volumes de production gigantesques. En effet, les technologies
CIGS et CdTe font appel à des métaux chers car peu abondants (In, Ga et Te) ce qui
limite à terme leur avantage compétitif. De plus les procédés de dépôts utilisés tels que
la pulvérisation cathodique ou la co-évaporation sont des technologies de déposition sous
vide, ce qui diminue les cadences de production, accroı̂t les investissements machine et
de facto les coûts de production. Compte-tenu de ces observations, un nouvel absorbeur
est actuellement étudié, il s’agit de la kësterite ou CZTS pour Cu2 ZnSn(S,Se)4 , composée
uniquement d’éléments abondants dont le coût ne sera pas handicapant pour l’industria-
lisation de la technologie. Symbole que les technologies de dépôt hors vide sont l’avenir
du photovoltaı̈que en couche mince, le record de rendement (12.6 %) en cellule est obtenu
par dépôts successifs par spin-coating de précurseurs dans l’hydrazine. Néanmoins, l’hy-
drazine est un solvant extrêmement toxique et le spin coating n’est pas viable de manière
industrielle. L’objectif de cette thèse initiée et financée par Screen Solar (Jérôme GAR-
NIER et Alain RICAUD), encadrée par le LPG2 (Anne BLAYO et Céline MARTIN), et se
déroulant au sein du Laboratoire de Synthèse et d’Intégration de Nanomatériaux du CEA
Grenoble (Konstantin TARASOV et Olivier PONCELET), est de décrire la faisabilité et
les contraintes observées pour la mise en oeuvre d’un dépôt hors vide par impression de
couches minces de CZTS à l’aide de composés bas-coûts, de faible toxicité et développable
à grande échelle. Sachant que les questions économiques de coût de matériau et de coût
de process ont été traitées en amont par Screen Solar, nous n’en mentionnerons que les
résultats.
En revanche, les questions auxquelles doit répondre cette thèse sont les suivantes :
d’impression pour obtenir une couche continue, homogène est également primordial. Pour
finir, la nature quaternaire du matériau rend aisé l’apparition de phases secondaires dont
la présence dépend à la fois de la composition chimique et des paramètres de recuit.
Pour terminer, le chapitre 6 décrit le recuit de cristallisation des couches minces sous
atmosphère soufrée et l’évolution des phases cristallines en fonction des températures et
temps de recuit. L’influence de la composition chimique de départ et de la pureté des
couches est discutée.
Chapitre 1
Introduction
Dans un marché mondial du solaire photovoltaı̈que largement dominé par les technologies
à bases de silicium cristallin, les technologies à base de couches minces ne représentaient en
2013 que 9 % du marché [1]. Dans ce marché morose, la technologie en couches minces uti-
lisant les chalcopyrites Cu(In,Ga)(S,Se)2 ou CIGS est la seule dont le marché se développe.
Cette exception est toutefois menacée par l’augmentation du coût des éléments qui la com-
posent. A l’inverse, les couches minces à base d’absorbeurs Cu2 ZnSn(S,Se)4 ou kësterites
sont encore cantonnées à l’étude en laboratoire mais ne contiennent pas d’élément dont
le coût présente un risque d’élévation à court terme. La kësterite se présente comme rem-
plaçant potentiel de la chalcopyrite étant donné que ces deux semi-conducteurs peuvent
être utilisés dans la même architecture de cellule solaire en couche mince. Le procédé de
dépôt de couches minces représente aussi une opportunité de réduction des coûts. Ac-
tuellement dominée par les dépôts sous vide comme la pulvérisation cathodique ou la
co-évaporation, la fabrication de modules photovoltaı̈ques par voie hors vide est une for-
midable occasion de réduire les coûts d’investissement de matériel, de diminuer les pertes
de précurseurs et d’augmenter les cadences de production.
Ce premier chapitre compare donc ces deux absorbeurs solaires de manière à identifier
les avantages ainsi que les handicaps du matériau CZTS que ce soit en termes de pro-
priétés intrinsèques, de mise en œuvre ou de pertinence économique. Tout d’abord, les
propriétés physiques des deux matériaux sont décrites et comparées puis les technologies
de dépôt seront abordées. Ces technologies de dépôt se séparent en deux grandes voies :
les méthodes de dépôt sous vide et les méthodes hors-vide.
6
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 7
Parmi les chalcogénures utilisées dans le solaire photovoltaı̈que, les chalcopyrites (CIGS)
et kësterite (CTZS) sont utilisées dans la même architecture de cellule et utilisent donc le
même principe de fonctionnement. Il s’agit d’une hétérojonction entre l’absorbeur, semi-
conducteur de type p, et les couches tampon et fenêtre, semi-conducteurs de type n. La
figure 1.1 décrit l’architecture standard utilisée pour les cellules solaires CIGS et CZTS.
Le support est un verre sodo-calcique sur lequel est déposé le contact arrière métallique
en molybdène (∼ 500 nm). Ce contact collecte les porteurs positifs ou trous générés sous
éclairement. L’absorbeur, c’est-à-dire le composé qui génère les paires électrons/trous sous
éclairement, est une couche de CIGS ou de CZTS (∼ de 1 à 3 µm d’épaisseur). De par leur
gap direct, ces composés absorbent l’intégralité du spectre solaire en quelques micromètres
là où le silicium en requiert plus de 50. Une jonction pn est formée à la surface de l’absor-
beur par une couche de sulfure de cadmium CdS (∼ 50 nm), semi-conducteur faiblement
dopé n. Le CdS est en très grande majorité déposé par bain chimique. Du fait de la
toxicité du cadmium, des couches tampons alternatives à base de Zn(O,S) sont étudiées
[2][3][4]. Un couche d’oxyde de zinc (ZnO) intrinsèque, faiblement dopé n est déposée sur
le CdS, elle est appelée couche fenêtre. Un oxyde transparent conducteur (TCO) composé
d’un semi-conducteur fortement dopé n, à base de ZnO :Al ou d’ITO (indium tin oxide),
permet de collecter les électrons. Dans certains cas, un contact ohmique obtenu par des
grilles Al-Ni peut être utilisé pour améliorer la collecte des électrons.
propriétés physiques et électroniques de ces matériaux mais aussi dans l’état de leur
compréhension et de leur industrialisation. Alors que la technologie CIGS est déjà présente
sur le marché mondial sous la forme de modules en couches minces avec des rendements
records d’environ 15 % (module de 1.44 m2 ) détenus par Samsung [6], le CZTS reste à ce
jour au stade de l’étude au laboratoire. Et pour cause, les rendements records du CZTS
ne permettent pas encore d’envisager son industrialisation : 12.6 % pour un petite cellule
de 0.42 cm2 [7] quand les rendements en laboratoire pour le CIGS dépassent les 20 %
[8]. Ces différences d’aboutissement s’expliquent dans un premier temps par l’antériorité
de l’état de l’art du CIGS face au CZTS, les premières cellules CuInSe2 (CIS) datent
des années 1970 alors que les premières cellules CZTS datent de la fin des années 1990
[9]. Néanmoins, ces différences d’efficacité s’expliquent aussi par les propriétés de chaque
matériau. Ces propriétés sont donc décrites et comparées dans les paragraphes suivants.
Les deux structures CIGS et CZTS sont dérivées de la blende de zinc (ZnS) composée de
deux réseaux cubiques à faces centrées de cations (Zn2+ ) et d’anions (S2− ) interpénétrés
et décalés d’un vecteur (1/4 ;1/4 ;1/4).
Dans le cas du CIS/CIGS, selon la répartition des cations de valence I (Cu) et III (In et
Ga) plusieurs phases cristallines sont possibles. Si la répartition des cations de valence
I et III est aléatoire, la phase cristalline est dite sphalérite (groupe d’espace F-43m), il
s’agit d’une maille cubique. En revanche si la répartition de ces cations est ordonnée,
deux phases cristallines existent. La phase chalcopyrite (du groupe d’espace I-42d), celle
qui nous intéresse, peut coexister avec la phase dite CuAu (du groupe d’espace P4m2)
dénommée ainsi en référence à la position alternative des cations de valence I et III selon
des plans (001). Les phases chalcopyrite et CuAu ont des structure tétragonales. Les trois
structures sont représentées à la figure 1.2.
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 9
Figure 1.2: Structures cristallographiques (a) sphalérite, (b) chalcopyrite, (c) CuAu.
Sphères noires : cuivre, sphères rouges : indium/gallium, sphères vertes : soufre/selenium
Figure 1.3: Structures kësterite (gauche) et stannite (droite) : grandes sphères jaunes :
S et/ou Se, bleues : cuivre, petites sphères jaunes : zinc, sphères rouges : étain [12]
Selon la composition chimique, les paramètres de maille des structures kësterite et chal-
copyrite évoluent. En effet, les distances interatomiques varient selon les atomes présents.
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 10
Comme l’indique la table 1.1, la substitution d’atomes de soufre par des atomes de
sélénium et la substitution d’atomes de gallium par des atomes d’indium augmentent
les paramètres de maille. Ceci s’explique aisément, puisque le diamètre des atomes de
sélénium est plus important que celui des atomes de soufre. Il en est de même pour
les atomes d’indium par rapport au gallium. Des paramètres de mailles intermédiaires
entre les structures sont obtenus pour leurs solutions solides, par exemple : CuIn(S,Se)2 ,
Cu(In,Ga)Se2 , Cu(In,Ga)(S,Se)2 , Cu2 ZnSn(S,Se)4 . De plus ces paramètres de maille va-
rient linéairement avec la composition selon la loi de Vegard [13]. En effet, pour les këste-
rites, les paramètres de mailles varient de façon linéaire avec la substitution d’atomes S
par Se entre les deux quaternaires Cu2 ZnSnS4 et Cu2 ZnSnSe4 .
De la même manière que les paramètres de maille, la largeur de bande interdite (ou énergie
de gap) varie linéairement avec la composition chimique. La solution solide Cu(In,Ga)(S,Se)2
peut posséder une largeur de bande interdite comprise entre 1.0 eV (pour le CuInSe2 ) et
2.4 eV (pour le CuGaS2 ). Dans le cas des kësterites, la plage de valeurs disponibles est plus
restreinte : entre 1.0 eV pour le Cu2 ZnSnSe4 et 1.5 eV pour le Cu2 ZnSnS4 . Néanmoins,
cet écart plus faible n’est pas un handicap puisque la valeur idéale d’énergie de gap pour
la conversion photovoltaı̈que se situe entre 1.0 et 1.5 eV [10]. Le contrôle du gap est très
important puisque qu’il détermine le domaine du spectre solaire absorbé par le matériau
et influe donc directement sur le rendement de conversion photovoltaı̈que. Il est alors
évident que les chalcopyrites et kësterites sont idéales pour le photovoltaı̈que puisque
leurs énergies de gap sont à la fois idéalement situées et de surcroit modifiables par la
composition chimique. Les meilleurs rendements photovoltaı̈ques des couches minces de
chalcopyrites et kësterites sont d’ailleurs obtenus avec des solutions solides [7][8].
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 11
Une fois la structure cristalline identifiée et l’énergie de gap ajustée via la composition,
le second paramètre indispensable à maı̂triser dans le matériau pour son application à la
conversion photovoltaı̈que est sa concentration en porteurs de charge. Dans le cas des chal-
cogénures, les porteurs proviennent de la présence de défauts dans le matériau provoqués
en majorité par des écarts à la stœchiométrie. Cependant, un écart à la stœchiométrie trop
important implique la présence de phases secondaires dans le matériau. Ce paragraphe
décrit donc en parallèle, les types de défauts rencontrés dans les chalcogénures ainsi que
l’évolution des phases cristallines en présence en fonction de la composition chimique.
Dans le cas des kësterites, le rôle des défauts est plus complexe. Tout d’abord, il est
nécessaire de relever que la liaison Sn-S est fortement covalente à l’opposé des liaisons
Zn-S et Cu-S qui sont ioniques et donc plus enclines à générer des défauts. De manière
identique aux chalcopyrites, la conductivité de type p du matériau provient de lacunes de
cuivre V− Cu . Néanmoins, les types de défauts majoritaires diffèrent entre la composition
stœchiométrique et les compositions déficitaires en cuivre et excédentaires en zinc.
Que la kësterite soit à base de soufre ou sélénium, le défaut Cu− Zn , c’est-à-dire un atome
de cuivre sur un site de zinc est dominant pour des compositions stœchiométriques. Son
énergie d’ionisation est plus importante que celle de la lacune de cuivre V− Cu , cepen-
dant il contribue à la conductivité intrinsèque de type p des matériaux Cu2 ZnSnS4 et
Cu2 ZnSnSe4 . Le défaut V− Cu , possède des énergies d’ionisation et de formation similaires à
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 12
celles observées dans les chalcopyrites cependant sa concentration est nettement inférieure
au défaut Cu− Zn .
Cu
Dans les compositions déficitaires en cuivre et riches en zinc ( ≈ 0.8) la lacune
Zn + Sn
de cuivre devient le défaut dominant et contribue à la conductivité de type p du matériau
[15]. Ce pourrait être une explication à l’origine des meilleurs rendements observés pour le
CZTS sur des compositions déficitaires en cuivre et riche en zinc [16]. Dans les matériaux
CZTS hors stœchiométrie, de nombreux complexes de défauts peuvent se former : [ V− Cu +
+ 2− 2+
ZnCu ], [ZnSn + 2CuZn ] et [2CuZn + SnZn ]. Pour finir, l’apparition de niveaux profonds,
− −
qui sont des pièges à électrons, semble plus faible dans le CZTSe que dans le CZTS ce
qui expliquerait les rendements plus faibles des couches minces Cu2 ZnSnS4 à ce jour.
Ces niveaux profonds sont la lacune de soufre/sélénium V2+ 2+
S ou VSe et la substitution
Sn2+
Zn [15]. Les résultats de simulations permettant d’établir les énergies de formation des
différents défauts en fonction de la composition sont présentés en figure 1.4. Les défauts
peuvent également être générés par les joints de grains dans la couche mince. Si ceux-
ci favorisent les recombinaisons et diminuent le Voc , il y a un consensus sur le fait que
ces joints de grains sont moins néfastes dans les chalcopyrites que dans d’autres semi-
conducteurs [17][18].
Figure 1.4: Energie de formation des complexes de défaut dans Cu2 ZnSnS4 d’après
Chen et al. [15]
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 13
Figure 1.5: Diagramme pseudo ternaire Cu2 Se-In2 Se3 -Ga2 Se3 pour des composés de
formules Cu1−Z (In,Ga)1+Z/3 Se2 [19]
La phase CIGSe et ses OVC, sont stables sur une large plage de compositions chimiques
représentées en gris sur la figure 1.5 . De manière générale, des compositions déficitaires en
Cu
cuivre ( = 0.9) sont utilisées pour accroı̂tre la quantité de défaut VCu− et pour
In + Ga
limiter l’apparition de phases binaires à base de cuivre et soufre/sélénium qui diminuent
le rendement. Dans la formule Cu1−Z (In,Ga)1+Z/3 Se2 , utilisée dans la figure 1.5, pour un
nombre Z compris entre 0 (CIGSe stœchiométrique) et 0.6 (phase OVC CuIn3 Se5 ), la
phase CIGS est présente [19]. Comme il a été dit précédemment, la présence de phases
OVC est bénéfique pour l’efficacité de la cellule si elles sont présentes aux interfaces
(contact avant et arrière). Ces observations sont les mêmes pour les chalcopyrites de
soufre et la solution solide soufre/sélénium.
Dans le cas des kësterites à base de soufre ou sélénium, la fenêtre de compositions chi-
miques est beaucoup plus restreinte comme le démontrent les figures 1.6 et 1.7. En dehors
des zones numérotées 1 dans les diagrammes, des phases secondaires sont formées. Il peut
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 14
s’agir soit de binaires soit de ternaires tels que le Cu2 SnS3 . Contrairement aux chalco-
pyrites, des phases de type OVC bénéfiques pour la conversion photovoltaı̈que n’ont pas
été observées. Il est d’ailleurs probable que les compositions donnant les meilleurs rende-
Cu Zn
ments dans la littérature ( =0.8 et =1.2), idéales en terme de concentration
Zn + Sn Sn
de porteurs, soient des compositions impliquant la présence de phases secondaires. Cela
constituerait une explication supplémentaire à l’infériorité des rendements de conversion
photovoltaı̈que obtenus en kësterites vis-à-vis des chalcopyrites.
Il est également nécessaire de préciser que les diagrammes des figures 1.6 et 1.7 sont
incomplets pour décrire les phases secondaires observables dans les kësterites. En effet
ils sont établis pour un degré d’oxydation constant pour chaque élément : cuivre (I),
zinc (II) et étain (IV). Or il a été établi par Scragg et al. que les kësterites peuvent se
décomposer en phases binaires contenant des sulfures et/ou sélénures d’étain (II) [21].
Plus précisément, l’apparition de ces phases secondaires est observée lors de l’élaboration
de cellules CZTS/Se. En contact arrière, une réaction chimique avec le molybdène favorise
la formation de binaires CuS/Se, ZnS/Se et SnS/Se au détriment du CZTS/Se. Au niveau
du contact avant, lors du recuit de cristallisation de la couche, un départ d’étain ou de
sulfure/sélénure d’étain peut être observé [21].
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 15
Figure 1.8: Mailles cristallines des phases kësterite et kësterite désordonnée [25]
La seconde problématique relative aux similitudes entre cuivre et zinc est la difficulté
que cette similitude entraine sur les caractérisations structurales des matériaux kësterite.
Cette difficulté s’observe notamment en diffusion des rayons X (DRX). Les atomes de
cuivre et de zinc possèdent des facteurs de diffusion des rayons X similaires. Ces facteurs
de diffusion associés aux paramètres de mailles très proches des phases ZnS, Cu2 SnS3
et CZTS, les rendent difficilement différentiables par diffraction des rayons X comme le
montre la figure 1.9.
Or, l’apparition de ces phases secondaires est probable, comme le démontrent les études de
matériaux du paragraphe précédent. Pour pallier cette difficulté, il est commun d’avoir
recours à la spectroscopie Raman. La profondeur de pénétration du laser utilisé par
spectrométrie Raman dépend de sa longueur d’onde mais des premiers calculs montrent
que celle-ci est d’environ 150 nm pour le CZTS et une excitation à 532 nm [26]. Il est
donc très difficile de conclure sur la composition cristallographique complète d’une couche
mince CZTS à partir de mesures DRX et Raman.
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 17
Figure 1.9: Diffractogrammes DRX simulés pour les phases kësterite CZTS (rouge),
CTS (violet) et zinc blende (bleu) [27]
L’intégralité des méthodes de caractérisation utilisées ainsi que leurs avantages et limites
seront plus amplement détaillés au chapitre 3.
Compte tenu des paragraphes précédents, les chalcopyrites sont des matériaux plus tolérants
aux écarts à la stœchiométrie et permettent la fabrication de cellules solaires plus perfor-
mantes.
Malgré leurs avantages indéniables pour la fabrication de cellules solaires, les chalcopy-
rites comportent des éléments tels que l’indium, le gallium et le sélénium dont le coût
est susceptible de rapidement évoluer. L’indium et le gallium sont déjà les éléments les
plus chers utilisés dans les cellules solaires en couches minces [28]. Comme l’indique la
figure 1.10, même si l’indium et le gallium ne sont pas les métaux les plus rares, ils font
partie des métaux les plus chers. La production annuelle d’indium (production primaire
et résidus de l’extraction du zinc) s’élève à 600 tonnes par an [29]. Cette production se
fait majoritairement en Chine.
Figure 1.10: Concentration des éléments sur la croute terrestre (ppm) et leurs prix ($
par tonne)[28]
Conclusion intermédiaire
Parmi les chalcogénures , les chalcopyrites Cu(In,Ga)(S,Se)2 et les kësterites
Cu2 ZnSn(S,Se)4 découlent de la même structure cristalline, celle de la blende de zinc.
Même si leurs propriétés en termes de gap sont similaires, les chalcopyrites sont beaucoup
plus tolérantes sur les écarts à la stœchiométrie que les kësterites. Le Cu(In,Ga)(S,Se)2
est également plus facile à caractériser. Néanmoins les contraintes économiques sur le
marché de l’indium et l’abondance des composés du Cu2 ZnSn(S,Se)4 en font une alter-
native crédible à la technologie chalcopyrites. Il est maintenant nécessaire de développer
les technologies existantes pour la fabrication de couches minces.
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 19
Jusqu’à présent, la très grande majorité des procédés industriels de fabrication de couches
minces photovoltaı̈ques s’effectuent sous vide. Dans cette atmosphère raréfiée, le taux
d’impuretés est minimisé et permet l’obtention de matériaux de qualité photovoltaı̈que.
Cette section détaille donc les différents procédés sous vide existants. Deux stratégies
principales sont connues pour la fabrication des couches minces de chalcogénures :
• Les procédés en une étape, où l’ensemble du matériau cristallin est obtenu à la
suite du dépôt.
• Les procédés en deux étapes qui consistent à déposer une couche contenant uni-
quement les métaux ou un quaternaire amorphe lors de la première étape et de
cristalliser le matériau lors d’un recuit sous atmosphère de chalcogène (soufre ou
sélénium).
La pulvérisation cathodique (1.11) aussi appelée dépôt PVD (ou sputtering en anglais) est
un procédé largement utilisé pour le dépôt de métaux et céramiques en couches minces.
Dans un gaz neutre (généralement de l’argon) et sous un vide secondaire (de l’ordre
de 10−4 Pa), une cible métallique contenant les éléments à déposer est placée dans un
plasma. Les ions du plasma arrachent les atomes de la cible qui viennent ensuite se
recondenser sur le substrat. Il est possible de jouer sur l’uniformité et la porosité du film
final grâce à la pression du plasma. Une pression plus élevée implique un nombre de
collisions accru entre les ions du plasma et la cible et de ce fait un taux de déposition plus
important, souvent accompagné d’une porosité du film déposé plus importante. Obtenir
un film compact requiert donc de travailler à de faibles pressions, ce qui ralentit la vitesse
de dépôt. Dans certains cas, pour accélérer cette vitesse de dépôt à basse pression, un
champ magnétique est appliqué pour piéger les ions près de la cible. On parle alors de
pulvérisation cathodique magnétron (magnetron sputtering en anglais). Selon le matériau
composant la cible (conducteur ou isolant) il peut être préférable de travailler sous courant
continu (DC) ou alternatif (RF pour radio-fréquence). Pour finir, dans le cas de dépôt
d’oxydes, de nitrures ou de carbures, une atmosphère réactive peut être choisie (O2 , N2
ou CH4 ) à la place du gaz neutre.
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 20
Katagiri et al. [33] ont développé un appareillage de dépôt en ligne (figure 1.12) pour la
synthèse de couches minces CZTS. Le système est placé sous vide de 10−4 Pa avec une
source d’argon à 0.5 Pa. Les cibles utilisées sont à base de Cu, ZnS et SnS. Le temps
de dépôt varie de 15 minutes à une heure. Tous les échantillons sont ensuite recuits sous
atmosphère N2 + 20 % H2 S pendant trois heures. Il s’agit donc d’un procédé en deux
étapes. L’optimisation des concentrations permet d’atteindre un rendement de 5.74 %
[33]. Un autre procédé en deux étapes cette fois recuit sous H2 Se pur permet l’obtention
d’un matériau aux rendements plus importants (9.5 %) [34].
Figure 1.12: Schéma du montage utilisé par Katagiri et al. pour le dépôt PVD de
CZTS [33]
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 21
Les deux procédés de dépôt sous vide présentés ici donnent lieu à des matériaux de haute
pureté. Cependant leurs coûts de mise en œuvre et la présence de vide poussé les rendent
onéreux, c’est pour cela que des dépôts hors vide sont développés.
Les différentes méthodes de synthèse présentées dans les paragraphes suivants, à l’in-
verse des procédés physiques abordés précédemment, ne requièrent pas l’utilisation du
vide. Bien que la majorité d’entre elles puissent être développées à l’échelle industrielle,
certaines techniques sont uniquement destinées à l’étude en laboratoire.
L’électrodépôt des métaux Cu, Zn et Sn pour les kësterites et Cu, In et Ga pour les chal-
copyrites est une des principales voies de dépôt chimique. Il se déroule dans un électrolyte,
c’est-à-dire un bain contenant les ions métalliques solvatés par le solvant et/ou par des
complexants. Lors de l’application d’un courant aux bornes de deux électrodes (anode et
cathode) plongées dans l’électrolyte, les cations métalliques se réduisent en s’adsorbant à
la surface de l’anode. Comme les potentiels de réduction varient d’un élément chimique
à l’autre. Les 3 métaux Cu, Zn et Sn sont généralement déposés successivement dans
des électrolytes différents, de manière à pouvoir faire varier les concentrations, le pH,
les potentiels électriques et complexants utilisés dans chaque électrolyte. Par exemple,
dans le procédé développé par Scragg et al. le premier bain contient 1.5 mol/L de NaOH,
50 mmol/L de CuCl2 et 0.1 mol/L de sorbitol (complexant). Le dépôt s’effectue sur le
molybdène avec un potentiel de –1.14 V / Ag — AgCl (c’est l’électrode de référence).
Le second bain est utilisé sous un potentiel de –1.21 V / Ag — AgCl en utilisant une
solution alcaline contenant 2.25 mol/L de NaOH, 55 mmol/L de SnCl2 et 0.1 mol/L de
sorbitol. Pour finir, le zinc est déposé sur l’étain à un potentiel de –1.20 V / Ag — AgCl
à partir d’une solution de 0.15 mol/L de ZnCl2 tamponnée à pH 3. Après recuit sous
atmosphère de soufre, les couches minces présentent la phase kësterite détectée en DRX
accompagnée de traces de SnS2 . Cette même équipe présentera des cellules de rendement
3.2 % en 2010 obtenues par le même procédé [37].
Cependant, des procédés de dépôts plus rapides sont possibles en utilisant un électrolyte
contenant les 3 cations métalliques.Ce procédé est appelé co-électrodépôt. En 2008 Araki
et al. ont présenté des couches obtenues à partir d’un seul bain contenant 20 mmol/L de
sulfate de cuivre (II) pentahydraté, 0.2 M de sulfate de zinc heptahydraté, 10 mmol/L
de chlorure d’étain (II) deshydraté et 0.5 mol/l de tri-sodium citrate déshydraté dans de
l’eau ultrapure. Le dépôt se déroule pendant 20 minutes sous un potentiel d’environ -1.1
à -1.2 V / Ag — AgCl (électrode référence). Après recuit à 600 ◦ C pendant 2 heures sous
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 23
atmosphère de soufre et d’azote, ces couches minces donnent lieu à des cellules solaires
de 3.14 % de rendement sous AM 1.5 [38].
Une autre famille de procédés de fabrication de couches minces est basée sur l’utilisation
de précurseurs ioniques en solution. Selon le solvant et la méthode de dépôt, les résultats
obtenus en cellules sont très différents. Les paragraphes suivants séparent donc cette
famille de procédés en fonction de leurs applications.
Cette méthode consiste à déposer directement sur le contact arrière de la cellule en mo-
lybdène une solution contenant tous les éléments chimiques du CZTS. Dans cette solution,
tous les composés sont sous forme de précurseurs moléculaires dissous dans un solvant :
c’est le sol. Une fois le solvant évaporé, les composés sont chauffés et réagissent entre eux
pour former du CZTS : c’est le gel.
Les solvants utilisés pour les sols sont l’éthanol [40], le 2-methoxyethanol [41][42], la py-
ridine [43] ou le DMSO [44] par exemple. Dans le cas du DMSO le sol est dilué dans
l’acétone pour augmenter sa mouillabilité. Les sols contiennent des précurseurs de cuivre,
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 24
zinc et étain. Ces précurseurs peuvent être des acétates, nitrates, sulfates, chlorures ou
iodures. Pour homogénéiser les vitesses de réaction des cations, les auteurs peuvent choi-
sir d’utiliser des précurseurs différents : Tanaka et al. [41] mélangent l’iodure de cuivre,
l’acétate de zinc et le chloure d’étain (II) dans la pyridine avec un large excès de thiourée.
Certains auteurs ajoutent de la monoéthanolamine pour homogénéiser la réactivité des
cations [45]. Un large excès de source de soufre (e.g. thiourée ou thioacétamide) est tou-
jours introduit avec les cations métalliques. Les sols sont majoritairement déposés par
spin-coating (procédé de dépôt présenté en détails au chapitre 2), mais le doctor bla-
ding (ou couchage à lame en français) et le dip-coating [46] sont également rencontrés
(techniques également présentées au chapitre 2). Après plusieurs dépôts successifs pour
atteindre l’épaisseur requise, les dépôts sont séchés sous air à environ 300 ◦ C, selon les
auteurs, puis recuits sous atmosphère réactive (N2 + S, Se ou H2 S)[41–43]. Le princi-
pal inconvénient de ce procédé est que tous les contre-ions des précurseurs doivent être
éliminés lors du séchage. A première vue, il est possible de limiter ces pollutions en choi-
sissant efficacement le solvant et les conditions de séchage et recuit puisque Schnabel et
al ont obtenu des rendements de 7.5 % en dissolvant des acétates de cuivre et chlorures
de zinc et étain (II) dans le DMSO [44]. Après un dépôt par doctor blading, l’échantillon
est séché une minute à 300 ◦ C et 6 minutes à 540 ◦ C sous atmosphère N2 + Se. L’équipe
de Schnabel communique des rendements de 10.3 % sans préciser si les paramètres de
dépôt et recuit sont identiques. L’approche sol-gel est généralement mise en œuvre avec
des techniques de dépôt lentes comme le spin coating et le dip coating, c’est pourquoi le
dépôt par spray pyrolyse est étudié.
S’il existe plusieurs géométries de spray pyrolyse [47], le principe reste toujours le même
(figure 1.15) : nébuliser une solution de précurseurs contenant tous les cations métalliques
et un excès de source de soufre sur un substrat chauffé. Quand la solution de précurseurs
arrive en contact avec le substrat, le solvant est évaporé et la réaction de formation du
CZTS a lieu. Contrairement au dépôt sol-gel précédent, la solution de précurseurs est
toujours à base de précurseurs chlorés et de thiourée. La thiourée est introduite en excès
pour compenser la perte de soufre due au traitement thermique et pour maintenir le
cuivre sous forme d’un complexe soluble [48].
Il existe une moyen de déposer des solutions de précurseurs sans que celles-ci ne contiennent
de pollutions organiques telles que les contre-ions des précurseurs métalliques ou de la
source de soufre. Cette méthode consiste à utiliser l’hydrazine (N2 H4 ) comme solvant.
L’hydrazine est un composé volatil, fortement réducteur et capable de dissoudre les sul-
fures. Ces solutions sont pour la plupart déposées par spin-coating. Comme l’hydrazine
est un composé inflammable et très toxique [53], ces dépôts sont effectués en boite à gants.
Ces contraintes rendent impossible le développement à l’échelle industrielle. Néanmoins,
cette technique de mise en œuvre est tout à fait pertinente pour l’étude des matériaux.
Le procédé à base d’hydrazine développé par l’équipe de Mitzi et al. au Watson Research
Center d’IBM est d’ailleurs la méthode de fabrication des meilleures couches minces
de kësterite [7]. Les cellules à bases de chalcopyrites fabriquées avec ce procédé sont
également les plus performantes obtenues en voie liquide .
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 26
Dans ce procédé, les précurseurs sont des sulfures ou sélénures binaires dissous dans
l’hydrazine (figure 1.16). Plusieurs dépôts successifs sont effectués en spin coating (de
l’ordre de 5 [55]) pour obtenir une couche finale d’épaisseur comprise entre 2 et 2.5 µm.
Après dépôt, la couche est recuite 5 minutes entre 500 ◦ C et 540 ◦ C selon les publications
[7, 55, 56] sous N2 . La couche mince est alors très cristalline comme le démontre la figure
1.17.
Une solution permet d’utiliser des solvants non toxiques tels que l’eau ou l’éthanol
pour déposer les couches de chalcogénures sans requérir de contre-ions potentiellement
néfastes : l’usage de nanoparticules. Les nanoparticules sont des solides nanométriques
dispersés dans un solvant, on parle alors de dispersion colloı̈dale. La théorie relative à ces
dispersions colloı̈dales est présentée plus en détails dans le chapitre 2.
Il existe plusieurs moyens de synthétiser des nanoparticules. Ces différentes voies sont
présentées dans les paragraphes suivants. L’objectif de ces paragraphes est de discriminer
les principales familles de synthèses. Plus de détails sur les conditions de synthèse et les
mécanismes mis en jeux seront présentés au chapitre 4.
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 28
Figure 1.19: Couche mince CZTSe contenant du germanium avant (haut) et après
recuit sous vapeur de sélénium (bas) [59]
Les monograins sont des particules de tailles millimétriques qui sont majoritairement
dédiées aux études structurales du matériau (figure 1.20).
Le principe de ces synthèses consiste à introduire les réactifs dans des ampoules de quartz
qui sont ensuite scellées et chauffées à plus de 900 ◦ C pendant plusieurs jours puis re-
froidies lentement (quelques ◦ C par heure) [60]. Même si ces synthèses sont très longues
et donnent des objets de tailles très supérieures aux couches minces habituelles, il est
possible de les exploiter après broyage pour fabriquer des cellules [61].
Figure 1.20: Exemple de monograins synthétisés dans le cas d’une étude sur les modes
Raman du CZTS [62]
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 29
Les nanocristaux sont des nanoparticules cristallines, chaque nanoparticule est en fait
un cristal de quelques nm. Ces synthèses se déroulent dans des solvants coordinants
(par exemples l’oleylamine, l’oxyde de trioctylphosphine, l’octadécène), c’est-à-dire des
solvants capables de complexer les métaux et le soufre ou le sélénium. Les synthèses de
nanocristaux se séparent en deux procédés : le procédé hot-injection et le procédé heating-
up. Le procédé hot-injection consiste à injecter une solution chauffée contenant le soufre
dans une solution plus froide contenant les précurseurs métalliques. Ce procédé permet de
contrôler très précisément la nucléation et la croissance des nanoparticules. La nucléation
a lieu lors de l’injection et la croissance est contrôlée par la température après injection,
c’est-à-dire par la température de la solution de précurseurs métalliques.
Figure 1.21: Exemple de nanocristaux CZTS synthétisés par méthode “heating up”
observés en MET haute résolution [63]
Comme le procédé hot-injection est très difficile à développer à plus grande échelle, le
procédé heating-up a été développé. Il consiste à chauffer avec une rampe de température
contrôlée une seule solution contenant tous les précurseurs [57]. Les nanocristaux obtenus
sont plus polydisperses (figure 1.21) mais la synthèse est plus facilement développable à
grande échelle. D’ailleurs une synthèse heating up de nanocristaux de CZTS en réacteur
continu a déjà été développée [64].
Chapitre 1. Les chalcogénures en couches minces et leurs procédés de fabrication 30
Comme on peut le voir sur la figure 1.18, les nanoparticules synthétisées sont entourées
d’une couronne de solvant coordinant. C’est pourquoi des ligands inorganiques peuvent
être utilisés pour remplacer les ligands organiques après synthèse [58]. Des rendements de
plus de 8 % ont été obtenus à partir de ce type de nanocristaux déposés en doctor blading
et recuits sous atmosphère réactive et ce notamment par incorporation de germanium
dans le CZTS, la cristallinité augmente après recuit ; cependant, une couche de faible
cristallinité riche en carbone est observée au niveau du molybdène [59] (figure 1.19).
Il est possible de synthétiser des nanoparticules de CZTS dans des solvants autres que
l’oleylamine, moins toxiques et à plus basse température. Il s’agit dans ce cas de synthèse
solvothermale. Ces synthèses peuvent se dérouler dans l’eau ou bien dans des solvants à
point d’ébullition plus élevé comme l’éthylène glycol ou le triéthylène glycol. *L’avantage
de ces synthèses est de se dérouler en autoclave. Ces procédés sont plus facilement trans-
posables à l’échelle industrielle que ne le sont les synthèses “hot-injection” et “heating
up”. De plus, des systèmes de chauffage à micro-ondes, plus rapides, sont utilisables pour
ce type de synthèses. Dans ces synthèses, un complexant tel que l’éthylène diamine ou la
triéthanolamine est utilisé pour équilibrer les vitesses de réactions des cations métalliques
vis-à-vis de la source de soufre [66], ce point sera plus amplement détaillé au paragraphe
4.1 du chapitre 4.
Figure 1.22: Clichés MET de nanoparticules CZTS synthétisées dans différentes condi-
tions [67][68]
Conclusion du Chapitre 1
Les composés CIGS et CZTS peuvent s’employer dans la même géométrie de cellules
grâce à leurs structures cristallines et électroniques proches. Le CZTS est un matériau
plus compliqué à caractériser et beaucoup moins tolérant que le CIGS en terme de compo-
sition. Les voies de dépôt sous vide sont exploitées pour le CZTS mais elles ne présentent
pas les rendements records pour le matériau. Du fait de leur coût de fonctionnement,
une large partie de la recherche s’effectue maintenant sur des voies de dépôt hors vide.
La technologie de synthèse du matériau doit être un équilibre entre pureté des réactifs,
faible toxicité des solvants et additifs et faibles coûts. Plusieurs voies existent avec des
résultats plus ou moins avancés. Le type de synthèse solvothermale présente de grandes
opportunités pour réduire les coûts et la toxicité c’est pourquoi elle sera choisie pour la
suite de l’étude.
Chapitre 2
Introduction
Ce chapitre présente les principaux procédés de dépôts d’encre utilisés dans les indus-
tries graphiques et l’électronique. Les propriétés des encres seront présentées de manière
à identifier les contraintes liées à l’impression de couches minces de CZTS pour le pho-
tovoltaı̈que. Dans ce chapitre, les procédés pertinents pour l’application visée seront ap-
profondis. Et ainsi, les stratégies de formulation adéquates seront sélectionnées.
Il existe une grande variété de procédés permettant le dépôt d’un film humide. Avant
toute discussion sur ces procédés de dépôts, il est nécessaire de les répartir en deux fa-
milles. Les procédés de dépôts permettant d’obtenir des motifs sont appelés procédés
d’impression. D’autres procédés de dépôts ne permettent d’obtenir que des aplats voire
des motifs à une dimension, des lignes par exemple. Ce sont des procédés d’enduction. Les
fluides déposées par ces procédés, couramment appelés encres, présentent plusieurs ca-
ractéristiques déterminant leur imprimabilité. Ces caractéristiques varient selon le procédé
de dépôt utilisé et seront détaillées en paragraphe 2.2.1.
— Quel type d’impression : quelle épaisseur déposée, quelle précision et quelle vitesse
de dépôt ?
— Quel support : est-il compressible, souple, poreux, disponible en feuilles ou en
bobines ?
— Quelle encre : quel type de séchage, quel solvant et quelle matière à déposer ?
Chacun de ces points sera successivement abordé dans les paragraphes suivants.
32
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 33
Le choix du procédé de dépôt est déterminé dans un premier temps par le type de motif
à imprimer. S’il s’agit d’un aplat ou bien de motifs à une dimension, comme des lignes,
un procédé d’enduction est suffisant. En revanche, si les motifs déposés sont à deux di-
mensions, un procédé d’impression sera envisagé. Ces procédés sont répartis en deux
catégories : les procédés conventionnels et les procédés numériques. Dans les procédés
conventionnels, l’encre est transférée au support à l’aide d’un élément intermédiaire dont
l’encrage s’effectue uniquement sur les zones appelées “zones imprimantes” qui forment
le motif [70]. Ces éléments intermédiaires sont appelés formes imprimantes. Selon la tech-
nologie, ces formes imprimantes peuvent être souples ou rigides, en relief ou planes. Dans
le cas de l’impression numérique, cette forme imprimante est absente. Cela permet no-
tamment de changer le motif imprimé à chaque impression.
Chaque procédé d’impression utilise des encres dont les formulations sont propres au
procédé [70]. Pourtant ces différentes encres présentent des problématiques communes
relatives à leurs propriétés physico-chimiques. Ces caractéristiques seront détaillées au
paragraphe 2.2.1.
Largement utilisés en laboratoire pour la mise en œuvre de couches minces [71, 72] et
la preuve de concept, certains procédés d’enduction sont également utilisés de manière
industrielle pour la réalisation de dépôts à grande vitesse comme par exemple pour les
applications en ”roll-to-roll” (R2R) [73].
Le drop casting ou “dépôt goutte”, est le plus simple des procédés de dépôts parfois
cités dans la littérature. Il s’agit simplement de déposer à l’aide d’une pipette l’encre
directement sur le substrat. Bien qu’élémentaire cette technique a déjà permis de fabriquer
des cellules solaires à base de CIS [74]. Il est possible de préparer des films homogènes via
ce procédé cependant le contrôle de l’épaisseur finale est très difficile. De plus, un mauvais
séchage du film entraı̂ne très vite des hétérogénéités de la couche comme représenté à la
figure 2.1.
Figure 2.1: Dépôt en drop casting avec séchage inhomogène (gauche) et homogène
(droite) [73]
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 34
Figure 2.2: Principe du dépôt en spin coating (en haut à gauche), présentation de
l’équipement (en haut à droite), répartition de la solution pendant le dépôt (bas) [73]
Le ”dip coating ” ou dépôt par trempage est très couramment utilisé dans les dépôts sol-
gel [73]. Il consiste à tremper l’échantillon dans un bain puis à le sortir à vitesse contrôlée
(figure 2.3). Il est possible de calculer l’épaisseur de fluide déposée en connaissant la
viscosité du mélange, sa densité et la vitesse de sortie du substrat si le fluide présente un
comportement newtonien (décrit au paragraphe 2.2.1.2). Le dip coating est généralement
une technique de dépôt de laboratoire. Son emploi à l’échelle industrielle peut cependant
être envisagé via un substrat souple qui se plonge dans un bain.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 35
Le ”doctor blading” ou couchage à lame est une des rares techniques d’enduction de
laboratoire qui peut être développée à plus grande échelle. Dans ce procédé, l’encre est
déposée sur le substrat puis une lame placée à une hauteur maı̂trisée du substrat est
déplacée à vitesse contrôlée pour effectuer le dépôt comme décrit à la figure 2.4. Lorsque
le doctor blading est présent à l’échelle industrielle, on parle de ”knife over edge coating”
[73].
Tous les procédés d’enduction présentés jusqu’ici ne permettent pas de fabriquer des
motifs. Le seul procédé d’enduction permettant de faire des motifs à une dimension (des
lignes par exemple) est le slot die coating figure 2.5. La tête de dépôt consiste en une
buse linéaire de la largeur du substrat, les encres nécessaires sont fluides, d’une viscosité
de l’ordre de 20 mPa.s. C’est un procédé de dépôt compatible avec les technologies ”Roll-
to-Roll” qui permet donc de déposer à une vitesse de plusieurs mètres par minute.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 36
Figure 2.6: Schéma d’un procédé de dépôt par spray coating ultrasonique pour le
photovoltaı̈que organique [78]
Il existe donc un large panel de procédés d’enduction qui sont employés pour le dépôt de
couches minces. Néanmoins rares sont ceux qui présentent un potentiel développement
à plus grande échelle. De plus, parmi ces procédés développables à plus grande échelle,
ceux permettant d’imprimer des motifs à une dimension sont encore moins nombreux.
Les procédés d’impression quant à eux, permettent d’imprimer des motifs de manière
industrielle. Le choix du procédé se fait alors en fonction du nombre de tirages et des ca-
ractéristiques du substrat. Dans ce qui suit sont décrits les procédés d’impression conven-
tionnels utilisés dans l’électronique imprimée, potentiellement applicables au dépôt de
chalcogénures.
La quasi totalité des procédés d’impression dédiés aux industries graphiques ont été uti-
lisés pour la fabrication à grande échelle de composants électroniques [73, 79].
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 37
Ces procédés se différencient par leurs formes imprimantes qui peuvent stocker l’encre
sur des géométries planes ou en reliefs, par les volumes des productions qui permettent
leur rentabilité ainsi que par la précision en épaisseur et en résolution du motif imprimé.
L’offset est un procédé utilisé pour 80 % de l’édition ainsi que pour les emballages et
en électronique imprimée [79]. Sa forme imprimante est une plaque d’aluminium dont les
zones imprimantes sont recouvertes par un polymère photoréticulé. Ce n’est pas directe-
ment l’encre qui est imprimée mais une émulsion de celle-ci avec la solution de mouillage.
La solution de mouillage est une particularité du procédé offset mais peut être absente
dans le procédé appelé offset waterless [70]. Les encres offset sont très visqueuses et for-
mulées à base de résines dont l’utilisation impliquerait trop de pollutions organiques pour
un dépôt de CZTS.
La flexographie est un procédé d’impression dont les encres sont fluides, la viscosité de
l’encre est en général de l’ordre de 10 mPa.s [80]. La forme imprimante est un photopo-
lymère en relief.
L’héliogravure est un procédé qui utilise des encres aux propriétés voisines de celles
utilisées pour la flexographie. C’est un procédé qui est utilisé pour les très longs tirages
comme les catalogues, et certaines antennes RFID [81]. Contrairement à la flexographie
qui est un procédé en relief, l’héliogravure est un procédé en creux où l’encre est délivrée
au support par un cylindre de cuivre.
La sérigraphie est un procédé d’impression qui se distingue des précédents par l’épaisseur
maximum d’encre qu’il permet de déposer : plusieurs dizaines de micromètres là où
les procédés précédemment décrits ne déposent que quelques micromètres. Le principe
consiste à forcer le passage d’une encre visqueuse à travers un pochoir à l’aide d’une racle,
comme décrit figure 2.7. La sérigraphie est un procédé plus lent que tous les procédés
décrits précédemment, même dans sa configuration rotative. Ce procédé est adapté à l’im-
pression sur textiles, sur polymères ou sur grands formats. Cette méthode d’impression a
été développée pour l’impression de couches minces CZTS. Dans ce cas, les encres sont à
base d’éthyl cellulose dans l’isopropanol [82].
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 38
De tous les procédés conventionnels, seule la sérigraphie a déjà été utilisée pour l’impres-
sion de CZTS. Le procédé offset utilise des encres nécessitant des polymères, sources de
pollution organique. La flexographie n’est pas un procédé suffisamment précis pour le
développement de couches minces photovoltaı̈ques. L’héliogravure serait pertinente si le
support utilisé était souple et compressible, par exemple si les couches minces de CZTS
étaient développées sur support souple. Comme ce travail se base sur un substrat en verre
et molybdène, ce procédé est à exclure. L’unique procédé pertinent pour ce travail serait
donc la sérigraphie.
Par ailleurs, le jet d’encre est très utilisé en électronique imprimée et sera plus pertinent
pour ce travail que les procédés conventionnels. C’est pourquoi il est présenté dans le
paragraphe suivant.
Le jet d’encre est un procédé d’impression sans contact dont le principe consiste à éjecter
des gouttes de liquide d’un volume de l’ordre du picolitre à travers des buses en direction
d’un substrat. Le volume, la vitesse des gouttes ainsi que leur positionnement sur le
substrat sont des paramètres clés de ce procédé. Plusieurs dispositifs existent pour générer
ces gouttes, c’est pourquoi on distingue plusieurs types de procédés jet d’encre.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 39
Figure 2.8: Formation des gouttes dans un procédé jet d’encre continu [84]
Le jet continu, ou CIJ pour “Continuous Ink Jet” est le procédé jet d’encre le plus an-
cien. Les premiers brevets décrivant la technologie d’impression jet d’encre CIJ remontent
aux années 1950 ( US Patent 2566,433). Le principe de cette technologie repose sur les
instabilités de Rayleigh-Plateau, un phénomène physique observé lorsqu’un filet de fluide
se scinde en plusieurs gouttes sous l’effet d’une perturbation, de manière à minimiser son
énergie de surface. Dans un système jet d’encre CIJ, cette instabilité est utilisée pour
générer des gouttes de volume régulier à hautes fréquences, de l’ordre de 75 kHz (voir
figure 2.8) et ce à travers une buse de 40 à 80 µm de diamètre et à une vitesse de 10 à
50 m/s [84].
Une fois générées, ces gouttes sont soit récupérées dans une gouttière via un circuit qui
réalimente les buses, soit déviées de manière à imprimer le substrat (figure 2.9). Selon
l’équipement, les gouttes peuvent être déviées par effet électrostatique, thermique ou par
flux d’air [86].
Dans le cas de l’excitation thermique, une résistance chauffante (dont la température peut
atteindre 300 ◦ C) entraı̂ne l’apparition d’une bulle de gaz dans le réservoir d’encre [86].
Cette bulle de gaz s’échappe par la buse en propulsant une goutte d’encre (figure 2.12).
Une fois l’encre éjectée, la température diminue et la buse se recharge, c’est d’ailleurs
cette étape qui est limitante au niveau de la fréquence d’éjection.
Historiquement, les procédés DOD sont plus récents que le procédé CIJ. En effet, les
premières machines DOD commercialisées utilisant l’excitation piézoélectrique n’ont été
brevetées que dans les années 1970. On attribue l’avènement du jet d’encre piézoélectrique
à trois principaux brevets : US 3683.212 de 1972, US 3747.120 de 1973 et US 3946.398 de
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 41
1976. Chacun est soutenu par des entreprises américaines et propose une configuration
de cristal piézoélectrique différente (”squeeze mode”,”bend mode” puis plus tard ”push
mode” et ”shear mode”). Le procédé jet d’encre thermique est le plus récent. Le premier
dispositif commercial d’impression jet d’encre thermique est développé en 1979 par la
société Canon et commercialisé en 1981 par la société HP.
En conclusion, le procédé jet d’encre DOD piézoélectrique est le plus adapté au dépôt
de couches minces CZTS. Il a d’ailleurs déjà été utilisé dans de nombreuses applications
pour l’électronique imprimée [89][90][91][92][93].
Quel que soit le procédé d’impression utilisé, la formulation d’une encre requiert la prise
en compte de plusieurs propriétés physico-chimiques. Ces propriétés influencent le com-
portement de l’encre lors de l’impression, comme par exemple l’étalement de l’encre sur
le substrat, la précision du dépôt ou encore le comportement de l’encre lors du séchage.
La tension de surface est une propriété fondamentale de toute encre. Elle conditionne à
la fois son comportement lors du dépôt, son étalement sur le substrat et l’adhésion au
support. La tension de surface est une propriété aisément visible à l’échelle macroscopique.
Elle est à l’origine des phénomènes de capillarité, de mouillage et de formation de gouttes.
Dans un fluide, l’ensemble des molécules qui le composent est en interaction avec ses
proches voisines, et ce de manière isotrope. Cependant, à l’interface entre ce fluide et
un autre fluide, ces interactions deviennent anisotropes. Il se crée donc un gradient de
forces à l’interface entre ces deux fluides. Ce gradient de force provoque une inflexion de
la structure à l’interface. On observe de manière très claire ce comportement dans le cas
de la formation de ménisques. Selon la force des interactions entre les molécules du fluide,
le ménisque formé peut être concave ou convexe, comme représenté en figure 2.13.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 43
Figure 2.13: Origine de la tension de surface (gauche), ménisques formés par l’eau et
le mercure dans le verre (droite)
La tension de surface est donc liée aux interactions entre les molécules du fluide, assurant
sa cohésion. La définition physique de la tension de surface d’un liquide est d’ailleurs
basée sur le travail de cohésion de celui-ci [95]. La tension de surface d’un fluide est
définie comme étant le travail nécessaire (W) pour une augmentation de la surface du
système (A). La tension de surface γL est exprimée selon l’équation 2.2 :
dW = γL dA (2.1)
dW
σL = (2.2)
dA
Avec :
— σL ( N · m−1 ) la tension de surface du liquide
— W ( J) l’énergie du système
— A ( m2 ) l’aire d’interface
Étant donné que les interactions intermoléculaires peuvent être de différents types (Van
der Waals, hydrogène, ioniques...[96]), la tension de surface peut être considérée comme
la somme de deux composantes :
— γLD la composante qui prend uniquement en compte les interactions dispersives,
c’est-à-dire les interactions de London ayant pour origine des fluctuations rapides
de densité électronique autour des atomes, créant un moment dipolaire
— γLP la composante qui regroupe les interactions polaires, c’est à dire les interactions
ioniques, les liaisons hydrogènes ainsi que les liaisons de type Debye (interaction
dipôle permanent, dipôle induit) et Keesom (interaction dipôle permanent, dipôle
permanent)
Le comportement Newtonien est observé pour les huiles pures, l’eau, les alcools... Dans
un fluide newtonien, la contrainte de cisaillement dépend du taux de cisaillement de
manière linéaire. Comme le définit l’équation 2.3, le facteur liant la relation entre taux
de cisaillement et contrainte de cisaillement est une constante, il s’agit de la viscosité du
fluide notée η.
τ = η γ̇ (2.3)
Avec :
— τ ( Pa) la contrainte de cisaillement
— γ̇ ( s−1 ) le taux de cisaillement
— η ( Pa · s) la viscosité
Les fluides à seuil se comportent comme un solide viscoélastique lorsqu’ils sont soumis
à des contraintes de cisaillement dont l’intensité est inférieure à une valeur de seuil alors
qu’ils s’écoulent comme des fluides lorsque cette contrainte est supérieure à cette valeur
de seuil. Parmi ces fluides à seuil, on dénombre deux familles principales :
— Le fluide de Bingham
— Le fluide de Herschel-Bulkley
τ = τ0 + η∞ γ̇ (2.4)
Avec :
— τ ( Pa) la contrainte de cisaillement
— τ0 ( Pa) la contrainte de seuil
— γ̇ ( s−1 ) le taux de cisaillement
— η∞ ( Pa · s) la viscosité
τ = τ0 + K γ̇ n (2.5)
Avec :
— τ ( Pa) la contrainte de cisaillement
— τ0 ( Pa) la contrainte de seuil
— γ̇ ( s−1 ) le taux de cisaillement
— K la consistance du fluide
— n l’indice d’écoulement
Lorsque le fluide est une suspension, la nature de la suspension peut influencer le compor-
tement rhéologique. Les paramètres tels que la fraction volumique des particules suspen-
dues, leurs tailles et répartition granulométrique ou encore l’état d’agrégation sont des
paramètres à prendre en compte. Différents auteurs ont tenté de modéliser la rhéologie
des suspensions par une approche théorique ou expérimentale. Par exemple, le modèle
d’Einstein [99] permet d’évaluer la viscosité d’une suspension de faible concentration
(fraction volumique inférieure à 3%) de particules sphériques dans un fluide newtonien.
Cette relation s’écrit :
η hom
η re = = 1 + 2.5φ (2.6)
η
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 46
Avec :
— η re ( Pa · s) la viscosité relative
— η hom ( Pa · s) la viscosité de la suspension
— η ( ( Pa · s) la viscosité du fluide suspendant
— φ la fraction volumique de particules sphériques
Cette approche est valable pour des suspensions diluées. L’estimation de viscosité dans
le cas d’une concentration supérieure à quelques pourcents volumiques est compliquée
puisque des perturbations des champs des vitesses apparaissent à ces concentrations. Le
modèle de Kreiger-Dougherty [100] permet une estimation de la viscosité selon la relation
suivante :
η hom φ −2.5φm
= (1 − ) (2.7)
η φm
Avec :
— η hom ( Pa · s) la viscosité de la suspension
— η ( ( Pa · s) la viscosité du fluide suspendant
— φ la fraction volumique de particules sphériques
— φm la fraction volumique théorique maximale de particules
Cette différenciation provient des mécanismes mis en jeu pour garantir la stabilité de
ces mélanges. L’instabilité d’une suspension peut avoir deux causes. La première cause
d’instabilité est l’attraction gravitationnelle (et la poussée d’Archimède) qui entraine une
sédimentation (ou crémage) des espèces solides dans la phase liquide. La compétition
entre ces deux forces s’exprime facilement selon l’équation 2.8.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 47
2 ∆ρR2 g
V= (2.8)
9 η0
Avec :
— V ( m · s−1 ) la vitesse de sédimentation
— ∆ρ ( kg−3 m) la différence de masse volumique entre la particule et le liquide
— g ( m · s−2 ) l’accélération de pesanteur
— η0 ( Pa · s) la viscosité du fluide
— R ( m) le rayon de la particule
Il existe donc une force qui déstabilise le système. Dans les dispersions très fines, le
mouvement brownien à l’origine de l’agitation thermique suffit à maintenir la répartition
homogène d’éléments solides. Cependant dans les dispersions d’objets plus volumineux
(∼ 1 µm ) le mouvement brownien est insuffisant pour assurer la stabilité du mélange. Ce
raisonnement justifie la différenciation entre suspension et dispersion colloı̈dale. En effet le
maintien de la stabilité d’une suspension relève du génie chimique alors que la stabilisation
d’une dispersion colloı̈dale implique la maı̂trise de propriétés physico-chimiques qui seront
discutées ci-après.
Pour décrire les procédés de stabilisation d’une suspension colloı̈dale, il est d’abord
nécessaire de discuter la seconde cause d’instabilité. Il s’agit des énergies d’interfaces.
D’une manière similaire à l’interface entre un liquide et une autre phase liquide ou solide
(décrite en paragraphe 2.2.1.1), à la surface de particules se trouvent des atomes moins
coordonnés que ceux du cœur de la particule. De ce fait, il se crée une énergie d’inter-
face que le système tend à minimiser. Plus les objets sont petits, plus l’aire d’interface
augmente.
HR
VV dW = − (2.9)
12s
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 48
Avec :
— H ( J) la constante de Hamaker du système
— VV dW ( J) l’interaction de Van der Waals
— R ( m) le rayon des particules
— s ( m) la distance entre particules
L’intensité de l’attraction liée aux interactions de Van der Waals varie donc inversement
avec la distance entre particules.
Pour empêcher l’agrégation des espèces solides dispersées, il faut maintenir une distance
entre particules suffisante pour éviter leur contact. Cette opération est à la base des
différentes stratégies de stabilisation des dispersions colloı̈dales. En effet, quelle que soit
la stratégie de stabilisation choisie, celle-ci met en œuvre l’adsorption d’espèces chimiques
en surface de particules qui ont le double rôle d’abaisser l’énergie d’interface (et donc les
interactions de Van der Waals) mais également de créer une atmosphère répulsive à la
surface des particules qui les empêche de se rapprocher et donc de s’agréger.
Figure 2.15: Les différents principes de stabilisation colloı̈dale, figure adaptée de [104]
Avec :
— ǫr la constante diélectrique relative du solvant
— ǫ0 ( kg−1 m−3 A2 s4 ) la constante diélectrique du vide
— kb ( JK−1 ) la constante de Boltzman
— T ( K) la température
— NA ( mol−1 ) le nombre d’Avogadro
— e ( C) la charge élémentaire
— I ( mol · L−1 ) la force ionique du milieu
• La température de séchage qui est liée aux points d’ébullitions des solvants uti-
lisés est également à prendre en compte. Ces températures influencent les cinétiques
de séchage, la quantité d’impuretés résiduelles et la génération de fissures dans la
couche [105].
Les propriétés caractéristiques d’une encre ayant été décrites, il est possible d’approfondir
les phénomènes mis en jeu lors de l’impression jet d’encre, et plus précisément par le
procédé d’excitation piézoélectrique.
Une encre dédiée à l’impression jet d’encre ne doit présenter aucun phénomène d’agrégation.
En effet, les constructeurs de têtes d’impression jet d’encre recommandent l’utilisation
de dispersions dont les particules présentent un diamètre à 90 % de la répartition granu-
lométrique (d90 ) cinquante fois plus faible que le diamètre des buses d’éjection.
d
d90 < (2.11)
50
Une stabilisation colloı̈dale insuffisante génère des agrégats susceptibles de boucher les
buses lors de l’éjection de gouttes. Le bouchage des buses s’observe aussi si la volatilité du
solvant de l’encre est inadaptée, plus précisément si cette volatilité est importante. Il est
nécessaire d’obtenir un équilibre au niveau de l’évaporation du solvant de l’encre : celle-ci
doit être suffisamment rapide une fois l’encre déposée sur le substrat mais suffisamment
lente pour éviter tout bouchage de buse.
Des considérations de dynamique des fluides sont également à prendre en compte lors
de la formulation d’une encre jet d’encre. Dans le cas du jet d’encre piézoélectrique, la
formation d’une goutte provient de la compression d’un cristal piézoélectrique au niveau
de l’encre. Dans le cas idéal, la surpression générée par le cristal piézoélectrique provoque
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 51
Figure 2.16: Formation d’une goutte dans un procédé jet d’encre DOD [86]
Le mécanisme de formation d’une goutte dans une tête jet d’encre piézoélectrique fait ap-
pel à des considérations de mécanique des fluides pour modéliser le phénomène d’inertie
qui implique l’éjection d’une goutte mais également à des considérations de tension de
surface pour comprendre le comportement du filet de fluide qui suit la goutte principale.
Il est commun dans les travaux relatifs à la formulation d’encre jet d’encre de recou-
rir à plusieurs nombres adimensionnels pour caractériser ces différentes composantes du
comportement en éjection [97][94][106].
Les trois principaux nombres adimensionnels utilisés en jet d’encre sont les nombres de
Reynolds (Re), de Weber (We) et d’Ohnesorge (Oh) :
Avec :
— ρ ( kg · m−3 ) la masse volumique
— ν ( m · s−1 ) la vitesse du fluide
— η ( Pa · s) la viscosité
— L (m) la longueur caractéristique (souvent le diamètre de la buse)
Avec :
— ρ ( kg · m−3 ) la masse volumique
— ν ( m · s−1 ) la vitesse du fluide
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 52
√
We η
Oh = =√ (2.14)
Re ρσL
η2
Ln = (2.15)
ρσ
Avec :
— ρ ( kg−3 m) la masse volumique
— η ( Pa · s) la viscosité
— σ ( Nm−1 ) la tension de surface
Il est de plus en plus courant d’utiliser le nombre Z (qui est l’inverse du nombre d’Oh-
nesorge) pour comparer le comportement des encres jet d’encre. Selon Kuscer et al., les
propriétés physico-chimiques d’une encre jet d’encre permettent l’éjection d’une goutte si
le nombre Z est compris entre 1 et 10 (figure 2.19). Pour un nombre Z inférieur à 1, les
forces liées à la viscosité de l’encre sont trop importantes et empêchent la génération d’une
goutte en sortie de buse. A l’inverse lorsque ce nombre est supérieur à 10, les forces liées
à la tension de surface deviennent trop importantes et le filament formé après éjection
ne se rétracte pas de manière à former une goutte unitaire. Il y a alors l’apparition de
gouttes satellites.
On distingue les gouttes satellites rapides et les gouttes satellites lentes. Les satellites ra-
pides apparaissent lors de vitesses d’éjection trop élevées et proviennent d’une séparation
d’une partie du fluide à l’avant de la goutte principale comme présenté sur la figure 2.17.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 53
A l’inverse, les gouttes satellites lentes apparaissent derrière la goutte principale. Leur
formation provient d’une mauvaise rétractation de la queue de la goutte principale due
à une tension de surface trop élevée. La queue de la goutte principale se rétracte en une
ou plusieurs gouttes de volume inférieur à la goutte principale (figure 2.18).
Dans le travail de Kuscer et al., reporté à la figure 2.19, on observe aisément l’incidence de
la présence de gouttes satellites et du coefficient Z sur la qualité finale de l’imprimé. Pour
des dispersions de nanoparticules de TiO2 dans l’eau à 10% massique, différents taux de
glycerol sont ajoutés de manière à ajuster la valeur de Z de 14 à 5. Pour les nombres
Z élevés, on observe bien des gouttes satellites, ce qui est cohérent avec un phénomène
d’éjection dominé par la tension de surface. Les gouttes sont alors multiples et la qualité
de l’imprimé en est dégradée.
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 54
Figure 2.19: Dépôts jet d’encre de dispersions de TiO2 dans des mélanges eau/glycerol
dont les valeurs associées de Z sont 14 (a), 11 (b), 9 (c), 5 (d) [108]
Compte tenu des informations données dans ce chapitre et au cours du chapitre 1, il est
possible d’établir les spécifications associées au mode de dépôt qui seront développées
durant ce travail. Ces spécifications portent sur le procédé de dépôt et sur l’encre qui
sera formulée. Pour rappel, ce travail se basera sur des nanoparticules. Les spécifications
portant sur le procédé de dépôt sont diverses. Compte tenu du support majoritairement
utilisé pour les cellules CIGS et CZTS, c’est-à-dire un verre sodocalcique recouvert de
molybdène servant de contact arrière et de l’épaisseur finale déposée, le choix du procédé
de dépôt est restreint. Si les procédés d’enduction sont encore tous envisageables, une
majorité des procédés d’impression décrits précédemment sont hors-jeu. La flexographie
n’est pas envisageable puisqu’elle n’est pas assez précise en termes d’épaisseur déposée.
L’héliogravure n’est pas envisageable puisque son procédé requiert un support compres-
sible, l’offset n’est pas envisageable puisque ses encres requièrent des distillats pétroliers ou
résines qui génèreront beaucoup de pollution organique dans la couche. La sérigraphie et
le jet d’encre restent des procédés d’impression pertinents. Pour les procédés d’enduction,
en tenant compte d’un potentiel développement à grande échelle du procédé de dépôt,
seuls les procédés de spray, doctor blading et slot die restent pertinents. Les spécifications
du photovoltaı̈que se répercutent également sur la formulation de l’encre. Quel que soit
le procédé choisi, le séchage de l’encre ne se fera pas par absorption du solvant par le
support, par oxydo-polymérisation ou photo-polymérisation. De plus l’encre ne pourra
pas contenir de liant, espèce polymérique permettant de promouvoir l’accroche au sup-
port et de limiter la fissuration au séchage. En effet tous ces éléments polymériques sont
susceptibles d’apporter des pollutions organiques dans la couche finale et de détériorer le
Chapitre 2. Propriétés physico-chimiques des encres et procédés d’impression 55
rendement des cellules imprimées. Pour la même raison, la stabilisation colloı̈dale des na-
noparticules dans l’encre sera compliquée, les additifs commerciaux à base de polymères et
utilisant les répulsions stérique ou électrostérique ne pourront pas être utilisés. La stabili-
sation colloı̈dale dans l’encre ne pourra s’effectuer que par répulsion électrostatique ou par
blocage d’adhésion des particules par l’adsorption de ligands. Ligands qui peuvent poten-
tiellement apporter une pollution organique mais qui sont dégradables aux températures
de travail du CIGS et CZTS.
Conclusion du chapitre 2
Malgré un très grand nombre de techniques de dépôts existantes, très peu remplissent
toutes les exigences du dépôt à faibles coûts de CZTS. Dans le cas des procédés d’en-
duction, peu sont développables à grande échelle étant donné qu’ils servent avant tout
à la preuve de concept en laboratoire. Quant aux techniques d’impression, permettant
d’imprimer des motifs, elles nécessitent toutes un type d’encre particulier et ne sont par-
fois pas assez précises pour le dépôt de couche mince. La stabilisation colloı̈dale et le
contrôle des propriétés physico-chimiques en s’interdisant l’utilisation d’additifs de type
polymère sera un des défis de ce travail. Compte tenu de toutes les recommandations
précédentes, cinq procédés restent pertinents : la sérigraphie, le jet d’encre, le “spray”,
le ”doctor blading” et le “slot die coating”. De manière à travailler sur des encres aux
propriétés similaires, deux procédés seront étudiés : le spray et le jet d’encre. Le slot die
nécessite des propriétés similaires au jet d’encre, il ne sera pas abordé, de même que le
doctor blading et la sérigraphie qui nécessitent des encres visqueuses qui risquent d’être
source de pollutions organiques.
Chapitre 3
Protocoles expérimentaux et
méthodes d’analyses
Introduction
Ce chapitre présente l’ensemble des protocoles mis en œuvre ainsi que les techniques
de caractérisation utilisées à chaque étape du procédé. Dans un premiers temps, les
différentes synthèses réalisées par micro-ondes sont présentées, suivies par les méthodes
de caractérisations de nanoparticules. Les procédés de dépôts et de séchage sont présentés
avec leurs paramètres de mise en œuvre. Pour finir, le recuit de cristallisation est détaillé
ainsi que l’ensemble des caractérisations des matériaux obtenus.
Dans un premier bécher, 1 mmol de SnCl4 soit 0.117 mL sont dissous dans 0.9 mL d’une
solution de HCl à 37 % massique. Des cristaux transparents se forment lors du mélange
56
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 57
puis se dissolvent en quelques minutes. Dans un autre bécher, une seconde solution est
préparée à partir de 4 mmol de Na2 S dissous dans 16 mL d’eau distillée. Une troisième
solution est préparée à partir de 2 mmol d’acétate de cuivre et 1 mmol d’acétate de zinc
dissous dans 15 mL d’eau distillée.
Les solutions contenant les précurseurs métalliques sont mélangées, la solution résultant
du mélange présente un pH inférieur à 0.5. Ensuite 10 mmol d’acide mercapto-acétique
(MAA), soit 0.705 mL, sont ajoutés goutte à goutte à cette solution. Un précipité violet
se forme, la solution devient jaune orangé en quelques minutes. Le pH de la solution est
ensuite ajusté à 6 à l’aide d’une solution de NH4 OH de concentration 1 mol/L Enfin,
la solution de Na2 S est ajoutée. La solution résultante est marron et d’un pH de 8.4. La
solution est placée dans un autoclave en PTFE (figure 3.1) et portée à ébullition à l’aide
d’un traitement micro-ondes de 1500 W appliqué pendant 60 secondes.
Dans un premier temps 2.5 mmol de SnCl4 sont dissous dans 25 mmol d’éthylène diamine
(EN) et 10 mL d’eau distillée. La solution obtenue après agitation est jaune clair.
Dans une seconde solution sont ajoutés 5 mmol d’acétate de cuivre dans 10 mL d’eau
distillée et 2.5 mmol d’acétate de zinc dans 10 mL d’eau distillée. Le mélange final présente
une couleur bleu foncé caractéristique des complexes amines-cuivre. Le pH de la solution
est alors de 8.5.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 58
3.5 mL d’une solution de (NH4 )2 S à 20 % massique, soit 4 mmol de (NH4 )2 S, sont ajoutés
au mélange final. Le traitement micro-ondes suivi des lavages des nanoparticules est
identique au protocole 3.1.1.1.
Ce protocole est identique au protocole précédent, excepté pour les précurseurs de cuivre
et de zinc, qui sont alors des sels chlorés. Dans un premier temps, 2.5 mmol de SnCl4 sont
dissous dans 25 mmol d’éthylène diamine et 10 mL d’eau distillée. La solution obtenue
après agitation est jaune clair.
Dans une seconde solution sont ajoutés 5 mmol de chlorure de cuivre dans 10 mL d’eau
distillée et 25 mmol de chlorure de zinc dans 10 mL d’eau distillée. Le mélange final
présente une couleur bleu foncé caractéristique des complexes amines-cuivre. Le pH de la
solution est alors de 8.5.
3.5 mL d’une solution de (NH4 )2 S à 20 % massique, soit 4 mmol de (NH4 )2 S, sont ajoutés
au mélange final. Le traitement micro-ondes suivi des lavages des nanoparticules est
identique au protocole 3.1.1.1.
Dans un premier temps 2.5 mmol de SnCl4 sont dissous dans 10 mmol de thiourée soit
0.76 g et 10 mL d’eau distillée. La solution obtenue est translucide.
Deux autres solutions sont préparées à partir de 5 mmol de chlorure de cuivre dans
10 mL d’eau distillée et 2.5 mmol de chlorure de zinc dans 10 mL d’eau distillée. Ces deux
solutions sont ensuite mélangées. La solution résultante présente une couleur bleutée. La
solution de chlorure d’étain et thiourée est ajoutée goutte à goutte dans la solution de
précurseur de cuivre et zinc sous agitation. Un complexe blanc et pâteux se forme.
3.5 mL d’une solution de (NH4 )2 S à 20 % massique, soit 4 mmol de (NH4 )2 S, sont ajoutés
au mélange final. Le pH de la solution résultante est ajusté à 9 à l’aide d’une solution de
NH4 OH à 1 mol/L.
Le traitement micro-ondes suivi des lavages des nanoparticules est identique au protocole
3.1.1.1.
protocole 3.1.1.1 mais celles-ci sont utilisées dans des volumes de solution dix fois plus
importants.
Une seconde solution est préparée à partir de 200 mL d’eau distillée dans laquelle sont
dissous : 4.13 g d’acétate de cuivre (soit 22.8 mmol) et 2.50 g d’acétate de zinc dihydraté
(soit 11.4 mmol).
Les deux solutions sont mélangées. La solution résultante est identique à celle obtenue
lors du protocole batch après le mélange des solutions de précurseurs métalliques : la
solution est translucide et présente un pH inférieur à 0.5.
15.72 g de MAA (soit 170.7 mmol) sont ajoutés goutte à goutte dans la solution de
précurseurs métalliques. Le comportement de la solution est identique à celui observé
dans le protocole en autoclave. Un précipité violet se forme, puis la solution devient
jaune orangé en quelques minutes.
Une troisième solution est préparée en dissolvant 3.55 g de Na2 S (soit 45.5 mmol) dans
200 mL d’eau distillée. Cette solution est ensuite ajoutée au mélange de précurseurs. Le
mélange final est marron et d’un pH de 8.4.
Le flacon dans lequel est récupérée la solution après traitement est plongé dans un bain
d’eau glacée pour stopper la croissance des nanoparticules après le traitement thermique.
3.1.3 Stabilisation
Le protocole est ici décrit pour une solution de 35 mL de nanoparticules obtenues après
synthèse et lavages.
La dispersion est ensuite traitée par micro-ondes pendant 5 minutes à une puissance de
800W. Après traitement thermique, le volume de la dispersion est complété à 45 mL
par de l’acétone puis celle-ci est centrifugée à 8000 tours/min pendant 5 minutes. Un
surnageant marron est éliminé et les particules sont alors dispersées dans le solvant choisi
pour la suite de l’étude.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 61
Le protocole est plus simple pour cette stabilisation. Le protocole est ici décrit pour une
solution de 35 mL de nanoparticules obtenue après synthèse et lavages.
Un traitement micro-ondes à une puissance de 800W est appliqué pendant 220s en mode
ON/OFF (20s de traitement suivies de 5s de pause, le tout répété 9 fois).
3.1.3.3 Purification
Les particules peuvent nécessiter une purification en voie liquide. Son protocole est établi
pour un gramme de nanoparticules, soit la quantité de nanoparticules préparée par tous
les protocoles en autoclave décrits précédemment.
Après les lavages décrits à la fin de chaque synthèse effectuée en autoclave, les particules
sont redispersées dans 35 mL de pyrrolidone. Cette dispersion est placée dans un autoclave
PTFE et est portée à ébullition et sous pression par un traitement micro-ondes à une
puissance de 1500W pendant 1 minute. Après traitement, l’autoclave est immédiatement
plongé dans un bain d’eau glacée et dépressurisé.
Les particules subissent ensuite les mêmes lavages avec des solutions de (NH4 )2 S à 5 %
massique. Elles sont ensuite redispersées dans le solvant choisi.
Cette section présente l’ensemble des techniques de caractérisation utilisées sur les nano-
particules ainsi que les dispersions colloı̈dales.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 62
kB T
Dh = (3.1)
3πηDt
où :
— Dh (m) représente le diamètre hydrodynamique (il nous informe sur la taille de la
particule)
— Dt ( m2 s−1 ) est le coefficient de diffusion transversal
— kB ( m2 · kg · s−2 · K−1 ) est la constante de Boltzmann
— T (K) est la température
— η ( Pa · s) est la viscosité
Dans ce travail, un Zêtasizer de la marque Malvern mesure le coefficient de diffusion
transversal via la diffusion d’un laser à 632 nm par la dispersion.
Cette mesure s’effectue également sur le Zêtasizer de la marque Malvern. Elle donne une
information sur le potentiel de surface des nanoparticules en solution.
Figure 3.3: Illustration des différents potentiels présents à la surface d’une particule
solvatée
Le temps de mesure peut varier d’une demi-journée à une journée complète selon le
nombre d’échantillons. L’appareil est étalonné à chaque nouvelle série de mesures. L’ICP-
MS est une technique de mesure destructrice, elle nécessite que l’échantillon soit totale-
ment dissous par une solution acide. Le protocole de cette dissolution est décrit ci-dessous.
20 mg de nanoparticules sont prélevés et dissous par un ajout successif de 2.5 mL d’H2 SO4
à 95 % massique, 2.5 mL de HNO3 à 65 % massique et 5 mL de HCl à 35 % massique.
La solution est laissée à dégazer pendant une nuit. Puis elle est placée dans un autoclave
en PTFE et chauffée sous une puissance micro-ondes de 800 W pendant 30 minutes.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 64
Finalement, la solution est diluée dans une matrice de 0.65 % massique de HNO3 avant
d’être caractérisée.
L’analyse ICP-MS dure environ une journée. C’est une technique précise et reproductible.
Pour une analyse plus rapide de la composition des poudres, une analyse EDX (présentée
en paragraphe 3.6.2) peut également être faite.
L’analyse thermogravimétrique (ATG) est une technique d’analyse thermique qui consiste
à mesurer la variation de masse d’un échantillon en fonction de la température. Cette
analyse peut se faire sous atmosphère inerte, pour analyser des phénomènes comme la
décomposition ou la déshydratation d’un échantillon, ou sous atmosphère réactive.
La connaissance des propriétés physico-chimiques des encres ainsi que du support est
impérative avant le dépôt. Celles-ci sont obtenues par les analyses présentées dans les
paragraphes suivants.
Le comportement rhéologique des encres a été étudié sur un rhéomètre rotatif à vitesse
imposée de type MCR 300 et 301 de la marque Anton Paar. Les essais ont été réalisés à
une température de 25 ◦ C avec une géométrie à plans parallèles de 50 mm.
L’atmosphère de l’échantillon est saturée en solvant pour éviter son évaporation lors de
la mesure.
Dans ces essais, un taux de cisaillement constant est appliqué pendant 200 secondes,
de manière à atteindre un régime permanent. Les mesures sont effectuées à différents
gradients de cisaillement de 1 à 10000 s−1 pour obtenir le profil rhéologique complet du
fluide mesuré.
Les phénomènes de mouillabilité sont dominés par les interactions d’énergies de surface.
Lorsqu’une goutte de fluide est déposée sur une surface, cette goutte forme un angle
caractéristique de la mouillabilité de ce fluide sur cette surface, comme représenté à la
figure 3.4.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 66
Figure 3.4: Angle de contact observé pour une faible mouillabilité (gauche) et une
bonne mouillabilité (droite)
L’angle formé par une goutte d’un fluide dépend de ses propriétés de tension de surface
mais également des propriétés du support. De manière à caractériser précisément ces
interactions, on mesure l’angle formé par une goutte de volume connu sur le substrat à
l’aide du montage décrit figure 3.5 .
Il est possible de calculer l’énergie de surface du solide en mesurant les angles de contact
formés par plusieurs liquides sondes et ce notamment grâce au modèle d’Owens-Wendt.
Selon ce modèle, l’énergie de surface d’un solide ou d’un liquide se scinde en deux com-
posantes : une composante dispersive (σLd ) et une composante polaire (σLp ) en référence
aux interactions à l’origine de cette énergie de surface.
q q
σL (1 + cos θ) = 2 σL σS + 2 σLp σSp
d d
(3.2)
Avec σL = σLd + σLp et σS = σSd + σSp (3.3)
Au cours de ce travail, 3 liquides sondes sont utilisés, leurs propriétés sont décrites dans
le tableau 3.1.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 67
Table 3.1: Propriétés des trois liquides sondes utilisés pour les mesures d’angle de
contact
s
σLp 1 + cos θ
Les résultats d’angles de contact sont ensuite tracés selon X = d
et Y = σL p d
σL 2 σL
La régression linéaire des résultats ainsi tracés donne un droite d’équation Y = AX + B
où A est la racine carrée de σSp et B la racine carrée de σSd . L’ensemble des mesures est
effectué sur un goniomètre SCA 20 de Dataphysics avec des gouttes de fluide de 10 µL.
L’imprimante jet d’encre utilisée dans ce travail est une imprimante DOD à excitation
piézoélectrique.
L’imprimante est une Dimatix DMP 2800 de la marque Fujifilm (figure 3.6). Cette im-
primante de laboratoire utilise des têtes d’éjection jetables composées d’une cartouche
à remplir par l’encre et d’un groupe de 16 buses d’éjection fixées sur cette cartouche
(figure 3.7). L’imprimante est composée d’un plateau mobile avec aspiration pour fixer
le substrat, d’un poste de purge des buses et d’un dispositif de visualisation des gouttes
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 68
appelé drop watcher. Ce drop watcher fait appel à une camera stroboscopique puisque les
gouttes sont éjectées à des fréquences de plusieurs kHz. Pour un dépôt, une cartouche
jetable est remplie avec 1.5 mL d’encre.
Le drop watcher permet à la fois de vérifier l’éjection de gouttes par chacune des buses
mais également d’évaluer la vitesse et le volume de gouttes éjectées par chaque buse
(figure 3.8). En modifiant le voltage appliqué indépendamment à chacune des buses, on
obtient une répartition de vitesse homogène sur l’ensemble de la tête d’impression.
Le diamètre de buse est de 21.5 µm, ce qui permet l’éjection de gouttes d’un volume
d’environ 10 pL selon le fournisseur. Les gouttes une fois déposées donnent lieu à des
points dont le diamètre varie avec les interactions encre/substrat mais sont de l’ordre de
40 µm selon ce même fournisseur. Il existe un autre paramètre d’impression primordial
qui n’est pas conditionné par les paramètres précédents, il s’agit de la résolution. La
résolution d’une impression s’exprime en dpi pour “dot per inch”, il s’agit du nombre
de points d’impression déposés par unité de longueur. Plus ce nombre est important,
plus l’impression sera de qualité. Sur l’imprimante dimatix, la résolution est modulée par
l’angle entre la tête d’impression et le sens d’impression (figure 3.9).
Comme l’espacement entre les buses est de 254 µm, la résolution minimale est de 100 dpi.
Cette résolution est obtenue avec une tête d’impression perpendiculaire au sens d’impres-
sion. Pour augmenter la résolution, l’imprimante Dimatix possède un système de rotation
de la tête d’impression muni d’un vernier pour contrôler l’angle de rotation (figure 3.10).
La résolution maximale est obtenue pour un angle de 5◦ ce qui correspond à une résolution
de 5400 dpi.
Comme le diamètre des points ne change pas avec la résolution, il existe une résolution
à partir de laquelle ceux-ci se superposent (figure 3.9). Modifier la résolution permet
aisément de moduler la quantité d’encre déposée par unité de surface.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 70
3.3.2 Spray
Dans le cas de ce travail, un montage de dépôt a été fabriqué à partir d’un aérographe
de la marque Colani présenté figure 3.11.
Le montage expérimental consiste en une arrivée d’air comprimé à une pression de 2 bar,
un support pour maintenir l’échantillon à la verticale pendant le dépôt. La buse de spray
présente un diamètre de 0.2 mm. L’échantillon est placé à 20 cm de la buse de spray lors
du dépôt et 1 mL d’encre est utilisé par dépôt. Après dépôt, l’échantillon est séché de
manière identique au dépôt jet d’encre.
3.4 Séchage
3. Pour sécher les dépôts à des températures supérieures à 300 ◦ C ou sous atmosphère
contrôlée, un four tubulaire Nabertherm a été utilisé. Il permet de sécher sous
un flux d’argon ou d’argon hydrogéné (2 %). Le flux de gaz est de 75 L/h. La
température maximale est de 1100 ◦ C.
Le séchage a pour but d’éliminer les composants organiques de la couche mince déposée.
Un recuit sous atmosphère de soufre permet de cristalliser le matériau.
Pour que le procédé de recuit sous atmosphère de soufre soit reproductible, l’ensemble
des recuits suit la même procédure. La rampe de chauffe est de 150 ◦ C/min sauf les
40 derniers degrés au cours desquels la rampe de chauffe est de 20 ◦ C/min. La rampe de
refroidissement est fixée à 30 ◦ C/min. 25 mg de soufre sont disposés à côté de l’échantillon
à recuire dans la boı̂te graphite. Pour assurer une pression partielle de soufre suffisamment
élevée tout au long du recuit, une cloche en quartz est ajoutée sur la boı̂te graphite (figure
3.14).
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 73
Une fois les couches minces cristallisées, celles-ci sont caractérisées pour identifier les
éléments qui les composent et leur cristallinité. Dans tous les appareils de microscopie
électronique, l’échantillon est bombardé par un faisceau d’électrons dans une enceinte
sous vide secondaire.
Lorsque le flux d’électrons, ou électrons primaires, entre en contact avec l’échantillon so-
lide, il se produit plusieurs interactions élastiques ou inélastiques. Ces interactions mènent
à des émissions très variées en terme d’énergie. Il y a tout d’abord l’émission électronique
rétrodiffusée (BSE en anglais) constituée d’électrons qui ressortent de l’échantillon avec
environ la même énergie que les électrons primaires (diffusion élastique par les atomes et
inélastiques par les électrons orbitaux de l’échantillon). L’émission d’électrons secondaires
de faible énergie (de l’ordre de la dizaine d’ eV), provient de nombreux chocs inélastiques.
Ces deux flux permettent d’obtenir l’image de l’échantillon avec des contrastes topogra-
phiques (électrons secondaires) et en terme de numéro atomique (électrons rétrodiffusés).
Le faisceau d’électrons primaires provoque également l’ionisation de nombreux atomes de
l’échantillon, ces atomes ionisés se désexcitent via l’émission de photons X dont l’énergie
est caractéristique de l’atome responsable de l’émission (paragraphe 3.6.2). La dernière
émission est une onde électromagnétique proche du visible, phénomène appelé cathodo-
luminescence observable uniquement sur les semi-conducteurs et isolants [113].
L’ensemble des électrons primaires restants est évacué vers la masse à laquelle est relié
l’échantillon. Si celui-ci n’est pas conducteur, ce courant d’électrons donne lieu à des
phénomènes de charge qui dégradent la qualité de l’image observée. Dans ce travail, la
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 74
morphologie des couches est observée à l’aide de MEB Hitachi 4000 et 4100 en configu-
ration électrons secondaires. Ponctuellement, un microscope électronique à transmission
haute résolution Tecnai OSIRIS a également été utilisé.
Sous l’effet du faisceau incident d’électrons dans le MEB, des électrons de cœur des
atomes constituant l’échantillon sont arrachés. La relaxation de ces excitations, par rem-
plissage du “trou” par des électrons de niveaux électroniques plus élevés, s’accompagne
de l’émission de rayons X (raies Kα ,Lα . . . ). L’énergie des photons réémis est spécifique
du matériau irradié et la quantité de photons est liée à la concentration de ce matériau
dans l’échantillon.
Dans ce travail, l’analyse EDX se fait sur un MEB Philips XL30 équipé d’une sonde
EDX AZTEC Energy X-Max 20 detector d’Oxford Instrument refroidie à l’azote liquide.
L’analyse EDX se fait sur les électrons secondaires avec une tension d’accélération de
20 kV.
Une fois la composition élémentaire déterminée, il est nécessaire d’identifier les phases cris-
tallines présentes. La diffraction des rayons X (DRX) est une technique de caractérisation
largement répandue pour l’étude des matériaux. Elle permet l’identification des pro-
duits cristallisés et ce de manière non destructive. Le principe consiste à bombarder un
échantillon sous forme de poudre ou de couche mince avec un faisceau monochromatique
de rayons X car leur longueur d’onde est de l’ordre des distances interatomiques dans le
cristal, soit de l’ordre de l’angström. Ces rayons X sont alors diffractés par le cristal qui
se présente sous la forme de plans réticulaires et agit donc sous la forme d’un réseau à
trois dimensions. Les rayons diffractés sont cohérents et peuvent donc interférer. La me-
sure consiste à évaluer l’intensité du faisceau diffracté en fonction de l’angle d’incidence.
Le diagramme de diffraction observé dépend de plusieurs facteurs. Il dépend notamment
du facteur de diffusion de chaque atome irradié (dépendant de son numéro atomique),
ainsi que des éléments de symétrie présents dans le cristal changeant la multiplicité du
signal diffracté (sous forme d’interférences destructives et constructives). C’est pourquoi
la DRX est efficace pour les composés de numéros atomiques supérieurs à 10.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 75
Dans ce travail, le système est composé d’un diffractomètre Brüker D8 Advance (go-
niomètre en montage θ-2θ équipé d’un détecteur rapide LynxEye et d’un générateur de
rayons X Siemens). La source de rayon X est une anticathode au cuivre utilisant la radia-
tion Kα du cuivre (1, 5418 Å), la fente de sortie du tube est de 2 mm et la fente d’entrée
du détecteur de 8 mm. L’analyse DRX permet également d’évaluer la taille moyenne des
cristallites via la formule de Debye-Scherrer (équation 2), pour des tailles inférieures à
200 nm [114].
Kλ
β= (3.4)
D cos θ
Avec
— β la largeur de raie de diffraction après correction de la contribution instrumentale
à l’angle θ
— D (m) la taille des cristallites
— λ (m) la longueur d’onde
— K une contante instrumentale
Dans le cas des kësterites, la DRX n’est pas suffisante pour discriminer la phase
Cu2 ZnSn(S,Se)4 du Zn(S,Se) ou du Cu2 Sn(S,Se)3 . C’est pourquoi, elle doit être
impérativement couplée à des mesures opérées par spectroscopie Raman. La spectrométrie
de diffusion Raman est une technique permettant l’observation des états vibrationnels
d’une molécule. Lors de l’incidence d’un faisceau monochromatique de lumière visible ou
proche du visible sur un matériau dont aucune transition électronique n’est associée à
la longueur d’onde du faisceau incident, celui-ci est majoritairement diffusé de manière
élastique, il s’agit du phénomène de diffusion Rayleigh. Cependant, une infime partie du
rayonnement est diffusée de manière inélastique, soit avec une énergie plus importante
dans le cas de la diffusion Raman anti-Stokes, soit avec une énergie plus faible dans le
cas de la diffusion Raman Stokes (figure 3.16).
Les énergies sont exprimées ici en nombre d’onde, le déplacement Raman désigne l’écart
de nombre d’onde entre l’excitation et la raie Stokes observée.
Les analyses Raman sont effectuées avec plusieurs longueurs d’ondes d’excitation : 365 nm
et 532 nm sur des spectromètres Raman Horiba Jobin Yvon T64000 et Aramis à l’aide
d’un grossissement X100.
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 76
L’utilisation de deux longueurs d’onde d’excitation différentes est justifiée par le faible
signal Raman des phases de ZnS en excitation visibles [115]. Il est également important
de préciser que l’intensité des différents modes Raman du CZTS observés varient avec la
longueur d’onde d’excitation (figure 3.17).
Figure 3.17: Diffusions Raman de couches minces CZTS sous différentes longueurs
d’onde d’excitation [116]
Chapitre 3. Protocoles expérimentaux et méthodes d’analyses 77
Pour finir, une fois le matériau identifié, il est nécessaire d’évaluer son comportement
optique. Pour cela des mesures d’absorbance sont effectuées sur les échantillons déposés
sur lame de verre. Ces mesures sont effectuées sur un spectromètre Shimadzu UV 3100
entre 250 nm et 1100 nm avec une fente de 5 nm.
Conclusion du chapitre 3
Un ensemble de protocoles de synthèses et de dépôts est présenté dans ce chapitre. Le
procédé par micro-ondes est largement exploité dans plusieurs synthèses en autoclave, en
réacteur en continu et même après synthèse pour les digestions acides de l’ICP-MS. Plu-
sieurs caractérisations physico-chimiques permettent une formulation précise des encres
avant leur dépôt par spray ou jet d’encre. Après séchage et recuit, un ensemble com-
plet de caractérisations permet de mettre en évidence les propriétés morphologiques et
cristallographiques des couches minces ainsi fabriquées.
Chapitre 4
Synthèses de nanoparticules
Introduction
Ce chapitre décrit la toute première étape du procédé d’impression de couches minces
CZTS par dépôt de nanoparticules : il s’agit de la synthèse de ces nanoparticules. Il a
pour objectif de permettre la compréhension du procédé de synthèse. Cette compréhension
passe par l’identification des phénomènes chimiques mis en jeux, la définition des pa-
ramètres clés ainsi que leur optimisation.
C’est pourquoi, ce chapitre décrira dans un premier temps les enjeux relatifs à cette
synthèse. Une fois les principales contraintes identifiées, la méthodologie de travail et les
analyses associées seront présentées. Ensuite, trois synthèses seront décrites. Différents
paramètres seront modifiés dans chacune des synthèses afin de comprendre et maı̂triser
chacune d’elles.
78
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 79
type p du CZTS est accentuée par des modifications chimiques intrinsèques au matériau
(discuté plus amplement au paragraphe 1.1.3). Les compositions menant aux meilleurs
Cu
rendements sont déficitaires en cuivre et sur-stœchiométriques en zinc ( = 0.8 −
Zn + Sn
Zn
0.9 et = 1.2 − 1.4) selon l’état de l’art (cf chapitre 1). La première des conditions
Sn
auxquelles doit satisfaire la synthèse est de pouvoir contrôler précisément la proportion de
cuivre, zinc et étain des particules de CZTS après synthèse. Ce contrôle de la composition
nécessite la compréhension des mécanismes mis en jeu lors de la synthèse.
Cette problématique est inhérente à toutes les synthèses de nanoparticules CZTS, quel
que soit le type : polyol, hydrothermale, “hot-injection” ou “heating-up”. Le principe
reste le même, à savoir la condensation d’espèces ioniques solvatées et/ou complexées de
cuivre, zinc, étain, soufre et/ou sélénium. Cette condensation des précurseurs permet la
formation de particules dont la taille, la composition chimique et la cristallinité dépendent
des conditions de synthèse.
Le principe de formation du CZTS en milieu aqueux est décrit à la réaction R4.1, cepen-
dant cette équation ne reflète pas les nombreuses difficultés induites par la présence de
trois types de cations métalliques différents.
2 Cu+ 2+ 4+ 2−
(aq) + Zn(aq) + Sn(aq) + 4 S(aq) −−→ Cu2 ZnSnS4 ↓ (R4.1)
L’équation R4.1 suggère que les cations métalliques sont présents sous forme ionique en
solution. Selon les conditions d’acidité du milieu, les différents cations métalliques peuvent
précipiter en oxydes ou hydroxydes. Afin de déterminer les conditions nécessaires à la
présence de tous les cations sous forme ionique non précipitée, le raisonnement de ce
paragraphe a été établi avec le postulat que les domaines de stabilité des ions cuivre,
zinc et étain en solutions aqueuses sont indépendants de la présence d’autres cations
métalliques.
Les domaines d’existence en solution des espèces ioniques et précipitées sont observables
dans les diagrammes potentiel-pH (E-pH) de chacun des métaux. Ces diagrammes, basés
sur la thermodynamique, permettent de prévoir sous quelle forme est l’espèce majoritaire
d’un métal dans des conditions données de température, concentration, acidité et potentiel
chimique.
Dans le cas du cuivre, figure 4.1, les ions Cu+ et Cu2+ peuvent co-exister en solution,
néanmoins pour des pH supérieurs à 7, le cuivre s’oxyde et peut précipiter sous forme
d’hydroxydes. Compte tenu de ce diagramme, la synthèse aqueuse de CZTS doit donc se
dérouler à pH acide.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 80
Lorsque ce raisonnement est répété pour les deux autres espèces métalliques, les résultats
sont similaires pour le zinc et beaucoup plus contraignants pour l’étain. Présenté en
figure 4.2, le diagramme E-pH du zinc montre que celui-ci est stable sous forme ionique
en solution aqueuse dans la gamme des pH acides identiques au cuivre. Dans ce cas, un
seul type de cation est présent en solution : Zn2+ .
Dans le cas de l’étain, dont le diagramme est en figure 4.3, deux types d’ions peuvent
être présents en solution : les ions Sn2+ et Sn4+ . Si les ions Sn4+ sont les plus susceptibles
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 81
d’être rencontrés en solution, leur domaine d’existence en termes de pH est très limité. En
effet, l’hydroxyde d’étain peut se former à partir de pH 4 dans des conditions fortement
réductrices (à potentiel presque nul) et se forme pour un pH supérieur à 0.5 sans l’ajout
d’autres espèces en solution.
Partir du principe qu’il n’y a pas d’interactions entre les trois types de cations est une
hypothèse fausse. Mais le domaine d’acidité où tous les métaux sont solubles, obtenu
par combinaison des trois diagrammes précédents reste pertinent. Par exemple, dans le
cas d’un diagramme binaire zinc-étain, présenté en figure 4.4, seule la nature des phases
précipitées est influencée par l’ajout de différents métaux. Les domaines d’existence des
cations Sn4+ restent inchangés.
Maintenant que les conditions de solubilisation des trois cations sont connues, il est
nécessaire de comparer la réactivité de ces cations vis-à-vis d’une source de soufre.
Une démarche permettant d’évaluer la réactivité de chacun des cations vis-à-vis d’une
source de soufre est la comparaison des produits de solubilité de leurs précipités associés.
Pour rappel, le produit de solubilité est la constante thermodynamique de la réaction de
dissociation d’un solide ionique en solution aqueuse à une température donnée (réaction
R4.2). Plus cette valeur est faible, plus le cation est réactif vis-à-vis d’une source de soufre.
A ce sujet, la table 4.1 apporte deux informations majeures. La première est que les
trois cations sont plus réactifs vis-à-vis du soufre que des hydroxyles. La seconde est que
la réactivité de chacun des cations est différente, ce qui peut influencer la cinétique de
formation des sulfures. En considérant les sulfures associés aux cations ayant le même
état d’oxydation que dans le CZTS, c’est-à-dire Cu+ , Zn2+ et Sn4+ , on peut classer les
réactivités selon cet ordre : Cu ≥ Zn≥ Sn
2+ 2−
CuS(s) −−⇀
↽−− Cu(aq) + S(aq) (R4.2)
Ks −[Cu2+ ][S2− ] (R4.3)
Cependant, il est important de préciser que les produits de solubilité sont des constantes
thermodynamiques. Or, la précipitation prioritaire d’un cation par rapport à un autre est
un problème de cinétique de réaction et non de thermodynamique. Il existe néanmoins
une corrélation entre les paramètres cinétiques et thermodynamiques des réactions de
précipitation de sulfures. Par exemple, dans le cas du zinc, Peters et al. ont défini une
relation mathématique entre la vitesse de précipitation de ZnS et son produit de solubilité.
s
[Zn2+ ][S 2− ]
GL = 2.98 ∗ 107 (S − 1)−0.3 où S = (4.1)
Ksp
Avec
— GL ( m · s−1 ) le taux de croissance cristallin linéaire moyen
— S est le taux de supersaturation
— Ksp ( mol/m3 ) le produit de solubilité
Bien que les produits de solubilité soient des paramètres de formation thermodynamiques,
ils sont pertinents pour comparer les cinétiques de réaction des différents sulfures.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 83
Le bilan de cette première étude sur les conditions de synthèse s’avère contraignant, non
seulement les domaines d’acidité dans lesquels tous les cations co-existent sont très limités
mais de surcroı̂t même dans ces domaines, les réactivités restent très disparates. Le solide
formé sera vraisemblablement constitué de CuS et SnS2 avec une très faible quantité de
zinc.
La table 4.3 qui récapitule un nombre important de synthèses de CZTS permet d’observer
qu’un “stabilisant” (ou complexant) est souvent ajouté au mélange réactionnel : on peut
citer le polynivinyl pyrrolydone (PVP), l’éthylène diamine, la tri-octylphosphine, l’oxyde
de tri-octylphosphine et l’hydroxyde de tétraméthyl ammonium. Dans le cas où aucun
stabilisant additionnel n’est ajouté, c’est le solvant lui-même qui complexe les précurseurs,
on parle alors de solvant coordinant. Le solvant coordinant le plus utilisé pour la synthèse
de CZTS est l’oleylamine.
Voici un liste non exhaustive de complexes pouvant se former à partir de cations cuivre,
zinc et étain :
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 84
Connaı̂tre la nature exacte des complexes formés pour chaque précurseur métallique au
moment de la synthèse de CZTS est également difficile à mettre en œuvre. Ce qui explique
que ce sujet soit peu abordé dans la littérature.
En plus des stabilisants requis par la synthèse, les solvants et additifs utilisés pour la
formulation de l’encre peuvent également être à l’origine de la présence de composés
organiques résiduels dans les couches minces. Ce travail requiert donc de développer deux
études : l’étude de la pureté des particules après synthèse ainsi que la modification de
cette pureté induite par la formulation des encres.
Cette recherche de l’influence des composés organiques résiduels sera présente dans tous
les chapitres suivants. Ce paragraphe détaillera comment ce problème est traité dans la
littérature au stade de la synthèse de nanoparticules CZTS et CIGS.
La pureté des particules a trait à leur composition chimique, à leur composition cristallo-
graphique et à la nature de leur surface. Cette dernière contribution est la plus largement
étudiée dans la littérature.
Les moyens les plus courants mis en œuvre pour étudier la pureté des nanoparticules
et identifier les pollutions résiduelles sont l’ATG (qui permet de quantifier la quantité
de matière décomposable) et la spectroscopie infrarouge (FT-IR qui permet d’identifier
les groupements organiques présents à la surface des particules). Même après plusieurs
rinçages et séchages, la surface des nanoparticules est couverte de nombreuses espèces
organiques résultant de la synthèse. Que les particules soit synthétisées par voie polyol ou
par synthèse de type oleylamine, les ligands de surface sont observables en FT-IR [124].
Après avoir identifié des résidus organiques en surface de particules, l’analyse thermogra-
vimétrique permet d’estimer la proportion de matière décomposable. Cette quantité est
rarement évoquée dans la littérature, certains travaux font néanmoins état d’études ATG
lors de la synthèse de nanoparticules. Cette matière organique se décompose généralement
entre 200 et 450 ◦ C et représente entre 15 et 25 % de la masse des nanoparticules dans le
cas d’une synthèse polyol[68][69].
Dans le cas d’une synthèse de type oleylamine, cette proportion s’abaisse à quelques %
[125].
En conclusion, il semblerait que les synthèses dans l’oleylamine soient les plus pertinentes
pour obtenir les particules les plus pures.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 86
Si dans la majorité des cas le temps de synthèse n’est pas évoqué, certains auteurs publient
des travaux sur la réduction du temps de synthèse de particules (figure 4.5).
Table 4.3: Tableau récapitulatif des synthèses de CZTS. Abréviations : Ac= Acétates,
Acac= Acétylacétonate, DEDTC= Diéthyldithiocarbamate, TOP=tri-octylphosphine,
Tu= thiourée, Ta= thioacétamide, TOPO= oxyde de tri-octylphosphine, MAA= acide
mercapto-acétique DDT=Dodecanethiol, SDBS= sodium dodécyle benzène sulfate,
EN= éthylène diamine, TPP= triphényl phosphine, OLA=oleylamine, ODE= oc-
tadécène
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 87
Conclusion Intermédiaire
Ainsi, synthétiser des nanoparticules quaternaires à base de cuivre, zinc, étain et soufre
nécessite de prendre en compte plusieurs aspects réactionnels. Comme ces trois cations
ne sont pas stables dans des milieux de faible acidité ou neutres et réagissent selon
des cinétiques différentes en présence de soufre, l’utilisation de ligands additionnels est
inévitable. Cette utilisation de ligands peut générer la présence d’éléments organiques
notamment à la surface des particules. Il y a un compromis à trouver entre la faible
toxicité des réactifs, la température de réaction, le temps de réaction et la pureté finale
des particules. Les synthèses utilisant le solvant oleylamine permettent d’atteindre les
meilleures puretés et cristallinité après synthèse mais les temps de réaction limitent leur
potentiel industriel. La synthèse en voie aqueuse, quant à elle, peut permettre des temps
de réactions courts, la production des composés moins toxiques et des températures moins
élevées. Elle présente donc le meilleur potentiel pour une synthèse développable à grande
échelle.
Introduction et méthodologie
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 89
Les paramètres clés relatifs à la synthèse de nanoparticules pour le CZTS ayant été
décrits précédemment, les sections suivantes seront consacrées à l’étude expérimentale de
ces paramètres. La problématique à résoudre est triple :
L’objectif reste toujours le développement d’une synthèse à faible coût à basse température
(e.g. 100 ◦ C).
La méthodologie utilisée pour ce travail se présente sous trois axes. Ces trois axes corres-
pondent aux trois ligands utilisés lors des synthèses. Dans un premier temps, une étude
sera menée sur une synthèse basée sur l’acide mercapto-acétique (MAA), afin de com-
prendre les conditions de synthèse et la possibilité de la développer en réacteur continu.
Ensuite ce complexant sera substitué par l’éthylène diamine, et un par un, chacun des
autres réactifs sera également modifié. Enfin, dans un troisième paragraphe, le dernier
complexant, la thiourée sera employée dans le but d’optimiser la pureté de ces particules.
A chaque type de synthèse, la phase CZTS est analysée par DRX et Raman, la compo-
sition est obtenue par EDX et la pureté est analysée par FT-IR et ATG.
Le précurseur introduit le premier en solution est le chlorure d’étain (SnCl4 ). Il est intro-
duit dans une solution d’HCl concentré qui maintient le pH de la solution en dessous de
0.5, c’est-à-dire le pH auquel ces précurseurs précipitent sous forme d’hydroxydes. Par la
suite, les précurseurs de cuivre et de zinc sont introduits.
La solution est alors bleue. Cette couleur est due aux complexes d’ions cuivres hydratés
de couleur bleue, alors que les ions zinc et étain sont incolores en solution [164].
Les changements de couleurs observés sont des indices sur les mécanismes chimiques qui
ont lieu au cours de cette préparation. Il est important de préciser que le précurseur de
cuivre utilisé, l’acétate de cuivre (II), n’apporte pas le cuivre sous le bon état d’oxydation
puisque le cuivre est sous l’état d’oxydation (I) dans le CZTS. Le cuivre doit donc être
réduit en solution et cette réduction s’opère via le MAA.
L’espèce CuSCH2 COOH est un complexe soluble en solution. Comme une mole d’ions
cuivre (II) nécessite 2 moles de MAA pour être réduite, le MAA est introduit en solution
en excès.
La composition de ces objets est analysée par EDX (après un séchage à 100 ◦ C) et est
présentée en table 4.4. Les nanoparticules présentent bien les trois cations métalliques
ainsi que du soufre mais dans des proportions qui ne correspondent pas à la phase CZTS.
Comme la réaction de précipitation est effectuée à température ambiante, il est probable
que les particules soient amorphes et composées de sulfures binaires. Cette hypothèse sera
vérifiée dans les paragraphes suivants.
Table 4.4: Composition élémentaire obtenue par EDX des nanoparticules synthétisées
sans traitement micro-ondes à pH 0.48
Les pH des solutions de précurseurs et complexes sont ajustés à l’aide d’hydroxyde d’am-
monium. Cinq solutions de précurseurs de pH 0.5, 2, 4, 6 et 8 sont préparées. Pour toutes
les expérimentations, l’ajout de Na2 S entraı̂ne une élévation du pH final ainsi qu’une
précipitation des nanoparticules. Ces observations sont récapitulées dans la figure 4.8.
Les dispersions de particules obtenues restent stables plus d’un jour après synthèse dans
le cas des pH basiques alors que pour les pH acides, les nanoparticules s’agrègent et
décantent rapidement. Ce phénomène est lié à la charge de surface des particules et sera
plus amplement détaillé au chapitre 5.
En élevant le pH à 2 avant l’ajout de la source de soufre, les particules sont cette fois
déficitaires en étain. Ce phénomène n’a pas été expliqué à l’heure actuelle. Les particules
à ce stade sont encore déficitaires en soufre.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 94
En conclusion de cette étude préliminaire : les précurseurs choisis peuvent donner lieu à la
formation de nanoparticules sans traitement micro-ondes et les pH permettant d’obtenir
des compositions chimiques satisfaisantes sont les pH 6 et 8.
Les analyses de diffraction de rayons X sont résumées sur la figure 4.9. Tous les dif-
fractogrammes sont similaires malgré les écarts de composition importants relevés à la
table 4.5. Pour l’ensemble des échantillons, deux phases sont observées. Il s’agit dans un
premier temps de la phase de molybdène cubique (JCPDS 04-014-7435) et ses pics des
plans (110) à 40.52◦ et (220) à 87.66◦ . Le faible pic parfois observé à 36.20◦ correspond
à la contribution Kβ du pic correspondant au plan (110) du molybdène. Dans un second
temps, 4 pics sont observés à 28.50◦ , à 47.40◦ , 56.20◦ et 74◦ . Ces pics peuvent traduire
à la fois la présence de CZTS, Cu2 SnS3 ou ZnS (JCPDS 04-015-223, 00-027-0198 et 04-
012-7581). La formule de Debye-Scherrer appliquée sur la largeur à mi-hauteur des pics
observés traduit une taille de cristallites moyenne de l’ordre de quelques nanomètres.
pH 0.5 pH 2 pH 4 pH 6 pH 8
Éléments (raie Précurseurs Moy. Ecart- Moy. Ecart Moy. Ecart Moy. Ecart Moy. Ecart
d’émission) atom. type atom. type atom. type atom. type atom. type
Soufre(K) 4 2.63 1.11 2.99 0.35 2.02 1.14 2.88 1.65 2.91 1.55
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules
Cuivre(K) 2 2.02 0.85 2.53 1.63 2.06 1.00 1.64 0.85 1.66 0.85
Zinc(K) 1 0.29 0.12 0.94 0.44 0.98 0.48 0.82 0.46 0.90 0.46
Étain(L) 1 1.01 0.40 0.66 0.31 0.66 0.34 0.77 0.41 0.77 0.39
Cu
1 1.55 1.58 1.25 1.03 0.99
Zn + Sn
Zn
1 0.29 1.42 1.49 1.07 1.16
Sn
S
sans traitement micro-ondes à différents pH
Figure 4.9: Diffractogrammes des poudres déposées sur molybdène et séchées à 300 ◦ C
Il est donc nécessaire d’avoir recours à la spectroscopie Raman pour discriminer ces
trois phases. Ces spectres sont présentés en figure 4.10. L’ analyse Raman confirme la
présence de la phase CZTS dans tous les échantillons, notamment par la présence du
pic correspondant au mode A1 de CZTS à 335 cm−1 [62]. L’échantillon provenant de la
synthèse à pH 0.5 est très différent des autres. Il présente un pic très faiblement défini à
335 cm−1 ainsi qu’un fort bruit de fond qui augmente avec le nombre d’onde. Ces deux
observations traduisent la présence d’un matériau très amorphe. Les spectres suivants sont
similaires, ils traduisent uniquement la présence de la phase CZTS par le pic à 335 cm−1 .
Aucune phase de ZnS à 350 cm−1 , à 700 cm−1 , de Cu2 SnS3 ou de CuS n’est observée. Ce
qui n’est pas cohérent avec les compositions observées en EDX à la table 4.5. Compte tenu
des domaines d’existence du CZTS (décrit au paragraphe 4.1), les échantillons synthétisés
à pH 0.5, 2 et 4 doivent présenter des phases secondaires. Les phases de Cu2 S (JCPDS
01-072-1071) qui présentent un pic principal en DRX à 47◦ peuvent être masquées par le
CZTS.
Quant aux analyses Raman, il est important de préciser qu’elles ont été faites à l’aide
d’un laser de longeur d’onde 785 nm. La valeur d’énergie associée à cette longueur d’onde
(1.56 eV) est très proche de la valeur du gap du CZTS, le signal Raman est donc exalté
à cette longueur d’onde et il apparaı̂t alors possible de ne pas voir de phases secondaires
comme le CuS (485 cm−1 ) [168] et le ZnS (350 et 700 cm−1 ) [169].
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 97
Figure 4.10: Spectres Raman (780 nm) des poudres déposées sur molybdène et séchées
à 300 ◦ C
Maintenant qu’une première clarification du protocole est faite sans traitement micro-
ondes, une seconde série d’échantillons est produite dans des conditions identiques mais
reçoit un traitement micro-ondes de 1500 W pendant 60 secondes. Le spectre d’analyse
est restreint aux pH entre 6 et 8 puisqu’ils permettent déjà d’obtenir des nanoparticules
de composition chimique satisfaisante sans traitement micro-ondes.
Après un séchage identique à l’étude précédente, c’est-à-dire une heure à 300 ◦ C sous
atmosphère d’argon, les analyses DRX sur poudres (sans support de Molybdène) donnent
des résultats similaires à l’étude sans micro-ondes. Seuls les pics communs au CZTS
Cu2 SnS3 et ZnS sont observés avec une faible cristallinité. Cette faible cristallisation ne
permet d’ailleurs pas d’observer le pic du CZTS à 18.27◦ correspondant au plan (101) qui
permettrait de valider la présence de la phase CZTS.
pH 6 pH 7 pH 8
Éléments(raie Prec. Moy. Écart Moy. Écart Moy. Écart
d’émission) atom. type atom. type atom. type
De même que pour l’étude sans traitement micro-ondes, il est maintenant nécessaire
d’avoir recours à la spectroscopie Raman.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 99
Les analyses obtenues sont similaires pour les trois échantillons. En effet, seule la phase
kesterite est observée via le mode A1 observé à 330 cm−1 , le mode E à 290 cm−1 et
l’épaulement à 350 cm−1 . Aucune phase de Cu2 SnS3 n’est observée, ni de ZnS (pas de
second ordre à 700 cm−1 ). Il encore une fois nécessaire de rappeler que ces tests sont
réalisés à l’aide d’un laser de longueur d’onde 782 nm et exalte donc le signal du CZTS,
et donc également les Cu2 SnS3 dont le gap est de 1.5 eV [170].
La présence de phase CZTS, d’une composition satisfaisante étant démontrée, il est main-
tenant nécessaire d’étudier la morphologie des particules obtenues. Une première observa-
tion réalisée au microscope électronique à transmission et décrite en figure 4.13 permet de
conclure que les particules sont majoritairement amorphes et constituées de domaines cris-
tallins dont la taille n’excède pas quelques nanomètres. Ces observations sont cohérentes
à la fois avec les mesures de diffusion dynamique de la lumière (figure 4.14) et les mesures
de diffraction des rayons X présentées précédemment.
Figure 4.14: Répartition granulométrique des particules obtenues par DLS avant et
après traitement micro-ondes
En conclusion de cette étude, le traitement micro-ondes est bénéfique pour deux raisons
principales : il réduit la polydispersité des nanoparticules synthétisées et il permet un
contrôle plus précis de la composition chimique via notamment une moindre sensibilité à
l’acidité de la solution de précurseurs.
Les poudres obtenues sont séchées à 300 ◦ C pendant une heure sous argon puis ca-
ractérisées en EDX, DRX et spectroscopie Raman. Les analyses de composition chimique
obtenues par EDX (table 4.8) permettent d’affirmer que la composition chimique des par-
ticules est directement influencée par la proportion de réactifs introduits avant synthèse.
Plus précisément, les concentrations en cuivre, zinc et étain sont influencées mais ne
semblent pas avoir de répercution sur le ratio soufre/cations après synthèse. L’évolution
de la concentration en cuivre, zinc et étain mesurée par EDX suit la concentration des
précurseurs, l’écart à la stoechiométrie est plus important après synthèse. En effet pour
Cu Zn
un ratio de 0.9 et de 1.1, les ratios obtenus après synthèse sont 0.86 et 1.23.
Zn + Sn Sn
Lorsque l’on augmente les écarts à la stœchiométrie des précurseurs, la composition me-
surée par EDX est plus éloignée de celle des précurseurs comme on peut le voir sur la
figure 4.15.
Moy. Ecart
atom. type
0.14
0.04
0.03
0.01
Échantillon C
0.73
1.36
0.92
3.69
1.62
1.29
0.95
Moy. Ecart Prec.
0.72
1.2
4
2
1
1
1
atom. type
0.12
0.04
0.02
0.01
Échantillon B
0.86
1.23
0.96
11.83
1.187
3.82
0.95
Moy. Ecart Prec.
0.86
1.1
4
2
1
1
1
atom. type
0.25
0.05
0.09
0.03
Échantillon A
0.96
1.05
0.90
3.58
1.95
1.04
0.99
Prec.
4
2
1
1
1
1
0.5Cu + Zn + 2Sn
Éléments(raie
Cuivre(K)
d’émission)
Soufre(K)
Étain(L)
Zn + Sn
Zinc(K)
Cu
Zn
Sn
S
Il est donc nécessaire d’avoir recours aux analyses Raman pour tenter d’identifier ces
phases secondaires potentielles. Ces analyses, affichées en figure 4.16, confirment une nou-
velle fois la formation de la phase CZTS via des pics caractéristiques à 330 cm−1 , 365 cm−1
et 285 cm−1 . Aucune phase secondaire n’est clairement apparente sur ces spectres. On
peut penser que l’épaulement observé à environ 360 cm−1 possède une contribution due à
la présence de ZnS dont le pic principal est à 350 cm−1 . Cependant comme aucun second
ordre n’est observé à 700 cm−1 cette hypothèse est peu vraisemblable.
zinc, comme il est requis pour le photovoltaı̈que. Aucune phase secondaire n’est identi-
fiable après un traitement thermique d’une heure à 300 ◦ C. La longueur d’onde de l’ex-
citation Raman choisie pour cette étude n’est cependant pas adaptée et sera remplacée
par la suite par des longueurs d’ondes inférieures qui n’exalteront pas le signal du CZTS
et permettront l’identification de phases secondaires.
La quantité de précurseurs utilisés par synthèse est 10 fois plus importante que dans le
protocole de synthèse en autoclave. Les concentrations ioniques et conditions d’acidité
restent identiques au protocole en autoclave.
Figure 4.17: Solutions de précurseurs de cuivre zinc, étain et MAA pour un protocole
de synthèse en réacteur continu
Figure 4.18: Solutions de précurseurs de cuivre zinc, étain, MAA et Na2 S pour un
protocole de synthèse en réacteur continu
Puis, le pH est ajusté à 6 par une solution de NH4 OH et la solution contenant le Na2 S
est ajoutée (figure 4.18). Cette solution est ensuite traitée dans un réacteur micro-ondes
en flux continu sous une puissance de 800 W et un débit de 18.5 mL/min. En sortie
de synthèse les particules sont amorphes mais après un traitement thermique à 300 ◦ C
pendant 1h, celles-ci présentent un diffractogramme identique à ceux obtenus pour des
synthèses en autoclaves (figure 4.19).
Table 4.9: Composition élémentaire obtenue par EDX lors de la synthèse en réacteur
continu
Une première analyse chimique (effectuée par EDX) montre que la composition est iden-
tique à celle observée lors d’une synthèse en autoclave. Une fois de plus, il est nécessaire de
vérifier si la variation de composition chimique des particules évolue de la même manière
en fonction des précurseurs que lors des synthèses en autoclave. En prenant en compte
les difficultés rencontrées lors de l’étude précédente, notamment une excitation Raman
inadaptée, les matériaux obtenus ont été caractérisés à l’aide de la DRX, de l’ICP-MS
pour la composition chimique ainsi qu’en spectroscopie Raman avec une excitation à 365
nm.
Synthèse 1 Synthèse 2
Éléments Prec. Moy. Ecart Prec. Moy. Ecart
(ICP-MS) atom. type atom. type
Les résultats en synthèse continue (table 4.10) reproduisent ceux des synthèses en auto-
clave en matière de composition chimique. Pour une solution de précurseurs introduits
en proportions stœchiométriques, les particules obtenues sont légèrement déficitaires en
Cu
cuivre ( = 0.92) et stœchiométriques en zinc et étain. De manière similaire à
Zn + Sn
l’étude menée sur les synthèses en autoclave, lorsque la solution de précurseurs présente un
écart à la stœchiométrie, les particules synthétisées présentent un écart à la stœchiométrie
plus important que celui des précurseurs.
Figure 4.21: Spectres Raman UV (365 nm) de poudres séchées à 300 ◦ C pour deux
compositions différentes
Les analyses DRX (figure 4.20) présentent un motif principal identique à celui observé
lors des synthèses en autoclave à savoir les pics communs au CZTS, CTS et ZnS. On
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 108
note une élévation de la taille moyenne de cristallites dans le cas de l’échantillon hors
stœchiométrie. Cependant deux pics de plus faible intensité à 31.7◦ et 45.5◦ traduisent la
présence de sulfures de cuivre. On conclut de ces premières mesures que la synthèse en
continu facilite la formation de phases binaires à base de cuivre malgré la composition
déficitaire en cuivre des deux échantillons.
Les analyses Raman effectuées sous excitation UV à 365 nm, présentées en figure 4.21,
décrivent un matériau encore faiblement cristallisé. Ce matériau est principalement du
CZTS puisque le pic correspondant au mode A1 observable à 330 cm−1 est présent sur
les deux échantillons. En revanche, les pics secondaires du CZTS observables à 285 cm−1
et 360 cm−1 ne sont pas présents. On peut donc conclure que la contribution à 350 cm−1
observée sur les échantillons provient de la présence de phase ZnS dans l’échantillon. Cette
phase est également peu cristallisée puisque le second ordre du ZnS attendu à 700 cm−1
n’est pas observé.
Figure 4.22: Cliché MET haute résolution de nanoparticules obtenues par synthèse
en réacteur continu
4.2.1.5 Pureté
Pour finir, on remarque que la surface des particules semble être composée par d’autres
éléments, certainement des ligands de synthèse. Pour vérifier cela, des analyses ATG et
FT-IR ont été réalisées.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 109
L’analyse thermogravimétrique des particules séchées à 80 ◦ C sous vide pendant une heure
(figure 4.23) met en évidence une proportion importante, de l’ordre de 25 %, de matière
volatile. Le profil de la dérivée de la perte de masse indique que la majeure partie de cette
décomposition a lieu entre 150 ◦ C et 350 ◦ C avec deux températures de décomposition
principales à 160 ◦ C et 220 ◦ C. Ces températures pourraient correspondre à la décompo-
sition d’acétates ou de résidus de MAA [171][121]. Pour confirmer cette hypothèse, il est
nécessaire de réaliser une caractérisation par spectroscopie infrarouge des particules avant
ATG (figure 4.24).
Figure 4.24: Analyse FT-IR des nanoparticules obtenues par protocole MAA
Conclusion intermédiaire
La série d’expérimentations présentée dans cette section apporte plusieurs informations
sur la synthèse de nanoparticules à l’aide du complexant MAA. Tout d’abord, le MAA a le
double rôle de complexer les ions métalliques en solution et de réduire les ions cuivre (II) et
cuivre (I). Sans traitement micro-ondes, il est possible d’obtenir des nanoparticules dont la
composition est proche du CZTS et dépend du pH de synthèse. Le traitement micro-ondes
permet de contrôler précisément la composition des nanoparticules, qui est alors identique
à la composition de la solution de précurseurs, et d’homogénéiser la granulométrie de ces
particules. Cette composition peut être stœchiométrique ou déficitaire en cuivre et riche
en zinc selon les quantités de précurseurs utilisées.
Des premiers essais démontrent que ce type de synthèse est transposable à plus grande
échelle. Sans modification de composition chimique, cette synthèse peut être effectuée en
réacteur continu permettant de synthétiser dix fois plus de matière. Enfin, des ligands
résiduels de synthèse ont été identifiés à la surface des particules et représentent 27 % de
la masse de nanoparticules obtenues.
Cette section établit donc la preuve de concept d’une synthèse aqueuse rapide et effectuée
à basse température pour l’obtention de CZTS. Les études suivantes viseront à identifier
l’influence de différents réactifs utilisés dans les mêmes conditions de synthèse.
Cette section étudie donc l’effet de la modification successive des différents réactifs. Le
premier changement est de remplacer le complexant, à savoir l’acide mercapto-acétique
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 111
(MAA) par un autre complexant. Dans ce paragraphe, il sera substitué par l’éthylène
diamine (figure 4.25). L’éthylène diamine est une di-base [120] déja utilisée dans plusieurs
synthèses de nanoparticules CZTS (voire table 4.3).
Figure 4.26: Solution de chlorure d’étain (IV) compléxé par l’éthylène diamine
Le protocole suivi ensuite a été décrit au chapitre 3 ; cependant la source de soufre uti-
lisée ici est le Na2 S introduit en proportions stœchiométriques de manière identique aux
synthèses précédentes. La coloration des solutions de précurseurs est décrite en figure
4.27, on observe notamment que pour que les cations métalliques introduits en solution
avec l’éthylène diamine dans des proportions identiques au protocole acétate-MAA, la
solution est bleutée et également opaque, signe que des hydroxydes sont encore présents
en suspension. Il est alors nécessaire d’ajouter de l’éthylène diamine pour complexer l’en-
semble des composés. Une fois cette complexation réussie, la solution est alors bleutée
mais n’est plus diffusante, signe que toutes les espèces sont solvatées. Une fois la source
de soufre ajoutée, la solution est ocre. Ces changements d’aspects sont observables en
figure 4.27.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 112
Table 4.11: Compositions chimiques mesurées par EDX après traitement micro-ondes
pour des nanoparticules synthétisées avec Éthylène diamine, sels acétates et Na2 S
La composition du matériau obtenu (table 4.11) est très différente de la composition obte-
nue par le protocole utilisant le MAA comme complexant. La composition des particules
est largement déficitaire en cuivre, élément sensé pourtant être le plus réactif compte tenu
des données du paragraphe 4.1.1. L’effet du complexant choisi est donc déterminant sur
la composition finale des nanoparticules. Étant donnée la composition très éloignée du
CZTS, les analyses DRX et Raman sur ce type de particules n’ont pas été poursuivies.
Pour remédier à ce défaut de composition, une seconde source de soufre est utilisée, il
s’agit du sulfure d’ammonium (NH4 )2 S. Le protocole est identique au précédent en termes
de concentration et d’ordre d’ajout des réactifs.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 113
Le remplacement du Na2 S par une source de soufre plus réactive qu’est le (NH4 )2 S per-
met d’obtenir de nouveau des nanoparticules de composition stœchiométrique. En effet,
comme il peut être observé en table 4.12, les analyses EDX effectuées sur ces poudres
décrivent un matériau possédant la composition du CZTS stœchiométrique avec cepen-
Zn
dant un léger déficit en zinc ( = 0.94) et en soufre. On peut donc conclure de ces
Sn
expériences que la nature du complexant détermine la réactivité chimique des cations en
solution mais cette réactivité est aussi dépendante du type de source de soufre utilisé.
Table 4.12: Compositions chimiques mesurées par EDX après traitement micro-ondes
pour des nanoparticules synthétisées avec Ethylene diamine, sels acétates et (NH4 )2 S
Table 4.13: Compositions chimiques mesurées par EDX après traitement micro-ondes
pour des nanoparticules synthétisées avec Éthylène diamine, sels chlorures et (NH4 )2 S
Lorsque ces poudres sont caractérisées par DRX (figure 4.29), on remarque qu’en sortie
de synthèse celles-ci sont presque totalement amorphes et présentent un seul faible pic à
28.5◦ qui pourrait appartenir au CZTS, CTS ou ZnS. Ce diffractogramme est très similaire
à celui obtenu pour des poudres en synthèse continue sans un traitement thermique post-
synthèse.
Figure 4.30: Analyse TG-DSC des nanoparticules synthétisées avec éthylène diamine
Conclusion Intermédiaire
Chaque réactif utilisé lors de la synthèse a une influence sur la composition finale des na-
noparticules et les mécanismes réactionnels. Changer de ligand et remplacer le MAA par
l’éthylène diamine par exemple, modifie la composition finale des particules. Puisque la
stabilité des complexes métalliques varie avec le type de ligand, le choix de celui-ci définit
la composition des particules synthétisées. Au niveau des précurseurs métalliques, le chan-
gement des contre-ions utilisés ne change pas la composition des particules. Néanmoins, il
est clair que ces contre-ions participent à la complexation des ions métalliques en solution
et déterminent donc la pureté des particules obtenues.
Les nanoparticules obtenues par les synthèses de cette section sont hygroscopiques et
présentent des résidus organiques en quantités plus importantes mais ont permis de mieux
comprendre les mécanismes mis en jeu.
Dans ce paragraphe, seuls des précurseurs chlorés seront utilisés, de manière à éviter
la présence de groupements acétates résiduels après synthèse. Le complexant choisi est
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 118
la thiourée (figure 4.31). Ce complexant est déjà largement utilisé pour l’obtention de
CZTS, que ce soit par spray pyrolyse, voie sol-gel ou pour l’obtention de nanoparticules
[132][48]. Ce composé chimique peut être utilisé soit comme source de soufre (en effet
il se décompose thermiquement en libérant du soufre [172]), soit comme complexant.Ce
complexant semble idéal puisqu’il ne contient qu’un atome de carbone et se décompose
thermiquement pour libérer du soufre, un élément qui ne sera pas néfaste pour le CZTS.
L’originalité du type de synthèse développé dans ce paragraphe réside dans le fait que les
rôles de complexant et de source de soufre sont séparés. En effet, on utilise la thiourée
uniquement comme complexant et le sulfure d’ammonium est utilisé comme source de
soufre.
De manière similaire au MAA, la thiourée peut être utilisée pour réduire les ions de
cuivre (II) en cuivre (I). Cette réaction implique la présence d’une molécule de thiourée
par cation métallique et la formation du disulfide de formamidine. Elle est décrite en R4.5
avec CuCl2 comme précurseur.
Table 4.14: Compositions élémentaires mesurées par EDX sur des poudres synthétisées
selon le protocole thiourée avec différentes quantités de thiourée
Écart-
type
0.26
0.10
0.05
0.04
0.99
0.81
0.82
3 eq 1500W
atom.
Moy.
3.31
1.94
0.87
1.08
Prec.
1
Écart-
type
0.13
0.36
0.07
0.01
0.83
0.81
1.2
2 eq 1500W
atom.
Moy.
3.31
2.28
0.86
1.04
Prec.
1
Écart-
type
0.15
0.07
0.04
0.02
1.01
0.99
0.77
1 eq 1500W
atom.
Moy.
3.10
2.01
0.99
1.00
Prec.
1
0.5Cu + Zn + 2Sn
Éléments (raie
Cuivre(K)
d’émission)
Soufre(K)
Étain(L)
Zn + Sn
Zinc(K)
Cu
Zn
Sn
S
L’étude est menée sur la quantité de thiourée nécessaire ainsi que sur l’influence de la
puissance du traitement micro-ondes. En considérant la quantité atomique de cations
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 120
métalliques (cuivre, zinc et étain) introduits en solution, trois échantillons sont préparés :
cette même quantité de thiourée (1eq), le double de cette quantité (2 eq) et le triple de
cette quantité (3eq) soit l’équivalent de 3 molécules de thiourée par cation métallique.
Les résultats d’analyse chimique par EDX pour les échantillons synthétisés à l’aide d’un
traitement micro-ondes de 1500 W (tableau 4.14) confirment les observations de la pré-
cédente série d’analyses. La quantité de thiourée idéale ici est également la quantité mini-
male, à savoir un équivalent de thiourée par cation métallique. Le traitement micro-ondes
réduit le déficit de soufre observé sur toutes les compositions chimiques des particules. Ce-
pendant ce défaut reste conséquent, le rapport soufre [cations métalliques] ne dépasse pas
0.8, ce qui est largement inférieur à celui observé lors des autres protocoles de synthèse.
On remarque également pour l’échantillon ne contenant qu’un équivalent de thiourée que
l’augmentation de la puissance de micro-ondes induit un contrôle plus précis de la com-
Cu
position. A partir de précurseurs en quantités stœchiométriques, les ratios et
Zn + Sn
Zn
passent respectivement de 0.94 à 1.01 et de 0.95 à 0.99.
Sn
Cette première série d’expériences démontre qu’un équivalent molaire de thiourée suffit à
complexer l’ensemble des cations métalliques de manière à homogénéiser leurs réactivités
et obtenir des particules de composition stœchiométrique. Cette composition est contrôlée
de manière plus précise avec un traitement micro-ondes d’une puissance de 1500 W
mais tous les échantillons restent déficitaires en soufre, ce qui traduit une large présence
d’oxydes dans les particules après synthèse.
Figure 4.32: Diffractogramme des poudres synthétisées par le protocole thiourée après
séchage à 80 ◦ C
Cette présence d’oxyde pourrait être confirmée par l’analyse DRX des particules en sor-
tie de synthèse. Pourtant, le diffractogramme de ces poudres après séchage (figure 4.32)
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 121
présente uniquement le motif commun au CZTS, CTS et ZnS, identique à celui observé
pour les poudres issues des autres synthèses. Encore une fois, ces analyses sont cohérentes
avec un matériau faiblement cristallisé, c’est-à-dire à base de cristallites de quelques na-
nomètres. Cette observation est facilement appuyée par les clichés effectués en microscopie
électronique à transmission. Les domaines ordonnés nanométriques sont observables sur
l’image de droite en figure 4.33, l’image de gauche montre la forte polydispersité des
nanoparticules. Il s’agit en effet d’un mélange de particules et de bâtonnets.
Figure 4.33: Cliché MET haute résolution des nanoparticules obtenues par protocole
thiourée
Figure 4.34: Analyse HAADF EDX des nanoparticules obtenues par protocole
thiourée
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 122
La répartition des différents éléments est homogène sur l’ensemble des particules qu’elles
soient de forme sphérique ou non. On retrouve donc ici un résultat similaire à celui des
particules synthétisées au paragraphe 4.2.1.4, c’est-à-dire des agglomérats amorphes où
la répartition des éléments chimiques est homogène et contenant des domaines cristallins
de quelques nanomètres.
Regardons à présent la dégradation des espèces carbonées présentes avec les nanoparti-
cules. La caractérisation ATG, affichée en figure 4.35 présente un matériau plus pur que
les précédents, en effet celui-ci ne contient que 15 % de matière décomposable. Cette
matière est décomposée entre 80 ◦ C et 400 ◦ C mais la dérivée de la perte de masse in-
dique que les pertes de masses principales ont lieu à 180 ◦ C et 310 ◦ C, ces températures
correspondent à la dégradation de thiourée ([173]).
Ce type de synthèse conduit à un matériau plus pur que les précédents. Il reste à vérifier
la possibilité de moduler la composition des nanoparticules en variant les quantités de
précurseurs. Étant donné que les nanoparticules synthétisées par cette voie présentent
un défaut de soufre, l’effet d’un ajout en excès de sulfure d’ammonium sera également
étudié. La première série d’expérimentations présente la comparaison entre une synthèse
de précurseurs en proportions stœchiométriques et une synthèse utilisant les mêmes
précurseurs mais avec 1.5 équivalent molaire de la quantité de sulfure d’ammonium uti-
lisée dans le protocole standard. Les compositions chimiques de ces poudres sont mesurées
en EDX et affichées à la table 4.15.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 123
Table 4.15: Compositions chimiques mesurées par EDX sur des poudres synthétisées
selon le protocole thiourée avec différentes compositions de précurseurs
Écart-
type
0.04
0.04
0.04
0.02
0.94
1.05
0.82
Échantillon B
atom.
Moy.
3.29
1.91
1.05
1.00
Prec.
1.5
6
2
1
1
1
1
Écart-
type
0.20
0.03
0.01
0.01
1.03
1.00
0.79
Échantillon A
atom.
Moy.
3.15
2.05
0.99
1.00
Prec.
4
2
1
1
1
1
(0.5Cu + Zn + 2Sn
Éléments (raie
Cuivre(K)
d’émission)
Soufre(K)
Étain(L)
Zn + Sn
Zinc(K)
Cu
Zn
Sn
S
Regardons à présent les résultats obtenus dans le cadre d’une composition sous stœ-
chiométrique en cuivre et sur-stœchiométrique en zinc.
Table 4.16: Composition chimique mesurée par EDX pour des nanoparticules
synthétisées avec différentes compositions de précurseurs
Écart-
type
0.28
0.08
0.08
0.05
0.76
1.37
1.18
Échantillon D
atom.
Moy.
4.72
1.69
1.28
0.94
Prec.
1.8
1.2
1.2
6
1
1
6
Écart-
type
0.27
0.19
0.08
0.08
0.77
1.36
0.93
Échantillon C
atom.
Moy.
3.71
1.71
1.36
0.93
Prec.
1.8
1.2
1.2
4
1
1
4
0.5Cu + Zn + 2Sn
Éléments (raie
Cuivre(K)
d’émission)
Soufre(K)
Étain(L)
Zn + Sn
Zinc(K)
Cu
Zn
Sn
S
présent dans les précurseurs n’influe pas sur la composition finale de ceux-ci en termes
d’éléments métalliques dans les particules. De plus, on retrouve le même comportement
que lors de la synthèse acétate-MAA à savoir que lorsque les précurseurs présentent un
écart à la stœchiométrie, cet écart se retrouve amplifié une fois les particules synthétisées.
Dans le cas des deux compositions (soufre stœchiométrique et soufre en excès), les ratios
Cu Zn
et passent respectivement de 0.9 à 0.77 et de 1.2 à 1.36. Cependant, un
Zn + Sn Sn
changement de comportement important est à observer pour l’échantillon synthétisé avec
le sulfure d’ammonium en excès. Cette fois-ci l’échantillon n’est pas déficitaire en soufre
mais excédentaire.
On conclut donc de cette étude qu’il est possible de moduler les concentrations des
différents éléments composant les nanoparticules en changeant simplement les quantités
de précurseurs utilisés.
Ce type de synthèse utilisant la thiourée comme complexant est donc pertinent pour la
suite de l’étude puisqu’elle permet l’obtention de nanoparticules de composition contrôlable
et ne contenant que 15 % de matière décomposable, essentiellement constituée d’éléments
soufre, chlore et azote. Ce pourcentage de matière décomposable reste important et il est
nécessaire d’évaluer l’impact d’une limitation de cette quantité avant dépôt.
Ce paragraphe décrit un procédé de purification qui a fait l’objet d’un brevet au cours
de ce travail de thèse [174].
Le premier objectif est de diminuer la quantité d’éléments organiques présents avec les na-
noparticules synthétisées par le protocole précédent. Sachant que la thiourée se décompose
thermiquement en solution ([172]), il est normalement possible de dégrader un maximum
de matière organique en solution à l’aide d’un solvant à haut point d’ébullition. Les sol-
vants testés ainsi que leurs températures d’ébullition sont présentés en figure 4.36. Ces
solvants présentent une polarité suffisante pour être portés à ébullition par un traitement
micro-ondes de 1500 W pendant 60 secondes.
Figure 4.36: Solvants utilisés pour la purification : (A) Sulfolane Teb =285 ◦ C,(B)
Pyrrolidone Teb =245 ◦ C, (C) Propylène carbonate Teb =242 ◦ C, (D) DMSO Teb =190 ◦ C
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 126
Table 4.17: Composition chimique de nanoparticules mesurée par EDX après purifi-
cation par les solvants Sulfolane et Pyrrolidone
Écart-
type
0.23
0.08
0.07
0.05
Pyrrolydone
0.96
1.02
1.02
atom.
Moy.
4.06
1.95
1.02
1.01
Écart-
type
0.15
0.11
0.04
0.04
Sulfolane
1.63
1.71
1.21
atom.
Moy.
4.83
2.99
1.16
0.67
Nanoparticules initiales
Écart-
type
0.07
0.05
0.03
0.02
1.01
0.88
0.87
atom.
Moy.
3.48
1.98
0.92
1.05
0.5Cu + Zn + 2Sn
Éléments (raie
Cuivre(K)
d’émission)
Soufre(K)
Étain(L)
Zn + Sn
Zinc(K)
Cu
Zn
Sn
S
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 127
Table 4.18: Composition chimique de nanoparticules mesurée par EDX après purifi-
cation par les solvants Propylène carbonate et DMSO
Écart-
type
0.15
0.40
0.06
0.13
DMSO
1.20
1.08
0.56
atom.
Moy.
2.22
2.32
1.01
0.92
Propylène Carbonate
Écart-
type
0.12
0.14
0.03
0.04
0.86
0.66
0.68
atom.
Moy.
2.70
1.69
0.78
1.19
Nanoparticules initiales
Écart-
type
0.06
0.06
0.03
0.01
0.90
0.86
0.66
atom.
Moy.
2.64
1.83
0.93
1.08
0.5Cu + Zn + 2Sn
Éléments (raie
Cuivre(K)
d’émission)
Soufre(K)
Étain(L)
Zn + Sn
Zinc(K)
Cu
Zn
Sn
S
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 128
Enfin, le traitement par le solvant DMSO n’est pas satisfaisant. Les analyses chimiques
EDX du tableau 4.18 démontrent qu’après traitement, les quantités de soufre et d’étain
présentes dans le matériau ont diminué. Cette réduction de la quantité d’étain explique
Cu Zn
l’élévation des ratios et . On peut donc conclure que le traitement dégrade
Zn + Sn Sn
les phases de SnS en priorité.
Selon les analyses chimiques, seul le traitement pyrrolidone et dans une moindre mesure le
traitement DMSO permettent de maintenir la composition chimique des nanoparticules.
Au niveau des analyses ATG, les traitements sulfolane et propylène carbonate n’apportent
aucune diminution d’éléments organiques décomposables puisque la perte totale de masse
finale est dans les deux cas de 25 %. En revanche la purification est notable pour les
traitements DMSO et pyrrolidone. Dans le cas du DMSO, la perte de masse s’élève à 10
%, ce qui est un progrès comparé aux 15 % présentés au paragraphe 4.2.3. En termes de
température de décomposition, on observe un comportement similaire à celui du matériau
avant traitement, à savoir une perte de masse centrée sur 300 ◦ C et l’ensemble des éléments
organiques décomposés avant 400 ◦ C. Ce comportement correspond à une dégradation
seulement partielle de la thiourée utilisée lors de la synthèse des nanoparticules. Une
solution envisageable serait d’augmenter le temps de traitement de purification, mais
ce traitement aggraverait encore le déficit d’étain du matériau final si l’on se base sur
les observations du tableau 4.18. Le traitement pyrrolidone est encore une fois le plus
satisfaisant puisque la perte de masse observée après caractérisation ATG s’élève à 7 % soit
une réduction de moitié de la quantité d’éléments volatils dans le matériau. L’élimination
de composés se fait de manière régulière avec l’élévation de température, ce qui signifie
que l’ensemble de la thiourée a été dégradé.
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 129
Conclusion du chapitre 4
Dans ce chapitre, la synthèse de nanoparticules a été abordée dans son ensemble. Plusieurs
paramètres sont à prendre en compte comme la stabilité et la réactivité des trois espèces
Chapitre 4. Synthèses de nanoparticules 130
métalliques qui génèrent des difficultés pour la maı̂trise de la composition chimique des
particules. L’ajout de complexants organiques est indispensable mais représente un source
de contamination des nanoparticules. Le développement d’une synthèse implique l’obten-
tion de compromis entre les temps et températures de réaction ainsi que la pureté et la
cristallinité des particules.
Enfin, une synthèse limitant l’usage de composés organiques, à base de sels chlorés et de
thiourée permettant de fabriquer des particules plus pures a été développée. Encore une
fois, la composition est modifiable et reste très proche des concentrations de précurseurs.
Un procédé de purification breveté [174] permet de réduire encore la quantité d’éléments
décomposables dans les particules.
Au terme de ce chapitre, plusieurs synthèses rapides et ayant lieu à basse température sont
mises au point pour fabriquer des nanoparticules. Bien qu’étant de nature amorphe ou peu
cristallisée, elles permettent l’obtention du matériau CZTS après traitement thermique.
La prochaine étape est l’utilisation de ces particules pour formuler des encres.
Chapitre 5
Introduction
Des nanoparticules de composition et de pureté maı̂trisées peuvent être synthétisées. La
prochaı̂ne étape dans le développement de couches minces CZTS à partir de nanoparti-
cules est la mise au point du procédé de dépôt. Ce dépôt doit permettre la mise en forme
des nanoparticules en couches continues de quelques microns d’épaisseur sur un substrat
en molybdène. Ce chapitre décrit donc les étapes successives qui permettent de passer
d’une dispersion colloı̈dale à une encre puis à une couche mince. Dans un premier temps,
l’étude du substrat molybdène est réalisée pour identifier d’éventuelles contraintes de
formulation. Ensuite, différentes stratégies de stabilisation colloı̈dale sont développées en
fonction de leur incidence sur la pureté des particules. Puis, des formulations sont établies
pour le procédé jet d’encre. Enfin, ces formulations développées pour le jet d’encre sont
déposées par le procédé spray et le séchage des couches est étudié.
Le support utilisé pour l’ensemble de ce travail est le verre sodocalcique recouvert d’une
couche continue de molybdène déposée par pulvérisation cathodique. Le molybdène est
le contact arrière de la future cellule déposée par impression. Ce type de substrat doit
être pris en compte avant tout travail de formulation d’encre. En effet, il est à la fois
incompressible et rigide. Les procédés de dépôt sans contact comme le spray et le jet
d’encre lui sont particulièrement adaptés .
Le molybdène est bien cristallisé et identifiable par diffraction des rayons X (figure 5.1) en
phase cubique. Le diffractogramme de ce substrat présente en plus du motif du molybdène
cubique certains pics non attribuables au molybdène à 33.46◦ et 32.41◦ provenant certai-
nement de pollutions liées à son dépôt mais encore non identifiées. Le faible pic observé
à 36.41◦ est lié à la contribution Kβ du pic principal du molybdène.
131
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 132
Toute encre formulée pour déposer une couche de CZTS sur ce substrat doit s’étaler
correctement sur celui-ci lors du dépôt. Pour prédire le comportement d’étalement de
ces encres sur le molybdène, il est nécessaire de déterminer son énergie de surface. Cette
mesure est effectuée selon le protocole décrit au paragraphe 3.2.3.
Les mesures d’angle de contact ont donc été effectuées sur ce substrat de molybdène
avant et après traitement (figure 5.2). Les angles pris en compte sont la moyenne de trois
mesures.
Figure 5.2: Analyse d’énergie de surface avant (gauche) et après (droite) traitement
ammoniaque
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 133
La première propriété à vérifier dans le but de formuler une encre adaptée au dépôt
de nanoparticules est la stabilité colloı̈dale de la dispersion dans les solvants adéquats.
Ce paragraphe décrit le comportement des nanoparticules dans différents solvants après
synthèse et les différentes voies de stabilisation utilisées dans ce travail.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 134
Pour discriminer les solvants susceptibles de satisfaire les conditions de stabilité colloı̈dale,
il est nécessaire de classer leurs caractéristiques physico-chimiques. Ce type de probléma-
tique est bien connu dans le domaine des polymères et nanoparticules [178][179]. Dévelop-
pée dans les années 1960, la théorie HSP (Hansen Solubility Parameters) permet de classer
les solvants selon le type de liaisons intermoléculaires qu’ils possèdent. Selon cette théorie,
il est possible de caractériser les solvants selon leurs interactions intermoléculaires de type
dispersive (δd ), de type polaire (δp ) et de liaisons hydrogènes (δh ) [180].
Ce type d’approche permet de distinguer plus précisément les solvants entres eux que par
la simple classification polaire-apolaire et protique-aprotique, puisque des valeurs chiffrées
sont utilisées.
L’ensemble des solvants utilisés au cours des études suivantes est présenté à la table 5.2.
Les solvants indiqués dans la table 5.2 permettent de couvrir l’ensemble des propriétés
physico-chimiques nécessaires à la formulation des encres. En effet dans ce groupe de
solvants, il est possible de trouver à la fois des solvants volatils ainsi que des solvants à haut
point d’ébullition tout en variant les propriétés de polarité et d’interactions hydrogène.
La méthode de mesures par DLS est un moyen simple pour discriminer les dispersions
selon leur stabilité. Si la dispersion est déstabilisée par un phénomène d’agrégation rapide,
la polydispersité provoquée par cette agrégation rendra la mesure impossible. Si cette
cinétique d’agrégation est plus lente, de larges agrégats seront tout de même observés
lors de la mesure. Enfin, si la dispersion est stable, la mesure s’effectue sans problème et
indique une polydispersité (PDI) inférieure à 0.2. La mesure de taille est effectuée juste
après redispersion dans le solvant.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 135
Table 5.2: Paramètres de solubilité (HSP) des solvants utilisés dans ce travail
Hexane
68 ◦ C
7.3
0
0
Dodecanethiol
275 ◦ C
7.8
1.3
1.7
Butanol
117 ◦ C
7.8
2.8
7.7
Éthanol
78 ◦ C
7.7
4.3
9.5
Méthyle
cétone
éthyle
80 ◦ C
7.8
4.3
2.5
Éthylène
197 ◦ C
glycol
7.8
5.4
13
100 ◦ C
20.68
H2 O
7.63
7.82
δd (cal/cm3 )
δp (cal/cm3 )
δh (cal/cm3 )
chimique
Formule
Teb
Les résultats résumés en table 5.3 informent que les nanoparticules sont de nature hydro-
phile. Elles sont dispersables dans l’eau ainsi que dans les solvants de polarité et proticité
intermédiaires tels que l’éthanol, l’éthylène glycol et l’acétone. En revanche, celles-ci ne
le butanol et le dodecanethiol.
moyenne
(nm)
PDI 0.225 0.180 0.337 0.285 échec 0.261 échec
Observations bonne bonne bonne bonne décantation décantation décantation
dispersion dispersion dispersion dispersion rapide rapide rapide
Table 5.3: Essai de dispersions de nanoparticules dans différents solvants
136
sont pas stables dans les solvants apolaires tel que l’hexane ou de faible polarité comme
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 137
Ces observations sont cohérentes puisque les nanoparticules sont synthétisées en voie
aqueuse. Pour approfondir le comportement en dispersion aqueuse de nanoparticules, le
potentiel Zêta a été mesuré en fonction du pH des nanoparticules.
Ce potentiel Zêta varie entre -3.49 et −37.4 mV. Cela signifie que les ions adsorbés en
surface de particules sont des anions et donc que les nanoparticules sont chargées positive-
ment en surface. Il y a donc des cations métalliques apparents ou des fonctions organiques
chargées positivement en surface de nanoparticules. Une hypothèse serait la présence de
fonctions aminées dont le pKa est de l’ordre de 9, ce qui expliquerait l’augmentation en
valeur absolue de potentiel Zêta à ce pH.
Lorsque les dispersions sont laissées à vieillir à température ambiante (figure 5.4), on
observe en quelques heures une décantation qui reflète une agrégation des nanoparticules.
On peut donc conclure de cette étude préliminaire que les nanoparticules sont de nature
hydrophile et redispersables dans les solvants de nature polaire et protique. Cependant,
ces dispersions sont toutes instables et les phénomènes d’agrégation et de décantation
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 138
sont inévitables peu importe le type de solvant. Les nanoparticules doivent donc être
stabilisées.
Les différentes voies de stabilisation sont décrites dans les paragraphes suivants.
Figure 5.5: Schéma d’un ligand alkyle fixé sur une nanoparticule
La première difficulté pour développer une stabilisation stérique par adsorption de ligand
est de déterminer quel type de fonction d’ancrage permet d’adsorber des molécules sur les
nanoparticules utilisées dans ce travail. Une méthode simple pour discriminer les fonctions
chimiques pertinentes est d’utiliser le principe du transfert de phase. Comme les particules
sont hydrophiles, lorsque celles-ci sont placées dans un mélange biphasique eau-hexane,
elles ne sont présentes que dans la phase aqueuse. Si la fonction d’ancrage du tensioactif
réagit avec la surface des particules, il se forme une monocouche de chaı̂ne alkyle qui
rend les nanoparticules hydrophobes et provoque leur migration dans la phase apolaire,
ici l’hexane (5.6).
Selon ces résultats, les fonctions d’ancrage pertinentes sont les fonctions thiol et pyrroli-
done, puisque seules ces deux fonctions permettent un transfert vers la phase hexane sans
modification de couleur, qui indiquerait une décomposition des nanoparticules.
Des stabilisants possédant ces deux fonctions d’ancrage sont donc utilisés dans la suite.
La fonction thiol comme fonction d’ancrage est adsorbée à la surface des particules selon le
protocole décrit au paragraphe 3.1.3.1. Même si l’expérience en transfert de phase prouve
que la fonction thiol permet d’adsorber les ligands en surface de particule, une analyse
par spectroscopie infrarouge est nécessaire pour analyser plus précisément le changement
d’état de surface des nanoparticules. Cette analyse, présentée en figure 5.7, indique que
la fonctionnalisation par DDT a bien lieu.
Les fonctions organiques identifiées sur les particules en sortie de synthèse au paragraphe
4.2.1.5 ne sont plus visibles après stabilisation. Les seules vibrations observées en FT-IR
après fonctionnalisation sont les vibrations symétrique et asymétrique des groupements
méthylène à 2920 cm−1 et 2950 cm−1 . De plus la signature des groupements méthylène est
aussi observable par leur vibration de cisaillement à 1450 cm−1 . L’analyse infrarouge ne
permet pas de conclure sur la nature de la liaison chimique entre les ligands dodecanethiol
et la surface des particules car la signature des fonctions thiol (observable à 2560 cm−1 )
est connue pour être de faible intensité [183]. L’absence de pic à ce nombre d’onde n’est
donc pas un argument suffisant pour prouver une éventuelle liaison covalente entre les
particules et les ligands DDT.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 141
Les tests de redispersion affichés à la table 5.5 démontrent que le comportement en disper-
sion de nanoparticules est influencé par la modification de surface induite par le traitement
au dodecanethiol. De manière logique, le traitement au dodecanethiol rend les nanoparti-
cules difficilement dispersables en phase aqueuse. Ce comportement s’explique aisément
par la présence de chaı̂nes alkyles apolaires en surface de particules ayant peu d’affinités
avec un solvant polaire et protique tel que l’eau.
La table 5.5 informe que les nanoparticules sont stables dans des solvants de polarité et
proticité intermédiaires comme l’éthylène glycol, l’éthanol ou la méthyle éthyle cétone.
En affinant cette analyse, on observe que le diamètre des nanoparticules mesuré dans
l’éthylène glycol est plus faible que celui des nanoparticules en sortie de synthèse. Cela
s’explique par une faible stabilité de celles-ci dans l’éthylène glycol. En réalité, les nano-
particules s’agrègent suffisamment lentement dans l’éthylène glycol pour permettre une
mesure par DLS. Comme les agrégats de tailles supérieures ont décanté avant la mesure,
seules les particules de diamètre inférieur sont encore dispersées de manière stable et sont
Sans H2 O Éthylène Méthyle Éthanol Butanol Dodecanethiol Hexane
stabilisation glycol éthyle
cétone
Taille 97.11 256.5 467.9 164.5 échec 2325 échec
moyenne
(nm)
PDI 0.225 0.180 0.337 0.285 échec 0.261 échec
Observations bonne bonne bonne bonne décanta- décantation décanta-
disper- disper- disper- disper- tion rapide tion
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres
cétone
Taille échec 34.21 148.3 164.0 527.9 858.5 échec
stabilisation par dodecanethiol
moyenne
(nm)
PDI échec 0.126 0.120 0.447 0.233 0.382 échec
Observations décanta- bonne bonne bonne dispersion dispersion mauvaise
tion disper- disper- disper- moyenne moyenne disper-
rapide sion sion sion sion
Table 5.5: Analyse de la dispersion des nanoparticules dans les solvants avant et après
mesurées. L’éthylène glycol présente donc un caractère protique trop affirmé (δp = 13
142
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 143
Lorsque la polarité et la proticité sont encore réduites, c’est-à-dire pour les solvants buta-
nol, dodecanethiol et hexane, les mesures de DLS montrent une instabilité de la dispersion
colloı̈dale. Dans le cas des solvants butanol et dodecanethiol, les analyses suggèrent un
phénomène d’agrégation lent comme l’indique la présence de larges agglomérats de plu-
sieurs centaines de nanomètres dans ces solvants.
Dans un solvant apolaire et aprotique tel que l’hexane, les particules ne se redispersent
pas. A première vue, ce comportement n’est pas logique : puisque les nanoparticules sont
fonctionnalisées avec des chaı̂nes alkyles, celles-ci devraient être stables dans un solvant
comme l’hexane qui est une chaı̂ne alkyle.
Une hypothèse qui expliquerait ce comportement non trivial est la présence de charges
résiduelles en surface de particules en plus des chaı̂nes alkyles de dodecanethiol, et donc
une couverture partielle de la surface des particules par les ligands dodecanethiol. Cette
présence de charges et de chaı̂nes alkyles expliquerait pourquoi les nanoparticules sont
stables dans un solvant de polarité intermédiaire comme la MEK. Pour valider cette
hypothèse, une mesure de potentiel Zêta est nécessaire (5.3).
En comparant le potentiel Zêta des particules stabilisées (figure 5.9) à celui des particules
non stabilisées (figure 5.3), on peut remarquer que celui-ci reste négatif, preuve que la
surface des particules reste chargée positivement après stabilisation. De plus, ce potentiel
reste relativement constant entre les pH 3 et 11 à une valeur d’environ −37 mV. Cette
valeur est supérieure en valeur absolue à celle du potentiel Zêta observé sur des particules
sans stabilisation. L’adsorption de dodecanethiol suscite donc la génération de charges à
la surface des particules. A ce jour ces charges n’ont pas été identifiées.
Les expériences de transfert de phase de la table 5.4 ont mis en évidence que la fonction
pyrrolidone permet également la fixation de ligands en surface de particules, ce paragraphe
décrit donc l’étude de la stabilisation par adsorption de dodécyle pyrrolidone.
L’utilisation de ce ligand est intéressante car il est composé de la même chaı̂ne alkyle que le
dodecanethiol et d’une fonction d’accroche différente. Ainsi, en utilisant les nanoparticules
stabilisées par les deux ligands, il sera possible de discriminer si un effet observé sur les
couches minces est dû à la chaı̂ne alkyle ou à la fonction d’accroche du ligand.
Pour valider la fonctionalisation par le dodécyle pyrrolidone, une analyse FT-IR est ef-
fectuée sur des particules fonctionnalisées selon le protocole décrit au paragraphe 3.1.3.2.
Cette analyse (figure 5.10) démontre d’une manière similaire que les fonctions organiques
présentes en surface de particules avant fonctionnalisation sont remplacées par des ligands.
En effet, d’une manière similaire à l’étude au dodecanethiol du paragraphe précédent, on
observe après stabilisation les vibrations symétrique et asymétrique des groupements
méthylène à 2920 cm−1 et 2950 cm−1 , ainsi que la signature de cisaillement des groupe-
ments méthylènes à 1450 cm−1 .
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 145
L’adsorption de ligands est vérifiée par ATG (figure 5.11). Comme lors de la stabilisation
par dodecanethiol, les ligands pyrrolidone augmentent la température de décomposition
des éléments carbonés présents sur les particules. Cependant l’élévation de température
de décomposition est moins importante dans le cas de la stabilisation pyrrolidone : envi-
ron 280 ◦ C pour désorber les ligands pyrrolidone, contre 330 ◦ C pour désorber les ligands
dodecanethiol. Le pourcentage d’éléments volatils est augmenté par le traitement pyrro-
lidone à hauteur de 40 % environ.
moyenne
(nm)
PDI 0.225 0.180 0.337 0.285 échec 0.261 échec
Observations bonne bonne bonne bonne décantation décantation décanta-
disper- disper- disper- disper- rapide rapide tion
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres
La table 5.6 indique une évolution de stabilisation différente de celle observée dans le cas
de la stabilisation au dodecanethiol. Si le comportement est similaire quant à l’instabilité
des nanoparticules stabilisées dans les solvants comme l’eau ou l’hexane, la MEK n’est
pas un solvant convenable pour les nanoparticules stabilisées par le dodécyle pyrrolidone.
Dans le cas présent, c’est l’éthanol qui semble présenter les meilleures caractéristiques
physico-chimiques et permettre d’obtenir une dispersion stable.
Les mesures DLS utilisées dans la table 5.6 sont présentés en Annexe C. Les particules
pourtant fonctionnalisées à l’aide de chaı̂nes alkyles ne sont pas stables dans les solvants
apolaires comme l’hexane. Pour approfondir ce point, une étude de potentiel Zêta a été
réalisée (figure 5.12).
Les résultats de la figure 5.13 confirment la stabilité à long terme des nanoparticules
stabilisées par le DDP. Comme la taille mesurée des particules varie de quelques dizaines
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 148
Une seconde voie de stabilisation est donc validée dans ce paragraphe, mais c’est également
la voie qui génère l’élévation la plus importante de la quantité d’éléments organiques
présents avec les nanoparticules. Pour limiter cette quantité d’éléments décomposables,
une autre voie de stabilisation a été développée et est décrite au paragraphe suivant.
Alors que les voies de stabilisation présentées précédemment ont recours majoritairement
au phénomène de stabilisation par encombrement stérique, le procédé décrit dans ce
paragraphe fait appel à la répulsion électrostatique expliquée au chapitre 2.
Dans le cas présent, des anions sulfures S2− sont adsorbés selon le protocole 3.1.3.3 à
la surface des nanoparticules synthétisées par le protocole “thiourée” 3.1.1.4 et purifiées
selon le protocole 3.1.3.3.
Le protocole d’ajout d’anions S2− se fait par lavages successifs dans des solutions de
(NH4 )2 S (paragraphe 3.1.3.3). La présence d’anions sulfures est validée par l’élévation
de potentiel Zêta en valeur absolue dans différents solvants. Dans tous les solvants, ces
potentiels Zêta, récapitulés en table 5.7, sont négatifs, ce qui corrobore l’adsorption des
charges négatives S2− .
Dans l’eau notamment, ces anions S2− permettent d’atteindre un potentiel Zêta proche
de -50 mV, valeur barrière à partir de laquelle une dispersion est considérée comme stable
à long terme.
Table 5.7: Potentiels Zêta des particules stabilisées par les anions sulfures dans
différents solvants
Potentiel Écart-type
Zêta (mV)
Eau -48.5 13.8
Ethylene glycol -38.8 83.1
DMSO -33.2 31.2
Ethanol -28.3 8.46
Methyl Ethyl -30.6 7.87
Cétone
Les nanoparticules obtenues par le protocole “thiourée” présentent deux populations : des
agrégats sphériques et des bâtonnets de tailles nanométriques différentes. De ce fait, la
mesure par DLS ne permet pas de connaı̂tre la stabilité à long terme de la dispersion. Il
est en effet impossible de savoir si les objets de plusieurs centaines de nanomètres observés
sont des bâtonnets ou des particules sphériques en train de s’agréger.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 150
Pour valider la stabilité colloı̈dale de ces dispersions, un vieillissement accéléré a été si-
mulé par centrifugation. Dans le cas présent, les dispersions subissent une centrifugation
à 5000 tours par minute pendant 5 minutes. L’observation de ces dispersions après centri-
fugation (figure 5.14) a permis d’évaluer le type de solvant dans lequel la stabilisation par
adsorption d’anions sulfures est pertinente. Il s’agit des solvants les plus polaires testés
tels que l’eau et le DMSO.
δd δp δh
(cal/cm3 ) (cal/cm3 ) (cal/cm3 )
Eau 6 15.3 16.7
Ethylene glycol 8.25 5.4 12.7
DMSO 9.0 8.02 4.99
Ethanol 7.72 4.30 9.48
Trois composés ont été identifiés comme permettant de fonctionnaliser cette surface, il
s’agit du dodecanethiol, du dodécyle pyrrolidone et des anions sulfures. Les nanoparticules
sont de nature hydrophile après synthèse mais après modification de leur surface par
les ligands organiques, celles-ci sont stables en dispersion dans des solvants de polarité
intermédiaire comme l’éthanol et la MEK. La stabilité dans ces solvants s’explique par
la présence de chaı̂nes alkyles en surface de particules mais également par la présence de
charges de surface. Ces ligands maintiennent, voire augmentent la quantité d’éléments
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 151
organiques présents dans les particules. Pour éviter cela, il est possible d’utiliser une
stabilisation par anions sulfures qui permet d’accroı̂tre la répulsion entre particules et
donc de stabiliser la dispersion sans augmenter la quantité d’éléments organiques. A
présent, il est envisageable d’utiliser ces dispersions stables pour obtenir des encres et des
dépôts.
Introduction
Une fois la stabilité colloı̈dale assurée, il est possible d’étudier la formulation d’encres
basées sur ces dispersions. Trois encres pour impression jet d’encre seront formulées avec
des nanoparticules stabilisées par le DDT, DDP et S2− .
Selon l’étude bibliographique du chapitre 2, le procédé jet d’encre est le plus restrictif
au niveau des propriétés physico-chimiques des encres. C’est pourquoi les encres seront
développées dans un premier temps pour l’impression jet d’encre puis appliquées sans
modification de formulation au procédé spray.
Toutes les formulations sont basées sur des mélanges de solvants : l’un à point d’ébullition
supérieur à 150 ◦ C et l’autre à faible point d’ébullition, inférieur à 100 ◦ C, pour assurer
un séchage rapide de l’encre une fois déposée sur le substrat.
Les nanoparticules stabilisées par dodecanethiol, décrites au paragraphe 5.2.3, sont stables
dans la MEK et partiellement stables dans le dodecanethiol. Ces deux solvants sont
miscibles et de températures d’ébullition très différentes (de l’ordre de 80 ◦ C pour la
MEK et 280 ◦ C pour le DDT). De plus, leurs tensions superficielles sont inférieures à
30 mN/m ce qui fait de ce couple de solvants un excellent candidat pour la formulation
d’une encre jet d’encre à base de nanoparticules stabilisées par DDT.
Pour évaluer la pertinence d’une formulation à base de MEK et DDT, plusieurs encres
sont formulées avec un taux de charge de particules de 5% massique. Selon les proportions
de MEK et DDT dans l’encre, l’éjection de gouttes est réalisée ou non. Ces résultats sont
résumés à la figure 5.15.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 152
Les résultats obtenus sont cohérents avec ceux de la littérature [97][94]. L’éjection est sa-
tisfaisante pour les encres dont le nombre Z est supérieur à 1. En dessous de cette valeur,
c’est-à-dire pour les encres contenant plus de 30 % massique de DDT, l’éjection de gouttes
n’a pas lieu. Dans la littérature, il est commun d’attribuer l’échec d’éjection de gouttes
pour des valeurs de Z inférieures à 1 à une viscosité de l’encre trop importante. Cette
explication est ici cohérente avec une augmentation de la proportion de dodecanethiol
dans l’encre puisque le dodecanethiol est un solvant plus visqueux que la MEK (respec-
tivement 2.98 mPa · s et 0.43 mPa · s à 20 ◦ C). Un taux massique de DDT supérieur à
30 % entraı̂ne donc une élévation de viscosité qui amortit l’excitation piézoélectrique des
buses. Pour garantir à la fois la présence d’un co-solvant de faible volatilité et une éjection
satisfaisante, toute la suite de ces travaux sera effectuée à l’aide d’une encre contenant
10 % de DDT et 5 % massique de nanoparticules.
Figure 5.16: Ejection d’une encre à 10% de DDT avant (gauche) et après (droite)
modification de la forme d’onde
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 153
Les gouttes éjectées présentent de nombreux satellites (voir figure 5.16). Comme l’ajus-
tement des propriétés physico-chimiques se limite à varier la quantité de solvant et de
co-solvant, il est nécessaire d’ajuster la forme d’onde du signal électrique envoyé aux buses
pour modifier la qualité de l’éjection des gouttes.
Comme le décrit la figure 5.16, une fois les paliers et durées d’impulsion modifiés, les
gouttes d’encre éjectées sont uniques et de vitesse régulière.
Maintenant que l’éjection des gouttes est optimisée, il est possible d’évaluer la qualité de
l’impression. La figure 5.17 présente l’impression effectuée sur substrat molybdène avec
une résolution de 150 µm.
On conclut qu’une résolution de 150 µm n’est pas suffisante pour couvrir le support. La
taille des points imprimés est d’environ 70 µm. De ce fait, un espacement des points de
150 µm ne permet pas de former une couche continue. En revanche on remarque l’ex-
cellente régularité de placement des points. A plus fort grossissement, toujours en figure
5.17, il est possible d’observer que l’intérieur des points ne recouvre que partiellement
le molybdène. Une fois l’impression séchée, les nanoparticules sont présentes en majorité
au cœur et à l’extrême périphérie des points. Ce phénomène est bien connu dans le jet
d’encre et s’appelle l’effet “coffee-ring” [185]. Il est dû à l’effet Marangoni [186], il provient
d’un gradient de tension de surface induit par le séchage. Ce gradient génère un flux de
particules vers la périphérie pendant le séchage. Comme la technologie développée dans ce
travail utilise une superposition d’un nombre important de points, ce problème de “coffee
ring” est secondaire.
Sachant que le diamètre des points imprimés est de 70 µm et que l’intérieur de ces points
ne couvre pas totalement le molybdène, il est nécessaire d’augmenter le nombre de points
par unité de surface pour assurer le recouvrement complet du substrat. Le nombre de
points par unité de surface est la résolution de l’impression. L’étude suivante présente
des impressions dont la résolution varie de 80 µm à 5 µm, la résolution maximale de
l’imprimante Dimatix.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 154
L’épaisseur moyenne est de 800 nm, ce qui est parfaitement compatible avec la fabrication
de couches minces CZTS.
La formulation et les paramètres d’impression ayant été optimisés, il reste à vérifier que
le procédé d’impression permet la réalisation de motifs sur des surfaces plus importantes.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 155
Dix carrés de 1 cm2 ont été imprimés sur un substrat de verre/molybdène. Une photo
de cet imprimé (figure 5.20), démontre la régularité et la précision de l’impression sur
plusieurs motifs successifs ainsi que le positionnement de ces motifs.
Après impression, tous les échantillons sont séchés une heure à 300 ◦ C sous une pression de
20 mbar. Ce séchage provoque des fissures dans la couche et laisse à nouveau apparaı̂tre
le molybdène. Il résulte de cette observation que malgré la présence d’un co-solvant à
haut point d’ébullition, à savoir le dodecanethiol, une étude sur le séchage des encres doit
être effectuée. Cette étude sera présentée au paragraphe 5.4.1 sur des dépôts de la même
encre effectués par spray.
Dans cette section, les nanoparticules stabilisées par le dodécyle pyrrolidone décrites
au paragraphe 5.2.4 sont utilisées. Les études sur la stabilité colloı̈dale ont montré que
ces particules sont stables dans l’éthanol et partiellement dans l’éthylène glycol. En se
basant sur les points d’ébullition de l’éthanol (80 ◦ C) et de l’éthylène glycol (197 ◦ C),
on constate que ce couple de solvants serait compatible pour la formulation d’une encre
utilisant, comme dans le paragraphe précédent, un solvant de forte volatilité et un solvant
de plus faible volatilité. Le mélange de ces deux solvants pourrait permettre d’ajuster les
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 156
L’éjection de gouttes d’encre est observée pour deux plages de composition. Une plage
allant de l’éthylène glycol pur à un mélange de 85 % d’éthylène glycol et d’éthanol. La
seconde plage de composition est entre 15 et 25 % d’éthylène glycol dans l’éthanol.
Comme une encre composée uniquement d’éthylène glycol présente un mouillage partiel
du molybdène, il est préférable de se baser sur une formulation contenant 15% d’éthylène
glycol dans l’éthanol.
Les impressions sont ici effectuées directement avec une résolution de 5 µm dans le but
de comparer l’aspect des couches minces obtenues. L’observation en coupe (figure 5.23)
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 157
démontre que les épaisseurs obtenues sont comparables d’une encre à l’autre. Comme les
concentrations massiques en particules sont identiques dans les deux encres, ce résultat
apparaı̂t logique.
L’imprimé est séché une heure à 300 ◦ C sous une pression de 20 mbar et des fissures sont
visibles sur l’imprimé (figure 5.24). Comme pour l’encre précédente, l’optimisation de ce
phénomène de fissuration sera discutée dans le prochain paragraphe (5.4.2).
Avant toute poursuite d’étude, il est important de préciser que les deux encres formulées
précédemment ont un inconvénient majeur : la rapidité d’évaporation de leur solvant
principal. Cette évaporation rapide tend à boucher les buses lorsque celles-ci ne sont pas
en activité. Aussi, est-il inenvisageable d’imprimer plusieurs couches successives avec un
séchage intermédiaire d’une heure puisque les buses seront bouchées dans cet intervalle
de temps.
En prenant cet inconvénient en compte, l’encre suivante sera formulée avec des solvants
à point d’ébullition supérieur à 100 ◦ C.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 158
Dans ce paragraphe, les nanoparticules utilisées sont les particules stabilisées par adsorp-
tion d’anions sulfures, décrites en partie 5.2.5. Ces nanoparticules apparaissent stables
dans les solvants : eau, DMSO et éthylène glycol. Tous ces solvants possèdent une tension
de surface trop élevée pour assurer un étalement complet de l’encre sur le molybdène,
un co-solvant est donc requis pour assurer l’étalement de l’encre. Cependant, l’étude
présentée en paragraphe 5.2.5 montre que les solvants MEK et éthanol, dégradent la
stabilité colloı̈dale de ces particules.
Dans cette étude, le solvant DMSO a été choisi comme solvant principal de l’encre. Ce
choix est motivé par plusieurs raisons : le DMSO est un solvant soufré, il possède un
point d’ébullition élevé (Teb = 197 ◦ C) et il a déjà été employé dans plusieurs travaux
sur le dépôt humide de couches minces CZTS menant à des rendements photovoltaı̈ques
supérieurs à 7.5 % [44]. La tension superficielle du DMSO est de 43.4 mN · m−1 , et sa visco-
sité est de 1.90 mPa · s. Pour ajuster la formulation, un co-solvant est nécessaire, miscible
avec le DMSO, de viscosité plus importante (idéalement supérieure à 20 mPa · s), de ten-
sion de surface plus faible (et au minimum inférieure à 35 mNm−1 ) et de température
d’ébullition supérieure à 100 ◦ C.
Le cyclohexanol (figure 5.25) est un solvant qui remplit l’ensemble de ces caractéristiques :
il est miscible avec le DMSO, possède une température d’ébullition de 161 ◦ C, sa tension
de surface est 34.4 mNm−1 et une viscosité de 41 mPa · s à 25 ◦ C. La masse volumique du
cyclohexanol est de 962 kgm−3 .
Dans le cas de l’encre A, le retrait de l’encre déposée sur le molybdène s’explique na-
turellement par l’évaporation dans un premier temps du cyclohexanol. Comme le point
d’ébullition du cyclohexanol (161 ◦ C) est inférieur à celui du DMSO (197 ◦ C), la quantité
de DMSO dans l’encre augmente au cours du séchage pour aboutir à une encre constituée
uniquement de DMSO. La tension superficielle du DMSO étant plus élevée, l’encre ne
s’étale plus sur le support.
Le cas de l’encre B semble plus complexe car au cours du séchage, l’étalement de l’encre
reste inchangé. L’hypothèse émise pour décrire l’évaporation de l’encre A ne convient
pas pour décrire le comportement de l’encre B. Si le mouillage du substrat reste total
pendant l’intégralité du temps de séchage, cela signifie qu’une fraction de cyclohexanol
est toujours présente dans l’encre.
qu’il faut minimiser le taux de cyclohexanol pour assurer la stabilité colloı̈dale de l’encre.
La composition de l’encre qui contient le moins de cyclohexanol et qui assure une bonne
mouillabilité du substrat pendant l’intégralité du séchage a été obtenue empiriquement.
δd δp δh
(cal/cm3 ) (cal/cm3 ) (cal/cm3 )
Eau 6 15.3 16.7
Cyclohexanol 8.51 2.00 6.60
DMSO 9.0 8.02 4.99
Ethanol 7.72 4.30 9.48
Cette conclusion est vérifiée par les essais sur imprimante Dimatix. Aucune optimisation
de forme d’onde n’a été nécessaire, les gouttes d’encres éjectées sont sans satellite et de
vitesse régulière (figure 5.27.
Les solvants utilisés dans cette encre étant moins volatils que les solvants utilisés dans les
encres précédentes, il donc est possible d’effectuer des séchages intermédiaires des dépôts
sans observer de bouchage des buses de la tête jet d’encre. Pour limiter le phénomène de
fissuration, ces encres sont imprimées sur un substrat à 40 ◦ C.
Les clichés MEB des dépôts obtenus par impression jet d’encre sont présentés en figure
5.28. L’aspect général est homogène, peu de fissures sont observées et les bâtonnets ty-
piques de la synthèse “thiourée” sont facilement identifiables. Sur l’observation en coupe
(figure 5.28), l’épaisseur de la couche peut être estimée à 800 nm. Cette épaisseur est
similaire à celle des précédentes impressions.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 161
Pour valider ce système d’impression, deux motifs et trois carrés de 0.25 cm2 ont été
imprimés en une seule fois sur un substrat verre/molybdène (figure 5.29).
Conclusion intermédiaire
Il est possible de formuler des encres jet d’encre et d’ajuster leurs propriétés physico-
chimiques en utilisant un mélange de deux solvants pour chacune d’entre elles. Les
encres contenant des solvants volatils ne permettent pas plusieurs impressions successives
puisque des buses se bouchent pendant le temps de latence. En revanche, l’encre la moins
volatile à base de cyclohexanol et de DMSO permet plusieurs impressions successives.
Comme certaines encres ne peuvent pas être déposées en plusieurs passages et forment
des fissures lors de leur dépôt, il est important d’évaluer la pertinence d’un autre procédé
de dépôt et d’étudier le procédé de séchage.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 162
Dans cette section, les encres formulées pour le jet d’encre sont déposées par le procédé
spray. Les résultats sont immédiatement satisfaisants en termes d’épaisseur, en revanche
de nombreuses fissures apparaissent lors du séchage, comme pour le procédé jet d’encre.
Cette section regroupe donc l’étude du procédé de séchage sur les dépôts obtenus par
spray.
Les causes potentielles de la présence de ces fissures sont multiples. Il peut s’agir de
contraintes provoquées par l’évaporation des solvants [186] [105] [187] mais aussi de
porosité générée par le départ des ligands adsorbés en surface. Dans le cas de l’encre
MEK/DDT, les ligands adsorbés et le co-solvant sont de la même famille chimique ; il
sera donc difficile d’identifier si la cause de la fissuration est la vitesse d’évaporation des
solvants ou la désorption de ligands. Cette différenciation sera abordée plus en détail dans
le paragraphe suivant.
Pour identifier les conditions optimales de séchage, celui-ci est séparé en 3 paliers de
température. Le premier palier est à température ambiante pour permettre l’évaporation
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 163
du solvant principal (la MEK), le second à une température variable entre 150 et 250 ◦ C
et le troisième à 300 ◦ C (figure 5.31). La pression lors des deux premiers paliers est de
800 mbar pour ralentir au maximum la cinétique d’évaporation de solvant alors qu’elle
est de 20 mbar lors du troisième palier pour limiter les risques d’oxydation.
Lorsque la température du palier 2 est de 250 ◦ C, des fissures de taille similaire à celles
observées précédemment sont présentes. Cela laisse supposer que le palier à 250 ◦ C n’est
pas utile, mais ne permet pas de conclure si l’origine des fissures est l’évaporation ou
la désorption de dodecanethiol. Pour un palier intermédiaire de 200 ◦ C, la dimension
des fissures se réduit bien que certaines soient encore présentes. Cette évolution ne se
poursuit pas pour un palier à 150 ◦ C. En effet, la dimension des fissures augmente de
nouveau (figure 5.32).
Figure 5.32: Couches minces déposées par spray et séchées avec un deuxième palier
à 150 ◦ C (gauche), 200 ◦ C (milieu), 250 ◦ C (droite)
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 164
Cette étude a permis d’identifier des conditions de séchage qui limitent le phénomène de
fissuration mais ne le suppriment pas. Pour obtenir une couche continue, il faut répéter
les opérations de dépôt et séchage plusieurs fois. A la suite de ces 3 dépôts et séchages
(avec un palier à 200 ◦ C) successifs, on obtient une couche continue avec peu de fissures,
aucune fissure n’atteint le molybdène( figure 5.33).
En conclusion il est possible de déposer des couches continues à partir des encres formulées
à base de MEK et DDT. Les conditions nécessaires sont d’effectuer au moins trois dépôts
successifs et d’utiliser le protocole de séchage décrit précédemment.
Ces résultats doivent maintenant être répétés pour l’encre formulée avec un mélange
éthanol/éthylène glycol et des nanoparticules stabilisées par dodécyle pyrrolidone.
Ces encres déposées par spray selon le protocole décrit au paragraphe 3.3.2, et séchées
à 300 ◦ C présentent des fissures similaires à celles observées dans le cadre de dépôt jet
d’encre. Ces observations sont basées sur la morphologie des dépôts observés en micro-
scopie électronique (5.34).
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 165
Pour optimiser le séchage de ces couches, la même méthodologie que celle du paragraphe
précédent, utilisant trois paliers de séchage, a été utilisée.
De manière empirique, les paramètres optimaux ont été déterminés pour les trois paliers
de séchage comme étant : 25 ◦ C et 800 mbar pour évacuer l’éthanol, 60 ◦ C et 800 mbar
pour évaporer lentement l’éthylène glycol et 300 ◦ C et 20 mbar pour dégrader les ligands
et promouvoir l’adhésion de la couche.
De manière à identifier à quel palier de séchage les fissures sont générées, les échantillons
sont analysés visuellement et par microscopie électronique à chaque palier.
Au terme du premier palier, le dépôt n’est pas sec, signe que l’éthylène glycol est encore
présent. En revanche, à la suite du deuxième et du troisième palier, l’échantillon est sec
et peut donc être analysé en microscopie électronique à balayage. Ces analyses MEB sont
représentées en figure 5.35. La morphologie de la couche n’évolue pas entre le deuxième
palier et le troisième.
Il n’est pas possible de déposer une couche mince à base de cette encre sans fissure en une
seule fois. De ce fait plusieurs dépôts successifs sont réalisés avec un séchage intermédiaire
selon le protocole qui vient d’être utilisé. En effectuant 2 dépôts successifs, il est possible
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 166
d’obtenir une couche ne présentant pas de fissure atteignant le molybdène comme présenté
en figure 5.36.
Figure 5.36: Dépôt d’encre 2 par spray après un palier de séchage à 60 ◦ C et 300 ◦ C
L’état de surface de ces dépôts est présenté en figure 5.37. L’absence de fissure ainsi que
l’épaisseur du dépôt valident cette troisième encre pour l’obtention de couches minces
CZTS.
Chapitre 5. Formulation et dépôt d’encres 167
Conclusion du chapitre 5
La stabilité colloı̈dale des dispersions de particules a été obtenue par l’utilisation de plu-
sieurs voies. Une première voie consiste à adsorber des ligands alkyles pour augmenter
le phénomène de stabilisation stérique bien que des charges surfaciques soient encore
présentes après stabilisation. Une seconde voie a consisté à rajouter des charges en sur-
face de particules via l’adsorption d’anions sulfures que ne dégradent pas la pureté des
particules.
A l’aide de ces nanoparticules stabilisées, différentes encres ont été formulées pour le jet
d’encre. A chaque fois, deux solvants sont utilisés pour moduler les propriétés physico-
chimiques de l’encre et permettre l’éjection de gouttes sans satellites et homogènes en
taille. Ces encres permettent d’imprimer des motifs sur un substrat molybdène mais
certains dépôts présentent des fissures.
Appliquées au procédé spray, ces même encres donnent des résultats similaires, plusieurs
paliers sont donc ajoutés aux procédés de séchage pour limiter les fissures. Malgré la
présence importante de matière organique décomposable sur les particules, il s’avère que
c’est l’évaporation des solvants qui génère la présence de fissures.
Au terme de ce travail, trois encres sont formulées pour les procédés spray et jet d’encre
et permettent le dépôt de couches minces continues et donc de poursuivre l’étude sur le
procédé de cristallisation de ces couches.
Chapitre 6
Introduction
Grâce aux travaux décrits dans les deux chapitres précédents, les points clés permettant
de synthétiser et d’imprimer des dispersions de particules de composition maı̂trisée ont
été identifiés. En l’état, ces couches minces ne possèdent pas la qualité cristalline requise
pour présenter un effet photovoltaı̈que. Une dernière étape dans le processus doit donc être
développée pour atteindre cette qualité. Il s’agit du recuit de cristallisation. Pour obtenir
cette qualité, l’étape de recuit doit permettre la croissance cristalline de la phase kësterite,
sans modifier la composition chimique, et se dérouler dans des conditions compatibles avec
une future industrialisation du procédé. Il en découle des contraintes en termes de temps,
température et d’atmosphère utilisées lors de ce recuit.
Les études présentées dans ce chapitre font intervenir plusieurs facteurs. En effet, la
cristallisation du matériau fait appel à des notions de chimie du solide ainsi que de
science des matériaux, mais les points clés des chapitres précédents tels que la pureté des
particules ou les formulations utilisées auront également un impact sur le développement
du recuit.
— Quelles sont les conditions optimales de recuit et quels sont les paramètres
déterminants dans le développement de cette étape ?
— La formulation et le dépôt d’encre ont-ils une influence sur l’étape de recuit ?
Pour répondre à ces questions, ce chapitre commence par une étude paramétrique sur
un type d’encre et de particules. Une fois les contraintes majeures et les paramètres
idéaux de recuit identifiés, plusieurs formulations et synthèses de nanoparticules sont
comparées pour comprendre l’influence de la formulation d’encre sur les propriétés finales
du matériau après recuit.
168
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 169
L’état de l’art décrit au chapitre 1 apporte quelques éléments de réponse. Dans le cas
du recuit de couches minces CIGS et CZTS, différentes atmosphères sont envisageables.
Dans de rares cas, une atmosphère inerte comme l’azote ou l’argon est utilisée. Mais dans
la majeure partie des travaux, une atmosphère réactive à base de soufre ou de sélénium
est utilisée. Les atmosphères les plus réactives sont le sulfure d’hydrogène et le séléniure
d’hydrogène. Cependant ces gaz sont hautement toxiques : une exposition à 1000ppm
de H2 S pendant 10 minutes est mortelle, de même qu’une exposition d’une heure à 7.4
ppm de H2 Se. De ce fait, ces atmosphères sont parfois utilisées mais diluées dans un gaz
neutre tel que l’argon à hauteur de quelques % [188]. Des atmosphères de sélénium et de
soufre élémentaires sont aussi couramment utilisées. Elles sont moins toxiques que leurs
équivalents sulfurés mais également moins réactives. De toutes ces atmosphères réactives,
celle à base de soufre élémentaire est la moins toxique. De plus, le sélénium est un élément
plus onéreux que le soufre [28]. C’est donc l’atmosphère à base de soufre qui sera retenue
pour la suite de ce travail.
La seconde interrogation porte sur les conditions de ce recuit : quelle température ? quelle
durée ? Il n’existe aucun profil de recuit universel. Les temps, températures et atmosphères
de recuit varient à chaque étude. Cette large plage de valeurs s’explique notamment par
les différentes géométries de four utilisées mais également par les différences entre les
matériaux déposés : précurseurs organiques, nanoparticules, dépôt de métaux. La table
6.1 atteste de cette diversité de protocoles de recuits. Le développement d’un protocole
de recuit propre à ce travail est donc indispensable et ne peut pas être substitué par une
simple utilisation des paramètres les plus courants dans l’état de l’art.
Table 6.1: Liste non exhaustive des conditions de recuit utilisées dans la littérature
en fonction des procédés de dépôt
Les nanoparticules utilisées dans cette étude, une fois traitées à 300 ◦ C comme lors du
procédé de séchage, présentent une phase kësterite peu cristallisée avec une présence
résiduelle de sulfure de cuivre identifiée par les analyses DRX et Raman de la figure 6.1.
La composition chimique de ces nanoparticules est mesurée par ICP-MS et indique des
Cu Zn
ratios métalliques de 0.89 et de 1.34.
Zn + Sn Sn
Figure 6.2: Diffractogrammes DRX des couches minces recuites de 40 à 180 minutes
à 450 ◦ C
Figure 6.3: Diffractogrammes DRX des couches minces recuites de 40 à 180 minutes
à 500 ◦ C
— Enfin, pour les échantillons recuits à 540 ◦ C, les diffractogrammes sont identiques
quel que soit le temps de recuit. Chacun d’entre eux présente une phase kësterite
cristallisée sans phase secondaire apparente. De plus, la présence de la phase këste-
rite est confortée par l’apparition du pic correspondant au plan (101) à 18.5◦ . Ce
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 173
pic n’appartient pas aux potentielles phases secondaires telles que CTS ou ZnS.
Cependant, le signal de la phase MoS2 apparait également à cette température
de recuit. La dégradation du support en molybdène est donc favorisée par cette
température. Ces échantillons vont également être caractérisés par microscopie
électronique.
Figure 6.4: Diffractogrammes DRX des couches minces recuites de 40 à 180 minutes
à 540 ◦ C
Les phases principales ainsi que leur évolution en fonction des paramètres de recuit sont
maintenant mises en évidence. Il est nécessaire de contrôler la morphologie des couches
minces et de la corréler aux caractérisations en DRX.
Dans le cas des échantillons recuits à 450 ◦ C, les analyses morphologiques (figure 6.5)
indiquent des couches encore amorphes. La porosité de ces couches décroı̂t avec le temps
de recuit et quelques cristaux sont observables à partir de 120 minutes de recuit. Ces
observations sont en accord avec la faible croissance cristalline observée en DRX.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 174
Figure 6.5: Clichés MEB des couches minces recuites à 450 ◦ C, de gauche à droite 40,
80, 120, 180 minutes
Pour les échantillons recuits à 500 ◦ C (figure 6.6), la croissance est hétérogène, des cristaux
sont apparents dès 40 minutes de recuit et leur taille augmente avec la durée du recuit.
Quelques cristaux hexagonaux sont visibles en surface, il peut s’agir de sulfures de cuivre.
Figure 6.6: Clichés MEB des couches minces recuites à 500 ◦ C, de gauche à droite 40,
80, 120, 180 minutes
Dans le cas des échantillons recuits à 540 ◦ C (figure 6.7), la croissance des cristaux est
également hétérogène. Si la taille des cristaux à 40 minutes de recuit est plus importante
que celle du même échantillon recuit à 500 ◦ C, les autres échantillons présentent une
morphologie identique à celle observée lors des recuits à 500 ◦ C.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 175
Figure 6.7: Clichés MEB des couches minces recuites à 540 ◦ C, de gauche à droite 40,
80, 120, 180 minutes
— Une température de recuit de 450 ◦ C est insuffisante pour recristalliser les couches
de CZTS. En fin de traitement, les couches ont un aspect amorphe ou faiblement
cristallisé, observation confirmée par les analyses DRX.
— Une température de recuit de 500 ◦ C convient pour la cristallisation de la phase
kësterite et ce indépendamment de la composition initiale des couches minces
traitées. L’affinement des pics en DRX s’observe à partir de 40 minutes de traite-
ment. Néanmoins cette cristallisation reste inhomogène en morphologie. Des cris-
taux se forment et leur taille augmente avec la durée de recuit, cependant une
importante surface de l’échantillon reste amorphe.
— Lorsque la température de recuit est élevée à 540 ◦ C, la cristallisation des
échantillons est améliorée et les cristaux présentent une taille plus importante
jusqu’à atteindre une taille micronique. L’aspect hétérogène avec la présence de
nombreuses zones amorphes est cependant conservé.
Cet ensemble d’expérimentations indique que les conditions optimales de recuit sont de
180 minutes de traitement à 500 ◦ C. Cependant, une autre information importante obte-
nue via les expériences précédentes est que la cristallisation du matériau pendant le recuit
est hétérogène et ce, quel que soit le temps du traitement thermique. Ce comportement
est illustré sur la figure 6.8. Pour obtenir un matériau de qualité photovoltaı̈que, l’origine
de cette croissance inhomogène doit être identifiée.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 176
Figure 6.8: Coupe MEB d’une couche mince recuite 180 minutes à 540 ◦ C
Une hypothèse est la présence d’éléments carbonés dans la couche même après recuit. En
effet, la présence de carbone dans les semi-conducteurs est connue pour inhiber la crois-
sance de ceux-ci [207]. Une première mise en évidence d’élément carbone est l’apparition
sur tous les spectres Raman d’une bosse large entre 1250 et 1500 cm−1 . Pour l’échantillon
ayant subi un recuit de 180 minutes à 540 ◦ C dont le spectre Raman (sous excitation
532 nm) est en figure 6.9, cet pic large contient en réalité trois pics caractéristiques du
graphite [208].
Figure 6.9: Spectre Raman sous excitation 532 nm d’une couche mince recuite 180
minutes à 540 ◦ C
Pour accréditer la thèse de l’inhibition de croissance par les éléments carbonés, une car-
tographie EDX a été effectuée sur l’échantillon caractérisé en spectrométrie Raman dans
la figure précédente. Cette cartographie, en figure 6.10, permet de visualiser la répartition
des éléments carbone, cuivre, zinc, étain et soufre.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 177
Figure 6.10: Cartographie EDX d’une couche mince recuite 180 minutes à 540 ◦ C
Cette cartographie permet de mettre en évidence que l’élément carbone est concentré dans
les zones amorphes, alors que les parties cristallines contiennent davantage d’éléments
minéraux. Cette analyse démontre le lien entre éléments organiques et croissance cristal-
line non-homogène.
Il est donc primordial de maı̂triser la teneur en éléments organiques des couches minces
après recuit.
Dans un second temps, des couches minces obtenues à partir des nanoparticules de pureté
supérieure (de l’odre de 7 % de perte de masse en ATG), stabilisées par adsorption
d’anions sulfures et formulées dans une encre à base de cyclohexanol et DMSO sont
étudiées.
Pour répondre à ces deux questions, l’étude suivante se base sur une même synthèse
de nanoparticules stabilisées différemment. La composition chimique des particules est
Cu Zn
la suivante : = 1.00 et = 0.82. Il est important de relever le fait que
Zn + Sn Sn
cette composition chimique est éloignée de la composition idéale. Néanmoins, l’étude
présente cherche à démontrer l’impact d’une variation de formulation en vue d’un éventuel
développement pour le photovoltaı̈que en couches minces.
Le travail présenté en section précédente indique que les phases cristallines obtenues après
recuit à 500 ◦ C ne diffèrent pas entre deux compositions différentes. En utilisant un recuit
à 500 ◦ C, il est donc envisageable d’utiliser ces nanoparticules pour évaluer l’influence des
stabilisants sur la croissance cristalline lors du recuit.
Les formules chimiques des deux stabilisants comparés dans cette étude sont rappelées
à la figure 6.11. Leurs masses molaires sont respectivement de 202.40 kg/mol et de
253.42 kg/mol pour le dodecanethiol et le dodécyle pyrrolidone. Dans le chapitre 4, il
a été démontré que l’adsorption de ces ligands en surface de nanoparticules implique une
proportion d’éléments décomposables de 29.1 % dans le cas du dodecanethiol et de 39.1
% dans le cas du dodécyle pyrrolidonne.
En premier lieu, il est nécessaire de vérifier que la phase cristalline obtenue après recuit
est bien la phase kësterite. Pour cela, les paramètres de recuit sont limités ici à 500 ◦ C
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 179
pendant 120 et 180 minutes. Tous les échantillons sont également caractérisés par DRX,
spectroscopie Raman, EDX et microscopie électronique.
Dans le cas des nanoparticules stabilisées par dodecanethiol et formulées en encre 1 (MEK-
DDT), les analyses DRX, en figure 6.12 sont cohérentes avec les analyses précédentes. Pour
les deux recuits de 120 et 180 minutes, les diffractogrammes ne contiennent que le motif
principal du CZTS et du molybdène. La largeur à mi-hauteur des pics est comparable
à celles observées lors des recuits à 500 ◦ C pour les deux autres compositions chimiques
testées à la section précédente. Cela traduit une cristallinité similaire à celle observée lors
des études précédentes.
Figure 6.12: Diffractogrammes DRX des couches minces de nanoparticules avec sta-
bilisation DDT recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C
D’une manière identique aux études précédentes, l’étude des phases cristallines est
complétée par une analyse par spectroscopie Raman. Les spectres des deux échantillons
sont présentés en figure 6.13. Ils apportent la confirmation de la cristallisation de la phase
CZTS (par le pic principal à 335 cm−1 ). La présence de sulfure de molybdène (MoS2 ) est
également identifiée par la présence de pics caractéristiques à 385 cm−1 et 410 cm−1 . En-
fin, la présence de composés carbonés est identifiable par leur contribution entre 1300 et
1600 cm−1 .
L’analyse EDX démontre que la composition chimique des échantillons reste inchangée
au cours du recuit. Le comportement que traduisent les analyses DRX, EDX et Raman
est donc identique à celui observé dans la section précédente. Ceci prouve une fois de
plus la répétabilité du procédé de recuit à 500 ◦ C malgré des échantillons de compositions
chimiques différentes. L’aspect morphologique des couches minces reste lui aussi inchangé
(figure 6.16) mais sera discuté en fin de paragraphe, afin de comparer les différentes encres
utilisées.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 180
Figure 6.13: Spectres Raman des couches minces de nanoparticules avec stabilisation
DDT, recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C
Les caractéristiques physiques des couches obtenues à partir d’une formulation dodeca-
nethiol étant établies, il est à présent possible d’étudier l’influence d’un changement de
formulation. Pour rappel, les couches suivantes sont obtenues à partir de nanoparticules
de composition identique mais stabilisées par le dodecyle pyrrolidone et formulées dans
une encre éthanol-éthylène glycol appelée Encre 2 dans le chapitre 5.
Tout d’abord, en ce qui concerne l’analyse DRX, les nouveaux échantillons (figure 6.14)
sont similaires aux échantillons étudiés précédemment. Le motif du CZTS est observable
sur les deux diffractogrammes, de même que le motif du molybdène. Le motif correspon-
dant au CZTS est mieux défini dans le cas du recuit de 180 minutes. En effet, le pic
correspondant au plan (101) et observé à 18.03◦ apparait uniquement sur le diffracto-
gramme du recuit de 180 minutes.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 181
Figure 6.14: Diffractogrammes DRX des couches minces de nanoparticules avec sta-
bilisation DDP, recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C
Ensuite, au niveau des analyses effectuées par spectroscopie Raman (figure 6.15), les
résultats sont encore une fois similaires à ceux des études précédentes. En effet, la présence
de la phase kësterite est une nouvelle fois confirmée par la présence du pic du mode A1
du CZTS à 335 cm−1 . Il est à noter que l’intensité relative des pics correspondant à
la contribution des éléments organiques est plus faible que lors de la stabilisation par
le dodecanethiol. Cette observation indiquerait une meilleure élimination des composés
organiques lors du recuit de cristallisation effectué sur l’encre 2. Avant d’observer si cette
potentielle réduction de la quantité d’éléments organiques présents après recuit modifie la
morphologie des couches, il est important de vérifier la composition chimique des couches
minces.
Encore une fois, l’analyse par EDX n’indique pas de modification de la composition
chimique.
En termes de composition chimique ainsi que d’analyses DRX et Raman, les couches
minces obtenues à partir des encres 1 et 2 conduisent aux mêmes résultats excepté un
signal Raman d’éléments organiques à priori moins important. Il reste à évaluer si le
changement des paramètres de formulation affecte la morphologie des couches après recuit.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 182
Figure 6.15: Spectres Raman des couches minces de nanoparticules avec stabilisation
DDP, recuites de 120 à 180 minutes à 500 ◦ C
Figure 6.16: Clichés MEB des couches minces obtenues avec stabilisation DDT et
DDP, de gauche à droite : DDT 120 minutes, DDT 180 minutes, DDP 120 minutes,
DDP 180 minutes
L’évolution de morphologie entre 120 et 180 minutes de recuit pour l’encre 1 corrobore
les observations de la section 6.2, à savoir que la croissance cristalline est peu présente à
120 minutes de recuit mais s’intensifie à 180 minutes. Dans le cas de l’encre 2 les cristaux
observés sur l’échantillon recuit 120 minutes sont de taille plus importante que ceux de
l’encre 1 pour le même recuit. Lors d’un recuit de 180 minutes, la taille de ces cristaux
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 183
n’augmente pas, en revanche, ceux-ci sont plus nombreux que lors d’un recuit de 120
minutes.
Ce séchage permet d’obtenir une couche non poreuse, comme en témoigne l’analyse MEB
de la figure 6.17. En revanche aucune zone cristallisée n’est apparente.
On s’interroge en premier lieu sur la pureté du matériau déposé. Pour évaluer cette pureté,
une analyse Raman est effectuée. Celle-ci, présentée en figure 6.18, permet de confirmer la
présence de la phase kësterite grâce au pic à 335 cm−1 . Le pic correspondant aux phases de
sulfure de cuivre est également présent (à 470 cm−1 ) mais son intensité est nettement plus
faible que celle du signal CZTS. L’analyse Raman démontre également que le séchage ne
suffit pas à éliminer l’intégralité des contaminations organiques. En effet le signal relatif
aux éléments carbonés situé vers 1500 cm−1 reste plus intense que le signal du CZTS.
La composition chimique de cet échantillon a été évaluée en ICP-MS par la société Nexcis
dans le cadre de la collaboration sur le projet Novacez. La composition de cet échantillon
Cu Zn
a été déterminée à = 0.83 et = 1.45.
Zn + Sn Sn
De manière à être comparées avec les essais précédents, les couches minces sont dans le
cas présent traitées à 500 ◦ C pendant trois heures sous atmosphère de soufre. Comme
pour les couches minces étudiées dans les paragraphes précédents, ce recuit favorise la
cristallisation de la phase kësterite. En effet, l’analyse DRX en figure 6.19, valide la
présence de cette phase sans la présence de phase secondaire.
Encore une fois, les analyses Raman sont effectuées pour détecter d’éventuelles phases se-
condaires. Dans le cas présent, les analyses (figure 6.20) sont satisfaisantes. Tout d’abord,
quelle que soit la longueur d’onde d’excitation, le mode A1 du CZTS est clairement
présent à 335 cm−1 . Le second mode A, le plus intense du CZTS à 285 cm−1 , est lui aussi
bien défini pour une excitation à 532 nm.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 185
Figure 6.19: Diffractogrammes DRX de couches minces recuites 180 minutes à 500 ◦ C
L’analyse à 532 nm indique une faible présence de sulfures de cuivre (pic à 470 cm−1 )
alors que l’analyse à 365 nm indique la présence de sulfure de molybdène. Il est d’autant
plus intéressant de noter que la contribution des éléments carbonés à 1500 cm−1 a diminué
pendant le recuit.
Il reste maintenant à vérifier que ces meilleurs résultats en DRX et Raman sont synonymes
d’une meilleure morphologie de couches minces, par microscopie électronique à balayage.
Figure 6.20: Spectre Raman sous excitation 532 nm (gauche) et 365 nm (droite) de
couches minces recuites 180 minutes à 500 ◦ C
Les clichés MEB présentés à la figure 6.21, valident l’élévation de qualité des couches
minces. Comparées aux précédentes, celles-ci sont plus cristallisées et plus homogènes.
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 186
Aucune zone amorphe n’est observable. Ces résultats confirment donc les observations
précédentes.
Figure 6.21: Clichés MEB de couches minces recuites 180 minutes à 500 ◦ C
L’étape suivante est de vérifier le comportement optique de ces couches minces. Pour cela,
le spectre d’absorption d’une couche mince déposée sur verre est mesuré. A partir de ce
spectre d’absorption, il est possible d’estimer la largeur de bande interdite du matériau.
Cette largeur de bande est estimée à 1.4 eV (figure 6.22), ce qui est légèrement inférieur à
la valeur théorique de 1.5 eV. Deux hypothèses peuvent expliquer ce décalage. La première
est la présence de sulfure de cuivre (Cu2 S) dont le gap de l’ordre de 1 eV décalerait la
mesure. La seconde est simplement une imprécision de la mesure liée potentiellement à
des phénomènes de diffusion optique.
Figure 6.22: Mesure optique de la largeur de bande interdite d’une couche mince
CZTS
Chapitre 6. Optimisation des conditions de recuit en relation avec la formulation 187
Conclusion du chapitre 6
Les conditions optimales de recuit ont été déterminées. De nombreux paramètres sont à
prendre en compte lors de cette phase. La température par exemple, si celle-ci est trop
basse (450 ◦ C), la croissance cristalline reste faible et la formation de phases secondaires
est favorisée. Si au contraire celle-ci est trop élevée (500 ◦ C), la formation de MoS2 au
contact arrière est importante et il y a un risque de décomposition du matériau.
Une fois les nanoparticules synthétisées, leur dépôt par impression spray ou jet d’encre
s’est avéré être un processus difficile à mettre en œuvre. Encore une fois il y a un équilibre
à trouver entre deux problématiques. La première est le contrôle des paramètres physico-
chimiques de l’encre : stabilité colloı̈dale, viscosité, tension de surface et densité. La
seconde problématique est le maintien de la pureté des nanoparticules. Le maintien de
la stabilité colloı̈dale est la propriété la plus importante car elle influence directement
toutes les autres. Cette stabilité est obtenue par modification de la surface des parti-
cules. Elle induit une variation de pureté et dirige le choix des types de solvants utilisés
pour l’encre. Dans ce travail, deux voies de stabilisation ont été développées à l’aide de
ligands aliphatiques ou inorganiques. A la suite de ces stabilisations, des encres ont été
développées pour le dépôt par spray et jet d’encre. Pour chaque encre, un couple de sol-
vants est utilisé pour moduler les propriétés physico-chimiques de l’encre. Pour chaque
188
Conclusion générale et perspectives 189
encre, les cinétiques d’évaporation de solvants ont été optimisées pour éviter le phénomène
de fissuration des couches lors du séchage.
Le dernier chapitre de cette thèse détaille l’étape de recuit de cristallisation des couches
minces imprimées. Pour en limiter sa toxicité, ce procédé est développé sous l’atmosphère
de chalcogène la moins toxique : le soufre élémentaire. L’influence de quatre paramètres
a été évaluée : la composition chimique, le temps de recuit, la température de recuit et le
type de formulation. Il a été déterminé que la température de 500 ◦ C permet de limiter
l’apparition de phases secondaires et de limiter la dégradation du support de molybdène
sous forme de MoS2 . Une durée de recuit de trois heures présente la meilleure croissance
cristalline. Cependant cette croissance cristalline reste très hétérogène si les couches re-
cuites contiennent des éléments organiques. En effet, plus les couches minces contiennent
d’éléments organiques et plus la formation de zones amorphes est observée après recuit.
La cristallisation homogène de couches minces de CZTS est obtenue uniquement pour les
encres à base de nanoparticules purifiées selon un procédé breveté au cours de ce travail.
La suite naturelle de ce travail est de corréler les caractérisations en couches minces ainsi
que les paramètres de l’étude du recuit avec le comportement en cellules photovoltaı̈ques.
Ce type d’étude nécessite le développement du reste de l’architecture de la cellule telle
qu’elle a été décrite dans le chapitre 1. La couche tampon, ou émetteur, peut être déposée
par bain chimique. Bien que la majeure partie des cellules photovoltaı̈ques à base de CZTS
utilise une couche tampon de CdS, l’utilisation d’une couche de Zn(O,S) déposée par bain
chimique serait plus cohérente avec l’utilisation des composés de faible toxicité. En plus
de l’étude en dispositif, une seconde voie d’optimisation des couches ainsi fabriquées est
l’incorporation d’éléments supplémentaires comme le sodium ou l’antimoine. A hauteur
de quelques pourcents atomiques, ces composés sont connus dans la littérature [184] pour
augmenter les rendements de conversions photovoltaı̈ques des couches minces CIGS et
CZTS.
L’inconvénient majeur du procédé développé par ce travail de thèse est la durée du re-
cuit. Cette durée de 180 minutes est longue en comparaison avec des recuits d’environ 30
minutes pour d’autres technologies CZTS. Une voie d’étude qui permettrait de réduire
le temps de recuit serait l’utilisation de nanoparticules métalliques ou bien d’un mélange
de particules métalliques et de sulfure. En effet, la technologie de dépôt d’encres mise en
place dans ce travail n’est pas limitée aux seules nanoparticules de CZTS et peut être ap-
pliquée à n’importe quelle couche mince à base de sulfures. L’utilisation de nanoparticules
Conclusion générale et perspectives 190
Principaux
Phases Références
pics ( cm−1 )
289, 339, 350,
CZTS [210]
370
CTS tétragonal 297, 337, 352 [170]
CTS cubique 267, 303, 356 [170]
CTS orthorhombique 318 [170]
ZnS cubique 275, 352 [211]
SnS 160, 190, 219 [211]
SnS2 314, 215 [211]
Sn2 S3 32,60,307 [211]
Cu2−x S 264, 475 [211]
MoS2 288, 384, 410 [211]
191
Annexe 2. Table des spectres Raman 192
193
Annexe C
Analyses DLS
194
Annexe 4. Analyses DLS 195
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Résumé
Les kësterites, ou Cu2 ZnSn(S,Se)4 (CZTS), sont des matériaux semi-conducteurs com-
posés uniquement d’éléments abondants. Leur gap direct compris entre 1.0 et 1.5 eV en
fait d’excellents candidats pour remplacer les absorbeurs actuellement utilisés en couches
minces. Ce travail de thèse décrit la fabrication de couches minces de Cu2 ZnSnS4 par
impression de nanoparticules suivie d’un recuit de cristallisation. Différentes synthèses
hydrothermales de nanoparticules ont été développées, dont certaines en réacteur à flot
continu, en vue d’un développement à plus grande échelle. L’influence des types de
précurseurs et des conditions de synthèse sur la composition chimique des particules
est étudiée ainsi que leur pureté est évaluée. Le comportement en dispersion colloı̈dale est
ensuite caractérisé et trois fonctionnalisations de surfaces à base de dodecanthiol, dodecyl
pyrrolidone et anions sulfures sont présentées. Ces stabilisations permettent la fabrication
d’encre jet d’encre et spray adaptées au dépôt sur molybdène. Les couches imprimées et
séchées sont recuites sous atmosphère de soufre. Des recuits d’au moins 120 minutes sont
nécessaires. Cependant la croissance des couches est hétérogène lorsque celles-ci sont im-
primées avec les nanoparticules stabilisées par le dodecanethiol et le dodecyl pyrrolidone.
La présence de carbone dans les couches, identifiable par spectroscopie Raman, inhibe la
croissance du matériau. Seules les couches minces imprimées à l’aide de nanoparticules
purifiées et stabilisées par anions sulfures permettent la croissance homogène du matériau
lors du recuit.
Abstract
Kësterites or Cu2 ZnSn(S,Se)4 (CZTS), are semi-conductors only made of abundant ele-
ments. Their direct bangap between 1.0 and 1.5 eV makes them excellent candidates
for the replacement of the currently used thin film absorbers. This thesis describes the
fabrication of thin films of Cu2 ZnSnS4 by nanoparticles printing followed by crystalliza-
tion annealing. Different hydrothermal synthesis of nanoparticles have been developed,
some in continuous flow reactor, for a development on a larger scale. The influence of
the types of precursors and synthesis conditions on the particals chemical composition
purity was evaluated. The behavior of colloidal dispersion is then characterized and three
surface functionalization based on dodecanthiol, dodecyl pyrrolidone and sulfide anions
are presented. These stabilizations allow the manufacture of inks deposited by inkjet and
spray on molybdenum. The printed and dried layers are then annealed in sulfur atmos-
phere. Annealing of at least 120 minutes are required. However, the growth of the layers
is heterogeneous when printed with the nanoparticles stabilized by dodecanethiol and do-
decyl pyrrolidone. The presence of high carbon content, prooved by Raman spectroscopy,
inhibits the growth of the material. Only thin film printed using purified nanoparticles
stabilized by sulfide anions allow homogeneous growth of the material during annealing.
Key Words : Kësterite, thin films, CZTS, hydrothermal synthesis, nanoparticles, micro-
wave, formulation, inkjet spray.