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Questes

Revue pluridisciplinaire d’études médiévales


29 | 2015
Copie, authenticité, originalité

Copie, authenticité et originalité dans les


chansonniers de trouvères : un bref panorama
Georges Veyssière

Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/questes/3541
DOI : 10.4000/questes.3541
ISSN : 2109-9472

Éditeur
Les Amis de Questes

Édition imprimée
Date de publication : 15 janvier 2015
Pagination : 87-94
ISSN : 2102-7188

Référence électronique
Georges Veyssière, « Copie, authenticité et originalité dans les chansonniers de trouvères : un bref
panorama », Questes [En ligne], 29 | 2015, mis en ligne le 20 juin 2015, consulté le 30 avril 2019. URL :
http://journals.openedition.org/questes/3541 ; DOI : 10.4000/questes.3541

© Association des amis de « Questes »


Copie, authenticité et originalité dans les
chansonniers de trouvères :
un bref panorama

Georges VEYSSIÈRE
Université Paris-Sorbonne (Paris IV)

Dans le domaine de la lyrique des trouvères, d’après l’ouvrage


bibliographique le plus récent relatif à ce domaine1, on peut estimer qu’il
existe plus de deux mille chansons et une trentaine de manuscrits que l’on a
coutume d’appeler chansonniers. Contrairement aux chansonniers occitans
qui sont aujourd’hui plutôt bien connus, ils se distinguent notamment par
l’absence de vidas – biographies où la fiction se mêle aisément à la vérité
historique – et de razos – circonstances imaginaires dans lesquelles les
chansons ont été composées. Cependant, cette distinction est adoptée ici
uniquement pour sa commodité, car bien des manuscrits se signalent par la
coexistence de chansons en oc et en oïl2.
Le présent article tentera donc de souligner la multiplicité de

1
Robert White Linker, A Bibliography of old French lyrics, Université du Mississippi,
coll. « Romance Monographs », 31, 1979. Pour les manuscrits, les sigles utilisés
aujourd’hui par la majorité des chercheurs, y compris par l’auteur de ces lignes, sont
ceux d’Eduard Schwan, Die Altfranzösischen Liederhandschriften, ihr Verhältniss,
ihre Entstehung und ihre Bestimmung. Eine litterarhistorische Untersuchung, Berlin,
Weidmann, 1886. Ils ont remplacé ceux de Gaston Raynaud, Bibliographie des
chansonniers français des XIIIe et XIVe siècles, Paris, F. Vieweg, 1884, 2 tomes. Les
chansons sont habituellement numérotées en suivant le système de Raynaud-Spanke
(abréviation « R » ou « RS ») qui adopte un classement alphabétique en fonction des
rimes) et celui de Linker (classement alphabétique par noms de trouvères).
2
On songe notamment au caractère composite du chansonnier de Modène, Biblioteca
Nazionale Estense, Estero 45, Alpha R. 4.4. Voir notamment l’article de Fabio
Zinelli, « D’une collection de tables de chansonniers romans (avec quelques
remarques sur le chansonnier Estense) », Romania, 122, 2004, p. 46–110.
Copie, authenticité, originalité Questes, no 29

phénomènes que peut recouvrir le terme chansonnier et soulèvera quelques


problèmes qui se posent aux éditeurs de textes lyriques.

Chansonnier, un terme unique pour une réalité plurielle

L’appellation de chansonniers peut donner l’impression qu’il s’agit


de recueils constitués exclusivement de pièces lyriques, impression
renforcée par le système de sigles. Si le manuscrit O (Paris, BnF, fr. 846),
datant de la fin du XIIIe siècle et qui recense plus de 350 chansons, peut être
qualifié de chansonnier au sens strict, il arrive bien souvent que ces recueils
contiennent plusieurs éléments génériques différents3. Le chansonnier V
(Paris, BnF, fr. 24406) en est un bon exemple. Le recueil est composé lui-
même de deux manuscrits, le premier regroupant 300 chansons dépourvues
de rubriques mentionnant les noms des trouvères, mais classées par auteur
(fo 1ro–119vo), et dont l’écriture pourrait dater de la fin du XIIIe siècle, tandis
que le deuxième manuscrit, révélant une autre main, remonte au début du
e
XIV siècle et comprend un Traité des quatre nécessaires (fo 120ro–140ro),
dont l’auteur ne nous est pas connu, et le Bestiaire d’amour de Richart de
Fournival (fo 141ro–148ro), suivis d’une trentaine de chansons dédiées à la
Vierge (fo 148ro–155). De même, dans le cas de P (Paris, BnF, fr. 847),
manuscrit de 228 folios composé par plusieurs mains vers la fin du
e
XIII siècle, une section initiale d’environ 300 chansons (jusqu’au fo 203vo)
est suivie du Roman du Verger de l’Arbre d’Amour (fo 204ro–210vo),
poème allégorique, avant de se clore par une trentaine de chansons d’Adam
de la Halle (fo 211ro–228vo).

3
La nécessité d’une distinction rigoureuse entre chansonniers au sens strict et
chansonniers au sens large a été déjà rappelée par Maria Carla Battelli, « Les
manuscrits et le texte : typologie des recueils lyriques en ancien français », Revue des
langues romanes, 100, 1996, p. 111–129. Pour une typologie encore plus développée
des manuscrits de trouvères, voir du même auteur, « Le antologie poetiche in antico-
francese », Critica del testo, II / 1, 1999, p. 141–180.
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Copie, authenticité et originalité dans les « chansonniers » Georges Veyssière

Les chansonniers se distinguent également les uns des autres par la


façon dont les chansons sont ordonnées et classées au sein du manuscrit.
Ainsi, dans O, les chansons semblent rangées alphabétiquement en
plusieurs groupes en fonction de la première lettre de leur incipit, ce qui est
une pratique observée généralement dans les manuscrits de motets. En
revanche, l’ordre des chansons dans chacun de ces groupes est loin d’être
rigoureux. Pour ne prendre que l’exemple de la section consacrée à la lettre
« A », le lecteur du chansonnier trouve au tout premier folio la célèbre
chanson de Thibaut de Champagne « Ausi cum l’unicorne sui… » (RS2075,
L240-3) juste avant « Amours me fait comencier… » (RS1268, L240-2) du
même trouvère, puis « A enviz senc mal qui ne l’a apris… » (RS1521,
L240-1), alors que ces chansons auraient dû être dans le sens inverse si
l’ordre alphabétique avait été scrupuleusement respecté. Dans les autres
parties du chansonnier, des regroupements par auteurs sont également
observables au sein de ces sections, voire des doublons, comme le cas
d’une chanson du Châtelain de Coucy aux folios 74ro et 78vo (RS1009,
L38-8), ce qui tendrait à montrer que le copiste disposait de plusieurs
manuscrits.
C’est le critère du genre des chansons qui intervient dans la
structuration du manuscrit I (Oxford, Bodleian Library, Douce 308), et ce
dans l’ordre suivant : « grands chants » (section qui regroupe les chansons
d’amour), « estampies », « jeux-partis », « pastourelles », « ballettes »,
« sottes chansons » et « motets », cette dernière section n’étant pas
indiquée dans l’index du manuscrit.
L’ordre des chansons peut enfin dépendre du statut social des
trouvères, comme le montre le chansonnier M (Paris, BnF, fr. 844)4, où
l’on distingue trois groupes : un premier constitué de seigneurs, que les
miniatures représentent à cheval, munis d’un écu ; un deuxième groupe
4
Chansonnier W pour les troubadours.
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Copie, authenticité, originalité Questes, no 29

composé de « maistres » (clercs) comme Guillaume le Vinier ; un troisième


comprenant des trouvères comme Pierequin de la Coupelle 5 . Ce
chansonnier se distingue également par la présence d’un petit chansonnier
indépendant qui regroupe exclusivement des chansons de Thibaut de
Champagne (fo 13, puis 59–77, que l’on remarque clairement par l’absence
de rubriques et par l’usage d’une encre plus claire), appelé t depuis
Schwan6. On a pu se demander si ce chansonnier indépendant (Liederbuch)
était celui évoqué dans les Grandes Chroniques de France :
Si fist entre luy et Gace Brulé les plus belles
chansons et les plus délitables et mélodieuses qui
oncques fussent oïes en chançon ne en vielle. Et
les fist escrire en sa sale a Provins et en celle de
Troyes, et sont appellées Les Chançons au Roy de
Navarre7.
Si l’on ne peut pas admettre aveuglément une telle affirmation, il apparaît
de fait qu’un certain nombre de chansons de Thibaut se trouvent dans un
ordre globalement similaire dans plusieurs manuscrits, notamment dans T
(Paris, BnF, fr. 12615). Dans N (Paris, BnF, fr. 845), K (Paris, BnF,
Arsenal, ms. 5198) et V, la section t suit souvent le même ordre, pour
former une petite anthologie et un échantillon représentatif des
compositions de Thibaut de Champagne 8 : une chanson inaugurale

5
La miniature représentant Pierequin de la Coupelle au fo 163 ro pourrait induire en
erreur le lecteur du manuscrit, car on y distingue une couronne qui est purement
symbolique et rappelle que Pierequin a été couronné lors d’un « puy », compétition
poétique qui a régulièrement eu lieu dans la ville d’Arras tout au long du XIIIe siècle.
6
Cf. Eduard Schwan, op. cit., p. 223–230 et 270–273. Sur le chansonnier M, voir Maria
Carla Battelli, « Il codice Parigi, Bibl. nat. F. fr. 844 : un canzoniere disordinato ? »,
dans La Filologia romanza e i codici. Atti del Convegno, Messina, Università degli
Studi - Facoltà di Lettere e Filosofia (19–22 Dicembre 1991), dir. Saverio Guida et
Fortunata Latella, Messina, 1993, t. I, p. 273–308. Les autres Liederbücher sont : h
(Adam de la Halle), r (Jehan de Renti) et q (Comte de Bretagne).
7
Les Grandes Chroniques de Saint-Denis, contenant l’histoire de France, depuis
l’origine de la monarchie jusqu’à Charles V, et publiées d’après les manuscrits de la
Bibliothèque Royale, avec notes et dissertations inédites par M. P. Paris, Paris,
J. Techener, 1843, t. IV, p. 254–255.
8
Voir Luca Barbieri, « Note sul Liederbuch di Thibaut de Champagne », Medioevo
Romanzo, vol. 23, fasc. III, septembre–décembre 1999, p. 388–416.
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Copie, authenticité et originalité dans les « chansonniers » Georges Veyssière

(« Amors me fet comencier », RS1268, L204-2), une chanson de croisade


(« Seignors sachiez », RS6, L204-49), une pastourelle (« J’aloie l’autrier
errant », RS342, L204-27), une chanson d’amour (« En chantant vueil ma
dolor descouvrir », RS1397, L204-25), une pièce de dialogue avec le dieu
Amour (« L’autre nuit en mon dormant », RS339, L204-32), avant de finir
par des chansons d’amour et des jeux-partis.
« Chansonnier » est donc un appellatif commode pour des manuscrits
extrêmement divers, posant de nombreux problèmes aux philologues qui
entreprendraient de les classer.

Problèmes philologiques

Que le philologue ait pour objectif une édition « reconstruction-


niste » ou dite « bédiériste », il est nécessaire de pouvoir établir un stemma,
c’est-à-dire un arbre généalogique de tous les manuscrits, afin d’obtenir
une compréhension globale de la tradition manuscrite. Dans le domaine de
la lyrique d’oïl, le classement suscite toujours des débats, depuis la
hiérarchie proposée par Eduard Schwan en 1886 à la suite des travaux de
Gröber sur les chansonniers de troubadours9.
Les chansonniers de trouvères (dont une vingtaine de complets)
peuvent être regroupés en deux catégories en fonction de leur provenance,
ou en trois familles (ou « archétypes ») : les chansonniers du nord de la
France, picards (l’archétype nommé sI chez Schwan) ; les chansonniers de
l’est de la France, lorrains, bourguignons voire franc-comtois (les
archétypes sII et sIII de Schwan). Les regroupements des différents
manuscrits passent par l’identification de points communs, puis de fautes
communes qui ne laissent place au doute, comme par exemple les
omissions d’un seul vers qui sont partagées par plusieurs manuscrits. Dans

9
Gustav Gröber, « Die Liedersammlungen der Troubadours », Romanische studien, 2,
1877, p. 337–670.
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Copie, authenticité, originalité Questes, no 29

les éditions de trouvères, on observe notamment que les chansonniers M, T,


A, a et Z ont des affinités au sein de l’archétype sI10. Les autres fautes
communes permettent de grouper, pour sII, K, N, V et X, tandis que O est
souvent indépendant par rapport au sous-groupe KNVX11, même si on
manque fréquemment d’éléments solides pour les positions relatives de K,
N, V et X. Pour sIII, on arrive à prouver l’existence d’un groupe CU, rejoint
parfois par I et H.
Si la plupart des éditeurs lyriques reprennent le stemma général tracé
par Schwan, certains font remarquer qu’il est difficile de prouver la
distinction existant entre sII et sIII car on n’arrive pas à opposer KNVX à
CU12, d’autres évoquent la possibilité d’une source commune à sI et sIII13.
L’éditeur de chansons de trouvères est ici comme bloqué14, car si le stemma
général reste une hypothèse, l’établissement d’un stemma pour chaque
pièce lyrique est souvent impossible en l’absence de fautes communes
indiscutables15. Les divergences de leçons peuvent provenir de l’activité du

10
Tracer un stemma fait souvent oublier les copies intermédiaires qu’il y a eues entre
les divers chansonniers : on a ainsi peu de certitudes quant à la position relative des
chansonniers A, a et Z.
11
Le flottement de O, qui passe d’un archétype à un autre dans le stemma, semble
indiquer qu’il est fortement contaminé.
12
Philippe Ménard, « L’édition des textes lyriques du Moyen Âge, réflexions sur la
tradition manuscrite de Guillaume le Vinier », dans Actes du IIIe Congrès
international de linguistique et philologie romanes, t. II, Québec, Les Presses de
l’université Laval, 1976, p. 763–776.
13
Luca Barbieri, « Contaminazioni, stratificazioni e ricerca dell’originale nella tradi-
zione manoscritta dei trovieri », dans La Tradizione della lirica nel medioevo
romanzo. Problema di filologia formale. Atti del Convegno internazionale (Firenze-
Siena, 12-14 novembre 2009), dir. L. Leonardi, Firenze, Edizioni del Galluzzo, 2011,
p. 179–240.
14
À défaut d’un « arbre » que dessinent habituellement les éditeurs qui suivent le
classement de Schwan, Luca Barbieri utilise des figures géométriques où chaque
manuscrit est considéré comme un ensemble qui possède des affinités plus ou moins
grandes avec un autre manuscrit. Voir Le Liriche di Hugues de Berzé, éd. Luca
Barbieri, Milano, Cooperativa universitaria studio e lavoro, 2001.
15
Harry H. Lucas, « L’édition des textes lyriques : schéma d’ensemble ou schéma in-
dividuel ? », dans Actes du Xe congrès international de linguistique et de philologie
romanes, Strasbourg 23–28 avril 1962, Paris, 1965, t. II, p. 697–703. L’auteur de
l’article y rappelle à juste titre que Schwan n’a pas fait d’analyse exhaustive pour
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Copie, authenticité et originalité dans les « chansonniers » Georges Veyssière

scribe lui-même, qui récite intérieurement ou de vive voix le texte qu’il


copie après l’avoir lu16. Mais le problème majeur reste la contamination,
c’est-à-dire la présence de plusieurs modèles : certaines variantes peuvent
par exemple être proches d’un manuscrit, puis d’un autre situé dans une
autre famille. Philippe Ménard remarque que dans le cas de Guillaume le
Vinier, la pièce XXIX de son édition critique17 possède une rime fautive
dans les manuscrits fréquemment sollicités par les éditeurs, dans la mesure
où ils contiennent beaucoup de pièces, à savoir KNVX18,.
Il serait donc téméraire de se lancer dans l’usage d’un seul manuscrit
respecté scrupuleusement, comme le font les éditeurs bédiéristes à
l’extrême, car on s’éloignerait alors du présumé original et de l’auteur au
profit du copiste. Au contraire, la méthode dite « lachmanienne » ou
« reconstructionniste » aura pour obstacle le faible nombre de fautes
communes. Philippe Ménard propose une « voie moyenne », où il s’agit de
publier un seul manuscrit, tout en corrigeant les leçons aberrantes, ou de
choisir le meilleur manuscrit pour chaque poème. C’est alors le « goût » de
l’éditeur qui permet de trancher entre les variantes, en évitant de transposer
les graphies de toutes les pièces d’un trouvère en un seul dialecte, ce que
l’on a pu faire jusqu’au milieu du XXe siècle, et, ce qui est plus grave, sans
en toucher un mot dans l’apparat critique. Le stemma est alors l’instrument
qui doit servir à voir la hiérarchie des variantes et permet à terme de faire
les corrections jugées les meilleures.

Dans la mesure où les chansonniers de trouvères notent plus souvent


les mélodies que les chansonniers occitans, on a pu penser que le critère

établir ses classements de manuscrits.


16
Keith Busby, « Mise en texte as Indicator of Oral Performance in Old French Verse
Narrative », dans Performing Medieval Narrative, dir. Evelyn Birge Vitz, Nancy
Freeman Regalado et Marilyn Lawrence, Cambridge, 2005, p. 61–71.
17
Les Poésies de Guillaume le Vinier, éd. Philippe Ménard, Genève, Droz, 1983.
18
Philippe Ménard, « L’édition des textes lyriques du Moyen Âge… », art. cit., p. 769.
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Copie, authenticité, originalité Questes, no 29

musical permettrait de classer les manuscrits. Les recherches des


musicologues tendent cependant à montrer que l’on ne peut pas tirer de
conclusions définitives par le regroupement des mélodies, qui n’a parfois
rien à voir avec le regroupement par textes19. Hendrik Van der Werf
soutient que des transpositions auraient été faites par des vocalistes faisant
évoluer le matériau mélodique20.
Les chansonniers méritent d’être mieux connus dans leur singularité,
et c’est ce à quoi s’est attelé depuis la fin des années 90 le projet
international Intavulare qui a pour but de produire les tables de tous les
chansonniers21, aidant le philologue à mieux saisir l’organisation de ces
recueils qui, souvent, ne peuvent être lus tels quels, dans la mesure où se
sont succédé insertions, suppressions et déplacements. L’édition critique
des trouvères a donc tout à gagner de la redécouverte de ces chansonniers
qui sont moins bien connus que leurs équivalents occitans.

19
Voir Gérard Le Vot, « Les transpositions/transformations mélodiques dans la mono-
die des trouvères. Un problème d’analyse », dans Histoire, humanisme et hymno-
logie : mélanges offerts au professeur Édith Weber, Paris, Presses de l’Université
Paris-Sorbonne, 1997, p. 149–162.
20
Hendryk Van der Werf, The Chansons of the troubadours and trouvères. A study of
the melodies and their relation to the poems, Utrecht, Oosthoek, 1972, p. 26–30.
21
Les tables concernant les chansonniers provençaux ont été publiées parallèlement.
Les chansonniers français qui ont fait l’objet d’une publication dans la série
Intavulare sont A (Arras, Bibliothèque Municipale, 657), C (Berne, Stadtbibliothek,
389), H (Modène, Biblioteca Nazionale Estense, Estero 45, Alpha R.4.4), U (Paris,
BnF, fr. 20050), Z (Sienne, Biblioteca Comunale, H.X.36), a (Rome, Biblioteca
Apostolica Vaticana, Regina 1490) et b (Rome, Biblioteca Apostolica Vaticana,
Regina 1522).
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