Echangeurs de Chaleur
Echangeurs de Chaleur
Echangeurs de Chaleur
1.1 Introduction
Ce cours de thermique sera consacré à l’exposé des notions élémentaires qu’on doit con-
naître au sujet d’appareils extrêmement courants dans les processus industriels, et que l’on
nomme les échangeurs de chaleur.
Un échangeur de chaleur est un appareil destiné à transmettre la chaleur d’un fluide à un
autre.
Dans les échangeurs les plus courants, les deux fluides sont séparés par une paroi au tra-
vers de laquelle les échanges se font par conduction, la transmission de chaleur fluides-
paroi relevant essentiellement de la convection.
L’étude hydraulique a pour but de déterminer les pertes de charges dans l’appareil.
Dans ce qui suit, nous n’aborderons que le seul aspect de l’étude thermique, et ceci d’une
manière très élémentaire.
1.2 Principaux types d’échangeurs
1.2.1 Classification
1
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- -
Les échangeurs thermiques présentent une extrême variété. On distingue trois catégories
principales:
Les échangeurs par mélange, dans lesquels les deux fluides sont intimement mélan-
gés. Dans cette catégorie, on peut citer les désurchauffeurs de vapeur, les déga-
zeurs, les ballons de détente de purges.
Les échangeurs continus. Dans cette catégorie qui est la plus importante en raison de
ses nombreuses applications industrielles, les deux fluides circulent de manière con-
tinue de part et d’autre de la surface d’échange. Selon la géométrie de cette surface
d’échange, on distinguera les échangeurs tubulaires et les échangeurs à plaques.
Un des modèles les plus simples d’échangeur que l’on puisse imaginer est constitué de
deux tubes coaxiaux. L’un des fluides s’écoule dans le tube central, et l’autre dans l’espace
annulaire, les deux fluides pouvant circuler dans le même sens ou en sens contraire.
Il est difficile d’obtenir des surfaces d’échange importantes avec ce type d’échangeur, sans
aboutir à des appareils très encombrants. Aussi choisit on plutôt de disposer un faisceau de
tubes dans une enveloppe unique appelée calandre. L’un des fluides circule dans les tubes,
et l’autre autour des tubes, dans la calandre.
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- -
Figure 8.2 - Echangeur à faisceau tubulaire à simple passe
Différentes variantes permettent de multiplier les passages d’un des fluides dans l’appareil
(échangeurs à 2 passages, à 4 passages, etc...)
Les températures des fluides évoluent pendant leur traversée longitudinale de l’échangeur,
à moins que l’un des fluides ne subisse un changement de phase, auquel cas sa tempéra-
ture reste constante.
Dans ce qui suit, nous considérerons le cas simple d’un échangeur « double tube » à un
seul passage, en prenant en compte les deux agencements possibles: courants parallèles
ou contre-courants.
On s’intéresse à la variation des températures Tc(x) du fluide chaud et Tf(x) du fluide froid,
depuis l’entrée de l’appareil ( abscisse x = 0 = surface d’échange déjà « vue », indice e),
jusqu’à la sortie ( abscisse x = S = surface d’échange totale « vue », indice s).
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- -
Figure 8.4 - Distribution des températures dans un Figure 8.5 - Distribution des températures dans un
échangeur à courants parallèles échangeur à contre-courants
k est le coefficient d’échange global entre les deux fluides, au niveau de l’élément dS. Il est
exprimé en W/(m2.°C). Il s’agit d’un paramètre local, qui peut changer le long de
l’échangeur. Il représente la « conductance thermique » interposée entre les deux fluides,
qui comprend trois termes: les deux coefficients d’échange fluides-parois, et un terme de
conduction à travers la paroi solide.
Dans ce qui suit, nous supposerons un échangeur sans pertes, c’est-à-dire un échangeur
dans lequel la chaleur cédée par le fluide chaud est intégralement transmise au fluide froid.
Dans ces conditions, le flux de chaleur d transmis du fluide chaud au fluide froid à travers
l’élément dS s’écrira, dans le cas de l’échangeur à courants parallèles (figure 8.3):
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__________________________________________________________________________________
- -
d = - m
c C pc dTc = m
f C pf dTf
Flux perdu Flux gagné
(8.2)
par le fluide par le fluide
chaud froid
c et m
m f sont les débits massiques respectifs des fluides chaud et froid, en kg/s.
Cpc et Cpf sont leurs chaleurs massiques à pression constante, en J/(kg.°C).
De (8.2) on tire:
d d
dTc = - et dTf =
m
c C pc m
f C pf
d’où la différence:
1 1
dTc - dTf = dTc - Tf = - + d (8.3)
m c C pc f C pf
m
1 1
dTc - Tf = - + k Tc - Tf dS
m c C pc f C pf
m
relation que l’on peut mettre sous la forme:
dTc - Tf 1 1
= - + k dS
Tc - Tf m c C pc f C pf
m
Si l’on admet que le coefficient local k reste constant tout le long de l ’échangeur, on peut
intégrer l’équation différentielle ci-dessus depuis S = 0 jusqu’à la valeur maximale S. Il vient
alors:
1 1
Log T T
S
= - + kS
c f S 0
m c C pc f C pf
m
d’où la relation:
5
__________________________________________________________________________________
- -
Tcs - Tfs 1 1
Log = - + kS (8.4)
Tce - Tfe m c C pc f C pf
m
Mais on peut également exprimer le flux total échangé en fonction des températures
d’entrée et de sortie des fluides; c’est faire le bilan enthalpique global de chaque fluide, ce
qui s’écrit:
= m
c C pc (Tce Tcs ) = m
f C pf (Tfs - Tfe ) (8.5)
(T Tcs )
Log
Tcs - Tfs
Tce - Tfe
= - ce
+
(Tfs - Tfe )
kS =
Tcs - Tfs - T
ce kS
- Tfe
expression d’où on tire finalement la puissance thermique totale échangée, dans l’hypothèse
d’une circulation à courants parallèles:
= k
T
cs - Tfs - Tce - Tfe
S (8.6)
Tcs - Tfs
Log
Tce - Tfe
d = - m
c C pc dTc = - m
f C pf dTf
Flux perdu Flux gagné
(8.7)
par le fluide par le fluide
chaud froid
Des calculs absolument analogues aux précédents conduisent alors à la relation qui donne
la puissance thermique totale échangée, dans l’hypothèse d’une circulation à contre-
courants:
= k
T ce - Tfs - Tcs - Tfe
S (8.8)
T - Tfs
Log ce
Tcs - Tfe
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__________________________________________________________________________________
- -
Les expressions (8.6) et (8.8) peuvent recevoir la même formulation, si on introduit la gran-
deur:
T = Tc - Tf
T désignant la différence de température entre le fluide chaud et le fluide froid, dans une
section donnée de l’échangeur.
Si on affecte les indices 1 et 2 à chaque extrémité de l’échangeur, on voit que:
T1 - T2
= k S (8.8 bis)
T1
Log
T2
Dans le cas d’un échangeur à courants parallèles (figure 8.4), on aura cette fois:
On voit que la formulation est la même, que l’échangeur soit à courants parallèles ou à
contre-courants.
La puissance thermique d’un échangeur tubulaire continu est donnée par la relation géné-
rale suivante:
T2 - T1
= k S TLM avec: TLM = (8.9)
T2
Log
T1
TLM est appelée la différence de température logarithmique moyenne entre les deux fluides
(DTLM)
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- -
L’expression (8.9) signifie que la puissance thermique échangée est proportionnelle à l’aire
de la surface d’échange et à la différence de température logarithmique moyenne.
Pour pouvoir calculer la puissance thermique d’un échangeur à l’aide de la relation précé-
dente:
Ta - Tb
= k S TLM avec: TLM = (8.9)
Ta
Log
Tb
il est encore nécessaire de connaître le coefficient global d’échange défini par la relation:
d = k (Tc - Tf ) dS (8.1)
La figure 8.6 ci-contre donne l’allure qualitative du profil de température lors de l’échange à
travers un élément de paroi plane.
Nous avons déjà étudié en détail la modélisation d’un tel transfert de chaleur à travers une
paroi en contact avec deux fluides.
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- -
On y a vu que la convection dans le fluide chaud est régie par un coefficient de convection
hc permettant de définir une résistance thermique convective 1/ h c S.
De même, la convection dans le fluide froid est régie par un coefficient de convection h f
permettant de définir une résistance thermique convective 1/ hf S.
De sorte que le flux thermique transféré du fluide chaud au fluide froid est donné par
l’expression:
Tc - Tf
= (8.10)
1 e 1
+ +
h cS S hfS
soit encore:
1
k = (8.11)
1 e 1
+ +
hc hf
Cette modélisation doit encore être complétée sur deux points pour rendre compte correc-
tement des phénomènes dans un échangeur réel:
1) Dans la relation (8.10), nous avons supposé la même surface d’échange S côté chaud et
côté froid. Dans la pratique, la surface d’échange n’a pas toujours la même étendue au con-
tact des deux fluides.
Il faut donc introduire des surfaces d’échange S c et Sf, et rapporter le coefficient d’échange
global, soit à l’unité de surface d’échange côté chaud - et on le notera kc - soit à l’unité de
surface d’échange côté froid - et on le notera kf .
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- -
2) De plus, au bout d’un certain temps de fonctionnement, les parois d’échange se recou-
vrent d’un film d’encrassement. Ces dépôts de tartre et de salissures ont une conductivité
thermique faible par rapport à celle du métal, et constituent donc des résistances ther-
miques supplémentaires Rec et Ref s’opposant à l’échange.
1
kc = (8.12 a)
1 e Sc 1 Sc
+ R ec + + R ef +
hc Sm h f Sf
ou:
1
kf = (8.12 b)
1 e Sf 1 Sf
+ R ef + + R ec +
hf Sm hc Sc
Des mesures comparatives entre les conditions de mise en service, puis le fonctionnement
au cours du temps, ont permis de déduire les valeurs des résistances d’encrassement.
Ces résistances sont comprises en gros entre 1.10 -4 et 20.10-4 (m2.°C)/W
- -
air « industriel » 4. 10-4
Cp
Pr = (5.10)
U Dh
Re = (6.10)
m
U = avec: m
, débit massique en kg/s
s
s, aire de la section droite de la veine fluide, en m2.
Dh est le diamètre hydraulique, en m
4s
Dh = avec: s, aire de la section droite de la veine fluide, en m2.
p
p, périmètre mouillé par la veine fluide, en m
La valeur obtenue pour le Nombre de REYNOLDS permet de savoir quel est le régime de
l’écoulement, laminaire ou turbulent.
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__________________________________________________________________________________
- -
3) La connaissance des Nombres de PRANDTL et de REYNOLDS permet alors de calculer,
pour un écoulement donné, le Nombre de NUSSELT:
h Dh
Nu = (5.10)
Nu = f (Re , Pr ) (5.11)
L’approche présentée est vraiment élémentaire, et devrait être complétée par la prise en
compte de beaucoup d’autres phénomènes, si on désirait réellement traiter un projet de bu-
reau d’étude. Parmi ces phénomènes dont on ne parlera pas ici, on peut citer:
Les effets des variations de température le long de l’échangeur sur la viscosité des
fluides, et par conséquent sur la distribution des vitesses dans la veine, et in fine
sur le coefficient d’échange convectif.
La présence de chicanes dans les calandres, compliquant les trajectoires suivies par
le fluide.
L’utilisation de tubes ailetés, les ailettes ayant pour but d’améliorer l’échange.
1.8 Exemple récapitulatif
On désire refroidir jusqu’à 30°C, au moyen d’un échangeur à contre-courant, une huile dont
la température initiale est de 110°C, le débit massique de 5.000 kg/heure, et la chaleur mas-
sique de 2.100 J/(kg.°C).
Le fluide de refroidissement utilisé sera de l’eau entrant dans l’appareil à 12°C, avec un débit
massique de 12.000 kg/heure.
Calculer la température de sortie de l’eau et la surface d’échange nécessaire.
- -
La puissance thermique cédée par l’huile est:
5000
c C pc Tce - Tcs =
= m 2100 110 - 30 233 kW
3600
On admet que cette puissance est intégralement récupérée par le fluide de refroidissement
(hypothèse de l’échangeur sans pertes), d’où le bilan enthalpique de l’eau:
12000
f C pf Tfs - Tfe =
= m 4180 Tfs - 12 233 kW
3600
233333 . 3600
Tfs = 12 + = 28,7 C
12000 . 4180
1.8.3 Calcul de la différence de température logarithmique moyenne
On peut alors calculer la différence de température logarithmique moyenne TLM entre les
deux fluides (DTLM):
T2 - T1
TLM =
T2
Log
T1
Relation où:
On obtient donc:
T2 - T1 18 - 81,3
TLM = = = 41,9 C
T2 18
Log Log
T1 81,3
13
__________________________________________________________________________________
- -
= k S TLM (8.9)
233.103 W
kS = = 5561 W/ C
41,9 C
Côté huile:
Les propriétés physiques de cette huile sont rassemblées dans la table suivante:
Cp 0,008 . 2260
Pr = = 100,4
0,18
2) On fait a priori le choix de la disposition constructive la plus simple: un échangeur
« double tube » à contre-courant:
14
__________________________________________________________________________________
- -
2) Le débit volumique d’huile a pour valeur:
m
5000 1
Qc = = = 0,00164 m 3 / s
3600 845
U Dh
Re =
Di S U Re
m m2 m/s
0,015 0,00018 9,28 14 704
0,020 0,00031 5,22 11 028
0,025 0,00049 3,34 8 822
0,050 0,00196 0,84 4 411
0,100 0,00785 0,21 2 206
L’examen du tableau ci-dessus montre que le choix d’un échangeur « double tube » est per-
tinent; en effet, avec un tube de diamètre intérieur Di = 25 mm, on obtiendra le débit désiré
au prix d’une vitesse U = 3,34 m/s tout-à-fait acceptable.
- -
4) La connaissance des Nombres de PRANDTL et de REYNOLDS permet alors de calculer
le Nombre de NUSSELT:
hc Dh
Nu =
= 0,023 100,4
1 1
N u = 0,023 Pr 3 R 0,8
e
3
8822 0,8 = 153
Le coefficient d’échange par convection entre l’huile et la paroi du tube dans laquelle cette
huile s’écoule est donc:
Nu 0,18 . 153
hc = = = 1102 W / (m 2 . C)
Dh 0,025
Côté eau:
Les propriétés physiques de l’eau sont rassemblées dans la table suivante:
Cp 95.10 -5 . 2450
Pr = = 3,75
0,62
6) Le débit volumique d’eau a pour valeur:
m
f 12000 1
Qf = = = 0,00334 m 3 /s
3600 998
7) Etudions la variation du Nombre de REYNOLDS de l’écoulement d’eau dans l’espace an-
nulaire, en fonction du diamètre intérieur D i du tube extérieur.
U Dh
Re =
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- -
Dh est le diamètre hydraulique de la section droite de la veine d’eau:
D 2 - d 2
section de passage 1
= Di - d e
4 i e
Dh = 4 RH 4 = 4
périmètre mouillé 2 D i + d e 2
Section de passage = 4 D i2 - d e2 = 0,00055 m 2
1
Diamètre hydrauliqu e = Di - d e = 0,005 m
2
Vitesse moyenne = Q f /Section de passage = 6,07 m/s
U D
Nombre de Reynolds = f m h = 31899
f
L’examen des valeurs ci-dessus confirme que le choix d’un échangeur « double tube » est
pertinent; en effet, avec un tube externe de diamètre intérieur Di = 40 mm (Dh = 0,005 m), on
obtiendra le débit désiré au prix d’une vitesse U = 2,66 m/s tout à fait acceptable.
hf Dh
Nu =
de l’écoulement dans ce tube, à partir de la formule de COLBURN:
Le coefficient d’échange par convection entre l’eau et la paroi du tube dans laquelle l’huile
s’écoule est donc:
17
__________________________________________________________________________________
- -
N u 0,62 . 74
hf = = = 9176 W/(m 2 .C)
Dh 0,005
e 0,0025
= 0,54 . 10 -4 m 2 . C / W
46
La surface d’échange S est unique, que l’on regarde côté huile ou côté eau. C’est la surface
latérale du tube interne.
Il faut tenir compte de résistances d’encrassement sur chacune des deux parois du tube in-
térieur. Nous prendrons:
R ef = R ec = 2.10 -4 m 2 . C / W
soit:
1 1
k =
1 1 0,00091 0,00020 0,00054 0,00071 0,00020
2.10-4 + 0,54.10-4 + 2.10-4
1102 5865
Il apparaît que les 5 résistances thermiques qui interviennent en série sont toutes du même
ordre de grandeur: on ne peut en négliger aucune.
k = 522 W / (m2.°C)
18
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- -
On peut maintenant déduire la surface d’échange S nécessaire:
kS 5561 W/ C
S= = = 6 m2
k 934 W/(m 2 .C)
= d = 0,094 m 2
La conclusion est claire. Il n’est pas question de conserver le dessin initial, car le coefficient
d’échange global k ne pourra jamais être suffisamment amélioré pour qu’on obtienne un en-
combrement acceptable.
1.8.7 Optimisation
Il faudra donc opter pour un nouveau dessin d’appareil, beaucoup plus compact : par
exemple pour un faisceau de 64 tubes de 1,40 m de long, répartis en 8 rideaux de 8 tubes
chacun.
Dans ces conditions, toutes les caractéristiques hydrauliques et thermiques ci-dessus ne
devraient plus être considérées que comme des valeurs de premier dégrossissage, et il
conviendrait de reprendre tous les calculs en faisant usage de données adaptées à la nou-
velle géométrie. On trouve ces données dans les ouvrages spécialisés, mais ces aspects
dépassent totalement les limites de ce cours d’initiation.
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- -