Cours de Contentieux Administratif 2024
Cours de Contentieux Administratif 2024
Cours de Contentieux Administratif 2024
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Licence 2 Droit public – Droit du contentieux administratif (2023-2024) – UGLCS
Cours de Dr Kalil Aissata KEITA
OBSERVATIONS PRÉALABLES
NB : ce syllabus peut faire l’objet de modification
I – Avant-propos
Ici les enseignements consistent à expliquer aux étudiants de licence 3 la possibilité donnée à
tout justiciable de pouvoir contester les actes des autorités administratives par la voie des
recours contentieux, notamment le recours pour excès de pouvoir, le recours de plein
contentieux, le recours en urgence.
Aussi, la maitrise du cours de contentieux administratif passe par des connaissances préalables
en droit interne, dans une large mesure il implique d’avoir des prérequis pluridisciplinaires.
Par ailleurs, l’objectif du présent cours vise à maîtriser les définitions du contentieux
administratif en France et en Guinée et son évolution graduelle. Il vise aussi à mieux poser les
principaux problèmes spécifiques à la connaissance contentieuse ; à maîtriser les différents
paradigmes du procès administratif ; développer les capacités d’analyse des phénomènes
sociaux dans leurs rapports contentieux.
Bref rappel sur les méthodes : Commentaire d’arrêt, dissertation et cas pratique
- Bref rappel sur la notion de juridiction administrative
- Analyse des documents
- Exercices et thèmes de réflexion
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INTRODUCTION
Sources. Il s’agit de rappeler les sources, c’est-à-dire les normes de référence du contentieux
administratif. Ces sources ou normes peuvent être écrites et non écrites. Les premières font
allusion aux bases constitutionnelles, internationales, législatives et réglementaires. Les
secondes, quant à elles, c’est-à-dire les sources non écrites, s’intéressent aux normes
jurisprudentielles, aux principes généraux du droit à la coutume et même à la doctrine dans
l’élaboration des décisions du juge.
En France comme en Guinée, le contentieux administratif est l’ensemble des litiges dont la
connaissance est dévolue en principe aux juridictions administratives. Il s’agit de l’ensemble
des juridictions intervenant dans le litige opposant un particulier et une administration centrale,
déconcentrée et décentralisée ou une personne privée habilitée à gérer un service public. Il peut
tout aussi être des litiges résultant des rapports entre les administrations publiques elles-mêmes , 1
c’est-à-dire entre une collectivité locale et l’État ou entre les collectivités locales ; ce qui est le
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cas notamment des litiges relatifs au droit de l’urbanisme , des litiges en matière de police
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administrative . Dans tous les cas, ces litiges sont ceux du droit administratif et relèvent de la
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compétence du juge administratif si les rapports entre ces personnes publiques ne font pas naître
entre elles des litiges de droit privé auquel cas seul le juge judiciaire demeure compétent.
1
Voir la loi L/2018/025/AN du 3 juillet 2018 portant organisation générale de l’Administration publique.
2
Idem.
3
Voir le Code Révisé des collectivités locales de la République de Guinée 2017.
4
Voir le Code Foncier et Domanial guinéen promulgué par l’ordonnance n°/92/019 du 30 mars 1992.
5
Voir le Code Révisé des collectivités locales de la République de Guinée 2017.
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PARTIE I – LA JUSTICE ADMINISTRATIVE
Les révolutionnaires ont avancé deux raisons pour justifier leur refus de soumettre
l’administration au « droit commun ».
La première résidait dans le fait que l’action administrative, lorsqu’elle se manifeste comme
puissance publique, ne doit pas être jugée par le juge judiciaire. Il en découle une interprétation
de la séparation des pouvoirs, par conséquent de la séparation des autorités administratives et
judiciaires. Or, selon la théorie de séparation des pouvoirs, aucun des pouvoirs ne doit empiéter
sur la compétence des autres. Dès lors, les révolutionnaires ont estimé que placée
l’administration sous le contrôle des tribunaux judiciaires était assimilée à une immixtion du
pouvoir judiciaire dans le domaine de compétence du pouvoir exécutif.
La seconde raison résidait dans la crainte des révolutionnaires de voir se renouveler les abus
des Parlements de l’ancien Régime qui ne manquaient pas de paralyser l’action du pouvoir
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exécutif. Pourtant, ces textes révolutionnaires qui écartaient les tribunaux judiciaires des litiges
administratifs, ne créaient pas pour autant de tribunaux administratifs.
Les révolutionnaires écartaient les tribunaux judiciaires des litiges administratifs, mais ils ne
créaient pas de tribunaux administratifs pour autant. En l’absence de toute juridiction
compétente, c’est donc à l’administration elle-même qu’il revenait de juger ses propres litiges.
Ce système de « juge et partie » a été qualifié de système de l’administrateur-juge.
A – Le système de l’administrateur-juge
Le système de l’administrateur-juge, donnait compétence aux autorités administratives le soin
de se juger. Ainsi, les directoires de département et de districts, autorités exécutives locales,
sont juges des affaires locales. Le Conseil des ministres, présidé par le Roi, puis les ministres
eux-mêmes pour ce qui concerne les affaires de leur compétence sont appelés à régler les litiges
auxquels leurs services sont impliqués. C’est la théorie du « ministre juge ». Les
révolutionnaires ont estimé que ce système ne violait pas le principe de séparation des pouvoirs,
car ils ont pensé que l’action de juger les litiges administratifs était le prolongement naturel de
l’action d’administrer, autrement dit que « juger l’administration, c’est encore administrer ».
Mais au fil du temps, des institutions de conseil, qui deviendront plus tard de véritables
juridictions, ont été mise en place pour les assister.
Le juge administratif, s’il n’est plus tout à fait l’administration, n’en demeure pas moins à son
service. Il faudra attendre la loi du 24 mai 1872 pour confier la « justice déléguée » au Conseil
d’État. L’article 9 de cette loi dispose que le Conseil d’État « statue souverainement sur les
recours en matière contentieuse administrative et sur les demandes d’annulation pour excès de
pouvoir formés contre les actes des diverses autorités administratives. » La nouveauté ici est
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cette souveraineté. L’organisme qui juge, en devenant souverain, devient de fait supérieur à
l’Administration et est donc extérieur à elle. Mais ce n’est finalement qu’en 1889, par le célèbre
arrêt Cadot, que le Conseil d’État met fin à la théorie du ministre juge . 6
Victime de son succès, il est bientôt menacé d’engorgement. C’est pourquoi on transfère sa
qualité de juge de droit commun en premier ressort à des « tribunaux administratifs », en
remplacement des conseils de préfecture. Le Conseil d’État devient pour l’essentiel un juge
d’appel. Devant son encombrement renouvelé, il s’avère nécessaire de créer des « cours
administratives d’appel » qui seront des juges d’appel de droit commun.
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CE 13 décembre 1889, Cadot, GAJA.
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IV – Une consolidation par la constitutionnalisation
Décision du 22 juill. 1980 en se référant à la loi du 24 mai 1872 pour affirmer que
l’indépendance, donc l’existence de la JA. est au nombre des « PFRLR », et qu’elle a donc
valeur constitutionnelle (Cons. const. 22 juill. 1980, Lois de validation, GDCC).
Par une décision du 23 janvier 1987, le Conseil constitutionnel, affirme en effet, selon un mode
de raisonnement classique, que figure au nombre des « PFRLR », à valeur constitutionnelle, le
principe (assorti d’exceptions) selon lequel « relève en dernier ressort de la compétence de la
juridiction administrative l’annulation ou la reformation des décisions prises, dans l’exercice
des prérogatives de puissance publique », par les autorités administratives (Cons. const. 23 janv.
1987, Conseil de la concurrence).
Par une décision du 3 décembre 2009, le Conseil constitutionnel affirme l’existence de deux
ordres de juridiction reconnus par la constitution (création jurisprudentielle).
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Ainsi, de l’an VIII à 1873, plusieurs critères ont coexisté : le critère de l’Etat débiteur, le critère
de l’acte d’autorité, le critère de la gestion publique qui met en opposition les deux grands
critères à savoir le critère de SP et celui de la prérogative de puissance publique.
- Le critère de l’Etat débiteur : il est le simple des trois, il se fondait sur une loi du 8 aout
1790 en vertu de laquelle toutes les créances de l’Etat sont réglées administrativement.
Cela voulait dire que seules les autorités administratives et les juridictions
administratives lorsqu’elles ont existée, étaient exclusivement compétentes pour
condamner l’Etat à payer une somme d’argent aux victimes de dommages. En dehors
de ces litiges, la compétence des JJ était complète.
- Le critère de l’acte d’autorité : selon ce second critère, les actes de l’administration
peuvent être répartis en deux catégories. Ceux qui comportent utilisation de la puissance
publique, c’est-à-dire de privilèges exorbitants du droit commun, sont des « actes
d’autorité », alors que ceux qui n’en comportent pas sont des « actes de gestion ». Les
premiers (parmi lesquels les AAU) relèvent du juge administratif et du droit
administratif, les seconds (les contrats administratifs) du juge judiciaire et du droit privé.
- Le critère de la gestion publique : ce troisième critère est l’œuvre du célèbre arrêt
Blanco. Pour certains, il s’agit du critère du service public, pour d’autres c’est plutôt
celui de la prérogative de puissance publique. Dans tous les cas l’arrêt Blanco a été
confirmé par plusieurs autres arrêts . 7
7
Terrier du CE 6 févr. 1903 ; Sté des granits porphyroïdes des Vosges du CE 31 juillet 1912 ; Bac d’Eloka du TC
22 janvier 1921 ; Théron ; Epx Bertin du CE 20 avr. 1956 ; Caisse primaire « Aide et protection » du CE, ass. 13
mai 1938 ; Narcy du CE sect. 28 juin 1963 ; Compagnie Air France c/ Epx Barbier du TC 15 janv. 1968.
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o La voie de fait : dans deux hypothèses alternatives : exécution forcée irrégulière
d’une décision même régulière portant atteinte au droit de propriété ou à une
liberté fondamentale (v. conditions d’exécution d’office TC 2 déc. 1902, Sté
immo. de St. Juste). La seconde est en elle-même « manifestement
insusceptible » d’être rattachée à l’exécution d’un texte législatif ou
réglementaire.
- Les hypothèses de gestion privée
o Gestion du domaine privé de l’Etat
o Les contrats de droit privé
o SPIC
- Distinction entre l’organisation et le fonctionnement du service public judiciaire (TC,
27 nov. 1952, Préfet de la Guyane)
o Compétence du JJ pour les actions mettant en cause le fonctionnement du service
public judiciaire (CE, 15 févr. 2006, Garde des Sceaux, Min. de la Justice c/
Consorts Maurel-Audrey
o Compétence du JA pour les actions mettant en cause l’organisation du service
public judiciaire
Ainsi, la réforme entreprise dans le secteur de la justice après l’indépendance a dans un premier
temps supprimé la dualité des juridictions de droit traditionnel et de droit écrit. Au terme de
l’ordonnance n° 047/PRG/60 du 29 décembre 1960, les juridictions de droit local ont été
supprimées.
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président de la République nomme les ministres par décret. Aucun membre du Gouvernement
de la République ne peut être arrêté ni poursuivi sans autorisation préalable du président de la
République ». Plus explicite encore dans le décret n° 498/PRG/64 du 19 novembre 1964,
modifié par le décret n° 310/PRG/68 du 23 août 1968, interdisant formellement au juge
judiciaire de statuer dans les contentieux impliquant l’administration. Son article 7, disposait
clairement que les actes émanant du chef de l’État échappaient à tout recours contentieux.
Mais cette interdiction expresse et absolue de tout contrôle juridictionnel contre les actes édictés
par le chef de l’exécutif, voulue par le constituant et le pouvoir règlementaire guinéens,
emportait-elle la conclusion que ces actes étaient également insusceptibles du recours pour
excès de pouvoir ? Aucune réponse n’en était donnée à l’époque, ni par le législateur, ni par la
jurisprudence. Pourtant, la Constitution guinéenne de 1958 proclamait théoriquement la
création d’un État de droit.
En Guinée, ce décret 1964 créant le Tribunal administratif, créait au même moment un Tribunal
des conflits à l’image de la France. Dans sa volonté affichée de doter à la Guinée un système de
dualité juridique et juridictionnelle, le législateur dotera ce Tribunal des conflits des
compétences pour trancher les conflits d’attributions pouvant opposer un juge judiciaire et le
Tribunal administratif.
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Pendant cette période, la Guinée a connu et pratiqué une coexistence de deux ordres de
juridiction comme en France. Certes, on pouvait noter de la dépendance politique et
administrative et le défaut de professionnalisme. Car, le Tribunal administratif était rattaché
organiquement à la présidence de la République ; souvent dépourvus de formations requises,
ses membres étaient nommés, au sein des instances du Parti-État (titulaires, suppléants et
greffiers) par le président de la République. Selon les dispositions du décret de 1964 modifié en
1968 : « tout membre du Tribunal qui manque aux convenances de son État peut être relevé de
ses fonctions par le président de la République sans préjudice, s’il y a lieu, des sanctions
disciplinaires prévues dans le statut de la fonction publique ».
8
Christophe BOUTIN, Frédéric ROUVILLOIS (dir.), Le Coup d’État : recours à la force ou dernier mot du
politique ? Paris, François-Xavier de Guibert, 2007, 419 p.
9
Hassane DIALLO, La réforme de la justice guinéenne. Défis et stratégie, op. cit., p. 16.
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différents (jurisprudence civile et jurisprudence administrative). Le même juge bénéficiait d’une
double casquette à la fois administrative et judiciaire.
Ce tout modèle en vigueur est l’œuvre de l’ancienne loi organique de 1991 prise sur le 10
modèle d’unité juridictionnelle à la base et de dualité contentieuse au sommet. Cette loi de 1995
sera modifiée par celle de 1998 qui elle-même sera amendée par le décret de 2001 . Donc, à
12 13
En somme, le système judiciaire guinéen en vigueur est celui du monisme dans lequel des
chambres et sections administratives sont créées au sein des juridictions de fond et de cassation
où sont affectés des magistrats qui n’ont eu souvent que de formations essentiellement centrées
sur le droit privé. Ces chambres (au sein de la Cour suprême et de chacune des deux Cours
d’appel) et sections administratives (au sein de chacun des Tribunaux de première instance)
10
La loi organique L. n° 091/008/CTRN du 23 décembre 1991, portant attribution, organisation et fonctionnement
de la Cour Suprême. Cette loi est désormais remplacée par la nouvelle loi organique L/2017/003 du 23 février
2017.
11
La loi L/95/021/CTRN du 6 juin 1995 portant réorganisation de la justice en République de Guinée.
12
La loi L/98/014/AN du 16 juin 1998 portant amendement de la loi L/95/021/CTRN du 6 juin 1995 portant
réorganisation de la justice en République de Guinée.
13
Décret n° 031/PRG/SGG du 17 mai 2001 portant organisation et attributions du Tribunal de première instance
de Conakry.
14
La loi n° 2015/019/AN du 13 août 2015 portant organisation judiciaire en République de Guinée.
15
Loi organique L/2017/003 du 23 février 2017 portant attribution, organisation et fonctionnement de la Cour
Suprême.
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sont compétentes lorsque le droit administratif est appliqué. Il s’agit alors du contentieux
administratif.
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