Le Droit Disciplinaire de La Fonction Publique The Law of Discipline in The Quebec Civil Service

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Relations industrielles
Industrial Relations

Le droit disciplinaire de la fonction publique


The Law of Discipline in the Quebec Civil Service
Patrice Garant

Volume 27, numéro 3, 1972

URI : https://id.erudit.org/iderudit/028313ar
DOI : https://doi.org/10.7202/028313ar

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Département des relations industrielles de l'Université Laval

ISSN
0034-379X (imprimé)
1703-8138 (numérique)

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Garant, P. (1972). Le droit disciplinaire de la fonction publique. Relations
industrielles / Industrial Relations, 27(3), 454–496.
https://doi.org/10.7202/028313ar

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DROIT DU TRAVAIL

Le droit disciplinaire de la fonction publique


Patrice Garant

INTRODUCTION
Le but de cette étude est de jeter un peu de lumière sur un secteur
du droit qui est presque ignoré des juristes et même de certaines auto-
rités administratives. En effet le droit disciplinaire de la Fonction Pu-
blique manque de cohérence, d'unité, de doctrine. Or pour les employés
de la Fonction Publique, pour la population en général comme pour
les spécialistes, « les conditions de clarté, d'intelligibilité et de certitude
ne sont-elles pas les qualités élémentaires de toute discipline juridi-
que ? » 1. C'est dans ce sens que porteront nos efforts, efforts qui sont
nécessités par l'importance que revêt pour l'État le sujet qui nous occupe.
En effet le régime disciplinaire existe d'abord dans l'intérêt général.
C'est en ce sens que De Visscher écrit que « c'est la communauté étatique
toute entière qui, par priorité, a intérêt au respect par les agents de tous
les devoirs de leur état » 2.
La nécessité d'un pouvoir disciplinaire est plus impérieuse dans le
secteur public que dans l'entreprise privée. C'est la garantie de la bonne
exécution du service public, de l'efficacité administrative, d'une saine
administration et enfin ce qui est primordial et si rare aujourd'hui, de la
confiance du public dans l'Administration3.
Le statut de la Fonction Publique détermine les droits et devoirs
des employés de l'État en regard de la mission que ceux-ci doivent pour-
suivre. Ces obligations sont déterminées d'une part à l'égard des autorités
administratives et de la collectivité d'autre part. De plus s'ajoutent des
limitations à l'exercice de certaines libertés publiques fondamentales,
limitations qui sont rendues nécessaires par la notion même de service
public. Il en résulte un certain code d'étique sanctionné par un régime
disciplinaire qui est plus exigeant que celui de l'entreprise privée.
* GARANT, Patrice, D.D., professeur, Faculté de droit, Université Laval, Québec.
1
Francis DELPÉRÉE, L'élaboration du droit disciplinaire de la Fonction Publi-
que, thèse de doctorat, Paris, Librairie de droit et de jurisprudence, 1969, p. 6.
2 Ibid., p. 29.
3
Louis FOUGÈRE, La Fonction Publique, Bruxelles, Institut international des
sciences administratives, 1966, p. 341.
454
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 455

Nous aborderons dans une première partie, après avoir donné la


définition de la Fonction Publique, les infractions et les sanctions disci-
plinaires. Nous aurons alors l'occasion de définir ce que l'on entend par
droit disciplinaire dans la Fonction Publique, définition qui nous fera
établir la distinction qui doit exister avec le droit pénal et qui fera
ressortir par ailleurs son caractère répressif. Nous tenterons alors de
caractériser les deux concepts de base du droit disciplinaire de la Fonction
Publique : l'infraction et la sanction. Partant de ces notions, nous passe-
rons en revue les quatre principales règles qui s'imposent à tous les
employés de l'État à savoir : le fonctionnement sans défaillance, l'obéis-
sance hiérarchique, le secret professionnel et la règle de désintéressement
et d'intégrité. Ces règles constituent une base sur laquelle nous bâtirons
notre notion de faute disciplinaire, faute qui doit être en rapport avec
les fonctions de l'employé 4. De la faute à la sanction il n'y a qu'un pas
que nous franchirons en jetant un bref regard sur les différentes mesures
prises par l'autorité compétente, mesures qui sont principalement la sus-
pension et la destitution. Nous terminerons alors cette première partie
en étudiant les différentes autorités habilitées à prendre des mesures
disciplinaires au Québec. Ces autorités seront étudiées à un double point
de vue; c'est-à-dire comme autorité normative et contrôleur. Dans une
deuxième partie, nous étudierons le régime de protection des employés
de la Fonction Publique lésés par les mesures disciplinaires prises contre
eux. Ce régime de protection est différent dans la Fonction Publique
québécoise, selon que l'employé est régi par une convention collective
ou non ; il diffère aussi suivant qu'il s'agit de la Fonction Publique qué-
bécoise ou fédérale. De l'étude de la notion de grief nous aborderons le
processus de solution des griefs au Québec et au Fédéral dont la dernière
étape est l'arbitrage. Nous aurons l'occasion de passer en revue les dispo-
sitions des conventions collectives québécoises et la jurisprudence arbitrale
dans les cas de suspension, destitution et des autres mesures disciplinaires
qui peuvent être prises. Le législateur québécois n'a pas voulu donner
de définition synthétique de la Fonction Publique mais il s'est contenté
d'en donner une énumération. Comme il serait trop long de la réciter au
long nous en donnerons les principaux éléments. Font partie de la Fonc-
tion Publique : les sous-chefs, les fonctionnaires et ouvriers employés au
siège du gouvernement dans les ministères ou ailleurs qu'au siège du
gouvernement, les fonctionnaires et employés de la législature, les régis-
trateurs et officiers de justice recevant un salaire fixe ainsi que les

4
Patrice GARANT, «Essai sur le Service public au Québec», Québec, 1966,
thèse de doctorat.
456 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

employés sous leurs ordres mais non les substituts du procureur général
qui ne sont pas nommés procureurs permanents ; les fonctionnaires et
employés affectés à la Sûreté du Québec à l'exclusion des membres de
la Sûreté ; le personnel, à l'exclusion des membres, de la plupart des
régies, commissions, agences gouvernementales ; les fonctionnaires et
employés des écoles régies par la loi de l'enseignement spécialisé ; les
agents ou délégués généraux de la province 5.

Afin d'éviter toute confusion, pour désigner l'ensemble du personnel


de la Fonction Publique nous emploierons le terme générique « employé
de la Fonction Publique » et non les termes spécifiques « fonctionnaires »
ou « ouvriers » 6. De plus à l'occasion nous devrons tenir compte d'autres
distinctions qui doivent être faites au sein du personnel de la Fonction
Publique ; ainsi il faudra tantôt distinguer entre les catégories fonction-
naires et ouvriers 7 , entre les fonctionnaires et ouvriers permanents 8 ,
surnuméraires 9 et temporaires 10, entre les emplois à caractère perma-
nent, occasionnel n , saisonnier et à temps partiel n.

Les infractions et les sanctions disciplinaires

Le droit disciplinaire occupe une place importante dans le statut de


la Fonction Publique. Malgré son importance, ce secteur du droit admi-
nistratif a été très peu étudié. C'est pourquoi nous entreprenons d'élaborer
la définition des concepts fondamentaux, l'énoncé des principales règles
qui gouvernent la conduite des employés de l'État et qui s'imposent en
vue d'une administration saine et efficace. La notion de faute discipli-
naire retiendra ensuite notre attention ; et enfin nous terminerons par
l'étude des mesures prises par les autorités compétentes à tous les niveaux
de l'administration.

5 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 1 (5) et art. 2, modifié
par S.Q. 1968, chap. 17, art. 94 S.Q. 1968, chap. 9, art. 82.
6
Journal des débats, Assemblée législative, août 1965, p. 4657.
7 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 1, al. 6 et al. 7.
8 S.Q. 1965, chap. 14, art. 35, tel que modifié par L.Q. 1969, chap. 14, art. 30.
9 S.Q. 1965, chap. 15, art. 45.
10 Voir note 9 et Convention collective fonctionnaires 1968-71, art. 1.01, al. f.
il S.Q. 1965, chap. 14, art. 3 ; A.G. du 5 octobre 1966, Gazette Officielle
1966, p. 5451 ; Convention collective des fonctionnaires, 1968-71, art. 1.01, al. h.
12 Convention collective des Fonctionnaires, 1968-71, art. 1.01, al. g., et Con-
vention collective des Ouvriers, 1968-71, art. 1.01, al. g.
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 457

La définition du droit disciplinaire de la Fonction Publique et de ses


principaux concepts
La meilleure façon de définir le droit disciplinaire est de le faire
par rapport au droit pénal. En effet des similitudes très grandes sont à
remarquer entre les deux définitions. Le droit pénal « a pour objet
l'incrimination et la répression par l'État des agissements de nature à
créer un trouble dans la société » 13. Par contre le droit disciplinaire peut
se définir parallèlement « comme la branche du droit public qui a pour
objet l'incrimination et la répression par l'État des agissements de nature
à créer des troubles dans cette société particulière qu'est la Fonction
Publique 14. Au plan de la finalité et des objets de ces deux branches du
droit, on peut relever une complète identité. En effet leur but est l'intérêt
général et leur objet est d'assurer, maintenir et, si besoin est, de rétablir
l'ordre au sein de la société étatique ou de cette collectivité particulière
qu'est la Fonction Publique. Donc la seule distinction qui existe avec
le droit pénal c'est que le droit pénal vise toute la société tandis que le
droit disciplinaire assure l'ordre au sein d'une collectivité restreinte au
moyen de sanctions répressives. Cette idée de répression est commune
au droit disciplinaire et au droit pénal. Cependant on ne doit pas con-
fondre totalement les deux car il n'y a pas d'identité de sujets. Ce droit
n'atteint l'agent public que dans sa carrière. La répression disciplinaire
est caractérisée par le fait qu'elle est liée à la fonction, tant en ce qui
concerne la nature du motif qui la provoque (la faute fonctionnelle) que
la nature de la sanction (peine fonctionnelle). Il faut que le fonctionnaire
ait commis une faute qui soit en rapport avec l'exercice de ses fonctions ;
ceci exclut la maladie ou l'insuffisance professionnelle qui ne constituent
pas des fautes, de même que les fautes personnelles qui n'ont aucun
rapport avec l'exercice de la fonction.

Parmi les concepts fondamentaux du droit disciplinaire, ceux d'in-


fraction et de sanction doivent être définis avec précision. On peut
définir l'infraction comme l'action ou l'omission imputable à son auteur
et punie par la loi d'une sanction disciplinaire15. Évidemment, cette
définition est sommaire mais il n'entre pas dans le cadre de notre étude
d'inventorier tous ses éléments. L'infraction se compose de trois éléments :
un élément de fait qui doit absolument exister et qui se caractérise par
sa matérialité et sa précision ; un élément de loi violée et un élément
de volonté. Face à l'infraction, la sanction apparaît comme une consé-

13 Francis DELPÉRÉE, op. cit., p. 21.


14 Idem, p. 22.
458 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

quence attachée par l'autorité à la violation d'une règle juridique. La


sanction doit être considérée comme un instrument en vue non seule-
ment d'assurer la répression d'une infraction disciplinaire, mais aussi de
corriger en enlevant l'envie de la récidive. C'est peut-être ce second aspect
qui est le plus important. Vue sous cet angle, « la correction peut se
muer en intimidation » I6 . Dans certains cas la sanction aura pour but
l'élimination des indésirables ; c'est le cas de la destitution notamment.
La sanction aura enfin un but de prévention par son caractère exemplaire
surtout lorsque les motifs des décisions disciplinaires sont connus grâce
à la publicité qu'on leur accorde. Au Québec tout comme à Ottawa les
décisions en matière disciplinaire ne sont publiées que depuis quelques
années et grâce à l'introduction du système d'arbitrage des griefs ; dans
certains encore cependant ces décisions sont secrètes comme c'est le cas
des décisions de la Commission de la Fonction Publique du Québec sous
l'article 61 de la loi. Il nous paraît anormal qu'aucune publicité ne soit
donnée à ces décisions, ce qui empêche le droit disciplinaire de réaliser
l'un de ses buts. L'expiation est enfin le dernier but visé par la sanction,
sanction qui pour l'employé constitue une tache parfois irréparable dans
son dossier. Voilà en quelques mots, les traits principaux du droit disci-
plinaire de la Fonction Publique. Voyons maintenant les principales règles
qui régissent la conduite des employés de l'État.

Les principales règles qui régissent la conduite des employés de l'État


À partir du moment où l'individu s'intègre à un ensemble, des
règles s'imposent à lui, afin de permettre à cette collectivité déterminée
de vivre en harmonie. H en est de même dans la Fonction Publique.
L'employé de l'État a une mission à accomplir, mission d'autant plus
importante qu'elle se confond avec la mission même du service public.
Le législateur québécois conscient de la crucialité de cette question a
édicté des règles de base ou principes que nous pourrons inférer du
double serment, serment d'allégeance et serment d'office, que doivent
prêter les agents publics en entrant au service de l'État 17 . Ces serments
énoncent des principes ou règles que la loi, les règlements et les direc-
tives quotidiennes de supérieurs hiérarchiques viendront préciser.

13 Francis DELPÉRÉE, op. cit., p. 53.


16 Idem, p. 103.
17 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 46 et 47, annexes A
et B, tels que modifiés par L.Q. 1969, chap. 14, art. 33 et 43 ; Loi des employés
publics, S.R.Q. 1964, chap. 12, art. 9 et formules tels que remplacés par L.Q. 1969,
chap. 14, art. 14 et 15.
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 459

Par son serment d'office le fonctionnaire jure d'être loyal, de porter


vraie allégeance à l'autorité constituée, de remplir les devoirs de sa charge
avec honnêteté et justice, de ne recevoir aucune somme d'argent ou consi-
dération quelconque dans l'exécution des devoirs de sa charge dans le
but de favoriser l'achat ou l'échange de quoi que ce soit par ou avec le
gouvernement, a part son traitement ou de ce qui lui sera alloué en vertu
de la loi ou d'un arrêté du lieutenant-gouverneur en conseil18. Certains
fonctionnaires19 peuvent être requis par le lieutenant-gouverneur en
conseil ou par leur chef ou sous-chef de prêter le serment de ne révéler
ou de ne faire connaître, sans y être dûment autorisé, quoi que ce soit
dont ils auront eu connaissance dans l'exercice de leur charge. La Fonc-
tion Publique fédérale connaît un serment similaire 20. Ces serments nous
donnent l'essence des règles qui s'imposent aux employés de l'État. Nous
les croyons liés à la notion même de service public. Nous pouvons tirer
de ces serments quatre règles qui s'imposent à tous les employés de la
Fonction Publique : règle de fonctionnement sans défaillance, règle de
l'obéissance hiérarchique, règle du secret professionnel et la règle de
désintéressement et d'intégrité. Ces règles constituent ce qu'il convient
d'appeler les impératifs fondamentaux du Service Public 21.
L'autorité compétente est aussi habilitée par la loi à préciser les
devoirs et obligations du fonctionnaire. L'article 54 de la loi autorise
« le Lieutenant-gouverneur en conseil, sur recommandation du Ministre
de la Fonction Publique à établir par règlement des nonnes d'éthique et
de discipline applicables aux personnes faisant partie de la fonction publi-
que ». L'économie générale de la loi d'autre part et notamment l'article
18 autorise les supérieurs hiérarchiques à «surveiller et à diriger», ce
qui implique à certains égards la définition de devoirs.
Le fonctionnement sans défaillance

Cette règle est de l'essence même du service public. Elle signifie que
l'action gouvernementale a des exigences particulières qui marquent leur
empreinte sur la situation des fonctionnaires de l'État. L'Administration
publique doit fonctionner non seulement sans défaillance dans le temps, n

18 Infra, note 21.


19 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 47 et annexe B, tels
qu'amendés par L.Q. 1969. chap. 14 ; Loi du Ministère de la Fonction Publique,
art. 33 et 43.
20 Loi sur l'emploi dans la Fonction Publique, S.R.C. 1970, C.P. -32.
21
Patrice GARANT, « Essai sur le Service Public au Québec », Québec, 1966.
22
Grief du groupe des aides forestières du 16 juillet 1970.
460 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 27, NO 3

mais aussi avec le maximum d'efficacité. Concrètement cette règle signifie


que les services gouvernementaux doivent fonctionner avec continuité,
sans défaillance, et que le fonctionnaire doit être à son poste. Cette règle
peut connaître des exceptions, notamment la reconnaissance du droit de
grève en faveur des fonctionnaires ne détenant pas de fonction de direc-
tion, mais son caractère universel est indéniable.

Au Québec, certains articles de la loi de la Fonction Publique fixent


des conditions générales du service tandis qu'au Fédéral, c'est la loi sur
l'administration financière qui habilite le conseil du trésor à déterminer
par voie réglementaire toutes ces questions. 23 L'article 52 de la loi de
la Fonction Publique stipule que certaines conditions générales du service
sont fixées par les règlements de la Commission de la Fonction Publique.
Citons comme exemple, les heures de travail, les méthodes de notation
des présences, la durée des congés24. De plus la loi prévoit que seuls les
dimanches et les jours de fête fixés par la loi sont les jours fériés à
observer dans la Fonction Publique25. Enfin la loi stipule qu'au cas où
un fonctionnaire ou un ouvrier s'absente sans permission, il doit être fait
une déduction proportionnelle sur son salaire pour chaque jour d'absence,
sans préjudice de toute autre sanction26. Il est à noter que par l'article
52 a de la loi, la convention collective pourra réglementer les heures de
travail et les congés ce qui relègue dans ces cas les règlements de la
commission à un rôle supplétif27. Ce nouvel article 52 a apporté une
précision supplémentaire en stipulant que « les fonctionnaires et ouvriers
sont régis par les dispositions de la convention collective qui leur est
applicable ou, à défaut de telles dispositions, par les dispositions de la
présente loi, nonobstant toute loi générale ou spéciale, relativement aux
sujets suivants : traitement ou rémunération additionnelle, congés, règle-
ment des griefs, suspension, congédiement, appel d'un employé qui se
croit lésé par une décision relativement à son classement ».

23 S.R.C. 1970, c. F-10.


24 S.Q. 1965, chap. 14, art. 52, tel qu'amendé par L.Q. 1969, chap. 14, Loi du
Ministère de la Fonction Publique, art. 34.
25 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 53.
26 idem, art. 54.
27 En effet ces deux matières sont énumérées aux sous-alinéas B et C de l'art.
« 52a », alors que l'ai. 2 énonce que la convention collective ne pourra toucher un
autre sujet relevant de la Commission ; or ces deux champs de compétence ne
sont point « autres » puisqu'ils font partie de la liste énoncée à l'art. « 52a ». Pour
plus de détails voir Patrice Garant, la « Loi du Ministère de la Fonction Publique »,
1970, 11 C de D., pp. 96-97
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 461

Quel est le sens exact de cette disposition, ou quelles sont les lois
visées ici ? Certaines de ces lois ne s'appliquent pas parce que le gouver-
nement n'y est pas spécifiquement mentionné : c'est le cas de la Loi du
Salaire minimum de la Loi sur les décrets de conventions collectives. Par
contre, dans d'autres lois telles que le Code du travail, la Loi sur la
discrimination dans l'emploi, la Loi sur les relations de travail dans la
construction il est expressément stipulé qu'elles s'appliquent au gouver-
nement. Pour ces dernières lois, à l'exclusion du Code du travail, il est
certain qu'elles ne s'appliquent plus qu'aux agences gouvernementales
non régies par la Loi de la Fonction Publique, telle l'Hydro-Québec, la
société des alcools (commerce)... Quant au reste, nous hésiterions beau-
coup à affirmer, après avoir soutenu que le législateur a voulu situer la
Fonction Publique dans l'économie générale du Code du travail, que les
dispositions du Code du travail sur le congédiement pour activité syn-
dicale ne s'appliquent pas aux fonctionnaires, de même que celles sur le
règlement et l'arbitrage des griefs,.. . même s'il n'est pas dit expressé-
ment que ces dispositions s'appliquent à la Fonction Publique.
La Commission de la Fonction Publique pour sa part a émis des
règlements sur les conditions du service. Les deux principaux sont l'arrêté
en conseil du 5 décembre 1968 M concernant les congés et l'arrêté du 4
octobre 1967 29 concernant les heures de travail et la rémunération du
temps supplémentaire. D'autre part, les conventions collectives30 régle-
mentent ces mêmes conditions de travail pour les employés régis par elles.
L'obéissance hiérarchique

Si le concept d'obéissance paraît désuet et démodé en 1971, à cer-


tains égards il a encore sa place dans le code d'éthique du fonctionnaire
à cause du caractère hiérarchique de l'Administration. Mais qu'est-ce
que la hiérarchie ? « C'est un mode d'organisation des fonctions et de
répartition des compétences entre les organes de la collectivité étati-
que » 31. Le pouvoir hiérarchique dérivé du pouvoir de commandement
du Ministre responsable de la bonne marche du service public. La hiérar-
chie est condition d'unité, de continuité et d'efficacité de l'organisation
comme de l'action administrative.

28 A.C. 3881 du 5 décembre 1968 qui a remplacé l'A.C. 1959 du 21 septem-


bre 1966 et principalement les articles 2, 3, 4, 5, 6.
29 A.C. 2696 du 4 octobre 1967 qui a remplacé l'A.C. no 487 du 21 avril
1960 et notamment les articles 2, 6.01, 6.03, 6.04.
30 Convention collective de travail, 1968-1971, unité fonctionnaires, et princi-
palement les articles 24, 25, 26, 27, 31, 32, 33.
462 INDUSTRIEL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 27, NO 3

Cette définition signifie concrètement que tout employé de la Fonc-


tion Publique doit, en plus de se soumettre aux lois, règlements, directives
de ses supérieurs, ne pas faire obstruction à l'application des politiques
auxquelles il pourrait ne pas adhérer intérieurement. Les conséquences
d'un manquement à cette règle sont très graves car la confiance du public
dans l'administration peut de ce fait être gravement compromise.
La jurisprudence québécoise illustre les diverses façons suivant les-
quelles l'obéissance hiérarchique peut être compromise. Ainsi dans une
excellente décision du juge Bérubé32 une sanction disciplinaire était
confirmée parce que la preuve avait établi que le fonctionnaire pénalisé
« rejetait sans cesse l'autorité de son patron immédiat », « qu'il refusait
d'exécuter certains travaux bien qu'il ait été conscient qu'il était de son
devoir de les exécuter», passait par-dessus la tête d'un hiérarchique » ;
enfin « il était insubordonné et chez lui, la non coopération était érigée
en système ». Dans une autre affaire33, la plaignante avait reçu un ordre
de mutation qu'elle ne voulait pas exécuter. Le juge Bérubé énonça le
principe à l'effet « qu'un employé est tenu d'obtempérer sur-le-champ à
un ordre de ses supérieurs qui n'a rien de contraire aux bonnes moeurs,
ou à l'ordre public et qui ne met pas sa santé en danger ». Il résulte de
ce principe que la plaignante devait obtempérer à cet ordre sous réserve
de son droit de présenter un grief.
De tous les problèmes que peut soulever l'application de cette; règle,
nous n'en retiendrons qu'un seul. ; jusqu'où va l'obligation de se soumettre
aux supérieurs hiérarchiques et de respecter la ligne hiérarchique lorsque
cette obligation pour tout employé de l'État entre en conflit avec celle
de réprimer ou de provoquer la répression des abus, négligences ou infrac-
tions aux lois et aux règlements qu'il constate dans l'exercice de ses
fonctions ? 34 . Le problème est facile à résoudre lorsqu'il s'agit d'égaux
ou de subalternes, mais comment résoudre ce conflit de devoirs lorsqu'une
faute a été commise par un supérieur hiérarchique. Dans ce cas, à notre
avis, l'employé doit dénoncer à l'autorité compétente ces manquements
qu'il a constaté dans l'exercice de ses fonctions et cela sans passer par
la voie hiérarchique. Par un tel geste il rassure la confiance du public
dans l'administration plutôt que de l'ébranler. « C'est son silence qui doit
étonner » 35. Dans le même ordre d'idées, si l'ordre d'un supérieur est

i31 Francis DELPÉREE, op. cit., p. 181.


32 Grief de Mlle Françoise Gravel du 4 novembre 1969.
33
Grief Évangéline Bourdages du 23 octobre 1970.
34
Francis DELPÉREE, op. cit., p. 183.
35 lbid.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 463

illégal, le fonctionnaire doit refuser d'obéir « lorsque l'ordre est entaché


d'une illégalité grave et flagrante. Le refus d'obéir est alors non seulement
un droit mais un devoir » 36. Au contraire c'est son obéissance aveugle
qui sera pénalisée.
Nous pouvons conclure en disant que malgré la contestation de toutes
les formes d'autorité et malgré les accrocs nombreux l'État continuera
d'imposer cette règle pour que l'efficacité administrative et la confiance
du public dans l'administration n'en soient pas diminuées.
Le secret professionnel du fonctionnaire

On pourrait considérer deux aspects à la règle du secret profession-


nel du fonctionnaire, dont l'un se situe dans le cadre du droit adminis-
tratif et l'autre dans celui du droit judiciaire37.
D'une part, il s'agit d'un devoir fondé sur la loi de la Fonction
Publique ou explicité par la pratique et la doctrine consistant en l'obli-
gation pour le fonctionnaire « de ne pas révéler » ou faire connaître sans
y être dûment autorisé quoi que ce soit dont il aura eu connaissance dans
l'exercice de son emploi38. Cette obligation est sanctionnée d'une façon
très rigoureuse. La loi édicté que ceux qui contreviennent à ce serment
doivent être immédiatement destitués en la manière prévue à la Loi de
la Fonction Publique39. Mais dans certains cas, les sanctions peuvent
être aggravées par des textes spéciaux propres à certaines catégories de
fonctionnaires40. Il est à noter que si le Québec ne semble pas obliger

36 Arrêt Chaput v. Romain, 1955, S.C.R., p. 834.


37 Voir Patrice GARANT, « Le secret professionnel du fonctionnaire au Québec »,
1967-1968, 9 C. de D. p. 781.
38 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 47 et annexe B, tels
que modifiés par la Loi du Ministère de la Fonction Publique, L.Q. chap. 14, art.
33 et 43. Cette définition est le texte du serment ou de l'affirmation solennelle aux-
quels sont tenus le greffier du Conseil exécutif et ses employés, les autres sous-chefs
et fonctionnaires des cadres supérieurs, ainsi que tous autres fonctionnaires lorsqu'ils
en sont requis par le Lieutenant-gouverneur en conseil ou par leur chef ou sous-chef.
39 Supra, note précédente.
40 Voir par exemple : Le Bureau de la statistique, S.R.Q. 1964, chap. 207, art.
4, 14, 15 ; Les fonctionnaires du Ministère du Revenu, S.R.Q. 1964, chap. 69, art.
152 ; S.R.Q. 1964, chap. 71, art. 18 et 22 ; chap. 70, art. 57 ; chap. 72, art. 16 et
20. Ces textes prévoient tous des pénalités spéciales au cas de contraventions de la
loi. Au Fédéral, voir : Loi de l'impôt sur le revenu, S.R.C. 1970, c. 1.5, art. 196,
Loi sur la Gendarmerie Royale, S.R.C. 1970, c. R-9, art. 25 i) Loi sur les secrets
officiels, S.R.C. 1970, c. 0-3. (applicable aux fonctionnaires fédéraux et provin-
ciaux).
464 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

strictement tous les fonctionnaires à prêter serment, au fédéral il y a


obligation pour tous les fonctionnaires sans exception à prêter un tel
serment41.

Pris sous son deuxième aspect, le secret professionnel est un droit


créé par l'article 308 du Code de Procédure Civile relativement aux
divulgations qui doivent être faites devant les tribunaux. Le fonctionnaire
peut opposer son silence si son ministre ou sous-ministre juge que son
témoignage serait contraire à l'ordre public. Mais dans ce cas, le juge a
le pouvoir d'apprécier les motifs invoqués par le ministre ou sous-ministre.

La règle peut devenir lourde de conséquences pour des fonction-


naires membres de corporations professionnelles. En effet, ils peuvent
faire l'objet de sanctions disciplinaires sous la loi de la Fonction Publique
en plus de celles qui peuvent leur être imposées par les corporations
professionnelles dans la mesure cependant où ils sont soumis à ces
dernières 42.

Dans le droit commun, le secret professionnel vise seulement les


renseignements communiqués par voie confidentielle ; par contre celui
des fonctionnaires comprend « quoi que ce soit dont il aura eu connais-
sance dans l'exercice de son emploi » 43. Il reste à nous interroger sur
certains problèmes. En effet l'article 308 du Code de Procédure Civile
s'applique aux « fonctionnaires de l'État ». Le terme fonctionnaire de
l'État utilisé ici doit être entendu dans un sens assez restrictif. Nous
sommes d'avis qu'il faudrait exclure d'une part les agents de l'État qui
ne relèvent pas de l'Exécutif ou qui constituent l'Exécutif et d'autre part
ceux qui ne participent pas à l'administration, tels les ouvriers, le per-
sonnel des entreprises à caractère industriel et commercial. Mais la
« démarcation » peut être difficile à faire dans certains cas.

Il convient de faire remarquer que le secret professionnel du fonc-


tionnaire n'existe que lorsque l'ordre public est en jeu et non pour favo-
riser l'efficacité administrative d'un ministère.

41 S.CR. 1970, c. P-32, Loi sur l'emploi dans la Fonction Publique, chap 71,
art. 23 et annexe C.
42 Voir l'affaire Wagner, 1968, B.R. 235 et le commentaire de cet arrêt par
Patrice GARANT, « L a loi du Ministère de la Fonction Publique», (1970), 11 C. de
D. pp. 94-95.
43 Supra, note 38.
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 465

La règle de désintéressement et d'intégrité

La finalité du service public étant l'intérêt général, il faut absolu-


ment que ceux qui participent à son fonctionnement ne détournent cette
finalité au profit de leur intérêt propre ou tout intérêt particulier auquel
ils auraient partie liée. Cette règle exige de l'agent public une moralité
administrative qui le place au-dessus de tout reproche 44. « L'agent public
doit pratiquer une éthique, une moralité administrative qui ne saurait
tolérer ni la corruption, la fraude, 45 le trafic d'influence, mais aussi exi-
ge que l'agent lui-même évite de se placer dans des situations où ses
intérêts personnels risquent d'être substitués à l'intérêt public ». C'est
ainsi que l'on peut déceler deux formes d'immoralité administrative : la
corruption sous toutes ses formes et le conflit d'intérêt qui en est une
forme plus raffinée.
La corruption administrative est fortement combattue par notre
droit. En effet le Code criminel aux articles 100 à 109 interdit à tout
agent public de solliciter ou d'accepter directement ou indirectement,
pour lui-même ou pour toute autre personne toute qualification, faveur,
somme d'argent ou récompense de quelque nature que ce soit qui aient
un rapport quelconque avec le Service Public provincial et fédéral46.
Évidemment nous n'entreprendrons pas ici l'énumération de toutes ces
infractions mais nous nous contenterons d'en énumérer les plus courantes.
Ce sont les ententes ou conspirations ayant pour but l'obtention d'une char-
ge ou d'un emploi47, l'octroi d'un contrat ou d'un permis ** ou d'une sub-
vention gouvernementale 49. Le droit pénal pourchasse non seulement
44
Dans l'affaire du Grief de Brian Stanton du 16 octobre 1969, le notaire
Perrin déclarait « que le public ayant un droit strict à s'tatendre que les administra-
teurs publics exigent de leurs subordonnés une honnêteté sans faille ». Le notaire
ajoutait : «On connaît la rigueur avec laquelle les tribunaux d'arbitrage de ce pays
sanctionnent les détournements de biens appartenant à l'employeur même privé.
(United Electrical Workers vs C.G. Electric 8 L.A.C. 228 et 238). On ne saurait
s'attendre à plus de clémence pour le cas où la victime est l'employeur public, tout
au contraire ».
45 Voir: Grief Brian Stanton, du 6 octobre 1969, (cas où un employé avait
pris de l'essence pour son usage personnel avec une carte de crédit du Gouverne-
ment); Grief Augustin Michaud du 8 janvier 1970; Grief Alfred Lauzon, du 5
mai 70, (cas d'utilisation de l'équipement du Ministère à des fins personnelles).
46 Code criminel, SRC, 1970, c. C-34, 107e, définition de fonctionnaire, en
remontant à 107d définition de charge, et à 107b définition de gouvernement.
47 Idem, art. 108, 109.
48 Idem, art 110.
49 Idem.
466 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

l'agent public qui se laisse corrompre mais aussi le corrupteur et autres


conspirateurs 50.

Quant au droit administratif, il s'intéresse au problème des conflits


d'intérêt en général et à une forme voilée de conflit que soulève le pro-
blème de l'exclusivité d'emploi 51 .

LE PROBLÈME GÉNÉRAL DES CONFLITS D'INTÉRÊT

Les conflits d'intérêts peuvent prendre plusieurs formes. Nous ne


retiendrons que deux exemples. Un premier type de conflit est celui où
l'agent public participe à une action ou décision gouvernementale ou
administrative qui a une incidence particulière sur ses intérêts personnels.
Cet agent est alors dans la situation analogue à celle du juge qui devrait
se prononcer dans un litige où il serait lui-même partie en cause. Le
nouvel article 56a de la Loi de la Fonction Publique du Québec vise à
prévenir cette situation en stipulant que « nul titulaire d'un emploi
relevant du Gouvernement peut, sous peine de déchéance de sa charge,
avoir un intérêt direct ou indirect dans une entreprise mettant en conflit
son intérêt personnel et les devoirs de sa fonction » 52. Cette disposition
vise aussi la participation de l'agent public aux relations contractuelles
dans lesquelles l'Administration est partie. Comme il n'y a pas de juris-
prudence sur ces questions, il est difficile de savoir l'extension exacte de
cette notion d'intérêt direct ou indirect, mais il est sage de soutenir que
la disposition doit être interprétée largement.

LE PROBLÈME DE L'EXCLUSIVITÉ D'EMPLOI

Cet autre type de conflits d'intérêts pourrait se formuler ainsi :


« L'agent public devrait éviter de prendre la partie des particuliers dans
leurs relations avec le gouvernement soit pendant le temps où il est dans

50 Idem, art. 109 (a), 110 (i).


51
Sur ces questions voir Patrice Garant, « Les conflits d'intérêts en Droit
Public Québécois », Travaux Vlème Colloque International de Droit Comparé,
Ottawa, 1967.
52 L.Q. 1969, chap. 14, Loi du Ministère de la Fonction Publique, art. 37
ajoutant l'art. 56a à la Loi de la Fonction Publique, de nouveau modifié par L.Q.
1971, Bill 82 art. 2. L'expression emploi relevant du gouvernement couvre doré-
navant « un emploi dans la Fonction Publique ou dans tout organisme lorsque en
vertu de la loi, le gouvernement est l'une des parties à la négociation des stipu-
lations de la convention collective pouvant régir des employés des ces organismes
qui sont des salariés au sens du Code du Travail » (L.Q. 1971 Bill 82 art. 2
ajoutant l'alinéa 5a à l'art. 1 de la Loi de la Fonction Publique).
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 461

le service soit à sa sortie immédiate du service » 53. Le cas le plus fré-


quent est celui du fonctionnaire qui exerce une activité professionnelle
parallèle en dehors de ses heures de travail. Le Loi de la Fonction Publi-
que, à l'article 19, édicté que les sous-chefs doivent consacrer tout leur
temps à leurs fonctions ; de plus un nouvel article de la même loi « interdit
à tout sous-chef ou fonctionnaire qui fait partie d'un groupement profes-
sionnel ou qui occupe un emploi requérant un diplôme universitaire
terminal exigeant un minimum de seize années d'étude ou l'équivalent,
d'exercer sa profession autrement que pour le compte du gouvernement
ou de l'organisme dont il est sous-chef ou fonctionnaire » 54.
Par ailleurs, les fonctionnaires du Ministère du Revenu sont soumis
à une clause spéciale leur interdisant «d'exercer d'autre emploi dans le
but d'en retirer un profit, directement ou indirectement, ni remplir aucune
autre charge lucrative sauf avec la permission expresse du Lieutenant-
gouverneur en conseil » 55. Une circulaire ministérielle du 16 novembre
1966 complète cette disposition en l'appliquant aux activités profession-
nelles même non rémunérées et en transférant au sous-ministre du Revenu
le pouvoir d'autoriser par écrit de telles activités. Dans une sentence
arbitrale 56, le juge Dumontier, étudiant le problème du contenu des con-
ventions collectives dans la Fonction Publique, déclarait que « la con-
vention collective peut contenir toute disposition relative aux conditions
de travail qui n'est pas contraire à l'ordre public ni prohibée par la loi
(article 50 du Code du travail). En stipulant que tout employé s'engage
à fournir un travail exclusif au gouvernement, le syndicat a voulu indi-
quer par là que ses membres renoncent à travailler pour d'autres que le
gouvernement même en dehors des heures de travail ( . . . ) Rien ne
s'oppose à la stipulation d'une telle condition de travail dans une con-
vention collective ; bien plus, elle concorde dans ce cas avec l'article 9
de la Loi du Ministère du Revenu57 ».
En ce qui concerne les fonctionnaires professionnels, les conventions
collectives reprennent l'interdiction prévue à l'article 56a de la loi ; une

53 Patrice GARANT, article précité.


54 L.Q. 1969, chap. 14, Loi du Ministère de la Fonction Publique, art. 37,
ajoutant l'art. 56b à la Loi de la Fonction Publique;
55 S.R.Q. 1964, chap. 66, art. 9.
56 Grief collectif des membres du syndicat interprofessionnel, 8 juin 1967,
Cahier des décisions sur les conflits de relations de travail dans la Fonction Publi-
que, dossier 1-22-1.
57 Supra, note précédente; S.R.Q. 1964, chap. 66.
468 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

autre disposition de la convention collective des professionnels renforce


cette interdiction en stipulant que toute demande soumise par un employé
visant à obtenir un congé sans traitement dans le but d'exercer sa profes-
sion . . . sera refusée sauf s'il s'agit de perfectionnement ou d'activités
syndicales 58.

Il semble que l'expression « travail de nature professionnelle » ne


s'applique pas à l'enseignement de niveau universitaire et collégial59,
dans ce cas cependant l'autorisation du supérieur hiérarchique est requise
comme en fait foi une directive du Ministère de la Fonction Publique
(D.G.R.T.)

LE PROBLÈME DE LA DISCRÉTION PROFESSIONNELLE

Nous avons vu que certains nombres de fonctionnaires sont: requis


de prêter un serment dit de discrétion professionnelle. D'autres textes
particuliers à certains organismes imposent également aux fonctionnaires
de ne rien divulguer des connaissances acquises dans le service m\ quant
à l'utilisation que peut en faire le fonctionnaire la loi n'est guère explicite
sauf dans deux ou trois organismes. Le manque de discrétion profession-
nelle place le fonctionnaire dans une situation de conflit d'intérêt: quand
la divulgation prend la forme d'une utilisation de ces connaissances pour
des fins personnelles 61.

58 Convention collective du syndicat des professionnels, 1968-71, art. 7.01,


7.02 et 42.03.
59 Cf. Débats de l'Assemblée Nationale, p. 4155 (24 nov. 1969) cité par
Patrice Garant, la « L o i du Ministère de la Fonction Publique», 1970, 11 C. de D.
p. 94.
60
Des catégories particulières de fonctionnaires sont soumises spécialement à
des dispositions analogues: c'est le cas des fonctionnaires du Ministère du Revenu,
S.R.Q. 1964, chap. 69, art. 152; chap. 71, art. 18 et 22; chap. 70, art. 57; chap. 72,
art. 16, et 20; des personnes impliquées dans le processus d'accréditation prévu
au Code du Travail, S.R.Q. 1964, chap. 141, art. 241, ajouté par L.Q. 1969, chap.
48, art. 14.
61
En ce qui concerne l'utilisation de renseignements pour des fins personnel-
les, deux lois l'interdisent spécifiquement. C'est le cas au Bureau de la Statistique
où il est interdit « de se servir de ces renseignements pour spéculer sur un article
ou une valeur», S.R.Q. 1964, chap. 207, art. 15. C'est aussi le cas à la caisse
des Dépôts et Placements où il est interdit « à un fonctionnaire ou employé de la
Caisse, à un membre de son Conseil d'administration ainsi qu'à une personne
qui lui rend des services ou qui est associé à ses activités d'utiliser pour transiger
des titres ou faire une autre opération financière pour son compte, un renseigne-
ment obtenu à la caisse », S.Q. 1965, chap. 23, art. 37.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 469

La faute disciplinaire

Les règles que nous venons d'exposer couvrent tout le champ d'acti-
vité de l'employé de la Fonction Publique ; elles constituent les fonde-
ments d'un code d'éthique véritable dont les manquements doivent être
sanctionnés.
Pour que l'autorité habilitée à prendre des sanctions intervienne, il
faut qu'il y ait un manquement, c'est-à-dire une faute. Mais en quoi
consiste cette faute ? Certes l'employé de l'État peut commettre des fautes
dans toute une série de domaines. Dans sa vie privée, il a l'occasion de
commettre des fautes qui sont en elles-mêmes repréhensibles ; devra-t-il
en subir des conséquences sur le plan professionnel ? Voilà autant de
questions qui nous pressent de formuler une définition de cette faute.
La faute que l'on peut imputer à un employé de l'État est caracté-
risée par le fait qu'elle est liée à la fonction. Est-ce à dire que seule la
faute commise dans l'exercice des fonctions sera retenue ? Non, car dans
certains cas la faute commise hors l'exercice des fonctions pourra avoir
néanmoins un rapport avec celle-ci, et l'intérêt du service exige qu'elle
soit sanctionnée.
Il faut que le fonctionnaire ait commis une faute qui soit en rapport
avec l'exercice de ses fonctions ; ceci exclut surtout la maladie et l'insuf-
fisance professionnelle qui ne constituent pas des fautes62 ; ceci exclut
en outre les fautes personnelles commises dans la vie privée et sans
rapport avec la fonction. Mais la jurisprudence est à l'effet qu'il y a lieu
généralement de suspendre un employé accusé d'un acte criminel jusqu'à
l'adjudication finale par les Cours compétentes sur la plainte ainsi portée
contre tel employé ; cependant, il peut y avoir dérogation à cette règle 63.
La mesure de suspension n'a pas alors nécessairement un caractère disci-
plinaire, ce peut être une mesure prise dans l'intérêt du service parce que
le maintien en fonction pendant l'instance criminelle, pourrait comporter
des inconvénients pour le service.

Les mesures prises par l'autorité compétente

Diverses mesures peuvent être prises pour réprouver les manque-


ments à la discipline dans la Fonction Publique. Il ne faut pas cependant
confondre ces mesures avec d'autres qui n'auraient pas le caractère disci-

62 Voir le Grief Jean-Baptiste Blanchard qui établit des distinctions entre


mesures disciplinaires et mesures administratives. Du 23/4/69.
63
Grief Jacques Côté du 2 décembre 1969.
470 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 27, NO 3

plinaire et qu'on appellera mesures administratives. Ces deux types de


mesures peuvent avoir le même objet et le même effet sur la carrière du
fonctionnaire ; ce qui les différencie, ce sont les motifs et le but poursuivi ;
dans certains cas aussi les recours contre ces mesures varieront.

Il n'existe pas en droit québécois de catalogue des mesures qui peu-


vent être prises à titre disciplinaire. Cependant la loi, les règlements, les
conventions collectives et la pratique administrative prévoient ces me-
sures ; nous allons successivement traiter brièvement de la destitution,
de la suspension, de la rétrogradation et des autres mesures disciplinaires.
La destitution

La destitution est prévue par certaines dispositions de la loi et notam-


ment à l'article 61 qui stipule que « tout sous-chef, fonctionnaire ou mem-
bre d'un cabinet qui contrevient à son serment » doit être destitué en la
manière prévue par la loi » 64 l'article 55 relatif à l'interdiction de politi-
que partisane dans une élection fédérale ou provinciale rend le coupable
« passible de destitution en la manière prévue par la présente ».

L'article 61 de la loi précise les modalités de la destitution en ces


termes : « Le secrétaire-général du conseil exécutif, les sous-ministres, le
secrétaire de l'assemblée nationale, le surintendant des assurances ainsi que
les fonctionnaires permanents et les ouvriers à l'exception de ceux qui
sont régis par une convention collective de travail, ne peuvent être ré-
voqués ou destitués que sur la recommandation écrite de la Commission
(fonction publique) après enquête, au cours de laquelle l'employé impliqué
a droit de se faire entendre avec ses témoins. À la demande de l'employé,
le dossier doit être transmis au lieutenant-gouverneur en conseil, avant
que la révocation ou la destitution soit décrétée » 65.

Cette disposition s'applique à tous les fonctionnaires non régis par


une convention collective ; quant aux autres les diverses conventions pré-
voient les modalités de mise en oeuvre de la destitution. L'arrêté en conseil
no 282 du 23 février 1966 relatif à la destitution d'un employé ou à la
révocation de sa nomination vient compléter l'article 61 et nous indique
la procédure à suivre dans ce cas 66 .

64 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 61, tel que modifié
par la Loi du Ministère de la Fonction Publique, L.Q. 1969, chap. 14, art. 38.
65
Supra, note précédente.
66 Gazette Officielle, 1965, p. 1593.
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 471

La suspension

La suspension est une mesure disciplinaire qui a pour but de punir


un employé en lui donnant un congé sans rémunération pour une période
déterminée. La loi de la Fonction Publique 67 stipule que : « le chef d'un
ministère peut suspendre de l'exercice de ses fonctions tout sous-chef ou
employé coupable d'inconduite ou de négligence dans l'accomplissement
de ses devoirs et faire cesser la suspension à volonté.
Le pouvoir de suspension est habituellement exercé par le sous-chef
à l'égard des fonctionnaires et ouvriers 68. S'il s'agit d'une suspension de
moins de deux mois aucune formalité n'est requise si ce n'est l'obligation
de faire un rapport écrit à la Commission de la Fonction Publique expli-
quant les motifs de la suspension 69.
S'il s'agit d'une suspension de plus de deux mois, l'assentiment de la
Commission de la Fonction Publique est requis. La suspension emporte
en principe forfaiture du traitement, à moins que la Commission ou le
sous-chef n'en ordonne autrement70.
La suspension peut être prise comme mesure autonome ou comme
mesure accessoire d'une destitution pendant le délai de mise en branle
de la procédure.
Toutes ces questions ont fait l'objet d'une décision récente de nos
tribunaux, qui malheureusement n'aborde qu'un aspect du problème ; il
s'agit de l'affaire Gérard Guay71. Voici les faits pertinents de l'affaire.
Le 22 septembre 1965, un fonctionnaire permanent régi par la Loi de
la Fonction Publique du Québec, était suspendu de ses fonctions par son
supérieur immédiat puis par son sous-chef. Le 1er octobre, le sous-mi-
nistre de qui relevait ce fonctionnaire fit une demande de destitution à la
Commission conformément à l'article 61 de la loi. Le 16 octobre, le mi-
nistre demandait à la Commission une prolongation de la suspension depuis

67 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 57.


68 idem, art. 58.
69 Idem, art. 59.
70 Idem, art. 60.
71 Le Syndicat des Fonctionnaires provinciaux du Québec et Gérard Guay
vs. Le Procureur Général de la Province de Québec et la Commission de la
Fonction Publique, C.S.Q. no 149668, 22 avril 1968, publié dans «Jugements iné-
dits», 1970, 11 C. de D., p. 141. Procureur Général de la province de Québec
et Commission de la Fonction Publique vs Guay, 1970, C.A. p. 714, publié dans
«Jugements récents», 1970, 11 C. de D. p. 105.
472 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

le 22 novembre jusqu'à ce qu'une décision soit prise relativement à la


demande de destitution. Le 23 novembre le secrétaire de la Commission
écrivait une lettre au ministre lui annonçant que la suspension imposée
à M. Guay était prolongée jusqu'à ce qu'une décision intervienne relative-
ment à la demande de destitution. La Cour Supérieure72 et après elle
la Cour d'Appel73 se sont prononcées sur les conditions de fonne des
décisions d'organismes administratifs à caractère collégial, comme la
Commission de la Fonction Publique du Québec. Malheureusement les
tribunaux n'ont pas abordé expressément la nature de cette intervention
de la Commission. S'agit-il d'un contrôle de nature simplement adminis-
trative ou d'un contrôle de type juridictionnel ou quasi-judiciaire ? Cette
question est d'autant plus importante que les fonctionnaires régis par les
conventions collectives ont à leur disposition un recours de nature quasi-

72
Le jugement de la Cour Supérieure a été rendu par le Juge en chef Dorion
qui s'exprime dans ces termes à la p. 142 : « Lorsque la loi stipule que dans telle
ou telle occasion il faut un consentement, un assentiment, ou une décision de la
Commission, il faut nécessairement qu'il y ait résolution. La loi ne donne pas le
pouvoir à un membre de la Commission, et encore moins au secrétaire, de prendre
des décisions pour elle. Même si, comme dans le présent cas, le secrétaire informe
le ministre que la Commission a prolongé la suspension, il est nécessaire que cette
information provienne d'une décision de la Commission, c'est-à-dire d'une résolution.
Il faut donc conclure que les prescriptions de l'art. 59 de la Loi de la Fonction
Publique n'ont pas été remplies. Il n'y eut de la part de la Commission aucune
décision prolongeant, pour plus de deux mois, la suspension du demandeur».
73
La Cour d'Appel ne partage pas l'avis des tribunaux de première instance.
En effet, le juge Casey dit à la p. 106 : « I cannot accept this proposition. I might
be prepared to concède that a formai resolution might be required in
cases where a décision of the Commission has to be executed. But to make
it essential that ail décisions of the Commission be evidenced by a formai reso-
lution would require a very clair text of law, or a very well established pratice ;
and neither one has been shown. It must not be forgotten that the Commission
was in a period of transition, and that it was developping its own procédures and
that it had decided that when a dismissal was being sought extensions of sus-
pensions would be granted. This is what was done hère as was explained by Mr.
Bolduc. I cannot therefore accept the conclusion that: « Il faut donc conclure
que les prescriptions de l'art. 59 de la loi de la Fonction Publique n'ont pas été
remplies. Il n'y eut de la part de la commission aucune décision prolongeant,
pour plus de deux mois, la suspension du demandeur ». Since I desagree with the
trial judge on the fact and validity of the extension the issue of retroactivity
becomes purely académie ». Donc l'arrêt de la Cour d'Appel souligne très claire-
ment qu'il n'est pas nécessaire de recourir à une résolution formelle. Il faut
comme le souligne le juge Casey, soit « a very clear text of law or a very well
established practice». Comme la loi ne contient aucune disposition à ce sujet,
alors il faut se référer à la pratique administrative.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 473

judiciaire contre toute mesure disciplinaire, y compris bien entendu la


suspension 74.
La jurisprudence de la Cour d'Appel nous incite à croire pour le
moment que l'intervention de la Commission n'est qu'un contrôle admi-
nistratif sur la durée de la suspension et non d'un contrôle quasi-judiciaire.
Par ailleurs la suspension de plus de deux mois n'est souvent que l'acces-
soire d'une destitution ; c'est pour cette raison qu'une simple lettre du
secrétaire de la Commission constitue l'assentiment de la Commission
sans qu'il y ait sous-délégation illégale75. Ceci confirme la prétention à
l'effet que l'assentiment de la Commission n'est pas l'exercice d'un pouvoir
quasi-judiciaire.
Outre la destitution et la suspension d'autres mesures peuvent être
prises à titre disciplinaire dans la Fonction Publique du Québec. Plusieurs
articles de la loi font allusion à d'autres mesures disciplinaires sans les
nommer. Ainsi l'article 54 stipule que lorsqu'un « fonctionnaire s'absente
du service sans permission, il doit être fait une déduction proportionnelle
sur son salaire pour chaque jour d'absence, sans préjudice de toute autre
sanction ». Les conventions collectives mentionnent en outre que « toute
mesure disciplinaire peut faire l'objet d'un grief sous réserve que les griefs
de suspension et de congédiement... » 76.
Les conventions collectives mentionnent expressément que des « aver-
tissements écrits » peuvent constituer une mesure disciplinaire77. Les
règlements des divers corps de fonctionnaires professionnels et les conven-
tions collectives de professionnels prévoient la notation au dossier78 ; il
est alors normal qu'une mauvaise note puisse être considérée comme
mesure disciplinaire si elle vise à sanctionner une faute ou un comporte-
ment fautif.
La jurisprudence arbitrale fait par ailleurs allusion à des mesures de
rétrogradation prises à titre disciplinaire79. Il se pourrait peut-être aussi

74 Convention collective des fonctionnaires, Ouvriers, Professionnels, 1968-71,


art. 19.00.
75 Garant, Patrice, «Chronique de jurisprudence», 1970, 11 C. de D. p. 169,
Les autres mesures disciplinaires
76 Convention collective des Fonctionnaires, Ouvriers, Professionnels, art. 19.01.
77 Convention Collective des Fonctionnaires, Ouvriers, Professionnels, art. 19.02.
78 Convention Collective des Professionnels, 1968-71, art. 26.07, et A.C.
1104 du 21 avril 1967.
79 Grief Bouchard, Cahiers des décisions, n o 3-8-1.
474 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

que le refus d'avancement d'échelon puisse être utilisé comme mesure dis-
ciplinaire 80, ainsi que la mutation d'un poste à un autre 81 et la prolon-
gation de la période de probation82 ; la jurisprudence ne s'est cependant
pas encore prononcée sur ces questions.

Il serait préférable que le législateur énumère les mesures discipli-


naires qui peuvent être prises ou autorise l'autorité réglementaire à les
déterminer, car autrement on pourrait contester le fondement de certaines
de ces mesures.

Les autorités habiles à prendre des mesures disciplinaires


Dans l'appareil administratif, diverses autorités exercent des com-
pétences en matière disciplinaire. Elles portent le titre de chef et de sous-
chef 83, de supérieur hiérarchique 84, de supérieur immédiat85 ; elles sont
réparties selon un plan vertical.

Le chef, c'est-à-dire le ministre de la Couronne qui dirige un mi-


nistère, ainsi que le Président de l'Assemblée nationale sont les supérieurs
hiérarchiques suprêmes. Celui qui habituellement a la surveillance et la
direction d'un ministère ou organisme est cependant le sous-chef. Le sous-
chef comme l'indique l'article 1 paragraphe 3° de la Loi de la Fonction
Publique désigne les sous-ministres, le secrétaire général du Conseil exé-
cutif, le chef du cabinet du premier ministre, le secrétaire de l'Assemblée
nationale, le surintendant des assurances, le président ou, le cas échéant,
l'administrateur de chacun des organismes visés au paragraphe 7 e de
l'article 2 et, dans la mesure où cette désignation est compatible avec les
fonctions qui lui sont assignées par la Loi de l'administration financière,

80 Loi de la Fonction Publique, art. 30, tel que modifié par L.Q. 1969, chap. 14,
art. 28.
81 Règlement de la Commission concernant certaines conditions de travail
des Conseillers juridiques, A.C. 813, du 26 mars 1969, art. 6.01; dans ce cas
le terme mutation a un sens spécifique. Suivant la pratique administrative, le terme
mutation ou transfert a un sens plus large. L'art. 45 de la loi fait aussi allusion
à la possibilité de transfert.
82 Loi de la Fonction Publique, art. 37 en vertu des conventions collectives,
cette mesure peut faire l'objet d'un grief, art. 20.03.
83 Loi de la Fonction Publique, art. 1, al. 2 et 3.
84 Convention collective de travail 1968-71, unité fonctionnaires, art. 12.01.
85 Ibidem.
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 475

le vérificateur général86. En l'absence du sous-chef, le sous-chef adjoint


exerce ses attributions 87.
Le sous-chef est titulaire en principe du pouvoir de suspension88 et
du pouvoir de demander la destitution 89.
Le pouvoir de destitution lui-même appartient au Québec à l'autorité
qui a le pouvoir de nomination en vertu de l'article 55 de la Loi d'inter-
prétation qui stipule que « le droit de nomination à un emploi comporte
celui de destitution » 90. La Loi de la Fonction Publique contient une
disposition sur les nominations à l'effet que « les sous-chefs ainsi que les
sous-ministres adjoints sont nommés par le Lieutenant-gouverneur en
conseil sur la recommandation du premier ministre ; les autres fonction-
naires des cadres supérieurs ainsi que les fonctionnaires et ouvriers de
tout organisme visé au paragraphe 7e de l'article 2 sont nommés par le
lieutenant-gouverneur en conseil ; tous les autres fonctionnaires et ouvriers
sont nommés par un écrit du chef du ministère dont ils relèvent, lequel
peut, par écrit, déléguer ce pouvoir au sous-chef ou à tout fonctionnaire
de son ministère 91. Ce sont donc ces diverses autorités qui ont le pouvoir
de destitution.
Pour savoir qui a l'autorité pour prendre les autres mesures disci-
plinaires possibles, il faut se référer aux textes de lois, aux règlements et
conventions collectives. Ainsi le refus d'avancement d'échelon est de la
compétence du sous-chef de même que les mutations, alors que la notation
au dossier relève du supérieur immédiat ; le blâme ou l'avertissement écrit
émanera habituellement du supérieur hiérarchique.

Le régime de protection des employés de la fonction publique


lésés par les mesures disciplinaires prises contre eux
L'employé qui est l'objet d'une mesure disciplinaire, est-il démuni
face à cette mesure prise contre lui ? Il importe de préciser comme règle
générale qu'au plan de la protection accordée par notre droit tous les em-

86
Pour la signification de « sous-ministre » voir la Loi de la Fonction
Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 2 (4°).
87 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 20.
88 Ibidem, art. 58.
89
A.C. no 282 du 23 février 1966, relatif à la destitution d'un employé ou à
la révocation de sa nomination, art. 2.
90 S.R.Q. 1964, chap. 1, art. 55.
91 Tel que modifié par L.Q. 1969, chap. 14, art. 30.
476 ÏNDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 27, NO 3

ployés de la Fonction Publique ne sont pas égaux en ce sens que certains


recours en apparence semblables ont une portée variable juridiquement
suivant l'instance compétente.
La distinction la plus importante qu'on retrouve chez-nous à cet
égard s'opère contre les employés non-régis par les conventions collectives
et ceux qui sont couverts par celles-ci. Au Fédéral cette distinction n'a
pas du tout la même portée depuis la réforme de 1967 qui a étendu le
recours à l'arbitrage à toutes les catégories de fonctionnaires dans un bon
nombre de cas.

La protection accordée aux employés non régis par des conventions collectives

Les employés non régis par des conventions collectives au Québec


se voient accorder une protection apparemment assez réduite par la Loi
ou les règlements de la Commission de la Fonction Publique. Cette pro-
tection varie suivant la nature des mesures disciplinaires prises contre eux.

En matière de destitution

Suivant l'article 61 de la Loi de la Fonction Publique aucune desti-


tution ne peut être prononcée sans « la recommandation écrite de lai Com-
mission de la Fonction Publique après enquête, au cours de laquelle l'em-
ployé a droit de se faire entendre avec ses témoins > 92. Cette enquête est
tenue conformément à un règlement de la Commission du 23 février
1966 93. Elle peut être présidée par un membre de la Commission ou un
délégué-enquêteur ; une telle délégation de pouvoir est permise par le texte
même de la loi 94 . L'enquêteur fait son rapport et c'est sur la base de
celui-ci et des pièces jointes au dossier que la Commission rend sa décision.
La Commission peut en outre entendre les parties si elle le juge à propos 95.
Si la Commission décide de rejeter la demande de destitution, cette
décision est finale et sans appel, en ce sens que la destitution ne peut être
prononcée et que l'autorité qui a sollicité la destitution n'a aucun droit
d'appel. Dans le cas contraire, la recommandation écrite est envoyée à
l'autorité qui a le pouvoir de destitution. Cette dernière n'est pas théorique-
ment et juridiquement tenue de procéder à la destitution mais jusqu'ici
dans tous les cas on a donné suite à cette recommandation.

92 Tel que modifié par L.Q. 1969, chap. 14, art. 38.
93 A.C. n o 282, du 23 février 1966.
94 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 13.
95 A.C. n o 282, art. 8.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 477

L'article 61 confert en outre au fonctionnaire qui a fait l'objet d'une


recommandation de destitution le droit de demander la transmission de son
dossier au Lieutenant-gouverneur en conseil avant que la destitution ne
soit décrétée. Ce recours est important lorsque c'est le Lieutenant-gouver-
neur en conseil qui est titulaire du pouvoir de destitution mais dans les
autres cas cela semble un peu curieux ; le Lieutenant-gouverneur en con-
seil exerce alors une véritable censure sur la recommandation de la Com-
mission et pourrait intimer à l'autorité compétente de ne pas donner suite
à la recommandation de la Commission.
Il nous semble que les recours offerts par l'article 61 sont déficients.
Nous suggérerions que la décision de la Commission soit dans tous les
cas finale et sans appel. Il s'agirait alors d'une véritable protection juri-
dictionnelle comparable à celle qu'ont les fonctionnaires régis par les con-
ventions collectives.
EN MATIÈRE DE SUSPENSION

Le fonctionnaire non régi par une convention collective n'a guère de


recours en cas de suspension. La seule protection qui lui est offerte porte
sur la durée de la suspension. En effet l'article 59 stipule que la durée
d'une telle mesure ne doit pas excéder deux mois sans l'assentiment de la
Commission. Certes dans tous les cas les suspensions doivent être portées
immédiatement à la connaissance de la Commission par rapport écrit et
motivé, mais ceci ne constitue pas un recours. Nous avons étudié précé-
demment la nature et la valeur de ce mécanisme 96.
Le fonctionnaire suspendu a aussi la possibilité de demander à
la Commission ou au chef de son ministère d'ordonner que son traitement
lui soit tout de même versé ^ ; il ne s'agit cependant pas ici d'un recours
quasi-judiciaire.

RELATIVEMENT AUX AUTRES MESURES DISCIPLINAIRES

Le fonctionnaire non régi par les conventions collectives n'a guère


de recours contre toute autre mesure prise contre lui à titre disciplinaire ;
ni la loi ni les règlements ni la pratique administrative n'en prévoient.
* * *

Donc l'employé non régi par une convention collective a une protec-
tion très réduite comme cela ressort des textes. La loi ne favorise pas les

96 Voir supra, page 4 7 1 .


97 Loi de la Fonction Publique, art 60.
478 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

procédures de contestation. L'employeur et ses agents sont investis d'une


autorité sans réplique relativement à l'exercice des pouvoirs disciplinai-
res 98. En ce qui a trait, comme nous l'avons vu, aux suspensions pour
inconduite ou négligence et aux autres mesures disciplinaires, aucun re-
cours n'est prévu au profit de l'employé ainsi pénalisé ou suspendu. Si un
fonctionnaire est destitué, la Commission peut faire enquête et recomman-
der la destitution. L'employé en cause a alors droit de se faire entendre
pendant l'enquête, avec ses témoins, et à sa demande son dossier doit
être transmis au Lieutenant-gouverneur en conseil avant que la destitution
ne soit décrétée.
Nous sommes d'avis que des amendements substantiels à la loi pour-
raient donner des recours appropriés aux employés non régis par des
conventions collectives, recours qui diminueraient l'aspect discrétionnaire
des décisions prises à leur égard. Nous croyons que le législateur aurait
grand intérêt à s'inspirer du statut de la Fonction Publique Fédérale.
Le protection accordée aux employés régis par des conventions collectives
L'une des caractéristiques fondamentales du système de relations de
travail introduit dans la Fonction Publique du Québec est le fait que la
Fonction Publique est placée sous l'économie générale du Code du travail.
Le Code du travail et ses diverses techniques s'appliquent donc sauf
dérogation expresse dans la Loi de la Fonction Publique " . De ce fait
le fonctionnaire qui peut être régi par une convention collective bénéfi-
ciera des protections propres au Droit du travail et notamment du recours
l'arbitrage.
Comme le système de protection du fonctionnaire régi par les con-
ventions collectives diffère cependant à certains égards de celui dont
bénéficie le salarié ordinaire nous devrons étudier la notion de grief, la
procédure de règlement des griefs et enfin l'arbitrage des griefs.
La notion de grief
Le Code québécois du travail définit le grief comme étant « toute
mésentente relative à l'administration et à l'application d'une convention
collective » 10°. Or dans la Fonction Publique la notion de grief nous

98 Voir J. R. CARDIN, « L a nouvelle loi de la Fonction Publique», (1966),


21, Relations industrielles, p. 256.
99 Voir Patrice GARANT, « Le statut de la Fonction Publique », in Barbe
Droit administratif Canadien et Québécois, 1969, Presses Université d'Ottawa, pp.
431, 456.
!00 Code du travail, art. l g (Codification administrative 1969).
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 479

semble plus large que sous le Code du travail. Tel n'est cependant pas le
cas si comme l'édictent les diverses conventions collectives « toute mesure
disciplinaire peut faire l'objet d'un grief » 101. C'est en vertu de la con-
vention que peut être soulevé le grief même si la mesure disciplinaire est
prise en vertu de la loi ou d'un règlement. Le droit de présenter un grief
est même reconnu à l'employé temporaire qui a été congédié. Dans ce
cas, l'employé lésé n'a qu'à alléguer que le congédiement a pour but
d'éluder l'article 16.01 de la convention collective, mais le fardeau de la
preuve lui incombe 102.

Le caractère disciplinaire d'une mesure est d'une importance capitale


car bon nombre de mesures administratives ne peuvent faire l'objet d'un
grief. Il s'agit essentiellement des mesures administratives prises en vertu
de la loi et des règlements sauf les modifications aux conditions de travail
non prévues à la convention ; dans ce dernier cas l'employé lésé peut
soulever un grief et il appartiendra à l'employeur de prouver qu'il a agi
de façon raisonnable 103.

La situation est bien différente dans la Fonction Publique Fédérale.


La loi sur les relations de travail dans la Fonction Publique définit ainsi
le grief : « une plainte écrite, présentée en conformité de la présente loi
par un employé pour son propre compte, ou pour son compte et celui
d'un ou de plusieurs employés, sauf que, (i) aux fins de toutes dispositions
de la présente loi visant les griefs, la mention d'un « employé » s'applique
à une personne qui serait un employé n'était-ce le fait qu'elle est pro-
posée à la gestion, ou à des fonctions confidentielles . . . » 104. La notion
de grief s'applique donc à tous les employés de l'État ; elle déborde le
champ d'application et le contenu de la convention collective. Cependant
au fédéral tous les griefs ne sont pas arbitrables. Seul l'employé qui
a présenté un grief jusqu'au dernier palier de la procédure applicable aux
griefs inclusivement, au sujet de l'application ou l'interprétation d'une
convention collective ou d'une mesure disciplinaire entraînant le congé-
diement, la suspension ou une sanction à caractère pécuniaire, peut s'il
n'est pas satisfait de la manière dont le grief a été réglé, renvoyer le grief

101 Convention collective, art. 19.01.


102 Grief Yves Me Nabb du 5 novembre 1970.
103 Convention collective, art. 4.01, sur la définition de « conditions de travail »,
cf. grief Auguste Lafontaine, du 12 décembre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-5-1 ; grief Vézina du 19 janvier 1969, dossier 1-14-1 ; grief Manseau du 5 février
1968, dossier 1-14-2; grief Gagnon du 28 décembre 1967, dossier 1-13-1.
104 s.C. 1967, chap. 72, art. 2p.
480 ÏNDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

à l'arbitrage 105. Le fonctionnaire préposé à la gestion et à des fonctions


confidentielles ainsi que les fonctionnaires non régis par une convention
collective ne peuvent soumettre à l'arbitrage que les griefs en matière
disciplinaire tel que précisé alors que tous les autres fonctionnaires peu-
vent soulever des griefs sur toute autre question y compris dans le cas
de mesure disciplinaire autre que le congédiement, la suspension ou la
sanction à caractère pécuniaire. Dans tous ces cas cependant le recours
est exclus si une autre procédure de réparation est prévue par une autre
loi du Parlement, notamment la Loi de l'emploi dans la Fonction Pu-
blique 106.

Le règlement des griefs

Au Québec la Loi de la Fonction Publique ne contient absolument


aucune disposition ni sur l'instruction ni sur l'arbitrage des griefs. Les
:onventions collectives seules réglementent ces procédures.
L'article 12 de la convention collective des fonctionnaires que nous
utiliserons comme illustration, stipule que les parties à la convention
collective conviennent que tout employé qui se croit lésé peut soumettre
un grief de la façon et dans l'ordre stipulés. Cette procédure en est une
à étapes, dont la quatrième est l'arbitrage.
Dans une première étape, l'employé lésé peut soumettre son grief
verbalement ou par écrit à son supérieur immédiat107, dans les dix jours
de l'événement qui a donné lieu à son grief. La convention mentionne que
l'employé lésé pourra s'il le désire être accompagné de son délégué
syndical ; au Fédéral, l'employé doit obligatoirement être accompagné de
son délégué syndical108. Dans les cinq jours qui suivent la date de la pré-
sentation du grief, le supérieur immédiat doit donner sa réponse par écrit
à l'employé et en remettre une copie au délégué syndical.
Dans une deuxième étape, si la réponse du supérieur immédiat ne
satisfait pas l'employé ou si sa réponse n'a pas été donnée dans le délai
de cinq jours, l'employé pourra alors soumettre son grief par écrit au

105 ibid., art. 91, al. 1 et 2 et 90, al. 1 et 2.


106 ibid., art. 91, al. 2 et S.C. 1967, chap. 71, art. 21 et 32.
107 Le supérieur immédiat est un titre créé par les règlements et les conven-
tions collectives au Québec. Ce titre appartient au fonctionnaire qui est à la tête
d'une unité administrative ou d'un service.
108 Loi sur les relations de travail dans la Fonction Publique, S.C. 1967, chap.
72, art. 91 ( 2 ) .
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 4SI

supérieur hiérarchique 109 désigné par l'employeur dans les cinq jours
qui suivent la réponse du supérieur immédiat ou l'expiration du délai
imparti au supérieur immédiat pour rendre sa décision s'il n'a pas donné
de réponse. À cette étape, l'employé peut être accompagné de son
délégué syndical. Le supérieur hiérarchique rendra sa réponse par écrit
à l'employé dans les trois jours de la réception du grief s'il n'a pas jugé
à propos de former un comité d'enquête. Si par contre, il a besoin de
faits additionnels avant de rendre sa décision, le supérieur hiérarchique
pourra dans les deux jours de la réception du grief, former un comité
d'enquête composé d'un représentant de l'employeur et du délégué syn-
dical. Ce comité aura pour fonction de recueillir les faits pertinents au
grief et de faire, dans les cinq jours de sa formation, un rapport écrit
au supérieur hiérarchique. Dans ce cas, le supérieur hiérarchique rendra
sa réponse par écrit à l'employé, avec copie au délégué syndical, dans
les trois jours de la réception du rapport du comité d'enquête.
Dans une troisième étape, si la réponse du supérieur hiérarchique ne
satisfait pas l'employé ou si sa réponse n'a pas été donnée dans les trois
jours de la réception du grief ou dans les trois jours de réception du
rapport du comité des griefs du syndicat et au sous-chef ou son représen-
tant dans les cinq jours qui suivent la réponse du supérieur hiérarchique
ou l'expiration du délai imparti au supérieur hiérarchique pour rendre
sa décision s'il n'a pas donné de réponse. Le comité des griefs et le
sous-chef ou son représentant se rencontreront à une date qui les satis-
fait mutuellement et examineront entre autres choses, si le grief est arbi-
trable en vertu des dispositions de la convention. Les parties pourront
s'adjoindre toute autre personne qu'elles désirent. Le sous-chef ou son
représentant rendra sa décision par écrit dans les cinq jours qui suivent
telle rencontre. Une copie de sa décision sera remise au comité des
griefs.
Dans une quatrième étape, si la décision des sous-chefs ou de son
représentant sur un grief relatif à une fausse interprétation ou prétendue
violation de la convention ou sur un grief relatif aux modifications des
conditions de travail par l'employeur, ne satisfait pas l'employé ou si
telle décision n'a pas été rendue dans le délai prévu, le syndicat peut,
dans le délai et de la manière prévue à l'article 13, soumettre ce grief
à l'arbitrage.

109 Le supérieur hiérarchique, tel que mentionné à la deuxième étape, est une
notion qui s'applique au supérieur immédiat, c'est-à-dire le sous-chef ou son repré-
sentant. L'expression est surtout utilisée dans les règlements et directives de la
D.G.R.T.
482 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

Pour l'application de cette procédure, la convention 110 stipule que


les délais sont calculés en jours ouvrables et sont de rigueur. Ils ne peu-
vent être prolongés que par entente écrite entre l'employeur et le syndicat
ou leurs représentants. La jurisprudence arbitrale est au même effet n l .

La procédure d'instruction des griefs n'est pas une procédure à


caractère quasi-judiciaire mais un simple appel administratif. Lorsqu'à
Tune ou l'autre des étapes le fonctionnaire lésé est satisfait de la réponse
obtenue ou laisse écouler les délais d'appel, la décision du supérieur
hiérarchique devient définitive et exécutoire. Dans les cas contraire, il y
a ouverture à l'arbitrage.

L'arbitrage des griefs

L'arbitrage des griefs est l'une des formes les plus inusités de contrôle
quasi-judiciaire des décisions prises par certaines autorités administratives.
Cette procédure n'est accessible au Québec qu'aux fonctionnaires régis
par une convention collective. Il n'y a qu'une seule exception à cette
règle en faveur des conseillers juridiques conformément au règlement de
la Commission sur les conditions de travail de ces fonctionnaires m .
H n'est pas sûr que cette procédure d'arbitrage créée par un règlement de
la Commission soit d'une légalité irréprochable ; la Commission se trouve
alors à sous-déléguer à des arbitres un pouvoir qu'elle n'a même pas
elle-même. Dans notre système juridique on ne peut pas nécessairement
faire par règlement ce qui est possible d'édicter dans une convention col-
lective sous le Code du travail. De plus le pouvoir quasi-judiciaire en
droit administratif canadien et québécois est un pouvoir qui ne peut
habituellement pas être conféré par voie de sous-délégation, comme l'a
encore soutenu récemment la Cour d'Appel dans l'affaire Commission
de la Fonction Publique v. Desbiens 113.

Aucun grief ne peut être soumis à l'arbitrage s'il n'a d'abord subi
les étapes prévues pour l'instruction des griefs, sauf dans le cas des
mesures de suspension et de destitution qui débutent à la troisième étape.

no A l'art. 12.06.
m Grief Charles Henri Simonneau du 21 novembre 1968, Cahier des
décisions, dossier 30803 ; Grief Ernest Alarie du 21 novembre 1968, ^Cahier des
décisions, dossier 3-8-4 ; Grief Gabriel Lévesque du 5 mars 1969, Cahier des
décisions, dossier 3-8-5.
H 2 A.C. 813 du 20 mars 1969 ; toute mesure disciplinaire à l'exclusion de la
destitution peut faire l'objet d'un grief.
H3 1970 C.A. 727.
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 483

La partie qui demande l'arbitrage doit en informer par écrit l'autre partie
au plus tard dans les quinze jours, ainsi que l'arbitre en chef.

Avant de procéder à l'audition d'un grief, l'arbitre devra entendre


l'objection qu'une partie pourrait soulever quant à l'arbitrabilité d'un
grief. En effet, les conventions stipulent que « dans les cas où il n'est
pas nécessaire que l'arbitre entende la preuve au mérite pour décider de
l'objection, il disposera de celle-ci dans le plus bref délai possible. Au
cas contraire, l'arbitre pourra prendre l'objection sous réserve et entendre
le grief au mérite » m . Quant au reste, le processus varie suivant le type
de mesure disciplinaire faisant l'objet du grief.

EN MATIÈRE DE SUSPENSION

L'arbitre saisi d'un grief en matière de suspension peut résoudre


ce litige : « a) en maintenant la décision de l'employeur ; ou b) en réins-
tallant l'employé avec tous ses droits et en lui remboursant le traitement
dont l'a privé la suspension, moins le salaire qu'il a pu gagner ailleurs ou
toute compensation qu'il a pu recevoir pendant la période de sa suspen-
sion pour remplacer en tout ou en partie, le traitement qu'il perdrait du
fait de sa suspension ; ou c) de toute manière jugée juste et équitable » 115.

Comme nous l'avons mentionné plus haut il semble y avoir dualité


de recours en matière de suspension. Afin d'éviter toute ambiguïté après
la signature des conventions collectives de 1968 une lettre d'entente du
Ministre délégué à la Fonction Publique proposait un modus vivendis à
l'effet que « la décision arbitrale en matière de congédiement ou de sus-
pension tiendra lieu des formalités prévues à la loi116, la même lettre
annonçait la présentation d'amendement à la loi afin de dissiper cette
ambiguïté. Or la loi n'a pas encore été amendée en ce qui concerne la
suspension. Comme nous avons vu que l'intervention de la Commission
de la Fonction Publique ne constitue pas une mesure de contrôle quasi-
judiciaire des suspensions, nous croyons que cette proposition de la lettre
d'entente n'avait pas sa raison d'être. De toute façon cette mention de
la suspension à la lettre d'entente est fort troublante. Au surplus certaines
propositions de cette lettre d'entente sont manifestement illégales; dans

114 Convention collective des Fonctionnaires, art. 13.02 et Grief Lafôrest du


9 août 1968, Cahier de Décisions 1-8-3.
H5 Convention collective des Fonctionnaires, art. 19.00.
116
Lettre du 19 juillet 1968, art. 10 in Convention collective des Fonction-
naires.
484 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 27, NO 3

un système juridique placé sous la « rule of law » le gouvernement ne


peut s'engager à ne pas appliquer la loi telle qu'elle est et il ne peut or-
donner à un organisme juridiquement autonome, tel la Commission de la
Fonction Publique, de ne pas appliquer la loi telle qu'elle est . . .
La jurisprudence nous fournit des nombreux cas de suspension. La
suspension a l'avantage d'être une sanction qui peut s'adapter à la gravité
de la faute m . Les décisions nous montrent que ce n'est généralement
pas sur un seul fait reproché que cette mesure sera prise mais plutôt
pour sanctionner un comportement général injustifiable. Ainsi dans le
Grief Bouchard la preuve révèle qu'il y a eu désobéissance, insubordina-
tion, injure verbale, insouciance, impolitesse, absence, malhonnêteté,
menaces de représailles politiques118 ; la suspension de quinze jours dans
ce cas fut pleinement justifiée compte tenu du fait que cet employé avait
déjà auparavant été suspendu. Dans d'autres cas ,un seul manquement
peut justifier la sanction ; c'est le cas du grief Blette119 où cet employé
a fait usage de boisson alcoolique à son travail. La suspension de dix
jours ouvrables ne fut pas jugée trop sévère si l'on considère que dans
plusieurs industries privées, comme le souligne l'arbitre, un tel manque-
ment entraîne souvent le congédiement. Dans une affaire récente, grief
Jacques Côté 120, un ingénieur employa une pratique administrative illégale
dans le but non pas de frauder le gouvernement mais de lui sauver de
l'argent ; l'arbitre a décidé de suspendre l'employé tout en spécifiant
clairement que la faute disciplinaire ne comportait pas d'éléments inten-
tionnels.

L'arbitre peut-il user de sa discrétion pour réduire la durée d'une


suspension? Dans une décision intéressante, l'arbitre estimait que la
durée de la suspension est affaire de discrétion pour la direction, et un
tribunal d'arbitrage ne saurait intervenir que si la suspension a été im-
posée sans cause, ou encore si elle est tellement sévère et disproportion-
née à la gravité de la faute qu'elle équivaut à toute fin pratique, à un déni
de justice ou à un véritable congédiement m . C'est ainsi que les arbi-

117 Voir Grief Pierre Boutin du 22 août 1969 ; Grief Robert Chevalier du 6
janvier 1971 ; grief J.P. St-Louis du 5 février 1971.
118 Grief Jos Bouchard du 10 novembre 1967, Cahier des décisions, dossier
3-8-1.
H9 Grief Roméo Blette du 19 novembre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-8-5.
120 Grief du 8 juin 1970.
121 Grief Fernand Leconte du 19 novembre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-8-4.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 485

très ont quelquefois réduit la durée de la suspension; dans le cas du


Grief Archambault m , l'arbitre réduisit la suspension de moitié parce
que le plaignant n'avait préalablement pas fait l'objet de remontrances
écrites et directes ; dans d'autres cas l'inexpérience de l'employé fut prise
en considération pour excuser le plaignant123.
Avant de terminer l'étude de la suspension, il nous reste une ques-
tion à résoudre. Est-ce que l'on peut suspendre un employé afin de pré-
parer son congédiement? La jurisprudence sous l'ancienne convention
collective de 1966 est à l'effet que la suspension et la destitution sont
deux mesures disciplinaires qui se contredisent et que l'une exclut l'autre.
Mais il peut s'avérer nécessaire à cause de la gravité de la faute imputée,
de suspendre l'employé immédiatement, en attendant de prendre 124 une
décision définitive relative à sa destitution. La pratique administrative est
à l'effet qu'une suspension n'exclut pas l'éventualité d'une destitution.
Le principe de droit pénal « non bis in idem » subirait ici une déroga-
tion.

La décision rendue dans le grief de Jacques Beaudoin 125 confirme


l'affaire précédente. Le juge Péloquin déclare « qu'en vertu de la nou-
velle convention, le Gouvernement a le droit également de suspendre ou
de congédier un employé, et il semblerait logique que le Gouvernement
choisisse entre la suspension pour une période déterminée et le congédie-
ment. Si la loi de la Fonction Publique ne permets pas aux chefs, aux
sous-chefs et à leurs représentants dûment autorisés de congédier, ils
pourraient suspendre pour une période indéfinie et demander un congé-
diement ». Le juge Péloquin, dans une affaire subséquente, grief Gaston
Cloutier,126 tout en se ralliant aux deux décisions précédentes et en
citant de multiples autorités à l'appui de sa décision déclare que « si le
Gouvernement désire procéder à l'avenir, dans des cas semblables, par
une suspension provisoire, il devra l'indiquer clairement dans l'avis de

122
Grief Jacques Archambault du 26 janvier 1968, Cahier des décisions,
dosier 1-8-2.
123
Grief Voghell et Côté du 16 août 1967, Cahier des décisions, dossier
1.11-1.
Pour d'autres décisions qui ont réduit la durée de la suspension voir: Grief
Royal Lavergne du 12 juin 1970, grief J.'Y. Proulx du 17 avril 1970.
124
Grief Gérard Giguère du 3 décembre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-8-6.
l 2 ' Grief du 3 novembre 1969.
i2* Grief du 16 novembre 1970.
486 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

suspension de façon à ce qu'il n'y ait qu'une seule mesure disciplinaire


d'imposée pour la même offense ou pour les mêmes motifs ». Les mesu-
res de suspension et de destitution sont alors totalement distinctes.

Dans le cas des fonctionnaires non régis par des conventions collec-
tives lorsque le suspension est utilisée comme préalable à une destitution
est-il vraiment correct de soutenir que la destitution peut avoir un effet
rétroactif à la date de l'avis de suspension ? La question a été reprise
dans l'affaire Guay dont nous avons parlé précédemment 127 .

Dans cette affaire, la Commission de la Fonction Publique recom-


mandait au Lieutenant-gouverneur en conseil sous l'autorité de l'article
61 de la Loi de la Fonction Publique que la nomination de M. Guay
soit révoquée à compter de la date de la suspension. Le juge en chef Do-
rion de la Cour Supérieure soutint que la Commission donnait donc un
effet rétroactif à sa décision. Or, il n'y a absolument rien dans la Loi
de la Fonction Publique définissant les pouvoirs de la Commission, qui
prévoit que les décisions qu'elle rend puissent avoir un effet rétroactif.
Selon des principes bien connus, toute loi ou toute décision ne dispose
que pour le présent et l'avenir. Même une loi nouvelle ne peut porter
atteinte aux droits régulièrement acquis sous l'empire d'une loi ancienne.
Il faut bien noter que ce principe ne lie pas le législateur et que ce dernier
peut valablement faire, s'il le désire, des lois rétroactives.

Quant aux actes non-législatifs, la doctrine et la jurisprudence en-


seignent que seul l'acte pris au terme du processus judiciaire ou quasi-
judiciaire est déclaratoire de droits et ainsi peut avoir un effet rétroactif
tandis que l'acte pris au terme du processus administratif n'a aucun effet
rétroactif puisqu'il n'est que générateur de droits 128. Il est à regretter
que la Cour ne se soit pas demandée si la recommandation de la Com-
mission de destituer un fonctionnaire est un acte quasi-judiciaire ou un
acte administratif. Cette décision porte incontestablement atteinte à des
droits ou modifie une situation juridique acquise, et s'inscrit au terme
d'un processus comportant des éléments de judiciaire : une demande est
faite, une enquête impartiale doit être tenue où est appliquée la règle
audi alteram partem, le dossier est transmis au Lieutenant-gouverneur
en conseil à la demande de l'employé. Il s'agirait peut-être d'une déci-
sion qui, tel le jugement d'un tribunal ou d'un organisme quasi-judiciaire,

127 Supra, p. 471.


12
8 Patrice GARANT, «Chronique de jurisprudence», 1970, 11 C. de D. p.
170 et Louis-Philippe Pigeon, op. cit., p. 49. Voir supra, page 469.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 487

rétroagit à la date de la demande. Il serait erroné cependant de faire


rétroagir cette décision à la date de la suspension, comme le souligne
d'ailleurs fort justement la Cour Supérieure. Le mieux que l'on puisse
faire c'est de la faire rétroagir à la date de la demande si l'on arrive à la
conclusion qu'il s'agit d'une décision à caractère quasi-judiciaire, ce qui
reste à démontrer 129 ! La Cour d'Appel fut sur ce point assez laconique,
et conclut que vu que la suspension a été légalement prolongée, il n'était
pas nécessaire de se prononcer sur la rétroactivité de la destitution 13°.

En matière de destitution

En matière de destitution, la procédure d'arbitrage prévue aux con-


ventions collectives de travail131 est exactement la même que celle prévue
par la suspension. Nous n'y reviendrons pas. Rappelons que comme
dans le cas de suspension, une lettre d'entente de 1969 du ministre délégué
à la Fonction Publique est venue apporter un modus vivendi quant à
l'application de cette disposition des conventions jusqu'à ce que la loi
de la Fonction Publique soit amendée ; ces amendements sont venus
confirmer les termes de la lettre d'entente m .

La destitution étant la mesure disciplinaire la plus rigoureuse qui


puisse être prise dans la Fonction Publique québécoise, les motifs sur
lesquels elle repose doivent être empreints de gravité. C'est ainsi que
dans le grief Léo Wharen133, la preuve révéla que l'employé dont le
gouvernement demande le congédiement a manifesté « une irresponsabilité
totale » et a été trouvé en état d'ébriété avancé à son travail. L'arbitre
n'eut aucune hésitation à confirmer la destitution de cet employé que
deux suspensions importantes et récentes n'avaient pas réussi à corriger.
Dans un autre grief semblable au précédent, le fait pour un employé de
vendre de l'alcool à des compagnons de travail et de garder cet alcool
sur les lieux du travail fut jugé repréhensible ; l'arbitre considéra qu'il

129 Voir Patrice GARANT, «Chronique de jurisprudence», 1970, 11 C. de D.


p. 170.
130 «Jugements récents», 1970, Il C. de D. p. 106.
131 Art. 19.04.
132 Lettre d'entente, in Convention Collective des Fonctionnaires, 1968-71,
p. 79 à la p. 83; voir aussi Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art.
61 tel que modifié par la Loi du Ministère de la Fonction Publique, L.Q. 1969,
Chap. 14, art. 38.
133 Grief de Léo Whalen du 15 octobre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-10-3.
488 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

s'agissait là d'un « manque aigu du sens de responsabilté » 134. Nous


pourrions multiplier ces exemples.
Plusieurs mesures de destitution ont été prises conformément à
l'article 55 de la loi qui interdit tout travail partisan lors des campagnes
électorales à moins que le fonctionnaire n'ait donné sa démission 135. La
jurisprudence arbitrale a tenté de définir la notion de travail partisan
en ces termes : « Sera considéré comme travail partisan: a) le fait de
poser le même geste, à savoir l'expression privée d'une opinion en matière
politique, à répétition, de multiples fois, dans des milieux divers, même
s'il procède de la seule initiative de celui qui la pose, b) l'expression
d'opinion politique proférée privément et librement par le fonctionnaire,
si elle s'accompagne d'une sollicitation de pressions en faveur d'un can-
didat ou d'un parti, sauf si elle a manifestement un caractère de taqui-
nerie, badinerie ou boutade. Ne sera pas considérée comme travail par-
tisan: l'expression privée d'une opinion en matière politique qui n'est pas
formulée à la demande du parti ou d'un candidat ou de l'agent ou orga-
nisateur de ceux-ci » 136. Ainsi le transport d'électeurs moyennant paie-
ment constitue un prolongement de l'organisation du candidat et de ce
fait entraîne la destitution 137. Mais la signature d'un bulletin de pré-
sentation n'est pas un travail partisan car,de par sa nature, le bulletin
ne contribue pas au succès de la cause d'un candidat ou d'un parti138.
Dans tous ces cas l'arbitre a estimé important que le plaignant connaisse
la nature exacte et la portée des actes qu'on lui reprocherait139.

D'autres faits peuvent entraîner la destitution, notamment les ab-


sences non motivées ; toute administration publique est aux prises avec
ce problème qui compromet souvent le fonctionnement sans défaillance
du service public. L'article 34.04 de la convention collective des fonc-
tionnaires stipule que pour toute absence de plus de trois jours., l'em-

134
Grief Bernard Bouchard du 30 juillet 1969, Cahier des décisions, dossier
4-4-17.
Pour d'autres décisions sur la destitution voir grief Maurice Bujold du 14 sept.
1969 ; Grief Jean-Jacques Trudel du 19 sept. 1969, Grief Fernand Desjardins du
7 janvier 1970, grief Jean-Yves Bélanger du 4 juin 1970.
135 Grief J. M. Boudrault du 26 février 1970.
136
Grief Romuald Mathieu du 25 mars 1969, Cahier des décisions, dossier
4-4-7.
137
Grief Albert Cardinal du 11 avril 1969, Cahier des décisions, dossier 4-4-9.
138 Grief Orner Bilodeau du 27 mai 1969, Cahier des décisions, dossier 4-4-14.
139
Grief Albert Lapierre du 28 avril 1969, Cahier des décisions, dossier 4-4-10.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 489

ployé doit produire un certificat médical attestant son incapacité physi-


que de travailler si l'employeur en fait la demande. Le texte de l'article
lui-même ne stipule aucune sanction, mais l'arbitre, en matière d'absen-
téisme, conclua au congédiement dans les cas où se trouvent réunis les
deux éléments suivants : si l'omission a été particulièrement fréquente ou
prolongée, et si l'employeur a donné une mise en demeure formelle
à l'employé ou encore s'il lui a imposé une première mesure disciplinaire
d'importance 14°.
Dans la Fonction Publique au Québec les arbitres ont toujours
estimé qu'ils jouissaient d'une certaine discrétion dans la détermination
et l'évaluation de la rigueur des sanctions. Ils ont même transformé des
destitutions en suspension s'ils jugeaient que la mesure appliquée était
disproportionnée par rapport à la gravité de la faute commise ou si la
preuve n'était pas satisfaisante pour justifier la destitution 141. Signalons
que depuis l'arrêt de la Cour Suprême dans l'affaire Port Arthur Shipping
Company du 1er octobre 1968, cette jurisprudence n'est plus valable142.
En effet, la Cour Suprême a décidé que dans un cas semblable le conseil
d'arbitrage avait à déterminer si le congédiement avait été fait pour une
cause raisonnable. Le conseil d'arbitrage ne pouvait pas substituer son
jugement à celui de la gérance pour réduire un congédiement en une
suspension, dès lors que la cause raisonnable ou juste avait été prouvée 143.
Pour palier à cette difficulté les conventions collectives ont été modifiées
de façon à normaliser cette situation en conférant expressément à l'arbitre
le pouvoir de transformer une destitution en suspension.
LES AUTRES MESURES DISCIPLINAIRES

Certaines mesures peuvent être prises dans le seul but de ramener


à l'ordre un employé que l'on ne veut pas suspendre ni destituer. Ces
mesures peuvent faire l'objet d'un grief.

140 Grief Gérard Paradis du 11 octobre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-10-2.
Grief Roland Bélisle du 8 juin 1970.
Grief Claude Renaud du 15 septembre 1969.
141 Grief Orner Couture du 22 octobre 1968, Cahier des décisions, dossier
1-10-5 ; Grief André Boutet du 20 mars 1969, Cahier des décisions, dossier 4-4-6 ;
Grieg Maurice Sawyer du 20 mai 1969, Cahier des décisions, dossier 4-4-12.
142 1969, S.C.R. 85 ; Régina v. Arthurs, ex parte Port Arthur Shipbuilding Co.
62 D.L.R. (2d) 342. Cet arrêt est commenté in (1969), 24, Relations industrielles
p. 199.
143 Grief Jean Renaud du 13 novembre 1969 ; grief Lévis Landry du 20 août
1969.
490 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 27, NO 3

Le refus d'avancement d'échelon est une mesure importante car elle


a un double effet et sur le traitement et sur le déroulement de la carrière
de l'employé. L'employé acquiert au service de l'État l'expérience que
vient récompenser l'avancement d'échelon. Voilà pourquoi nous ne pou-
vons considérer l'avancement d'échelon comme un droit mais comme un
privilège 144. Si l'employé ne l'obtient pas, il pourrait prétendre être l'objet
d'une mesure disciplinaire. Il devrait alors démontrer que ce refus vise
à punir un comportement ou un acte fautif. Cela ne sera guère facile
parce qu'habituellement c'est l'insuffisance du rendement que sanctionne
le refus d'avancement d'échelon. Il y a ici une différence entre la con-
vention collective des professionnels et les autres conventions ; dans la
première il y a toujours possibilité de soulever un grief si l'avancement
d'échelon n'est pas accordé 145 ; dans le second cas il faut qu'il s'agisse
d'une authentique mesure disciplinaire car ces conventions ne contiennent
aucune stipulation sur l'avancement d'échelon.

Sur demande du Gouvernement, la prolongation de la période de


probation 146 est accordée par la Commission de la Fonction Publique
pour une période n'excédant pas six mois car l'employé temporaire n'a
pas un droit strict à la permanence. Si nous nous référons à ce que nous
avons dit lorsque nous avons étudié la notion de grief, cette mesure pour-
rait faire l'objet d'un grief si elle avait une connotation disciplinaire. Cette
proposition est tout de même assez théorique car déjà les conventions
prévoient que si le gouvernement au terme de la période de probation ne
nomme pas l'employé à titre permanent, ne révoque pas sa nomination
à titre temporaire ou n'obtient pas de la Commission de la Fonction
Publique une prolongation de la période de probation, l'employé pourra
soulever un grief parce que le gouvernement ne se conforme pas à la
clause où il est stipulé que « l'employé » à titre temporaire sera nommé
à titre permanent s'il est maintenu en fonction 147. Donc l'employé, régi
par une convention collective a le droit de loger un grief si la décision
du gouvernement a pour but d'éluder l'application de cette clause.

144 Grief André Lefebvre du 5 décembre 1968, Cahier des décisions, dossier
2-2-4.
145 Convention collective des professionnels, art. 26 où il est stipulé que
l'avancement d'échelon sera sur rendement satisfaisant, accordé par le sous-chef
qui tiendra compte de la notation périodique faite sur l'employé.
146 Loi de la Fonction Publique, S.Q. 1965, chap. 14, art. 37.
147 Convention collective, art. 16.01.
L E DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 491

La notation au dossier est prévue dans la Convention Collective du


travail du syndicat des professionnels du gouvernement du Québec 148.
Cette notation peut nuire à l'employé dans ses avantages de carrière.
Comme c'est une mesure administrative prise en application de la con-
vention collective, l'employé pourra loger un grief s'il croit qu'il a été
injustement noté.
La mutation est une mesure prévue explicitement dans un seul cas,
celui des conseillers juridiques 149 et implicitement dans celui des profes-
sionnels 15° et des fonctionnaires 151. Cette mesure administrative tend à
favoriser « une très souhaitable mobilité inter-ministrérielle » 152. La mu-
tation ne saurait entraîner une diminution de traitement, non plus qu'une
perte d'avantages. Il est entendu toutefois, que si un employé régi par
une convention collective se croit lésé par de telles modifications, il peut
en faire un grief et, dans ce cas, il appartiendra à l'employeur de prouver
qu'il a agi de façon raisonnable. Toutefois si le fonctionnaire muté pré-
tendait que c'est à titre disciplinaire que cette mesure est prise contre lui,
il pourrait à notre avis soulever un grief, comme s'il s'agissait de toute
autre mesure disciplinaire.
Les conventions collectives mentionnent aussi les avertissements
écrits 153, qui peuvent être utilisés à titre disciplinaire. Si l'employé croit
que l'avertissement n'est pas mérité, il peut loger un grief suivant la pro-
cédure de règlement et d'arbitrage des griefs.
H reste encore une mesure disciplinaire qui est très rare, qu*on ne
retrouve dans aucun texte de loi ou conventions collectives, mais seule-
ment dans la jurisprudence : la rétrogradation. Dans les cahiers de déci-
sions, nous en avons retrouvé qu'un seul cas ; il s'agit d'un employé de
la Voirie provinciale qui a été rétrogradé alors qu'il avait précédemment
été chauffeur de camion, et que comme tel il venait d'avoir un accident
qui aurait été causé par sa faute et négligence 154. L'arbitre déclara que
le fait d'être rétrogradé à une date donnée, ne constitue pas un grief

148 Convention collective des professionnels, art. 26.02; règlement sur les con-
ditions de travail des conseillers juridiques, art. 26.02.
1 4 9 Règlement de la Commission, art. 16.01.
150 Convention, art. 8.00 et art.
151 Convention, art. 3.00.
152 Rapport de la Commission de la Fonction Publique, 1965, p. 13.
153 Convention, art. 19.02.
154 Grief Elisée Bouchard du 4 avril 1967, Cahier des décisions, dossier 3-8-1.
492 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

continu comme celui qui découlerait d'une mauvaise classification mais


un grief découlant d'une décision unique. Le grief a été rejeté parce qu'il
n'avait pas été présenté dans les délais, mais compte tenu de toutes les
circonstances de l'affaire, on peut présumer que l'arbitre aurait confirmé
la mesure prise par l'autorité compétente.

CONCLUSION GÉNÉRALE

Le droit disciplinaire dans la Fonction Publique du Québec est une


discipline jeune tout comme le droit de la Fonction Publique lui-même.
Il résulte d'un rapprochement du droit administratif traditionnel et du
droit du travail qui fournit ses mécanismes de protection juridictionnelle
notamment en faveur de la grande majorité des employés de l'État.

Au plan de la définition des règles qui doivent régir la conduite des


employés de l'État, le système québécois s'est grandement amélioré depuis
quelques années ; non seulement des textes adéquats ont été édictés, en
matière de conflits d'intérêt et d'exclusivité d'emploi notamment, mais la
jurisprudence a eu, elle aussi, sa part dans l'élaboration les principes et
règles visant à préciser notamment la portée du devoir obéissance hié-
rarchique ou celui d'intégrité.

C'est cependant au plan de la protection juridictionnelle, au plan du


contentieux disciplinaire, que s'est opérée la réforme la plus radicale chez
nous. Avant l'introduction de la convention collective avec les recours
qui lui sont propres, le fonctionnaire québécois n'était pas systématique-
ment à la merci de l'autorité hiérarchique, mais il s'agissait d'une pro-
tection très limitée et dont la réglementation n'est venue que tardivement.
Certes il ne nous a pas été possible d'évaluer la portée de la protection
accordée par la Commission de la Fonction Publique en matière de desti-
tution et de suspension parce que les dossiers de celle-ci sont secrets...
peut être pour cause. Il est cependant sûr et certain que l'introduction de
l'arbitrage obligatoire des griefs en faveur des fonctionnaires et ouvriers
qui sont des salariés au sens du Code du travail a été grandement béné-
fique.

Tout n'est évidemment pas parfait, loin de là. D'ailleurs l'améliora-


tion du droit disciplinaire ne signifie pas que du coup nous aurons une
Fonction publique disciplinée, mais il y a de fortes chances qu'il en soit
ainsi. Il nous semble que trois conditions doivent être réalisées pour que
cet objectif soit atteint ; il faut tout d'abord que les textes définissent adé-
LE DROIT DISCIPLINAIRE DE LA FONCTION PUBLIQUE 493

quatement les devoirs et obligaions des fonctionnaires ; il faut des agents


de la gestion du personnel responsables et clairvoyants ; il faut enfin que
les protections juricditionnelles soient appliquées par des juges ocmpé-
tents et conscients des impératifs essentiels du service public.

BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES GÉNÉRAUX
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2 vol.
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Commission de la Fonction Publique.
Journal des Débats, Assemblée Nationale du Québec.

ARTICLES
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494 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

LOIS
— Québec
S.Q. 1965, chap. 14, Loi de la Fonction Publique
L.Q. 1969, chap. 14, Loi du Ministère de la Fonction Publique
S.R.Q. 1964, chap. 141, Code du Travail
— Fédéral
S.RC, 1970, c. P-35, Loi sur les relations de travail dans la Fonction Publique
S.RC, 1970, c. P-32, Loi sur l'emploi dans la Fonction Publique
S.RC. 1970, c. C-34, Code criminel
S.RC. 1970, c. E-10, Loi sur l'administration financière.

RÈGLEMENTS

— Québec
1965:
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de sa nomination, Gazette Officielle de Québec, p. 1593.
1966:
A.C. 319 - B règlement de la Commission de la Fonction Publique relatif aux
agents de la gestion du personnel, Gazette Officielle de Québec, p. 1594.
A.C. 1659, règlement concernant les congés, Gazette Officielle de Québec,
p. 5443.
A.C. 1822, règlement concernant certaines conditions de travail des conseil-
lers juridiques et de procureurs de la Couronne, Gazette Officielle de Québec,
p. 5790.
A.C. 1714, règlement concernant les emplois ou fonctions d'un caractère occa-
sionnel et leurs titulaires, Gazette Officielle de Québec, p. 5451.
1967:
A.C. 2484, règlement concernant la classification et la rémunération des agents
de la gestion du personnel, Gazette Officielle de Québec, p. 2427.
A.C. 185, règlement concernant le classement et la rémunération des ouvriers
de la Fonction Publique, Gazette Officielle de Québec, p. 3795.
A.C. 1966-1713, règlement provisoire concernant la prolongation d'emploi des
fonctionnaires nommés à titre temporaire, Gazette Officielle de Québec, p. 1661.
A.C. 2483, règlement concernant le statut particulier des adjoints aux cadres
supérieurs, Gazette Officielle de Québec, p. 5953.
A.C. 1104 du 21 juillet 1967.
A.C. 2484, règlement concernant le statut particulier des cadres supérieurs,
Gazette Officielle de Québec, p. 5955.
Règlement 2696 : concernant les heures de travail et la rémunération du temps
supplémentaire, Gazette Officielle de Québec, p. 6515.
THE LAW OF DISCIPLINE IN THE QUÉBEC CIVIL SERVICE 495

1968:
A.C. 3412, règlement de la Commission de la Fonction Publique concernant le
statut particulier des attachés d'administration, Gazette Officielle de Québec, p. 752.
A.C. 3353, règlement de la Commission de la Fonction Publique, concernant
le statut particulier du personnel de maîtrise des ouvriers, Gazette Officielle de
Québec, p. 457.
1969:
A.C. 813, règlement de la Commission de la Fonction Publique, concernant
certaines conditions de travail de conseillers juridiques.

Fédéral :

Conseil du trésor, DORS 67-118, règlement sur les conditions d'emploi dans la
Fonction Publique.
Commission de la Fonction Publique, DORS, 67-129, règlement sur l'emploi dans
la Fonction Publique.
Commission des relations de travail, DORS 67-200, règlement et règle de procé-
dure de la Commission des relations de travail dans la Fonction Publique.

CONVENTIONS COLLECTIVES AU QUÉBEC :

Convention collective de travail 1968-1971, unité fonctionnaires.


Convention collective de travail, 1968-1971, unité ouvriers.
Convention collective de travail, 1968-1971, unité agents de la paix.
Convention collective de travail, 1968-1971, entre le gouvernement du Québec et
le syndicat des professionnels du gouvernement du Québec.

JURISPRUDENCE

Cahiers des décisions sur les conflits de relations de travail dans la Fonction Pu-
blique.

THE LAW OF DISCIPLINE IN THE QUEBEC CIVIL SERVICE


The purpose if this study is to throw some light on a chapter of public law
which has been almost ignored by lawyers and neglected by specialist of labor
relations in the public sector. What is called in European countries, the law of
discipline in the public service (le droit disciplinaire dans la fonction publique)
is composed firstly of an important chapter where are defined the principles of
that branch of the Law, such as the distinction between pénal repression and
disciplinary repression, the idea of a fault committed in the exercise of the fonctions.
The définition of the rules which governs the conduct of public agents can be
summarized under four headings. The rules flow from the personnality of the State-
employer, the spécial nature of the authority entreprise and the duties of the public
agent not only to the public but to the collectivity they are.
496 INDUSTRIAL RELATIONS INDUSTRIELLES, VOL. 2 7 , NO 3

The rule of government effectiveness.


The rule of hierarchical obédience.
The rule of professional secret.
The rule of integrity.
Thèse four rules are embodied in the laws, régulations, collective agreements
and orders that are considered as the sources of that branch of law. And thèse
texts will authorise the responsible of personnel management to take appropriate
measure to punish the servant that paid to their duty.
The second part of the study is concerned mainly with the régime of juridictional
or quasi-judicial protection offered to the public servant. The fondamental distinction
hère to be made is between employées covered by a collective agreement and the
others, mainly at the upper level of the Civil Service.
The servants not covered by a collective agreement are protected against
arbitrary dismissal by sec. 61 of the Civil Service Act : a written recommendation
must be given by the Civil Service Commission, following an inquiry at which
the employé implicated is entitled to be heard with his witness. If the servant is not
satisfied with that recommendations, he may appeal to the Cabinet. The servants
of that category are also protected to a certain extent by art. 59 against suspension
exceeding two months.
Compared to that protection, the civil servants in the bargaining units hâve
almost the same status as the « employée » under the Labour Code. The collective
agreements détermine the procédure which is open in case of dismissal, sus^pension
and of any other disciplinary measures causing préjudice to an employée.
The Law of Labour relations hâve greatly modified the traditional law of Civil
Service in Québec since 1965. Indeed other aspects hâve been the object of deep
reforms, but in the field of discipline the greatest achievement hâve been surely the
coming of collective agreements with the quasi-judicial protections called the
procédures settlement and arbitration of grievances.

INDEX ANALYTIQUE
C U M U L A T I V E INDEX
RELATIONS INDUSTRIELLES
INDUSTRIAL RELATIONS
Volume 1 — Volume 25
(1945-1970)
Rapport des — Proceedings of
CONGRÈS DES RELATIONS INDUSTRIELLES
(1946-1970)
Avant-propos — Forewords; A— Index alphabétique — Subject index; B-1 Index
méthodique — Broad Subject Headings Index; Liste des descripteurs génériques
— List of generic k e y w o r d s ; B - 2 Index méthodique des titres — Broad Subject
Heading Index of T i t l e s ; C— Index méthodique des ouvrages recensés — Broad Authors
of Book Reviews; E-Auteurs des articles et des recensions — Authors of the Articles
and Book Reviews; F— Références bibliographiques — Bibliographical Références.
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