La Conduite de L'instruction

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Fiche III-A-2: Conduite des investigations dans le cadre de

l’instruction

Le juge d’instruction a pour mission d’instruire « à charge et à décharge » (article 81 CPP). Il procède à
tous les actes d’information qu’il juge utiles à la manifestation de la vérité (articles 81 et 82 CPP).

Le juge d’instruction peut déléguer certains de ses pouvoirs d’investigation à des OPJ ou autres magistrats
par la voie de commissions rogatoires. La commission rogatoire ne peut prescrire que des actes
d’instruction se rattachant à l’infraction visée aux poursuites.

. Crim, 12 février 1985 : les investigations sur des faits différents se justifient si elles ont pour objet de
préciser les faits en cause et les buts poursuivis par leurs auteurs.

. Crim, 12 janvier 2005 : des faits nouveaux découverts à l’occasion de l’exécution d’une commission
rogatoire peuvent donner lieu à l’ouverture d’une enquête préliminaire ou de flagrance.

Les magistrats et OPJ commis exercent les pouvoirs du juge d’instruction dans les limites de la commission
rogatoire.

- Les OPJ ne peuvent pas procéder aux interrogatoires et confrontations du mis en examen (possible
pour auditions de la partie civile ou témoin assisté à la demande de ces derniers).

- Pour certains actes, la commission rogatoire doit expressément autoriser l’OPJ à effectuer un acte.

Le juge d’instruction fixe le délai dans lequel la commission rogatoire doit lui être retournée avec les
procès-verbaux dressés lors de son exécution. A défaut de délai fixé, la commission rogatoire et les procès-
verbaux doivent lui être transmis dans les 8 jours de la fin des opérations.

AUDITIONS, INTERROGATOIRES ET CONFRONTATIONS

Les OPJ agissant sur commission rogatoire peuvent placer un suspect en garde à vue durant l’instruction
(article 154 CPP). Le juge d’instruction assume alors le rôle et la fonction du Procureur de la République.

Le juge d’instruction réalise des interrogatoires pour la personne mise en examen, auditions pour les
témoins, partie civile et témoin assisté et confrontations lorsqu’il estime cela nécessaire à la manifestation
de la vérité (article 81 CPP).
Ces actes peuvent être réalisés à la demande des parties (article 82-1 CPP). Le juge d’instruction ne peut
procéder à une mise en examen sans avoir entendu les observations de la personne. Elle peut demander à
être entendue par le juge d’instruction lorsque 4 mois se sont écoulés depuis sa dernière comparution.

Le juge d’instruction fait citer toute personne dont la déposition lui paraît utile (article 101 CPP). Toute
personne citée comme témoin est tenue de comparaître. Si elle ne comparaît pas ou refuse de comparaître,
peut y être contrainte par la force publique (réquisitions du procureur).

La partie civile et le mis en examen peuvent demander au juge d’instruction l’audition d’un témoin en
présence de leur avocat (article 82-2 CPP). Le juge d’instruction peut procéder à des confrontations
individuelles ou collectives.

Le mis en examen et le témoin assisté mis en cause par plusieurs personnes peut demander la confrontation
individuelle avec chacune d’elles (article 120-1 CPP). Le juge d’instruction peut refuser mais son refus ne
peut être motivé par la seule raison qu’une confrontation collective est organisée.

Les parties ne peuvent être entendues, interrogées, confrontées qu’en présence de leurs avocats (sauf
renonciation expresse). Les avocats sont convoqués au plus tard, cinq jours ouvrables avant l’interrogatoire
ou audition (par lettre recommandé avec AR, télécopie avec récépissé, convocation verbale avec
émargement). Le dossier de la procédure est mis à leur disposition au plus tard 4 jours avant.

Après la 1ère comparution ou audition, le dossier est mis à leur disposition à tout moment durant les jours
ouvrables.

Les avocats peuvent se faire délivrer copie de tout ou partie des pièces, le cas échéant sous forme
numérisée (article 803-1 CPP) : délivrance dans un délai d’un mois à compter de la demande.

Les avocats peuvent transmettre une reproduction des copies obtenues à leur client, et les parties
dépourvues d’avocat peuvent demander une copie au juge d’instruction. Les clients s’engagent à ne pas
diffuser ces documents (article 114-1 CP).

Les interrogatoires menés par le juge d’instruction en matière criminelle doivent faire l’objet
d’un enregistrement audiovisuel sauf impossibilité technique (article 116-1 CPP).

CONSTATATIONS ET VÉRIFICATIONS

1. Transport sur les lieux


Si les nécessités de l’information l’exigent, le juge d’instruction et le greffier peuvent se transporter dans
l’ensemble du territoire national afin d’y procéder à tout acte d’instruction.

Il doit en aviser le Procureur de la République de son tribunal et de celui du ressort dans lequel il se rend :
Procès-verbal de transport énonçant les motifs (article 93 CPP).

Si les nécessités de l’information l’exigent, il peut aussi se transporter en territoire étranger afin de
procéder à des auditions (dans le cadre d’une commission rogatoire adressée à un État étranger). Il doit en
aviser le Procureur de la République de son tribunal et obtenir l’accord de l’état étranger.

2. Expertises

En enquête, les OPJ peuvent recourir à des personnes qualifiées pour réaliser des examens techniques et
scientifiques (articles 60 et 77-1 CPP).

Le juge d’instruction peut ordonner la réalisation d’une expertise d’office, sur demande du ministère
public ou des parties (article 156 CPP) : il désigne l’expert, ses missions et pose les questions techniques.

En cas de refus d’une demande d’expertise : il rend une ordonnance motivée dans le délai d’un mois.

L’expertise pénale n’est pas contradictoire.

Le juge d’instruction doit adresser une copie de son ordonnance de désignation d’expert aux parties et au
ministère public.

Les parties ont 10 jours pour demander au juge d’instruction de compléter, modifier les questions posées
à l’expert ou de lui adjoindre un expert de leur choix (article 161-1 CPP).

Exceptions :

- En cas d’urgence.

- Si la communication risque d’entraver l’accomplissement des investigations.

- Si l’expertise n’a pas d’incidence sur la détermination de la culpabilité.

- Si renonciation expresse des parties.

Le juge d’instruction peut demander à l’expert de rédiger un rapport provisoire qui sera notifié aux parties.
Les parties pourront adresser leurs observations ou dires (article 161-2 CPP). Après le dépôt du rapport, le
juge d’instruction notifie les conclusions de l’expert aux parties.
Il fixe un délai (15 jours minimum) pendant lequel les parties peuvent lui adresser des observations,
demande de complément d’expertise ou contre-expertise (article 167 CPP).

Le juge d’instruction peut accepter la demande ou la refuser (ordonnance motivée dans le délai d’un mois).
A défaut, possible saisine de la chambre de l'instruction.

LES INVESTIGATIONS INTRUSIVES

1. Perquisitions et saisies (articles 94 et suivants CPP)

Les perquisitions s’imposent aux intéressés, sans nécessité de recueillir de consentement. En revanche, la
présence de la personne (parents, alliés ou de deux témoins) est nécessaire.

Elles peuvent être pratiquées dans tous lieux où peuvent se trouver des objets ou données informatiques
dont la découverte serait utile à la manifestation de la vérité ou des biens dont la confiscation est prévue à
l’article 131-21 CP.

Respect des heures légales (21h à 6h perquisitions interdites,) sauf :

- réclamation de l’intérieur,

- consentement de l’intéressé (articles 95 et 96 CPP)

- autres exceptions (proxénétisme, stupéfiant et articles 706-91 CPP).

Les saisies peuvent porter sur des données informatiques nécessaires à la manifestation de la vérité (article
97 CPP).

Le juge d’instruction ne peut pas saisir les correspondances émises entre la personnes mise en examen et
son avocat sauf :

- Si elles ne concernent pas les droits de la défense (Crim, 7 mars 1994).

- Si elles permettent d’établir la participation de l’avocat (Crim, 18 juin 2003).

- Si elles sont relatives aux activités ayant donné lieu à sa mise en examen (Crim,5 octobre 1999).

Seuls les documents nécessaires à la manifestation de la vérité peuvent être saisis (Crim, 14 janvier 2003).
Le juge d’instruction peut aussi ordonner la saisie des biens pouvant faire l’objet d’une confiscation (saisie
pénale conservatoire), afin de garantir l’exécution de cette peine si elle est ultérieurement prononcée
(article 706-141 CPP).

2. Écoutes téléphoniques

Kruslin et Huvig c/ France, 24 avril 1990 : condamnation de la France en matière d’écoutes téléphoniques.

Les interceptions des correspondances émises par la voie des télécommunications sont possibles en matière
criminelle ou correctionnelle à 2 conditions :

- Si le crime ou délit puni d’une peine de prison 2 ans.

- Si les nécessités de l’information l’exigent.

Décision prise pour une durée de 4 mois maximum mais renouvelable. Le juge d’instruction ou OPJ sur
commission rogatoire transcrit la correspondance utile à la manifestation de la vérité et en dresse un procès-
verbal (versé au dossier).

Certaines correspondances sont protégées :

- Nullité des écoutes téléphoniques sur la ligne d’un avocat pour une conversation liée à l’exercice
des droits de la défense.

- Nullité des écoutes pratiquées sur la ligne d’un avocat sans information du bâtonnier.

- Nullité des écoutes pratiquée sur la ligne d’un magistrat (cabinet ou domicile) sans information du
1er procureur de la République ou Procureur Général de la juridiction où il réside.

- Nullité des écoutes pratiquées sur la ligne d’un député/sénateur sans information du Procureur de
la République de l’Assemblée concernée.

- Nullité des transcriptions de correspondances avec un journaliste permettant d’identifier une


source (violation de l’article 2 de la loi du 29 juillet 1881).

3. Sonorisation et fixation d’image

Installation d’un dispositif technique destiné à enregistrer des paroles prononcées à titre privé ou
confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics, ou à capter des images de personnes se trouvant
dans un lieu privé (article 706-96 CPP).
Ces mesures (autorisées par le juge d’instruction après avis du Procureur de la République) sont réservées
aux infractions de l’article 706-73 CPP lorsque les nécessités de l’information l’exigent, et pour une durée
de 4 mois maximum (renouvelable).

Pour l’installation du dispositif technique, le juge d’instruction peut autoriser l’introduction dans un
véhicule ou lieu privé à l’insu, sans le consentement de l’occupant des lieux y compris en dehors des heures
légales.

S’il s’agit d’un lieu d’habitation, l’installation du dispositif en dehors des heures légales doit être autorisée
par le JLD.

Les opérations d’installation, désinstallation et surveillance sont effectuées sous l’autorité et contrôle du
juge d'instruction.

- procès-verbal de chacune des opérations effectuées (mention de la date, heure de début et fin).

- enregistrements placés sous scellés fermés et détruits à l’expiration du délai de prescription .

Régime identique pour la captation de données informatiques : mise en place d’un dispositif technique
ayant pour objet d’accéder à des données informatiques et de les enregistrer.

4. Géolocalisation

La loi du 28 mars 2014 relative à la géolocalisation a validé la pratique au stade de l’enquête et de


l’instruction.

Utilisation d’un moyen technique destiné à la localisation en temps réel d’une personne, véhicule, objet
sans le consentement de son propriétaire ou possesseur.

Conditions : cette opération doit être exigée par les nécessités :

- D’une enquête/instruction relative à un délit de terrorisme ou d’évasion puni d’au moins 3 ans de
prison.

- D’une enquête/instruction relative à un crime, délit puni d’au moins 5 ans de prison.

- D’une enquête/instruction de recherche des causes de la mort, disparition (4 mois maximum,


renouvelable), recherche d’une personne en fuite.

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