9parcours - Personnages en Marge, Plaisirs Du Romanesque

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Parcours : Personnages en marge,

plaisirs du romanesque
Abbé Prévost, “Manon Lescaut” (1731)
Extrait du coup de foudre

Intro:
Antoine François Prévost dit Abbé Prévost, romancier de l’amour
fou et auteur d'une oeuvre romanesque considérable du XVIIIème siècle
n’a cessé d’éprouver par lui-même la force de passions, des angoisses
et des désirs qu’éprouvent ses personnages en marge dont il peint l’âme
humaine de leur déchéance progressive. Il publie en 1731 Manon
Lescaut, un roman à forte composante autobiographique où il narre
l’histoire du jeune Des Grieux qui sacrifie tout, honneur, famille, au
vertige de la passion amoureuse pour la belle et libertine Manon.
L’extrait soumis à l’analyse appartient à la première partie de
l'œuvre, l’incipit qui peint l’instant de la première rencontre, raconté par
Des Grieux lui-même, et décident de la naissance d’un amour fatal pour
la belle Manon.

Lecture expressive:

Projet de lecture: Comment l’auteur renouvelle- t-il le topos de la


rencontre amoureuse?

Mouvement:
Donc tout d’abord après avoir analysé les circonstances hasardeuses de
la rencontre de la ligne 1 à 5, on s'intéressera au coup de foudre bien
raconté et bien mis en scène dans un second mouvement de la ligne 6 à
15, pour achever l’étude avec la conversation étonnante entre DG et
Manon, et l’annonce d’une fin funeste dans ce dernier mouvement de la
ligne 16 à la fin.

Analyse linéaire:

J'avais marqué le temps de mon ● “J’avais marqué” = plus que parfait


départ d'Amiens. Hélas ! que ne le utilisé pour montrer que cette action
marquais-je un jour plus tôt ! était prévue, mais ce qui était prévu
J'aurais porté chez mon père vas être annulé par la rencontre de
toute mon innocence. Manon
La veille même de celui que je ● “Que ne le marquais-je un jour plus
devais quitter cette ville, étant à tôt !” = souligne le regret +déception
me promener avec mon par rapport aux conséquences de ce
ami, qui s'appelait Tiberge, nous départ + accentuée par interjection
vîmes arriver le coche d'Arras, et “Hélas” et “Jaurais” conditionnel =
nous le suivîmes par curiosité mode du regret et par le verbe à
jusqu'à l'auberge où ces voitures l’imparfait “marquais” qui montre
descendent. Nous n'avions point regret de l’avoir rencontré
d'autre motif que de savoir de ● “Le temps de mon départ d’Amiens”
quelles personnes il était rempli. , “cette ville” + “La veille”, c’est la
situation spatio-temporelle
expliquant les circonstances de
rencontre
● “toute mon innocence” = montre sa
bonne foie souligné par “toute”= naïf
à 100% et cela montre qu’il ne l’est
plus depuis qu’il a rencontré Manon
● Passage de l’imparfait au passé
simple “vîmes, suivîmes” souligne
une action de premier plan et
montre que l’aventure démarre
● “Nous n'avions point d’autre motif
que de savoir” + “par curiosité”
=CCM nous montre que cette
rencontre est vraiment hasardeuse

Il en sortit quelques femmes qui ● Idée de distinction :


se retirèrent aussitôt ; mais il en - opposition par le biais de la
resta une fort jeune, qui s'arrêta conjonction de coordination
seule dans la cour, pendant qu'un “Mais” entre “quelques
homme d'un âge avancé, qui femmes” et “une fort jeune”
paraissait lui servir de conducteur, montre que Des Grieux ne
s'empressait pour faire tirer son regarde qu’elle = distinction
équipage des paniers. Elle était si - ”il en resta une, fort jeune”,
charmante, que moi, qui n'avais restriction: focus sur elle
jamais pensé à la différence des - ”seule” elle est singulière
sexes, et à qui il n'était peut-être ● Proposition circonstancielle de
jamais arrivé de regarder une fille temps (l.8 à 11) → pendant que : un
pendant une minute, moi, dis-je, serviteur fait de son mieux pour
dont tout le monde admirait la satisfaire cette femme ; elle est
sagesse et la retenue, je me l’objet d’attentions particulières idée
trouvai enflammé tout d'un coup accentuée par “s’empressait”
jusqu’au transport. J'avais le ● Autoportrait mélioratif, “moi”(x2) +
défaut naturel d'être proposition subordonnées relatives
excessivement timide et facile à insistant sur le fait qu’il est sage et
déconcerter ; mais loin d'être innocent et qu’il n’a jamais eu de
arrêté alors par cette faiblesse, je
m'avançai vers la maîtresse de pensées impures + “admirât”
mon cœur. (champ lexical de la retenue)
● ”Elle était si charmante que je me
trouvai enflammé tout d’un coup
jusqu’au transport” = hyperbole + “la
maitresse de mon coeur “ +
adverbe d’intensité “si” si…que :
conséquence = ardeur des
sentiments
● “charmante” vient de charme qui
vient de “carmen” en latin qui est le
chant de séduction par excellence
● Retour aux caractéristiques morales
de Des Grieux, il est timide,
influençable, naïf, mais il combat sa
timidité pour parler à Manon car son
“amour” pour elle est plus fort

Quoiqu'elle fût encore moins âgée ● Discours indirect nous permet pas
que moi, elle reçut le compliment d’en apprendre bcp sur manon “Elle
honnête que je lui fis sans paraître me répondit” → cela nous montre
embarrassée. Je lui demandai ce que c’est la version de Des Grieux.
qui l'amenait à Amiens, et si elle y Toute cette conversation est
avait quelques personnes de rapportée du point de vue de DG
connaissance. Elle me répondit ● “ingénument” : cet adverbe montre
ingénument qu'elle y était peut-être que DG croit déjà tout ce
envoyée par ses parents pour être qu’elle dit… car on comprend très
religieuse. L'amour me rendait vite qu’elle est tout sauf ingénue
déjà si éclairé, depuis un moment (“son penchant aux plaisirs”)
qu'il était dans mon cœur, que je ● Portrait ambivalent : jeune “encore
regardai ce dessein comme un moins âgée que moi “ mais pas
coup mortel naïve et aussi expérimentée et
pour mes désirs. Je lui parlai assurée “son penchant au plaisir” +
d'une manière qui lui fit “plus expérimentée que moi”
comprendre mes sentiments, car ● Manon soumise à ses parents : “
elle était bien plus expérimenté qu’elle y était envoyée par ses
que moi ; c'était malgré elle qu'on parents” + qu’on l’envoyait au
l'envoyait au couvent, et pour couvent” ,passif et emploi pronom
arrêter sans doute son penchant personnel objet (l’envoyait) le
au plaisir, qui s'était déjà déclaré ; montrent
et qui a causé dans la suite tous ● “Mes désirs” + “l'amour” énonce les
ses malheurs et les miens. sentiments qu’il ressent : une
attirance physique assumée
● Comparaison “comme un coup
mortel pour mes désirs” nous
montre que DG est totalement sous
l’emprise de Manon
● “qui a causé dans la suite tous ses
malheurs et les miens” = avenir de
mauvaise augure présageant une
mauvaise fin, impossible à éviter
(aucune issue possible) +
déterminant “tous” qui insiste sur le
fait que les mésaventures
(malheurs) vont être nombreux

Conclusion:
Ainsi, Abbé Prévost réussit dans cet extrait de l’incipit de son
roman Manon Lescaut à raconter la rencontre amoureuse entre le
chevalier Des Grieux et Manon à travers un double regard: celui du
jeune narrateur dominé par la passion et celui du narrateur adulte qui
lance plutôt un regard critique mais bienveillant sur les errances de sa
jeunesse et rend l’intrigue plus complexe y pique la curiosité du lecteur:
la scène décrit l’état intense de l’amour de Des Grieux lors d’une
rencontre déterminante, dans une rue anodine, lors d’une conversation
qui dessine un portrait ambivalent de Manon, et où s’érige un obstacle,
celui d’une morale religieuse, incompatible avec le coeur et le “penchant
au plaisir” de Manon. La rencontre scelle alors le destin des
personnages entre amour et souffrance et annonce déjà la tragédie.

Ouverture:
Nous retrouvons également la scène de rencontre constituant le
topos du coup de foudre dans l’incipit de la Princesse de Clèves, de
Mme de la Fayette publiée en 1678 où elle aborde la première rencontre
au bal des deux protagonistes , la princesse de Clèves déjà mariée et le
Duc de Nemours et qui à travers un simple regard, s’avèrent fascinés
l’un pour l’autre et annonce l’aspect dramatique de l’intrigue et suscite la
curiosité du lecteur.

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