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La politique foncière agricole en France :

analyses et propositions d’AGTER et de Terre de Liens

Préserver et partager
la terre

© T. Martin/P.M. Blanc

Une politique foncière en faveur d’une transition écologique :


- pour préserver et améliorer les fonctions écologiques
des espaces agricoles et forestiers
- pour créer de l’emploi, de la valeur ajoutée, et mieux
la partager.
Novembre 2018
Table des matières
I Contexte foncier........................................................................................................................3
II Les espaces agricoles et forestiers : un Commun de l’humanité.............................................4
II-1 Les espaces agricoles et forestiers : des espaces multifonctionnels, interdépendants à
prendre en compte comme un tout........................................................................................4
II-2 les espaces agricoles et forestiers : un Commun sous pression.......................................5
III Commun, propriété foncière agricole, unité de production agricole.....................................8
III-1 Commun et propriété foncière agricole...........................................................................8
III-2 Propriété foncière, unité de production agricole, accès aux droits d’usage....................8
III-3 Les unités de production agricole....................................................................................9
III-4 Inégalités dans l’accès aux droits l’usage de la terre et freins à l’installation................11
IV Les objectifs d’une loi foncière.............................................................................................13
V Mesures d’une politique foncière..........................................................................................14
V-1 La préservation des espaces agricoles et forestiers et l’amélioration de leurs fonctions
écosystémiques.....................................................................................................................14
V-2 la régulation foncière......................................................................................................17
V-3 Le financement du foncier et des outils de régulation...................................................20
VI Conclusion.............................................................................................................................23
ANNEXE 1. La biodiversité du sol, un enjeu majeur pour les pratiques agricoles. Extrait de
« Plaidoyer pour des politiques agricoles actives » de Jacques Loyat et Thierry Pouch
(éditeur : France Agricole éditions)...........................................................................................24
ANNEXE 2 : Prévision d’évolution des rendements agricoles liée au changement climatique au
XXIe siècle..................................................................................................................................26
ANNEXE 3 : Chiffres sur les dynamiques de l’artificialisation...................................................27
ANNEXE 4 : Evolution des structures de production agricole en France..................................28
ANNEXE 5 Valeur ajoutée des OTEX et évolution de leurs surfaces.........................................29
ANNEXE 6 : La formation des prix fonciers...............................................................................30

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I Contexte foncier
Aujourd’hui, force est de constater que les cadres législatifs et réglementaires n’encadrent
pas suffisamment les dynamiques foncières et permettent d’une part l’extension des surfaces
imperméabilisées, la dégradation des sols et de la biodiversité, d’autre part la concentration
des terres agricoles en un nombre toujours plus réduit d’unités de production agricole. C’est
pourquoi il devient nécessaire de proposer une nouvelle politique foncière.
La démarche se situe au moment de la préparation de la réforme de la Politique Agricole
Commune pour 2020. Elle intervient alors que les instances européennes s’interrogent sur
les conséquences de la concentration des terres en Europe1.
Elle se déroule dans un contexte où un nombre croissant de citoyens s’intéresse à la qualité
de son alimentation en lien avec les modes de production et leurs impacts
environnementaux. D’ailleurs les consommateurs orientent leurs achats, de plus en plus, vers
des produits bio, artisanaux, de proximité, pour des œufs de plein air, pour une alimentation
moins carnée, moins sucrée, avec moins d’additifs, entre autres.
Elle vient après de nouvelles alertes de scientifiques sur l’urgence d’arrêter le réchauffement
climatique ainsi que la sixième érosion massive de la biodiversité, deux sujets qui concernent
spécifiquement les usages des espaces agricoles et forestiers2.
L’un des enjeux de cette nouvelle politique foncière est de poser les bases d’un système
agricole durable en ce qui concerne les usages des espaces naturels, agricoles et forestiers,
dans la perspective d’une transition vers une alimentation durable, condition indispensable à
la survie de l’humanité.
Dans cette perspective, avant de proposer des orientations pour cette nouvelle politique
foncière, les liens entre les espaces agricoles et forestiers et l’humanité sont rappelés.

1 cf. la communication interprétative de la Commission Européenne sur l’acquisition de terres agricoles et le


droit de l’Union Européenne, 2017/C 350/05, suite au rapport du Comité Economique et social Européen de
2015 et à la résolution du Parlement Européen du 27 avril 2017 sur « l’état des lieux de la concentration agricole
dans l’Union européenne : comment faciliter l’accès des agriculteurs aux terres ? »
2 Selon le bilan 2018 de l’Observatoire national de la biodiversité, 180 000 espèces sont en danger en France,
notamment en raison de l’usage de pesticides et de l’artificialisation des sols.

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II Les espaces agricoles et forestiers : un Commun de l’humanité
II-1 Les espaces agricoles et forestiers : des espaces multifonctionnels,
interdépendants à prendre en compte comme un tout
Les espaces agricoles et forestiers permettent le développement des végétaux (plantes
annuelles, pluriannuelles, arbres) qui transforment l’énergie solaire en biomasse grâce à la
photosynthèse. Ces espaces englobent le sol dans toutes ses composantes : les matières
minérales (argile, limon, sable), l’eau, l’air, la matière organique, qui s’y trouvent, la flore
(macro et micro) et la faune (macro et micro) qui s’y développent. Dans une première
approche, il importe de considérer les espaces agricoles et forestiers comme un tout pour
plusieurs raisons. Ces espaces présentent des usages réversibles : une parcelle forestière
peut être déboisée, cultivée puis reboisée. De nombreux espaces permettent à la fois la
production de bois et de biens alimentaires telles que les parcelles sylvopastorales et
agroforestières, les vergers. Les espaces boisés, arborés, interagissent avec les espaces
agricoles au niveau de la biodiversité, des échanges de minéraux, de la lutte contre l’érosion ;
les haies des régions bocagères assurent diverses fonctions bénéfiques à la production
agricole.
Les espaces agricoles et forestiers assurent de nombreuses fonctions qui permettent la vie de
l’humanité. On peut citer, entre autres, les fonctions :
- de production de biomasse (biomasse alimentaire, énergétique, pharmaceutique,
artisanale, industrielle, …),
- de régulation, de filtration des flux d’eau,
- de réservoirs d’eau, au profit notamment des plantes,
- de stockage de carbone, essentielle dans la lutte contre le réchauffement climatique,
- de stockage d’éléments minéraux nécessaires à la vie des plantes,
- d’accueil de la biodiversité remarquable et ordinaire, qui est à la base de
l’agroécologie, assure la pollinisation, constitue un réservoir de gènes (cf. annexe 1),
- de support d’activités récréatives et touristiques,
- de représentations humaines constituant d’identités et de pratiques culturelles,
notamment les paysages.
Ces multiples fonctions sont interdépendantes. Une parcelle a un potentiel de production de
biomasse d’autant plus important que sa matière organique, sa réserve utile en eau, son
activité biologique sont importantes (dans une certaine limite). Une parcelle n’assure donc
pas seulement une fonction de production de biomasse et doit être gérée pour assurer
toutes ses nombreuses fonctions écosystémiques.
Globalement, à l’échelle mondiale, le réchauffement climatique perturbe la croissance des
végétaux ; il entraîne une baisse des rendements (cf annexe2). Cette baisse sera d’autant plus
forte que le réchauffement sera élevé. Il est donc impératif de le stopper le plus rapidement
possible. Il convient de favoriser le stockage du carbone dans la végétation, notamment dans
les arbres, et les sols ; l’agroforesterie peut le favoriser. Par contre, toute destruction
d’espaces agricoles ou forestiers diminue leur capacité de stockage, tout comme l’extension
des surfaces agricoles au détriment des surfaces forestières 3. Le réchauffement climatique ne

3 la conférence de Bali de 2007 a bien conclu à la nécessité d’arrêter le déboisement

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s’arrêtant pas aux frontières, cette contrainte mondiale est aussi une contrainte européenne
et française4.
A noter que le réchauffement climatique augmente la vitesse de minéralisation de la matière
organique ; plus il fera chaud, plus il sera difficile d’augmenter la matière organique, c’est à
dire la fertilité des sols5. Raison de plus pour agir significativement dès maintenant.
Aussi pour faire face aux enjeux alimentaires et de survie de l’humanité, une politique
foncière doit prendre en considération la multifonctionnalité des espaces agricoles et
forestiers.

II-2 les espaces agricoles et forestiers : un Commun sous pression


Les fonctions des espaces agricoles et forestiers citées ci-dessus sont indispensables à
l’humanité dans la mesure où chaque être humain doit, pour vivre, pouvoir y accéder
directement ou indirectement.
Le bénéfice de la fonction de production de biomasse des espaces agricoles présente un
caractère « rival » : le droit d’usage d’une parcelle attribué à une personne ne peut l’être à
une autre, il y a « rivalité ». Puisque les espaces agricoles et forestiers sont limités 6 et qu’ils
présentent un caractère « rival » alors que toute personne doit avoir accès directement ou
indirectement au bénéfice de leurs fonctions, ils constituent un Commun.
Ces espaces agricoles et forestiers sont sous pression (cf. annexe 3). Les sols font l’objet de
diverses menaces : perte de matière organique, érosion, contamination, tassement, perte en
biodiversité, salinisation, acidification et imperméabilisation. Si les premières menaces
dégradent la qualité des sols agricoles et forestiers, la dernière mène à leur destruction. Au
cours des dernières décennies, les sols artificialisés annuellement (dont plus des trois quarts
sont imperméabilisés) en France n’ont cessé d’augmenter 7 : 54 000 ha/an entre 1980 et
1992, 61 000 entre 1992 et 2003, et jusqu’à plus de 80 000 à la fin de la décennie 2000. Avec
la crise financière de 2008, l’artificialisation des terres s’est ralentie puis elle a retrouvé un
rythme de 50 000 à 60 000 hectares par an. En considérant qu’un département dispose de
300 000 ha agricoles en moyenne, on peut considérer qu’en 5 à 6 ans les surfaces agricoles
d’un département disparaissent. De plus, l’imperméabilisation, liée à l’extension des villes
(pour le logement et les activités économiques) et à l’extension des infrastructures de
transport, se fait trop souvent sur les meilleures terres en termes de réserve utile en eau.
Par ailleurs, les propriétaires de terres en limite d’urbanisation ont tendance à anticiper le
changement d’usage de leur terrain, dans la perspective de la plus-value financière afférente.
Ceci amène à un enfrichement important en zone périurbaine 8, qui bénéficie peu à la
4 en France, la déprise agricole qui se traduit par l’enfrichement et à terme le boisement de certaines terres est
un facteur d’atténuation des émissions de carbone, néanmoins largement insuffisant
5 ainsi les sols des climats tempérés enregistrent des taux de matière organique plus forts que les sols des
climats tropicaux
6 Pris dans leur ensemble, il ne se crée pas de nouveaux espaces agricoles et forestiers. Il est possible de
reconstituer des sols à des coûts économiques et environnementaux très importants, mais cette action ne peut
être que marginale au regard des besoins globaux.
7 Tous ces chiffres proviennent de calculs sur les données de TERUTI du Ministère de l’Agriculture
8 Par exemple, selon Nantes Métropole 2 % de sa surface agricole utile est recouverte par des friches récentes et
4 % par des friches ligneuses plus anciennes : https://www.nantesmetropole.fr/medias/fichier/rapport-

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biodiversité, laissant les terrains libres au développement d’espèces floristiques
envahissantes9 échappées des jardins et des espaces verts urbains (herbe de la pampa,
baccharis, renouée du japon, buddleia, etc.)10.
Déjà, il convient de considérer que les espaces agricoles et forestiers sont insuffisants pour
les générations futures. Ces espaces fournissent 97% des calories consommées par
l’humanité et 93 % des protéines11. Les ressources marines offrent le complément. Comme il
n’est pas envisageable d’augmenter la consommation des ressources halieutiques sans
risquer de conduire à leur épuisement, la nourriture de l’humanité dépendra essentiellement
des végétaux terrestres. Pour lutter contre le réchauffement climatique, il faudrait plus de
carbone dans les sols et les arbres ; de même pour lutter contre l’érosion de la biodiversité, il
faudrait plus d’espaces, espaces productifs compris, qui y soient consacrés. Bref, nous ne
pouvons plus nous permettre de détruire des espaces agricoles et forestiers. Toute
destruction de ces espaces accentue la difficulté d’une transition écologique. Toute
destruction de ce qui nous fait vivre va à l’encontre de cette nécessaire transition. Comment
pouvons-nous demander aux Brésiliens de stopper la déforestation de la forêt amazonienne,
en partie conséquence des achats d´aliments pour le bétail et d’agrocarburants pour
l’Europe, quand nous continuons à détruire des espaces agricoles et forestiers ? Comment
pouvons-nous continuer à détruire les espaces qui nous font vivre quand, à l’échelle de
l’Europe, en bilan net, nous importons l’équivalent de la production de 35 millions
d’hectares, soit le cinquième de la surface agricole européenne ?
Comme pour lutter contre le réchauffement climatique nous ne pouvons diminuer le stock
de carbone des sols et des arbres, comme les rendements ne vont pas augmenter à cause du
réchauffement climatique, nous ne pouvons pas augmenter les surfaces agricoles (non
arborées). La conclusion est qu’il faut arrêter le plus rapidement possible la destruction des
sols du fait de l’artificialisation des espaces naturels, agricoles et forestiers.
Les concurrences entre les productions alimentaires et non alimentaires (notamment
énergétiques) accentuent encore les difficultés pour satisfaire les besoins alimentaires futurs.
Il en est ainsi pour la production d’agrocarburants, l’implantation, de panneaux
photovoltaïques en plein champ et l’usage récréatif des espaces agricoles (infrastructures
touristiques, terrains de motocross, …).
Tout espoir n’est cependant pas perdu. Des études récentes suggèrent que les surfaces
agricoles actuelles en France et en Europe pourraient permettre une relative autonomie
alimentaire en pratiquant l’agroécologie, tout en anticipant les évolutions de population
jusqu’en 2050, moyennant une évolution des régimes alimentaires des Européens 12 et en
luttant contre le gaspillage alimentaire.

presentation-16-friches_1513953843533.pdf
9 https://inpn.mnhn.fr/programme/especes-exotiques-envahissantes
10 Plus on se rapproche de l’espace urbain, plus les friches hébergent des espèces exotiques et invasives et
moins d’espèces indigènes. Voir le projet DUE : Délaissés Urbains et Espèces envahissantes de l’Université de
Tours (UMR CITERES) mené par MARION BRUN, FRANCESCA DI PIETRO et SABINE GREULICH
11 Walter C, Bispo A, Chenu C, Langlais-Hesse A, Schwartz C ; « Les services écosystémiques des sols » p 56 et 57
in Cahier Déméter n°15 Agriculture et Foncier ; 2015
12 Voir les scénarios Afterre (afterres2050.solagro.org) ou TYFA (iddri.org/fr/projet/tyfa)

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Cette relative autonomie ne pourra être atteinte et perdurer que si le réchauffement
climatique est fortement contenu et si nous arrivons à recycler la matière organique pour
maintenir la fertilité des sols.

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III Commun, propriété foncière agricole, unité de production agricole
III-1 Commun et propriété foncière agricole
Au cours de l’histoire, les sociétés humaines ont établi et fait évoluer une grande variété de
règles d’usage des espaces agricoles et forestiers. Aujourd’hui, en France, comme ailleurs en
Europe, les droits d’usage des espaces agricoles et forestiers relèvent en grande majorité du
régime de la propriété foncière.
Un propriétaire d’un terrain agricole détient le droit d’usage d’un espace délimité (usus), le
droit de céder temporairement ce droit à autrui contre rémunération (fructus), et le droit de
vendre, de donner et de léguer en héritage (abusus). La propriété foncière agricole se révèle
être la propriété d’un droit ou de droits d’usage d’espaces agricoles. et non la propriété du
matériau ou de la ressource « sol ». En France, un propriétaire foncier ne détient pas le droit
de construire sur sa parcelle sans autorisation administrative ; il n’a pas non plus le droit de
vendre le matériau « sol »13 ; il ne peut en faire un usage prohibé par la loi. La réglementation
environnementale tend d’ailleurs à encadrer le droit d’usage agricole tant pour garder un
potentiel de production agricole que pour maintenir ou améliorer les fonctions écologiques
des espaces agricoles. La déclaration des droits de l’Homme de 1798 qui proclame dans le
contexte de la révolution française le « caractère inviolable et sacré de la propriété »,
notamment foncière, affirme en même temps ses limites et la nécessité de l’encadrer par « la
nécessité publique, légalement constatée » 14. La propriété foncière absolue n’a en fait jamais
existé, ni avant ni après la révolution française.
Le propriétaire d’un terrain agricole pourrait être considéré comme délégataire de la
« gestion raisonnable » de l’espace. L’article L101-1 du code de l’urbanisme précise bien que
le territoire français est le patrimoine commun de la nation. Au-delà du vocabulaire et des
définitions, ce qui importe bien ce sont les contenus des droits d’usage et leurs modalités de
transferts.

III-2 Propriété foncière, unité de production agricole, accès aux droits d’usage
On accède au droit d’usage agricole de la terre :
- par héritage
o de terres libres de location, ou de terres louées si le bailleur détient un droit
de reprise dans le cadre du statut du fermage,
o de baux ; aujourd’hui en France, les baux sont, de fait, cessibles d’une
génération à l’autre, le droit de reprise par les propriétaires étant strictement
encadré par la loi,
- par accès aux marchés des droits d’usage de la terre agricole via
o le marché de la terre agricole,
o le marché des locations,

13 Pour pouvoir vendre les matériaux constituant le sol, il faut obtenir un permis d’extraction régi par le Code
minier.
14 Art. 17. La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la
nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable
indemnité.

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o et, depuis quelques décennies, le marché des parts de sociétés qui permet
d’accéder aux droits d’usage agricole des biens en propriété ou en fermage de
cette société.
On peut accéder également au droit d’usage par le mariage.
Le propriétaire foncier, qui peut céder temporairement son droit d’usage, se distingue bien
alors du propriétaire de l’unité de production et des autres moyens de production
(équipements, cheptel ,..) . Ce dernier est la personne, physique ou morale, qui dispose, à un
moment donné, du droit d’usage agricole d’un ensemble de biens agricoles par la propriété
ou le bail.
Par ailleurs, le développement du recours à l’entreprise de travaux agricoles de la part de
propriétaires fonciers ou de fermiers, pour l’ensemble du cycle de production agricole, donne
à l’entreprise en question un accès direct au foncier. L’entreprise de travaux agricoles qui, via
des contrats de prestations de service, assure les pratiques culturales, l’achat et l’usage des
intrants, voire la commercialisation des produits agricoles et les demandes de subvention,
pourrait être considérée comme un fermier ou un métayer dans la mesure où la
rémunération du propriétaire est fixe ou que les bénéfices sont partagés, selon les clauses
des contrats, en dehors du statut du fermage. Certaines entreprises de travaux agricoles
assurent l’ensemble des pratiques culturales sur plusieurs milliers d’hectares.
Par ailleurs, il convient de souligner que des producteurs agricoles peuvent être de simples
exécutants, via une contractualisation déséquilibrée par des firmes agroalimentaires ou
d’autres acteurs qui contrôlent l’aval et l’amont de la filière agricole.

III-3 Les unités de production agricole


La dernière enquête structure du SSP (Service statistique et de prospective du Ministère de
l’Agriculture) permet de connaître l’évolution des structures des unités de production entre
2000 et 2016.
En seize ans, le nombre d’unités de production agricoles a reculé de plus d’un tiers. Les
unités de production dont la totalité du capital d’exploitation (hors foncier) appartient aux
producteurs (unités de production individuelles et GAEC15) ont vu leur nombre chuter de 43%
et leurs surfaces passer de 76 à 60 % du territoire agricole. Dans le même temps, les EARL
(entreprises agricoles à responsabilité limitée), dont le capital peut être détenu jusqu’à 50%
par des non-agriculteurs, ont augmenté en nombre de 40% quand leur surface a progressé
de 65%. Elles utilisent désormais 28 % de la surface agricole nationale contre 17% en 2000.
Sur la même période, les SCEA (société civile d’exploitation agricole) et autres SA (société
anonyme), dont le capital n’est soumis à aucune contrainte en termes de répartition entre
agriculteurs et non-agriculteurs, ont pratiquement doublé leurs surfaces pour atteindre les
3,3 millions d’hectares (12% du territoire agricole national) ; en nombre, ces unités de
production ont augmenté de plus de 50%. Au final, il y a de moins en moins d’unités de
production et leurs surfaces sont de plus en plus grandes (cf. annexe 4).
Si le mouvement de concentration des terres, initié à la fin du XIXe siècle, s’est d’abord opéré
presque exclusivement entre structures familiales ou paysannes, il se poursuit aujourd’hui au
profit de structures dont tout ou partie du capital peut être financé par des personnes ne
participant pas au travail agricole.

15 Groupement agricole d’exploitation en commun.

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Dans le même temps, on constate que, dans les SCEA et SA, le travail familial est minoritaire
par rapport au travail salarié alors que dans les unités de production individuelles et les
GAEC, il procure 85% du travail (chiffres 2010).
De plus, les statistiques officielles surestiment le nombre d’unités de production : une même
personne (physique ou morale) peut détenir plusieurs sociétés d’exploitations, et des
personnes, considérées comme chef d’exploitation « sur le papier », recourent pour
l’ensemble des travaux agricoles à des entreprises spécifiques. Les statistiques officielles
sous-estiment ainsi la concentration des terres.
Sous l’effet de divers facteurs, l’agriculture française, en tendance générale, comme les
autres agricultures européennes, a connu une spécialisation régionale des productions, une
spécialisation des unités de production, une simplification des systèmes de production, la
substitution du travail par du capital (moto-mécanisation, robotisation, automatisation) avec
un recours accru à des salariés au statut de plus en plus précaire. L’unité de production se
concentre sur les quantités de biens agricoles marchands produites sans prendre en compte
les liens entre la fonction productive des terres et toutes les autres fonctions, notamment
celles d’accueil de la biodiversité ou de stockage du carbone. L’augmentation de la taille des
parcelles avec la suppression des haies, le retournement de prairies en pente avec un
accroissement de l’érosion, l’adaptation des parcelles aux machines et non l’inverse,
l’entretien défaillant des haies restantes qui sont simplement élaguées mécaniquement en
largeur et en hauteur, et la diminution de la matière organique dans les sols des systèmes de
grande culture attestent de cette évolution. De leur côté, les espaces difficilement
mécanisables ne sont plus entretenus, notamment en zones humides ou en zones de
montagne. Ce délaissement favorise la fermeture des paysages et la disparition d’habitats
importants pour la biodiversité16.
Les détenteurs du capital d’exploitation (hors foncier) qui ne participent pas aux travaux de
l’unité de production, même s’ils restent encore très minoritaires, sont de plus en plus
nombreux et captent une part croissante de la valeur ajoutée agricole dégagée. Une part des
subventions agricoles de la PAC (Politique Agricole Commune) leur revient ce qui est en
contradiction avec l’article 39 du traité de fonctionnement de l’Union Européenne qui précise
que « la Politique Agricole Commune a pour but d’assurer (ainsi) un niveau de vie équitable à
la population agricole, notamment par le relèvement du revenu individuel de ceux qui
travaillent dans l’agriculture ». Il s’agit d’une tendance à contrecarrer le plus rapidement
possible.
Si l’agriculture familiale avec des unités de production à deux unités de main d’œuvre,
regroupée ou non en GAEC, où la famille détient le capital d’exploitation et fournit la
majorité de la main d’œuvre de l’unité de production, est la référence politique depuis 1960
et le reste17 pour l’ensemble des régions de l’Union, les unités de production s’en écartent de
plus en plus chaque jour.
Sans régulation des marchés fonciers, la concentration des terres et la spécialisation des
unités de production agricole vont se poursuivre. Peut-on imaginer les conséquences que
1 500 unités de grandes cultures de 10 000 ha chacune couvrant 15 millions d’hectares
auraient en France ? Elles resteraient modestes au regard des mastodontes de plus de 50 000

16 Nombre d’habitats préservés par le réseau des sites Européen Natura 2000 sont liés au maintien de pratiques
pastorales, d’ailleurs soutenu par des subventions de la PAC dites « mesures agro-environnementale » (MAE).
17 Cf. p 11, communication de la Commission européenne, 2017-11-29, the future of Food and farming.

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hectares en Roumanie, Ukraine ou au Brésil qui avec des parcelles de plusieurs centaines
d’hectares sont un désastre en terme humain, économique et écologique. De la même
manière, quelles seraient les conséquences d’unités de production laitières de plusieurs
milliers de vaches ? Trente unités standardisées de poules pondeuses pourraient
théoriquement satisfaire la consommation française !
Ces concentrations et spécialisations, qui reposent sur le recours à un nombre limité de
variétés végétales et de races animales, rendent le système global plus vulnérable aux
accidents climatiques, moins adapté aux conditions écologiques locales. Par ailleurs, ces
modèles détruisent de nombreux emplois, réduisent la biodiversité et affectent les sols en
s’éloignant de l’agroécologie basée sur la complémentarité cultures/élevages, sur les
rotations et la diversification des cultures.
Les quelques détenteurs des unités « survivantes » pourraient espérer un taux de profit
élevé par rapport aux capitaux engagés. Par contre la valeur ajoutée de la ferme France
diminuerait comme elle le fait depuis plus de quatre décennies 18. Valeur ajoutée et emplois
par hectare continueraient de reculer, alors que la désertification humaine des campagnes
s’amplifierait et la biodiversité s’appauvrirait encore (cf. annexe 5). Les unités de production
familiales, paysannes, seraient marginalisées de plus en plus sur les terres les plus
difficilement mécanisables.
Face à cette perspective, d’autres modèles agricoles doivent se développer. Les surfaces
agricoles étant limitées, l’intérêt général n’est-il pas de chercher à augmenter la valeur
ajoutée à l’hectare, l’emploi à l’hectare plutôt que de maximiser la rentabilité des capitaux
d’un nombre réduit d’investisseurs pour une valeur ajoutée globale moindre ? N’est-il pas
urgent de favoriser des modèles plus respectueux de l’environnement, moins
consommateurs d’intrants chimiques et d’énergie fossile, en bref des modèles
agroécologiques, plus productifs et plus durables ?
S’il faut créer les conditions de viabilité des unités de production qui répondent aux objectifs
d’intérêt général, il convient dans cette perspective de réguler efficacement les marchés
fonciers afin d’atteindre les objectifs qui viennent d’être énumérés.

III-4 Inégalités dans l’accès aux droits l’usage de la terre et freins à l’installation
La concentration foncière s’opère via les marchés fonciers. La caractéristique des marchés
fonciers mal régulés est de sélectionner les personnes qui ont la capacité d’offrir les prix les
plus élevés. Les surfaces agricoles étant limitées, les marchés fonciers mal régulés diminuent
le nombre d’entrepreneurs et, contrairement à la théorie, ne favorisent pas le
développement de l’esprit d’entreprise. Aussi, certains publics sont écartés ou rencontrent
plus de difficultés que d’autres pour accéder aux droits d’usage de la terre. Certains porteurs
de projets agricoles, notamment hors-cadre familial ou non issus du milieu agricole, ne
bénéficient pas des facilités de la transmission familiale ni de l’héritage pour accéder aux
moyens de production agricole et en premier lieu au foncier (bâti ou non). Aussi, pour
espérer accéder au droit d’usage de la terre, ils doivent se tourner vers les marchés fonciers,
dont ils sont trop souvent exclus par des prix trop élevés. Dans les territoires où le « pas de
porte » (paiement du droit au bail) se pratique massivement, malgré son interdiction, on

18 Gambino M, Laisney C, Vert J, (coord.), Le Monde Agricole en tendances. Un portrait social et prospectif des
agriculteurs, Centre d’études et de prospective, SSP, ministère de l’Agriculture, de l’Alimentation, de la Pêche, de
la Ruralité et de l’Aménagement du Territoire, 2012

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observe que son montant est d’autant plus important que le preneur est familialement et
socialement éloigné du cédant19.
Par ailleurs, l'accès aux facteurs de production et notamment au foncier agricole est plus
difficile pour les femmes que pour les hommes. Malgré une législation garantissant l'égalité
en droit quel que soit le sexe et même le projet d'inscrire cette égalité dans la constitution
française, force est de constater que des inégalités significatives et sans fondement
subsistent aujourd'hui en France. Pour les candidates au métier d’agricultrice, le manque de
ressources propres (foncier non bâti et bâti) et d’appuis solides s’ajoute à la défiance des
organismes préteurs et des bailleurs de terre potentiels. Ces éléments conjugués font
qu’elles sont contraintes de se reporter sur les petites unités de production, selon la MSA
(Mutualité Sociale Agricole). Les prêts bancaires sont plus modiques pour ces dernières que
ceux consentis à leurs homologues masculins. Leur recours à d’autres structures financières
(coopératives de production, abattoirs, etc.) accroît leur taux d’endettement au démarrage
de leur activité. Il en découle des écarts en termes de durée de prêts, plus longs pour les
femmes que pour les hommes20.
Aussi, pour le développement de nombreuses unités de production diversifiées, comme les
enfants d’agriculteurs ne souhaitent pas forcément faire le métier de leurs parents 21,
améliorer l’accès au foncier d’une population qui n’est pas d’origine agricole, est une
nécessité.

19 Le renouvellement des générations en zone de fermage majoritaire, Terres d’Europe-SCAFR, Terre de liens,
CLERSE, Terre de Liens Nord-Pas-de-Calais, Ministère de l’Agriculture
20 Communication de la sociologue Sabrina Dahache lors du colloque « Être agricultrice » organisé au Sénat en
2016.
21 2013, HERVIEU, PURSEIGLE, Sociologie des Mondes agricoles, Armand Colin-Collection U.

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IV Les objectifs d’une loi foncière
Une loi foncière organise, entre les personnes, les droits d’usage des espaces agricoles et
forestiers qui constituent un Commun. Cette loi offre l’opportunité d’une refondation de
notre politique foncière pour assurer la transition vers la sécurité alimentaire des citoyens de
façon durable.
Les objectifs de la loi foncière doivent être ambitieux pour :
- préserver les espaces agricoles et forestiers et améliorer les fonctions
écosystémiques de ces espaces (objectif zéro artificialisation nette),
- favoriser une meilleure répartition des droits d’usage de la terre pour lutter
contre la concentration des terres,
- favoriser la transition vers des systèmes agricoles et alimentaires plus durables
notamment en s’inscrivant dans le développement de l’agriculture écologique et
de l’économie circulaire qui permettent une augmentation de la valeur ajoutée et
de l’emploi local par unité de surface,
- redynamiser les campagnes et les liens sociaux qui s’y nouent, grâce à l’existence
d’une population agricole plus nombreuse, d’un accroissement de la richesse
locale, de la vivabilité22 et de l’attractivité des territoires.
La réglementation foncière seule ne pourra apporter toutes les réponses. Elle doit être
accompagnée de moyens pour favoriser l’investissement dans des systèmes agroécologiques
d’une part et pour porter le capital foncier d’autre part. Elle doit être accompagnée de
moyens pour adapter le mode de rémunération des travailleurs agricoles (paysans et
salariés) tant pour la production de biens agricoles que pour le financement des services
environnementaux fournis. La fiscalité et la protection sociale doivent accompagner et
favoriser cette transition. Enfin, un travail de sensibilisation, formation et accompagnement
de la société et des travailleurs agricoles sur ces sujets est nécessaire afin de lever les
nombreux freins à cette transition agroécologique.

22 Caractère de ce qui est vivable

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V Mesures d’une politique foncière
V-1 La préservation des espaces agricoles et forestiers et l’amélioration de leurs
fonctions écosystémiques
V-11 La préservation des espaces agricoles et forestiers
L’objectif est de stopper la diminution des espaces agricoles et forestiers. La survie de
l’humanité passe nécessairement par la préservation des espaces agricoles, forestiers et des
autres espaces de biodiversité, en particulier les zones humides. Ces espaces ne peuvent plus
être considérés comme des réservoirs d’extension urbaine, mais bien comme une ressource
essentielle aussi vitale que l’air et l’eau. Tout espace agricole ou forestier, parce qu’il assure
les fonctions énumérées ci-dessus, doit être préservé. L’objectif est la zéro artificialisation
nette dès maintenant. Cette mesure est indispensable dans la lutte urgente à mener contre
le réchauffement climatique.
Pour atteindre cet objectif, plusieurs mesures complémentaires sont à envisager.
Il convient de délimiter les zones urbaines et les zones naturelles, agricoles et forestières.
Cette délimitation s’appuiera sur les documents d’urbanisme actuels. Elle partira d’un relevé
des surfaces agricoles et forestières qui sont aujourd’hui incluses dans les zones urbaines U
d’une part et dans les zones d’urbanisation futures AU (à urbaniser). Selon l’importance de
ces surfaces, ces zones, urbaines et surtout à urbaniser, devront être révisées.
En vue de l’objectif, les actions de renouvellement urbain, de reconstruction de la ville sur la
ville, doivent rester du ressort des collectivités locales, au plus près du territoire. Les
documents d’urbanisme doivent être élaborés dans le cadre de véritables concertations
associant les diverses parties prenantes, avec du temps et des moyens adéquats. Dès
maintenant, des actions doivent être engagées pour favoriser la densification urbaine tout en
favorisant une ville inclusive, écologique et solidaire 23. Par contre, l’extension urbaine sur des
espaces agricoles et forestiers doit relever d’un régime dérogatoire et ne peut être autorisée
que par l’Etat et les Régions (voire les Départements). La consultation d’instances comme les
CDPENAF (Commission Départementale de Préservation des Espaces Naturels, Agricoles et
Forestiers) est à conforter. Quand la puissance publique va contre l’avis de telles instances,
elle devrait publier un avis argumenté et circonstancié consultable par tous.
Pour assurer la zéro artificialisation nette, il convient d’envisager la compensation en termes
de ressources naturelles24. Aujourd’hui, la compensation, si elle peut parfois atteindre son
but en termes de biodiversité remarquable, aboutit toujours à une destruction quasi-
irréversible d’espaces naturels, agricoles ou forestiers - c’est-à-dire à une diminution de la
biodiversité ordinaire, de la réserve utile en eau, du potentiel de capture et de stockage du
carbone, de la réserve d’éléments minéraux accessibles par les végétaux. La compensation
devra prendre en compte la biodiversité ordinaire et le potentiel agronomique, notamment
avec le critère de la réserve utile en eau. L’extension urbaine ne peut alors s’opérer qu’à
l’issue de la séquence ERC où l’étape E (évitement) doit être étudiée et privilégiée avant les

23 L’objectif de faire la « ville sur la ville » sans consommer d’espace non urbain tout en améliorant la qualité de
vie des habitants est réalisable comme le confirme le rapport « Faire la ville, dense, désirable et désirable » de
l’ADEME paru en 2018 https://www.ademe.fr/faire-ville-dense-durable-desirable
24 Une compensation financière ne permet pas la compensation de la perte de ressources naturelles.

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deux autres étapes R (réduction) et C (compensation) 25. Dans une phase de transition brève,
l’extension urbaine pourrait se faire en tenant compte de la valeur agronomique des sols, de
la réserve utile en eau par exemple.
Toujours dans l’objectif de stopper l’imperméabilisation des sols, des garanties doivent être
apportées à la pérennité du bâti agricole tant pour l’habitation que pour les bâtiments
d’exploitation d’autant plus quand ils ont été construits dans le cadre de l’activité agricole. De
nombreux bâtiments agricoles perdent leur usage agricole, pour diverses raisons, ce qui
oblige ensuite à en reconstruire de nouveaux au détriment de sols perméables ; aussi
convient-il d’instaurer une servitude d’usage professionnel agricole des bâtiments pour
préserver les possibilités d’installation agricole.
De plus, la construction de bâtiments agricoles peut permettre aussi de revaloriser des
friches commerciales, artisanales, industrielles, etc. La mise en place de secteurs de taille et
de capacité d’accueil limités « STECAL » (L-151-13 du code de l’urbanisme) est à étudier,
notamment pour limiter les risques de mitage de l’espace agricole, mais aussi pour faciliter
l’accès au logement des travailleurs agricoles, permettre le recours à des habitats légers et
mobiles, et traiter du logement des retraités agricoles. Les opérateurs expérimentant des
constructions « réversibles »26, qu’elles soient légères ou pas, méritent d’être encouragés et
soutenus. Par ailleurs, les bailleurs sociaux pourraient être encouragés à intervenir en milieu
rural hors des bourgs des villages. En effet, nombre d’agriculteurs sont éligibles au logement
social, mais ne peuvent habiter dans les zones où se concentre aujourd’hui l’action des
bailleurs sociaux. Des initiatives comme celles des hameaux agricoles doivent-être incitées et
facilitées là où les élus locaux et les agriculteurs les jugent adaptées à l’organisation agricole
de leur territoire27. Enfin, l’accès et la réhabilitation de logements vacants, que ce soit en
milieu rural ou en milieu urbain, doivent être facilités avec volontarisme, la préservation des
espaces naturels, agricoles et forestier devant être compatible avec la possibilité de chacun
d’avoir un toit.
Pour compléter le dispositif, les propriétaires fonciers ne doivent plus avoir de perspective de
plus-value foncière du fait d’un changement d’usage des espaces agricoles et forestiers, cela
passe par a) un impôt ou b) une taxe ou c) la maîtrise des prix fonciers. De même, les
aménageurs ne doivent plus avoir intérêt financièrement à détruire des espaces agricoles ou
forestiers28 : une taxe d’urbanisation des espaces agricoles et forestiers, payée par la
personne réalisant le changement d’usage, supérieure à la différence entre le coût de
l’aménagement d’un espace urbain, voire de friches urbaines, et le prix de la terre agricole
ou forestière devrait être instituée ; pour être à la fois simple et efficace, la taxe pourrait être
nettement supérieure à la différence entre le prix du terrain à bâtir et le prix du terrain
agricole.
Par ailleurs, du moins tant que l’arrêt de l’extension urbaine n’est pas effectif, et compte tenu
de la spécificité de leurs objectifs et de leurs métiers respectifs, les opérateurs fonciers
25 Guide d’aide à la définition des mesure ERC
https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/sites/default/files/Th%C3%A9ma%20-%20Guide%20d
%E2%80%99aide%20%C3%A0%20la%20d%C3%A9finition%20des%20mesures%20ERC.pdf
26 Voir par exemple les travaux de la coopérative Hamosphère (SOURCE A PRECISER)
27 Cf. note de 2015 du Centre d’étude et de prospective sur l’expérience en Languedoc Roussillon :
http://agreste.agriculture.gouv.fr/IMG/pdf/analyse811507.pdf
28 L’extension urbaine, pour partie, se fait sur les terres agricoles périurbaines car l’aménagement est plus
rapide et se fait à un coût plus faible que dans des opérations urbaines.

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« urbains » (EPF – Établissement Public Foncier) et « ruraux » (SAFER – Société
d’Amémagement Foncier et d’Établissement Rural) assurant des missions de service public,
doivent être bien distincts et ne doivent pas être fusionnés. Ceci ne doit pas empêcher de
réfléchir sur leur rôle et d’améliorer leur fonctionnement.
Il existe d’autres concurrences d’usage qu’il convient de traiter. La loi doit pouvoir interdire
certains usages contraires à l’intérêt général dans les espaces agricoles et forestiers, en
premier lieu en prohibant le photovoltaïque en plein champ (c’est à dire hors toiture). Une
réflexion doit s’engager sur ces problématiques.
L’arrêt de l’artificialisation des sols est une mesure qui sort des cadres de référence
habituels. Néanmoins, l’objectif de zéro artificialisation a été proposé, en 2011, par la
Commission Européenne pour 2050 ; sa nécessité a été rappelée en mai dernier par Nicolas
Hulot, alors ministre de l’Ecologie, car c’est une des conditions d’un monde durable. C’est
une mesure de lutte contre le réchauffement climatique qui doit être appliquée le plus tôt
possible. C’est désormais urgent.

V-1-2 Objectif : la préservation et l’amélioration des fonctions écosystémiques


des espaces naturels, agricoles et forestiers
Les fonctions des espaces naturels, agricoles et forestiers peuvent se dégrader sous l’effet de
l’érosion, de la diminution de la matière organique, de la salinisation, du tassement, de
pollutions chimiques, entre autres. Le travail spécifique des travailleurs agricoles pour éviter
la dégradation des sols et pour améliorer leurs caractéristiques, doit être rémunéré.
L’opération « 4 pour mille » (augmentation annuelle de 4 pour mille de la matière organique
des sols) doit prévoir le financement approprié d’une politique visant l’agroécologie. Ces
actions de préservation et d’amélioration de la qualité des fonctions des espaces agricoles et
forestiers peuvent se raisonner à différentes échelles géographiques ; des cadres spécifiques
doivent permettre leur déploiement à l’échelle de la parcelle, de l’unité de production, du
site naturel, de la commune, du bassin versant. Ils peuvent se développer dans un cadre
associé aux Projets Alimentaires Territoriaux (PAT). Dans ce contexte, des paiements pour
services environnementaux29 (PSE) ont toute leur place pour rémunérer les travailleurs et
non les détenteurs de capitaux.
L’agroécologie suppose de maintenir et/ou de créer des infrastructures agroécologiques
(haies de qualité, fossés, mares, plantations d’arbres, de vergers, …) en réduisant la taille des
parcelles les plus grandes. Il convient de créer des outils financiers spécifiques pour
l’établissement et l’entretien de ces infrastructures agroécologiques. Le financement du
capital d’exploitation pour favoriser la transition des systèmes de production vers des
systèmes plus durables (agroécologie, agriculture biologique, systèmes agroforestiers)
relocalisés (circuits courts) est à prévoir. Des contrats de transition auraient à financer de

29 Cf. la Plateforme « Pour une autre PAC », dont AGTER et Terre de liens sont membres : Les services
environnementaux sont les services fournis par les paysans, qui contribuent à la préservation et à l’amélioration
de notre patrimoine commun et à l’environnement, notamment la biodiversité, le climat et la santé. Ces services
ont une utilité pour la société en général. Les pratiques sont intégrées dans l’itinéraire de production du paysan
et dans une approche globale. Ils produisent des services environnementaux qui peuvent être de plusieurs types
et doivent se déployer de façon harmonieuse, cohérente et sans générer de pollution. Il s’agit de rémunérer les
pratiques vertueuses, favorables au maintien ou au développement des fonctions écosystémiques endogènes.
Le service environnemental est d’autant plus pertinent qu’il s’inscrit dans une approche territoriale et collective.
Ceux que nous souhaitons rémunérer sont liés à l’acte de production.

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telles orientations. Le financement de l’accompagnement nécessaire est aussi à prévoir (par
exemple avec un financement « PAC »)30.
Mais ce financement ne doit pas pousser les unités de production dans une fuite en avant
technologique et informatique, pendant moderne de la mécanisation à outrance lancée à la
fin du XXe siècle. L’agriculture de précision se base de plus en plus sur des technologies
gourmandes en énergie et matières premières non renouvelables31 et protégées par des
brevets32 limitant l’autonomie paysanne.

V-2 la régulation foncière


L’accès au droit d’usage de la terre constitue un droit d’accès à une activité économique, à un
revenu. L’accès au droit d’usage de la terre relève des politiques économiques et sociales,
mais également environnementales.
Si cet accès au droit d’usage s’effectue pour partie par héritage et mariage, l’évolution des
unités de production agricole s’opère principalement via les divers marchés fonciers (cf. ci-
dessus). Aujourd’hui, la politique des structures dont les fondements ont été mis en place en
1960 et 1962 pour les unités de production agricole à 2 unités de travail est mise à mal avec
tous les moyens de contournement développés.
La logique des marchés fonciers est celle d’une exclusion arbitrée par le pouvoir de l’argent ;
elle conduit à une diminution du nombre des unités de production et du nombre
« d’entrepreneurs ». Il convient de sortir de cette impasse pour entrer dans une logique de
projets qui permettent la mise en œuvre des politiques publiques, en vue notamment de
favoriser l’installation (en augmentant le nombre de porteurs de projets), d’augmenter la
valeur ajoutée et l’emploi, de contribuer au maintien et à l’amélioration des fonctions des
espaces agricoles, forestiers et naturels, et d’assurer ainsi plus d’équité dans l’accès au
foncier.
Une nouvelle régulation foncière peut se mettre en place sur la base des projets de cession
de droits d’usage des terres (ventes de terres ou de parts de sociétés détenant ou louant des
terres, ou locations).
Dans cette nouvelle régulation des marchés, les projets de cession des droits d’usage des
terres devraient faire l’objet d’une autorisation administrative effective au vu du projet, qui
est tout à fait compatible avec le cadre européen 33. Il s’agit de mettre fin à l’application très
partielle de la politique des structures et de l’étendre de manière équitable à toutes les
unités de production indépendamment de leur statut et sur l’ensemble du territoire.
Certaines autorisations se feraient automatiquement sur la base de critères préalablement
définis. D’autres seraient subordonnées à la cohérence du projet par rapport aux politiques
publiques menées aux différentes échelles territoriales.
Cette régulation foncière repose sur :

30 Voir par exemple la proposition de contrat de transition de la plateforme Pour une autre PAC :
https://drive.google.com/file/d/1ZqtkBoUCtnw4ajBSxCIlHs0ttbi4o61-/view?usp=drive_open (page 31)
31 Par exemple en terres rares, ressources minérales non renouvelables extraites majoritairement en Chine dans
des conditions environnementales et sociales délétères (http://www.zite.fr/parutions/mauvaises-mines/).
32 L’usager est soumis au détenteur du brevet.
33 cf. Communication interprétative de la Commission sur l’acquisition de terres agricoles et le droit de l’Union
européenne du 18.10.2017 (Journal officiel de l'Union européenne C 350/5

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- la transparence de la propriété foncière, qui doit être assurée par l’Etat,
- la transparence de la propriété des unités de production agricole et du capital
d’exploitation,
- la transparence et la régulation des marchés fonciers (terres, parts sociales,
locations).
La transparence sur la propriété foncière agricole, la propriété des unités de production
agricole ainsi que sur les marchés fonciers suppose l’établissement d’un observatoire foncier
au niveau national en lien avec des observatoires régionaux. Cet observatoire établirait avec
le Ministère de l’agriculture le barème indicatif de la valeur vénale des terres et des loyers. La
transparence foncière suppose que les personnes physiques détentrices de parts de société
puissent être identifiées. La mise en œuvre de la directive 2015/849/UE du Parlement
Européen et du Conseil européen du 20/5/2015 qui impose aux Etats membres de mettre en
place, dans un registre central, un dispositif d’identification des bénéficiaires effectifs, soit
des personnes physiques ou des sociétés, devrait faciliter cette transparence. En France, la
gestion de ce registre revient aux greffiers des tribunaux de commerce. Cette transparence
foncière devrait aussi s’organiser au niveau européen dans la mesure où des unités de
production agricole transnationales existent au sein de l’UE comme entre l’UE et des pays
tiers. Cette transparence foncière, sous le contrôle de l’administration, donne lieu à des
études et publications mises à disposition du public lui permettant de comprendre la réalité
et les dynamiques foncières.
La régulation foncière, qui aujourd’hui est répartie entre deux commissions départementales
(la commission structures de la CDOA - et le Comité Technique SAFER) pourrait être sous la
responsabilité d’une seule commission, la commission de régulation foncière rurale ,
présidée par un représentant de l’Etat, rassemblant des syndicats et élus professionnels
agricoles, des élus territoriaux, des associations et institutions de protection de
l’environnement, des organisations rurales (composition proche de la CDPENAF ou des
Comités techniques SAFER). (voir Figure 1)
Les critères de désignation des organisations siégeant dans cette commission devraient être
objectifs, transparents et démocratiques et ne pas être basés sur la cooptation. Des
commissions locales (infra-départementales) constituées sur le même modèle pourraient
être des instances de concertation locale donnant des avis à la commission départementale.
D’ores et déjà, ce dialogue a lieu dans certains territoires dans des Comités locaux
d’installation. Les projets de transaction foncière (ventes ou achats de terres ou de parts de
sociétés agricoles ou locations) seraient soumis à autorisation de cette commission.
L’autorisation devrait être donnée aux projets qui génèrent un maximum de valeur ajoutée et
d’emplois par hectare, dans la limite d’une surface maximale par actif tenant compte du type
de production, et sous la condition du respect d’un cahier des charges permettant
d’améliorer les fonctions des espaces agricoles tout en évitant une concentration des
terres et en créant des opportunités d’installation :
- les projets devront s’inscrire dans les politiques locales ;
- les critères de valeur ajoutée et d’emplois devront entrer dans un cadre cohérent
national ; ceci afin d’éviter la concentration foncière dans les zones où elle est déjà
forte et l’accroissement des inégalités entre régions.

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 18/32


Il s’agit de garantir un accès équitable au foncier, et à qualité égale, de favoriser les publics
les plus défavorisés, en premier lieu les femmes34.

Schéma de la nouvelle régulation foncière proposée par AGTER et Terre de Liens

Les projets de cession de droits d’usage devraient être portés à la connaissance du grand
public. Les décisions doivent être motivées et transparentes. Les instances techniques de
régulation, de statut public, appuyant la Commission de régulation, doivent disposer d’un
financement propre, non lié aux transactions sur la terre. L’Etat devrait toujours détenir un
droit de véto sur les décisions d’autorisation ou de refus. Pour que la politique des structures
puisse avoir des retombées positives, elle doit être menée sur l’ensemble du territoire, les
services de l’Etat devant y veiller.
En cas de refus, en ce qui concerne les projets de vente de terres ou de parts sociales (dans
leur totalité ou leur quasi-totalité), cette Commission pourrait décider, le cas échéant, que la
SAFER préempte. Pour les autres refus, les vendeurs ou les bailleurs seront appelés à
envisager de nouveaux projets qui répondent aux critères du cahier des charges. Ils
pourraient, s’ils le souhaitent, être accompagnés. Des autorisations temporaires d’usage
pourraient être délivrées pour une phase transitoire afin de permettre l’émergence de
projets répondant aux objectifs des politiques publiques.

34 voir : Annie Rieu, « Agriculture et rapports sociaux de sexe. La « révolution silencieuse » des femmes en
agriculture », Cahiers du Genre 2004/2 (n° 37), p. 115-130 ; Communication de la sociologue Sabrina Dahache
lors du colloque « Être agricultrice » organisé au Sénat en 2016 ; L'agriculture familiale à travers le prisme du
genre , Revue Pour n°222, Grep.

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 19/32


Cette régulation foncière suppose de ne pas élargir la cessibilité du bail et même de
supprimer les dispositions spéciales du bail cessible 35 introduites dans la loi d’orientation
agricole de 200636. Le bail doit rester cessible seulement entre les parents et enfants, pour
faciliter le renouvellement des structures agricoles paysannes. Mais cette cessibilité doit être
réduite si le bénéficiaire dispose d’une surface dépassant la taille de référence 37. La
restriction de la cessibilité du bail permet d’augmenter l’offre de terre pour l’installation et la
consolidation d’unités de production de taille réduite. Cette régulation suppose aussi de
combattre les pas-de-porte. Une bonne gestion du système d’attribution des autorisations
d’exploiter devrait à terme faire disparaître cette pratique qui est un obstacle majeur à
l’installation dans les zones de fermage38.
Dans ce nouveau cadre, la SAFER, sous le contrôle de l’Etat et en collaboration avec les
services publics compétents, devrait être chargée de l’établissement de l’Observatoire de la
propriété foncière rurale (biens agricoles et parts de sociétés) et des différents marchés
fonciers cités ci-dessus, et non seulement du marché des terres agricoles comme
aujourd’hui. Elle a la charge d’appliquer la politique foncière de la Commission de régulation,
avec l’instruction des dossiers, la mise en œuvre des préemptions, le stockage temporaire
des terres selon différentes modalités (stockage direct, convention de mise à disposition
SAFER). Ce stockage permet aux candidats, à l’installation et à l’agrandissement, de disposer
du temps suffisant pour établir des projets répondants aux objectifs de la politique foncière.
Elle intervient toujours à l’amiable avec les diverses parties prenantes, sous le contrôle de la
Commission de régulation, pour orienter les biens selon les objectifs des politiques. Le
financement des SAFER ne doit pas dépendre pas du montant des transactions foncières. (cf.
ci-dessous)
Par ailleurs, le recours à des entreprises de travaux agricoles pour l’ensemble du cycle de
production pose problème ; une régulation de cette pratique doit être organisée ; elle n’est
pas développée dans ce document mais elle fera l’objet de propositions ultérieures.
Cet encadrement des marchés fonciers est nécessaire et justifié pour assurer une sécurité
alimentaire à long terme, en relocalisant les cycles alimentaires, via l’agroécologie, en
développant la multifonctionnalité des espaces et en créant des emplois agricoles.

V-3 Le financement du foncier et des outils de régulation


V-3-1 Financement du foncier
Aussi curieux que cela puisse paraître, la régulation foncière est un moyen puissant pour
faciliter le financement du foncier. En contenant les prix des fermages et des terres, elle
permet à un plus grand nombre de candidats d’accéder au droit d’usage des terres.
- L’encadrement des loyers assure aujourd’hui une relative sécurité aux fermiers et
évite une surenchère.

35 Article L 418-1 du Code rural


36 Le bail cessible n’a pas rempli la promesse de faciliter la transmission des exploitations et de favoriser
l’installation
37 Actuellement, la surface de l’unité de référence est définie par arrêté préfectoral
38 L’agriculteur cédant demande un pas-de-porte à l’exploitant entrant car il lui assure le transfert des baux. Si
ce transfert des baux dépend d’une commission, le cédant ne pourra pas exiger le pas-de-porte.

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- La régulation des marchés fonciers s’appuyant sur la délivrance des autorisations
d’usage des terres permet de sélectionner les personnes qui ont des projets
cohérents avec les objectifs des politiques publiques. Ce contrôle des structures
permettra d’éviter l’achat de sociétés d’exploitation agricole par des personnes ne
prenant pas part aux travaux agricoles, plus susceptibles de faire monter les prix. En
excluant des marchés fonciers les personnes dont le projet ne correspond pas aux
politiques publiques, on évite la surenchère des prix. Dans les années 1960, une
autorisation d’exploiter pouvait être refusée même lorsqu’il n’y avait qu’un candidat ;
cette pratique permettait de prendre le temps de trouver d’autres candidats.
Toujours dans le but d’élargir le spectre des personnes susceptibles de s’installer, le
financement du foncier par des personnes non agricoles (physiques ou morales) qui mettent
à bail, est intéressant. Dans une période où le coût de l’argent est faible (taux bas des prêts,
rémunération des placements sécurisés faibles), l’arrivée massive de bailleurs fonciers
pourrait faire monter les prix. Il faut prendre des précautions pour éviter cet écueil ; le
mécanisme d’autorisation ou non des transferts fonciers permet de réguler ces prix. Cet
encadrement des prix fonciers va même dans l’intérêt bien compris des apporteurs de
capitaux ; les loyers étant encadrés, la modération des prix fonciers va leur procurer un
meilleur rendement financier. Pour les investisseurs fonciers ou les paysans, la modération
des prix fonciers revêt des aspects positifs. Cependant, elle n’encourage pas la spéculation,
ce qui est bien un objectif.
Aussi, pour accompagner une nouvelle politique foncière, en faveur de l’installation, des
structures de portage foncier à long terme pourraient être renforcées ou créées afin de
permettre à plus de candidats de pouvoir s’installer. Ces structures ne pourraient louer des
terres, dans le cadre du statut du fermage, qu’à des personnes individuelles ou associées
dans des structures de production où elles fournissent l’essentiel de la main d’œuvre. En
aucun cas, ces structures ne pourraient faire appel à des entreprises de travaux agricoles ni
devenir producteur agricole. Les achats de biens agricoles par ces structures de portage
seraient autorisés ou non par les organes de régulation foncière et conditionnés à une
location par bail rural.
Ces structures pourraient être ouvertes à l’investissement public et s’appuyer notamment sur
la finance solidaire. Les structures de portage s’engageant dans une optique non spéculative
(évolution de la valeur de la part fixe, propriété sur le long terme), peu lucrative (lucrativité
limitée comme pour l’agrément ESUS (Entreprise solidaire d’utilité sociale) et dans des
démarches agroécologiques à forte valeur ajoutée à l’hectare devraient pouvoir bénéficier de
l’ingénierie publique de la Caisse des Dépôts et Consignations ou de la Banque Publique
d’Investissement, d’incitations fiscales ou administratives. Cela nécessitera aussi de financer
de l’accompagnement et de l’ingénierie foncière sur les terres et le bâti.
Les projets de transmission hors cadre familial se heurtent souvent à un problème
d'inadéquation entre le calendrier de départ d'un cédant et celui du preneur. De nombreuses
unités de production sont cédées, en vente et/ou en location, entières ou démantelées pour
agrandir des fermes existantes faute de repreneurs prêts à s'installer immédiatement. Il faut
multiplier et soutenir les solutions de portage temporaire pour favoriser les installations
cohérentes avec les attentes publiques, comme les conventions de portage foncier entre des
SAFER et des Régions, comme il convient de soutenir les différentes formes de « pépinières »
de porteurs de projets.

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De plus, il convient de créer des outils financiers spécifiques pour l’établissement et
l’entretien des infrastructures agroécologiques. Le financement du capital d’exploitation
(prêts spécifiques) pour favoriser la transition des systèmes de production vers des systèmes
plus durables (agroécologie, agriculture biologique, systèmes agroforestiers) relocalisés
(circuits courts) est également à prévoir39.
V-3-2 Le financement des outils de régulation
Les politiques préconisées ne pourront se faire à moyens constants ou sans effectifs
supplémentaires dans les services des collectivités ou de l’État. La taxe spéciale
d’équipement payée par les habitants, les propriétaires urbains et ruraux et les entreprises
qui bénéficient tous des fonctions des espaces agricoles et forestiers, est une piste à explorer
pour financer les politiques et les outils de la régulation foncière. Les SAFER, notamment,
doivent obtenir un financement propre ; leur résultat économique ne doit pas dépendre du
volume financier des ventes immobilières.
L’ingénierie et l’animation foncière pourraient être en partie financées par le FEADER. De
nombreuses recommandations venant du Parlement Européen vont dans ce sens. Cela
permettrait un meilleur engagement des Régions.

39 Cf. les recommandations de la plateforme « Pour une autre PAC : pouruneautrepac.eu

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VI Conclusion
Une nouvelle loi foncière doit jeter les bases d’une nouvelle gestion des espaces agricoles et
forestiers pour une agriculture durable et répondre à l’urgence écologique (lutte contre le
réchauffement climatique et lutte contre l’érosion de la biodiversité, préservation des
ressources en eau).
Elle doit viser à la préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers, tant en quantité
qu’en qualité, et en même temps à la création d’emplois et à l’augmentation de la valeur
ajoutée produite en la partageant mieux.
Elle doit reposer sur une transparence foncière, tant du point de vue de la propriété que des
usages et ce, dans une perspective européenne.
Elle doit permettre d’orienter l’usage des terres vers des porteurs de projets en cohérence
avec les objectifs des politiques locales. Elle doit faciliter également le financement des
unités de production agricole. Une nouvelle politique des structures est à redéfinir pour
assurer le renouvellement des générations en agriculture et viser la triple performance
économique, sociale et environnementale.
La politique foncière doit s’inscrire dans le cadre plus large d’une politique qui permette la
transition vers un système alimentaire durable. Cette politique foncière devrait être
consolidée par la réforme de la politique agricole commune avec notamment la remise en
cause des aides surfaciques. En effet, avec l’adoption du rapport de Maria Noichl 40 en 2017,
le Parlement européen a admis que la PAC avait bien un impact négatif sur les dynamiques
foncières agricoles quand bien même les politiques foncières relèvent de la compétence des
états membres. C’est pourquoi les propositions faites ici sont cohérentes avec celles portée
par les auteurs au sein de la plate-forme « Pour une autre PAC »41. Le gouvernement français
devra aussi veiller à la cohérence entre la proposition de loi foncière et les engagements et
position de la France dans le cadre de la PAC.

40 Rapport sur l’état des lieux de la concentration agricole dans l’Union européenne : comment faciliter l’accès
des agriculteurs aux terres ? (2016/2141(INI)) Commission de l'agriculture et du développement rural
http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A8-2017-
0119+0+DOC+XML+V0//FR&language=fr
41 https://pouruneautrepac.eu/article/41

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 23/32


ANNEXE 1. La biodiversité du sol, un enjeu majeur pour les pratiques
agricoles42. Extrait de « Plaidoyer pour des politiques agricoles actives »
de Jacques Loyat et Thierry Pouch (éditeur : France Agricole éditions)
Le sol, bien commun de l’humanité
Les sols se forment à partir d’un substrat de diverses origines (roches d’origine géologique,
limons et sables d’origine éolienne, alluvions et rivières), soumis à des processus influencés à
la fois par le climat, le relief, les organismes vivants et l’activité humaine. La formation d’un
sol est un processus lent qui peut prendre de quelques centaines d’années à plusieurs
centaines de milliers d’années.43 Le sol et à travers lui le foncier, peuvent être considérés
comme des biens communs dont la « qualité » ou la « dégradation » importent à la société
tout entière.
Outre sa fonction de support de production, le sol remplit de nombreuses fonctions
environnementales, comme celle de filtre et de lieu de stockage de l’eau et des polluants. La
fertilité des sols, la qualité de notre alimentation, la pureté de l’air et la qualité de l’eau sont
liées à un bon fonctionnement du sol et à l’activité des organismes qui le peuplent.
Même si chacun de ces organismes vivants joue individuellement un rôle spécifique dans les
fonctions et les propriétés du sol, c’est leur grande diversité et les relations qu’ils établissent
entre eux qui mettent en œuvre des processus biologiques à l’origine du bon
fonctionnement des milieux terrestres et de leur adaptabilité aux changements
(changements climatiques ou d’usage des terres).44
La biodiversité du sol regroupe l’ensemble des formes de vie qui présentent au moins un
stade actif de leur cycle biologique dans les sols. La plupart des espèces se retrouvent dans
les deux-trois premiers centimètres du sol où les concentrations en matière organique et en
racines sont les plus élevées. Les organismes du sol supportent indirectement la qualité et
l’abondance de la production végétale en renouvelant la structure du sol, en permettant la
décomposition des matières organiques et en facilitant l’assimilation des nutriments
minéraux disponibles pour les plantes. Avoir une importante biodiversité des sols, c’est
augmenter la probabilité que les sols hébergent un ennemi naturel des maladies des
cultures.
Maintenir ou favoriser la biodiversité des sols permet donc de limiter l’utilisation des
pesticides.
La biodiversité du sol est toutefois directement menacée par les dégradations telles que
l’érosion, la diminution des teneurs en matières organiques, les pollutions locales et diffuses,
l’imperméabilisation et la salinisation des sols.
Des pratiques agricoles favorables à la biodiversité des sols45
42 King, D., Bardy, M., Bispo, A., Citeau, L., Gestion durable des sols. Éditions Quae, 2008. Programme GESSOL.
La vie cachée des sols. L’élément essentiel d’une gestion durable et écologique des milieux. 2010. Climat et
sécurité alimentaire : le programme 4 pour 1 000 replace les sols au cœur de l’agriculture. Article sur le site du
Cirad, 8/9/2015.
43 King, D., Bardy, M., Bispo, A., Citeau, L., Gestion durable des sols, Éditions Quae, 2008.
44 https://fr.wikipedia.org/wiki/Biodiversit%C3%A9_du_sol
45 Repris de http://www.gessol.fr/content/biodiversite-la-vie-cachee-des-sols

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 24/32


Augmenter la teneur en matière organique
Des apports réguliers de matière organique améliorent la structure du sol, augmentent la
capacité de rétention de l’eau et des nutriments, protègent le sol contre l’érosion et le
tassement et soutiennent le développement d’une communauté saine d’organismes du sol.
Limiter les intrants agro-chimiques et les contaminations des sols
L’utilisation de pesticides et de fertilisants chimiques favorise les rendements, mais les
matières actives peuvent nuire aux organismes du sol. Par ailleurs, les apports de
contaminants volontaires (par exemple la bouillie bordelaise à base de cuivre) ou
involontaires (par exemple le cadmium dans les engrais, le mercure dans les boues de station
d’épuration, le zinc dans les lisiers) peuvent avoir une influence sur les organismes du sol
conduisant à des modifications de la biodiversité.
Prévenir le tassement du sol
Le tassement du sol, par des passages répétés d’engins, en particulier sur sol mouillé,
diminue les quantités d’air, d’eau et d’espace disponibles pour les racines et les organismes
du sol. Comme la remédiation est difficile voire impossible, la prévention est essentielle.
Minimiser les risques d’érosion
Un sol nu est sensible à l’érosion par le vent et l’eau, au dessèchement et à l’encroûtement.
La présence d’une couverture végétale ou de résidus de cultures protège le sol, fournit des
habitats pour les organismes du sol et peut améliorer la disponibilité en eau et en
nutriments.
Semer la biodiversité
La préservation et le renouvellement de la biodiversité cultivée est une mesure indispensable
pour garantir la biodiversité des sols. Cela passe en particulier par la reconnaissance par la
réglementation, les institutions et les laboratoires de recherche des semences paysannes.
Replacer les sols au centre des pratiques agricoles : un enjeu des négociations sur le
changement climatique
Du carbone est stocké dans le sol, sous forme de matière organique. Une augmentation de 4
pour 1 000 des stocks de carbone chaque année dans la totalité des sols mondiaux, sans
aucune déforestation, compenserait en totalité les émissions de CO2 d’origine anthropique.
Ce chiffre clé ouvre des perspectives d’impact sur les changements climatiques qui n’avaient
jusqu’alors pas été mises sur la table des discussions (qu’elles soient scientifiques ou
politiques). Il offrirait en outre un deuxième effet majeur en concourant, par une
augmentation de la quantité et de la diversité des productions agricoles, à la sécurité
alimentaire mondiale, notamment dans les pays du Sud. La solution passe par un
accroissement de la matière organique des sols, contribuant ainsi à la résilience et à la
durabilité de l’agriculture, et de fait à la sécurité alimentaire, tout en séquestrant du carbone.
C’est l’agriculteur qui, par ses pratiques, doit être à même d’accroître la matière organique et
donc de préserver la biodiversité. Toutes les initiatives de promotion et de défense de la
biodiversité cultivée et des savoir-faire associés doivent être encouragées.

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 25/32


ANNEXE 2 : Prévision d’évolution des rendements agricoles liée au
changement climatique au XXIe siècle

Source : ONERC : figure RID.7 extrait du résumé à l’intention des décideurs du volume 2 du
cinquième rapport d’évaluation du GIEC-2014
Ce graphique résume les changements prévus en termes de rendements en raison du
changement climatique durant le 21e siècle. La hauteur de chaque couleur représente le
pourcentage d’études scientifiques montrant le même pourcentage de variation des
rendements. Il présente les projections pour différents scénarios d’émissions, sur les régions
tropicales et tempérées, pour des cas avec et sans adaptation combinés. Peu d’études ont
examiné les effets, sur les systèmes de culture, de scénarios où les températures moyennes
mondiales augmenteraient de 4° C ou plus. Les variations de rendements sont calculées par
rapport aux niveaux de la fin du vingtième siècle. Les données pour chaque période sont
réparties en pourcentage.

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 26/32


ANNEXE 3 : Chiffres sur les dynamiques de l’artificialisation
En France, évolution des surfaces artificialisées
• De 1980 à 1992 : 54 000 ha/an
• De 1992 à 2003 : 61 000/ an
• Fin des années 2000 : plus de 80 000 ha/an
• Rythme actuel : de l’ordre de 60 000 ha/an
Doublement des surfaces « artificialisées » entre 1960 et 2010 :
• De 2,5 millions à 5 millions d’hectares
Conséquence : avec un rythme de 60 000 ha/an de 2010 à 2060 ; en un siècle la France aurait
perdu 5,5 millions d’hectares de terres agricoles (20% de la surface agricole actuelle, et plus
de 25% de sa réserve utile en eau)
Evolution en Europe et dans le monde
• Au niveau mondial, selon diverses estimations, l’urbanisation pourrait atteindre entre
300 et 400 millions d’hectares à rapprocher des 1,5 milliard d’hectares de terres
arables (d’un cinquième à plus d’un quart des terres arables) (cf. La question foncière
renouvelée pour une alimentation durable de l’humanité et une souveraineté
alimentaire européenne dans Cahier Demeter n°15)
• Tendances identiques en Europe, quand l’Europe est déficitaire nette de surfaces
agricoles : l’UE importe en net l’équivalent de la production de 35 millions d’hectares
(Cf. EU agricultural production and trade (Harald von Witzke, Humbolt University
Berlin et Steffen Noleppa, Agripol) soit 20% de la surface agricole de l’Union),
L’UE est de plus en plus dépendante de surfaces agricoles de pays tiers, dans un contexte
où les rendements vont baisser !

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ANNEXE 4 : Evolution des structures de production agricole en France

évolution 2000-
2016
évolution des
exploitations en part de la surface agricole exploitée en
nombre
2000 2016
exploitations -43% 76% 60%
individuelles et GAEC
EARL 40% 17% 28%

SCEA,SA 50% 7% 12%

-34% 100% 100%


Ensemble
source R Levesque d'après données SSP

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ANNEXE 5 Valeur ajoutée des OTEX et évolution de leurs surfaces
Les orientations technico-économiques qui augmentent leur surface « COP », grandes
cultures et « bovins viande » sont celles qui dégagent le moins de valeur ajoutée à l’hectare

Moyennes annuelles Part de la surface agricole Valeur ajoutée en € par


« 1988-1990 » et « 2011-2013 » nationale par OTEX hectare

Part en Part en
Sans Avec
1988-1990 2011-2013 subvention subvention
Ensemble des orientations technico-
100,0% 100,0% 891 1 251
économiques
OTEFDD 15 : Céréales, oléagineux,
19,3% 24,5% 507 822
protéagineux (COP)

OTEFDD 16 : Cultures générales 8,3% 8,7% 1 130 1 504

OTEFDD 28 : Légumes et champignons 0,3% 0,2% 11 354 12 141


OTEFDD 29 : Fleurs et horticulture
0,2% 0,1% 19 569 19 989
diverse
OTEFDD 35 : Viticulture 5,1% 4,1% 5 684 5 857
OTEFDD 39 : Arboriculture fruitière et
1,0% 0,9% 3 730 4 232
autres cultures permanentes
OTEFDD 45 : Bovins lait 22,9% 15,9% 721 1 096
OTEFDD 46 : Bovins viande 8,5% 13,2% 138 556
OTEFDD 47 : Bovins mixtes 4,2% 4,2% 482 873
OTEFDD 481 + 482 + 483 : Ovins et
5,0% 4,6% 193 633
caprins
OTEFDD 484 : Autres herbivores 1,4% 1,5% 448 831
OTEFDD 51 : Porcins 1,1% 1,4% 1 926 2 240
OTEFDD 52 : Volailles 1,4% 2,2% 1 639 1 994
OTEFDD 53 + 74 : Granivores mixtes 1,8% 1,9% 925 1 319
OTEFDD 61 + 73 + 83 + 84 : Polyculture,
19,6% 16,6% 632 989
polyélevage
Source : C Lécuyer, R Levesque, Terres d’Europe-SCAFR d’après RICA

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 29/32


ANNEXE 6 : La formation des prix fonciers
Extrait du « Prix des terres en 2015 » de la FNSafer
L’évolution du prix des terres est guidée par plusieurs paramètres communs à tous les pays :
 le niveau des revenus46 des agriculteurs, incluant les aides directes de la politique
agricole commune (PAC) ou les subventions aux cultures énergétiques, comme en
Allemagne ;
 la valeur des taux d’intérêt réels : sur les vingt dernières années, leur baisse semble
être le principal facteur de hausse des valeurs foncières ;
 l’arrivée de nouveaux investisseurs ;
 la pression foncière urbaine, qui peut engendrer des valeurs d’anticipation de
changement d’usage. Des facteurs propres à chaque pays interfèrent avec ces
paramètres, au premier rang desquels la fiscalité et les modalités de transmission du
patrimoine. Des instruments gouvernementaux peuvent aussi avoir un impact sur les
marchés fonciers agricoles, telles les ventes encadrées des anciennes fermes
collectives en Pologne et dans les Länder de l’ancienne Allemagne de l’Est ou les
contraintes environnementales aux Pays-Bas.

46 Plus précisément l’évolution de la valeur ajoutée à l’hectare

Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 30/32


Préserver et partager la terre – AGTER/TDL – novembre 2018 31/32
AGTER est une association internationale de droit français
qui travaille à l’Amélioration de la Gouvernance de la Terre,
de l’Eau et des autres Ressources naturelles. Face aux
accaparements, à la concentration mais aussi à
l’épuisement et à la dégradation des ressources, AGTER appuie l’émergence de
nouvelles formes politiques et sociales de gestion de celles-ci, du local au global, tout
en préservant les équilibres écologiques.
Grâce à son réseau de membres institutionnels et individuels (paysans,
professionnels, porte-paroles de collectifs citoyens, chercheurs de disciplines
diverses, …) originaires de 30 pays, AGTER anime un processus de réflexion et
d’apprentissage collectif destiné à formuler des propositions et à les mettre œuvre,
notamment en ce qui concerne la production agricole et forestière à petite échelle.
En 2016, AGTER a organisé avec le CERAI le forum mondial sur l’accès à la terre
(FMAT) qui a réuni 400 participants de 70 pays.
AGTER capitalise des expériences, produit et diffuse des connaissances.
www.agter.asso.fr

Né en 2003, Terre de Liens réunit aujourd'hui plus de 25 000


citoyens qui ont rendu possible l'acquisition de 170 fermes partout en
France grâce à l’épargne solidaire et au don. Plus de 3 000 hectares de
terres ainsi acquises sont dédiés à une agriculture paysanne et
biologique. A ce jour, 210 paysans sont installés et pratiquent leurs activités sur des terres
consacrées à l'agriculture de proximité, puis commercialisent leurs productions
essentiellement en circuits courts.
Fort d’avoir ainsi prouvé que le foncier agricole est un sujet mobilisateur dans la société,
Terre de Liens cherche à défendre la préservation du foncier agricole et à favoriser les
installations biologiques et paysannes sur le territoire Français. Pour cela, Terre de Liens
mobilise et fédère des citoyens. A travers ses collaborations avec de multiples acteurs
(associations, collectivités territoriales, organisations paysannes et/ou environnementales,
…), Terre de Liens met en œuvre un dialogue territorial et anime le débat public sur la
question du foncier agricole.
www.terredeliens.org

Contacts :
AGTER - Mathieu Perdriault - mathieu.perdriault@agter.org - 01 43 94 72 59
Terre de Liens - Tanguy Martin - t.martin@terredeliens.org - 06 42 68 97 31

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