Rapport de l'ONU Sur Moura-Mali
Rapport de l'ONU Sur Moura-Mali
Rapport de l'ONU Sur Moura-Mali
Mai 2023
Sommaire
Résumé exécutif................................................................................................................................ 2
I. Introduction .............................................................................................................................. 6
II. Méthodologie ............................................................................................................................ 7
A. Le déroulement de la mission d’établissement des faits .......................................................7
B. Les défis rencontrés par la mission d’établissement des faits .............................................10
III. Contexte .................................................................................................................................. 11
IV. Cadre juridique applicable ................................................................................................... 15
A. Le déroulement de l’opération militaire ..............................................................................18
B. Les violations des règles du droit international humanitaire et du droit international des
droits de l’homme ........................................................................................................................21
1. Violations des règles et principes du droit international humanitaire régissant la
conduite des hostilités .............................................................................................................21
2. Exécutions sommaires, extrajudiciaires ou arbitraires des civils et personnes hors
combat......................................................................................................................................23
3. Les cas de viol et autres formes de violences sexuelles ..................................................28
4. Torture et traitements cruels, inhumains ou dégradants...............................................29
VI. Conclusion et recommandations ........................................................................................... 31
VII. Annexes ................................................................................................................................... 34
1
La résolution 2640 (2022) a été adoptée à la suite de la résolution 2584 (2021) qui était en vigueur au moment
des faits rapportés dans le présent rapport et qui en son paragraphe 30 (d) (ii) demande à la MINUSMA
«d’améliorer les activités de surveillance des violations du droit international humanitaire et des violations
des droits humains et atteintes à ces droits, notamment toutes les formes de violence sexuelle et fondée sur le
genre, la traite des personnes et les violations et atteintes commises contre des femmes et des enfants sur tout
le territoire malien, recueillir des preuves, mener des missions d’établissement des faits, concourir aux
enquêtes et faire rapport au Conseil de sécurité à ce sujet, publiquement et régulièrement, et contribuer aux
activités de prévention de ces violations et atteintes, y compris en communiquant avec les partenaires
compétents, selon qu’il convient ».
2
Résolution 2640 (2022) paragraphe 27 d (ii).
3
Selon les informations recueillies par la mission d’établissement des faits, le 29 mars, dans l’après-midi,
entre 15h00 et 16h00, des militaires ont désigné parmi les hommes détenus au bord du fleuve, quelques jeunes
majoritairement membres de la communauté bobo pour ramasser les corps dans le village à l’aide d’au moins
quatre charrettes tirées par des ânes. Les corps ont ensuite été amassés du côté sud-est du village, près d’un
petit creuset qui servait de fosse commune. Le décompte fait par ces témoins directs a été presque le même
(entre 170 et 190 corps pour certains et à peu près 200 corps pour d’autres) (voir paragraphe 60 du
rapport). Le 31 mars, entre15h00 et 18h00, après le départ définitif des troupes militaires, les villageois se
sont mobilisés pour ramasser les cadavres se trouvant à différents endroits du village. Selon les informations
reçues par la mission des charrettes ont été mises à contribution pour faciliter le ramassage des corps des
victimes. Environ 370 corps auraient été ramassés, dont une vingtaine de corps de femmes et sept
enfants. Les corps ramassés ce jour-là auraient été inhumés dans trois fosses communes creusées par les
villageois, notamment à proximité du cimetière du village ; au sud-ouest du village sur la route de Gossiri et
au nord-est sur la route de Diabi (voir paragraphe 65 du rapport).
1. Le présent rapport publié par le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de
l’homme présente les résultats d’une mission d’établissement des faits mise en place
par la Division des droits de l’homme et de la protection de la Mission
Multidimensionnelle Intégrée des Nations Unies pour la Stabilisation au Mali
(MINUSMA). Il est publié en vertu du mandat de promotion et de protection des
droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme,
décrit dans la Résolution 48/141 de l’Assemblée générale des Nations Unies, de 20
décembre 1993 et du mandat de la Mission multidimensionnelle intégrée des
Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA) à laquelle la résolution
2640 (2022) du Conseil de sécurité des Nations Unies4 demande de « surveiller les
violations du droit international humanitaire et les violations des droits humains et
les atteintes à ces droits, notamment toutes les formes de violence sexuelle et fondée
sur le genre, la traite des personnes et les violations et atteintes commises contre
des femmes et des enfants sur tout le territoire malien, recueillir des preuves, mener
des missions d’établissement des faits, concourir aux enquêtes et faire rapport
publiquement au Conseil de sécurité à ce sujet tous les trois mois, et contribuer aux
activités de prévention de ces violations et atteintes, y compris en communiquant
avec les partenaires compétents, selon qu’il convient5 ».
4
La résolution 2640 (2022) a été adoptée à la suite de la résolution 2584 (2021) qui était en vigueur au moment
des faits rapportés dans le présent rapport et qui en son paragraphe 30 (d) (ii) demande à la MINUSMA
«d’améliorer les activités de surveillance des violations du droit international humanitaire et des violations
des droits humains et atteintes à ces droits, notamment toutes les formes de violence sexuelle et fondée sur le
genre, la traite des personnes et les violations et atteintes commises contre des femmes et des enfants sur tout
le territoire malien, recueillir des preuves, mener des missions d’établissement des faits, concourir aux
enquêtes et faire rapport au Conseil de sécurité à ce sujet, publiquement et régulièrement, et contribuer aux
activités de prévention de ces violations et atteintes, y compris en communiquant avec les partenaires
compétents, selon qu’il convient ».
5
Résolution 2640 (2022) paragraphe 27 d (ii).
II. Méthodologie
4. Le 1er avril 2022, la MINUSMA a mis en place une mission d’établissement des faits
(ci-après la mission) composée de 12 chargés des droits de l’homme avec le soutien
de quatre (4) experts de la police des Nations Unies qui a conduit ses travaux sur
une période de sept mois, soit du 1er avril au 30 octobre 2022. En dehors du vol de
reconnaissance préparatoire au déploiement de la mission d’établissement des faits
dûment autorisé, les autorités maliennes, invoquant des impératifs sécuritaires et
opérationnels ont continué de refuser à la mission d’établissement des faits l’accès
au village de Moura, bien que vidé de la majorité de ses habitants. Ainsi, des équipes
mobiles de chargés des droits de l’homme ont été déployées à Bamako, Douentza,
Mopti et Ségou en vue de vérifier et corroborer les informations et allégations
recueillies et de collecter des informations additionnelles. La mission
d’établissement des faits a été conduite aussi bien dans sa phase de planification que
sa réalisation conformément aux principes et à la méthodologie du Haut-
Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme6. Seules les informations
répondant aux standards du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de
l’homme et à la méthodologie applicable aux missions d’établissement des faits ont
été prises en compte dans l’analyse des faits et des violations. Les informations des
sources ouvertes ont été consultées à titre informatif. A tous égards, les différentes
sources et informations ont été prises en considération et examinées rigoureusement
6
Voir : Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme (HCDH), Commissions d’enquête et
missions d’établissement des faits sur le droit international des droits de l’homme et le droit humanitaire
international : Orientations et pratiques (New York et Genève, 2015) pp. 69–70
https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Publications/CoI_Guidance_and_Practice_FR.pdf.
6. A cet égard, la mission d’établissement des faits a mené 157 entretiens individuels
avec une variété de sources membres des communautés peule, rimaibè et bozo
venant de 18 localités, notamment Sofara, Mana, Wagnere, Manga, Larde Bale,
Yogosiradji, Yogon Siré, Femaye, Kouakourou, Djenne, Douentza, Ndjougouni,
Oura-Modi, Boron et Sare dine. Elle a conduit 11 séances de groupe avec des
personnes ayant une connaissance directe et de première main de l’incident,
notamment des sources directes parmi lesquelles des témoins oculaires, des rescapés
et des personnes qui auraient été désignées pour ramasser et ensevelir les corps des
personnes tuées. La mission s’est également entretenue avec des déplacés internes
qui ont quitté Moura pour trouver refuge ailleurs. La mission a aussi interviewé 15
victimes de viols et violences sexuelles perpétrés par des éléments des Forces
Armées Maliennes au cours de l’opération militaire. Par ailleurs, la mission s’est
également entretenue avec 42 personnes sur les 58 arrêtées lors de l’opération
militaire à Moura qui ont été libérées par la suite.
7. Le rapport s’est appuyé sur des informations vérifiées et corroborées auprès des
sources crédibles, notamment des victimes et leurs familles, des témoins et
survivants des évènements, ainsi que des responsables communautaires et
traditionnels de la région de Moura. Les témoignages ont été recueillis avec le
consentement éclairé des témoins, dans une langue de leur choix qu’ils comprenaient
(Bambara, Dogon, Français, Fulani). La protection des témoins et les potentiels
risques d’interférence ont été considérés et ont amené la mission à relocaliser
certains d’entre eux pour mieux garantir leur sécurité et leur permettre de témoigner
librement et sans intimidation.
7
Voir : Haut-Commissariat des Nations Unies aux Droits de l’Homme (HCDH), Commissions d’enquête et
missions d’établissement des faits sur le Droit International des Droits de l’Homme et le Droit Humanitaire
International : Orientations et pratiques (New York et Genève, 2015) pp. 36 – 92,
https://www.ohchr.org/sites/default/files/Documents/Publications/CoI_Guidance_and_Practice_FR.pdf.
9. Au total, 297 personnes ont pris part à ces diverses rencontres organisées à
Douentza, Mopti, Bamako, Ségou et Sikasso. Dans le but de recueillir des
informations détaillées et de les corroborer, la mission a relocalisé plusieurs témoins
à plusieurs endroits, notamment à Bamako, Sikasso, Koulikoro, Ségou et Sévaré.
Dans chaque cas, la mission a évalué la fiabilité, la crédibilité et la véracité des
informations transmises et leur cohérence avec les informations obtenues provenant
d'autres sources.
10. Dans le but de vérifier certaines allégations, la mission a également fait des suivis
auprès des membres du personnel médical en région et à Bamako et a pu établir le
statut de certaines victimes qui avaient des besoins spécifiques de prise en charge.
11. Conformément au principe de « ne pas nuire », la mission a pris des mesures pour
renforcer la protection des personnes fournissant des informations.
12. La mission a rencontré les autorités maliennes civiles et militaires tant au niveau
national que régional pour recueillir leur version des faits et discuter des actions
entreprises, y compris l’ouverture des enquêtes internes ou judiciaires. Elle a
rencontré dans le cadre de cette démarche, le Ministre de la Réconciliation nationale,
de la Paix et la cohésion nationale, chargé de l’Accord pour la paix et la
réconciliation, le Ministre de la Justice et des droits de l’homme, le Gouverneur de
la région de Mopti, le Procureur militaire de Mopti ainsi que la Gendarmerie et les
Forces Armées Maliennes au niveau régional.
13. La mission d’établissement des faits a été en mesure d’analyser et exploiter des
informations pertinentes de l’imagerie satellitaire et d’autres images disponibles au
sein des Nations Unies, lesquelles ont permis d’établir la cartographie du
déroulement des évènements et de reconstituer les faits à l’appui de plusieurs
séances d’analyse avec des témoins directs et personnes internes déplacées de Moura
(voir les images en annexe aux pages 34 et suivantes).
8
https://www.africanews.com/2022/04/06/moura-killing-mali-s-army-chief-reacts-to-accusations/
9
https://information.tv5monde.com/video/mali-deux-versions-contradictoires-sur-l-attaque-moura
10
https://www.tf1info.fr/international/afrique-mali-succes-antijihadiste-contre-al-qaida-ou-massacre-de-
civils-par-la-junte-et-wagner-que-s-est-il-passe-a-moura-2215782.html
11
https://voxafrica.com/fr/mali-le-gouvernement-condamne-des-fausses-allegations-contre-son-armee/
12
https://www.africanews.com/2022/04/08/un-asks-mali-for-authorisation-to-access-city-of-moura//
13
https://www.facebook.com/watch/?v=503893121269920
14
https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/mali/mali-que-s-est-il-passe-a-moura-ou-des-centaines-de-
personnes-ont-ete-tuees-par-l-armee-malienne-et-des-mercenaires-russes_5063236.html
15
https://www.rfi.fr/fr/afrique/20220331-mali-moura-encercl%C3%A9-par-l-arm%C3%A9e-malienne-et-
ses-suppl%C3%A9tifs-russes
16
https://www.jeuneafrique.com/1335714/politique/mali-larmee-et-wagner-accuses-davoir-commis-un-
massacre-a-moura/
17
https://www.france24.com/fr/afrique/20220406-massacres-%C3%A0-moura-dans-le-centre-du-mali-les-
dessous-d-une-op%C3%A9ration-militaire
18
https://www.bfmtv.com/international/afrique/mali/mali-des-soldats-maliens-et-presumes-russes-ont-
execute-300-civils-en-mars-d-apres-l-ong-human-rights-watch_AD-202204050399.html
19
https://www.bbc.com/afrique/region-61008972
20
https://www.ohchr.org/en/statements/2022/04/comment-un-human-rights-office-spokesperson-seif-
magango-malian-authorities
21
https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/mali/crimes-civils-moura-mali-enquete-independante
22
https://www.hrw.org/fr/news/2022/04/05/mali-massacre-perpetre-par-larmee-et-des-soldats-etrangers
III. Contexte
18. Moura est l’un des 12 villages23 et le chef-lieu de la commune de Togué Mourari
(région de Mopti et compte 6818 habitants selon le recensement général de la
population et de l’habitat (RGPH) de 2009. La commune est enclavée et difficile
d’accès surtout pendant la période d’hivernage.24 Les principales ethnies peuplant la
commune sont les Peul « Rimaïbé », les Bozo, les Bella et les Sonrai dont les
activités principales sont l’agriculture, l’élevage et la pêche. L’organisation sociale
repose en grande partie sur des pratiques traditionnelles telles que les chefferies et
les sociétés sécrètes. Dans la commune, il existe plusieurs organisations dont les
associations et les coopératives de coordination des femmes et des jeunes. Depuis
l’année 2012, le village de Moura serait passé sous le contrôle de la Katiba Macina,
affiliée au Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (Jama’a Nusrat ul-Islam
wa al-Muslimin – JNIM) affilié à Al-Qaida. Le village abrite la plus grande foire
hebdomadaire dans la région du delta intérieur du Mali25 et attire des villageois et
commerçants venant de plusieurs localités, notamment Ténenkou
(approximativement 30 km de Moura), Sofara (15 km), Wandjere (10 km), Manga
(30 km), Yogon Siré (25 km), Femaye (34 km), Kouakourou (20 km), Djenné (75
km), Oura-Modi (5 km), Boron (30 km), etc. La foire serait aussi fréquentée par des
membres de la Katiba Macina qui viendraient s’approvisionner en aliments et bétail.
19. Depuis le mois de décembre 2021, les autorités maliennes ont engagé des opérations
militaires d’envergure avec l’appui de personnels militaires étrangers dans le centre
du pays, notamment dans les régions de Mopti et Ségou. En janvier 2022, le Chef
d’Etat-major général des Armées a annoncé le début de l’opération Kélétigui « dans
une dynamique offensive contre les groupes « terroristes » et dans le but de détruire
leurs bases et éradiquer ainsi la menace ». Cette opération a été lancée en marge de
l’opération « Maliko » instituée par le décret n°2020-0034/P-RM du 30 janvier
2020. Selon les termes de ce décret, cette opération vise « à rétablir l’Etat du Mali
dans ses fonctions régaliennes dans certaines de ses régions, en s’appuyant sur
l’action des Forces Armées et de Sécurité maliennes, soutenue et accompagnée par
23
Moura, Diaby, Gossiri, Makame peulh, Mountou, Ouodaré, Saré Hamadou, Sogondé, Tossa, Wandjeré,
Makame peulh, Makame rimaibé.
24
Cette période correspond à la saison des pluies.
25
Il s’agit de la vaste zone inondable située entre Djenné, Mopti et Tombouctou.
20. Depuis les deux derniers coups d’Etat successifs survenus respectivement le 18 août
2020 et 24 mai 2021, les conflits armés au Mali ont pris une nouvelle dimension
avec le déploiement depuis octobre 2021 de nouveaux acteurs militaires, à savoir
des personnels militaires étrangers. Selon les autorités maliennes de transition ces
nouveaux acteurs sont des « instructeurs » arrivés au Mali dans le cadre d'un accord
bilatéral entre le Mali et la Fédération de Russie. Cependant, selon plusieurs médias,
le Ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie a indiqué que le Mali
a fait appel à une compagnie militaire privée russe26 et que la société paramilitaire
privée russe Wagner est présente au Mali sur une base commerciale.27 Ces
personnels militaires étrangers auraient été déployés aux côtés des Forces Armées
Maliennes dans le cadre de l'opération « Kélétigui », une opération « antiterroriste »
lancée en décembre 2021, menée principalement dans le centre et le sud du Mali.
Au 31 juillet 2022, ces personnels militaires étrangers auraient également été
déployés aux côtés des Forces Armées Maliennes dans les régions de Ménaka et
Tombouctou, les régions centrales de Douentza, Mopti et Ségou ainsi que les régions
sud de Koulikoro et Nara.
21. En ce qui concerne la présence des personnels militaires étrangers, la majorité des
témoins avec lesquels la MINUSMA s’est entretenue ont été unanimes sur la
présence « d’hommes armés blancs » qui opéraient aux côtés des Forces Armées
Maliennes dès le premier jour de l’opération militaire menée à Moura. Il a été précisé
en outre qu’ils supervisaient même les opérations. Selon les témoins, certains
portaient des semi-cagoules qui cachaient la bouche jusqu’au nez, mais le reste de
la partie du visage était visible. D’autres n’avaient pas de cagoules et portaient des
lunettes de soleil uniquement. Les témoins ont également précisé que chaque jour et
jusqu’à la fin des opérations, il y avait des rotations de troupes des militaires maliens
alors que les « blancs » eux ne quittaient pas Moura. Par ailleurs des témoins ont
précisé que ce sont « les hommes armés blancs » qui faisaient le tri pour déterminer
qui était considéré comme « djihadiste » avant d’orienter les victimes ainsi
identifiées vers la direction où les éléments des Forces Armées Maliennes les
exécutaient en leur tirant dans le dos. De plus lorsqu’ils donnaient des ordres, il y
avait un interprète parmi les militaires maliens qui transmettait les instructions en
Bambara. Plusieurs entretiens avec des témoins directs présents au moment des faits
à Moura permettent d’établir que les militaires maliens s’exprimaient en Bambara
26
https://www.reuters.com/world/africa/mali-asked-private-russian-military-firm-help-against-insurgents-
ifx-2021-09-25/
27
https://www.voaafrique.com/a/wagner-pr%C3%A9sent-au-mali-en-libye-sur-une-base-commerciale-
selon-lavrov/6554853.html; https://mondafrique.com/serguei-lavrov-le-groupe-russe-wagner-fait-du-
business-au-mali/;
22. C’est dans ce contexte que le 27 mars 2022, une opération militaire a été lancée par
les forces de défense et sécurité maliennes, avec le soutien des personnels militaires
étrangers, dans le village de Moura.
24. Le 1er avril 2022, l’Etat Major Général des Armées a publié un communiqué
annonçant que « du 23 au 31 mars 2022, une opération d’opportunité aéroterrestre
de grande envergure a été menée dans la zone de Moura à 17 kilomètres au Nord-
est de Kouakourou dans le cercle de Djenné. Cette opération fait suite à des
renseignements bien précis qui ont permis de localiser la tenue d’une rencontre
entre les différents Katibas à Moura, fief des terroristes depuis quelques années.
Une combinaison d’actions aéroterrestres, en l’occurrence les forces au sol et les
troupes aérotransportées, notamment les forces spéciales, a permis un bilan très
lourd chez les terroristes : 203 combattants des GAT (groupes armés terroristes)
avec une interpellation de 51 personnes, 200 motos brulées et saisies, d’importantes
quantités d’armes et de munitions récupérées. Les FAMA ont procédé en suite aux
nettoyages systématiques de toute la zone »28.
28
https://twitter.com/FAMa_DIRPA/status/1510210825549668355/photo/1
26. Ces allégations ont suscité une vague de réactions aussi bien sur le plan national
qu’international. Le 5 avril 2022, un deuxième communiqué de l’Etat-Major Général
des Armées a indiqué que les « FAMa font l’objet d’allégations infondées
d’exactions sur les populations civiles. Les porteurs de ces informations infondées
n’ont d’autres objectifs que de ternir l’image des FAMa résolument engagées dans
la lutte pour la liberté, la sécurité et la protection des populations ». Le
communiqué a précisé que « l’action aéroportée et aéroterrestre ayant mobilisé des
drones de surveillance, 05 hélicoptères dont 3 de transport Mi 171 et 02 de combat
Mi 35, 04 groupes de forces spéciales a initialement permis de cerner la zone de
regroupement des terroristes […] Pris en étau, les terroristes tendant de fuir la
localité sur les plaines ont été interceptés et neutralisés par le Mi 35 en
couverture »30. Le même jour (5 avril 2022), la Commission nationale des droits de
l’homme (CNDH) du Mali a exprimé sa vive préoccupation par rapport aux
allégations de violations des droits humains en lien avec les opérations des Forces
armées et de sécurité dans le village de Moura, Cercle de Djenné, du 23 au 31 mars
courant.31 Également le 5 avril 2022, l’ONG Human Rights Watch (HRW) a déclaré
que « les forces armées maliennes et des soldats étrangers alliés auraient exécuté
sommairement environ 300 hommes civils, dont certains soupçonnés d’être des
combattants islamistes, dans la ville de Moura, dans le centre du Mali, fin mars
2022. Ces hommes faisaient partie d’un groupe de personnes arrêtées suite à une
opération militaire lancée le 27 mars. Cet incident constitue la pire atrocité de ce
type signalée au Mali au cours du conflit armé qui dure depuis dix ans. Le rapport
de HRW a révélé que pendant plusieurs jours, les forces de sécurité maliennes et
des soldats étrangers - identifiés par plusieurs sources comme étant des russes - ont
exécuté par petits groupes des centaines de personnes arrêtées à Moura » 32.
29
Voir la Matrice de suivi des déplacements.
30
https://twitter.com/FAMa_DIRPA/status/1511406020379267075/photo/1
31
CNDH, Communiqué n°006-2022/CNDH-P (5 avril 2022)
https://cndhmali.com/index.php/2022/04/05/communique-n006-2022-cndh-p/
32
https://www.hrw.org/fr/news/2022/04/05/mali-massacre-perpetre-par-larmee-et-des-soldats-etrangers
29. Le 11 avril 2022, des éléments de la Katiba Macina sont retournés dans la zone et
ont procédé à l’enlèvement d’au moins dix (10) personnes accusées de coopérer avec
les Forces Armées Maliennes. Ces personnes sont depuis lors portées disparues.
Enfin, le 27 juin 2022, à la suite d’un ultimatum donné la veille aux habitants de
Moura par ces mêmes éléments pour quitter le village, une trentaine de notables de
la commune de Togué-Mourrai composés de chefs de village, de marabouts et des
leaders traditionnels de Moura, de Digani, Ouro-Modi, Tonssa, Gossiri, Wandjèré,
Makamin, Djabé, Saré Amadou ont constitué une délégation pour rencontrer les
éléments de la Katiba Macina et solliciter le retour des populations déplacées dans
le village. Ces notabilités ont été toutes séquestrées par les éléments de la Katiba
Macina avant d’être relâchées entre 5 et le 15 juillet 2022.
30. Depuis 2012, plusieurs conflits armés non-internationaux coexistent au Mali et des
confrontations armées perdurent sur l’étendue du territoire opposant les Forces de
33
Ministère de la Défense et des Anciens Combattants, Tribunal Militaire de Mopti, Cabinet du Procureur de
la République, Communiqué (6 Avril 2022)
34
https://www.facebook.com/ministerereconciliationnationale/posts/1544072829327782/
35
Association malienne des droits de l’Homme (AMDH), Avocats sans frontières Canada (ASFC), la
Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et Amnesty International (AI), Allégations de crimes
contre des civil.e.s à Moura au Mali : une enquête indépendante doit avoir lieu (06 avril 2022)
<https://www.fidh.org/fr/regions/afrique/mali/crimes-civils-moura-mali-enquete-independante
33. Le droit international humanitaire interdit toute atteinte à la vie des civils et des
personnes mises hors de combat au pouvoir d’une partie au conflit. L’article 3
commun aux quatre Conventions de Genève applicable aux conflits armés non
internationaux énonce notamment que : « les personnes qui ne participent pas
directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé
les armes et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure,
détention, ou pour toute autre cause, seront, en toutes circonstances, traitées avec
34. Le Mali est partie aux principaux instruments juridiques internationaux relatifs aux
droits de l’homme.36 Le Mali est également partie aux principaux instruments
relatifs aux droits de l’homme de l’Union africaine et de la Communauté
économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Entre autres, le droit
international des droits de l’homme interdit la privation arbitraire de la vie, ainsi que
la torture et les peines ou traitements cruels ou dégradants et impose que toute
personne privée de liberté soit traitée avec humanité. Dans la mesure où des États
tiers opèrent au Mali, y compris par le déploiement du personnel de leurs forces
armés et de sécurité ou autres agents au Mali, leurs obligations en matière de droits
de l’homme, s’appliquent aux actes accomplis par ces États, y compris par leurs
agents, dans l’exercice de leur compétence en dehors de leur propre territoire.37
35. Les États ont une obligation de mener des enquêtes pour toute allégation de violation
du droit international humanitaire et du droit international des droits de l’homme.
Cette obligation est déclenchée chaque fois qu'il existe une indication plausible,
quelle qu'en soit la source, que des violations ont été commises y compris lorsque
les faits ne sont pas clairs ou que l'information est partielle ou circonstancielle. Ces
36
Il s’agit notamment du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, du Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, de la Convention internationale sur l’élimination de toutes
les formes de discrimination raciale, de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination
à l’égard des femmes, de la Convention relative aux droits de l’enfant, de la Convention contre la torture et
autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et de la Convention internationale sur la
protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
37
Article 2(1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques; Conséquences juridiques de
l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif, C.I.J Recueil 2004, par. 108 à
113 ; Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Ouganda), arrêt, C.I.J
Recueil 2005, par.216. Voir aussi A/HRC/43/35, para. 4. Voir aussi, Comité des droits de l’homme,
Observation générale no 36, para. 63, qui définit les « personnes relevant de sa compétence » comme incluant
« les personnes se trouvant à l’extérieur de tout territoire effectivement contrôlé par l’État mais dont le droit à
la vie est néanmoins affecté par ses activités militaires ou autres de manière directe et raisonnablement
prévisible», et souligne que les « États ont également l’obligation, au regard du droit international, de ne pas
apporter leur aide ou leur assistance à des activités menées par d’autres États ou par des acteurs non étatiques
qui constituent une violation du droit à la vie ».
(b) les violations du droit international humanitaire et du droit international des droits
de l’homme qui auraient été commises lors de l’opération militaire.
37. Au terme de son travail, la mission d’établissement des faits est en mesure de
conclure qu’une opération militaire dite « antiterroriste » a été menée par les Forces
Armées Maliennes, avec des éléments des forces spéciales et appuyées par des
personnels militaires étrangers du 27 au 31 mars 2022 à Moura. Sur la base des
éléments concordants recueillis, la reconstitution des évènements a permis d’établir
la chronologie des cinq jours de l’opération militaire qui se présente comme suit.
38
Le communiqué numéro 27 de l’EMGA précise que les forces armées ont engagé 5 hélicoptères dont 3 de
transport de type MI17, 2 de combat de type MI 35 et 4 groupements des Forces spéciales.
39
Localisation en annexe.
40
Localisation en annexe.
39. Dans le même temps, des éléments armés, membres de la Katiba Macina présents à
la foire au moment de l’assaut auraient riposté en tirant en direction des hélicoptères
et se repliant en même temps pour s’abriter dans des maisons.
40. L’assaut a duré trois heures. Elle a pris fin aux alentours de 14h00, lorsque la zone
a été totalement « maitrisée » par les Forces Armées Maliennes et les personnels
militaires étrangers. Environ une trentaine de personnes auraient été tuées au cours
de cet assaut dont environ une douzaine de membres de la Katiba Macina présents à
la foire, le reste étant composé majoritairement des civils. Par ailleurs, environ 3000
personnes, tous des hommes auraient été interpellés dans le village après l’assaut.
Ces personnes auraient été rassemblées en quatre (4) lieux. Un premier groupe
d’hommes a été rassemblé au nord-ouest du village, sur la route de Diabi, non loin
de la maison à étage (la seule du village). Un second groupe d’hommes a été
rassemblé au sud du village, non loin de la route de Gossiri, et deux autres groupes
du côté est du village, dans le lit asséché du fleuve. Selon les informations
recueillies, au moins 58 personnes auraient été arrêtées (sur base de leur apparence
physique) sur les 3,000 personnes regroupées dans le village. Ces personnes ont été
provisoirement détenues dans une maison du village du 27 au 30 mars. Un premier
groupe de 40 personnes et un deuxième groupe de 18 personnes ont été transférées
à Sévaré par hélicoptère le 30 mars 2022. Cinquante-et-un (51) d’entre elles ont été
conduites dans la soirée à Bamako où elles ont été transférées au Camp 1 de la
Gendarmerie de Bamako le lendemain matin. Pendant leur transfert, ils avaient tous
les yeux bandés. Certains ont, par la suite, été conduits à l’Agence nationale de la
sécurité d’état (ANSE) où ils ont été détenus quelques jours avant d’être ramenés au
Camp I. Pendant leur détention, ces personnes ont été interrogées et torturées. Sur
les 51 personnes transférées à Bamako, 47 ont été remises en liberté. Les quatre
autres étaient toujours en détention à la date de la finalisation du présent rapport.
41
Marché à bétail.
42. Les informations collectées ont permis d’établir que dès le premier jour de
l’opération, les militaires ont informé les populations qu’ils étaient à la recherche
d’individus suspectés d’appartenir à un groupe armé « extrémiste » dont ils avaient
les identités.
43. Le communiqué № 26 de l’Etat-Major général des Armées du 1er avril 2022 précise
que l’opération avait visé une « rencontre entre différents Katiba à Moura, fief des
terroristes depuis quelques années (...) ». Le communiqué № 27 du 5 avril 2022,
indique également que « (...) les renseignements obtenus par des moyens techniques
et électroniques ont été le fondement de la réussite de l’opération à Moura ». Le
même communiqué précise en outre que « (...) le contrôle de la localité a permis de
faire le tri, rechercher, identifier des terroristes déguisés et dissimulés parmi les
populations civiles (...) ».
44. Le lendemain dès 7h00 du matin, les militaires ont procédé à des fouilles dans les
habitations à la recherche des « présumés terroristes » dont ils avaient dit détenir la
liste. Ils se sont organisés par groupes de cinq ou six personnes. Au cours de cette
opération, ils se sont introduits dans chaque habitation et ont procédé à
l’interpellation des hommes qu’ils ont conduit par petits groupes vers les quatre lieux
de rassemblement. En fin de journée, l’Imam a été instruit pour faire une annonce
publique via des haut-parleurs pour demander aux hommes qui se cachaient encore
dans le village de se rendre le lendemain matin de leur propre gré au risque d’être
exécutés si les militaires les trouvaient ou de ne pas faire quartier.42
45. Le troisième jour, aux alentours de 8h00 du matin, à la suite de l’appel fait par
l’Imam la veille, certains hommes encore cachés dans le village se sont rendus aux
militaires. Ceux-ci ont été conduits vers les divers points de rassemblement. Comme
le jour précédent, les militaires ont effectué des fouilles approfondies dans les
42
Le devoir de faire quartier est une règle de base qui interdit d’attaquer une personne reconnue comme hors
de combat dans des situations de combat sur le champ de bataille. Il est interdit d’ordonner qu’il ne sera pas
fait quartier, d’en menacer l’adversaire ou de conduire les hostilités en fonction de cette décision.
46. Le quatrième jour, les fouilles des habitations se sont poursuivies à la suite
desquelles, des femmes, des enfants, des personnes âgées ainsi que des malades qui
se trouvaient dans les centres de santé ont été conduits vers les lieux de
rassemblement du côté sud-est et sud-ouest du village. Deux individus recherchés
par les Forces Armées Maliennes (dont l’un serait le point focal des groupes
« extrémistes » à Moura) ont été retrouvés ce jour et ont été transférées le même jour
par hélicoptère vers une destination inconnue. Ces deux individus ont par la suite
été mis à la disposition du Pôle judiciaire spécialisé de lutte contre le terrorisme et
la criminalité transnationale organisée.
47. Vers 9h00-10h00, les militaires ont rassemblé les quatre groupes de personnes dans
le lit du fleuve pour leur parler. Les militaires ont indiqué aux populations qu’ils
étaient venus faire « le nettoyage » des éléments « extrémistes » dans la zone. Ils ont
ensuite dit aux villageois de ramasser les cadavres des personnes tuées et éparpillés
dans le village et de les enterrer. Dans le même temps, quatre (4) individus parmi
dix (10) suspectés d’être des « terroristes » et qui étaient retenus au bivouac situé de
l’autre côté du fleuve se sont enfuis. Les militaires les ont cherchés en vain dans le
village et seraient ensuite revenus exécuter les six (6) restants alors qu’ils avaient les
mains attachées dans le dos. Vers 11h00, les militaires ont demandé à tout le monde
de retourner au village et ont commencé à quitter le village par voie aérienne.
48. La mission d’établissement des faits a documenté des cas d’exécutions sommaires
et extrajudiciaires, de viols et autre violences sexuelles ainsi que des actes de torture
et mauvais traitements perpétrées au cours de l'opération militaire. Elle a aussi
recueilli des éléments qui indiquent que les règles de la conduite des hostilités n’ont
pas été respectées.
1. Violations des règles et principes du droit international humanitaire
régissant la conduite des hostilités
49. Au terme de son travail, la mission d’établissement des faits a pu établir la tenue de
la foire hebdomadaire de Moura le 27 mars 2022. Il s’agissait de la foire la plus
importante de la localité qui a rassemblé des milliers de civils venus
s’approvisionner en prévision au démarrage du Ramadan. Les populations présentes
51. Comme mentionné plus haut, la mission d’établissement des faits a conclu que les
tirs effectués par les militaires lors de l’assaut du 27 mars 2022 auraient
mortellement atteint et de manière indiscriminée une vingtaine des civils. Par
ailleurs, il a été établi que même lorsque les Forces Armées Maliennes et les
personnels militaires étrangers ont pris le « contrôle » du village, ils auraient
sélectionné plusieurs centaines de personnes qui ont été sommairement exécutées
pendant au moins quatre jours. Cette opération au cours de laquelle plusieurs
centaines des personnes auraient été tuées soulève des préoccupations importantes
quant au respect des principes de la conduite des hostilités et surtout des règles
régissant le traitement des civils et des personnes hors de combat. L’opération
soulève également des préoccupations importantes quant au respect des normes et
standards du droit international des droits de l’homme.
43
CICR, Commentaire du Deuxième Protocole Additionnel aux Conventions de Genève, 1987, para 4787.
54. La présence d’une trentaine des membres de la Katiba Macina parmi des milliers de
personnes dans un marché ou parmi un groupe d’hommes ne suffit pas pour qualifier
les autres personnes présentes à la foire comme des membres d’un groupe armé sans
plus d’informations. Tout individu, sauf preuve contraire, est présumé civil. Dans
son communiqué du 1er avril 2022, l’Etat-Major général des Armées a indiqué avoir
été en possession des renseignements précis qui ont permis d’identifier les membres
des différents Katiba qui tenaient une réunion à Moura, considéré comme « fief des
terroristes » depuis des années et de mener l’opération militaire contre un
rassemblement des combattants. Toutefois, il semble difficile dans les circonstances
de la tenue d’une foire comme celle de Moura que les militaires aient pu déterminer
que toutes les personnes ciblées étaient des membres d’un groupe armé organisé.
Par ailleurs, des personnes hors de combat auraient été exécutées en violation des
règles portant sur le traitement des personnes hors de combat
44
Conformément à l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève, « (…) Les personnes qui ne
participent pas directement aux hostilités, y compris les membres de forces armées qui ont déposé les armes
et les personnes qui ont été mises hors de combat par maladie, blessure, détention, ou pour toute autre cause,
57. Le 27 mars 2022, premier jour de l’opération comme indiqué ci-dessus, les Forces
Armées Maliennes ainsi que les personnels militaires étrangers auraient interpellé
au moins 3.000 personnes, tous des hommes, tout âge confondu et les ont répartis
en quatre (4) groupes. Ces hommes auraient été triés en fonction des caractéristiques
physiques comme le fait de porter la barbe ; de porter un pantalon court au-dessus
la cheville ou d’avoir des marques sur l’épaule. Les personnes triées sur la base des
critères susmentionnés ont été conduites les mains attachées dans le dos par petits
groupes de 5 à 10 personnes, à environ 300 mètres des sites de rassemblement. Elles
auraient été exécutées sommairement par les militaires à proximité de la fosse
commune qui avait été creusée par des ressortissants de Moura sur ordre des
militaires.
58. Le 28 mars, un nombre indéterminé d’individus a également été tué dans des
circonstances similaires. Un témoin du groupe rassemblé au sud-est du village a
affirmé :
« Les individus ainsi sélectionnés étaient alors sortis du lot et
conduits derrière un muret situé à une trentaine de mètres puis
remis à deux autres militaires qui les exécutaient par balle pour
certains dans la tête, dans le dos pour d’autres ou sur la poitrine
pour d’autres encore. Les corps étaient ensuite jetés dans un
petit creuset45 qui a servi de fosse pour l’occasion. Ceux qui
résistaient ou essayaient de fuir étaient systématiquement
exécutés autant par les militaires « blancs » que les FAMa et
traînés dans la fosse. Les exécutions ont continué toute la
journée, c’était insupportable… ».
seront, en toutes circonstances, traitées avec humanité, sans aucune distinction de caractère défavorable
basée sur la race, la couleur, la religion ou la croyance, le sexe, la naissance ou la fortune, ou tout autre
critère analogue. À cet effet, sont et demeurent prohibés, en tout temps et en tout lieu, à l’égard des personnes
mentionnées ci-dessus : a. les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle, notamment le meurtre sous
toutes ses formes, les mutilations, les traitements cruels, tortures et supplices ; b. les prises d’otages ; c. les
atteintes à la dignité des personnes, notamment les traitements humiliants et dégradants ; d. les
condamnations prononcées et les exécutions effectuées sans un jugement préalable, rendu par un tribunal
régulièrement constitué, assorti des garanties judiciaires reconnues comme indispensables par les peuples
civilisés (…)».
45
Localisation en annexe.
60. Le 29 mars 2022, dans l’après-midi, entre 15h00 et 16h00, des militaires ont désigné
parmi les hommes détenus au bord du fleuve, quelques jeunes majoritairement
membres de la communauté bobo pour ramasser les corps dans le village à l’aide
d’au moins quatre charrettes tirées par des ânes. Les corps ont ensuite été amassés
du côté sud-est du village, près du petit creuset qui servait de fosse commune. En
effet ce creuset existait bien avant parce que la population du village de Moura en
extrayait de l’argile pour l’entretien des maisons. Les militaires ordonnaient ainsi
aux personnes qui n’avaient pas été identifiés comme djihadistes lors du tri, de
ramasser les corps au fur et à mesure des exécutions et de les jeter dans cette
« fosse ». Cette fosse a été par la suite agrandie afin de pouvoir contenir un
maximum de corps. Une fois la fosse remplie de cadavres, les militaires y ont mis le
feu avec de l’essence46 et du bois sec. La Mission d’établissement des faits a eu des
entretiens avec plusieurs témoins directs qui ont participé au ramassage et à
l’inhumation des corps dans ce creuset. Le décompte fait par ces témoins directs a
été presque le même (entre 170 et 190 corps pour certains et à peu près 200 corps
pour d’autres). Ce même jour, les militaires ont demandé aux « chefs de familles »
d’aller dans le village pour instruire les femmes et les enfants de sortir de leurs
maisons le lendemain. Selon un témoin, les militaires ont affirmé ceci :
61. Une seconde annonce a ainsi été faite par l’Imam du village pour demander aux
hommes qui se cachaient encore de se « rendre de leur plein gré ».
62. Le 30 mars 2022, aux environs de 9h00, les militaires ont procédé à un ultime tri au
sein des quatre groupes d’hommes regroupés aux divers lieux de rassemblement.
Plusieurs individus auraient été sommairement exécutés selon le même mode
opératoire des premiers jours sur la base des suspicions d’appartenance aux
« groupes extrémistes ». Plusieurs sources ont affirmé que les militaires ont fait
46
L’essence a été prise dans le village, chez un revendeur de carburant dont l’identité est connue et dont le
point de vente se trouve au niveau du port de pêche non loin de l’endroit où les hommes étaient retenus « Les
militaires sont passés à côté de moi avec deux bidons de 20 litres d’essence. Quelques minutes après j’ai
aperçu des flammes et la fumée là où ils faisaient les choses ».
63. La mission d’établissement des faits a pu établir que ce jour-là alors que les fouilles
étaient en cours et que les exécutions se poursuivaient, des rotations de troupes ont
été effectuées et par la même occasion, les militaires embarquaient des individus
vers une destination inconnue.
64. Le 31 mars 2022, les militaires ont indiqué aux populations qu’ils étaient venus faire
« le nettoyage » des éléments « extrémistes » dans la zone. Ils ont ensuite dit aux
villageois de ramasser les cadavres des personnes tuées et éparpillés dans le village
et de les enterrer. Dans le même temps, quatre (4) individus parmi dix (10) suspectés
d’être des « terroristes » et qui étaient retenus au bivouac situé de l’autre côté du
fleuve se sont enfuis. Les militaires les ont cherchés en vain dans le village et serait
ensuite revenus exécuter les six (6) restants alors qu’ils avaient les mains attachées
dans le dos. Vers 11h00, les militaires ont demandé à tout le monde de retourner au
village et ont commencé à quitter le village par voie aérienne.
65. Entre15h00 et 18h00, après le départ définitif des troupes militaires, les villageois
se sont mobilisés pour ramasser les cadavres se trouvant à différents endroits du
village. Selon les informations reçues par la mission d’établissement des faits des
charrettes47 ont été mises à contribution pour faciliter le ramassage des corps des
victimes. Environ 370 corps auraient été ramassés, dont une vingtaine de corps de
femmes et sept enfants. Les corps ramassés ce jour-là auraient été inhumés dans trois
fosses communes creusées par les villageois, notamment à proximité du cimetière
47
Les témoignages concordants indiquent qu’une douzaine de charrettes ont été utilisées.
66. Les jours suivants, d’autres corps ont été découverts dans les alentours du village et
ont été enterrés par les villageois dans la plupart des cas sur les lieux de leur
découverte du fait de leur état de putréfaction avancée.
48
Localisation en annexe.
49
Localisation en annexe.
50
Localisation en annexe.
51
Article 6(1) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Le droit à la vie est également
reconnu à l’article 6 de la Convention relative aux droits de l’enfant ; l’article 10 de la Convention relative
aux droits des personnes handicapées ; l’article 9 de la Convention internationale sur la protection des droits
de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ; ainsi que dans l'article 3 de la Déclaration
Universelle des droits de l’homme. Au niveau régional, voir l’article 4 de la Charte africaine des droits de
l'homme et des peuples.
52
Article 4 (2) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Voir aussi : Principes de base sur
le recours à la force et l'utilisation des armes à feu par les responsables de l'application des lois, principe 8.
53
L’article 3 commun aux Conventions de Genève interdit « les atteintes portées à la vie et à l’intégrité
corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes ...» des personnes civiles et des personnes qui ne
participent pas directement aux hostilités et les personnes qui ont été mises hors de combat. Par ailleurs,
conformément aux règles du droit international coutumier applicable dans les conflits armés internationaux et
les conflits armés non internationaux, « le meurtre est interdit » Règle 89.
54
Article 7(1)(a) du Statut de Rome.
55
L’exigence de traiter avec humanité est inscrite à l’article 3 commun aux Conventions de Genève. Cette
exigence est reconnue comme une garantie fondamentale par le Protocole additionnel II en son article 4 qui
dispose que « toutes les personnes qui ne participent pas directement ou ne participent plus aux hostilités,
qu'elles soient ou non privées de liberté, ont droit au respect de leur personne, de leur honneur, de leurs
convictions et de leurs pratiques religieuses. Elles seront en toutes circonstances traitées avec humanité, sans
aucune distinction de caractère défavorable. Il est interdit d'ordonner qu'il n'y ait pas de survivants ».
68. La mission d’établissement des faits a des « motifs raisonnables » de croire que des
viols et des actes de violences sexuelles ont été commis par des éléments des Forces
Armées Maliennes (FAMA) sur au moins 58 femmes et jeunes filles pendant toute
la durée de l’opération militaire. La mission a interviewé 15 victimes de viols.
D’autres victimes n’ont pas souhaité être entendues par les chargés des droits de
l’homme pour éviter d’être stigmatisées. La MINUSMA a appuyé la prise en charge
médicale et psychosociale de six (6) parmi les 15 victimes interviewées. Par crainte
de représailles et de stigmatisation, aucune d’elles n’a souhaité porter plainte.
69. Par ailleurs, des témoins ainsi que les victimes qui ont rapporté ces faits étaient en
état de choc et ont insisté sur la confidentialité de ces informations, précisant qu’au
terme d’un conseil des sages qui s’est tenu après le départ des militaires le 31 mars,
il a été décidé de ne pas révéler les cas de viol et de violences sexuelles dans l’ultime
objectif de protéger l’honneur et la dignité, de préserver la stabilité des foyers et des
familles et de lutter contre la stigmatisation des femmes et jeunes filles victimes.
70. Selon plusieurs témoignages des victimes et des habitants corroborés par ceux des
parents ou autres proches, les premiers viols ont eu lieu derrière la maison d’un jeune
connu de Moura. Il a été précisé au cours des témoignages que des militaires des
Forces Armées Maliennes ont fait sortir des couchettes qu’ils ont installées sous des
arbres dans un jardin où ils ont ensuite emmené des femmes qu’ils ont violées à tour
de rôle. D’autres actes de violence sexuelle se sont produits dans une maison située
au sud du village sur la route de Gossiri où des femmes s’étaient cachées.
71. Ces actes constituent des violations du droit international humanitaire56 et du droit
international des droits de l’homme. En effet, le viol peut constituer une violation
du droit à la sécurité de la personne, du droit d'être protégé de la torture et d'autres
56
Le viol et les autres formes de violence sexuelle sont interdits par l’article 3 commun aux Conventions de
Genève qui mentionne les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle. Le viol et les autres formes de
violence sexuelle sont interdits par la règle 93 du droit international coutumier applicable dans les conflits
armés internationaux et non internationaux.
72. Selon les informations recueillies, les militaires ont infligé des traitements
inhumains et dégradants ainsi que des actes de torture aux personnes capturées dans
le cadre de l’opération militaire conduite du 27 au 31 mars. Ces personnes ont été
torturées aussi bien à Moura, à Sévaré ainsi qu’à Bamako à l’Agence nationale de la
sécurité d’état (ANSE). Certaines l’ont été alors qu’elles étaient interrogées en
Bambara et en Peul sur leurs activités. Une victime a témoigné en ces termes :
57
Article 7 du Pacte international relative aux droits civils et politiques auquel le Mali est parti depuis le 16
juillet 1974 ; art. 5(b) de la Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
raciale à laquelle le Mali est partie depuis le 16 juillet 1974 ; articles 1 et 16 de la Convention contre la torture
et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants à laquelle le Mali est partie depuis le 26 février
1999 ; arts. 19, 37(a) de la Convention relative aux droits de l’enfant à laquelle le Mali est partie depuis le 20
septembre 1990 ; et articles 10, 16(1) et 16(2) de la Convention internationale sur la protection des droits de
tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille à laquelle le Mali est partie depuis le 05 juin
2003. Au niveau régional, voir l’article 5 de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples à laquelle
le Mali est partie depuis le 21 décembre 1981; les articles 11(3) et 14(2)(c) du Protocole à la Charte africaine
des droits de l'homme et des peuples relatif aux droits de la femme en Afrique ou Protocole de Maputo auquel
le Mali est partie depuis le 13 janvier 2005; les articles 16, 17(2)(a), 21, 22(1) et (3) ; 27 de la Charte africaine
des droits et du bien-être de l'enfant à laquelle le Mali est partie depuis le 3 Juin 1998; Les Lignes directrices
et mesures pour l'interdiction et la prévention de la torture, des peines ou traitements cruels, inhumains ou
dégradants en Afrique (Lignes directrices de Robben Island).
58
Article 12 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels auquel le Mali est partie
depuis le 16 juil. 1974. Voir également : Comité des droits économiques, sociaux et culturels - Observation
générale No. 14: Le droit au meilleur état de santé susceptible d'être atteint (Article 12), UN doc no :
E/C.12/2000/4 (11 août 2000) paragraphe 8.
59
Communications n° 262/2005, V.L. c. Suisse, Décision adoptée par le Comité contre la torture le 20
novembre 2006, para. 8.10 ; n° 279/2005, C.T. et K.M. c. Suède, Décision adoptée par le Comité contre la
torture le 17 novembre 2006, para. 7.5. Voir également Tribunal pénal international pour le Rwanda, Chambre
de première instance, Procureur c. Akayesu, ICTR-96-4-T, Jugement du 9 février 1998, paras. 597, 687 ;
Tribunal international chargé de juger les personnes présumées responsables de violations graves du droit
international humanitaire commises sur le territoire de l'ex-Yougoslavie depuis 1991, Procureur c. Zejnil
Delali et al, IT-96-21-T, Jugement du 16 novembre 1998, para. 495 ; Cour européenne des droits de l'homme,
Grande Chambre, requête no 23178/94 Aydin c. Turquie, arrêt du 25 septembre 1997, par. 86 ; Commission
interaméricaine des droits de l'homme, affaire 10.970, Marti de Mejia c. Pérou, rapport 5/96, section B.3(a),
1er mars 1996.
60
Le viol et les autres formes de violence sexuelle sont interdits – règle 93 : Cette règle constitue une norme
de droit international coutumier applicable dans CAI et CANI. L’article 3 commun aux Conventions de
Genève mentionne aussi les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle.
61
Article 8(2)(e)(vi) du Statut de Rome.
62
Article 7(1)(g) du Statut de Rome.
74. Le droit international humanitaire interdit également de manière claire la torture des
civils et d'autres personnes ne prenant pas une part active aux hostilités, y compris
les personnes hors de combat et les autres personnes qui bénéficient d'un statut
protégé.66 Les traitements cruels et les traitements inhumains sont interdits par le
63
Article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; Convention contre la torture et autres
peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ; article 5(b) de la Convention internationale sur
l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale ; article 37(a) de la Convention relative aux droits
de l’enfant ; articles 10 et 16(2) de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les
travailleurs migrants et des membres de leur famille. En vertu de l'art. 10(1) du Pacte international relatif aux
droits civils et politiques, les États ont également l'obligation positive de veiller à ce que les personnes privées
de liberté soient traitées avec humanité et dans le respect de leur dignité. Au niveau régional, voir : article 5
de la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, articles 16, 17(2)(a) de la Charte africaine des
droits et du bien-être de l'enfant ; Commission africaine des droits de l'homme et des peuples, Lignes
directrices et mesures pour l'interdiction et la prévention de la torture, des peines ou traitements cruels,
inhumains ou dégradants en Afrique (Lignes directrices de Robben Island).
64
Article 4(2) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; articles 2(2) et (3) de de la
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Voir également
Comité contre la torture, Observation générale n° 2, Application de l’article 2 par les États parties, paras. 1 et
5.
65
Article 7(1)(f) du Statut de Rome de la Cour pénale internationale.
66
En ce qui concerne les conflits armés non internationaux voir : Article 3 commun aux Conventions de
Genève et l’article 4(2)(a) du Protocole additionnel II (s'appliquant tous deux aux personnes civiles et aux
personnes qui ne participent pas ou plus activement aux hostilités). Voir également : Jean-Marie Henckaerts
et Louise Doswald-Beck, Droit International Humanitaire Coutumier. Volume I : Règles (Bruylant, 2006)
règle 90 <https://www.icrc.org/fr/doc/assets/files/other/icrc_001_pcustom.pdf>.
67
Outre la règle selon laquelle les personnes doivent être traitées avec humanité (article 3 commun aux
conventions de Genève et article 4(1) du Protocole additionnel II art. 4(1)), il existe également une interdiction
explicite du "traitement cruel" dans l'article 3 des Conventions de Genève et dans ; et l’article art. 4(2)(a)du
Protocole additionnel II. Voir aussi : Jean-Marie Henckaerts et Louise Doswald-Beck, Droit International
Humanitaire Coutumier. Volume I : Règles (Bruylant, 2006) règle 90
<https://www.icrc.org/fr/doc/assets/files/other/icrc_001_pcustom.pdf>.
68
Article 8(2)(c) du Statut de Rome de la Cour pénale internationale
69
Selon les informations recueillies par la mission d’établissement des faits, le 29 mars, dans l’après-midi,
entre 15h00 et 16h00, des militaires ont désigné parmi les hommes détenus au bord du fleuve, quelques jeunes
majoritairement membres de la communauté bobo pour ramasser les corps dans le village à l’aide d’au moins
quatre charrettes tirées par des ânes. Les corps ont ensuite été amassés du côté sud-est du village, près d’un
petit creuset qui servait de fosse commune. Le décompte fait par ces témoins directs a été presque le même
(entre 170 et 190 corps pour certains et à peu près 200 corps pour d’autres) (voir paragraphe 60 du
rapport). Le 31 mars, entre15h00 et 18h00, après le départ définitif des troupes militaires, les villageois se
sont mobilisés pour ramasser les cadavres se trouvant à différents endroits du village. Selon les informations
reçues par la mission des charrettes ont été mises à contribution pour faciliter le ramassage des corps des
victimes. Environ 370 corps auraient été ramassés, dont une vingtaine de corps de femmes et sept
enfants. Les corps ramassés ce jour-là auraient été inhumés dans trois fosses communes creusées par les
villageois, notamment à proximité du cimetière du village ; au sud-ouest du village sur la route de Gossiri et
au nord-est sur la route de Diabi (voir paragraphe 65 du rapport).
70
Localisation en annexe.
71
Localisation en annexe.
72
Localisation en annexe.
A la MINUSMA :
• de soutenir les efforts des autorités maliennes de transition dans le cadre de la lutte
contre l’insécurité au Mali et appuyer les autorités nationales dans leurs efforts de
lutte contre l’impunité.
• d’assurer des enquêtes sur les possibles violations du droit international humanitaire
et du droit international des droits de l’homme commis par leurs ressortissants et le
cas échéant, poursuivre les suspects.
• de respecter leurs obligations en droit international des droits de l’homme et en droit
international humanitaire, dans la mesure où des membres de leurs forces armées et
de sécurité ou d’autres agents de l’état seraient déployés au Mali et participent aux
opérations de sécurité.
-4.599989, 14.324590
-4.602691, 14.328581
-4.597770, 14.325698
-4.595620, 14.328937
-4.601830, 14.325960
-4.603787, 14.330834
-4.600789, 14.324546
-4.605182, 14.329618
-4.603131, 14.329781
-4.600974, 14.326442