Conseil International Pour L'Exploration de La Mer: Impact de L'Extraction de Granulats Marins Sur Le Milieu Marin

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CONSEIL INTERNATIONAL

POUR L'EXPLORATION DE LA MER

IMPACT DE L'EXTRACTION DE GRANULATS


MARINS
SUR LE MILIEU MARIN

Michel DESPREZ

GROUPE D'ETUDE DES MILIEUX


ESTUARIENS ET LITTORAUX
CONSEIL INTERNATIONAL
POUR L'EXPLORATION DE LA MER

IMPACT DE L'EXTRACTION DE GRANULATS


MARINS
SUR LE MIUEU MARIN

Michel DESPREZ

GROUPE o•ETUDE DES MILIEUX


ESTUARIENS ET LITTORAUX
AVANT- PROPOS 1

Ce document, rédigé à l'issue de la réunion de travail annuelle du Groupe de


Travail sur les "Effets de l'extraction de sédiments marins sur les pêches" (!CES-
meeting n• 53; Council Resolution 2:43), constitue plus que le simple compte-rendu
des travaux de cette réunion qui s'est tenue à St Valery-sur-Somme du 11 au 14 mai
1993.

En effet, dans la conjoncture actuelle de raréfaction des ressources


traditionnelles et de report potentiel de l'effort d'extraction vers le milieu marin, il était
souhaitable que ce document dresse le bilan le plus exhaustif possible des
connaissances acquises à ce jour sur l'impact de l'exploitation des granulats marins.
C'est pourquoi il constitue la synthèse de plusieurs rapports :

- le rapport des recherches collectives (n" 182) effectuées de 1986 à 1990;


-les rapports annuels 1991 (CM 1991/E:13), 1992 (CM 1992/E:?) et 1993 (CM
1993/E:?).

2
SOMMAIRE

RESUME

1. INTRODUCTION

2. L'EXTRACTION DE GRANULATS MARINS

2 1. Situation dans les Pays Membres du CIEM

2 2. Discussion

3. CARTOGRAPHIE DES RESSOURCES

3 1. Introduction

3 2. Revue par pays

4. IMPACT DES ACTIVITES D'EXTRACTION SUR LE MILIEU, LES


RESSOURCES VIVANTES ET LES PECHES

4 1. Impact physique

4 2. Impact chimique

4 3. Impact biologique
4 3 1. Nature et intensité du dragage
4 3 2. Nature des nouveaux sédiments du site d'extraction
4 3 3. Sensibilité du benthos aux prélèvements et aux dépôts de
sédiments
4 3 4. Recolonisation benthique
4 3 5. Espèces et communautés sensibles : incidence sur les
pêches

4 4. Estimation de l'échelle d'impact


4 4 1. Introduction
4 4 2. France & Pays-Bas
4 4 3. Grande-Bretagne
4 4 4. Conclusion

4 5. Impact des activités de pêche

4 6. Interactions bénéfiques

3
5. CONTROLE

5 1. Législation

5 2. Résolution d'un conflit entre les intérêts de la pêche et de


l'extraction de granulats marins : l'expérience française

5 3. Considérations scientifiques et permis d'exploitation : Evaluation de


l'impact sur l'environnement

5 3 1. Informations nécessaires
5 3 1 1. Nature du dépôt
5 3 1 2. Environnement physique
5 3 1 3. Environnement biologique
5 3 1 4. Interférences avec les autres utilisations de la mer

5 3 2. Préparation de l'évaluation et bilan de l'environnement

53 3. Suivi
5 3 3 1. Définition
5 3 3 2. Modalités
5 3 3 3. Conseils

6. RECOMMANDATIONS POUR LES RECHERCHES A MENER

6 1. Axes de recherche à développer

6 2. L'expérience française

ANNEXES

Annexe 1 Collaborateurs de ce rapport

Annexe 2 Liste des participants au Groupe de Travail1993


(St Valery/Somme, 11-14 mai)

Annexe 3 : Code de conduite pour l'extraction commerciale de


sédiments marins

REMERCIEMENTS

4
1 RESUME 1

Introduction

Les granulats (sables et graviers) sont une matière prem1ere recherchée


principalement pour la construction et pour des projets de poldérisation et de
renforcement de plages.

Du fait de la diminution des ressources terrestres, la pression augmente dans


de nombreux pays membres du CIEM pour répondre à la demande avec des
matériaux d'origine marine.

Cette évolution conduit à augmenter les risques de conflit entre l'industrie


d'extraction de granulats marins et les autres utilisateurs du milieu marin, en particulier
l'industrie de la pêche.

Le Groupe de Travail du CIEM sur les "Effets de l'Extraction de Sédiments


Marins sur les Pêches" a été créé en 1986 dans le but d'accroître la connaissance et
la compréhension de l'impact des activités d'extraction de granulats marins, en
particulier sur les pêches et plus généralement sur l'environnement marin, mais aussi
pour examiner les procédures de suivi adoptées par les pays membres du CIEM pour
contrôler ce type d'activité.

Ce rapport dresse le bilan des problèmes engendrés par les activités


d'extraction sur la pêche, la navigation, l'érosion littorale et les écosystèmes
benthiques, mais il fait également état de certaines conséquences positives des
extractions sur l'environnement marin.

Ce rapport reflète les principaux objectifs du Groupe de Travail avec une


attention particulière pour :
- les activités d'extraction et d'aménagement littoral sur le plateau continental
des états membres du CIEM;
- l'impact de l'extraction sur les ressources vivantes et les pêches ;
- la gestion de cette ressource minérale, comprenant la règlementation, la
résolution des conflits potentiels et le suivi de cette activité.

5
Statut de l'extraction de granulats marins

Cette industrie est bien établie et en expansion dans certains pays membres du
CIEM où elle contribue jusqu'à 15% de la demande nationale en sables et graviers.

Les principales utilisations des granulats marins résident dans des projets de
construction (infrastructures routières, aménagements portuaires), dans des plans de
renforcement de plages et de poldérisation (digues), et dans la création d'îles
artificielles.

Cartographie des ressources

La cartographie des sédiments marins superficiels progresse dans la plupart


des pays membres du CIEM ; des programmes de cartographie des ressources en
granulats ont été lancés dans quelques pays, mais ils sont très en retard par rapport à
ceux des sédiments superficiels.

Impacts physiques et chimiques

Les impacts physiques de l'extraction de granulats marins concernent


l'altération de la topographie des fonds par enlèvement de sédiments, l'augmentation
de turbidité dans la colonne d'eau et le dépôt des sédiments entraînés avec les eaux
de surverse de la drague.

La nature de ces impacts varie selon la méthode de dragage, son intensité et le


site d'extraction.

Les impacts physiques du chalutage sont semblables par certains aspects à


ceux du dragage mais, dans la plupart des secteurs géographiques considérés,
affectent une proportion beaucoup plus grande des zones côtières.

Les impacts chimiques de l'extraction sont considérés comme mineurs du fait


des faibles teneurs en matière organique et en argile des matériaux extraits.

Impact biologique

L'impact biologique d'une opération d'extraction dépend beaucoup de la nature


des impacts physiques et des communautés benthiques indigènes; il est donc très
spécifique.

Les espèces potentiellement menacées par l'extraction de granulats marins


sont principalement le lançon (équille}, le hareng, le tourteau ainsi que les algues
calcaires contenues dans les fonds de maërl.

6
Une approche pour quantifier l'impact des extractions sur la faune marine et les
pêches a été esquissée. Des études réalisées en Mer du Nord montrent que, à moins
de perturber des secteurs de frayères, les conséquences sur les stocks de poissons
sont faibles.

Réglementation

La plupart des pays membres du CIEM ont une législation et des procédures de
révision établies pour traiter les demandes d'extraction de granulats en mer.

Les critères scientifiques à prendre en considération lors du dépôt des permis


d'extraction doivent inclure les effets potentiels sur la stabilité du littoral. La méthode
de dragage, la quantité totale de granulats à extraire et le rythme d'exploitation doivent
tous être précisés dans la demande de permis d'extraction comme moyen de contrôler
l'impact potentiel de l'opération.

Un "Code de conduite pour l'extraction des minéraux marins" est proposé; il est
destiné à instaurer une bonne relation de travail entre l'industrie d'extraction et les
autres utilisateurs du milieu marin. Un accent particulier est mis sur l'évaluation des
demandes de prospection et d'extraction afin de minimiser le conflit potentiel entre les
industries de dragage et de pêche et d'optimiser l'utilisation des ressources marines.

Contrôle

L'utilisation d'instruments de contrôle électronique à bord des dragues doit être


encouragée aussi bien pour les besoins de compagnies de dragage que ceux des
autorités de tutelle.

Le suivi physique et biologique des opérations d'extraction est nécessaire à la


protection de l'environnement marin et littoral en général et des ressources
halieutiques en particulier.

7
1 INTRODUCTION

Le Groupe de Travail sur les Effets de l'Extraction de Sédiments Marins sur les
Pêches a pour missions :
- la mise à jour du statut des opérations d'extraction en mer et de leur impact
sur l'environnement ;
- l'examen des résultats des programmes de recherche nationaux sur l'impact
des opérations d'extraction sur l'environnement marin et plus particulièrement sur les
pêches;
- la comparaison des codes de conduite nationaux pour le contrôle des
activités de dragage et leur évolution depuis 1979 ;
- la mise à disposition d'informations sur le développement à court-terme de
cette activité et son impact possible sur l'environnement marin et les pêches;
- l'établissement de recommandations sur la gestion des extractions mais aussi
sur les recherches à promouvoir.

Ce Groupe réunit des représentants d'instituts de recherche et d'organismes


gouvernementaux impliqués dans les domaines de la pêche, de la géologie, du suivi
de l'environnement et de la législation de l'extraction des ressources minérales
d'origine marine (Annexe 1).

Le C.I.E.M. a chargé le Groupe de Travail de mener à bien les tâches suivantes


au cours de la réunion de Saint-Valery-sur-Somme (France) du 11 au 14 mai 1993
(Annexe 2):

1. examiner le statut des activités d'extraction de granulats marins et l'état


d'avancement de la recherche associée à cette activité, dans les pays membres du
CIEM;

2. examiner le développement de la cartographie des ressources minérales


marines dans les pays membres du CIEM ;

3. comparer les résultats d'études d'impact sur l'environnement réalisées en


France et aux Pays-Bas en liaison avec l'extraction des granulats marins;

4. faire des recommandations sur le contenu des études d'impact sur


l'environnement qui, en accord avec le "Code de Conduite pour l'Exploitation
Commerciale des Minéraux Marins", peuvent être réalisées avant l'extraction des
matériaux marins ;

5. examiner le développement et la mise en oeuvre des systèmes de


surveillance électronique ("boîtes noires") pour le contrôle de l'activité des dragues ;

8
2 L'EXTRACTION DE GRANULATS MARINS

2 1. Situation dans les Pays Membres du CIEM

Belgique:

L'extraction de granulats se concentre dans 2 secteurs (Zealand Banks et


Flemish Banks) avec une intensité moyenne de 1 million de m3 par an.

Canada:

La plupart des opérations de dragage correspondent à des travaux de


maintenance de chenaux de navigation; ces projets varient de quelques centaines à
plusieurs centaines de milliers de m3. Les quantités totales draguées dans les quatre
provinces atlantiques étaient de 485 000 m3 en 1990, 980 000 m3 en 1991 et 325 000
m3 en 1992.

Une petite extraction expérimentale devrait commencer en 1994 avec un point-


zéro biologique, puis un suivi en 1995 et 1996 pour étudier la recolonisation du
benthos.

Danemark:

L'extraction de granulats est largement développée dans les eaux côtières


danoises et dans un site situé en Mer du Nord; les ressources marines fournissent 10
à 15% des besoins nationaux pour la construction et la poldérisation.
Depuis 1990, plus de 9 millions de m3 ont été dragués pour la construction du
pont et du tunnel reliant la Suède au Danemark, tandis que 3 millions de m3 de sables
sont annuellement utilisés pour le renforcement des plages de la côte ouest (Jutland).

L'exploitation de sables et graviers marins devrait augmenter dans les


prochaines années avec l'épuisement des ressources terrestres (expiration des permis
en cours et conflits croissants en terme d'environnement dans les secteurs potentiels
d'extraction).

En 1994, 4 millions de m3 de sables devraient être dragués en liaison avec la


construction du lien fixe entre le Danemark et la Suède.

Finlande:

L'extraction de 17 millions de m3 de granulats est prévue pour la période 1990-


1997 dans trois secteurs principaux: Helsinki (constructions et aménagements
portuaires), Kotka (aménagements portuaires) et Hailuata Island (pont).

9
France:

Malgré une demande importante, l'extraction est limitée à quelques sites pour
les matériaux siliceux (Dieppe, Lorient, Nantes, La Rochelle, Royan) qui produisent
environ 2 millions de m3 par an. La production de matériaux calcaires (sable coquillier
et maërl}, qui est de 450 000 m3 par an, est traditionnellement localisée en Bretagne
(fig. 1).

De 1977 à 1988, la contribution des granulats marins aux besoins nationaux est
restée constante et très limitée (environ 1%). Une évolution s'observe depuis 1989 et
devrait conduire à une augmentation des extractions marines dans un futur proche.

Irlande:

Aucune extraction significative de granulats marins n'a eu lieu ces dernières


années, mais plusieurs demandes sont à l'étude.

Pays-Bas:

Des sables sont extraits du secteur néerlandais de la Mer du Nord; utilisés pour
les projets de poldérisation, de renforcement de plages ou pour la construction, ils ont
deux origines principales :
- l'entretien et l'agrandissement des chenaux d'accès aux ports (Rotterdam,
Amsterdam, ljmuiden, puis Escaut et Mer des Wadden à une échelle moindre) ;
- le plateau continental, au-delà de 20 m de profondeur, qui alimente
exclusivement les projets d'engraissement de plages.

La production de ces sables a augmenté de 2 à 9 millions de m3 entre 1986 et


1989 pour satisfaire les schémas de poldérisation; cette augmentation reflète la
politique néerlandaise de favoriser l'extraction en mer et limiter au maximum celle à
terre; elle s'est stabilisée depuis 1990 :

1990 1991 1992


Rotterdam 2,8 2,7 3,9
ljmuiden 4,7 3,6 2,8
Plateau Continental 3,6 5,7 5,2
.... 11~1·• 12;0
TOTAL ····•·•···················· · · ·••·
L'augmentation des extractions sur le plateau continental est due à ce que
l'engraissement artificiel des plages constitue l'une des méthodes les plus
économiques pour l'équilibre du littoral et qu'elle nécessite en moyenne de 5 à 1 0
millions de m3 par an.

Aucune extraction de graviers n'a eu lieu ces trois dernières années, à


l'exception d'une expérience-pilote sur le Klaverbank, en Mer du Nord, qui représente
le seul site potentiel d'exploitation industrielle en mer.

10
Le gravier est aujourd'hui importé ou extrait de sites continentaux (Limburg)
dont les réserves ne représentent que 30 à 40 ans d'exploitation. Les ressources
marines étant également limitées, les Pays-Bas favorisent le recyclage des matériaux
durs.

Norvège:

L'extraction, règlementée depuis 1970, est très limitée (66 000 m3 en 1989}.

Suède:

La situation est identique à celle de la Norvège du fait d'importantes réserves


terrestres.
1989 70 500 m3
1991 100 000 m3
1992 37 500m3

Les extractions sont localisées principalement dans le "Sound" pour la


construction du pont qui reliera ce pays au Danemark. Deux compagnies possèdent
un permis et un renouvellement pour une période de 10 ans a été déposé.

Grande-Bretagne :

Ce pays, deuxième producteur mondial de granulats marins après le Japon, voit


cette activité concentrée essentiellement en Angleterre et au Pays de Galles.

La production totale de granulats marins a été de 20,5 millions de tonnes en


1992 dont 13 millions destinés à la construction (contre 21 millions de tonnes en 1989}
et 6,3 millions de tonnes pour l'exportation.

Les prévisions pour 1994 sont stables pour ces deux utilisations mais en
hausse pour le renforcement de plages (5 millions de tonnes/an à partir de 1995 contre
1,3 million de tonnes en 1992).

Les réserves totales de granulats marins restent à quantifier précisément mais


se situent probablement entre 400 et 500 millions de tonnes, ce qui suppose leur
épuisement d'ici 20 ans, au rythme actuel d'exploitation.

Etats-Unis :

La seule extraction marine d'ordre commercial consiste dans le dragage du


chenal d'accès au Port de New-York (750 000 m3fan) dont les sables et graviers sont
utilisés pour la poldérisation et la construction.

11
A la suite de l'importante érosion des plages atlantiques liée aux tempêtes
hivernales exceptionnelles de 1991-92 et 1992-93, on estime que de 2 à 5 millions de
m3 sont dragués chaque année pour le renforcement de plages, la moitié provenant de
travaux d'entretien de chenaux d'accès.

Un intérêt supplémentaire des dragages sublittoraux serait de fournir des


matériaux de recouvrement de dépôts de dragage contaminés en provenance de
ports, dépôts qui sont traditionnellement rejetés au large.

2 2. Discussion

Le Groupe de Travail souhaite prendre en considération aussi bien les


statistiques de dragage d'entretien de chenaux que celles d'extraction de matériaux
afin de dresser une image complète de la nature et de l'ampleur, et donc des effets, de
l'activité de dragage.

Le Groupe de Travail demande que chaque pays-membre fournisse des


statistiques sur 10 ans sur une même base de données (définitions, unités ... ).

Le Groupe de Travail considère la nécessité d'informations supplémentaires sur


les besoins futurs en matériaux pour la construction et le renforcement de plages.

12
3 CARTOGRAPHIE DES RESSOURCES

3 1. Introduction

Une pression croissante est exercée dans le monde entier sur l'environnement
marin, tant côtier que du large, en tant que lieu de ressources exploitables. L'intérêt
croissant pour ces activités conduit à un risque accru de conflits entre les différents
types d'exploitation et de préservation de ce milieu.

La demande d'une coordination plus systématique a augmenté parallèlement à


celle d'une meilleure connaissance de l'environnement marin. Les techniques actuelles
permettent une cartographie précise des fonds et la plupart des pays ont mis en place
leurs propres programmes au cours des dix dernières années, malheureusement sans
véritable concertation. C'est pourquoi il existe une grande variabilité dans les
méthodes et techniques de suivi, les échelles cartographiques, les informations
présentées ainsi que dans l'avancement de la publication de ces cartes.

La plupart des pays entreprenant de tels suivis éditent des cartes de distribution
des sédiments marins. Quelques pays, comme la Grande-Bretagne, sont bien
avancés dans la couverture systématique de leurs fonds marins. Cette information est
intéressante pour l'industrie d'extraction de granulats mais le type d'information et
l'échelle des cartes sont souvent insuffisants pour une évaluation précise des
ressources.

C'est pourquoi des programmes de cartographie des ressources ont récemment


été lancés dans quelques pays, avec publication de cartes et rapports. L'information y
est présentée à différentes échelles, la plus communément choisie étant celle au 1:
100 000.

Des échanges d'informations et d'idées sur les procédures de cartographie ont


régulièrement lieu parmi les pays membres du CIEM. Ils ont parfois donné lieu à la
publication commune de certaines cartes, comme pour le secteur sud de la Mer du
Nord par la Grande-Bretagne et les Pays-Bas.

Si ces approches conduisent à de bons résultats du point de vue de l'industrie


d'extraction de granulats, il y manque la nécessaire prise en compte d'une gestion
rigoureuse des ressources ou d'une solide réglementation de l'extraction.

13
3 2. Revue par pays

Belgique:

La carte des sédiments superficiels au 1: 250 000 du secteur d'Ostende a été


publiée en 1991, complétant la cartographie systématique de la Mer du Nord par les
Pays-Bas et la Grande-Bretagne .
Cette cartographie des ressources minérales situées au large se poursuit sous
la responsabilité du Service des Recherches Géologiques et avec l'aide de l'Université
de Gand et du Ministère de l'Agriculture et des Pêches.

Canada:

Un programme de cartographie a été mené dans les années 1970 et 1980 dans
la zone des 200 milles nautiques, soit un secteur de 1,6 million de km2 • Mais ce travail
représentant peu d'intérêt pour les ressources minérales (échelle, moyens techniques
inadaptés), une cartographie plus détaillée est actuellement planifiée, plus
particulièrement au large de la Nouvelle-Ecosse, avec recensement des données
existantes en 1993, puis campagnes de prospection en 1994-96. Des informations de
base sur l'environnement (biologie, géologie) seront également collectées.

Danemark:

Une carte des sédiments superficiels du Sound au 1: 100 000 a été publiée en
1990.
Une carte d'ensemble au 1 : 500 000 des sédiments de la marge continentale
danoise a été publiée en 1992.
La reconnaissance des principaux secteurs de blocs glaciaires a été effectuée
de 1991 à 1993 et sera suivie d'une cartographie biosédimentaire.
La cartographie systématique des ressources se poursuit actuellement en Mer
du Nord avec des documents au 1: 100 000 (sédiments superficiels, géologie,
ressources en sables et graviers et informations biologiques). En 1993, près de 90%
des secteurs de ressources potentielles seront cartographiés.

Finlande:

La cartographie des fonds a débuté à la fin des années 1970 pour atteindre un
rythme régulier à partir de 1983.

France:

Le Bureau de Recherches Géologiques et Minières (B.R.G.M.) est responsable


de la cartographie géologique tant terrestre que marine, tandis que I'IFREMER, en
collaboration avec les Universités, réalise des cartes thématiques en milieu marin.

14
L'identification des réserves de granulats marins du plateau continental est le
résultat de 12 ans d'études de I'IFREMER, avec estimation de 33 milliards de m3 de
matériaux siliceux et 5 milliards de m3 de matériaux calcaires (fig. 2).

Depuis 1985, I'IFREMER publie des cartes morphosédimentaires des fonds


marins pour les secteurs potentiels d'extraction. Ces cartes, d'échelle variable selon
les sites (1: 15 000 à 1 : 43 400) existent pour certains secteurs côtiers du Nord/Pas-
de-Calais, de Bretagne, de Méditerranée, de Guadeloupe et de Haute-Normandie. La
cartographie est en cours pour la Martinique.

Irlande:

Le programme de cartographie des ressources au 1 : 250 000, initié en 1976,


concerne les sables et graviers, le charbon, les hydrocarbures, les routes potentielles
de pipelines, la géologie quaternaire, les secteurs de pêche et les ressources
benthiques.

Pays-Bas:

Trois programmes de cartographie sont menés dans le secteur néerlandais de


la Mer du Nord :
- une carte au 1: 1 000 000 des sédiments de tout le secteur néerlandais de la
Mer du Nord est disponible avec des informations sur les fractions sableuses et la
fraction vaseuse.
- une cartographie au 1: 250 000, initiée en 1980 avec la Grande-Bretagne, se
poursuit.
-une cartographie détaillée au 1: 100 000, initiée en 1985, concerne la frange
littorale et présente :
+ la nature des deux premiers mètres de sédiments et le potentiel de
granulats (granulométrie, teneur en vases et en graviers);
+ la géologie du substratum.
La première carte est publiée, d'autres sont en préparation.

Suède:

A la suite d'une décision gouvernementale de 1988, les fonds suédois seront


cartographiés au 1: 100 000 d'ici 2050, soit une moyenne annuelle de 2 500 km2 • Les
informations porteront sur la distribution des sédiments superficiels (0,5 m), sur la
stratigraphie jusqu'au substratum, mais aussi sur les teneurs en polluants (40
éléments). A ce jour, environ 10% de la marge continentale a été cartographiée. Les
cartes du Kattegatt seront publiées en 1993-94, puis celles de la Baltique.

Une carte générale au 1 : 3 000 000 (Golfe de Botnie, Baltique, Kattegatt,


Skagerrak) a été publiée en 1992, ainsi qu'une carte au 1: 500 000 commune au
Danemark et à l'ouest de la Suède.

15
Grande-Bretagne :

Initié en 1969, le programme de cartographie de la marge continentale


britannique s'est achevé en 1992.
Les cartes au 1 : 250 000, résumées dans des cartes au 1 : 1 000 000,
présentent les sédiments superficiels et la géologie du substratum.

Un programme "Ressources de Granulats Marins", lancé en 1986 dans la partie


Sud de la Mer du Nord, s'est poursuivi en Manche (1988), sur la Côte Est (1990) et en
Mer d'Irlande (1992).

Etats-Unis :

Le programme de cartographie des fonds au 1: 1 000 000 se poursuit.

Un programme coordonné de cartographie au 1: 250 000 est en cours sur le


Georges Bank pour étudier les relations entre nature des fonds et distribution des
pêches; les cartes montrent :
- la topographie,
- la nature des sédiments et des courants,
- la distribution des jeunes morues en fonction de la présence de graviers et
celle des coquilles Saint-Jacques en fonction de la présence de sables mobiles.

16
4 IMPACT DES ACTIVITES D'EXTRACTION SUR LE MIUEU, LES
RESSOURCES VIVANTES ET LES PECHES

4 1. Impact physique

La modification de la topographie du fond liée au prélèvement de sédiment


est la conséquence la plus immédiate de l'activité de dragage.
Le prélèvement d'une épaisseur significative de sédiment par une drague
aspiratrice peut provoquer une chute localisée de l'intensité des courants de fond du
fait de l'augmentation de profondeur, permettant le dépôt de sédiments plus fins.
Le remplissage des puits et sillons de dragage est souvent très lent, sauf dans
les secteurs de sables mobiles et dans les zones de forte turbidité.
Les intérêts des pêches sont plus sérieusement affectés par les processus de
dragage lorsque des zones d'extraction de granulats coïncident avec .des zones de
frayères

Le dragage entraîne la création d'un panache turbide dans la colonne d'eau.


Son importance dépend de la proportion de vases dans le sédiment et de la turbidité
naturelle de l'eau.
La persistance de ce panache dépend de facteurs hydrodynamiques (intensité
des courants, de la houle ... ) et de la taille des particules remises en suspension.
La production primaire de la colonne d'eau peut être soit augmentée soit
diminuée selon la capacité du zooplancton à réagir à l'augmentation des teneurs en
nutriments et autre matériel remis en suspension.
Certaines espèces de poissons se nourrissant à vue, comme le maquereau et
le turbot, peuvent éviter la zone turbide.
D'autres, au contraire, peuvent être attirées vers la zone de dragage par
l'abondance des espèces benthiques endommagées lors du processus d'extraction et
rejetées avec les eaux de surverse.

Le dépôt du matériel fin du panache sera particulièrement important dans la


zone de dragage ; son extension hors de cette zone dépendra de la force des
courants, de la salinité et de la température de l'eau, ainsi que de la taille des
particules en suspension.
Le dépôt de sable par surverse peut modifier de façon significative le sédiment
et transformer un banc en équilibre dynamique en zone instable. A Dieppe, le
sédiment initial sable-graveleux a été progressivement remplacé par un sédiment fin
qui s'est accumulé dans les sillons de dragage après plusieurs années d'exploitation
(cf§ 442).
Les conséquences majeures de ces dépôts sont l'enfouissement d'oeufs de
poissons dans des zones de frayères (équille, hareng) et l'asphyxie d'espèces
benthiques filtre uses (moules, coques ... ).

17
4 2. Impact chimique

Les matériaux extraits sont des sables et graviers qui, du fait de leur
granulométrie et de leur faible surface spécifique, présentent peu d'interaction
chimique avec la colonne d'eau. Les particules les plus "à risque" sont les vases et le
matériel organique dont les effets chimiques ne sauraient être importants du fait de
leur faible proportion dans les sédiments exploités. De plus, les opérations de dragage
sont généralement de courte durée et ne concernent que des secteurs limités, ce qui
limite d'autant l'impact chimique.

4 3. Impact biologique

4 3 1. Nature et intensité du dragage

L'impact d'une opération de dragage sur une communauté benthique dépend


non seulement du caractère intensif de l'exploitation, mais aussi du type de dragage
utilisé :

- plus l'opération est intensive, plus l'impact sur la faune est grand et plus la
recolonisation est lente.

- le type de dragage (fig. 3) modifie la nature de l'impact :


+ l'extraction au point fixe a un effet important (1 0 à 20 mètres de
profondeur) mais localisé, tant sur la morphologie du fond que sur la faune ;
+ l'extraction par aspiration en marche a un impact moins prononcé
mais plus étendu, avec creusement de sillons d'environ 2 mètres de large sur 25 cm
de profondeur. Le passage répété de la drague peut provoquer le surcreusement de
ces sillons jusqu'à 1 ,5 m voire 2 m de profondeur au bout de plusieurs années comme
nous avons pu l'observer à Dieppe.

Cette dernière méthode est cependant généralement préférée car elle laisse le
fond dans un état plus proche des conditions initiales, ce qui facilite le processus
ultérieur de recolonisation par la faune benthique ainsi que le chalutage ultérieur de
ces fonds par les pêcheurs.

4 3 2. Nature des nouveaux sédiments du site d'extraction

La nature du sédiment mis à nu par le dragage, ou s'accumulant dans le site du


fait de l'extraction, influence fortement la structure et la composition de la communauté
recolonisatrice. Celle-ci sera d'autant plus proche de la communauté initiale que la
couverture sédimentaire sera voisine de celle de l'état initial.
A Dieppe, l'affinement du sédiment observé après plusieurs années
d'exploitation s'est traduit par l'apparition d'espèces nouvelles caractéristiques des
sables fins.

18
4 3 3. Sensibilité du benthos aux prélèvements et aux déoôts de
sédiments

Peu d'animaux benthiques sont Insensibles aux opérations de dragage, à


l'exception d'espèces mobiles colonisant des sédiments continuellement remaniés ou
de quelques petites bivalves à coquille épaisse pouvant se réenfouir même après
aspiration par la drague.

L'impact du dépôt de sédiments varie avec la nature de la communauté, le


rythme de dépôt et l'augmentation relative de la turbidité. Il peut prendre l'une des
quatre formes suivantes :
- appauvrissement de la faune identique à celui observé dans la zone draguée,
mais recolonisation plus rapide ;
- appauvrissement moindre et recolonisation plus rapide ;
- enrichissement faunistique ;
- aucun effet.

4 3 4. Recolonisation benthique

La restructuration de la communauté benthique après le dragage est influencée

- par la qualité du nouveau sédiment mis à jour ou accumulé dans le site


d'extraction,
- par le stock de larves et d'adultes des espèces potentiellement
recolonisatrices,
- par la nature et l'intensité des stress que supporte habituellement la
communauté.

Le processus de recolonisation peut ressembler à celui observé après l'arrêt


d'une pollution organique ou après de grosses tempêtes. Les premières espèces
seront des adultes de l'épifaune vagile habitant les sédiments adjacents non perturbés.
Le potentiel de colonisation par recrutement larvaire est moins lié à la proximité
de communautés non perturbées qu'au mode de vie des espèces concernées.

La recolonisation est rapide dans les communautés de substrat meuble


exposées à des perturbations régulières et qui sont souvent dominées par des
espèces opportunistes à court cycle de vie. Elle est plus lente dans les communautés
stables.

Une restauration complète du benthos peut prendre de un mois à quinze


ans ou plus.

19
4 3 5. Espèces et communautés sensibles: incidence sur les pêches

Les espèces considérées comme potentiellement menacées par les extractions


sont celles utilisant les fonds marins comme lieu de ponte ou de nourrissage (lançons,
harengs, crabes ... ).

le lançon (ou équille) est une espèce sédentaire faisant l'objet d'une pêche
importante en Mer du Nord et qui constitue également la proie de plusieurs espèces de .•
poissons d'intérêt commercial. Cette espèce pond ses oeufs sur le sable; ces derniers
sont directement menacés lorsque les secteurs d'extraction coïncident avec les zones
de frayères. Les adultes sont également particulièrement vulnérables du fait de leur
habitude de s'enfouir la nuit dans le sable.

En Manche et Mer du Nord, la même menace concerne le hareng qui pond ses
oeufs dans les secteurs de graviers.

En Manche, le tourteau est pêché par les bateaux anglais et français. La


multiplication actuelle des demandes de prospection et d'extraction en Manche
orientale conduit à un conflit d'intérêt avec les pêcheurs pour l'utilisation des fonds
marins.
Dans ce secteur, les bancs de graviers abritent des concentrations hivernales
de crabes, ce qui a amené les autorités britanniques à confiner les extractions dans
les secteurs de moindre abondance hivernale.

Le maërl, constitué d'algues calcaires (comme le Uthothamnium), est utilisé


comme amendement. les principaux dépôts concernés par l'extraction sont localisés
sur les côtes bretonnes, anglaises et irlandaises. A moyen terme, le dragage va
épuiser les réserves de maërl des secteurs d'extraction, leur renouvellement étant très
lent. Ces communautés riches et productives doivent impérativement être protégées.
La cartographie de ces zones est une priorité du CIEM pour limiter, voire
interdire les extractions.

Une étude a tenté de quantifier l'impact des extractions pour la Mer du Nord; les
résultats montrent que, en dehors des zones de frayères, l'impact sur les stocks
de poissons sera pratiquement négligeable.

Le principal problème réside dans la limitation d'accès à des secteurs


traditionnels de pêche, plus que dans une perte sèche de ressource. Celle-ci (de
même que les pêcheurs) se "redistribue" ailleurs. Cette redistribution peut avoir des
conséquences économiques pour des flottilles locales et le CIEM recommande que
soit établi un calendrier d'exploitation pour permettre l'activité de pêche pendant
certaines saisons correspondant, par exemple, à un passage local important
d'espèces migratrices, sans que le dragage vienne perturber ces activités.

20
4 4. Estimation de l'échelle d'impact

4 41. Introduction

L'importance des effets de l'extraction de sédiments, pour la vie marine et les


pêches, dépend :
- des caractéristiques de l'environnement du secteur concerné,
- de la nature et de l'intensité de l'opération d'extraction,
- du potentiel de recolonisation ou de retour à l'équilibre du benthos.

Il n'existe pas d'exemple publié de bilan complet d'un projet d'extraction de


sable ou de gravier. Une étude importante a toutefois été réalisée par le CNEXO dans
les années 1970 mais l'étude de la recolonisation n'a pu être menée à terme. Le
rapport 1989 soulignait le besoin de telles évaluations quantitatives.

4 4 2. France & Pays-Bas

La réunion 1993 du Groupe de Travail a été l'occasion de présenter une


comparaison de l'impact de l'extraction de graviers sur la géomorphologie, le
sédiment et la macrofaune benthique de deux secteurs : le Klaverbank (NL) et
Dieppe (F).

Cette étude a comparé :


- les méthodologies d'étude ;
- les états initiaux (sédiment, benthos) ;
- les conditions d'exploitation;
- l'impact de l'extraction sur la morphologie du fond, le sédiment et la faune
benthique (richesse spécifique, densité, biomasse) ;
- la vitesse de recolonisation des sites d'extraction.

Les principaux résultats de cette étude sont résumés dans la figure 4.

a. Méthodologie :

Les deux études d'impact ont utilisé des stations de référence situées en
dehors du périmètre d'extraction.

b. Etat initial :

Bien que le sédiment initial des deux sites soit comparable, les communautés
benthiques du Klaverbank sont apparues moins diversifiées (128 espèces) que celles
de Dieppe (228 espèces). Cette différence tient à la durée supérieure du suivi réalisé à
Dieppe ainsi qu'à une détermination plus fine des différents groupes faunistiques.
La comparaison des communautés a cependant été facilitée par le fait que 65%
des espèces identifiées sur le Klaverbank étaient égalemeot présentes à Dieppe.

21
c. Conditions d'exploitation :

L'extraction est expérimentale et extensive (8,5 km2 ) sur le Klaverbank où elle


n'a duré que deux mois au cours de l'été 1989.
L'extraction est industrielle et intensive (1,5 km2 ) à Dieppe où elle a commencé
en 1980.

d. Impact de l'extraction:

Les résultats montrent que l'impact de l'extraction sur la densité et la biomasse


des deux peuplements est semblable dans les deux sites :
-les densités sont réduites de 72% (Kiaverbank) et 80% (Dieppe);
-pour les biomasses, la réduction est de 80% (Kiaverbank) et 90% (Dieppe).

Par contre l'impact sur la richesse spécifique est moindre sur le Klaverbank (-
30 %) qu'à Dieppe (- 70 %).

L'impact sur le sédiment est également différent selon le site puisqu'aucun


changement de granulométrie n'a été observé sur le Klaverbank alors qu'à Dieppe le
sédiment initial sable-graveleux (26 % sable fin) a été remplacé par un sédiment
contenant jusqu'à 70 % de sable fin, avec quelques taches de graviers.

e. Recolonisation:

La recolonisation n'a été étudiée que sur le Klaverbank où la richesse


spécifique et les densités ont été restaurées en 8 mois, sauf pour les gros bivalves. Le
rétablissement de la biomasse initiale demandera donc probablement plusieurs
années.
A Dieppe, l'étude de la recolonisation est dans l'attente de l'arrêt de l'extraction;
un retour significatif d'espèces a cependant pu être observé avec la diminution de
l'intensité d'extraction à partir de 1986.

4 4 3. Grande-Bretagne

En Grande-Bretagne, bien que les extractions en mer soient pratiquées depuis


plusieurs décennies, on est paradoxalement confronté à fa rareté des études
scientifiques décrivant les effets de l'extraction des granulats marins sur le benthos et
les rythmes de recolonisation. C'est pourquoi le Ministère de l'Agriculture et des
Pêches a lancé en octobre 1990, sur la côte est de l'Angleterre (Norfolk), un
programme de recherche de trois ans ayant pour but de mettre en évidence :
- l'impact initial du dragage sur le benthos et les sédiments ;
- les processus de recolonisation ;
- les variations naturelles à grande échelle des communautés de graviers ;
- les méthodes d'échantillonnage des sédiments grossiers.

22
L'extraction a concerné un site de 1/3 km2 dont 70% de la surface a été draguée
pendant 5 jours à raison de 10 000 tonnes par jour (fig. 5). Selon le critère considéré,
l'extraction est donc extensive (faible durée, importance relative de la surface
perturbée) ou intensive (tonnage journalier de matériaux).

Les premiers résultats de cette expérience, menée en avril 1992, montrent :


- un affinement du sédiment dans les sillons de dragage;
- une réduction du nombre d'espèces (50%), de l'abondance (85 %) et de la
biomasse (95 %), comparable à celle observée à Dieppe;
- un début de recolonisation à la faveur du recrutement estival, mais dont
l'amplitude reste limitée par rapport au site de référence.

4.4.4. Conclusion

Il a été prouvé qu'une extraction de caractère intensif à l'ancre est préjudiciable


à la morphologie des fonds, la qualité du sédiment et par suite aux communautés
benthiques, ainsi qu' à l'accès ultérieur aux chaluts de pêche (souille expérimentale
CNEXO, "puits" au large d'Hastings), ce qui a conduit le CIEM à préconiser l'extraction
à la traîne.

Cependant les études récentes montrent que la morphologie du fond, la


nature du sédiment et la faune benthique peuvent être rapidement et fortement
affectées par des activités extensives d'extraction à la traîne (NL, GB), ce qui pose
la question de savoir s'il ne serait pas préférable de concentrer le dragage dans des
secteurs de surface restreinte (Dieppe).

L'étude de la recolonisation (NL, GB) montre par contre le moindre impact d'une
exploitation extensive de courte durée.
Mais des études complémentaires concernant ces processus restent à faire
dans le cas d'une exploitation intensive à la traîne (Dieppe) avant que puisse être
préconisé un type particulier d'exploitation qui minimise l'impact de cette activité sur
l'environnement biologique et humain.

Le principe d'une exploitation alternant les secteurs d'extraction (système de la


jachère) pourrait constituer une étape qu'il serait nécessaire d'expérimenter rapidement
à l'échelle industrielle, car il permettrait:
- de vérifier l'impact relatif d'extractions plus ou moins intensives (durée,
fréquence et volume d'extraction, profondeur des sillons) sur l'environnement
benthique (modification du sédiment et de la faune associée, vitesse de
recolonisation);
- de tester l'intérêt de la remise en état des sites (nivellement des sillons) sur le
processus de recolonisation par la faune benthique;
- de vérifier l'éventuel profit que la ressource ichtyologique peut tirer de
secteurs dont la morphologie est perturbée par l'exploitation (valeur de refuge).

23
4 s. Impact des activités de pêche

Le chalutage des engins de pêche sur les fonds marins perturbe également
directement ou indirectement la faune benthique :
- par destruction d'organismes benthiques (crabes, oursins, coquillages ...),
écrasés ou blessés ;
- par remise en suspension du sédiment et dépôt des particules fines dans les
secteurs de calme hydrodynamique ;
- par modification de la structure des fonds entraînant leur recolonisation par
des communautés différentes des communautés initiales ;
- par des changements à long-terme de la diversité, de la biomasse et de la
productivité du benthos dans des secteurs soumis à un chalutage intensif (les espèces
à croissance lente et longue durée de vie disparaissent au profit d'espèces à
croissance rapide et courte durée de vie).

En Mer du Nord, la surface relative des fonds marins perturbés par la


pêche (54 %) est de loin supérieure à celle des autres activités (0,03 % pour
l'extraction de granulats).

4 6. Interactions bénéfiques

Des effets bénéfiques, résultant de l'extraction d'agrégats, ont été observés


dans le Port de New-York où des puits de dragage ont servi d'abri à des stocks de
poissons.
Cet exemple apporte un argument pour concentrer les activités de dragage
dans des zones de surface limitée où l'altération de la topographie des fonds, qui les
rend difficiles à chaluter, peut se révéler avantageuse pour la préservation d'espèces
surexploitées. Il serait intéressant de dresser un bilan ichtyologique de la souille
expérimentale du CNEXO, près de 20 ans après l'arrêt des extractions.

Dans certaines conditions d'extraction extensive, la perturbation du substrat


avec dépôt de matériel fin est parfois responsable d'une augmentation de la production
benthique; il y a en effet colonisation de ce sédiment plus riche par des populations
plus denses qui constituent une source de nourriture pour les poissons.
Des perturbations répétées permettent également l'installation de nouvelles
communautés plus productives constituées d'espèces à cycle de vie plus court.

24
5. CONTROLE

5 1. Législation

Onze des douze pays membres du CIEM (à l'exception de l'Allemagne)


possèdent une législation spécifique au milieu marin.
Huit pays ont plus d'un texte de loi qui concerne les extractions marines de
minéraux, des actes différents s'appliquant aux eaux territoriales et au plateau
continental. Ce sont l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, les Etats-Unis, la
Finlande, la France, l'Irlande et les Pays-Bas.

Neuf pays peuvent inclure dans le permis des termes et conditions spécifiques
au suivi de l'impact sur l'environnement et les pêches (par exemple : le suivi de
l'environnement, les mesures compensatoires, la réhabilitation); ces pays sont:
Allemagne, Belgique, Danemark, Etats-Unis, Finlande, France, Grande-Bretagne,
Pays-Bas et Suède.

Le Groupe de Travail a également élaboré un "Code de Conduite• (Annexe 3)


mis au point à partir des informations de la bibliographie et de l'expérience des pays
membres en terme de réglementation. Ce Code de Conduite devra s'appliquer à tous
les dépôts minéraux superficiels du plateau continental. Il a été établi pour interdire
toute extraction non contrôlée et pour assurer la coexistence harmonieuse des
extractions d'agrégats et des autres activités marines, plus particulièrement les
pêches. Ce Code accorde une attention spéciale à l'épaisseur des dépôts,
l'augmentation de turbidité et la nature du substrat résiduel.

Ce document est destiné à fournir un canevas de lignes directrices pour la


gestion et la réglementation de l'extraction marine, afin que la pêche et les autres
activités marines soient convenablement protégées.

52. Résolution d'un conflit entre les intérêts de la pêche et de l'extraction


de granulats marins : l'expérience française.

La réunion 1993 du Groupe de Travail a été l'occasion de présenter les


conclusions d'un rapport interministériel (Ministères de la Mer, de l'Environnement et
de l'Industrie) sur "L'exploitation des granulats marins et la cohabitation avec la
pêche professionnelle".

Ce rapport met en évidence les problèmes suivants :


- la législation actuelle n'est pas adaptée aux demandes d'extraction en mer
(procédures lourdes et redondantes);
- il y a absence de politique globale;
- les pêcheurs ne sont ni associés ni suffisamment informés;
- la méfiance est extrême entre extracteurs et pêcheurs;
- la connaissance scientifique est insuffisante.

25
Il propose:

- de faciliter l'action de l'administration :


en assurant une meilleure objectivité de l'information;
en amplifiant l'effort de recherche;
en associant très tôt tous les secteurs d'activité concernés par les
granulats;
en assurant un suivi des activités d'extraction;

-d'organiser la concertation :
avec des réunions préalables entre extracteurs et pêcheurs;
avec l'élaboration de schémas d'utilisation des ressources de la
mer;
avec la mise à disposition des informations auprès du public;

- de simplifier et modifier la réglementation :


en fusionnant les procédures (titre minier et travaux);
en déconcentrant la prise de décisions au niveau local;
en allongeant la durée de validitié du titre minier;

- de garantir le respect des conditions d'exploitation :


par des prescriptions réalistes sur la production, la localisation, la
géométrie du fond et le respect de l'environnement;
par le contrôle de l'éxécution de ces prescriptions.

s 3. Considérations scientifiques et permis d'exploitation : Evaluation de


l'impact sur l'environnement

Depuis la publication en 1992 du "Code de Conduite pour l'extraction de


matériaux marins" (Annexe 3), des développements liés à l'évaluation de l'impact sur
l'environnement ont eu lieu dans plusieurs pays membres du CJEM (Suède, Pays-
Bas, Grande-Bretagne) où cette évaluation est devenue pratique courante, et même
exigée par la législation en Finlande. La Communauté Européenne a publié une
directive sur ce type d'évaluation.

Préalablement aux études d'impact sur l'environnement et au programme de


suivi des opérations d'extraction, il est nécessaire de réaliser une étude "point-zéro"
suffisamment détaillée du secteur revendiqué, afin de juger de la qualité de
restauration du site après la fin de l'extraction.

Le Groupe de Travail a reconnu que les études d'impact sur l'environnement


liées aux demandes de permis d'exploitation de granulats marins n'avaient pas à ce
jour apporté une très grande "expérience".

26
Il propose cependant le document-conseil provisoire ci-après :

5 3 1. Informations nécessaires

5 3 1 1. Nature du dépôt

La réserve de matériaux doit être localisée géographiquement (latitude,


longitude) et décrite en termes de :
bathymétrie,
- distance à la côte,
- géologie : origine et nature du matériel, carte d'épaisseur du dépôt,
morphologie du fond, nature des sédiments superficiels et sous-jacents, stabilité
géologique du dépôt,
mobilité naturelle des sédiments de surface,
activités d'extraction proches (existantes ou en projet)
potentiel de remplissage.

La réserve totale de matériaux doit être estimée en fonction des rythmes


d'extraction et de la durée de vie prévue du dépôt.

5 3 1 2. Environnement physique

Pour évaluer l'impact physique des activités d'extraction, des informations


doivent être fournies sur :
l'hydrographie locale, incluant les courants de marée et courants
résiduels;
les conditions météorologiques (vent et houle}, le nombre annuel
moyen de jours de tempête;
- le transport des sédiments superficiels, ainsi que la présence et la
direction de formations sédimentaires indicatrices de transport;
- la turbidité naturelle liée à la houle et aux tempêtes;
le transport et le dépôt de sédiments fins remis en suspension par le
dragage;
les effets du tamisage/calibrage à bord de la drague, sur la turbidité et
la redéposition;
le potentiel de relargage de contaminants chimiques lors du dragage;
la prévision du régime principal des courants et de la circulation locale
résultant de la modification de la topographie liée à l'extraction;
- des prévisions sur des processus à plus long-terme et sur le
mouvement de la couverture sédimentaire;
- des prévisions pour l'érosion côtière.

27
5 3 1 3. Environnement biologique

Le principal impact biologique de l'extraction de granulats réside dans la


perturbation et l'enlèvement de faune benthique (endo- et épi-faune) et dans la
modification du substrat qu'elle colonise. Pour évaluer cet impact biologique, il
conviendra de connaître :
- la structure de la communauté benthique (diversité, abondance) au
sein du secteur potentiel d'extraction, avec si possible des informations sur les
variations temporelles et spatiales naturelles;
- les ressources en poissons et coquillages, incluant les zones de
frayères, avec une attention particulière pour les poissons se reproduisant sur le fond
(hareng, lançon), les zones de nourrisseries, les zones d'hivernage de crustacés et les
routes de migration ;
- les relations proie/prédateur entre benthos et poissons démersaux (par
exemple avec l'étude de contenus stomacaux) ;
- la méthode de dragage, incluant l'effet de différents types d'aspiration
sur la topographie et le benthos ;
- l'estimation du temps de recolonisation des sédiments mis à nu.

53 1 4. Interférences avec les autres utilisations de la mer

Le projet d'extraction doit mentionner :


- la fréquence, la durée et la période des travaux ;
- l'importance économique de la pêche dans le secteur concerné ;
- les liaisons maritimes et autres contraintes de navigation ;
- les zones militaires ;
- les utilisations civiles du fond (extractions adjacentes, câbles et pipe-
lines sous-marins) ;
- les zones de dépôt de déchets (boues de dragage portuaires ... )
-les épaves (avec indication de leur statut historique).
- les secteurs protégés d'importance culturelle, historique, scientifique ou
biologique.
- les zones de loisirs (pêche à la ligne, plongée ... )
- tout besoin de rejet en mer de matériaux inutiles résultant du traitement
à terre des granulats.

5 3 2. Préparation de l'évaluation et bilan de l'environnement.

La préparation nécessite d'identifier et de quantifier tout impact significatif du


projet.

Ces impacts peuvent être considérés comme une •hypothèse d'impact" qui
peut utiliser les résultats d'études antérieures sur les caractéristiques de
l'environnement et leur variabilité. Cette hypothèse d'impact indiquera également les
mesures à prendre pour réduire les conséquences des opérations potentielles de
dragage.

28
Ces mesures pourront inclure :
- le choix d'un équipement de dragage et d'un calendrier d'exploitation
limitant l'impact sur les communautés benthiques et les cycles de reproduction;
- la modification de la profondeur ou de la surface de dragage pour
réduire les changements d'hydrodynamisme et de transport du sédiment;
- le quadrillage de la zone demandée et la programmation des
campagnes d'extraction, afin de protéger les pêches sensibles ou permettre l'accès
aux pêches traditionnelles;
- la réduction du tamisage à bord pour minimiser la surverse du matériel
non sélectionné.

Il peut également être nécessaire de démontrer le besoin d'exploiter la


ressource en question, à l'aide de considérations précises sur le besoin local, régional
et national du matériau en relation avec les impacts du projet et les coûts relatifs
d'approvisionnement à partir d'autres sites, tant marins que terrestres.

Les résultats de l'évaluation doivent être présentés comme un bilan de


l'environnement décrivant l'information utilisée comme base de l'évaluation et faisant
ressortir ces résultats sous forme d'une hypothèse d'impact. Ce bilan détaille tous les
effets significatifs du projet qui ont été identifiés et explique brièvement pourquoi le
projet n'affectera vraisemblablement pas d'autres intérêts ou secteurs d'importance
reconnue situés à proximité.
Le bilan de l'environnement doit faire ressortir toute mesure ou changement
destinés à améliorer les conséquences du projet identifiées dans l'hypothèse d'impact.
Lorsqu'il n'est pas possible d'améliorer les effets du projet, ce bilan doit indiquer les
raisons pour lesquelles les avantages du projet l'emportent sur ses conséquences
négatives sur l'environnement.
Le bilan doit décrire le suivi nécessaire pour s'assurer que l'hypothèse d'impact
est correcte et que toutes les mesures d'amélioration sont efficaces.

53 3. Suivi

5 3 3 1 . Définition

L'activité d'extraction marine doit être continuellement su1v1e pour avoir un


enregistrement permanent à la disposition tant des autorités de tutelle que des
compagnies d'extraction. L'information obtenue permettra à ces autorités de surveiller
l'activité du navire pour s'assurer de la conformité avec les conditions particulières du
permis et enquêter sur les affirmations de tiers concernant des activités illégales de
dragage.

29
Le suivi de l'environnement marin est généralement entrepris pour les raisons
suivantes:
-vérifier si les normes du permis sont respectées (suivi de conformité);
- mettre en évidence l'impact spatial et temporel du dragage (suivi
d'impact);
- améliorer la base sur laquelle sont établies les demandes de permis en
améliorant la connaissance des effets sur l'environnement qui ne sont pas facilement
estimés par des études bibliographiques ou de laboratoire (recherche appliquée).

5 3 3 2. Modalités

a) Suivi électronique : "boîtes noires".

Les informations minimales pour le stockage de données fournies par des


systèmes de surveillance électronique, doivent inclure :
- la position de la drague en continu;
- le positionnement du système de dragage (position de la tête d'élinde
par rapport à la surface et au fond);
- le mode de fonctionnement du système de dragage (aspiration de
granulats ou d'eau).

Des informations complémentaires peuvent être demandées au bon vouloir des


autorités de tutelle et/ou de la compagnie d'extraction pour assurer ses propres
besoins de gestion.

Des rapports sur le développement et la mise en oeuvre de systèmes de


surveillance électronique ("boîtes noires") des dragues ont été présentés par plusieurs
pays à l'occasion de la réunion de St Valery/Somme.

Belgique

Le système de boîte noire est obligatoire en 1993 sur toutes les dragues belges
et son installation est une condition de renouvellement ou d'obtention des permis
d'extraction.

Les paramètres à enregistrer sont :


- identification du navire,
- identification de la compagnie d'extraction,
- numéro de série de la rotation,
- date et heure de l'enregistrement,
-position du navire (degrés, minutes, secondes),
-statut des pompes (marche/arrêt),
-statut de l'aspiration (connexion avec le tuyau d'aspiration),
-statut de la tête d'élinde (connexion avec le tuyau d'aspiration déployé),
- rapport d'erreur.

30
Intervalles d'enregistrement :
- au mouillage : toutes les heures,
- en route : toutes les 15 minutes,
- en dragage : toutes les 5 minutes.

Grande-Bretagne

Après une enquête - test, réalisée en été 1990, sur ce type d'équipement,
toutes les dragues britanniques possédant une licence du Crown Estate ont été
équipées depuis le 1er janvier 1993 d'un Electronic Monitoring System (EMS).

Description du matériel de base :


- équipement de navigation et indicateurs de statut de dragage,
- équipement d'enregistrement de ces paramètres,
- logiciels de traitement des données,
- logiciels d'enregistrement des données au format de sécurité du Crown
Estate. La disquette de chaque drague est présentée chaque mois au Crown Estate
qui confronte les données aux conditions particulières du permis et relève
automatiquement les anomalies.

Paramètres enregistrés :
-en cours d'extraction (pompes en marche), toutes les 30 secondes:
+ localisation de la drague,
+ date, heure,
+ statut de dragage.
- hors extraction (pompes à l'arrêt) toutes les 30 minutes
+ date, heure.

Pays-Bas

Un système de boîte noire, testé en mai 1993, est opérationnel depuis juillet
1993.
Un système "simple" est déjà opérationnel (système ODIN) dans les chenaux
de navigation ; il enregistre la position du dragage qui est tracée au bout d'une
semaine ou un mois pour vérifier si elle se situe dans le secteur concédé.

Irlande

Le besoin d'un tel système est admis mais aucune décision n'a été prise sur les
spécificités qui seront demandées au système.

Suède

Aucun système n'est utilisé ni à l'étude. Le gouvernement suédois


reconsidérera la situation en fonction des niveaux futurs de l'activité d'extraction.

31
Etats-Unis

Dans le cadre d'un Dredging Research Program, I'U.S. Army Corps of


Engineers continue d'explorer différents systèmes, notamment pour améliorer
l'efficacité des opérations de surverse.

b) Suivi physique

Le suivi physique des sites d'extraction est nécessaire pour plusieurs raisons,
notamment:
- s'assurer de la conformité avec les clauses du permis (contraintes
d'extraction),
- constituer une composante à part entière de toute étude d'impact,
- fournir des informations sur la variabilité naturelle et les tendances évolutives
des conditions et sédiments des fonds,
- décrire plus amplement les réserves de granulats.

Les méthodes utilisées sont variées :


- sonar latéral: il permet de localiser avec prec1s1on les traces de
l'activité de dragage (puits, sillons), mais aussi la distribution des grands ensembles de
sédiments; avec l'écho-sondeur, il permet de fournir un relevé précis de la
bathymétrie;
- prélèvements de sédiments: cet échantillonnage est une composante
majeure des suivis car il fournit la preuve des changements de substrat liés au
dragage et il est essentiel à l'interprétation des données du sonar latéral et des
résultats biologiques;
- photographie et vidéo sous-marine;
- profils sismiques : ces profils sont utiles pour suivre l'épaisseur de la
réserve de granulats et donc les risques d'exposition des matériaux sous-jacents.

c) Suivi biologique :

Le benthos, du fait de sa nature sédentaire et de son mode de vie à l'interface


eau-sédiment, est un maillon optimal pour le suivi biologique des effets à court-
et à long-terme des extractions en milieu marin. La durée de vie de ces espèces
permet d'intégrer les effets sur une période de plusieurs années, alors que la
méiofaune offre des réponses à l'échelle de quelques mois.
L'utilisation la plus commune du suivi biologique est l'étude du rythme de
recolonisation et d'installation d'une communauté benthique productive sur un fond
récemment exploité.
Le suivi biologique est moins utile pour mettre en évidence les effets de la
remise en suspension. Contrairement au rythme de recolonisation, où l'on observe un
gradient entre des conditions abiotiques et des communautés benthiques stables, les
effets d'un dépôt de sédiment sont subi étaux et de faible impact.

32
De nombreuses techniques ont été mises au point pour mesurer les différences
entre les communautés, résultant de perturbations liées à l'activité humaine, et qui
pourraient être appliquées au cas du dragage; les plus couramment utilisées sont les
indices de diversité.
Avec l'utilisation croissante des micro-ordinateurs, des techniques multivariées
et des analyses hiérarchiques (Ciuster analysis) sont de plus en plus employées. Les
dendrogrammes permettent de bien visualiser la similarité des communautés.

Toutes ces techniques nécessitent le tri et la détermination préalable de


nombreux échantillons, qui représentent des étapes très fastidieuses et coûteuses. Le
nombre d'échantillons nécessaires peut être diminué par un prélèvement stratifié,
tandis que la détermination des espèces peut être remplacée par l'emploi de méthodes
allométriques ou de "remote sensing".

5 3 3 3. Conseils

Les opérations de suivi sont onéreuses car elles demandent des besoins
considérables, tant en mer que dans Je traitement ultérieur des prélèvements et des
résultats. Afin d'élaborer un programme de suivi efficace, il est essentiel de:
- définir des objectifs précis,
- mettre en place des mesures permettant de répondre à ces objectifs,
- examiner à intervalles réguliers les résultats de ces mesures.

Le programme de suivi peut alors être poursuivi, réexaminé ou même


interrompu.

L'hypothèse d'impact préparée pour J'évaluation de l'environnement résume les


effets du projet sur l'environnement marin. C'est un élément important de la mise au
point d'un programme de suivi.

Avant l'établissement de tout programme de suivi et la réalisation de toute


mesure, les questions suivantes doivent être posées :
- quelles mesures sont nécessaires ?
- quel est Je but du suivi d'une variable particulière ?
- dans quel compartiment de l'environnement ou à quels endroits les
mesures peuvent-elles être réalisées Je plus efficacement?
- combien de temps doivent durer les mesures en continu pour répondre
aux objectifs ?
- quelle doit être J'échelle spatiale et temporelle des mesures pour
vérifier les hypothèses ?

L'extraction de granulats marins a un impact majeur sur le fond. C'est pourquoi,


bien que la prise en compte des effets sur la colonne d'eau ne puisse être écartée
dans les premières ébauches du projet de suivi, il est souvent possible de réduire Je
suivi ultérieur à celui du fond.

33
Le suivi physique peut être basé sur des méthodes à distance comme le sonar
latéral pour mettre en évidence des modifications de la nature du fond. Ces mesures
peuvent demander quelques prélèvements de sédiment pour recaler avec la réalité du
substrat.

Le suivi biologique peut être basé sur l'évaluation des modifications de la


structure des communautés benthiques.

Afin d'évaluer l'impact, il peut être nécessaire de comparer l'état physique et


biologique des secteurs concernés avec celui de sites de référence éloignés de la
zone d'extraction. Ces sites de référence peuvent être identifiés au cours de la
préparation de l'hypothèse d'impact.

L'étendue de la surface d'échantillonnage nécessite de prendre en compte la


taille du secteur d'extraction, la zone de transition entre ce dernier et les fonds
environnants, ainsi que de possibles effets éloignés résultant de la mobilité du matériel
fin remis en mouvement par l'activité de dragage.

S'il peut être démontré que les effets de l'extraction sont identiques dans des
secteurs aux fonds comparables, il peut être judicieux de mener les programmes de
suivi biologique sur quelques sites choisis avec soin et considérés comme
représentatifs de ces conditions .
• Un état précis des activités de suivi doit être préparé; des rapports doivent
détailler les mesures effectuées, les résultats obtenus, leur signification et montrer en
quoi ces résultats sont conformes aux objectifs du suivi. La fréquence du suivi dépend
des objectifs et est liée à l'échelle de l'extraction ainsi qu'à la période prévue des
modifications consécutives de l'environnement, qui peuvent durer après l'arrêt des
activités d'extraction.

34
6. RECOMMANDATIONS POUR LES RECHERCHES A MENER

6 1. Axes de recherche à développer

Si l'extraction de granulats marins est pratiquée dans de nombreux pays-


membres du CIEM, il y a comparativement peu d'études détaillées sur l'impact
biologique de cette activité; en conséquence, notre connaissance des effets de ce type
d'activité sur les communautés benthiques et les pêches, reste fragmentaire.

De nombreuses recherches doivent encore être menées avant que des


conclusions définitives puissent être tirées sur les effets de l'extraction de granulats
marins sur les pêches.

Le Groupe de Travail a identifié en 1991 plusieurs axes de recherche à


développer :

* Au niveau halieutique :
- la distribution des secteurs de frayères de poissons et d'hivernage de crabes
et celle des gisements coquilliers, dans les secteurs potentiels d'extraction de
granulats marins;
- les effets sur la distribution des poissons et coquillages, des perturbations
liées à des dragages à grande échelle pendant une courte période : les populations
sont-elles réellement réduites ou seulement déplacées ?
- les populations de poissons sur des sites antérieurement exploités ; l'étude
devrait préférentiellement porter sur la composition spécifique et la dynamique de
population des communautés d'un site avant toute extraction, juste après leur arrêt et
se poursuivre avec une périodicité variable;

* Au niveau benthique :
- une meilleure connaissance des propriétés structurelles et fonctionnelles des
fonds graveleux et relation avec la pêche, via la chaîne trophique; des améliorations
préalables de la méthodologie de prélèvement dans ce type de substrat sont
nécessaires;
- la nature des impacts sur les communautés benthiques sur des sites
intensivement dragués;
- le devenir des organismes benthiques aspirés par la drague et rejetés avec
les eaux de surverse;
- les effets des perturbations physiques et de leur fréquence sur les fonds de
graviers, à l'aide d'expérimentations en mésocosmes;
- la recolonisation des substrats graveleux après arrêt des perturbations;
défaunation liée au dragage. L'échelle de temps est une considération de première
importance;
- les changements de composition faunistique au cours de la recolonisation de
substrats perturbés ou défaunés, particulièrement dans les sites où la nature du
sédiment a changé;

35
*Au niveau de la colonne d'eau :
- le rôle des particules fines remises en suspension dans le piégeage des
métaux-traces de la colonne d'eau;
- les impacts liés aux dragages, comme le recyclage de nutriments et de
matières en suspension, sur la croissance d'espèces d'intérêt commercial comme les
coquillages;
- les effets du panache de turbidité sur le comportement des poissons,
notamment leur évitement et'ou leur attirance;

A ce jour, des réponses ont déjà été apportées, notamment sur l'état des
organismes benthiques rejetés avec les eaux de surverse des dragues.

6 2. L'expérience française

Le besoin de connaissances scientifiques a été évoqué lors de la réunion de St


Valery lors d'une intervention sur les "Rôle et champ d'action des biologistes dans
les dossiers d'extraction de granulats marins; réflexions inspirées d'expériences
françaises en Manche-Est ".

Il ressort de cette réflexion que la nécessaire révision de la législation française


actuelle sur les dossiers d'extraction de granulats marins, passe aussi : - par une
meilleure identification des besoins en connaissances scientifiques: les biologistes
peuvent notamment apporter des éléments de relativisation de l'impact :
. en termes de rapport de surfaces entre zones pressenties pour
l'extraction (quelques km2 ) et zones maritimes environnantes (12 000 km2 en Baie de
Seine);
. en rappelant que l'extraction de granulats n'engendre pas de pollution
durable et incontrôlable mais une perturbation mécanique passagère des fonds
comparable à celle occasionnée par les pêcheurs eux-mêmes.

-par la réalisation de "point-zéro" rigoureux précisant:


l'identification des zones et saisons de ponte ;
la localisation d'éventuelles nourrisseries;
la localisation de gisements de coquillages (et crustacés),
accompagnée d'une évaluation qualitative et quantitative précise;
. l'évaluation qualitative de sites alimentaires remarquables pour les
ressources exploitables;
. la recherche des migrations des ressources exploitables.

- par la clôture irréversible des sites après exploitation pour progresser dans
l'étude de reconstitution des sites. Le suivi topographique, sédimentaire et biologique
pourrait être accompagné d'expériences de "réhabilitation accélérée" par des moyens
physiques (nivellement) ou biologiques (réensemencement).

36
Le rôle des scientifiques apparaît essentiel pour la "dédramatisation" de
l'instruction des dossiers; ce rôle doit être différent et plus rigoureux qu'actuellement où
l'on peut constater inconfort et ambiguïté.

Rôle et responsabilités de la recherche doivent donc être précisés en affichant


à la fois:
- l'incertitude du biologiste, liée à la variabilité naturelle des données et aux
difficultés d'évaluation quantitative des peuplements marins;
- ses capacités à contribuer utilement aux dossiers :
. en faisant en sorte que la connaissance minimale nécessaire soit
disponible et mobilisée;
en traduisant, en langage accessible au grand public, des
connaissances ou concepts parfois complexes ou inhabituels;
. en exposant les résultats en termes strictement neutres vis-à-vis des
intérêts en présence.

37
ANNEXE 1

COLLABORATEURS DE CE RAPPORT

Les personnes suivantes ont contribué à la rédaction et la préparation de ce rapport :

D. Alexander, Department of Fisheries and Oceans, Canada.


D. Ardus, British Geological Survey, Marine Geology, Grande-Bretagne.
C. Augris, lfremer, France.
P.J. Bide, Department of the Environnment, Grande-Bretagne.
H. Bokuniewicz, Marine Sciences Research Center, State University of New-York, Etats-Unis.
1. Cato, Geological Survey, Suède.
A.P. Cressard, lfremer, France.
S.J. de Groot, Netherlands lnstitute for Fishery Investigations, Pays-Bas.
P. Davis. Ministry of Transport and Public Works, North Sea Directorate, Pays-Bas.
M. Des prez, Groupe d'Etude des Milieux Estuariens et Uttoraux, France.
S. Duhamel, Groupe d'Etude des Milieux Estuariens et Uttoraux, France.
P. Duval, lfremer, France.
S. Footner, Crown Estates Commissioners, Grande-Bretagne.
M. Geoghegan, Geological Survey, Irlande.
P.B. Hale, Department of Energy, Mines and Ressources, Canada.
H. Hallback, Instituts of Marine Research, Suède.
F. Hallie, Ministry of Transport and Public Works, North Sea Directorats, Pays-Bas.
D.J. Harrison, British Geological Survey, Coastal Geology, Grande-Bretagne.
H.G. Janssen, Geological Survey, Suède.
H.C. Joseph, Department of Energy, Mines and Ressources, Canada.
R. Keary, Geological Survey, Irlande.
P. Kingston, lnstitute of Offshore Engineering, Ecosse.
C. Laban. Geological Survey, Pays-Bas.
B. Lauwaert, Ministry of the Environnment, Belgique.
R.G. Lees, Ministry of Agriculture, Fisheries and Food, Grande-Bretagne.
H. Lehttonen, Finnish Gama and Fisheries Research Instituts, Finlande.
M. Lemoine, lfremer, France.
O. Maertens, Fisheries Research Station, Ostende, Belgique.
A.J. Murray, Crown Estates Commissioners, Grande-Bretagne.
T. Murray, Crown Estates Office, Grande-Bretagne.
P.E. Nielsen, National Forest and Nature Agency, Danemark.
F. Parrish, Crown Estates Commissioners, Grande-Bretagne.
R. Pearson, ARC Marine Ltd, Grande-Bretagne.
O.L Peer, Department of Fisheries and Oceans, Canada.
H.L Rees, Ministry of Agriculture, Fisheries and Food, Grande-Bretagne.
S. Rowlatt, Ministry of Agriculture, Fisheries and Food, Grande-Bretagne.
O. Saward, Marine Laboratory, Ecosse.
R.T.E. Schüttenhelm, Geological Survey, Pays-Bas.
J. Side, lnstitute of Offshore Engineering, Ecosse.
S. Simon, Cellule du Uttoral Haut-Normand, France.
J. van Alphen, Ministry of Transport and Public Works, North Sea Directorats, Pays-Bas.
B. Winterhalter, Geological Survey, Finlande.

38
ANNEXE2

LISTE DES PARTICIPANTS


au Groupe de Travail1993
(StValery/Somme, 11-14 mai)

Membres du Groupe de Travail :

Mr P.J. BIDE Dr H.L. REES


Dept. of the Environment Fisheries Laboratory
Room C 15/20 Remenbrance Avenue
2, Marsham Street Bumham-on-Crouch
London SW1 E 6RB Essex CMO 8HA
GRANDE BRETAGNE GRANDE BRETAGNE

Dr. M. DESPREZ Dr. S.J. DE GROOT


GEMEL Netherlands lnstitute for
Stn d'Etude en Baie de Somme Fisheries Research
Quai Jeanne d'Arc P.O. Box68
80230 St Valery S/Somme 1970 AB IJmuiden
FRANCE PAYS-BAS

Mr. D.J. HARRISON Dr. R. KEARY


British Geological Survey Geological Survey of lreland
Keyworth Beggars Bush
Nottingham NG12 5GG Haddington Road
GRANDE BRETAGNE Dublin 4
IRLANDE

Dr R. ALEXANDER Mr. R.T.E. SCHÜTTENHELM


Dept. of Fisheries & Oceans Rijks Geologische Dienst
P.O. Box 5030 P.O. Box 157
Moncton, NB E1C 986 2000 Haarlem
CANADA PAYS-BAS

Mr. T. MURRAY MrF. HALLIE


Marine Estates RWS-DNZ
Crown Estate Office P.O. Box 5807
13-16 Carlton House Terrace 2280 HV Rijswijk
London SW1 Y 5AH PAYS-BAS
GRANDE BRETAGNE

Mr. R. PEARSON
ARC Marine Ltd
Burnley Wharf, Marine Parade
Southampton S01 1 JF
GRANDE BRETAGNE

39
Dr P. KINGSTON MrD. SAWARD
I.O.E. Marine Laboratory
Heriot-Watt University P.O. Box 101
Edinburgh EH 14 4 AS Victoria Road
GRANDE BRETAGNE Aberdeen AB9 BOB
GRANDE BRETAGNE

Dr 1. CATO Mr H. G. jANSSON
Geological Survey of Sweden Geological Survey of Sweden
Box670 Box670
S-75128 Uppsala S-75128 Uppsala
SUEDE SUEDE

Observateurs :

Mr S. DUHAMEL MrS. SIMON


GEMEL Cellule de Suivi du
Station d'Etude en Baie de Somme Uttoral Haut Normand
115, Quai Jeanne d'Arc 4, Rue du Colonel Fabien
80230 St Valery S/Somme 76600 Le Havre
FRANCE FRANCE

Mr. M. LEMOINE Mr P. DUVAL


IFREMER IFREMER
Avenue Général de Gaulle 14520 Port-En-Bessin
14520 Port-en-Bessin FRANCE
FRANCE

Membres excusés ayant envoyé leur contribution :

Dr C. Augris, France
Dr H. Bokuniewicz, U.S.A.
Dr H. Hallback, Suède
Mme B. Lauwaert, Belgique
Mr P.E. Nielsen, Danemark
Dr B. Winterhalter, Finlande

40
ANNEXE3

CODE DE CONDUITE
Pour l'extraction commerciale de sédiments marins
(comprenant ressources en minéraux et en granulats)

1 INTRODUCTION

Ce code de conduite est destiné à favoriser une saine gestion permettant la


cohabitation harmonieuse de l'industrie d'extraction avec la pêche et les autres
activités marines.

Ces conseils ont pour but de fournir un canevas souple que chaque pays puisse
adopter dans le contexte de sa législation.

Ce code de conduite donne, étape par étape, son avis sur la manière dont les
dragages en mer devraient être effectués pour minimiser les conflits avec les autres
utilisateurs de la mer et optimiser l'utilisation des ressources marines. Des procédures
consultatives spécifiques concernant les pêches sont données dans l'Annexe 3'.

Du fait de différences radicales dans l'approche faite par chaque pays, ce code
ne concerne pas le dragage de chenaux de navigation. Ces recommandations sont
destinées essentiellement à la prospection et à l'extraction de sédiments, comprenant
les sables et graviers, les minéraux précieux, le charbon et le maërl.

Ces conseils ont pour but de s'assurer qu'une information suffisante sera
disponible pour permettre une évaluation de l'impact des projets sur l'environnement et
les autres activités marines dont les pêches.

41
2 CONSEILS POUR LA RECHERCHE DE GISEMENTS

Tous les conflits potentiels entre l'extraction et les autres activités marines
devront être identifiés par l'autorité de contrôle, en concertation avec les utilisateurs et
groupes d'intérêts (gouvernementaux et non) concernés.
Avant que la demande de permis de prospection ne soit prise en compte, le
demandeur devra consulter les groupes précédemment identifiés. Il sera de la
responsabilité de l'autorité de contrôle d'identifier les secteurs particulièrement
sensibles (comme les frayères de harengs, les réserves naturelles, les sites
archéologiques, les câbles et pipe-lines) avant toute prospection. L'autorité de
contrôle devra s'assurer que les techniques adéquates de prospection sont choisies.
L'autorité de contrôle devra s'assurer qu'un réseau de liaison approprié est mis
en place pour permettre des prises de décision opportunes à toutes les étapes du
programme d'exploration.
Tous les détails du programme de prospection devront être soumis par le
demandeur à l'autorité de contrôle pour approbation. Des dispositions devront être
prises pour permettre une procédure de résolution de conflit à laquelle participeront
l'autorité de contrôle, la compagnie requérante, les pêcheurs et les autres activités
concernées. La procédure exacte dépendra des pratiques courantes de chaque pays.
La prospection devra couvrir l'ensemble du secteur autorisé, afin de fournir une
image complète de la nature géologique et des richesses benthiques et halieutiques.
Toute l'information obtenue lors de cette prospection par l'entreprise devra être
soumise à l'autorité de contrôle. La confidentialité commerciale normale devra être
appliquée.

Les détails d'un permis de prospection changeront selon les exigences de


chaque autorité de contrôle; il est cependant recommandé d'inclure les éléments
suivants:
- identification des ressources recherchées ;
- durée du permis de prospection ;
- indication du caractère exclusif ou non du secteur prospecté ;
- localisation du secteur prospecté (coordonnées géographiques) ;
- techniques de prospection utilisées ( méthodes hydre-acoustiques,
dragages, prélèvements à la benne, carottages) ;
- détails du programme de prospection (chronologie et durée,
caractéristiques du navire, maillage géophysique, nombre et localisation des
sites de prélèvements, volumes de matériaux à récupérer, projets de
traitement des échantillons) ;
- clause d'avertissement des autres utilisateurs de la mer ;
- dispositifs de liaison avec les autres utilisateurs de la mer et groupes
d'intérêts.

Un exemple de conseils pour la consultation ou la liaison avec les intérêts des


pêches est donné en Annexe 3'. De tels conseils pour d'autres groupes d'intérêts
(protection de la nature, navigation, armée) pourront être établis.

42
3 CONSEILS D'EXTRACTION

Les demandeurs de permis d'exploitation devront soumettre un canevas de


propositions en vue de discussions informelles avec l'autorité de contrôle. Cette
dernière devra entreprendre des consultations avec les autres autorités responsables
des intérêts suivants, en fonction des besoins :
. pêche et aquaculture,
. protection de l'environnement (réserves),
. défense,
. énergie,
. navigation et ports,
. protection du littoral,
. ouvrages et équipements sous-marins (câbles et pipe-lines, émissaires de
rejets),
. zones d'aménagement littoral (autorités locales d'aménagement),
.loisirs,
. zones de dépôts.

Ces consultations devront associer les organisations gouvernementales et non-


gouvernementales concernées, ainsi que tous les groupes d'intérêts susceptibles
d'être affectés par la demande. Celle-ci devra être rendue publique, et indiquer où
peut être obtenue toute information utile ainsi qu'une adresse administrative pour
toutes les démarches. Tous les intérêts consultés devront être informés des
conclusions des consultations et de la décision de l'autorité de contrôle.

L'autorité de contrôle devra prendre en compte toutes les démarches des


organismes consultés sur les canevas de propositions des demandeurs. Discussions
et négociations devront avoir lieu si besoin. Un rapport devra être préparé, faisant
ressortir les propositions du demandeur, les démarches enregistrées parmi celles de
tous les groupes d'intérêts susceptibles d'être affectés, ainsi que les possibles
mesures compensatoires. Ce rapport devra résumer les arguments favorables et
défavorables, afin que l'autorité de contrôle puisse juger du bien-fondé de la demande.
Dans tous les cas, un Bilan de l'Environnement devra être préparé. L'autorité de
contrôle peut également décider, si besoin, d'effectuer une Evaluation de l'Impact
sur l'Environnement pour constituer la base d'une décision équilibrée.

Les détails d'un permis d'extraction varieront en fonction des exigences de


chaque autorité de contrôle; cependant, il est recommandé que les éléments suivants
y figurent:
. la nature de la ressource à exploiter;
. la durée du permis d'extraction et les dispositions pour une fin anticipée du
permis;
. des indications sur le caractère cessible, exclusif ou non, du permis
d'extraction;
. la localisation (coordonnées) du secteur d'extraction et de tout secteur
complémentaire pour les manoeuvres de la drague;

43
. les quantités totales autorisées à l'extraction pendant la durée du permis. Le
lieu de contrôle devra être précisé dans le permis (dans la drague ou au
déchargement). Les rythmes d'extraction (intensité, périodicité) pourront aussi être
précisés, avec par exemple une limitation dans le temps plutôt que sur la quantité
totale;
. la profondeur minimale du site d'extraction et l'épaisseur maximale de
sédiment autorisée à extraire;
. l'exigence de laisser, après extraction, un substrat comparable au substrat
initial;
. les méthodes de dragage détaillées;
. l'indication d'une possibilité de surveillance vidéo ou d'une autre forme de suivi
électronique;
. l'intégration d'un programme approuvé et approprié de suivi des effets des
activités d'extraction;
. des mesures d'accès et d'inspection à bord de fa drague par l'autorité de
contrôle, afin de s'assurer que les quantités extraites et le secteur autorisé sont
conformes aux spécifications du permis;
. les moyens appropriés de s'assurer du respect des conditions d'extraction (par
ex. des moyens de suivi électronique), à fa demande de l'autorité de contrôle;
. la fourniture régulière d'informations sur les quantités extraites;
. les dispositions de restrictions saisonnières, incluant fa suspension du dragage
si besoin.

44
ANNEXE3'

Conseils pour les consultations sur les pêches

Ces conseils fournissent une trame pour l'échange d'informations demandé


pendant les consultations. Les autorités de contrôle devront s'assurer que tous les
thèmes concernés ont été abordés suffisamment en détail pour permettre une prise de
décision avertie lors de la demande de permis, notamment pour la nécessaire
protection des intérêts des pêches.

Il est envisagé que l'information sur le dragage soit fournie par la compagnie
d'extraction et l'information sur les pêches par les autorités de tutelle.

1. Informations sur le dragage

a) Précisions sur le secteur :


. coordonnées exactes, détaillant le secteur pour l'exploitation pratique des
ressources et prenant en compte les manoeuvres de la drague ;
. zonation de secteurs étendus en bandes plus petites où l'extraction se
succèdera selon un calendrier approuvé ; cette disposition peut être liée à des plans
de pêche saisonniers et au besoin d'accès plus général par les autres utilisateurs ;
. marquage-balisage des secteurs d'extraction pour aider à leur identification en
mer.

b) Types de dragues.

c) Description suffisamment détaillée des activités d'extraction pour permettre


l'évaluation du niveau de perturbation.

d) Routes d'accès au site d'extraction (lorsqu'existe un risque particulier de


conflit).

e) Etat requis pour le secteur de dragage après la fin des extractions.

f) Epaisseur maximale de sédiment à prélever, en fonction des conditions


d'extraction et des possibilités de suivi.

g) Turbidité liée à la surverse, intensité du tamisage et qualité des suspensions


rejetées.

h) Rythme d'extraction et durée de vie estimée du gisement.

1) Précisions pour le contrôle régulier de cette information et la révision du plan


de travail.

45
2. Informations sur les ressources en poisson et l'intensité de l'activité de
pêche.

a) Localisation des frayères et identification des saisons de reproduction ;

b) Secteurs de nourriceries à protéger ;

c) Localisation des gisements coquilliers ;

d) Zones de nourrissage des poissons, crustacés et céphalopodes ;

e) Routes migratoires des poissons, crustacés et céphalopodes ;

f) Nombre de pêcheurs et de navires travaillant dans le secteur ;

g) Types d'engins de pêche utilisés (casiers, filets, dragues) ;

h) Secteurs et périodes d'activité de pêche intensive ;

i) Points de contact avec les organisations de pêche (autorités


gouvernementales et associations locales de pêcheurs) ;

j) Taille des captures par espèce.

46
REMERCIEMENTS 1

J'exprime toute ma gratitude à Mr Emory A. ANDERSON, Secrétaire Général


du Conseil International pour l'Exploration de la Mer, pour m'avoir donné l'autorisation
de traduire les rapports du Groupe de Travail sur les "Effets de l'Extraction de
Sédiments Marins sur les Pêches" et de les diffuser en France sous la forme de cette
synthèse.

Je remercie également les organismes suivants qui ont apporté leur précieuse
contribution à la réalisation et à la publication de ce document, ainsi qu'à l'organisation
de la réunion de St Valery-sur-Somme:
- I'IFREMER,
- le Ministère de l'Environnement,
- le Conseil Régional de Picardie,
- le Conseil Général de la Somme,
- la Société GSM,
- la Caisse d'Epargne de Picardie,
- le Cabinet Notarial R. Lécuyer,
- et le GEMEL.

Je tiens enfin à associer à ces remerciements Mr L. DARIDON, Directeur du


G.I.E. Graves de Mer, qui a toujours souhaité que les extractions menées à Dieppe
permettent de progresser dans la connaissance scientifique de l'impact sur
l'environnement de cette activité.
Ce document doit beaucoup à la confiance qu'il nous a accordée dès 1981 pour
assurer le suivi biologique et sédimentaire du site de Dieppe puisque ces résultats
m'ont permis d'intégrer en 1990 ce Groupe de Travail du Conseil International pour
l'Exploration de la Mer.

47
LEGENDE DES FIGURES

Figure 1 : Localisation des sites d'extraction de sédiments marins sur le littoral


français (document C. AUGRIS, IFREMER).

Figure 2 : Localisation des zones prospectées par I'IFREMER pour l'identification des
réserves en granulats marins du plateau continental français (document C. AUGRIS).

Figure 3 : Méthodes habituelles de dragage pour les granulats marins :


A : dragage à l'ancre,
B : dragage à la traîne.

Figure 4 : Tableau comparatif des principaux résultats des études d'impact sur
l'environnement réalisées sur le site d'extraction industrielle de Dieppe (F) et sur le site
expérimental du Klaverbank (NL).

Figure 5 : Enregistrement de la route suivie par la drague sur le site expérimental


d'extraction situé au large de la côte du Norfolk, montrant que 70% des fonds ont été
dragués (KENNY & REES, 1993).

48
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Doc. Claude AUGRIS


IFREMER
Figure 1 GISEMENTS EXPLOITES
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CHERBOURG

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Figure z = ZONES PROSPECTEES PAR L' IFREMER

Doc. Claude AUGRIS


IFREMER
A

Gravier
Vase

Figure 3 Méthodes habituelles de dragage pour les granulats marins


A : dragage à l'ancre
B : dragage à la traîne
FIGURE 4 DIEPPE KLAVERBANK
SITE
Localisation Manche Orientale Mer du Nord
Profondeur -20m -38m
Sédiment sable graveleux sable graveleux
Benthos 228sp 128 sp

METHODOLOGIE
Engin de prélèvement Drague Rallier Benne Hamon
Volume de prélèvement 201 201

EXTRACTION
Type aspiration aspiration
Durée 1980-85 1986-92 1989 (2 mois)
Surface (Km 2) 1,5 1,5 8,5
Volume (m3/an) 200 000 50000 336 000
Intensité (m3/km 2/mois) 12 200 3000 3750

IMPACT
Morphologie Sillons 0,5 - 1,50 m Sillons 0,3 - 0,5 rn
Sédiment affinement aucune modification
Benthos: diversité -70% -30%
densité -80% -72%
biomasse -90% -80%
RECOLONISATION 1986 1988 1991 en 8 mois
Diversité -70% -60% -50% sauf bivalves
Densité -80% -70% -70%
Figure S.

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