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Cours de macroéconomie

monétaire 1

Niveau : Licence 2

1
Introduction générale
Nous vivons dans des économies complexes et décentralisées où les opérations (de
production, de consommation etc.) reposent sur des échanges monétaires. Ces derniers sont
tellement nombreux que la monnaie est en nous, devenant un des modes d'expression de
l'homme, à tel point qu'un l’on pourrait se dire qu’il n’a besoin de définir la monnaie, puisque
pour lui, lorsqu’il la vois, il la reconnais. Mais la monnaie est difficile à définir. Une première
définition estime que la monnaie est un instrument de paiement Indéterminé, universel et
immédiat. En prolongeant cette définition essentiellement juridique, nous pouvons exhiber
trois approches en vue de préciser le concept de monnaie :
- Une approche historique et Institutionnelle ;
- Une approche fonctionnelle ;
- Une approche essentielle.
Parmi les formes monétaires, après avoir distingué les moyens dés paiement et les
moyens d'épargne, nous préciserons les différentes mesures de la monnaie en présentant les
agrégats monétaires. Le pouvoir de transformation des créances en moyens de paiement est
exclusivement détenu par les institutions financières, principalement les banques. La création
monétaire met toujours en relation deux catégories d'acteurs ; les agents non financiers et les
agents financiers qui seuls ont pouvoir de création monétaire. Cette création monétaire est
assurée par trois types d'agents : les banques commerciales, la Banque Centrale et le Trésor
Public.
Il s'agit de voir qui des banques centrales et des banques commerciales détient le rôle
moteur en matière de création monétaire et quels en sont en définitive les déterminants majeurs
de l'offre de monnaie. Deux réponses sont le plus souvent données. Dans l'optique dite du
multiplicateur, c'est la banque centrale qui a un rôle premier. Dans l'optique dite du diviseur,
l'accent est mis sur la relative autonomie des banques en matière d'octroi de crédit et donc de
la création monétaire.
Le cours est constitué de quatre chapitre.

2
Chapitre 1 : LA MONNAIE
Introduction
La monnaie a toujours représenté pour les économistes un objet d’étude particulièrement
complexe. Pour certains économistes, la difficulté à la définir est telle qu’il est sans doute
préférable d’y renoncer. La formule de Francis A. Walker (1840-1897), « Money is that money
does », s’inscrit dans une conception qualifiée de fonctionnaliste : la nature de la monnaie,
c’est-à-dire son essence et par extension sa raison d’être, peut être approchée de manière
suffisante à partir des fonctions qu’elle remplit dans l’économie. D’autres travaux partent de
l’hypothèse que la nature de la monnaie est une question complexe qui mérite d’être prise au
sérieux et que sa définition à partir des services qu’elle rend est, au mieux, incomplète et au
pire non satisfaisant. Ils montrent que la monnaie est une institution qui structure de nombreuses
sociétés humaines et qu’elle entretient des liens étroits avec l’économie de marché.
Avant de développer les notions de base en économie monétaire, il convient de préciser «
l’objet de l’étude : la monnaie » : « Qu’est-ce que la M ? ». Quel est son rôle dans l’économie
? Quelles sont ses formes ? Comment la mesurer ?

1.1. L’émergence des études d’économie Monétaire


La science économique est une science sociale s’intéressant aux faits économiques et aux
institutions qui régissent les rapports entre les individus. Elle cherche à découvrir l’utilisation
la plus efficace des ressources productives afin d’atteindre la satisfaction maximale des désirs
matériels des hommes.
Or, les questions de l’économie politique se posent sous des angles variés et donnent lieu à
diverses disciplines : l’économie de travail, l’économie du développement, l’économie
monétaire……
L’économie monétaire est une branche de la science économique qui s'intéresse aux fonctions
et au rôle de la monnaie dans l'économie. Elle a également pour objectif essentiel d'analyser les
liens existants entre la monnaie et l’activité économique notamment les relations causales entre
le volume de la monnaie en circulation et certaines variables économiques afin de mettre en
œuvre la politique monétaire la plus efficace.

1.1.1. La domination de la vision dichotomique


Historiquement, le début effectif des études d’économie monétaire était conditionné par la
considération de l’importance de la monnaie. En effet, la vision dichotomique entre la sphère
3
réelle et la sphère monétaire conduisait les économistes classiques tels que J B Say à éliminer
la monnaie de l'analyse économique. La monnaie est un "voile " qui cache les transactions
réelles qui s'opèrent entre les agents «les produits s'échangent contre les produits». A cet effet,
J S Mill déclare qu'« il n'y a rien plus insignifiant que la monnaie». Et même Walras qui
considère la monnaie, il ne lui attribut qu'un rôle secondaire dans sa théorie de l'équilibre
général puisqu'elle sert uniquement à convertir les prix relatifs en prix absolus.
Si on considère que la monnaie est un « voile » dissimulant la réalité de l’économie, ceci
revient à considérer que la sphère réelle et la sphère monétaire de l’économie sont strictement
séparées. L’équilibre au niveau de la sphère réelle est indépendant de l’équilibre monétaire. La
monnaie était alors « neutre ». En effet, la variation de la quantité de monnaie en circulation
n'a aucune influence sur la production et l'échange.
De ce fait, la préoccupation principale était d'étudier l'équilibre au niveau de la sphère réelle
(Production, Investissement, Consommation). L’étude de la monnaie est alors en dehors des
préoccupations des économistes. Elle n'influence pas les décisions qui portent sur la
consommation, l'offre du travail, etc….

1.1.2. La considération de l’importance de la monnaie par Keynes


Toutefois, J.M Keynes a qui a publié en 1930 le « Treatise on Money »1 et « La théorie générale
de l’emploi, de l’intérêt et de la monnaie » en 1936 a montré que le volume et la valeur de la
production dépendent de la monnaie et du crédit. Ceci a permis de dépasser la vision
dichotomique et démontrer que la monnaie est un déterminant important du niveau de l’activité
économique. En effet, selon l’auteur, le taux d’intérêt est déterminé sur le marché de la
monnaie (tel que O de M = D de M) et le taux d’intérêt influence l’investissement. Ainsi, dans
cet esprit, le taux d’intérêt fait le lien entre sphère réelle et sphère monétaire. D’une part, le
taux d’intérêt est une variable monétaire : il résulte de la confrontation entre la demande et
l’offre de monnaie et d’autre part, le taux d’intérêt détermine le niveau de l’investissement.

C’est donc grâce à l'œuvre de Keynes que l’économie monétaire soit imposée au sein de
l’analyse économique. L'économie keynésienne est une « économie monétaire de production

1 Le Traité sur la monnaie « A Treatise on Money » paraît en 1930 alors que Keynes était membre du
Comité Macmillan chargé de « conseiller » le gouvernement de Ramsay MacDonald. L’ouvrage se
composait de deux volumes : le premier « La Théorie pure de la monnaie ». Le deuxième volume : «
La Théorie de la monnaie appliquée ». Toutefois, cet ouvrage n’a pas eu autant de succès que « La
théorie générale ».

4
» et non comme « économie réelle d'échange » considérée par la théorie classique. Par ailleurs,
Keynes est le fondateur de la macroéconomie.

1.1.3. La monnaie dans l’économie moderne


La simple observation de la réalité démontre que la monnaie joue un rôle fondamental dans
l'économie moderne : il existe plusieurs interactions entre la sphère réelle et la sphère financière
: contrainte de financement, l'influence de l'endettement, le rôle des marchés…. La dernière
crise financière de septembre 2008, « crise des subprimes » a affecté et continue à peser sur les
économies nationales et l’économie mondiale. En 2009, les taux de croissance des pays
développés étaient très faibles.
De même, l’activité réelle pèse sur le secteur monétaire : par exemple, l’augmentation de la
production entraîne une demande additionnelle de monnaie ou une augmentation des
possibilités nouvelles de financement offertes par les banques ou les marchés financiers.

1.2. Les fonctions et formes de la monnaie


La définition de la monnaie pose des problèmes étant donné son usage répandu et ses formes
diverses. Ainsi, il existe plusieurs définitions de la monnaie.
• La monnaie peut être définie comme tout ce qui sert à payer. Or, tout ce qui permet de
payer n’est pas systématiquement une monnaie. Ex : le ticket restaurant.
• Juridiquement, c'est tout moyen de paiement qui permet de régler sans délai et
définitivement une dette ou un achat.
• L’approche historique et institutionnelle définit la monnaie en se référant aux différentes
étapes historiques de l’émergence de la monnaie et développement des banques.
• L’approche essentialiste de la monnaie relève d’une lecture sociologique de la monnaie.
La monnaie n’est pas un instrument technique au service de l’échange marchand car elle
précède les sociétés de marché : la monnaie est un fait social qui permet de normaliser
les rapports marchands. Elle fonde l’économie marchande et permet de représenter
institutionnellement le social.
• La définition fonctionnelle de la monnaie considère les fonctions spécifiques de la
monnaie ou les propriétés qu’elle doit remplir afin de jouer son rôle.

1.2.1. Les fonctions de la monnaie


Généralement, on privilégie la définition fonctionnelle de la monnaie c-à-d définir la monnaie
non par ce qu'elle est mais plutôt parce qu'elle fait. La définition de la monnaie par ses

5
fonctions est une approche instrumentale. Comme le note Hawtrey « Certains objets trouvent
dans l'usage que l'on en fait leur meilleur définition »2. Selon Walker «Money is that money
does».

La monnaie remplit trois fonctions, à savoir :


• la fonction d'unité de compte
• la fonction d'intermédiaire d'échange
• la fonction de réserve de valeurs

a. La fonction d'unité de compte ou d’étalon de valeur


La monnaie est une mesure de la valeur des biens. Elle permet d’exprimer la valeur de chaque
bien par rapport à une référence unique à la manière des unités de mesure des longueurs ou
des poids.

L'unité de compte est celle dans laquelle les prix sont fixés et les comptes sont tenus. La
monnaie est appelée « numéraire ». Les valeurs des différents biens sont exprimées en une seule
unité.
Certains économistes considèrent que cette fonction est la première qui se manifeste puisque
même avec le troc, une référence unique de la valeur des différents biens et services s'impose.
Cette référence unique des biens est d'autant plus nécessaire que le nombre des éléments de
l’échange augmente multipliant ainsi le nombre des combinaisons possibles. En effet, en
présence de n biens, l'opération bilatérale des échanges c-à-d l'échange de 2 à 2 donne lieu à
l'analyse combinatoire :
= n !/2 ! (n-2) ! = n (n-1)/2.

Toutefois, lorsqu'un bien parmi les autres joue le rôle de la monnaie, les rapports de l'échange
se réduisent à (n-1) et on abandonne les prix relatifs au profit des prix absolus. Comme unité
de compte, la monnaie réduit le nombre des prix nécessaires dans une économie, ce qui réduit
les coûts de transaction.
Par exemple : Si on a 20 biens à évaluer, il faut établir 190 combinaisons possibles. En effet,
grâce à l’analyse combinatoire.
= n!/(n-2)!*2! = n (n-1 ) / 2 = (20* 19)/2

2Selon Hawtrey « la notion de la monnaie comme celle de cuillère à thé ou de parapluie appartient à
un groupe de notions qui se définissent avant tout par la fonction ou le but que chacun se propose ».

6
Si un des biens set d’étalon en lui donnant la valeur 1, le nombre de combinaisons est moins
important, il est de n-1 (20-1 = 19) soit 19 prix.

Ainsi, en harmonisant les multiples évaluations, la monnaie simplifie le système des prix, les
négociations, les comparaisons et les calculs économiques et favorise les transactions
économiques.
Cette fonction nécessite la confiance en la valeur de la monnaie, une confiance que la Banque
Centrale cherche à entretenir.

b. La Fonction d'intermédiaire d'échange ou fonction de moyen de


paiement
La monnaie est un intermédiaire dans la circulation des marchandises. A chaque fois que les
marchandises circulent, la monnaie circule. Cette situation succède au régime du troc
(marchandises contre marchandises) qui pose des difficultés :
• La rencontre de deux agents présentant une désidérabilité mutuelle.
• La possibilité de comparaison entre les deux éléments faisant l'objet de l'échange dont
les valeurs doivent être identiques pour que l'échange soit bénéfique et qu'il se réalise
dans l'équité. Ce pose alors le problème de la
détermination des termes de l’échange.
• L’indivisibilité des biens.
Le troc entraîne que les agents consacrent beaucoup de temps, d'effort, des coûts d'information
et de transaction pour pouvoir réaliser des transactions.
Or, grâce à un intermédiaire général dans les échanges, les transactions se trouvent facilitées
et le processus d'échange devient plus facile et plus efficient. Ainsi, la monnaie dissocie le troc
(flux réel contre flux réel) en 2 opérations : une opération de vente qui permet d'obtenir la
monnaie utilisée ensuite pour une opération d'achat. L'économie monétaire se distingue de
l'économie de troc par la circulation de la monnaie.
Pour que la monnaie joue d'une façon unanime le rôle d'intermédiaire, elle doit circuler et jouir
d’un :
- Cours légal : la monnaie ne peut pas être refusée en paiement dans un espace
économique ou une zone monétaire donnée bien déterminée.
- Pouvoir libératoire : la monnaie doit permettre d'effectuer des paiements immédiats et
définitifs et donc se libérer immédiatement des dettes.

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c. La Fonction de réserve de valeurs
Si la monnaie permet d’acheter un bien et un service, elle offre aussi la possibilité de différer
une telle acquisition. Ainsi, elle autorise le transfert du pouvoir d’achat d’une période à une
autre sans pour autant garantir le « pouvoir réel » étant donné l’inflation.

La monnaie serait un instrument permanent de réserve de valeurs. Elle permet d'aménager les
décisions par rapport au présent, au passé et à l'avenir et offre les avantages des choix temporels.
Selon Keynes: " l'importance de la monnaie découle essentiellement du fait qu'elle constitue un
lien entre le présent et l'avenir ". Les agents sont alors incités à épargner3.

Toutefois, la fonction de réserves de valeurs n'est pas spécifique pour la monnaie et certains
biens peuvent constituer une réserve de valeurs plus sûre que la monnaie.

La monnaie est une partie intégrante du patrimoine des agents économiques. Le patrimoine de
l'agent est l'ensemble de sa richesse se composant de 3 catégories d'actifs:

• Actifs réels : terrains, constructions, équipements,….


• Actifs financiers : actions, obligations……..
• Actifs monétaires : Billets de banque, compte courant….
Les actifs réels procurent des satisfactions ou des revenus. De plus, ils peuvent être une source
de plus-value. De même, les actifs financiers peuvent offrir des revenus alors que les actifs
monétaires ne rapportent quasiment rien, au contraire, ils peuvent être source de « moins-value
réelle » en cas d'inflation. Ainsi, chaque agent détermine la répartition de son patrimoine par
arbitrage entre tous les actifs qui peuvent composer son patrimoine afin de minimiser le risque
et les moins-values tout en maximisant les gains. Généralement, les déterminants du choix de
détention d’actifs des individus dépendent de la richesse de l’individu, du rendement anticipé
pour une période d’un actif relativement aux autres actifs, du risque d’un actif par rapport aux
autres et aussi de la liquidité d’un actif par rapport aux autres.

La monnaie possède la qualité d'être un moyen de paiement général, immédiat et plus liquide.
Depuis son traité de 1930, Keynes a développé la « notion de préférence pour la liquidité »
définit la liquidité comme des éléments réalisables dans un bref délai et sans pertes :

3
Si cette épargne est conservée sous forme de monnaie non rémunérée en dehors du circuit bancaire
et financier, elle est appelée thésaurisation.

8
La liquidité englobe deux caractéristiques :
- la disponibilité
- la surêté nominale
En effet, il existe trois degrés de liquidité:
• La liquidité primaire que l'on confère aux actifs monétaires qui sont
immédiatement mobilisables et sans coûts : ex : billets de banques, dépôts à
vue
• La liquidité secondaire est attribuée aux actifs financiers non immédiatement
disponibles mais réalisables rapidement sans coûts onéreux : ex : dépôts à
terme
• La liquidité tertiaire: elle est relative aux effets non escomptables réalisables
à un coût potentiellement élevé et pouvant entraîner une perte financière : ex
: les actions.
Comparée aux autres actifs financiers, la monnaie présente trois caractéristiques :
- Les coûts de transactions les plus faibles en raison de sa liquidité qui tient à son
aptitude à être utilisée pour régler des dettes et des achats sans délai. Toutefois, tous
les autres actifs doivent d'abord être transformés en monnaie pour assurer ce rôle, ce
qui entraîne des coûts.
- Son rendement est nul alors que les dépôts à terme et les obligations rapportent des
intérêts.
- Sa valeur nominale est constante. Toutefois, elle peut présenter un risque de
moins-value réelle en cas de l’inflation.
Il s’en suit que la détention de la monnaie comme réserve de valeurs résulte de la préférence
pour la liquidité.

CARACTÉRISTIQUES générale physique temporelle


1. Intermédiaires d'échange liquidité concret immédiat
2. Unité de compte numéraire abstrait immédiat
3. Réserve de valeur actif concret intertemporel
Source : http://zonecours.hec.ca/documents/H2005-1-228291.NOTE05complet.pdf

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Remarque : certains auteurs intègrent une autre fonction de la monnaie : instrument de la
politique économique. Or, la considération de la monnaie comme instrument de politique
économique qui permet aux autorités d’influencer l’activité économique (Chapitre 5).

1.2.2. Les formes de la monnaie


La monnaie actuelle est l'aboutissement d'une évolution longue et mouvementée. Elle se
présente sous des formes diverses : M métallique, M fiduciaire-papier et M scripturale.
Suite à la spécialisation, la division du travail et le développement des échanges, le troc a été
abandonné et un bien s'est imposé comme intermédiaire dans les échanges : c'est l'émergence
de la « Monnaie- marchandise : Commodity money ». C’est une marchandise connue et
d’usage courant qui en plus de son utilisation normale comme bien de consommation ou bien
de production, sert aussi de moyen de paiement. Par exemple : le blé dans les sociétés
agricoles, le poisson séché ou les coquillages sur les îles, le riz, le sel, le thé… 4

a. La monnaie marchandise
La monnaie marchandise se caractérise par le fait que le support monétaire présente une valeur
intrinsèque égale à sa valeur monétaire. Elle est généralement considérée comme la forme la
plus « primitive » ; on parle également de paléo-monnaie.
De nombreuses sociétés marchandes antiques utilisent ainsi le bétail, des céréales, des
coquillages ou encore des barres de sel, pouvant se conserver, inspirant confiance, facilement
cessible, accepté comme ayant une valeur d’usage. Les monnaies-marchandises encombrantes,
coûteuses à produire, ou trop facilement périssables, n’ont guère traversé le temps.
Dans tous ces cas de figure, il s’agit de marchandises qui sont produites par le système
économique : elles impliquent des coûts de production et disposent d’une valeur d’échange. Les
paléo-monnaies sont utilisées pour remplir la fonction d’unité de compte et/ou celle
d’intermédiaire des échanges. Compte tenu du caractère parfois périssable de la marchandise
qui prend le statut de monnaie, la fonction de réserve de valeur était, le plus souvent, peu prise
en compte.

4Toutefois, ces biens présentent certains inconvénients : l'encombrement, la non homogénéité et la


périssabilité. Par ailleurs, pour employer la Marchandise-M, la société doit soit réduire ses autres
utilisations soit en produire des quantités supplémentaires en utilisant les ressources rares.

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b. La Monnaie-métallique
Dès l'origine, les monnaies métalliques sont des poids, puis elles ont pris la forme de lingots
(M pesée), ensuite elles se sont présentées sous forme quelconque (M comptée) et enfin des
pièces (M frappée).
Les M-Métalliques sont au début fabriqué à partir des métaux non précieux (fer, cuivre,
Bronze) remplacées après par des métaux précieux (argent et/ou or). L'or et l'argent présentent
des qualités de constance, d'homogénéité et de divisibilité. Ensuite, il y a eu le passage du
bimétallisme vers le monométallisme (depuis 1819 en Grande Bretagne).
Au début, la fabrication des pièces métalliques était le fait de ceux qui travaillent les métaux
entraînant ainsi une circulation monétaire très hétéroclite. Il s'en suit que les bonnes pièces
n'étaient jamais utilisées alors que les pièces usées et mauvaises demeurent toujours en
circulation, d'où la loi de Gresham « la mauvaise monnaie chasse la bonne ».
Au début, l’Etat intervient sous forme d’une apposition d’un sceau (attestant du poids et de
teneur en métaux précieux) sur les pièces en circulation. Mais ceci n’était pas suffisant. Ensuite,
le droit de battre la M sera confié à la puissance publique. Or, le besoin grandissant de la M des
princes et des souverains de même que la rareté relative des métaux ont entraîné une
dépréciation de la valeur de la monnaie. On abandonne la correspondance entre la valeur réelle
et la valeur nominale grâce à des mutations réelles (modification soit de l'alliage de la pièce de
M soit de la qualité du métal qu'elle contient) ou encore des mutations nominales (modification
du rapport d'équivalence liant la M de compte à la M réelle).

Remarque : La M divisionnaire actuelle admet une valeur faciale qui n'a aucun rapport avec
la valeur du métal qu'elle contient. Elle permet d’assurer les transactions de faible valeur.
Dotées d’un pouvoir libératoire limité (elles sont utilisées pour les échanges de faibles
montants), elles font de nos jours parties des monnaies fiduciaires en raison de leur faible valeur
intrinsèque.

c. La Monnaie fiduciaire-papier
Historiquement, la monnaie métallique est devenue un instrument peu commode pour les
transactions à distance qui se multiplient avec le développement du commerce. Pour éviter le
risque de perte et de vol, les commerçants se sont mis à confier leurs fonds aux orfèvres contre
des reçus. Ils peuvent ainsi trouver un endroit sûr pour stocker leurs monnaies et les reprendre
quand ils en avaient besoin. Les reçus permettent de régler les transactions. Ultérieurement,

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les orfèvres londoniens Goldsmith ont pensé à fractionner les reçus en coupons de sommes
rondes, ainsi,
les reçus anonymes se substituent à la M métallique, c’est l’apparition du billet de banque.
Dès le milieu du 17ème siècle, le banquier suédois Palmstruch a eu l'idée qu'une banque peut
faire circuler plus de billets qu'elle encaisse en délivrant des reçus sans contreparties : prêter
de la monnaie sous forme de billet sans pour autant disposer de son équivalent en or : c’est le
crédit.
C'est la banque d'Angleterre qui après la Banque de Stockholm a constitué le modèle des
banques modernes émettant les billets de banques. Ainsi, l'émission de la M-papier bénéficie
de la garantie des pouvoirs publics, tout le monde lui fait confiance et elle est acceptée en
règlement de toutes les transactions. L'Etat donne donc à la M fiduciaire-papier un cours légal
(Fidus= Confiance).
Les billets de banque étaient entièrement couverts par une contrepartie métallique5. Toutefois,
à l'issu de la première guerre mondiale, les pays de l'Europe ont été obligé de décréter
l’inconvertibilité des billets. C'est le passage du cours légal au cours forcé (imposé).
N.B : La monnaie fiduciaire est composée des billets de banque et de la monnaie divisionnaire.

d. La monnaie scripturale
Lorsqu’un agent confie son argent à la banque, cette dernière ouvre un compte au nom du
déposant, inscrit à son crédit le montant déposé et enregistre le dépôt dans ses livres
comptables. La monnaie revêt alors la forme écrite sur les livres de la banque: c'est la monnaie
scripturale (Script = écriture). C’est l’ensemble des inscriptions dans les comptes en banque.
La monnaie scripturale est l’ensemble des dépôts auprès des institutions financières6.

Elle est plus commode que la monnaie de papier : facilite les paiements à distance, évite les
transports d’espèces et ses mouvements, laisse des traces écrites, simplifie la tenue de la
et l’apport des preuves de paiement….
Les moyens de mobilisation de la M scripturale sont :
-Le retrait de l’argent : le retrait d’une partie de l’avoir à la banque sous forme de billets.
-Le chèque : c’est un ordre de paiement écrit adressé à la banque que le tireur remet au
bénéficiaire.

5
Un débat « currency school »/« banking school » quant à la liberté ou réglementation de l’émission.
6Historiquement, la monnaie scripturale est apparue au 12ème siècle en Italie. Mais, elle n’a
commencé à se généraliser qu’au 19ème siècle en Grande Bretagne.

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-Le virement c-à-d un transfert de fonds d'un compte à un autre compte.
Or, le chèque et le virement présentent à coté de leurs nombreux avantages pour les usagers,
l'inconvénient d'un coût de gestion élevé pour les banques. C'est pour réaliser des économies
que le traitement de la M scripturale s'est automatisé et qu'un nouveau support a été adopté : la
carte magnétique (on distingue la carte de retrait, la carte de paiement et la carte de crédit).

La monnaie électronique dont le développement a été favorisé par des techniques


électroniques de l'information se définit comme « l’ensemble des techniques informatiques,
magnétiques, électriques et télématiques permettant l'échange de fonds sans papier ». La carte
à puce jouit d’un ordinateur miniaturisé permettant de stocker des informations. Le statut de la
monnaie électronique dépend de la nature de l’émetteur. Si la carte est émise par un agent non
financier (société de service), c’est un pouvoir d’achat utilisable sur le marché des biens et
services en fonction des dépenses contenu dans la carte mais dont l’acceptation de la carte en
paiement est limitée. Le pouvoir de cette carte est limité. Si l’émetteur est un établissement de
crédit, l’opération est une simple substitution d’une forme de monnaie, la carte à une autre, les
dépôts ou billets7. Dès lors, la M électronique n'est pas en soi une nouvelle forme de M, mais
c'est un nouveau moyen de mobilisation de la M scripturale.
Source : http://www.bct.gov.tn/bct/siteprod/francais/indicateurs/moyens.jsp
L’évolution historique de la monnaie permet de constater :
- La coexistence des différentes formes de monnaie.
- La dématérialisation progressive c-à-d la disparition progressive du support matériel tangible
: blé, pièces d’or, billets de banque, écritures puis impulsion magnétique.
- L’utilité de la monnaie dans l’échange est la même quel que soit sa forme et sa valeur
intrinsèque.

1.3. Les agrégats monétaires


Les agrégats monétaires permettent de mesurer la masse monétaire.
La masse monétaire est l’ensemble des moyens de paiements détenus par les agents non
financiers leur permettant d’acquérir des biens et des services à un moment donné.
La mesure précise et exacte de la monnaie est essentielle pour un grand nombre de variables
économiques. Les agrégats sont des grandeurs définies par les autorités monétaires qui

7Par exemple, le e-dinar, émis par la poste qui gère la monnaie postale est considéré comme monnaie
scripturale.

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regroupent dans des rubriques homogènes mesurables et contrôlables la monnaie et ses
substituts proches8 en se basant sur différents critères :
- Le critère monétaire qui distingue parmi les actifs ceux dont la proximité monétaire est
la plus grande.
- Le critère institutionnel qui privilégie dans la définition des agrégats la qualité de ou
du gérant (Banque Centrale, banque, trésor, entreprise).
- Le critère financier qui range les actifs selon leur degré de liquidité.
Ainsi, les agrégats monétaires sont des indicateurs statistiques élaborés par les autorités
monétaires et censés refléter la capacité de dépense des agents économiques9. Le rôle de ces
indicateurs est de fournir des informations aux banques centrales devant permettre à celles-ci
de guider au mieux les évolutions monétaires en fonction de leurs objectifs. La définition de
ces agrégats suppose que l’on trace une frontière entre les différents actifs financiers détenus
par les agents non financiers afin de déterminer ceux qui représentent une réserve de pouvoir
d’achat.
Aujourd’hui, les mesures de la monnaie sont difficiles à effectuer suite aux innovations
financières depuis les années 80 entraînant la prolifération des actifs financiers et le
développement des marchés financiers. Ces innovations ont rendu délicate la séparation entre
les actifs monétaires et les actifs financiers. La limite entre monnaie et épargne est floue. Ainsi,
en plus de la monnaie au sens strict, on considère les actifs qui sont facilement et rapidement
convertibles en moyens de paiement puisque les coûts de transaction d’un actif à un autre est
devenus très faible. Les agrégats sont devenus instables et doivent être révisés périodiquement.
En Côte d’Ivoire, on recense M1, M2, M3 et M4. Ces agrégats sont calculés par simple
sommation et reflètent des composantes de la masse monétaire. Ils sont emboîtés du plus au
moins liquide.
La masse monétaire admet aussi des contreparties (développées au Chapitre 2).

8Ceci permet de suivre l'évolution de la masse monétaire dans ses diverses composantes, contrôler sa
croissance et mener la politique monétaire.
9Autres définitions : Les agrégats monétaires peuvent être définis comme des indicateurs statistiques
qui regroupent « tous les actifs permettant des achats de biens et de services ou le règlement d’une
dette sur un territoire donné, ou facilement convertibles en moyens de paiement avec un faible risque
en capital » (Banque centrale européenne).

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1.3.1. La MM au sens de M1
L’agrégat monétaire étroit M1 (monnaie au sens strict) ou les disponibilités monétaires
comprend les moyens de paiement immédiats, à savoir la M manuelle sous forme de billet de
banque, de pièces métalliques et les dépôts à vue auprès du système monétaire détenus par les
ANF. Ces disponibilités monétaires servent directement d'instruments de paiement.
M1 = M Fiduciaire10 + M scripturale
M1 = Billets + M divisionnaire + Dépôts à vue auprès des banques et auprès des CCP
Remarque: Les dépôts à vue en devises sont exclus de M1, leur conversion en dinars comporte
un risque de capital.

1.3.2. La MM au sens de M2
M2 est plus large que M1. Elle est obtenue en ajoutant la quasi-M à M1 c-à-d des avoirs qui
peuvent être transformés rapidement et sans coûts onéreux en moyens de règlement. En
d’autres termes, l’agrégat « intermédiaire » (M2) comprend, en plus de (M1), les placements
à vue effectués sur des comptes sur livrets à taux réglementés, notamment les livrets A des
caisses d’épargne, les comptes d’épargne-logement, les comptes pour le développement
industriel (CODEVI), les livrets d’épargne populaire (LEP), les livrets « jeunes ». Ces
placements — parfois qualifiés de quasi-monnaie — ont la caractéristique d’être disponibles
à tout moment mais, contrairement aux actifs qui constituent M1, ils ne peuvent servir
directement à effectuer des paiements. Les actifs inclus dans (M2 – M1) correspondent en
grande partie aux actifs liquides non négociables.
M2 = M1+ quasi-monnaie
M2 = M1 + Dépôts à terme+ dépôts d'épargne+ certificats de dépôts+ avoirs en devises ou en
FCFA convertibles.
Les dépôts d'épargne = les comptes spéciaux d'épargne+ l'épargne au CEP+ les autres dépôts
d'épargne
Les certificats de dépôts sont des titres de créances négociables émis par les banques sur le
marché monétaire.

10 Monnaie Fiduciaire = Billets et monnaie en circulation – (encaisses des banques + encaisses de


trésor).

15
1.3.3. La MM au sens de M3
La masse monétaire au sens large (M3) recouvre (M2) ainsi que les instruments négociables
émis par les institutions financières monétaires (IFM). Il s’agit en particulier des titres
d’OPCVM monétaires et des titres de créances négociables (TCN), notamment les certificats
de dépôt. Les actifs compris dans (M3 – M2) correspondent pour l’essentiel aux actifs liquides
négociables.
M3 englobe l'ensemble des moyens de paiement permettant d'acquérir des biens et services
que ces moyens soient immédiatement utilisables ou qu'ils soient constitués sous forme de
placements rapidement et facilement transformables en M.
M3 est composée de M2 à laquelle on ajoute l’épargne affectée.
M3 = M2 + l’épargne affectée
M3 = M2 + Epargne-Logement + Epargne projet et investissement+ Emprunt obligataire
L'épargne projet et investissement: il s'agit de dépôts d'une durée de 5 ans qui sont destinés à
acheter des titres de sociétés.
Emprunt obligataire: il s’agit des titres émis en bourse par les institutions financières et les
entreprises.

1.3.4. Masse monétaire au sens de M4


M4 est l'agrégat le plus large puisqu'il regroupe l'ensemble des liquidités de l'économie. M4
comporte les composantes de M3 ainsi que des titres étroitement substituables aux actifs
liquides inclus dans M3. M4 = M3 + Autres Titres de Créances Négociables
M4 = M3 +Titres de l'Etat auprès du public + Billets de trésorerie
Les Titres émis par l'Etat = Bons d'équipement + Bon de trésor + Emprunt National

1.4. La vitesse de circulation de la monnaie


Grâce à « l’équation des échanges » proposée par Irving Fisher en 1911 : M V = P T (M:
le stock de M en circulation, P: le niveau général des prix, T : le volume des transactions), on
peut calculer la vitesse de circulation de la M.
V= (P T)/M : La vitesse-transaction est obtenue en divisant la valeur globale des transactions
par la quantité de M qui a servi à le .
V désigne le nombre moyen de paiements qu'effectue un instrument de paiement durant une
période donnée. C'est la fréquence avec laquelle une unité monétaire change de propriétaire au
cours d'une période donnée: c'est aussi le taux de rotation de la monnaie par an.

16
Toutefois, l'école de Cambridge notamment avec Pigou et Marshall avait proposé une nouvelle
formule de cette équation : M V= P Y (Y: le revenu national réel).
On peut alors calculer la vitesse-revenu: V= (P Y)/M ou V= PIB /M
V exprime le nombre de fois, par période de temps qu’une unité monétaire entre dans le revenu
de quelqu’un.
Cette vitesse peut être calculée pour M1, M2; M3, M4.

1.5. Le Taux de liquidité


L'ensemble des actifs liquides constitue la liquidité de l'économie. Ces actifs permettent aux
agents de rentabiliser leurs trésoreries et au système financier de disposer de ressources plus
stables que les dépôts à vue.
Le taux de liquidité est le rapport exprimé en pourcentage entre la somme des moyens de
paiement disponibles et un indicateur de l'activité économique le produit intérieur brut : Li =
Mi/PIB ; i= 1,…4, donc, Li = 1/Vi
Il permet d'étudier le degré de liquidité par rapport aux besoins de l'économie. Si l'économie
est très liquide, ceci signifie que les ANF détiennent un volume important de M et permet
d'alimenter une forte demande de consommation et cause une inflation. Toutefois, le manque
de liquidité entraîne des tensions de financement des entreprises, ce qui risque de freiner la
croissance économique.

17
Chapitre 2 : La création monétaire

La création de la monnaie est la mise en circulation d'une nouvelle quantité de monnaie, en


d'autres termes c'est l'augmentation de la masse monétaire pendant une période donnée. Elle
consiste à monétiser des actifs auprès d'agents non-financiers. En d’autres termes, c’est une
transformation de créances sur les agents non financiers dépourvues du pouvoir libératoire en
moyens de paiement immédiatement utilisables pour les règlements.
Rappelons que la Masse monétaire est l'ensemble des moyens de paiements détenus par les
ANF qui peuvent se manifester sous forme de pouvoir d'achat sur les marchés de biens et
services.
Or, les opérations de conversion ne modifient pas le montant de la masse monétaire. Par
exemple, les billets déposés en dépôts à vue constituent une simple transformation de la M
fiduciaire en M scripturale et non pas une création monétaire. Par ailleurs, lorsque la M créée
reste à la disposition du secteur bancaire et ne circule pas, ceci n'augmente pas la masse
monétaire.
Il y a création de monnaie à partir du moment où s’accroît le volume des avoirs monétaires des
agents économiques, sous forme de pièces, de billets, mais surtout de monnaie scripturale.
Les banques commerciales sont les plus importants créateurs de monnaie. Elles influencent
considérablement la masse monétaire. Les banques peuvent créer la monnaie scripturale à
l'occasion de plusieurs opérations avec un agent non financier tels que :
- l'achat d'un bien réel
- l'achat de devises (lorsque la banque commerciale reçoit des devises étrangères pour le
compte du client, elle crédite le compte d'un agent en échange de devises, elle acquière
une créance sur l'extérieur), la banque enregistre la dette envers le client (au passif) et
une créance sur le pays émetteur des devises (à l’actif). C’est une « création monétaire
spontanée ».
- l'achat d'actions-obligations ou de titres à court terme négociables.
- l'escompte est une opération qui consiste pour la banque à acheter effets de commerce11
en contrepartie des fonds offerts. Il est à remarquer que cette création de M est
temporaire jusqu'à l'échéance, lorsque la banque recouvre sa créance, cette création de
M sera annulée à l’échéance.

11 Les effets de commerce sont des titres de créances à court terme qui s'établissent entre les
particuliers lors des transactions et qui deviennent mobilisables par le biais de l'escompte. Nous
distinguons deux effets de commerce : billets à ordre et la lettre de change.

18
- le crédit où la banque joue un rôle actif dans la création de la monnaie. C’est une «
création monétaire provoquée ».

2.1. Le processus de création de monnaie


Le processus de création monétaire est principalement l’œuvre des banques commerciales, du
Trésor et de la Banque Centrale. Les banques sont caractérisées par ce pouvoir de création
monétaire ; c’est ce qui les distingue des autres institutions financières. La monnaie résulte d’un
processus de monétisation de créance.
2.1.1. Création de monnaie scripturale par les banques commerciales
L'activité la plus importante de la banque est le crédit. Lorsque la banque accorde un crédit à
son client, elle crédite son compte courant et crée la M scripturale. Contrairement à ce que l'on
peut intuitivement croire, la banque ne transforme pas les dépôts en crédits, elle transforme par
le crédit les actifs non monétaires en dépôts selon l'expression «les prêts font les dépôts». Les
nouveaux crédits accordés sont à l'origine de nouveaux dépôts puisque les banques inscrivent
le montant un nouveau montant au passif des comptes agents12 ce nouveau montant est égal au
montant du crédit accordé. Les crédits créent la monnaie parce qu’ils augmentent les dépôts
à vue. Ainsi, les banques détiennent en contrepartie des titres de créances sur l’économie. Cette
création de M par le crédit est temporaire, elle sera annulée lors du remboursement du crédit.
Si on considère que les dépôts font les crédits alors ceci signifie que l’épargne préalable finance
et permet l’investissement. Or, si les crédits sont financés par épargne, ceci ne constitue pas
une création monétaire. Mais, en réalité, la banque commerciale ne se limite pas à prêter les
avoirs déposés chez elle, mais elle peut créer la monnaie et accorder des crédits qui dépassent
ses dépôts. Ainsi, la banque n’est pas limitée par ses ressources pour ses emplois. Par
conséquent, le mouvement se fait non pas des ressources vers les emplois, mais, des emplois
vers les ressources. Il s’agit d’une logique keynésienne : l’investissement initial va créer une
épargne qui lui est égale.
Ainsi, la structure et le volume de la masse monétaire sont soumis à la variation, donc à une
création ou destruction de M suite aux relations entre les banques et les ANF qui s’inscrivent
dans un processus dynamique.
Une banque crée également de la monnaie lorsqu’elle monétise des créances sur l’étranger,
c’est-à-dire lorsqu’elle transforme des devises (moyens de paiement non libellés en monnaie

12Or, les agents peuvent retirer une partie de leur nouveau avoir (crédit), alors le montant des dépôts
baisse, ainsi en général les prêts font les dépôts d’un montant moindre.

19
nationale (par exemple en FCFA)) en FCFA (moyens de paiement détenus par des ANFR et
libellés en FCFA. Une banque crée de la monnaie lorsqu’elle achète des titres publics,
principalement des bons du Trésor.
Tableau 1. Bilan monétaire d’une banque commerciale
ACTIF PASSIF
- Créance sur l’extérieur - Dépôts à vue
- Créance sur le Trésor public - Actifs liquides (billets, pièces)
- Créance sur l’économie

Lorsque le crédit arrive à échéance et qu’il fait l’objet d’un remboursement, la quantité de
monnaie correspondante est détruite. La quantité de monnaie en circulation dans une économie
à un moment donné est donc le résultat d’un processus de création et de destruction de monnaie.
Si cette quantité de monnaie augmente, c’est que les opérations de création de monnaie
l’emportent sur les opérations de destructions de monnaie.

2.1.2. Les limites de la création monétaire par les banques


La création monétaire par les banques n'est pas illimitée. Elle se trouve contrainte par des
facteurs de la demande de crédit et les besoins des banques en M centrale.
• La contrainte de demande de crédit : la responsabilité de la création de M est d'une
certaine façon partagée entre la banque et les autres agents économiques puisque la
banque ne peut créer la M que si un agent économique lui demande un crédit. Or, le
besoin en liquidité des ANF peut être élevé en période de croissance et faible lors des
périodes de récession. Les banques ne créent pas de la monnaie en absence de demande
de crédit même si elle présente une potentialité de création monétaire.
• Le besoin en matière première : la monnaie centrale. La création de la M scripturale par
les banques engendre des fuites en M centrale de leur circuit. Une fraction plus ou moins
importante de la monnaie nouvellement créée quitte le circuit de la banque auquel le
banquier doit faire face. Les banques qui ne peuvent pas créer la monnaie centrale mais
scripturale doivent ainsi détenir la M centrale. Plus les fuites sont importantes, plus la
capacité de création monétaire est faible. Les fuites que subissent les banques sont de
deux types :

20
a. Les fuites naturelles
La banque se trouve exposée à une double ponction puisque le détenteur du dépôt à vue peut
exiger des billets ou demander à la banque de régler un tiers dont le compte se trouve dans un
autre établissement. Les fuites naturelles sont donc en billets ou vers d'autres établissements :
*Les fuites en billets: ces fuites s'expliquent par la dualité des moyens de paiement (M
fiduciaire, M Scripturale). En fait, le bénéficiaire du crédit peut demander la conversion de la
M scripturale en billets. Ainsi, une partie de la monnaie nouvellement créée est convertie en
monnaie centrale. La Banque doit disposer ainsi d'une certaine quantité de monnaie centrale.
Cette fuite est fonction de deux paramètres: le premier est d'ordre général: c'est l'importance de
la M fiduciaire par rapport aux dépôts à vue, cette importance est fonction des habitudes des
usagers, du développement du système bancaire, de la confiance suscitée par les banques, des
contraintes de conversion. Le deuxième élément est propre à chaque banque à savoir sa
situation géographique (zone urbaine, zone rurale), sa clientèle (ménages, entreprises, ouvrier,
cadre), son mode de gestion, etc…
Remarque: La quantité optimale de billets que doit détenir chaque banque est difficile à
déterminer, elle ne doit pas être trop importante dans la mesure où la M fiduciaire n'est pas
rémunérée mais juste suffisante pour que la banque puisse satisfaire toutes les demandes de
conversion émanant de sa clientèle.
*La fuite vers d'autres établissements :
Si le bénéficiaire du crédit X règle un créancier Y une somme de 100 qui possède un compte
dans la même banque (A), c'est un simple jeu d'écriture dans les livres de la banque.
Dans le bilan de la banque, le passif est constitué par les dépôts des clients (ce que la banque
doit au client). A l’actif, on a les réserves en monnaie centrale et les créances détenues sur les
personnes par le crédit.

Bilan de la banque A
Actif Passif
Compte courant de X -100 Compte courant de Y+ 100
Mais si Y est un client de la banque B, se pose alors le problème de l'inconvertibilité des M
scripturale des banques. Les banques n'acceptent que la M centrale dans le règlement
interbancaire. Ce genre de fuite dépend de la taille de la banque par rapport à ses concurrents
(c-à-d la part de marché de chaque banque) car plus elle a des clients moins elle risque d'avoir
des paiements à effectuer à d'autres banques et donc plus faibles sont les fuites.

21
Bilan de la banque A

Actif Passif

Compte courant à la BC= -100 DV = -100

Bilan de la banque B

Actif Passif

Compte courant à la BC=+100 DV = +100

Bilan de la Banque Centrale

Actif Passif

Compte courant de A = -100


Compte courant de B = +100

b. Les fuites artificielles


Le contrôle de la création monétaire des banques devient nécessaire dans la mesure où les fuites
de création monétaire par les billets ne sont pas importantes. La M fiduciaire ne représente de
nos jours qu’une faible part de la M scripturale, d'où des fuites naturelles.
Afin d'exercer une contrainte suffisante pour les banques. La BC a instauré une fuite artificielle
sous forme de réserves obligatoires : chaque banque est obligée de détenir à son compte à la
Banque Centrale, un certain pourcentage de ses dépôts à vue (et parfois de ces dépôts à terme)
sous forme de M centrale : des réserves obligatoires. Ce sont des comptes non rémunérés en
monnaie centrale à la banque Centrale. Plus cette proportion est importante plus les possibilités
de création monétaire par les banques sont limitées dans la mesure où la banque doit détenir un
montant important de monnaie centrale pour chaque unité de dépôt à vue gérée. La BC qui
module le taux de réserves obligatoires peut contrôler ainsi indirectement la création
monétaire.

22
La création de M par les banques est donc fonction des fuites hors de leurs circuits13.

Exemple
Si la proportion de la M centrale des dépôts à vue est fixée à 25%, le bilan de la banque est
équilibré à l'instant to.
Bilan de la banque à to

Actif Passif

M centrale = 250 DV= 1000


Crédits = 750

TOTAL = 1000 TOTAL = 1000

A l'instant to, la banque ne peut pas prêter car elle ne dispose d'aucun surplus de M centrale qui
lui permet d'honorer à ses engagements.
Si la banque accorde un crédit de 500 à t1:
Bilan de la banque à t1

Actif Passif

M centrale = 250 Crédits DV= 1500


= 1250
TOTAL = 1500 TOTAL = 1500

Une quantité de M centrale manque à la banque (1500*25%) –250= 125 de M centrale, ceci
peut amener la banque à une situation d’illiquidité.
Ainsi, toute banque pour pouvoir accorder des prêts, elle doit au préalable avoir un de M
centrale appelée réserves excédentaires : RE c-à-d des avoirs en M centrale au-delà de ce qui
est nécessaire pour assurer la conversion de la monnaie scripturale en monnaie centrale.

13La banque est obligée de détenir une proportion entre la réserve de monnaie centrale et la création
monétaire afin d’éviter tout risque d’illiquidité. Ce critère de solvabilité, le ratio COOKE instaure une
norme minimale de capitaux de base ou de fonds propres (8% des actifs pondérés en fonction du risque)

23
2.1.3. Création de monnaie par le Trésor Public et par la Banque Centrale
Le Trésor et la Banque Centrale créent deux catégories de monnaie : de la monnaie fiduciaire
et de la monnaie scripturale.
a. La création de monnaie par le Trésor Public
Le Trésor Public est le « Banquier » de l’Etat. Il gère les finances publiques, collectent des
recettes, règle des dépenses de l’Etat. Le Trésor crée de la monnaie fiduciaire, la monnaie
divisionnaire, puisqu’il a le monopole de fabrication des pièces de monnaie. Le Trésor Public
crée également de la monnaie scripturale par l’intermédiaire des comptes courants (jeu
d’écriture). Ainsi, lorsqu’il crédite le compte courant d’un fonctionnaire ou fournisseur de
l’Etat, il crée sa propre monnaie. Le paiement d’impôts, de taxes, d’amendes par un ANFR au
Trésor et la souscription aux bons du Trésor correspondent à une destruction de monnaie.

b. La création de monnaie par la Banque Centrale


La BC émet de la M centrale sous deux formes : la M fiduciaire et la M centrale scripturale. En
effet, la BC a pour mission la fabrication, la distribution et l'approvisionnement de l'ensemble
du territoire national en M centrale. Aussi, la BC assure les fonctions de banques et la fonction
de banque du trésor, elle peut alors influencer la Masse monétaire. La monnaie centrale
scripturale prend la forme d’une écriture dans les comptes courants des banques ou du trésor
auprès de la BC. La BC crée la M centrale scripturale à l'occasion des opérations financières
suivantes :
* L’acquisition de créances sur l’étranger : Les opérations sur or et devises
* L'acquisition des créances sur le trésor public : les concours accordés au trésor *
L'acquisition de créances sur les banques : le refinancement des banques Ces opérations sont
génératrices de l’émission monétaire.

 L'acquisition des créances sur l'étranger : Les opérations sur or et devises


L'acquisition des créances sur l'étranger concerne les opérations sur les devises et les opérations
sur l'or.
Les opérations sur devises : Ces opérations sont la plupart du temps effectuées par les banques.
Ensuite, les banques présentent les devises à la BC qui crédite leur compte courant. Cette
nouvelle M créée prend la forme d'une écriture ou de d’un crédit dans les comptes courants des
banques auprès de la BC : c'est la monnaie centrale scripturale.

24
Exemple : Une entreprise X est cliente de la Banque A, a exporté des dattes. Elle a reçu un
transfert en 100000 euros. Comme sur le territoire national, il ne faut faire circuler que le FCFA,
alors il faut convertir les euros en FCFA et les verser dans le compte de l’entreprise X. Ainsi,
la banque A présente les 100000 euro à la BCEAO, la BCEAO crédite le compte courant de la
banque A chez elle du montant équivalent à 100000 euros en FCFA soit 65 577 000 FCFA si
le taux de change euro/FCFA est de 655,77. C’est une nouvelle monnaie scripturale centrale
créée. Ensuite, la banque A crédite le compte de X.

Compte de X à la banque A
Bilan de la BC

A P D C
Compte de la banque +65577000 FCFA
A: +65577000
FCFA

Les réserves en devises sont susceptibles de varier quotidiennement étant donné les liaisons de
ces dernières avec les activités de l'exportation et de l'importation et l'entrée et la sortie de
capitaux.
Par ailleurs, les fluctuations et les variations du taux de change peuvent avoir une incidence sur
la valeur des devises étrangères en M nationale et peuvent donc susciter une création ou une
destruction de M, d'où la relation étroite entre la masse monétaire et le solde de la balance de
paiement.
Les exportations de marchandises, les entrées de devises, les transferts des travailleurs immigrés
entraînent un gonflement de la MM. Chaque devise qui entre dans le pays suscite une création
de M centrale alors que chaque devise qui quitte le territoire entraîne la destruction de la M
centrale.
Les opérations sur l'or : Les opérations sur l’or sont très limitées puisque l’or n’est plus utilisé
dans les transactions avec l’extérieur. Or, la variation des cours de l’or peut influencer la valeur
des actifs détenus par la BC et oblige la BC à procéder à une révision de la valeur qu’elle

25
possède. Dans le cas de la révision à la hausse, la plus-value est versée au trésor : la BC crédite
le compte courant du trésor du montant de cette plus-value, c’est une création monnaie centrale
scripturale au profit du trésor. En cas de révision à la baisse, ceci entraîne une destruction de la
M centrale.

 L'acquisition des créances sur le trésor


Le déficit du trésor peut le pousser à solliciter des crédits ou des avances de la BC. La BC
crédite le compte courant du trésor et crée ainsi la monnaie centrale scripturale. Le trésor peut
se servir de la somme empruntée en effectuant des retraits en billets ou des virements au profit
des banques. Cette création monétaire alimente ainsi les encaisses liquides des agents
économiques et les banques. Dès lors, on ne peut parler de création monétaire que si le trésor
utilise cette liquidité disponible pour effectuer des paiements au profit des ANF.

 L'acquisition des créances sur les banques


L'activité des banques entraîne le recours à l'Institut d'Emission (La Banque Centrale) lorsque
les banques sont en manque de liquidité. La BC acquiert des titres et crédit le compte courant
de la banque. La BC émet de la monnaie centrale scripturale au profit des banques en
contrepartie de l'acquisition d'une partie des créances des banques (traite, effet de commerce)
et elle pratique ainsi le réescompte (escompter de nouveaux titres déjà escomptés). Par ailleurs,
le refinancement des banques peut s'effectuer par le biais du marché monétaire. La BC peut leur
acheter des titres selon un taux du marché monétaire.
Bilan simplifié de la Banque Centrale
ACTIF PASSIF

Créances nettes sur l’étranger Billets en circulation


Compte courant des banques (Réserves)
Créances sur le Trésor
Créances sur les banques ( RF ) Compte courant du Trésor

Fonds propres
Autres postes de l'actif Autres postes du passif

Remarque : Les créances nettes sur l'extérieur = avoirs extérieurs - engagements extérieurs

26
OU ENCORE
Tableau 2 : bilan simplifié de la Banque centrale
ACTIF PASSIF
Avoirs en or et en devises Concours aux Monnaie fiduciaire
contreparties du secteur financier.
Notes : 1/ les avoirs en or et devises constituent les réserves détenues par la Banque centrale.
Ce sont des créances de la Banque centrale sur les résidents et des non-résidents. 2/ les concours
aux contreparties du secteur financier correspondent aux opérations de refinancement des
institutions financières, appelées contreparties, par la Banque centrale.

Comme toutes les banques, la Banque Centrale crée de la monnaie : la monnaie fiduciaire (les
billets) et la monnaie scripturale, qui sont les deux composantes de la monnaie banque centrale
(MBC). La création de monnaie est rendue possible par la monétisation (transformation en
moyens de paiement) de certains actifs ; c’est-à-dire achat par la Banque Centrale de ces actifs.
Le pouvoir de création monétaire des banques commerciales est potentiellement illimité14,
cependant en pratique il fait l’objet d’une double limitation :
- une limitation institutionnelle qui prend la forme du contrôle exercé par les autorités
monétaires sur les banques de second rang. Cette contrainte s’exerce en premier lieu en
imposant aux établissements de crédits de constituer des réserves obligatoires proportionnelles
aux montants des dépôts collectés (dépôts à vue et dépôts à court terme essentiellement). Les
réserves obligatoires sont déposées sur un compte auprès de la Banque centrale. Ce compte doit
être provisionné par remise de billets, de devises ou d’actifs, autrement dit, par une monnaie
que les banques ne créent pas elles-mêmes.
- une limitation liée à la concurrence interbancaire. En effet, toute banque de second rang qui
crée de la monnaie s’expose à des « fuites » hors de son propre circuit bancaire 15, ces fuites
exigent de la banque qu’elle détienne de la monnaie banque centrale. Ainsi, comme mentionné
plus haut, une banque qui émet « trop » de monnaie s’expose à un risque de liquidité16.
Le processus de création monétaire peut être analysé selon différentes approches : l’approche
du multiplicateur du crédit, l’approche du diviseur, l’approche du multiplicateur monétaire.

14 Il est illimité dans le cas où existe une seule banque émettrice d’une seule forme de monnaie.
15 Par exemple, une banque qui accorde un crédit à un client, crédite le compte de ce client en monnaie
scripturale, rien n’empêche ensuite ce client d’effectuer un retrait en billets (monnaie banque centrale),
il s’agit d’une fuite. Les fuites les plus importantes prennent la forme de paiements effectués à des
clients d’autres banques.
16 Pénurie de liquidités banque centrale.

27
2.2. Multiplicateur et diviseur de crédit
2.2.1. Le multiplicateur de crédit
L’approche en termes de multiplicateur de crédit met en évidence le fait qu’une opération de
monétisation de créance déclenche une réaction en chaîne, de sorte que la monnaie créée
finalement est un multiple de la première vague de monétisation. Dans ce modèle, le primat est
accordé aux réserves excédentaires en monnaie centrale détenues par les BSR : c’est par
conséquent la banque centrale qui est à l’origine des octrois de crédits par les BSR. Compte
tenu des parts de marché détenues par chaque BSR, celles-ci savent par expérience qu’elles
doivent conserver un certain pourcentage de dépôts en monnaie centrale sur leur compte auprès
de la banque centrale par rapport aux crédits qu’elles émettent.
En un mot, le multiplicateur de crédit indique quelle quantité de monnaie scripturale peuvent
créer les banques en fonction d’hypothèses relatives aux comportements de la Banque centrale
et de la clientèle des banques, et de leurs avoirs en MBC.
Les deux limitations que sont les retraits de billets par le public et les réserves obligatoires
correspondent à la réalité de la création monétaire. Elles permettent de définir le multiplicateur
de crédit. Si l’on note :
M, la monnaie totale créée (somme des crédits additionnels) ;
MBC, réserves excédentaires initiales ;
r, le taux des réserves obligatoires que les banques doivent constituer par rapport au montant
des dépôts qu’elles gèrent ;
b, le taux de préférences des agents économiques pour la détention de billets/ ou taux de retraits
sous formes de billets ;
On peut écrire comme suit le résultat auquel on aboutit à la fin du processus ci-dessous :
1
𝑀 = 𝑟+𝑏−𝑟𝑏 𝑀𝐵𝐶 (1)

Le multiplicateur de crédit est donc : 𝛼 = 1 ∕ (𝑟 + 𝑏 − 𝑟𝑏).


La distribution de crédits et la création de monnaie sont d’autant plus importantes que les agents
économiques utilisent la monnaie scripturale et non pas les billets, et que la banque centrale
maintient un faible taux de réserves obligatoires.
Le multiplicateur de crédit mesure le pouvoir de création monétaire d’un système bancaire dans
une zone économique donnée. Il peut s’écrire sous une forme simplifiée :
𝑀 = 𝛼𝑀𝐵𝐶 (2)

28
L’équation (2) signifie que la création monétaire (M) est une fonction du montant des réserves
bancaires (MBC). Ces dernières sont déterminées par le montant de billets en circulation et le
niveau des réserves obligatoires, deux variables contrôlées par la banque centrale.
Le multiplicateur de crédit permet de calculer le montant maximum de crédits que les banques
peuvent accorder à partir d’un excédent de réserves en monnaie centrale. Le multiplicateur
mesure l’ampleur de la création monétaire à partir d’une variation centrale. En d’autres termes,
il indique l’aisance de la création monétaire des banques, plus la valeur du multiplicateur est
importante, plus la création monétaire des banques est importante.
Tableau 3 : création de monnaie dans le cas de réserves obligatoires

Le montant de nouveaux crédits et la quantité de monnaie créée sont un multiple des réserves
excédentaires initiales. On remarque aussi que la quantité de monnaie créée (1000) correspond
à l’épuisement, par les réserves obligatoires, des réserves excédentaires.
Ce modèle du multiplicateur de crédit fait cependant l’objet de vives critiques qui sont
généralement regroupées autour de deux idées : Il suppose que le processus de création
monétaire est subordonné à la détention préalable par les BSR de réserves excédentaires en
monnaie centrale. Ensuite, ce modèle conduit à supposer que la banque centrale dispose de la
maîtrise de la création monétaire dans la mesure où le rythme d’augmentation de la base
monétaire est censé conditionner celui de la masse monétaire.

2.2.2. Le diviseur du crédit


La théorie du multiplicateur montre que la création monétaire des banques dépend de la M
centrale préalablement par les banques, donc une relation causale de la M centrale vers la M
des banques.
Or, en réalité, la banque accorde des crédits (crée la M) et se procure ensuite la liquidité (la
monnaie centrale) dont elle a besoin dans une étape ultérieure. Au fur et à mesure que les fuites
se produisaient, les banques obtiennent la liquidité de la Banque Centrale. La BC détermine la
liste des titres monétisables qu’elle peut acheter aux banques commerciales pour les refinancer
et leur procurer la monnaie centrale nécessaire qui leur manquent.

29
C'est la quantité de M centrale qui s'adapte à la quantité de M bancaire et non l'inverse. Le sens
de causalité est M scripturale- M centrale.
Ainsi, le diviseur de crédit mesure le besoin global en M centrale qui apparaît dans les comptes
des banques commerciales suite à l'octroi des crédits. La BC ne peut pas refuser d'accorder la
M centrale demandée au risque de causer de grandes difficultés aux banques. La BC joue le
rôle de prêteur en dernier ressort.
Le diviseur de crédit indique quelle quantité de MBC doivent se procurer les banques après
avoir créé un montant M de monnaie. L’ordre des phénomènes est alors inversé par rapport au
mécanisme du multiplicateur de crédit : le système bancaire accorde tout d’abord des crédits
pour un montant M et se procure seulement dans un second temps la monnaie banque centrale
nécessaire pour faire face à la demande de billets et à la constitution des réserves obligatoires,
monnaie dont le montant s’élève à :
𝑀𝐵𝐶 = (𝑟 + 𝑏 − 𝑟𝑏)𝑀 ou 𝑀𝐵𝐶 = 𝑀/𝛼
Ce mécanisme, appelé diviseur de crédit, peut se dérouler lorsque les banques peuvent
facilement obtenir la monnaie banque centrale en cédant des actifs mobilisables ou
éventuellement en puisant temporairement dans leurs réserves obligatoires.

Théorie du multiplicateur : Total de crédit = k Monnaie


Sens de causalité
Théorie du diviseur : Besoin en M centrale = Total de crédits/k
Sens de causalité

Remarque : Le changement de causalité a des conséquences fondamentales sur la politique


monétaire, ses instruments, ses objectifs. En réalité, si l'offre de monnaie est déterminée par les
besoins de l'activité économique, elle est alors endogène.

2.3. Les contreparties de la masse monétaire


Qu’elle émane de la Banque centrale ou des banques commerciales, toute création monétaire
se traduit par l’achat ou la naissance d’une créance. Celle-ci figure à l’actif de l’établissement
concerné, et constitue la contrepartie de la monnaie ainsi créée.
On distingue traditionnellement deux grandes catégories de contreparties de la masse
monétaire. La première regroupe les créances acquises sur des non-résidents, et porte le nom
de contrepartie « extérieure » (ou de créances nettes sur les non-résidents). On y trouve des

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crédits accordés à des ménages ou entreprises étrangères, des titres émis par des non-résidents
détenus par le système bancaire, ainsi que des avoirs liquides en devises détenus à l’étranger
par les banques commerciales ou la Banque centrale.
La deuxième catégorie de contreparties (en pratique, la plus importante) regroupe, pour sa part,
les créances sur les agents économiques résidents, et s’appelle le « crédit interne net ». Elle se
subdivise à son tour en deux sous-ensembles : les créances sur le Trésor et les créances nettes
sur l’économie. Les premières sont des titres publics détenus par le système bancaire, ainsi que
d’éventuels concours monétaires de la Banque centrale au Trésor. Les secondes correspondent
aux crédits accordés aux agents non financiers résidents, ainsi qu’aux titres émis par ces
derniers et détenus par le système bancaire.
La lecture du bilan de la Banque centrale permet d’identifier directement les contreparties de la
monnaie centrale. La tâche est plus malaisée lorsqu’on s’intéresse aux contreparties d’un
agrégat plus large et elle n’est entreprise en pratique que pour l’agrégat M3.
Les contreparties de M3 s’obtiennent en consolidant les bilans des agents créateurs de monnaie
que sont la Banque centrale, les banques commerciales et le Trésor. La consolidation fait
disparaître les avoirs liquides détenus par un agent financier auprès d’un autre agent financier
– qui ne sont pas comptabilisés dans M3. Ne subsistent, au passif consolidé, que les actifs
monétaires détenus par des agents non financiers, ainsi que les ressources stables des banques
et l’épargne contractuelle. Si on déduit de l’actif un montant équivalent à ces ressources non
monétaires, on met en regard l’agrégat M3 et ses contreparties.

Bilan consolidé du système bancaire

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- Le poste « créances nettes /extérieur » ou « or et devises » regroupe l’ensemble des réserves
de change nettes.

- Le poste refinancement inscrit la somme des concours que la BC a accordé aux banques de
second rang.

- Le poste « compte courant des banques » comprend les réserves des banques détenues
auprès de la BC.

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L'agrégation de l'ensemble des bilans des banques, de la BC et aussi du trésor permet
d'établir l'état consolidé des bilans qui permet de ressortir d'une part les composantes de la
MM et d'autre part les contreparties de la MM. Les contreparties de la MM sont des
opérations qui se trouvent à la source de la création de M c-à-d à la source de l'émission
monétaire.
En contrepartie de la MM, sont comptabilisés à l'actif du système monétaire des opérations de
« monétisation » qui sont à l'origine de la création de M.
La MM admet 3 contreparties c-à-d 3 catégories d'opérations susceptibles d'affecter son
montant.
- Contrepartie externe : Les créances nettes sur l'extérieur
- Contreparties internes :
 Les créances nettes sur l’Etat
 Les concours à l’économie
L’étude des contreparties de la masse monétaire leur évolution permet d’apprécier la place qui
revient à la monnaie dans le financement de l’économie.
2.3.1. Les créances nettes sur l'extérieur
Cette contrepartie est une contrepartie externe qui reflète l’influence des relations
internationales sur la masse monétaire interne.

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Les créances nettes sur l'extérieur qui s'établissent à partir de la différence entre les avoirs
extérieurs et les engagements extérieurs vis-à-vis du RDM de la BC et du système bancaire.
Ces créances nettes sur l’extérieur apparaissent comme source de création monétaire. Tout
achat de devises par la BC revient à une création de la M centrale c-à-d un accroissement
de la MM tandis que les ventes en devises présentent un effet restrictif entraînant la
contraction de la MM. Ainsi, tout excédent de la balance commerciale (X>M) entraîne une
expansion monétaire. De même, les mouvements de capitaux (ex : investissement direct
étranger) affectent la MM. La variation de la masse monétaire se traduit par une variation
de même montant des avoirs en Or et devises de la banque centrale.
2.3.2. Les créances nettes sur l'Etat
Cette contrepartie est d’origine interne.
Les créances nettes sur l'Etat sont constituées essentiellement par des créances détenues par
la BC, les banques commerciales et d’autres agents. Les crédits accordés au trésor
correspondent aux dépenses publiques qui n'ont pas pu être couverts par des ressources
propres à l'Etat. Ces créances dépendent du montant du déficit budgétaire.
Le trésor public suscite la création monétaire en cherchant à financer son déficit soit par des
crédits auprès des établissements bancaires soit par l'émission des titres publics
(essentiellement des bons de trésor) achetés par la Banque centrale.
2.3.3. Les concours à l'économie
Cette contrepartie est d’origine interne. Ce sont tous les crédits accordés par le système
monétaire à l'économie accordés par le système financier aux agents non financiers autres
que l’Etat puisque l'octroi de crédits aux agents économiques non financiers17 représente
une nouvelle de M dans le circuit économique. Ainsi, toute augmentation du crédit bancaire
entraîne l'expansion de la MM alors que toute mesure de nature à restreindre le crédit exerce
un effet restrictif sur la MM. Par ailleurs, la monétarisation des créances et l'acquisition des
titres par le système bancaire constitue une autre contrepartie de la MM.
Concours à l'économie = crédits à l'économie + portefeuilles-titres.
La notion des contreparties de la MM est particulièrement importante pour la politique
monétaire puisqu'elle indique la nature de la demande de monnaie dans une économie
donnée.

17L’endettement total (ET) : l’ensemble des financements des agents non financiers résidents
obtenus par voie d’endettement par les crédits et des titres négociables sur le marché monétaire, le
marché obligataire et le financement extérieur.

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