Cours Pharmacognosie 2021-1

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PHARMACOGNOSIE

Matières premières et substances naturelles à usage thérapeutique

Pharmacognosie 2021 0-163


MATIERES PREMIERES VEGETALES

I- LES SOURCES DE MATIERES PREMIERES VEGETALES

Les matières premières peuvent provenir de deux sources : la cueillette et la culture.

1/ Plantes de cueillette

La récolte de plantes de cueillette intéresse les plantes spontanées qui poussent naturellement).
La cueillette est encore valable quand les peuplements sont abondants ou lorsque la culture est
impossible (Ex : Gomme sterculia). Les avantages sont:
- Absence de charges d’entretien
- Plants résistants aux maladies
- Absences de contamination par les pesticides

Cette méthode d’approvisionnement est devenue rare et non efficace pour plusieurs raisons :
- dispersions géographiques
- qualité variable
- main d’œuvre abondante et déplacements
- contraignant
- dégradation de l’environnement

2/ La culture des plantes

C’est le mode d’approvisionnement privilégié de l’industrie. Ses avantages sont :


- matière première abondante homogène et de bonne qualité. Celle-ci peut être améliorée.
- Récolte aisée (mécanisation possible), main d’œuvre réduite traitement rapide des drogue
fragiles
- Falsification difficile à entreprendre.
Inconvénient : espèces fragiles vis à vis des maladies, culture délicate, soins coûteux.

II- CULTURE ET AMELIORATION DES PLANTES MEDICINALES

Elles requièrent des connaissances en agronomie

1/ La culture
Deux facteurs interviennent :
- Facteurs extrinsèques dus au climat et à la nature du sol (humidité, luminosité, altitude,
pH , porosité, éléments minéraux, humus).
- Facteurs intrinsèques ou endogènes intéressent le patrimoine génétique donc héréditaire
des plantes.

La multiplication des plantes s’opère par deux voies :


- La voie sexuée utilisant les graines.
- La voie végétative utilisant : éclats de souche, boutures, rejets.

2/ Amélioration des plantes

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L’amélioration visera avant tout à obtenir des individus plus riches en principes actifs. Autres
caractères non négligeables : résistance aux parasites et aux conditions climatiques défavorables.

a) Action sur les facteurs extrinsèques :


On cherchera à optimiser les conditions de cultures : engrais, fumures, écimage, lutte contre les
parasites.
b) Action sur les facteurs intrinsèques :
La sélection de bonnes graines ou de bonnes souches se fera de plusieurs manières.

➢ Sélection naturelle ou conservatrice


On choisit les individus les plus intéressants pour les critères retenus (races chimiques par ex.).
Cette sélection est :

- Massale : si on choisit plusieurs individus


- Individuelles : si on isole un seul individu et qu’on suit sa descendance.

➢ Sélection artificielle ou créatrice :


On modifie expérimentalement le patrimoine génétique de l’espèce considérée en provoquant des
mutations ou en créant des hybrides.

- Mutations : peuvent intéresser l’ensemble du génome (caryotype) ; c’est le cas de la


polyploïde obtenu avec les agents mitoclasiques (colchicine).
Ex : Datura et chrysanthème insecticide.
Les mutations géniques intéressent un gène particulier ou plusieurs et sont obtenues par les rayons X,
le Cobalt, les dérivés de l’ypérite, les ultra-violets.

- Hybridation : c’est le croisement de variétés ou de races d’une même espèce ou de deux


voisines. Les hybrides inter-spécifiques sont stériles et sont donc multipliés par voie
végétative, ce qui permet de conserver leurs caractères.

III- RECOLTE ET TRAITEMENT DU MATERIEL VEGETAL

1/ Période de la récolte
La composition chimique d’une drogue varie avec la cycle végétatif de la plante voire le moment de la
journée.
D’une manière générale les précautions suivantes sont prises :

✓ Les parties souterraines (racines, bulbes, rhizomes, tubercules) se déterrent en dehors de la


période de pleine végétation (hivernage).
✓ Les écorces sont recueillies au moment de la montée de la sève (Printemps) ou au début de la
période de repos (automne).
✓ Les tiges herbacées et les feuilles sont recueillies au début de la floraison. Chez certaines
espèces on tient compte de l’âge. Pour le Théier on récolte les jeunes feuilles plus riches en
caféine, alors que pour l’Eucalyptus ce sont plutôt les feuilles âgées.
✓ Les fleurs et sommités fleuries sont souvent récoltées peu avant leur complet épanouissement.
✓ Les graines sont récoltées bien mûres.

2/ Traitement en vue de la conservation de la drogue

Si la drogue n’est pas utilisée à l’état frais, elle doit être traitée en vue de sa conservation pour une
utilisation ultérieure.
En effet, une fois récoltée, la drogue subit des processus de dégradation dus à des agents internes
ou externes.

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Ces dégradations sont dues à la présence d’eau qu’il faudra éliminer autant que faire se peut de la
drogue. Les procédés sont les suivants :

La dessiccation
Il faudra ramener la teneur en eau jusqu’à l’ordre de 10% de la drogue sèche. En outre il est
nécessaire d’agir le plus vite possible aven d’empêcher la destruction des principes actifs par les
enzymes ou par les micro-organismes. L’élimination de l’eau ne doit pas altérer les principes
actifs. Selon la nature de la drogue à sécher, on peut utiliser différents procédés :

✓ Séchage à l’air libre : il se fera au soleil, si la drogue n’est pas fragile car les UV peuvent
provoquer des réactions photochimiques, ou mieux à l’ombre et sous abri (utilisation de
claies). Utilisation de tentes solaires.
✓ Séchage par air chaud : procédé rapide, conditions contrôlées. On a souvent recours à la
ventilation.
✓ La lyophilisation : peu pratiquée, coûteuse/
✓ La nébulisation ou atomisation (des solutions aqueuses)

La stabilisation
Elle a pour but de dénaturer de manière irréversible les enzymes du végétal. On utilise pour ce
faire la chaleur ou l’alcool avec les procédés suivants :

✓ Traitement à l’alcool bouillant (permet en même temps une extraction).


✓ Vapeurs d’alcool (Perrot-Gorris) se fait à l’autoclave.
✓ Vapeurs d’eau (Gorris-Arnould)
✓ Utilisation de la chaleur sèche, à l’étuve (= blanchiment).

3/ Présentation de la drogue végétale

La drogue est la forme sous laquelle la matière première est présentée pour être utilisée soit
directement ou à la préparation d’autres formulations médicamenteuses :
- En nature : telle quelle ou en poudre
- Extraits : teinture, extrait sec, extrait mou …

4/ Les Essais
On distingue deux types d’essais :
- Qualitatifs : identification de la drogue (de la plante), mise en évidence de certains
composés chimiques ayant en général une relation avec les propriétés physiologiques (ce
sont les principes actifs).

- Quantitatifs : dosage des principes actifs.

• 5 / Emplois
Nature: poudre
Préparation des tisanes
Extraction des principes actifs
Morphine (pavot)
Rutoside (sophora)
cineol (eucalyptus)
cocaine ( coca)

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PLANTES A HUILES ESSENTIELLES

Les plantes à huiles essentielles occupent une place non négligeable dans la phytothérapie
moderne. La thérapeutique qui les utilise exclusivement est appelée aromathérapie. Les secteurs qui
sont les plus grosses consommatrices d’huiles essentielles sont les industries alimentaires, la
parfumerie et la cosmétologie.
Les huiles essentielles ou essences sont des mélanges très complexes ; la nature des
composants est restée pendant longtemps mal définie, tout au plus on arrivait à déterminer le
composant majeur. Aujourd’hui, les moyens d’analyses très puissants ont permis d’établir que la
composition d’une huile essentielle est rarement simple, on y retrouve des centaines de constituants
(400 pour l’essence de rose).
La valeur commerciale d’une huile essentielle est largement tributaire de la nature et de sa
teneur en certains composants (menthol/menthone pour l’essence de menthe). Aujourd’hui on arrive à
reconstituer certaines essences de haute valeur commerciale à partir d’essence de moindre qualité.
Le marché mondial des huiles essentielles est estimé à 700 millions de dollars US ; la
production provient pour 1,4% des plantes sauvages et pour 34% des agrumes.

A) GENERALITES SUR LES HUILES ESSENTIELLES

1. DEFINITION
Malgré leurs différences de constitution, les huiles essentielles (HE) ont en commun un certain
nombre de propriétés physiques qui permettent de les définir :

- généralement liquides à la température ordinaire


- volatiles par opposition aux huiles fixes (= lipides), d’où leur odeur.
- entraînables à la vapeur d’eau
- peu soluble dans l’eau, lui communiquent cependant leur odeur
- solubles dans l’alcool à titre élevé (à la différence des huiles fixes), dans les huiles fixes et les

solvants organiques)

- très altérables : sensibles à l’oxydation entraînant une polymérisation en résines ;


cependant ne rancissent pas.
Mais étant donné leur utilisation massive en parfumerie et en alimentation et pour éviter
des fraudes, certains organismes de normalisation (AFNOR et ISO) ont donné une définition
restrictive des huiles essentielles:

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Les huiles essentielles sont des produits généralement odorants, obtenus soit par entraînement à la
vapeur d’eau de végétaux ou de parties de végétaux, soit par expression du péricarpe frais de certains
citrus. Cette définition exclue notamment les extraits organiques comme les concrètes et les absolus.

2. BIOGENESE DES HUILES ESSENTIELLES

Les composés constituant les HE sont de deux natures : les dérivés terpéniques et les dérivés
aromatiques.

a) Biogenèse des dérivés terpéniques

Les terpènes et les terpénoïdes sont considérés comme dérivés de l’isoprène,un hydrocarbure
en C5. Selon le nombre d’unités isopréniques mises en jeu, on distingue : les monoterpènes en C10,
les sesquiterpènes en C15, les diterpènes en C20, les triterpènes en C30, etc.. Les HE sont surtout
constituées de monoterpènes et sesquiterpènes.
La biogenèse des terpènes part de l’acétylcoenzyme A (ACE-CoA) pour aboutir à
l’isopentényl-pyrophosphate (IPP), en passant par l’acide mévalonique. L’IPP s’isomérise en
diméthylallylpyrophosphate (DMAPP) qui se combine à un IPP pour donner le premier monoterpène,
le géranylpyrophosphate (géraniol). La combinaison avec un autre IPP aboutit au pyrophosphate de
farnésyle (Farnésol), un sesquiterpène.
Les autres terpènes sont obtenus à partir de ce dernier composé (voir schéma).

b) Biogenèse des dérivés aromatiques

Les dérivés aromatiques qui nous intéressent sont surtout les dérivés de l’acide cinnamique.
Nous allons donc voir la biogenèse de l’acide cinnamique.
C’est un dérivé de l’acide shikimique obtenu à partir du phosphoénolpyruvate et du D-
érythrose-4-phosphate (voir schéma).

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HO HO

3 CH3CO SCoA
CO2H COSCoA CO2H CH2OH
3 S hydroxy-3méthyl Acide 3 R mévalonique
3 glutaryl CoA

CH2OPP
OPP OPP DMAPP
IPP DMAPP
OPP

Sesquiterpènes DMAPP
Monoterpènes

2 farnésyles DMAPP
Géranyl-géranyl PP
Farnesyl PP
Squalène

Triterpènes
cycliques
Diterpènes
Stéroïdes

BIOGENESE DES TERPENES ET TERPENOÏDES

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COOH
PHosphoenolpyruvate HO COOH
+
D-erythrose phosphate

O OH HO OH

HO HO
Acide 5 dehydro quinique Acide shikimique
CH2 CO COOH
COOH CH2 CO COOH
Acide
phénlpyruvique CH2 CO COOH

NH2 OH
Acide préphénique
CH2 CH COOH
HO
NH2

Phénylalanine CH2 CH COOH


COOH

COOH

HO
Acide cinnamique
Acide
p-coumarique

HO

FORMATION DU CYCLE AROMATIQUE (Voie de l'acide shikimique)

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3. COMPOSITION CHIMIQUE DES HUILES ESSENTIELLES

La composition des essences est très complexe ; néanmoins on peut classer leurs constituants
en deux groupes selon leur biogénétique (voir biogenèse).

a) Les terpènes

Selon le nombre d’unités isopréniques, les terpènes sont classés en monoterpènes (2 unités),
sesquiterpènes (3 unités), diterpènes (4 unités), triterpènes (6 unités).
En général les huiles essentielles renferment un mélange d’hydrocarbures et de composés
oxygénés dérivés de ces hydrocarbures. Dans certaines huiles essentielles les hydrocarbures
prédominent (Essence de térébenthine) ; dans d’autres, la majeure partie de l’essence est constituée de
composés oxygénés (Menthes) ; l’odeur et le goût dépendent principalement de ces composés
oxygénés.

b) Composés aromatiques
Les huiles essentielles renferment également des composés aromatiques qui sont
essentiellement des « phénylpropanoïdes », en l’occurrence les dérivés des acides cinnamique et p.
courmariques (voir biogenèse). On peut citer :

- acide et aldéhyde cinnamiques (cannelle)


- eugénol (girofle)
- anéthole (Badiane, Fenouil, Anis).

c) Autres constituants
On retrouve en faible proportion dans les HE : acides organiques de faible PM (acétique,
valérique, isovalérique), cétones de faible PM et coumarines volatiles (ex : bergaptène)

Remarque
En réalité la plupart des constituants des H.E. sont des terpènes. Seul un petit nombre d’H.E.
renferment en majorité des composés aromatiques (cannelle, giroflier).
Généralement un des constituants domine parmi une multitude d’autres composés (Ex : les
H.E. Badiane et d’Anis renferment 95% d'anéthol).

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OH

alpha Pinène ß Pinène Bornéol

Sabinène
CH2OH
O
O

Camphre

Thuyone Farnesol

OH OCH3
OH
OCH3

OH

CH2 CH CH2 CH CH CH3


Carvacrol Thymol Eugénol Anéthol

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OH

CH2OH CHO

Linalol Géraniol Citral

OH O

Limonène Menthol Menthone Carvone

O O
O

Pipériténone Menthofurane Pulegone

Pipéritone

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4. FACTEURS DE VARIABILITE DES HUILES ESSENTIELLES

4.1- Chimiotypes (races chimiques)


Les chimiotypes sont très fréquents chez les plantes à huiles essentielles. EX: Thymus vulgaris L. de
la mediterrannée, on compte plus de sept chimiotypes différents morphologiquement homogène et
caryologiquement stable thym à thymol, carvacol géraniol, linalol, terpinéol, thuyanol, myrcénol)
On a aussi des chimiotypes avec Basilic, niaouli, verveine etc.

4.2-Influence du cycle végétatif


Pour une espèce donnée, la proprtion des différents constituants d’une huile essentielle peut varier
tout au long du développement
Chez la menthe poivrée (Mentha piperita) la diminution de la taneur en menthone observée au cours
du cycle végétatif
Chez le fenouil, la teneur en anéthole double aucours de la maturation du fruit
Chez le coriandre, la teneur en linalol 50% plus élévé chez le fruit mûr que chez le fruit vert

4.3-Influence des facteurs extrinsèques


Il s’agit de l’incidence des facteurs de l’environnement et des pratiques culturales.
La température, l’humidité relative, la durée totale d’insolation et le régime des vents exercent une
influence directe ( structure de stockage superficielle);
Chez la menthe poivrée : les jours longs et les nuits tempérées conduisent à des rendements en HE
plus élevés et à une augmentation de la teneur en menthofuranne. A contrario, Les nuits froides
favorisent la formation de menthol.
Chez Lauris nobilis L., la teneur en huile essentielle des feuilles exposées au nord.
Les pratiques culturales sont également détaerminantes sur le rendement et la qualité du produit final.
L’apport d’engrais et l’influence des variations N, P, K ont été étudiés pour diverses espèces. L’
expérience montre qu’il n’a pas de règles générales applicables dans tous les cas. Un autre element
fondamental est le régime hydrique. Toute généralisation s’avère hasardeuse.
4.4-Influence du procéde d’obtention
La labilité des constituants des huiles essentielles explique que la composition du produit obtenu par
hydrodistillation soit, le plus souvent, différente de celle du mélange initialement présent dans les
organes sécréteurs du végétal. Au cours de l’hydrodistillation, l’eau, l’acidité et la température induire
l’hydrolyse des esters mais des réaragementss, des isomérisations des racémisations, des oxydations
etc.

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5. EXTRACTION DES HUILES ESSENTIELLES

Cette extraction conduit à quatre types de produits selon le procédé : huiles essentielles, concrètes,
résinoïdes et absolues.

a) Huiles essentielles

Deux procédés sont admis par ISO (International Standart Organisation) : l’entraînement à la
vapeur d’eau et l’expression à froid.

Entraînement à la vapeur d’eau


Le procédé utilise 3 variantes selon la texture et la fragilité de la matière première.

- entraînement à la vapeur proprement dit


La drogue est soumise directement à l’action d’un courant de vapeur sous pression provenant
d’un générateur distinct de l’enceinte qui renferme la drogue.

- Hydrodistillation : la drogue est immergée dans l'eau qui est chauffée à ébullition, dans un seul
réacteur
- Procédé mixte : la drogue est immergée dans l’eau, le tout est soumis à un courant de vapeur
produit par un générateur séparé. Cette méthode s’applique à des essences qui ne supportent pas
l’ébullition prolongée.
Dans tous les cas les vapeurs saturées en essences sont condensées et l’essence séparée par
décantation.

Expression des péricarpes frais d’agrumes


Les péricarpes sont scarifiés afin de libérer les essences des poches sécrétrices, ensuite on les
soumet à l’expression selon 3 variantes :
- les « peaux » sont râpées sous un courant d’eau ; l’essence est ensuite séparée par
centrifugation.
- les fruits entiers sont écrasés entre des cylindres métalliques ; après élimination des
déchets solides, les essences sont récupérées par centrifugation. Les déchets solides sont
soumis ensuite à l’entraînement à la vapeur d’eau.
- les fruits coupés en deux et débarrassés de leur jus, sont soumis à l’expression.

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b) Obtention des essences concrètes et des résinoïdes

Extraction par les solvants


L’extraction est précédée d’une division de la drogue : contusion d’organes frais, flétris ou
semi-desséchés, hachage, concassage…Les solvants les plus utilisés sont les hydrocarbures
aliphatiques (Pentane, hexane, éther de pétrole 64-70°C), les hydrocarbures aromatiques (benzène,
toluène) ; les hydrocarbures halogénés sont moins utilisés. L’usage des alcools ou des solvants
carboxylés conduit à des résinoïdes.

Extraction par gaz liquéfiés


On utilise le butane (6 bars) ou le propane (15 bars) à l’état liquide. L’évaporation du gaz se
produit par décompression. Cette méthode permet une grande sélectivité et une manipulation à basse
température (produits fragiles). Le dioxyde de carbone liquide ou super critique est également utilisé à
cette fin.

Extraction par les huiles et les graisses


Deux procédés :
- L’enfleurage : on dépose la drogue (des fleurs en général) sur des plaques de verre
enduites d’une couche mince de graisse. Périodiquement la drogue est renouvelée.

Une variante consiste à faire traverser la drogue par un courant d’air chaud qui est ensuite
dirigé à travers une dispersion de graisse fondue.
- La digestion : la drogue est immergée dans le corps gras fondu.
Dans les cas ci-dessus, l’essence est récupérée sous forme d'absolu par lavage des graisses à
l’alcool.

Nouveaux procédés de pré-traitement des matières premières


Ces dernières années se sont développées, au niveau des laboratoires des procédés permettant
d'améliorer les rendements d'extraction et que l’on s’efforce d’appliquer à l’échelle industrielle. Ces
procédés ont pour effet de désorganiser les cellules et notamment les poches à essences. En voici
quelque uns :

- L’extraction assistée par micro-ondes (Microwave Assisted Process MAP).


- La sonification : application d’ultra-sons en production d’HE à deux niveaux : en pré-
traitement pour améliorer la productivité en HE, ou en post-traitement pour récupérer le maximum de
composés volatils dans les résidus d’hydrodistillation. La sonification peut s’appliquer à l’extraction
d’autres composés végétaux.

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- L’extraction par cônes rotatifs a été développée récemment

c) Traitements ultérieurs des essences

Il est parfois nécessaire de décolorer, neutraliser ou rectifier les huiles essentielles. La


rectification (à sec ou par jet de vapeur d’eau) permet d’éliminer des produits malodorants ou
irritants ; la déterpènation en est un aspect et aboutit à l'enrichissement des essences en composés
oxygénés.

6. ESSAIS

a) Dosage : l'évaluation de la teneur en essence d'une drogue se fait par la mesure de


la quantité de d'huiles essentielles recueillie après hydrodistillation. A cet effet, on utilise un appareil
normalisé et on opère dans des conditions bien définies. La méthode varie légèrement selon que
l’essence est moins dense ou de densité égale ou supérieure à celle de l’eau.

b) Identification des constituants

Pour chaque huile essentielle, l’identification des principaux constituants est nécessaire.
Cette identification se fait par CCM de silice et surtout par chromatographie en phase gazeuse
(un dosage des constituants est possible avec cette méthode).

Analyse grossière

- la CCM permet de repérer les principaux constituants, à l’aide de témoins. La


révélation des plaques par le réactif à la vanilline-acide sulfurique permet d’avoir des taches de
couleur très variées (Ex : le menthol apparaît en bleu…).

- L’olfactométrie (ou « sniffing ») ; c’est plutôt une méthode de détection ; en effet


certains individus sont capables de déceler des composés présents à l’état de traces, par leur odeur. Il
existe des chromatographies en phase gazeuse qui utilisent le sniffing comme moyen de détection
(surtout employé en parfumerie).

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Analyse fine
Elle se fait par chromatographie en phase gazeuse utilisant des colonnes capillaires (25 m à
50m de long). Les phases stationnaires utilisées sont surtout polaires (carbowax). On sépare ainsi des
dizaines de composés (détectés même à l’état de traces) dont les teneurs peuvent être obtenues grâce à
un enregistreur-intégrateur.
La CPG peut être couplée à un moyen de détermination de structure, notamment un
spectromètre de masse ; la CPG/masse couplée à une banque de spectres informatisée est un puissant
moyen d’investigation.

c) Détection des contrefaçons et adultérations

Les fraudes sur les HE ne sont pas rares de nos jours, à cause du coût très élevé d’un certain
nombre d’entre elles. Ainsi récemment se sont développés des moyens de contrôle de plus en plus
élaborés ; le souci majeur étant l’authentification de l’origine naturelle ou industrielle (noms de
marques déposées) des produits. Plusieurs moyens sont proposés :

- Le couplage CPG/Masse isotopique : détermination des teneurs en isotopes 13C et 2H.


- Le système SNIF-NMR propose de mesurer les rapports isotopiques spécifiques
2
H/1H et 13C/12C sur plusieurs sites d’une même molécule composantes d'une essence.
- Marquage avec des isotopes non radioactifs de certains produits alimentaires dont les
arômes, dans le seul but d’en certifier l’origine commerciale.

7. ACTION PHYSIOLOGIQUE ET EMPLOIS

Les activités physiologiques des huiles essentielles sont très variées eu égard à la diversité des
composants ; néanmoins on peut cerner les actions suivantes :

Action sur le tube digestif


Pour certaines H.E. on relève une activité stomachique, eupeptique, carminative (cas des
essences de Menthe, Badiane, et Verveine) ; d’autres sont cholérétiques ou cholagogues (Sauge),
vermifuges (chénopode).

Propriétés antiseptiques
Certaines H.E. sont antiseptiques, cette activité est parfois élective :

- au niveau de l’appareil respiratoire : Pin, Eucalyptus, Niaouli.


- au niveau des voies urinaires : Buchu.

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Action stimulante sur le SNC
Les plantes à anéthole, particulièrement, ont une activité stimulante sur le SNC : Badiane,
Fenouil, Anis.

Action antiinflammatoire et cicatrisante


Elle est notée pour certaines huiles essentielles : Lavande, Romarin, Sauge…

Toxicité
Les huiles essentielles (H.E.) ne sont pas dénuées de toxicité. En particulier les H.E. à anéthole
ont une action convulsivante à forte dose (d’où vente réglementée) ; il en est de même des H.E. à
Thuyone (Thuya, Absinthe). On a relevé une intoxication chez un enfant avec une menthe à carvone
(convulsions).

B) MONOGRAPHIES

Il existe plusieurs façons d’aborder ces monographies : classification selon les propriétés
thérapeutiques ou alors selon la famille botanique, c’est cette dernière que nous allons adopter. Dans
toutes les familles on trouve des huiles essentielles ; nous ne citerons cependant que celles qui sont
plus couramment utilisées en thérapeutique ou dans l’industrie.

1. LES LABIAE (LAMIACEAE)

Cette famille renferme de très nombreuses espèces à essences.

a) Les lavandes
On distingue : la Lavande vraie, la Lavande aspic et les Lavandins.

La Lavande vraie ou Lavandula vera


Sommités fleuries (Pharm. afric. 1985)

Botanique

Sous-arbrisseau vivace cultivé au Sud-Est de la France, la lavande possède une racine


Pivotante d’où partent des rameaux simples, dressés en touffes. Les fleurs sont terminales et disposées
en long épis. La corolle est d’un bleu caractéristique (bleu lavande) ; l’odeur est fine, pénétrante.

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Chimie
La drogue renferme 0,5 à 0,8% d’essence à odeur agréable non camphrée (contrairement à la
lavande aspic) cette essence est composée par :

- des alcools terpéniques : linalol surtout (30 à 40%)


- des esters : acétate de linalyle (35-55%)
- carbures terpéniques en petite quantité et des traces de cinéol et de camphre.

Action physiologique et emplois


La lavande officinale a des propriétés antiseptique, cicatrisantes et cholérétiques. L’essence de
lavande est officinale (Ph. Fse VIIIè Ed.) ; elle est surtout utilisée en parfumerie.

Lavande aspic ou Lavandula latifolia ou Lavandula aspica


Sommités fleuries (Ph. Fse IXè éd.)

C’est un sous-arbrisseau spontané dans le Sud-Est de la France ; pousse à une altitude


inférieure à 500m, se distingue de la lavande vraie par le port et par la taille des feuilles, mais surtout
par l’odeur qui est ici moins fine et nettement camphrée.
Les sommités fleuries renferment 0,5% à 0,6% d’huiles essentielles se distinguant de celle de
la lavande vraie par la présence de linalol et de ses esters en plus faible quantité, de bornéol et
camphre (30-40%), de cinéol en teneur assez élevée.
Les emplois de la lavande aspic sont réservés à la parfumerie, la cosmétologie et la savonnerie.

Les lavandins : Ce sont des hybrides de L. angustifolia et L. latifolia.


La drogue est constituée par les sommités fleuries. Les lavandins sont cultivés dans le Sud-Est
de la France, la reproduction se faisant par boutures. Ils renferment 1-2% d’essences constituées par :
alcools libres (linalol, géraniol) 45%, esters (acétate de linalyle) 25%, camphre et cinéole.
Les lavandins sont des succédanés de la Lavande officinale.

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b) Les Menthes

La Menthe poivrée : Mentha piperata L.


(Hybride de M. aquatica et M. viridis) - Feuilles (Ph. Afric. 1985.)

Botanique
C’est une plante herbacée vivace, à tige quadrangulaire souvent violacée. Les feuilles sont
opposées, entières, dentées, pétiolées. Les fleurs, pourpres ou blanches, sont groupées en épis courts et
serrés.
La plante a une odeur caractéristique, une saveur aromatique et chaude, qui laisse l’impression
de fraîcheur.
La culture de la menthe poivrée est très importante en France, Allemagne, Italie, USA.
La plante n’est pas exigeante, mais fragile vis à vis des parasites comme la rouille.
Elle est cueillie en début de floraison.
Les variétés renommées sont : Mitcham (Grande Bretagne : Grasse et Alberta) – Milly, Maine-
et-Loire (France).
Récemment on a proposé comme succédané de la menthe officinale la menthe " Auvergnat
tradition", cultivée en Auvergne, notamment à SAYAT près de Volvic en France (Plantes med.
phytother., 1987, 21(3), 242-251)

Chimie
A côté des flavonoïdes présents dans les feuilles, on trouve 1-3% d’huiles essentielles dans la
drogue séchée. L’huile essentielle a une odeur mentholée caractéristique, renferme 40-60% de menthol
libre et estérifié (acétate et valérianate de menthyle), 8-10% de menthone, de petites quantités de
menthofurane et des carbures terpéniques.

Action physiologique
La menthe poivrée est stomachique et antispasmodique, l’action étant due à l’essence. Les
flavonoïdes sont responsables de l’action cholérétique.

Emplois
- Infusé à 5% comme carminatif, stomachique et antispasmodique. La tisane est en
vente libre.
- Eau distillée de Menthe (obtenue à partir des sommités fraîches).
- Essence de menthe poivrée (Ph. Fse VIIIè Ed.) employée telle quelle en pharmacie, confiserie,
liquoristerie et pour la préparation de formes galéniques.

Pharmacognosie 2021 18-163


La Menthe verte ou M. spicata

La Menthe verte ou Menthe douce ou menthe crépue (Spearmint aux USA) est une plante
herbacée à feuilles couleur vert-clair, sessiles, lancéolées et dentées. Les fleurs sont blanches ou
pourpres, disposées en épis ou allongées.
Elle est très cultivée en France et aux USA, renferme 1 à 2,5% d’essence riche en carvone (50-
70%).
La menthe verte est employée en infusion et surtout pour l’extraction de l’essence qui sert à
aromatiser chewing-gum, dentifrices, etc..

Autres menthes

- Mentha arvensis ou Menthe des champs Ph. Fse Ixè Ed.


C’est la menthe la plus cultivée dans le monde, car elle sert à obtenir le menthol naturel à
partir de son huile essentielle qui en renferme 75% .
- Mentha viridis L. (Phar. Afric. 1985) : l’essence renferme 45 à 60% de 1-carvone.
- Mentha pulegium ou Menthe Pouliot : de son essence on extrait la pulégone qui sert à
l’hémisynthèse du menthol.

c) Les Thyms
Thym commun : Thymus vulgaris
Le thym est un sous-arbrisseau typiquement méditerranéen. La tige est dressée et ligneuse ; les
feuilles, petites, sont enroulées sur leurs bords, les fleurs sont roses ou blanches et groupées en épis.
L’odeur est caractéristique (thymol).
On trouve la plante en France surtout dans la région de Montpellier.
La drogue séchée renferme 0,5 à 2% d’essence dont la composition varie selon la localisation
géographique ; il existe des thyms à phénols, à linalols, à thuyanol, etc.. qui constituent de véritables
chimiotypes.
L’essence de thym à phénols qui est l’officinale, renferme 50-60% de thymol ou de carvacrol
(son isomère de position en 2).
En usage interne le thym est antiseptique et anthelmintique, cholérétique et diurétique ; c’est
aussi un cicatrisant externe. Le thym vulgaire est aussi une épice très utilisée en alimentation.

Le Serpolet = Thymus serpyllum

Pharmacognosie 2021 19-163


Le serpolet renferme 0,15-0,50% d’essence à thymol et carvacrol.
Il est utilisé en infusé à 10% comme antiseptique pulmonaire, antispasmodique et
cholérétique. C’est aussi une épice.
Il existe d’autres thyms notamment Thymus zygis (Thym d’Espagne) qui est une source
industrielle de thymol.

d) Le romarin : Rosmarinus officinalis

C’est un arbrisseau toujours vert, poussant sur les terrains calcaires des régions
méditerranéennes. Son nom vient de « Rose marine » car le romarin pousse près du littoral.
Les sommités fleuries sèches renferment des composés polyphénoliques (acide rosmarinique
ou tanin des Labiées) : ester de l’acide caféique). Des flavonoïdes sont également présents, mais on
trouve surtout une essence (1 à 2%) constituée de carbures terpéniques, de cinéole et bornéol libres ou
estérifiés, du camphre).
Le romarin a des propriétés cholagogue et cholérétique dues à l’acide rosmarinique. C’est
également un stimulant grâce à son essence qui est officinale (Ph. Fse VIIIè Ed.).

e) Autres Labiées

- La Mélisse : Mélissa officinalis très utilisée en herboristerie et liquoristerie


- L’Hysope : Hyssopus officinalis
En médecine populaire c’est un stimulant, antitussif et expectorant.
- Patchouly : Pogostemon cablin et P. patchouli
Il est employé en parfumerie.

2. RUTACEES

a) Bigaradier ou oranger amer : Citrus aurantium L. (C. vulgaris Risso)


Parties externes du péricarpe frais ou séché (Phar. Afric. 1985).

Botanique
Le bigaradier est un petit arbre originaire d’Asie et acclimaté dans les zones méditerranéennes.
Les feuilles sont ovales, lancéolées, à pétiole ailé. Les poches à essence y sont visibles par
transparence. Les fleurs sont blanches et d'odeur agréable. Le fruit est une drupe recouverte d’un
péricarpe appelé zeste ou écorce de curaçao.

Pharmacognosie 2021 20-163


La drogue

On utilise plusieurs parties.


- Les feuilles : séchées, elles sont coriaces, cassantes, de couleur vert-pâle. L’odeur est
aromatique et la saveur amère.
- les feuilles fraîches donnent "l'essence de petit grain Bigarade".
- Les fleurs à l’état frais donnent l’essence de "Néroli Bigarade".
- Les zestes sont récoltés sur les fruits avant leur complète maturité.

Chimie

Dans les feuilles, on trouve un principe amer de nature terpénique (la limonine), des
flavonoïdes et une huile essentielle (0,2 à 0,4%) obtenue par entraînement à la vapeur d’eau
des feuilles fraîches. Elle est composée de carbures terpéniques (limonène), d’alcools (linalol)
et leurs esters.

Les fleurs :renferment 0,05-0,1% d'essence. L’essence de Néroli Bigarade contient


principalement du limonène, du linalol, du nérol et leurs esters. On retrouve une petite quantité
d’anthranilate de menthyle responsable de l’odeur.de l'essence d fleur d'oranger.
Les zestes renferment pectines, limonine, flavonosides, une essence de curaçao (1-2%) avec
90% de limonène.

Action physiologique et emploi

Les feuilles : sont utilisées en nature pour préparer des tisanes antispasmodique légers
(vente libre). L’huile de feuille est un succédané de l’essence des fleurs en parfumerie.

Les Fleurs : donnent l’essence de Néroli Bigarade très recherchée en parfumerie. Les
fleurs servent surtout à la préparation de l’eau distillée de fleurs d’oranger préparée à partir des
fleurs fraîches. Cette eau est utilisée comme sédatif léger et aromatisant.

b) L’oranger doux : Citrus aurantium var. dulcis

Les zestes donnent 0,5% d’huile essentielle appelée essence d’orange douce officinale

Pharmacognosie 2021 21-163


(Ph. Fse VIIIè Ed.) ou encore appelée essence de Portugal.
Cette essence renferme principalement du limonène (90-95%). Le jus de l’oranger est très
consommée en alimentation et en diététique.
Des citroflavonoïdes sont extraits du péricarpe. Les zestes donnent l’alcoolature d’orange.
Enfin, l’essence est souvent déterpénée pour la préparation du limonène ; elle est un très bon
aromatisant.

c) Le citronnier : Citrus limonum Risso ou C. medica var. acida brandis

Les zestes du fruit frais ou séché (Ph. Afric. 1985.) renferment 0,5% d’essence riche en
limonène (90%), accompagné d’un peu de citral et de citronnellal.
L’essence de citron officinale (Ph. Fse VIIIè Ed.) est un aromatisant et entre dans la
composition de la teinture de citron composée (eau de Cologne).
La pulpe est une source de citroflavonoïdes. Sa principale utilisation est la fabrication de jus
de fruits; en diététique , le jus de citron est utilisé comme tonique et antiscorbutique (vit. C)

d) Le bergamotier : Citrus limetta var. bergamia


La drogue est constituée par le fruit appelé bergamote. L’essence de bergamote est officinale
(Ph. Fse IXè Ed.) ; elle renferme des carbures terpéniques, de l’acétate de linalyle et une petite
quantité de bergaptène (furo-coumarine).

3. LES MYRTACEAE

Trois plantes nous intéressent : l’eucalyptus, le niaouli, et le giroflier.

a) Eucalyptus globulus Labill.

La feuille Phar. Afric. 1985.

Botanique
Grand arbre originaire d’Australie, acclimaté dans les régions méditerranéennes et dans de
nombreuses régions tropicales, l’Eucalyptus possède des feuilles de deux types :
- celles portées par les rameaux jeunes, sont opposées et sessiles, leur limbe est ovale,
mince et de couleur vert bleuté ; elles sont disposées horizontalement.

Pharmacognosie 2021 22-163


- celles portées par les rameaux âgés sont alternes, pétiolées, leur limbe est falciforme,
épais, coriace et de couleur gris-verdâtre ; elles sont pendantes. Seules, ces dernières sont inscrites à la
pharmacopée française.

Caractères de la drogue
Les feuilles âgées ont une odeur forte, balsamique, exaltée par le froissement. La saveur est
chaude et aromatique.

Chimie: la drogue renferme 1-3% d’essence riche en cinéole 1,8 (ou eucalyptol).

Action physiologique : l’activité est due à l’eucalyptol, un stimulant respiratoire et


antiseptique pulmonaire.

Emplois
- en nature : décoction, inhalation, fumigation.
- teintures, sirops.
- extraction de l’essence officinale et de l’eucalyptol.

Il existe d’autres eucalyptus utilisés pour l’extraction d’huiles essentielles : E. australiana


et Eucalyptus divers riches en eucalyptol, E. citriodora à citronnelal, E. piperata à pipéritone.

b) Le Niaouli : Melaleuca viridiflora

C’est un arbre à tronc blanc, à feuilles persistantes. Il est très répandu en Nouvelle-Calédonie.
Les feuilles renferment 1 à 2% d’essence riche en eucalyptol. L’huile essentielle renferme
également des carbures terpéniques et des aldéhydes responsables de l’action irritante de l’essence de
Niaouli officinale (Ph. fse VIIIè Ed.). L’essence rectifiée (par élimination des produits irritants) donne
l’essence de niaouli purifiée (Ph. fse VIIIè Ed.), employée comme antiseptique respiratoire sous forme
de gouttes nasales et préparations pour aérosol.

c) Le Giroflier : Eugenia caryophyllata

Botanique
Petit arbre des îles de l’Océan Indien, à feuilles persistantes et coriaces. Les fleurs sont
disposées en petites cimes. Le fruit est une baie appelée « anthofle ».
L’arbre est cultivé en Indonésie, en Tanzanie et Madagascar (chaleur et humidité). La récolte
des boutons floraux est manuelle, ceux-ci sont le plus souvent séchés au soleil. On obtient le « clou de

Pharmacognosie 2021 23-163


girofle » qui mesure 10-12 mm de long sur 2-3 mm, son odeur est caractéristique, sa saveur chaude et
brûlante.

Chimie
Le clou de girofle est très riche en huile essentielle (12 à 15%), plus dense que l’eau,
constituée surtout d’eugénol et de ses dérivés (acétyl-eugénol) ; on y retrouve d’autres constituants tels
que terpènes et alcools.

Action physiologique et emplois


Le clou de girofle est un stimulant aromatique. L’essence est bactéricide et analgésique.
Le clou de girofle entre dans la préparation d’alcoolat (de Mélisse et de Fioravanti). L’essence
est utilisée en art dentaire comme antiseptique caustique et analgésique léger.
Dans l’industrie, l’eugénol est extrait de l’essence de fruit et de feuilles et sert à
l’hémisynthèse de la vanilline. Dans l’alimentation, le clou de girofle est une épice très utilisée.
Les pays producteurs sont : Madagascar, Indonésie, Inde.

4. LES OMBELLIFERES

a) Anis vert : Pimpinella anisum L. (fruit : Pharm. Afric. 1985).

Botanique
Plante herbacée, annuelle, originaire d’Egypte et du Moyen-Orient, l’anis est cultivé dans les
régions méditerranéennes et d’Europe méridionale. Le fruit, de couleur vert-grisâtre, est petit, ovoïde,
piriforme, strié et toujours muni de son pédoncule ; il a une odeur anisée, aromatique et agréable, une
saveur chaude et sucrée.

Chimie
Le fruit renferme 2 à 3% d’essence constituée surtout de trans-anéthole accompagné de son
isomère allylique, l’estragol.

Emplois
La drogue est employée en nature sous forme d’infusion comme stomachique, carminatif,
antispasmodique et aromatisant.
L’huile essentielle sert à préparer le soluté alcoolique d’essence d’Anis (Ph. fse VIIIè Ed.), un
aromatisant. Elle entre également dans la composition de la teinture d’opium benzoïque (ou élixir
parégorique) et sert comme source d’anéthole qui est surtout utilisé en liquoristerie.

Pharmacognosie 2021 24-163


La vente de l’essence d’anis et de l’anéthole est réglementée car, à forte dose, l’anéthole est un
toxique du SNC.

b) Le Fenouil : Foeniculum vulgare Mill (fruit : Phar. Afric. 1985)

Botanique
Le fenouil est une grande herbe vivace : les fleurs sont jaunes, les feuilles découpées en
lanières filiformes. La variété douce n’existe pas à l’état sauvage ; elle est cultivée notamment en
Italie, en Allemagne et dans le sud de la France.
Le fruit est de coloration vert-jaune à maturité ; il a une odeur douce et suave et une saveur
pénétrante et sucrée.

Chimie
Le fruit renferme 2 à 6% d’essence composée de 50 à 75% de trans-anéthole accompagné
d’oestragol et de carbure terpéniques. La Pharmacopée française exige une teneur d'au moins 2%
d’essence. Le fenouil a les mêmes emplois que l’anis vert.

c) Autres Ombellifères à essence

Angélique : Archangelica officinalis : Feuille, fruit, souche radicane.


La souche renferme une essence à phéllandrène ; le fruit une essence à furocoumarines.
Persil : Petroselinum sativum ou Carum petroselinum : c’est une plante emménogogue renfermant une
essence à apiol (dans le persil allemand), une essence à myristicine (persil français.
Ajowan : Carum capticum : le Fruit renferme une essence à thymol
Carvi : Carum carvi (Fruit) : essence à carvone
Cumin : Cuminum cymirum : (Fruit) : essence à aldéhyde cuminique
Coriandre : Coriandrum sativum (Fruit) : essence à linalol
.

5. Le Badianier de Chine : Illicium verum (Magnoliaceae)

Botanique
Petit arbre de 5 m de haut, originaire du sud de la Chine et du Nord Vietnam. Le fruit est
composé de 8 à 12 follicules ligneux disposés en étoile autour du réceptacle floral. Chaque follicule
renferme une graine brune et brillante.

Pharmacognosie 2021 25-163


Chimie
Le fruit du Badianier, appelé anis étoilé ou encore badiane, renferme 5% d’huile essentielle
contenant 80 à 90% d’anéthole trans, accompagné d’oestragol ou méthyl-chavicol et des produits
d’oxydation de l’anéthole : anisaldéhyde, acide anisique et l’anis-cétone. L’essence est plus dense que
l’eau.
Action physiologique
Elle est due surtout au trans-anéthole. A faible dose, c’est un stimulant de la digestion, un
dépresseur du tonus et du péristaltisme intestinal ; à forte dose, c’est un excitant du SNC et un
stupéfiant. L’isomère cis est beaucoup plus toxique et serait un convulsivant.

C’est pour cette raison que la fabrication et la vente des essences à anéthole et des boissons
alcoolisées en renfermant sont réglementées en France.

Essais
- Botanique : écarter le badianier du Japon ou Shikimi (Illicium religiosum) qui est toxique
(forme du fruit, odeur camphrée).
- Physico-chimique
Un extrait alcoolique donne par addition d’eau une opalescence nette due à l’anéthole.
Dosage de l’essence, dosage de l’anéthol par la détermination du point de congélation.

Emplois
- en nature sous forme de tisane comme stomachique, eupeptique et carminatif.
- préparation de teinture, aromatisant.
- extraction de l’essence et de l’anéthole.

6. LAURACEAE

Le Camphrier du Japon Cinnamomum camphora (Lauraceae)

C’est un grand arbre à feuilles persistantes, originaire d’Extrême-Orient et cultivé à Formose,


au Japon et en Chine.
Le bois des arbres âgés de 25 à 40 ans renferme 2 à 3% d’essence riche en camphre et en
safrol. Le camphre naturel, obtenu après entraînement à la vapeur et refroidissement, est dextrogyre.

Action physiologique

Pharmacognosie 2021 26-163


Le camphre est un excitant du SNC, il agit surtout au niveau de bulbe, sur les centres
cardiaques et respiratoires. C’est aussi un antiseptique pulmonaire et un rubéfiant en usage externe
(alcool camphré).

Emploi
- extraction du camphre utilisé comme révulsif sous forme d’alcool camphré ; analeptique
cardiorespiratoire (sous forme de camphre soluble).
- extraction du safrol utilisé en parfumerie et pour l’hémisynthèse de la vanilline.

Le Cannelier de Ceylan : Cinnamomum zeylanicum

Botanique
Petit arbre originaire de l’Océan Indien et cultivé dans divers pays tropicaux.
A la récolte, les écorces sont grattées, ainsi elles sont privées du suber, du phelloderme et
d’une

partie du parenchyme cortical. Séchées, ces écorces s’enroulent en tuyau et prennent une coloration
jaune.

Chimie
Les écorces de cannelier renferment 1 à 2% d’essence de densité supérieure à celle de l’eau.
Cette huile essentielle renferme 70% d’aldéhyde cinnamique accompagné d’eugénol et de divers
carbures terpéniques.
Les feuilles renferment une huile essentielle riche en eugénol.

Remarque : On utilise comme succédané de la cannelle de Ceylan, la cannelle de Chine


(Cinnamomum cassia). Les écorces renferment une essence plus riche en aldéhyde
cinnamique mais dépourvue d’eugénol.

7. AUTRES PLANTES A HUILES ESSENTIELLES

Ylang-Ylang : Cananga odorata (Annonaceae) : fleurs avec 1à 2% d'essence à linalol et


géraniol. Plante très utilisée en parfumerie

Pharmacognosie 2021 27-163


Graminées à huiles essentielles

- Lemon-grass (Cymbopogon citratus) : les feuilles contiennent 1-2% d’essence composée de


90% de citral et utilisée en parfumerie. Les feuilles sont également souce de citral qui sert à
l’hémisynthèse de la vitamine A et des ionones utilisés en parfumerie.

- Citronnelle (Cymbopogon nardus) : les feuilles renferment 1% d’essence à géraniol et


citronellal.
- Vétiver (Vetiveria zizanoïdes) : les racines renferment 2 à 3% d’essences riches en alcools et
cétones sesquiterpéniques. le vétiver très utilisé en parfumerie.

Pharmacognosie 2021 28-163


PLANTES A SAPONOSIDES

Les saponosides sont des substances qui appartiennent à la classe chimique des hétérosides.
C’est-à-dire des substances qui donnent par hydrolyse une partie glucidique et une autre non
glucidique appelée génine ou encore aglycone.
Ce sont des substances très répandues dans le règne végétal. Les plantes qui les renferment
sont employées sous forme d’extraits bruts ou pour l’extraction et la purification des saponosides.
Leur importance se situe à deux niveaux :

- l’activité vitaminique P (protecteurs veineux)


- l'utilisation comme matières premières pour l’hémisynthèse des hormones stéroïdes.
Cette possibilité a permis de réduire considérablement le prix des pilules contraceptives qui occupent
une place importance dans l’espacement des naissances.

Nous allons tout d’abord voir un certain nombre de généralités sur les saponosides, ensuite les
monographies des principales plantes utilisées suivront.

A – GENERALITES SUR LES SAPONINES

1. DEFINITION

Les saponosides ou saponines sont des hétérosides très répandus dans le règne végétal. Ils ont
en commun leur structure et surtout un ensemble de propriétés physico-chimiques et physiologiques :
- abaissent la tension superficielle des solutions, d’où leur pouvoir aphrogène dans
l’eau.
- saveur âcre
- pouvoir sternutatoire
- pouvoir hémolytique et toxicité sur les animaux à sang froid.

2. STRUCTURES DES SAPONOSIDES

Ce sont des hétérosides terpénoïdes qui, par hydrolyse acide ou enzymatique, donnent une
génine tétra ou pentacyclique et un sucre souvent accompagnés d’un acide uronique.
Les sucres rencontrés sont très variés : D-glucose (Dioscorea), D-xylose, D-galactose, L-
arabinose, L-fucose etc…

Pharmacognosie 2021 29-163


La génine : on distingue les hétérosides à génines stéroïdiques et ceux à génines triterpniques.

Génines stéroïdiques : Il n’y a pas de différences fondamentales entre les stéroïdes et


les triperpènes ; les stéroïdes sont des triterpènes ayant perdu 3 méthyles au moins.
La génine stéroïdique comporte un squelette héxacyclique dérivé du spirostane (proche du
noyau cholane des cardiotoniques), comportant deux cycles lactoniques spiro ; c’est le cas des
saponosides des Dioscorea (diosgénine), Agava (hécogénine) et Ruscus (rucogénine).

Les génines triterpèniques


Leur noyau, avec 30 atomes de carbone, sont penta ou hexacycliques. On rencontre surtout 3
squelettes :
Oléanane : hederacoside (Lière), sénégénine (Polygala), escine (marron d’Inde),
glycyrrhizine (réglisse),  amyrine ;
Ursane : asiaticoside ;
Dammarane : protopanaxatriol du ginseng

3. BIOGENESE DES SAPONINES

Les génines ont la même biogenèse, qu’elles soient stéroïdiques ou triterpniques : elles
dérivent de la cyclisation du squalène (voir huiles essentielles).

4. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES ET CARACTERISATION

Les saponines sont des poudres amorphes, solubles dans l’eau et l’alcool dilué, insoluble dans
l’éther, l’acétone et le chloroforme.
Les solutions aqueuses, agitées, donnent une mousse (pouvoir aphrogène). Cette propriété est
utilisée systématiquement pour la mise en évidence des saponosides (notamment lors de la recherche
de matière première pour l’hémisynthèse des stéroïdes). La caractérisation des saponines fait intervenir
les test suivants :

- Réactions colorées
* CARR et PRICE : SbCl3 dans CHCl3.
Pulvériser sur la plaque une solution saturée de SbCl3 dans du chloroforme; aprés chauffage à
110°C, on obtient des taches de couleur rose.
* Action de l’acide phosphotungstique (coloration bleue).

Pharmacognosie 2021 30-163


* Réaction de Liebermann : solution chloroformique + anhydride acétique + H2SO4
donne colorations variées.

- Chromatographie CCM : les révélateurs peuvent être SbCl3/CHCl3, l'acide


phosphotungstique ou une solution d’hématies de bœuf.

5. EXTRACTION ET PURIFICATION

Les saponosides sont extraits à l’eau ou à l’alcool à 95°. Le schéma suivant peut être proposé pour
la purification.

Pharmacognosie 2021 31-163


O
O O

O
O

HO
HO
Diosgénine H
Hécogénine
O
HO
O
H2C
COOH

HO O
Ruscogénine

HO

Acide glycyrrhétique
COOH
HO

C H2O H
HO
COOH
Sénégenine OH

OH
C H2O H

OH
HO
C H2O H

Escigénine

Pharmacognosie 2021 32-163


Schéma d’extraction des saponines

Poudre
1 benzène ou Hexane (dégraissage)
2 Ethanol (extraction)
Extrait alcool
1 Evaporation
2 Eau

Extrait aqueux

Butanol (Extraction)

Extrait BuOH
1 Evaporation
2 Méthanol

Extrait MeOH
1 Charbon (dépigmentation)
2 Concentration

Solution MeOH

Ether froid (0°C)

Précipité des saponines

Le précipité de saponines peut être purifié davantage en faisant une filtration sur gel de
Sephadex LH20 (séparation d’avec les flavonoïdes) ou une filtration sur silice désactivée.

6. PROPRIETES PHYSIOLOGIQUES

En abaissant la tension superficielle des liquides, les saponosides sont des irritants
cellulaires. Cette action irritante se traduit par une action dépurative qui se manifeste différemment
selon la cellule en cause: cellule bronchique (action sternutatoire), hématie (hémolyse), cellule rénale
(diurèse), cellule pulmonaire (expectorante).
Les propriétés les plus en vue des saponines sont l'action toxique sur les animaux et l'action
vitaminique P, protecteur veineux. Chez certaines saponines on a noté une action anti-inflammatoire
(bétuline, acides bétulinique et ursolique), anticancéreuse, cytotoxique ou anti virale VIH 1

Pharmacognosie 2021 33-163


7. EMPLOIS DE SAPONOSIDES

Les saponosides sont utilisés pour leurs propriétés thérapeutiques et comme matières
premières dans l’industrie de synthèse.

a) Matières premières industrielles

Hémisynthèse des stéroïdes

Les saponosides des Dioscorea et des Agave servent à l’hémisynthèse des hormones
stéroïdiques : progestérone, hormones oestrogènes, cortisone etc… Ce procédé a permis d’obtenir les
pilules contraceptives à des prix très abordables.

Synthèse d’agent émulsionnant et détergents


Les saponines du bois de Panama (Quillaya saponaria, Rosacées) servent à la fabrication de
shampooings.

b) Usage populaire
Les drogues riches en saponosides (ex : Balanites aegyptiaca et Phytolaca dodecandra) sont
très utilisées pour capturer les poissons qu’ils tuent (ichtyotoxiques) et pour laver le linge.

c) Usages thérapeutiques

- Diurétiques et expectorants : Salsepareille (Smilax medica Liliaceae) , Polygala


senega
- Abaisse le taux de cholestérol, antilipémique
- Anti-inflammatoire, antiulcéreux : la glycirrhizine de la réglisse a les propriétés des
11-cétostéroïdes.
- Protecteurs veineux : Marronnier d’Inde (Escine), Petit houx (ruscoside).
- Tonique, défatigant, aphrodisiaque ; Ginseng (Panax ginseng, Araliaceae),
Eleutherococcus senticosus, Araliaceae).

Pharmacognosie 2021 34-163


B – PRINCIPALES PLANTES A SAPONOSIDES

1. PLANTES A SAPONOSIDES STEROIDIQUES

a) Le Petit houx : Ruscus aculeatus (Liliaceae)

Plante ligneuse de 50 à 60 cm de haut, poussant dans toute l’Europe tempérée,


notamment en France. Les racines et rhizomes sont à la pharmacopée française de 1949.
L’extrait est utilisé comme antihémorroïdaire et antivariqueux. Il renferme des saponosides à
ruscogénine.
Spécialités : Cyclo 3ND RuscorectalND (ruscogénines).

b) Balanites aegyptiaca (Simaroubaceae)


Le balanites est un arbre épineux qui atteint généralement une hauteur de 4,5 à 6m, parfois
10m. Le fruit est une drupe jaune à maturité, renferme une amande riche en huile (44-51%). La pulpe
de fruit est employée comme laxatif ; la pulpe et l’amande sont riches en saponines à diosgénine et
yamogénine (son épimère 25).

c) Les Dioscorea (Dioscoreaceae) : Dioscorea composita et D. tokoro


Ce sont des plantes herbacées, vivaces par leur rhizome, avec des tiges volubiles et qui
poussent surtout en Amérique centrale.
Leur intérêt en Pharmacognosie réside surtout dans la présence de saponosides stéroïdiques
qui ont servi à l’hémisynthèse des oestrogènes, androgènes et corticoïdes.
Les tubercules sont plus riches en hétérosides. L’industrie s’intéresse surtout aux génines que
l’on obtient sous forme de précipité après hydrolyse acide (HCl, 5N).
Il existe des Dioscorea alimentaires, riches en amidon et doux appelés Ignames.

d) Les Agave : Agave sisalana (Amaryllidaceae)


Plantes à feuilles charnues, épineuses disposées en rosette.
A. sisalana ressemble à l’Aloès. Les Agave sont originaires d’Amérique centrale, cultivées
en Tanzanie, Kenya, Brésil pour l’extraction de l’hécogénine et l’obtention de fibres textiles.
L’hécogénine, comme la diosgénine, est surtout employée dans l’hémisynthèse des stéroïdes.

Remarque : L’hécogénine est également extraite de certains Furcraea américaines


(F. selloa-marginata).

Pharmacognosie 2021 35-163


e) Autres plantes à saponosides stéroïdiques
Azadirachta indica (Meliaceae), Boscia senegalensis (Capparidaceae), Securidaca
longepedunculata (Polygalaceae).

2. PLANTES A SAPONOSIDES TRITERPENIQUES

a) La réglisse : Glycyrrhiza glabra Papilionacées


La racine et le rhizome sont utilisés comme édulcorants, diurétiques et laxatifs.
La réglisse est un petit arbuste poussant dans tout le bassin de la Méditerranée. On trouve deux
variétés : typica (Espagne et Italie) et glandifolia (Russie).

Chimie : La réglisse contient un saponoside, la glycyrrhizine dont la génine est l’acide


glycyrrhétique. Un autre constituant important est le liquiritoside, hétéroside flavonique à propriétés
antispasmodique et anti-ulcère gastrique.

Emploi : - extrait comme édulcorants


- les dérivés de l’acide glycyrrhétique sont antiinflammatoire en ORL, antiulcéreux
(CarbénexoloneND), antiémétique (MétaglizND : combinaison de la métoclopramide).

b) Le Marronnier d’Inde : Esculus hypocastanum Hypocastanaceae


C'est un grand arbre des pays tempérés. Le fruit est une baie appelée marron. La drogue est
constituée par la graine dont les cotylédons renferment des saponosides.
L’Escine est le saponoside prépondérant ; il libère par hydrolyse 2 glucoses, un acide
glycuronique et la protoescigénine. On trouve également une coumarine : l’Esculoside (esculétol +
glucose).

Action et emploi
- l’extrait de la drogue a des propriétés vitaminique P, vasoconstricteur veineux, utilisé
comme antihémorroïdaire et antivariqueux : Intrait de marron d’IndeND, fluxine PND.

- l’escine est extraite des cotylédons ; elle est un anti-œdémateux en phlébologie


- les écorces de marronnier d’Inde servent à l’extraction de l’esculoside à propriétés
vitaminiques P.

c) Polygala senega (Polygalaceae)


Herbe rampante originaire des Etats-Unis, le polygala est cultivée aux USA et au Japon.

Pharmacognosie 2021 36-163


La racine renferme des saponosides à sénégénine. Elle est utilisée comme expectorant sous
forme de teinture dans les sirops antitussifs (NeocodionND).

d) Les ginsengs: Panax sp. (Araliaceae)


Le nom de Ginseng correspond à plusieurs espèces très voisines du genre Panax :
P. ginseng C.A. Meyer (Chine, Manchourie, Corée, Sibérie), P. pseudo-ginseng Wall (Sud-Ouest
Chine), P. japonicum, C.A. Meyer (Japon), P. quinquefolius L. (Amérique du Nord).

La drogue
Les ginseng sont des plantes herbacées caractérisées par des racines tubérisées dont certains
échantillons ont un aspect anthropomorphe.
La drogue est constituée par les racines des plantes de culture (URSS, Chine, Corée, Amérique
du Nord) ; les racines sont arrachées sur les plantes de six ans, traitées rapidement à l’eau bouillante
puis séchées.
La falsification du ginseng est fréquente par les racines d’Ombellifères.

Chimie
De P. ginseng ont été isolés de nombreux composés, en particulier des saponosides. Ceux-ci
dérivent de trois génines tétracycliques (panaxadiol et panaxatriol) et pentacyclique comportant deux
chaînes mono ou biosidiques : les gensénosides RB, RC, Rd, Re, Rf, Rg et Ro.
Dans le ginseng du Japon, les hétérosides de l’acide oléanolique sont prépondérants.

Activités et Emplois
Les ginseng sont, dans la médecine traditionnelle orientale, une véritable panacée. Ce sont des
toniques reconstituants, procurant une « jeunesse nouvelle » dit-on.
De très nombreux travaux ont été consacrés à l’action pharmacologique du ginseng, cependant
avec des résultats souvent contradictoires. Les gensénosides ont parfois des effets opposés. La drogue
aurait des effets anabolisants généraux. Le ginseng est actuellement très consommé en Europe et
surtout aux USA.

Remarque : Eleuterococcus senticosus Maxim (Araliaceae) est une plante de Sibérie


employée comme succédané du ginseng. La racine renferme des saponosides (dérivés de l’acide
oléanolique), des glucosides de lignanes et de coumarines.

Pharmacognosie 2021 37-163


e) Hydrocotyle : Centella asiatica (Daucaceae)
C’est une herbe vivace à feuilles simples, très répandue à Madagascar, en Inde et en Indonésie.

Chimie : La plante renferme des saponosides pentacycliques du groupe de l’ursane dont


l’asiaticoside et l’ester de l’acide madécassique. On trouve également des flavonoïdes, du stigmastérol
et son glucoside, du stigmastérone)

Actions et emplois : Le suc de la plante fraîche est utilisé depuis longtemps en Chine et en
Inde pour soigner les plaies et la lèpre (locale et per os). Aujourd’hui on utilise des extraits titrés dans
le traitement de lésions cutanées diverses (Madecassol ND).

3. AUTRES PLANTES A SAPONINES


La recherche de Molluscicides nouveaux, a donné un regain d’intérêt à beaucoup de plantes,
parmi lesquelles des plantes à saponosides.
Les molluscicides occupent une part très importante dans la lutte contre les shistosomiases,
une des maladies parasitaires les plus importantes dans les régions tropicales et subtropicales.
Le seul molluscicide disponible dans le commerce et recommandé par l’OMS est le
BAYLUSCIDEND (niclosamide), mais coûte très cher pour les pays du Tiers Monde (en 1980, 1 tonne
coûte US$ 25 000).

L’OMS a donc encouragé la recherche sur les molluscicides biologiques. Phytolacca


dodecandra ou Endod, plante dont deux variétés poussent abondamment en Ethiopie ( var « arabe » et
var « ahiyo »), est très intéressant de ce point de vu. Cette plante renferme des saponosides
triterpéniques dérivés de l’acide oléanolique.

CONCLUSION

Les saponosides sont les hétérosides à génines triterpéniques ou stéroïdiques. En thérapeutique


on emploie des extraits de plantes ou encore des produits purifiés pour combattre les troubles liés à la
fragilité des veines ; cette activité vitaminique P, les saponosides la partagent avec les flavonosides.
Dans l’industrie on utilise les saponosides stéroïdiques pour l’hémisynthèse des hormones
stéroïdiques (les oestro-progestatifs notamment). Enfin les saponosides sont actuellement étudiés
comme molluscicides, utilisables dans la lutte contre les shistosomiases (bilharziose), ceci au même
titre que certains tanins.

Pharmacognosie 2021 38-163


PLANTES A HETEROSIDES CARDIOTONIQUES

Les hétérosides cardiotoniques, outre leur analogie de structure, ont en commun leurs
utilisations dans les insuffisances cardiaques ; leur découverte a révolutionné la thérapeutique dans ce
domaine.
Ces hétérosides furent isolés pour la première fois de la digitale laineuse (Digitalis lanata,
Scrofulariaceae) d’où Nativel a isolé la digitaline en 1868 et que l’on baptisa digitoxine en Allemagne
(1875). Plus tard d’autres hétérosides cardiotoniques importants furent découverts à partir des
Strophanthus, Apocynacées africianes utilisées comme poison de flèche.
Quelques familles végétales seulement renferment des espèces à hétérosides cardiotoniques.
Parmi elles on peut citer : Scrofulariaceae (Digitales), Apocynaceae (Strophantus, Thevetia, Laurier
rose), Liliaceae (Scille, Muguet) et Renounculaceae (Adonis et Hellébore noire).
Dans la première partie de ce chapitre, nous parlerons de généralités en insistant
particulièrement sur l’action physiologique et la relation structure-activité des molécules. Dans la
seconde partie, des plantes sources de cardiotoniques seront passées en revue, classées par famille
botanique.

A) GENERALITES SUR LES HETEROSIDES CARDIOTONIQUES

1. DEFINITION ET STRUCTURE

Comme tous les hétérosides, les hétérosides cardiotoniques (hc) sont constituées d’une génine
et d’une fraction osidique.

La génine: Elle est de nature stéroïdique avec un squelette cyclopentano-


perhydrophenanthrénique. Sur ce noyau on retrouve des éléments de structures constants :

- les jonctions A/B et C/D de configuration Z


- en 17 un cycle lactonique insaturé
- en 3 un hydroxyle alcoolique secondaire
- en 14 un hydroxyle alcoolique tertiaire.

On peut trouver des hydroxyles supplémentaires en 1, 5, 11, 12, et 16. Parfois le méthyle en 10
est oxydé en alcool primaire ou en aldéhyde. En outre, selon la nature du cycle lactonique en 17, on
distingue deux types de génines :

Pharmacognosie 2021 39-163


- Les cardénolides ou butadiènolides, à cycle lactonique pentagonal. Ce sont les
cardiotoniques les plus répandus ; on les retrouve dans les plantes suivantes : Digitales,
Strophanthus, Thevetia, Laurier rose, Muguet, Adonis.
- Les bufadiénolides ou bufanolides, à cycle lactonique hexagonal (pentadiénolides).
Ils sont peu répandus ; on les trouve dans la Scille et l’hellébore noir, également dans le venin de
certains crapauds.

La partie glucidique de ces hétérosides est constituée par des oses fixés sur
l’hydroxyle en 3 de la génine. On peut avoir un ose (monodesmosidique) ou plusieurs oses (bis ou tris-
desmosidique).
La nature des oses est variable ; on trouve notamment des hexoses (glucose) et surtout des
désoxy-oses dont certains sont particuliers aux cardiotoniques : désoxy-6-hexoses (Rhamnose, D-
digitalose et L-thévétose), désoxy-2-méthylpenstoses (D-digitoxose, D-cymarose et L-oléandrose).
Dans la plante fraîche, on trouve des hétérosides primaires riches en oses, très solubles dans
l’eau ; alors que la plante séchée renferme des hétérosides secondaires provenant de l’hydrolyse
partielle enzymatique des hétérosides primaires.

Relation structure activité : On trouve des éléments de structure indispensable


à l’activité cardiotonique et des éléments qui modifient cette activité.

Eléments indispensables
• Configuration Z de la jonction A/B ou alors présence de double liaison en 4-5 (chez
les bufadiénolides) et jonction C/D à configuration Z.

• Cycle lactonique insaturé en 17


• Hydroxyle en 3.

Modifient l’activité
- Présence d’une chaîne osidique en 3 : les sucres influent sur la solubilité et
renforcent considérablement l’activité cardiotonique. Les hétérosides primaires sont en général plus
actifs que les secondaires.

- la présence d’hydroxyles supplémentaires sur la génine est important pour la


pharmacocinétique des molécules (influence sur l’absorption des hc).

Pharmacognosie 2021 40-163


2. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES ET ESSAI DES HC

a) Propriétés physiques
Les hétérosides cardiotoniques sont des produits généralement bien cristallisés ; leur saveur est
amère. Par exemple, la digitoxine se présente sous forme de cristaux microscopiques en lamelles
rectangulaires, inodore, dont la poudre, de saveur amère intense, irrite la muqueuse nasale et provoque
l’éternuement. Son point de fusion est à 270°C.
Les hétérosides cardiotoniques sont plus ou moins solubles dans l’eau (influencée par le
nombre d’oses fixés en 3), solubles dans l’alcool, souvent assez solubles dans le chloroforme (cas de
la digitaline), mais insolubles dans le benzène et l’éther de pétrole.
Les hétérosides cardiotoniques sont des molécules fragiles : en milieu alcalin, il y a ouverture
du cycle lactonique et épimérisation en 17 (17 donne 17).

b) Propriétés chimiques, caractérisation et dosage


La caractérisation des hétérosides cardiotoniques s’effectue à partir d’extrait alcooliques
concentrés alcooliques, purifiés ou non. Souvent une délipidation est nécessaire (cas des graines de
Strophanthus). La caractérisation se fait par des réactions colorées et par CCM principalement et
secondairement par réaction de fluorescence

Réactions colorées

- Caractérisation des oses


* Action d’un acide concentré à chaud (formation de dérivés furfuraliques)
suivi de la combianison avec un phénol (résorcine), on obtient une coloration variable selon la nature
de l’ose (bleu pour les aldoses, rouge pour les cétoses).

* Réaction des désoxy-oses

• Keller-Killiani : extrait + acide acétique + acide sulfurique + traces


de sels ferriques. On observe un anneau brunâtre à l’interface et une coloration
bleue de la couche acétique.

• Réaction de Pesez : solution acétique + xanthydrol + HCl, on


observe le développement d’une coloration rouge par chauffage au bain-marie.

Pharmacognosie 2021 41-163


O O

O O
OH
OH OH
RO RO

H H
Digitoxigénine Gitoxigénine
gitoxine (R = 3 digitoxoses)
- digitoxine (R = 3 digitoxoses)
oléandroside (16 formyl gitoxine)
- thévétine B (R = thévétose + 2 glu)

O OH O

O O

OCHO OH
OH RO
RO
H
H
Digoxigénine
Gitaloxigénine
- digoxine (R = 3 digitoxoses)
- gataloxine (R = 3 digitoxoses)

O
O
OH
OH OCH O
OH CH O
2

OH
OH HO
OH
HO
OH
Strophantidine = Convallatoxigénine
Ouabaïgénine

O
O

HO
HO

Scillarénine

Pharmacognosie 2021 42-163


- Caractérisation des génines
* Caractérisation du noyau stéroïdique par la réaction de Liebermann-
Buchard : la solution chloroformique + anhydride acétique + H2SO4 concentré donne
une coloration violacée, bleue puis verte.

* Réaction du noyau lactonique : réaction des cardénolides avec des dérivés


nitrés, en milieu alcalin :

- Baljet : Acide picrique + NaOH donne une coloration orangée stable


(peu sensible).

- Kedde : acide 3,5 dinitrobenzoïque + NaOH : rouge plus stable


(sensible).
- Raymond-Marthoud : métadinitrobenzène + NaOH : violette fugace
(très sensible).

Réaction de fluorescence

Les hétérosides cardiotoniques donnenet en milieu acide des dérivés 14(15)dehydro ou


14(15)-16(17)- didéhydro fluorescents, ce qui permet de révéler les CCM. En pratique, on
emploie la réaction de Svensen-Jensen : pulvérisation sur plaque l’ acide trichloroacétique en
solution dans l’ethanol. l’Utilisation simultanée d’un oxydant (Chloramine) permet d’observer
des fluorescences de couleurs différentes ce qui facilite l’interpretation des
chromatogrammes. On peut aussi recourir à l’acide phosphorique seul ou mélangé à l’ Acide
sulfurique et au chlorure ferrique : Après chauffage on obtient une coloration rouge
(réaction de Tattje)

Chromatographie sur couche mince : On utilise une plaque de silice avec comme solvant par
exemple : Acétate d’éthyle-pyridine –eau (5-1-4) phase supérieure. Il est souvent necessaire de
recourir à une CCM bidimensionnelle pour séparer les hétérosides. On opère en présence d’hétérosides
cardiotoniques témoins et on révèle par le réactif le Baljet ou celui de Kedde.

Dosage des hétérosides cardiotoniques


Bien que le dosage biologique rende plus compte de l’activité (comme nous le verrons plus
loin), le dosage physico-chimique est le plus pratiqué car plus facile à mettre en œuvre.

Pharmacognosie 2021 43-163


- Dosage physicochimique
* colorimétrie utilisant les réactions de Kedde et de Baljet.
* séparation par CCM : densitométrie ou colorimétrie après élution.
* dosage pondéral : c'est la méthode pratiquée par l'industrie.

- Dosage biologique
Les méthodes de dosage biologique sont restées longtemps les seules admises pour estimer
l’activité cardiotoniques (ph. fse VIIè et VIIIè Ed.). Elles visent à estimer la cardiotoxicité qui est en
rapport direct avec l’activité cardiotonique : DL50 chez la grenouille et dose minimale mortelle chez le
cobaye.

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE DES HETEROSIDES CARDIOTONIQUES

a) Principales actions
Les hétérosides cardiotoniques modifient les propriétés du cœur. Leur action
thérapeutique fondamentale est l’augmentation du débit cardiaque dans l’insuffisance cardiaque. Les
variations du débit cardiaque résultent d’influences sur le cœur et la circulation.

Action cardiaque
Cette activité obéit à la règle de Potain dite « règle des 3R (renforce, régularise et ralentit les
mouvements cardiaques). On distingue plusieurs effets :
- Effet inotrophe positif : les cardiotoniques augmentent la force de contraction du
myocarde ; celle-ci est due à une modification de la perméabilité ionique membranaire : la pompe à
Na, commandée par le Na+-K+ ATPase, est inhibée par les hétérosides cardiotoniques, il en résulte au
niveau de la fibre cardiaque une diminution du potassium et une augmentation du sodium.

L’accroissement du Na+ dans la cellule entraîne une montée du Calcium ionisé donc un
renforcement des contractions myocardiques.

- Effet chronotrope négatif : les hétérosides cardiotoniques ralentissent la fréquence


cardiaque par une action directe vagotonique dépressive sur le nœud sinusal et par une action indirecte
antiadrénergique due à l’amélioration du débit cardiaque.

Pharmacognosie 2021 44-163


- Autres effets : ils découlent des précédents : effet dromotrope négatif se manifestant
par le ralentissement de la conduction au niveau du faisceau de His et un effet bathmotrope négatif se
traduisant par la diminution de l’excitabilité anormale du myocarde.

Action sur le système nerveux central


On observe en particulier une stimulation des centres du vomissement et des centres visuels ;
ce sont plutôt des effets indésirables qui traduisent un surdosage.

Action au niveau des reins


Les hétérosides cardiotoniques exercent une action diurétique indirecte par l’amélioration du
débit sanguin entraînant une augmentation de la filtration glomérulaire et, par conséquent, de
l’élimination urinaire.

b) Pharmacocinétique des hc
Elle étudie particulièrement la résorption digestive, la durée d’action et l’élimination de la
molécule d’hétéroside cardiotonique. Ici, le nombre d’hydroxyles sur la génine est d’une grande
importance. On distingue :
- les molécules peu hydroxylées : elles sont plus liposolubles, sont rapidement
absorbée per os. Par contre leur action est lente et leur élimination est retardée par une fixation au
niveau des lipoprotéines plasmatiques et tissulaires d’où accumulation et risque d’intoxication.

- les molécules très hydroxylées : elles sont non liposolubles, non adsorbées par voie
digestive ; l’administration est parentérale, l’action est rapide et fugace (élimination rapide).

c) Tentatives d’amélioration de l’activité des hétérosides cardiotoniques


Ces dernières années, l’on a tenté d’obtenir des h.c. hémisynthétiques pour résoudre le
problème posé par la grande toxicité des dérivés naturels, la marge thérapeutique de ceux-ci étant très
faible. Les modifications de structure ont été principalement apportées sur la digoxine et la gitoxine.
Ces modifications structurales sont les suivantes :

- Hydrogénation du cycle lactonique


- Polyformylation (estérification) des HO 12, 16 et de la chaîne de digitoxose.
- Hétérosides mono-O-isopropylidènes (3’’’, 4’’’ O-isopropylidène digoxine).
- Modification de la chaîne d’oses remplacée par le 4-amino-4,6 dideoxy D-galctose,
ose naturel extrait du Cambodia (exemple de « AST 222 »). Son action inotrope positif est
supérieure à celle de la digitoxine in vivo chez le lapin.

Pharmacognosie 2021 45-163


- Modification de la position du cycle lactonique (sa fixation modifiée sur le squelette
stéroïdique).

Malgré les nombreuses recherches entreprises, l’apport des modifications de structure en vu de


l’amélioration des propriétés des cardiotoniques naturels et la réduction de leur toxicité s’est révélée
faible jusqu’à ce jour. Les dérivés naturels demeurent toujours les seuls utilisés.

4. CONCLUSION SUR LES HETEROSIDES CARDIOTONIQUES


Les plantes à hétérosides carditoniques sont aujourd’hui presque exclusivement utilisées pour
l’extraction des hétérosides, les formes galéniques issues des extraits étant tombées en désuétude. Les
plantes les plus utilisées sont les digitales et la scille. Il faut retenir que la pharmacocinétique,
intimement liée à la structure moléculaire, est particulièrement importante à connaître pour l’utilisation
efficace d’un cardiotonique ; (absorption, accumulation et élimination). (Biblio : J. Pharm. Belg. 1984,
39, 4, 225-232).

B / PRINCIPALES PLANTES A HETEROSIDES CARDIOTONIQUES

1. LES SCROFULARIACEAE

Les plantes concernées sont la digitale pourpre laineuse.

a) Digitale pourpre : Digitalis purpurea


La drogue, constituée par les feuilles séchées, figure au tableau A.

Botanique : c’est une plante herbacée bisannuelle, très répandue en Europe occidentale. La
première année de végétation, la plante fournit une simple rosette de feuilles ovales et oblongues,
forme sous laquelle elle passe l’hiver. La deuxième année apparaît une tige florifère longue de 1 à 1,5
m, portant des feuilles isolées et une inflorescence terminale. Les fleurs ont une corolle tubuleuse
tachetée de pourpre.
La drogue provient le plus souvent de plantes cultivées (Pays-Bas), Etats-Unis…)
sélectionnées notamment en vue de l’obtention de races chimiques riches en hétérosides du groupe A
(voir plus loin). Le séchage se fait à une température inférieure à 50°C.
La drogue est constituée par les feuilles. Celles-ci sont oblongues, subaiguës au sommet,
terminées à la base en un pétiole ailé. Le limbe, irrégulièrement crénelé, possède un réseau de nervures
secondaires très proéminentes sur la face inférieure donnant à l'ensemble un aspect gaufré très
caractéristiques. L'odeur est faiblement aromatique et la saveur très amère.
Du point de vue anatomique on a :

Pharmacognosie 2021 46-163


- arc libéro-ligneux ouvert accompagné d’un péricycle collenchymateux
- poils tecteurs pluricellulaires unisériés à parois finement ponctuées.
- poils sécréteurs rares
- absence de cristaux d’oxalate de Ca.
Tous ces caractères se retrouveront dans la poudre.

CHIMIE
Parmi les principes banaux on remarque :
- des flavonoïdes dont la digitoflavone identifiées à la lutéoline.
- des saponosides : digitonoside, digitonine
- des hétérosides non cardiotoniques appelés digtanol-hétérosides ou digiénol-
hétérosides avec un noyau stéroïde, mais absence cycle lactonique.

Les principes actifs sont constitués par des hétérosides cardiotoniques cardénolides en faible
teneur (0,1 à 0,4% de la drogue fraîche).
On distingue deux groupes A et B
- Groupe A : génine digitoxigénine
• digitoxoside = digitoxine = digitaline
• purpurea glucoside A (Digitoxine + 1 glucose terminal)
- Groupe B : divisé en deux sous-groupes :
* Sous-groupe de la gitoxigénine
• Purpurea glucoside B
• Gitoxine
* Sous-groupe de la gitaloxigénine (16-formyl-gitoxigénine)
• Gitaloxine
• Glucogitaloxine

Action physiologique
La digitale pourpre très anciennement connue pour sa toxicité, s’est révélée un cardiotonique
majeur, encore utilisé.
Son action sur le cœur malade s’observe après un temps de latence et est marquée. On observe
des effets inotrope (+), chronotrope (-), bathmotrope (-) et dromotrope (-) (voir généralités)
L'action de la drogue totale sur le cœur est due à l'ensemble des hc qui agissent en synergie.
Les saponosides, les flavonoïdes augmentent l'effet cardiotonique et agissent sur la diurèse.

Pharmacognosie 2021 47-163


Particularités des différents hétérosides cardiotoniques
Les hétérosides cardiotoniques du groupe A (digitoxine) sont plus actifs que ceux du groupe B
et leur action chronotrope (-) est très marquée. En outre leur pharmacocinétique est conforme à celle
des substances liposolubles (voir généralités).
Les hétérosides cardiotoniques du groupe B, à élimination plus rapide, ont un effet inotrope
(+) plus marqué.

Essais
- Essais physico-chimiques
• CCM en présence de digitoxine et de gitoxine. Révélation par le mélange
chloramine-acide trichloracétique : on observe des fluorescences bleues (groupe B) et brunâtre (groupe
A).
• Dosage des hétérosides cardiotoniques par colorimétrie avec la réaction de Kedde.
Minimum 0,3% exprimé en digitoxine.
- Essais biologiques (voir généralités)

Emplois de la digitale pourpre


Elle est aujourd’hui surtout employée pour l'extraction des hétérosides cardiotoniques; il existe
néanmoins des formes galéniques :
- la poudre, Tableau A (titrée à 10 U.I./g)
- teinture, Tableau C (1 U.I./g).

Les hétérosides utilisés sont :


- Digitaline (Ph. fr IXème T.A.) dose usuelle 0,25 mg/prise et 1 mg/24 heures utilisée
sous forme de soluté buvable (gouttes) et comprimés dosés à 0,1 mg (1 à 2 cp./24H).

Ce sont des médicaments de la grande insuffisance cardiaque, à action lente durable. La


surveillance médicale doit être stricte.

- Hétérosides totaux (DIGIPLEXND)

b) La digitale laineuse : Digitalis lanata


La drogue : feuilles séchées (Tableau A)

BOTANIQUE

Pharmacognosie 2021 48-163


La digitale laineuse est une plante herbacée, vivace, calcicole, originaire d’Europe centrale et
orientale. Sa tige, dressée, violacée à la base, cotonneuse au sommet, possède des feuilles lancéolées,
vert foncé, glabres. Les inflorescences en longues grappes terminales, portent des fleurs tubuleuses à
calice très velu.
La digitale laineuse est une plante de culture (Europe occidentale et USA). Les feuilles sont
lancéolées, pointes aiguës, bords droits. Elles sont pratiquement glabres et de couleur vert foncé. A la
face inférieure, on distingue un réseau de nervures parallèles, donnant un aspect rayé à la feuille.
Au microscope, on observe un épiderme à cuticule épaisse portant des poils sécréteurs à tête
bi-cellulaire.

La drogue : elle est constituée par les feuilles séchées rapidement à 55-60°C. Les substances
étrangères ne doivent pas dépasser 2%. A conserver en atmosphère sèche et à l'abri de la lumière.

CHIMIE
On retrouve les mêmes principes banaux que dans la digitale pourpre. Les hétérosides
cardiotoniques ont une teneur de 0,5 à 1% (drogue sèche). Selon la nature de la génine on a :

Le groupe A : à digitoxigénine
L'hétéroside cardiotonique primaire est le lanatoside A qui diffère du purpurea
glucoside A par la présence sur le dernier digitoxose de la chaîne glucidique, d’un groupement acétyle
en position 3 ( ou ) ou 4 ( ou ). Les -acétylés sont plus actifs physiologiquement.

Le groupe B : deux sous-groupes


* Sous-groupe de la gitoxigénine :
• Lanatoside B (hc. Primaire)
• Désacétyl-lanatoside B (=Purpurea glucoside B)
• Acétylgitoxoside
• Gitoxoside

* Sous-groupe de la 16-formyl-gitoxygénine (gitaloxigénine)


• Lanataglucoside E
• Acétylgitaloxoside
Le groupe B est peu important du point de vue pharmacologique.

Pharmacognosie 2021 49-163


Le groupe C : c’est avec le groupe A, le groupe le plus important ; il représente 30 à 40% des
hétérosides totaux. La génine est la digoxigénine (hydroxylée en 3, 12 et 14); Les hétérosides
sont : Digoxine, acétyldigoxine, et lanatoside C.

Le groupe D : diginatigénine : Lanatoside D.

Action physiologique
La Digitale laineuse est 3 à 4 fois plus toxique que la Digitale pourpre. Elle possède une action
inotrope (+) nettement plus marquée, cela est du notamment aux hétérosides du groupe C (Digoxine).
La digoxine est en effet moins liposoluble, sa résorption digestive plus faible, sa fixation sur
les protéines plasmatiques diminuées. Elle s’élimine rapidement par les reins.

Essais : Les mêmes que ceux de la digitale pourpre.

Emplois :
La digitale laineuse est exclusivement employée pour l'extraction des hétérosides
cardiotoniques. Elle tend à remplacer la digitale pourpre pour cet usage. On extrait les composés
suivants :

- Digitoxine
- Digoxine (Ph. fse Ixè Ed.) t.A : Digoxine NativelND, CoragoxineND doses 0,10-0,20
mg/24H.
- Lanatoside C (1 à 4 mg/24H) CedilanideND
- Acetyldigitoxine 0,2 mg/24H AcylanideND.

N.B. : Traitement sous surveillance médicale stricte.

1. LES APOCYNACEAE A HETEROSIDES CARDIOTONIQUES

Les plus importants sont sans aucun doute les Strophantus.

a) Les Strophantus
On trouve trois strophantus dont les graines sont inscrites à la pharmacopée africaine de 1985 :
Strophantus gratus, S. hispidus et S. kombe.

Pharmacognosie 2021 50-163


BOTANIQUE

Les Strophantus, originaires d’Afrique tropicale, sont des arbustes ou des lianes. Les feuilles
sont opposées et lancéolées ; les fleurs de type 5 possèdent une corolle blanche ou rose avec des
pétales parfois prolongées d’appendices (cas de S. kombe).

Les fruits sont constitués de deux follicules divergents renfermant de nombreuses graines. Les
trois Strophantus se différencient par les caractères des graines (grosseur, longueur de l'aigrette) et par
leur répartition géographique : l'Afrique occidentale équatoriale pour S. gratus, occidentale tropicale
pour S. hispidus et orientale pour S. kombe.

La drogue est constituée par les graines mûres dépourvues de leurs arrêtes. Elles sont ovoïdes,
aplaties et mesurant 12 à 20 mm de long et 3 à 5 mm de large. Elles sont glabres, couleur fauve pour S.
gratus, velues couleur gris-verdâtre (S. kombe) et velues grises, brun doré (S. hispidus)
CHIMIE

Les graines renferment 20 à 30% de lipides, qui rendent leur conservation difficile.
Les principes actifs sont des cardénolides, présents à des teneurs particulièrement élevées ; la
composition varie suivant les espèces.
Strophantus gratus renferme 3 à 7% d’h.c. dont le principal est l'ouabaïne. C’est un h.c. très
hydroxylé dont le sucre est le rhamnose.
Strophantus kombe renferme 5 à 10% d’h.c. appelée K-strophantosides. L'hétéroside
primaire est le K-strophantoside . Celui-ci donne par hydrolyse enzymatique progressive les K-
strophanthosides  et .
La génine (obtenue par hydrolyse acide) est le Strophantidine ou cymarigénine ; elle est
moins hydroxylée que l'ouabaïgénine et possède une fonction aldéhyde en 10.
S. hispidus a une composition chimique voisine de celle S. kombe.

Action physiologique
Les hétérosides des Strophantus ont un effet chronotrope (-) peu marqué et un effet inotrope
(+) très accentué.
L'ouabaïne n’est pratiquement pas résorbée par voie digestive ; fortement polaire, elle n’est
pas métabolisée mais éliminée telle quelle dans les urines. Elle ne se fixe pas sur les protéines
plasmatiques. Son action est donc rapide mais de courte durée. L'ouabaïne est un médicament
d’urgence administré par voie intraveineuse.

Pharmacognosie 2021 51-163


Le K-strophanthoside a une action analogue à celle de l'ouabaïne, mais d’intensité plus faible
et de durée plus longue.

Emplois des Strophantus


Actuellement les Strophantus ont un usage restreint en thérapeutique. On extrait l'ouabaïne de
S. gratus.
L'ouabaïne est administré en urgence par voie I.V. en ampoule dosé à 0,25 mg. (Ouabaïne
ArnaudND, Ouabaïne AguettantND).

b) Autres Apocynacées à hétérosides cardiotoniques

Thevetia neriifolia Juss ou laurier jaune des Indes (Pharm. Afric. 1985)
C’est un arbuste ornemental originaire des régions tropicales. Ses fleurs sont jaunes et le fruit
renferme un noyau dur à graines triangulaires.
Ces graines sont riches en huile et renferment 5% de cardénolides dont le principal est la
thévétine, mélange de thévétoside A et B.
La thévétine fut jadis utilisée pour ses propriétés cardiotoniques intermédiaires entre la
digitaline et l'ouabaïne.

Nerium oleander ou laurier rose (feuilles)


Arbuste ornemental très répandu dans les régions méditerranéennes. Les feuilles renferment
des hétérosides cardiotoniques cardénolides dont le principal est l'oléandroside (oléandrine). Cet
hétéroside par hydrolyse donne l'oleandrogénine (= acétoxy-16 gitoxigénéine) et l'oleandrose.

Les Acokantheras
Ce sont des arbustes d’Afrique orientale, d’où l'on a extrait pour la première fois l'ouabaïne à
partir des graines et des racines : Acokanthera schimperi et A. ouabaïo.
Apocynum cannabinum ou chanvre du Canada
Plante herbacée d’Amérique du Nord dont le rhizome renferme un cardénolide, le cymaroside
utilisé aux USA.

3) LILIACEES A HETEROSIDES CARDIOTONIQUES

a) Le Muguet : Convallaria majalis

Pharmacognosie 2021 52-163


Drogue : plante fleurie.
La plante herbacée, renferme 0,1 à 0,3% de cardénolides représentés principalement par la
convallatoxine. L'activité cardiotonique de cette dernière est rapide, mais fugace ; elle a en outre une
action diurétique.

b) La scille = Urginea scilla ou U. maritima


Drogue : Ecailles du bulbe (tableau C).

BOTANIQUE : plante herbacée des rivages méditerranéennes, vivace par un bulbe


tuniqué volumineux. Les feuilles, en touffes à la base, sont très longues et aiguës. Les fleurs, disposées
en grappes terminales, sont de couleur blanc-verdâtre. Le fruit est une capsule.
La cueillette des bulbes s’effectue à la fin de l'été. Il existe deux variétés de Scille : la Scille
blanche dit e d’Italie et la Scille rouge dite d’Espagne.
La drogue se présente en lanière étroite de couleur variable et de consistance cornée. Son
odeur est nulle, sa saveur âcre et amère.
CHIMIE
- Substances banales : sels minéraux (oxalate Ca), mucilages, fructosannes et flavonoïdes
- 0,4% de bufadiénolides constitués par :
* des osides de la Scillarigénine = Scillarénine
• Glucoscillarène A, hétéroside primaire
• Scillarène A hétéroside secondaire.
• Proscillaridine A
* Le Scilliroside trouvé uniquement dans la Scille rouge.

Action physiologique
Les hétérosides de la Scille ont une action cardiotonique type, avec effet inotrope (+) marqué
on note en plus, avec la drogue totale, une action diurétique renforcée par la présence de certains
polysaccharides et des flavonoïdes.

Emplois de la Scille
La Scille est utilisée surtout pour l'extraction de la proscillaridine A obtenue après hydrolyse
enzymatique.
La proscilaridine A (TalusinND) est un produit à élimination rapide, utilisée dans les
insuffisances cardiaques (0,5 à 1mg/24H).
La Scille rouge sert en plus à préparer des appâts empoisonnés raticides.

Pharmacognosie 2021 53-163


GENERALITES SUR LES FLAVONOÏDES - PLANTES A FLAVONOÏDES

Les flavonoïdes constituent un groupe chimique homogène. Ce sont des pigments naturels de
couleur jaune (Flavus signifiant jaune) que l'on rencontre dans presque tous les végétaux. Si l'on
s’accorde à dire que les flavonoïdes sont des métabolites secondaires, par contre leur rôle dans la
plante est encore mal défini.
Chez l'homme l'activité de plusieurs plantes a été attribuée à la présence de flavonoïdes. Leurs
premières propriétés pharmacologiques à être découvertes sont sans doute l'activité diurétique et
l'action vitaminique P. Aujourd’hui un grand nombre de flavonoïdes est extrait et sert à la fabrication
de spécialités pharmaceutiques très utilisées.
La recherche sur les mécanismes d’action des flavonoïdes est très active en ce moment et a
permis de découvrir d’autres domaines d’application thérapeutique de ces molécules.

1) DEFINITION

Les flavonoïdes, au sens strict, sont des pigments jaunes, généralement polyphénoliques ; ils
sont le plus souvent sous forme d’hétérosides appelés flavonosides dont les génines sont des dérivés
de la phénylchromone, la chromone étant la benzo--pyrone.
Dans les flavonoïdes au sens large, son inclus tous les composés en C6-C3-C6 notamment les
dérivés du phénylchromane ou flavane (catéchines et proanthocyanidols) et les dérivés du flavylium,
(anthocyanes).

2) REPARTITION, LOCALISISATION ET ROLE DANS LA PLANTE

Les flavonoïdes sont surtout abondants chez les végétaux supérieurs et particulièrement dans
certaines familles : Polygonaceae, Rutaceae, Légumineuses, Ombellifères et Composeae.
On les trouve dans les organes aériens, en particulier dans les organes jeunes (feuilles, boutons
floraux) où ils sont dissous dans les vacuoles ou sont des constituants des chromoplastes.
Le rôle des flavonoïdes dans la plante est encore mal connu, mais on pense qu’ils participent à
plusieurs fonctions physiologiques et biologiques. En raison de leur structure polyphénolique, les
flavonoïdes pourraient jouer un rôle dans les chaînes d’oxydo-réduction et modifier certaines
réactions concernant la croissance, la respiration et la morphogenèse de la plante. Ils participent
probablement à la phase lumineuse de la photosynthèse comme catalyseurs du transport d’électrons et
(ou) comme régulateurs de la photophosphonylation ; en effet, l'inhibition de la H+ ATPase et de la
(Na+, K+) ATPase peut expliquer la participation des flavonoïdes à de pareilles réactions.

Pharmacognosie 2021 54-163


De nombreux flavonoïdes, en raison de leur richesse en groupements phénols, sont capables de
se fixer sur certaines protéines et enzymes, et de modifier ainsi les équilibres enzymatiques. Ils
interviennent à différents stades du développement, notamment lors de la germination. Ceux qui ont
une forte absorption UV interviendraient pour protéger la plante contre les rayonnements nocifs.
Enfin les flavonoïdes qui imprègnent le bois de cœur, ont des propriétés fongicides et
insecticides qui protègent l'arbre contre l'intrusion des champignons ou les insectes.

3) STRUCTURE ET CLASSIFICATION

Les flavonoïdes sont le plus souvent sous forme d’hétérosides. Nous décrirons successivement
les génines, les sucres et le mode de liaison entre ces deux parties.

a) Les génines
Les génines permettent de classer les flavonoïdes en différents groupes. Ce sont des dérivés
polyhydroxylés, parfois méthoxylés ou méthylés, de la chromone. On distingue :

Les flavones vraies : Ce sont des dérivés de la phenyl-2-chromone. Ils constituent les formes
les plus oxydées.

Les flavonols : Ils possèdent un OH alcoolique en 3. Ce sont les flavonoïdes les plus répandus
chez les végétaux.
Les flavanones : Ils ne possèdent pas de double liaison en 2-3. Ils sont souvent méthoxylés. On
les rencontre surtout dans les Rutaceae. On note la présence d’un carbone chiral dans la structure des
flavanones, ce qui entraîne l'existence de deux isomères optiques pour chaque composé.
Les chalcones : Ici le cycle pyronique est ouvert. Ce sont des isomères des flavanones avec
lesquels ils sont en équilibre.
Les isoflavones : Ce sont des dérivés de la phenyl-3-chromone, isomères des flavones.
Les aurones : Ce sont des benzalcoumaranones considérés comme des flavonoïdes.

b) Les oses
Les sucres qui interviennent dans la structure des flavonoïdes sont presque exclusivement des
aldoses. La présence de D-fructose (cétose) est tout à fait exceptionnelle. Le D-glucose et le L-
rhamnose sont les plus fréquents. On trouve également du D-galactose, D-xylose et L-arabinose. On
peut trouver des diholosides comme le rutinose (rhamnose + glucose). Selon le nombre d’oses, on
trouve desmosides, des biosides, des triosides, les oses pouvant être placés sur le même carbone
(monodesmosidiques) ou sur des carbones différents (en 3 et 7) : bidesmosidiques).

Pharmacognosie 2021 55-163


Le plus souvent, la liaison entre génine et sucre est de nature etheroxide, on parle alors de O-
hétérosides. Il existe également des C-hétérosides dans lesquels la génine est liée au sucre par une
liaison carbone-carbone (c'est le cas de la vitexine). Sur le plan stéréochimique, les liaisons sont de
conformation , rarement .

4) BIOGENESE DES FLAVONOÏDES

Il convient d'envisager l'origine des noyaux A et B séparément. Le noyau B provient des


acides dérivés du phénylpropane (cinnamique, coumarique). Quant au noyau A, il résulte de la fixation
de 3 chaînons acétates sur l'acide p-coumarique. Les premiers composés formés sont constitués par un
équilibre chalcones-flavanones qui sont les précurseurs des flavones et flavonols. Les isoflavones
résultent de la transposition du noyau B des flavones correspondantes.
La chalcone-synthétase, qui préside à la formation de la chalcone, est un complexe
multienzyme comprenant trois sites, chacun assurant successivement l'addition des unités malonates.
La chalcone-synthétase occupe une position clé qui en fait le principal enzyme régulateur du
mécanisme de cette biosynthèse. A la fin de la réaction, la chalcone-synthétase est inhibée par le CoA-
SH et la chalcone (ou la flavanone). Le deuxième enzyme intervenant, est la chalcone-flavanone-
isomérase qui catalyse l'équilibre chimique chacone-flavanone, équilibre largement déplacé du coté de
la flavanone aux pH physilogiques.

5) PROPRIETES PHYSICOCHIMIQUES ET EXTRACTION

a) Propriétés physicochimiques
Les flavonoïdes sont des solides cristallisés dont la teinte varie du blanc ivoire au jaune vif.
Les hétérosides flavoniques sont solubles dans l'eau (surtout à chaud), l'alcool, les solvants
organiques polaires (butanol, acétate d’éthyle), insolubles dans les solvants organiques apolaires. Les
génines sont peu solubles dans l'eau et solubles dans l'éther.
Les flavonoïdes sont solubles dans les solutions alcalines en donnant une coloration jaune
intense (augmentation de la conjugaison) qui disparaît avec addition d’acide.
Les spectres d’absorption UV sont caractérisés par deux bandes qui correspondent aux
différentes structures mésomères. La bande I (300-400nm) fait intervenir la conjugaison du CO de
l'hétérocycle central avec le noyau B (structure cynnamoyle); la bande II (240-285 nm) fait intervenir
la conjugaison du CO avec le cycle A (structure benzoyle). Ces deux bandes sont déplacées dans le
sens hypsochrome ou bathochrome selon le nombre et la position des hydroxyles sur le squelette.
Il est à remarquer que pour les flavanones et les isoflavones, la bande I est presque inexistante
du fait qu’il n’y a pas de conjugaison possible entre le CO et le noyau B dans de telles structures.

Pharmacognosie 2021 56-163


b) Extraction
L'extraction est basée sur la solubilité dans l'eau à chaud, ou dans l'alcool. L'extraction
alcoolique est plus pratiquée. L'extrait alcoolique est alors évaporé à sec le résidu repris par l'eau
chaude. Ceci permet de précipiter les composés tels que les la chlorophyle, les composés lipophiles ou
résineux. Après filtration, on peut procéder à l'extraction du filtrat aqueux par l'acétate d'éthyle ou par
le butanol.

6) PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES DES FLAVONOIDES

Les flavonoïdes sont depuis longtemps connues pour leur activité cardiovasculaire, leur action
sur la diurèse et enfin leur activité vitaminique P. Récemment on leur a découvert de nouvelles
activités intéressantes.

a) Action cardiovasculaire
Certains flavonoïdes ont une action stimulante sur le cœur fatigué et une action hypotensive
(notamment les dérivés du quercétol).

b) Action sur la diurèse


Les flavonoïdes sont capables de doubler ou de tripler la diurèse chez l'animal. Quelques
travaux ont été consacrés à cette activité sans qu’aucun mécanisme d’action ne soit dégagé.
Certaines plantes sont connues pour leur action diurétique due aux flavonoïdes : exemple des
feuilles de Combretum micranthum (kinkéliba) et des fleurs du genêt à balais.

c) Action vitaminique P
Cette activité a été découverte durant la recherche du facteur antiscorbutique qui fut identifié à
la Vitamine C. On a mis en évidence également des facteurs complémentaires antiscorbutiques dont
des flavonoïdes.
La capacité de renforcer la résistance des capillaires et de diminuer leur perméabilité est
appelée propriétés vitaminiques P. Cette propriété est mise en évidence par plusieurs tests : signe du
lacet, ventouse de Lavollay, angiosterrométrie de Parrot et diffusion de colorants.
Le mécanisme d’action n’est pas clairement établi. Cependant certains travaux font état de la
protection des parois vasculaires par inhibition des enzymes protéolytiques que sont l'élastase, la
trypsine et la -chymotrypsine.

Pharmacognosie 2021 57-163


Acétates 3 Malonates
Chalcone
synthétase acide p.coumarique

OH
O
CO 2 H

O O

OH
OH
HO OH HO
O

Chalcone-isomerase
OH O Flavanone
Chalcone OH O

Flavones

Flavonols O

Anthocyanes OH

O Dihydro-flavonol

BIOSYNTHESE DES FLAVONOÏDES

Pharmacognosie 2021 58-163


OH OH OH

OH OH
HO O
HO O HO O

O OH
HO
HO O Lutéoline HO O Quercétol
Apigénine
(Vitexine du kinkéliba)

OH
HO
HO O O
OMe HO

HO O
OH
HO O OH HO O
Génistéine Kaempférol
HO O
Hespérétol (agrumes)

OH
OH HO O

HO OH

O Liquiritigénine
(réglisse)
O Isoliquiritigénine
HO

OH
HO O
CH

HO O

Aureusidine

Pharmacognosie 2021 59-163


OH OH

OH Glu Rh O CH3
(1 6)
HO O O O

O Glu Rh
(1 6) OH O
OH O
Rutoside Hespéridine

Glu OH
Rh
(1 2)
O O OH

Glu Rh OCH3
(1 2)
O O O
OH OH
Naringoside
OH
HO O OH O
Diosmine
Glu

OH O

Lespecapitoside
(homoorientine) OH
OH

HO O HO O

HO H3CO OCH3

OH O OH O

Baïcalein Axillarine
(5,6,7- trihydroxy- flavone ) (5,7,3',4'- 3,6 tetra hydroxy-3,6-dimethoxy flavone)

Pharmacognosie 2021 60-163


c) Nouvelles données sur l'activité pharmacologique des flavonoïdes
Ces propriétés ont été découvertes notamment lors des études effectuées sur les plantes des
pharmacopées traditionnelles à travers le monde. Ces propriétés furent attribuées à la présence de
flavonoïdes. Les principaux effets sont les suivants :

- Action antiinflammatoire
On a établi que l'hypolaetine--glucoside (de Sideritis mugronensis Lamiaceae) d’une part et
d’autre part la baïcalein, la vogomine (de Scutellaria baïcalensis Labiateae) ont une activité
antiinflammatoire sur l'animal. Le mécanisme d’action évoqué est l'inhibition de la synthèse des
prostaglandines par l'inhibition de la cyclo-oxygénase et de la lipo-oxygénase.

- Effets sur les fonctions plaquettaires


Les flavonoïdes diminuent l'adhésion plaquettaire induite par le collagène et d’autres
macromolécules extracellulaires. Les dérivés les moins polaires sont les plus actifs.
Par ailleurs, les flavonoïdes inhibent l'agrégation plaquettaire dans des plasmas riches en
protéines (PRP) ou sur des plaquettes isolées. Les glucosides sont moins actifs que les aglycones
correspondants et la présence d’une double liaison en C1-C2 est indispensable.
Le mode d’action sur l'agrégation plaquettaire s’explique par l'inhibition de l'AMPC
phosphodiestérase qui entraîne une diminution du calcium cytoplasmique.
Quand on sait que l'agrégation des plaquettes joue un rôle important dans l'initiation de la thrombose
et le développement de l'athérosclérose, on peut dire que les flavonoïdes pourraient constituer une
nouvelle approche thérapeutique de ces maladies vasculaires. Axillarine, baïcaleine sont les plus actifs.

- Action sur les complications diabétiques


Les flavonoïdes se sont révélés les meilleurs inhibiteurs naturels de l'aldose réductase. Cet
enzyme assure la conversion du D-glucose en sorbitol qui, en s’accumulant, provoque des
complications dégénératives tels que : cataractes, neuropathies périphériques, microangiopathies
rénales et rétiniennes. A ce propos l'axillarine ( 5,7,3’, 4’ tétra-OH-3,6-diméthoxyflavone) est le plus
intéressant.

- Autres activités
De nombreux travaux ont relevé chez les flavonoïdes des activités variées : antihistaminique,
anticancéreuse (controversée) par mécanismes divers (Arylhydrolase, époxyhydrolase ou Captage des

Pharmacognosie 2021 61-163


radicaux libres); action antifongique, antibactérienne, antivirale, antigoutteuse (inhibition de la
xanthine-oxydase qui catalyse la synthèse de l'acide urique).

7) CARACTERISATION ET DOSAGE DES FLAVONOIDES

CARACTERISATION
La réaction colorée la plus spécifique est celle dite de Shibata : les hétérosides flavoniques, en
solution alcoolique, mis en présence d’hydrogène naissant, donnent des dérivés diversement colorés
selon la structure du flavonoïde : orangés (flavones), rouges (flavonols) et rouge violacé (flavanones).

Par ailleurs on peut noter que la couleur jaune des flavonoïdes s’accentue en milieu alcalin.
L'identification est faite par CCM en présence de témoins. On révèle directement sous UV ou
après pulvérisation d'une solution de chlorure d’aluminium.

DOSAGE
- Le dosage physico-chimique : ce dosage peut s'effectuer par colorimétrie après
formation de chélates d’aluminium (méthode de Duret et Paris), par HPLC (dosage d’un flavonoïde
particulier), densitométrie après CCM d’un extrait.

- Le dosage biologique
Il consiste à mesurer l'activité vitaminique P par l'appréciation de la résistance des capillaires
(retard dans l'apparition des pétéchies provoquées par une ventouse) et par la mesure de la
perméabilité capillaire (ralentissement de la diffusion d’un colorant).

8) PRINCIPAUX FLAVONOÏDES ET LEURS EMPLOIS

Anciennement employés comme colorants (exemple du genêt des teintures), un certain


nombre de drogues à flavonoïdes sont utilisées aujourd’hui soit en nature soit pour l'extraction des
flavonoïdes.
a) Flavonoïdes purifiés

Le rutoside
Le rutoside est extrait industriellement à partir de différentes espèces :

- Polygonum fagopyrum, Polygonaceae (sarrasin) : feuilles.

Pharmacognosie 2021 62-163


- Eucalyptus macrorrhyncha, Myrtaceae : feuilles (originaire d’Australie).
- Sophora japonica, Papilionaceae : boutons floraux (originaire d’Asie).

Le rutoside est utilisé comme protecteur capillaire, dans un grand nombre de spécialités. Il
existe également de très nombreux dérivés hémisythétiques hydrosolubles : Morpholine-ethylrutoside,
hydroxyéthyl rutoside entre autres.

Spécialités : RutineND, SolurutineND (Morpholinoéthylrutoside), RelvèneND (hydroxy-


ethylrutoside). Association avec d’autres médicaments : ErcevitND EsberivenND.

Les citroflavonoïdes ou bioflavonoïdes


Ce sont des flavonoïdes extraits de divers citrus. Ils sont utilisés sous forme d’extraits totaux
purifiés ou alors sous forme de flavonoïdes isolés.
La plupart des citroflavonoïdes sont des flavanones, les principaux étant l'hespéridoside et le
naringoside. Les bioflavonoïdes sont des sous-produits de l'industrie des jus de fruits obtenus à partir
des espèces comme le bigaradier (Citrus aurantium var amara), l'oranger doux : (C. aurantium var
dulcis) et le citronier (Citrus limonum).

Les citroflavonoïdes sont utilisés dans le traitement de la fragilité capillaire.


Les spécialités sont très nombreuses : ErcevitND, DaflonND, cyclorelND, CitroflavononoïdesND.
L'hespéridoside (= hespéridine) est utilisé sous forme de dérivés : l'hespéridine méthylchalcone
(Cyclo3ND, CépévitND) et l'hespéridine diétylamino-éthyle. On a par ailleurs mis en évidence des
propriétés sédatives et hypotensives chez des citroflavonoïdes du péricarpe du fruit de l’oranger doux,
propriétés qui ne sont pas encore exploitées (Agric. Biol. Chem., 1986, 50(3), 781-783).

La diosmine ou diosmoside
On la rencontre dans les feuilles de Buchu (Borosma divers, Rutacées), dans les Menthes et
l'Hysope. Elle est industriellement obtenue à partir de l'hespéridoside. La diosmine est utilisée pour
son action vitaminique P ( DaflonND, DiovenorND).

b) Extraits de plantes à flavonoïdes


Ginkgo biloba, Ginkgoaceae (Japon et Corée du Sud).
Les principes actifs des feuilles (utilisées vertes) sont la ginkgétine et l'isoginkgétine.

Pharmacognosie 2021 63-163


L'extrait de Ginkgo est indiqué dans les affections veineuses et les œdèmes (Ginkor ND,
TanakanND).

Sarothamnus scoparius ou genêt à balai, Légumineuse (rameaux et sommités fleuries)


. Le principe actif est le scoparoside. Le genêt a une action diurétique et est utilisé sous
forme de tisane. Le genêt sert également à extraire la sparteine (alcaloïde ganglioplégique et stimulant
cardiaque).

Lespedeza capitata, Légumineuse (tiges feuillées)


La plante est active par le lespécapitoside ou homoorientine. L'extrait est diurétique et
antiurémique (LespénéphrylND).

Combretum micranthum, Combretaceae


Les feuilles sont riches en flavonoïdes dont la vitexine, l'isovitexine, l'orientine et
l'homoorientine. L'action est cholagogue et diurétique.

9) CONCLUSION

Les flavonoïdes constituent un groupe chimique homogène, très répandu dans les végétaux.
A cause de leurs grandes affinités chimiques, ils possèdent de nombreuses propriétés
pharmacologiques dont la plus exploitée est l'activité vitaminique P, utilisée dans le traitement des
affections veineuses.
Bien que les études soient à leurs débuts, les flavonoïdes constituent un espoir dans le
traitement des maladies vasculaires outre que la fragilité et aussi contre d’autres maladies telles que le
cancer, le diabète, les viroses, …etc.

Pharmacognosie 2021 64-163


PLANTES A TANINS

INTRODUCTION

Les tanins doivent leur nom à leur propriété de tanner la peau des animaux pour en faire du
cuir. Pour cet usage, les tanins sont concurrencés par des sels métalliques. Cependant ils demeurent
toujours utilisés.
Leurs propriétés astringentes expliquent l'utilisation très ancienne de certaines plantes à tanins
en thérapeutique.

I. DEFINITIONS DES TANINS

Ce sont des composés phénoliques de structures variées, ayant en commun la propriété de


précipiter les alcaloïdes, la gélatine et les protéines. Ils sont le plus souvent polymérisés, donnant des
molécules de poids moléculaire allant de 500 à 3000.
Cette taille est nécessaires pour conférer au tanin la propriété de tanner la peau des animaux.
En effet la molécule de tanin s'intercale entre les fibres de collagène de la peau et y établit des liaisons
solides rendant ainsi la peau imputrescible.

II. STRUCTURE ET CLASSIFICATION

Les tanins polymères ou oligomères ont un poids moléculaires compris entre 500 et 3000.
Du point de vue structural, il convient de distinguer deux classes :

1) Les tanins hydrolysables


On les appelle tannoïdes. Ils appartiennent à la grande famille des hétérosides. Ce sont des
polyesters de glucides et d’acide gallique et de ses dérivés.
Par hydrolyse acide ou enzymatique (tannase), on les scinde en oses et en acides phénols.
Les Oses trouvés dans ces tanins sont surtout représentés par le glucose. On trouve rarement
des oses acylés, comme dans les tanins de la rhubarbe.

2) Les tanins non hydrolysables ou tanins vrais ou tanins condensés


Ils sont parfois classés parmi les flavonoïdes au sens large, car de structure voisine. Par
ailleurs ils ne renferment pas de sucre dans leur molécule. Ils ont tendance à se polymériser pour
donner des produits rouges insolubles, nommés phlobaphènes (exemple : rouge de cola). Ce sont des
dérivés du flavane.

Pharmacognosie 2021 65-163


COOH
COOH COOH

OH
HO OH
HO OH OH
OH HO
OH COOH
OH
acide gallique acide digallique
HO OH
OH
COOH Acide quinique
O
HO O
OH
HO Acide caféique
HO OH
O
O
OH
acide ellagique
OH OH

OH OH
HO O HO O

OH OH
OH OH
(-) = épicatéchol
(+) catéchol

R1

OH

HO O
R2

OH
OH OH

procyanidol (R1 = OH, R2 = H)


prodelphinidol (R1 = R2 = OH)
propelargonidol (R1 = Ré = H)

Pharmacognosie 2021 66-163


La structure des tanins condensés a fait l'objet de beaucoup de controverses. On a d'abord
considéré l'existence de deux catégories dont les monomères respectifs sont la catéchine (sous forme
d'épicatéchol ou de catéchol) d'une part, d'autre part le flavane-diol -3-4 encore appelé leuco-
anthocynidol ou proanthocyanidol. En réalité, si l'on a pu isoler la catéchine, par contre le flavane-diol
3-4 n'a jamais pu l'être à cause de sa très grande instabilité (il est sûrement un produit intermédiaire !).
L'hypothèse de son existence a été formulée grâce à la réaction de Bate-Smith : l'aromatisation du
cycle pyranne provoquée par HCl dilué à chaud et conduisant à des dérivés anthocyniques, s'est
expliquée par l'existence de deux OH en 3 et 4 (structure proanthocyanique). Or, la réaction de Bate-
Smith est positive avec les dimères flavanoliques; ce qui pourrait s'explique par la formation de
flavane-diol 3,4 au cours de la réaction.

En définitive, les tanins non hydrolysables sont formés d'oligomères flavanolique dont l'unité
terminale peut être un flavane-diol 3,4 (proanthocyanidol) ou un flavanol 3 (catéchine).
Le poids moléculaire variant entre 500 et 3000, correspond à des polymères comptant 2 à 10
unités flavane .

III. BIOGENESE DES TANINS


La biosynthèse de l'acide gallique et de ses dérivés se fait principalement par la voie de l'acide
shikimique et secondairement par la voie de la  oxydation de l'acide tri-hydroxycinnamique. (voir
biogenèse des compsés aromatiques des huiles essentielles)
La biosynthèse des flavanes est identique à celles des flavonoïdes.

IV. PROPRIETES PHYSICOCHIMIQUES

a) Solubilité
Les tanins sont des corps généralement amorphes, solubles dans l’eau, dans l’alcool et
l’acétone, insoluble dans les solvants organiques apolaires. On les extrait par des mélanges
hydroalcooliques additionnés ou non d’éther ou
d’acétone. Le tanin à l'éther, figurant à la pharmacopée française, est préparé par extraction des galles
du chêne avec le mélange éther-eau-alcool.

Pharmacognosie 2021 67-163


Pharmacognosie 2021 68-163
b) Réactions de précipitation : Les tanins précipitent avec :
- les sels métaux lourds Fe, Pb, Zn, Cu et le Molybdaté d'ammonium,

- les protéines : responsable du tannage, des propriétés astringentes et antidiarrhéiques

- les alcaloïdes : les combinaisons tanniques expliquent les effets retard de la caféine
de la noix de cola et du thé.

c) Réactions colorées
- Avec FeCl3 : bleu-noir (tanins galliques), brun-vert (tanins catéchiques)
- Acide phosphotungstique : coloration bleu avec gallique

V. CARACTERISATION ET DOSAGE

- La réaction la plus utilisée pour la mise en évidence des tanins dans un extrait ou sur une
plaque de chromatographie est la coloration avec FeCl3.
- On différencie les deux groupes de tanins par addition du réactif de Stiasny (formol
chlorhydrique) qui précipite seulement les tanins condensés par polymérisation).

- L'hydrolyse acide des tanins hydrolysables libère de l'acide gallique ou de l'acide


hexahydroxydiphénique qui se lactonise en acide ellagique . L'hydrolyse des tanins catéchiques donne
des dérivés anthocyaniques (réaction de Bate-Smith).

2) Dosage
a) Dosage pondéral
Il utilise soit la poudre de peaux standardisées, soit la caséine : Un volume donné est prélevé
d'un extrait aqueux de drogue. On y ajoute une quantité determinée de poudre de peaux ou de
caseine. Après agitation, le filtrat est séché à l'étuve puis le résidu pesé. Une prise d'essai
identique et non traitée à la peau est séchée dans les mêmes conditions. La différence de poids
des deux résidus correspond aux tanins fixés par la poudre de peaux.

b) Colorimétrie
L'acide phosphotungstique donne avec les tanins une coloration bleu que l'on mesure à 750nm.

VI. ACTION PHYSIOLOGIQUE DES TANINS

Par leur propriété de précipiter les protéines du collagènes et de se combiner aux alcaloïdes,
les tanins sont utilisés comme :

Pharmacognosie 2021 69-163


- antidiarrhéiques : diminution de la perméabilité de la muqueuse intestinale
- hémostatiques : cautérisation des petits vaisseaux sanguins
Les tanins sont utilisés comme antipoison dans les intoxications aux métaux lourds.
En outre, on a montré que les oligomères flavanoliques sont de puissants facteurs vitaminiques
P (vitamine C2).
Ce sont des inhibiteurs enzymatiques de la hyaluronidase et de la catéchol O-methyl
transférase.

ACTION ANTIINFLAMMATOIRE ET AUTRES

Les oligomères flavanoliques auraient une activité anti-élastase (extrait du pancréas de porc) :
ceci entraînerait une diminution de la libération de peptides vaso-actifs et une diminution par
conséquent de la libération des prostaglandines inductrices de l'élastase et des autres protéases.
Par ailleurs ces oligomères diminuent le taux de cholestérol et préviendraient l'athéromatose.

Les tanins de Acacia nilotica ( nep-nep) ont montré une action molluscicide.

VII. EMPLOIS DES TANINS

En pharmacie, les proprié tés des tanins sont exploitées à travers des extraits de plantes qui les
renferment. Dans l'industrie du tannage, on utilise des extraits de plants plus ou moins purifiés.

A) DROGUES A TANINS A USAGE PHARMACEUTIQUE

1) Rosa gallica : Rose-rouge : les pétales sont utilisées comme astringent en


gargarisme ou en collutoire. La lotion est utilisées en cosmétologie.

2) Hamamelis virginiana : c'est un petit arbre du Canada et des USA. La drogue est
constituées par les feuilles et les écorces de tronc; elle renferme des acides phénols, des dérivés
flavaniques polymérisés, un tannin gallique non tannant (dans les écorces), du gallates de flavane diol
3-4.
Teintures et extraits de cette plante sont prescrits dans les hémorroïdes et les phlébites (
ampamelisND). Le plus gros usage de l'hamamélis est en cosmétologie.

Pharmacognosie 2021 70-163


3) Le Ratahnia : krameria triandra ( Krameriaceae): sous-arbrisseau du Pérou et du
Chili. La drogue est constituée par les racines qui renferment 20% de tanins catéchiques. Le ratahnia
est utilisé en teinture et extrait sec comme antidiarrheique ou antihémorroïdaire (suppositoire et
pommade).

4) Autres plantes : Areca catechu (palmier); Acacia catechu (Mimosaceae) qui donne
le cachou noir tiré du bois (tanins condensés et flavanol 3); Pinus pinaster (écorces à
proanthocyanidols). Arachis hypogea (la graine renferme des flavane-diol); Combretum micranthum;
Cola nitida; Psidium guajava; le quinquinas.

B) PLANTES SOURCES DE TANINS INDUSTRIELS

Ces tanins servent essentiellement au tannage des peaux pour les transformer en cuir.
- Chêne de galle : Quercus lusitania var. infectoria (sert à préparer le tanin à l'éther)
- Cachou : Acacia catechu (cosmétologie, alimentaire)
- Châtaignier : Castanea vulgaris (Fagaceae): écorces et feuilles
- Sumac : Rhus typhina (Anacardiaceae (feuilles)
- Quebracho : Schinopsis lorentzii et S. balansae (Anacardiaceae)
- Acacia nilotica : utilisé en Afrique dans le tannage artisanal.

Les tanins jouent un rôle important dans le murissement du vin de raisin, lors de sa conservation dans
des fûts en bois de chaine par exemple.

Pharmacognosie 2021 71-163


OH
H H HO
HO COOH
COOH
HO COO
O OR1
HO H
H OH R3O
OR2
acide cafeyl-quinique
(Thea sinensis) R = galloyl (esters) ou H
(Caesalpinia spinosa)

OH
OH

HO O OH
O
.
O
OH OH
HO OH
O
O R
.
O .
n
OH OH
OH OH
. O
. HO O R
O

OH
polymère de proanthocyanidols
OH OH

Pharmacognosie 2021 72-163


PLANTES A HETEROSIDES ANTHRACENIQUES

Les hétérosides anthracéniques sont des substances de structures homogènes dérivées de


l'anthracène. Les plantes qui les renferment sont utilisées comme laxatif ou purgatif, propriétés dues à
la présence de ces hétérosides. On trouve ces plantes un peu partout dans le monde ; parmi les plus
connues on peut citer le séné (Afrique), la bourdaine et le nerprun (Europe), la rhubarbe (Chine), le
cascara (USA).
Leur production mondiale et leur consommation sont très fortes.

A) GENERALITES SUR LES HETERODES ANTHRACENIQUES

1) DEFINITION ET STRUCTURE

Les hétérosides anthracéniques sont des substances phénoliques dérivées de l'anthracène à


divers stades d’oxydation (anthranol, anthrone et anthraquinone); ils existent dans la plante sous des
formes libres (génines) ou sous des formes combinées (hétérosides).

HO HO HO HO O HO

Anthranol Anthrone
HO O HO

O Anthraquinone

Pharmacognosie 2021 73-163


a) Les génines
Le noyau anthracénique porte des substituants constants :
- 2OH phénoliques en 1 et 8
- 1 substituant carboné en 3.

Les substituants éventuels sont un OH ou OCH3 en 6. On va ainsi distinguer différents types


de génines dont les principaux sont : le chrysophanol, l'aloe-émodol, la rheine, l'émodol et le physcion.
Dans des conditions oxydantes particulières, les anthrones peuvent se combiner pour donner des
dianthrones ; selon que les anthrones sont de même nature ou de natures différentes on aura
respectivement des homodianthrones (sennidiennes A et B du séné) ou des hétérodianthrones
(sennidines C et D).

b) Les hétérosides ou anthracénosides


Les génines sont liés en 6 et en 8 (rarement en 1) à un ou plusieurs oses. Selon la nature de la
liaison on aura des O- ou des C-hétérosides (conférer flavonoïdes).
Il y a des différences notables de composition entre les plantes fraîches et les drogues séchées.
Dans le végétal frais, les principes anthracéniques sont majoritairement sous forme d’hétérosides
d’anthrones monomères. Au cours de la dessiccation, deux processus de transformation entrent en jeu :
- L'oxydation qui donne des hétérosides anthraquinoniques (le glucofrangularoside conduit au
glucofranguloside).
- Des dimérisations : dans le cas du Séné, il a été démontré que la dimérisation est une réaction
enzymatique qui ne s’observe que si le séchage est effectué à température modérée (40°C) ; à 100°C il
n’y a pas de dimérisation.

2) BIOGENESE
Les génines anthracéniques résultent de la cyclisation d’une chaîne octo-acétate

HO
O

O O O OH
COOH
O O O HO O

Octaacetate
HO O HO

HO
O
Emodine
Pharmacognosie 2021 74-163
3) PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES

L'activité est modulée suivant la dose ; des doses les plus faibles aux doses les plus fortes on a
respectivement une action cholagogue, laxative ou purgative.
L'activité est liée également à la structure et à la forme sous laquelle se trouvent les principes
actifs :
- les formes combinées sont plus actives que les génines. L'action purgative résulte de
leur hydrolyse au niveau de l'intestin ; les sucres sont indispensables à leur transport et retardent
l'absorption des génines.
- les formes réduites libres ou combinées sont plus actives et parfois ne peuvent être
utilisées en thérapeutique à cause leur action drastique (ex : Bourdaine voir plus loin). Les génines
anthraquinoniques sont donc les moins actifs.

Métabolisme intestinal
Les génines libres sont absorbés au niveau du grêle ; à cause de leurs effets indésirables, leur
présence n’est pas souhaitée dans les préparations médicamenteuses.
Les hétérosides ne sont ni absorbés, ni hydrolysés au niveau de l'intestin grêle. Parvenus au niveau du
colon, ils sont hydrolysés par les glucosidases de la flore intestinale, les anthraquinones sont réduites
en même temps en anthrones et anthranols. Ces dérivés actifs se forment en situ et cela explique le
temps de latence important observé (6 à 12 heures) entre la prise de la drogue et l'effet recherché.

Mécanisme d’action
Les anthracéniques diminuent la résorption de l'eau, du sodium et du chlore au niveau du
colon. L'un des mécanismes évoqué est l'inhibition du système Na+,K+ ATPasique des entérocytes.
Par ailleurs, ils provoquent une augmentation du péristaltisme intestinal en excitant les terminaisons
nerveuses locales du système nerveux central. On observe également une altération de la muqueuse
intestinale qui est irritée.

Toxicité
L'abus des dérivés anthracéniques provoque de la diarrhée et de l'hypokaliémie ainsi qu’une
mélanose colique caractéristique mais non dangereuse (pigmentation noirâtre de la muqueuse du
colon).

Pharmacognosie 2021 75-163


HO O HO HO HO OH

CH3 CH2 OH

O O
Aloe-émodine
Chrysophanol

HO HO
O
HO O HO

COOH
CH3
HO O
O
Rheine
Emodine
HO O HO

CH3
H3 CO
O
Physcion

Glu O O HO Glu O O HO

COOH COOH
H H H H
COOH CH2 OH

OH O O OH
Glu O O Glu

Sennidines A et B
Sennidines C et D

Pharmacognosie 2021 76-163


4) PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES, CARACTERISATION ET DOSAGE

a) Propriétés physico-chimiques
Les génines sont insolubles dans l'eau, solubles dans les solvants organiques. Les génines
carboxyliques sont extractibles par une solution aqueuse de bicarbonate de sodium. Les hétérosides
sont hydrosolubles et solubles également dans les solutions hydro-alcooliques.
Le traitement acide des O-hétérosides provoque une hydrolyse mais pour les
C-hétérosides, celle-ci ne peut être obtenue qu’en présence d’un oxydant comme FeCl3.

b) Caractérisation
La caractéisation des dérivés anthracéniques se fait le plus souvent au moyen de réactions
colorées. La plus connue est celle de Bornträger qui est positive uniquement avec les formes
anthraquinoniques libres. Celles-ci en présence de KOH donnent une coloration rouge. La
caractérisation comportera donc une hydrolyse et une oxydation.

- La réaction à l'acétate de magnésium est utilisée de façon courante pour caractériser


les 1,8-dihydroxy-anthraquinones. La coloration rouge obtenue est plus stable et plus intense (formes
libres et oxydées uniquement) ; c’est pourquoi, pour le dosage, cette réaction est préférée à celle
utilisant la potasse.

- Les anthrones sont caractérisés par le p-nitroso-diméthyl-aniline qui donne forme


des dérivés colorés (azométhine) en gris-bleu.
- Les hétérosides anthroniques en présence de borate de sodium donnent une
fluorescence verte caractéristique (réaction de Schouteten).

L'identification des hétérosides ou des génines se fait par des méthodes chromatographiques :
CCM (révélation par réaction de Bornträger), HPLC, etc..

c) Le dosage
Le dosage est surtout physico-chimique ; il peut cependant être physilogique.

Dosage physico-chimique
Il est basé sur la réaction à l'acétate de magnésium. Certains préfèrent cette dernière car celle
de Bornträger se développe lentement, diminue sous l'influence de la lumière et est perturbée par la
présence des formes réduites.
Les pharmacopées prescrivent de doser les seules formes combinées, les formes libres étant à
exclure car inactives 5 voir schéma).

Pharmacognosie 2021 77-163


Méthodes physiologiques
- Méthode de Fairbairn : détermination de la dose qui fait apparaître chez la souris des selles
molles ou fluides capables de tacher un papier-filtre ; comparaison avec une substance étalon.
- Méthode de Loewe : mesure de la durée du transit intestinal par incorporation dans le bol
d’un colorant (carmin).

Généralement on se contente du dosage physico-chimique (voir schéma suivant).

Pharmacognosie 2021 78-163


POUDRE DE DROGUE
-
Eau (infusion)

EXTRAIT AQUEUX

CHCl3
(HCl)

Phase chloroformique PHASE AQUEUSE

Oxydation (FeCl3)

Hydrolyse (HCl)

HYDROLYSAT
Aqueux

Ether

PHASE ETHEREE
Phase aqueuse
Evaporation
Magnésium acétate 0,5% dans MeOH

SOLUTION METHANOL
Lire au spectrocolorimétrie à 515 nm et
Faire une gamme étalon

DOSAGE DES HETEROSIDES ANTHRACENIQUES DES SENES

Pharmacognosie 2021 79-163


5) EMPLOIS

La consommation des dérivés anthracéniques est très importante, car la constipation est une
affection très répandue. Elle est très souvent due à un régime alimentaire non équilibré.
Dans certaines pharmacopées traditionnelles, les plantes laxatives sont largement prescrites
(conception particulière de la maladie).
Les drogues sont utilisées en nature (tisanes), sous forme de préparation galénique (poudres,
extraits) ou pour l'extraction des anthracénosides purs. Les plantes les plus utilisées sont : le Séné ou
Cassia angustifolia (gousses et folioles), la Bourdaine ou Rhamnus frangula (écorces), le Cascara ou
Rhamnus purshiana (écorces, tige), les aloès ou Aloe sp. (suc épaissi), la Rhubarbe ou Rheum
officinale (racine-rhizome).

6) CONCLUSION

Comme nous venons de le voir, les hétérosides anthracéniques servent tous au même emploi :
accélération du transit intestinal, qui est modulé suivant la dose administrée. Ils servent à combattre la
constipation, aussi sont-ils très souvent utilisés en automédication. Cet automédication comporte un
danger : l'abus et l'habitude. Il faudrait pour remédier à cela insister sur la nécessité d’avoir une
alimentation équilibrée : pas trop de féculents, présence de fibres alimentaires par exemple.
Par ailleurs ces anthracénosides sont à éviter en cas de grossesse, car il y a un risque de
passage transplacentaire des génines.

Pharmacognosie 2021 80-163


B) MONOGRAPHIE

Les plantes à anthracénosides constituent un groupe très important en pharmacognosie. Leur


répartition géographique est très large : France (Bourdaine, Nerprun), USA (Cascara), Chine
(Rhubarbe), Inde et Afrique (Sénés).

1) LES SENES ( Légumineuses-Cesalpiniaceae)

Trois espèces sont inscrites à la Pharmacopée africaine : Cassia acutifolia Del. ou Séné
d’Alexandrie ou de Khartoum ; Cassia angustifoliaVahl. ou Séné de l'Inde ou de Tinnevelly. Cassia
italica Mill. ou séné du Sénégal. On utilise folioles et fruits mûrs séchés.

a) Botanique
Les Sénés sont des sous-arbrisseaux des régions sèches d’Asie et d’Afrique. La tige ligneuse et
dressée porte des feuilles composées paripennées ; les fleurs jaunes, sont de type 5. Le fruit est une
gousse déhiscente à deux valves.

b) Caractères de la drogue
- macroscopiques : certains caractères permettent de distinguer les drogues des deux espèces :
taille des fruits, des folioles…

- microscopiques : une coupe transversale des folioles montre :


• un limbe à mésophylle symétrique et un tissu palissadique continu au niveau de la
face supérieure.

• un arc libéro-ligneux peu marqué avec un péricycle à fibres sclérifiées comportant


des cristaux d’oxalate de calcium.

• poils tecteurs unicellulaires arqués, renflés à la base, à parois épaisses et


verruqueuses.
Fibres sclérifiées et poils tecteurs sont les éléments caractéristiques de la poudre de feuille.
La poudre de fruits contient les mêmes éléments mais en moindre importance.

Falsifications : C. auriculata et la globulaire. Ces falsifications sont levées grâce à des


examens botaniques e physico-chimiques.

Pharmacognosie 2021 81-163


c) Utilisations traditionnelles

Appelations en langues locales :

- Pular : faladièn
- Wolof : laïdur
- Sérère : laidur

Les feuilles (et à défaut les racines ou les écorces quand, pendant la saison sèche, l'arbrisseau est
défeuillé), sont couramment utilisées comme purgatif proprement dit et purgatif de dérivation d'où
découlent les principales indications : constipations, helminthiases, affections hépato-biliaires, maladies
vénériennes.

d) Chimie
Les drogues renferment 2-4% de dérivés anthracéniques constitués par :
- des formes libres en faible proportion : rheine, aloeémodol, chrysophanol.
- des formes combinées (80-90%) représentées par des dimères d’homodianthrone
(sennidines A et B) et d’hétérodianthrones (sennidines C et D).
Sennidines A e B, stéréo-isomères par les carbones 10-10’, sont des diglucosides (8-8’) de
dirhéine-anthrones (deux rheines sous forme anthronique). Les sennidines C et D sont des diglucosides
(8-8’) de rhéine-anthrone et d’aloeémodol-anthrone (également stéréoisomères en 10-10’). Les
sennidines A et B représentent 50% des hétérosides des folioles ; ils se retrouvent très peu dans les
gousses.
Par ailleurs, on trouve 10 à 15% de 0-glucosides d’anthraquinones (rhéine et aloeémodol) et
certains auteurs signalent la présence de glucosides primaires A et B.
Il est admis aujourd’hui qu’il n’existe dans la plante que des monoglucides d’anthrones et une
faible proportion d’anthrones libres. C’est au cours du séchage que se forment, par réaction
enzymatique (entre 20°C et 40°C), les sennosides dimères et des glucosides d’anthraquinone.

e) Essais
- Botanique : recherche de falsification.
- Physico-chimiques
• Réaction à l’acétate de magnesium
• Recherche de proanthocyanidols pour détecter la falsification par Cassia auriculata :
extrait alcoolique +H2SO4 ne doit pas donner une coloration rouge.

Pharmacognosie 2021 82-163


• CCM en présence de témoins sennosides A et B.
• Dosage des hétérosides anthracéniques.
- Physiologique : le protocole décrit précédemment peut être appliqué dans ce cas particulier
des Sénés, car les animaux sont très sensibles à ses hétérosides (voir généralités).

f) Action et emplois
L'activité est laxative à une certaine dose. Elle s’exerce sur le côlon 10 à 12 heures après
ingestion (l'action est beaucoup plus rapide en lavement). Les Sénés sont actuellement les purgatifs les
plus utilisés :
- Sous forme galénique : poudre, infusé, sirop, lavement.
- En spécialités :
• Seuls : SennokotND (poudre de fruit sans graines), PursenideND (sennosides
A et B purs)
• Associés à d’autres drogues purgatives : TamarineND.

REMARQUE
La croyance répandue faisant état de l'existence d’une résine toxique que l'on extrait par
lavage à l'alcool est sans fondement. (Plant. Med. Phytothér., 1985, XIX, n°1, 57-61).

2) LA BOURDAINE : Rhamnus frangula L., Rhamnaceae.

Les écorces desséchées de la tige et des branches sont inscrites à la Pharmacopée africaine
1985.

a) Botanique
C’est un arbuste originaire d’Europe, commun en France, surtout sur les terrains frais et
humides. Les feuilles sont elliptiques, alternes, entières. Les fleurs de type 5, blanc-rosé ou verdâtre,
sont groupées à l'aisselle des feuilles. L'écorce est lisse, brun-rougeâtre avec de petites taches grisâtres
(appelées lenticelles). Ces écorces sont récoltées au moment de la floraison.

b) Caractères de la drogue
La surface externe brunâtre parsemée de lenticelles (taches brunâtres) ; surface interne brun-
orangé lisse, avec des stries longitudinales.

Pharmacognosie 2021 83-163


L'odeur est faible, la saveur amère et astringente. La falsification peut se faire avec Rhamnus divers, le
saule, le chêne…
c) Chimie
Les principes actifs sont des dérivés anthracéniques (10% du poids sec) constitués par :
- Formes libres peu abondantes : émodol, chrysophanol.
- Formes combinées :
• Hétérosides d’anthraquinone : Glucofrangulosides A et B (70%),
Frangulosides A et B correspondant aux glucofrangulosides A et B après perte du
glucose en 8.

• Hétérosides d’anthrones et d’anthranols qui sont abondants dans la drogue


fraîche seulement : glucofrangularosides, frangularosides, homodianthrones
(d'émodol), hétérodianthrones (comme les palmidines)

d) Essais
- Botaniques
- Physicochimiques
• Réaction à l’acétate de magnésium
• CCM avec des témoins.
L'on vérifie l'absence d’anthrones par la réaction à la nitrosodiméthyl-aniline (pas de
coloration gris-bleu). La tache rouge la plus importante, obtenue avec la potasse, est le
glucofranguloside.

- Dosage des glucofrangulosides (Pharm. fr. IXèd.) : On procède de la même façon que pour le
Séné ; ici on élimine les hétérosides secondaires (franguloside) en même temps que les génines (extrait
à l'éther) : minimum 6% de glucofrangulosides A et B anhydres.

e) Action physiologique et emplois de la boudaine


La drogue fraîche a une action violente due à la présence d’anthrones ; elle ne peut être utilisée
qu’après conservation d’un an ou un séchage convenable. La bourdaine est actuellement très utilisée
en France sous forme de poudre et d'extrait fluide dans des spécialités comme MucinumND, IdeolaxND,
VegelaxND.

Pharmacognosie 2021 84-163


3) AUTRES RHAMNACEES PURGATIVES

a) Le Cascara : Rhamnus purshiana DC


C’est un arbre originaire de l'Ouest des Etats-Unis, cultivé en Afrique orientale. Les écorces de
tiges sont récoltées, séchées, puis gardées un an avant leur emploi.

Chimie : 10-12% des dérivés anthracéniques représentés par des formes libres
(émodol, aloeémodol, chrysophanol) et des C-hétérosides principalement représentés par les
cascarosides.

Essais :
- Mise en évidence des O-hétérosides, des C-hétérosides (hydrolyse oxydante).
- Dosage des cascarosides : minimum 8% d’anthracénosides dont 60% de
cascarosides.

Action et emploi : l'action est voisine de celle de la bourdaine, mais plus irritante à
cause des C-hétérosides. Le cascara est surtout employé aux USA. En France on en trouve
dans : dragées FucaND,
grains de ValND, péristaltineND.

b) Le Nerprun : Rhamnus cathartica


Les fruits de cet arbrisseau sont de petites drupes, noires à maturité. Ils renferment
des flavonoïdes et une faible quantité d’hétérosides anthraquinoniques.
L'action du nerprun est plus douce que celle de la bourdaine.

4) LES ALOES (Liliaceae)

La drogue est fournie par le suc séché des feuilles de l'Aloès du Cap (Aloe ferox
Miller) et de ses hybrides d’une part et d’autre part de l'Aloès des Barbades A. vera L. . Ils figurent
tous à la Pharmacopée africaine 1985.

a) Botanique

Pharmacognosie 2021 85-163


Les Aloès sont des plantes poussant dans les régions désertiques. Ils possèdent un tronc
ligneux portant au sommet une touffe de feuilles grandes, charnues, cireuses et épineuses sur les bords.
Les inflorescences sont des épis de fleurs jaunes ou rouges.
b) La drogue
Elle diffère selon l'origine géographique et le mode de préparation :
- Aloès du Cap : il est récolté sur des plantes sauvages, le suc est concentré par
chauffage à ébullition. Il se présente en masses brun-foncé à reflets verdâtres et à cassures
brillantes.
- Aloès des Barbades ou Aloès des Antilles ou de Curaçao. Il provient de plantes de
culture. Le séchage se fait sous vide. Sa couleur est brun-rougeâtre et l'aspect terne.

c) Chimie
Les dérivés anthracéniques constituent 20% de l'Aloès du Cap et 30% de l'Aloès des
Barbades. La composition est la suivante :
- formes libres en très faibles proportions (aloe-émodol)
- surtout des hétérosides presque exclusivement représentés par l'aloïne ou barbaloïne
(C-hétérosides de l'aloe-émodol-anthrone). On rencontre également l'isobarbaloïne (un mélange) et
des dérivés O-rhamnosides (en 1) de l'aloïne.

d) Essais
- Mise en évidence des formes réduites par la réaction de Schouteten au borate de
sodium.
- CCM : la tache principale (jaune) correspond à l'aloïne.
- Dosages des anthracénosides (minimum 18% exprimée en aloïne.

e) Action et emploi
Laxatif et purgatif, l'aloïne entre dans la composition de nombreuses spécialités :
IdeolaxyND, Grains de ValsND, AloïneND…

5) LA RHUBARBE DE CHINE : Rheum officinale (Polygonaceae)

La rhubarbe est à l'origine importée de Chine, aujourd’hui elle est cultivée en Europe
occidentale. La drogue est constituée par la racine et le rhizome.
Chimie : la rhubarbe renferme 2 à 4% de dérivés anthracéniques composés de :
- formes libres (très peu)
- glucosides d’anthraquinones mono ou diglucosides de chrysophanol, émodol, physcion et
rheine.

Pharmacognosie 2021 86-163


- glucosides d’homo et d’hétéro-dianthrones (sennidines, palmidines, rheidines).
Emplois : la poudre et les extraits se retrouvent dans des spécialités vétérinaires purgatives
(OpocynosND).

Glu O O OH

RO CH3
O

Glucofranguloside A (R = rhamnose)
Glucofranguloside B (R = apiose)

Glu O O OH

CH3
CH2OH

O O OH
Glu

Palmidine B

Glu O O OH
OH O OH

CH2OH
H Glu CH2OH
H Glu

Cascarosides A (10 ) B (10 ) Aloïne

Pharmacognosie 2021 87-163


GENERALITES SUR LES ALCALOIDES

I. DEFINITION

Les alcaloïdes constituent un groupe chimique très hétérogène, difficile à définir précisément.
Le terme alcaloïde est généralement appliqué aux substances organiques basiques azotées et douées de
propriétés physiologiques.

II. ETAT NATUREL

Les alcaloïdes, substances basiques, se trouvent dans le végétal sous forme de sels solubles ou
alors sous forme de complexes tanniques insolubles. Tous les organes peuvent en contenir : écorces
(quinquinas), racines (ipéca), feuilles (coca), graines (colchique).
Leur rôle dans la plante est mal connu ; cependant ce sont des métabolites actifs et non inertes
comme on l’a longtemps supposé.

III. STRUCTURE

Les structures, très hétérogènes, sont caractérisées par la présence d’un ou de plusieurs atomes
d’azote déterminant ainsi des fonctions amines primaires, secondaires, tertiaires ou quaternaires.
La classification se fait selon le noyau de base constitutif de la structure . Celui-ci peut être
monocyclique ou le plus souvent polycyclique.

IV. BIOGENESE

Le processus de biosynthèse des alcaloïdes dans la plante ne peut être envisagé dans un cas
général ; cependant ce processus met en jeu des acides aminés et chaque groupe d’alcaloïdes est à
examiner séparément (conférer Chapitres suivants).

Pharmacognosie 2021 88-163


N

N
H
Indole
Tropane

N
N

Quinoleine Isoquinoleine

N N N NH

N N N N
Pyrimidine Imidazole Purine

Quelques noyaux de base entrant dans la structure des alcaloïdes

Pharmacognosie 2021 89-163


V. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES

Caractères physiques

- Solides cristallisés pour les alcaloïdes oxygénés possédant un P.M. élevé.


- Liquides entraînables à la vapeur d’eau lorsqu’ils sont non oxygénés et de faible
poids moléculaire.
- Leur saveur est amère

Solubilité
Elle est fonction du pH.
En milieu alcalin, les alcaloïdes sont sous forme de bases et sont insolubles dans l’eau, mais
solubles dans les solvants apolaires (éther, benzène, chloroforme, etc…).
En milieu acide les alcaloïdes sont sous forme de sels, ils sont alors solubles dans l’eau, mais
insolubles dans les solvants organiques apolaires.
Noter que l’alcool est capable de dissoudre les deux formes (base et sel).
Ce comportement intéressant va engendrer trois modes d’extractions (voir plus loin).

Réactions de précipitation
Les sels d’alcaloïdes (milieu acide) donnent des réactions de précipitation avec
certains réactifs :

- les acides picrique, silicotungstique et phosphotungstique.


- les réactifs iodés appelés réactifs généraux des alcaloïdes, à savoir : le réactif Iodo-ioduré
(Bouchardat), le réactif Iodomercurate de K (Valser-Mayer), le réactif Iodobismuthite de K
(Draggendorf).

Pharmacognosie 2021 90-163


VI. EXTRACTION DES ALCALOIDES TOTAUX

3 méthodes peuvent être envisagées (voir solubilité).

1. EXTRACTION PAR SOLVANT ORGANIQUE

La poudre de plante est humectée d'une solution alcaline; les alcaloïdes présents sont déplacés
de leurs sels naturels et se retrouvent sous forme de bases libres. L’alcali utilisé peut être faible
(NH4OH, CO3Na2…) ou fort (KOH, NaOH). (Voir remarques importantes en fin de chapitres).
Les alcaloïdes sont alors extraits par un solvant organique (Benzène, chloroforme, éther,
dichlorométhane…). L'extrait d'alcaloïdes bases ainsi obtenu renferme également des substances
liposolubles (graisses, terpènes, caroténoïdes…). En agitant cet extrait organique avec une solution
aqueuse acide, les alcaloïdes passent dans la phase aqueuse sous forme de sels de l'acide utilisé.

2. EXTRACTION L’EAU ACIDE

Lorsqu’on trempe la plante dans une solution aqueuse d’acide (HCl, H2SO4, HCO2H),
les alcaloïdes sont extraits sous forme de sels de ces acides. La solution aqueuse d’alcaloïdes
totaux renferme également d'autres substances hydrosolubles (sucres, sels minéraux,
protides…). La solution aqueuse est alcalinisée puis agitée avec un solvant organique qui
extrait uniquement les alcaloïdes bases libres.

3. EXTRACTION PAR L’ALCOOL

L’alcool est souvent acidifié ; on obtient ainsi un solution alcoolique de sels d’alcaloïdes
Après avoir ajouté de l’eau à l’extrait, l’alcool est éliminé par distillation sous vide. Après filtration, la
solution aqueuse obtenue est alcalinisée et les alcaloïdes bases extraits par à l'aaide d'un solvant
organique.
Quelque soit la méthode adoptée, les alcaloïdes totaux sont presque toujours obtenus sous forme de
résidu d’alcaloïdes bases, plus faciles à manipuler.

4. OBTENTION DES ALCALOIDES PURS

L’obtention d’un alcaloïde à l'état pur à partir d’un totum d'alcaloïdes bases se fait après
séparation faisant appel à des méthodes variées parmi lesquelles les méthodes

Pharmacognosie 2021 91-163


chromatographiques sont les plus utilisées. Le processus est souvent très long. Voici à titre
d'exemple quelques méthodes :
- Cristallisation dans un solvant sélectif
- Précipitation des sels spécifiques
- Séparation par contre courant
- Chromatographie Liquide Haute Performance (CLPH ou HPLC)
- Chromatographie d’adsorption sur colonne.

VII. CARACTERISATION DES ALCALOIDES

1. CARACTERISATION GENERALE

Elle se fait avec les extraits aqueux acides, par précipitation avec les réactifs généraux des
alcaloïdes :
- avec le réactif de Valser-Mayer on obtient un précipité blanc-jaunâtre.
- avec le Draggendorf on obtient un précipité rouge orangé.

2. CARACTERISATION SPECIFIQUE
L'identification des alcaloïdes est effectuée par :
- Chromatographie sur couche mince (CCM) en présence de témoins. La CCM est une
méthode appliquée dans tous les cas pour apprécier la pureté d’un échantillon.
- Réactions particulières de coloration : certaines fonctions ou certains noyau
structuraux peuvent avoir des réactions de coloration plus ou moins spécifiques ( noyaux tropane,
indole, cardénolides, quinine …etc.).

VIII. DOSAGE DES ALCOLOIDES

Le dosage s’effectue généralement sur le résidu d’alcaloïdes totaux sous forme bases. Les
résultats sont exprimés en alcaloïdes bases totaux ou en alcaloïde majoritaire. Plusieurs méthodes sont
développées :

Pharmacognosie 2021 92-163


1. DOSAGE GRAVIMETRIQUE

Le résidu d'alcaloïdes bases obtenu ainsi que noté plus haut, est pesé et le poids est rapporté à
100g de drogue.

2. DOSAGE VOLUMETRIQUE

Le résidu d’alcaloïdes bases totaux est titré par acidimétrie (Protométrie) selon trois
méthodes :
- Méthode directe : la solution acide titrée est déversée dans une solution
méthanolique des alcaloïdes bases totaux.
- Méthode par retour (plus pratique) consiste à titrer l’acide en excès dans une
solution ayant servi à neutraliser le résidu d’alcaloïdes bases totaux.
- Dosage en milieu non aqueux (les alcaloïdes sont dissous dans l’anhydride
acétique par exemple). Dans ce milieu, la basicité faible des alcaloïdes est exaltée.
Le dosage se fait alors par une solution non aqueuse d’acide fort.

3. DOSAGE COLORIMETRIQUE

Lorsqu’on peut avoir une réaction colorée spécifique, on peut alors utiliser la
spectrocolorimétrie.

IX. REMARQUES SUR L’EXTRACTION

La règle générale de solubilité des alcaloïdes bases et de leurs sels souffre de quelques
exceptions et particularités.

1. Bien que les alcaloïdes soient présents sous forme de sels (d’acides organiques,
sulfates…) donc susceptibles d’être extraits par l’eau simple, on a recours généralement à
des l’eau acidifiée (H2SO4, HCl, HCOOH…). Ceci est expliqué par le caractère peu
dissocié des sels organiques d'alcaloïdes.

2. Certains alcaloïdes bases très faibles sont extractibles par les solvants organiques chlorés
en milieu acide, ce qui est contraire à la règle générale. C’est le cas de la réserpine des
Rauwolfia, des bases puriques (caféine, théobromine, théophylline), ces derniers ne
précipitent par ailleurs pas avec les réactifs généraux des alcaloïdes.

Pharmacognosie 2021 93-163


3. Les alcaloïdes sous forme ammonium quaternaire ne sont pas extractibles en milieu
alcalin par les solvants apolaires, car ne peuvent être déplacés de leurs sels par aucun des alcali usuels
(NaOH, KOH…). Ces ammoniums quaternaires sont des bases plus fortes que ces alcalis. Ils sont
extraits par l’eau acide et l’alcool. Exemple : la serpentine des Rauwolfias.

4. Les alcaloïdes phénoliques, en milieu alcalin donnent des phénates alcalins (Na+, K+)
solubles dans l’eau et qui rendent les alcaloïdes bases insolubles dans les solvants apolaires, donc non
extractibles dans ces conditions.

Pharmacognosie 2021 94-163


ALCALOIDES DERIVES DU TROPANE

GENERALITES

On trouve dans cette famille des alcaloïdes très importants tels que les alcaloïdes
parasympatholytiques des Solanaceae (Hyocyamine, atropine) et ceux anesthésiques locaux des
Erythroxylaceae.

1. STRUCTURE

La tropane résulte de la fusion des noyaux N-méthylpyrrolidine et N-méthylpipéridine, avec


l’atome d’azote commun aux deux cycles. Le tropane est ici sous forme alpha ou alors tropanol bêta
(ou pseudo-tropanol). Les alcaloïdes sont en définitive des esters de ces alcools avec des acides
organiques variés.

2. CLASSIFICATION

Elle tient compte de la nature de l’alcool tropanique.

1. Les esters du tropanol et dérivés

a/ Esters du tropanol
Retenons deux esters du tropanol et de l’acide tropique (acide hydroyméthyl-
phénylacétique)

- L’hyoscyamine : ester de l’acide 1-tropique (levogyre)


- L’atropine : ester de l’acide dl-tropique (racémique)

Plantes : Belladone, Daturas…

b/ Esters du scopanol (époxyde du tropanol)


Un exemple : la scopolamine dans laquelle le scopanol est estérifié par l’acide tropique.

Plantes : Datura inoxia, D. metel.

Pharmacognosie 2021 95-163


2. Esters du tropanol 
Retenons les esters de l’ecgonine ou pseudotropanol-2-carboxilique dont la cocaïne.

3. BIOGENESE DU NOYAU TROPANE

Il a été établi, grâce à l’utilisation d’éléments marqués (radioactifs) que les alcaloïdes des
Solanacées se forment dans les racines puis migrent au niveau des feuilles où ils ne subissent que des
modifications mineures.
La formation du tropanol fait intervenir l’ornithine et l’acide acétoacétique.

4. PROPRIETES PHARMACOLOGIQUES

Les propriétés pharmacologiques vont dépendre en grande partie de la stéréochimie du –


OH en position 3 du cycle tropane.

- chez les Solanacées le –OH a une configuration « E » (prendre comme repère l’azote
de l’hétérocycle), ce qui confère à ces alcaloïdes une activité parasympatholytique.

- Le –OH en « Z » (pseudotropanol) se retrouve dans les alcaloïdes anesthésiques


locaux des Erythroxylaceae.

Les alcaloïdes des Solanacées, dérivés du tropanol sont anticholinergiques, c’est-à-dire


qu’ils s’opposent aux effets du médiateur chimique du système parasympathique : l’acetylcholine. Les
effets de cette action sont variés suivant les organes :
- Œil : mydriase
- Vaisseaux : vasoconstriction
- Bronches : bronchodilatation
- Diminution du péristaltisme et des sécrétions intestinales et salivaires.

L’hyoscyamine est un antispasmodique intestinal puissant, excitant du système nerveux


central (SNC) (pouvant entraîner des hallucinations).
L’atropine a les mêmes propriétés que l’hoscyamine, mais son action est deux fois plus
faible.
La scopolamine est un puissant sédatif du SNC, antispasmodique intestinal.

Pharmacognosie 2021 96-163


LES SOLANACEES A ALCALOIDES DERIVES DU TROPANE

LA BELLADONE

Atropa belladonna
(Pharmacopée africaine O.U.A/CRST 1985)

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
La balladone est une herbacée atteignant 1,50m de haut.
Les feuilles sont simples, entières, alternes, géminées au niveau des inflorescences. Les fleurs
sont solitaires ou alors groupées par deux à l’aisselle des feuilles géminées.
Le fruit est une baie noire contenant de nombreuses graines très petites.

Culture
La belladone est une plante européenne cultivée en France, Belgique, Angleterre et
Europe centrale.
Le multiplication est faite par semis de graines sélectionnées (secondairement par voie
végétative). Le sol doit être léger de préférence calcaire. On pratique l’écimage qui augmente
la teneur des feuilles en alcaloïdes.

La drogue
Elle est constituée par les feuilles récoltées en début de floraison ; elles sont séchées dans des
tunnels à 40-50°C.
La drogue a une odeur légèrement vireuse, la saveur peu amère. Au microscope, la poudre est
caractérisée par des débris d’épiderme dont les cellules ont des parois sinueuses et une cuticule striées.

Pharmacognosie 2021 97-163


CH3
CH3 NH2 N
COOH CH
HN O
.
SCoA
O
Ornithine N-methyl Acetylacetyl CoA

.
O CH3
CH3
C - SCoA N COCH
N Cyclisation
Hydrogénation OH
O

CO2 Hydrolyse CH3


Ecgonine
CH3
CH3 N
N +
N<
[O]
O
O CH O

Tropanone

Esters
du tropanol Tropanol

Biogenèse du Tropanol

Pharmacognosie 2021 98-163


CH3
CH3
N
N
H CH2OH
O H CH2OH
O CH

O CH
O

O
Hyoscyamine (Atropine)

Scopolamine

CH3

N OCH3

O O
O

Cocaïne

Principaux alcaloïdes dérivés du Tropanol

Pharmacognosie 2021 99-163


3. ETUDE CHIMIQUE

Les principes actifs de la feuille de belladone sont des alcaloïdes dérivés du tropane. On
distingue :
des constituants banaux
- sels minéraux 15%
- scopolétol ou méthyl-6-esculoside (une coumarine). Ce constituant présente une fluorescence
bleue en milieu ammoniacal, permettant ainsi de distinguer la belladone des autres Solanacées

des alcaloïdes
Ils sont présents à raison de 0,3 à 1%. Ce sont des esters :
- du tropanol : Atropine et hyoscyamine constituent 90% des alcaloïdes totaux. On
trouve également l’atropamine, ester de l’acide tropique.
- du scopanol : la scopolamine ou hyoscine (5 à 10% des alcaloïdes).

4. ACTION PHARMACOLOGIQUE

L’activité de la plante est celle de l’atropine et de l’hyoscyamine (voir généralités).


A dose toxique on observe une excitation du SNC avec délires.

5. ESSAIS ET DOSAGE DES ALCALOIDES

a / Essais botaniques
On peut rechercher les falsifications éventuelles par les autres belladones (Atropa acuminata
ou belladone de l’Inde admise par la pharmacopée internationale, et A. baetica ou belladone
d’Espagne). La drogue doit renfermer moins de 3% de tiges.

b/ Caractérisation des alcaloïdes


Outre les réactions de précipitation avec les réactifs généraux des alcaloïdes, on peut faire :
- Réaction de Vitali-Morin caractérisant le noyau tropane estérifié (Pharm. Afric.
1985). Les alcaloïdes sont traités avec l’acide nitrique, après évaporation à chaud, le résidu est repris
par l’acétone en présence de KOH (coloration violette).

- C.C.M. de silice avec l’extrait d’alcaloïdes bases totaux ; on élue par le système
acétone-eau-NH 0H (90-7-3) en présence de témoins d’atropine, d’hyoscyamine et
d’hyoscine. On observe deux taches correspondant l’une à l’atropine et l’hyoscyamine l’autre à

Pharmacognosie 2021 100-


163
l’hyoscine (Pharm. Afric. 1985).

- Par chromatographie sur papier (éluant Butanol-acide acétique-eau 4-1-5), puis révélation au
réactif iodo-ioduré. L’atropine se colore en rouge, l’hyocyamine en bleu (leur teneur relative
peut être ainsi appréciée).

c/ Dosage des alcaloïdes


La méthode la plus pratiquée est le dosage chimique par acidimétrie ; on observe les
étapes suivantes :
- Extraction et purification des alcaloïdes bases totaux (voir généralités),

- Elimination des bases volatiles en chauffant le résidu d’alcaloïdes bases au bain-


marie après dissolution dans du chloroforme,
- Dosage acidimétrique en retour recommandé par la Pharmacopée africaine (Voir
généralités).

L’inconvénient de cette méthode est qu’elle ne permet pas de déterminer les proportions
relatives d’hyoscyamine et d’atropine qui n’ont pas la même activité. La teneur minimale en
alcaloïdes est de 0,3M exprimée en hyoscyamine.
Le dosage biologique qui détermine effectivement l’activité est peu pratiqué. Il consiste
à : mesurer la mydriase de l’œil énuclée de grenouille ou alors mesurer l’inhibition des contractions
provoquées par l’acétylcholine sur un intestin isolé de rat (test réalisé couramment au laboratoire de
pharmacologie).

6. EMPLOIS DE LA BELLADONE

Les feuilles de belladone sont encore très employées pour :


- l'extraction des alcaloïdes totaux utilisés comme antispasmodique en association
avec certains purgatifs, antisecrétoire dans les ulcères gastro-duodénaux. Spécialités : BellafolineND,
BelladenalND, BellargalND . Les racines servent également à extraire
des alcaloïdes totaux.
- la préparation de teintures entrant dans des médicaments prescrits contre les toux d’irritation
(coqueluche), les coliques hépatiques et néphrétiques.
- la fabrication de cigarettes antiasthmatiques.

Pharmacognosie 2021 101-


163
LA STRAMOINE
Datura stramonium (D. tatula L.)
(Pharm. Afric. 1985)
1. ETUDE BOTANIQUE

Description

La Stramoine est une plante herbacée mesurant 30 à 150 cm de haut.


Les feuilles sont alternes, courtement pétiolées, découpées et dentées. Les fleurs isolées sont
grandes et à corolle blanche. Le fruit est une capsule ovoïde recouverte d’épines rudes.

La drogue
Elle est constituée par les feuilles. Les régions de culture sont les mêmes que celles de la
belladone, la multiplication se faisant par semis de graines sélectionnées. La sélection porte sur la
richesse en alcaloïdes et sur une plus grande facilité de récolte (variétés inermes à capsules lisses).
Les feuilles sont récoltées juste avant la floraison et desséchées rapidement. Ici l’écimage est
également pratiquée.
La coupe de feuille présente :
- des poils tecteurs pluricellulaires unisériés avec des parois épaisses et ponctuées.
- des macles d’oxalate de calcium dans le mésophylle.
Dans la poudre, on retrouve les mêmes éléments, notamment les poils tecteurs et les macles.

2. COMPOSITION CHIMIQUE

La composition en alcaloïdes est voisine de celle de la belladone. Les 2/3 des alcaloïdes totaux
sont constitués par l’hyoscyamine, contre 1/3 pour la scopolamine.
Il est intéressant de noter que les graines renferment les mêmes alcaloïdes.

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE ET ESSAIS (voir belladone)

4. EMPLOIS
Le Datura officinal (-stramoine) est très peu utilisé ; il possède les mêmes indications
que la belladone.
Spécialités : cigarettes Louis Legras, Cigarettes Schulze.
La scopolamine est utilisée dans le traitement de la maladie de Parkinson.
Spécialités : GenoscopolamineND . VagantylND.

Pharmacognosie 2021 102-


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LA JUSQUIAME D’EGYPTE (Hyoscyamus meticus)

C’est une plante vivace, très velue, poussant dans les zones désertiques d’Arabie,

d’Egypte et d’Iran. Elle possède des feuilles entières, des fleurs jaunes tachées de violet.

Les feuilles renferment 0,50 à 1% d’alcaloïdes. La pharmacopée internationale exige 0,80%

minimum. Atropine et hyoscyamine représentent 90% des alcaloïdes toaux non volatiles.

Atropine et hyoscyamine sont utilisés sous forme de sulfates (Codex tableau A) et de

bromhydrates (Hyoscyamine).

Ces alcaloïdes sont prescrits comme antispasmodiques du tractus digestif, des bronches et de

la vessie; antisécrétoires, mydriatiques (solution à 1% pour l'examen de fond d’œil,).

Spécialités : Duboisine Martinet collyre, AparoxalND (épilepsie), DibilèneND

LES DUBOISIA (Duboisia leichardtii)

Les Duboisias sont des arbres ou arbustes d’Australie et de la Nouvelle Calédonie. Les
feuilles de Duboisia leichardtii renferment 2 à 4% d’alcaloïdes surtout constitués d’hyoscyamine.
Les feuilles Duboisia myoporoïdes donnent 0,6 à 3% d’alcaloïdes composés surtout de la
scopolamine. On rencontre plusieurs races chimiques à scopolamine.

DATURA METEL

Les feuilles figurent à la pharmacopée indienne comme source de scopolamine. C’est une
herbe annuelle mesurant 40cm à 1m de haut, poussant en Inde, Egypte, Sénégal…
Les feuilles renferment 0,50% d’alcaloïdes composées surtout de scopolamine.

Autres Daturas : Datura inoxia

Pharmacognosie 2021 103-


163
LE COCAIER

Erythroxylon coca

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
Le cocaier est un petit arbuste originaire de la Bolivie et du Pérou. Les feuilles sont isolées, stipulées,
entières, ovales. Les fleurs sont petites, blanches, groupées à l’aisselle des feuilles. Le fruit est une
petite drupe rouge.

Culture et récolte
Le cocaier est cultivé depuis une longue date par les péruviens qui en font une grande consommation
pour ses propriétés existantes (masticatoire). L’arbuste est taillé afin qu’il ne dépasse pas 1,5m ce qui
facilite la récolte ; celle-ci est exclusivement manuelle. Les feuilles sont récoltées 3 à 4 fois par an,
rapidement séchées à l’ombre ou dans des séchoirs conditionnés.

Deux variétés de coca sont cultivées :


- variété bolivianum à grandes feuilles. Elle est la plus cotée (encore appelée Coca de
Bolivie ou de Huanuco).
- variété novogranatense à feuilles plus petites, cultivées au Pérou (coca du
Pérou).
Le coca de Java (var. spruceanum) est de composition chimique différente de celle des
variétés précitées.

La drogue : La feuille est entière ovoïde, assez mince. On observe deux lignes très visibles de
part et d’autre de la nervure (traces de préfoliation). Au microscope : l’épiderme inférieur comporte
des épaississements lui donnant un aspect festonné.
La drogue se conserve très mal (perte de 50% des principes actifs après 4 ans de conservation).

2. COMPOSITION CHIMIQUE

Le coca de Bolivie et celui du, Pérou ont sensiblement la même composition chimique.

a- Principes banaux : la feuille renferme des tanins, des flavonoïdes et une huile
essentielle.

Pharmacognosie 2021 104-


163
b- Principes actifs :
- Les bases volatiles contenues dans les feuilles de Coca sont des dérivés N-
méthylpyrrolidine : hygrines et cuscohygrines.

- Les bases fixes sont des esters du pseudotropanol carboxylique (ou ecgonine). On
rencontre :

Ecgonine en très faible teneur (sinon signe de mauvaises conservation).


Monoesters acides : en traces (idem)
Diesters : la fonction acide de l’ecgonine est estérifiée par le méthanol, tandis que le OH est
estérifié par un acide variable. On trouve : la cocaïne (benzoylméthyl ecgonine), la cinnamoylcocaïne
(sous forme de trace) et les truxillines ou cocamines.

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE
L’action de la drogue totale diffère de celles des alcaloïdes seuls.

a- Les alcaloïdes
La cocaïne, alcaloïde majeur, est l’anesthésique local type, de référence ; elle est utilisée pour
les trois types de d’anesthésie (surface, infiltration, conduction).
La cocaïne est un sympathomimétique de type adrénaline, donc vasoconstricteur. Cette
propriété limite la diffusion du produit, renforce l’action locale et minimise ainsi les risques d’accident
nerveux.
Son action sur le SNC se traduit à faible dose par une action stupéfiante. L’intoxication
chronique s’installe (cocaïnomanie). La cocaïne est une drogue dure. La cocaïne possède une action
défatigante sur le muscle strié.
Les autres alcaloïdes ont une action beaucoup plus faible. L’ecgonine et les hygrines
sont dépourvues d’action.

b- La drogue entière
Elle possède une action tonique et défatigante due à la cocaïne et aux tanins.
Noter que la drogue débarrassée des alcaloïdes conserve en partie cette action défatigante
tonique recherchée dans certaines boissons.
Les feuilles de coca utilisées comme masticatoire ont le même effet, provoquant en plus un
fourmillement de la langue (anesthésie locale). Une intoxication chronique peut en résulter.

Pharmacognosie 2021 105-


163
4. ESSAIS

a - Botaniques (voir l'aspect de la feuille)


b- Physico-chimiques
- CCM : caractérisation de la cocaïne
- Les alcaloïdes non volatils sont dosés par la méthode pondérale (voir
généralités) après élimination par chauffage sous vide des alcaloïdes volatils. Cette méthode a
l’inconvénient de doser en même temps les ecgonines libres non actives.
- Le dosage biologique peut être effectué pour appréciation de l’action
anesthésique sur la cornée du lapin (test de Régnier).

5. EMPLOIS DES FEUILLES DE COCA

- Masticatoire défatigant, euphorisant, anorexigène, souvent associé à de la cendre ou de la


chaux.
- Formes galéniques : la poudre de feuille est utilisée en infusion pour gargarisme
(anesthésique local).

- Extraction de la cocaïne
Elle est faite de manière licite au Pérou et aux USA. On utilise le chlorhydrate de cocaïne
comme anesthésique local aux doses de 0,03 à 0,06g maximum.

CONCLUSION

Seulement 5% de la production de feuilles de coca sont employés dans l’industrie pour la


production licite de cocaïne ; la quasi totalité est donc utilisée à des fins masticatoires ou pour la
production illicite de cocaïne utilisée comme drogue. C’est le cas en Colombie où le cartel de
Médéline organise la production artisanale de cocaïne.

Pharmacognosie 2021 106-


163
GENERALITES SUR ALCALOÏDES INDOLIQUES

1. DEFINITION

Les alcaloïdes indoliques renferment dans leur structure un noyau indole et ses dérivés
(dihydro-indole et oxindole).
Ce sont généralement des alcaloïdes sympathomimétiques rencontrés chez les Rubiacea
(yohimbe) et les Apocynaceae (Rauwolfia, Petite Pervenche). Certains sont actifs contre les tumeurs
(Pervenche de Madagascar).
Il faut enfin remarquer que la découverte des alcaloïdes indoliques a marqué un grand pas dans
le traitement de l’hypertension artérielle (Réserpine) et des leucémies (Vincaleucoblastine).

2. CLASSIFICATION

Les alcaloïdes indoliques sont habituellement classés en deux groupes selon leur origine
biogénétique :

Les alcaloïdes indolomonoterpéniques


On y trouve, lié au noyau indole, un reste monoterpène (voir huiles essentielles). On trouve
dans ce groupe les alcaloïdes des Rauwolfia, des pervenches et des Strychnos.

Les alcaloïdes indolo-isoproéniques


Le reste hydrocarboné lié au noyau indole est moins condensé et correspond à une molécule
d’isoprène (voir biogenèse des terpènes). Les alcaloïdes de l’Ergot de seigle appartiennent à ce
groupe.

3. BIOGENESE

Le noyau indole dérive du tryptophane qui réagit avec différents substrats selon
l’alcaloïde considéré : avec le sécologanoside pour donner les alcaloïdes des Rauwolfias, et avec
l’acide mévalonique pour donner les alcaloïdes de l’Ergot de seigle (voir monographies).

Pharmacognosie 2021 107-


163
ALCALOÏDES INDOLO-MONOTERPENIQUES

NH3 Logonoside Voie des terpènes


N
H
+
Tryptophane CHO
OGlu

H3CO2C O
NH
N
HH H
Sécologanoside
OGlu
H
O
H3CO2C
Strictosidine (vincoside)

NH
N
HH H

CHO
H NH
N
HH H
O -H
OH
H
O
H3CO2C
3 N
N H
HH 20
15

Alcaloïdes H
indolomonoterpéniques 18

Geissoschizine
OH

Biogenèse des alcaloïdes indolomonoterpéniques

Pharmacognosie 2021 108-


163
ALCALOÏDES INDOLO-MONOTERPENIQUES

LES RAUWOLFIAS

Les Rauwolfias appartiennent à la famille des Apocynaceae. Leur intérêt thérapeutique, très
grand, est dû à la présence dans leurs racines d’alcaloïdes indoliques ou indoliniques possédant des
propriétés sédatives, antihypertensives et/ou anti-arythmiques.
On rencontre plusieurs espèces dont R. vomitoria originaire d’Afrique et R. serpentina
d’origine asiatique.
R. serpentina est une plante de la pharmacopée traditionnelle de l'Inde où il est connu sous le
nom « Sarpagandha ». Il y fut utilisé comme fébrifuge et anti-épileptique. Ce n’est qu’en 1952 que fut
isolée de ses racines la réserpine qui se révéla comme un anti-hypertenseur majeur et un
tranquillisant.
L’intérêt grandissant de la réserpine va stimuler la culture de R. serpentina et la recherche
d’autres espèces hors d’Asie. C’est ainsi que furent découverts R. vomitoria en Afrique et R.
tetraphylla en Amérique. Ces deux espèces se sont révélées plus intéressantes pour l’extraction
industrielle de la réserpine (car plus riches en alcaloïdes).
Aujourd’hui la réserpine a en partie perdu de son intérêt au profit des autres alcaloïdes
présents dans la plante et utilisés à d’autres fins : la raubasine (vasodilatateur périphérique) et
l’ajmaline (antiarythmique proche de la quinidine).

1. ETUDE BOTANIQUE

DESCRIPTION
Les Rauwolfias sont des arbres ou des arbustes des régions tropicales humides. Les
Feuilles sont entières, ovales, verticillées par 3,4 ou 5. Les fleurs de type 5 sont de petite taille,
blanches, régulières et disposées en cymes. Le fruit est une baie, la racine est pivotante.

HABITAT
R. vomitoria est une espèce des formations secondaires, répandues dans toute l’Afrique
intertropicale (Sénégal, Mali). Au Sénégal, il n’est fréquent qu’en Casamance maritime où il croît à
proximité des rizières et sur les sols frais.

Pharmacognosie 2021 109-


163
LA DROGUE
Elle est constituée par les racines.
Les racines de R. vomitoria se présentent en morceaux cylindriques de forme droite et de
grandes dimensions ; leur diamètre est nettement plus grand que celui des autres Rauwolfias. La
surface est jaune-brun, striée longitudinalement. Le suber s’exfolie facilement, la cassure est régulière
et la saveur très amère.
Parmi les éléments anatomiques caractéristiques on note la présence d’un suber
stratifié, de cellules scléreuses dans le parenchyme cortical et d’un bois hétérogène possédant des
vaisseaux d’un grand diamètre (100µ).
La drogue provient essentiellement de plantes cultivées ; la multiplication se fait
généralement par éclats de souches. La récolte se fait sur des arbustes âgés de 3 à 4 ans ; les racines
secondaires sont périodiquement prélevées, débarrassées des radicelles séchées puis coupées.

2.BIOGENESE

La biogenèse des alcaloïdes des Rauwolfias a pour point de départ le tryptophane. Celui-ci est
décarboxylé en tryptamine ; la condensation de celle-ci avec le sécologanoside donne la strictosidine à
partir de laquelle se forme la geissochizine, précurseur de tous les alcaloïdes indolomonoterpéniques
des Rauwolfias.

3. COMPOSITION CHIMIQUE

En dehors des principes banaux (amidon, tanins, stérols…), les principes actifs sont des
alcaloïdes indoliques dont le principal est la réserpine.
La racine entière de R. vomitoria renferme 2 à 3% d’alcaloïdes concentrés dans les écorces ;
ainsi elle est l’espèce la plus riche en alcaloïdes totaux et en réserpine (50% des alcaloïdes totaux).
Les alcaloïdes sont classés en 4 groupes : yohimbane, hétéroyohimbane, sarpagine, ajmaline.

a) Alcaloïdes du groupe de l’yohimbane


La structure est pentacyclique avec 2 atome d'azotes. On relève 3 carbones chiraux situés en 3,
15, 20 et qui sont à l’origine de plusieurs isomères. L’isomèrie est déterminée par la position en  ou
en  des substituants sur ces carbones.
Ainsi on note 4 configurations selon les combinaisons et qui déterminent les séries normale (3, 15,
20), pseudo (3, 15, 20), allo (3, 15, 20), 3 épi-allo (3, 15, 20).
Par ailleurs, une autre isomérie est introduite par les positions axiale ou équatoriale des
substituants en 16, 17 et 18.

Pharmacognosie 2021 110-


163
Selon la présence ou l’absence d’un substituant en 18, on distinguera deux sous-groupes :
- Le sous-groupe de l’yohimbine (non substitué en 18). Ce groupe est de moindre
importance chez les Rauwolfias, très important par contre chez les Rubiacées
comme Pausinystalia yohimbe.
- Le sous-groupe de la réserpine (substitué) est le plus important. Ces alcaloïdes
sont caractérisés par la présence d’un méthoxy (-OCH3) en 17 et d’une fonction alcool secondaire en
18 estérifiée par un acide variable. Le chef de file de ce groupe est la réserpine (ester benzoïque du
réserpate de méthyle) de configuration 3 épi-allo.
A côté de la réserpine on a la rescinnamine (ester de l’acide triméthoxycinnamique) et la
déserpidine ou démethoxy 11-réserpine.

b) Alcaloïde du groupe de l’hétéroyohimbane


Le cycle noté E est un hétérocycle oxygèné. On rencontre également deux sous-groupes : Les
alcaloïdes du sous-groupe de la raubasine qui sont des bases faibles ; ceux du groupe de la serpentine
où le cycle C est aromatique, sont des bases très fortes et solubles dans l’eau.
Remarque : la raubasine est préparée dans l'industrie à partir de la serpentine, par réduction.

c) Les alcaloïdes du groupe de la sarpagine


Ce sont des bases tertiaires ayant un hydroxyle phénolique et une fonction alcool primaire. Le
principal est la sarpagine ou raupine.

d) Les alcaloïdes du groupe de l’ajmaline


Ils ont une structure indolinique, méthylée à l’azote et hydroxylée.

Remarques importantes
Les alcaloïdes des Rauwolfias ont un caractère basique plus ou moins prononcé. On rencontre
des bases très faibles (réserpine, rescinnamine), des bases faibles (raubasine, ajmaline), enfin des
bases très fortes (serpentine). Ces bases auront donc une différence de solubilité, mise à profit pour
leur extraction. Ainsi la réserpine peut être séparée des autres alcaloïdes par extraction au chloroforme
en milieu acide (contrairement au cas général, voir généralités).

Pharmacognosie 2021 111-


163
3 N
H2CO NH H
H
15 20
OCH3
H 18 C
16
17
O
H3CO2C
O OCH3
OCH3
OCH3
Réserpine

N N+
3 N
N
H H H H H CH3
CH3
H H
O O
H3CO2C
H3CO2C

Serpentine
Raubasine

OH

N OH
N
H H
CH3

Ajmaline

ALCALOÏDES DES RAUWOLFIA

Pharmacognosie 2021 112-


163
4. ACTION PHYSIOLOGIQUE
Il convient de distinguer l’action des alcaloïdes pris séparément, et l’action de la drogue totale.
L’yohimbine a un effet adrénolytique, vasodilatateur périphérique pouvant agir sur les
organes sexuels (aphrodisiaque).

La réserpine agit :
- sur le SNC : on observe une action dépressive voisine de celle des neuroleptiques ; ce
qui l’a fait utiliser jadis dans les troubles mentaux. L’action est sédative et hypnotique
sans analgésie ni anesthésie.
La réserpine inhibe l’hyperactivité provoquée par la caféine, l’amphétamine ou la cocaïne.
- sur le SNA : l’action se traduit par une hypotension progressive et particulièrement
prolongée.

Mécanismes d’action : la réserpine provoque la déplétion en noradrénaline au niveau des fibres post-
ganglionnaires sympathiques, ceci en inhibant le mécanisme de recaptage granulaire de la
noradrénaline et celui des monoamines (dopamine et 5OH tryptamine).

Effets secondaires : l’effet le plus important est l’action ulcérogène se traduisant par une augmentation
des sécrétions en général et gastriques en particulier (on observe notamment une galactorrhée).
L’implication de la réserpine et des alcaloïdes des Rauwolfias dans la survenue du cancer du
sein a été établi en 1974 (1) mais demeure controversée (2) [(1) Lancet (1974), 2, 669-671. (2) Eur. J.
Clin. Pharmacol. (1984), 26, 143-146].

La raubasine : est une adrénolytique, vasodilatateur périphérique qui augmente le flux


sanguin musculaire et cérébral. Cette action est synergique de celle des alcaloïdes hydrogénés de
l’Ergot de seigle.

La serpentine : est un hypotenseur puissant, non adrénolytique

L’ajmaline est un antiarythmique majeur dont l’effet se rapproche de celle de la quinidine


(voir quinquinas).
Elle est utilisée en particulier dans les troubles du rythme ventriculaire. Son action
antihypertensive est faible, forte dose on a arrêt cardiaque.

Relation structure activité


Le squelette yohimbane est nécessaire à l’action adrénolytique.

Pharmacognosie 2021 113-


163
La configuration 3 épi-allo est indispensable à l’activité neurosédative et antihypertensive. De
même la nature de l’acide estérifiant en 18 influe sur l’intensité de l’action neurosédative.

Action de la drogue totale


Les racines de Rauwolfia ont des propriétés sympatholytiques et antihypertensives. On
observe à faible dose une baisse prolongée de la pression artérielle, à forte dose un effet sédatif sur le
SNC accompagnée d’une dépression cardiaque et respiratoire.

5. ESSAIS

ESSAIS BOTANIQUES

On cherchera notamment sur une coupe les éléments de distinction des différents Rauwolfia
(suber stratifié ou non,cellules scléruses…).

ESSAIS PHYSICO-CHIMIQUES
- Réactions générales des alcaloïdes
- Caractérisation par CCM en présence de témoin de réserpine et d’ajmaline. On révèle
les plaques à l’UV ou la réserpine apparaît en jaune verdâtre, l’ajmaline en bleu foncé.
Avec l’iodoplatinate, la réserpine apparaît en rose et l’ajmaline en violet.
- Dosage des alcaloïdes type réserpine, comme l’indique la Pharmacopée africaine
1985 (page 200).
- Dosage des bases faibles.

6. EMPLOI DES RAUWOLFIAS

Les formes galéniques obtenues à partir de R. sepentina (seule officinale) sont d’un usage très
restreint. Les autres (R. vomitoria et R. tetraphylla) sont les plus utilisés et cela pour l’extraction des
alcaloïdes.
La réserpine est inscrite à la Pharmacopée française IXè Ed., utilisée comme neuroleptique et
antihypertenseur à la dose de 0,50-1,50 mg/24H. Spécialités : SERPASIL, TENSIONORME.

La rescinnamine : Antihypertenseurs associés à des diurétiques : ANAPREL, ALDATENSE

Methoxy 10 déserpidine : Action antihypertensive (BARONORME)

Pharmacognosie 2021 114-


163
La raubasine : vasodilatateur dans la pathologie cérébrale périphérique seul
(HYDROSARPAN) ou associée aux alcaloïdes hydrogènes de l’Ergot de seigle (ISKEDYL).
L’ajmaline : Inscrite à la pharmacopée française IXè Ed. ; indiquée dans les tachycardies
ventriculaires, seule à la dose de 0,05-0,025 g/24H, en association avec des sédatifs nerveux.
Autres dérivés : Il existe de nombreux dérivés hémi-synthétiques où l’on pu dissocier les
effets sédatifs des effets hypnotiques et où les effets secondaires sont moindres (diminution des effets
sécrétoires notamment). Parmi les dérivés de la réserpine on peut citer : la biétaserpine ou diéthyl-
aminoethyl-réserpine, hypotenseur (TENSIBAR), la syrosingopine ester de l’acide carbéthoxy-
syringoïque (SINGOSERP).

Pharmacognosie 2021 115-


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Racines pulvérisées

Alcool acétique

Solution alcoolique
des alcaloïdes totaux

H2O/H2SO4

Solution aqueuse acide

CHCl3

Solution chloroformique : Phase aqueuse :


alcaloïdes groupe réserpine autres alcaloïdes

Evaporation
+ alcool +Na2NO2
Résidu Spectrophotométrie
+ H2SO4
+ Sulfamate d'ammonium

DOSAGE DES BASES FAIBLES DES RAUWOLFIA

Pharmacognosie 2021 116-


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APOCYNACEAE SOURCES DE VINCAMINE

1. LA PETITE PERVENCHE : VINCA MINOR

a) BOTANIQUE

La petite pervenche est une plante herbacée, vivace poussant dans les sous-bois.
Elle possède des tiges sarmenteuses couchées et des tiges florifères dressées. Les feuilles sont
entières, persistantes.
La petite pervenche ou Pervenche officinale est cultivée dans les pays à climat tempéré (Europe de
l’Est notamment). La drogue est constituée par les feuilles.

b) COMPOSITION CHIMIQUE

Les principes actifs sont des alcaloïdes indolomonoterpéniques (0,4 à 1% du poids sec) dont
le principal est la vincamine (10 à 15%).
On rencontre des alcaloïdes secondaires tels que la vincadifformine.

c) ACTION PHYSIOLOGIQUE

Les feuilles de la petite Pervenche furent utilisées comme astringent et vulnéraire en usage
externe, antilaiteux par voie interne. Aujourd’hui, la drogue est utilisée pour l’extraction des alcaloïdes
totaux, la vincamine étant obtenue par d’autres voies.
Les alcaloïdes sont sympatholytiques, vasodilatateurs périphériques. Ce sont en particulier des
oxygénateurs et vasorégulateurs cérébraux.

Pharmacognosie 2021 117-


163
d) EMPLOIS

La petite pervenche sert à l'extraction des alcaloïdes totaux spécialisés sous le nom de
RUTOVINCINE. La vincamine, obtenue par hémisynthèse à partir de la tabersonine, est prescrite
dans les troubles psycho-comportementaux de la sénescence cérébrale et les troubles post-
commotionnels des traumatisés crâniens (trouble de la mémoire et de l’attention).
Spécialités : PERVINCAMINE, PERVONE…

2. LES VOACANGA : VOACANGA AFRICANA ET V. THOUARSII

Les graines de ces Apocynacées renferment un alcaloïde indolique : la tabersonine.


La récolte se fait avant la déhiscence du fruit, en Octobre-Novembre pour V. africana et en
Juin-Juillet pour V. thouarsii. Les graines renferment 2 à 3% de tabersonine.
La tabersonine donne par hydrogénation de la vincadifformine qui est à son tour oxydée par un
peracide en vincamone qui donne à son tour la vincamine.

LA PERVENCHE DE MADAGASCAR : CATHARANTHUS ROSEUS, APOCYNACEAE

1. ETUDE BOTANIQUE

La Pervenche de Madagascar est un sous-arbrisseau, très répandu dans les régions tropicales.
La tige ligneuse, atteignant 80 cm de haut, porte des rameaux dressés. Les feuilles sont coriaces,
oblongues, opposées. Les fleurs de type 5, sont blanches à rose violacé. Le fruit est une follicule
double renfermant de nombreuses graines.

La drogue est constituée, d’une part par les parties aériennes, d’autre part par les racines (ces deux
parties n’ayant pas le même usage). Elle est obtenue à partir des plantes de culture (Madagascar,
Australie, USA, Amérique du sud).

Pharmacognosie 2021 118-


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2. COMPOSITION CHIMIQUE

Nous distinguerons la chimie des parties aériennes et celle des racines.


Parties aériennes
Les feuilles et tiges renferment 0,2 à 1% d’alcaloïdes indoliques et indoliniques très variés
parmi lesquels on distingue :

- Alcaloïdes monomères quantitativement plus importants mais dépourvus d’intérêt


pharmacologique : vindoline et catharanthine.

- Alcaloïdes dimères, bisindoliques avec un noyau indole et un indoline. Ces


alcaloïdes représentent seulement 0,01% de la drogue mais sont doués de propriétés mitoclassiques :
Vincaleucoblastine (VLB), vincristine (VCR), leurosine et leurosidine.

Remarque : Vu la très faible teneur de ces alcaloïdes, de nombreuses hémisynthèses et même


des synthèses totales ont été tentées (cette dernière a semble-t-il été réussi).

Chimie des racines


Les racines de C. roseus renferment des alcaloïdes du type hétéroyohimbane dont le plus
important est la raubasine (Conférer à Rauwolfia).

3. ACTION PHYSIOLOGIQUE

Les différentes parties de la plante sont utilisées depuis fort longtemps en médecine populaire
comme antidiabétique, dépuratif, fébrifuge, vermifuge, etc…
L’activité antitumorale est devenue prépondérante. Elle a été découverte fortuitement lors de
la recherche du principe antidiabétique (les animaux d’expérience décédaient de leucopénie).
Les alcaloïdes dimères sont responsables de l’action oncholytique. La VLB est un
antimitotique inhibant la biosynthèse des ADN et ARN solubles (blocage de la formation des
microtubules). La VCR a la même activité, mais plus forte et plus toxique. La toxicité se manifeste par
une neutropénie et une neuropathie.

Pharmacognosie 2021 119-


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4. EMPLOIS

Les parties aériennes servent à l’extraction de la VLB et VCR. Le sulfate de vinblastine est
utilisé en perfusion i.v. lente, une dose de 0,1 à 0,5 mg/kg tous les 7 jours, dans le traitement de la
maladie de Hodgkin, les lymphosarcomes, les réticulosarcomes, les leucémies aiguës…
Le sulfate de vincristine est également administré en perfusion i.v. lente, essentiellement dans
les leucémies lymphoblastiques aigues. La surveillance du traitement est très stricte.
Spécialités : ONCOVIN (VCR), VELBE (VLB).

De nombreux dérivés des alcaloïdes dimères du Catharanthus ont été synthétisés, un seul est
commercialisé : Vindésine préparée à partir de la VLB :
Spécialité : ELDISINE (sulfate).

Pharmacognosie 2021 120-


163
H N H
H
N N
N N
HO N O
CO2CH3 H
CO2CH3 Eburnamonine = vincamone
Vincamine
Vincadifformine

N N
H

OH N
OCOCH3 H
H3CO N CO2CH3
H
CO2CH3 Catharanthine
Vindoline

-
OH
COO N

N
H

R N N

R = CHO : Vincristine
R = CH3 : Vincaleucoblastine

Pharmacognosie 2021 121-


163
L’ERGOT DE SEIGLE : CLAVICEPS PURPUREA, ASCOMYCETES

1. DEFINITION

L’ergot de seigle est la forme de résistance (sclérote) de Claviceps purpurea, un champignon


parasite du seigle.
La drogue a des propriétés ocytociques, vasoconstrictrices et sympatholytiques. Ces propriétés
sont dues à la présence d’alcaloïdes indoloisopréniques.
Les ergots de riz, de blé et d'avoine ont été tolérés par la 7è Ed. de la Pharmacopée française.

2. ETUDE BOTANIQUE

Cette étude biologique est dominée par le cycle évolutif du champignon.

a) Cycle évolutif
Ce cycle comprend deux phases :

- La phase sexuée : le sclérote formé sur les épis de seigle tombe au sol à la fin
de l’été et y passe l’hiver. Au printemps suivant apparaissent des stromas (corpuscules pédicellés) qui
sont les organes de la reproduction sexuée. Ces stromas renferment des ascospores filiformes
contenus dans des asques (sacs), ces derniers logés dans des périthèces (cavités situées à la périphérie
des stromas).
Les ascospores sont libérés des stromas et véhiculés par le vent ou les insectes jusqu’aux fleurs de
seigle.
- La phase asexuée : avec la faveur de l’humidité, les ascospores germent sur les
fleurs de seigle, donnant des filaments (hyphes) qui envahissent les ovaires. Ces ovaires sont
transformés en des masses blanchâtres appelées sphacélies. Dans les sphacélies se forme un liquide
visqueux, sucré (ou miellée du seigle) qui englue des conidies (organes de la reproduction asexuée.
Les insectes attirés par la miellée, disséminent les conidies sur d’autres fleurs de seigle.
Les ovaires ainsi envahis de hyphes avortent et se transforment en une masse compacte dont la base
s’allonge et devient cornée pour constituer le sclérote. Le cycle recommence au printemps suivant.

b) Culture et récolte
Les ergots sauvages (spontanés) sont rares de nos jours. On les trouve en Europe Centrale
(Pologne, Hongrie) en en URSS.

Pharmacognosie 2021 122-


163
Pour les besoins de l’industrie pharmaceutique, l’ergot est obtenu par infestation artificielle
des champs de seigle cultivé à cette fin. La production est dominée par les Laboratoires Sandoz de
Suisse et des USA.
Le support de culture est constitué par un seigle à floraison tardive afin d’éviter de contaminer
d’autres céréales. Pour augmenter le rendement en sclérotes, on peut choisir des variétés de
seigle tétraploïdes, moins résistantes à l’infection.
Par ailleurs les souches de claviceps sont sélectionnées pour leur richesse en alcaloïdes totaux
ou pour leur richesse en un constituant particulier .

Obtention des conidies : Les spores de races sélectionnées sont semées dans des tubes
renfermant un milieu nutritif riche en glucides. Il se développe un mycélium qui donne une multitude
de conidies. Celles-ci sont récupérées et serviront à infester les champs de seigle.
L’infestation des champs se fait par pulvérisation ou par infection de préférence. Dans cette
dernière méthode, on pique les ovaires à l’aide de pointes creuses reliées à la suspension de conidies
(l’opération est mécanisée). Au bout de 15 jours apparaît la miellée de conidies qui répand l’infection.
La production de sclérote est favorisée par un temps chaud et humide. Le rendement est d'environ 200
kg/ha.
La première récolte (mécanisée) se fait avant maturité complète des sclérotes (avant qu’ils ne
tombent sur le sol). La deuxième se fait 15 jours après la première et correspond aux sclérotes
issus de l’infestation par les insectes à partir de la miellée.

c) La drogue-conservation
Les sclérotes sont des masses allongées plus ou moins arquées, amincies aux deux extrémités ;
ils mesurent 1-4 cm de long sur 2-7 de section (l’ergot de culture est généralement plus gros que le
sauvage). La surface est noir violacé avec plusieurs sillons longitudinaux. La cassure est nette,
blanchâtre au centre.
Les ergots se conservent mal, surtout en milieu humide (attaque des insectes et des
moisissures). On les conserve dans des flacons bien bouchés renfermant un déshydratant comme la
chaux. Le stock doit être renouvelé fréquemment car les alcaloïdes s’isomérisent au cours de la
conservation et deviennent inactifs.

3. BIOGENESE DES ALCALOÏDES

La possibilité de réaliser des cultures saprophytiques de l’ergot de seigle a facilité l’étude de la


biosynthèse des alcaloïdes. Cependant seules les grandes étapes sont cernées.

Pharmacognosie 2021 123-


163
Les alcaloïdes de l’ergot dérivent d’une structure de base, Ergoline, noyau tétracyclique
comportant une structure quinoléine octahydrogénée que l'ont retrouve dans l’acide lysergique. Les
alcaloïdes sont des dérivés de cet acide.
Les précurseurs de l’acide lysergique sont le tryptophane, l’acide mévalonique et la
méthionine qui apporte le méthyle substituant l’azote en 6.

4. COMPOSITION CHIMIQUE

La composition chimique de l’ergot de seigle est très complexe. On distingue :

a) Principes banaux
- eau, minéraux, glucides.
- aminoacides très variés : Leucine, Valine, Tyrosine, Arginine, Tryptophane.
- Forte teneur en lipide (20 à 40%) renfermant des acides gras insaturés ; le
rancissement facile de cette huile est à l’origine de la mauvaise conservation de l’ergot.
- Matières colorantes dérivant des chromones (ergoflavine) et des anthraquinones
(sclérérythrine) de couleur rouge.

b) Les principes actifs


Parmi les principes actifs, on trouve des amines, des ammoniums quaternaires et surtout des
alcaloïdes indoliques.

- Les amines : histidine, tyramine, methylamine, éthylamine, putrescine, cadavérine,


histamine.
- Les alcaloïdes, de teneur comprise entre 0,15 et 1%.Les alcaloïdes carboxylés sont
dérivés de l'acide D-lysergique ou de l'acide D-isolysergique (l'isomérie se situe au niveau du C-7
portant le carboxyle). Noter que l'on retrouve les deux formes pour chaque alcaloïde.
Les alcaloïdes sont classés en trois groupes principaux :

Les clavines et les sécoergolines qui ne comportent pas de carboxyle en 8.


Leur teneur est très faible et n’ont pas d’intérêt thérapeutique.

Les alcaloïdes hydrosolubles qui représentent 20% du totum alcaloïdique. Ce


sont des amides simples de l’acide lysergique. Le plus important est l’ergométrine (appelée ergobasine
ou ergonovine) dans laquelle l’acide lysergique est amidifié par du () amino 2 propanol.

Pharmacognosie 2021 124-


163
Les alcaloïdes polypeptidiques ou « ergopeptines » représentent 80% des
alcaloïdes totaux ; sont insolubles dans l’eau. Ces alcaloïdes donnent par hydrolyse de l'acide
lysergique et des acides aminés (hydroxyalanine, leucine ou valine, proline).
On distingue 5 alcaloïdes, différents par la composition de leur chaîne peptidique et classés en
deux groupes :

* Le groupe de l’ergotamine composé de : Ergotamine, Ergosine, Ergovaline


* Le groupe de l'ergotoxine : mélange où domine l'ergocornine à côté de l'ergocristine
et de l'egocryptine.

Pharmacognosie 2021 125-


163
CH3
NH CH CH2OH
O C
N CH3

N
H
ergométrine

OH N
O H O
H3C N
NH
O
O C
N CH3

N OH N
H CH3
ergotamine O H O
H3C HC N
CH3
NH
O CH3
O C
N CH3

N
H
ergocornine

Principaux alcaloïdes de l'ergot de seigle


Pharmacognosie 2021 126-
163
5. ACTION PHYSIOLOGIQUE

La toxicité de l’ergot de seigle est connue depuis le moyen âge. Les farines souillées étaient à
l’origine de fléau épidémique nommé ergotisme , populaire sous les nom de «mal des ardents » ou
« feu de Saint-Antoine ».
L’intoxication se manifeste par des brûlures d’estomac et la gangrène des extrémités ou alors
par des convulsions.
L’activité de l’ergot est due à la fois aux amines et aux alcaloïdes. Elle se manifeste sur le
SNC, le SNA sympathique et sur les fibres lisses.
Sur le SNC, on observe une excitation pouvant se traduire par des hallucinations ; une
vasodilatation d’origine centrale due surtout au groupe de « l’ergotoxine » (l'action est antisérotonine).

L’action sur le SNA se traduit par une action adrénolytique avec effet antihypertenseur et
antisérotinine. Par ailleurs, on observe une vasoconstriction des vaisseaux et une contraction de
l’utérus (effet observé notamment avec la tyramine).

Action sur les fibres lisses : On observe une action ocytocique due à l’ergométrine,
l’ergotamine et l’ergotoxine, action non accompagnée d’hypertension car compensée par l’histamine
et l’action adrénolytique des alcaloïdes.

Relations structure-activité

L’action sur le SNC est due au motif ergoline, analogue structural des amines biogènes
(Dopamine, noradrénaline, sérotonine) d’où l’affinité de ces alcaloïdes pour des récepteurs de ces
amines. Cette analogie structurale est retrouvée chez un dérivé de synthèse, la LSD25, puissants
hallucinogènes prohibés.
Les dérivés de l’acide lysergique sont plus actifs que ceux de l’acide isolysergique. L’action
sympatholytique est due aux polypeptides car l’ergométrine ne possède pas cette activité. D’autres
paramètres interviennent notamment la double liaison en 9-10 importante pour l’action ocytocique (la
dihydroergotamine est inactive sur l’utérus).

Pharmacognosie 2021 127-


163
Autres actions des alcaloïdes de l’ergot

Pour certaines clavines, on a observé une activité antitumorale (Planta Medica (1986), n°4,
290). La relation structure-activité suivante a été observée : parmi les clavines naturelle, seules sont
actives les 8-methyl ergolines. Les ergolines ayant un oxygène en 17 sont moins actifs que les non
substitués par un oxygène ; les hydroxyméthylergolines deviennent actives par propylation sur l’azote
1.

6. ESSAIS DE L’ERGOT

a) Essais botaniques

Ces essais sont peu importants car l’ergot de seigle est rarement falsifié car
facilement reconnaissable par sa forme. L’odeur de la poudre est désagréable et est exaltée lorsqu’on
triture la poudre avec un alcali.

b) Essais physico-chimiques

- La caractérisation des pigments anthraquinoniques peut avoir un intérêt dans


la détection de l’ergot dans les farines : la farine additionnée de H2SO4 est extraite par l’éther qui se
colore en rose progressivement ; la solution éthérée est agitée avec une solution aqueuse de carbonate
de sodium, celle-ci prend une coloration violacée.

- Caractérisation des alcaloïdes


Les réactifs généraux des alcaloïdes sont très peu sensibles en raison de la très faible teneur en
alcaloïde de l’ergot de seigle et à la présence d'alcaloïdes peptidiques

On effectue plutôt la réaction de caractérisation du noyau indole utilisant le


paradimethylamino-benzaldéhyde (ou réaction de VAN URK de coloration violette).

- L’identification des alcaloïdes est réalisée par CCM en présence de témoins


d’ergotamine et d’ergométrine (révélée par réaction de VAN URK).

- Le dosage des alcaloïdes totaux est colorimétrique et correspond à la détermination


des alcaloïdes totaux obtenue sous forme de tartrates. On applique la réaction de VAN URK. L’ergot

Pharmacognosie 2021 128-


163
officinal doit contenir un minimum de 0,15% d’A.T. calculés en ergotamine. Certaines pharmacopées
demandent de doser les alcaloïdes hydrosolubles.
Les essais biologiques sont peu pratiqués mais peuvent permettre une appréciation plus juste
de l’activité pharmacologique de la drogue : mesure de l’action ocytocique sur l’utérus de cobaye
vierge, mesure de l’activité vasoconstrictrice périphérique sur la crête de coq (Pharmacopée
américaine).

. 7. EMPLOIS DES ALCALOÏDES DE L’ERGOT

L’ergot de seigle est aujourd’hui utilisé uniquement pour l’extraction des alcaloïdes à partir
desquels de nombreux dérivés hémisynthétiques sont préparés.
L’ergométrine donne le méthylergométrine utilisé sous forme de maléate comme tonique
utérin et ocytocique ; il est prescrit pour la prévention des hémorragies du post-partum.

Spécialité : METHERGIN gouttes.

Le Méthysergide (maléate) est utilisé dans le traitement de fond de la migraine à la dose de 2


à 8 mg/jours per os ;
Spécialité : DESERNYL.

L’ergotamine (tartrate) est exclusivement réservée au traitement de la crise de migraine en


association avec la caféine per os ou par voie rectale ;

La dihydroergotamine (méthane sulfonate) est prescrite comme antimigraineux dans le


syndrome orthostatique, per os 1 à 2 mg/jour.

La dihydroergotoxine prescrite dans le traitement des troubles vasculaires cérébraux ; per os


1 à 2 mg/jour.
Spécialités : HYDERGINE, ISKEDYL

La nicergoline est un adrénolytique puissant prescrite dans les mêmes indications que la
dihydroergotoxine, sans effet indésirable notable : SERMION.

La bromocriptine (méthane sulfonate de bromo-2-ergocritptine) freine la sécrétion de


prolactine et est utilisée comme inhibiteur de la lactation dans les hypogonadismes chez l’homme et la
femme. Spécialité : PARLODEL.

Pharmacognosie 2021 129-


163
LES QUINQUINAS

Les quinquinas sont des Rubiaceae originaires d’Amérique du Sud, où ils croissent à l’état
sauvage dans la Cordillère des Andes, sur le versant oriental humide des différentes chaînes. C’est au
XVIIè siècle que des Missionnaires Espagnols après la découverte du Pérou, ont reconnu les vertus
fébrifuges des écorces de quinquinas.
Bien plus tard, ces plantes furent classées dans le genre Cinchona par LINNE en 1742.
Ce nom étant attribué en l’honneur de la princesse Chinchon, femme du Vice-Roi du Pérou, qui aurait
été guérie des fièvres par ces écorces.
A cause de l’intérêt grandissant de ces plantes, elles furent introduites et cultivées dans
plusieurs pays. Les quinquinas sont actifs par la présence d’alcaloïdes dont le plus important est la
quinine. Cet alcaloïde isolé pour la première fois en 1820 par les Pharmaciens PELLETIER et
CAVENTOU, s’est révélé un antipaludéen majeur.
Par la suite d’autres alcaloïdes extraits des quinquinas se sont révélés intéressants en particulier la
quinidine qui a des propriétés antiarythmiques.
Actuellement quatre espèces de quinquina sont exploitées : Cinchona succirubra (quinquina
jaune), C. ledgeriana (variétés de quinquina jaune) et C. officinalis (quinquina gris).

1. ETUDE BOTANIQUE

DESCRIPTION DE LA PLANTE

Les Cinchona sont des arbres de 10 à 15 m de haut, à feuilles opposées, pétiolées, pourvues à
la base de 2 stipules. Leur limbe est elliptique plus ou moins ovale penniverve.
Les fleurs, en grappes de cimes terminales, sont régulières, du type 5, blanches ou rosées. Le
calice présente 5 dents, la corolle est tubuleuse puis évasée en 5 lobes.
Le fruit est une petite capsule ovale-oblongue, à déhiscence septicide par 2 valves. Les graines
sont petites, ailées, aplaties.
Il existe de nombreuses espèces du genre Cinchona (40). On exploite notamment les espèces
suivantes : C. succirubra, C. calissaya, C. officinalis, C. ledgeriana. Il existe également des hybrides :
C. hybrida, issu du croissement de C. ledgeriana x C. succirubra, C. robusta issu de C. succirubra x
C. officinalis.

Pharmacognosie 2021 130-


163
Culture et récolte
Actuellement les quinquinas sauvages ont une importance mineure par rapport aux quinquinas
de culture.
Les premières cultures de quinquinas furent entreprises en Asie (Java) par les Hollandais et les
Anglais dans la 2ème moitié du 19ème siècle. Les Hollandais ne tarderont pas à avoir le monopole de la
quinine grâce à leurs plantations de Java, où étaient opérées des sélections rigoureuses. Le marché de
la quinine se trouvait alors à Amsterdam où les prix étaient fixés par le « Kina Bureau ».
En Afrique la culture des quinquinas a réussi en Guinée (Sérédou 1935), Côte d’Ivoire (Man-
Tonkoiri), Cameroun et Madagascar.
La culture des quinquinas est difficile et nécessite des conditions strictes particulières :

- altitude (1000-3000m) : facteur très important pour la production d’alcaloïdes.


- le climat : température assez élevée et stable (15-25°C), une humidité importante
(74-90%). Les jeunes plants doivent se développer à l’abri du soleil.
- le sol doit être profond, perméable, argilo-silicieux, riche en humus.

La multiplication se fait par les graines, parfois par boutures. Les greffes sont également
utilisées.

Espèces cultivées
C. succirubra est l’espèce la moins exigeante et la plus vigoureuse ; elle est surtout utilisée
comme porte-greffe car ses écorces sont relativement peu riches en alcaloïdes.

C. ledgeriana est l’espèce la plus cultivée en raison de sa richesse en alcaloïdes totaux et en


quinine; elle a été améliorée par une sélection.
On cultive également des hybrides tels que C. hybrida et C. robusta. La récolte se fait par
arrachage des arbres de 6-9 ans d’âge (la teneur en alcaloïdes est maximale à cet âge), on récupère en
même temps l’écorce des racines.
Les pays producteurs sont : Pérou, Bolivie, Equateur, Guatemala, Tanzanie, Indonésie, Inde.

Caractères de la drogue
La drogue est constituée par les écorces du tronc, des branches ou des racines. Les écorces de
tronc se présentent en morceaux plats ou légèrement cintrés, celles des branches en tuyaux ; les
écorces de racines sont en petits fragments plats, de faible épaisseur.

Pharmacognosie 2021 131-


163
Quinquina rouge
Les écorces desséchées sont inscrites à la pharmacopée française IXème édition. Leur surface
externe est brun-rouge ou gris-brunâtre, fissurée longitudinalement et plus ou moins crevassée
transversalement. La surface interne est jaune ou brun rougeâtre ; l’odeur est faiblement aromatique, la
saveur amère et astringente. La poudre est brun-rouge.

- La coupe transversale d’écorce de quinquina rouge met en évidence :


- un suber très développé
- un phelloderme réduit
- un parenchyme cortical avec peu d’amidon, des cellules sécrétrices, des
cellules à sable d’oxalate de Calcium
- un liber formé de cônes libériens étroits et renfermant des fibres sclérifiées
isolées.
- dans la poudre, l’élément caractéristique est constitué par la présence de
fibres libériennes isolées, longues, fusiformes, à parois épaisses et un lumen étroit avec canalicules.

Autres quinquinas
- Quinquina jaune : l’écorce, généralement privée de suber, est jaune fauve, la cassure
très fibreuse, l’odeur peu aromatique ; la saveur est très amère.
- Quinquina gris : l’écorce est très mince et très enroulée. La surface externe est gris-
brun, l’odeur est agréable, la saveur astringente et peu amère. La poudre est de couleur chamois.
- Cinchona ledgeriana : les caractères sont voisins de ceux du quinquina jaune.

2.CHIMIE DES QUINQUINAS

En dehors de l’eau, de l’amidon et des matières minérales, les écorces de quinquina


renferment
- Tanins catéchiques (3-5%), ceux-ci s’oxydent facilement en phlobaphènes ou rouge
de quinquina.
- une huile essentielle en faible quantité
- des acides organiques dont l’acide quinique
- un hétéroside triterpénique (le quinovoside).

Les principes actifs sont des alcaloïdes dérivés de la quinoleine, dont la teneur varie suivant
les espèces entre 2 et 15% .

Pharmacognosie 2021 132-


163
Ces alcaloïdes sont rattachés à un squelette fondamental comportant un noyau quinoleine et un
noyau bi-cyclique très spécifique : le noyau quinuclidique. Ces deux noyaux sont reliés par un carbone
portant une fonction alcool secondaire. Les alcaloïdes majeurs existent par paires de stéréo-isomères :
quinine-quinidine, cinchonine-cinchonidine.
La différence dans chaque couple d’alcaloïdes est due à la stéréochimie des carbones
asymétriques 8 et 9.
A côté de ces alcaloïdes majeurs, on note la présence d’alcaloïdes minoritaires :
- homologues hydrogénés en 10-11 des précédents (hydroquinine, hydroquinidine,
etc…).
- des dérivés cétoniques du type quinidine (ou quinotoxine)
- la cinchonamine possèdent un noyau indolique et un noyau quinuclidique à chaîne
vinylée.

Propriétés des alcaloïdes des qunquinas


Ces alcaloïdes possèdent 2 azotes basiques (cependant restent des bases faibles) ; il en résulte
qu’ils peuvent fournir avec les acides 2 séries de sels :
- des sels basiques (un seul azote est alors salifié) qui sont peu solubles dans l’eau, ont
une réaction neutre en solution aqueuse.
- des sels neutres (2 azotes salifiés), solubles dans l’eau où ils donnent une réaction
acide.
Les autres propriétés seront vues dans les essais.

Teneur des différentes espèces en alcaloïdes


C. succirubra renferme 3 à 8% d’alcaloïdes totaux (A.T.) avec une teneur en quinine
inférieure à 50% des A.T. . C. calissaya renferme 3 à 7% d’alcaloïdes avec plus de 50% de quinine.
C. ledgeriana est le plus riche avec 15% d’A.T. et 80 à 90% de quinine.

3. BIOGENESE DES ALCALOÏDES

La biogenèse des alcaloïdes des quinquinas a pour point de départ le tryptophane, comme le
laisse présager la présence d’alcaloïdes comme la cinchonamine. Le tryptophane, décarboxylé en
tryptamine se combine au sécologanoside (un hétéroside monoterpénique) pour donner la strictosidine,
le cinchonaminal puis la cinchonidinone et la quininone précurseurs des principaux alcaloïdes.

Pharmacognosie 2021 133-


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4. EXTRACTION DES ALCALOÏDES

La poudre d’écorces est alcalinisée le plus souvent par un mélange de Ca(OH2) et NaOH, puis
épuisées par un solvant organique (toluène ou hydrocarbures pétroliers divers). La solution organique
d’alcaloïdes est agitée ensuite avec une solution de H2SO4. Par concentration et refroidissement de la
solution aqueuse acide, le sulfate neutre de quinine précipite et le sulfate de quinidine reste en
solution.
La quinine est purifiée par des séries de cristallisations en jouant sur les différences de
solubilité des sels neutres et des sels basiques.
La quinidine est isolée des eaux mères sous forme de tartrate puis purifiée sous forme de
sulfate.

Pharmacognosie 2021 134-


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HO COOH

HO OH

HO
Acide quinique

H HO
N
HO N H
H3CO
H3CO

N N
Quinine Quinidine

HO H
H N HO N

N N
Cinchonine Cinchonidine

Pharmacognosie 2021 135-


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5. ACTION PHYSIOLOGIQUE

N NH2
H
+
CHO
Tryptamine Glucose
O

O
H3CO2C
Secologanoside

Intermédiaire
NH
N
H O

O
H3CO2C
OH Vincoside

N
N Quinine-cinchonidine
H

Cinchonamine

BIOSYNTHESE DES ALCALOÏDES DES QUINQUINAS

Pharmacognosie 2021 136-


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5. ACTION PHYSIOLOGIQUE

La drogue totale, à faible dose possède des propriétés astringentes, toniques, amères (dues aux
tanins). A forte dose, on observe une action antimalarique et antipyrétique.

Action des alcaloïdes

- La quinine est un toxique cellulaire agissant en particulier sur les protozoaires et


spécialement sur les plasmodiums agents du paludisme. Elle agit surtout sur les formes érythrocytaires
asexuées (=schizonticide), mais ne diminue pas la fréquence des rechutes car faiblement gamétocide
et inactive sur les sporozoides ainsi que les formes tissulaires de l’hématozoaire.
A dose élevée, la quinine provoque des troubles sensoriels (bourdonnements d’oreille,
vertiges, diplopie) et est ocytocique (risque d’avortement).
- La quinidine est un antiarythmique cardiaque. Elle diminue l’excitabilité du cœur
en diminuant sa perméabilité à l’ion potassium.

Esssais des quinquinas


Les essais botaniques ont beaucoup perdu de leur importance à cause de l’approvisionnement
quasi exclusive du marché par les plantations.
Les essais physico-chimiques sont fondamentaux, car la drogue est vendue sur son titre en
alcaloïdes.
Outre les réactions de précipitations classiques, on peut mettre en évidence et doser semi
quantitativement les alcaloïdes par C.C.M. de silice à partir d’un extrait chloroformique de la poudre
d’écorces alcalinisée ; on utilisera un témoin de quinine.
La quinine peut être caractérisée par la réaction de la thalléoquinine : l’extrait aqueux
sulfurique a une fluorescence bleue en UV, celle-ci disparaît lorsqu’on ajoute HCl.
Le dosage des alcaloïdes est fait sur le résidu d’alcaloïdes bases totaux, par protométrie
utilisant l’acide perchlorique, en milieu non aqueux (anhydride acétique).

Pharmacognosie 2021 137-


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7. EMPLOIS DES QUINQUINAS
DROGUE PULVERISEE

NaOH Ca (OH)2 /H2O


benzène

Marc Solution organique


H2SO4

Solution aqueuse Solution organique


(Sulfates neutres)
Na CO3 à chaud
concentration puis
refroidissement

Eaux mères Précipité


(Sulfate basique de quinine)
Tartrate
alcalin

Précipité Solution
(Tartrate quinine et
cinchonidine) (Tartrate quinidine et cinchonine

NaOH KI
éther

Solution Précipité
Solution Précipité
quinine cinchonine quinidine
cinchonidine
NH4OH
Précipité
cinchonine

EXTRACTION DES ALCALOÏDES DES QUINQUINAS

Pharmacognosie 2021 138-


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7. EMPLOIS DES QUINQUINAS

Les préparations galéniques à base de quinquinas (le rouge seulement) sont d’un emploi très
limité comme tonique, sous forme de teintures, d'extraits et de vins.
Les quinquinas sont utilisés de nos jours pour l’extraction des alcaloïdes.
L’extrait d’alcaloïdes totaux purifiés est utilisé sous forme de bichlorhydrate en injection
pour combattre l’accès palustre.

Spécialités : QUINIMAX, PALUJET.

La quinine est utilisée sous forme de sulfate basique, de chlorhydrate basique et


d’ethylcarbonate, dans le traitement de l’accès palustre et cela rarement (injection douloureuse).
Cependant elle reste indiquée dans les cas, hélas de plus en plus fréquents, de résistance aux
amino-4-quinoléines (chloroquine, amodiaquine).
La quasi totalité de la quinine produite dans le monde sert à la préparation de la quinidine, de
la quinicine et d’autres dérivés (1).
La quinidine sous forme de sulfate de phénhylbarbiturate ou d’arabogalactane sulfate est
indiquée dans les arythmies pour le maintien du rythme sinusal et la prévention des crises de
tachycardie.
Spécialités : LONGACOR, NATISEDINE.

(1) : Actual. Chim. Thér. 13è série.

Pharmacognosie 2021 139-


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LE PAVOT

PAPAVER SOMNIFERUM, PAPAVERACEAE

Le pavot somnifère est l’une des drogues dont les propriétés sont connues depuis la plus haute
antiquité ; il est mentionné dans une tablette sumérienne de Mésopotamie (4000 avant J.C.).
Au premier siècle de notre ère, DIOSCORIDE distinguait déjà le suc (opos en grec d'où vient
le nom opium) de l’extrait. Au 17ème siècle le laudanum de SYNENHAM fut mis au point par
Thomas SYDENHAM; sont utilisation fut très large au 18è et au 19è siècle. Les vertus du pavot
étaient également connues en Inde et en Chine. Son utilisation en toxicomanie apparut dès le 19è
siècle en Europe et en Extrême Orient occasionnant une consommation accrue.
La morphine, principal alcaloïde du pavot somnifère, fut découverte en 1806 par SEGUIN et
DEROSNE. C’est un antalgique très puissant et très dangereux à cause de la toxicomanie qu’il
entraîne et qui limite aujourd’hui son usage en thérapeutique.
De même son dérivé acétylé (Héroïne = diacetyl morphine) est proscrit. Par contre de
nombreux dérivés sont utilisés comme antitussifs par exemple.

1. ETUDE BOTANIQUE

Description

Le pavot est une plante herbacée annuelle, à tige dressée (mesurant 0,50 à 1,5m). Les feuilles sont
alternes, vert-glauque ; les feuilles de la partie inférieure sont découpées profondément, tandis que
celles supérieures sont simplement dentées.
La fleur est solitaire, terminale et blanche, rose ou violette selon la variété. Le fruit est une capsule
ovoïde ou sphérique renfermant 25 à 30 000 graines très petites. Il existe de très nombreuses variétés
et races dont trois principales :

La variété album ou pavot blanc à fleurs blanches et capsules ovoïdes indéhiscentes (pavot aveugle),
graines blanches. Elle est cultivée en Inde.
La variété glabrum, cultivée en Turquie. Elle a des fleurs pourpres, des capsules globuleuses avec des
graines blanches et noires.
La variété nigrum possède des fleurs violacées, des capsules aplaties déhiscentes par des pores (pavot
à œillettes). Les graines sont grises ou noirâtres. C’est l’espèce cultivée en Europe pour l’extraction de
l’huile d’œillette.

Pharmacognosie 2021 140-


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Les drogues

Le pavot est cultivé d’une part pour le suc obtenu par incision des capsules encore vertes
(préparation de l’opium), et d’autre part pour la production de la paille de pavot (capsule + le 1/3
supérieur des tiges). Ainsi on distingue la culture en climat tempéré et la culture en climat chaud.
- Culture en climat chaud :
Elle est traditionnellement réservée à la production de l’opium qui est défini comme le latex
épaissi provenant de l’incision des capsules encore vertes de plusieurs variétés de pavots (les
principales étant album et glabrum).
Les semis des graines se font en automne ; les races à mésocarpe épais sont recherchées, car
les incisions y sont plus facilement pratiquées lors de la récolte du suc.
Les pays autorisés à produire de l’opium, depuis le protocole de New York de 1953, sont au
nombre de 7 : Iran, Inde, Turquie, Grèce, Bulgarie, Yougoslavie et l’ex URSS. Aujourd’hui la
production licite ne se fait qu’en Inde (446 tonnes en 1984), les autres pays ayant abandonné la culture
ou alors ayant décidé de ne produire que la « paille » (Turquie) pour limiter les trafics illicites.
Les cultures illicites sont très répandues notamment en Asie du Sud-Est (Laos, Birmanie,
Thaïlande), au Pakistan au Mexique.

- La culture en climat tempéré est réservée à la production de la « paille » de pavot.


Jadis ces cultures servaient à la production de graines destinées à l’extraction de l’huile. La mise au
point d’une méthode rentable d’extraction des alcaloïdes à partir de races sélectionnées d’une part et
d’autre part par la volonté de réduire le trafic illicite (l’extraction nécessitant des installations
onéreuses), ont fait se développer la culture pour la production de « paille », dans de nombreux pays.

2. CHIMIE DES PAVOTS

L’opium
L’opium renferme des substances banales telles que : minéraux, glucides, acides organiques
(lactique et méconique).
Les principes actifs sont des alcaloïdes isoquinoléiques (10 à 20%de l'opium), Ces alcaloïdes
(plus de 20 isolés), sont sous forme de lactates, de méconates et de sulfates solubles dans l’eau.
Selon le squelette de base, on distingue 4 groupes d’alcaloïdes :

- le groupe du Morphinane où domine la morphine (5 à 20% de l’opium)


La morphine est une base peu soluble dans l’éther, insoluble dans l’eau ; ses sels sont solubles
dans l’eau. A cause de sa fonction phénol, elle donne des phénates alcalins solubles dans l’eau. La
morphine réduit le nitrate d’argent ammoniacal et donne une réaction colorée avec FeCl3.

Pharmacognosie 2021 141-


163
Les autres alcaloïdes du groupe sont la codéine (methylmorphine) et la thébaïne (dérivé de
l’énol-codéinone).
La codéine est plus soluble que la morphine, cependant elle est insoluble dans l’eau en milieu
alcalin (ne donne pas de phénates).

- le groupe des bensylisoquinoléines : ce sont plus précisément des dérivés du benzyl-


tétrahydroisoquinoléine. Le plus important par sa teneur est la papavérine (0,5 à 1,5% de l’opium).

- le goupe des phtalyl-tétrahydroisoquinoleines : l’alcaloïde majoritaire de ce groupe


est la noscapine ou narcotine (2 à 8%) ; la noscapine est une base très faible donnant des sels peu
solubles dans l’eau froide ; son cycle lactonique s’ouvre facilement en milieu alcalin.

- Groupe de la protopine : ces alcaloïdes ont leur noyau isoquinoléique ouvert.

Chimie des autres parties du pavot

- La paille de pavot est constituée par la partie supérieure de la plante (tige + feuilles
+ fruit).
Il existe deux procédés d’obtention de cette paille : la première consiste à récolter à maturité
complète, lorsque les feuilles sont desséchées et les graines riches en huile ; la paille est alors

broyée et stockée sous forme de granulés. Le second procédé consiste à récolter « en vert » environ 3
semaines après la floraison ; il faut alors sécher rapidement. Ce dernier procédé permet d’obtenir une
plus grande quantité d’alcaloïdes (-0,3%).
On commercialise également un concentré de paille titrant environ 5% de morphine.

- La graine de pavot ne renferme pas d’alcaloïdes. On y trouve des glucides, des


protéines et surtout des lipides (40 à 50%).

- Les feuilles renferment des traces d’alcaloïdes.

Pharmacognosie 2021 142-


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HO H3CO

N CH3 H N CH3
O H O

HO HO
Codéine
Morphine

H3CO

N CH3
O O
O N CH3
H3CO H
H
H3CO
O
Thébaïne
OCH3
O
H3CO OCH3

N Noscapine
H3CO
OCH3

OCH3

papavérine

Alcaloïdes du pavot

Pharmacognosie 2021 143-


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3. EXTRACTION DES ALCALOÏDES DU PAVOT

Extraction des alcaloïdes de l’opium


La majeure partie de l’opium produite est actuellement destinée à l’extraction des alcaloïdes
(840 tonnes, soit 77 tonnes de morphine). La méthode classique d'extraction est celle de
ROBERTSON-GREGORY : elle consiste à macérer l’opium dans l’eau, tous les alcaloïdes sont
solubilisés sauf la noscapine qui reste dans le marc. Par addition de chlorure de calcium, les acides
organiques précipitent sous forme de sels de calcium ; les alcaloïdes, après concentration des eaux-
mères, précipitent sous forme de chlorhydrates pour donner le sel de Grégory (mélange de
chlorhydrates de morphine et de codéine).

Extraction de la paille de pavot


Etant donné la teneur très faible en alcaloïdes, l’extraction demande des procédés spéciaux
ayant un maximum de rentabilité. La méthode du KABAY répond à ce critère. Elle consiste à tremper
la paille dans une solution aqueuse légèrement alcaline ; celle-ci est épuisée par un alcool non miscible
à l’eau, l’addition ultérieure d’ammoniaque précipite la morphine.
D’autres méthodes font intervenir des fixations/élutions sur résines échangeuses d’ions.

4. ACTION PHARMACOLOGIQUE

L’action de l’opium résulte des actions cumulées des différents alcaloïdes. On note des cas
d’antagonisme et des cas de potentialisation.

Action de la morphine
Dans l’opium, cette action prime sur celle des autres alcaloïdes. On note une sensibilité
variable suivant l’espèce animale et l’âge (enfants et vieillards sont plus sensibles).

Sur le SNC la morphine a une action à la fois excitante (faible dose) et sédative (forte dose).
Elle entraîne une dépression respiratoire. Elle procure une sensation d’euphorie et de bien- être, avec
accoutumance et assuétude. Ceci fait que la morphine est classée parmi les stupéfiants.

Sur le tube digestif : la morphine provoque des spasmes stomacaux avec vomissements. Les
sécrétions sont diminuées et le péristaltisme intestinal également, entraînant une constipation; d'où
l'action antidiarrhéique des Opiacées.
La pharmacocinétique de la morphine est extrêmement importante, car a permis de découvrir
les peptides analgésiques (enképhalines et endorphines).

Pharmacognosie 2021 144-


163
En effet on a montré qu’il existe dans le SNC des mammifères, des récepteurs naturels de la
morphine et qui sont originellement des sites d’action de peptides synthétisés dans l’organisme ; ces
peptides ont une action semblable à celle de la morphine. Cette découverte a permis de comprendre
sous certains aspects l’acupuncture.

La codéine est un excellent antitussif, elle sert de référence. Son action sédative est peu
marquée. Cependant, à doses fortes et des prises prolongées, on peut observer une dépendance
analogue à celle de la morphine.

La papavérine est un spasmolytique, stimulant cardiorespiratoire, obtenu surtout par synthèse


chimique.

La noscapine est un antitussif à action centrale, bronchodilatateur.

5. ESSAIS DE L’OPIUM
Les essais sont essentiellement physico-chimiques.

Essais d’identification

- L’identification de l’opium peut se faire en mettant en évidence certains composés


comme l’acide méconique. Celui-ci est extrait à l’éther à partir d’un extrait aqueux acidifié d’opium ;
en présence de FeCl3 on obtient un coloration rouge.
- Les alcaloïdes sont caractérisés par C.C.M. de la teinture dans l’alcool à 60° et en
présence de témoins (morphine, noscapine…)
- Une autre réaction colorée peut être envisagée avec le réactif sulfo-fomolé qui donne
avec le résidu d’alcaloïdes totaux une coloration caractéristique de la morphine.

Dosage de la morphine
Le dosage est basé sur la solubilité particulière de la morphine. Elle est dosée par acidimétrie
après élimination des autres alcaloïdes. L’opium est d’abord traité par Ca(OH)2 (chaux) : l’acide
méconique précipite, le morphinate de calcium reste en solution. Par addition de chlorure
d’ammonium, on a formation de CaCl2 et d’ammoniaque qui provoque la précipitation de la morphine
base. La morphine est alors recueillie, lavée à l’eau saturée de morphine et à l’éther, puis séchée.
Le précipité est ensuite redissous dans du méthanol bouillant et, après dilution, on titre avec
HCl 0,1N en présence de rouge de méthyle.

Pharmacognosie 2021 145-


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6. EMPLOIS DU PAVOT

L’opium et le pavot sont surtout utilisés pour l’extraction des alcaloïdes. Cependant, l’opium
est encore utilisé sous forme galénique.

Formes galéniques de l’opium


On prépare un extrait d’opium titrant 20% de morphine, qui sert à préparer une teinture titrant
1% de morphine, à partir de laquelle les autres formes sont préparées : Sirop d’opium fort (0,05%),
sirop d’opium faible (0,01%), teinture benzoïque (0,05% appelée Elixir Parégorique).
La poudre d’opium sert à préparer la teinture d’opium safranée (ou laudanum de Sydenham),
titrant 1% de morphine.

Extraction des alcaloïdes


Comme vu plus haut, la majeure partie de l’opium et du pavot est destinée à l’extraction de la
morphine qui va surtout servir à préparer des dérivés antitussifs, analgésiques ou antagonistes
morphiniques.
La morphine est employée sous forme de chlorhydrate ou de sulfate par voie cutanée à la
dose de 1 à 3 cg/24H. Elle est contre-indiquée chez les enfants et chez les vieillards.
La codéine (Tableau B) est le principal alcaloïde utilisé (sulfate, camphosulfonate,
iodhydrate…) comme antitussif et antidiarrhéique. 80% de la morphine produite sert à préparer la
codéine par méthylation. Les spécialités à base de codéine sont très nombreuses (NEOCODION,
BEXOL…).
La noscapine (Tableau A) est utilisé sous forme de base ou de chlorhydrate comme antitussif.
La thébaine est transformée en codéine ou en oxycodone (ou dihydrone), un analgésique et
antitussif.

Dérivés morphiniques : Codéthyline (éthylmorphine) antitussif plus toxique que la codéine,


Pholcodine (morpholino-ethylmorphine), antitussif plus actif et moins toxique, Oxycodone (OH-14-
codeinone), analgésique; Apomorphine (émétique), Nalorphine (N-allyl nor-morphine), antagoniste
morphinique partiel. Nalorphine (N-allyl nor-morphine), antagoniste partiel, Nalaxone (N-allyl OH-
14 dihydroxy 7,8 norcodeinone), antagoniste pur.

Pharmacognosie 2021 146-


163
7. AUTRES PAVOTS

Diverses variétés de Papaver bracteatum présentent la particularité de n'élaborer que de la


thébaïne (pas de morphine). Ces espèces sont originaires d’Iran et d’Anatolie orientale ; leur
généralisation pourrait limiter les détournements vers les usages illégaux.

LES IPECAS : CEPHAELIS IPECACUANHA et CEPHAELIS ACUMINATA ( RUBIACEAE)

La racine et le rhizome de ces deux Rubiacées figurent à la pharmacopée africaine.

1. ETUDE BOTANIQUE

Les ipécas sont des sous-arbrisseaux de 20-40cm de haut, originaires des régions
tropicales humides d’Amérique du Sud ; C. ipecacuanha est originaire du Brésil, C. acuminata de
Colombie et du Nicaragua.

La drogue est constituée par les racines. Les racines de C. ipecacuanha (ou ipéca du Brésil)
se présentent en fragments tortueux de 10 cm x 2 à 4mm ; leur surface, gris noirâtre présente une
succession de renflements circulaires (d’où le nom d’ipéca annelé mineur) séparés par d’étroits
étranglements. Les rhizomes sont des fragments courts adhérents aux racines.
Les racines de C. acuminata (ou ipéca du Nicaragua, de Panama, de Carthagène) ont un
diamètre plus grand, mais de forme voisine de l’ipéca du Brésil.

2. COMPOSITION CHIMIQUE

On trouve des principes banaux tels que tanins catéchiques, un hétéroside azoté
(l'ipécoside).
Les principes actifs sont des alcaloïdes bisisoquinoléiques (2-3%) dont le plus important est
l’émétine (60% des alcaloïdes totaux.) suivi de la céphéline (25%). Ce sont des alcaloïdes
isoquinoléino-monoterpéniques.

3. BIOGENESE DES ALCALOÏDES

La biosynthèse des alcaloïdes des ipéca est assez différente de celle de la plupart des
isoquinoléiques et se rapproche plutôt de la biogenèse des indolo-monoterpéniques. En effet, ces

Pharmacognosie 2021 147-


163
alcaloïdes résultent de la condensation initiale d’une molécule de dopamine et d’une molécule de
sécologanoside. Le désacétyl-ipécoside obtenu (épimère) conduit à l’émétine.

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE

La drogue totale doit ses propriétés à l’émétine qui est un toxique et irritant cellulaire.
Son action s’exerce sur les cellules de certains protozoaires et notamment sur Entamoeba
histolitica (l'amibe dysentérique).
Son action toxique chez l’homme se manifeste par des vomissements, une cardiotoxicité et
une hypertension. Au niveau des bronches on note une action expectrorante.
La céphaeline a une action émétique plus marquée.

5. EMPLOIS DES IPECAS

Les ipeca Ils servent à la préparation de formes galéniques et à l’extraction de l’émétine et de


la céphaline.

Formes galéniques : Poudre titrée à 2% en A.T. ; extrait, teinture et sirop sont utilisés comme
expectorant et le sirop comme vomitif.
L’ipéca entre dans la composition du sirop de Desessartz (antitussif) ou sirop officinal
d’ipecacuanha composé, en association avec le séné, coquelicot, serpolet et le sulfate de magnésium.

Extraction de l’émétine
La céphéline est transformée en émétine par méthylation. Le chlorhydrate d’émétine est
encore l’un des produits les plus actifs contre l’amibiase hépatique (abcès amibien du foie) et reste
utilisée malgré sa toxicité. Dans la thérapeutique courante, on lui préfère son dérivé, la déhydro-2,3
émétine produite par hémi-synthèse. Celle-ci est utilisée par voie orale et par voie parentérale (IM et
SC) dans l’amibiase intestinale et dans l’abcès amibien du foie, les distomatoses hépatobiliaires et
certaines schistosomiases.

LE COLCHIQUE

Colchicum autumnale (Liliaceae)

Le colchique est une plante connue depuis l’antiquité grecque et arabe pour sa toxicité et son
action antigouteuse. Aujourd’hui les graines sont utilisées pour l’extraction de la colchicine.

Pharmacognosie 2021 148-


163
1. ETUDE BOTANIQUE

Le colchique est une plante herbacée poussant dans les prés d’Europe, vivace par son bulbe.
Le fruit est une capsule septicide à 3 loges, contenant 60 à 80 petites graines par loge.
La plante est cultivée en Italie, France, Europe Centrale et Orientale.

La drogue : les graines de colchique sont petites (diamètre ne dépassant pas 3mm), trèd dure
et brun rougeâtre. Le tégument se développe anormalement sur un côté de la graine en formant un
caroncule qui renferme de l’amidon. Pour les besoins de l’extraction, on peut également utiliser le
bulbe qui est récolté en juillet-août avant l’apparition de la hampe florale ou après la chute des
feuilles.

2. COMPOSITION CHIMIQUE

La teneur en alcaloïdes totaux varie de 0,6 à 1,2% pour les graines et de 0,3 à 0,6% pour les
bulbes. Les alcaloïdes sont des amides non basiques dérivés du tropolone ; ils sont solubles dans l’eau
et le chloroforme; ne forment pas de sels définis, mais précipitent avec les réactifs généraux des
alcaloïdes.
Le principal alcaloïde est la colchicine ; elle est accompagné de plusieurs autres substances
tropoloniques (colchicoside …).

3. BIOGENESE
On a fait dériver les tropolones de la phénéthyl-isoquinoléine, mais en réalité cette voie
biogénétique n’est pas évidente ; cependant on peut dire que la phénylalanine (par l’acide cinnamique)
et la tyrosine (par la dopamine) sont incorporées.

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE DE LA COLCHICINE

La colchicine est un irritant émétocathartique chez l’homme et les carnivores, toxique à forte
dose. Son action antigouteuse se manifeste par une activité anti-inflammatoire, sans action sur la
synthèse de l’acide urique (conférer flavonoïdes). Elle s’élimine lentement, pouvant ainsi provoquer
des accidents digestifs.
La colchicine a une action antimitotique, bloquant la division cellulaire en métaphase et
occasionnant ainsi la formation de polyploïdes (utilisation agricole).

5. ESSAIS

Pharmacognosie 2021 149-


163
La colchicine est caractérisée par C.C.M. de la teinture au 1/5, la révélation se fait par
pulvérisation d’un mélange d’anhydride acétique et de H2SO4 (coloration jaune).
Le dosage est pondéral (Pharmacopée française 1972).

6. EMPLOIS

La colchicine est un antigoutteux encore très utilisé en association avec l’aspirine et la


vitamine B1. Elle est également utilisée dans les sclérodermies et les cirrhoses comme inhibiteur de la
biosynthèse du collagène.

La N-désacetylthiocolchicine, un dérivé de la colchicine, est un anticancéreux


(THIOCOLCIRAN).

Le thiocolchicoside, un dérivé soufré du colchicoside, est un décontracturant musculaire


(COLTRAMYL).
En dehors des emplois médicaux, la colchicine est utilisée en horticulture pour l’obtention des
polyploïdes (voir cours sur la multiplication des plantes médicinales).

N.B. Certaines espèces du genre Gloriosa (les graines de G. superba, Liliaceae) sont recherchées
comme source industrielle de colchicine.

Pharmacognosie 2021 150-


163
RO HO
N COCH3
H3CO HO N
H
H
O glu
H
H H
N O
H3CO2C
H
Ipécoside

OCH3

OCH3

Emétine (R = CH3 )
Céphéline (R = H)

H3C O

H3CO
NH
H
H3CO

H3CO
O
Colchicine OCH3

Pharmacognosie 2021 151-


163
PLANTES A BASES PURIQUES : GENERALITES SUR LES BASES PURIQUES

En fait, le terme d’alcaloïde ne convient pas aux bases puriques, si l’on se réfère à la définition
des alcaloïdes (voir généralités).
En effet ces bases ne donnent pas de précipités avec les réactifs généraux des alcaloïdes ; ils
sont solubles dans l’eau chaude et dans les solvants chlorés.

1. STRUCTURE
Les bases puriques sont des composés à noyau purine, plus précisément xanthine (d’où
le nom de bases xanthiques). Leur structure bicyclique renferme un noyau pyrimidine annelé à un
noyau imidazole.

2. PROPRIETES PHYSICO-CHIMIQUES
Les alcaloïdes puriques sont des bases très faibles directement extractibles par un solvant
organique apolaire, sans déplacement préalable de leurs sels. A chaud, les sels sont dissociés dans les
solvants organiques.
Théophylline et théobromine sont les moins basiques car comportent un hydrogène plus ou
moins mobile (-N-H) conférant à la molécule une certaine acidité.
La mise en évidence de ces composés se fait par une réaction colorée dite « de la murexide»,
mise en œuvre sur un extrait chloroformique en milieu alcalin sur lequel on fait agir de l’eau de brome
ou de l’acide nitrique, puis après addition d’ammoniaque, on obtient une coloration violacée.

3. ESSAIS

Qualitatifs : caractérisation des bases par C.C.M. en présence de témoins.

Dosage des alcaloïdes : Ce dosage pondéral comporte les étapes suivantes :


- Insolubilisation des tanins par trituration avec l’oxyde de magnésium.

Pharmacognosie 2021 152-


163
COOH
HO

OH
HO
O C
OH
HO O
Acide chlorogénique

CH3 O
O
CH3 N CH3 H
N N

O N N
N
O
CH3 CH3
Caféine Théophiline
O CH3

HN N

O
N N

CH3
CH3
Théobromine

Pharmacognosie 2021 153-


163
- Extraction par le chloroforme à chaud.
- Le résidu de l’extrait chloroformique est repris par l’éther de pétrole, puis on extrait
par HCl dilué.
- La phase aqueuse est extraite au chloroforme après alcalinisation à l’ammoniaque.
- La phase chloroformique donne un résidu qui est pesé.

4. ACTION PHYSIOLOGIQUE

Les bases puriques possèdent en commun plusieurs propriétés pharmacologiques mais


l’intensité des actions varie avec la nature chimique des différentes bases.

Action sur le SNC


A ce niveau la caféine est la plus active. Elle excite toutes les parties du SNC. Les bases
puriques diminuent la sensation de fatigue, augmentent le travail intellectuel, diminue la somnolence.
A fortes doses, elles déclenchent des convulsions cloniques. On note par ailleurs une excitation des
centres spinaux, augmentant ainsi l’excitabilité réflexe.
Au niveau des fibres motrices, les xanthines favorisent la libération d’acétylcholine. En outre,
elles augmentent l’amplitude du premier potentiel de plaque motrice. Cette action est analogue à celle
d’un accroissement de l'ion calcium.

Action sur les muscles


Les xanthines accroissent la force des contractions des muscles squelettiques ; cette action est
directe et porte uniquement sur l’amplitude des contractions, le temps nécessaire pour atteindre le
maximum et la durée des contractions restent inchangées.
Sur les fibres lisses on note un relâchement au niveau des bronches (surtout la théophylline),
les vaisseaux, l’intestin et l’uretère.
Action cardio-vasculaire
Les xanthines stimulent le cœur. Elles accroissent le rythme et la force des contractions
cardiaques. L’amplitude de la contraction est accrue ; l’action est semblable à celle des catécholamines
bien que plus lente à s’établir. Les effets cardiaques de ces catécholamines sont potentialisés.

Action sur le rein


Les xanthines ont une action diurétique. La caféine est la moins active. Elles provoquent une
diurèse hydrique et sodique en réduisant la réabsorption du sodium au niveau du tubule proximal.

Pharmacognosie 2021 154-


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Mécanisme d’action
Les xanthines agissent sur le métabolisme du calcium, inhibent la phospho-diesterase
responsable de l’hydrolyse du 3’5‘ AMP cyclique.
L’action sur le calcium est responsable des effets musculaires et cardiaques, tandis que
l’action sur la phosphodiesterase rend compte des effets pharmacologiques tels que : glycogénolyse et
hyperglycémie, lipolyse, augmentation de la sécrétion d’insuline et de rénine, mobilisation du calcium
osseux.
Enfin les xanthines sont des antagonistes puissants des nucléotides comme l’ATP dans les
jonctions où ils jouent le rôle de neurotransmetteurs.

Remarque : L’action des alcaloïdes est modifiée par la présence de certains composés dans la
drogue totale : les tanins, par les combinaisons insolubles qu’ils donnent, confèrent un effet retardé et
durable. Les flavonoïdes renforcent l’action diurétique.

PLANTES A CAFEINE

1. LE CAFEIER

La drogue appelée café, et constituée par l’amande, provient de Coffea divers notamment de
Coffea arabica et C. canephora de la famille des Rubiaceae.

a) Etude botanique

Description
Les caféiers sont de petits arbres originaires d’Afrique ; leurs feuilles sont persistantes,
courtement pétiolées, à limbe ovale, vert luisant sur la face supérieure. Les fleurs blanches, verticillées
sont très odorantes. Le fruit est une drupe ovoïde verte puis rouge à maturité.
On distingue deux espèces cultivées :
- C. arabica, originaire des hauts plateaux d’Abyssinie (Ethiopie actuelle), possède
des feuilles de 10 à 15cm de long sur 4 à 5cm de large, des fruits de 15 à 20mm de long.

- C. canephora, originaire de l’Ouest africain, est une espèce plus robuste qui se
distingue du précédent par des feuilles plus grandes, des inflorescences plus denses et
des fruits plus petits.

Pharmacognosie 2021 155-


163
Le fruit du caféier comprend un épicarpe rouge et un mésocarpe pulpeux renfermant des
graines. Ces graines sont constituées, de l’extérieur vers l’intérieur par : un endocarpe sclérifié ou
« parche », un tégument plus fin (le tégument séminal ou « tégument argentin ») et enfin une amande
ou « fève » comprenant elle-même un albumen corné et l’embryon.
Le fruit entier est appelé « café cerise » ; débarrassé de l’épicarpe et du mésocarpe, c’est le
« café en parche » ; réduit à l’amande, c’est le café marchand ou café « en grain ».

Culture et récolte
La culture, délicate, est réalisée à l’aide de variétés sélectionnées. Coffea arabica var typica et
var « Mokka » sont cultivées au Brésil, Colombie, Arabie et en Inde. Coffea canephora var. robusta
est cultivée dans les régions basses et humides de l’Ouest africain (Côte-d’Ivoire, Congo).
La récolte des fruits, essentiellement manuelle, se fait au moment de leur pleine maturité.

b) Traitement du café cerise


- par voie humide : on procède au dépulpage, le mucilage est éliminé par
fermentation : après lavage à l’eau, on obtient le café en parche que l’on sèche au soleil ou à l’air
chaud. On termine en éliminant mécaniquement l’endocarpe et le « tégument argentin ».
- par voie sèche : le traitement consiste à sécher à l’air chaud ou au soleil ensuite décortiquer
mécaniquement l’ensemble des enveloppes.
A l’issue de ces deux procédés on obtient le café vert « en fève » ou « en grain » qui sont les
cafés commerciaux.
La préparation du café torréfié a pour but de développer l’arôme particulier du café. C’est une
opération délicate consistant en un « grillage » des grains vers 200°C, réalisé au moyen d’un courant
d’air chaud et sous agitation. Les grains refroidis sont ensuite triés et généralement enrobés pour leur
donner un aspect lustré et en même temps favoriser leur conservation ; celle-ci nécessite souvent un
emballage sous vide.

c) Composition chimique du café


Selon que l’on est en présence de café vert ou de café torréfié, on aura une composition
chimique légèrement différente.

Le café vert
On y trouve 10 à 12% d’eau et 3 à 4% de matières minérales représentées par des phosphates
et sulfates de potassium, calcium et sodium.
Les glucides représentent plus de 50% de la matière sèche ; ce sont surtout des
polysaccharides : cellulose et dérivés, amidon, gommes, mucilages et pectines.

Pharmacognosie 2021 156-


163
Les lipides formés par des stéroïdes et terpénoïdes, représentent 10 à 15% des constituants du
café vert.
On retrouve des acides organiques aliphatiques (oxalique, citrique, malique, succinique…) et
des acides phénols surtout sous forme de combinaisons avec l’acide quinique ; ce sont notamment les
acides chlorogéniques (ou acides caféyl-quiniques).
Parmi les composés azotés on trouve :
- des protéines, des acides aminés libres et de la trigonelline.
- des bases puriques représentées surtout par la caféine dont la teneur varie selon les
espèces : 0,6 à 2% pour C. arabica et 1 à 3% pour C. canephora. On trouve également des traces de
théophylline et de théobromine.

Café torréfié
Au cours de la torréfaction, certaines modifications de la composition chimique on lieu :

- la teneur en eau est abaissée au voisinage de 5%


- les glucides sont partiellement hydrolysés.
- les acides chlorogéniques sont en partie détruits
- la trigonelline est transformée en amide nicotinique (vitamine PP).
- la caféine est partiellement libérée de ses combinaisons tanniques.
- l’arôme est développé : il s’agit d’un mélange très complexe de produits odorants.
- enfin il y aurait formation d’une caféotoxine, mais dont la présence est controversée.

d) Essais
- Vérifications de caractères organoleptiques : odeur, goût, couleur.
- Dosage de la caféine (voir généralités).
e) Action physiologique

En dehors de l’action physiologique de la caféine, il faut noter l’action particulière des acides
chlorogéniques doués de propriétés stimulantes, diurétiques, expectorantes.

f) Emploi du café
Le café est le premier produit agricole d’exportation des pays non développés (5,6 millions de
tonnes en 1983). Le café produit sert à fabriquer différents produits :
Le café soluble est un nébulisat ou un lyophilisat d’un extrait aqueux.

Pharmacognosie 2021 157-


163
Le café décaféiné est obtenu en traitant le café vert à la vapeur d’eau puis au
trichloroéthylène. On obtient des taux de caféine voisins de 0,1%. D’autres procédés utilisent le CO2
supercritique après imbibition préalable du grain de café par l’eau ; on récupère alors la caféine sur
charbon actif. Cependant le café décaféiné reste toxique pour le SNC par la caféotoxine.
Le café moulu : il est consommé après extraction.

Extraction de la caféine
Une partie de la caféine utilisée dans l’industrie pharmaceutique ou pour charger les boissons
à base de cola, provient de la préparation des cafés décaféinés. On en extrait également des suifs
provenant de torréfaction.
La caféine est utilisée comme excitant cortical et analeptique cardiaque dans plusieurs
spécialités par voie orale ; par voie externe comme anti-adipeux dans les surcharges adipeuses sous-
cutanées (PERCUTAFEINE GEL).

2. LE THEIER

Thea sinensis (ou Camelia thea), Ternstremiaceae

a) Etude botanique

Le théier est un arbuste originaire de l’Inde. Les feuilles sont persistantes,


régulières, ovales avec des bords dentés munis de griffes. Lorsqu’elles sont jeunes, les feuilles sont
poilues et souples ; âgées, elles sont glabres et coriaces. Les fleurs sont blanches ; le fruit est une
capsule loculicide.
La drogue est constituée par les feuilles jeunes ayant subi diverses transformations destinées
à développer l’arôme ou à les stabiliser (voir préparations des thés commerciaux).

Culture du théier et récolte

La culture du théier exige un climat chaud (>20°C) et humide, une altitude comprise entre
1000 et 2000m. L’arbuste est fréquemment taillé, ce qui favorise la ramification et la pousse de jeunes
feuilles.
La récolte se fait plusieurs fois par an et commence chez les plantes de 3 ans jusqu’à 12 ans.
Cette récolte est exclusivement manuelle ; les bourgeons terminaux accompagnés de quelques feuilles
(4 à 5) sont cueillis. Les bourgeons foliaires non épanouis constituent le thé « Pékoé ».

Pharmacognosie 2021 158-


163
b) Préparation des thés commerciaux

Les feuilles, une fois récoltées, vont subir des transformations pour donner deux types de
thés : les thés verts et les thés noirs.
Les thés verts sont obtenus par stabilisation des feuilles à la vapeur d’eau suivie d’une
torréfaction, elles sont ensuite roulées à la main ou à la machine. On y ajoute souvent des colorants
(indigo, curcuma ou sulfate de vivre).
Les thés noirs sont des thés fermentés, ils ont un arôme particulier. On distingue les
opérations suivantes :
- Flétrissage des feuilles par un courant d’air chaud (30-35°C) pendant 18 à 20 heures.
- Roulage permettant de briser les cellules pour en libérer le suc et permettre une bonne
fermentation.

- La dessiccation est effectuée à 90°C pendant 30mn (jusqu'à 5% d’eau).


- Le criblage permet de séparer différentes qualités : "orange pékoé" (feuilles entières)
"Fannings" (feuilles brisées).

c) Composition chimique du thé

Le thé renferme 4 à 7% de sels minéraux (sels de potassium surtout), des acides organiques
(succinique, malique, chlorogénique, galloyl-quinique).
Les composés les plus importants sont :
- des bases puriques : 2 à 4% comprenant surtout de la caféine avec de petites
quantités de théophylline. Ces bases sont combinées dans la plante aux acides organiques et
aux tanins.
- des flavonoïdes hétérosides du quercétol et du kaempférol.
- des tanins constitués par des catéchols et leurs esters galliques, ainsi que des tanins
catéchiques condensés.
- une huile essentielle à l’état de trace, se développant au cours de la fermentation.
- des vitamines (C et B) et des enzymes (oxydases ou théases).

d) Action physiologique

Le thé est un stimulant central et cardio-respiratoire, action due à la caféine et à la


théophylline. C’est aussi un diurétique (bases puriques et flavonoïdes) ; le thé a également une
propriété vitaminique P (catéchols et flavonoïdes).

Pharmacognosie 2021 159-


163
Le thé peut provoquer une intoxication chronique (le théisme) qui se manifeste par des
insomnies, une excitation, une dyspepsie et un amaigrissement.

e) Emplois du thé
Le thé sert à préparer des boissons stimulantes de très grande consommation.

3. LES KOLATIERS

Cola nitida, C. acuminata et C. verticillata, Sterculiaceae

Description
Les kolatiers sont des arbres d’Afrique tropicale, à feuilles isolées ou verticillées. Le fruit est
composé de 5 follicules verruqueuses, mesurant 5 à 10 cm de long et disposées grossièrement en
étoile. Chaque follicule renferme 5 à 10 graines blanches ou rouges recouvertes d’un tégument
blanchâtre.
La graine peut être composée de 2 fragments (C. nitida) ou de 4 à 6 fragments (C. acuminata
et C. verticillata). Pour C. nitida on distingue plusieurs variétés suivant la taille et l’aspect des
graines : rubra, alba, mixta, pallida.
La drogue est constituée par les graines sans téguments (cotylédons).

b) Culture et formes commerciales

Le kolatier pousse et est cultivé en Afrique Occidentale, et au Congo, à basse altitude.


Les graines récoltées sont laissées en tas durant 3 jours, puis lavées. La noix de cola
commerciale se présente sous trois formes :

- Noix fraîches : elles sont enveloppées dans des feuilles, dans la tourbe ou alors dans
du charbon de bois humidifiés régulièrement. Leur conservation est précaire, mais reste la forme de
vente la plus courante
- Noix stabilisées à la vapeur d’eau, elles sont de bonne conservation.
- Noix séchées : le séchage se fait avec précaution afin d’éviter un durcissement, une
fermentation ou une oxydation.

Pharmacognosie 2021 160-


163
c) Composition chumique de la noix de cola

La noix de cola renferme 40% d’amidon et de sucres, 2 à 4% de tanins catéchiques qui


s’oxydent facilement pour donner des phlobaphènes (ou rouge de cola). Les bases puriques sont
représentées principalement par la caféine (2%) accompagnée de traces de théobromine.
Dans la noix fraîche, les alcaloïdes sont combinés aux tanins alors qu’ils sont libres dans la
noix séchée.

d) Emplois

La noix fraîche est un masticatoire, tonique musculaire et nerveux. A partir de la noix séchée
sont préparées des formes galéniques : Extrait ferme (5% caféine), extrait fluide (1,5% caféine), extrait
mou stabilisé (5% caféine), vins et teintures (0,10% caféine). Ces formes galéniques entrent dans la
fabrication de médicaments et de boissons toniques, stimulantes.
Les extraits obtenus à partir de noix stabilisées ont l’avantage d’avoir une action douce
(caféine liée aux tanins) et de conserver une action vitaminique P due aux catéchines.

4. AUTRES PLANTES A CAFEINE

Le Guarana : Paullinia sorbilis, Sapindaceae


C’est une liane brésilienne dont les graines servent à préparer une pâte séchée appelée
guarana. Le guarana renferme 4% de caféine, 10% de tanins. Les fleurs et les feuilles renferment
surtout de la théobromine.
Le guarana est employé à la préparation de boissons stimulantes très consommées au Brésil.

La Maté : Ilex paraguariensis, Ilicaceae


Le Maté est un petit arbre d’Amérique du Sud (Brésil, Paraguay, Argentine). Les feuilles
séchées renferment 1 à 2% de caféine et servent à la préparation de boissons stimulantes.

Pharmacognosie 2021 161-


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LE CACAOYER : Theobroma cacao, Sterculiaceae

1. ETUDE BOTANIQUE

Description
Le cacaoyer est un petit arbre spontané dans le sous-bois des grandes forêts humides
d’Amérique tropicale. Son port est ramifié, ses feuilles alternes, simples et grandes ; ses fleurs sont
très petites, blanches ou rosées naissant directement sur le tronc et les grandes branches. Le fruit est
une cabosse de 15 à 20 cm de long sur 10 à 12 cm de large ; son enveloppe est coriace, jaune ou rouge
à maturité et marquée de côtes longitudinales verruqueuses. Il renferme de nombreuses graines (30 à
40) ou "fèves de cacao" enveloppées d’une pulpe blanche.
Les graines, ovoïdes, mesurent 2 à 3 cm de long sur 1 à 1,5 cm de large avec un tégument
externe (« coque ») mince, brun-rougeâtre.

Culture et récolte
Le cacaoyer est essentiellement cultivé en Amérique et en Afrique tropicale dans des
conditions climatiques particulières : température moyenne 25°C, humidité constante, etc..
Il existe plusieurs variétés dont les variétés "cryollo"et "forastero". On récolte les fruits des arbres
âgés d’au moins 6 ans.
La préparation du cacao commercial nécessite plusieurs jours de fermentation suivie d’un
séchage au cours desquels l’arôme se développe.
Les pays producteurs sont : Côte d’Ivoire (premier producteur mondial), Ghana, Nigeria,
Cameroun, Equateur, Brésil.

2. COMPOSITION CHIMIQUE DE LA GRAINE SECHEE

L’amende de la graine contient environ 50% de triglycérides d’acides gras saturés en C16 et
C18. Ces lipides sont solides à la température ordinaire et constituent le beurre de cacao. On trouve
également des tanins catéchiques qui s’oxydent en rouge de cacao.
Les xanthines représentent 1 à 3% de la drogue, sont représentées surtout par la théobromine
et peu de caféine. On retrouve la théobromine dans la coque (1,5%) après la fermentation et la
torréfaction.

3. EMPLOIS DES GRAINES DE CACAOYER

Pharmacognosie 2021 162-


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Extraction du beurre de cacao par expression à chaud. Il sert comme excipient pour
suppositoires.
Les coques servent à l’extraction de la théobromine (par eau chaude).
La poudre de cacao sert comme correcteur de goût pour les médicaments destinés aux enfants
(antibiotiques, vitamines…). Elle sert également à la fabrication du chocolat. Au Sénégal, la poudre de
cacao est additionnée de pâte d'arachide et de sucre pour donner une pâte alimentaire à tartiner, très
prisée.

Pharmacognosie 2021 163-


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