Chapitre 3 2024-2025 CHM 361

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Chapitre 3 2024-2025 | CHM 361

Chapitre 3 : Défauts des structures cristallines, non-stœchiométrie et solutions solides


3.1. Défauts des structures cristallines
3.1.1. Cristal parfait et cristal réel
Un défaut est considéré comme tout écart à l'agencement parfaitement ordonné du cristal.
L’agacement des particules du cristal réel s’écarte en général de celui du cristal idéal en raison
de la présence de défauts dans la structure cristalline.
Dans un cristal parfait, tous les espèces chimiques sont au repos dans leur position du réseau
cristallin. Un tel cristal est obtenu hypothétiquement uniquement au zéro absolu de température
(0 K). A des températures usuelles, les solides cristallins sont imparfaits. Les atomes vibrent,
ce qui peut déjà être vu comme un défaut. Les autres défauts incluent entre autres les espèces
chimiques déplacés de leurs sites ou des déformations de certaines mailles du cristal. Le
nombre de défauts dans un cristal varie en fonction de la structure du cristal, et des paramètres
tels que la température et la méthode de préparation. Ces défauts modifient de manière
considérable les propriétés des matériaux.
Les structures cristallines sont imparfaites étant donné que la création de défauts entraine une
réduction de l’énergie libre à température et pression constantes au moins jusqu’à une certaine
concentration comme le montre la Figure ci-dessous (figure 3.1). Les défauts à de faibles
concentrations augmentent la stabilité du cristal.

Figure 3.1 Variation de l’énergie libre avec l’introduction de


défauts dans la structure cristalline

L’introduction d’un défaut dans un cristal s’accompagne d’une augmentation de son énergie
interne U ou de son enthalpie H (H ≈ U pour les phases condensées). Ainsi, pour une lacune,
l’enthalpie de formation ∆Hf est de l’ordre de 1eV (97 kJ mol–1). La création d’un défaut
s’accompagne également d’une augmentation importante de l’entropie S du système, car le
défaut introduit dans la structure cristalline un désordre configurationnel supplémentaire.
Jusqu’à une concentration déterminée, la formation de défauts s’accompagne d’une diminution
de l’enthalpie libre G du système :

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L’équilibre thermodynamique est atteint, à P et T constantes, lorsque l’enthalpie libre G est


minimale ou, lorsque la variation de G avec la concentration est nulle.
Pour un cristal atomique contenant N atomes identiques et n défauts ponctuels, la fraction
molaire en lacunes (la concentration d’équilibre) est :

R est la constante des gaz parfaits (R = 8,314 J mol–1 K–1) et ∆Gf l’enthalpie libre de formation
d’une mole de défauts.
Si la création de défauts par élimination de particules dans les sites cationiques est par exemple
considérée, à partir d’un certain seuil de défauts, le désordre dans le cristal en termes de sites
occupés et vacants est tel que l’énergie requise pour augmenter les sites vacants est plus
importante que le gain d’entropie résultant, et la structure cristalline avec cette concentration
de défauts deviendrait alors instable.
Une représentation de ∆Gf en fonction de la concentration de défauts peut être réalisée pour
tous les types de défauts. Le type de défaut prédominant est celui dont la valeur minimale de
l’énergie libre est observée à des grandes concentrations.
3.1.2. Les types de défauts
Plusieurs critères de classification ont été utilisés pour les défauts ; aucun n’étant entièrement
satisfaisant.
Ainsi les défauts peuvent être classés en deux groupes à savoir :
 Les défauts stœchiométriques : la structure chimique du cristal reste inchangée. On
parle aussi de défauts intrinsèques
 et les défauts non-stœchiométriques qui résulte d’un changement de composition du
cristal. Ce sont des défauts extrinsèques.
La forme et les dimensions des défauts sont aussi utilisées comme moyen de classification. On
distingue :
 Les défauts ponctuels impliquant un seul atome ou site (vacant ou interstitiel) bien que
les atomes immédiatement voisions peuvent en être perturbés.
 Les défauts linéaires ou dislocations qui sont des perturbations de la structure du cristal
situées le long d’une ligne d’atomes ou d’une rangée réticulaire.
 Les défauts plans ou défauts bidimensionnels qui mettent principalement en jeu des
imperfections comme celles situées à l’interface séparant deux cristaux. Une couche
entière est défective.
La notion de défaut est fondamentale pour expliquer les différents comportements des
matériaux. Ainsi, la diffusion chimique et la conduction ionique ne peuvent s'expliquer que par
la présence de défauts intrinsèques, tandis que la conductivité électronique peut varier dans de
larges mesures en fonction des défauts extrinsèques crées par dopage.
3.1.2.1 Défauts ponctuels

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Les défauts ponctuels déforment le réseau et génèrent un champ de contraintes dans le cristal
qui englobe un volume largement plus grand que celui du défaut même. Celui-ci est représenté
schématiquement par des flèches à la figure 2.2.

Figure 3.2 : Défauts ponctuels dans un cristal

On distingue trois principaux types de défauts ponctuels :


 La lacune caractérise l’absence d’un atome d’un site normal du réseau cristallin (A).
 L’interstitiel apparaît lorsqu’un atome étranger de petite taille (B) s’insère dans les
espaces vides du réseau cristallin. Lorsqu’un atome constitutif du cristal est déplacé en
insertion, on a affaire à un auto-interstitiel (B’).
 L’atome en substitution résulte du remplacement d’un atome constitutif du cristal placé
en position régulière par un atome étranger (C, C’).
Dans les cristaux monoatomiques (métaux), les défauts ponctuels sont créés de manière
indépendante les uns des autres.
Par-contre, dans les cristaux ioniques, la création de défauts doit préserver la neutralité
électrique du matériau. Quelques défauts dans les solides ioniques :
Défaut de Schottky : est un défaut stœchiométrique correspondant à formation d’une paire de
sites vacants, un site anionique et un site cationique. Ce type de défaut est courant dans les
halogénures de métaux alcalins tels que NaCl.

Figure 3.3 : Représentation 2D d’un défaut de Schottky dans le NaCl


Les défauts de Schottky sont responsables des propriétés optiques et électriques du NaCl.
Défaut de Frenkel : C’est un défaut stœchiométrique impliquant le déplacement d’une
particule de son site pour un site interstitiel qui est normalement vide.

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Figure 3.4 : Représentation 2D d’un défaut de Frenkel dans AgCl


La création de défauts de Frenkel par exemple dans les halogénures d’argent joue un rôle
considérable en photographie.
Les centres colorés : L’exemple le plus connu d’un centre coloré est le cas d’un électron piégé
dans un site vacant anionique dans le NaCl (voir Figure 3.5).

Figure 3.5 : Exemple de centre coloré dans le NaCl

Les centres colorés sont appelés centres-F. Les centres-F peuvent être obtenus en chauffant un
halogénure alcalin dans les vapeurs du métal alcalin. Chauffé dans une atmosphère contenant
des vapeurs de sodium, un cristal de NaCl devient jaune (KCl chauffé dans la vapeur de
potassium devient rouge violacé). Le passage d’un atome de sodium de la phase vapeur au
cristal implique donc la disparition d’un défaut de Schottky ; l’atome s’ionise ; l’ion Na+ occupe
une lacune cationique et l’électron une lacune anionique.
Une autre façon de créer des centres F est d'irradier le cristal avec des rayons X. Les électrons
arrachés aux espèces chimiques normales (ex : ions) du réseau sont piégés par les lacunes
anioniques. Dans ce cas, le spectre d'absorption est différent (et donc la couleur du cristal) car
l'irradiation prolongée produit de nombreux électrons non appariés et ceux-ci ne sont plus
indépendants.
Il existe d'autres types de centres colorés, appelés centres H et centres V, obtenus en chauffant
un cristal, de NaCl par exemple, dans une atmosphère de chlore. L'espèce responsable de cette
coloration est un ion Cl2- qui occupe un site pour le centre H et deux sites anioniques voisins
pour le centre V.
3.1.2.2. Défauts extrinsèques
Les défauts de Schottky et de Frenkel sont des défauts intrinsèques qui sont observés dans les
solides stœchiométriques. Des défauts peuvent aussi résulter de la variation de la composition
d’un cristal et sont des défauts extrinsèques. Une catégorie importante de ces défauts est
observée dans les solides cristallins dopés. Des atomes de valence différente sont introduits
dans un réseau cristallin hôte en faible proportion pour en modifier les propriétés.

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Le NaCl est dopé avec le CaCl2 pour donner des cristaux Na(1-2x)CaxVNa,xCl. Dans ce cas,
l’arrangement CFC des ions Cl- est maintenu, mais les ions Na+ et Ca2+ et VNa sont distribués
dans les sites cationiques octaédriques. L’effet principal de ce dopage est d’augmenter les sites
vacants cationiques.
D’autres cristaux non-stœchiométriques très étudiés sont les oxydes de métaux notamment FeO
et UO2. FeO stœchiométrique a une structure CFC similaire à celle de NaCl. Les mesures de
densité montrent que le Fe1-xO non-stœchiométrique présente une déficience en fer et non un
excès d’oxygène dans le réseau cristallin. L’analyse de la structure déficiente qui peut être
écrite sous la forme Fe2+(1-3x)Fe3+2xVxO montre que les ions Fe3+ ne partagent pas les sites
octaédriques avec Fe2+ comme dans le cristal stœchiométrique, mais occupent des sites
tétraédriques.
3.1.2.3 Les particules interchangés
Dans certains solides cristallins, des paires d’atomes ou ions peuvent échanger de places. Ceci
se produit fréquemment dans les alliages qui contiennent deux ou plusieurs éléments chimiques
différents, chacun disposé dans un ensemble de sites spécifiques. De tels alliages sont par
exemple des alliages de substitution. Un alliage peut être soit désordonné avec les atomes
distribués de manière aléatoire dans les sites disponibles, ou soit ordonné avec les différents
atomes occupant un ensemble de sites distincts.
On les observe aussi dans les solides ioniques contenant deux ou plusieurs cations. Un réel état
d’ordre-désordre est obtenu lorsque le nombre d’atomes interchangés est large. La limite est
atteinte quand un nombre suffisant de paires d’atomes ont échangé de places et que les atomes
ne présentent plus de préférence pour des sites spécifiques.
Une superstructure ordonnée est par exemple obtenue avec CuZn, au-dessous de 450 °C
composée des atomes de Cu occupant le centre et des atomes de Zn les sommets du cube ou
vice-versa, comme dans la structure cubique centrée du CsCl.
3.2. Les solutions solides
Une solution solide est fondamentalement une phase cristalline qui peut avoir différentes
compositions. On distingue les solutions solides de substitution et les solutions solides
interstitielles.
3.2.1 Les solutions solides de substitution
Dans les cas les plus simples, l’atome ou l’ion introduit remplace directement un atome ou ion
de même charge dans la structure parent.
Beaucoup d’alliages sont des solutions solides de substitution. Exemple : alliage Cu-Zn de
formule Cu1-xZnx dans lequel les atomes de Cu et Zn se substituent dans les sites en fonction
de la composition.
Un exemple dans les solides ioniques : Al2O3 et Cr2O3 forment une série de solutions solides
dont la formule générale peut être écrite sous la forme (Al2-xCrx)O3 (avec 0 ≤ ≤ 2). A des
valeurs intermédiaires de x, Al3+ et Cr3+ sont distribués aléatoirement dans sites octaédriques
occupés par Al3+ dans Al2O3.

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De nombreuses combinaisons de charge sont possibles dans les solutions solides de


substitution. Pour exemple, des ions divalents Mg2+ dans les sites tétraédriques sont remplacés
par les ions Al3+, dans un rapport numérique de 3 :2 dans la structure de la spinelle MgAl2O4.
Alors on peut écrire Mg1-3x Al2+2x Vx O4 dans lequel x sites tétraédriques vacants sont créés.
Le déséquilibre de charges électriques entre le cation remplacé et le cation de substitution peut
être compensé soit par l’insertion des anions ou des cations dans les sites interstitiels soit par
le départ des anions ou des cations de la structure hôte laissant des sites vacants.
La création des vacances cationiques est très fréquente. Pour exemple, NaCl peut dissoudre
une faible quantité de CaCl2, processus accompagné du remplacement d’un ion Na+ par un ion
Ca2+ et du départ d’un autre ion Na+ d’un autre site laissé ensuite un site vacant. La formule de
la solution solide de substitution est notée dans ce cas : Na1-2x Cax VxCl.
La création des vacances anioniques se produit aussi avec les oxides tels que ZrO2, notamment
dans oxyde de zirconium stabilisé par la chaux : Zr1-xCaxO2-x (0.1 < x < 0.2)
L’insertion des anions est rare car la taille des sites interstitiels n’est souvent pas assez grande
pour accepter de nouveaux anions. On peut l’observer avec l’anion F-. Exemple : Le CaF2 peut
dissoudre un peu de YF3, les ions Ca2+ sont remplacés par les Y3+ dans leurs sites et des ions
F- supplémentaires vont occuper des sites interstitiels pour compenser les déficits de charges
positives. La formule est Ca1-x Yx F2+x
L’insertion des cations est observée dans une structure cristalline comme celle de la « silice
farci » obtenu par substitution des ions Si4+ dans le quart (SiO2) par les ions Al3+. Cette
substitution s’accompagne d’insertion des ions de métaux alcalins (exemple : Li+) dans les sites
interstitiels pour former des alumino-silicates de formule : Lix(Si1-x Alx)O2: 0 < x ≤ 0.5. Des
compositions spéciales existent à x = 0,5 (LiAlSiO4, eucryptite) et x = 0,333 (LiAlSi2O6,
spodumene).
Les anions peuvent aussi se substituer dans les solutions solides de substitutions. Exemple :
solution solide AgCl–AgBr, mais ces cas sont moins fréquemment rencontrés que les
substitutions cationiques.
Des substitutions simultanées de cations et d’anions sont également rapportées. Mg2+ peut être
remplacé par Fe2+ et simultanément Si4+ remplacé par Ge4+ dans Mg2SiO4 pour former la
solution solide (Mg2-x Fex)(Si1-y Gey)O4. AgBr et NaCl peuvent former des solutions solides
dans lesquels les anions et les cations sont simultanément remplacés (Ag1-x Nax)(Br1-y Cly) (avec
0 < x, y < 1)
3.2.2. Les solutions solides interstitielles
Un grand nombre de métaux forment des solutions solides dans lesquelles de petits atomes, en
particulier H, C, B and N, occupent les sites interstitiels dans la structure cristalline de base.
Exemple : Le Pd métallique est bien connu pour son habilité à absorber des volumes importants
de H2 pour donner un hydride qui est une solution solide interstitielle notée PdHx (0 ≤ ≤
0,7). Les atomes H occupent les sites interstitiels du réseau CFC du Pd métallique.

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L’acier est une solution solide interstitielle de grande importance industrielle dans laquelle les
atomes de C occupent les sites octaédriques du CFC de Fer (γ -Fe). La proportion de C qui se
dissout dans le γ -Fe est plus élevée que dans les autres variétés allotropiques du fer (α-Fe and
δ-Fe) qui ont une structure cubique centrée. Bien que γ -Fe ait une structure CFC plus compact,
les sites interstitiels y sont plus larges et moins nombreux.
3.2.3. Compensation électronique
Les solides ioniques contenant les métaux de transition multivalents peuvent former des
solutions solides semi-conductrice, métallique, ou même supraconductrice à basse température.
Les sites vacants cationiques peuvent être générés par de-intercalation, par exemple,
l’élimination d’un Li+ (et e−) de LiCoO2 and LiMn2O4. Pour maintenir la balance électronique,
des électrons sont arrachés des orbitales de certains cations le plus souvent avec les cations de
métaux de transition dans le réseau cristallin :
Li1−x Co3+1−x Co4+x O2
Li1−x Mn3+1−x Mn4+ 1+xO4
Ces solutions solides peuvent être vues aussi comme provenant de la substitution des cations
de grande valence (Co4+, Mn4+) par des cations de faible valence (Co3+, Mn3+), avec la création
des sites vacants Li cationiques pour la balance. Ces matériaux sont très importants dans les
batteries au lithium de 2e génération.
Les solutions solides de cations multivalents sont formées pour beaucoup d’oxydes métalliques
avec l’absorption de l’oxygène à des températures hautes. Exemple : NiO

+ ⎯ ,

La création des solutions solides de cations multivalents peut aussi résulter de l’insertion des
anions interstitiels. De nombreuses familles de supraconducteurs avec de hautes températures
critiques sont des solutions solides de cette catégorie. Le plus connu est YBCO ou Y123,
YBa2Cu3Oδ. L’état d’oxydation de Cu varie en fonction de la valeur de δ, Cu a soit des valences
mixtes +I et +II (pour δ = 6), entièrement +II (pour δ = 6.5) ou mixtes +II et +III (pour δ = 7).
Partant de δ = 6, les oxygènes supplémentaires sont introduits dans la structure par chauffage
dans l’air ou O2 à 350 °C, l’oxydation des ions Cu2+ se produit alors et le matériau se transforme
progressivement de semi-conducteur à supraconducteur pour δ = 7

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