le mal

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LE MAL

Arthur Rimbaud, figure emblématique de la poésie française, incarne à la fois la


révolte adolescente et le génie précoce. Né en 1854 à Charleville, il se fait
remarquer dès son jeune âge par son talent exceptionnel. À seulement 16 ans, il
écrit des poèmes qui seront regroupés sous le titre Les Cahiers de Douai. Ce
recueil, composé de vingt-deux textes, marquant les débuts littéraires d’un
poète qui bouleversera les codes de la poésie traditionnelle.
Le jeune Rimbaud dénonce les horreurs de la guerre engagée par Napoléon III
contre la Prusse. Pour le poète, ce conflit représente le "Mal" incarné par le roi (ou
l'Empereur) qui déclenche cette guerre sans se préoccuper des soldats qui
combattent au péril de leur vie. Mais au-delà de cette figure politique, le "Mal"
c'est Dieu lui-même qui permet de telles atrocités et s'en réjouit.

Je vais maintenant procéder à la lecture


Après cette lecture, une question émerge Comment Arthur Rimbaud dans ce
poème pathétique est engagé dénonce-t-il la cupidité de l’église qui fait un profit
de la guerre ?
Pour répondre à cette question, je vais distinguer trois mouvements dans ce
poème : • La peinture effrayante de la guerre • Une adresse à la nature
personnifiée • La condamnation de l'église

Mouvement 1: La peinture effrayante de la guerre (vers 1à 6)


 L’allitération en [r] dans "crachats rouges de la mitraille" est
particulièrement efficace pour mettre en avant le mépris des dirigeants.

 Le terme "crachats" renforce cette idée de dédain, tandis que la césure à


l'hémistiche accentue encore plus cette notion de rejet.

 L’enjambement présent dans "Tandis que les crachats rouges de la


mitraille / Sifflent tous le jour par l'infini du ciel bleu" est crucial, car il
montre que la violence des armes déborde et ne peut être contenue.

 Le contraste entre "rouges" et "bleu" est significatif, évoquant à la fois la


mort (rouge) et l'innocence ou la paix (bleu), soulignant ainsi l’absurdité de
la guerre.

 Enfin, l’emploi du présent d’énonciation avec des verbes comme "sifflent",


"raille" et "croulent" plonge le lecteur dans l’immédiateté de l’action,
rendant la scène d’autant plus vivante et tragique.

 L'utilisation des adjectifs de couleur "écarlates ou verts" souligne


effectivement les uniformes des soldats français et prussiens, ce qui
permet à Rimbaud de passer d'une critique générale à une dénonciation
explicite de la guerre franco-prussienne.
 Cela donne une dimension politique forte à son propos, où le "Roi" devient
une figure qui pourrait symboliser Napoléon III, ajoutant une critique
personnelle au pouvoir en place.

 L'allitération en [r] dans "Roi qui les raille" accentue le mépris du roi pour
ses hommes, renforçant l'idée que ce dernier est déconnecté des réalités
de la guerre et des souffrances qu'elle engendre.

 Concernant "Les bataillons en masse", le fait de les placer de part et


d'autre de la césure met en avant l'ampleur des pertes humaines,
soulignant la tragédie de la situation.

 Le terme "Folie" est particulièrement fort, surtout mis en valeur à la césure


et accompagné de "épouvantable", qui accentue l'horreur de la guerre.

 La manière dont ce mot est prononcé et structuré dans le vers attire


l'attention sur l'absurdité de la violence.

 l'adjectif "épouvantable" en tant qu'épithète de "folie" et sa prononciation


de cinq syllabes ajoutent une musicalité qui renforce le choc émotionnel
que le poème cherche à transmettre.

 "Broie" Verbe Mis en évidence par le rythme de l'alexandrin a la rime. Il


annonce "tas fumant" au vers suivant et dit à nouveau que les soldats ne
sont plus considérés comme des humains.

 « Cents milliers » Hyperbole Placé avant la césure, l'hyperbole Réaffirme


le caractère meurtrier des soldats.

 Bilan du premier mouvement: • Un tableau violent et déstabilisant de la


guerre . Une critique du pouvoir, indifférent aux innombrables morts qui
perdent toute humanité

Mouvement 2 : une adresse a la nature personifiée


 Le tiret du vers 7 indique effectivement une rupture.

 L'exclamative nominale "Pauvres morts !" montre que le locuteur ressent


de l'empathie pour les soldats morts au combat, en contraste avec
l'indifférence des dirigeants.

 Les sentiments qu'il éprouve se traduisent par l'emploi du registre lyrique,


avec un rythme ternaire et des exclamations.

 L'apostrophe "Ô toi" s'adresse directement à la nature, qui est ici


personnifiée. Cela crée une connexion directe entre le locuteur et son
environnement.
 L'énumération "Dans l'été, dans l'herbe, dans ta joie" mêle des éléments
concrets, comme l'herbe, à des éléments abstraits, comme la joie. On sait
que pour Rimbaud, les promenades dans la nature sont source de
réflexion et d'inspiration.

 "Saintement" est un adverbe qui annonce effectivement le troisième


mouvement. Ce mouvement est polémique, car le jeune poète attribue la
création de l'homme à la nature plutôt qu'à Dieu.

Le bilan du deuxième mouvement montre une pause lyrique dans un poème


engagé, où il y a une célébration de la nature et de la vie.

Mouvement 3 : la condamnation de l’église ( vers 9 a 14)


 L'emploi du déterminant indéfini "un Dieu" suggère effectivement
une déconsidération du Dieu des catholiques, laissant entendre qu'il
pourrait en exister d'autres.

 Les rimes riches, comme "d'or" et "s'endort", renforcent le propos


poétique. Ce dieu est décrit comme indifférent et cupide, ce qui
souligne un aspect critique du poète.

 Rimbaud choisit de s'éloigner de la forme régulière du sonnet, ce qui


reflète son désir de rompre avec les conventions.

 Le verbe "rit" montre que ce Dieu partage une attitude similaire à


celle du Roi, ce qui met en lumière la complicité entre le pouvoir et
l'Église.

 Les termes "Damassées" et "Calices d'or" renforcent le champ


lexical de la richesse, soulignant la critique des excès matériels
associés à la religion.

 Le rejet de "des autels" entre les vers 9 et 10 crée une transition


intéressante entre la spiritualité et la richesse.

 Le champ lexical du sommeil, avec des mots comme "bercement" et


"s'endort", met en avant l'indifférence d'un Dieu qui semble se
moquer de ses créatures.

 L'assonance en "len" et l'allitération en sifflantes dans "qui dans le


bercement des hosannah s'endort" évoquent un chant monotone et
apaisant, presque hypnotique.
 l'utilisation du verbe "et se réveille" crée un effet de surprise, ce qui
est d'autant plus frappant grâce au bouleversement du rythme de
l’alexandrin.

 L'analyse des termes "Ramassées / Dans l'angoisse" met en lumière


l'attitude physique et morale des mères éplorées, qui se replient sur
leur douleur.

 Le mot "angoisse", mis en valeur par le contre-rejet, crée un effet


de suspens qui accentue leur souffrance.

 L'expression "Vieux bonnet noir" encadrée par des adjectifs


épithètes souligne le deuil des mères, qui ont déjà perdu des
membres de leur famille. Leur prière, malgré leur perte, semble en
effet incohérente, renforçant l'idée de leur désespoir.

 l'idée du " un gros sou" illustre leur pauvreté, montrant qu'elles


n'ont qu'un seul sou à donner à Dieu, ce qui souligne leur dévotion
malgré leur situation désespérée.

 Le "Mouchoir" dans le poème symbolise à la fois le deuil et la


pauvreté des mères, qui n'ont pas de sac pour ranger leur vieux
bonnet noir.

 Le point d'exclamation du vers 14 clôt le poème avec une forte


indignation, soulignant le reproche du poète envers l'Église pour son
indifférence et sa cupidité face au malheur des gens.

Le bilan du troisième mouvement révèle un double reproche, illustrant


l'indignation de Rimbaud face au pouvoir de l'Église sur une population
souffrante.

CONCLUSION :

En conclusion, Rimbaud compose un sonnet en alexandrins, mais il ne


respecte pas toutes les règles de ce modèle classique, ce qui témoigne de
son désir de s'émanciper des conventions poétiques. À travers "Le Mal", il
exprime une rage d'adolescent face à l'autorité et au pouvoir de l'Église,
qu'il accuse d'indifférence au malheur des populations et de cupidité. Le
poète met en lumière la violence et la déshumanisation engendrées par la
guerre, en utilisant des hyperboles et des images puissantes qui
soulignent la souffrance des soldats et des civils. Par cette œuvre,
Rimbaud dénonce non seulement l'horreur de la guerre, mais aussi le
silence complice de ceux qui, comme l'Église, profitent de cette tragédie.
Son indignation résonne à travers chaque vers, faisant de "Le Mal" un cri
de révolte contre les injustices sociales et les abus de pouvoir.

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