Lecture linéaire (Le Mal, Arthur Rimbaud)

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Le poème est extrait du recueil « Cahiers de Douai » qui est un recueil de jeunesse d’Arthur

Rimbaud dans lequel il dresse une virulente critique de la guerre et de la religion. Ce poème est un
sonnet dont le titre « Le Mal » est allégorique. Il s’agit ici de la folie de la guerre mais également de
l’hypocrisie de la religion qui sont pour lui deux forces de mal social. C’est-à-dire la domination des
puissants qui sacrifient le peuple à ses caprices. Il s’agit donc d’un poème de révolte et de
dénonciation. Il est alors légitime de se demander comment à travers la critique de la société du XIX
siècle, Arthur Rimbaud dénonce-t-il la guerre ainsi que l'indifférence et la cupidité de Dieu ? En
premier lieu nous verrons : la guerre et son massacre (v.1 à 8) et en deuxième lieu nous verrons : la
satire de la religion (v.9 à 14).

I. La guerre et son massacre (v.1 à 8)

Le poème s’ouvre mystérieusement sur la locution adverbiale “Tandis que”. Cette structure narrative
permet de créer une atmosphère de tension continue. Le verbe principal de la phrase ne sera révélé
qu’à la troisième strophe, ce qui laisse présager d’un enchaînement tragique.

Le premier vers plonge le lecteur dans un univers de violence et de sang, avec la métaphore des
“crachats rouges de la mitraille”, suggérant à la fois le sang et le dégoût. Le terme “crachat”, avec ses
sonorités dures, dévalorise la guerre et souligne son caractère ignoble.

L’allitération en -r dans ce vers crée une onomatopée qui évoque le bruit des balles. L’enjambement
du vers 1 au vers 2 renforce ce sentiment de chaos, plongeant le lecteur dans l’horreur du combat.
Rimbaud insiste sur l’idée que les soldats ne connaissent aucun repos, l’hyperbole “tout le jour”
accentuant l’intensité des combats.

Les couleurs, notamment le rouge et le vert, renforcent l’image du sang versé. La couleur verte
renvoie aux uniformes des soldats prussiens, tandis que le rouge des soldats français souligne la
brutalité de la guerre.

L'image picturale se construit avec des mots évocateurs liés à la guerre, comme “mitraille” et
“bataillons”, tandis que le contraste entre le bleu du ciel et le rouge du sang évoque une nature
impassible face à la violence humaine.

Dans cette première strophe, Rimbaud montre une scène de combat, où la nature est reléguée au
second plan, alors que le rouge de la guerre prend le pas sur le bleu du ciel.

Le début du deuxième quatrain reprend la subordonnée de temps introduite par “Tandis que”,
prolongeant l’idée de combat et de chaos. Le groupe nominal “une folie épouvantable” désigne
métaphoriquement la guerre, tandis que l'adjectif “épouvantable” exprime le choc du poète face à
cette horreur.

La transformation des “cent milliers d’hommes” en “un tas fumant” déshumanise les soldats,
illustrant l’impact destructeur de la guerre. La métaphore du “tas fumant” évoque une image
grotesque, une dévalorisation des corps et de la dignité humaine.

Pourtant, ces deux vers ouvrent une porte vers l’espoir : Rimbaud évoque la Nature comme un
refuge. La douceur de l’été et de l’herbe, ainsi que l’exclamation “Nature !”, soulignent un rapport
presque divin entre le poète et la nature.

En présentant la Nature comme une figure divine, le poète lui confère une capacité de rédemption,
une échappatoire face à la brutalité humaine.
II. La satire de la religion (v.9 à 14)

Le premier vers du premier tercet introduit enfin le verbe principal du poème : “Il est un Dieu”. Ce
Dieu, qui ne se préoccupe guère de la souffrance des hommes, est présenté comme une figure
cynique et distante. L'utilisation du déterminant indéfini “un” avant “Dieu” accentue le scepticisme
du poète.

Le rire de Dieu, qui “rit” et “s’endort”, évoque un être capricieux, indifférent à la douleur des
hommes. Ce contraste avec les “nappes damassées” et les “grands calices d’or” montre le luxe dans
lequel il évolue, tandis que les soldats périssent. De plus, le Dieu rit et le Roi raille, cela signifie que
tous deux méprisent et se moquent de peuple.

La tonalité douce de cette strophe, avec une allitération en -s, tranche avec l’horreur décrite
précédemment, soulignant l’indifférence d’un Dieu qui se laisse emporter par les chants d’adoration.

La conjonction de coordination “et” amène l’antithèse entre “s’endort“ et “se réveille”. Le réveil de ce
Dieu ne s’effectue que lorsque les mères souffrantes lui donnent de l’argent, représentant ainsi le
contraste entre la douleur, l’angoisse du peuple et le luxe de l’église. Le dieu, ici, représente les
prêtres qui sont embourgeoisés et qui profite de la guerre pour soutirer de l’argent.

Le lexique pathétique de cette strophe évoque la misère des mères, leur tristesse face à la perte des
fils. L’image des mères “ramassées” et “pleurant” est poignante, soulignant le contraste entre le Dieu
indifférent et le désespoir.

Le poète, en se focalisant sur la souffrance des femmes, propose une critique de la religion qui ne
protège pas les siens car elle est trop hypocrite.

Dans “Le Mal”, Rimbaud dresse un tableau tragique de la guerre et de la religion, mettant en
lumière la souffrance humaine face à l’indifférence des puissants. À travers une vision picturale et
émotionnelle, il critique la cruauté d’un monde qui déshumanise et ignore la douleur des victimes. En
opposition à ce constat, la Nature apparaît comme une divinité pacifique, capable de rédemption. Par
ce poème, Rimbaud affirme son refus de se soumettre à la folie guerrière, tout en laissant entrevoir
une lueur d’espoir. Tout comme Rimbaud, Henri Michaux critique la société tout en entreprenant une
quête identitaire à travers ses voyages. Dans certaines œuvres (Un Barbare en Asie), il explore des
cultures étrangères, mais c'est avant tout un voyage intérieur. Michaux cherche à se libérer des
conventions sociales et à redéfinir son rapport au monde et à lui-même, mêlant critique sociale et
exploration de l’identité.

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