Presse Med. 2008; 37: 470–476
ß 2007 Elsevier Masson SAS.
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Mise au point
Endocrinologie/Maladies
métaboliques
Parcours multidisciplinaire du candidat
à une gastroplastie
L’exemple de l’hôpital Avicenne
Hélène Bihan1, Carine Choleau1, Jean-Marc Catheline2, Gérard Reach1,
Jean-Luc Fournier4, Nathalie Garnier1, Françoise Robert3, Christiane Poulhès3,
Fatma Sidotmane1, Joseph Bénichou2, Régis Cohen1
1. Service d’endocrinologie et Université Paris XIII (Centre de recherche en
nutrition humaine)
2. Service de chirurgie digestive,
3. Service de diététique,
4. Service d’anesthésie, Hôpital Avicenne, AP-HP, Bobigny (93)
Correspondance :
Disponible sur internet le :
6 juillet 2007
Régis Cohen, Service de médecine interne et d’endocrinologie, Hôpital Avicenne,
AP-HP, 93009 Bobigny Cedex.
Tél. : 01 48 95 51 51
Fax : 33 1 48 95 55 60
regis.cohen@avc.aphp.fr
Key points
Multidisciplinary management of gastroplasty candidates
Example of Avicenne Hospital
The decision to perform gastroplasty must be made by a
multidisciplinary team.
This organization ensures compliance with good practice guidelines.
Multidisciplinary management after surgery is also essential but
patients’ adhesion to follow-up is relatively poor.
E
470
n tenant compte de sa prévalence qui augmente de façon
dramatique depuis quelques années, l’obésité morbide est
devenue un défi médical mondial. Elle est une cause majeure
de décès et pourrait faire régresser l’espérance de vie dans de
Points essentiels
La décision d’une gastroplastie est le résultat d’une équipe multidisciplinaire.
Cette organisation garantit l’application des recommandations de
bonnes pratiques (Anaes).
La prise en charge multidisciplinaire des patients au décours de
l’intervention est indispensable mais l’observance du suivi est faible.
nombreux pays [1, 2]. Dans ce contexte, il est évident que des
stratégies efficaces de perte de poids sont attendues afin de
réduire les maladies associées à l’obésité, d’améliorer la qualité
de vie des patients, et de diminuer le coût économique engendré par ce problème. Or, les résultats de sa prise en charge
tome 37 > n83 > mars 2008 > cahier 2
doi: 10.1016/j.lpm.2007.06.003
Parcours multidisciplinaire du candidat à une gastroplastie
Contexte et historique
Le département de la Seine Saint-Denis se caractérise par une
population jeune, multiethnique (18,5 % d’habitants sont de
nationalité étrangère) et soumise à un fort taux de précarité.
Dans un centre d’examen de santé proche de notre établissement, 368 des 26 268 consultants, soit 1,4 %, avaient une
obésité morbide en relation avec leur précarité [13]. Cette
incidence est 2,5 fois supérieure à la moyenne nationale.
L’arrivée en 2002, à l’hôpital Avicenne, d’un chirurgien formé
à la chirurgie bariatrique a permis de structurer cette activité, en
particulier par la création d’un collège médicochirurgical impliquant médecins, chirurgiens, anesthésistes, et paramédicaux
(diététiciennes, psychologue).
Nos objectifs
Notre objectif principal était d’organiser cette activité dans le
cadre du respect des recommandations de l’Anaes [11]. Les
objectifs secondaires étaient d’une part l’évaluation scientifique
de cette activité et, d’autre part, la valorisation de cette activité
réalisée dans le cadre d’un hôpital universitaire afin d’en faire un
pôle d’excellence et de justifier l’obtention de moyens humains
et matériels supplémentaires.
tome 37 > n83 > mars 2008 > cahier 2
Indications de la chirurgie de l’obésité
Sujet âgé de 18 à 60 ans
Échec du traitement médical bien conduit et d’une durée suffisante
(1 an)
IMC > 40 kg/m2 ou entre 35 et 40 kg/m2 lorsqu’il existe des
comorbidités associées non contrôlées par le traitement médical,
avec principalement l’hypertension artérielle, le diabète, l’arthrose
radiologiquement prouvée, et l’apnée du sommeil
Mise au point
Encadré 1
Source : Agence nationale d’accréditation et d’évaluation de santé.
Chirurgie de l’obésité morbide de l’adulte. Anaes, Mai 2001.
Notre organisation pratique
Le parcours de soins du patient est composé de 4 étapes
(tableau I, encadré 2).
Le patient est adressé à la consultation du chirurgien qui vérifie
les indications et contre-indications d’une chirurgie bariatrique.
Il oriente le patient vers le psychiatre et l’hôpital de jour
d’endocrinologie. Au cours d’une première hospitalisation de
jour d’endocrinologie, le patient rencontre un médecin
endocrinologue, une diététicienne, une psychologue, des
prélèvements biologiques sont effectués.
Des informations sont transmises aux patients au cours d’une
deuxième journée d’hospitalisation de jour. Il s’agit d’informations générales sur la prise et la perte de poids, de la
présentation d’un film montrant les différents types d’intervention. Le patient discute avec la diététicienne, et rencontre
l’anesthésiste référent en chirurgie de l’obésité. Au terme de
cette journée, une décision est prise par le collège médicochirurgical. Il peut s’agir d’un accord, d’un refus lorsque le collège
estime que l’intervention est contre-indiquée car dangereuse ou
lorsque l’IMC (indice de masse corporelle) du patient est
insuffisant. Une troisième décision possible est l’accord différé,
lorsque nous estimons que la prise en charge médicodiététique
préalable à une chirurgie bariatrique a été insuffisante. Dans ce
cas, nous proposons un suivi diététique et psychologique avant
que le dossier ne soit rediscuté.
L’intervention chirurgicale est pratiquée.
Le suivi des patients est assuré par le même collège
médicochirurgical sur plusieurs années dans les locaux de
l’hôpital de jour d’endocrinologie.
Nos résultats
Sélection des patients
Trois cent soixante patients ont été adressés pour une gastroplastie à notre chirurgien entre juin 2002 et décembre 2005. Fin
2005, 180 patients ont été sélectionnés pour une gastroplastie
(50 %). Cent quarante-sept patients ont été opérés et 38 étaient
471
médicale sont décevants, permettant d’espérer au mieux une
perte de poids de l’ordre de 5 à 10 % sur le long terme [3]. La
chirurgie bariatrique représente une stratégie alternative à la
prise en charge médicale de l’obésité. C’est une méthode de
traitement plus efficace que le régime [3] ou les interventions
médicamenteuses (essentiellement orlistat, sibutramine et rimonabant). La chirurgie de l’obésité permet à long terme une
diminution probable de la mortalité [4], ainsi qu’une diminution
significative des comorbidités associées [5-7].
En France, 1 000 interventions de chirurgie bariatrique sont
pratiquées chaque mois parmi lesquelles 2 grands types d’interventions [8, 9] :
les interventions restrictives qui permettent de diminuer la
capacité gastrique, utilisant notamment l’anneau ajustable. À
2 ans, la réduction de l’excès de poids initial se situe entre 50 et
60 % [7] ;
les interventions mixtes, restrictives et malabsorptives,
principalement représentées par le by-pass gastrique. À
2 ans, son efficacité sur la perte de poids est supérieure aux
techniques restrictives, celle-ci atteignant plus de 70 % de perte
de l’excès de poids initial [6, 7, 10].
Cependant, l’organisation de cette activité doit obéir à plusieurs
principes [11, 12] :
le respect des indications (encadré 1) ;
l’expertise des dossiers par un collège multidisciplinaire ;
l’information éclairée du patient ;
le suivi prolongé médicochirurgical.
C’est autour de ces 4 principes qu’a été pensée et organisée
l’activité de chirurgie bariatrique à l’hôpital Avicenne depuis 2002.
Endocrinologie/Maladies métaboliques
H Bihan, C Choleau, J-M Catheline, G Reach, J-L Fournier, N Garnier, F Robert et al.
Tableau I
Parcours de soins du patient obèse morbide candidat à une chirurgie de l’obésité
Programmation des visites par
rapport à l’intervention chirurgicale
Visite
J-120
HDJ
J-90 et J-60*
J0
Visites
J90
X
IC
CS d’endocrinologie
X
IC
CS diététique ou nutritionniste
X
IC
X
CS psychiatrique
X
IC
X
CS avec le chirurgien
X
Visites
J-30 à J-1
HDJ
1 an**
HDJ 2 ans,
3 ans, etc.**
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
X
IC
Cs psychologique
X
CS d’anesthésie
Bilan biologique
X
HDJ
6 mois**
X
IC
IC
CS : consultation ; HDJ : hospitalisation de jour d’endocrinologie ; IC : intervention chirurgicale. * Tous les patients ont 2HDJ en préopératoire : une pour bilan, l’autre pour
information et décision thérapeutique ; ** HDJ de suivi après gastroplastie.
Le détail des consultations est présenté dans l’encadré 2.
en attente de l’intervention avec un délai moyen d’attente de 23 mois après la décision. Pour les patients récusés, la raison de
cette décision était le plus souvent un IMC insuffisant. Une
patiente a été récusée pour trouble psychiatrique (perversion).
Plus rarement des causes médicales sont à l’origine du refus :
cardiopathie ischémique, antécédent d’embolie pulmonaire,
reflux gastro-œsophagien avec asthme grave, antécédents
de chirurgie abdominale avec cicatrices multiples. Les patients
différés avaient une absence de suivi diététique d’au moins 1 an
et quelques patients une absence de motivation (aucun suivi
diététique ou intoxication alcoolique associée).
Le groupe des 147 patients opérés comprenait 129 femmes et 18
hommes, l’âge moyen de cette population était de 39,3 ans (1963), et l’IMC moyen de 44 kg/m2 (35-57), avec un poids moyen
de 117 kg (89-178). La mise en place de l’anneau gastrique a été
réalisée selon la technique pars flaccida, avec une durée moyenne
d’intervention de 111 min (95-205), et une durée moyenne de
séjour dans le service de chirurgie de 5,1 jours (3-7). Tous les
patients ont eu une gastroplastie car il s’agit d’une technique
chirurgicale plus simple que le by-pass et moins à risque postopératoire. La plupart des jeunes équipes ont procédé de cette
façon avant de réaliser des courts-circuits gastriques.
Complications postopératoires précoces et tardives
De juin 2002 à décembre 2005, nous avons constaté une
complication postopératoire chez 3 patients (2 %) et une
complication tardive après le premier mois postopératoire chez
10 patients (6,8 %) (encadré 3).
Observance au suivi et évolution pondérale
472
Nous constatons que, 6 mois après la gastroplastie, la perte
d’IMC était de 5,3 à 7,9 kg/m2, à 1 an de 7,1 à 9,4 kg/m2, à 2 ans
de 7,8 à 9,4 kg/m2, et à 3 ans de 10,4 kg/m2 (figure 1).
Concernant l’observance au suivi et en considérant la période
entre la date d’opération et ce jour, 52 % des patients opérés (76
sur 147) ont participé au suivi à 6 mois, 69 % (84 sur 121) au
suivi à 1 an, 55 % (36 sur 66) au suivi à 2 ans et enfin 22 % (7 sur
32) au suivi à 3 ans.
Suivi diététique
Le suivi diététique est organisé sous la forme d’entretiens
individuels et en groupe. Ces échanges ont pour but d’encourager le patient à s’impliquer dans une démarche de changement de ses habitudes alimentaires et de conduites de vie en
général. Dans un premier temps, l’intervention chirurgicale va
entraı̂ner des modifications du comportement alimentaire induites par l’anneau lui-même. Plus particulièrement, le temps
du repas est allongé, le patient doit mastiquer, les volumes
ingérés sont réduits et les prises alimentaires doivent être
fractionnées pour éviter les carences. Si ce comportement
n’est pas adopté, des vomissements apparaissent. La perte
de poids consécutive à la mise en pratique de ces modifications
va conduire le patient vers une dynamique positive qui l’encourage à mettre en place progressivement de réels changements dans son mode de vie à la fois sur le plan alimentaire
(apprendre à adapter ses apports alimentaires à ses besoins) et
sur le plan physique (mettre en place une activité physique
régulière). Néanmoins, un patient qui n’est pas suffisamment
acteur de sa démarche ne parvient pas, malgré l’anneau, à
maintenir la perte de poids à long terme.
Suivi psychologique
Les entretiens individuels permettent d’accompagner ces patients
à retrouver une identité et de les soutenir dans leur démarche. Les
groupes de paroles lors du suivi après l’intervention sont des
espaces d’échanges, dont l’objectif est de remotiver les patients
tome 37 > n83 > mars 2008 > cahier 2
Parcours multidisciplinaire du candidat à une gastroplastie
Consultation chirurgien
Inclusion (J-120) : poids, taille, IMC, excès de poids, vérification des
critères d’inclusion de l’Anaes [11] et du consentement éclairé,
antécédents chirurgicaux.
Suivi (M3, M6, M12, M18, M24 puis tous les ans) : poids, taille, IMC,
excès de poids, tolérance digestive, carence vitaminique,
complications.
Consultation médecine (HDJ)
Inclusion (J-90) : poids, taille, IMC, excès de poids, courbe de poids,
vérification des critères d’inclusion de l’Anaes et du consentement
éclairé, antécédents médicaux, traitements en cours, recherche des
comorbidités (hypertension, diabète, dyslipidémie, syndrome
d’apnée du sommeil, troubles ostéoarticulaires), remise des
questionnaires : score d’Epworth (apnée du sommeil), score SF36
(qualité de vie), score de Lequesne (arthrose genou et hanche),
élimination d’une obésité secondaire (bilan thyroı̈dien, cortisolique).
Suivi (M6, M12, tous les ans en HDJ) poids, taille, IMC, excès de
poids, courbe de poids, traitements en cours, tension artérielle,
évolution des comorbidités (hypertension, diabète et dyslipidémie,
syndrome de l’apnée du sommeil, troubles ostéoarticulaires),
recherche de carences en fer et vitaminiques, analyse du bilan
sanguin, remise des questionnaires identiques à la première HDJ.
Entretien avec chirurgien, nutritionniste, diététicienne et
psychologue.
Consultation psychiatrique
Inclusion (J-90) : vérification de l’absence de contre-indication à une
chirurgie bariatrique.
Consultation psychologique
Inclusion (J-90) : vérification de l’absence de contre-indication à une
chirurgie bariatrique.
Suivi (M3, M6, M12, tous les ans) : suivi en groupe de parole et en
consultation externe. Apprécier le retentissement psychologique de
l’évolution pondérale. Soutien psychologique.
Consultation diététique
Inclusion (J-90) : vérification de l’absence de contre-indication à une
chirurgie bariatrique. Quantification de la durée totale (devant
excéder 1 an) des périodes de régime hypocalorique. Information
sur la diététique.
Suivi (M3, M6, M12, tous les ans) : conseils diététiques et
vérification du bon équilibre alimentaire.
Consultation anesthésie
J-30 et J-1 : recherche de contre-indications anesthésiques, analyse
des résultats du bilan cardiorespiratoire.
Contrôles radiologiques
M2, M6, tous les ans par un radiologue dédié à cette activité avec
éventuel serrage de l’anneau.
tome 37 > n83 > mars 2008 > cahier 2
pour une réussite optimale de ce programme de perte de poids.
L’intervention des patients dans les groupes de paroles et l’analyse
desquestionnaires(évaluation del’étatémotionnel) ontpermisde
montrer que la pose de l’anneau a engendré des bénéfices
somatiques, une amélioration de la qualité de vie et une modification des émotions. Particulièrement enthousiastes quant à leur
perte de poids, les patients espèrent encore en perdre davantage.
Les émotions telles que la honte, la colère, la tristesse, la peur,
l’angoisse, ressenties de manière intense avant l’intervention sont
considérablement moins exprimées à 6 mois. Il faudra attendre 12
mois après l’intervention pour voir émerger de nouvelles expressions émotionnelles (la joie, l’enthousiasme, le plaisir, des envies
nouvelles), avecune restaurationdel’estime desoi. Cependant, les
changements parfois brutaux dans le corps sont difficilement
gérables pour le patient en pleine restructuration physique et
psychologique. Le suivi psychologique des patients opérés permet
donc d’évaluer l’enjeu d’une telle chirurgie [14, 15].
Mise au point
Détail des consultations du parcours de soins du patient obèse
morbide candidat à une chirurgie de l’obésité
Observance à la surveillance à long terme des
patients opérés
Malgré la signature d’un contrat entre les patients et l’équipe les
incitant à participer à des réunions de suivi, l’observance à ce
suivi est variable en fonction du temps. Nous avons décidé
d’alléger le temps de présence à l’hôpital pour améliorer
l’assiduité par des réunions de groupe. L’aide d’une assistante
à mi-temps accordée dans le cadre de la reconnaissance de
notre hôpital en tant que Centre de référence de l’obésité de
l’AP-HP permettra de relancer par courrier et téléphoniquement
les patients dont le nombre va croissant.
Une autre difficulté dans le suivi est de mieux identifier les
facteurs de réussite ou d’échec de la gastroplastie. La corrélation
entre l’efficacité et le type de troubles du comportement alimentaire nous paraı̂t importante à étudier. Plus efficace en cas
d’hyperphagie, la gastroplastie semble néanmoins avoir un
effet freinateur important sur les grignotages et certains troubles du comportement alimentaire [16].
Discussion
L’enquête réalisée en 2003 par la Caisse primaire d’assurancemaladie souligne que seulement 48,7 % des patients opérés ont
bénéficié d’une prise en charge médicale d’au moins 1 an avant
l’intervention conformément aux recommandations de l’Anaes
[11] (suivi diététique, conseil d’activité physique, prise en charge
des troubles du comportement alimentaire et suivi des difficultés
psychologiques) [17]. Cette même année, sur près de 10 000
anneaux posés, 70 % des interventions étaient réalisées dans le
secteur privé [18]. Les recommandations dictées par les sociétés
savantes sont suivies dans notre organisation multidisciplinaire.
Une première sélection des patients demandeurs d’une chirurgie
de l’obésité est réalisée par le chirurgien et permet de diminuer le
nombre de patients à prendre en charge par l’équipe multidisciplinaire. Ensuite, notre organisation en 4 étapes permet
473
Encadré 2
Endocrinologie/Maladies métaboliques
H Bihan, C Choleau, J-M Catheline, G Reach, J-L Fournier, N Garnier, F Robert et al.
Figure 1
Évolution de l’IMC
de notre groupe de patients
n : nombre de patients
présents lors du suivi
et évalués.
d’une part de répartir la charge de travail sur plusieurs acteurs de
soins et d’améliorer la qualité des soins comme cela a été rapporté
dans quelques études [19, 20]. De plus, elle permet de maximaliser le temps patient-soignant (environ 9 heures en préopér-
Encadré 3
Complications constatées par le chirurgien de juin 2002 à
décembre 2005
Précoces jusqu’à J30
Pneumopathies : 1
Perforation de l’œsophage : 1*
Distension aiguë de l’estomac : 1*
Déplacement d’anneau : 1***
Tardives (> J30)
Déconnexion de boı̂tier : 2
Déplacement d’anneau : 2*
Fuite au niveau de l’anneau : 1**
Obstruction du système de gonflage : 1**
Mégaœsophage : 1*
Migration intragastrique : 3*
* ablation d’anneau ; ** changement d’anneau ;
474
*** repositionnement par cœlioscopie.
atoire). La prise en charge multidisciplinaire a déjà apporté des
résultats dans la prise en charge difficile des patients obèses, avec
les avantages suivants [21-23].
Le bénéfice de cette chirurgie pour l’amélioration de la survie [4]
est probable et de nombreuses études ont montré qu’elle permettait une diminution des comorbidités [7, 5, 24, 25]. Le bilan
préopératoire détecte les contre-indications et non-indications de
la chirurgie. Un travail en cours a pour objectif d’évaluer l’intérêt du
bilan cardiovasculaire systématique que nous réalisons chez ces
patients à haut risque pour les protéger d’un accident cardiorespiratoire. D’après nos premiers résultats, il semble que la
polysomnographie et l’électrocardiogramme 12 pistes sont les
examens incontournables de l’évaluation préopératoire [26]. Si
les 3 premières étapes (évaluation, information-décision, chirurgie) sont bien respectées et organisées, la dernière concernant
le suivi n’est pas aussi satisfaisante et les raisons sont multiples.
Suivi
Au décours de la gastroplastie, le suivi reste problématique
(30 % des patients ne sont pas venus en hospitalisation de jour à
1 an de l’intervention). Ceci rend difficile l’évaluation de l’efficacité de cette chirurgie, notamment à très long terme. Dans
une étude sur 1 035 patients opérés, de 80 % de patients suivis
les premières années, le taux chute à 50 % après 11 ans de suivi,
et ceci malgré le recours aux autorités locales pour retrouver les
tome 37 > n83 > mars 2008 > cahier 2
Parcours multidisciplinaire du candidat à une gastroplastie
patients [4]. Le fait de ne pas se rendre aux consultations de
suivi est commun dans les maladies chroniques et représente en
fait une manifestation de la non-observance thérapeutique [27].
Nous insistons lors de l’hospitalisation de jour au terme de
laquelle la décision d’intervention est prise sur l’importance du
suivi, et nous avons décidé de faire signer un ‘‘contrat’’ écrit par
le patient, afin de montrer que notre engagement à des soins de
qualité doit avoir la contrepartie d’un engagement de sa part à
accepter un suivi, car ce dernier fait partie de la qualité des soins.
Cet engagement a été accepté par tous les patients, car ils
étaient très demandeurs d’une chirurgie de l’obésité.
suivis et le partage des difficultés et des vécus. Chaque groupe
(environ 10 patients) voit au cours d’une demi-journée une
diététicienne, la psychologue et le couple chirurgien-endocrinologue. L’inconvénient du manque de confidentialité est réglé
en partie par la possibilité lors de cette rencontre de demander
une consultation (réglage d’anneau, suspicion de complication,
suivi diététique). Par ailleurs, une méta-analyse concernant la
prise en charge médicale de l’obésité montre que le suivi en
groupe donne les meilleurs résultats [30].
Efficacité
Nous pensons que la mise en place d’une organisation multidisciplinaire réelle améliore la qualité de la prise en charge des
patients. En effet, le chirurgien ne peut pas à lui seul cumuler
les fonctions de chirurgien, nutritionniste, psychologue et
diététicien. En période préopératoire, la discussion de plusieurs
experts autour d’un patient conduit à une prise de décision
(acceptation de la demande du patient, opération différée
après suivi diététique et psychologique mieux encadré, ou
refus de la chirurgie). Cette décision est annoncée au patient
à la suite d’une séance approfondie d’informations, qui nous
paraı̂t être en accord avec la dimension éthique contemporaine
de la prise de participation éclairée du patient aux décisions qui
touchent à sa santé. En période postopératoire, le suivi en
groupe permet de tenir compte du nombre exponentiel de
patients suivis à 1, 2, puis 3 ans, de croiser les vécus et les
expériences diverses.
Nos résultats sont proches de ceux rapportés dans la littérature.
Deux revues sur l’efficacité de la gastroplastie rapportent un taux
moyen de perte d’excès de poids de 61, 56 et 54 % à 3, 4 et 5
ans respectivement [28], ou une perte de poids absolue de 39,8
kg (34,9-44,7) [7]. L’étude de O’Brien rapporte à 2 ans une perte
de 21,6 % (19-23,9) du poids initial, et de 87,2 % (77,7-96,6) de
l’excès de poids, cependant les 39 patients opérés avaient
un IMC moyen faible à 33,5 kg/m2 [3]. Nos résultats paraissent
encore insuffisants, l’IMC moyen après 3 ans restant > 35 kg/m2.
Ces patients malgré une amélioration attendue de leurs comorbidités restent encore dans un sur-risque médical. Ainsi notre
équipe évolue en proposant des by-pass ou des gastrectomies
longitudinales [29].
Perspectives
L’optimisation du suivi passe à notre sens par des réunions de
groupe, permettant une augmentation du nombre de patients
Mise au point
Endocrinologie/Maladies métaboliques
Conclusion
Conflits d’intérêts : aucun
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