Évaluation Des Politiques Publiques Anass - Aboulaaguig
Évaluation Des Politiques Publiques Anass - Aboulaaguig
Évaluation Des Politiques Publiques Anass - Aboulaaguig
Anass Aboulaaguig
Anass Aboulaaguig*
1
S ommaire
Résumé ………………………………………………...……………………...…. 3
Introduction ……………………………………………………...…...……........... 4
publics ……………………………………………………………………….. 6
Conclusion ……………………………………...……...………………………… 16
Bibliographie …………………………………………………...………………... 17
2
Résumé
Mots clés
Abstract
3
Introduction
L’évaluation des politiques publiques est une pratique très récente au Maroc. En
effet, les premières évaluations suivant des approches scientifiques fondées remontent au
milieu des années quatre-vingt-dix, effectuées surtout par les institutions internationales,
notamment la Banque mondiale qui a procédé à une évaluation globale (plus précisément
une méta-évaluation) dans plusieurs secteurs, à savoir l’éducation, la santé, la justice… et
qui a permis de relever les grandes faiblesses structurelles dans ces systèmes.
Cette même période a été marquée par l’exigence des bailleurs de fonds
internationaux de réaliser un suivi/évaluation ou des audits pour les projets financés dans le
cadre de la coopération internationale et des partenariats avec les institutions
internationales.
L’évaluation des politiques et des programmes publics est une pratique récente au
Maroc, car ce n’est qu’au début du 21ème siècle que certaines instances gouvernementales
marocaines, existantes ou nouvellement créées (départements ministériels, commissions
conjointes, agences…), commencent à effectuer des évaluations sectorielles pour apprécier
l’impact des interventions publiques dans le cadre de certains programmes spécifiques
(C’est le cas par exemple de l’évaluation du programme de lutte contre les effets de la
sécheresse, effectuée par des commissions conjointes de l’Inspection Général des Finances
et de l’Inspection Générale de l’Administration Territoriale en 2002)
4
nationaux (BENCHEIKH, 2013), donnant plus d’intérêt essentiellement à cette question de
« accountability » (rendre les comptes).
5
Cette disposition, bien que significative aux yeux des responsables publics qui la
considère comme traductrice d’une réelle volonté d’ancrer l’évaluation comme activité
propre de la Cour des comptes, limite l’intervention de celle-ci, du point de vue théorique,
à l’analyse à postériori des projets et n’ouvre pas le champ de l’évaluation à toutes les
étapes du processus d’élaboration et de mise en œuvre des politiques et des programmes
publics. Autrement dit, dans l’état actuel des choses, les missions d’évaluation de cette
institution sont beaucoup plus orientées vers l’étude de l’efficacité des projets, c’est-à-dire
le degré de réalisation des objectifs, et non pas leur impact.
6
d’exemple, de l’évaluation d’impact du programme des transferts monétaires
conditionnels, appelé « Tayssir », et de l’évaluation d’impact de la politique de formation
continue sur la compétitivité, la productivité et les compétences des entreprises
marocaines.
Il est clair, à partir de ces exemples, que le recours aux méthodes avancées
d’évaluation des programmes publics est d’une grande utilité puisqu’elles permettent,
comme c’est le cas de l’évaluation d’impact, de mesurer les effets de ceux-ci sur les
différentes dimensions visées. Or l’usage de l’outil évaluative n’est pas encore instauré
d’une manière systématique en tant que composante essentielle du processus des politiques
publiques au Maroc. En outre, le pays doit, avant tout, stimuler la demande interne en
termes d’évaluation des programmes publics en profitant surtout de ses multiples
avantages qui ne sont pas encore mis en avant.
7
II. L’élargissement de l’usage et des fonctions de l’évaluation
En effet, pour mieux cerner les rôles et les responsabilités des différentes parties
prenantes dans le processus d’évaluation, il est indispensable de revisiter la fonction
évaluative et ses principales variantes (rendre compte, gestion et apprentissage), en
précisant, notamment les types de relations entre les intervenants.A cet effet, trois
fonctions principales de l’évaluation sont à distinguer :
Tableau 1
Les trois fonctions de l’évaluation
Management de
Responsabilité
l’action publique « project
de Fonction Destinées aux
(administration cycle »
l’implémentation évaluative responsables de la mise
publique,
et de la mise en managériale en œuvre ⇒
collectivités
œuvre
territoriales…)
Ces trois variantes de la fonction évaluative dans les systèmes de gestion publique
nous rappelle, tout de même, les deux dimensions proposées par M. ALKIN dans son
fameux arbre des théories de l’évaluation, à savoir l’enquête sociale (social Inquiry) et la
reddition des comptes (Accountability and Control). En effet, il est question d’envisager la
pratique évaluative au Maroc surtout dans sa dimension d’enquête scientifique sociale, qui
constitue un champ très peu exploité malgré son importance vis-à-vis du citoyen. Vient en
8
deuxième lieu la dimension de reddition des comptes qui reste tout de même primordiale
dans le système d’efficacité de l’action publique, et qui fait partie des missions de
nombreuses institutions de contrôle de l’intervention publique (parlement, cours des
comptes, inspections ministérielles…).
L’évaluation doit être, ainsi, considérée par les décideurs publics marocains
comme l’occasion de faire le point sur les connaissances existantes, puisqu’elle fournit
l’expertise nécessaire à la recherche d’une meilleure articulation entre les composantes
d’une politique publique. C’est l’aspect managérial de l’évaluation qui se présente dans la
démarche évaluative comme une alternative plus flexible par rapport aux modes un peu
rigides d’audit et de contrôle de gestion favorisés jusque-là par l’administration publique
marocaine.
Dans cette optique, la pratique évaluative au Maroc peut bénéficier des apports
des deux principaux types d’approches scientifiques de l’évaluation : celles fondées sur les
preuves et celles basées sur la théorie. Chacune de ces modalités peut être appliquée sous
certaines conditions, mais il est possible d’envisager les deux dans une seule évaluation car
elles sont souvent complémentaires. A l’instar de plusieurs pays comme les Etats-Unis,
l’Australie, la Grande Bretagne et l’Allemagne, les méthodes fondées sur les preuves
peuvent être, en fait, d’une grande utilité puisque les politiques publiques sont évaluées
selon des essais ou des vérifications systématiques permettant de tester l’efficacité des
actions avant leur implantation à grande échelle.
Cependant, les méthodes fondées sur les preuves ne sont pas toujours opportunes
et il est question de faire appel aux approches basées sur la théorie, surtout lorsque la
politique publique est formulée sous forme d’un processus de relations causales bien défini
9
et approuvé. L’évaluation dans ce cas teste la validité empirique de ces relations pour
pouvoir confirmer la théorie de la politique publique.
10
III. Les principales possibilités d’institutionnalisation de l’évaluation au Maroc
III.1. Des conditions essentielles pour toute tentative d’institutionnalisation
Il est clair que l’introduction de cette nouvelle activité au sein des institutions
publiques marocaines existantes ne peut se faire d’une manière souple à cause de la
dominance d’une culture de contrôle chez la majorité de ces institutions. Les expériences
des pays les plus avancés démontrent que l’instauration des pratiques d’analyse des
politiques publiques, dont l’évaluation, a nécessité un réel changement des mentalités, des
visions et des attitudes. Un changement qui a pris, dans certains cas, beaucoup de temps
avant d’aboutir à une reconnaissance élargie des apports de l’évaluation.
Dans cet esprit, P-J. ROGERS et J-M. OWEN (1999) ont identifié certaines
conditions préalables qui forment le cadre logique de la conduite du changement essentiel
pour s’assurer de la fluidité de l’adaptation des systèmes nationaux aux pratiques
évaluatives. Ces préalables sont considérés par les deux auteurs dans une vision linéaire et
mettent l’accent sur la nécessité de reconnaitre le besoin pour un changement dans les
activités des institutions et les comportements des acteurs (décideurs publics et citoyens
notamment), avant de pouvoir construire une vision de ce changement de manière à
s’assurer de l’adhésion de tous les acteurs de la société. ROGERS et OWEN précisent, de
plus, qu’il existe un risque lié au « non-changement » qui n’implique pas seulement le
développement de l’évaluation dans la société, mais aussi tous les aspects de
modernisation de l’action publique.
11
Tableau 2
Les préalables de la conduite du changement nécessaire pour
l’institutionnalisation de l’évaluation
12
III.2. Le renforcement des dispositifs d’évaluation et de leur implication
A cet effet, l’évaluation externe ne peut être la seule voie de diffusion d’une
culture d’évaluation au Maroc, surtout que les potentialités des dispositifs internes sont
énormes. D’ailleurs, la majorité des départements ministériels dispose déjà de cellules
dédiées aux études et suivis des programmes sectoriels. Par contre, l’institutionnalisation
au niveau transversal de l’exécutif reste très faible et c’est là où les efforts doivent être
concentrés, surtout en présence de plus en plus de politiques et programmes
multisectoriels.
13
Il est à noter que le Maroc s’est lancé également dans la création d’organismes
spécialisés dans l’évaluation des politiques sectorielles tout en renforçant le dispositif
existant en insistant sur la nécessité de mener des évaluations d’une manière périodique,
comme c’est le cas du Haut Commissariat aux Eaux et Forêts et à la Lutte Contre la
Désertification qui mène des évaluations environnementales notamment par rapport à la
politique du gouvernement en matière de lutte contre la désertification.
Sur le plan pratique, l’ONDH a mené une multitude d’études d’évaluation portant
soit sur des programmes gouvernementaux dans leur globalité ou sur des aspects
particuliers de ceux-ci. Cette deuxième catégorie comprend, à titre d’exemple, les études
réalisées en partenariat avec l’université, notamment l’évaluation de l’approche
participative en matière de gestion forestière dans la commune rurale de « Oued Ifrane », et
l’étude sur les disparités d’accès à une éducation de base de qualité au niveau de la
commune urbaine de Ouisslane et de la commune rurale de Dkhissa (préfecture de
Meknès). La première étude vise le développement de référentiel méthodologique pour
l’évaluation des approches participatives dans le domaine forestier à travers l’élaboration
et le test d’une grille d’évaluation qui va permettre de mesurer l’effet de l’approche
participative en matière de gestion forestière dans la commune en question.
14
de la pratique évaluative et de s’assurer de l’engagement des acteurs publics pour sa
réussite.
15
Conclusion
Sans doute le Maroc doit bénéficier des avancées réalisées par les pays pionniers
dans ce domaine, en l’occurrence les Etats-Unis, le Canada, et même la France et le
Mexique, mais il reste primordial d’adapter les méthodes et les outils importés de
l’étranger et surtout de mettre en place des dispositifs formels et officiels, et de diffuser
une culture de reddition des comptes et d’évaluation des actions publiques auprès des
acteurs nationaux et locaux.
16
Bibliographie
ALKIN M-C. ; Evaluation essentials : From A to Z ; Ed. The Guildford Press, New
York, 2011.
BENCHEIKH A. ; Présentation d’ouverture lors de la 6ème Conférence de
l’Association Africaine d’Evaluation (AfrEA) ; du 9 au 13 janvier 2012 à Accra –
Ghana.
BENHASSINE N., DEVOTO F., DUFLO E., DUPAS P., POULIQUEN V. ;
Turning a shove in to a Nudge ? A « Labeled Cash Transfer » for education ;
Document publié par J-PAL, Avril 2014.
HARAKAT M. ; Gouvernance, gestion publique et corruption ; Imprimerie El
Maarif El Jadida, Rabat, 2006.
La Fondation Européenne pour la Formation ; Les études d’évaluation d’impact et
leurs implications sur la prise de décision politique, 2008.
MOURABIT S. ; L’expérience de la Cour des comptes du Royaume du Maroc en
matière d’évaluation des programmes et projets publics ; Présentation lors du
« Regional Workshop on Public Policy Evaluation » organisé par l’OCDE, le 23-24
mars 2010 à Institut Supérieur d’Administration – Rabat.
OWEN J-M, ROGERS P-J ; Program evaluation : forms and approaches ; Ed.
SAGE Publications, London, 1999.
PATTON M-Q. ; Utilization-focused evaluation (4th edition); Ed. SAGE
Publications, Thousand Oaks, 2008.
PERRET B. ; L’évaluation des politiques publiques ; Ed. La Découverte, Paris,
2008.
SHADISH W-R., COOK T-D., LEVITON L-C. ; Foundations of program
evaluation : Theories of practice ; Ed. SAGE Publications, Newbury Park, 1991.
17