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2-3 Mycoses
G.E. Piérard, C. Piérard-Franchimont
RÉFÉRENCES
1. Piérard G.E. et coll., Scientific World Journal. 2014, 462634, 2014.
2. Wakasa A. et coll., J Dermatol. 2010, 37, 431.
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5. Hubka V. et coll., Mycologia. 2015, 107, 169.
Dermatophytoses
Les agents pathogènes en sont les dermatophytes (tableau 2.25).
Sur le plan taxonomique, ils se répartissent en trois genres dénom-
més Trichophyton (T), Epidermophyton (E) et Microsporum (M), qui
se distinguent principalement par la forme des macroconidies qu’ils
développent en culture. Fig. 2.53 Teigne microsporique.
135
2-3 Maladies infectieuses
Mycoses
Les agents en sont Microsporum audouini, M. langeroni (anthro- Teignes suppurées (kérion de Celse,
pophiles), M. canis, M. persicolor (zoophiles), M. gypseum et
M. cookei (géophiles). Ce sont les enfants, spécialement en âge
sycosis mycosique)
scolaire, qui en sont atteints. Contagieuse, la teigne micros- Les agents responsables les plus fréquents en sont des dermato-
porique provoque des épidémies étendues, en particulier lors- phytes zoophiles (T. mentagrophytes, T. ochraceum, plus rarement
qu’elle est due à M. audouini ou familiales (M. canis). Elle guérit M. canis) ou parfois géophiles (M. gypseum). Les enfants et les
spontanément à la puberté, à de rares exceptions près. Elle se hommes sont atteints plus souvent que les femmes et l’affection
présente sous forme d’aires érythématosquameuses uniques ou prédomine en milieu rural. La contamination se fait généralement
en petit nombre, pouvant atteindre quelques centimètres de dia- à partir d’animaux domestiques (bovidés, chats, chiens, cobayes,
mètre, sur lesquels tous les cheveux sont cassés à 2 ou 3 mm de etc.), mais parfois une contagion inter-humaine directe ou indirecte
leur émergence. La hampe pilaire résiduelle est entourée d’une est possible. Chez l’enfant, c’est le cuir chevelu qui est atteint, alors
gaine pulvérulente blanchâtre, correspondant à des amas com- que chez l’adulte, la barbe et les régions particulièrement velues
pacts de spores. peuvent également être touchées (fig. 2.54). Le début se fait par
À l’examen en lumière de Wood, ce matériel émet une fluores- une ou plusieurs plaques érythématosquameuses, arrondies et pru-
cence verte. L’examen microscopique révèle que les cheveux sont rigineuses. Trois à 5 jours plus tard, les plaques bien limitées se
engainés de spores et infiltrés de quelques filaments (parasi- tuméfient et se couvrent de pustules folliculaires qui se rompent
tisme ecto-endothrix). Les cultures permettent l’identification de et donnent issue à un pus jaunâtre. La plupart des cheveux ou des
l’espèce. Le diagnostic différentiel se fait avec les teignes tricho- poils s’éliminent spontanément. Des adénopathies satellites doulou-
phytiques, le favus et avec toute affection inflammatoire du cuir reuses peuvent apparaître, ainsi qu’une fièvre modérée, des cépha-
chevelu. lées, des courbatures et des arthralgies. L’évolution spontanée se
fait vers la guérison parfois marquée d’une cicatrice alopécique. Le
parasitisme est à la fois endo- et ectothrix. Des mycides (réactions
Teignes trichophytiques inflammatoires à distance) généralement lichénoïdes ne sont pas
Les agents les plus fréquents en sont Trichophyton tonsurans, rares, surtout chez les enfants.
T. violaceum, T. soudanense, tous anthropophiles. La teigne tri-
chophytique atteint les enfants en âge scolaire. Elle guérit sou-
vent à la puberté, avec quelques exceptions correspondant à la
trichophytie chronique de l’adulte. Elle se présente sous la forme
de petites zones grisâtres, de 1 à 2 cm de diamètre, de forme irré-
gulière, renfermant des cheveux fragiles, se cassant à leur émer-
gence. Ils peuvent ainsi apparaître sous l’aspect d’un point noir
implanté dans l’orifice folliculaire. Quelques cheveux non parasi-
tés persistent au sein des plages alopéciques.
L’examen sous la lumière de Wood est négatif. L’examen
microscopique des cheveux cassés révèle un parasitisme endo-
thrix caractérisé par la présence de très nombreuses spores intra-
pilaires disposées en chaînettes. Les cheveux atteints ne sont pas
engainés de spores. La culture est indispensable à l’identification
de l’espèce. Le diagnostic différentiel doit se faire avec la teigne
microsporique, le favus, ainsi qu’avec toute affection inflamma-
toire et/ou squameuse du cuir chevelu. Fig. 2.54 Sycosis mycosique de la barbe à T. mentagrophytes.
136
Maladies infectieuses 2-3
Mycoses
Fig. 2.55 Dermatophytose circinée.
Le diagnostic différentiel se fait avec un eczéma nummulaire,
plus érythémateux, vésiculosuintant sur toute sa surface et sans
évolution centrifuge. Il faut également éliminer la possibilité d’une
eczématide, d’un pityriasis rosé de Gibert ou d’un psoriasis (cf. chapitre
17). Les infections dermatophytiques sont malencontreusement
parfois confondues avec d’autres dermatoses. Si une corticothéra-
pie topique est instaurée, par paresse ou incompétence, l’aspect
clinique peut s’en trouver bouleversé, perdant la plupart des signes
sémiologiques typiques. C’est la tinea incognita qui s’installe alors
avec des stades successifs d’extension de l’infection et de rémis-
sion apparente. Des lésions papulopustuleuses, des nodules et des
plaques érythémateuses peuvent ainsi s’étendre tant que le diag
nostic correct et le traitement adéquat ne sont pas rétablis. Fig. 2.56 Dermatophytose des grands plis périnéaux à T. rubrum.
137
2-3 Maladies infectieuses
Mycoses
des troubles circulatoires et le port de chaussures imperméables. l’itraconazole et la terbinafine ont fait preuve d’une efficacité
Le prurit, parfois violent, est exacerbé par la transpiration et le remarquable [1] alors que leurs effets indésirables sont très sou-
contact de l’eau. Le patient accuse parfois seulement une sensa- vent mineurs et réversibles (cf. chapitre 22).
tion de brûlure. Ce sont les plis interdigitaux (en particulier le qua-
trième) (fig. 2.57) et sous-digitaux qui sont le siège le plus fréquent
de l’infection, avec extension à la voûte plantaire. La face dorsale Dermatophytoses unguéales
et les bords latéraux sont moins fréquemment touchés. Les lésions
Les onychomycoses à dermatophytes sont dues à quelques champi-
débutent soit par un intertrigo exsudatif, ou simplement squameux,
gnons, en particulier T. rubrum et T. mentagrophytes var. interdigitale,
souvent avec rhagades au fond des plis entre et sous les orteils, soit
alors que d’autres pathogènes tels que T. violaceum, T. schönleinii,
par une plaque érythématovésiculeuse plantaire, parfois bulleuse,
E. floccosum et M. canis ne sont que très rarement impliqués [5].
pouvant s’étendre pour confluer avec d’autres plaques et, parfois,
occuper toute la surface plantaire. Selon l’épaisseur de la couche Aspects cliniques. L’ onychomycose dermatophytique débute sur le
cornée, les vésicules sont plus ou moins visibles. Elles sèchent ou bord libre ou les bords latéraux de l’ongle par une tache blanchâtre
s’érodent, laissant à nu une surface rouge entourée d’une collerette qui s’étale progressivement. La lame unguéale perd sa transpa-
cornée. Il en existe deux formes cliniques, dénommées dysidrosique rence et son brillant et, peu à peu, elle devient polychrome. Elle se
et hyperkératosique. Dans la forme hyperkératosique, une xérose soulève par épaississement du lit unguéal et devient friable avec
érythémateuse peut s’étendre sur toute la sole plantaire et les bords une surface irrégulière et striée. L’ongle peut être réduit à quelques
latéraux du pied, réalisant une topographie en mocassin. Ailleurs, débris et se détacher de son lit. Une autre forme d’onychomycose à
elle peut réaliser un aspect de kératodermie farineuse. Aux mains, dermatophyte se présente sous l’aspect d’une leuconychie superfi-
l’atteinte hyperkératosique prédomine sur une paume, réalisant par- cielle à départ proximal. Elle est un marqueur du sida.
fois le tableau du syndrome « deux pieds – une main ».
Diagnostic différentiel. Il se fait avec les autres onychomycoses et
des affections inflammatoires telles un psoriasis, une pelade ou
un lichen plan (cf. chapitre 15-1). Les examens mycologique et his-
tologique sont souvent indispensables pour assurer un diagnostic
de certitude. Les filaments mycéliens et les arthroconidies sont
localisés à divers niveaux de la lame unguéale et de l’hyperkéra-
tose sous-unguéale.
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Maladies infectieuses 2-3
Mycoses
Candidoses buccodigestives
Elles peuvent atteindre tous les segments de l’appareil digestif. Candidoses génitales
Elles sont généralement la conséquence du passage à la pathogé- On les rencontre surtout chez les adultes ou par extension d’une
nicité de l’endosaprophyte C. albicans. dermite fessière chez l’enfant.
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2-3 Maladies infectieuses
Mycoses
La vulvovaginite candidosique déborde fréquemment sur la face contenant des levures. La douleur, continue ou intermittente, est
cutanée des grandes lèvres, sur les plis inguinaux, le périnée et exacerbée par toute pression mécanique et souvent par le contact
le pli interfessier, pour former des lésions de contour irrégulier, de l’eau. L’onyxis secondaire à une paronychie débute par la partie
bordées par une collerette blanchâtre. La muqueuse est rouge, proximale ou latérale de l’ongle. Il se traduit par de petites taches
macérée et parsemée de vésiculopustules qui, une fois rompues, jaunes ou verdâtres, des sillons transversaux, occasionnellement
forment de petites érosions souvent recouvertes de dépôts blan- par de petites dépressions. La lame unguéale s’opacifie progressive-
châtres grumeleux. Une cervicite érosive peut l’accompagner. ment, devient molle et friable, se détache progressivement de son lit
Une leucorrhée généralement abondante s’installe. Les patientes et, parfois, s’élimine spontanément.
accusent un prurit et des douleurs à type de brûlure entraînant Aux pieds, et plus exceptionnellement aux mains, l’onyxis est
une dyspareunie. Les examens bactériologique, virologique et souvent primaire. Il commence sur le bord libre ou les bords laté-
mycologique permettent de la distinguer des vulvovaginites raux de la lame, qui devient friable, blanchâtre, verdâtre ou même
d’autres étiologies (gonocoque, herpès, trichomonas, etc.). franchement noire. L’ongle s’épaissit avant de se désagréger en sa
partie ventrale, entraînant une onycholyse.
Une urétrite complique près de 20 % des vulvovaginites. Elle se Les examens histologique, mycologique, bactériologique et
traduit par une dysurie et une pollakiurie. Chez l’homme, elle sérologique permettent de reconnaître la paronychie candidosique
est souvent de nature vénérienne. Elle est fréquente chez les dia- des périonyxis bactériens ou syphilitiques. De même, ce sont les
bétiques. Elle se localise habituellement à l’urètre antérieur, se examens de laboratoire qui permettent de reconnaître l’onyxis
traduit par une rougeur du méat, avec prurit et picotements, et candidosique de toutes les autres atteintes de la lame unguéale
par un écoulement purulent d’importance variable, de couleur (à dermatophytes, à moisissures, psoriasique, lichénienne, pela-
blanc verdâtre. Les examens microbiologique et mycologique dique, etc.) (cf. chapitre 15).
permettent de la distinguer des urétrites dues à d’autres germes
(gonocoques, Chlamydiae, Trichomonas, etc.).
Candidose mucocutanée chronique
Les balanites et balanoposthites résultent de l’ensemencement du
Il s’agit d’infections chroniques, cutanées et muqueuses, qui sur-
gland et du prépuce à l’occasion d’un rapport sexuel contaminant
viennent chez des patients atteints d’un déficit immunitaire. Parfois,
ou à partir d’une candidose urétrale ou digestive. Le début se
l’infection à Candida, souvent associée à d’autres infections à germes
marque par l’apparition sur le gland et/ou le sillon balanopréputial
opportunistes, témoigne d’un déficit profond, primitif ou secondaire,
de lésions érythématovésiculeuses ou pustuleuses, dont le toit se
des fonctions immunitaires cellulaires, comme au cours de l’infection
rompt précocement. Les érosions ainsi formées peuvent confluer
évoluée par le VIH ou au cours des déficits immunitaires combinés
en zones lisses, se recouvrant parfois de squames. Les lésions
sévères. Dans des cas exceptionnels, le déficit immunitaire semble
gagnent souvent le feuillet interne du prépuce, qui devient rouge,
spécifique pour le Candida. Il comporte des lésions hypertrophiques
œdématié et douloureux. Ensuite les lésions se recouvrent d’un
et papillomateuses labiales, buccales, cutanées et unguéales qui
enduit blanchâtre, crémeux ou grumeleux. La tuméfaction de l’an-
traduisent, d’une part, une forte réaction épithéliale (fig. 2.60) et,
neau préputial antérieur peut conduire à un phimosis. L’affection
d’autre part, la pénétration des levures dans l’épiderme et le derme
à un stade chronique est caractérisée par de petites aires rouges,
avec constitution de granulomes. Ce syndrome est parfois associé
lisses, entourées d’une collerette cornée et, parfois, recouvertes
à certaines endocrinopathies (hypoparathyroïdisme, insuffisance
de fines squames. Prurit et brûlure sont variables en intensité.
surrénalienne dans le cadre du syndrome APECED : Autoimmune
Les lésions peuvent s’étendre au fourreau de la verge, au scro-
Polyendocrinopathy-Candidiasis-Ectodermal Dystrophy), à une hypo-
tum, au périnée ainsi qu’aux plis inguinaux et interfessier. La cli-
thyroïdie, à un thymome, à une hyposidérémie, etc. Outre la mutation
nique, complétée par des examens microbiologique, sérologique,
du gène AIRE responsable de l’APECED, des mutations activatrices
mycologique et, parfois, histologique, permet de reconnaître une
STAT1, des déficits en CARD9 ou STAT3 peuvent être révélées par un
balanoposthite candidosique d’une balanite érosive, d’une syphi-
tableau de candidose mucocutanée chronique. L’IL-17 joue un rôle
lis secondaire, d’un herpès génital, d’une dermite de contact ou,
clé dans l’immunité mucocutanée contre Candida ; des déficits en
éventuellement, d’une balanite plasmocytaire de Zoon, voire d’un
IL-17RA ou IL-17 F expliquent un certain nombre de ces tableaux [4].
carcinome intraépithélial de type érythroplasie de Queyrat.
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Maladies infectieuses 2-3
Mycoses
Septicémies à Candida confluer entre elles pour former des macules ou des plaques à
peine surélevées étendues. Leur couleur varie du jaune au brun,
Des septicémies à Candida peuvent rarement être révélées par avec un érythème inconstant et discret (fig. 2.61). Sur les peaux
des lésions cutanées chez les sujets neutropéniques. Il s’agit de pigmentées par le soleil, les macules deviennent souvent hypo-
papules ou de nodules fermes, roses ou rouges, de 5 à 10 mm, chromiques (pityriasis versicolor achromiant). Le grattage à la
parfois à centre pâle, uniques ou multiples. En cas de thrombopé- curette mousse fait se détacher des squames en lambeaux super-
nie, les lésions deviennent purpuriques. Ce sont surtout Candida ficiels (signe du copeau).
tropicalis et Candida albicans qui provoquent ces lésions. À l’exa-
men histopathologique, les Candida peuvent être mis en évidence
dans le derme, à la différence des candidoses cutanéomuqueuses
où les germes sont dans la couche cornée. Il s’agit d’une urgence
thérapeutique avec un mauvais pronostic, notamment en raison
du terrain d’immunodépression profonde sur lequel surviennent
ces septicémies.
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2-3 Maladies infectieuses
Mycoses
Dermatite séborrhéique Piedra blanche. Il s’agit d’une affection observée au niveau des che-
veux, de la moustache et de la barbe, plus rarement sur les poils des
Par définition, un état pelliculaire consiste en une desquama-
aisselles, du pubis, des sourcils et des cils. L’infection se traduit par
tion non inflammatoire du cuir chevelu. La dermatite sébor-
l’apparition, sur les cheveux ou les poils, d’une à plusieurs petites
rhéique s’en distingue par la présence d’un érythème et par une
nodosités de couleur blanchâtre à brune et de consistance plutôt
extension de la maladie en dehors du cuir chevelu. Ces deux
molle. Les nodules mesurent environ 0,5 mm de diamètre et la lon-
conditions, état pelliculaire et dermatite séborrhéique, forment
gueur varie de 1 à 4 mm. L’infection est asymptomatique et peut
vraisemblablement une seule entité d’origine multifactorielle,
passer inaperçue.
dans laquelle Malassezia sp. joue apparemment un rôle central,
responsable d’une réaction inflammatoire conduisant aux alté-
Trichosporonose invasive. Les lésions cutanées sont de deux
rations épidermiques (cf. chapitre 17). L’utilisation de produits
types : isolées sous l’aspect d’un nodule abcédé ou multiples,
antifongiques topiques voire par voie orale est discutée au cha-
papuleuses, papulocroûteuses ou purpuriques, signant une fongé-
pitre 17-2 [6].
mie. Dans le cas d’une septicémie, les lésions parenchymateuses
peuvent concerner de nombreux organes. Parmi eux, les poumons,
RÉFÉRENCES les reins, le myocarde, le foie, la rate et la moelle osseuse sont des
1. Ashbee H.R., Med Mycol. 2007, 45, 287. cibles privilégiées. Trichosporon envahit et oblitère les vaisseaux
2. Prohic A. et coll., Mycoses. 2007, 50, 58. entraînant des infarcissements nodulaires. D’autres présentations
3. Jagielski T. et coll., BMC Dermatol. 2014, 14, 3.
4. Harada K. et coll., J Dermatol. 2015, 42, 250.
pathologiques existent avec formation de granulomes et d’abcès.
5. Velegraki A. et coll., PLoS Pathog. 2015, 11, e1004523. La trichosporonose disséminée s’avère souvent fatale. Des succès
6. Piérard G.E. et coll., Dermatology. 2007, 214, 162. thérapeutiques ont été rapportés avec le saperconazole (200 mg/j)
associé à l’amphotéricine B (0,1 à 1 mg/kg/j).
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Mycoses
L’amphotéricine B est administrée à une dose de 0,4 à 0,6 mg/ sur les autres territoires. Elle est polymorphe avec des papules
kg/j selon la gravité de la symptomatologie. L’itraconazole par isolées ou groupées, des nodules et des abcès. Les ganglions
voie orale est également actif à une dose de 200 à 400 mg/j. régionaux sont atteints, augmentent de volume et peuvent devenir
suppuratifs. Le système nerveux central, le foie et la rate peuvent
être également concernés par la maladie qui devient chronique
Histoplasmose américaine et évolue vers une issue fatale en quelques mois ou années. Les
L’histoplasmose, parfois dite « américaine », est due à Histoplasma cellules fongiques sphériques sont très grandes (10 à 60 μm) et
capsulatum var. capsulatum. On peut la trouver partout dans le multibourgeonnantes.
monde, mais elle est particulièrement endémique dans certaines L’iodure de potassium, le kétoconazole et l’itraconazole sont des
régions intertropicales et au sud des États-Unis. La maladie est thérapies de choix.
contractée par l’inhalation de spores présentes dans le sol souillé
de déjections d’oiseaux ou de chauves-souris contaminées. Elle
touche des individus de tout âge. L’histoplasmose est considérée Pénicilliose
comme un marqueur du sida. La pénicilliose à Penicillium marneffei est une affection rare, ori-
L’atteinte cutanéomuqueuse de l’histoplasmose chronique dis- ginaire du Sud-Est asiatique. Elle est considérée comme un mar-
séminée est granulomateuse, verruqueuse ou ulcérative. Elle peut queur du sida. Le sol pourrait être le réservoir de ce champignon.
prendre l’aspect d’une perlèche, d’une gingivite ou d’une ulcéra- À partir d’un site d’inoculation pulmonaire, la maladie s’étend
tion bien limitée du palais ou de la langue. Des lésions cutanéo- à divers organes et peut provoquer des foyers ostéolytiques et
muqueuses végétantes peuvent également survenir de manière une splénomégalie. Les lésions cutanées sont polymorphes. Elles
très tardive, parfois 20 ans après une primo-infection silencieuse. peuvent se présenter sous la forme de pustules, d’ulcères chro-
La culture est utile, bien que la différence avec l’histoplasmose niques ou de papules multiples, acnéiformes, ou évoquant l’aspect
africaine par H. duboisii ne soit pas possible. L’examen histolo- de molluscum contagiosum (fig. 2.63).
gique met en évidence des champignons unicellulaires de petite
taille (1 à 3 μm de diamètre), soit en amas extracellulaires, soit
dans des macrophages mononucléés. Ces éléments doivent être
distingués des leishmanies, des toxoplasmes et du Pneumocystis
jirovecii.
L’itraconazole apparaît être la thérapie de choix à la dose de
100 à 200 mg/j jusqu’à disparition des lésions, puis à 100 mg/j
pour terminer 6 mois de traitement.
Histoplasmose africaine
L’histoplasmose africaine à grandes levures est due à Histoplasma
capsulatum var. duboisii. Elle est présente dans les régions chaudes
et humides de l’Afrique du Centre-Ouest. Les lésions cutanées, qui
sont les plus fréquentes, prédominent au niveau du thorax et de la
face. Elles se présentent sous forme de papules hémisphériques,
lenticulaires ou ombiliquées, de nodules, d’abcès, d’ulcérations
torpides ou de cicatrices avec fistules. Fig. 2.63 Pénicilliose à Penicillium marneffei.
Les lésions ostéoarticulaires ressemblent beaucoup aux
atteintes de la tuberculose. On retrouve des gommes et des abcès L’affection réagit relativement bien à une cure d’amphotéri-
principalement au niveau des poignets, des genoux, des maxil- cine B, pour une dose totale de 40 mg/kg. L’itraconazole, 200 mg/j
laires, du crâne, du sternum et des vertèbres. Ces dernières lésions per os, s’avère cependant plus efficace et devrait être le traitement
ressemblent à un mal de Pott. de première ligne.
La culture permet d’isoler H. capsulatum sans distinguer les
variétés duboisii (histoplasmose africaine) et capsulatum (his- Sporotrichose
toplasmose américaine). En revanche, l’examen histologique de
ces champignons dans les tissus infectés permet de les distinguer. La sporotrichose est due à Sporothrix schenckii. Elle existe partout
H. duboisii est plus grand (8 à 15 μm de diamètre) et a souvent dans le monde, mais est endémique dans certaines régions rurales
un seul bourgeonnement latéral formant une « double cellule ». Ce des zones subtropicales et tropicales La contamination se fait par
champignon se retrouve au sein de cellules géantes multinucléées. voie cutanée à la suite d’un traumatisme et d’un contact avec des
animaux ou des végétaux porteurs de spores. La maladie touche
L’amphotéricine B est efficace à une dose totale de 2 à 4 g admi-
principalement certains milieux professionnels comme les culti-
nistrée en 4 mois. Le kétoconazole et l’itraconazole (200 mg/j) ont
vateurs, les bûcherons, les vétérinaires et les mineurs.
également prouvé leur efficacité.
Trois types de sporotrichose sont individualisés : la sporotri-
chose cutanée isolée, la forme cutanéolymphatique et la forme
Paracoccidioïdomycose disséminée. Après une période d’incubation de quelques jours
La paracoccidioïdomycose, ou blastomycose sud-américaine, est à environ 3 semaines, un chancre d’inoculation apparaît. La
causée par Paracoccidioides brasiliensis. Elle est endémique dans lésion initiale peut rester unique et prendre un aspect verru-
la plupart des pays d’Amérique latine. queux ou de pyodermite chronique. Elle peut aussi ressembler
La lésion est habituellement pulmonaire où elle peut rester à un botryomycome. Dans la forme évolutive la plus fréquente,
silencieuse. Les premières manifestations cliniques résultent de de type cutanéolymphatique, des nodules (gommes) secondaires
la dissémination du champignon dans l’organisme, en particu- se développent en direction centripète le long de trajets lympha-
lier au niveau de la muqueuse orale ou pharyngée, de la peau tiques. Une adénite est possible. D’autres variantes existent et,
et des ganglions. Les muqueuses sont infiltrées par des plaques parmi elles, l’augmentation anormale de volume d’une cicatrice.
blanc jaunâtre parsemées de points hémorragiques qui s’ulcèrent. La forme disséminée est rare et se manifeste par le développe-
L’atteinte cutanée est plus fréquente sur la face et le tronc que ment d’abcès sous-cutanés et de lésions viscérales et osseuses.
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