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D. MARIE, O. MIMOZ
Courriel : o.mimoz@chu-poitiers.fr
Points essentiels
Les infections du site opératoire représentent la première cause de mortalité et de
morbidité en chirurgie et la deuxième cause d’infection associée aux soins.
Leur taux d’incidence est de 3 à 7 %. Elles entrainent un surcoût important.
Il est recommandé de pratiquer au moins une douche préopératoire sans qu’aucune
recommandation concernant le type de savon (antiseptique ou non) ne puisse être
émise.
Il est recommandé de privilégier la non-dépilation à condition de ne pas nuire aux
impératifs per et postopératoire. Si les conditions locales justifient la dépilation, il est
recommandé de privilégier la tonte ou la dépilation chimique.
Il est fortement recommandé de ne pas faire de rasage mécanique la veille de
l’intervention et il est déconseillé de dépiler le patient en salle d’opération.
Il n’est pas recommandé de pratiquer systématiquement une détersion à l’aide d’une
solution moussante antiseptique suivie d'une désinfection large du site opératoire
lorsque la peau est macroscopiquement propre.
Il est recommandé de privilégier un antiseptique en solution alcoolique. Bien que les
études disponibles soit plutôt en faveur d’une solution à base de chlorhexidine, les
résultats d’études en cours permettront de définitivement trancher en faveur ou non de
cet antiseptique.
Introduction
Les infections du site opératoire (ISO) sont définies par toute infection survenant au site
opératoire dans les 30 jours suivant la chirurgie, ou dans l'année s'il y a eu mise en place d'un
implant, d'une prothèse ou d’un matériel prothétique, et restent la principale complication
observée durant la période postopératoire [2]. Elles occupent la 2e cause d’infections
associées aux soins derrière les pneumonies, représentent 25 % de ces infections et touchent 3
à 7 % des opérés [3]. Cette incidence élevée s'explique, en partie, par la pratique de gestes de
plus en plus complexes chez des patients porteurs de pathologies de plus en plus graves. Un
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tiers des ISO sont profondes et nécessitent une reprise chirurgicale ou un geste en radiologie
interventionnelle [2].
Les ISO allongent la durée du séjour hospitalier d’en moyenne une semaine, retardant ainsi la
reprise de l'activité professionnelle, entraînent des séquelles transitoires ou permanentes, un
préjudice moral ou financier, voire le décès du patient, et enfin un surcoût moyen compris
entre 700 et 5000 € par épisode, ce qui justifient la mise en place de mesures de prévention
[2].
Facteurs de risque
Physiopathologie
Les mécanismes participants à la genèse des ISO dépendent du moment de leur survenue et du
type de chirurgie (Classification d’Altemeier). endant l’acte chirurgical, une faute d’asepsie
(manuportée ou liée à l’environnement) est le plus souvent mise en cause ou encore, une
préparation cutanée de mauvaise qualité ou rendue difficile en raison d’une plaie souillée ou
du caractère urgent de l’intervention. En postopératoire l’infection est le plus souvent
attribuable à une erreur technique (désunion anastomotique colique entrainant une
péritonite...) ou à des soins postopératoires de mauvaise qualité (drains, pansements...).
Micro-organismes en cause
Le patient est la source principale des bactéries incriminées dans les infections du site
opératoire, et proviennent soit de la peau (staphylocoques pénétrant la plaie lors de l’incision
ou des manœuvres chirurgicales), soit des tractus respiratoire, digestif, génital et urinaire
(contenant naturellement des bactéries à Gram négatif et des anaérobies), soit d'un site
opératoire infecté et concerné par l’acte chirurgical.
Par opposition, le personnel et l'environnement opératoire constituent les sources exogènes
d'infection. Les bactéries commensales de la flore cutanée ou muqueuse (mains, cuir chevelu,
naso-pharynx, périnée) des membres de l'équipe opératoire, les bactéries présentes sur les
instruments (mal stérilisés ou longtemps exposés à l'air ambiant), dans l'eau ou les solutés
(Pseudomonas aeruginosa, mycobactérie atypique) et des levures ou des champignons
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filamenteux présents dans l'air (système de ventilation) peuvent être à l'origine d'infection du
site opératoire.
Prévention
Douche préopératoire
L’élimination des poils est supposée réduire le risque d’infection du site opératoire. Pour
autant, certaines études attestent que cette pratique à l’inverse majore ce risque et qu’elle doit
être évitée si elle ne gêne pas la chirurgie. Si la dépilation est jugée indispensable, la tonte
(voire la crème dépilatoire), qui génère moins de traumatismes cutanés que le rasage, doit être
favorisée. La dépilation est à réaliser au plus près de la chirurgie, mais il est déconseillé de la
réaliser au bloc opératoire.
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Détersion
Elle consiste en un lavage avec un savon antiseptique de la zone opératoire, suivi d’un rinçage
avec des compresses et de l’eau stérile, puis d’un séchage avec des compresses stériles avant
l’application de l’antiseptique. Bien que cette pratique ait longtemps été recommandée, des
études ont montré que la préparation du champ opératoire par antisepsie seule était aussi
efficace que la préparation par détersion puis antisepsie cutanée [9, 10, 11, 12]. A l’inverse,
elle est onéreuse en raison du temps passé et des produits nécessaires à la réaliser, ce qui
explique sa remise en cause par certains professionnels dans un contexte budgétaire des
établissements de soins souvent déficitaires et d’une pénurie de personnel paramédical. Ainsi,
dans l’attente des résultats de l’étude CLEAN à venir [13] aucune recommandation ne peut
être émise concernant l’intérêt de la détersion avant la réalisation d’une antisepsie sur une
peau sans souillure. En revanche, il reste recommandé de réaliser une détersion sur une peau
souillée.
L’antisepsie
Deux familles d’antiseptiques sont recommandées dans cette situation par la plupart des pays
développés dont la France : la povidone iodée alcoolique à 5 % et la chlorhexidine (disponible
à la concentration de 0,25 %, 0,5 % et 2 %). Il existe peu de données comparant l’efficacité de
la chlorhexidine en fonction de sa concentration. On peut néanmoins s’attendre à une
efficacité au minimum identique des produits à concentration élevée par rapport à ceux aux
concentrations plus faibles. La formulation aqueuse de povidone iodée ne doit plus être
utilisée.
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par une solution alcoolique de chlorhexidine (toujours concentrée à seulement 0,25 %) a
permis de réduire le nombre de cathéters colonisés ou infectés [17]. Enfin, un troisième travail
présenté lors du congrès de l’ICAAC par une équipe française ( arienti JJ, ICAAC 2012) a
conclu que le passage d’une préparation cutanée en quatre temps avec une solution alcoolique
de povidone iodée à 5 % à celle en un temps avec une solution alcoolique de chlorhexidine à
2 % s’accompagnait d’une diminution significative du nombre de cathéters colonisés et non
significative du nombre de bactériémies. Les résultats de l’étude CLEAN ayant inclus plus de
2400 patients et près de 5000 cathéters permettront de conclure définitivement à la supériorité
ou à l’équivalence des 2 composés en association avec de l’alcool [13].
Conclusion
Les ISO ne sont pas une fatalité. Ces infections sont parmi les infections associées aux soins
les plus fréquentes. Depuis 1999, la France a mis en place une coordination des réseaux de
surveillance interrégionaux afin d’évaluer l’incidence des ISO. endant la même période, une
campagne nationale de promotion des mesures de prévention des ISO et d’incitation à la
surveillance en réseau a été mise en place.
Une meilleure compréhension de la pathogénie et des facteurs de risque d'infection, les
progrès de l'hygiène, des techniques opératoires, d'anesthésie et de réanimation ont transformé
le pronostic des actes chirurgicaux. L'adoption d’une bonne préparation cutanée associée à
l'antibioprophylaxie et au maintien d’une normothermie et d’une euvolémie ont permis à la
chirurgie moderne de réduire notablement le taux d'ISO en s'opposant à un des facteurs
essentiels de risque qu'est l'inoculum bactérien.
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Références
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