Matiere Organique Vegetale
Matiere Organique Vegetale
Matiere Organique Vegetale
Celle-ci évite la génération de substances toxiques, et met au point des procédés de fabrication réduisant
ou éliminant l'usage et la génération de substances dangereuses pour la santé et l'environnement, comme les
solvants organiques et les catalyseurs. Cette chimie biosourcée entre pleinement dans la chimie verte, à côté
de la chimie pétrosourcée revue et corrigée à l'aune des objectifs de sécurité et de préservation de
l'environnement.
Cette conversion de la pétrochimie à la chimie du végétal rencontre cependant plusieurs freins
consubstantiels à tout changement. De multiples verrous, d'ordre scientifique, technologique et économique,
sociétal et environnemental, subsistent encore pour en faire une industrie à grande échelle et compétitive :
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elle doit au préalable résoudre de nombreux problèmes et pas des moindres. Par exemple, à l'inverse du
pétrole (facilement manipulable et transportable), la disponibilité de la ressource végétale n'est pas toujours
régulière et homogène, puisqu'elle dépend des conditions météorologiques, des conditions de culture et des
territoires. De plus, l'outil industriel existant – historiquement développé et optimisé pour traiter des
composés d'origine fossile – n'est pas toujours adapté à une mutation vers des procédés de fabrication, vers
des filières de recyclage et vers le maintien de la qualité et des performances des produits élaborés. De ce
fait, la formation des personnels est un enjeu majeur à prendre en compte.
L'innovation dans certains procédés de chimie biosourcée est encore au stade de la recherche (ex : la
déconstruction des parois lignocellulosiques) et l'efficience industrielle de synthèse de ces composés
biosourçés renvoie à deux enjeux majeurs :
- la compétitivité économique des produits, où la chimie verte affronte une chimie pétrosourcée qui
s'est améliorée depuis un siècle,
- et l'enjeu environnemental tant dans les procédés que dans la fin de vie des produits,
ce qui ouvre souvent des voies originales de recyclage et de traitement des déchets organiques.
Toutefois, le développement de nouvelles technologies – par transformation de la biomasse en produits
chimiques utilisables – est en progrès constant. Les technologies de fractionnement, de purification, et
surtout de fermentation et de transformation par les micro-organismes – les biotechnologies blanches – se
sont améliorées considérablement au cours de ces dernières années ; les enzymes et micro-organismes
modifiés par ces nouvelles biotechnologies apportent des solutions technologiques efficaces de conversion
"biocatalyse" de la biomasse en molécules d'intérêt, ce qui élargit la palette des molécules issues du vivant.
La biocatalyse présente certains autres avantages : conditions douces de réaction (quelques dizaines de
degrés), usage de l'eau comme solvant, activités de catalyse élevée, etc. La mise en œuvre de ces
technologies permet de réduire (entre -20 % et -30 %) les consommations d'énergie par rapport aux produits
pétroliers, ainsi que les émissions de CO2.
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restent souvent élevés, les marchés (encore modestes) sont en forte croissance, répondant ainsi aux
préoccupations environnementales des sociétés modernes. La R&D s'accélère partout dans le monde, et les
enjeux sont d'élargir la gamme des produits, d'améliorer les bilans et la productivité de la filière, et de
réduire les coûts, notamment par diversification des ressources et valorisation des coproduits et déchets.
Pour valoriser au mieux les produits d'origine biologique, agricole notamment, les industriels ont
construit des ensembles regroupés sur un même site : les bioraffineries, qui transforment la biomasse en
produits chimiques à partir de matières premières renouvelables, de réactifs éco-compatibles – non ou peu
toxiques pour la santé (chimie blanche) – ouvrant un rôle privilégié aux biotechnologies. L'enjeu de cette
écologie agro-industrielle est de tirer parti de toutes les fractions organiques, et de valoriser les structures
chimiques dans des usages en cascade, jusqu'au traitement des déchets, tendant ainsi vers un bouclage des
cycles N, P et K.
Des problèmes restant à résoudre
De nombreux problèmes en particulier socio-économiques restent à résoudre :
- cycle de vie des composés biosourcés ;
- traitement des déchets organiques ;
- incidence du développement de la chimie biosourcée sur le climat et le paysage (nouvelles cultures
dédiées) ;
- compétition équitable des prix entre produits biosourcés et produits issus de la pétrochimie ;
- équilibres entre satisfaction des besoins alimentaires et produits industriels.
L'évolution de notre alimentation vers une réduction de la consommation de produits animaux et vers
l'implantation de l'agroécologie ouvre des perspectives de réorientation des systèmes de culture.
Les produits biosourcés vont-ils créer de nouveaux marchés et de nouveaux emplois proches du territoire
où les matières biologiques sont produites (bioéconomie territoriale) ? Ou conduire au développement d'une
bioéconomie portuaire à l'instar de la chimie pétrosourcée ?
L'enjeu social est majeur pour dépasser l'opposition "nouvelles technologies/compétitivité économique" :
- Comment les États développeront-ils des politiques publiques incitatrices dans ce sens ?
- Quelles formations et informations à donner aux citoyens-consommateurs ?
Conclusion
L'objectif de la chimie du végétal est donc d'atteindre le stade d'une efficacité industrielle, économique et
respectueuse de l'environnement tout en répondant aux besoins humains.
Produire de l'énergie, des molécules et des matériaux à partir des ressources agricoles non alimentaires
constitue un enjeu majeur dans un contexte de développement durable, c'est-à-dire dans une économie basée
sur les ressources renouvelables.
Jean-François MOROT-GAUDRY et Paul COLONNA, membres de l'Académie d'Agriculture de France
septembre 2021
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