Apport Hypnothérapie Trauma
Apport Hypnothérapie Trauma
Apport Hypnothérapie Trauma
1
Remerciements
Je tiens à exprimer toute ma reconnaissance à mes patients pour leur aide et leur
investissement tout au long de cet apprentissage et particulièrement à Léa.
J’adresse mes sincères remerciements à Monsieur Emile Notté pour sa disponibilité, son
ouverture d’esprit et ses précieux encouragements, ainsi que pour son intérêt porté à mes
questionnements au cours de cette recherche.
Merci à vous tous, famille et amis, pour m’encourager sans cesse dans mes nouvelles
aventures extraordinaires. A toi Mégane, ma fidèle amie et alliée lors de ce projet, qui a
attesté de mon évolution au cours de cette formation. A toi Valentin, pour ta patience et ton
amour inconditionnel. A Audrey et Mohammed, pour leur gentillesse et leur accueil
chaleureux lors des sessions de cours. Mes pensées s’adressent particulièrement à toi Maman,
qui a tenu à me financer ce Diplôme Universitaire d’Hypnothérapie, dont je te parle depuis
longtemps. Merci de m’avoir permis de vivre cette expérience unique, et de m’avoir soutenue
depuis toutes ces années.
2
Table des matières
Introduction ............................................................................................................................................. 5
Revue théorique....................................................................................................................................... 7
I- Hypnose et traumatisme : similarités des processus et spécificités de la prise en charge
thérapeutique ..................................................................................................................................... 7
1. Définition des concepts .......................................................................................................... 7
1.1 Traumatisme psychique et trouble de stress-post-traumatique ............................................... 7
2.2 Hypnose dans le champ du traumatisme ................................................................................. 8
2. Similarités des processus hypnotiques et traumatiques: la question de la dissociation .. 9
2.1 Hypnotisabilité et processus cognitifs communs ..................................................................... 9
2.2 La notion de dissociation.......................................................................................................... 9
3. Approches hypnothérapeutiques du traumatisme ........................................................... 11
3.1 La remise en mouvement........................................................................................................ 11
3.2 Le renforcement de la sécurité et des ressources et la régulation émotionnelle .................. 12
3.3 L’élaboration et l’intégration du traumatisme : l’écran de projection................................. 13
II- Hypnose et résilience dans la prise en charge du traumatisme : des processus
analogues ? ....................................................................................................................................... 14
1. La résilience : une approche centrée sur les ressources ................................................... 14
1.1 Résilience et traumatisme : l’activation des ressources ........................................................ 14
1.2 La résilience : processus dynamique et évolutif sur le chemin d’un néodéveloppement15
2. Prise en charge thérapeutiques : la résilience assistée ? .................................................. 16
2.1 Accompagner la quête de sens et renforcer le sentiment de sécurité.................................... 17
2.2 Le psychologue, un tuteur de résilience ?.............................................................................. 18
3. Hypnose et résilience : quelles interactions ? .................................................................... 18
3.1 Des processus analogues entre hypnose et résilience ........................................................... 19
3.2 L’hypnose comme outil thérapeutique favorable au travail de la résilience ....................... 19
Problématique........................................................................................................................................ 21
Méthodologie......................................................................................................................................... 22
Résultats et données cliniques ............................................................................................................... 26
I- Séance 1 : Les premiers temps de l’alliance thérapeutique, à la recherche d’une
stabilité dans le lieu secure ............................................................................................................. 26
II- Séance 2 et 3 : Potentialisation des ressources ................................................................ 29
III- Séance 4 : Elaboration et intégration du psychotraumatisme avec l’écran de
projection ......................................................................................................................................... 32
IV- Séance 5 : Supports métaphoriques autour de la résilience .......................................... 33
Discussions théorico-clinique................................................................................................................ 36
I- Rappel de la problématique.............................................................................................. 36
3
II – Confrontation des résultats à la problématique ............................................................. 37
III – Discussion éthique : l’hypnose comme alliée et biais pour le « thérapeute
suffisamment bon » ? ...................................................................................................................... 41
Conclusion ............................................................................................................................................. 45
Bibliographie ......................................................................................................................................... 47
Annexes ................................................................................................................................................. 50
Résumé .................................................................................................................................................. 65
4
Introduction
Mon activité en tant que psychologue clinicienne dans un Centre Hospitalier Spécialisé est
très variée, tant dans la diversité des champs d’intervention qu’au niveau de la population des
patients rencontrés. En effet, j’interviens à la fois en milieu carcéral dans une Unité de
Consultation et de Soins Ambulatoires dans un centre de détention, également dans un des
services d’hospitalisation ouvert et fermé du CHS, ainsi que dans un Centre Médico-
Psychologique pour adultes. Malgré une pratique clinique très riche de part cette variété des
rencontres et des environnements associés, il se dessine de manière régulièredes
problématiques similaires au fil des entretiens avec les patients.
J’ai pu en effet constater, au travers des multiples et singulières histoires de vie, que la
dimension du traumatisme était souvent présente. L’expression du traumatisme peut être
bruyante et les patients souffrant de psychotraumatismes formulent alors une importante
demande d’aide à leur thérapeute. Le traumatisme, dans sa verbalisation et ses manifestations
symptomatologiques, peut provoquer un état semblable à celui de la sidération chez le
praticien, ainsi qu’un ressenti d’impuissance face à la violence du vécu du sujet qu’il
accompagne. Parallèlement à ce premier constat, j’ai pu aussi observer que la demande
initiale des patients pouvait être biaisée, ce qui peut générer une posture de passivité de leur
part dans le suivi. Cela se note particulièrement en milieu carcéral, où la demande du patient
peut être le reflet d’une requête de la justice ou bien peut être influencée par ce que permettent
les incitations aux soins. Effectivement, il faut savoir qu’un investissement dans un suivi
psychologique peut permettre aux personnes détenues d’obtenir des remises de peines
supplémentaires. Cependant, cela se distingue aussi en milieu psychiatrique où certains
patients peuvent s’engager dans un suivi psychologique, encouragés par leur médecin
psychiatre ou un membre de leur famille etc. Ils reconnaissent leur souffrance pour la plupart
mais ne savent pas nécessairement comment la signifier.
6
Revue théorique
L’étymologie du terme trauma vient du grec « blessure » (Winnick, 1969 in Van Der
Hart et al. 2010 ; Crocq, 2012) qui dérive du verbe percer. Le trauma correspond à une
« blessure avec effraction » (Lacambre&Baccino, 2014). La notion de traumatisme psychique
quant à elle détermine un « phénomène d’effraction et de débordement des défenses psychiques
de l’individu face à un afflux de stimulations critiques et urgentes qui menacent sa vie, son
intégrité physique ou son équilibre psychique » (Crocq, 2018, p.104). L’évènement traumatisant
vient déborder les défenses psychologiques du sujet, le mettant dans une position passive et
impuissante et vient affecter sa santé psychique par l’apparition potentielle de troubles
psychopathologiques que nous définirons au paragraphe suivant. Il est à noter que les origines
des traumatismes psychiques peuvent être diverses mais qu’il n’existe pas d’évènement
traumatisant en soi, dans le sens où pour une même situation extrêmement stressante, tout le
monde ne sera pas dit « traumatisé » (Bioy et al., 2010 ; Crocq, 2018). L’important est de
prendre en compte la question du vécu subjectif de l’individu par rapport à l’expérience donnée
(Van der hart et al. 2010), en sachant qu’un même évènement traumatique peut être vécu
différemment par deux individus, en fonction de leurs caractéristiques individuelles,
environnementales et leurs ressources respectives (Delage 2004 ; 2008 inTisseron 2007 ; 2017).
La notion de trauma est donc relative et cela pour un même individu : « ce qui est trauma pour
l’un ne l’est pas pour l’autre, et ce qui est trauma pour moi aujourd’hui ne le serait pas
demain » (Crocq, 2018, p.106).
Le vécu traumatique se caractérise globalement par une sidération, une désorientation spatio-
temporelle, une déréalisation et une dépersonnalisation (Crocq, 2018). Au niveau
psychopathologique, lorsqu’un individu est soumis à un traumatisme psychique, il peut
potentiellement développer un trouble de stress post traumatique, identifié dans le DSM V par :
- Des symptômes envahissants d’intrusion (flashbacks, souvenirs intrusifs, rêves
récurrents…).
- Un évitement de tous stimuli se rapprochant du traumatisme.
7
- Une altération négative des cognitions et de l’humeur.
- Une modification de l’état d’éveil et de la réactivité (irritabilité, hypervigilance, troubles
du sommeil).
Le mécanisme physiologique principal du traumatisme consiste en un « dérèglement du
processus dissociatif initial protecteur, devenant pathologique par son intensité et sa
pérennisation » (Clastot, 2013, p.167). Dans le DSM V, on spécifie le trouble de stress post
traumatique s’il est associé à l’un des symptômes dissociatifs suivants :
- La dépersonnalisation : expérience persistante ou récurrente de se sentir détaché de soi-
même comme si le sujet ne faisait qu’observer de l’extérieurses processus mentaux ou
son corps.
- La déréalisation : sentiment persistant ou récurrent que l’environnementn’est pas réel.
8
2. Similarités des processus hypnotiques et traumatiques: la question de la
dissociation
Nous allons voir dans cette partie théorique qu’il existe des similitudes entre les
mécanismes du traumatisme et l’état hypnotique, et plus particulièrement développer la notion
de dissociation associée aux processus hypnotiques et traumatiques.
Les études ont montré que le trouble de stress post-traumatique était corrélé à une
hypnotisabilité, soit une capacité à entrer en hypnose, plus importante que la population
générale (Spiegel et al. 1988, Bryant 2001, Yard et al. 2008 inClastot, 2013). Aussi, Clastot
(2013) explique que l’état hypnotique et le trauma ont en commun des processus cognitifs tels
que :
- Une réorganisation de la perception de la temporalité par rapport à soi-même et au
monde extérieur.
- Une altération des fonctions d’intégrations des souvenirs, de la conscience de soi et de
son corps.
Malgré leurs apparences initiales éloignées, l’état hypnotique et les mécanismes psychiques
associés au traumatisme se révèlent analogues dans certains de leurs processus.
9
mécanismes protecteurs mais peuvent devenir pathologiques s’ils s’avèrent persistants,
invalidants et agissent de manière inadaptée et involontaire.
L’état dissociatif traumatique et l’état dissociatif hypnotique se révèlent donc similaires par
leur processus commun d’altération de la perception et des fonctions normales
d’intégrationdes souvenirs, de la conscience, du contrôle des mouvements corporels et de
l’identité (Fareng&Plagnol, 2014) mais sont à nuancer en prenant en compte la durée du
processus dissociatif, son caractère normal et contrôlé ou pathologique et involontaire.
Contrairement à la dissociation traumatique, la dissociation hypnotique est donc un vecteur
thérapeutique, dans son caractère contrôlé et provoqué par le thérapeute (Pambrun, 2015).
Fareng et Plagnol(2014) synthétisent trois différents états de dissociation qui permettent de
distinguer la dissociation « normale et pathologique » :
- La dissociation « quotidienne » dite normale, naturelle et spontanée. Elle correspond à
la capacité de l’être humain à focaliser son attention et à se distancer de la réalité par le
recours à l’imaginaire. Ce type de dissociation peut avoir un caractère protecteur si nous
sommes face à un évènement perçu comme menaçant, en écartant les ressentis
douloureux et stressants. En hypnose, on travaille cette capacité innée d’altération de la
conscience, en induisant le sujet dans une transe hypnotique, de façon contrôlée et
accompagnée par le thérapeute.
- La dissociation traumatique, qui se rapporte à l’installation d’une dissociation
« quotidienne » sur du long terme, perdurant au-delà du danger immédiat, de manière
rigide et perturbante pour le sujet. Ce type de dissociation est à caractère pathologique
et lié à des symptômes traumatiques. Elle vient altérer les perceptions, l’expérience, les
ressentis et l’identité du sujet, vis-à-vis d’une situation vécue comme menaçante. Ce
type de dissociation affecte également le niveau de contrôle volontaire de la conscience
et l’individu peut être soumis à des symptômes de répétitions (souvenirs intrusifs et
envahissants, flashbacks, cauchemars…).
- La fragmentation du moi identifié par Janet en 1889 comme une « rupture d’unité
personnelle » dans laquelle la personnalité est divisée en deux. La fragmentation du moi
se produit lorsqu’un nombre important de sensations sont isolées de la conscience et
qu’une nouvelle forme de perception se crée. Ce processus est enjeu dans les troubles
dissociatifs de l’identité (DSM V).
10
2.2.2 La dissociation traumatique : notion de dissociation structurelle
La notion de dissociation structurelle a été conceptualisée par Van Der Hart, Nijenhuis
et Steele (2010) et identifiée comme propre à la dissociation traumatique. La dissociation
structurelle se divise en trois configurations selon son degré de gravité :
- La dissociation structurelle primaire, retrouvée dans les traumatismes simples. Elle
correspond à la division du fonctionnement psychique par l’évènement traumatique en
deux parties qui sont la Partie Apparemment Normale (PAN) et la Partie Emotionnelle
(PE). La PAN est la partie de la personnalité qui fait face au quotidien et dont la défense
principale est l’évitement de situation pouvant réactiver le traumatisme. La PE est celle
qui porte le poids traumatique, maintenue à l’écart de la PAN par le processus de
dissociation.
- La dissociation structurale secondaire, associée au trouble de stress post-traumatique
complexe ou trouble dissociatif complexe. Dans ce type de dissociation la PAN doit se
confronter à plusieurs PE. La PAN est donc affaiblie, l’évitement n’est pas toujours
opérant, les réactivations traumatiques sont plus régulières.
- La dissociation structurale tertiaire, identifiée dans les troubles de personnalité multiple.
Ici, la dissociation de personnalité se divise en plusieurs PAN et plusieurs PE.
11
psychiques qui ont pu être bloqués. En effet, le choc impliqué dans le traumatisme peut
entraîner un effet de sidération, qui empêche potentiellement la verbalisation du sujet. De
plus, s’il y a reviviscences du traumatisme, celles-ci s’expriment et se répercutent à la fois sur
la scène du corps, sur les ressentis et sur les capacités sensorielles de l’individu. Il est souvent
décrit un caractère incontrôlable de ce revécu du traumatisme. Cependant, l’intérêt de
l’hypnose, qui par analogie est une approche corporelle et sensorielle, est de passer par ces
accès afin que le thérapeute puisse accompagner l’élaboration du vécu subjectif du sujet
traumatisé, cette fois-ci de manière maîtrisée et non plus imposée. C’est grâce à « la mise en
scène du corps que la mise en sens va pouvoir être opérante » (Paumbrun, 2015, p.124).
L’hypnose s’avère donc être une méthode thérapeutique adaptée et efficace dans la prise en
charge des personnes ayant subi un traumatisme (Fareng, 2017). Cependant, la notion de
temporalité psychique est importante, il faut pouvoir laisser le temps nécessaire au patient
avant d’élaborer directement le traumatisme. Initialement, le but est d’acquérir des stratégies
de régulation émotionnelle et de trouver un sentiment stable de sécurité, notamment au sein
du suivi psychologique en co-construisant une alliance thérapeutique solide. Une fois ces
objectifs thérapeutiques établis, on peut alors se confronter au traumatisme lors les séances
d’hypnose au sein du suivi psychologique (Notté 2019 ; Vuillaume 2019). L’hypnose pourra
alors permettre une ouverture des possibilités concernant le vécu traumatique, avec une
modification de son scénario proposée, une mise en avant des ressources acquises et
potentialisées au sujet, afin qu’il puisse se remettre en action et non plus subir cet évènement
et les ressentis associés (Fareng, 2017).
12
non directif, on vient solliciter des réponses inconscientes et spontanées. Il ajoute qu’il
pourrait d’ailleurs être contre-indiqué de faire des suggestions directes à des patients
traumatisés, victimes de leur propre histoire ou d’un agresseur (Simon, 2012). Cela pourrait
faire revivre le traumatisme dans son aspect incontrôlable et de domination. L’hypnose doit
être envisagée comme un mode de communication relationnelle, tel un dialogue établi entre
patient et thérapeute et non pas un rapport de pouvoir ou de force. De plus, ce n’est pas
seulement la transe hypnotique qui constitue un vecteur thérapeutique mais le cadre contenant
de l’hypnothérapie posé entre le thérapeute et son patient. Le thérapeute proposant l’hypnose
doit pouvoir assurer un travail particulier d’écoute et d’accordage à son patient, d’ajustement,
afin de lui garantir les limites et la sécurité dont il a besoin pour pouvoir verbaliser, ressentir
et éprouver son traumatisme (Paumbrun, 2015). Il est donc également important de faire un
repérage des points forts du patient, d’identifier ce qui l’a aidé à survivre au trauma et à vivre
son quotidien jusqu’à présent (Smith & Crochet, 2012) afin de pouvoir les potentialiser au
sein de l’hypnothérapie. Selon Smith et Crochet (2012) il faut pouvoir repérer chez les
patients avant toute prise en charge :
- Ses qualités de mentalisation, d’association et d’insight.
- Ses aptitudes de verbalisation (et de jeu pour les enfants).
- Ses capacités de création et d’accès à l’art ou à la sublimation.
- Ses ressources internes et externes.
- Ses capacités émotionnelles (manière dont il exprime ses émotions, dont il les tolère et
les gère).
En termes de techniques thérapeutiques, un outil intéressant appelé « safe place » peut servir
de point de départ pour le travail hypnothérapeutique. Cela consiste à créer un lieu de bien-
être, rassurant, d’apaisement, afin de contrebalancer avec l’état d’alerte constant et la perte du
contrôle émotionnel vécus au quotidien chez les sujets traumatisés (Clastot, 2013).
13
de ne plus subir ces images traumatiques vécues comme intrusives, en lui proposant de
prendre le contrôle par le biais d’une télécommande imaginaire. Cette télécommande est
présentée au sujet comme ayant le pouvoir d’agir sur la taille de l’écran, afin de gérer par
analogie la charge émotionnelle liée aux images. Le sujet peut aussi avoir la possibilité de
modifier les couleurs, de faire un arrêt sur image s’il le désire. Toutes les possibilités sont
envisageables grâce à la télécommande, afin que le sujet face l’expérience d’une
désensibilisation de la scène traumatique par la reprise de contrôle du souvenir. L’intérêt est
de proposer au patient de sortir du vécu d’impuissance et de le restaurer sans sa capacité à être
acteur de son changement (Paumbrun, 2015). Plusieurs variantes de ce même exercice
hypnothérapeutique d’écran de projection sont proposées pour la prise en charge du
psychotraumatisme. Certains utilisent un double écran (Spiegel 1987 in Clastot, 2013) sur
lesquels le patient peut projeter sur l’un la scène traumatique, sur l’autre des aspects positifs
de son vécu (ressources du sujet au moment de ce même évènement traumatique, souvenirs
agréables…). Cela permet un travail de « pendulation » par désensibilisation (Notté, 2019)
mettant en perspective le traumatisme comme « un élément de l’histoire du patient et non
comme un tout envahissant » (Clastot, 2013, p.159).
14
vie » (Bioy et al. 2016, p.333). Dans le modèle de la résilience, il existe différents types de
ressources, qualifiées aussi de « facteurs de protection » (Anaut, 2015 p.65), dont le sujet
disposera plus ou moins, selon son parcours de vie (Anaut, 2009), pour atténuer l’adversité
d’une situation :
- Les ressources internesou facteurs de protection individuels : âge (jeunesse) ;
tempérament actif, doux, gentil ; QI élevé ou bon niveau d’aptitudes cognitives, bonne
estime de soi etc.
- Les ressources externes ou facteurs de protections familiaux(contexte psycho-affectif,
structure et qualité des relations familiales, soutien familial etc.) et extra-familiaux
(soutiens communautaires, sociaux, religieux, idéologiques, expériences de succès
scolaires ou au travail etc.).
15
apparaît souvent à ce moment-là, attestant de l’intégration psychique du traumatisme, de
sa mise en sens et non pas de son déni.
Dans l’idée de la construction d’un nouveau développement nous constatons qu’il faut porter
attention à ne pas confondre la résilience comme un retour à l’état antérieur, avant le
traumatisme, avec une absence de changement. En effet, la finalité du processus de résilience
est d’amener le sujet, blessé, traumatisé, à s’engager dans un autre type de développement, un
néodéveloppement. De plus, la résilience n’est pas non plus à considérer comme une forme de
résistance, qui consisterait plus en une stratégie d’accommodation à la situation adverse, ou
d’invulnérabilité (Anaut, 2018).
Les recherches sur la résilience ont développé des applications cliniques visant à
favoriser l’émergence de la résilience chez les patients traumatisés. Ionescu parle de
« résilience assistée » (2011). La résilience dans les prises en charges thérapeutiques est à
envisager comme un ensemble de caractéristiques personnelles que possèdent le patient (ses
ressources) et en même temps comme processus et finalité du soin (Tisseron, 2007). La
résilience ne correspond pas à un type de prise en charge spécifique avec des techniques
d’intervention données. Le modèle de la résilience propose plutôt un mode
d’accompagnement pour le sujet traumatisé par l’exploration de ses modes de protections et
l’activation de ses ressources internes et externes (Anaut, 2003). Une prise en charge axée sur
l’émergence du processus résilient chez un individu pourrait s’organiser en trois étapes, en
prenant compte les deux phases évolutives du fonctionnement psychique de la résilience
d’Anaut vues ci-dessus :
- Une première étape dans laquelle l’objectif thérapeutique est de permettre à l’individu
de se protéger psychiquement, en se distanciant des mécanismes de répétitions associés
au traumatisme. Le thérapeute pourra chercher à mettre en évidence les ressources
opérantes du patient et à les réactualiser ou les potentialiser (Anaut, 2009, Tisseron
2007). Une analyse de ses facteurs de protection et compétences individuelles peut être
co-construite sur la base d’actions concrètes que le patient a mises et/ou met en place et
cela peutfavoriser un renforcement de son sentiment de confiance et de compétence en
ses propres ressources.
- Une seconde étape correspondant à l’intégration et l’élaboration du traumatisme afin de
permettre au sujet de se réapproprier son vécu et d’y trouver du sens. Coutanceau(2018)
16
nomme cela le travail de liaison et de remémoration, qui consiste en une remise en route
narrative ainsi qu’une abréaction, c'est-à-dire une décharge émotionnelle des affects
douloureux liés au traumatisme L’objectif est pour l’individu d’élaborer sa
représentation de l’évènement traumatique afin de l’intégrer à sa trajectoire de vie et
cela participe à sa reconstruction psychique (Anaut, 2003, 2018).
- Une troisième étape consistant à l’accompagnement de la reprise d’un
néodéveloppement par l’individu, en lui proposant notamment de recourir à des
mécanismes de défenses plus adaptés à long terme, tels que la créativité et l’humour
(Anaut, 2018). Pour les équipes soignantes, l’enjeu peut être d’engager avec le patient
traumatisé un processus de reconstruction identitaire et de réalisation d’un nouveau
projet de vie (Tisseron, 2007).
Comme nous l’avons évoqué, le chemin vers la résilience passe par une recherche de
signification du vécu traumatique. Après y avoir conférer un sens, le sujet va pouvoir intégrer
à son histoire le traumatisme qu’il a subi et possiblement ne plus le vivre de manière étrangère
et/ou intrusive. Le thérapeute doit donc pouvoir permettre à l’individu traumatisé un travail de
mentalisation et d’historicisation (Anaut, 2018). On pourrait rapprocher le travail de
l’intégration par la quête de sens et de signification mis en jeu dans le processus résilient, au
concept de « réalisation » évoqué par Steele et al. défini comme « L’action continue d’être
conscient de la réalité telle qu’elle est, de l’accepter et de s’y adapter efficacement » (Janet
1935, Van dert Hart etal., 2006 in Steele & al., 2018, p.26).
L’élaboration du trauma peut aussi passer par l’activation de ressources positives et créatrices
afin de favoriser la transformation de la souffrance psychique. Les psychothérapies à
médiation sont d’ailleurs recommandées auprès des personnes traumatisées, le média venant
étayer l’élaboration du traumatisme. Mais avant toute élaboration autour du traumatisme, il
convient pour le psychothérapeute d’aller interroger la sécurité interne de son patient. En effet
le processus de résilience peut s’activer à condition que le patient ait trouvé une certaine
sécurité interne, un équilibre psychique qui n’est plus effracté par le traumatisme. Cela
nécessite de respecter la temporalité psychique du patient et de prendre en compte la
subjectivité de chaque personne rencontrée. L’exploration des modes d’attachements
infantiles donne une indication sur la sécurité intérieure du sujet mais il y a aussi un intérêt à
17
évaluer les liens affectifs actuels. Si la sécurité interne du patient n’est pas adéquate alors cela
pourra être travaillé au sein même de la psychothérapie (Anaut, 2018).
La notion de « tuteurs de résilience » a été développée par Cyrulnik en 1999 (cité par
Delage 2004, Tisseron 2007) et désigne les personnes qui guident, placent sur le chemin de la
résilience, soutiennent dans la reprise d’un néo-développement. Les tuteurs de résilience
peuvent être des membres de la famille mais aussi des membres de relations extra-familiales
comme des amis, des pairs, des enseignants ou encore des soignants etc. Ils agissent en faveur
du processus résilient chez l’individu de manière directe ou indirecte et/ou symbolique.
Jacques Lecomte en 2005 a identifié les caractéristiques des tuteurs de résilience :
- Ils optent pour des attitudes relationnelles positives.
- Ils proposent des étayages empathiques.
- Ils adoptent une attitude de non jugement envers l’individu en souffrance.
- Ils permettentune facilitation de l’estime de soi chez l’individu.
Nous pouvons aisément faire le parallèle entre les caractéristiques des tuteurs de résilience et
les qualités exigées chez un psychologue. Par ses qualités professionnelles et en faisant
l’hypothèse d’un potentiel résilient chez l’individu qu’il prend en charge, le psychologue peut
alors se situer comme l’un des tuteurs de résilience du patient. Le psychothérapeute peut
penser le sujet et sa problématique à travers la résilience, en instaurant les caractéristiques de
la relation d’aide, venant favoriser les processus résilients :
- Laisser la place à l’initiative personnelle.
- Autoriser la créativité.
- Permettre le changement.
- Envisager constamment l’évolution positive du sujet comme possibilité.
18
3.1Des processus analogues entre hypnose et résilience
1
5econgrés Hypnose & Douleur https://www.hypnoses.com/bibliotheque-hypnose/la-resilience/ (2014)
19
de reconstruction, par la redécouverte par le sujet de ses propres ressources et leur
réappropriation pour gérer au mieux ce qui lui arrive dans l’ici et maintenant. Nous pouvons
aussi venir travailler la créativité en hypnothérapie, qui est une ressource importante, que l’on
cherche à activer dans les prises en charge axées sur la résilience. Cette ressource créatrice est
stimulée par la « la richesse de l’imaginaire » (Coutanceau, 2018, p.101) produit par
l’inconscient en état de transe hypnotique et va permettre au sujet une relecture de son vécu et
de sa réalité psychique. Nous constatons donc par l’activation même des processus
hypnotiques, comment l’hypnose peut favoriser l’émergence de ressources résilientes au sein
du suivi psychothérapeutique. Ostermann évoque lui l’intérêt de l’hypnose dans le travail de
résilience par la notion de présence. L’hypnose est un mode relationnel à part entière, qui
implique une présence du thérapeute au patient, dans toutes ses dimensions, « dépassant
l’importance de la parole » (Ostermann, 2019, p.81). Il lie le processus de présence avec les
caractéristiques des tuteurs de résilience, comme favorisant un soutien dans le vécu de
solitude, de vide intérieur, et d’anéantissement que peuvent ressentir les patients traumatisés.
Il explique que par l’expérience de la rencontre et de la transe hypnotique, les patients
peuvent ressentir sensoriellement et partir à la découverte de la présence de l’autre et d’eux-
mêmes, à la recherche des ressources résilientes (Ostermann, 2019).
20
Problématique
21
Méthodologie
La première rencontre avec cette patiente a permis d’emblée de construire son anamnèse et
nous donne une représentation de l’aspect traumatique de son histoire ainsi que de la
complexité de sa demande.
22
Premier entretien et éléments d’anamnèse : rencontre explosive, demande
volcanique
Léa décrit un père absent, qu’elle ne connait pas, ou seulement à travers les dires de sa
mère. Sa mère n’a pas désiré sa grossesse. Elle élève seule Léa les premiers mois puis
demande à ses propres parents de s’en occuper, s’estimant trop jeune pour pouvoir élever sa
fille. Léa part donc vivre chez ses grands-parents maternels, qui lui transmettront une
éducation stricte, peu marquée par l’affect et la tendresse. A 5 ans, sa mère décide de
reprendre Léa chez elle. Le quotidien de la patiente sera alors fait de maltraitances physiques
et psychologiques de la part de sa mère et de ses différents compagnonsmais aussi
d’agressions sexuelles concernant l’un d’entre eux. Léa ne sera jamais reconnue comme
victime, elle explique avoir peur de parler et anticipait de perdre à nouveau sa mère si elle la
dénonçait. C’est comme si les maltraitances étaient plus supportables que l’abandon, dans le
vécu de Léa.
A ses 15 ans, Léa est rejetée du domicile familial, sa mère estimant qu’elle doit
s’émanciper et qu’elle ne supporte plus sa présence. Le rejet et l’abandon de la figure
maternelle se répètent. Elle part dans un habiter un studio en ville et tente de poursuivre son
cursus scolaire dans la vente. Sa mère lui payant uniquement le loyer, Léa survit. Elle ne peut
se nourrir correctement ou maintenir une bonne hygiène dans son appartement. Elle est
toujours en contact avec ses grands-parents maternels qui découvriront ses conditions de vie
précaires. Ceux-ci décideront de l’aider financièrement mais pas de réagir face à la négligence
de leur propre fille sur leur petite fille. Léa échoue à son certificat d’études. Lors de cette
même période elle dit s’intéresser et trouver refuge dans la religion et décide de se convertir à
l’Islam.
A 17 ans, elle est embauchée au service dans un restaurant. Elle est appréciée au
travail, valorisée par ses patrons et collègues. Elle dit se sentir bien, elle évolue
professionnellement et personnellement en prenant un appartement plus grand. A cette
23
période, elle n’a plus aucune nouvelle de sa mère, qui ne l’aide plus financièrement. Un an
plus tard, le restaurant ferme pour liquidation judiciaire. Elle vit cet évènement comme un
deuil et le ressent tel un nouvel abandon. Elle tente de se suicider. Léa se referme sur elle-
même et dans son appartement, elle s’isole de plus en plus et se radicalise progressivement
dans la religion.
Un mois après la perte de son travail, Léa fait la connaissance d’Arnaud par un réseau
social. Celui-ci la valorise et met en avant leurs valeurs et centres d’intérêts communs. Deux
mois après leur rencontre virtuelle, Léa part en Syrie, se marie à Arnaud, membre de l’Etat
Islamique. Elle décrit un quotidien traumatique, tentant d’échapper à la mort tous les jours,
tout en y étant confrontée par la vue de cadavres, de corps gravement blessés, abîmés. Les
bombardements représentent une menace à chaque seconde et quand ils surviennent c’est
cette peur terrifiante de mourir qui l’envahit. Elle explique avoir vécu cette période comme un
« film d’horreur », qui se projetait, et dont elle ne semblait pas faire partie, comme
« spectatrice » de sa propre vie. Elle dit être perturbée par le fait d’avoir peu pleuré à la vue
des cadavres, même d’enfants, alors qu’elle pouvait être affectée par le fait de ne pas pouvoir
nourrir les chats qu’elle avait adoptés.
Actuellement Léa est incarcérée. Elle a des contacts téléphoniques réguliers avec ses
grands parentset a rencontré Rémi en France, un homme avec qui elle a créé une relation
amoureuse avant son incarcération.
Léa raconte son histoire de façon automatisée, sans affect, dès le premier contact,
laissant peu de place aux reformulations. Elle a quasi le souffle coupé lors de sa verbalisation,
comme si elle voulait synthétiser son histoire à son interlocuteur, de manière à ce qu’il s’en
saisisse et qu’elle tente de se décharger de celle-ci. Elle est toujours agitée sur le plan psycho-
moteur. Léa semble apparaitre, dès notre 1er entretien, dissociée, hypothèse qui se consolide
au vu des éléments traumatiques de son histoire. Son anamnèse est sidérante, et par analogie à
son propre vécu, cette patiente fait l’effet d’une bombe, prête à exploser.
24
Concernant sa demande, elle est vive. Léa insiste sur un besoin important d’aide, sans
la cibler sur un point précis. Comme un volcan en éruption, ses différentes demandes se
projettent, sur nous-mêmes. Elle souhaite un accompagnement psychologique quant à son
histoire traumatique actuelle et passée, un soutien dans son quotidien en détention, un espace
de verbalisation pour la protéger de passages à l’acte auto-agressifs.
25
Résultats et données cliniques
La prise en charge de Léa par l’hypnothérapie s’inscrit dans la globalité d’un suivi
psychothérapeutique dit « classique ». Le descriptif des entretiens correspond à un suivi
psychologique se déroulant sur 5 mois pendant cette recherche, à raison d’un entretien toutes
les deux semaines environ. Les séances d’hypnose ont été initiées un mois et demi après le
début du suivi psychologique et la proposition de participer à une recherche clinique au même
moment. Léa a accepté d’emblée de participer à cette étude et a signé un formulaire de
consentement (cf.annexe 1). Ici sont décrits le déroulé des entretiens, l’évolution de Léa au
cours du suivi et les séances d’hypnose seront particulièrement détaillées, avec des scripts
construits (cf. annexe 2 et 3) pour la séance d’écran de projection et la séance sur la
construction d’une métaphore résiliente.
La première étape au sein des entretiens s’est axée à co-construire une alliance
thérapeutique fiable et à rechercher une régulation émotionnelle, associée à une première
séance d’hypnose illustrée par un « lieu sécure ». Il a également été question d’affiner le
diagnostic de trouble de stress post-traumatique au fil des observations cliniques. La suite des
entretiens avait pour objectif de repérer et de potentialiser les ressources de Léa, ce qui a été
renforcé par deux séances d’hypnose sur la réification du symptôme et l’ancrage d’un
souvenir positif. Une fois les ressources activées et ancrées, l’intérêt a été d’élaborer et
d’intégrer le traumatisme de Léa en hypnose, sur la base d’une technique thérapeutique
d’écran de projection. Faisant le parallèle avec l’évolution positive de Léa au sein même du
suivi, et dans son quotidien, une séance d’hypnose a été proposée afin de continuer à favoriser
sa dynamique, par le support d’une séance d’hypnose particulière, avec médiation de photos
symboliques et la construction d’une métaphore résiliente.
Les premières séances de suivi psychologique avec Léa se sont centrées sur la co-
construction d’une alliance thérapeutique solide, avec un soutien particulier quant à son
traitement en détention. En effet, Léa a été soumise, selon ses dires et ses ressentis, à une
négligence puis par ambivalence à une stigmatisation de la part de l’administration
pénitentiaire. Elle a eu besoin de réassurance et de trouver un espace de sécurité et de
bienveillance au sein même de son suivi psychothérapeutique. Ces évènements quotidiens
26
négatifs qui lui arrivaient, parallèlement aux reviviscences traumatiques, provoquaient chez
elle un débordement émotionnel qu’il a fallu contenir. Il s’agissait alors également de repérer
ses ressources positives, internes et externes, afin de les potentialiser pour qu’elle puisse s’en
saisir et l’aider à surmonter les différents évènements.
Léa a rapidement et fortement investi son suivi psychologique, cet espace de rencontre.
C’est lors du 6èmeentretien que je présente à Léa l’hypnose et comment nous pourrions
envisager par cette approche, de l’aider à élaborer et intégrer son traumatisme. Dans une
dynamique de confiance et déjà informée par les différentes stratégies thérapeutiques pour
traiter le traumatisme (elle nous parle dès le début du suivi de son intérêt à faire de l’EMDR),
Léa accepte de faire une première séance. Nous lui proposons alors au prochain entretien de
s’exercer sur un lieu sécure, afin qu’elle puisse faire l’expérience agréable de se détendre dans
une certaine sécurité, avec ses propres ressources que son inconscient aura sues lui procurer.
Nous l’informons également de la possibilité de réutiliser ce lieu lors de futures séances
d’hypnose, si elle en ressent le besoin.
27
• Lieu sécure
Léa arrive lors de cette séance avec des ressentis de colère et de dégoût par rapport à
ce qu’elle subit en détention. Elle évoque une crise d’angoisse les jours précédents, manquant
de distance avec les problématiques des autres détenues et suite aux passages réguliers des
avions. Je propose donc, comme prévu, une séance d’hypnose pour qu’elle puisse notamment
se détendre. Ses croyances concernant l’hypnose sont de « faire travailler l’inconscient, une
partie du cerveau qu’on n’est pas capable de solliciter seule ».
Nous proposons une induction avec focalisation sur les sensations de son
environnement extérieur, puis ramenons sur ses sensations intérieures corporelles, en
invoquant les appuis de son corps puis sa respiration. Léa semble au début en difficulté à se
détendre corporellement, elle reste très droite, son dos n’est pas contre le dossier de la chaise.
Cependant, elle semble très rapidement en transe. Nous permettons à son esprit inconscient de
contacter un lieu sécure, agréable, dans lequel elle pourrait ressentir un bien-être. Quelques
minutes après cette suggestion, Léa pleure, a le faciès crispé et ouvre parfois les yeux. Nous
lui laissons la possibilité d’exprimer ce qui se passe pour elle :
« Je voyais de la verdure, un champ de fleurs, mais j’ai eu un flash de la Syrie, de ma
chambre en Syrie, je ne comprends pas … (pleurs)… et puis là je suis allée dans ma chambre
en France, j’adore ma chambre, je l’ai bien décorée. J’avais acheté une tête de lit, je n’en
avais jamais eu avant. Vous m’avez parlé d’odeur… il y en a une que j’aime bien, d’une
bougie. J’aérais souvent, il n’y avait aucun bruit. Et là, je vois Rémi (son compagnon
actuel)… (pleurs)… Il est là je le vois, il me sécurise. ».
Nous incitons Léa à rester dans cet endroit, en reformulant les détails qu’elle vient
d’amener, tout en restant neutre. Nous lui proposons de profiter de toutes les sensations
qu’elle peut vivre, en investiguant tout son champ sensoriel. Noussuggérons ensuite que sa
chambre peut être son lieu sécure et qu’il est possible qu’elle s’y détende. Léa continue à
pleurer mais semble beaucoup plus apaisée. Je formule une suggestion post-hypnotique afin
qu’elle puisse retrouver les sensations de son lieu sécure, si elle en ressent le besoin.
Suite à la phase de retour, Léa exprime le besoin de verbaliser ce qu’elle a vu, son
expérience. Elle la décrit comme très positive, malgré les pleurs et l’image traumatique
envahissante. Elle affirme que nous avons pu l’aider à se distancier des images négatives.
Nous l’informons que c’est elle-même qui a pu ramener spontanément des ressources
positives, dont nous noussommes saisies pour consolider un lieu sécure et un moment de
28
détente. Nous la valorisons quant aux ressources qu’elle possède et qu’elle a mis en œuvre
aujourd’hui, qui peuvent l’aider à aller mieux, et au-delà du traumatisme. Léa semble adhérer
à notre discours et exprime son intention de continuer l’hypnose. Nous lui proposons alors de
s’exercer à l’autohypnose entre les entretiens, en lui expliquant comment procéder et en lui
laissant une note écrite pour qu’elle puisse mettre en pratique.
Les séances faisant suite au lieu sécur seront complexes. En effet, il a fallu soutenir et
contenir un ressenti abandonnique, suite au départ de l’Infirmier Diplômé d’Etat qui la suivait,
parti « sans lui dire au revoir ». Léa exprime avoir mal vécu cet évènement. Elle ressent de la
déception, révoque ses difficultés face aux séparations et à l’abandon. Elle a pensé à passer à
l’acte de manière auto-agressive. Elle explique que pour essayer d’aller mieux, elle tente de se
mettre au sport et qu’elle s’est inscrite à un atelier sculpture. Nous valorisons et encourageons
ce qu’elle met en place, dans une dynamique de potentialisation de ses ressources. Nous
axons donc sur ses ressources positives et notamment celle de la créativité, importante dans la
dynamique d’émergence de la résilience. A ce moment du suivi, Léa évoquera de plus en plus
Rémi, son compagnon, la confiance qu’elle lui porte et leur lien particulier. Après sa
visualisation dans son lieu sécure, et l’élaboration autour de leur relation amoureuse, cette
personne semble être une ressource externe pour Léa.
29
• Réification du symptôme : refuge vers le lieu secure
Nous proposons une 2ème séance d’hypnose, après que Léa ait exprimé une impression
de lourdeur au niveau de sa poitrine, comme un poids pesant qui la fatigue. Nous lui
suggérons de choisir une image ou un objet qui pourrait symboliser, représenter cette
sensation. Léa choisi une image de tornade. Au moment de l’induction, partant sur les
sensations extérieures, Léa décrit une sensation de malaise, elle sent une odeur de soufre,
désagréable. Déstabilisée par cette information que nous donne Léa sur ses ressentis, nous lui
suggérons alors qu’elle ressente les odeurs agréables qu’elle pouvait trouver dans son lieu
sécure, dont elle nous avait fait part. Léa valide cette suggestion. La transe hypnotique une
fois induite, suite à un body scan et une focalisation de l’attention sur sa respiration extérieure
et intérieure, nous suggérons à Léa de visualiser et ressentir l’image choisie, de tornade. Son
faciès est tendu, elle décrit des ressentis corporels de lourdeur qui la gênent, l’envahissent.
Nous proposons la suggestion suivante, de rendre les modalités de cette tornade plus
acceptable, en l’accompagnant de manière neutre sur les changements de modalités.
Cependant Léa exprime la complexité de cet exercice, elle dit ne pas y arriver. Elle ne
visualise plus la tornade, elle dit qu’elle a choisi le mauvais objet. Nous entendons sa
difficulté, la rassurons et lui proposons de se réfugier dans son lieu sécure au vu de ses
ressentis complexes et de notre propre vécu d’échec et d’impuissance à ce moment. Elle
s’apaise alors corporellement, son faciès est détendu, souriant. Suite à la phase de retour, Léa
exprime qu’’elle aurait peut-être dû choisir l’image de la fumée. Son premier malaise au
moment de l’induction, d’odeur de soufre, semble se rapprocher de cette deuxième image
choisie. Pour ne pas rester sur une expérience négative, ou du moins qui s’écarte de notre
objectif premier, nous valorisons la sécurité de son lieu comme ressource importante, qui l’a
aidée à se sortir de ressentis complexes lors de la séance d’hypnose. Nous encourageons son
investissement et lui expliquons que nous continuerons progressivement à travailler ses
différents ressentis et par la suite son vécu traumatique.
Afin de pouvoir continuer un travail de potentialisation des ressources avec Léa, nous
allons lui proposer une nouvelle séance d’hypnose, consistant à revivre un souvenir, une
expérience positive. Léa se met spontanément en échec, affirmant qu’elle n’en a aucune en
tête, que cela va être difficile. Juste avant, elle avait évoqué un sentiment d’échec vécu ces
30
derniers jours. Elle ne s’est pas rendue à un examen pour intégrer une formation proposée par
la détention. Elle a exprimé un manque de confiance en elle et a préféré « abandonner ».
Nous avons pu reformuler et la rassurer en lui expliquant qu’actuellement elle avait pu
écouter ses limites mais que cela ne signifiait pas qu’elle n’était pas capable de réussir un
examen dans le futur. Concernant son anticipation d’échec pour la séance d’hypnose, nous
l’encourageons et lui expliquons que c’est son esprit inconscient qui choisira une expérience
positive et que nousavions déjà pu constater qu’elle avait des ressources. Léa accepte.
Nous proposons une induction classique comme habituellement faite avec Léa. La
transe hypnotique s’installe rapidement. Son faciès est parfois tendu. Nous lui affirmons qu’il
se passe quelque chose pour elle. Elle rouvre les yeux, verbalise qu’elle voit Rémi, qu’elle a
envie de rire mais qu’elle ne le fait pas. Elle referme les yeux. Nous ratifions, nous validons
ce qu’elle vit, nous la valorisons et lui suggérons de s’autoriser à vivre et ressentir ce souvenir
positif. Léa sourit, elle pleure également. Son visage est apaisé, elle se laisse aller à des rires
pudiques. Nous lui laissons le temps de s’imprégner de ce moment, et faisons la suggestion de
l’associer à un geste particulier, qu’elle peut choisir. Elle bouge la main droite, dans un
mouvement où elle la serre. Nous lui proposons, tout en faisant ce geste, de profiter de ses
sensations positives et exprimons une suggestion post-hypnotique : « En faisant ce geste, en
fermant votre main droite, il vous sera possible de retrouver ces sensations positives ».
Léa, dans son rituel d’après séance, ressent le besoin de détailler ce qui s’est passé pour
elle. Elle a vu Rémi dans un contexte négatif mais a su se centrer sur le positif de la situation :
les rires, la joie, le fait de se sentir aimée et en sécurité. Elle fait le constat du travail de son
imaginaire, en expliquant qu’elle ne riait pas dans ce contexte en réalité. Léa a ancré dans sa
main droite mais dit avoir ressenti des maux de ventre au même moment, avec une impression
de lourdeur, déjà ressentie auparavant. Elle a éprouvé le manque de Rémi au travers de cette
expérience, d’où ses pleurs, ce qui est rassuré et valorisé. Il s’est passé quelque chose au
niveau émotionnel et corporel.
Les entretiens suivant cette séance d’hypnose ont été marqués par l’évolution de Léa.
Elle se saisit de ses propres ressources et les met en avant dans le suivi et dans son quotidien.
Elle se régule de mieux en mieux sur le plan émotionnel, ne se laissant plus déborder par ses
propres ressentis. A la fin d’un entretien, elle nous informe avoir trouvé un nouvel espace de
créativité. Elle colorie des mandalas durant ses après-midis et se demande si elle n’est pas en
autohypnose à ces moments : « Je suis détendue et je focalise mon attention sur le coloriage !
31
J’ai l’impression que cela me fait ressentir des sensations presque similaires que lorsque
vous me faites de l’hypnose ! ».
Léa se présente en entretien et explique qu’elle tente d’aller de l’avant chaque jour
avec de nouveaux objectifs. Elle s’est inscrite à une nouvelle activité culturelle en groupe et
souhaite continuer celles déjà entreprises. Nous la valorisonspour ses efforts et sa motivation.
Léa dit qu’elle s’interroge sur son fonctionnement actuel, lié à la gestion de son
traumatisme. Elle décrit des souvenirs intrusifs de la Syrie qui viennent à elle
quotidiennement. Elle affirme tenter de les « balayer » c’est-à-dire de les mettre de côté, afin
de ne plus y penser. Cela l’épuise et n’est pas toujours efficace, certaines pensées étant
ancrées et résistantes. Elle se demande alors si ce fonctionnement est de l’ordre de la
schizophrénie. Nous rassurons Léa en lui expliquant que son fonctionnement actuel se
rapproche de celui des personnes souffrant d’un trouble de stress post-traumatique. Nous
développonsnotre propos, en faisant un temps de psychoéducation autour de la dissociation
comme mécanisme défensif face à ses reviviscences traumatiques. Nous associons en
proposant alors à Léa d’élaborer sur son traumatisme, en hypnose. Nous lui demandons dans
un premier temps, si Léa aime aller au cinéma. Elle répond négativement, mais affirme aimer
le théâtre. Nous prenons en compte cette information et travaillons avec Léa sur une séance
complète de 40 minutes d’hypnose, avec la technique hypnotique de l’écran de projection (cf.
annexe 2). Léa semble vivre beaucoup d’émotions durant cette séance. Son faciès est très
tendu, ses sourcils froncés, sa bouche pincée. Ses globes oculaires font des mouvements
rapides et réguliers, sous ses paupières. Léa pleure beaucoup. Une fois apaisée, et lorsqu’elle
me signifie avoir fait le nécessaire pour elle dans cette séance, nous suggérons à Léa de
revenir à l’état de conscience normale. Léa débriefe en expliquant qu’elle a eu des difficultés
à projeter sur l’écran du théâtre. Elle avait plutôt la sensation que les souvenirs passaient en
elle, dans son esprit. Elle a utilisé la télécommande, pour effacer. Elle dit ne pas avoir utilisé
d’autre bouton, d’autre fonction pour engendrer des modifications différentes, autre que la
suppression. Le fait d’effacer ses souvenirs, laissait alors se projeter en elle une image
blanche. Elle a vu différents souvenirs mais ne s’en souvient pas forcément avec exactitude et
ne les détaille pas. Elle explique qu’à un moment elle a tenté d’en chercher mais qu’elle n’en
avait plus. Cela l’a déconcertée. Elle affirme être surprise de ne pas avoir vu les images de son
32
enfance. Une distorsion temporelle s’est produite, étant donné que Léa a le sentiment que la
séance a duré 10 minutes. Elle exprime un ressenti de soulagement, a la sensation de s’être
délestée d’un poids, comme cela était suggéré sur la fin de séance hypnotique. Elle met
beaucoup d’espérance quant à ce travail sur le traumatisme. Elle souhaite que cela lui
permette d’avoir moins de reviviscences, voir plus aucune.
33
toujours ressentir une peur intense et devoir prendre 10 minutes avant de pouvoir calmer cette
tension interne.
Une séance particulière d’hypnose avec support de médiation est construite pour
transmettre et acter l’évolution de Léa, son parcours résilient. L’idée est de transmettre en
hypnose le récit métaphorique d’un « arbre résilient ». Cette métaphore expose l’histoire d’un
arbre blessé mais qui n’a cessé de croître, au grès des 4 saisons, en puisant en lui et dans son
environnement extérieur des ressources positives lui permettant de continuer sa croissance,
dans une trajectoire singulière, unique (cf. annexe 3).
Dans un premier temps, en hypnose conversationnelle, nous proposons d’observer 5
photos (cf. annexes 4,5,6,7 et 8) symbolisant la résilience, avec des éléments de nature, qui
font partie des ressources de Léa. Nous suggérons à Léa de choisir une photo qui la représente
le plus ou qui lui fait ressentir une émotion particulière. Elle sélectionne une des photos (cf.
annexe 5), sans mettre de mots dessus, et semble ne pas oser la toucher. Elle exprime après un
temps de latence qu’elle la trouve « bizarre » mais qu’elle en apprécie les couleurs. Après
reformulation, elle dit ressentir une étrangeté concernant cette photo, ne pas comprendre
pourquoi l’arbre ronge l’autre élément (qui est un poteau en béton mais qu’elle n’identifie pas
à ce moment-là). Le fait de décrire dans l’ici et maintenant les éléments de la photo, ses
nuances de couleurs, ses différentes textures, permet à Léa de mieux se la représenter, et de
pouvoir s’y connecter émotionnellement. Sur la base de cette photo choisie et du travail
débuté en hypnose conversationnelle, nous démarrons une induction pour provoquer une
transe classique. Léa apparait en difficulté à se détendre, à trouver une position confortable.
Son faciès est tendu, et cela de plus en plus au fil du script énoncé. Elle pleure. Elle verbalise
vivre un souvenir de la Syrie et le décrit :
« Je vois tous les grands arbres au bord de la route, on part en moto pour fuir le prochain
bombardement annoncé… c’est horrible… on roule vite, ces arbres défilent… j’ai peur. J’ai
mes chats dans une écharpe contre moi pour essayer de les sauver. Et là un avion passe très
bas… je n’en peux plus… je suis nulle, je ne m’en sortirai jamais… on va tomber… ».
Nous essayons de contenir ce revécu en suggérant à Léa de venir convoquer dans ce souvenir
ce qui pourrait être positif. Elle ne trouve pas d’élément ressource à ce moment-là, étant
toujours dans son souvenir et vivant les émotions associées. Nous lui indiquons certaines
odeurs qu’elle apprécie, celle de son lieu sécure mais elle n’adhère pas à cette proposition.
Nous verbalisons alors que ces souvenirs sont encore présents car ils font partis d’elle-même,
de son histoire, comme cet arbre sur la photo, blessé, heurté. Mais nous lui affirmons qu’elle
34
peut les transformer, qu’elle en est capable, puisqu’elle a montré qu’elle avait des ressources
en elle pour pouvoir évoluer aujourd’hui. Nous la valorisons sur son parcours, ses efforts
produits pour aller mieux et au-delà de ses souffrances. Puis, après un temps de latence, Léa
dit vivre un autre souvenir. Les traits de son visage se détendent légèrement. Elle se revoit
petite fille, en sortie scolaire dans la forêt, faisant un parcours de santé fabriqué par des
rondins de bois. Nous ratifions et validons ce souvenir, tout en allant l’explorer plus
profondément, en invoquant sa sensorialité. Progressivement Léa se détend, vit son souvenir
positif et nous le confirme en le verbalisant. Elle dit aussi « Je suis bien… il n’y a pas ma
mère, alors je suis bien. ». Une fois que les sensations et émotions positives associées à ce
souvenir d’enfance sont ancrées, nous lions ce qui vient de se produire, à l’histoire de l’arbre
sur la photo. Nous construisons une métaphore de résilience, en y associant ce qui vient de se
passer lors de cette séance, et au parcours global de Léa depuis quelques mois. Léa continue
de pleurer mais dans une dynamique d’apaisement. Après être revenue de la transe, Léa
verbalise ses difficultés. Elle a finalement l’impression que ses souvenirs traumatiques ne
seront jamais derrière elle. Elle dit avoir été perturbée par l’arbre, qui en temps normal est un
élément qu’elle apprécie. Elle a besoin de réassurance et nous lui révoquons son
investissement dans le suivi, son parcours jusqu’à présent et tous les efforts mis en place pour
évoluer. Nous lui expliquons la nécessité de respecter sa temporalité psychique, qu’il faudra
encore se laisser du temps pour traiter le trauma. Ensemble, nous illustrons notre élaboration à
la photo choisie, qui représente l’une de celle où l’on voit le poteau en béton, de relativement
prêt, au premier plan. Nous lui expliquons qu’avant de pouvoir prendre de la distance par
rapport au trauma et de voir l’arbre dans sa globalité et non pas que dans sa blessure, il nous
faudrait encore progresser, sans se précipiter et continuer à élaborer son traumatisme. Nous
pointons la progression qui se symbolise sur les 5 photos, le chemin parcouru jusqu’à présent,
où Léa a réussi à prendre de la distance avec son traumatisme, qui reste cependant encore
actuel. Nous ciblons sur ce qu’il nous reste encore à explorer au sein du suivi, avec le support
des dernières photos, représentant progressivement l’arbre dans son entièreté. Léa semble
adhérer, et terminera l’entretien en amenant des nouvelles positives et d’autres plus négatives
mais en insistant sur la manière dont elle les a gérées et dont elle en était valorisée.
35
Discussions théorico-clinique
I- Rappel de la problématique
36
II – Confrontation des résultats à la problématique
37
séances d’autohypnose en autonomie, en essayant de se suggérer des souvenirs positifs pour
mettre à distance ceux qui étaient intrusifs, ou en se questionnant sur les processus analogues
lorsqu’elle colorie des mandalas. Progressivement, l’observation de la potentialisation de ses
ressources psychiques propres à la dynamique résiliente s’est remarquée chez Léa, telles que :
Nous avons aussi remarqué au cours du suivi, l’évolution physique de Léa dans ses
aspects corporels et esthétiques. Léa arrivait au début de son suivi, dans des attitudes inhibées
en salle d’attente, le regard fuyant, comme apeurée par autrui. Une fois installée dans le
bureau, elle laissait place à une agitation psychomotrice importante. Elle était habillée de
vêtements amples et sombres. Elle a su se réajuster progressivement. En lien avec son mieux-
38
être, elle adopte une posture corporelle plus affirmée, plus droite. Elle se tient debout en salle
d’attente, à la vue de tous et peut échanger quelques paroles ou regards et sourires chaleureux
envers ses pairs. En entretien, son attitude est plus posée, en lien avec sa régulation
émotionnelle qui s’est effectuée au cours du suivi. Elle se remaquille progressivement et
s’habille en couleur et avec des motifs, ne semblant plus vouloir se cacher derrière de sombres
et vêtementscouvrants. Elle verbalise son envie de changement à plusieurs reprises et son
auto-observation sur ce qui évolue chez elle, psychiquement et physiquement. Cela montre
l’importance de la prise en compte du langage non-verbal et de la posture du corps : « …la
posture corporelle elle-même peut être comprise comme indicateur du changement de posture
psychique. Il n’est pas rare de constater le mouvement par le corps avant même qu’il soit
énoncé par les mots. » (Gouchet& Morvan, 2017)
On pourrait alors dire que Léa se situe dans une dynamique de néodéveloppement.
Effectivement, elle utilise des stratégies défensives plus adaptées, comme la remise en route
narrative de ce qui lui fait souffrance, pour éviter le passage à l’acte. Cela lui permet ensuite
d’être dans une mise à distance. Elle se situe dans un réel investissement à rechercher du sens
à son traumatisme, pour pouvoir aller au-delà et se cibler sur ses projections vers l’avenir
telles que sa libération, son mariage, son désir d’enfant.
Nous pouvons donc synthétiser ces observations sur l’évolution de Léa, en confirmant
que l’hypnose comme approche thérapeutique et relationnelle particulière, a été un outil de
médiation venant stimuler l’alliance thérapeutique et par la suite les ressources propres à la
dynamique résiliente. Nous nuançons notre propos en appuyant que cela a été possible et
observable grâce à un authentique investissent au changement de la patiente. Le modèle de la
résilience ainsi que l’hypnothérapie, dans leur intérêt commun à se centrer sur les ressources,
ont permis une vision non pathologisante du patient pris en charge. Cela influence un
accompagnement dans une perspective salutogène (Anaut, 2003).
Nous avons donc pu constater au fil de cette étude, que les processus psychiques
propres à la dynamique résiliente ont émergé au sein de la dynamique relationnelle et du cadre
posés par les séances d’hypnothérapie. Cependant, nous avons aussi constaté la complexité de
la prise en charge du traumatisme. En effet, nous avons observé que la prise en charge
psychologique peut se complexifier face à des patients souffrant de traumatismes complexes,
c'est-à-dire ayant vécu des agressions anciennes et répétées. Herman identifie les
39
traumatismes complexes comme « un empilement d’expositions traumatiques multiples,
répétées et/ou prolongées, et survenant parfois de façon précoce, dans l’enfance »
(Lahya&Fossard, 2018, p.20). En termes de processus associés au trouble de stress post
traumatique complexe, c’est la dissociation structurale secondaire que va vivre l’individu
(Van der Hart et al,2010). Rappelons que dans ce type de dissociation, les réactivations
traumatiques sont plus régulières.
40
trauma complexe ne vient donc pas annihiler la dynamique résiliente de la patiente mais la
rend complexe, non linéaire.
Nous ne pouvons donc pas valider dans son entièreté notre hypothèse, notamment par
l’invalidation de l’une de nos hypothèses spécifiques qui supposait que l’hypnothérapie
influencerait une dynamique résiliente par l’utilisation de métaphores résilientes, chez le sujet
souffrant de psychotraumatisme. Un des biais venant invalider cette hypothèse, en plus de
l’importance de la temporalité psychique pour traiter le traumatisme complexe, peut se
trouver dans la construction même de la métaphore « résiliente ». En effet, les liens entre la
problématique du patient et ce qui était évoqué dans la métaphore, pouvait être consciemment
perçus. Or, Melchior (1998) conseille de construire des métaphores qui évoque indirectement
le problème du sujet, afin qu’il puisse être à l’écoute de ce que lui dit son thérapeute, sans se
sentir menacé.
41
En effet c’est une approche qui change la perception du psychothérapeute sur le monde. Elle
pousse à porter plus d’attention à la nature, aux créations, à l’art sous toutes ses formes et elle
incite à s’approprier chaque élément pour en construire quelque chose de thérapeutique,
métaphorique, pour les utiliser auprès des patients rencontrés. Concernant cette étude, si on
prend l’exemple même des photos choisies, il semble que cette capture de cette force de la
nature n’aurait pas été ressentie avec autant d’intensité avant l’investissement dans cette
formation universitaire. Cette image aurait été perçue mais pas nécessairement pensée comme
possibilité de médiation et de support à la création d’une métaphore thérapeutique. L’hypnose
aide à une exploration nouvelle sur le monde et une redécouverte de la profession même de
psychologue. Elle rend possible une écoute et une observation différente des patients que l’on
accompagne, son approche incite à prendre en compte leur champ lexical, à mettre
concrètement en avant leurs centres d’intérêts, à les encourager à s’impliquer d’autant plus
dans leur suivi. Elle permet une qualité d’adaptation particulière au sujet, dans un langage
commun, co-construit, permettant une communication bénéfique et plus fluide (Prévot-
Stimec,2017). La pratique de l’hypnose stimule les capacités créatrices à la fois du thérapeute
et du patient. Elle amène à moduler son cadre en tant que psychothérapeute, jusqu’à
surprendre certains des patients habitués à un espace de rencontre plutôt conventionnel. Et
cela génère souvent des moments d’humour, de détente et de légèreté.De plus, proposer au
patient de faire un mouvement inhabituel au sein de son suivi, par le biais de l’hypnothérapie,
crée une expérience nouvelle qui peut mobiliser différemment ses ressources, et l’amener à la
sensation qu’il n’est pas figé dans sa problématique (Prévot-Stimec, 2017).
Une thérapie aura de meilleurs gains thérapeutiques si les objectifs ont été partagés
entre patient et thérapeute (Steele et al., 2018). Parfois, l’objectif du thérapeute est confondu
avec la demande et les besoins mêmes du patient et cela semble avoir constitué l’un des biais
de cette étude. Par exemple, si on prend l’un des premiers objectifs thérapeutiques qui était de
renforcer la sécurité interne et externe de Léa, cela a été effectué, mais par ambivalence.
Effectivement l’alliance thérapeutique qui s’est construite progressivement, au sein d’un
espace bienveillant, a permis de faire ressentir à Léa un sentiment de sécurité. Cependant, à la
première séance d’hypnose, est suggéré à la patiente de trouver un lieu sécure, alors que la
sécurité de celle-ci est encore fragile. Il est donc essentiel de porter une vigilance en tant que
thérapeute, à nos objectifs qui doivent continuellement être repensés en fonction de
l’évolution de notre patient, renégociés avec lui lors de la psychothérapie. Il est également
42
indispensable de faire attention au choix des mots que l’on emploie face à nos patients, qui ne
sont pas tous forcément adaptés dépendant de la stabilité de leur équilibre psychique à ce
moment. Dans le contexte de cette séance il aurait peut-être été plus juste et plus dans
l’accordage au patient de suggérer un lieu agréable ou bien un lieu de répit par exemple. Le
fait de vouloir dépasser les besoins ou la demande du patient est aussi constaté par le choix
des photos comme support de médiation. Ces photos représentent un seul et même élément,
pris sous différents angles. Cette capture de nature est venue interpeller en tant que personne
et thérapeute mais il aurait peut-être été plus objectif de proposer plusieurs photos de
différents éléments à la patiente.
43
rencontre. Brillon (2013) évoque la notion de « traumatisme vicariant » qui peut affecter le
soignant prenant en charge une patientèle traumatisée. Steele et al. (2018) conseillent
d’ailleurs pour les thérapeutes prenant en charge majoritairement des patients atteints de
trouble de stress post-traumatique, de toujours se questionner sur « comment rester stable et
ancré avec mes patients ? » (Steele et al. 2018, p.59). Il est alors important de se fixer des
limites, des objectifs réalisables et réalistes au sein de la thérapie, et de les verbaliser au
patient. Etre dans une juste distance et bon thérapeute, c’est aussi se questionner sur ses
propres besoins et sa disponibilité psychique à accompagner tel individu. « Les relations
thérapeutiques sont des voies bidirectionnelles. Les thérapeutes ont également certains
besoins dans la relation thérapeutique : …se sentir en sécurité, être respectés dans leurs
limites et inviter les patients à collaborer à des objectifs convenus » (Steele et al. 2018, p.70).
Ces auteurs insistent également sur la nécessité d’une supervision, pour obtenir un soutien,
ainsi que des éclairages quant à l’établissement des objectifs au sein des suivis (Brillon,
2013 ; Steele et al. 2018)
Pour conclure, en faisant ce constat de certaines erreurs et biais dans cette étude, et en
reprenant le postulat qu’être suffisamment bon thérapeute, c’est aussi se remettre en question
sur sa pratique, il est possible d’affirmer que c’est ce qu’a permis cette découverte
l’hypnothérapie, accentuée par cette formation universitaire, la mise en place de cette étude et
la rédaction de ce mémoire clinique.
44
Conclusion
45
aux symptômes bruyants et parfois imprévisibles du traumatisme. L’hypnose est comme une
nouvelle porte d’accès dans le champ du soin psychique, un chemin différent que l’on propose
au patient, afin de ne plus uniquement subir mais de pouvoir agir sur le plan symbolique et
émotionnel. Elle remet en mouvement ce qui reste bloqué par la verbalisation, aussi bien du
côté du patient que du psychothérapeute. Elle réinscrit le corps et sa sensorialité comme
ressources importantes à potentialiser.
46
Bibliographie
Articles :
Livres :
Anaut M., La résilience : Surmonter les traumatismes. 2e édition. Paris : Armand Colin ; 2012.
Anaut M., Quête de sens et reconstruction résiliente après les traumatismes. In Coutanceau R.,
Damiani C. Victimologie : évaluation, traitement, résilience Malakoff : Dunod ; 2018. p. 240-
248.
47
Coutanceau R., Smith J., Lemitre S., Trauma et résilience : victimes et auteurs. Paris :
Dunod ; 2012.
Crocq L. Tableaux cliniques et prise en charge des traumatisés psychiques. In Coutanceau R.,
Damiani C. Victimologie : évaluation, traitement, résilience. Malakoff : Dunod ; 2018. p 104-
126.
Crocq L. Quelques jalons dans l’histoire du concept du trauma. In Coutanceau R., Smith J.,
Lemitre S. Trauma et résilience. Paris : Dunod 2012. p.175-185.
Melchior T. Créer le réel. Edition remise à jour. Paris : Editions du Seuil ; 2008.
Paumbrun M-L. L’hypnose dans tous ses états. Issy-les-Moulineaux : ESF Editeur; 2015.
Simon V. Du bon usage de l’hypnose, facteur de résilience dans la prise en charge du trauma.
In Coutanceau R., Smith J., Lemitre S. Trauma et résilience. Paris : Dunod 2012. p 255-259.
Smith J., Crochet S. Evaluation et prise en charge des victimes des traumas. In Coutanceau R.,
Smith J., Lemitre S., Trauma et résilience. Paris :Dunod 2012. p 85-96.
Steele K., Boon S., Van Der Hart O. Traiter la dissociation d’origine traumatique : approche
pratique et intégrative. Louvain-la-Neuve : De Boeck Supérieur ; 2018.
Van Der Hart O., Nijenhuis E.R.S.,Steele K. Le soi hanté. Bruxelles : De Boeck ; 2010.
Vermerein E. Analyse critique du concept de résilience. In Coutanceau R., Smith J., Lemitre
S., Trauma et résilience. Paris :Dunod 2012. p 15-22.
48
Notes de cours :
Sites internet :
Thèse :
Clastot P-A. Hypnose médicale et stress post traumatique –[Thèse de Doctorat en Médecine]
Université de Rouen ; 2013.
49
Annexes
FORMULAIRE DE CONSENTEMENT
Toutes les informations recueillies dans le cadre de cette étude et des entretiens de suivi
psychologiques seront traitées de façon anonyme et resteront confidentielles. Vous ne serez pas
identifiable par les lecteurs, car tous les éléments non nécessaires à l’étude et susceptibles de vous
identifier seront modifiés. Votre identité restera anonyme, ainsi que l’institution dans laquelle l’étude
est menée. Ce mémoire clinique sera soutenu à l’oral en juillet 2019 devant un jury d’enseignants et de
professionnels ayant participé au DU d’Hypnothérapie, eux-mêmes soumis à des règles de
confidentialité, et au respect du secret professionnel. La forme écrite du mémoire pourra être
conservée à la bibliothèque universitaire de Bourgogne-Franche-Comté et faire l’objet de publications
scientifiques. Elle sera également à disposition des professionnels de santé du Centre Hospitalier
Spécialisé. Si vous le souhaitez, vous pourrez obtenir un exemplaire de cette étude.
Votre participation à cette étude est entièrement volontaire. Il vous est possible de refuser d’intégrer ce
travail de mémoire ou d’interrompre votre participation à tout moment, sans avoir à vous justifier ni à
encourir aucune responsabilité. Votre consentement ne décharge pas les organisateurs de la recherche
de leurs responsabilités et vous conservez tous vos droits garantis par la loi. Votre refus de participer à
cette étude ou l’interruption de votre participation ne changeraient pas la qualité des soins dont vous
bénéficiez par ailleurs à l’UCSA.
Je soussigné(e) …………………………………………………………………………………
À Joux-la-Ville, le …/…/…….
Signature :
50
Annexe 2 : Script hypnotique« écran de projection »
Et maintenant, vous n’avez rien à faire de particulier, juste à porter votre attention à ce qu’il
se passe à l’intérieur de vous, d’une manière particulière, comme à votre habitude.
Vous n’avez rien à faire d’autre qu’à écouter ma voix, et peut-être les différents bruits et sons
aux alentours de la pièce qui viennent à vos oreilles... et progressivement de porter attention
sur votre corps, installé confortablement. Peut-être qu’une sorte d’engourdissement s’installe,
une lourdeur agréable, une chaleur dans les différentes partie de votre corps… qui vient du
bas vers le haut, de vos pieds, prenant appui sur le sol, reliés à vos jambes, par vos chevilles…
puis votre buste et votre dos qui prend appui sur le dossier de cette chaise… ainsi que vos bras
reliés à vos avant-bras par vos coudes, et vos mains qui se posent sur vos jambes et la pulpe
de vos doigts qui touchent votre vêtement… et le haut de votre corps, vos épaules, qui se
meuvent en fonction du rythme de votre respiration…respirer…
Et vous pouvez petit à petit, focaliser votre attention sur votre respiration… Cette respiration
que vous pouvez sentir, comme un air frais à l’inspire, puis un air plus chaud à l’expire, à
l’intérieur de vos narines. Cette respiration qui s’installe par le nez, passe par la gorge et vos
poumons… puis qui vient gonfler votre abdomen puis le dégonfler, dans un rythme régulier et
profond. Votre respiration, à l’intérieur de votre corps, dont on n’a pas forcément conscience
de son importance, mais qui permet à ce corps de puiser l’énergie nécessaire à son bon
fonctionnement. Votre respiration peut se matérialiser, comme une colonne d’air… ou de
lumière… ou tout autre chose… à l’intérieur de vous, venant oxygéner vos organes, vos
muscles, chaque articulation, chaque cellule… et rejeter naturellement ce dont elle n’a pas
besoin.
Et je vais proposer à votre esprit de voyager devant une porte, une porte d’un théâtre. Vous
pouvez tirez cette porte, lourde, et monter les marches devant vous, afin d’accéder à la salle
de théâtre…. Une salle de théâtre, vide, car c’est votre salle, privée… avec des sièges, très
confortables, en velours… peut être rouges ou d’une toute autre couleur… dans lesquels vous
pourriez possiblement vous installer… confortablement, où vous voulez, à la rangée qui vous
51
convient, au milieu, ou devant, ou à l’arrière de la salle… vous assoir confortablement sur
l’un des sièges que vous avez choisi…
En face de vous se trouve un écran/une toile tendue sur une scène, blanc/blanche… éteint… et
sur un des accoudoirs de votre siège se trouve une télécommande. C’est une télécommande
assez spéciale… tout comme ce théâtre. Cette télécommande possède plusieurs boutons dont
un qui rembobine, un qui permet de stopper l’image, qu’on appelle bouton « pause, un qui
permet l’avance rapide… et tout un tas d’autres boutons originaux… permettant différents
changements… modifications agréables… comme la taille de la toile, la couleur des images,
des odeurs à associer aux images de l’écran… et tout ce dont votre inconscient aura envie,
pourra faire le choix de se servir s’il le souhaite, car lui connait la fonctionnalité de chacun…
Si vous le voulez, vous pouvez prendre cette télécommande dans une de vos mains, votre
main droite ou votre main gauche…
Avec votre télécommande vous avez donc la possibilité d’accélérer… de ralentir… de couper
le son… de couper certaines parties sans utilité… vous pouvez aussi modifier certains
passages, en y ajoutant une couleur que vous aimez, ou une odeur… Vous avez la possibilité
de faire tout ce que vous voulez faire, de dire tout ce que vous voulez dire, d’agir comme vous
le souhaitez… Vous pouvez choisir des modifications positives…car votre inconscient est
tout à fait compétent pour cela… vous avez des ressources… (PAUSE – RATIFICATION –
VALIDATION)
Et ce que vous projetez appartient au passé, à une époque aujourd‘hui terminée… et nous
sommes dans le présent, dans une position confortable… et à n’importe quel moment vous
pouvez décider de faire une pause ou toute autre modification… et vous pouvez retourner
faire ce qu’il vous semble nécessaire de faire, de modifier, quand votre inconscient est prêt…
Vous avez tout le temps nécessaire… pour traiter toutes sortes de souvenirs, d’informations
qui appartiennent au passé… à une époque aujourd’hui terminée. Vous êtes à la fois en
52
sécurité dans ce bureau, sous ma vigilance bienveillante… et à l’intérieur de vous, en train de
faire un travail, en toute tranquillité…
Je reste en silence, face à vous tandis que vous êtes à l’écoute de ce que votre inconscient
vous propose… ces souvenirs, ces images, ces évènements, ces émotions… (PAUSE -
RATIFICATION - VALIDATION DE CE QUI VIENT EN TERME D’EMOTIONS OU
ABREACTIONS EMOTIONNELLES ET PHYSIQUES – ACCUEILLIR CE QUI VIENT)
C’est très bien… vous faites un excellent travail… vous êtes compétente, votre inconscient
également… et quand vous sentirez que vous avez fini, terminé ce travail, votre inconscient
me fera un signe de l’index…
53
Et de tout ce travail réalisé aujourd’hui, dans cette séance, vous ne retiendrez que ce qui est
nécessaire pour vous, vous pourrez oublier les autres éléments, dans cette rivière … quand
votre inconscient aura terminé, libéré vous pourrez traverser le pont qui ramène sur le chemin
du retour, et qui vous permet progressivement de revenir dans cette pièce, en adoptant un
rythme de respiration plus régulier, petit à petit, de vous réveiller en retrouvant les sensations
de votre corps, de votre dos sur le dossier, de vos pieds sur le sol, et quand vous serez prêt
d’ouvrir vos yeux et de prendre une profonde inspiration, vous étirez.
54
Annexe 3 : Script hypnotique « métaphore résiliente »
Aujourd’hui je vous propose une séance particulière. J’ai déposé 5 photos sur la table, d’un
même lieu, d’un même élément, mais comme vous le constater, prises sous différents points
de vue, différents angles, de plus ou moins près… Je vous laisse regarder attentivement ces
photos, vous pouvez les prendre, pour mieux les observer, de plus près, ou les retourner…
c’est comme vous le souhaitez.
Je vais vous demandez (prénom) de choisir la photo qui vous représente le plus, vous fait
possiblement ressentir une certaine émotion ou sensation, ou qui vous attire le plus par un
aspect esthétique… ou tout autre chose. Peut-être celle sur laquelle votre regard c’est porté en
premier, ou peut-être une sur laquelle vous avez dû prendre le temps pour en observer les
détails… Prenez le temps de choisir la photo que vous aimez le plus, qui vous représente le
plus aujourd’hui, maintenant, et vous pouvez la prendre en main si vous le souhaitez.
Je vous propose de vous focaliser sur cette photo, sur ses nuances de couleurs et de tons… sur
ses différences de lumières et de textures entre les différents éléments qui la composent… ce
poteau gris en béton, lourd… cet arbre en bois sous cette mousse verte, ces feuilles
d’automne orangées qui tapissent le sol, les branches de part et d’autre, le ciel calme au loin,
neutre, lisse, sans nuage…
Et progressivement je voudrais que vous portiez votre attention sur cet arbre dans la photo…
sur sa texture, son bois… ses rainures, sa forme, la mousse verte, comme un manteau pour le
couvrir de l’humidité et du froid… qui l’entoureplus voluptueuse, à la fois légère mais
compacte, qui prend appui sur lui, solide, avec ses écailles d’écorces qui l’enveloppe…
Si nous laissons la parole à cet arbre, à votre avis, selon votre imagination, que souhaite-t-il
vous dire, ou vous transmettre ?
Laissez-vous alors imaginer que vous êtes cet arbre et que vous vous ressentez comme cet
arbre… quelques instants, maintenant… Mettez-vous à place de cet arbre, qui est vous
(prénom) et ressentez cela, cette émotion ou cette sensation, à l’intérieur de vous… Quelle
émotion ou sensation ou vécu vient en vous ? …Progressivement, à chaque inspiration, puisez
l’énergie, l’émotion/sensation/vécu de cet arbre, en vous… Inspirez, puis expirez,
profondément…
Et dès à présent, tout en continuant à vous focaliser sur votre respiration ressourçante,
énergisante, en profondeur, qui vient réveiller votre corps et permettre son bon
55
fonctionnement… je vais vous proposer si vous le souhaitez de fermer vos yeux, tout en
adoptant la position la plus confortable possible, comme à votre habitude …
Et laissez votre esprit voyager sur un chemin en forêt… et prenez le temps de marcher jusqu’à
cet arbre au bout d’un chemin, peut-être bordé de feuilles que vous sentez ou entendez
craquez sous vos pas, par un temps possiblement doux et agréable, ou tout autre chose…Une
fois arrivée auprès de votre arbre, je vous propose de vous poser auprès de lui, de vous assoir
ou peut être de vous allonger, comme vous voulez, de vous poser et vous reposer… dans une
position détendue, confortablement… et d’observer tout ce que vous pouvez observer sur
votre arbre… Ses couleurs, ses différentes textures… vous pouvez peut-être toucher des
éléments… peut-être cet épais manteau de mousse verte, ou ces écorces de bois… peut-être
est-il chaud ou froid, sec ou humide… je ne sais pas… possiblement, vous pouvez sentir
certaines odeurs… et prenez aussi le temps de vous concentrer sur sa blessure, causée par la
chute de ce poteau en béton possiblement très lourd et peut-être froid, ou tout autre chose…
Laissez-vous vous connecter à cet arbre, à son vécu, son histoire… C’est à partir d’une graine,
que cet arbre est devenu, si grand, et vous pouvez peut-être constater sa hauteur, sa
croissance, par la hauteur et la largeur de son tronc… Une graine est devenue cet arbre, par la
rencontre des différents éléments de la nature, tel que la chaleur du soleil et la fraicheur de la
pluie… et cette graine s’est enracinée, et transformée arbre et continue à pousser en fonction
de ce qu’il doit vivre selon chaque saison… en automne à perdre certaines partie de lui, ses
belles feuilles rouges orangées…en hiver résister aux vents violents, et au froid de la neige et
des pluies verglaçantes… au printemps à retrouver une enveloppe de verdure, avec de
nouvelles feuilles sur ses branches, à accueillir les oiseaux et leurs chants joyeux, leur
proposer l’hébergement pour leur nid et futurs oisillons… en été à se ressourcer par les rayons
de soleil et parfois être malmené par la sécheresse et les grandes chaleurs… et à chaque
saison, cet arbre grandi de chaque changement autour de lui, se solidifie et se protège grâce à
ses écorces qui apparaissent, comme un bouclier, au fur et à mesure du temps, et cette mousse
comme une barrière protectrice, qui l’enveloppe, l’aide à se préserver au gré des
intempéries…
Et ce poteau lourd, en béton, qui s’est abattu sur cet arbre, probablement suite aux vents
intenses… hivernaux… est venu heurter l’arbre par son poids et la puissance de sa chute… et
remarquez (prénom) comme cela n’a pas empêché cet arbre de continuer à grandir… comme
si la lutte pour survivre l’avez rendu plus fort encore à traverser chaque saison… et d’autant
56
plus remarquable par sa singularité à avoir intégré en lui sa blessure tout en se restaurant… Sa
trajectoire de croissance s’est modifiée, maiscette blessure ne l’a pas rendu plus petit ou plus
faible cela ne l’a pas empêché de grandir, cela l’a rendu différent, unique… Cela a permis une
renaissance durant laquelle il a pu mobiliser en lui ses ressources, et continuer à puiser dans la
nature des forces pour grandir, selon une trajectoire différente…
Alors prenez le temps d’admirer la force de cet arbre, imaginez que vous soyez comme lui,
que vous soyez lui… (prénom), comme cet arbre vous avez été blessée par les vicissitudes de
la vie… et comme lui vous avez décidé de rebondir, de transformer vos blessures, de les
cicatriser et d’opérer des changements en vous… et ces cicatrices, comme celle de l’arbre, ont
permis de créer et faire grandir de nouvelles branches, qui développerons de nouvelles
feuilles, grâce à l’alliance de votre endurance et du soleil, de la pluie, et vous pourrez même
déployer des fleurs, suite à la rencontre des papillons ou des abeilles courageuses sur vos
branches, et qui deviendront de magnifiques fruits, frais, doux, sucrés… comme peut l’être la
vie, chaque jour… Comme les branches de cet arbre vous faites le choix de tendre les bras
pour obtenir de l’aide et de l’énergie, pour accueillir ce qui vous apporte une bienveillance et
vous porte vers votre renaissance… Comme cet arbre il y a des ressources à l’intérieur de
vous, et à l’extérieur de vous, qui vous protègent et vous renforcent, comme ces feuilles
protègent le fruit, qu’elles le renforcent… Ressentez votre énergie, votre force …
Et vous pourriez décider d’apporter d’autres modifications à votre arbre, qui signent de votre
parcours restaurateur, de renaissance… peut-être agir sur sa taille… sa forme…. Ses
racines… ou peut-être des couleurs… ou possiblement d’autres éléments positifs, qui le
soutiennent ... ou tout autre chose qui vous représente vous… vous, aujourd’hui, vos
ressources maintenant… votre affirmation… votre détermination… votre sensibilité… votre
créativité… Pensez à tout ce que vous êtes devenue au-delà de vos blessures, ressentez vos
aptitudes, vos forces à chaque inspiration… Ayez de la reconnaissance pour vous-même… Et
quand votre arbre de vie, vous ressemble au plus près, avec toutes ses modifications… prenez
le temps… à chaque inspiration, d’ancrer en vous, d’assimiler votre énergie …
profondément… Assimilez vos changements actuels, vos ressources positives… à chaque
inspiration… Et il est possible que vous puissiez repensez à cet arbre et toutes les ressources
qui sont en vous pour vous aider à faire face et à construire de nouvelles modifications en
vous… Et quand vous aurez pris le temps nécessaire pour assimiler, intégrer vos ressources
positives et votre changement… Vous pourrez revenir progressivement à la réalité extérieure,
57
reprendre contact avec la pièce, ce qui vous entoure, en adoptant une respiration plus rythmée,
et en réveillant votre corps petit à petit.
58
Annexe 4 : Photo N°1 « arbre résilient »
59
Annexe 5 : Photo N°2 « arbre résilient »
60
Annexe 6 : Photo N°3 « arbre résilient »
61
Annexe 7 : Photo N°4 « arbre résilient »
62
Annexe 8 : Photo N°5 « arbre résilient »
63
Annexe 9 : Poème Primo Levi
64
Résumé
65