Nutrition Chez Le Cirrhotique

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Post’U (2011) 17-24

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Nutrition chez le cirrhotique

Objectifs pédagogiques par les complications aggravent


également le déficit d’apport alimen- Benoît Dupont, Servais Eloumou,
– Connaître les conséquences nutri- taire. Une malabsorption des graisses
tionnelles de la cirrhose
Marie-Astrid Piquet
et des vitamines liposolubles est
– Connaître les conséquences de la souvent associée chez les patients
malnutrition chez le cirrhotique ayant une hépatopathie chronique
– Savoir évaluer l’état nutritionnel avec ictère, due à une diminution de s’est révélée efficace dans plusieurs
chez le cirrhotique la sécrétion des acides biliaires. De circonstances telles que l’hépatopathie
– Connaître les besoins nutritionnels plus, une insuffisance pancréatique alcoolique [8-9].
spécifiques exocrine peut coexister chez les
– Connaître les techniques de supplé- patients alcooliques. Enfin, le méta-
mentation nutritionnelles bolisme protéino-énergétique est
Évaluation de l’état
affecté au cours de la cirrhose. Le
catabolisme protéique est augmenté nutritionnel du cirrhotique
Conséquences nutritionnelles en raison d’une insulino-résistance
L’évaluation de l’état nutritionnel est
de la cirrhose liée à la cirrhose. Les données sur la
difficile chez le patient cirrhotique.
dépense énergétique sont contradic-
La principale conséquence est une toires, certains patients étant hyper- En effet, les moyens anthropomé-
malnutrition protéino-énergétique. Sa métaboliques, d’autres hypométabo- triques simples comme le poids et
prévalence est corrélée à la sévérité liques [2]. l’index de masse corporelle (poids/
de la cirrhose, atteignant 60 % des taille2) ne reflètent pas, en présence
patients classés Child C [1]. La malnu- d’ascite ou d’œdèmes, la composition
trition est également plus fréquente Impact de la malnutrition corporelle. De même, les paramètres
chez les patients souffrant de cirrhose biologiques comme l’albuminémie ne
sur la survie du cirrhotique sont pas utilisables car ils traduisent
alcoolique que chez ceux ayant une
cirrhose d’une autre étiologie [1]. Cette L’état nutritionnel est un facteur qu’il plus, au cours de la cirrhose, la dimi-
malnutrition résulte d’un déséquilibre faut rechercher et traiter, car la mal- nution de la synthèse hépatique que
entre les apports et les dépenses éner- nutrition diminue significativement la l’état nutritionnel [11]. Les méthodes
gétiques. La diminution des ingesta en survie des patients cirrhotiques [3]. La d’évaluation de la composition cor-
est la principale cause. En effet, une malnutrition est fortement corrélée à porelle comme l’impédancemétrie ne
diminution des apports alimentaires la sévérité de l’hépatopathie, mais plu- sont pas fiables en présence de réten-
est très fréquemment observée au sieurs auteurs ont néanmoins montré tion hydrosodée, et les méthodes de
cours des hépatopathies, et s’aggrave dans des analyses multivariées que les référence, telles l’activation neutro-
avec la sévérité de l’hépatopathie. Elle paramètres nutritionnels étaient des nique ou la dilution isotopique, ne
est due d’une part à des altérations du facteurs prédictifs indépendants de sont pas applicables en pratique cli-
goût et de la satiété, et d’autre part à mortalité au cours des cirrhoses nique. C’est pourquoi, la plupart des
une anorexie et des nausées qui sont compensées [4] ou décompen- travaux se réfèrent aux paramètres
présentes dans plus de 50 % des cas. sées [5-7]. L’importance pronostique anthropométriques, en particulier la
Les hospitalisations fréquentes et les de la malnutrition peut être étayée par circonférence musculaire du bras,
restrictions diététiques imposées le fait que l’assistance nutritionnelle considérée comme relativement fiable
[12-13]. Une étude multicentrique
italienne [1] a montré que ces critères
■ B. Dupont (!), S. Eloumou, M.-A. Piquet, Service d’hépatologie, gastro-entérologie et nutrition,
Centre Hospitalier Universitaire de Caen, Avenue de la Côte de Nacre, 14033 Caen cedex 9.
anthropométriques permettaient de
Tél. : (33) 2 31 06 52 00 ; Télécopie : (33) 2 31 06 45 45 diagnostiquer la malnutrition avec
E-mail : piquet-ma@chu-caen.fr / dupont-b@chu-caen.fr une plus grande sensibilité que le

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jugement clinique global. La plupart Tableau I : besoins nutritionnels au cours des cirrhoses
des auteurs recommandent une éva- Cirrhose compliquée
luation clinique globale associée Cirrhose Encéphalopathie
(infection, chirurgie,
compensée hépatique
aux paramètres anthropométriques, dénutrition...)
en particulier le pli cutané tricipital Protéines (g/kg/j) 1,2 1,5 0,5 à 1,5 (voir texte)
Énergie (kcal/kg/j) 35 40 35
et la circonférence musculaire du dont glucides 50 à 65 % 50 à 65 % 50 à 65 %
bras. Cette dernière est calculée selon lipides 35 à 50 % 35 à 50 % 35 à 50 %
la formule : circonférence musculaire Calcium 1 g/j, vitamine D 800 UI/j (systématique)
Micronutriments Vitamine B1 500 mg/j, vitamine B6 250 mg/j (si alcoolisme)
= circonférence du bras - 3,14 × (pli Vitamine K1 10 mg/semaine (si cholestase)
cutané tricipital), puis comparée à des En cas de rétention hydrosodée : régime sans sel large
Eau et électrolytes
tables de références [14]. En pratique, (NaCl : 2 à 3 g/j)
lorsque la mesure des plis cutanés
n’est pas disponible, on peut se
contenter de la mesure de la circon-
férence brachiale (à mi-distance entre Protéines Sur le plan qualitatif, la majorité des
l’acromion et l’olécrane), qui patients tolèrent un mélange protéique
lorsqu’elle est inférieure à 26 cm chez Il ressort des différentes études standard dérivé essentiellement de
l’homme et 24 cm chez la femme, publiées que les besoins protéiques protéines animales. Toutefois, dans
permet de repérer une malnutrition sont augmentés chez les patients certaines encéphalopathies sensibles
sévère [14]. Une évaluation approxi- ayant une cirrhose non décompensée à une restriction protéique, des modi-
mative des apports alimentaires par rapport aux sujets sains. Des fications qualitatives de l’apport
spontanés est également utile, étant apports protéiques de 1,2 g/kg/j protéique visant à améliorer la balance
donné la fréquence de l’anorexie chez permettent de couvrir les besoins azotée peuvent se révéler utiles. On a
ces patients, et le fait qu’elle est estimés et de maintenir une balance pu montrer qu’une alimentation à base
corrélée au pronostic [7]. azotée positive dans la cirrhose stable, de protéines végétales améliorait
contre 0,8 g/kg/j chez le sujet sain. la balance azotée et diminuait
En cas de complication aiguë ou de l’encéphalopathie par rapport à un
Besoins nutritionnels malnutrition sévère, les besoins apport protéique animal [18]. Les
du cirrhotique s’élèvent à 1,5 g/kg/j. mécanismes susceptibles d’expliquer
ce résultat sont la stimulation de la
Un groupe de consensus de l’European Peut-on adopter cet apport protéique
motricité intestinale induite par la
Society of Parenteral and Enteral en cas d’encéphalopathie hépatique ?
richesse en fibres de ce régime, les
Nutrition a publié des directives Un des traitements classiques de
modifications de la flore microbienne
concernant la nutrition au cours des l’encéphalopathie consistait à dimi-
colique et une réponse hormonale
maladies hépatiques qui ont été réac- nuer l’apport protéique, voire à le
différente. Cependant la prescription
tualisées en 2006 [15] (tableau I). supprimer, en vue de diminuer l’am-
de ce régime est difficile en pratique.
moniémie. En fait, un apport protéique
Énergie (glucides, lipides) exogène nul n’a pas d’intérêt, car il est Une supplémentation en acides aminés
contrebalancé par le catabolisme des ramifiés (également appelés acides
Alors que les besoins du sujet sain protéines endogènes. Une restriction aminés branchés) pourrait se révéler
tournent autour de 30 kcal/kg/jour, il protéique à 0,5 g/kg/j a été décrite plus intéressante. Le principe consiste
semble qu’un apport moyen de comme efficace dans certains cas [16]. à apporter des suppléments d’acides
35 kcal/kg/j permette de maintenir la Néanmoins, une étude randomisée de aminés ramifiés dans le but d’inhiber
balance énergétique chez les patients bonne qualité a évalué chez des compétitivement le transport vers le
cirrhotiques stables [8,15]. Cet apport patients en encéphalopathie, l’intérêt cerveau des acides aminés aroma-
doit passer à environ 40 kcal/kg/j en d’une restriction protéique versus un tiques, qui partagent le même trans-
présence d’une dénutrition ou d’une apport protéique normal, administré porteur au niveau de la barrière
complication. L’énergie doit provenir par nutrition entérale, et n’a pas mis hémato-encéphalique. On diminue
des glucides et des lipides, selon un en évidence de différence sur l’évolu- ainsi la quantité d’acides aminés
rapport habituel de calories gluci- tion de l’encéphalopathie hépatique aromatiques susceptibles de se trans-
diques et lipidiques respectivement de entre les 2 groupes [17]. Selon les former en faux neurotransmetteurs au
65-50 % et 35-50 %. La glycémie doit données actuelles de la littérature, la niveau de l’encéphale. Une revue et
être particulièrement surveillée en restriction protéique ne peut donc pas une métaanalyse ont suggéré qu’une
raison de la coexistence fréquente être conseillée dans la prise en charge supplémentation orale [19] ou
d’une insulinorésistance. de l’encéphalopathie hépatique. parentérale [20] en acides aminés

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ramifiés améliorait l’évolution de cholestase, et de vitamine B1 dont la 72 h). La cirrhose peut donc être consi-
l’encéphalopathie. Cependant, la plu- carence aiguë, se manifestant par un dérée comme une maladie de « jeûne
part des auteurs restent très nuancés syndrome de Gayet-Wernicke, survient accéléré ». En raccourcissant la durée du
car les essais sont très hétérogènes volontiers lors d’une hospitalisation. En jeûne, et donc la lipolyse, le fraction-
et leurs résultats, discordants. Une effet, les patients alcooliques sont caren- nement de l’alimentation et en parti-
supplémentation en acides aminés cés en vitamine B1 et, lors d’une hospi- culier l’ajout d’une collation dans la
ramifiés pourrait avoir également un talisation, ils bénéficient souvent d’une soirée permettent d’améliorer la
intérêt nutritionnel car les acides perfusion de sérum glucosé. Or, le méta- balance azotée et la tolérance au
aminés ramifiés stimulent la synthèse bolisme du glucose utilise la vitamine B1 glucose [27]. L’utilisation de supplé-
protéique musculaire. Des études comme cofacteur et la perfusion de ments nutritifs oraux industriels a
récentes ont montré qu’un apport en glucose risque alors de provoquer une l’intérêt d’apporter des nutriments
acides aminés ramifiés améliorait les carence aiguë par épuisement du stock équilibrés riches en vitamines, mais
paramètres nutritionnels, diminuait la restant. Pendant les premiers jours, il est est limitée par une compliance faible
fréquence de survenue des compli- donc recommandé d’apporter des au long cours et la fréquence de l’ano-
cations de la cirrhose, et améliorait suppléments en vitamine B1 (500 mg/j) rexie et des nausées. Dans ces condi-
la qualité de vie [21-22], par un effet aux patients alcooliques, de préférence tions, une alimentation orale fraction-
probablement nutritionnel sans qu’il par voie intraveineuse car la biodispo- née ne permet pas toujours d’atteindre
n’y ait de bénéfice sur l’encéphalo- nibilité par voie orale est médiocre. l’objectif calorique, et il faut alors
pathie [21]. Des petites séries suggèrent Des dosages et des supplémentations recourir à une nutrition artificielle.
également une diminution des spécifiques doivent être proposées
complications après chimioemboli- selon les signes cliniques d’orienta- Nutrition entérale
sation ou hépatectomie de carcinomes tion [25]. Il faut se méfier d’une
hépatocellulaires [23-24]. Cependant surcharge en vitamine A qui serait Les recommandations européennes
ces produits ne sont pas disponibles susceptible d’aggraver l’hépatopathie, soulignent que la voie entérale doit,
en France et leur utilisation est limitée et d’une surcharge en vitamine B6 qui autant que possible, être préférée à la
par une acceptabilité médiocre par serait neurotoxique pour des doses voie parentérale [16]. En effet, elle est
voie orale. intraveineuses supérieures à 250 mg/j. plus physiologique et préserve mieux
Une supplémentation systématique en la trophicité intestinale, prévenant
Sel calcium (1 g/j) et vitamine D (800 UI/j) ainsi d’éventuels phénomènes de
est recommandée en cas d’hépato- translocation bactérienne. De plus, il
Un régime sans sel est habituellement pathie ou de cholestase chronique en a été clairement établi que la morbi-
prescrit en cas d’ascite ou d’œdèmes. prévention de l’ostéoporose [26]. dité, en particulier infectieuse, était
Le sel stimule l’appétit et améliore plus faible avec la voie entérale
la qualité gustative des aliments. qu’avec la voie parentérale. Les
Ainsi, le régime sans sel strict (NaCl Les techniques troubles de la coagulation et les
1 g/j) est associé à une mauvaise varices œsophagiennes ne contre-
de supplémentation indiquent pas la mise en place d’une
compliance, et risque de majorer
l’anorexie et la dénutrition. En termes nutritionnelle sonde nasogastrique [9,28]. Cabré
de contrôle de l’ascite, les régimes sans et al. [9,28] ont étudié, dans deux
Fractionnement
sel stricts et larges sont d’efficacité études, 51 patients traités par nutrition
de l’alimentation orale entérale et ayant une cirrhose Child C
comparable, c’est pourquoi la confé-
rence de consensus sur l’hypertension Le métabolisme des glucides au cours avec ou sans hépatite alcoolique. Ils
portale a recommandé la prescription de la cirrhose est marqué par une insu- ne mentionnaient pas la présence
d’un régime sans sel large comprenant linorésistance. Celle-ci, associée à une ni de varices œsophagiennes, mais
2 à 3 g NaCl/jour. diminution des stocks hépatiques en certains patients avaient un anté-
glycogène, a pour conséquence des cédent d’hémorragie digestive par
Vitamines changements dans la nature des hypertension portale. Après une
substrats énergétiques utilisés après nutrition entérale par sonde d’une
Étant donné les carences fréquentes, une une nuit de jeûne. On observe alors durée moyenne de 23 jours [28] et
supplémentation large en vitamines et une diminution du pourcentage de 28 jours [9], il n’y avait pas de
en oligo-éléments est justifiée à la phase calories provenant des glucides et une différence de saignement entre les
initiale de la renutrition, mais il n’y a pas augmentation des calories provenant patients traités par nutrition entérale
de donnée précise concernant les besoins des lipides, jusqu’à obtenir des valeurs et les contrôles. En revanche, l’ascite
réels. On peut toutefois insister sur habituellement retrouvées chez le sujet et l’hypertension portale rendent
l’apport de vitamine K en cas de sain après un jeûne prolongé (36 à difficile et dangereuse la pose d’une

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gastrostomie percutanée endosco- hépatite aiguë. Or, il a depuis été systématiquement recherchée par une
pique. Dans la cirrhose, aucune étude montré que la nutrition entérale dans évaluation clinique globale, une
n’a comparé les modalités d’adminis- le traitement de l’hépatite alcoolique mesure de la circonférence brachiale
tration de la nutrition entérale, conti- aiguë avait des résultats superposables et une estimation approximative des
nue ou intermittente. Cependant, la à ceux de la corticothérapie à un an ingesta alimentaires. Le fractionne-
diminution des stocks de glycogène [9]. Ainsi, on ne peut pas éliminer que, ment de l’alimentation, avec l’ajout
chez ces patients entraîne une stimu- dans les études précédentes, une part d’une collation dans la soirée, est la
lation précoce de la lipolyse au cours du bénéfice tiré soit issue de l’amélio- première ligne de traitement. Si l’ano-
du jeûne. Il paraît donc logique, quel ration de l’hépatite aiguë. Les béné- rexie est sévère, la nutrition entérale
que soit le mode d’administration fices de la nutrition entérale chez le doit être préférée à la nutrition
utilisé, de raccourcir au maximum ces cirrhotique dénutri restent donc à parentérale. Les besoins énergétiques
périodes de jeûne et donc de fraction- étayer. Après chirurgie, le support vont de 35 kcal/kg/j en l’absence de
ner les apports ou d’utiliser un mode nutritionnel entraîne une diminution des complication à 40 kcal/kg/j en cas de
continu nocturne. La nutrition paren- complications postopératoires [10] et complication aiguë ou de malnutrition.
térale doit être réservée aux cas où la septiques [10]. Le support nutritionnel Les besoins protéiques sont augmentés
nutrition entérale est contre-indiquée est également efficace avant [31] ou par rapport à des sujets sains (1,2 g/
en raison de l’encéphalopathie. La après transplantation [32]. kg/j). L’encéphalopathie hépatique
nutrition entérale chez un patient n’est pas une contre-indication à un
L’effet de la nutrition entérale au cours
ayant des troubles de la conscience est apport protéique standard, sauf en cas
de l’hépatite alcoolique aiguë grave
dangereuse et peut entraîner des d’intolérance prouvée aux protéines.
(définie par un score de Maddrey
pneumopathies d’inhalation graves, S’il est indiqué, le régime sans sel doit
supérieur à 32) a été particulièrement
engageant le pronostic vital. être large (2 à 3 g NaCl/j). Une supplé-
étudié. Cabré et al. ont comparé la
mentation en calcium (1 g/j) et vitamine
nutrition entérale à la corticothéra-
D (800 UI/j) est indiquée de façon systé-
pie [9] et n’ont pas mis en évidence
Efficacité du support matique en prévention de l’ostéoporose.
de différence significative entre les
Une supplémentation en vitamines B1
nutritionnel 2 groupes, mais l’analyse des courbes
et B6 est nécessaire en cas de poursuite
de survie suggérait que la cortico-
de l’alcoolisation.
Trois études contrôlées randomisées thérapie était supérieure à la nutrition
sur l’intérêt de la nutrition entérale pendant le premier mois et le groupe
chez le cirrhotique ont été publiées. nutrition entérale était avantagé
Toutes trois montraient logiquement les mois suivants. Ces résultats ont
une amélioration des apports nutri- conduit les auteurs à proposer
tionnels [28-30]. Les études de Cabré l’association nutrition entérale et Références
et al. et de Kearns et al. montraient corticothérapie dont l’évaluation est
une amélioration des paramètres en cours. Les mécanismes d’action
1. Italian muticentre cooperative project
hépatiques : augmentation de l’albu- supposés de la nutrition, sont la res-
on nutrition in liver cirrhosis.
mine, diminution de la bilirubine et tauration de la perméabilité intestinale
Nutritional status in cirrhosis. J
donc amélioration du score de et des défenses antioxydantes permet- Hepatol 1994;21:317-25.
Child [28,29]. L’étude de Cabré et al. tant de diminuer l’agression endo-
toxinique, la correction des altérations 2. Guglielmi FW, Panella C, Buda A et al.
concluait également à une diminution Nutritional state and energy balance
de la mortalité chez les patients ayant membranaires et une stimulation des
in cirrhotic patients with or without
bénéficié de la nutrition entérale [28]. capacités de régénération hépatique.
hypermetabolism. Multicentre pro-
Cependant, ces travaux ont été menés Dans le traitement de l’hépatite spective study by the ‘Nutritional
sur des effectifs relativement modérés alcoolique aiguë grave, la nutrition Problems in Gastroenterology’ Section
(15 à 30 patients par groupe) et sur entérale est donc une alternative of the Italian Society of Gastro-
une période limitée (moins d’un mois). validée à la corticothérapie lorsque enterology (SIGE). Dig Liver Dis 2005;
Ces études sont anciennes et les pro- celle-ci est contre-indiquée. 37:681-8.
grès dans les traitements des compli- 3. Merli M, Riggio O, Dally L. Policentrica
cations associées à la cirrhose peuvent Italiana Nutrizione Cirrosi. Does
avoir modifié l’impact relatif de la Conclusion malnutrition affect survival in cirrho-
nutrition entérale dans la prise en sis ? Hepatology 1996;23:1041-6.
charge de ces patients. De plus, on La malnutrition est fréquente au cours 4. Moller S, Bendsten F, Christensen E,
notait, dans ces effectifs, la présence de la cirrhose et en affecte négative- Henriksen H. Prognostic variables in
de plusieurs patients présentant une ment le pronostic. Elle doit donc être patients with cirrhosis and oesopha-

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Les 5 points forts
➊ La malnutrition est fréquente au cours de la cirrhose et aggrave le
pronostic.
➋ Le fractionnement de l'alimentation, avec l'ajout d'une collation dans la
soirée, est la première ligne de traitement.
➌ Si l'anorexie est sévère, la nutrition entérale doit être préférée à la nutri-
tion parentérale. Les besoins énergétiques sont de 35 kcal/kg/j.
➍ Les besoins protéiques sont augmentés par rapport à des sujets sains
(1,2 g/kg/j). L'encéphalopathie hépatique n'est pas une contre-indication
à un apport protéique standard.
➎ S'il est indiqué, le régime sans sel doit être large (2 à 3 g NaCl/j). Une
supplémentation en calcium (1 g/j) et vitamine D (800 UI/j) est indiquée
de façon systématique.

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