Beys

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Directeur d’Hôpital

Promotion : 2014-2016
Date du Jury : Décembre 2015

« Adapter une méthode de management issue de


l’industrie au milieu hospitalier : l’implantation du
lean management au Centre Hospitalier Régional et
Universitaire de Lille »

Faustine Beys
Remerciements

Je souhaite tout d’abord remercier Monsieur ARNAUD, Directeur Général du Centre


Hospitalier Régional et Universitaire de Lille, et Monsieur DONIUS, Directeur Général
Adjoint, ainsi que toute l’équipe de direction pour la qualité de leur accueil et la
transmission de leur passion du métier de directeur d’hôpital.

Je tiens tout particulièrement à exprimer ma reconnaissance à ma maître de stage,


Angélique BIZOUX-COFFIGNIER, Directrice du Département des Ressources Physiques,
pour son temps que je sais rare et précieux, pour ses conseils et son écoute tout au long
de mon stage mais surtout pour avoir, par son exemple, conforté mon enthousiasme à
exercer ce métier.
Je remercie également Marie-Cécile BOUILLOT, Directrice adjointe du Département des
Ressources Physiques, pour son accompagnement tout au long de mon stage.

De la même manière, je remercie Anne GIRARD, Directrice adjointe au Département des


Ressources Financières, pour sa relecture bienvenue, mais également pour ses
encouragements sans faille pendant mes huit mois de stage.

Mes remerciements s’adressent également à Agnès FERET, Marion GUIHARD et Estelle


QUELDERIE de la Délégation d’Appui à la Performance pour m’avoir associée à la
démarche lean et à leurs travaux.

Je souhaite remercier toutes les équipes médicales, paramédicales, administratives et


techniques du CHRU, rencontrées dans le cadre de la rédaction de ce mémoire et qui,
par leurs avis, ont permis d’enrichir ma réflexion sur le sujet.

Enfin, je remercie Patrick De Coster, Directeur du CHU de Dinant Godinne, pour avoir
accepté d’encadrer ce travail et m’avoir transmis, au cours de nos échanges, son
expertise et son expérience du lean management.

Faustine BEYS - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2015
« Quand le problème est bien compris, l'amélioration devient possible. »
Taiichi Ohno, L'Esprit Toyota (1989)

Faustine BEYS - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2015
Sommaire

Introduction ....................................................................................................................... 1
Méthodologie ..................................................................................................................... 5
1 Le lean management, méthode novatrice issue de l’industrie, exige une
communication adaptée pour convaincre de son bien-fondé ............................................. 6
1.1 Malgré les objectifs poursuivis, la démarche lean, inconnue du milieu hospitalier,
ne remporte pas d’adhésion immédiate et sans réserve de la part des professionnels de
santé, conduisant ainsi le CHRU de Lille à insister sur son caractère participatif ........... 6

1.1.1 Les objectifs lean du CHRU de Lille ............................................................. 6

1.1.2 La réserve des professionnels hospitaliers ................................................... 8

1.1.3 Une démarche avant tout participative ....................................................... 10

1.2 L’implantation du lean au CHRU de Lille constitue un défi managérial ambitieux


dans un environnement empreint d’exigences quantitatives et qualitatives .................. 12

1.2.1 Vers un changement de paradigme : la lutte contre les gaspillages et


l’identification de la valeur ajoutée par l’utilisation de la Value Stream Mapping ....... 12

1.2.2 Le lean management, méthode de terrain dans un environnement


d’exigences qualitatives et quantitatives ................................................................... 19

2 La méthode d’implantation du lean management employée par le CHRU de Lille


permet d’en identifier les facteurs de réussite .................................................................. 22
2.1 Le lean nécessite une méthodologie structurée................................................. 22

2.1.1 Définir ........................................................................................................ 22

2.1.2 Mesurer ...................................................................................................... 24

2.1.3 Analyser ..................................................................................................... 25

2.1.4 Innover ....................................................................................................... 26

2.1.5 Contrôler .................................................................................................... 27

2.2 Le rassemblement de professionnels moteurs autour de la démarche et la mise à


disposition d’outils lean innovants permet au CHRU de Lille de conduire et
d’accompagner le changement .................................................................................... 28

2.2.1 L’identification d’un leader lean, un facteur essentiel de réussite ............... 28

2.2.2 La nécessité de valoriser le travail des équipes.......................................... 30

2.2.3 Le management visuel pour conduire et accompagner le changement ...... 31


Faustine BEYS - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2015
3.1 Les premiers résultats de la démarche au CHRU de Lille sont encourageants
mais permettent néanmoins d’identifier les limites du lean en milieu hospitalier........... 35

3.1.1 Les premiers résultats du lean management au CHRU .............................. 35

3.1.2 Les limites du lean à l’hôpital : une attention particulière portée à la


méthodologie............................................................................................................ 38

3.1.3 Partout, le lean ? ........................................................................................ 41

3.2 L’animation du déploiement de la démarche lean au DRP en tant que chef de


projet…………. ............................................................................................................ 42

3.2.1 La mise en place d’une équipe lean au sein du DRP.................................. 42

3.2.2 L’extension à de nouveaux secteurs .......................................................... 45

3.3 La promotion du développement des compétences est un axe indispensable du


lean management ........................................................................................................ 46

3.3.1 Le développement des talents.................................................................... 47

3.3.2 La formation ............................................................................................... 48

Conclusion ...................................................................................................................... 51
Bibliographie ................................................................................................................... 53
Liste des annexes ........................................................................................................... 55

Faustine BEYS - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2015
Liste des sigles utilisés

CHU : Centre Hospitalier Universitaire

CHRU : Centre Hospitalier Régional et Universitaire

CHSCT : Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail

COPIL : Comité de Pilotage

COMOP : Comité Opérationnel

CTE : Comité Technique d’Etablissement

DAP : Délégation d’Appui à la Performance

DCHR : Direction du Confort Hôtelier et de la Restauration

DPC : Développement Professionnel Continu

DRH : Département des Ressources Humaines

DRP : Département des Ressources Physiques

EPP : Evaluation des Pratiques Professionnelles

HAB : Hôpital Ami des Bébés

MCO : Médecine-Chirurgie-Obstétrique

PTE : Petits Travaux d’Entretien

VSM : Value Stream Mapping

Faustine BEYS - Mémoire de l'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique - 2015
Introduction

Les établissements de santé évoluent actuellement dans un environnement de réformes


successives, organisant leur gouvernance, rénovant en profondeur leur financement,
développant les notions de pilotage médico-économique, de performance et
d’amélioration continue.

Ainsi, la performance définie comme la « procuration du meilleur état de santé possible


aux populations en étant réactif par rapport aux besoins de ces dernières, tout en restant
économiquement supportable pour la nation »1 et l’efficience, anglicisme dérivé du mot
efficiency qui peut être définie par la capacité d’une organisation à obtenir de bons
résultats en utilisant le moins de ressources possibles, ne sont plus des notions
étrangères à l’hôpital et font partie du quotidien des professionnels hospitaliers.

A ce titre, la frontière entre l’hôpital et l’entreprise devient plus perméable, le premier


s’inspirant de plus en plus des standards et méthodes de management de la seconde
pour répondre aux exigences nouvelles qui lui sont imposées. Ce fut le sens de l’arrivée
du Nouveau Management Public à l’hôpital et c’est précisément le sens de l’arrivée du
lean management, méthode issue de l’industrie automobile, à l’hôpital.

Né dans les années soixante dans l’entreprise automobile Toyota, le lean management
(« maigre » en anglais) est une organisation de travail dont l’objectif est de lutter contre
les gaspillages et activités sans valeur ajoutée tout en transformant le mode de
management des équipes. Le terme lean a été adopté par une équipe de chercheurs du
Massachussets Institute of Technology (MIT) suite à une observation des méthodes de
production de l’entreprise Toyota. James Womack et D.Jones ont également étudié le
système Toyota et décrivent le lean comme un moyen « d’ajouter de la valeur, de réduire
les gaspillages et d’initier un processus d’amélioration continue (kaizen en japonais).»2

Les premiers travaux autour de l’implantation du lean à l’hôpital ont été publiés au début
des années 2000 en Angleterre suite à un rapport de la National Health Service
Modernisation Agency3 et d’un article décrivant l’expérimentation du lean dans un hôpital
américain en 2002. L’arrivée du lean en milieu hospitalier se justifie notamment par la

1
FERMON B. et GRANDJEAN P., Performance et innovation dans les établissements de santé,
éd. DUNOD 2015, Introduction.
2
WOMACK C. et JONES D., That machine that changed the world, Freepress, 1990.
3
BRANDAO DE SOUZA L., “Trends and approaches in lean management”, Leadership in Health
Services, 22 (2) 2009, pp. 121-139.
1
nécessité de mieux utiliser les ressources disponibles pour répondre aux besoins en
constante évolution et aux exigences nouvelles de performance et d’efficience.

Parce qu’il a des conséquences sur le quotidien des professionnels hospitaliers et


transforme certaines pratiques managériales, le lean management conduit vers une
évolution de la culture hospitalière. Cependant, l’hôpital est un environnement dont les
particularités, les contraintes et obligations règlementaires sont nombreuses, en
conséquence, le lean management à l’hôpital ne peut être le lean de chez Toyota.

Le Centre Hospitalier Régional et Universitaire (CHRU) de Lille, seul CHU de la région


Nord-Pas-de-Calais, qui compte près de 4 millions d’habitants, s’est engagé dans
l’expérimentation du lean management en 2014. Il a, par ailleurs, une vocation
interrégionale pour certaines prises en charge très spécialisées dans le cadre de
l’Interrégion Nord-Ouest qui compte près de 10 millions d’habitants. Dans ce cadre, le
CHRU de Lille accueille chaque année près de 205 000 patients en hospitalisation MCO
et assure plus de 1 400 000 prises en charge en consultation et soins externes. Il mobilise
à cette fin 15 600 professionnels en exercice ou en formation et dispose d’un budget
consolidé de 1 119 M€.4

 L’introduction du lean management au CHRU de Lille

Soucieux de développer sa politique de performance, de marketing et de communication,


le CHRU de Lille a lancé en 2013 une réflexion sur les outils permettant de renforcer ces
axes. La création d’une Délégation d’Appui à la Performance (DAP) auprès de la Direction
Générale de l’établissement a ainsi concouru au développement de cette politique.

En 2014, soutenue par la Direction Générale et par la Fédération Marketing, Performance


et Communication du CHRU, la DAP a proposé l’expérimentation du lean management
dans l’établissement. Grâce à cette méthode managériale innovante pour un
établissement de santé, le CHRU souhaite poursuivre sa politique d’amélioration continue
au service de ses patients et de ses professionnels ainsi que conforter ses pratiques
professionnelles en qualité, en délais et ses conditions de travail.

Les deux périmètres d’expérimentation retenus par le CHRU sont le Département des
Ressources Physiques et le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né. Ils ont été choisis grâce à

4
Données issues du rapport d’activité 2014-2015 du CHRU de Lille
2
l’enthousiasme et la volonté des responsables concernés d’expérimenter le lean dans leur
secteur.

Considérant la nouveauté que représentait cette méthode pour le CHRU, l’établissement


a fait le choix d’être accompagné par deux cabinets pendant plusieurs mois. L’un a œuvré
à la mise en place du lean au sein du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né de novembre 2014
à juillet 2015, l’autre a travaillé sur le périmètre du DRP au cours de la même période. Le
CHRU a choisi deux cabinets offrant des compétences distinctes garantissant un
accompagnement de qualité adapté aux secteurs retenus. En effet, sur le pôle Femme-
Mère-Nouveau-Né un cabinet doté de plusieurs expériences lean en milieu hospitalier a
été privilégié alors que pour le DRP, un cabinet dont l’expérience se concentrait
davantage sur le secteur privé et la supply chain5 a été retenu par l’établissement.

Au cours de la phase d’accompagnement, les deux cabinets de consulting ont proposé


des thématiques d’intervention précises, pour lesquelles la même méthodologie a été
employée : observations sur le terrain, entretiens avec les acteurs clés, réalisation de la
cartographie du processus en vigueur, de la cartographie du processus cible, élaboration
et mise en place des plans d’actions et suivi des plans d’actions. Cette phase
d’accompagnement a été ponctuée, dans les deux périmètres lean du CHRU, de comités
de pilotage (COPIL) ou comités opérationnels (COMOP) servant à présenter l’état
d’avancement des chantiers et éventuellement proposer des solutions/arbitrages aux
points bloquants.

Au sein du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né, les trois thématiques suivantes ont été


retenues :
- L’accueil téléphonique des secrétariats médicaux en gynécologie et obstétrique ;
- L’hôtellerie dans les suites de naissance ;
- L’organisation des soins de jour.

Au DRP, les deux chantiers suivants ont été retenus :


- En maintenance : le traitement des demandes d’intervention requalifiées en
demandes de travaux ;
- En achats/approvisionnements : la formulation de la demande d’achat et
d’approvisionnement.

5
Chaîne logistique
3
Depuis le mois de juillet 2015, l’établissement n’est plus accompagné et œuvre, seul, à la
fois à la consolidation de la méthode lean sur le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né et le
DRP, à travers le suivi régulier des plans d’actions, et au déploiement de la démarche sur
d’autres secteurs au sein de ces mêmes périmètres. Ainsi, le lean est actuellement en
cours de déploiement au sein de la blanchisserie de l’établissement.

 Quelle place pour le lean à l’hôpital ?

Né dans l’industrie automobile, le lean management est aujourd’hui peu ou pas implanté à
l’hôpital. L’objectif de son implantation est d’apporter aux établissements de santé un
levier supplémentaire au service des politiques d’amélioration de la qualité de prise en
charge des patients, des conditions de travail et de recherche de la performance.
Cela constitue néanmoins un défi managérial pour les établissements de santé puisque,
malgré les objectifs d’amélioration continue poursuivis et le caractère participatif de sa
méthodologie, le lean management, méthode peu connue et issue du secteur privé,
suscite la réserve des professionnels de santé, plus particulièrement au sein des secteurs
de soins, et des partenaires sociaux.

Dans ce contexte de méfiance du personnel hospitalier concernant la part croissante de la


performance dans les établissements de santé, comment garantir la réussite de
l’implantation du lean management, méthode issue de l’industrie, dans les hôpitaux ?

L’évolution des pratiques managériales induite par le lean management est-elle


souhaitable ? Quelles sont les limites de la méthode lean appliquée à l’hôpital ?

Quel est l’apport réel du lean management à l’hôpital, dans un milieu professionnel où la
recherche de la qualité et de la performance est intégrée depuis plusieurs années sous
l’impulsion d’institutions telles que la Haute Autorité de Santé ou l’Agence Nationale
d’Appui à la Performance ?

Nous verrons que le lean, méthode issue de l’industrie et novatrice pour les
établissements de santé, exige une communication adaptée pour convaincre de son bien-
fondé (I). Nous analyserons ensuite la méthodologie employée par le CHRU de Lille pour
déterminer les facteurs de réussite de l’implantation du lean en milieu hospitalier (II). Pour
finir, nous étudierons les enseignements tirés par le CHRU de Lille à partir des premiers
résultats de la démarche pour garantir le déploiement du lean au sein de l’établissement
(III).

4
Méthodologie

Ce sujet a été au centre de mon second stage hospitalier puisque j’ai pu participer en tant
qu’observatrice à tous les comités de pilotage organisés sur le pôle Femme-Mère-
Nouveau-Né ainsi que sur le DRP. De la même manière, j’ai pu assister aux présentations
de la démarche et l’avancée de ses chantiers dans les différentes instances de
l’établissement (Comité d’Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail, Comité
Technique d’Etablissement, Comité de Performance, etc.). J’ai également été associée
aux réunions internes de la Délégation d’Appui à la Performance, en charge du pilotage
institutionnel et opérationnel de la démarche.

Par ailleurs, au cours de mon stage je me suis vue confier, en tant que chef de projet,
l’animation du déploiement de la méthode lean au sein du Département des Ressources
Physiques. Plus précisément, j’ai été chargée de proposer une méthodologie du
déploiement de la démarche après son expérimentation et l’accompagnement par un
cabinet, ainsi que de son pilotage opérationnel sur un chantier en particulier : la
préparation des commandes en blanchisserie.

La présente analyse a été réalisée à partir d’une recherche bibliographique


volontairement large. En effet, les ouvrages étudiés concernent à la fois le lean de
manière générale, notamment en milieu industriel mais également l’implantation du lean
en milieu hospitalier. De même, la démarche lean a fait l’objet d’un grand nombre
d’articles, y compris dans le milieu de la santé, dont la lecture a enrichi le travail d’étude.
J’ai également participé à un séminaire sur le lean management organisé par le Centre
Hospitalier de Beauvais, ainsi qu’au colloque international « lean management » organisé
par le CHU de Dinant Godinne à Bruxelles.

De nombreux entretiens ont été menés avec des membres du personnel médical,
paramédical, technique et administratif concerné par l’implantation de la démarche lean
au CHRU de Lille (la liste des personnes rencontrées se trouve en annexe I). Ces
entretiens n’ont pas été réalisés à partir d’une grille d’entretien type et ont été adaptés en
fonction de la personne interrogée et de son rôle dans l’implantation du lean management
à l’hôpital.

5
1 Le lean management, méthode novatrice issue de
l’industrie, exige une communication adaptée pour
convaincre de son bien-fondé

Issu du secteur privé, le lean management est peu connu des professionnels de santé et
génère de la réserve. Le CHRU de Lille est alors particulièrement attentif à la
communication, particulièrement concernant les objectifs poursuivis par l’implantation de
cette démarche. Il s’agit surtout de rassurer les professionnels et de garantir leur
participation tout au long du processus (1.1). Cependant, le lean management représente
pour le CHRU de Lille un défi managérial ambitieux, puisqu’il entraîne une évolution des
pratiques managériales, dans un environnement empreint d’exigences qualitatives et
quantitatives (1.2).

1.1 Malgré les objectifs poursuivis, la démarche lean, inconnue du


milieu hospitalier, ne remporte pas d’adhésion immédiate et sans
réserve de la part des professionnels de santé, conduisant ainsi le
CHRU de Lille à insister sur son caractère participatif

Le CHRU, à travers un dispositif de communication structuré, souhaite présenter les


objectifs poursuivis dans le cadre de l’implantation du lean management (1.1.1).
Cependant, la réserve des professionnels de santé reste importante (1.1.2) et nécessite,
pour le CHRU, d’insister sur le caractère participatif de cette démarche (1.1.3).

1.1.1 Les objectifs lean du CHRU de Lille

Au CHRU de Lille, dès le lancement de la démarche, le lean a fait l’objet de présentations


régulières au sein des instances de l’établissement (Conseil de Surveillance, Commission
Médicale d’Etablissement, Comité Technique d’Etablissement, Comité d’Hygiène, de
Sécurité et des Conditions de Travail, Assemblée Générale des Cadres, Comité de
Performance, Collège des chefs de pôles...)

6
Cette communication institutionnelle, à visée informative et pédagogique, se veut
rassurante sur les objectifs poursuivis et présentés ci-dessous, à l’opposé des objectifs de
cost-killing6 :

- Aborder plusieurs dimensions telles que l’organisation du travail, le


développement des ressources humaines, la sécurité, l’environnement de travail
et l’aménagement des postes ;
- S’appuyer sur un partage d’expériences et sur l’élaboration de référentiels qui
prennent en compte les organisations du travail ;
- Identifier tout ce qui empêche les collaborateurs de faire leur travail dans les
meilleures conditions ;
- Mettre en place un plan d’actions avec les personnels concernés par la
problématique.

Par ces communications, le CHRU de Lille souhaite démontrer qu’il poursuit des objectifs
ambitieux qui concernent tant l’amélioration de la qualité de la prise en charge des
patients, que l’amélioration des conditions de travail des professionnels hospitaliers. De
même, le CHRU souhaite faire preuve de transparence, une notion importante du lean
management, qui conditionne l’adhésion des équipes. Par ailleurs, il est
systématiquement rappelé lors de ces temps de présentation que c’est bien le lean qui
doit s’adapter à l’environnement hospitalier et non pas l’inverse.

Pour rassurer le personnel hospitalier, certains établissements ayant expérimenté le lean


management ont fait le choix de rédiger une charte. Sans être contraignant, cet outil, qui
n’a pas été employé par le CHRU de Lille, engage moralement la direction de
l’établissement et vise à rassurer les professionnels. C’est notamment le cas du CHU de
Dinant Godinne dont la charte insiste notamment sur les points suivants :

- La Direction encourage un modèle d’organisation ouvert à un changement


continu ;
- La Direction s’engage à prôner une culture de la sécurité axée sur le respect,
l’ouverture et la transparence ;
- La Direction s’engage à développer un système de transmission des incidents non
sanctionnant. Les personnes qui déclarent un problème ou un incident auront la
garantie que le signalement de ce problème n’aboutira à aucune suite négative
sauf si celui-ci a été réalisé de façon intentionnelle ou répétitive.

6
Réducteur de coûts
7
1.1.2 La réserve des professionnels hospitaliers

Malgré ces communications, les professionnels de santé ont fait état, dès le démarrage,
de leur réserve concernant la mise en place du lean management. Cette réserve a en
particulier été exprimée lors des instances représentatives du personnel (CTE, CHSCT),
mais aussi lors d’ateliers dans le cadre des différents chantiers lean.

Cette méfiance des professionnels peut s’expliquer notamment par l’abondance de


littérature à charge contre le lean, particulièrement sur internet. La traduction du terme lui-
même peut amener à certaines conclusions hâtives puisque le terme «lean», pouvant être
traduit par «maigre», est souvent rapproché du terme de « dégraissage » et donc de cost-
killing qui inquiète le personnel hospitalier dans un contexte budgétaire nationalement
contraint.

Les représentants du personnel du CHRU de Lille ont ainsi interpellé la Direction de


l’établissement lors d’un CHSCT. Leur argumentaire était notamment étayé par de
nombreux articles disponibles sur internet, instruisant à charge la méthode lean. Un tract
rédigé par l’un des syndicats majoritaires de l’établissement comportait l’encart suivant :

« Une méthode « industrielle » appliquée à l’hôpital :

Dans le dernier « Contact »7, on nous fait l’éloge du lean management, une méthode
organisée du travail très utilisée dans l’industrie, notamment dans l’automobile, comme
chez Toyota. Quand on regarde sur Internet, on trouve la définition de cette méthode:
performance en matière de productivité, de baisse des coûts, et lutte contre le gaspillage
et le temps perdu. Gérer l’hôpital comme une usine, certains à la direction en rêvent, mais
pas nous ! »

D’autres établissements ont rencontré une résistance beaucoup plus importante, c’est
notamment le cas du CHU de Toulouse qui en 2013 lors de l’organisation d’une
conférence sur le lean a fait face à une opposition syndicale forte doublée d’un relais
médiatique national. Le syndicat majoritaire de l’établissement dénonçait alors un
« piège » à travers « l’exacerbation des individualités » et le « le summum de
l’intensification avec en prime la recherche de la servitude volontaire par une soi-disant
autonomie ». 8

7
Journal du CHRU de Lille
8
Article de presse Médiapart, « CHU de Toulouse, la direction plébiscite le lean manufacturing », 8
mars 2013.
8
La méfiance du personnel porte principalement sur les conséquences que pourraient
avoir d’éventuels gains de productivité : suppression de personnel ? Réduction de
moyens ? Intensification du travail ? Course à la performance ?

En effet, le risque de la méthode lean réside dans son utilisation détournée par certaines
structures dont les objectifs principaux sont uniquement l’amélioration de la productivité et
de la rentabilité. La recherche d’une meilleure performance est effectivement l’un des
objectifs du lean, qui s’attache à ne conserver que les tâches dites « à valeur ajoutée »,
mais elle ne peut être souhaitée au détriment de la qualité de vie au travail des agents et
de prise en charge des patients. Appliqué exclusivement pour poursuivre des objectifs de
productivité et de rentabilité, le lean management ne pourra rencontrer l’adhésion des
professionnels de santé, nécessaire à sa réussite.

Cette réserve est particulièrement présente au sein des services de soins puisque la
rationalisation induite par le lean peut impliquer des choix qui, selon les professionnels
hospitaliers, ne leur permettront pas d’exercer pleinement leur mission de soignants.
Nous pouvons notamment citer en ce sens plusieurs caractéristiques du métier de
soignant et de l’environnement hospitalier qui peuvent être en contradiction avec la
rationalisation qu’implique le lean management :

- La multiplicité des temporalités (chronicité, urgence) ;


- La multiplicité et la diversité des réponses que peuvent nécessiter l’état d’un seul
patient ;
- La difficulté à anticiper l’activité pour partie non programmée ;
- La difficulté d’anticiper l’état de santé d’un patient ;
- Le caractère singulier de la décision de soin qui l’éloigne de toute forme de
« mécanisation » ou standardisation.9

Ces caractéristiques nous rappellent alors que le lean de Toyota ne peut être appliqué
sans adaptation au milieu hospitalier. L’appellation « lean santé » ou « lean heathcare »,
utilisée notamment par le Québec prend alors tout son sens puisqu’il s’agit d’adapter le
lean à l’environnement hospitalier, dont les obligations, en termes de prise en charge du
patient et de conditions de travail du personnel, conduisent à une approche
singulièrement différente de celle pratiquée par l’industrie.

Cette réserve des professionnels de santé est néanmoins à nuancer car certains
membres du personnel ont accueilli l’expérimentation de cette démarche avec beaucoup
d’enthousiasme et d’intérêt. C’est particulièrement le cas de ceux qui disposaient d’une
9
FERMON B. et GRANDJEAN P., Performance et innovation dans les établissements de santé,
éd. DUNOD 2015, pp 255.
9
connaissance, voire même d’une expérience du lean dans le cadre de leur parcours
professionnel. D’autres étaient également en attente d’outils d’amélioration continue.
C’est le cas du responsable des approvisionnements de la Direction de
l’Approvisionnement, de la Logistique et de la Fonction Linge du CHRU, particulièrement
enthousiaste au moment de l’expérimentation du lean, puisqu’il en avait eu l’expérience
dans le secteur privé et qu’il savait ainsi que les outils lean pouvaient constituer un appui
méthodologique important dans la perspective d’une amélioration du service rendu au
client interne. De la même manière, le chef du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né était
particulièrement enthousiaste au démarrage de l’expérimentation du lean management,
qu’il connaissait au travers de lectures personnelles et a consacré une énergie importante
à convaincre ses collègues des bienfaits de la méthode.

1.1.3 Une démarche avant tout participative

Einstein disait « Il est plus facile de briser un atome qu’un préjugé », les valeurs et outils
qui caractérisent la méthode lean permettent de répondre, en partie, aux critiques
évoquées dans la partie précédente.
En effet, les outils du lean management sont avant tout des outils participatifs. L’objectif
est, comme le souligne Patrick De Coster, directeur du CHU de Dinant Godinne, de faire
de chacun des professionnels hospitaliers un « résolveur de problème »10. Il s’agit de faire
évoluer les pratiques managériales pour encourager la proposition de solutions
d’amélioration continue par le personnel.

Cette réorganisation dite de « l’intérieur », par ceux qui pratiquent, est un élément
essentiel de la méthode lean. En effet, la participation et l’association des professionnels
est au cœur des outils du lean : ateliers Value Stream Mapping, chantier 5S, stand-up
meeting.11

Le Value Stream Mapping (VSM) ou cartographie des flux repose entièrement sur la
participation des professionnels puisque ce sont eux qui décrivent les flux et interfaces
d’un processus. Au CHRU, la VSM d’un processus est réalisée sur une demi-journée et
mobilise tous les interlocuteurs d’une thématique. J’ai pu participer à la VSM du chantier
approvisionnement du CHRU de Lille et constater que le cabinet accompagnant
l’établissement s’appuyait entièrement sur l’expertise et l’analyse des professionnels de
terrain. Ces derniers ont décrit le processus d’approvisionnement dans son intégralité, de

10
Propos recueillis lors d’un entretien téléphonique avec Patrick De Coster.
11
Réunion debout
10
la saisie de la commande à la livraison dans un service et ont caractérisé la nature des
flux, qu’ils soient informatifs ou de validation. Ils ont également identifié les différentes
interfaces avec les autres services et pointé les dysfonctionnements altérant le bon
déroulement du processus. Nous reviendrons plus tard dans cette étude sur l’utilisation de
la VSM.

De même, la mise en place de chantiers 5S, par le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né, l’un


concernant le local des archives, l’autre le bureau du secrétariat médical de frappe,
repose sur la participation des professionnels de santé. Le chantier 5S est une méthode
d’organisation des lieux qui permet de travailler un environnement ordonné et rangé
favorisant une atmosphère de travail plus sereine et permettant d’améliorer la prise en
charge des patients ou le cas échéant des clients. En effet, en s’assurant que chaque
élément a une place et une fonction précises et partagées par tous, le circuit est optimisé
et les gaspillages de toute nature sont considérablement réduits.

Pour comprendre ce qu’est un chantier 5S et le rôle des professionnels qui y participent,


voici le sens qui est donné à chaque « S » de l’outil lean :

- Seira : éliminer l’inutile ;


- Seiton : ranger ;
- Seiso : inspecter ;
- Seiketsu : standardiser ;
- Shitsuke : maintenir.

On comprend ici aisément que seuls les professionnels de terrain sont en mesure
d’apporter les réponses nécessaires à l’avancement d’un tel chantier. Le chantier 5S
favorise le travail en équipe puisqu’ensemble, les membres d’un même service vont
participer au chantier et proposer des solutions d’amélioration de l’aménagement de
l’espace. L’équipe propose également la mise en place d’un système de standardisation
partagé par tous.

La participation des professionnels hospitaliers est donc essentielle puisqu’elle


conditionne l’appropriation et l’adhésion des équipes à la démarche lean. En effet, un
chantier lean aura peu d’impact si les premiers concernés par le plan d’amélioration
continue ne sont pas associés à la recherche de solutions. Le lean management
encourage ainsi le passage de la culture du « pompier solitaire »12 à celle de la recherche
de solutions en équipe. En cela, le lean constitue une évolution des pratiques

12
Propos recueillis au cours d’un entretien téléphonique avec Patrick De Coster
11
managériales importante, notamment pour un établissement de l’envergure du CHRU de
Lille.

1.2 L’implantation du lean au CHRU de Lille constitue un défi


managérial ambitieux dans un environnement empreint
d’exigences quantitatives et qualitatives

Nous l’avons vu, le lean management est une évolution des pratiques managériales
hospitalières. En cela, son expérimentation et son déploiement constituent un défi
managérial ambitieux pour le CHRU de Lille puisqu’il induit une évolution de paradigme
(1.2.1). La démarche lean induit également une évolution des pratiques dans un
environnement dont les exigences quantitatives et qualitatives sont de plus en plus
importantes. (1.2.2)

1.2.1 Vers un changement de paradigme : la lutte contre les gaspillages et


l’identification de la valeur ajoutée par l’utilisation de la Value Stream
Mapping

Tout d’abord, le lean nécessite d’éliminer les gaspillages et activités n’ayant pas de valeur
ajoutée pour l’établissement.
Comme le montre le schéma ci-dessous, il existe trois types d’activités : celles qui ont une
valeur ajoutée et qui sont la raison même de la venue du patient au sein du CHRU, les
activités nécessaires mais qui n’ont pas de valeur aux yeux du patient, et les activités qui
n’ont aucune valeur ajoutée pour le patient ou pour l’établissement. C’est au sein même
de cette dernière catégorie que l’on trouve les gaspillages auxquels l’objectif du lean
management est de mettre fin.

12
Appelé « muda » en japonais, la notion de gaspillage est centrale dans le lean. Elle
comprend toutes les activités qui n’ont aucune valeur ajoutée pour le patient et pour
l’établissement. Ces gaspillages peuvent être de différentes natures et sont
systématiquement détaillés lors des présentations de la démarche pour faciliter leur
identification par les équipes.

13
- La surproduction : surproduire c’est produire plus que ce qui est nécessaire et
entraîne du stockage. En milieu hospitalier, la surproduction résulte souvent de la
bonne volonté du personnel de prévoir plus que nécessaire en anticipation de
demandes ou situations imprévues.
Nous pouvons ici nous interroger sur le sens de la « surproduction », notamment
en milieu soignant. Peut-on « surproduire » du soin ? Nous comprenons ici la
complexité d’appliquer cette analyse en secteur soins.

- Les attentes : elles concernent le patient comme le personnel et peuvent générer


de fortes tensions. Elles engendrent des temps d’inactivité du personnel et
peuvent susciter l’anxiété chez les patients. Elles sont coûteuses puisque le
temps lui-même représente un coût important, rarement rattrapable.

- Les transports inutiles : les mouvements de matériels inutiles peuvent augmenter


le risque de perte ou de casse ou encore de mauvais étiquetage qui peuvent
diminuer la qualité des soins. Ils augmentent l’insatisfaction du patient.

- La sur-qualité ou « sur-processing » : Elle est souvent liée en milieu hospitalier aux


contraintes règlementaires.

- Les stocks : Il s’agit là des stocks inutiles qui engendrent des pertes de temps et
d’espace notamment.

- « Rebuts » ou reprises : Elles résultent d’une activité qui n’a pas été correctement
réalisée dès la première fois.

- Les déplacements inutiles : Ils entraînent de la fatigue et accentue la pénibilité des


conditions de travail des professionnels de santé.

Tous ces gaspillages mènent au gaspillage ultime qu’est l’inexploitation voire la perte de
potentiel humain, cœur de l’hôpital, générateur d’idées et de solutions d’amélioration pour
des situations créatrices d’insatisfaction.

Si ces gaspillages sont facilement observables en milieu industriel, ils sont plus difficiles à
objectiver dans le milieu hospitalier, la nature même des activités hospitalières ne pouvant
être comparée à la nature d’activités industrielles poursuivant un but lucratif. La réponse
lorsque l’on questionne l’origine d’une activité sans valeur ajoutée est souvent la même :
14
« On a toujours fait comme cela ». Pourtant, l’appréhension de ces gaspillages permet
d’améliorer considérablement les conditions de travail ainsi que la qualité de prise en
charge des patients. Nous comprenons ici aisément en quoi le lean est un défi managérial
ambitieux pour le CHRU, il impose une évolution de paradigme et une lutte contre les
gaspillages dans un environnement dont les caractéristiques sont particulières au sein
duquel on ne peut raisonner comme dans une entreprise. C’est alors à l’établissement
d’insuffler cette évolution des pratiques, notamment par la pratique du gemba, « là où ça
se passe » en japonais, que nous détaillerons ci-après, et en développant les
compétences des professionnels hospitaliers, particulièrement en ce qui concerne la
détection des anomalies de processus.

Le CHRU de Lille utilise ainsi la VSM, outil lean employé lorsqu’il s’agit de travailler sur
les gaspillages et la notion de valeur ajoutée et permet d’amorcer une évolution de culture
vis-à-vis de certaines habitudes professionnelles.

Nous l’avons vu, la notion d’activité à valeur ajoutée est une notion centrale dans la
démarche lean. Il s’agit de définir la valeur du point de vue des patients et des clients
internes pour caractériser une activité et déterminer son utilité.
James Womack et Daniel Jones ont établi 5 principes de base13, tous autour de la notion
de valeur, sur lesquels le lean repose :
- Définir la valeur du lean attendue par le patient/le client ;
- Identifier la chaîne de valeur ;
- Réduire toutes les opérations sans valeur ajoutée ;
- Tirer les flux : ne produire que des soins ou services en termes de « bien et de
bon » pour les patients/clients ;
- Viser la perfection : l’amélioration continue n’ayant pas de limite et ne devant être
perçue comme une utopie.

Il est important de rappeler ici que la notion de valeur ajoutée en milieu hospitalier est
bien différente de celle du milieu industriel, les obligations de service public ainsi que le
fonctionnement même de l’hôpital challengent quotidiennement la notion d’activité à
valeur ajoutée dans les établissements de santé.

La valeur ajoutée peut être définie comme « le résultat d’actions qui améliorent la qualité
et qui en réduisent les coûts ».14 En milieu industriel, pour déterminer la valeur d’une
activité, il faut répondre à trois questions : L’activité réalisée engendre-t-elle une

13
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 34.
14
OVREITVEIR J., STAINES A., L’amélioration de la valeur dans les services de santé, Springer
2011, Introduction.
15
transformation du service attendu ? L’activité peut-elle être réalisée dès le premier essai ?
Le client serait-il prêt à payer pour cette activité s’il le devait ? Pour un établissement de
santé, les réponses à ces questions ne sont pas aisées puisque la valeur d’une activité
dépend de ce qui est attendu par le patient/le client interne. Certaines activités
importantes aux yeux de certains patients/clients, notamment la qualité de l’accueil,
n’auront pas la même valeur pour d’autres.

A l’hôpital plusieurs questions peuvent guider un établissement pour identifier la valeur


ajoutée : la tâche exécutée permet-elle d’apporter une fonction nouvelle au soin ou à la
prestation ? Si le patient devait payer pour cette tâche, le ferait-il? L’activité contribue-t-
elle à garantir une meilleure prise en charge pour le patient ?

Dans les établissements de santé, il existe une part importante d’activité sans valeur
ajoutée. Elles peuvent être particulièrement pénalisantes pour un établissement,
notamment dans le contexte actuel où la performance et l’efficience des hôpitaux sont des
exigences.

De plus, les établissements de santé connaissent un autre type d’activité : les activités
sans valeur ajoutée mais nécessaires. Il s’agit des tâches qui ne disposent pas de valeur
ajoutée mais qui sont pourtant nécessaires au fonctionnement normal d’un établissement.
C’est par exemple le cas des actions de reporting. L’objectif est de faire en sorte d’en
réduire les coûts et le temps sans pour autant les éliminer puisqu’elles sont nécessaires.
La difficulté pour un établissement de santé est ici majeure, puisqu’il doit assurer la
gestion simultanée d’aspects techniques, médicaux et humains, portefeuille multifactoriel
qu’il doit prendre en compte dans la définition de la valeur de ces actions.

L’analyse de la chaîne du flux de valeur, notamment via l’utilisation de la Value Stream


Mapping (ou cartographie des flux) pointe toute les activités réalisées qui n’apportent pas
de valeur ajoutée. Cet outil, très visuel, présente, sous une forme graphique, l’ensemble
des flux d’un processus : flux humains, d’informations, d’équipements, etc. Il permet
notamment de faire apparaître les gaspillages et actions sans valeur.

Pour réaliser la VSM d’un processus, la méthodologie utilisée par le CHRU de Lille est la
suivante :
- Choisir la chaîne de flux de valeur à étudier : en l’espèce nous analyserons la
VSM produite sur le chantier de la requalification d’une demande de travaux en
intervention ;
- Réunir sur une journée toutes les personnes concernées par le processus ;

16
- Fixer sur un mur une affiche large de papier kraft, sur laquelle sera dessinée la
cartographie des flux via l’utilisation de post-it colorés selon que l’action ait, ou
non, une valeur ajoutée ;
- Commencer par le but final du processus.

Chacune des étapes dessinées est ensuite renseignée par son nombre d’intervenants, le
temps qu’elle prend, les outils utilisés et les temps d’attente.

Réalisation de la VSM du chantier achat/approvisionnement : formulation de la demande


d’achat/approvisionnement.

Ci-après, la formalisation de la VSM pré-lean, c’est-à-dire précédent l’expérimentation, sur


le chantier de la maintenance a permis de caractériser les dysfonctionnements et les
interfaces de ce processus.

17
Ont notamment pu être identifiés les dysfonctionnements suivants :
- Des phases de validation trop nombreuses et génératrices de perte de temps ;
- Un lead-time15 non maîtrisé ;
- Une partie du suivi des dossiers non tracée dans le système d’information.

De plus, la VSM a permis la distinction des interfaces avec la Direction du Confort Hôtelier
et de la Restauration (CGPH ou Coordination Générale des Pôles Hôteliers sur le
schéma), les services de soins, la comptabilité travaux et les vaguemestres.

La réalisation d’une VSM dite « actuelle » permet ensuite d’établir la mise en place d’un
chantier d’amélioration dit « VSM future ou cible», également réalisée sur une journée
pour permettre, à partir des écarts observés, d’améliorer les flux. De cette VSM future
découlera ensuite le plan d’actions prioritaires visant à atteindre les objectifs
d’amélioration du chantier. La VSM permet tout particulièrement d’attirer l’attention sur
l’importance de la coordination entre les services dans une organisation aussi complexe
que l’organisation hospitalière.

Ci-après, la VSM future du chantier de la maintenance, incorporant le plan d’actions.

15
Délai entre le démarrage du processus et son achèvement
18
Les actions d’amélioration suivantes ont été identifiées suite à la VSM cible :
- Validation de l’opportunité avant le montage du dossier ;
- Réduction du nombre de signatures ;
- Mise en place d’une réunion hebdomadaire de pilotage des projets ;
- Permettre la réalisation directe des travaux urgents par les
responsables professionnels de maintenance ;
- Suivre le lead-time global ;

Cet outil nécessite un investissement en temps très important de la part des équipes, que
les établissements de santé doivent prendre en compte et sur lequel nous reviendrons
ultérieurement au cours de cette analyse.

1.2.2 Le lean management, méthode de terrain dans un environnement


d’exigences qualitatives et quantitatives

Le lean management conduit vers une évolution des pratiques managériales. C’est
notamment le cas du gemba, littéralement « là où ça se passe » terme qui résume le fait
pour les managers de se rendre sur le terrain de manière régulière.

Cette « direction par les yeux »16 est un point essentiel de la méthode lean, Patrick De
Coster, Directeur du CHU de Dinant Godinne, y voit plusieurs avantages :
- Une diminution de la distance entre le management et le terrain ;
- Un outil qui permet de poser les bonnes questions pour comprendre la réalité du
terrain ;
- Un moyen pour apprendre de ses collaborateurs et améliorer son processus de
décision ;
- Un moyen pour contribuer à la pérennisation des améliorations ;
- Un moyen pour remercier et féliciter et montrer du respect.

En effet, la présence des managers sur le terrain est un vecteur important de cette
évolution de culture qu’induit le lean. Ainsi, la Délégation d’Appui à la Performance du
CHRU de Lille veille à être présente sur le terrain avec les équipes pour accompagner
certains changements, c’est notamment le cas pour le déploiement du lean en cours à la
blanchisserie dont le démarrage est conditionné par plusieurs temps d’observation sur le

16
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 21.
19
terrain. Chaque atelier lean du CHRU a démarré par plusieurs visites de terrain pour
comprendre les processus, réalités et contraintes des équipes. Cette présence des
managers est particulièrement attendue et appréciée par les professionnels hospitaliers et
conditionne l’adhésion de ces derniers.

Lors des entretiens réalisés sur le terrain, sans que j’aborde la question, il m’a
systématiquement été affirmé à quel point les visites de terrain avaient eu leur importance
dans la part d’adhésion des équipes à la démarche. Eric Guyader, Directeur du Centre
Hospitalier de Beauvais a, à ce propos, affirmé lors du séminaire « le lean management à
l’hôpital », imposer à son équipe de direction de se rendre sur le terrain deux heures par
semaine.

La pratique du gemba enrichit les managers, certains d’entre eux, rencontrés lors
d’entretiens m’ont affirmé disposer d’« une meilleure compréhension des activités »17. Elle
leur permet de se poser les « cinq pourquoi » préconisés par T.Ohno18 :

- Quand se passe le « quoi » (le quoi étant le processus analysé)?


- Combien peut-il y avoir de quoi, qui, où et quand ?
- Comment se passe le quoi ?
- Pourquoi le quoi s’est-il produit, quelle en est la justification ?
- Pour quoi améliorer la situation du quoi ? Pour quel(s) objectifs ?

La légende raconte que Taiichi Ohno lui-même avait pour habitude de laisser ses cadres
passer des journées entières dans un cercle qu’il traçait à la craie par terre, jusqu’à ce
qu’ils « voient ce qu’ils étaient censés regarder »19. Regarder c’est dépasser le stade du
simple « voir » seulement à travers le prisme de ce que l’on pense ou connaît déjà.

La pratique du terrain permet notamment de se mettre d’accord sur la cause d’un


problème, elle encourage le dialogue jusqu’à ce qu’un consensus émerge sur la
formulation d’un problème.

La difficulté du gemba au CHRU de Lille réside dans sa pratique régulière. En effet, la


taille de l’établissement et la charge de travail des managers ne facilitent pas la pratique
du terrain et représentent un véritable défi pour l’établissement. Nous pouvons ici nous
interroger sur la pratique du gemba dans un établissement de la taille du CHRU de Lille :
rappelons que l’établissement comporte 3245 lits, assure près de 206 000 prises en
charge en hospitalisation par an et s’étend sur 474 885 mètres carrés comprenant 61

17
Propos recueillis au cours d’un entretien avec le chef du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né
18
BALLE M. et BEAUVALLET G., Le management lean, Editions Pearson, 2013, pp 37.
19
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 69.
20
bâtiments20, la pratique du terrain ne peut donc pas y être la même que dans un
établissement d’une taille plus réduite. Il faut cependant préciser que les directeurs
référents de pôles du CHRU pratiquent le gemba de manière régulière et que les
membres de l’équipe de direction sont régulièrement invités par la Direction Générale à
se rendre sur le terrain.
De même, la notion de temps est également ici particulièrement importante, comment
trouver le temps, ressource rare de l’hôpital ? Nous pouvons ici citer le CHU de Dinant
Godinne (d’une taille toutefois nettement plus réduite que le CHRU de Lille) dont le
directeur s’astreint à consacrer trois heures par semaine de son agenda à la visite du
terrain et à la rencontre de patients.

Nous l’avons vu, un établissement qui décide d’employer le lean management se doit de
faire preuve de pédagogie et de transparence à l’égard des professionnels qui le
composent. Le lean suscite la réserve des professionnels puisqu’il implique une évolution
des pratiques managériales. En imposant de mesurer la valeur des activités, en luttant
contre les gaspillages, il est un défi important pour celui qui voudrait le mettre en place.
Cependant, l’expérience du CHRU de Lille démontre qu’une méthodologie structurée et
minutieuse ainsi que l’accompagnement des équipes vers le changement sont des
facteurs de réussite fondamentaux de l’implantation du lean management à l’hôpital.

20
Données issues du rapport d’activité 2014-2015 du CHRU de Lille
21
2 La méthode d’implantation du lean management
employée par le CHRU de Lille permet d’en identifier
les facteurs de réussite

Nous l’avons vu, l’implantation du lean management à l’hôpital est un défi managérial
ambitieux qui repose sur la pédagogie et la communication à l’intention des
professionnels de santé pour les convaincre de son bien-fondé. L’analyse de la méthode
employée par le CHRU de Lille dans un premier temps nous permettra d’en identifier les
facteurs de réussites (2.1), puis nous verrons ensuite la nécessité de fédérer les
professionnels de santé et de les accompagner à travers la mise à disposition d’outils
lean (2.2).

2.1 Le lean nécessite une méthodologie structurée

La méthodologie employée par le CHRU s’articule autour de 5 mots clés : Définir (2.1.1) -
Mesurer (2.1.2) – Analyser (2.1.3) – Innover (2.1.4) – Contrôler (2.1.5). Cette méthode
dite « D.M.A.I.C »21 est la méthodologie préconisée pour mettre en place le lean
management et nous allons la détailler ci-après en l’illustrant par l’expérimentation du
CHRU de Lille.

2.1.1 Définir

La définition du périmètre d’un chantier lean est une étape décisive pour le bon
déroulement et la réussite du chantier. Il s’agit, tout au long de cette phase de définition,
d’évaluer les bénéfices et les moyens à mettre à disposition.
La précision des contours du projet doit permettre de répondre aux questions suivantes :

- Quel service ?
- Quels objectifs / gains recherchés ?
- Quel processus étudier ?
- Quel calendrier proposer ?

21
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 73.
22
Il est essentiel que le projet identifié se caractérise par un gain (qualitatif et/ou quantitatif)
important pour le patient et/ou pour l’établissement, qu’il s’agisse des conditions de travail
du personnel, de l’efficience, ou encore de l’amélioration de la prise en charge du patient.
De même, le chantier lean doit reposer sur un processus facilement identifiable, pouvant
impliquer un ou plusieurs services. C’est ainsi qu’au DRP, le processus de la formulation
de la demande d’achat et d’approvisionnement ainsi que la requalification d’une demande
d’intervention en demande de travaux ont été retenus pour faire l’objet d’un chantier lean.

Ensuite, l’identification de l’équipe projet est une étape particulièrement importante. Nous
reviendrons ultérieurement sur l’importance du « leader lean », mais nous pouvons d’ores
et déjà affirmer que la désignation d’un professionnel de santé en charge de conduire le
projet est un élément essentiel de la réussite d’un chantier.
Sur le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né, chaque chantier est conduit par un binôme
associant un médecin et un cadre de proximité garantissant ainsi l’implication du corps
médical, de l’encadrement et des professionnels de terrain.
De même, au DRP, un pilote de chantier est identifié et il est accompagné par la DAP ou
par le référent lean de sa direction.
L’identification de l’équipe-projet permet de définir la structure des COMOP et COPIL,
c’est à dire les membres de droit et ceux qui seront invités en fonction de l’ordre du jour.
Le CHRU a souhaité garantir l’opérationnalité de cette structure puisque les instances de
pilotage se réunissent toutes les six semaines et rassemblent des professionnels
d’horizons divers afin d’apporter leur vision d’expert sur les différents chantiers lean.

Comme indiqué lors de la première partie, l’appropriation par les équipes de la démarche
lean est un facteur fondamental de la réussite de l’implantation du lean à l’hôpital. Il s’agit
donc au cours de cette phase de sensibiliser les acteurs en leur présentant le lean
management et l’évolution des pratiques qu’il implique, la présentation des ateliers et des
objectifs et gains associés. C’est à cette étape précise que peut être construite une charte
projet. Cet outil, utilisé sur le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né décrit le périmètre et les
objectifs du chantier lean, les exigences de la patiente, les indicateurs qui permettront de
mesurer l’état d’avancement du plan d’action, le plan d’action et l’équipe projet associée.
(cf. annexe II). Cette charte est un guide partagé, rédigé en collaboration avec les équipes
concernées.

Concernant la phase de définition, la totalité des éléments présentés ci-dessus a été


communiquée lors de la première réunion de l’instance de pilotage : COMOP pour le pôle
Femme-Mère-Nouveau-Né, COPIL pour le DRP. Enfin, la partie de définition du projet a

23
été conclue par une étape importante de communication officielle à la fois sur la
démarche et son calendrier et a été communiquée à l’ensemble du service concerné.

Cette phase de définition est actuellement en cours sur le chantier de la distribution des
commandes en blanchisserie. En tant que chef de projet du déploiement du lean sur le
DRP, je constate l’importance du temps passé à définir le périmètre nécessairement limité
d’un chantier lean et la nécessité d’impliquer tous les professionnels concernés par le
processus. Chaque professionnel est rencontré au cours d’un entretien ce qui permet
notamment de prendre connaissance de la structure du processus en question, de ses
dysfonctionnements et des interfaces qui existent entre un service et un autre. Pour
exemple, la rencontre de la responsable de la distribution de la blanchisserie a mis à jour
l’importance de l’interface avec la Direction du Confort Hôtelier et de la Restauration,
notamment à travers les conseillères en linge présentes sur chaque site, mais également
avec les transports pour la livraison du linge. Cette rencontre nous a permis d’établir les
différents flux et échanges entre la blanchisserie et ses interlocuteurs, sans quoi le
cantonnement à l’organisation interne de la blanchisserie aurait été une erreur.

2.1.2 Mesurer

La performance du processus dans son état pré-lean est mesurée grâce à l’analyse des
modes de travail existants (organisation, compétences, outils, etc). L’objectif de cette
phase est d’impliquer les professionnels et l’encadrement dans l’identification
d’indicateurs de performance et de qualité partagés qui serviront ensuite à mesurer l’état
d’avancement de chacun des chantiers lean.
Cette phase dite de « mesure » analyse plus particulièrement les gaspillages évoqués
lors de la première partie et repose également sur l’emploi du gemba et de la VSM, outils
détaillés plus tôt dans cette étude.
Pour exemple, concernant le chantier « Amélioration de l’accueil téléphonique par les
secrétariats médicaux en gynécologie et obstétrique » au sein du pôle Femme-Mère-
Nouveau-Né, plusieurs indicateurs ont été identifiés par l’équipe projet au cours d’une
réunion spécifique « indicateurs ».

La première étape de cette réunion a consisté à identifier les difficultés des patientes :
- Des difficultés d’accès au secrétariat téléphonique des consultations et donc des
difficultés d’inscription en consultation prénatale ;
- Une mauvaise orientation des appels vers les secrétariats médicaux ;
- Une incompréhension de certains problèmes techniques ;
24
- Des difficultés dans la prise de rendez-vous sur internet.

La définition de ces difficultés a ensuite conduit à l’identification d’indicateurs de


performance et des modalités associées à ces indicateurs :

- Nombre d’appels pris ;


- Taux de prise d’appels ;
- Nombre d’inscriptions prénatales ;
- Taux d’appels mal orientés ;
- Taux de non-venues en consultation gynécologie.

Ces indicateurs ont fait l’objet de mesures initiales au mois de janvier 2015 et d’une
analyse afin d’identifier des mesures-cibles par la suite. Pour exemple le nombre
d’inscriptions prénatales en janvier était de 94 et la mesure-cible a été définie, par le
groupe de travail « indicateurs », composé de tous les professionnels de santé
concernés, à 105 inscriptions.

2.1.3 Analyser

La phase d’analyse repose sur l’étude des dysfonctionnements et de leurs causes


racines. On retrouve ici la méthode des cinq pourquoi évoquée dans la première partie.
Elle permet d’identifier les leviers d’amélioration du processus.
Si l’on poursuit l’illustration du chantier « amélioration de l’accueil téléphonique par les
secrétariats médicaux en gynécologie et obstétrique » du pôle Femme-Mère-Nouveau-
Né, plusieurs causes racines ont pu être identifiées et ont permis de faire le lien avec le
plan d’actions.

En voici quelques exemples :

- Environnement de travail : promiscuité des postes téléphoniques, cause racine :


salle mal insonorisée, matériel audio peu efficace.
Piste d’amélioration : Insonorisation, qualité du matériel à améliorer, 1 ligne par
pièce ? ;
- Matériel : Script téléphonique peu efficace, cause racine : contenu non efficace,
mauvaise orientation de la patiente initialement.
Piste d’amélioration : retravailler la qualité du script, privilégier une ligne pour
l’orthogénie ? ;

25
- Acteurs : mauvaise orientation par le standard. Cause racine : problème de
renseignement dans l’annuaire mis à disposition du standard, manque
d’informations données aux standardistes.
Piste d’amélioration : observer le travail des standardistes et échanger avec eux
pour améliorer les pratiques.

L’analyse des causes et son constat partagé permettent de proposer des solutions
efficaces d’amélioration continue, c’est le sens des groupes de travail dont l’objectif est la
recherche collective d’axes d’amélioration par les professionnels de santé.

2.1.4 Innover

La phase d’innovation consiste à mettre en œuvre les leviers d’amélioration produits par
la phase d’analyse et à enclencher la démarche d’amélioration continue. L’objectif est de
définir les modalités de suivi du plan d’actions et de mettre en place des rituels de
management et de pilotage du plan d’actions. L’innovation consiste ici en la mise à
disposition d’outils nouveaux permettant la mise en œuvre du plan d’action : management
visuel, stand-up meeting, etc.
La méthodologie retenue pour le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né et le DRP concernant
cette phase a été l’organisation de points hebdomadaires pour suivre l’avancement du
plan d’actions avec les pilotes des chantiers pour permettre d’identifier les principales
difficultés rencontrées et suivre les résultats. Ces rencontres permettent de partager des
résultats et gains obtenus au travers des indicateurs de performance identifiés lors de la
phase de « mesure » et si besoin d’adapter les actions en fonction des difficultés
rencontrées sur le terrain suivant le principe d’amélioration continue. Sur le pôle Femme-
Mère-Nouveau-Né, la mise en place d’un tableau de bord pour chaque chantier permet de
suivre cette phrase de mise en œuvre (cf. annexe III). La phase d’innovation s’appuie
notamment sur plusieurs outils lean dont le management visuel, que nous analyserons
dans seconde sous-partie de cette étude.
Côté DRP, sur le chantier de la maintenance, la mise en place d’une réunion tripartite
hebdomadaire (accompagné du management visuel) est l’outil lean innovant. Cette
réunion de pilotage des projets, qui rassemble le service de la comptabilité des travaux,
des représentants de la maintenance et des représentants de la Direction du Confort
Hôtelier et de la Restauration (DCHR) permet d’accélérer considérablement le processus
de décision de la demande d’intervention à la requalification en demande de travaux.
Comme nous l’évoquions lors de la VSM actuelle réalisée sur ce chantier, le lead-time
entre la demande d’intervention et la requalification en demande de travaux était d’une
26
durée initiale de 11.5 jours. Ce délai, trop long, s’expliquait notamment par un circuit
complexe de validation et de nombreux déplacements de dossiers au sein des différents
services. L’un des obstacles était également budgétaire puisque se posait la question du
budget sur lequel imputer les demandes de travaux, celui du DRP ou de la DCHR ?
Aujourd’hui, toutes ces décisions sont prises, dans la mesure du possible, au cours de la
réunion tripartite et les dossiers sont validés et signés sur place, écourtant le lead-time
actuel à 2.5 jours.

2.1.5 Contrôler

La phase de contrôle s’attache à évaluer l’impact des leviers lean sur la performance et à
identifier les leviers d’amélioration à pérenniser. Elle mesure ainsi les progrès accomplis
sur les différents chantiers via le recueil d’un retour qualitatif du personnel sur les
solutions mises en œuvre et la pertinence ou non de leur pérennisation. Elle identifie et
analyse les écarts entre les objectifs ciblés et les résultats observés. Cette phase a fait
l’objet des derniers COMOP et COPIL de la phase d’accompagnement du CHRU par les
deux cabinets.

Pour exemple, le chantier lean de la formulation de la demande d’achat et


d’approvisionnement du DRP avait pour objectif de clarifier la vision des clients et
d’améliorer la communication clients fournisseurs. Plusieurs actions ont été mises en
place pour répondre à ces objectifs :
- La mise en place d’une réunion bimensuelle tripartite de validation des nouvelles
demandes de référencement composée par le représentant des achats, le
représentant des approvisionnements et un expert technique selon le sujet traité.
Le périmètre de chantier lean achats/approvisionnement a été limité à deux
familles : les fournitures de bureau et les produits d’hygiène et d’entretien ;
- Le « nettoyage » de la base de référencement pour éviter la multiplication des
nouvelles demandes et la complexification du circuit de commande ;
- Le suivi des réclamations clients pour satisfaire davantage les demandes clients,
qui avaient été identifiées comme l’un des dysfonctionnements majeurs de ce
processus lors de la VSM actuelle.

Au dernier COPIL sur le DRP, il a été décidé de poursuivre l’épuration de la base, les
réunions bimensuelles de validation ainsi que le suivi des réclamations des clients, les
résultats étant particulièrement encourageants notamment concernant le traitement plus
rapide de la demande de référencement et la réponse systématique faite au client.
27
Nous l’avons vu, une méthodologie structurée garantit la réussite de l’implantation du lean
management à l’hôpital. Chaque phase est à suivre minutieusement, sinon les bienfaits
de la démarche ne pourront être identifiés aisément. Cependant, la réussite du lean ne
dépend pas uniquement des outils sur lesquels elle s’appuie et d’une structure bien
définie, il s’agit également de fédérer les professionnels hospitaliers autour de la
démarche, dans le but de les accompagner vers l’évolution des pratiques induite par le
lean.

2.2 Le rassemblement de professionnels moteurs autour de la


démarche et la mise à disposition d’outils lean innovants permet
au CHRU de Lille de conduire et d’accompagner le changement

La participation des professionnels de santé à l’implantation du lean est l’élément central


de la démarche. En effet, l’adhésion et l’appropriation par les équipes des différents outils
lean conditionnent sa réussite. Cette adhésion peut être obtenue à la fois par
l’identification d’un leader lean qui fédèrera autour de lui les différents professionnels
(2.2.1) et par la reconnaissance du travail des équipes (2.2.2). Enfin, la mise à disposition
d’outils lean tels que le management visuel, permet d’accompagner les professionnels
vers le changement (2.2.3).

2.2.1 L’identification d’un leader lean, un facteur essentiel de réussite

Le lean induit une évolution des pratiques managériales de l’hôpital. Cette évolution ne
peut se faire sans une adhésion importante des équipes et une appropriation des outils
par les professionnels hospitaliers, qui sont au cœur du changement comme nous l’avons
constaté précédemment.
Cette évolution des pratiques doit être incarnée par un leadership fort et mobilisateur. Le
leadership lean doit susciter l’adhésion, convaincre et diffuser la confiance parmi ses
équipes. C’est une personnalité qui, par son exemple et son dynamisme, parvient à
conduire une équipe vers le changement.

28
La directrice générale du Centre de Santé et des Services Sociaux Jardins Roussillon a
présenté le leadership lors du Colloque Lean de la santé et des services sociaux 2014 à
Montréal de la manière suivante :
« C’est un défi culturel qui dépasse largement la gestion de projet. C’est une démarche
majeure de changement d’un système de gestion des soins et services basé sur 4 piliers :
- Le respect des personnes ;
- La poursuite de l’amélioration continue ;
- La recherche de la performance ;
- La perspective à long terme des actions.»22

La présence d’un leader mobilisateur est essentielle, notamment pour le maintien d’une
dynamique dans un environnement hospitalier souvent agité. Lors d’un entretien avec une
sage-femme cadre, celle-ci m’exprimait le rôle fondamental joué par le chef de pôle lors
de l’implantation de la démarche lean sur le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né. En effet, le
chef de pôle, sensibilisé à la démarche lean au cours de lectures personnelles, a joué un
rôle moteur dans la mise en place de la démarche. Cela a commencé par le volontariat,
puisque, comme détaillé lors de l’introduction de cette analyse, le CHRU de Lille a
privilégié la mise en place du lean sur des périmètres où des managers avaient exprimé
leur souhait d’expérimenter la démarche.
Dans un service de santé, notamment dans une maternité réalisant près de 5600
accouchements par an et, à l’époque, en cours de labellisation Hôpital Ami des Bébés
(HAB), le souhait de développer le lean management était particulièrement ambitieux. En
effet, le label HAB, mis en place à l’initiative de l’Organisation Mondiale de la Santé et de
l’UNICEF garantit la qualité d’accueil des parents et nouveau-nés au sein des
maternités23, il implique pour les établissements qui souhaitent le recevoir, une
réorganisation des soins importante. La disponibilité de l’encadrement était alors une
véritable difficulté et l’adhésion des équipes difficile à obtenir dans un contexte où la
labellisation HAB mobilisait fortement leur quotidien.

Le projet a donc été porté par le chef de pôle, qui, il est important de le souligner, a
bénéficié du soutien de la part de l’encadrement des services concernés.
Le chef de pôle a notamment fréquemment pratiqué le gemba et s’est souvent étonné au
cours de ses visites sur le terrain, auxquelles j’ai régulièrement pu participer, d’apprendre
que les choses fonctionnaient d’une manière bien différente que celle qu’il pouvait avoir à
l’esprit. Sa présence à chacun des comités opérationnels, de même que sa disponibilité

22
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 122.
23
http://amis-des-bebes.fr
29
pour participer à certains ateliers a considérablement encouragé les équipes à s’investir
dans cette démarche. De plus, en participant à des visites extérieures au CHRU et
notamment au Centre Hospitalier de Liège pour y visiter le standard téléphonique, le chef
de pôle s’est ainsi fait le relais d’idées novatrices au sein de son pôle.

Concernant le chantier lean du DRP, la présence de la Directrice du Département aux


comités de pilotage, ainsi que sa volonté de débloquer certaines situations a permis de
faire considérablement avancer les chantiers. A son initiative, un travail de clarification
budgétaire est actuellement en cours entre le DRP et la DCHR, notamment pour éviter
tout blocage budgétaire au moment de la validation des demandes d’interventions.

Leader lean de son établissement, Patrick De Coster énonce sept règles de management
pour conduire le changement au sein de ses équipes24 :
- Montrer l’exemple en restant humble ;
- Etre ambitieux pour le patient qui doit se trouver au centre des préoccupations ;
- Mettre les bonnes personnes à la bonne place ;
- Encourager l’autoqualité par le discernement et la rigueur ;
- Communiquer et rendre les infos visuelles ;
- Soutenir l’apprentissage et la formation ;
- Motiver et aller sur terrain.

2.2.2 La nécessité de valoriser le travail des équipes

La reconnaissance du travail des équipes, au cœur du processus lean est un facteur de


réussite non négligeable de la démarche. Nous l’avons dit, la mise en place du lean
représente un investissement important, notamment en matière de temps. Concernant le
chantier lean au DRP, les deux pilotes du chantier « traitement de la demande
d’intervention requalifiée en demande de travaux », ont souvent insisté sur les bénéfices
que leur avaient apportés le lean management mais ils ont souhaité préciser lors de nos
entretiens le temps important qu’ils avaient dû y consacrer.

Reconnaître cet investissement peut notamment permettre de relancer une dynamique


lean qui pourrait être en train de s’essouffler. C’est notamment le cas au sein du DRP sur
le chantier de la maintenance, à un moment où la dynamique du changement semblait

24
Présentation réalisée lors du séminaire « le lean management à l’hôpital » du Centre Hospitalier
de Beauvais le 30 juin 2015
30
ralentie par des blocages d’ordre budgétaire, la présence et les encouragements de la
Directrice du Département lors d’un comité de pilotage ont permis de relancer une
machine en train de s’enrailler. Présente à la réunion tripartite précédant le comité de
pilotage dont il est question, j’avais pu constater les difficultés de l’équipe de mettre à
profit les outils lean à cause de blocages budgétaires au sujet desquels des
éclaircissements étaient attendus. Les félicitations et encouragements de la direction de
leur département, qui a reconnu leur travail et l’efficacité des outils mis en place en
termes de relation client notamment, ainsi que la garantie d’apporter une solution aux
blocages budgétaires, a rassuré les équipes et a permis d’éviter leur démotivation. De
plus, le déroulement du COPIL dans leur salle de réunion, au milieu des outils lean
visuels mis en place a, fortement participé à la reconnaissance de leur travail.

De même, la reconnaissance institutionnelle du travail mené est tout aussi importante. Un


responsable de la maintenance m’exprimait au cours d’un entretien sa fierté d’avoir été
convié à l’Assemblée Générale des Cadres pour exposer les résultats du chantier lean
mené sur le DRP. La parution d’un article dans le journal de l’établissement a également
été un signal fort de la direction pour saluer le travail mené par les professionnels
hospitaliers.
Pour promouvoir le travail réalisé ainsi que valoriser l’investissement des professionnels
hospitaliers, le CHU de Dinant Godinne a réalisé un film sur la pratique du lean au sein de
leur établissement. Ce film, présenté lors du séminaire du Centre Hospitalier de Beauvais,
est un outil de communication particulièrement intéressant puisqu’il met en image ce qu’il
est parfois difficile d’exprimer de manière plus abstraite. On y voit les équipes lors de
stand-up meeting, l’utilisation de méthodes de management visuel ainsi que des
témoignages de professionnels. La direction de l’établissement n’apparaît à aucun
moment dans cette réalisation, il s’agit de ne mettre en avant que le travail des
professionnels de santé.
Actuellement, la Délégation d’Appui à la Performance du CHRU travaille à la réalisation
d’un outil de communication semblable, auquel j’ai pu apporter une contribution en filmant
un entretien avec le chef de pôle Femme-Mère-Nouveau-Né.

2.2.3 Le management visuel pour conduire et accompagner le changement

Outil support du lean management, le management visuel a pour but de mettre en


évidence les écarts entre la situation dite idéale et la situation actuelle mais il permet
également de rendre plus simple et plus visible tout ce qui peut l’être (mise en place de

31
tableaux de bord, planning, affichage de résultats…) Il n’est pas simplement utilisé dans
un but unique d’affichage, il doit être construit et partagé par tous ceux qui l’utilisent. En
ce sens, il peut être un outil d’animation d’équipe. Le management visuel permet
également l’implication de tous par le partage d’informations, d’avancements et de points
bloquants et peut engendrer la mise en place de plan d’actions préventives et curatives.

En guise d’exemple, le CHRU de Lille a adopté, sur ses deux périmètres lean, des outils
de management visuel.
Au sein du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né, le management visuel a accompagné des
rituels de management mis en œuvre dans le cadre notamment des
chantiers d’amélioration de l’accueil téléphonique des secrétariats médicaux et
d’amélioration de l’organisation interne des soins de jour.
Des réunions hebdomadaires de quelques minutes dites stand-up meeting (réunions
debout annonçant leur durée limitée) dont les objectifs sont de partager les chiffres-clés et
les difficultés de la semaine écoulée, s’appuient sur le management visuel notamment
pour partager les résultats clefs.
C’est notamment le cas dans le bureau des secrétaires médicales où le nombre
d’inscriptions à l’accouchement enregistré la semaine précédente est inscrit en vert s’il est
satisfaisant (objectif fixé à 104 pour une semaine de 5 jours), en rouge s’il ne l’est pas. Y
figure également le suivi détaillé quotidien des appels téléphoniques et du nombre
d’inscriptions sous la forme d’un diagramme.

Le management visuel peut également être utilisé comme support de planification, c’est-
à-dire pour afficher la répartition des activités, c’est notamment le cas pour les soins de

32
jour où l’affichage du planning de la journée permet au personnel soignant de visualiser la
répartition des activités ce qui permet d’optimiser la gestion des salles et diminuer le
temps d’attentes des patientes.

De la même manière, sur le chantier lean de la maintenance au DRP, le management


visuel a été utilisé notamment pour représenter le plan de charge des chargés d’opération
et ainsi mieux répartir les activités entre ces derniers. Ces tableaux sont affichés dans la
salle de réunion du groupe B de la maintenance du CHRU et sont visibles par tous.

Ainsi, le management visuel est un vecteur de transparence au sein des équipes. Il


permet la construction d’une culture collective de la performance et de la transparence
partagée par tous via des supports dont l’utilité est avérée et m’a été rapportée au cours
de chacun des entretiens que j’ai réalisés.

Nous pouvons cependant nuancer ici les bienfaits du management visuel qui peut, dans
certains cas, se révéler déstabilisant pour le personnel. En effet, le management visuel
peut être ressenti comme un contrôle du travail réalisé rendu ensuite public et qui serait
donc vecteur de pression psychologique pour les professionnels de santé. Il peut
également être vécu comme infantilisant, particulièrement pour le visuel de couleur verte
pour mettre en avant, rouge pour alerter. L’importance de la pédagogie et de la
communication à l’intention des équipes prend alors tout son sens.

33
Le lean fait évoluer les habitudes des professionnels hospitaliers et en cela, la
méthodologie employée se doit d’être particulièrement structurée, sans quoi l’attente de
résultats entraînera un désintérêt de la part des professionnels de santé, qui sont eux-
mêmes garants du succès de la démarche. L’exemple du CHRU de Lille permet de tirer
plusieurs enseignements, sur la base des premiers résultats identifiés suite à
l’expérimentation du lean, qui serviront à la mise en œuvre du déploiement de la
démarche à d’autres périmètres au sein de l’établissement.

34
3 Sur la base des premiers résultats du lean
management, le CHRU de Lille tire les enseignements
de son expérience pour assurer la réussite du
déploiement de la démarche à d’autres périmètres

Fort de son expérimentation, le CHRU de Lille est en mesure de tirer plusieurs


enseignements, sur la base des premiers résultats du lean management, qui lui serviront
de guide pour le déploiement de la démarche dans l’établissement. L’expérience du
CHRU a montré d’encourageants résultats mais a également fait apparaître certaines
limites de l’implantation du lean en milieu hospitalier, que la direction de l’établissement
devra anticiper dans la poursuite de sa démarche (3.1). Nous verrons ensuite la nécessité
de proposer une méthodologie de déploiement partagée par tous comme j’ai pu le faire en
tant que chef de projet du déploiement au sein du DRP (3.2). Enfin, nous verrons que le
développement des compétences doit être un axe majeur du déploiement du lean
management, les professionnels de santé se trouvant au cœur de cette évolution des
pratiques (3.3).

3.1 Les premiers résultats de la démarche au CHRU de Lille sont


encourageants mais permettent néanmoins d’identifier les limites
du lean en milieu hospitalier

L’expérimentation du CHRU de lean a donné lieu à de nombreux résultats qualitatifs et


quantitatifs qui permettent de tirer les enseignements de l’application de la démarche en
milieu hospitalier (3.1.1). Ces premiers résultats bien qu’encourageants font apparaître
quelques limites et rappellent notamment l’importance de la méthodologie employée
(3.1.2) et nous permettent de nous interroger sur la possibilité d’étendre le lean dans tous
les champs d’activité de l’hôpital (3.1.3).

3.1.1 Les premiers résultats du lean management au CHRU

Expérimentée depuis la fin de l’année 2014 par le CHRU, le lean management a fait
apparaître un certain nombre de résultats quantitatifs et qualitatifs.

35
Au DRP, les deux périmètres choisis pour expérimenter la démarche ont connu plusieurs
évolutions dont les effets bénéfiques ont pu être identifiés. Sur le chantier maintenance
« traitement de la demande d’intervention requalifiée en demande de travaux », la
principale avancée réside dans la réduction du lead-time de la demande d’intervention,
initialement de 11 jours, celui-ci est de 2.5 jours en moyenne aujourd’hui. Ce gain de
temps a été rendu possible grâce notamment à la réduction du circuit des signatures, les
dossiers étant signés au cours de la réunion tripartite, et à la validation de l’opportunité de
la demande d’intervention avant le commencement du montage du dossier. Aujourd’hui,
un dossier ne peut faire l’objet d’une présentation en réunion tripartite sans que son
financeur et son budget aient été identifiés au préalable. De plus, le chantier lean a
permis d’améliorer l‘interface avec la DCHR, qui dispose d’un budget pour les petits
travaux d’entretien (PTE) et qui est aujourd’hui systématiquement représentée lors des
réunions tripartites hebdomadaires. La relation client a également été améliorée car
aujourd’hui les réclamations font l’objet d’un suivi à travers un fichier de réclamations.
Lors d’un entretien avec la cadre supérieure du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né, alors
que nous parlions du lean sur son périmètre, celle-ci s’est félicitée de l’expérimentation du
lean sur la maintenance et a constaté un changement de pratiques puisqu’elle est
aujourd’hui systématiquement informée des suites données à chacune de ses demandes
d’intervention. Enfin, l’utilisation du management visuel permet au groupe de maintenance
d’établir le plan de charge entre les différents chargés d’opération.

Sur le chantier de la formulation de la demande d’achat/approvisionnement, des résultats


sont également identifiables. La base de référencement est en cours d’épuration et la
validation de l’opportunité des nouvelles demandes de référencement se fait au cours des
réunions bimensuelles évoquées plus tôt dans cette étude, en présence d’un expert
technique (en l’espèce, une conseille en hygiène de la DCHR. De plus, la relation client
connaît une importante évolution puisqu’aujourd’hui, la date de livraison du produit au
sein du logiciel de commande n’est plus la date de livraison au magasin logistique, ce qui
entraînait auparavant une importante insatisfaction de la part des services qui croyaient à
un retard, mais la date prévisionnelle de livraison au sein du service. Les réclamations
clients sont aujourd’hui systématiquement tracées dans un fichier de réclamation, 53
réclamations ont été ainsi tracées en 1.5 mois.25

Sur le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né, des évolutions dans les pratiques ont donné lieu à
d’importants résultats.

25
Résultats identifiés entre mi-mai et début juillet 2015 par le fichier de suivi des réclamations.
36
Le chantier concernant l’hôtellerie dans les suites de naissance a notamment permis une
nette amélioration dans le service des petits déjeuners servis aux patients suite à un
partage d’idées avec les aides-soignantes/auxiliaires de puériculture et le service
restauration. Cette amélioration s’est mise en place de manière à ne pas complexifier les
conditions de travail du personnel en charge de la distribution du petit-déjeuner et donne
satisfaction aux patientes comme l’ont démontré les résultats d’un questionnaire de
satisfaction dans le service.26 En effet, le petit-déjeuner atteint la note de 4.3/5, soit un
point supplémentaire par rapport au précédent questionnaire proposé en 2013. De plus,
les patientes déjà venues pour un autre accouchement sont 7/10 à avoir remarqué un
changement dans la qualité du petit déjeuner comme en témoignent les photos ci-
dessous. La première photo représente le petit déjeuner avant le lean, et la seconde le
résultat après l’expérimentation de la démarche lean sur le secteur.

Ce chantier a également permis de lutter contre les gaspillages à travers la mise en place
d’une fiche à l’intention des patientes qui leur permet de choisir ce qu’elles souhaitent

26
Questionnaire réalisé en août 2015 par la Délégation au Marketing, à l’Attractivité et aux
Relations aux Usagers du CHRU.
37
pour le petit déjeuner; le gaspillage de nourriture est donc moindre et les patientes sont
plus satisfaites par cette liberté de choix.
Au-delà du petit-déjeuner, le lean dans le service des suites de naissance a permis de
décloisonner certaines pratiques et d’amener les services de soins et l’hôtellerie à
travailler ensemble, chacun comprenant les contraintes de l’autre.

Sur le chantier lean de l’organisation des soins de jour, la planification des activités s’est
améliorée grâce au management visuel notamment, comme nous l’avons évoqué
précédemment dans cette étude. De plus, un important travail de réorganisation des
activités de soins de jour est en cours grâce à la mise en place d’un groupe de travail dont
l’intérêt collectif est d’améliorer davantage la qualité de la prise en charge des patientes.

Enfin, le chantier lean concernant l’organisation des secrétariats médicaux de gynécologie


et d’obstétrique a permis de développer une culture du résultat au sein des secrétariats
médicaux puisque la communication hebdomadaire des indicateurs d’inscriptions est
aujourd’hui effective. L’augmentation du taux d’appels décrochés est importante
27
puisqu’elle est passée de 56% à 67%. Le développement de la culture du résultat a
également permis aux équipes de s’investir davantage dans la proposition de solutions
d’amélioration, notamment concernant le changement de script pour orienter les
patientes. Le lean a mis à disposition de l’encadrement des secrétariats médicaux des
outils de performance, à utiliser prudemment, l’objectif n’étant pas de surveiller les
secrétaires et de dévaloriser celles dont le nombre de décrochés serait insuffisant.

Si des résultats qualitatifs et quantitatifs sont identifiés, il est important de rappeler que le
lean à l’hôpital est une démarche nouvelle dont l’application est relativement récente et
dont les bénéfices à moyen terme seront à évaluer au regard de la capacité à maintenir
les innovations.

3.1.2 Les limites du lean à l’hôpital : une attention particulière portée à la


méthodologie

Le CHRU de Lille a choisi d’implanter le lean management via l’installation de différents


chantiers lean. Cette approche par « secteur » lean est principalement justifiée par la taille
de l’établissement qui ne permet pas une application immédiate de la démarche sur la

27
Evolution mesurée entre fin 2014 et juin 2015.
38
totalité de l’établissement. Cette approche par secteur, si elle paraît justifiée pendant la
période d’expérimentation, présente cependant quelques limites.

Les spécialistes de l’implantation du lean management à l’hôpital, dont fait partie Patrick
De Coster, Directeur du CHU de Dinant Godinne, hôpital qui emploie le lean management
depuis près de six ans, s’accordent à dire que le lean doit être un « changement total de
culture »28. Le risque d’une approche par secteur serait alors que le changement ne soit
pas total et que l’évolution des pratiques promue par le lean ne puisse être diffusée dans
la totalité de l’établissement.
Patrick De Coster explique que la taille de l’établissement ne doit pas être un obstacle à la
diffusion de ce changement de pratique. Il interpelle sur le danger de la « mode lean »
comme cela a pu exister aux Etats-Unis et qui conduit souvent à un échec de la
démarche et ainsi à une forme de scepticisme des professionnels hospitaliers sur les
nouvelles méthodes de management. Il m’a également exposé au cours d’un entretien
qu’il s’était attaché à recruter un Directeur des Ressources Humaines prêt à s’engager
dans le lean management et à suivre une démarche mise en place depuis six ans au sein
de l’établissement. Patrick De Coster parle ainsi de « contamination positive »29
encourageant, à chaque entretien de recrutement, que le lean fasse partie des critères
de sélection. La méthode lean du CHU de Dinant Godinne a consisté à poursuivre ses
activités mais avec une méthode totalement différente qu’est le lean management.

L’approche du CHRU de Lille se base d’abord sur un temps d’expérimentation et


d’ajustement avant un déploiement plus généralisé, cependant le risque est de voir la
dynamique s’essouffler dans l’établissement, notamment à cause de la disparité du
niveau de formation lean d’un service, voire d’une direction à l’autre. L’un des objectifs du
lean étant de faire de chaque membre du personnel un « résolveur de problème »,
l’évolution globale des pratiques managériales dans la totalité de l’établissement est donc
un facteur essentiel de réussite.

Nous pourrions ici suggérer que la totalité de l’équipe de direction du CHRU de Lille soit
formée au lean management et aux outils afin que soit diffusée plus largement et
équitablement la méthode au sein de l’établissement. De la même manière, à l’image
d’autres établissements, des séminaires de direction pourraient être organisés sur la
thématique du lean pour permettre un échange et des partages d’expérience entre
directions sur les outils employés, les succès et échecs de la démarche lean sur les
différents secteurs. En effet, et ce malgré la communication interne sur la démarche,
28
Propos recueillis lors d’un entretien téléphonique avec Patrick De Coster.
29
Ibid.
39
seuls le DRP, le pôle Femme-Mère-Nouveau-Né et la DAP sont concernés aujourd’hui
par le lean management, ce n’est donc pas la majorité du CHRU et de nombreux
professionnels ignorent encore ce qu’est le lean.

La structure de ce séminaire de direction pourrait être organisée pour répondre aux


interrogations suivantes :
- Quelle est la vision de l’équipe de direction de l’établissement après un
déploiement global du lean management ? ;
- Quelles valeurs l’équipe de direction veut-elle diffuser au sein de
l’établissement ? ;
- Quels sont les objectifs prioritaires ? ;
- Quelle structure adopter ? ;
- Quel plan de formation faut-il prévoir ? ;
- Comment communiquer ? ;
- Comment coordonner les chantiers d’amélioration continue en place
(certification HAS, certification des comptes, démarche qualité) avec le lean
management ? 30

Ces échanges et partages d’expériences peuvent également être réalisés avec d’autres
établissements, à l’image du CH de Beauvais qui a organisé un séminaire sur le lean et a
invité tous les établissements de santé de France pour échanger sur la mise en place du
lean à l’hôpital. Ainsi, dans le cadre d’un Comité de Performance, j’ai suggéré que la
thématique du prochain séminaire organisé par le CHRU et à destination d’établissements
extérieurs soit le lean management à l’hôpital.

La superposition des chantiers d’amélioration continue à l’hôpital aujourd’hui constitue


une opportunité de perfectionner la qualité des soins et la prise en charge des patients,
elle permet également de certifier la gestion budgétaire de l’établissement et en cela,
concourt à son efficience et à sa performance. Cependant, la multiplication de ces
démarches brouille l’environnement hospitalier et génère un certain nombre de
contraintes qu’il est parfois difficile pour les professionnels hospitaliers d’accepter.
Anticiper les limites du lean en milieu hospitalier c’est alors pouvoir expliquer la place du
lean management au milieu de la certification HAS, de la certification des comptes et de
toutes les autres démarches institutionnelles d’amélioration de l’efficience (programme
d’actions Horizon 2020, base d’Angers...). Le lean management peut ainsi être présenté
comme un support non contraignant d’amélioration continue, fournissant des outils

30
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 134.
40
simples d’utilisation et accessibles par tous dans le but de mettre en place un référentiel
partagé et des axes d’améliorations qui résultent d’un travail en équipe.

3.1.3 Partout, le lean ?

L’implantation du lean management ne peut être la solution à tous les problèmes de


l’hôpital. Il doit se concentrer sur des processus identifiables dont les dysfonctionnements
et leurs causes sont partagés par tous mais doit également être attentif aux obligations
qui incombent aux hôpitaux et à leurs particularités. Le danger est que les standards
véhiculés par le lean management puissent contrevenir à certaines de ces
caractéristiques spécifiques de l’hôpital, notamment concernant les conditions de travail
du personnel hospitalier et la prise en charge des patients.

En effet, plusieurs analyses se sont attachées à mesurer les résultats obtenus par le lean.
31
C’est notamment le cas de l’analyse d’Holden en 2011 qui a évalué les résultats du
lean dans les services d’urgences. Ces résultats, éminemment positifs, démontrent une
amélioration globale dans la prise en charge des patients (augmentation du nombre de
consultations, diminution du temps d’attente, meilleure satisfaction des patients). Ces
résultats sont cependant à nuancer car ils ne concernent que les services d’urgence, dont
le fonctionnement n’est pas toujours représentatif de celui des autres services mais
également parce que ces analyses se concentrent sur l’amélioration de la prise en charge
du patient mais pas sur l’amélioration des conditions de travail du personnel hospitalier.

Le lean est une méthodologie dont l’application stricte à l’hôpital peut être dangereuse car
elle peut conduire à une rationalisation des activités qui ne peut être appliquée strictement
à l’hôpital, comme nous l’avons évoqué dans la première partie de cette étude. C’est
pourquoi, les établissements de santé, et donc le CHRU doivent alors être attentifs à ne
pas s’éloigner des objectifs d’amélioration de la prise en charge des patients et des
conditions de travail du personnel. Patrick De Coster, Directeur du CHU de Dinant
Godinne, avoue lui-même l’erreur faite par son établissement d’avoir initialement centré
son approche uniquement sur le lean process, ou lean des processus, et non sur le
développement des compétences et l’implication des cadres. Leurs actions étaient
davantage centrées sur l’amélioration de l’organisation et non sur le patient.
Les établissements traditionnellement davantage centrés sur les soins que sur leur
destinataire ont d’ores et déjà entamé un virage important en replaçant le patient au cœur

31
HOLDEN R.J. « Lean thinking in Emergency Departments: A critical review », Annals of
Emergency Medecine, 57 (3), 2011, pp 265-278.
41
de la prise en charge : chirurgie ambulatoire, parcours et filières de soins, etc. Le lean
participe à cette évolution des pratiques à laquelle les établissements doivent rester
attentifs pour garantir la qualité de la prise en charge du patient et des conditions de
travail du personnel.

3.2 L’animation du déploiement de la démarche lean au DRP en tant


que chef de projet

L’expérimentation du CHRU de Lille a permis de tirer les enseignements concernant


notamment la méthodologie du déploiement de la démarche lean que j’ai animé en tant
que chef de projet au sein du DRP à travers la proposition d’une équipe lean (3.2.1) et
l’extension à de nouveaux secteurs (3.2.2)

3.2.1 La mise en place d’une équipe lean au sein du DRP

La phase de déploiement est une phase dite « critique » de la démarche lean puisqu’une
fois la phase d’accompagnement et d’expérimentation achevée, le lean management doit
trouver sa place au milieu des nombreux projets hospitaliers et maintenir la dynamique
connue lors de son expérimentation.
Pour les raisons précédemment citées, la structuration claire et partagée par tous du
déploiement est un facteur essentiel de la réussite et de la pérennisation du lean.
La structuration de la gouvernance lean au sein du CHRU a été présentée comme
l’indique le schéma ci-après.

42
Au cours de mon stage long, la structuration et le pilotage du déploiement de la démarche
lean au sein du DRP m’ont été confiés en tant que chef de projet. Comme précisé au
cours de la seconde partie, l’animation de la démarche est un élément essentiel de son
succès, c’est pourquoi je me suis attachée à redéfinir le rôle de chacun afin de constituer
une « équipe lean » au DRP, garante de son déploiement.

A l’image de certaines entreprises (notamment Renault Maroc) qui disposent de service


lean identifié, la constitution d’une équipe lean au sein du DRP permet l’identification des
personnes « clefs » œuvrant pour sa mise en place et son déploiement, et rappelle à
chacun son rôle.

J’ai structuré l’équipe lean DRP de la manière suivante :

- Le coordonnateur lean : Il coordonne le portefeuille lean du DRP, il est le garant


de la mobilisation interne autour de la démarche. Il est également le relais entre la
DAP et les secteurs lean du DRP. Il a également un rôle de communication interne
plus particulièrement à travers la présentation de l’état d’avancement de la
démarche en réunion de direction du DRP et dans les instances concernées.

43
J’ai proposé que la Directrice adjointe du Département des Ressources Physiques
soit identifiée coordonnatrice lean du DRP.

- Le référent lean : Il est formé à la méthode lean par la DAP. Il peut aider les
pilotes (dont le rôle est décrit ci-après) dans l’animation des ateliers et peut former
aux outils. Il assure le suivi des points hebdomadaires ainsi que le suivi des
secteurs lean dans les COPIL.
J’ai ainsi identifié trois référents lean au DRP : le Directeur des
Approvisionnements, de la Logistique et de la Fonction Linge, l’adjoint au Directeur
des achats, le Directeur technique adjoint à la Direction des Travaux, de la
Maintenance, des Equipements et de l’Exploitation.

- Le pilote lean : Formé aux outils lean, le pilote anime le suivi du plan d’action sur
le secteur concerné. Il prépare et anime les réunions hebdomadaires et présente
les avancées du chantier au référent lean.
J’ai identifié en tant que pilotes lean les responsables de groupes sur le chantier
maintenance, le responsable des approvisionnements sur le chantier
approvisionnement, le responsables blanchisserie et la responsable de la
distribution sur le chantier blanchisserie ;

En collaboration avec la Directrice de la DAP, nous avons rappelé, dans le cadre de la


conduite de projet du déploiement de la démarche, que l’équipe lean DRP s’appuie sur la
Délégation d’Appui à la Performance qui intervient en tant qu’appui méthodologique et qui
gère le portefeuille de projets lean pour la totalité de l’établissement. La DAP peut former
aux outils Lean et constitue un soutien dans l’animation de groupe si des difficultés sont
rencontrées. Elle contribue à l’organisation et l’animation des COPIL. Elle assure
également le reporting auprès de la Direction Générale de l’établissement et devant les
instances du CHRU.

Le comité de pilotage lean DRP assure le suivi des chantiers lean et permet d’échanger
sur les avancées ainsi que sur les points bloquants. Je me suis attachée à définir sa
composition pour l’avenir : DAP, Direction du DRP, coordonnateur et référents lean,
pilotes, représentant qualité et gestion des risques, équipes opérationnelles selon l’ordre
du jour.

44
Lors d’une rencontre concernant la structuration du déploiement du lean en présence de
la direction du DRP et de la DAP, nous avons fixé le calendrier suivant pour les mois à
venir :
- Arbitrage des nouveaux chantiers lean au cours de l’été ;

- Organisation de COPIL toutes les six semaines ;

- Reporting régulier aux instances : CHSCT, Collège des chefs de pôles, Bureau de
Performance, bilan annuel CME, etc ;

- 1er bilan du déploiement lors du dernier COPIL en 2015.

3.2.2 L’extension à de nouveaux secteurs

Une fois le calendrier défini, mon attention s’est portée sur la définition du prochain
chantier lean DRP. Tout d’abord, j’ai proposé qu’au-delà de la poursuite des actions
engagées, le lean management s’étende au sein des mêmes secteurs.

Concernant le chantier maintenance, l’objectif est de pérenniser le travail réalisé, de


poursuivre les actions en cours et de s’assurer qu’il n’y ait plus de points bloquants,
particulièrement d’ordre budgétaire. Etant donné les résultats positifs, j’ai suggéré que
l’implantation du lean management soit étendue à deux autres groupes de maintenance.
J’ai souligné le fait qu’étendre ne voulait pas dire dupliquer et que chaque groupe avait
ses spécificités. Ainsi, la méthode lean sur le groupe A ne peut être identique à celle
pratiquée sur le groupe B, la réalisation de la VSM actuelle permettra notamment de
visualiser les différences et d’adapter le plan d’actions.

Concernant le chantier achats/approvisionnements, j’ai, de la même manière, proposé de


poursuivre le travail sur la méthodologie de référencement et l’épuration du catalogue
ainsi que l’amélioration du traitement des réclamations. De plus, j’ai suggéré d’étendre ce
travail aux produits de la famille blanchisserie, puisque nous avions identifié au cours de
réunions de travail un certain nombre de points d’amélioration sur cette famille de
produits.

Constatant le succès de la méthodologie sur ces secteurs et après avoir proposé leur
extension au sein des mêmes périmètres, j’ai suggéré le démarrage d’un nouveau
chantier lean sur la blanchisserie et notamment sur la préparation des commandes à
distribuer aux services. Cette proposition est l’aboutissement de rencontres des différents
directeurs techniques du DRP dont l’objet était de recenser les thématiques qui pourraient
45
être améliorées par le lean management. J’ai proposé le secteur de la distribution en
blanchisserie car j’ai constaté que l’encadrement était en demande d’outils pour
accompagner une évolution des pratiques nécessaire dans un contexte de préparation à
la vente de prestations à des clients externes impliquant une hausse de la production et le
respect d’engagements qualité vis-à-vis des clients.
L’objectif de ce chantier lean est d’améliorer les flux et l’espace, et notamment la
préparation de commandes réalisées à l’intention des services de soins. Le référent pour
ce nouveau chantier est le Directeur des Approvisionnements, de la Logistique et de la
Fonction Linge et les deux pilotes sont le responsable de la blanchisserie et la
responsable du secteur de la distribution. J’ai rappelé l’importance de l’accompagnement
de la DAP tout au long du processus car les pilotes n’ont pas de connaissance de la
démarche.

A ce jour, le chantier lean en blanchisserie est dans sa phase de définition. J’assiste la


DAP dans la réalisation des entretiens avec tous les acteurs du processus de préparation
des commandes. De plus, j’organise des visites de terrain pour analyser les flux et
comprendre les interfaces. Enfin, suite aux entretiens, je programme avec le concours de
la DAP des rencontres avec toutes les structures qui sont en interface avec le service de
la distribution dans le but de comprendre l’intégralité du processus, notamment avec la
DCHR et le service des transports. J’ai suggéré que plusieurs groupes de travail soient
mis en place selon les thématiques (dotations de linge, transport/livraison, organisation
des lingeries de site, etc.). Il faut cependant être attentif au sein de ces groupes de travail
à garder une vision transversale de l’activité et à ne pas cloisonner les différentes
thématiques. La conception partagée de la VSM cible permet d’éviter cet écueil
puisqu’elle rappelle la totalité des phases et interfaces du processus. Les VSM actuelle et
cible sont programmées au cours du mois d’octobre et le lancement du plan d’action au
mois de novembre.

3.3 La promotion du développement des compétences est un axe


indispensable du lean management

Nous l’avons dit, le lean à l’hôpital repose sur une évolution des pratiques managériales
des professionnels d’un établissement de santé. Celle évolution doit notamment se
traduire par l’implication de la Direction des Ressources Humaines, garante du
développement des compétences au sein de l’hôpital (3.3.1), notamment à travers la
formation des professionnels (3.3.2).
46
3.3.1 Le développement des talents

Le rôle de la Direction des Ressources Humaines est essentiel dans la mise en place du
lean management car le développement des compétences est au cœur de la réussite de
cette démarche et plus particulièrement de son déploiement. Rappelons ici que Patrick De
Coster avouait avoir négligé, au démarrage de son expérience lean, le développement
des talents. 32

Pour rappel, « La compétence est l’ensemble des caractéristiques individuelles :


connaissances, aptitudes, et attitudes qui permettent à une personne d’exercer son
activité de manière autonome, de perfectionner sans cesse sa pratique et de s’adapter à
un environnement en mutation rapide. »33

Dans les établissements de santé, plus encore qu’ailleurs, les compétences humaines,
patrimoine social de l’hôpital, ont une place prépondérante, notamment dans la prise en
charge des patients et dans l’interface avec les clients internes. Le développement des
compétences permet de faire de chacun « un résolveur de problème » et doit être pensé
en parallèle de l’implantation du lean, et non comme une étape postérieure à la
démarche. Nous l’avons vu, le lean implique une évolution des pratiques, mais pour cela,
les professionnels de santé doivent être formés à l’identification des gaspillages et
dysfonctionnements et donc aux outils lean.

La résistance au changement est un élément à ne pas négliger lors de l’implantation du


lean management. Le CHRU de Lille en a lui-même fait l’expérience, lors de la
présentation de la démarche devant les instances de l’établissement, mais également au
sein même des ateliers dans les services.
Les freins au changement peuvent être nombreux : opposition politique, nous entendons
souvent que « le lean est une méthode industrielle inapplicable à l’hôpital sans
détérioration de la qualité des soins et des conditions de travail », opposition face à
l’emploi d’une technique nouvelle, peur de voir la relation de soin se déshumaniser, peur
de perdre du « pouvoir », et opposition personnelle (incidence négative du lean sur un
proche).34

32
Propos recueillis lors d’un entretien téléphonique avec Patrick De Coster.
33
FERMON B. et GRANDJEAN P., Performance et innovation dans les établissements de santé,
éd. DUNOD 2015, pp 106.
34
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 126.
47
Cette résistance au changement est notamment présente au sein des organisations
syndicales, comme évoqué au cours de la première partie de cette étude. Il pourrait donc
leur être proposé de participer à une formation lean, dans le but de leur présenter la
méthode et les outils. En effet, la pédagogie est un facteur fondamental de la réussite du
lean puisqu’il conditionne l’adhésion des équipes. Au CHRU de Lille, la présentation de
l’état d’avancement des chantiers dans les différents CHSCT de l’établissement permet
également de rassurer les mandatés.
En émanant des professionnels de santé eux-mêmes, les plans d’action ont davantage de
chance de rencontrer le succès escompté et le lean de s’installer durablement. Comme le
précise Patrice Marvanne, consultant en management et organisation, en charge de
nombreuses formations d’établissements de santé au lean management, développer les
compétences c’est apprendre à ne pas répondre à l’interpellation « j’ai un problème » par
« je m’en charge » mais plutôt par « réfléchissons-y ensemble »35. Il faut donc valoriser
les équipes et leur fournir le moyen de pouvoir devenir eux-aussi, des résolveurs de
problèmes.

3.3.2 La formation

«Vous pensez que la formation coûte cher ? Essayez l’ignorance !», cette citation
d’Abraham Lincoln nous rappelle que la formation est un investissement auquel les
établissements de santé sont particulièrement attentifs et qui doit ainsi faire partie de la
boîte à outils lean.

Pour rappel, la formation professionnelle est un « levier de la promotion sociale et


professionnelle – comme un investissement et non une charge pour les entreprises car
les compétences et les qualifications des salariés sont des facteurs de compétitivité »36.
L’hôpital a pris la mesure de l’importance de la formation et du levier fondamental qu’elle
constitue notamment depuis la mise en place de la Formation Tout au Long de La vie en
2007 mais également à travers la loi Hôpital Patients Santé et Territoire37 qui a fait
émerger le Développement Professionnel Continu (DPC) dont les objectifs sont
« l'évaluation des pratiques professionnelles, le perfectionnement des connaissances,

35
MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, pp 117.
36
Loi n°2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la
démocratie sociale
37
Loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé
et aux territoires.
48
l'amélioration de la qualité et de la sécurité des soins ainsi que la prise en compte des
priorités de santé publique et de la maîtrise médicalisée des dépenses de santé ». 38

L’hôpital doit donc s’appuyer sur ces dispositifs de formation existants pour accompagner
vers le changement. En effet, le lean requiert des compétences en matière de détection
de dysfonctionnements et de gaspillages, de gestion de projet, de communication mais
également d’analyse d’indicateurs qui doivent être développées et consolidées dans le
cadre de la formation continue.
La méthodologie de déploiement de la démarche lean au sein du pôle Femme-Mère-
Nouveau-Né s’est attachée à former plusieurs référents lean. Une première formation a
été réalisée, sur la base du volontariat par le cabinet accompagnant le pôle. A ce jour, un
projet de formation lean est en cours d’élaboration entre la DAP et le DRH. L’objectif est
de proposer une formation interne, dispensée par la DAP, avec la possibilité d’approfondir
les connaissances sur une formation externe. La prise en compte de cet élément
essentiel qu’est le développement de tous les talents de l’hôpital est un facteur permettant
de distinguer un établissement qui suivrait la méthodologie lean par effet de « mode »
d’un établissement dont l’objectif serait de se transformer progressivement.

Le décryptage du modèle Toyota permet ici de poser les bases de la transmission de


compétences au sein d’un établissement et dont le CHRU pourra s’inspirer lors de la
définition de sa formation. En effet, la transmission des compétences doit répondre aux
questions suivantes :

- Préparer la structure (besoins organisationnels, plan de formation, sélection


des formations) ;
- Identifier les connaissances fondamentales ;
- Transmettre les connaissances ;
- Vérifier l’apprentissage et la performance.

De même, la formation fait partie d’une boîte à outils plus globale encore, qui peut
également se composer de guides méthodologiques (partage des bonnes pratiques,
standards, outils et méthodes…), ou encore de la définition d’un processus de
labellisation lean qui pourrait encourager et valoriser le travail des équipes.

L’évaluation des compétences est également un élément essentiel du développement des


professionnels de santé. Ces compétences étant diverses, elles doivent faire l’objet
d’évaluation afin de mesurer le besoin d’accompagnement d’un professionnel

38
Article L 4133-1 du code de la santé publique
49
éventuellement en difficulté et elles doivent ainsi s’inscrire dans la démarche plus globale
d’évaluation des pratiques professionnelles (EPP) et de développement professionnel
continu (DPC), présents à l’hôpital.

50
Conclusion

Les notions de performance et d’efficience sont aujourd’hui inhérentes au fonctionnement


des établissements de santé. Dans un contexte budgétaire et un environnement
concurrentiel toujours plus contraints, les hôpitaux sont de plus en plus nombreux à
s’inspirer de méthodes nouvelles pour l’hôpital, principalement issues du secteur privé,
pour faire évoluer leurs pratiques de management.
Ce décloisonnement des pratiques agrémente le management hospitalier, participant
ainsi à la pérennisation de notre système de santé public.

Le lean management enrichit à ce titre la culture hospitalière. Il ne doit cependant pas


s’exercer aux dépens des obligations qui incombent à nos établissements de santé. Le
lean hospitalier ne peut être le lean de Toyota et doit respecter les spécificités de
l’environnement hospitalier : permanence des soins, établissement de recours, impératifs
règlementaires de sécurité, personnel dont la charge psychologique est lourde, etc.

Le lean management n’est pas une méthode miracle et doit faire l’objet d’un important
travail de pédagogie, de définition et d’évaluation pour parvenir à atteindre les objectifs
qu’il s’est fixé. Il doit être l’opportunité pour les établissements de santé de bousculer
leurs habitudes, par la pratique régulière du terrain et du management participatif, axé sur
le développement des compétences de chacun.

Enfin, le lean management apporte avant tout, par son origine, un regard nouveau au sein
des établissements hospitaliers. Il a été salué par tous les professionnels médicaux et non
médicaux rencontrés dans le cadre de la réalisation de cette étude qui, d’abord contraints
de s’interroger sur leurs propres pratiques, ont pu participer ensuite collectivement à la
mise en œuvre de chantiers d’amélioration continue composés d’actions dont ils ont eux-
mêmes été instigateurs.

En tant que future Directrice d’hôpital, l’analyse du lean management m’a permis de
mesurer la nécessité d’accompagner les professionnels de santé vers l’évolution des
pratiques induite par les impératifs de performance et d’efficience. La pédagogie et la
valorisation du travail des équipes à travers la mise à disposition d’outils simples tels que
la VSM ou encore le management visuel sont des facteurs fondamentaux de réussite sur
lesquels le Directeur d’hôpital peut s’appuyer pour impulser une dynamique et conduire le
changement.

51
Cette valorisation des compétences des professionnels hospitaliers en tant que
« résolveurs de problèmes » chasse donc le gaspillage ultime identifié par la méthode
lean « la perte du potentiel humain » et participe ainsi à la préservation et au
développement du patrimoine social de l’hôpital, dont le Directeur d’hôpital se doit d’être
le garant.

52
Bibliographie

Références juridiques

Loi n°2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la
santé et aux territoires ;

Loi n°2014-288 du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la


démocratie sociale ;

Article L-4133-1 du code de la santé publique.

Ouvrages

WOMACK JP. & Jones D., The machine that changed the world, Freepress, 1990, 352p;

OVRETVEIR J., STAINES A., L’amélioration de la valeur dans les services de santé,
Springer 2011,183p ;

HOHMANN C., Lean management, Eyrolles, 2012, 243p;

BALLE M. & BEAUVALLET G., Le management lean, Editions Pearson, 2013, 192p;

MARVANNE P., Le lean à l’hôpital, Les études hospitalières, 2014, 196p;

FERMON B. et GRANDJEAN P., Performance et innovation dans les établissements de


santé, éd. DUNOD 2015, 456p.

Rapports

ENA, Promotion Aristide Briand, groupe n°15, L’efficience et la performance hospitalière,


février 2008.

53
Revues et articles de presse

HOLDEN R.J. « Lean thinking in Emergency Departments: A critical review », Annals of


Emergency Medecine, 57 (3), 2011, pp 265-278.

RADNOR Z., «Lean in healthcare: the unfilled promise? », Social Science & Medicine, 74
(3), 2012;

Mediapart, « CHU de Toulouse, la direction plébiscite le lean manufacturing », 8 mars


2013 ;

PHANEUF M., « L’approche lean : entre louanges et questionnements », Prendre soin,


novembre 2013 ;

NOBRE T., « Gestion des hôpitaux : n’ayons plus peur du management ! », Le Monde, 05
mai 2014.

Mémoires EHESP

MARGAIN, P., Engager une démarche lean à l’hôpital - un cas pratique : le transport
externe des patients, décembre 2014.

54
Liste des annexes

Annexe I : Liste des personnes interrogées

Annexe II : Charte-projet du lean management du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né

Annexe III : Exemple d’un tableau de bord de suivi d’un chantier lean
ANNEXE I

Liste des personnes interrogées

- Directeur Général du CHU de Dinant Godinne ;


- Chef du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né ;
- Cadre sage-femme supérieure du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né ;
- Secrétaire médicale en gynécologie ;
- Directrice du Département des Ressources Physiques ;
- Directrice adjointe du Département des Ressources Physiques ;
- Déléguée d’Appui à la Performance ;
- Référents lean de la DAP ;
- Directeur de l’Approvisionnement, de la Logistique et de la Fonction Linge ;
- Responsable des approvisionnements ;
- Responsable de la blanchisserie ;
- Responsable de la distribution en blanchisserie ;
- Coordinateur de groupe de maintenance ;
- Responsable de maintenance.
ANNEXE II
Charte projet au démarrage du chantier lean « Organisation des soins de jour » du pôle Femme-Mère-Nouveau-Né

Exigences critiques de la patiente Enoncé de l’opportunité


Temps d’attente global perçu cohérent par rapport au Déployer une démarche d’amélioration continue sur le processus de prise en charge
contenu de la prise en charge des patientes en hôpital de jour et soins externes
- Optimisation du temps associé à chacune des étapes du
parcours de la patiente : convocation – orientation –
prise en charge administrative – prise en charge P1 – P2
– P3 – P4 – conclusion de la prise en charge et
autorisation de sortie
Besoin de réception de l’ensemble des prélèvements
avant 12h par le laboratoire génétique

Indicateurs de mesure de la performance Périmètre


Objectifs : Les soins de jour regroupent plusieurs activités (6 au total) de types variés (activités
Fluidifier le parcours de la patiente dans les soins de jour programmées, non programmées…). Ils sont réalisés sur des lieux distincts par une
et limiter ses temps d’attente même équipe, et sont souvent dépendants d’autres équipes de soins. Plusieurs
Optimiser l’organisation de chacune des étapes du dysfonctionnements liés à l’organisation de ces activités apparaissent (gestion des
parcours de la patiente en améliorant la coordination rendez-vous non informatisée, temps d’attente important des patientes,
entre les acteurs aménagement des locaux peu efficace…) et sont sources d’insatisfaction de la part des
Indicateurs hebdomadaires : patientes, qui sont mal orientées, mais également de la part des médecins et des
•Délai global de prise en charge de la personnels.
patiente Périmètre d’étude : hôpital de jour et soins esxternes
•Taux de satisfaction de la patiente
•Heure d’arrivée du dernier prélèvement
Plan d’action à définir Equipe projet à définir
ANNEXE III
Tableau de bord du chantier lean « Accueil téléphonique des secrétariats médicaux gynécologie et obstétrique » du
pôle Femme-Mère-Nouveau-Né
Projet 2. accueil téléphonique aux secrétariats médicaux gynécologie et obstétrique
Faits marquants du mois Risques / points de vigilance
N° Nature du risque Criticité
• Présentation commune des indicateurs aux équipes des 2 cliniques
(septembre) 1. Gestion des chiffres et présentation aux équipes ++++
• Avancée charte graphique (projet d’un modèle unique de convocation avec
création d’un mémo des n utiles) En l’absence d’indicateurs -> pas d’action -> des chiffres qui
2. ++
• Baisse des ERDV en gynéco : reflet d’un meilleur taux de prise d’appels stagnent
• Meilleure fluidité d’appels en gynéco Ressenti d’un manque de soutien du chef de service dans la
• Avancée dans la modification du message répondeur (validation équipe en 3.
démarche pour la gynécologie
++++
cours puis pilote du projet) en Obstétrique
• Proposition de levée du message en cas de ligne dispo avec rédaction d’un
nouveau message Gains
Suivi des chantiers en cours Description du gain Criticité

Chantiers Situation Remarques Mise en place d’une cible (appels) et appropriation des termes
d’efficience – imprégnation de la culture du chiffre
1. Ajuster les RH à la charge d’appel En cours
Prise de conscience d’un bénéfice apportée à la patiente
SILLAGE WEB avec possibilité Augmentation du taux de prise d’appels
2. Faciliter la prise de rdv
d’intégrer les ERDV

3. Réviser les chartes graphiques liées à la Difficultés à traiter au niveau du pôle


communication des n° de téléphone de la En cours
maternité
- SILLAGE +++++++++++++++++++++++

SILLAGE WEB : point fait sur


4. Améliorer l'utilisation de l'outil de nouvelles fonctionnalités et
gestion des rendez vous (Sillage) lancement d’une semaine
test en obstétrique

5. Disposer d'outils de travail plus


performants
6. Déssaturer les agendas médicaux Thèse démarrée

Consultation orientation
7. Fidéliser les patientes en Obstétrique
scindée en 2
8. Fidéliser les patientes en Gynécologie /
Orthogénie
CHRU de Lille Confidentiel. © 2015 BearingPoint France SAS | 20
BEYS Faustine Décembre 2015

DIRECTEUR D’HÔPITAL
Promotion 2014-2016

Adapter une méthode de management issue de l’industrie


au milieu hospitalier : l’implantation du lean management
au Centre Hospitalier Régional et Universitaire de Lille

PARTENARIAT UNIVERSITAIRE : Sans objet

Résumé :

Ce mémoire, à travers l’étude de l’implantation du lean management au Centre Hospitalier


Régional et Universitaire de Lille, interroge la pertinence du développement d’une démarche,
issue de l’industrie, au milieu hospitalier au sein duquel la recherche de la qualité et de la
performance est intégrée depuis plusieurs années sous l’impulsion d’institutions telles que la
HAS ou l’ANAP.

Cette étude démontre que le lean management, parce qu’il est avant tout une méthode
participative d’amélioration continue, enrichit la culture hospitalière à travers la mise à
disposition d’outils simples et la valorisation du travail en équipe. Elle constitue néanmoins un
défi managérial en introduisant un changement de paradigme, tourné vers la lutte contre les
gaspillages et la recherche de valeur ajoutée.

Cette étude conclut à la nécessité d’être attentif à la méthodologie employée, le lean ne devant
pas s’exercer aux dépens des obligations qui incombent aux établissements de santé, et doit
s’attacher à garantir la qualité de la prise en charge du patient et la préservation du patrimoine
social de l’établissement, à travers une attention particulière portée aux conditions de travail
des professionnels de santé et au développement de leurs compétences.

Mots clés :
Lean- performance- efficience-management- industrie- innovation- Lille

L'Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique n'entend donner aucune approbation ni improbation aux opinions

émises dans les mémoires : ces opinions doivent être considérées comme propres à leurs auteurs.

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