Les Différentes Formes de Services

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L'assurance qualité : quelles contributions à la qualité des

services ?
Myriam Campinos-Dubernet, Muriel Jougleux
Dans Revue française de gestion 2003/5 (no 146), pages 81 à 98
Éditions Lavoisier
ISSN 0338-4551
DOI 10.3166/rfg.146.81-98
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L’ assurance qualit é : quelles cont ribut ions à la qualit é des services ?

par Myriam CAMPINOS-DUBERNET et Muriel JOUGLEUX

| Lavoisier | Revue f r ançai se de gest i on

2003/ 5 - n° 146
ISSN 0338-4551 | pages 81 à 98
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Pour cit er cet art icle :


— Campinos-dubernet M. et Jougleux M., L’ assurance qualit é : quelles cont ribut ions à la qualit é des services ?, Revue
f rançaise de gest ion 2003/ 5, n° 146, p. 81-98.

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SERVICES
PAR MYRIAM CAMPINOS-DUBERNET,
MURIEL JOUGLEUX

L’assurance
qualité :
quelles contributions
à la qualité
des services ?
Dans les services comme
a certification ISO 90001 touche aujourd’hui un
dans l’industrie ISO

L
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n’a pas le pouvoir de
nombre croissant d’entreprises y compris celles
transformer l’organisation offrant non pas des biens matériels mais des ser-
en place. Au contraire vices. Paradoxalement le développement de ce phéno-
son efficacité dépend mène ne s’accompagne que de peu d’études quant aux
de la configuration
impacts réels de la certification sur les organisations qui
dans laquelle
elle s’insère.
la mettent en œuvre, alors même qu’un certain nombre
d’entreprises s’interrogent sur la pertinence de ce dispo-
sitif dans la recherche de la qualité du produit2. Cepen-
dant des questions émergent aujourd’hui relatives aux
apports de l’assurance qualité d’une part, et au caractère
contingent ou non, d’autre part, de la démarche. Suffit-il
à une entreprise de respecter le « cahier des charges »

1. Celle-ci est définie par les normes ISO 9000 comme « l’ensemble
des actions préétablies et systématiques nécessaires pour donner la
confiance appropriée en ce qu’un produit ou service satisfera aux exi-
gences données relatives à la qualité » (Lamprecht, 1994).
2. Le produit est ici entendu comme ce qui est offert ou vendu sur un
marché, et renvoie donc à un bien matériel ou à un service.
82 Revue française de gestion

de la certification pour constater les effets ception qu’a le client de la qualité (Jou-
positifs de la méthode sur la qualité des pro- gleux, 2000) ?
duits de l’entreprise ? N’existe-t-il pas cer- Cette question trouve des échos dans le
tains facteurs de contingence de la champ de la sociologie du travail où des
démarche comme la nature de l’activité de recherches voient dans la certification un
l’entreprise, son organisation, le mode dispositif de rigidification de l’organisa-
d’implémentation de la démarche, l’enga- tion à travers le renforcement de la pres-
gement de la direction et de la hiérarchie ? cription du travail et la limitation de l’auto-
« La méthode ne pourrait être alors en elle- nomie du personnel imputables à la
même considérée comme prédictive de son codification des savoir-faire de l’entreprise
usage » (Campinos-Dubernet et Marquette, dans des procédures de travail (Mispel-
1997) et ses effets seraient fortement blom, 1995). Même si d’autres travaux
dépendants du contexte dans lequel elle est nuancent cette position en soulignant l’im-
implantée. portance de la participation du personnel à
Dans cette perspective, une interrogation la mise en place de la démarche de l’assu-
se développe face au nombre croissant rance qualité (Segrestin, 1996 ; Cochoy et
d’entreprises de service qui enclenchent alii, 1998) ou à l’évolution des procédures
des dispositifs de certification ISO3. Ce adoptées, et au contexte organisationnel
phénomène paraît surprenant au premier (Campinos-Dubernet et Marquette, 1997),
abord aux vues des caractéristiques intrin- il n’en demeure pas moins que l’assurance
sèques des activités de service. En effet, qualité pose la question de la standardisa-
une organisation qui applique les prin- tion des procédures de travail et de son inté-
cipes de l’assurance qualité garantit en rêt pour le client. Ne signifie-t-elle pas dans
permanence au client que la qualité visée une entreprise de service, une standardisa-
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du produit est atteinte à travers la défini- tion du service offert au détriment de la
tion d’un système qualité reposant notam- prise en compte des caractéristiques parti-
ment sur la définition et le respect de pro- culières du client, de la qualité de l’interac-
cédures de travail et la mise en place de tion entre ce client et le personnel en
mécanismes de détection, d’analyse et de contact de l’entreprise, et donc au final de la
correction des dysfonctionnements. qualité globale du service ?
Garantir la qualité d’un service à travers L’étude de la certification ISO 9002 dans
une démarche de certification suppose une grande entreprise de services que nous
donc que les caractéristiques du service et dénommons Sertenet (cf. encadré « Les
la manière de le produire puissent être activités de service à Sertenet »), permet
décrits et maîtrisés par l’entreprise. Est-ce d’apporter des éléments de réponse à ces
vraiment possible dans le cadre d’une acti- questions. La certification ISO 9002 y
vité dont le résultat est immatériel et où la couvre deux processus majeurs ; l’un
composante relationnelle, souvent forte, concerne un processus transversal, la factu-
intervient de façon marquée dans la per- ration et le paiement des services comman-

3. 26 % des certificats AFAQ ISO 9000 concernent ainsi ce secteur. Source : www.afaq.fr (jan-
vier 2002).
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 83

dés et mis à disposition du client, et fait de nouveaux concurrents. Le déplacement


l’objet d’une certification nationale obtenue stratégique opéré dans les années quatre-
en 1997. Le second concerne un service vingt-dix, a consisté à privilégier une
particulier destiné essentiellement à la « orientation client » (Franc et Hogg, 2000)
clientèle professionnelle et comprend la sur l’excellence technique antérieure. Il
commande, la mise à disposition d’un rac- s’agit de réagir efficacement aux offensives
cordement au réseau et son rétablissement des concurrents en complétant l’excellence
éventuel. Il a fait l’objet d’une certification technique par un affinement des interactions
régionale, obtenue en 1998 dans les sites avec le marché afin d’augmenter la valeur
enquêtés. des services offerts au client : identification
La certification de ces deux processus s’ins- et compréhension des attentes des clients,
crit dans le développement de la stratégie segmentation fine de la clientèle, construc-
commerciale de l’entreprise face à l’arrivée tion d’offres et de stratégies locales, évalua-

LA MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE
La méthodologie de recherche repose sur des entretiens semi-directifs auprès de l’en-
semble des acteurs concernés par la certification dans deux régions, et ce un an ou deux
après l’obtention du certificat. La grille d’entretien a été élaborée à partir des résultats
de recherche sur la certification dans les entreprises industrielles, d’une part, et sur la
qualité des services, d’autre part. Les salariés étaient interrogés sur le mode de construc-
tion, les apports et les limites de la démarche de certification ISO 9000 pour eux-mêmes,
le client, et l’entreprise. 170 entretiens d’une heure trente environ ont été réalisés par les
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deux chercheurs de mai à octobre 1999. L’échantillon des profils interrogés a été
construit de manière à être représentatif dans chacune des régions des différentes caté-
gories d’acteurs concernées par la certification et ce sur l’ensemble de la ligne hiérar-
chique. Cependant dans chacune des catégories, le choix des personnes a échappé en
partie aux chercheurs, car se faisant pour partie sur la base du volontariat et des
contraintes d’exploitation de l’entreprise. Ces entretiens, enregistrés, ont ensuite fait
l’objet d’une analyse thématique qualitative et ce essentiellement de manière transver-
sale (Thiétart, 1999 ; Bardin, 1993). Le contenu et les apports de ces entretiens ont été
confrontés aux documents disponibles dans l’ensemble des unités interrogées (tableaux
de bord de gestion, tableaux de bord qualité, résultats d’enquêtes de satisfaction, manuel
qualité, logigrammes de processus, fiches de non-conformité, etc.). Cette triangulation
des données, effectuées en cours d’étude quand cela était possible, a permis d’affiner
certaines questions, de confirmer ou non les propos des acteurs, voire de limiter le biais
induit par le mode de sélection des salariés interrogés. L’ensemble des résultats a enfin,
fait l’objet de restitutions et de validations auprès d’un certain nombre d’acteurs, notam-
ment les responsables qualité et les responsables hiérarchiques et a servi de support à des
actions de formation.
84 Revue française de gestion

tion et amélioration de la qualité des ser- activités industrielles (Campinos-Dubernet


vices. Cette stratégie s’est accompagnée en et Marquette, 1997). Tout se passe comme
1996 d’une réorganisation qui a permis le si le simple fait de « mettre l’organisation
regroupement au sein de mêmes unités des en règle » de manière systématique, et ce,
différentes activités commerciale, adminis- pour un tiers (l’auditeur), induisait presque
trative et technique relatives à un marché mécaniquement un certain nombre d’effets
donné (particuliers, professionnels, entre- organisationnels.
prises). Cette stratégie participe à une réelle
perte de prestige, et donc de pouvoir, des 1. Un progrès dans la maîtrise des zones
salariés techniques au profit des commer- de coordination stratégiques
ciaux, situation que les premiers résument La satisfaction du client passe par l’amélio-
de la manière suivantes : « Les emplois de ration de la maîtrise des processus (Lorino,
commercial et d’accueil sont devenus les 1997) de façon à ce que le service offert soit
emplois phares de l’entreprise »4. Dans ce effectivement produit de manière fiable et
contexte évolutif, l’assurance qualité consti- efficace.
tue un des divers éléments de la « décentra- L’incertitude des coordinations se trouve
tion » ainsi opérée. réduite du seul fait de l’homogénéisation
Nous nous interrogerons dans une première des manières de travailler induite par
partie sur les apports de la certification l’existence de procédures de travail tant au
pour Sertenet et étudierons la question de sein d’une activité, que dans les relations
leur convergence ou leur divergence éven- entre activités. On peut citer quelques
tuelle avec ceux identifiés dans l’industrie. exemples, qu’il s’agisse des relations entre
Dans une deuxième partie nous analyse- commerciaux et activités techniques char-
rons alors la question de la prise en charge gées de la préparation et de la réalisation
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de l’interaction client/prestataire par l’AQ des installations, entre le commercial qui
puis les limites des effets de l’AQ impu- reçoit le signalement d’un dérangement et
tables à l’organisation de Sertenet. toute la chaîne des activités techniques de
surveillance et d’intervention du réseau.
De manière générale, les salariés associent
I. – DES APPORTS DE LA
la démarche assurantielle au développe-
CERTIFICATION GLOBALEMENT
ment de la rigueur à travers notamment la
CONVERGENTS AVEC CEUX
rédaction et l’application des procédures
IDENTIFIÉS DANS L’INDUSTRIE
de travail. Rigueur pour le commercial
dans l’enregistrement de la demande du
Les observations réalisées à Sertenet met- client et la gestion du contrat ; rigueur
tent en évidence des apports certains de la enfin reconnue, pour l’agent administratif
certification. Ils se révèlent sensiblement qui, grâce au dispositif est satisfait de ne
comparables aux effets constatés dans les plus apparaître comme « l’empêcheur de

4. L’introduction de l’assurance qualité intervient après une refonte du système de classification dont les techniciens
estiment qu’il les a lésés par rapport aux commerciaux et administratifs, à laquelle est venue s’ajouter une réduc-
tion des effectifs techniques provoquée par des mutations technologiques.
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 85

LES ACTIVITÉS DE SERVICE À SERTENET

Une offre de services complexe, mais relativement standardisée


Services offerts :
– Service de base : droit d’usage d’une infrastructure de réseau transportant les flux d’in-
formations (voix, données, images) d’une origine vers une destination définie par le
client.
– Services complémentaires : des services facilitants (information sur le produit, prise de
la demande en face-à-face ou au téléphone, facturation, modes de paiement, etc.) et des
services de soutien (Gronroös, 1990) (vente ou location d’appareils et d’accessoires de
communication, installation, service après-vente et services complémentaires).
Tarification : droit d’usage du réseau (abonnement) et usage effectif (temps d’utilisation,
distance).
Offre de service segmentée en fonction des types de clientèle (particuliers, clientèles pro-
fessionnelles).
Bien que l’offre de services soit relativement importante, chaque client combinant le ser-
vice de base à un certain nombre de services facilitants ou de soutien, cette offre est plu-
tôt standardisée, les caractéristiques de chaque service et les prix étant clairement pré-
définis. Par ailleurs, cette offre est offerte de manière homogène sur l’ensemble du
territoire.
Une production de services multicibles et fortement consommatrice
de coordinations
L’offre de services suppose un système de production technique et relationnel5 s’ap-
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puyant d’une part, sur un réseau d’infrastructure lourd et des unités techniques et,
d’autre part, sur de multiples points de contact (en face-à-face et au téléphone) avec la
clientèle, le tout couvrant l’ensemble du territoire.
La production de ces services suppose ainsi la coordination d’activités diverses et de
processus travaillant sur des cibles différentes :
Cibles matérielles : création et maintien d’un réseau technique destiné à faire circuler
l’information, y compris en intervenant à domicile chez le client pour réaliser des tra-
vaux de génie civil ou d’installation technique ;
Information : création et mise à jour de l’information technique concernant le réseau de
communication (bases de données sur l’occupation du réseau), les services dont dispo-
sent le client et les caractéristiques du client lui-même (bases de données accessibles en
temps réel par les agents de front office) ;

5. Nous reprenons ici la typologie des systèmes de production de service établie par Bancel-Charensol et Jougleux
(1997).
86 Revue française de gestion

Le client lui-même, reçu en face-à-face ou au téléphone, dont on détecte les besoins en


vue de lui proposer une gamme de services adaptés, et à qui on fournit des informations
notamment sur certains aspects techniques du service proposé : usages possibles, tarifi-
cation, caractéristiques des appareils de communication…
Coproduction
L’ensemble des services suppose une interaction entre l’entreprise et son client lors de
la phase de création du service et éventuellement lors des opérations de maintenance
ou d’évolution du service initial. En phase de « croisière », le contact entre l’entreprise
et le client est minime, se résumant à un droit d’usage du réseau technique. Pendant
les phases d’interaction, le client constitue éventuellement une ressource de la pro-
duction de service dans la mesure où il fournit des informations diverses permettant à
son interlocuteur de détecter ses besoins, où il collabore lors de travaux d’installation
à son domicile, où il signale et explicite les symptômes d’un dysfonctionnement du
service…
Le système de production est éclaté d’une part, sur le territoire national et d’autre part,
entre des unités de front office où la spécification et la production du service s’effectuent
au contact du client, que cela soit pour les aspects commerciaux ou techniques, et des
unités de back office (commerciale, administrative, technique) où le client est absent.

tourner en rond » et voit ses exigences résulte une fiabilisation des coordinations
légitimées ; rigueur des techniciens dont dont l’espace géographique peut être très
c’est habituellement la culture, mais qui étendu et qui, de ce fait, se trouvent sujettes
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ont désormais à apporter la preuve à ceux à plus d’aléas que des coordinations de
qui ne sont pas du « métier » qu’ils ont proximité. La réduction des erreurs et des
effectivement respecté la procédure. dysfonctionnements est largement admise
L’assurance qualité construit et renforce et vérifiée.
une représentation en termes de processus L’objectif de satisfaire le client a conduit à
dans l’entreprise6. Les unités techniques, créer une nouvelle fonction d’interface front
par exemple, qui assurent la supervision et office/back office, correspondant unique du
le rétablissement éventuel du cœur du client une fois le contrat signé. Cette fonc-
réseau, via la commutation, ont été dotées à tion appelée « pilotage » prend le relais du
cette occasion d’un point d’entrée unique commercial et s’assure à la fois des rela-
de façon à ce que soient réparties de tions qui vont suivre avec le client, de la
manière rationnelle et efficace les diffé- réalisation des études du réseau, et des
rentes sollicitations et demandes d’inter- interventions qui vont permettre à ce client
vention dont elles peuvent être l’objet (nou- d’y être connecté afin de bénéficier des ser-
veaux services ou rétablissement). Il en vices attendus. L’apport indéniable de cette

6. La version 2000 des normes ISO en fait d’ailleurs une exigence.


L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 87

fonction est de permettre, en un point spé- ciaux, que des groupes de travail interunités
cifique de l’organisation identifié par tous, ont été formés (une fois la certification
d’avoir une visibilité de l’ensemble du pro- obtenue), afin de régler des problèmes de
cessus. Le pilote joue en quelque sorte un frontières entre les uns et les autres et sur-
rôle de « vigie ». Il sait à tout moment où en tout de construire des « repères partagés » à
est l’avancement des activités de back office la fois sur la nature et la qualité du service
préalables à l’installation. Il est chargé en rendu et sur le contenu des activités y
outre de résoudre ou faire résoudre les pro- concourant. (Hatchuel et Weil, 1992)7. Plus
blèmes de coordination momentanément particulièrement, la certification a permis
identifiés. Enfin de manière systématique, de faire mieux comprendre, en liaison avec
une fois le service rendu, il vérifie le degré la définition partagée de la qualité de ser-
de satisfaction du client (envoi d’un écrit vice, aux différentes populations qu’activi-
puis téléphone si signalement de pro- tés de back office et activités de front office
blèmes). sont très étroitement interconnectées et
De fait, le dispositif assurantiel permet une concourent toutes ensembles au service
meilleure identification et un suivi dans le vendu au client (Bancel-Charensol et Jou-
temps des problèmes de coordination. Il gleux, 1997).
facilite le traitement des anomalies et Le dispositif assurantiel a précisé le service
« valorise l’erreur ». D’ailleurs, il a de fait rendu au client et a formalisé le niveau de
entraîné une professionnalisation du traite- qualité voulu par l’entreprise, concourant
ment des réclamations et systématisé le ainsi à une homogénéisation du traitement
recueil et le traitement des non-conformités du client. La qualité du service a été préci-
internes. sée à travers la définition de délais de réali-
sation et de rétablissement des installa-
2. L’AQ substitue une qualité entreprise
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tions8, et de taux de respect de ces délais.
aux diverses conceptions « indigènes » Elle inclut également le temps de traite-
de la qualité ment des réclamations écrites des clients,
La formalisation de l’organisation a permis voire le suivi de leur satisfaction face à la
une clarification de la division du travail réponse de l’entreprise à cette réclamation.
adoptée et du rôle de chacun dans une Dans le cas du service client par téléphone
période de transformation profonde de l’or- un suivi des temps d’attente client a été
ganisation. La description des activités faci- introduit. Par ailleurs, la détection des sur-
lite la construction de nouveaux repères, consommations accidentelles, erratiques,
après que les changements organisationnels donne lieu à des démarches spontanées de
adoptés soient venus brouiller les repères l’entreprise destinées à prévenir les conflits
existants. C’est ainsi que des techniciens éventuels avec le client lors de la réception
ont appris à travailler avec des commer- de la facture.

7. Elle est également utile pour les nouveaux recrutés qui disposent du fait de l’assurance qualité, d’une source d’in-
formation consultable de manière autonome, sans être dépendant du bon vouloir des anciens.
8. Dans les deux régions enquêtées, les indicateurs internes témoignent de l’amélioration des délais des dates
contractuelles, des taux de relève et de rétablissement.
88 Revue française de gestion

Cette formalisation des caractéristiques du et des effets qu’elle produit. D’ailleurs, les
service favorise en interne une représenta- regrets quant à l’absence de communication
tion partagée par les différents métiers de la externe sur la certification de la part de l’en-
qualité du service offert, permettant un treprise n’en sont que plus vifs.
dépassement des visions locales, partielles Elle offre alors des ressources de conviction
et indigènes (Bonnet, 1996) de la qualité à l’encadrement pour motiver les équipes à
jusque-là préexistantes. adopter des démarches de qualité. Certains
Ainsi aux yeux des techniciens, l’assurance encadrants se sont ainsi appuyés sur les
qualité est très directement associée au fiches de non-conformité ou l’écoute-
développement d’une préoccupation client clients pour sensibiliser les équipes à la
« Le plus utile dans l’assurance qualité problématique de la qualité, pour en faire
c’est le ressenti du client » signalent les des acteurs capables de faire remonter les
encadrants. Plus concrètement, ces préoc- problèmes des clients et de générer de ce
cupations clients se traduisent par l’atten- fait une solution à ces problèmes ; c’est le
tion accordée désormais aux délais par les cas notamment des équipes en contact avec
techniciens, au-delà de la seule qualité tech- le client, que ce soit en face-à-face ou au
nique de l’intervention, ainsi que par la téléphone.
qualité d’une éventuelle interaction avec le Mais l’assurance qualité peut aussi indénia-
client. blement être un outil de management d’im-
position. L’existence d’un référentiel écrit
« Les agents d’intervention ont quand légitime par exemple les rappels de procé-
même bien intégré cette relation client et dures faits en réunion d’équipe, suite par
ça, c’est bien le résultat de l’AQ et de toutes exemple à un audit ou à des fiches de non-
les actions de formalisation, notamment en conformité émises par d’autres services.
termes de délai » (encadrant).
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Au final, l’assurance qualité a permis à
Une fraction des commerciaux a compris l’entreprise d’enclencher une réelle dyna-
que la qualité du service offert au client ne mique de progrès relative aux processus,
se limitait pas à la qualité de l’interaction conduisant à une amélioration de la qualité
avec celui-ci, mais que la rigueur de la sai- du service fourni au client, et à un suivi plus
sie sur les bases de données client par systématique à la fois des moyens de l’ob-
exemple, la signature du contrat commer- tenir mais aussi des résultats produits. Si
cial, le suivi après-vente avait un rôle sur la ces conclusions s’apparentent à celles déjà
qualité de la facturation (exhaustivité, exac- réalisées dans l’industrie, elles ne semblent
titude) et donc, sur la qualité du service glo- pas du tout contradictoires avec la nature de
bal offert. l’activité ici étudiée, c’est-à-dire un service.
Au contraire, les apports de la certification
3. L’AQ légitime la référence au marché
nous semblent d’autant plus importants
Le fait que l’assurance qualité soit une règle qu’ils permettent une certaine rationalisa-
externe à l’entreprise, utilisée de plus en tion des processus et concourent à une
plus par un grand nombre d’entreprises, y réelle professionnalisation de l’activité à
compris de service, est une aide indéniable travers la formalisation des caractéristiques
de légitimation du choix fait par l’entreprise du service, de sa qualité et des activités
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 89

nécessaires à sa production. Plus particuliè- cipalement au début (la plupart) ou à la fin


rement dans le cas étudié le développement des processus certifiés. Peut-on affirmer
de la certification a suscité une réflexion sur que les méthodologies AQ garantissent la
la production d’un service particulièrement réussite de l’interaction avec le client ?
complexe.
Mais les conclusions évoquées ci-dessus 1. L’impossible intégration
sont-elles valables aussi bien en front office de la qualité relationnelle du service
qu’en back office ? dans les procédures de travail
La population commerciale à Sertenet se
montre la plus réticente vis-à-vis de l’assu-
II. – ASSURANCE QUALITÉ
rance qualité. Près de la moitié des agents
ET INTERACTIONS
interrogés sont des « critiques indiffé-
CLIENT/ENTREPRISE :
rents » : la hiérarchie intermédiaire et de
« OUTILLER » LA RELATION
proximité n’affichent pas d’attente vis-à-vis
De nombreux travaux en sciences sociales de l’assurance qualité, se contentant de
ont souligné les spécificités des activités de jouer formellement le jeu de la certification
service et ont notamment mis en avant l’im- tout en n’étant pas convaincu de l’intérêt de
portance de la relation qui s’instaure entre la méthode ; les employés de base déclarent
le prestataire et le client lors de la produc- quant à eux ne pas se sentir concernés, esti-
tion du service demandé9. L’existence de mant que l’outil apporte peu de chose au
cette relation induit de nombreuses consé- client et ne leur fournit pas d’aide dans leur
quences managériales : adaptation aux travail. Comment expliquer cette forte
caractéristiques différentes des clients, dis- réticence ?
ponibilité et réactivité du personnel en Le service proposé par Sertenet articule des
contact, développement de compétences
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dimensions techniques et relationnelles. En
relationnelles, régulation de flux physiques reprenant l’analyse de Berry, Parasuraman
de clients, etc. et Zeithaml (1990), l’évaluation de la qua-
L’analyse des apports de l’assurance qualité lité du service par les clients repose sur des
suppose de se pencher sur le point de vue critères tels que la réactivité du service pro-
d’une population particulièrement concer- posé (temps de traitement et de réalisation
née par les interactions avec le client, la de la demande), sa fiabilité (absence d’inci-
population commerciale. Ce sont les sala- dents techniques), son accessibilité (temps
riés amenés à être en contact direct avec le de prise de ligne au téléphone, proximité
client que cela soit dans les points d’accueil géographique de l’accueil physique et
ou au téléphone, pour des activités de vente, amplitude d’ouverture), sa sécurité (instal-
d’information, d’assistance, de factura- lation technique conforme, confidentialité
tion/paiement, de traitement de réclama- des échanges de données, absence de pira-
tions diverses. Ces activités se situent prin- tage du réseau). Il s’agit là d’un ensemble

9. Delaunay et Gadrey (1987) ; Gadrey (1991) ; Eiglier et Langeard (1987) ; Eymard-Duvernay (1994) ; Joseph
(1994). Pour une mise en perspective de la notion de relation de service, voir May (2001).
90 Revue française de gestion

d’éléments dont nous avons pu montrer nement » que l’interaction avec le client va
qu’ils se révélaient très directement amélio- bien se passer, voire même il va exiger des
rés par l’AQ. papiers d’identité, des informations que le
Mais elle repose aussi sur des items tels que client n’a pas, ce qui va contribuer à son
la capacité de compréhension du personnel mécontentement. Le strict respect de cer-
(le prestataire fait un effort pour connaître taines procédures amène ainsi parfois une
le client et ses besoins et lui propose un ser- dégradation localisée de la qualité du ser-
vice adapté), de communication du person- vice perçue par le client en ne permettant
nel (écoute des clients, informations des pas, par exemple, de satisfaire très rapide-
clients), sa courtoisie, sa disponibilité, ment un client ou de prendre en compte une
c’est-à-dire en résumé un certain nombre de demande particulière.
critères caractérisant la qualité de l’interac-
tion entre le client et le personnel en « L’AQ est une contrainte car il y a des
contact, qu’il soit commercial, technique ou processus rigoureux alors qu’avec le client,
administratif. il faut faire en souplesse » (vendeur).
Les activités commerciales sont les plus Les commerciaux ont, pour une partie
directement impliquées dans la qualité d’entre eux, interprété alors l’assurance
relationnelle du service car elles initient, qualité comme l’irruption de la technique et
réparent ou modifient le service de l’administratif dans leur activité ou
consommé par le client et ce en interaction comme une volonté de l’entreprise de stan-
avec lui. Les commerciaux demeurent por- dardiser leurs activités au détriment de la
teurs d’une définition « locale » de la qua- qualité du service au client telle qu’ils la
lité du service, fortement axée sur ce conçoivent.
moment d’interaction avec le client que
« ISO n’apporte que des ennuis aux
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cela soit en face-à-face ou au téléphone. La
vendeurs, bon de commande mal rempli,
qualité du service offert est alors perçue
contrat non obtenu ; c’est une pièce
comme essentiellement dépendante de
rapportée. La qualité est toujours technique
leurs connaissances techniques des pro-
à Sertenet alors que la qualité ici repose sur
duits, de leur capacité d’écoute et d’ajuste-
le professionnalisme des vendeurs. ISO
ment aux attentes et aux ressources des
les fait rire. » (encadrant intermédiaire
clients, de leur disponibilité et donc de ce
ventes).
qu’ils nomment « leur professionna-
lisme ». Il s’agit là de l’essence même de Faut-il alors conclure pour autant que l’as-
l’activité commerciale. surance qualité et la qualité du service ne
L’assurance qualité apparaît dès lors sont guère compatibles, voire antinomiques
comme ne fournissant pas d’aide directe en front office ?
aux populations commerciales, la qualité
2. Une contribution indirecte à la qualité
relationnelle du service n’étant pas stricte-
de l’interaction avec le client
ment dépendante du respect de procédures
de travail particulières, même pertinentes. Si l’assurance qualité ne contribue pas
Ce n’est pas parce que l’agent commercial directement à la qualité de l’interaction, elle
suit à la lettre la procédure « premier abon- offre un certain nombre de mécanismes au
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 91

personnel en contact avec le client et à sa client. Ils sont par ailleurs, nous l’avons
hiérarchie qui, conjugués les uns aux autres, vu dans la première partie, complexes à
concourent à améliorer la qualité du service produire pour l’entreprise.
en cadrant et outillant la partie relationnelle Dans ce contexte, la certification ISO
du service sans pour autant la standardiser. constitue un argumentaire intéressant pour
L’assurance qualité offre tout d’abord un le personnel en contact dans les négocia-
cadre de référence partagé10 au personnel tions de vente ou les échanges relatifs aux
de front office (caractéristiques du service, problèmes de maintenance, notamment
niveau de qualité voulu par l’entreprise, avec la clientèle professionnelle : il peut
procédures de travail, cf. partie I) qu’il peut mettre en avant la crédibilité d’une entrepri-
mobiliser dans sa relation au client et à par- se de service engagée dans une telle
tir duquel il peut détecter et déclarer une démarche, l’homogénéité du traitement du
situation anormale ou non (délais d’inter- client, la fiabilisation de la qualité tech-
vention non respectés, procédure de traite- nique (cf. partie I) et donc ancrer l’interac-
ment d’une demande non suivie) ; l’AQ tion avec le client dans la confiance.
amène ici une objectivation du service
contrebalançant la nature intangible du pro- « Si derrière, c’est fiable, c’est plus facile
duit vendu au client. d’affirmer quelque chose au client quand il
De nombreux travaux de recherche souli- vient pour une réclamation sur la facture »
gnent en effet, que l’achat d’un service est (vendeur).
fondamentalement entaché d’incertitudes « Ce sont les mêmes procédures partout,
pour le client11. Cette incertitude provient c’est un argument commercial, cela rassure
de la nature intangible du service et des dif- le client » (vendeur).
ficultés rencontrées par le client dans la
3. La remontée des attentes des clients
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compréhension et l’appréciation, avant
l’achat, des caractéristiques du produit ainsi et le développement de boucles qualité
que de son hétérogénéité plus ou moins Au-delà du développement de la confiance
grande. entre le client et le prestataire, l’assurance
Les services offerts par Sertenet n’échap- qualité est susceptible de déclencher une
pent pas à la règle : incorporant des boucle qualité sur les caractéristiques de
dimensions techniques multiples et inno- l’offre et de sa production. En effet, l’AQ a
vantes, notamment pour les services induit un système formalisé de remontée
concernant les clients professionnels, des plaintes exprimées par le client au per-
reposant sur de nombreuses règles tari- sonnel en contact, au travers notamment la
faires, proposant des options variées, ils rédaction de fiche d’écoute clients et de
sont complexes à appréhender par le fiches de non conformité interne. Elles

10. Des travaux de recherche dans les front offices montrent que si l’absence de marges de manœuvre pour les sala-
riés au contact est source de tensions avec le client, l’absence d’un cadre de référence collectif et partagé est tout
aussi pesant. Voir David et Huguet (1998), Warin (1993).
11. Delaunay et Gadrey (1987) ; Gadrey (1990).
92 Revue française de gestion

apparaissent pour les agents en contact III. – CEPENDANT LES RÉSULTATS


direct avec le client et donc sous sa pression DE L’AQ DÉPENDENT
comme un moyen de s’exprimer et de faire FONDAMENTALEMENT
remonter les dysfonctionnements avec la DES CHANGEMENTS
certitude d’être lu et d’obtenir une réponse. ORGANISATIONNELS
Ces informations sont communiquées à
La préparation de la certification s’est
d’autres services, à l’échelon local ou natio-
accompagnée d’une réflexion sur l’organi-
nal, combinées au suivi statistique des
sation en place et de son évolution selon
résultats, au traitement des réclamations et
une orientation processus. Cependant, la
aux données issues des enquêtes de satis-
logique voudrait qu’une telle réflexion ne
faction, analysées et mutualisées dans les
s’arrêtât point à la phase préparatoire, et
réunions d’équipe ou les groupes de travail
qu’au vue des dysfonctionnements organi-
interservices. Elles contribuent à une
sationnels identifiés par la suite – et ce de
réflexion commune des différentes unités
façon systématique – l’organisation de
de l’entreprise et donc, à l’émergence d’une
l’entreprise puisse évoluer afin de les
définition globale de la qualité du service.
résoudre. En effet, comme l’a constaté
Dans une des agences, cette écoute client a
Deming (1991), « La plupart du temps, les
ainsi été systématisée pour construire et
désordres que l’on trouve dans une activité
développer une stratégie locale de l’unité.
de production ou de service proviennent
Même si l’AQ n’assure pas la perfor-
du système. »
mance de la relation avec le client, c’est
Sertenet, malgré les changements organisa-
un outil intéressant dans les services ; elle
tionnels introduits en 1996 au moment de la
offre en effet, un système formalisé de
certification, et malgré l’introduction d’une
remontée et d’analyse des interactions
stratégie « orientée client », demeure forte-
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avec le client, mettant ainsi à profit l’exis-
ment hiérarchisée et cloisonnée, conservant
tence de ce client dans la production du
ainsi de manière prédominante les traits
service pour enclencher une démarche
d’une bureaucratie mécaniste (Mintzberg,
dynamique d’amélioration de l’offre et de
1984). Ainsi le mode de conduite de la cer-
la production.
tification a été organisé de manière descen-
Les résultats de l’AQ se montrent certes
dante et n’a pas facilité l’adhésion des per-
liés pour partie à la nature de l’activité et
sonnels. Une grande partie des salariés n’a
on a pu voir précédemment que l’activité
perçu l’introduction de la certification que
commerciale était de ce point de vue dans
comme l’expression d’une nouvelle règle
une situation un peu particulière. Cepen-
émanant de la hiérarchie, voire le nouveau
dant, à Sertenet comme dans les activités
symbole de l’ensemble des changements en
industrielles, les limites de l’AQ ne tien-
cours qu’ils estiment pénalisant. Par
nent pas seulement à la nature d’une acti-
ailleurs, la certification n’ayant concerné
vité particulière mais se révèlent aussi lar-
que deux des divers processus de l’entre-
gement induites par le type de résolution
prise, elle n’a pas englobé le haut manage-
des dysfonctionnements organisationnels
ment dans la dynamique enclenchée. En
adopté.
conséquence, les méthodologies introduites
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 93

par ISO, après des améliorations initiales base. Plus encore, il entretient l’idée qu’il
patentes, mettent à jour des problèmes plus revient essentiellement à la hiérarchie de
profonds qui ne peuvent être résolus par des régler les problèmes qui surviennent.
aménagements à la marge de l’organisation. Nombre de réclamations internes adressées
Enfin, les responsables qualité à la depuis le niveau local au niveau central de
recherche d’une position statutaire légitime l’organisation restent sans réponse. C’est
nouvelle et confrontés à l’incertitude du ainsi que le manque d’adaptation signalée
rôle que leur attribuait l’organisation, n’ont de différents applicatifs informatiques, sus-
pas facilité l’appropriation du système qua- citant une double saisie, des difficultés à
lité et apporté le soutien attendu par une identifier l’ensemble des services achetés
partie des acteurs. par un même client, à renseigner la confi-
guration physique et technique des lieux
1. Des boucles qualité interrompues d’installation du client, restent non seule-
par l’organisation ment sans solution immédiate, mais surtout
Des difficultés récurrentes liées au non res- sans réponse aucune. Les grandes direc-
pect des procédures de travail ne donnent tions fonctionnelles centrales, non incluses
pas lieu à enquête et perdurent dangereuse- dans le champ de la certification ne se sen-
ment. On peut citer des non signatures de tent pas engagées par les démarches qu’elle
contrat par les clients avant engagement des impulse. De manière équivalente, les divi-
travaux, les renseignements insuffisants des sions opérationnelles nationales ne répon-
bases de données qui conditionnent le suivi dent pas à des propositions de solutions des
des zones d’occupation des réseaux. Signa- problèmes rencontrés, émanant du niveau
lés de manière régulière, ils sont peu suivis local.
d’effet. Il en va de l’implication du mana- Si les difficultés précédemment signalées
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gement sur lequel nous reviendrons, mais relèvent pour partie du caractère limité de la
aussi de problèmes d’organisation du tra- démarche assurantielle dans l’entreprise,
vail au sein des unités. D’ailleurs, la nombre de problèmes sont induits par l’in-
manière même dont sont traitées les fiches suffisance de la réflexion sur les processus.
de non conformité émises par le personnel Les démarches préalables à l’obtention de
se révèle significative de la culture bureau- la certification nationale ont largement été
cratique prévalante. Elles sont triées et ren- organisées sur le mode descendant. Certes,
voyées aux services concernés par le res- certains processus nécessitaient un mode de
ponsable qualité et ne font pas, de sa part, coordination sur l’ensemble du territoire.
l’objet d’un suivi systématique quant aux Toutefois, les propositions faites par les
solutions adoptées pour résoudre les pro- groupes de travail locaux, n’ont pas donné
blèmes signalés. En outre, lorsque ce traite- lieu à amples consultations et discussions.
ment est opéré, il l’est fréquemment au Certains groupes qui se sont impliqués, ont
niveau des comités de direction d’unités. Si fait des propositions pour s’entendre dire
ce traitement confère au dispositif une forte une fois le travail fini, d’adopter les procé-
légitimité, il présente également l’inconvé- dures nationales. Ils s’étaient crus partie
nient de favoriser les représentations en prenante de la démarche engagée. On ne
termes de délation pour le personnel de s’étonnera donc pas que les procédures
94 Revue française de gestion

adoptées fassent l’objet de nombreuses cri- générale est de convaincre les responsables
tiques. Dans certains cas, celles-ci reposent intermédiaires de l’intérêt stratégique pour
certes sur le refus de voir remises en cause celle-ci de s’engager dans la démarche assu-
des habitudes antérieures. Tel est le cas de rantielle. Il est en effet frappant de constater
l’obligation de signature à des fins de traça- qu’à Sertenet les ressources organisation-
bilité. Cependant, nombre de critiques ren- nelles mobilisées l’ont été essentiellement
voient, soit au caractère insuffisamment dans un souci de démultiplication et d’expé-
fondé des choix retenus (par exemple en rimentation dans la phase préalable à la cer-
métrologie, longueur du processus d’éta- tification, plus que dans celui de développer
lonnage sans que des solutions de rempla- la conviction. La logique d’autorité l’a
cement des instruments n’aient été pré- emporté conformément à la tradition
vues), soit au système de preuve bureaucratique de l’entreprise.
particulièrement lourd (preuve de réception D’ailleurs, dans le cadre des nouvelles
de l’ordre de traduction, preuve de l’intro- orientations stratégiques, les règles d’éva-
duction des éléments de logiciel, preuve du luation de l’activité des managers les amè-
bon fonctionnement obtenu à travers la nent à privilégier les résultats commer-
trace papier de la réalisation d’un essai). ciaux. Ceci les conduit parfois à négliger
Concernant également les processus, l’or- certaines dimensions processus de leur acti-
ganisation du bureau d’étude par exemple, a vité, telles, par exemple, les insuffisances
été conçue pour des installations standards, de renseignement des bases de données de
nécessitant donc des études simples. Or, la part de leurs subordonnés dont les effets
20 % de celles-ci sont complexes et ont ne seront perceptibles que dans la durée,
donc du mal à être gérées dans les mêmes c’est-à-dire lorsque ces managers auront été
conditions que celles qui sont standards. affectés à d’autres fonctions.
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Elles induisent une désorganisation des En ce qui concerne les agents de maîtrise,
études, provoquent des retards, suscitent la ils rencontrent de réelles difficultés à obte-
production de dossiers incomplets, très nir de leurs subordonnés le respect des nou-
pénalisants pour leurs utilisateurs, les tech- velles règles. S’ils cherchent à les
niciens d’intervention. Une fois chez le convaincre, les limites du système en place
client, ils constatent qu’ils ne disposent pas en termes de procédures de travail, ou en
de l’ensemble des informations nécessaires. termes de non résolutions de dysfonction-
Conformément à la tradition bureaucra- nements récurrents, constituent un frein
tique, peu d’effort de conviction ont été manifeste à leur démarche. Quant aux
développés en direction du management audits, ils suscitent au mieux un effort
intermédiaire qui comprend deux niveaux, ponctuel comparé à du bachotage qui
les responsables d’unité et de département, retombe ensuite comme un « soufflet ».
et les agents de maîtrise. Or on sait que
celui-ci joue un rôle important dans ces 2. Des responsables qualité
démarches (Nonaka et Takeuchi, 1997). qui privilégient la défense de la règle
Une telle situation se révèle fort différente Selon les différents écrits et travaux dispo-
des pratiques en cours dans nombre d’entre- nibles, deux conceptions du rôle des res-
prises où la première tâche de la direction ponsables qualité sont généralement défi-
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 95

nies : une première qui dans une tradition dent que la qualité du résultat obtenu par la
plus anglo-saxonne en fait en quelque sorte certification dépend fortement de la recon-
« des professionnels de la règle » ; tandis naissance accordée à la fonction qualité
que la seconde plutôt représentée par les elle-même.
japonais conçoit les responsables qualité Aussi n’est-il pas surprenant qu’ils soient
davantage comme des facilitateurs, principalement perçus comme les défenseurs
capables d’aider les opérationels12. Dans de la règle, et secondairement soucieux de
cette seconde conception, le soutien qu’ils soulever les problèmes d’organisation qui
apportent à ceux-ci suppose une connais- engendrent des dysfonctionnements.
sance effective des activités à « mettre en D’ailleurs, aucun dispositif d’aménagement
règle » et à améliorer. À l’inverse, une pos- des règles adoptées n’a été prévu, pas davan-
ture de forte extériorité par rapport aux acti- tage que les modalités de capitalisation des
vités considérées maintient plus naturelle- savoirs activité par activité. Pourtant, le
ment le système dans le formalisme. caractère standardisé des services vendus
On ne s’étonnera pas que conformément à seraient susceptibles de mettre à profit les
la tradition bureaucratique, les responsables apprentissages effectués afin de produire des
qualité de Sertenet adoptent plus aisément savoirs nouveaux et d’améliorer la maîtrise
la première conception de leur rôle. Consi- des processus (effet statistique). Aussi, ces
dérant leur activité comme un champ d’in- apprentissages rencontrent-ils des difficultés
tervention autonome, ils attendent de l’or- à être intégrés par l’organisation ; ils s’arrê-
ganisation qu’elle définisse précisément la tent le plus souvent à l’étape de « simple
reconnaissance statutaire qui leur paraît boucle », pour reprendre l’expression
convenir (cf. Crozier, 1963). C’est de cette d’Argyris et Schön (1996).
reconnaissance que dépend à leurs yeux
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l’obtention par l’organisation du meilleur CONCLUSION
résultat possible dans ce domaine. Si on
leur oppose que l’objectif assigné à la L’exemple de l’AQ à Sertenet paraît tout à
démarche qualité par la direction générale fait instructif. La certification ISO 9000
est davantage de construire une démarche semble être une démarche pertinente dans
processus, et de s’éloigner ainsi progressi- une activité de service telle que l’exerce
vement d’une organisation construite à par- Sertenet. Si l’assurance qualité ne contribue
tir d’une juxtaposition hiérarchique de pas directement à la qualité de la relation de
sous-ensembles autonomes revendiquant service, elle contribue à réduire l’incerti-
chacun leur zone d’intervention et d’en tude de l’ensemble des coordinations
favoriser une réelle transversalité, ils répon- nécessaires à la production du service,

12. Ishikawa (1981) reproche aux américains leur conception « trop professionnelle » de leur rôle dans le domaine
de la qualité, « professionnelle » étant entendu au sens anglo-saxon du terme. Il insiste ainsi sur « la différence entre
le TQC selon Feigenbaum et le TQC à la japonaise. Le premier, dit-il, est organisé par « les professionnels QC »,
alors que le second fait intervenir toutes les personnes de toutes les fonctions de l’entreprise d’où l’appellation de
CWQC proposée par l’auteur de Company Wide Quality Control, Le TQC ou la qualité à la japonaise, édition
française AFNOR Gestion (1984).
96 Revue française de gestion

notamment entre front et back office, amé- De fait, dans les services comme dans
liorant ainsi la qualité du service vendu. En l’industrie, ISO s’applique à l’organisa-
outre, elle met à la disposition du personnel tion en place. Elle ne fait que la rendre
en contact un certain nombre « d’outils » plus lisible, mais elle n’a pas spontané-
qui constituent des ressources mobilisables ment le pouvoir de la transformer et a for-
dans l’interaction avec le client. La question tiori de réguler les changements qui
de la nature du service étudié se pose seraient nécessaires si le management ne
cependant ici. L’ensemble du fonctionne- souhaite pas s’y engager. Ceux-ci com-
ment du dispositif assurantiel à Sertenet portent un ensemble complexe d’opportu-
résulte-t-il de la nature particulière de l’ac- nités mais aussi de menaces pour les
tivité de service : un service globalement acteurs concernés et induisent nécessaire-
standardisé, où la dimension technique est ment des conflits. Ainsi, contrairement à
très importante alors que la coproduction une idée assez communément répandue,
avec le client se révèle être assez ponc- ISO n’est pas une norme organisation-
tuelle ? Qu’en serait-il de ces conclusions nelle. Elle formalise l’organisation et
dans une activité où la dimension relation- suppose l’utilisation de certaines métho-
nelle serait prépondérante ? Des études dans dologies mais elle n’introduit pas un stan-
d’autres activités de service permettraient dard organisationnel analogue à la divi-
d’éclaircir la question. sion conception/exécution à la manière
Cependant, le cas étudié met également en du taylorisme. Bien au contraire, son effi-
évidence l’importance du contexte organi- cacité dépend intimement de la configu-
sationnel de l’entreprise. Ainsi, dans cet ration de l’organisation dans laquelle elle
exemple, les caractéristiques de la mise en s’insère. En effet comme ont pu l’analy-
place du système qualité et son fonctionne- ser d’autres travaux (Girin, 1995 ; Gree-
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ment ultérieur sont totalement marqués de nan, 1995 ; Coriat, 1996), l’introduction
la tradition bureaucratique prévalante. On y d’une innovation donnée ne garantit pas
remarque, tout comme dans d’autres inves- qu’elle s’effectue automatiquement dans
tigations industrielles (Campinos-Dubernet les conditions d’efficacité requises.
et Marquette, 1999), la difficulté de l’AQ à Plus fondamentalement, cet exemple met
résoudre les dysfonctionnements organisa- en évidence l’incidence des choix manage-
tionnels. La résolution de ceux-ci dépend riaux sur les résultats de la certification
de la volonté et de la capacité du manage- ISO. La nouvelle version des normes sera-
ment à engager, dans ce domaine, les chan- t-elle capable de changer cet état de fait ?
gements susceptibles de les résorber. On est en droit d’en douter.
L’assurance qualité : quelles contributions à la qualité des services ? 97

BIBLIOGRAPHIE
C. Argyris, D.A. Schön, Organisationnel learning reading, Addison-Wesley, Publishing
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