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FICHE 15 – L’AUTORITE JUDICIAIRE

FICHE 16 – LE JUGE ADMINISTRATIF


SOMMMAIRE

THEME 1 : LES DEFINITIONS.......................................................................................................4

FICHE 1 – LA NOTION DE LIBERTES ET DROITS FONDAMENTAUX...............................................4


FICHE 2 – LA TYPOLOGIE DES LIBERTES ET DES DROITS FONDAMENTAUX..................................7

THEME 2 : L’EVOLUTION HISTORIQUE......................................................................................10


FICHE 3 – LES LIBERTES AVANT LA REVOLUTION DE 1789.........................................................10
FICHE 4 – LES LIBERTES DEPUIS LA REVOLUTION DE 1789........................................................12
FICHE 5 – L’ÉTAT DE DROIT......................................................................................................15

FICHE 8 – LES SOURCES EUROPEENNES....................................................................................25


FICHE 12 – LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL..............................................................................40
FICHE 13 – LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE (QPC)..................................42
FICHE 14 – L’INDEPENDANCE DES JURIDICTIONS......................................................................44

FICHE 17 – LES RECOURS DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF.....................................................51


FICHE 18 – LA PROTECTION NON-JURIDICTIONNELLE DES LIBERTES........................................53

THEME 6 : LES DROITS PROCEDURAUX....................................................................................57


FICHE 21 – LE DROIT A L’EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE.............................................65

THEME 7 : LES LIMITATIONS DES DROITS.................................................................................73


FICHE 23 – LES LIMITATIONS NORMAES (Restrictions)................................................................74
FICHE 24 – L’ORDRE PUBLIC.....................................................................................................77
FICHE 25- LE CONTROLE DE PROPORTIONNALITE.....................................................................80
FICHE 26 - LES LIMITATIONS EXCEPTIONNELLES (Dérogations).................................................83
FICHE 27– LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME..........................................................................87
FICHE 29 – L’INTERDICTION DES DISCRIMINATIONS.................................................................93

FICHE 31 – DIGNITE DE LA PERSONNE ET BIOETHIQUE...........................................................105


FICHE 32 – DIGNITE DE LA PERSONNE ET DROITS SOCIAUX....................................................118

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Copyright © 2022 Pré-Barreau /89
FICHE 33 – LA PROTECTION INTERNATIONALE DE LA PERSONNE............................................121

THEME 10 : L’INTIMITE ET LA VIE SOCIALE.............................................................................127


FICHE 34 – LE DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET FAMILIALE.........................................127
FICHE 35 – LA PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES....................................................137
FICHE 36 – LA VIE PRIVEE ET FAMILIALE DES DETENUS...........................................................142
FICHE 37 – LE TRAVAIL EN PRISON.........................................................................................144
FICHE 38 – LE DROIT A L’ENVIRONNEMENT............................................................................146
THEME 11 : NATIONALITE ET CITOYENNETE...........................................................................151
FICHE 39 – LA NATIONALITE...................................................................................................151

FICHE 40 – LES DROITS POLITIQUES........................................................................................155

FICHE 41 – LES DROITS CIVIQUES DES DETENUS.....................................................................158

FICHE 42 – LE DROIT A UNE BONNE ADMINISTRATION..........................................................160

THEME 12 : LES LIBERTES DU CORPS......................................................................................163


FICHE 43 – LA LIBERTE D’ALLER ET VENIR...............................................................................163

FICHE 43 – LA LIBERTE SEXUELLE............................................................................................173

THEME 13 : LES LIBERTES DE L’ESPRIT....................................................................................177


FICHE 46 – LA LIBERTE DE PENSEE ET DE CONSCIENCE............................................................177

FICHE 45 – LA LIBERTE D’ENSEIGNEMENT..............................................................................179

FICHE 46 – LA LIBERTE DE RELIGION ET LA LAÏCITE.................................................................181

FICHE 47 – LA LIBERTE D’EXPRESSION....................................................................................184

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FICHE 48 – LA LIBERTE MEDIATIQUE (MEDIAS = RELAIS ESSENTIELS DE LA LIBERTE
D’EXPRESSION)......................................................................................................................185

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Copyright © 2022 Pré-Barreau /89
FICHE 49 – LA LIBERTE ARTISTIQUE........................................................................................188

FICHE 50 – LA PROTECTION DES LANCEURS D’ALERTE............................................................190

THEME 14 : LES LIBERTES ECONOMIQUES ET SOCIALES..........................................................192


FICHE 51 – LA PROTECTION DE LA PROPRIETE........................................................................192

FICHE 52 – LA LIBERTE D’ENTREPRENDRE ET DE CONTRACTER...............................................195

FICHE 53 – LA LIBERTE D’ASSOCIATION..................................................................................197

FICHE 54 – LES LIBERTES DE REUNION ET DE MANIFESTATION...............................................199

FICHE 55 – LA LIBERTE SYNDICALE ET LE DROIT DE GREVE......................................................202

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Copyright © 2022 Pré-Barreau /89
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 1 : LES DÉFINITIONS

THEME 1 : LES DEFINITIONS

FICHE 1 – LA NOTION DE LIBERTES ET DROITS FONDAMENTAUX

Origine

Mutation profonde. Passage de « libertés publiques » à « droits et libertés fondamentales », ce


terme vient de la loi fondamentale d’Allemagne en 1949
On retrouve « droits et libertés » à l’article 61-1 de la Constitution

Définition des notions clefs


- Droits et libertés fondamentaux : notion de nature doctrinale pouvant désigner :
o les droits porteurs de valeurs fondamentales (approche « substantialiste »)
(// jusnaturalistes, exemple d’Aristote / Hobbes / Locke) ;
Ces droits sont dans leur substance porteurs de ces valeurs, c’est, à raison de leur caractère fondamental
que l’ordre juridique les consacre

o les droits énoncés dans une norme de rang fondamental dans l’ordre juridique :une
norme de rang constitutionnel ou conventionnel (approche « normativiste »).
Le droit est un DLF parce qu’il a un rang supra-législatif.

Le référé liberté a été mis en place en 2000, par l’article L 521-2 du CJA : création d’une catégorie
juridique particulière : les libertés fondamentales « au sens du référé-liberté ».
NB : certains droits ou libertés considérés par ailleurs comme fondamentaux ne le sont pas
nécessairement « au sens du référé-liberté » ex : le droit à la santé : CE 2005. (et inversement, ex : droit
du patient à donner son consentement).

Référé-liberté : décision du juge du TA dans les 48H.en cas:


1) de décision administrative portant atteinte grave et manifestement illégale à un DLF
2) d’urgence.

- Droits de l’homme :
o en droit international et européen, expression générique désignant les droits
consacrés dans les conventions dites « de droits de l’homme » ;
o en droit interne, notion renvoyant à la conception jusnaturaliste des droits découlant
de la DDHC de 1789
Les droits de l’homme créent des obligations envers les Etats, pour protéger les individus.

- Libertés publiques : notion désignant les droits et libertés dégagés de manière prétorienne, de
valeur législative, par le CE à partir de la IIIe République et dont le respect s’impose aux autorités
étatiques ex. : droit au recours pour excès de pouvoir dégagé dans CE 1950 Dame Lamotte

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 1 : LES DÉFINITIONS

Si, avant 1958 et l’institution d’un contrôle de constitutionnalité des lois, l’expression « Etat légal »
était utilisée pour qualifier la manière dont la loi s’impose à l’administration, l’expression « Etat de
droit », que concrétise l’introduction d’un contrôle de constitutionnalité, implique que le législateur
lui-même est limité par le droit.

NB : le passage des libertés publiques aux DLF révèle une mutation de l’ordre juridique et le
remplacement de la « simple » légalité par la « constitutionnalité » et la « conventionnalité »,
ainsi que la montée en puissance de la figure du juge.
Durant IIIe République, toute puissance de la loi, triomphe des libertés publiques avec grandes lois
libérales.

Résumé : les libertés publiques renvoyaient à un contrôle de légalité (les droits et libertés étaient dans
la Loi) alors que les DLF renvoient à un contrôle de constitutionnalité et conventionnalité.

Les libertés publiques ne s’inscrivaient que dans un rapport vertical, entre l’Etat et l’individu : c’est
pourquoi on parle de libertés « publiques ». Alors que DLF visent rapports horizontaux également.
Les libertés publiques sont donc conçues comme des normes objectives (de valeur législative)
s’imposant exclusivement aux organes de l’État (essentiellement l’administration)

- Principes fondamentaux :
o dans un sens large, notion renvoyant aux principes sur lesquels est bâti l’ordre
juridique et qui le structurent (ex: principe de liberté, d’égalité, fraternité proclamés par DDHC de 1789).

o dans un sens étroit, expression désignant les PFRLR : 3 conditions pour être un
PFRLR :

1) Principe issu d’une norme législative adoptée sous un régime républicain avant 1946
2) Ayant fait l’objet d’une mise en œuvre continue depuis
3) Ayant pour objet une règle générale et essentielle à la vie de la Nation (caractère fondamental)

Ils sont reconnus par les juges du CC (ex. : PFRLR de la liberté d’association identifiée dans Cons.
constit., déc. de 1971, Liberté d’association).
Aujourd’hui les PFRLR sont inclus dans le bloc de constitutionnalité.
DONC une loi peut être annulée sur le fondement d’un PFRLR par un contrôle de constitutionnalité.

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 1 : LES DÉFINITIONS

Distinctions des notions voisines


- Liberté vs droit :
o Liberté : prérogative ancrée dans la sphère d’autonomie du sujet de droit, dont la
reconnaissance par les autorités lui confère un pouvoir d’autodétermination
Article 4 DDHC 1789 : la liberté consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui

o Droit : prérogative attribuée par une autorité au sujet de droit et dont il peut
invoquer
le bénéfice à l’égard de cette autorité tenue d’y déférer (ex. : droit à la santé, droit au respect de la vie
privée et familiale, droit au mariage).
DONC la grande différence est que le droit est déterminé alors que liberté est indéterminée

distinction droit et liberté : une liberté renvoie à un pouvoir d’auto-détermination du sujet (pouvoir de
faire ou de ne pas faire) alors qu’un droit renvoie plus spécifiquement à une relation avec les autres
sujets de droit (un droit s’exerce sur ou contre autrui).

- Droit et libertés fondamentaux vs « Liberté fondamentale » (art. L. 521-2 CJA ) :


o Droits et libertés fondamentaux : droits porteurs de valeurs fondamentales ou
consacrés dans une norme de rang fondamental dans l’ordre juridique.
o « Liberté fondamentale » (art. L. 521-2, CJA) : ensemble des droits et libertés
identifiés
par le Conseil d’État comme constituant une « liberté fondamentale » au sens de l’article L. 521-2 du
CJA pouvant être invoquée dans le cadre d’un référé-liberté.

- Liberté individuelle vs Libertés personnelles :


o Liberté individuelle : le droit de ne pas être soumis de manière arbitraire à la
contrainte physique, dont la protection relève de la compétence du juge judiciaire (art. 66 de la
Constitution de 1958).

o Libertés personnelles : l’ensemble des prérogatives, qui ne relèvent pas de la liberté


individuelle, dont sont titulaires les sujets de droit.

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 1 : LES DÉFINITIONS

FICHE 2 – LA TYPOLOGIE DES LIBERTES ET DES DROITS FONDAMENTAUX

Critères généraux de classification


- Classification des libertés et droits selon leur objet :

o Droit-autonomie (ou droit de) : prérogative tendant à la protection d’un pouvoir


de s’émanciper de l’autorité publique (ex. : droit d’aller et venir, droit de propriété)
Il s’agit de droits préservant une certaine capacité de l’individu à agir selon sa volonté. Ce sont des
droits qui tendent principalement à permettre à l’individu de s’autodéterminer.
On trouve aussi les droits-garanties contre l’arbitraire de l’Etat : art. 66 Constitution ; droit de la
défense ; droits politiques.

o Droit-créance (ou droit à) : prérogative tendant à la fourniture d’une prestation par


l’autorité publique (ex. : droit au travail, droit à la protection sociale), reconnus par la Constitution de
1946

- Classification des libertés et droits selon leur génération


Explication : Il existe un lien entre l’objet des droits et libertés et la date de leur proclamation. En effet,
les constituants qui ont procédé à la proclamation de ces droits étaient animés par une certaine
philosophie des droits, une certaine conception des rapports entre l’individu et l’État :

o Droits de première génération : droits qui s’exercent contre ou en dehors de l’Etat


(droits-autonomie ; droits-garanties ; droits politiques).

Il s’agit des droits découlant de l’esprit révolutionnaire, qui protègent l’autodétermination du sujet de
droit contre ou en dehors de l’autorité étatique (ex. : droit à la vie, droit à la liberté d’expression) =
DDHC 1789

o Droits de deuxième génération : droits découlant d’un esprit socialisant et


égalitariste
(milieu du XXème siècle), qui supposent la fourniture d’une prestation des autorités étatiques (ex. :
droits-créances) = préambule de la Constitution de 1946.

o Droits de troisième génération : droits découlant de l’esprit de globalisation


économique et juridique de la fin du XXème siècle et du début du XXIème siècle, qui ont pour objet la
protection de l’Humanité et de son environnement (ex. : droit à un environnement sain).

- Classification des libertés et droits selon les obligations des autorités qui les sous-tendent :
o Obligation négative : obligation des autorités étatiques de ne pas commettre
d’actions qui soient en contrariété avec les droits.

o Obligation positive : obligation des autorités étatiques de mettre en œuvre les

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 1 : LES DÉFINITIONS

moyens raisonnablement exigibles pour prévenir ou remédier aux situations contraires aux droits.

Critères secondaires de distinction


- Distinction des titulaires de libertés et droits :
o Personne physique : individu (nationaux ou étrangers) ou groupe d’individus
o Personne morale : entité dotée de la personnalité juridique, distincte de la
personnalité des individus qui la composent (syndicat, société, parti politique, ONG).

- Distinction de l’intensité du contrôle juridictionnel du respect des libertés et droits : en l’absence


de hiérarchie entre les droits et libertés fondamentaux, tout conflit entre des droits concurrents
dans une situation se résout par la recherche d’un juste équilibre – dont la justesse dépend de la
particularité des circonstances de l’espèce – entre les intérêts, avec l’intérêt général et donc les
droits, des différentes personnes en présence.
Le contrôle juridictionnel exercé dépend de la nature des droits en présence :

o Droits absolus : droits ne pouvant pas faire l’objet d’une dérogation ou d’une
exception, de sorte que toute atteinte portée à l’exercice d’un droit absolu en emporte la violation
(ex. : droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains ou dégradants).

o Droits non absolus : droits dont l’exercice peut être limité par l’État (dérogation ou
exception) à condition que cette limite soit proportionnée (ex. : droit au respect de la vie privée et
familiale, liberté d’entreprendre).

Le contrôle des juridictions repose sur le principe de proportionnalité : principe fondamental du droit
des libertés : arrêt fondateur CE 1933 Benjamin. : contrôle prend souvent la forme d’un triple test (NAP)

1) adéquation de la mesure législative à la finalité poursuivie : vérifier l’aptitude de la mesure à


atteindre le but poursuivi par le législateur
2) nécessité de la mesure pour atteindre cette finalité : elle ne doit pas excéder ce qu’exige la
réalisation du but poursuivi
3) proportionnalité de la mesure qui ne doit pas créer des charges hors de proportion avec la
finalité recherchée.

NB : Le contrôle de proportionnalité est une technique juridictionnelle de coexistence des droits et


libertés et de leur limitation par des impératifs d’intérêt général.

L’atteinte portée à un DLF peut être la conséquence de deux types d’actes :

- un acte d’une personne privée exerçant aussi l’un de ses droits ou de ses libertés (ex. : un
journaliste, dans le cadre de la liberté médiatique, prend une photo d’un tiers susceptible de
heurter son droit à l’image).

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 1 : LES DÉFINITIONS

- un acte des pouvoirs publics qui avait pour but de garantir la protection d’un intérêt général (ex. :
une mesure de couvre-feu, limitative de la liberté d’aller et venir, justifiée par la protection de
l’ordre public).

Dans le premier cas, le litige éventuel porté devant le juge le conduira à réaliser une conciliation des deux
droits et libertés fondamentaux qui s’opposent.
Dans le second cas, le contrôle juridictionnel aura pour finalité de vérifier que l’atteinte portée au droit
ou liberté en cause est bien justifiée, de manière raisonnable, par l’objectif poursuivi.

L’utilisation de cette technique de contrôle juridictionnel s’explique par la circonstance qu’il n’existe pas
de hiérarchie entre les droits et les libertés.

MAIS : certains droits ne peuvent pas être limités, en sorte que toute ingérence dans ces droits emporte
automatiquement leur violation. Il s’agit du droit à la vie, du droit à la protection contre la torture,
contre les traitements inhumains et dégradants, contre l’esclavage, contre le travail forcé, ainsi que du
principe de la légalité des délits et des peines

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

THEME 2 : L’EVOLUTION HISTORIQUE

FICHE 3 – LES LIBERTES AVANT LA REVOLUTION DE 1789

L’Antiquité (couvre la période allant de l'invention de l'écriture vers 3300-3200 av. J.-C. jusqu'à la
chute de l'Empire romain d'Occident en 476)
- Pensée gréco-romaine :
o Naissance des premières formes de démocratie, comprise comme le pouvoir du
peuple, directe mais inégalitaire (exclusion des femmes, des esclaves et des étrangers et variabilité du
poids du vote en fonction de la richesse) ;
o Prémisses de la théorie du droit naturel (ou jusnaturalisme), fondée sur l’idée que la
Cité est consubstantielle à l’homme (inhérence des droits à la citoyenneté), mais pas
au sens contemporain de l’inhérence des droits à la nature humaine. En effet,
individus simplement vus comme citoyens et non comme personnes + pas de
conception de la moralité de manière définie. C’est avec le christianisme que ceci se
développe. Même s’il existait le courant du stoïcisme (courant qui recherche bien de
la Cité mais aussi morale et sagesse).

- Apports du christianisme :
o Consécration de l’idée de la dignité de chaque individu, sans distinction entre les
Hommes, tous ayant été créés à l’image du Créateur ;
o Affirmation de l’idée de liberté de l’Homme, capable de pêcher et de se repentir, ce
qui fonde la responsabilité de l’individu pour ses actes.
Moyen-Âge (476 – 1492 découverte Amérique)
- Construction d’une pensée moderne :
o Subordination de la légitimité du pouvoir politique au regard de Dieu, donnant
naissance à un droit, ou devoir, de résistance à un gouvernement injuste (Saint
Thomas d’Aquin) ;
o Développement par les légistes d’une exigence pour le souverain de poursuivre le
bien commun à travers le concept de lois fondamentales qui s’imposent au Roi.
- Émergence d’un droit des libertés :
o Reconnaissance de libertés effectives dans des chartes concédées par le seigneur
local et dans des textes de portée générale à l’échelon royal (ex. : Magna Carta de
1215 qui est réaffirmée en 1225, pouvoir limité par la nécessité de respecter
individus, donc encadrement du pouvoir par Etat de droit, par droits des individus)
o Apparition de juridictions chargées de veiller au respect des lois fondamentales.

= fondamentalisation des droits des individus

MAIS au Moyen Age, inégalités entre bourgeois qui ont libertés et serfs qui n’ont presque
rien + existence du tribunal de l’Inquisition, qui est un tribunal d’exception rattaché à
l’Eglise, mis en place pour lutter contre les manifestations de l’hérésie (des opinions
divergentes de la doctrine de l’Eglise).
Ancien Régime

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

- Les Lumières et la progression des idées (XVI – Révolution) :


o Apparition de l’idée laïque du droit naturel, les droits dont sont titulaires les Hommes
étant conçus comme inhérents à leur nature humaine (Grotius) ;
o Émergence de la notion de contrat social : fiction juridique selon laquelle les
Hommes ont renoncé à certaines de leurs libertés pour conférer à des représentants
le pouvoir d’œuvrer au bénéfice de la paix et du bien commun (passage de l’état de
nature à l’état civil), ils s’associent (John Locke ; Thomas Hobbes ; Jean-Jacques
Rousseau).
- Consolidation des libertés dans le droit positif :
o en France : l’édit de Nantes en 1598 reconnaît la liberté de conscience et de culte
aux protestants, mais les avancées du droit positif sont peu importantes ;
o en Angleterre :
 la Petition of rights de 1628 prohibe les arrestations et détentions illégales,
impose ceci au Parlement ;
 l’Habeas Corpus de 1679 constitutionnalise les droits énoncés dans le
Petition of Rights (droit d’être présenté devant un juge pour qu’il statue sur
la légalité de la détention ; droit à réparation et à la sanction des
responsables en cas d’arbitraire) ;
 le Bill of Rights de 1689 fondamentalise les droits énoncés en subordonnant
l’exercice du pouvoir royal à leur respect, mettant fin à la royauté de droit
divin.

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

FICHE 4 – LES LIBERTES DEPUIS LA REVOLUTION DE 1789


Héritage de la Révolution de 1789
- Proclamation des libertés :
o Consécration de droits universels et naturels : art. 2 : c’est-à-dire inhérents à la
nature
humaine et dont la jouissance n’est pas subordonnée à une nationalité donnée, et d’une exigence de
légalité des atteintes y étant portées : art. 6 DDHC 1789
Critique par Burke qui disait que c’était utopique

o Instauration de droits-créances à la charge de l’État (secours des indigents et droit à


l’instruction) dans la DDHC de 1793

o Abolition de l’esclavage par le décret de 1794 en France et dans ses colonies, même
si définitivement acquise en 1848 seulement.
- Marche contrariée des libertés :
o Contestation des libertés :
 XIXe siècle : éclipse des droits de l’homme du fait de la mise en place de
régimes autoritaires (1er et 2d Empires sous Napoléon III) ;
 Critique contre-révolutionnaire : l’universalisme des droits est une pure
fiction, puisque l’ordre social et la condition des hommes est inégalitaire ;
 Critique marxiste : les libertés proclamées ne seraient que formelles,
puisqu’en réalité les individus se trouveraient dans un état de dépendance et d’aliénation qui les
empêche d’en faire usage de manière concrète et effective car seuls les bourgeois en profitent
réellement
 Totalitarisme : négation des droits de l’homme, de l’individu et de sa
primauté. Bolchevisme, fascisme, nazisme.

o Œuvre républicaine :
 Philosophie de la IIe République : instauration d’un équilibre entre liberté et
égalité et ajout d’une dimension fraternelle (ex. : interdiction faite à tout Français de pratiquer
l’esclavage même en pays étranger par le décret de 1848) ;
 Acquis de la IIIe République : ère des libertés consacrées par des lois
républicaines (liberté de réunion [1881], liberté de la presse [1881], liberté syndicale [1884], liberté
d’association [1901], principe de séparation des Églises et de l’État [1905]) préfigurant les principes
fondamentaux reconnus par les lois de la République et des libertés publiques consacrées de manière
prétorienne par le Conseil d’État.

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

Renouveau après la Seconde Guerre mondiale


- Protection renforcée des droits et libertés :
o Internationalisation de la protection des droits de l’homme :
 Système international :
 - Adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme en 1948 ;
 entrée en vigueur du Pacte international relatif aux droits civils et
politiques (PIDCP) et du Pacte international relatif aux droits
économiques sociaux et culturels (PIDESC) de 1966, dont les organes
de surveillance sont respectivement le Comité des droits de l’homme
et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels ;
Adoption de conventions sectorielles (ex. : convention internationale
sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale de
1969) et catégorielles (ex. : convention relative aux droits de l’enfant
de 1989) ;
 essor du droit humanitaire (quatre Conventions de Genève de 1949).
 Système régional :
 en Europe :
o entrée en vigueur de la CESDH de 1950 dont le respect est
assuré par la Cour européenne des droits de l’homme ;
o entrée en vigueur de la Charte des droits fondamentaux
depuis le traité de Lisbonne de 2007
 en Amérique : entrée en vigueur de la Convention américaine des droits de
l’homme en 1969 (cadre de l’Organisation des États américains), dont le
respect est assuré par la Commission et la Cour interaméricaine des droits
de l’homme ;
 en Afrique : entrée en vigueur de la Charte africaine des droits de l’homme et
des peuples de 1981 (cadre de l’Organisation de l’Union Africaine), dont le
respect est assuré par la Commission et la Cour africaine des droits de
l’homme et des peuples.
o Évolutions nationales :
 Sous la IVe République : déclaration de droits-créances dans le Préambule de
la Constitution de 1946 (ex. : droits à l’emploi, à l’instruction, à la protection
sociale) consistant en des principes particulièrement nécessaires à notre
temps.
 Depuis l’avènement de la Ve République :
 renvoi à plusieurs textes consacrant des droits par le Préambule de la
Constitution de 1958 (Déclaration des droits de l’homme et du
citoyen de 1789, Préambule de 1946, Charte de l’environnement de
2004) ;
 création du Conseil Constitutionnel qui a, au fil des différentes
révisions de la Constitution de 1958 (1974 saisine avant entrée en
vigueur possible et 2008 avec QPC), acquis un rôle de garant des
libertés et droits constitutionnels en France.

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

- Ambivalences de la période actuelle :

o Tendance générale à la limitation des libertés au nom de la sécurité publique et de


la lutte contre le terrorisme : les restrictions portées à l’exercice des libertés dans le cadre d’un régime
d’exception (ex. : état d’urgence) intègrent progressivement le droit commun en France

o Émergence d’une quatrième génération de droits : protection de la personne


humaine contre les dangers auxquels ils sont exposés du fait des progrès de la
technique (ex. : manipulations génétiques, surveillance automatisée, protection de
l’environnement).

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MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

FICHE 5 – L’ÉTAT DE DROIT


- État de droit (notion absente de notre Constitution : l’obstacle à sa reconnaissance en droit
français semble résider dans le principe de la souveraineté de la loi et la méfiance contre les
juges) : exigence d’un ordonnancement de l’ordre juridique garantissant un certain de degré de
neutralisation du pouvoir, de sorte à protéger les justiciables contre l’exercice arbitraire de ce
pouvoir et de leur apporter des garanties. L’individu doit être au centre des préoccupations.

- L’idée d’Etat de droit s’est imposée sous l’influence de la CEDH qui affirme dans son préambule le
« principe de la prééminence du droit » / le TUE article 2 qui consacre l’Etat de droit comme
« valeur commune » de l’Union. Pas de référence à l’Etat de droit en droit français.

Le pouvoir neutralisé (2 conditions)


- Règne de la norme : la norme suprême n’est plus la norme législative mais la norme
constitutionnelle.
Les individus disposent de droits subjectifs contre l’Etat et contre la loi : art. 2 DDHC 1789

o État légal : historiquement, la souveraineté de la loi avait pour conséquence


d’encadrer
le pouvoir exécutif et son administration, mais de laisser libre de toute limite le législateur.
o État de droit : contemporainement, l’avènement du constitutionnalisme prend racine
dans la souveraineté du peuple et encadre l’exercice du pouvoir par l’exécutif et le législatif.
Article 16 DDHC 1789 : « toute société dans laquelle les droits ne sont pas garantis, ni la séparation des
pouvoirs déterminée, n’a point de constitution ».

- Empire du juge : le juge est le garant du respect par le pouvoir étatique de la norme suprême.
o Garant de la norme suprême : le juge contrôle la conformité de la loi et des actes
exécutifs à la norme suprême – constitutionnelle (par CC) ou conventionnelle (par juges ordinaires) – à
l’exception des actes de gouvernement, des mesures d’ordre intérieur et des régimes d’exception.

> Actes de gouvernement = 2 types d’actes de gouvernrment :


- actes de l’exécutif non détachables des relations internationales de la France
(ex. la suspension d’un traité / la décision d’engager des forces militaires à l’étranger…)
- actes entre pouvoir exécutif et pouvoir législatif
(ex. nomination d’un membre du CC / dissolution de l’AN / décret soumettant un projet de loi au
référendum)

> Mesures d’ordre intérieur = mesures qui expriment la discipline intérieure à


certaines institutions (prison, armée, école), exemple juge administratif incompétent pour statuer sur
interdiction faite à un élève de porter pantalon de ski à l’école.
En revanche, les mesures qui portent atteinte à la situation juridique, au salaire ou au statut des agents,
échappent à la catégorie des mesures d'ordre intérieur et sont susceptibles de recours.

> Les régimes d’exceptions = article 16 de la Constitution / état de siège / état


15
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

d’urgence
Mis en œuvre par président de la république en cas de :
1) menace grave et immédiate des institutions de la République, de l'indépendance de la Nation,
de l'intégrité de son territoire ou de l'exécution de ses engagements internationaux

2) interruption du fonctionnement régulier des pouvoirs publics constitutionnels

La décision de recourir à l’article 16 est un acte de gouvernement : CE 1962 Rubin de Servens.

>> Etat de siège : article 36 de la Constitution : régime exceptionnel et


temporaire
proclamé par un gouvernement pour faire face à un péril national imminent (insurrection armée ou
invasion étrangère), en vue du maintien de l'ordre public. Armée remplace police pour sécurité
publique.

>> Etat d’urgence : existe depuis loi de 1955, très grande marge d’appréciation
du Chef d’Etat (CE Rolin 2005). Il est décidé par décret en conseil des ministres en cas de péril imminent
résultant d’une atteinte à l’OP. Il autorise le ministre de l'intérieur et les préfets à décider notamment
de l’interdiction des rassemblements / manifestations / blocage de sites internet (apologie du
terrorisme) / fermeture de lieux publics et de lieux de cultes…

L'état d'urgence instauré à la suite des attentats de novembre 2015 a pris fin le 1er
novembre 2017. En mars 2020, c'est l'état d'urgence sanitaire qui est déclaré pour
faire face à l'épidémie de Covid-19.

o Limites de la norme suprême :

1. Le pouvoir constituant peut modifier la Constitution : art. 89 car pas de clause


d’éternité comme en Allemagne par exemple (interdit modification par législateur et par pouvoir
constituant)

2. Le justiciable ne peut pas directement saisir la juridiction constitutionnelle (il


existe la QPC mais ne peut pas être comparée à un véritable recours constitutionnel car les juridictions
ordinaires jouent rôle de filtre + CC analyse situation du requérant de façon objective, sans regard
particulier pour la situation subjective).

Remarque : Constitution de 1958 a été écrite par comité d’experts, et ensuite validation par le peuple
par référendum

16
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

Les garanties généralisées (2 conditions)


- Droit au juge : ensemble de droits assurant l’effectivité des garanties procédurales du procès
équitable.
o Droit d’accès à un tribunal : droit de soumettre sa cause à un organe ayant pour
fonction de trancher des litiges sur la base de règles de droit au terme d’une procédure déterminée.
en droit interne : PGD : recours pour excès de pouvoir : CE, 1950 Dame Lamotte.
Droit à un recours juridictionnel : principe de valeur constitutionnelle : CC, 1996, Statut de la Polynésie
française

en droit international : CEDH, 1975, Golder c. Royaume-Uni


-
o Droit à l’exécution des décisions de justice : droit de bénéficier de manière effective
des effets du jugement
CEDH, 1997, Hornsby c. Grèce

En principe, la validation législative d’un acte annulé par le juge porte atteinte au principe de
séparation des pouvoirs, MAIS elle est possible en cas d’impérieux motifs d’intérêt général : CEDH 1999
Zielinski.

- « Droit au Droit » :
o Qualité des normes : exigences, assurant l’effectivité de la protection contre
l’arbitraire, de clarté et de précision des normes prévoyant les limites dans lesquelles s’exerce le
pouvoir
en droit interne : objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité : CC, 2005,
Registre international français) et principe de valeur constitutionnelle de normativité de la loi : CC,
2012, Loi « Gayssot ».
en droit international : garanties d’accessibilité et de prévisibilité du droit interne, quelle que soit sa
source, législative ou exécutive (CEDH, 1990, Kruslin c. France).

o Sécurité juridique : exigence de stabilité des relations juridiques (CEDH, 1979,


Marckx
c. Belgique et CE, 2006, Sté KPMG), qui suppose le respect des principes de légalité des délits et des
peines (art. 8 de la DDHC), de la non-rétroactivité des lois (art. 2 du code civil) et des actes
administratifs (CE, 1948, Sté du Journal l’Aurore).

17
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

La démocratie sans l’État de droit : la démocratie illibérale


- Composantes de la démocratie illibérale : forme de régime politique qui adhère formellement à
des éléments de la démocratie (tenue régulière d’élections et références constantes au pouvoir
du peuple) mais qui matériellement restreint les libertés en rejetant fondamentalement les valeurs
de l’État de droit.
Dans la démocratie illibérale il y a une démocratie apparente : le représentant est élu MAIS il y a une
contestation de l’Etat de droit : refus des contrepouvoirs.
Expression vient du politologue américain Zakaria.
Exemple de la Russie (Poutine avec + de 80% des voies) / de la Pologne avec Duda / Hongrie avec
V. Orban.
o Utilisation de la forme démocratique : elle repose sur un certain populisme qui se
réclame de victoires électorales impressionnantes (dictature majoritaire) tout en
tolérant, de manière variable, une opposition politique ;

o Contestation de l’État de droit :


 refus des contre-pouvoirs : rejet du principe du contrôle de l’exercice du
pouvoir dans le cadre de la norme suprême, ce qui engendre un déséquilibre des pouvoirs au profit
de l’exécutif au détriment, en particulier, du pouvoir judiciaire ;

Illustrations :
Pologne refuse d’appliquer décisions CJUE contraires à sa Constitution.
En Pologne, depuis 2017, fonction de Procureur Général a été supprimée, c’est le ministre de la Justice
qui nomme les procureurs.
En 2015, la Cour Suprême russe (cour constitutionnelle) a affirmé que si décision CEDH contraire à
Constitution, pas obligée de l’appliquer. Remarque : exclusion Russie de CEDH le 16 septembre 2022.

 refus des valeurs de la société démocratique : rejet des valeurs de «


pluralisme, tolérance et esprit d’ouverture » (CEDH, 1976, Handyside c. Royaume-Uni), ce qui se traduit
souvent par le refus de pluralisme dans les médias et dans l’éducation

18
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

- L’Europe contre la démocratie illibérale :


o Union européenne (en plus de l’activité de la CJUE fondée sur la Charte des droits
fondamentaux de l’UE) :
 procédure de prévention (avant mise en œuvre de l’article 7) : existe depuis
2014,
sur proposition motivée de 1/3 des EM, du Parlement européen ou de la Commission européenne, le
Conseil, statuant à la majorité des 4/5 de ses membres après approbation du Parlement européen, peut
constater qu’il existe un risque clair de violation grave par un EM des valeurs de l’UE.
Avant de procéder à cette constatation, le Conseil entend l’EM en question et peut lui adresser des
recommandations, en statuant selon la même procédure. Le Conseil vérifie régulièrement si les motifs
qui ont conduit à une telle constatation restent valables.

 procédure de sanction (art. 7 TUE) :


Etape 1 : Le Conseil européen, statuant à l’unanimité sur proposition de 1/3 des EM ou de la
Commission européenne et après approbation du Parlement européen, peut constater l’existence
d’une violation grave et persistante par un EM des valeurs de l’UE, après avoir invité cet État membre
à présenter toute observation en la matière.

Etape 2 : Lorsqu’une telle constatation a été faite, le Conseil, statuant à la majorité qualifiée, peut
décider de suspendre certains des droits découlant de l’application des traités à l’EM en question, y
compris les droits de vote du représentant du gouvernement de cet État membre au sein du Conseil.

Ce fut le cas contre la Pologne et la Hongrie récemment.

NB : les Etats peuvent contester validité de cette procédure devant CJUE

o Conseil de l’Europe :
 Inconstance de la Cour EDH :
 > Arrêts intransigeants
CEDH, 2018, Navalny c. Russie : prononciation d’une violation du droit à la sûreté et de la liberté de
réunion du chef de l’opposition ;

CEDH, 2014, Baka c. Hongrie : violation du droit à un procès équitable du fait du limogeage du président
de la Cour suprême.
Un ancien juge de la CEDH avait été élu président de la Cour Suprême en 2009 et critiquait publiquement
le pouvoir en place. Une nouvelle Cour Suprême a été mise en place et nécessitait expérience de 5 ans en
tant que juge national, ce qui l’empêchait d’être président alors qu’il aurait dû l’être pendant encore 3
ans. Violation article 10 CEDH car punissait indirectement sa liberté d’expression + violation article 6§1

19
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 2 : L’ÉVOLUTION HISTORIQUE

car pas de recours national contre limogeage.

 > Arrêts contestables : rejet de 25 000 requêtes, irrecevables, soumises


par des ressortissants turcs victimes de purges après la tentative de coup d’État. CEDH a décidé de ne pas
s’en mêler (de peur d’être engorgée), donc renvoi des requêtes à la commission ad hoc en Turquie.

 Critiques de la Commission de Venise pour la démocratie par le droit :


organe
consultatif du Conseil de l’Europe composé d’experts indépendants en droit constitutionnel. Par
exemple, juge que la réforme de la justice en Pologne est inacceptable dans un Etat de droit.

20
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 3 : LES SOURCES

THEME 3 : LES SOURCES

FICHE 6 – LA CONSTITUTION

« Bloc de constitutionnalité » :
o expression d’origine doctrinale, attribuée à Louis Favoreu, désignant l’ensemble des
normes de rang constitutionnel dans la Ve République, ; CC 1971, Liberté d’association.

o le rang constitutionnel des normes composant le bloc de constitutionnalité leur


confère, dans la hiérarchie des normes au sein de l’ordre juridique français, un rang supérieur
aux :
 Conventions internationales : art 55 de la Constitution : un conflit entre une
norme conventionnelle et une norme constitutionnelle se résout au profit de la norme
constitutionnelle par le juge administratif (CE, Ass., 1998, Sarran et Levacher) et le juge judiciaire
(C. Cass., Ass. Plén., 2000, Fraisse) dès lors que le Conseil constitutionnel décline sa compétence
pour vérifier la concordance des normes conventionnelles avec les normes constitutionnelles
(CC, 1975, IVG) (compétence réservée au juge européen)

MAIS les juges internationaux qui considèrent que l’ordre international est : CJUE considère que droit
de l’UE prime sur les constitutions : Internationale Handelsgesellschaft 1970.

Concernant le CC, transposition des directives européennes : le CC a fait obstacle à la primauté du droit
de l’union et a fait primer la Constitution.
CC 2004 loi pour la confiance dans l’économie numérique : c’est la Constitution qui fonde l’obligation de
transposer les directives européennes (art. 88-1). C’est donc bien la Constitution qui est supérieure,
selon cette décision du conseil et ce qu’il a dit + la transposition d’une directive peut être bloquée par le
fait que celle si contienne une disposition contraire de la C : réserve de constitutionnalité.

CC 2006 : la transposition peut être bloquée si elle va à l’encontre de l’identité constitutionnelle de la


France.

Consécration d’un principe inhérent à l’identité constitutionnelle française : QPC 2021, Société Air
France : monopole public de la force légale .
Ici : principe d’interdiction de déléguer à des personnes privées des compétences de police
administrative inhérentes à l’exercice de force publique.

CE Arcelor 2007 : le CE doit vérifier que les principes du droit communautaire sont respectés par la
transposition et s’il n’existe pas d’équivalent en droit communautaire, contrôle de constitutionnalité

 Lois : les normes législatives sont soumises au respect des normes


constitutionnelles ce que vérifie le Conseil constitutionnel dans le cadre de son contrôle a priori
(article 61, Constitution de 1958) ; ce qui suppose aussi le respect des droits et libertés garantis
par les normes constitutionnelles que vérifie le Conseil constitutionnel dans le cadre de son
contrôle a priori mais aussi avec son contrôle a posteriori (QPC : article 61-1).
En cas de loi déclarée contraire à la Constitution, la responsabilité de l’État peut être engagée devant
le juge administratif dans les limites fixées dans la décision d’inconstitutionnalité par le CC et si les

21
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 3 : LES SOURCES

dommages ont leur cause directe dans la loi inconstitutionnelle (CE, Ass., 2019, Paris Eiffel
Suffren).

NB : les lois issues de l’article 11 (référendum) ne sont pas visées et sont une hypothèse à part

 Actes administratifs : un conflit entre un acte administratif et une norme


constitutionnelle se résout au profit de la norme constitutionnelle, par le juge administratif : CE,
1960, Société Eky ; CE, 2008, Commune d’Annecy).

Normes faisant partie du « bloc de constitutionnalité »


Normes textuelles

- Corps de la Constitution de 1958 : articles 1er à 89 de la Constitution de 1958 , ayant pour


particularité de ne pas contenir de déclaration de droits (+ un outil pour cantonner pouvoir du
Parlement, elle contient peu de références aux droits et libertés) et de faire mention de droits de
manière sporadique (ex. : liberté individuelle à l’article 66 et prohibition de la peine de mort à
l’article 66-1) ou à travers des grands principes (exemple article 1erégalité des citoyens / égalité
homme/femme ; article 2 liberté égalité fraternité).
6 juillet 2018 QPC, la fraternité est un principe à valeur constitutionnelle, fondement=art.2 C°

- Préambule de la Constitution de 1958 : exposé des motifs et des buts de la Ve République, qui
renvoie à la DDHC de 1789, au Préambule de la Constitution de 1946 et à la Charte de
l’environnement de 2004, formellement inclus dans le bloc de constitutionnalité depuis 1971 (CC,
1971, Liberté d’association).

- Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : texte déclaratif, consacrant des droits
civils et politiques.

- Préambule de la Constitution de 1946 : texte introductif de la Constitution de la IVe République,


auquel renvoie le Préambule de 1958, inclus dans le bloc de constitutionnalité depuis 1971 (CC,
1971, Liberté d’association) et énumérant les principes particulièrement nécessaires à notre
temps (PPNT) et identifiant la catégorie des PFRLR.

PFRLR : voir plus haut : liberté d’association / principe des droits de la défense / principe
d’indépendance des professeurs de l’enseignement supérieur

PPNT : énumérés par le préambule de 1946 : l’égalité, le droit d’asile, le droit de grève… = droits
économiques, sociaux et culturels énumérés par le Préambule de 1946

FOCUS sur la peine de mort

22
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 3 : LES SOURCES

Ajd, abolition de la peine de mort inscrite à l’article 66-1 de la Constitution. Abolie en 1981. Discours de
Robert Badinter :
- Pas de corrélation entre taux de criminalité et peine de mort
- La justice peut toujours se tromper, aussi prudente soit-elle

- Charte de l’environnement de 2004 : adossée au Préambule en 2005, comportant dix articles


relatifs au droit de chaque homme de vivre dans un environnement sain reposant sur le principe de
prévention (risques avérés de dommages) et sur le principe de précaution (risques éventuels).
Charte qui contient de façon assez inédite un certain nombre de devoirs (ex. obligation de prendre
part à la préservation de l’environnement). DC C° 2005 affirme que Charte a valeur C°.

NB : l’art 1246 du Code civil admet la réparation du préjudice écologique : validé par CC 5 février
2021.

NB 2 : le CE aussi applique la Charte pour s’assurer de la constitutionnalités des actes administratifs


déférés à son contrôle
Sur le principe de précaution : critique car favorise les interdictions par l’administration (moins
risqué juridiquement), serait un frein à la recherche et au progrès, termes de la charte sont flous,
pas de définition du dommage affectant de manière grave et irréversible l’environnement…

Normes non-textuelles
- Principes de valeur constitutionnelle (PVC) : normes identifiées par le Conseil constitutionnel,
sans nécessaire fondement textuel, ayant pour objet de consacrer des libertés et droits
fondamentaux :
Continuité du service public
- Objectifs de valeur constitutionnelle (OVC) : normes identifiées par le Conseil constitutionnel,
sans nécessaire fondement textuel, ayant pour objet de limiter l’exercice des libertés et droits
fondamentaux :

Sauvegarde de l’ordre public


Protection de l’environnement 2020

23
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 3 : LES SOURCES

FICHE 7 – LES SOURCES INTERNATIONALES


Droit international général (s’adresse à l’homme dans sa généralité)
Notions
- Convention : accord conclu entre sujets de droit international (État ou organisation
internationale),
régi par le droit international et liant les seules parties à l’accord en vertu du principe de l’effet
relatif.

- Coutume : norme générale, opposable à tous les États à l’exclusion des objecteurs persistants,
découlant d’une pratique fréquente et étoffée (élément objectif) perçue comme étant de droit
(élément subjectif).

- Principe général de droit : norme générale issue de la convergence des ordres juridiques
nationaux sur un même principe et de la transposition de ce principe dans l’ordre juridique
international.

- Principe général du droit : norme générale traduisant un principe structurant de l’ordre juridique
international (ex. : principe d’égalité entre les États, principe pacta sunt servanda).

- Jus cogens : norme impérative du droit international, indérogeable car protégeant des intérêts
qui lui sont fondamentaux (ex. : prohibition de la torture, du génocide, de l’esclavage et du
recours à la force armé).
La Convention de Vienne affirme la nullité de tout traité contrevenant au jus cogens, même si la
norme de jus cogens est affirmée après la conclusion du traité.
Instruments
• Instrument non-conventionnel
- Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 : texte déclaratif, sans valeur
conventionnelle, issu d’un compromis entre les EM des Nations Unies ayant pour objet de poser
une matrice des droits inhérents à l’homme, ayant vocation à être déclinés dans des
conventions universelles (ex. : PIDCP et PIDESC), des conventions régionales (ex. : CEDH, CIADH
et CADHP) et des conventions spéciales. Texte adopté sous la forme d’une résolution de
l’Assemblée Générale, pas de valeur contraignante car pas un traité international au sens de
l’article 55 de la Constitution.

• Instruments conventionnels (entrés en vigueur en 1976)


- Pacte international relatif aux droits civils et politiques de 1966 : texte conventionnel d’ordre
universel consacrant les droits civils et politiques, énoncés dans la DUDH, et faisant reposer leur
protection sur un mécanisme de protection spécialement compétent qu’est le Comité des droits
de l’homme chargé du respect des droits proclamés.

NB : la sanction d’une violation n’est que faiblement normative, avec l’établissement


d’observations et de recommandations.

24
MODULE I – LES NOTIONS FONDAMENTALES THÈME 3 : LES SOURCES

- Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de 1966 : texte
conventionnel d’ordre universel consacrant les droits économiques, sociaux et culturels,
énoncés dans la DUDH, et faisant reposer leur protection sur un mécanisme de protection
spécialement compétent depuis l’entrée en vigueur du Protocole facultatif en 2013 qu’est le
Comité des droits économiques, sociaux et culturels.
S’adresse ici à l’individu socialement et concrètement situé (ex. travailleur) et non à l’homme en
général

Droit international spécial (protègent des droits particuliers ou des catégories particulières)
Notions
- Droit international des droits de l’homme : droit obligeant les États à garantir les droits reconnus
aux personnes se trouvant sous leur juridiction, en tant de paix et en tant de guerre.

- Droit international humanitaire : droit régissant l’activité des États en période de conflits
armés internes et internationaux, eu égard aux personnes et aux biens affectés par les hostilités.

- Droit international pénal : droit réprimant les activités des personnes en position d’autorité
dans un État portant atteinte aux principes fondamentaux du droit humanitaire et des droits de
l’homme.

Instruments
• Spécialité à raison de l’objet des droits protégés (jus cogens)
- Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de 1948 : texte conventionnel
d’ordre universel prohibant le génocide et obligeant les États parties à le prévenir et le réprimer.

- Convention contre la torture et autres peines ou traitements inhumains ou dégradants de 1984 :


texte conventionnel d’ordre universel prohibant la torture et les traitements indignes et
obligeant les États parties à adopter des mesures positives concrètes pour en protéger les
personnes sous leur juridiction.

• Spécialité à raison des titulaires des droits protégés


- Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes de 1979 :
texte conventionnel d’ordre universel consacrant des droits pour les femmes fondés sur le
principe de non-discrimination à raison du sexe.

- Convention internationale relative aux droits de l’enfant de 1989 : texte conventionnel d’ordre
universel consacrant des droits pour les enfants fondés sur le principe de l’intérêt supérieur de
l’enfant.

25
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 5 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES INTERNATIONALES

FICHE 8 – LES SOURCES EUROPEENNES


Droit du Conseil de l’Europe
- Conseil de l’Europe : organisation internationale créée par le Traité de Londres de 1949, ayant
pour
objet la protection et la promotion des droits de l’homme, de la démocratie et de la prééminence du
droit par les États en Europe (même si des États non-européens en sont membres, ex. : Azerbaïdjan).
Instruments

CESDH 1950 :
1) texte conventionnel d’ordre régional consacrant les droits civils et politiques, et
faisant reposer leur protection sur un mécanisme de règlement des différends, obligatoire depuis 1998
et l’entrée en vigueur du Protocole n° 11, : la Cour européenne des droits de l’homme ;

2) les droits qui y sont consacrés sont universels), leur protection repose sur le principe
d’effectivité (interprétation téléologique) et sur le principe d’actualité (interprétation évolutive) et leur
garantie est objective (obligatoire même en absence de réciprocité des autres États) ;

3) la Convention européenne des droits de l’homme est l’« instrument constitutionnel


de l’ordre public européen » car neutralise la portée de la souveraineté étatique : CEDH 1995 c. Turquie.

Charte sociale européenne 1961 : texte conventionnel d’ordre régional consacrant les droits
économiques, sociaux et culturels, initialement énoncés dans la DUDH, et faisant reposer leur
protection sur un mécanisme de simples recommandations devant le Comité européen des droits
sociaux, pas de portée exécutoire. Saisi par les organisations syndicales notamment.

Droit de l’Union européenne

- Union européenne : organisation internationale qui trouve ses origines dans le Traité de Rome de
1957, ayant pour objet une coopération économique et politique entre les États en Europe.
Instruments
- Principes généraux du droit de l’Union européenne : source de droits dégagés par la CJUE de
manière prétorienne, prenant bien souvent pour inspiration les traditions constitutionnelles communes
aux États membres et les droits consacrés dans la Convention européenne des droits de l’homme en
tant qu’« instrument international concernant la protection des droits fondamentaux auxquels les
États membres ont coopéré ou adhéré » : CJCE, 1974, Nold (ex. : le droit au juge dans CJCE, 1986,
Johnston).

- Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne : texte conventionnel d’ordre régional,
proclamée à Nice en 2000 mais entrée en vigueur en 2009 (avec le Traité de Lisbonne de 2007),
consacrant les droits qui faisaient jusque-là l’objet de PGDUE et contraignant les institutions
européennes ainsi que les activités législatives, judiciaires et administratives des EM lorsqu’ils «
mettent en œuvre » le droit de l’Union européenne.
26
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 5 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES INTERNATIONALES
Sur l’articulation CEDH / Charte, protègent des droits similaires et Charte prévoit que Cour EDH est
compétente pour l’interpréter, donc pas de soucis concernant une potentielle interprétation différente.
THEME 4 : LA PROTECTION INSTITUTIONNELLE INTERNATIONALE

Différence majeure entre le Droit international des DH et le Droit pénal international :

Le DIDH : repose sur une théorisation des DH à travers une matrice conceptuelle : DUDH de 1948 :
elle n’a pas de valeur obligatoire : elle déclare qu’un certain nombre de droits auraient vocation à être
reconnus. La DUDH est le début pour l’instauration d’un système plus général et obligatoire des DH.
Autrement dit, la consécration des DH dans des conventions.
La conséquence est la rédaction du PIDCP et PIDESC qui fait émerger l’idée que les DH devraient être
déclinés au niveau régional (chaque région a des particularismes et des difficultés systémiques
différentes).
DONC CESDH en Europe : permet une mise en œuvre effective des ces droits.

Le DIDH est donc le résultat d’une théorisation des DH.

Le DPI : la logique est celle d’une réaction à la commission d’exactions qui donnent lieu à un besoin
ressenti de punir.
Les juridictions pénales ont été créées en réaction à des atrocités : construction empirique sans
réflexion d’ensemble (mais la CPI donne désormais une impression de stabilité).

Différence entre les normes internationale de DH et les normes pénales internationales :

a. Normes internationales de DH : elles ont pour objet de consacrer des droits : elles posent
également des obligations à la charge des Etats.

b. Normes pénales internationales : droit de la responsabilité individuelle des dirigeants


politiques pour les : mise à la charge d’individus d’obligations de ne pas commettre
certains crimes.

27
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 5 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES INTERNATIONALES

FICHE 9– LES JURIDICTIONS PENALES INTERNATIONALES


Juridictions pénales internationales
- Tribunaux militaires internationaux : juridictions pénales internationales temporaires chargées
de juger des crimes contre l’humanité, de guerre et contre la paix commis lors d’un conflit armé
international. Ces tribunaux n’existent plus : leur objet est éteint.
1) Tribunal de Nuremberg : mis en place par l’Accord de Londres du 8 août 1945 pour juger
« les grands criminels de guerre des pays européens de l’Axe », sans limite géographique.

2) Tribunal de Tokyo (pour l’Extrême-Orient) : mis en place par la Proclamation spéciale


du 16 janvier 1946 pour « la poursuite et le châtiment des grands criminels de guerre ».

- Tribunaux pénaux internationaux : juridictions pénales internationales temporaires créées par le


Conseil de Sécurité des Nations Unies (CSNU) chargées de juger des crimes contre l’humanité, de
guerre et de génocide.

1) Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) : créé par la Résolution de

1993 du Conseil de Sécurité pour connaître des agissements à compter du 1er janvier 1991 (limite
temporelle) sur le territoire de l’ex-Yougoslavie (limite géographique).

2) Tribunal Pénal International pour le Rwanda (TPIR) : créé par la Résolution 955 de
1994 du Conseil de Sécurité pour connaître des agissements commis entre le 1er janvier et le 31
décembre 1994 (limite temporelle) sur le territoire du Rwanda et par des ressortissants rwandais sur le
territoire d’États voisins (limite géographique).

Ces tribunaux sont arrivés au terme de leur mandat : ne fonctionnent plus.

MAIS a été créé le « Mécanisme » : appelé à exercer les fonctions résiduelles des Tribunaux pénaux :
juridiction résiduelle créée par une Résolution de 2010 du Conseil de Sécurité chargée de prendre le
relai des deux Tribunaux pénaux internationaux (TPIY et TPIR) : poursuite des criminels ayant commis un
crime de guerre ou génocide.
Ex : le financier du génocide du Rwanda, Félicien Kabuga, a été déféré au Mécanisme.

- Tribunaux pénaux « internationalisés » : juridictions pénales qui fonctionnent au niveau national.


MAIS ce sont des tribunaux hybrides : les statuts qui prévoient leur existent contiennent des
éléments nationaux et internationaux : prévoient une hybridité dans le fonctionnement.
Leur existence découle d’une logique consensuelle entre les autorités nationales et des
autorités internationaux,
Ces juridictions peuvent résulter d’accords de paix.

28
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 5 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES INTERNATIONALES
1) Tribunal Spécial pour la Sierra Leone (TSSL)
2) Chambre Extraordinaire au sein des Tribunaux Cambodgiens (CETC)

- Cour pénale internationale : juridiction pénale internationale permanente créée par le Statut de
Rome de 1998 pour juger des crimes contre l’humanité, de génocide, de guerre et d’agression commis
à compter du 1er juillet 2002 par des ressortissants ou sur le territoire d’un État partie au Statut de
Rome ; sa compétence est complémentaire de celle des juridictions pénales nationales, c’est-à-dire
qu’elle se saisit d’une affaire en cas d’absence de volonté ou de capacité pour l’État de juger l’auteur
présumé.
Alors que CEDH suit une logique de subsidiarité car vérifie juste que Etats ont bien appliqué CEDH. Pour
être responsable d’un crime, il faut être une PP et il faut avoir l’intention et être conscient de commettre
ce crime.

Saisine : par un Etat ayant ratifié (sur le territoire duquel crime / duquel ressortissant est criminel)
(1), ou par conseil de sécurité des NU (2) ou saisine par Procureur donc auto saisine (3)
NB : un particulier ne peut pas saisir la CPI.
Procureur de la CPI : Karim Kahn depuis début 2021
Sanctions possibles : prison à perpétuité / amendes / confiscation profits liés au crime…

Crimes de droit pénal international

- Génocide : meurtre, atteinte grave à l’intégrité physique ou mentale, stérilisation ou avortement


forcé, transfert forcé d’enfants ou soumission à des conditions de vie devant entraîner la
destruction totale ou partielle d’un groupe national, ethnique, racial ou religieux avec l’intention
de détruire ce groupe.

- Crime contre l’humanité : contraires à la dignité humaine (meurtre, extermination, réduction en


esclavage, déportation ou transfert forcé de population, emprisonnement, torture, viol, esclavage
sexuel, persécution, disparition forcée de personnes, crime d’apartheid ou autres actes
inhumains) commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre une
population civile et en connaissance de cette attaque.

- Crime de guerre : infractions graves aux Conventions de Genève 1949 et aux lois et
coutumes applicables aux conflits armés internationaux dans le cadre établi par le droit
international.

>>> Pour ces 3 crimes, les personnes punies peuvent être celles de nationalité d’un Etat ayant
ratifié statut de Rome / ou qui ont commis le crime sur le territoire d’un Etat partie au statut de
Rome.

29
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 5 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES INTERNATIONALES
- Crime d’agression (défini en 2010 seulement car en 1998 pas d’accord sur la définition) : acte
d’agression (emploi de la force armée) qui, par sa nature, sa gravité et son ampleur, constitue une
violation manifeste de la Charte des Nations Unies (de la résolution 33/14), donc pas en légitime
défense et pas avec l’autorisation du conseil de sécurité des Nations Unies.
>>> Particularité de ce crime car plus restreint, il faut que ce soit une personne de nationalité d’un
Etat ayant ratifié le statut de Rome + commettent le crime sur un Etat partie au statut de Rome ET
au protocole de 2010 définissant ce crime.
Remarque : le principe de légalité pénale est-il respecté en matière internationale dès lors que les
personnes sont poursuivies pour des faits incriminés par un texte qui n’existait pas au moment de
la commission de l’infraction ?
A priori non.
TOUTEFOIS, ka logique est que les personnes poursuivies le sont, certes sur la base de textes
adoptés postérieurement, mais que ces textes n’ont pour objet que la consécration textuelle e
principes élémentaires et universels communs à l’humanité.

FOCUS SUR L’UKRAINE


Poutine, le 24 février 2022, a ordonné l’invasion de l’Ukraine.
Le Procureur de la CPI a ouvert une enquête le 3 mars 2022 concernant l’opération militaire de la Russie
envers l’Ukraine, qui a débuté fin février. Poutine la justifie par des mouvements séparatistes du Pays et
un génocide des russophones par les ukrainiens.
L’interdiction de recourir à la force dans les relations internationales est une norme impérative du
droit international coutumier selon CIJ 1986, avec2 exceptions :
> Légitime défense
> Habilitation par conseil de sécurité des NU
Pas le cas ici, donc était interdit. L’AG des NU a reconnu cette opération comme étant une agression
armée.
MAIS la Russie a dénoncé le statut de Rome en 2016, donc ne fait plus partie de celui-ci et la CPI n’est
ainsi pas compétente de ce point de vue. Ukraine n’est pas partie non plus mais a accepté la
compétence de la CPI à deux reprises en 2014 et 2015, ce qui pourrait la rendre compétente.
Ici Procureur pourrait qualifier de Crime de guerre car la Russie a causé plusieurs milliers de victimes
civiles, détruit des hôpitaux, des théâtres…
MAIS DONC IMPOSSIBLE qu’il soit déféré pour crime d’agression CAR même s’il a bien ordonné l’emploi
de la force armée de l’Ukraine, et que c’est une agression (reconnu par AG), la Russie n’est pas partie au
Statut de Rome et l’Ukraine non plus, donc de toute façon conditions pas remplies.

FOCUS SUR LA COMPETENCE UNIVERSELLE DU JUGE PENAL FRANÇAIS EN MATIERE DE GENOCIDE ET


DE CRIMES CONTRE L’HUMANITE
Crim. 24 novembre 2021 :

30
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 5 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES INTERNATIONALES
En principe, le juge pénal français n’est compétent que si l’infraction est commise sur le territoire
français ou par un ressortissant français.
Néanmoins, le crime de génocide peut être jugé par le juge pénal français.
Le crime contre l’humanité aussi à la condition qu’il soit prévu dans la législation étrangère visée (1) et
commis en exécution d’un plan concerté (2)
MAIS CA de Paris résistante (arrêt CA Paris 4 avril 2022)

FOCUS SUR LA COMPLICITE – AFFAIRE LAFARGE ET SYRIE


Crim. 7 septembre 2021 : le simple fait pour une société de verser des millions d’euros à une
organisation criminelle pour assurer la sécurité de ses salariés caractérise une complicité même si
aucune volonté de prendre part à l’organisation criminelle et que son but était purement commercial.
Ce qui compte est qu’elle était au courant de l’objet exclusivement criminel de ce groupe armé.

31
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 10 – LA COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME


Organisation de la Cour européenne des droits de l’homme
- Juges : 46 membres (1 par État partie) élus par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe
pour un mandat de 9 ans non renouvelables, l’un d’eux étant le président de la Cour élu par la
Cour réunie en Assemblée plénière. CEDH date de 1950, France l’a ratifiée en 1974.
- Formations de jugement :
1) Juge unique : statue sur les demandes de mesures provisoires et les requêtes qui
n’ont
pas été communiquées au gouvernement car manifestement irrecevables, sans motivation.

2) Comité de trois juges : statue sur la recevabilité et/ou le fond d’une requête qui fait
l’objet d’une jurisprudence bien établie de la Cour, dans une décision ou un arrêt définitif.

3) Chambre : composée de 7 juges, statue sur une requête transmise par un juge
unique
ou un comité ou qui lui a été directement allouée, dans une décision ou un arrêt qui ne devient définitif
que si les parties au litige ont déclaré ne pas vouloir demander le renvoi de l’affaire devant la Grande
Chambre, si les parties n’ont pas demandé le renvoi dans les 3 mois suivants ou si cette demande de
renvoi a été rejetée par la Grande chambre.

4) Grande chambre : composée de 17 juges, statue sur les affaires dans lesquelles la
Chambre s’est dessaisie ou sur renvoi après que la Chambre a statué une première
fois.
- Requêtes :
1) Requête interétatique :requête introduite par un État partie contre un autre État
partie.
2) Requête individuelle : requête introduite par un individu contre un État partie.

- Procédures particulières :
1) Procédure de l’arrêt pilote : lorsqu’une violation d’un droit conventionnel trouve
son
origine dans un problème systémique et structurel dans l’ordre juridique international, qui aboutit à
l’introduction d’un grand nombre de requêtes répétitives devant la Cour, celle-ci donne des indications
à l’État défendeur sur la manière d’éliminer le dysfonctionnement.

2) Procédure de règlement amiable : conciliation, dont l’effet est de rayer l’affaire du


rôle, dans le cadre de laquelle la Cour vérifie si la somme convenue entre les parties correspond à ce
qu’elle aurait pu octroyer en cas de violation au titre de la satisfaction équitable.

3) Demande de satisfaction équitable : demande de réparation forfaitaire du


dommage
subi en cas de violation de la Convention et si le droit interne ne permet pas de le réparer.

32
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme


- Notion autonome : notion dont la définition est propre au droit de la CESDH et indépendante des
définitions qu’elle reçoit dans les ordres juridiques des États parties. Exemple tribunal au sens de la
CEDH = organe qui tranche problèmes de droit. Donc la CNIL en France est un tribunal selon CEDH.

- Obligation positive : obligation des autorités de l’État de mettre en œuvre les moyens
raisonnablement exigibles pour prévenir ou remédier aux situations contraires aux droits
conventionnels
- Obligation négative : obligation pour l’Etat de ne pas faire obtacle à la protection effective des
DLF de ses ressortissants, de sorte à ce que soit respecté le droit

- Violation virtuelle : violation caractérisée par la contrariété, non d’une situation, mais des risques
de violation auxquels une situation expose le requérant (ex. : expulsion vers un État où il risque la
torture)

- Nécessité dans une société démocratique : test de proportionnalité mis en œuvre par la Cour
pour contrôler que la mesure litigieuse est nécessaire pour atteindre un but légitime sans être excessive.

- Autorité de la chose jugée : une décision (jugement sur la recevabilité) ou un arrêt (jugement au
fond) de la Cour européenne des droits de l’homme n’est obligatoire, une fois définitif, que pour le ou
les États parties au litige concerné et ils doivent en tirer les conséquences, pour réparer et prévenir des
violations similaires à celles éventuellement constatées par la Cour, sous la surveillance du Comité des
Ministres.

Double conséquence d’un arrêt de la CEDH :


> Effet pour la partie concernée
> Effet d’interprétation de la Convention donc autres Etats doivent respecter JP (prévention) car CEDH
considère que sa JP est une source générale du droit

Effet des arrêts CEDH en France :

> Impact législatif important car nombreuses réformes à la suite d’arrêts CEDH (dans lesquels France était
partie), exemple loi de 1991 sur le secret des correspondances après arrêt de 1990

> Impact jurisprudentiel aussi, exemple affaire Mennesson refus par France de transposer filiation sur
état civil français pcq enfant né d’une GPA à l’étranger, CEDH sanctionne pour violation de l’article 8 de la
33
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
CEDH, et Cass se soumet à cette jurisprudence en 2015.

Avis consultatifs peuvent aussi être rendus.

EXCLUSION DE LA RUSSIE DU CONSEIL DE L’EUROPE

> Décision du 16 mars 2022 : Comité des ministres du Conseil de l’Europe a exclu la Fédération de Russie
à partir du 16 septembre 2022 car ne respecte pas le principe de prééminence du droit / respect des DLF
(avant, avait suspendu son droit de représentation mais face à absence de réaction de la Russie,
exclusion). Première fois qu’un membre est exclu.

> Conséquences :

- La Russie n’est plus membre du Conseil de l’Europe et ne participe donc plus financièrement (alors
qu’était son plus grand contributeur)

- La Russie n’est plus partie à la Convention EDH, donc tous les actes commis par la Russie à partir du 16
septembre 2022 ne sont plus soumis à la CEDH. Les citoyens russes ne sont plus protégés par le recours
possible devant la CEDH.

Articulation – Protection nationale


Protection, système d’alerte : en amont
= alerte sur une situation qui en tant que telle pose pb, et plusieurs personnes seront visées
= situations qui resteraient dans l’ombre sans cette alerte
a) L’indisponibilité
= même le législateur n’a pas connaissance du problème, il n’a donc pas créé de voie de recours
Exemple prison où situations d’incarcération atroces, torture mais personne au courant
b) L’inaccessibilité
= victimes n’ont pas connaissance de leurs droits / des voies de recours qui existent
c) L’ineffectivité
= problème d’ordre probatoire, lorsque tout est caché (exemple dans la prison torture cachée)
Si a) b) ou c), l’effectivité des DLF ne sera pas respectée.
d) Plusieurs institutions (sont des AAI)
Création Sanction
La CNIL (Commission Loi informatique et liberté de Veiller à ce que le droit à la
nationale de l’information et 1978 protection des données
des libertés) personnelles soit protégé,
obligations ont été pour la
plupart consacrées par le
34
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

RGPD 2016
La CADA (Commission Loi de 1978 Veiller au respect du droit
nationale d’accès aux d’accès aux documents
documents administratifs) administratifs (ce droit fait
partie du droit à la liberté
d’expression de l’article 10
CEDH)
La CGLPL (Contrôleur général Loi de 2007 (pcq France est Mission est que les
des lieux de privation de partie à une convention de personnes qui se trouvent
liberté). Nommé par Pdt l’ONU contre torture et dans un lieu de privation ne
République. traitements inhumains et fassent pas l’objet d’un
dégradants) + protocole traitement inhumain et
Dominique Simmonot
facultatif qui prévoit organe dégradant.
national veillant au respect
PP / associations peuvent
des obligations de l’Etat
saisir. Premier ministre aussi,
découlant de la ratification
membres du gvnt, du
de la convention
parlement, et autres AAI (et
auto saisine).
Pas de pouvoir direct de
sanction mais publication de
l'observation / et peut relater
au procureur de la
République si infraction
pénale.
Défenseur des droits Révision c° de 2008, statut c° Article 71-1 Constitution
Depuis 2020, Claire HEDON. = fusion de 4 institutions Immunité juridictionnelle //
Mandat de 6 ans non entre médiateur de la les parlementaires
renouvelable et non République / du défenseur
Incompatibilité de cette
révocable. Nommé par des enfants / de la haute
fonction avec d’autres
Président de la République. autorité de la lutte contre les
métiers ou mandats électifs
discriminations / de la
commission nationale de
déontologie
AAI = institution administrative indépendante = organisme administratif qui agit au nom de l’Etat mais
qui ne relève pas de l’autorité du Gouvernement
L’indépendance = pas de subordination, pas de pression d’une autre entité
Importance de l’indépendance car l’obligation de protéger les droits de l’Homme incombe à
l’Etat, donc si pas d’indépendance pas de contrôle réel.
A – Mission de contrôle
Droit de contrôle des locaux par la CNIL, des établissements qui traitent des données personnelles
(associations, entreprises privées, organismes publics…, exemple de Google). Depuis 2016, avec le
RGPD, la CNIL peut aussi contrôler les locaux des sous-traitants qui mettent en œuvre le traitement des
données personnelles.
Le CGLPL, droit de visite des lieux de privation de liberté. Zones d’attente / zones pénitentiaires…
Remarque : depuis loi du 22 décembre 2021, bâtonniers peuvent désigner avocats pour faire ce
contrôle
35
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
B – Mission d’information
Recommandations peuvent être formulées par CGLPL après qu’il a exercé son contrôle. Permet de
faire la lumière sur les situations et de résoudre le problème probatoire (ineffectivité).
Arrêt JMB et autres contre France, 2020 : plusieurs détenus alléguaient que conditions indignes de
détention, mais pb de preuve donc utilité du rapport du CGLPL, et CEDH a conclu à la violation du droit
de ne pas faire l’objet de traitements inhumains et dégradants
Défenseur des droits formule aussi recommandations sur sujets qui relèvent de sa mission. Exemple
procès des attentats du Bataclan : comment caractériser victime de l’attentat ? Proches aussi ?
Défenseur des droits a publié des recommandations.
La CNIL peut aussi faire des recommandations pour éclairer le sens des obligations des structures
traitant des données personnelles, donc relève plutôt de directives qu’elle donne.
Si information mais que rien n’est fait, alors on passe à la protection en aval.
1. Protection, résolution litige en aval (car si violation d’un droit, veut dire que qlq n’a pas rempli son
obligation)
= résolution du litige au cas par cas
Remarque : protection en aval ne correspond pas à protection juridictionnelle, car CEDH, Pl., 1984,
Sramek c. Autriche définit le tribunal (notion autonome) comme étant tout organe – qu’il soit conçu
comme un organe juridictionnel ou non par le droit interne – établi par la loi, chargé de trancher, sur la
base de normes de droit et à l’issue d’une procédure organisée, toute question relevant de sa
compétence
Définition de la juridiction = institution qui exerce une fonction juridictionnelle, en latin juridiction veut
dire juris dictio, donc qui dit le droit -> car les juridictions ont une fonction d’interprétation mais aussi
d’application du droit dans le but de répondre à la question qui lui est posée / de résoudre le litige
A – Effectivité de l’accès
Les AAI y concourent.
Exemple des délégués, formées et travaillent pour le défenseur des droits. Gratuitement, ils assistent
les gens dans les démarches administratives ou d’accès au droit.
Le CGLPL peut initier lui-même des poursuites pénales et disciplinaires dans le sens où permet de
convaincre procureur de mettre en mouvement une action publique. Alors que si une personne allait
porter plainte et que était la seule, moins efficace. Accompagnement du Procureur ici.
B – Effectivité du recours
 Soit une situation est contraire aux DLF
Dualisme juridictionnel : lois des 16 et 24 août 1789 principe de séparation des autorités
administrative et judiciaire. Voir fiche 17.
Possible d’exercer recours contre décision administrative (REP) mais aussi contre décisions des AAI
(exemple demande d’accès à la CADA qui refuse).
Voir fiche 16.
 Soit le droit en lui-même est contraire aux DLF
> Contrôle de conventionnalité (juges ordinaires), conformité du droit aux normes conventionnelles,
si pas conforme, juge doit écarter la loi en question et ne pas l’appliquer
> Contrôle de constitutionnalité des lois (conseil constit pour vérifier conformité de la loi / juges
ordinaires vérifient conformité décrets)

36
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 11 – LES RECOURS DEVANT LA COUR EUROPEENNE DES DROITS DE L’HOMME


Le recours interétatique
- Recours interétatique : voie de recours ouverte à tout État partie à la Convention européenne
des
droits de l’homme, lui permettant de saisir la Cour européenne pour alléguer la violation par un autre
État partie à la Convention de ses obligations conventionnelles : article 33 de la CESDH.

Le recours individuel (article 34)


- Recours individuel : voie de recours ouverte à toute personne se trouvant sous la juridiction d’un
État partie à la CESDH, obligatoire depuis l’entrée en vigueur du Protocole n° 11 en 1994 et constitutive
d’un véritable droit de recours international (CEDH 2005), lui permettant d’alléguer la violation par cet
État partie de ses obligations conventionnelles : article 34 de la CESDH.

- Conditions tenant au requérant :


1) personne : peut se réclamer de la protection de la Convention toute personne
physique
et toute personne morale si elle est une « organisation non gouvernementale » au sens de l’article 34

2) qualité de victime : il faut qu’il y ait un véritable litige (rejet des actions popularistes)

- catégories de victimes : une personne peut être victime directe – lorsqu’elle est « directement
affectée » par la mesure étatique litigieuse – ou indirecte – si elle est un proche d’une personne décédée
en conséquence des actes reprochés à l’État (CEDH, , 2009, c. Turquie) ; une victime directe peut être une
victime potentielle, lorsque la décision litigieuse n’a pas produit ses effets mais où le risque de violation
serait avéré et le dommage irréversible si elle venait à les produire (CEDH, 1989, Soering c. Royaume-Uni)

- perte de la qualité de victime : en cas de reconnaissance de la violation par les


autorités et de la réparation du dommage subi par le requérant en conséquence.

- Conditions tenant à la procédure :


1) épuisement des voies de recours internes : devoir pour le requérant à deux égards :
1) volet procédural : exercer les voies de recours internes disponibles et effectives,
c’est-à-dire présentant des chances raisonnables de redressement des griefs ;
2) volet matériel : invoquer en substance les griefs conventionnels

2) délai de saisine de la Cour : avec l’entrée en vigueur du Protocole n° 15, le délai de


saisine de la Cour européenne des droits de l’homme est passé de 6 à 4 mois à compter de l’obtention
de la dernière décision définitive interne une fois les voies de recours épuisées.

3) abus de droit : obstacle procédural à ce qu’un requérant puisse se prévaloir de la


protection conventionnelle au titre d’un droit qu’il aurait exercé en le détournant de ses finalités ou
pour nuire à autrui, en contrariété avec les valeurs au fondement de la Convention.

37
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

- Conditions tenant à la compétence de la Cour :


1) compétence ratione materiae : compétence pour examiner le respect des seuls
droits
protégés par la CEDH, en faisant application et interprétation de ses dispositions.

2) compétence ratione personae : compétence pour examiner le respect par un État


partie à la CEDH à l’égard d’une personne sous sa juridiction (article 1er de la Convention), soit une
personne à l’égard de laquelle l’État a exercé son autorité ou son contrôle, a adopté une décision
produisant des effets à son endroit, et entre lesquelles il existe un lien –territorial ou personnel – de
rattachement (CEDH, décision, 2020, M.N. c. Belgique).

3) compétence ratione loci : en général, une personne se trouve sous la juridiction d’un
État partie si elle se trouve sur son territoire (CEDH, décision, 2001, Bankovic c. Belgique).

4) compétence ratione temporis : compétente pour examiner les situations se déroulant


à compter de la ratification par l’État partie de la Convention ou de ses Protocoles.

- Conditions tenant au fond :


1) absence de défaut manifeste de fondement : est irrecevable toute requête qui, à
l’issue d’un examen préliminaire, ne révèle aucune apparente violation de la Convention – soit parce
qu’aucun manquement à la Convention n’est allégué, soit parce qu’il ressort d’une jurisprudence de la
Cour que la situation ne soulève pas de problème conventionnel, soit parce qu’aucun apparence
d’arbitraire ou de disproportion ne se dégage des griefs.

2) existence d’un préjudice important : est irrecevable une requête dans le cadre de
laquelle le préjudice subi par le requérant du fait des actes litigieux est mineur – le seuil de gravité
étant apprécié objectivement (enjeu de l’affaire) et subjectivement (effets sur le requérant) – à moins
que le respect des droits de l’homme en exige un examen au fond.

La q de la juridiction est au cœur du litige avec rapatriement des femmes et enfants français détenus en
Syrie. En effet, si sont sous la juridiction de la France, alors France doit appliquer CEDH. Ne sont pas en
France, donc pas territorialement en France, mais France aurait refusé de les rapatrier de façon
souveraine et lien avec personnes car elles sont françaises. Donc lien personnel. Le 6 février 2022, CEDH a
condamné la France et lui a ordonné de procéder au rapatriement. Elle considère que la France a
méconnu le droit d’entrer sur le territoire national.

Principe d’effectivité
= Airey contre Irlande, CEDH 1979 : les droits doivent être protégés non de façon théorique et illusoire
mais de façon pratique
Droits procéduraux 1 = permettent l’effectivité des droits matériels (donc du respect par l’Etat de ses
obligations = droit à un recours effectif

Droits procéduraux 2 = garantissent l’effectivité des droits procéduraux 1 (= droits qui permettent de
garantir la régularité de la procédure et les droits qui permettent d’assurer l’utilité de la procédure
38
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
(célérité et loyauté))
Célérité : en effet, si justice trop lente, pas efficace (exemple avec documentaire sur Pedro), délai
raisonnable (dépend évidemment du litige, logique de proportionnalité)
Loyauté : dans l’administration de la preuve notamment

Effectivité de l’absence d’arbitraire des pouvoirs publics : article 13 CEDH peut être invoqué en
combinaison avec article 6 en ce que article 6 n’aurait pas été reconnu
Effectivité de l’absence d’arbitraire du tribunal : par exemple si absence de respect de la présomption
d’innocence (car par exemple condamnation fondée sur une erreur de preuve, donc preuve n’a pas été
apportée), possibilité de recours (double degré de juridiction pénale, article 2 protocole 7 CEDH)

Droit procédural = source d’obligation pour l’Etat de garantir l’effectivité des droits

Exemple de pb à ce sujet qui s’est posé : circonstances d’incarcération pas bonnes, référé liberté,
mais en 48h juge ne pouvait pas remédier au pb car pouvait juste enjoindre à l’administration
qlqchose / et JLD n’avait pas ce pouvoir pour les détenus en détention provisoire, donc n’avaient pas
de pouvoirs suffisants pour remédier à la violation du droit -> donc il n’y avait pas voie de recours
effective -> DONC législateur a mis en œuvre une nouvelle loi modifiant le CPP, prévoyant pouvoirs
plus importants aux JLD, peuvent enjoindre à l’administration de prendre toute mesure appropriée
pour mettre fin à la violation

REMARQUE IMPORTANTE : un texte (ex. la CEDH) ne présente jamais une liste exhaustive. En effet,
il y a toujours d’autres droits qui peuvent en être tirés. Donc même si n’est pas énuméré, peut être
reconnu en JP ou juste qu’il soit logique qu’il existe. Donc même si on oublie qu’est consacré dans
texte, ne jamais dire qu’il n’existe pas si on pense que logique qu’il existe !

39
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
THEME 5 : LA PROTECTION INSTITUTIONNELLE NATIONALE

Principe d’effectivité : Airey contre Irlande, CEDH 1979 : les droits doivent être protégés non de façon
théorique et illusoire mais de façon concrète et effective. Il ne suffit pas de consacrer des droits, que ces
textes soient nationaux ou internationaux.
Les instances de protection non juridictionnelles permettent de faire produire leurs effets aux droits
consacrés. Certaines institutions permettent de fournir les éléments (de preuve notamment) permettant
de condamner la violation des DLF.

Cette protection institutionnelle peut prendre 2 formes :


- une protection en amont : établissement d’une documentation sur laquelle pourra s’appuyer
l’autorité compétence pour prendre la décision relative à la violation ou y remédier.
Il s’agit d’informer le public sur des éléments qui pourraient entraîner des violations : alerte sur des
problèmes systémiques

- une protection en aval : vise à résoudre les litiges nés de la violation. Elle est à destination des
individus lésés.
Il s’agit ici d’une réparation des violations produites, réparation casuistique ici.

NB : cette distinction n’est pas identique à la distinction entre institutions non juridictionnelles et
juridictionnelles : la protection en aval que permet l’accès un tribunal au sens de l’art. 6 CEDH n’est pas
nécessairement l’accès à une juridiction nationale (cf définition autonome du tribunal par la CEDH).

Une juridiction est une institution qui exerce la fonction juridictionnelle. Cette dernière est une
institution chargée de dire le droit (juris dictio) : fonction qui consiste à interpréter et appliquer le droit
à une situation de fait dans le but de résoudre le litige qui en ressort.

40
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 12 – LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL


Conseil constitutionnel
- Membres :
1) Membres de droit : anciens Présidents de la République.
2) Membres nommés : 9 membres nommés pour un mandat de 9 ans irrévocable
et non renouvelable ; 3 sont nommés par le PLR, (donne lieu à un contrôle parlementaire), 3 autres
sont nommés par le Président du Sénat et les 3 derniers par le Président de l’AN, sur avis de la
commission permanente compétente de l’assemblée parlementaire concernée.
- Compétences : pas seulement fonction de contrôle constitutionnel
1) Compétence consultative : rend un avis lorsque le Président de la République le
consulte sur la mise en œuvre de l’article 16 de la Constitution (pouvoirs exceptionnels) et vérifie si les
conditions à sa mise en œuvre sont toujours réunies au bout soit de 30, soit de 60 jours.

2) Compétence juridictionnelle : exerce une fonction de juge électoral en matière


d’élection présidentielle, des élections législatives et du déroulement du référendum et contrôle
les mandats électoraux en contrôlant les conditions de la fin du mandat avant terme.

3) Contrôle de constitutionnalité :
1) des règlements des assemblées parlementaires, le contrôle est obligatoire.
2) des lois : si la loi est organique, le contrôle a priori est obligatoire ; si la loi
est ordinaire, le contrôle a priori et a posteriori est facultatif ; si la loi est
référendaire, le Conseil constitutionnel se déclare incompétent.
3) des engagements internationaux : contrôle avant ratification ou approbation
d’un traité.

EXAM : Le CC est-il une juridiction ?


Une juridiction est une institution qui interprète et applique du droit à une situation litigieuse qui lui
est soumise ou à une question de droit posée, pour la résoudre.
Le CC, dans le cadre de son contrôle a posteriori, interpréter et fait application des normes
juridictionnelles afin de répondre à la QPC.
Il existe donc des éléments de similarité.
MAIS le CC ne résout par le litige : il ne s’intéresse pas aux faits.

Contrôle de constitutionnalité des lois


- Contrôle a priori : contrôle de la conformité à la Constitution des dispositions législatives après le
vote et avant la promulgation de la loi.
- Contrôle a posteriori :contrôle de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution
des dispositions législatives en vigueur dans le cadre d’un litige devant les juridictions ordinaires.
- Saisine :
1) Contrôle a priori : initialement réservée au PLR, PM ministre, Président de l’AN ou
Président du Sénat, la saisine a été élargie à 60 députés ou 60 sénateurs (révision du
29 octobre 1974).
2) Contrôle a posteriori : instauration de la QPC transmise par les juridictions ordinaires sur

41
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
la demande du justiciable (révision du 23 juillet 2008).

- Techniques de contrôle :
1) Effet cliquet : le législateur, compétent pour fixer les droits et libertés des citoyens,
ne
peut faire marche arrière en abaissant le seuil de protection octroyée (liberté d’expression).

2) Garanties légales : le législateur ne peut pas décliner législativement un droit


protégé
par la Constitution en prévoyant un régime moins protecteur que celui du droit constitutionnel, ni en
omettant de prévoir les garanties indispensables à son effectivité.

3) Réserve d’interprétation : indication par le Conseil constitutionnel, après avoir validé


une disposition législative, du sens qu’il convient de lui donner.

4) Types de contrôle : dénaturation, erreur manifeste d’appréciation ou triple test. Entier


(aptitude, nécessité) ou restreint (restreint = vérifie que pas manifestement contraire).

Ce contrôle constitutionnel est-il la mise en œuvre d’une fonction juridictionnelle ?

 Au départ, c’était juste vérification de la manière de mettre la loi en place (vérification


procédurale)
 Mais ensuite évolutions, ouverture saisine à 60 députés et 60 sénateurs (but était d’ouvrir la
saisine à une minorité, recherche d’effectivité procédurale car sinon majorité ne saisissait pas,
logique)
 Et surtout décision du 16 juillet 1971 liberté d’association -> CC vérifie constitutionnalité des lois
par rapport au bloc de constitutionnalité
 Donc 1971 et 1974 = grosses étapes dans l’effectivité du contrôle
 MAIS il reste un pb quand la loi est entrée en vigueur / si juges l’interprètent dans un sens
contraire / si C° est modifiée… pb car contrôle était seulement a priori !!
 C’est pq la révision constitutionnelle de 2008 est capitale : elle crée la QPC, question prioritaire de
constitutionnalité, contrôle a posteriori, donc CC peut abroger une loi en vigueur

Particularité de la QPC : peut être vérifiée seulement la conformité aux DLF et non à la procédure
pour adopter la loi

Procédure : voir fiche QPC

Remarque -> les institutions internationales contribuent aussi à la vérification du respect des DLF : (fiche
18)

1. Le système onusien
>> Charte des NU
>> Les traités (ensemble des conventions internationales négociées dans le cadre de l’ONU)

Toutes les conventions sont assorties d’un comité ! Deux types de contrôle : plainte / rapport
(fiche18)

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 13 – LA QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE (QPC)


La procédure de QPC
Question prioritaire de constitutionnalité : voie de contrôle de conformité de la loi aux droits et libertés
garantis par la Constitution, créée par la réforme du 23 juillet 2008 à l’article 61-1 de la Constitution, a
posteriori de la promulgation de la loi et dans le cadre d’un litige devant les juridictions ordinaires.
Permet prééminence de la Constitution dans l’ordre juridique.
Procédure de QPC : la procédure se divise en deux phases de filtres :
- transmission de la QPC aux juridictions suprêmes :
1) une QPC peut être posée au cours de toute instance judiciaire ou
administrative, en faisant l’objet d’un écrit distinct des conclusions relatives à l’objet principal et motivé
;
2) parce qu’elle est « prioritaire », la juridiction saisie du litige l’examine sans délai
et avant toute autre question de droit et transmet la QPC au CEou à la Cour de cassation si :
1) la disposition législative litigieuse est applicable au litige ou constitue le fondement des
poursuites
2) elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution(caractère nouveau)
3) la QPC n’est pas dépourvue de caractère sérieux.

Le refus de transmettre ne peut faire l’objet d’un recours qu’avec la décision au fond

la juridiction saisie sursoit à statuer jusqu’à réception de la décision du CE ou de la Cour de cassation et,
s’il a été saisi, du Conseil constitutionnel – sauf si une personne partie au litige est privée de sa liberté
individuelle. Et peut prendre mesures provisoires ou conservatoires.

- renvoi de la QPC par les juridictions suprêmes au Conseil constitutionnel :


1) une QPC peut être soit transmise au CE ou à la Cour de cassation par une
juridiction du fond qui en aurait été saisie, soit soulevée directement devant le Conseil d’État ou la Cour
de cassation ;
2) les juridictions suprêmes statuent dans un délai de 3 mois, sans quoi la QPC est
automatiquement renvoyée au Conseil constitutionnel : CC, 2012, M. Zafer E ;

la QPC est transmise au Conseil constitutionnel si :


1) la disposition contestée est applicable au litige ou constitue le fondement des poursuites
2), elle n’a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution
3) la QPC présente un caractère sérieux (formulation positive) OU est nouvelle (alternative).

Le principe de ce filtre garantit l’effectivité de la protection car sinon CC mettrait trop de temps à
statuer. MAIS ne doit pas être trop restrictif. Le CC accepte de contrôler le respect par une disposition
législative telle qu’elle est interprétée par les juges ordinaires. DC 6 et 14 octobre 2010 QPC. DC 2012
Lepen QPC, contrôle possible si C° a été modifiée et donc que loi plus conforme.

Décision du Conseil constitutionnel : si le CC déclare que la disposition législative est inconstitutionnelle,


il peut l’abroger à compter de la publication de la décision ou peut reporter ses effets dans le temps

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
pour protéger un objectif d’intérêt général qui serait sinon manifestement atteint.

Les termes de la QPC


Disposition législative : l’objet du contrôle de constitutionnalité, dans le cadre d’une QPC, peut-être une
disposition issue d’une loi ordinaire, d’une loi organique, d’une ordonnance ratifiée par le Parlement,
une loi dite « du pays » de Nouvelle Calédonie et les interprétations constantes faites en jurisprudence
par le Conseil d’État ou la Cour de cassation de ces dispositions (CC, 2010, Compagnie agricole de la
Crau).

MAIS le contrôle de constitutionnalité ne peut pas porter sur :

- une loi référendaire votée dans le cadre de l’article 11 de la Constitution puisqu’elle constitue «
l’expression directe de la souveraineté nationale » : CC, 2014, Province Sud de Nouvelle-Calédonie)

- une révision constitutionnelle adoptée au titre de l’article 89 : CC, 2003, Loi constitutionnelle
relative à l’organisation décentralisée de la République.

Droits et libertés garantis par la Constitution : le contrôle de constitutionnalité, dans le cadre d’une
QPC, s’opère à l’égard des seuls droits et libertés que garantit la Constitution (ex. : DDHC de 1789,
Préambule de la Constitution de 1946, Charte de l’environnement de 2004), à l’exclusion de toutes les
normes constitutionnelles ne garantissant pas de droits et libertés.

Remarque : alors qu’avec le contrôle a priori, est à l’égard de toutes les dispositions de la Constitution

Remarque : en 10 ans de QPC, environ 54% de décisions de conformité

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 14 – L’INDEPENDANCE DES JURIDICTIONS


Corps judiciaire
- Magistrat :
1) du siège : juge, il tranche les litiges sur la base du droit en rendant une décision ;

2) du parquet : procureur, conseiller-rapporteur, avocat général qui participent à


l’exercice
de la fonction juridictionnelle, en proposant une certaine lecture du droit et des faits d’une affaire pour,
parfois, recommander une solution, mais qui ne constituent pas une autorité judiciaire au sens de l’art.
5 § 3 de la CEDH, puisque leur statut les place sous l’autorité du garde des Sceaux et les prive de leur
indépendance (CEDH 2010, Medvedyev c. France).
Ils sont nommés par le PLR sur proposition du garde des Sceaux et après avis du CSM (mais cet avis du
CSM ne lie pas le ministre de la J). Ils sont aussi placés sous l’autorité de leur supérieur hiérarchique.
Chaque procureur représente le parquet entier (le ministère public).

3) Le ministère public peut participer aux procès civils (en tant que partie jointe pour
donner
son avis ou en tant que partie principale en tant que demandeur ou défendeur) / mais surtout aux procès
pénaux (il exerce l’action publique, dispose de l’opportunité des poursuites donc peut décider de classer
sans suite ou de poursuivre) mais la victime peut se constituer partie civile aussi et saisir la juridiction
(même si l’affaire est classée sans suite ou en l’absence de réponse dans un certain temps)

4) Attention, le ministre de la justice peut seulement donner des instructions générales


aux procureurs (et non instructions concernant affaires individuelles)

5) Procureur de la République financier : créé en 2013 suite à l’affaire Cahuzac


(compétence
exclusive notamment pour délit de manipulation des cours / concurrente pour infractions commises dans
affaires d’une grande complexité, corruption, trafic d’influence, blanchiment…)
Atténuation verrou de Bercy : avant 2018, administration fiscale décidait si transmettait au Procureur de la
R, mais depuis dans certains cas, est obligée de transmettre

6) Existence d’un parquet européen depuis 2017

7) Existence du CSM : conseil de discipline de la magistrature (peut être saisi par un


justiciable / garde des Sceaux /par les premiers présidents de CA), décision de rejet de la plainte
insusceptible de recours

8) Responsabilité des magistrats : ne sont responsables que de leurs fautes


personnelles
selon ordonnance de 1958 (donc si pas de lien avec fonction, responsable) / concernant la
responsabilité pénale, droit commun, aucune immunité / responsabilité disciplinaire avec CSM

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
9) L’erreur d’appréciation n’est pas considérée comme une faute disciplinaire (permet
donc de préserver indépendance juges)

10) Incompatibilités : pas de mandat parlementaire / électif si magistrat


- Droit à un procès équitable : ensemble des garanties procédurales (art. 14 du PIDCP ; art. 6 de la
CEDH : art. 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE) encadrant :
1) la composition du tribunal (compétent, indépendant et impartial) ;
2) l’accès et le déroulement de l’instance (égalité devant les tribunaux, équité, publicité).

- Principes de valeur constitutionnelle :


1) indépendance de l’autorité judiciaire : garantit la possibilité de prendre des décisions
à l’abri de toute instruction, à défaut de relation de subordination, et de toute pression : CC, 2007, Loi
relative au recrutement, à la formation et à la responsabilité des magistrats et découle de l’art. 64, al.
1er de la Constitution : garantie de l’égalité devant la justice pour les citoyens

2) inamovibilité des magistrats du siège (art. 64 de la Constitution de 1958) ; (principe de


non révocation / destitution sauf cas prévus par statut)

3) égalité de traitement dans l’accès à la magistrature, déclinaison du principe d’égalité


accès aux emplois publics (CC, 2012, Mme Elisabeth B.) ;

4) impartialité des magistrats : absence de préjugé sur l’affaire et de préjugement de


l’affaire elle-même (CC, 2012, Société Pyrénées services qui le déduit de l’art. 16 de la DDHC).

Juridictions administratives
- Juges administratifs : deux corps distincts :
1) corps des conseillers des tribunaux administratifs et des cours administratives
d’appel, qui bénéficient du statut de magistrats et de l’inamovibilité y associée.
2) corps des conseillers d’États, qui ne bénéficient pas du statut de magistrats (Enarques)

- Dualisme juridictionnel : principe de séparation des autorités administratives et judiciaires (loi


des 16 et 24 août 1789)

- Indépendance des juridictions administratives : reconnaissance implicite qui découle d’un PFRLR
au sein de la loi du 24 mai 1872 portant réorganisation du Conseil d’État : CC, 1980, Loi portant
validation d’actes administratifs.

- Dualisme fonctionnel : coexistence au sein du Conseil d’État d’une fonction consultative et d’une
fonction contentieuse, ce qui n’est pas contraire au principe d’impartialité du tribunal si les
membres d’une formation de jugement saisie d’une question n’aient pas aussi siégé dans la
formation consultative qui avait été saisie pour avis sur cette même question : CEDH, 2009,
Sacilor Lormines c. France.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
- Rapporteur public : anciennement appelé « commissaire du Gouvernement », il intervient à
l’audience pour exprimer son opinion juridique et pour proposer une solution à la formation de
jugement chargée de délibérée ; sa participation au délibéré a été jugée contraire au principe de
l’égalité des armes et l’absence de communication du sens de ses conclusions en amont de
l’audience a été jugée contraire au principe du contradictoire : CEDH, 2001, Kress c. France.
Un décret tenta de résoudre le problème en disant que le rapporteur public participait au délibéré sans
voter, mais en fait c’était déjà le cas et CEDH a précisé que ne changeait rien, tjrs contraire à CEDH en
2006. Désormais, décret prévoit interdiction pour lui d’être présent au délibéré des tribunaux admin /
CAA mais peut au CE, sauf si parties refusent.

Un décret du 1er août 2006 interdit finalement la présence du commissaire du gouvernement au


délibéré devant les TA et CAA.
Il peut continuer à assister au délibéré au Conseil d’État, sauf demande contraire d’une des parties.
La CEDH a jugé ce dispositif conforme aux exigences de l’article 6 § 1 de la CESDH (CEDH, 15 septembre
2009, Etienne c. France).
Il doit désormais indiquer aux parties, préalablement à l’audience, le sens de ses conclusions. Aux
termes du décret du 23 décembre 2011, les parties peuvent répondre oralement et publiquement aux
conclusions

Remarque : le vice-président du CE est en fait le président (formulation issue d’un usage)

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 15 – L’AUTORITE JUDICIAIRE


Juge naturellement protecteur des droits et libertés fondamentaux
- Autorité judiciaire :
1) ensemble des magistrats, juridictions et organes concourant à l’exercice du pouvoir
de juger dans l’ordre judiciaire au nom du peuple français, sans pour autant en être le représentant (cf.
titre VIII de la Constitution : « De l’autorité judiciaire ») ;
2) « gardienne de la liberté individuelle » (article 66 de la Constitution) ;
3) contrôle la conventionnalité des lois : Ch. mixte, 1975, Jacques Vabre – mais pas la
constitutionnalité des lois (Crim., 1833, Paulin) – et, en cas d’inconventionnalité de la loi, le juge la met
à l’écart, c’est-à-dire n’en fait pas application dans le litige qui lui est soumis.

- Juge civil : il peut être saisi de recours, notamment par la voie du référé (art. 808 et 809, CPC ; art.
9, c. civ. pour la vie privée ; art. 16-2, c. civ. pour la protection du corps humain), mettant en jeu :
1) le droit de propriété, c’est-à-dire « le droit de jouir et de disposer des choses de la
manière la plus absolue » (article 544 du code civil) ;
2) les droits conventionnels puisque les conventions de droits de l’homme, en mettant
à
la charge des États des obligations positives, produisent leur effet dans le cadre de rapports privés, ex. :
droit au respect de la vie privée (droit à l’image, protection des données).

- Juge pénal : il détermine la culpabilité du prévenu et fixe une sanction en tant que limite à
l’exercice par le prévenu de sa liberté, du fait que cet exercice a lui-même contrevenu à la liberté
d’autrui (cf. article 4 de la DDHC) ; ce faisant, il protège la liberté d’expression, du travail,
d’association, de réunion ou de manifestation sur la voie publique, l’entrave y étant portée étant
réprimée (article 431-1 du code pénal).

Juge assurant la protection des droits et libertés contre l’administration


- Gardien de la liberté individuelle : la compétence de la juridiction administrative pour
l’annulation des actes administratifs ne s’étendant pas aux « matières réservées par nature à
l’autorité judiciaire : CC 1987 Conseil de la concurrence, le juge judiciaire est compétent pour se
prononcer sur la légalité des décisions administratives portant gravement atteinte à la liberté
individuelle (article 66, Constitution ; article 136, c. proc. pén.), qui se limite au droit à la sûreté,
c’est-à-dire au droit de ne pas être soumis de manière arbitraire à la contrainte physique.

- Censeur de la voie de fait : lire affaire Lambert


p203
1) voie de fait : situation dans laquelle l’administration a porté atteinte à une liberté
individuelle ou a provoqué l’extinction d’un droit de propriété en étant manifestement sortie de ses
attributions, donc acte perd sa nature administrative : TC, 2013, Bergoend

2) juge compétent : le juge judiciaire a la compétence de principe, mais le juge


administratif se reconnaît compétent s’il est saisi d’un référé-liberté : CE, 2013, Commune de Chirongui.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

- Protecteur de la propriété privée :


1) procédure d’expropriation : le TJ tire les conséquences d’une déclaration d’utilité
publique quant au transfert de propriété et l’indemnisation de l’exproprié.

2) emprise irrégulière : si l’administration prend possession d’un immeuble, ayant pour


effet de déposséder une personne de son droit réel immobilier (TC, 1949, Sté Rivoli- Sébastopol), et si la
dépossession causée a entraîné une extinction du droit de propriété, le juge judiciaire est compétent
pour se prononcer sur l’indemnisation du préjudice subi (TC, 2013, Époux Panizzon).

2019 : création de la cour criminelle qui traite en première instance des crimes punis de quinze à vingt ans
de réclusion criminelle (cour d’assises pour les crimes punis de 30 ans / perpétuité)

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 16 – LE JUGE ADMINISTRATIF


Juge compétent pour protéger les libertés
- Juridiction administrative :
1) ensemble composé des TA (créés en 1953), des CAA (créées en 1987), des
juridictions
spécialisées (ex:Cour nationale du droit d’asile) et du CE juridiction suprême de l’ordre
administratif(1799)

2) le juge administratif jouit d’une compétence constitutionnellement réservée (un «


noyau de compétences » protégé par la Constitution) en matière de réformation ou d’annulation des «
décisions » des autorités publiques : CC, 1987, Conseil de la concurrence).
Dans ce cadre, il est « juge de la légalité » des actes administratifs et devient ipso facto juge des libertés
constitutionnelles et conventionnelles dont il vérifie le respect dans l’acte litigieux

3) Et en plus, contrôle des QPC car décide de transmettre ou non


(donc compétence indirecte en fait !)

Il doit respecter libertés fondamentales reconnues par le CC, mais peut en tirer des conséquences :
exemple dignité -> Morsang sur Orge 1995 /

4) quand les normes constitutionnelles et conventionnelles applicables ne permettent


pas de protéger efficacement ces libertés, il crée de nouvelles normes sous la forme de principes
généraux du droit (PGD) d’une valeur infra-législative et supra-décrétale (ex. : droits d’exercer un
recours pour excès de pouvoir dans CE, 1950, Dame Lamotte, égalité des usagers devant service public)

5) contrôle la conventionnalité des lois (CE, 1989, Nicolo) et, en cas


d’inconventionnalité
de la loi, le juge la met à l’écart et n’en fait pas application dans le litige qui lui est soumis.

6) contrôle la constitutionnalité des actes administratifs (CE, 1950, Dehaene), sauf si le


contenu de cet acte est prévu par une loi, auquel cas exercer un tel contrôle reviendrait à contrôler
indirectement la constitutionnalité de la loi : la loi fait « écran » et le juge administratif n’est pas
compétent : CE, 1936, Arrighi.
SAUF si l’écran est « transparent » : la loi ne détermine pas le contenu de l’acte et ne fait que définir une
compétence : CE,1991, Quintin.

A moins que le juge ne fasse de la loi une interprétation neutralisante (cas dans lequel elle était
contraire à la Constitution, l’acte admin était conforme à cette loi, mais comme juge interprète loi pour
qu’elle soit conforme à C°, acte devient contraire à la loi et est annulé) faisant disparaître l’écran causé
par la question de sa constitutionnalité, car l’acte administratif devient contraire à la loi
>> à moins qu’il fasse un contrôle de l’abrogation implicite de la loi
(constate qu’une disposition législative est devenue incompatible avec le droit constitutionnel en
vigueur, exemple CE 2005 privation de la liberté syndicale des huissiers par loi de 1945 alors que liberté
syndicale affirmée dans C° de 1946)
>> et évolution avec QPC car rôle de filtre du juge admin
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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

7) Evolution avec loi de 1955 : par exception au principe de prohibition des injonctions,
le juge administratif a la faculté d’enjoindre, si cela lui est demandé par parties, à l’administration
d’exécuter sa décision et, le cas échéant, l’accompagner d’une astreinte (loi de 1995 ; art. L. 911-1 et L.
911-2 du CJA).

Juge contrôlant les atteintes portées par l’administration aux libertés


- Atteintes causées par la police administrative : la liberté est le principe et la restriction de cette
liberté est l’exception
1) légalité externe : contrôle le respect de la procédure et des formalités entourant la
mesure de police (ex. : vice d’incompétence, défaut de motivation, non-respect du contradictoire) ;

2) légalité interne : contrôle le respect par le contenu de la mesure de police du


principe
de proportionnalité (ex. : conformité au but de la mesure, erreur de fait), la mesure de police devant
être nécessaire et la moins contraignante possible : CE, 1933, Benjamin.

- Atteintes résultant du service public : le service public dans sa vocation économique (SPIC) peut
prendre en charge des activités économiques, auquel cas il limite la liberté du commerce et de
l’industrie qui garantit le droit pour toute personne privée d’entreprendre et d’exploiter une activité
économique ; en ce cas, l’acte administratif qui crée le service public doit être justifié par la poursuite
d’un motif d’intérêt général et ne pas avoir pour conséquence de placer l’entité gérant le service
public dans une situation contraire aux règles de concurrence (entente ou abus de position dominante).

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

FICHE 17 – LES RECOURS DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF


Juge de l’excès de pouvoir
- Recours pour excès de pouvoir : recours ouvert même sans texte contre tout acte administratif et
qui a pour effet d’assurer le respect de la légalité : CE., 1950, Dame Lamotte.

I- Conditions de recevabilité

1) intérêt à agir :
1) peut-être direct ou indirect (CE, 1901, Casanova recours contre une commune
par un contribuable de la commune), individuel ou collectif (exemple organisations professionnelles CE,
1906, Syndicat des patrons-coiffeurs de Limoges), matériel ou moral ; et

2) doit être légitime (l’intérêt protégé doit être licite), personnel (l’acte litigieux
doit toucher le requérant), direct (les effets sur le requérant doivent être immédiats) et certain
(l’intérêt doit être né et actuel et ne pas doit pas être futur et éventuel).

2) délai : le juge ne peut être saisi que de la légalité d’une décision préalable, expresse
ou implicite – le silence de l’administration pendant deux mois valant, en principe, décision
d’acceptation – et peut être saisi dans un délai de 2 mois à compter de sa publication.

II- Moyens invocables

- légalité externe : contrôle le respect de la procédure et des formalités entourant l’acte


(moyens : vice d’incompétence, vice de procédure, vice de forme) ;

- légalité interne : contrôle le contenu de l’acte administratif (moyens : erreur de droit,


erreur sur les faits, erreurs de qualification juridique des faits, détournement de pouvoir).

III- Intensité du contrôle

L’intensité du contrôle est variable : 4 degrés :

- absence de contrôle : le juge laisse une liberté totale à l’administration sur la qualification
juridique
des faits et d’adéquation de l’objet de l’acte à ses motifs = pouvoir discrétionnaire de l’administration

- contrôle restreint : vérifie que la qualification par l’administration n’est pas


manifestement erronée ou disproportionnée et que l’objet de l’acte est adéquat avec ses motifs.

53
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES

1) contrôle dit du « bilan coûts-avantages » : forme particulière du contrôle


restreint développée en matière d’expropriation (déclarations d’utilité
publique).

- contrôle normal (ou entier) : vérifie que la qualification et que le choix de la mesure
sont proportionnés, et que les faits sont de nature à justifier la décision litigieuse.

- contrôle maximum : vérifie que l’acte est le mieux adapté à la situation litigieuse et
qu’il n’existe pas d’autre solution plus satisfaisante.

IV- Effets du recours

- une décision de rejet revêt une autorité relative de la chose jugée mais ne fait pas
obstacle à ce que la légalité de l’acte ne puisse pas à nouveau être remise en cause ; et

- une décision d’annulation revêt une autorité absolue de la chose jugée

L’annulation est rétroactive, sauf lorsque l’intérêt général suppose le maintien des effets de l’acte : CE,
Ass., 2004, Association AC !
L’annulation peut aussi être expliquée (indique les conséquences devant en être tirées) et différée
(auquel cas l’acte illégal n’est pas abrogé par le juge qui laisse à l’administration la charge de le faire en
exécution de sa décision).

Juge de l’urgence

Référé-suspension (L. 521-1 du CJA) : procédure, accessoire d’une requête en annulation ou en


réformation, qui permet d’obtenir la suspension temporaire de l’exécution d’une décision
administrative dont la légalité fait l’objet d’un doute sérieux et en cas d’urgence dûment constatée par
le juge.

Référé-liberté (article L. 521-2 du CJA) :


- Procédure d’urgence : suppose que des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour le
demandeur de bénéficier dans un délai très court (48 heures) d’une mesure de nature à mettre un
terme à l’atteinte portée à sa liberté fondamentale ;

FOCUS :
permettant au juge d’ordonner toutes mesures nécessaires : mesures provisoires, sauf lorsqu’aucune
mesure de cette nature ne permet de sauvegarder l’exercice effectif de la liberté fondamentale en cause
(CE, 2007, Syndicat CFDT Interco).
pour la sauvegarde d’une « liberté fondamentale » : notion n’ayant pas de définition propre et se
contentant de renvoyant aux droits et libertés que le Conseil d’État a identifié dans sa jurisprudences
comme constituant des « libertés fondamentales » au sens de l’article L. 521-2 du CJA
lorsqu’il y est portée une atteinte grave et manifestement illégale.
Concerne les agissements et les décisions administratives (donc possible même sans requête au fond et sans
décision préalable)

54
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 6 : LES PROTECTIONS
JURIDICTIONNELLES NATIONALES
Les ordonnances du juge du référé-liberté sont susceptibles d’appel directement devant le Conseil d’Etat
dans les 15 jours suivant leur notification
La mise en place du référé liberté permet de faire comme avec le juge judiciaire + permet de réduire
l’utilisation de la voie de fait dont l’usage était abusif.

55
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 7 : LES PROTECTIONS
NON-JURIDICTIONNELLES

FICHE 18 – LA PROTECTION NON-JURIDICTIONNELLE DES LIBERTES


Les garanties non-juridictionnelles en droit interne
I- Les droits de démocratie directe :

A) droit de résistance à l’oppression


« droit naturel et imprescriptible de l’homme » : article 2 de la DDHC qui correspond, sous sa forme
active, au droit à l’insurrection et, sous sa forme passive, au droit de désobéissance à la loi décliné en
une cause d’irresponsabilité en cas de désobéissance à un ordre manifestement illégal (art. 122-4 du
code pénal).

B) droit de pétition
Possibilité de protester, d’en appeler aux pouvoirs publics et autorités constitutionnelles pour les alerter
et solliciter leur intervention pour un objet déterminé, pour les électeurs d’un collectivité territoriale
en demandant l’inscription à l’ordre du jour de leur assemblée délibérante d’une question relevant de
sa compétence (article 72-1 de la Constitution).
Pour les citoyens de l’Union européenne en adressant des pétitions au Parlement européen, de recourir
au médiateur européen, de s’adresser aux organes et aux institutions consultatifs de l’Union (article 24
du TFUE) et d’inviter la Commission à présenter des propositions législatives (droit d’initiative citoyenne
: article 11 § 4 du TFUE). Il faut au moins 1M de signatures.

II- Institutions indépendantes


Une AAI est un organisme administratif qui agit au nom de l’État sans pour autant relever de l’autorité
du gouvernement.
A) Défenseur des droits
Succédant au Médiateur de la République, au Défenseur des enfants, à la Haute autorité de la lutte contre
les discriminations et pour l’égalité et à la Commission nationale de déontologie, il s’agit de l’AAI
bénéficiant d’un statut constitutionnel (article 71-1 de la Constitution) et disposant d’une compétence
générale pour défendre les droits et libertés.
Il a 3 missions spéciales en matière de :
- protection des droits de l’enfant
- lutte contre les discriminations
- garantie du respect de la déontologie par les personnes exerçant des activités de sécurité sur le
territoire de la République

Il dispose d’un pouvoir d’information, de vérification (juge des référés/JLD), d’un pouvoir de
recommandation et d’un pouvoir de médiation pour la résolution des litiges, et il mène des actions de
communication et d’information du public dans ses domaines de compétences.

Il peut renvoyer des réclamations aux autres AAI mais peut suivre leur travail

Sa saisine a été simplifiée : elle est possible par toute PP, PM gratuitement en cas de non-respect des
droits / et présence de délégués du Défenseur des droits, même à l’étranger.

NB : la saisine du Défenseur des droits n’interrompt pas la prescription


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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 7 : LES PROTECTIONS
NON-JURIDICTIONNELLES

B) Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) :

AAI, créée en 2007 à la suite de la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention


onusienne contre la torture et autres peines et traitements cruels, inhumains et dégradants, chargée
de veiller au respect des droits fondamentaux des personnes privées de liberté

Il dispose du droit de visite des lieux de privation de liberté, d’un droit d’accès à l’information et il peut
dresser des observations, à l’occasion desquelles il formule des recommandations, et initier des
poursuites pénales ou disciplinaires ;

L’actuel CGLPL est Dominique Simmonot, nommée en 2020 pour un mandat de 6 ans non
renouvelable.

Position du CGLPL sur le traitement de la radicalisation islamiste en milieu carcéral (prosélytisme


religieux) : défavorable aux conditions de placement en unités dédiées (UD) en ce qu’elles sont
arbitraires / discrétionnaires / parfois même pas de jugement donc irait contre présomption
d’innocence.

Recommandations relatives aux conditions matérielles de garde à vue dans les services de police :
saleté des cellules, surpopulation dans cellules…. Accès à l’eau potable limité car en dehors des cellules…
DONC recommandations : respecter dignité des personnes, ordonner transfert si non ou levée de la
mesure

C) Commission nationale de l’information et des libertés (CNIL) :

AAI instituée en 1978 chargée de veiller à ce que les traitements de données à caractère personnel
soient mis en œuvre conformément à la loi et aux exigences conventionnelles et constitutionnelles ;

il dispose d’un droit de contrôle des locaux professionnels et des documents et fichiers s’y trouvant
ainsi que d’un pouvoir de sanction pécuniaire, à l’issue d’une procédure contradictoire, pouvant être
assortie d’une injonction de cesser le traitement des données et d’un retrait de l’autorisation accordée
par la CNIL.
Affaire Google, en 2020 le CE a validé la sanction prononcée par la CNIL car Google pas assez clair envers
utilisateurs notamment sur personnalisation de la publicité.

D) Commission d’accès aux documents administratifs (CADA) :

AAI créée en 1978 chargée de veiller au respect de la liberté d’accès aux documents administratifs et
aux archives publiques ainsi qu’au respect du principe de transparence par l’administration.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 7 : LES PROTECTIONS
NON-JURIDICTIONNELLES

Les garanties non-juridictionnelles en droit international

L’institution du Comité des droits de l’homme en 1977 (en application du PIDCP de 1966) constitue
une étape décisive en matière de garanties non-juridictionnelles en droit international.
Depuis, 5 autres organes ont été créés : le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des
femmes (CEDF, en 1982) ; le Comité des droits économiques sociaux et culturels (CDESC, en 1985) ; le
Comité contre la torture (CCT, en 1987) ; le Comité des droits de l’enfant (CDE, en 1990) et le Comité
des travailleurs migrants (CTM, en 2003).
I- Le contrôle sur rapport

La procédure prévue repose, d’une part, sur l’obligation faite aux États parties de transmettre
périodiquement des rapports sur la bonne application des règles contenues dans ces textes et, d’autre
part, sur l’examen de ces rapports par les comités compétents.
Contrôle exercé notamment par les comités, leur permettant d’évaluer leur conformité aux obligations
conventionnelles et de formuler des recommandations dans des observations finales

Cette évaluation peut se faire sur deux types de rapports :


- rapport initial : rapport soumis dans un court délai après la ratification ou l’adhésion par un État à
une convention onusienne relative à la protection des droits de l’homme ;
- rapport périodique : rapport soumis à un intervalle régulier, dont la durée est fixée
par chaque convention, faisant état du droit en vigueur et des pratiques observées, ainsi que de leur
évolution depuis la transmission du rapport initial ou du dernier rapport périodique.

Les États parties sont tenus, d’abord, de présenter un rapport initial dans un délai d’un an suivant
l’entrée en vigueur pour eux de la convention concernée. Ils sont obligés, ensuite, de remettre des
rapports périodiques : tous les 2 ans sur l’application de la Convention sur l’élimination de toutes les
formes de discrimination raciale (article 9 § 2) ; tous les quatre ans sur celle de la Convention sur
l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (article 18 § 1, b) et de la
Convention contre la torture (article 19 § 1) ; tous les cinq ans pour le Pacte relatif aux droits
économiques, sociaux et culturels (Décision du 1er décembre 2000, doc/ E/2001/22), la Convention sur
les droits de l’enfant (article 44 § 1) et la Convention sur la protection des droits des travailleurs migrants
(article 73 § 1).

La principale est la procédure dite du « bilan » : consiste en un examen non contradictoire de la


situation des droits de l’homme dans les États n’ayant pas rendu leur rapport dans le délai prescrit.

D’autres procédures ont été établies pour renforcer le contrôle lorsque la situation des droits de
l’homme est gravement compromise dans un État partie.
L’une d’elles est la procédure d’enquête spécifique sur les violations massives des droits de l’homme
instituée à l’article 20 de la Convention contre la torture et à l’article 8 du Protocole facultatif à la
Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes.
Si le Comité contre la torture ou le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes a
des raisons de croire, sur la base de « renseignements crédibles », que des actes de torture ou de
discrimination sont réalisés de manière grave ou systématique, il peut, à moins que l’État partie concerné
n’ait émis une réserve pour s’y opposer au moment de son engagement, charger un ou plusieurs de ses
membres de procéder à une enquête et de lui rendre compte, en urgence, des résultats de celle-ci.

Les autres procédures sont d’origine prétorienne : il s’agit, d’une part, de la procédure d’alerte rapide et
d’intervention d’urgence, créée en 1993 par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale et,

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 7 : LES PROTECTIONS
NON-JURIDICTIONNELLES
d’autre part, de la procédure d’urgence instituée en 1990 par le Comité des droits de l’homme. Au titre
de la première, le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale peut, en cas de pratiques
discriminatoires systématiques, demander au gouvernement concerné de fournir des informations ou
décider d’entendre ses représentants, sans attendre le rapport périodique ordinaire.

II- La conciliation et le contrôle sur plainte

Contrôle sur plainte : contrôle exercé notamment par les comités conventionnels des Nations Unies à
l’occasion de constatations, à partir des communications alléguant la violation par un État partie à une
convention onusienne de ses obligations conventionnelles ; ces communications peuvent être :

communications étatiques : faculté pour un État partie à une convention onusienne de saisir le comité
instauré pour veiller à son respect, d’une plainte alléguant du non-respect de cette convention par un
autre État partie, aux fins de conciliation du différend.

communications individuelles : faculté pour une personne se trouvant sous la juridiction ou sur le
territoire d’un État partie à une convention onusienne, après avoir épuisé les voies de recours internes,
de saisir le comité instauré pour veiller au respect de cette convention d’une plainte alléguant sa
méconnaissance par cet État.

DONC contrôle sur rapport correspond à contrôle en amont.


DONC contrôle sur plainte ressemble à fonction juridictionnelle (répond à définition juridiction CEDH).

Tous les comités participent à la protection en amont (rapport) / et en aval (plainte).

Comité des droits de l’homme / comité des droits civils et politiques / comité pour l’élimination de la
discrimination à l’égard des femmes…

CF Bréviaire I p. 230 pour + d’infos.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

THEME 6 : LES DROITS PROCEDURAUX

FICHE 19 – LE DROIT A UN RECOURS EFFECTIF


Le droit au recours conditionne largement l’effectivité des droits fondamentaux. Il s’agit d’une
garantie fondamentale de l’État de droit. Dans son arrêt Golder 1975 la Cour EDH a affirmé que
l’accès à un tribunal est le corollaire indispensable du droit à un procès équitable.
Le droit au recours (= droit de porter une demande pour obtenir annulation, réformation d’une
décision ou une indemnisation)
En droit international :
Droit à un recours effectif : droit d’exercer les voies de recours existantes et effectives en saisissant les
instances nationales – qui ne sont pas nécessairement juridictionnelles car notion autonome– de griefs
relatifs au respect des droits conventionnels.
Fondements textes :
- article 13 de la CEDH
- article 47 de la Charte des DFUE
- article 2 § 3 du PIDCP

Instance nationale de recours : tout organe, instance indépendante (1) + peut rendre une décision
juridiquement contraignante (2)
Exemple : en droit français, existence de la CADA qui est ce type d’instance (même si en France on ne la
qualifie pas d’instance)

Droit d’accès à un tribunal :


Tribunal (notion autonome) : tout organe établi par la loi, chargé de trancher, sur la base de normes de
droit et à l’issue d’une procédure organisée, toute question relevant de sa compétence : CEDH 1984,
Sramek c. Autriche.

Selon la CEDH, la question du délai raisonnable (article 6) et du droit au recours effectif (article 13)
peuvent s’articuler et se combiner. Si article 6 pas respecté, alors selon article 13 il faut recours effectif
pour y remédier.

En droit interne :
Droit constitutionnel d’exercer un recours effectif devant une juridiction : droit, issu
de l’article 16 de la DDHC, de contester la régularité d’une mesure litigieuse ou d’une situation de fait
devant une juridiction : CC, 2014, M. Laurent L.

Il y a deux obligations envers l’Etat :


- obligation d’ouvrir une voie de recours (prévoir des modalités légales pour ouvrir voie de recours)
- obligation de mettre en œuvre une voie de recours (obligation attribuée aux juridictions)

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Droit de former un REP : droit de contester la légalité d’un acte administratif : CE, 1950, Dame Lamotte
dont les mesures d’ordre intérieur : CE, 1995, Marie à propos de cellule de punition) et les actes de
droit souple des autorités de régulation : CE, 2016, Fairvesta.

Droit de former un recours en cassation : PGD, droit de contester la légalité d’une décision prise par un
juge administratif statuant en dernier ressort : CE, 1947, D’Aillières.

L’effectivité du recours

Obstacles et remèdes :
En cas d’absence ou insuffisance des voies de droit : création de nouvelles voies de recours ou
élargissement des compétences et prérogatives des instances nationales
En cas d’application d’une règle portant une atteinte excessive au droit d’intenter un recours :
assouplissement des critères de recevabilité : CEDH, 2021, Vermeersch c. Belgique
En cas de complexité ou d’opacité de la règle de droit : clarification de la règle de droit par son
interprétation en jurisprudence ou par la simplification des termes de la loi

En cas de coût financier élevé : aide juridictionnelle : CEDH, 1979, Airey c. Irlande) / solution des actions
de groupe également :

5 élargissements depuis :
- Devant juge administratif (même procédure, par association, mais préjudice est relatif à l’Etat / au service
public, exemple discrimination par les administrés, etc.)
- Pour produits de santé
- Pour discriminations
- Pour données personnelles
- Pour dommage environnemental

CC QPC 2021 : système de purges des vices de procédure lorsque l’ordonnance de mise en accusation est
devenue définitive est contraire au droit à un recours juridictionnel effectif car ne prévoit aucune
exception en cas de défaut d’information de l’intéressé notamment. Fondement = article 16 DDHC (bloc
de c°)

Crim. 20 avril 2022 QPC : l’absence de droit de faire appel pour le témoin assisté est contraire au droit à
un recours juridictionnel effectif : elle renvoie la QPC au CC.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 20 – LE DROIT A UN PROCES EQUITABLE


Critères d’application de l’article 6 = tribunal + matière civile ou commerciale ou accusation en
matière pénale
La notion de procès équitable (recherche d’une justice équilibrée)
Droit à un procès équitable : droit d’être entendu par un tribunal, ensemble de droits encadrant la
composition du tribunal et le déroulement de la procédure visant à régler un litige civil, pénal,
administratif, disciplinaire ou pénitentiaire.
Tribunal (notion autonome) : tout organe, établi par la loi, chargé de trancher, sur la base de normes
de droit et à l’issue d’une procédure organisée, toute question relevant de sa compétence : CEDH 1984,
Sramek c. Autriche.
CEDH 2018 : la compétence renvoie au pouvoir d’un organe ou d’une institution de trancher une
question de droit.
Champ matériel du droit à un procès équitable (article 6 de la CEDH) : il comprend deux volets (notions
autonomes, attention !!!) :
1) volet civil : « contestation en matière civile ou commerciale » (1) relatif à l’étendue ou aux
modalités d’exercice d’un droit reconnu en droit interne (2) et dont l’exercice a des incidences
patrimoniales (3)
2) volet pénal : « accusation en matière pénale » émanant de l’autorité compétente (1) du
reproche d’avoir accompli une infraction de caractère pénal (2)

3 indices pour savoir si c’est matière pénale (CEDH 1976, Engel c. Pays-Bas) :
1) Elle reçoit une telle qualification en droit interne
2) Elle contrevient à une norme répressive ou dissuasive
3) Cette contravention a pour effet d’imposer une sanction suffisamment grave

Exemple : condamnation par la CNIL de Google : matière administrative en droit français. Mais selon notion
autonome de la CEDH, sera une matière pénale (car accusation + reçoit qualification pénale en droit interne car
infraction + peine sévère)

Certains litiges ne ressortent pas de ces volets, donc pas objet de 6§1 (donc bien vérifier que s’applique !!!) :
- Matière fiscale : CEDH Ferrazzini
- Litige qui touche à ce qu’est la prérogative de puissance publique : CEDH Pellegrin contre Italie

Rôle de l’UE dans le procès équitable : Charte des DFUE reprend articles procédure + directives en matière pénale

Les garanties du procès équitable


Droits relatifs à la composition du tribunal : ils sont protégés par l’article 6 § 1 de la Convention EDH :
- Garantie d’indépendance des juges : l’indépendance doit être subjective et objective :
- Indépendance subjective : les juges doivent exercer leur fonction juridictionnelle sans subir les
pressions ou être influencés par les parties au litige, ni par d’autres organes exerçant un pouvoir
étatique (ex. : législatif, exécutif, ou même judiciaire), à moins que d’impérieux motifs d’intérêt général
ne le justifient : CEDH, 1999, Zielinski c. France.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Garantie d’impartialité des juges : l’indépendance doit être subjective et objective :

Impartialité subjective : les juges doivent juger du différend qui leur est soumis sans préjugé (pas de
parti pris) ni préjugement (n’ont pas déjà eu à en connaître).

Impartialité objective : les juges doivent exercer leur fonction juridictionnelle en garantissant l’apparence
de leur impartialité.

Droits relatifs au déroulement de la procédure :


Droit d’accès à un tribunal : droit, découvert par la Cour : CEDH, 1975, Golder c. Royaume-Uni, de
soumettre un différend à un tribunal disposant d’une compétence de « pleine juridiction », c’est-à-dire
pouvant examiner l’affaire en fait et en droit (CEDH, 2003, Chevrol c. France).
Ce droit n’est pas absolu, ce qui implique que son exercice peut faire l’objet de restrictions
proportionnées à un but légitime par l’État partie (bonne administration de la justice souvent en
pratique)

Droit à l’aide juridictionnelle : découvert la Cour EDH (CEDH 1979 Airey c. Irlande), de bénéficier du
système d’aide juridictionnelle lorsque les ressources d’une des parties au litige ne lui permet pas de
bénéficier d’un accès effectif au tribunal ; en France, la loi du 10 juillet 1991 en prévoit le régime.

Droit à être jugé dans un délai raisonnable : droit, protégé par l’article 6 § 1 CEDH, d’obtenir une solution
à son litige dans un délai proportionné à la complexité et à l’enjeu de l’affaire, et adapté au
comportement du requérant et des autorités nationales

Principe de l’égalité des armes : garantie, découverte par la Cour (CEDH, 1960, Lawless c. Irlande),
exigeant qu’une possibilité effective soit offerte à chaque partie au litige de faire valoir les éléments
nécessaires au succès de ses prétentions à l’égard du juge, en discutant de l’ensemble des pièces se
trouvant en sa possession.

Principe du contradictoire : garantie, découverte par la Cour EDH dans sa jurisprudence (CEDH, 1959,
Szwabowicz c. Suède), exigeant qu’une possibilité effective soit offerte aux parties au litige de défendre
leurs intérêts en respectant un juste équilibre entre elles, de sorte qu’une partie ne doit pas être en
situation de net désavantage par rapport aux autres.

Donc différence entre principe d’égalité des armes et principe du contradictoire = égalité des armes est
un droit de chaque partie individuellement à l’égard du juge alors que principe du contradictoire est en
fonction de ce qu’a dit l’autre partie, droit de se défendre par rapport à ça

Droits de la défense : déclinaisons particulières du contradictoire et de l’égalité des armes dans le cadre
d’un procès pénal, énoncés à l’article 6 § 2 de la Convention, comprenant le droit de disposer du temps
et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense, le droit à l’assistance d’un avocat et le droit à
l’assistance gratuite d’un interprète.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Principe de la présomption d’innocence (procès pénal) : garantie, protégée par l’art. 6 § 2 de la CEDH :
- un droit subjectif : droit de tout accusé, devant les juges dans le cadre d’un procès pénal, de ne
pas
subir les effets attachés à une déclaration de culpabilité si une telle déclaration n’a pas été faite à son
endroit par une juridiction.

- une règle de preuve : la charge de la preuve de la culpabilité de l’accusé incombe à l’accusation,


donc l’accusé n’a pas à faire la preuve de son innocence. Il doit simplement répondre aux accusations.

Principe de publicité des débats : exigence, prévue à l’article 6 § 1 de la Convention EDH, de


transparence dans l’administration de la justice garantissant la publicité des audiences, à laquelle peut
être faite exception aux termes d’une conciliation avec d’autres intérêts en jeu (ex. : intérêt supérieur de
l’enfant, droit à la vie privée) et la publicité des jugements.

Principe de loyauté de la preuve : exigence, découverte par la Cour EDH (CEDH 1988, Barbera c.
Espagne), de légalité dans l’administration de la preuve.

Droits relatifs à la décision de justice rendue :


Droit à l’obtention d’une solution juridictionnelle : droit, découvert par la Cour EDH (CEDH, 2002, Kutic c.
Croatie), d’obtenir d’une décision définitive à l’issue de la procédure judiciaire.

- Principe non bis in idem : droit, protégé par l’article 4 du Protocole n° 7, de ne pas être
poursuivi ou puni une deuxième fois, au terme d’une procédure pénale, par les juridictions d’un même
État pour des faits identiques.

- Droit à la motivation des décisions de justice : garantie, découverte par la Cour EDH dans
sa jurisprudence (CEDH, 1987, H. c. Belgique), variant selon la nature de la décision rendue, exigeant
que les juges mettent le requérant en mesure de comprendre les raisons expliquant le sens de la
décision rendue (CEDH, 2001, Papon c. France).

Par exemple, CEDH a précisé que la Cour d’assises doit transmettre questions posées au jury et réponses
Et CEDH précise que pour procédure de tri (CE) / de non-admission, pas besoin de motiver car sinon
imposerait charge à la Cour suprême une charge qui l’éloignerait de sa finalité (urgence).

- Prohibition du déni de justice : la décision rendue ne doit pas être entachée d’arbitraire, ni être
manifestement erronée en droit ou en fait (CEDH, GC, 2017, Tommaso c. Italie).
Manifestement = qui ressort évidemment à la lecture de la motivation

- Droit à l’exécution du jugement : exigence, découverte par la Cour EDH (CEDH, 1997,
Hornsby c. Grèce), pour les autorités de faire produire ses effets à une décision définitive. Mais pas un
droit absolu donc possible pour l’Etat d’y porter atteinte de façon proportionnée à un but légitime.
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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

o Droit d’accès à la CEDH et à l’exécution des arrêts de condamnation

Focus – Arrêt CEDH 2014 – Procédure du plaider coupable : ne pose pas de problème au regard de
l’article 6 à 3 conditions :
1. Accord établi de manière non équivoque
2. Assorti de garanties minimales pour prévenir les abus (exemple accord soumis à un contrôle
judiciaire)
3. Ne doit se heurter à aucun intérêt public

Focus - Arrêt CEDH 2022 – Auditions libres (matière pénale)


Deux requérants invoquent une exception de procédure sur le fondement de l’article 6§1 CEDH au motif
qu’ont fait l’objet d’une audition libre alors que pas d’interprète et pas notifié du droit de garder silence /
pas d’avocat pour le second.

Raisonnement de la CEDH :
1. Vérifie l’existence ou non de raisons impérieuses justifiant les restrictions

En l’espèce, à l’époque des faits, il n’existait pas de droit de garder silence / de présence
d’avocat / d’interprète en audition libre dans législation française. Et Gouvernement n’a pas
justifié de raisons impérieuses justifiant les restrictions. Passe à l’étape suivante. Vérifie si ces
restrictions ont été compensées.

2. Examine l’équité du procès dans son ensemble

La CEDH affirme la violation de l’article 6§1 pour l’un des requérants mais non pour l’autre :

> La première se trouvait placée dans une situation de vulnérabilité car l’audition n’était pas faite
dans sa langue maternelle. Ceci a contribué à ce qu’elle s’auto-incrimine. Et c’est cette auto-
incrimination qui a été la base de la condamnation.

> Alors que le second requérant n’était pas en situation de vulnérabilité et sa condamnation n’a
pas été fondée sur son auto-incrimination mais sur d’autres preuves. Pas de violation de 6§1.

Focus – DC QPC 2021 – Droit de se taire


QPC car il n’était pas exigé en droit pénal qu’il soit rappelé au prévenu / à l’accusé qu’il a le droit de se
taire lors d’une audience avec le JLD qui statue sur sa détention provisoire ou sa mise en liberté. Car
même si le JLD ne statue pas sur le fond de l’affaire, sera nécessairement pris en compte. CC affirme que
effectivement, contraire à la C° (à l’article 9 DDHC, présomption d’innocence).

Focus – Visioconférence en matière pénale


Conseil constit : affirme que le recours à la visioconférence contribue à la bonne administration de la
justice et au bon usage des deniers publics, mais ne doivent pas porter une atteinte excessive aux droits
de la défense.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

CEDH : 6§1 prévoit implicitement droit pour prévenu de comparaitre physiquement, mais droit moins
important en appel (surtout en première instance) et peut être utilisée si but légitime et que modalités
d’administration de la preuve compatibles avec procès.

Focus - Droit à l’information dans procédures pénales


Garde à vue : droit à un avocat / droit d’être examiné par un médecin / de prévenir un proche / de se
taire

Focus – Représentation de la partie


Litige inférieur à 10 000 euros : pas d’avocat obligatoire en principe, possible d’être représenté par
concubin, membre de la famille, membre syndicat, membre de l’entreprise… il faut mandat spécial. Et
supérieur : avocat

Focus – Fouille d’un véhicule


Crim. février 2022 : en cas de véhicule stationné sur une aire d’autoroute sans occupant, la fouille n’est
possible qu’en sa présence pour respecter droits de la défense et égalité des armes. Seule exception =
risque grave pour la sécurité des personnes et des biens. Donc ici, annulation de la fouille douanière
exigée par Cass en ce qu’ils ont fouillé le véhicule en l’absence du propriétaire.

Focus – Loi du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l’institution judiciaire :

> Le débat contradictoire sera ouvert dès l’enquête : suspect et victime auront accès facilité au dossier,
pourront faire observations (si ne risque pas de porter atteinte à l’efficacité des investigations)

> Autorisation de l’enregistrement des procès à des fins pédagogiques : l’autorisation sera donnée,
après avis du ministre de la justice, par les chefs de juridiction. Publication une fois l’affaire définitivement
jugée + accord des parties. Champ d’application : juge d’instruction / Cass / CE (Conseil constit -> existait
déjà).

> Encadrement des enquêtes préliminaires : 2 ans max et 3 ans max pour délinquance ou criminalité
organisée (prolongation de 2 ans possible)

> Peines alourdies en cas de meurtre sur un policier/un gendarme : 30 ans

Focus – Statut des magistrats du parquet au regard des critères d’indépendance et d’impartialité
Arrêt Moulins CEDH 2010 : article 5 CEDH prévoit que toute personne privée de sa liberté doit aussitôt
être traduite devant un juge ou « tout autre magistrat » -> q° de savoir si « tout autre magistrat » peut-
être parquetier français, réponse est que non car parquetier n’est pas indépendant car soumis
hiérarchiquement au garde des sceaux, membre du pv exécutif.

Solution : soit réformer statut parquetier (impossible en pratique), soit ne plus lui confier cette mission (+
réaliste)

Focus - Motivation des décisions de la Cour d’assises

En France, Cour d’assises -> article 365-1 CPP prévoit feuille de questions + feuille de motivation en cas de
condamnation
CEDH 2013 : considère que suffit

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Crim. 2014 : considère que suffit


CC QPC 2018 : considère que contraire à DDHC (article 8 notamment)
Réforme 2019 : modification de la loi, précisions sur la motivation

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 21 – LE DROIT A L’EXECUTION DES DECISIONS DE JUSTICE

Le droit à l’exécution des décisions de justice du justiciable


CEDH, 1997, Hornsby c. Grèce : garantie d’une exécution effective et rapide de la décision de justice,

Le choix des moyens les plus appropriées pour permettre l’exécution d’une décision donnée est laissé à
la libre appréciation de l’État en vertu du principe de subsidiarité ;

Les moyens d’exécution des décisions de justice par le juge


Exécution des décisions du juge civil :
- Pouvoirs d’injonction et d’astreinte notamment par voie de référé (art 809 du code civil)
- Pouvoir de « prescrire toutes mesures […] propres à empêcher ou faire cesser une atteinte à la vie
privée » (art. 9 du code civil) ;
- Pouvoir de coercition renforcé pour l’exécution des mesures garantissant la continuité
et l’effectivité du maintien des liens de l’enfant avec chacun de ses parents (article 373-2-6, al. 2 du
code civil)
- Pouvoir d’astreinte (article 373-2-6, al. 4)
- Pouvoir de condamnation au paiement d’une amende civile le parent qui fait obstacle de façon
grave et renouvelée à l’exécution d’une décision ou d’une convention homologuée (article 373-2-
6) et pouvoir de recourir au concours de la force publique (article 373-2, al. 3).

Exécution des décisions du juge administratif :


- Pouvoir d’astreinte (loi n° 80-539 du 16 juillet 1980) ;
- Principe de prohibition des injonctions en matière administrative, atténué par l’attribution au juge
administratif d’un pouvoir d’injonction (loi n° 95-125 du 8 février 1995) pouvant être préventive,
soit prononcée concomitamment au jugement en cause (art. L. 911-1 et L. 911-2 du CJA), ou
pouvant être prononcée a posteriori, une fois la décision de justice rendue pour assurer son
exécution en cas de refus de la personne publique condamnée, à condition que le jugement «
implique nécessairement » qu’une mesure d’exécution soit prise « dans un sens déterminé » ou
qu’une décision soit « à nouveau » prise « après une nouvelle instruction »

Exécution des arrêts de la Cour EDH :


Le contrôle de l’exécution des arrêts de condamnation de la Cour européenne des droits de l’homme est
assuré par le Comité des ministres (art. 46 de la Convention EDH) en procédant aux étapes suivantes :
- il invite l’État condamné à l’informer des mesures prises pour se conformer à l’arrêt ;
- il adopte une résolution dans laquelle il constate, au vu des informations apportées par l’État,
avoir rempli sa mission de contrôle de l’exécution de l’arrêt ;
- mais, en cas de non-exécution de l’arrêt, il peut saisir la Cour d’un manquement par l’État à son
obligation d’exécution, qui découle de l’article 46 de la Convention (Protocole n° 14).

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 22 – LE DROIT A LA SURETE


Droit à la sûreté : autrement appelé liberté individuelle, il s’agit de l’interdiction de la contrainte
physique – arrestation ou détention – imposée de manière arbitraire, y compris de manière illégale

Fondements textuels :

- arts. 2 et 7 de la DDHC

- art. 5 § 1 de la CEDH

- art. 9 du PIDCP

La rétention
Contrôle d’identité : 4 possibilités :
- contrôle de police judiciaire
- contrôle de police administrative
- contrôle Schengen
- contrôle d’identité des étrangers
Contrôles de police judiciaire : contrôle réalisé à condition qu’il existe des raisons plausibles de
soupçonner qu’une personne a commis, a tenté ou s’est préparée à commettre une infraction.
Le contrôle d’identité peut aussi être réalisé sur réquisitions écrites du procureur (art. 78-2 du CPP) à
condition qu’elles précisent les infractions visées et des lieux et périodes de temps déterminés.

Contrôles de police administrative : contrôle, réalisés à titre préventif, visant à prévenir une atteinte à
l’ordre public, la réalité du risque d’atteinte devant être circonstanciée bien que la loi n’exige plus qu’il
soit directement rattachable au comportement de la personne dont l’identité est vérifiée (art. 78-2, al. 2
du CPP).

Contrôles « Schengen » : contrôles créés en 1993, réalisés à la frontière avec les autres États parties à la
convention Schengen pour assurer le respect des obligations de détention des titres et documents
prévus par la loi (art. 78-2, al. 9 du CPP), sur des tranches de 12 heures non- consécutives (loi n° 2011-
267 de 2011), devant être fondés sur des informations générales et des données liées au séjour illégal
de personnes (CJUE, 2012, Adil).
Schengen : a été absorbé par le droit communautaire de l’UE mais comprend aussi 4 Etats non-membres
de l’UE, permet libre circulation (sans passeport…)

Contrôles d’identité des étrangers : contrôle des titres de séjour (art. L. 812-1 du CESEDA) si des
éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne de l’intéressé sont de nature à
faire apparaître sa qualité d’étranger (art. L. 812-2 du CESEDA)
en effet, il ne faut pas que la décision de contrôler ses titres / son identité soit fondée sur un délit de
faciès -> exemple d’élément objectif : plaque d’immatriculation du véhicule / exemple d’élément non pris
en compte en théorie : conversation en langue étrangère / lecture d’un journal étranger

69
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Vérification d’identité : prolongation du contrôle d’identité, par une rétention (4h max) aux fins de
vérification, si la personne interpellée n’a pas pu ou n’a pas voulu justifier de son identité.
4 conditions à peine de nullité : art. 78-3 du CPP
1) la personne doit être immédiatement présentée à un OPJ qui la met en mesure d’établir son
identité par tout moyen
2) l’OPJ l’avertit de son droit de faire aviser le procureur de la vérification dont elle fait l’objet
3) l’OPJ avertit la personne qu’elle n’est retenue que pendant le temps strictement exigé pour
établir
son identité
4) un PV spécialement motivé est dressé.

Garde à vue : art. 62-2 du CPP : « mesure de contrainte […] par laquelle une personne à l’encontre de
laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de
commettre un crime ou un délit puni d’une peine d’emprisonnement est maintenue à la disposition
des enquêteurs »
3 Conditions
1) Suspicion de crime ou de délit puni d’une peine d’emprisonnement (avant, était possible pour
suspicion d’une infraction sans précision)
2) Pendant une période limitée à 24 heures, pouvant être prolongée de 24h supplémentaires
3) Garde à vue doit être l’unique moyen pour :
- garantir la présentation devant procureur république
- l’empêcher de contacter des complices / faire pression sur témoins
- l’empêcher de s’enfuir
-l’empêcher de modifier les preuves

Dans le cadre de laquelle le gardé à vue se voit reconnaître plusieurs droits fondamentaux :
Le droit d’être informé de :
- son droit au silence
- des faits qui lui sont reprochés et de la qualification retenue,
- son droit de consulter certaines pièces du dossier,
- son droit d’être assisté par un avocat et d’un interprète,
- son droit à l’aide juridictionnelle, de son droit à un avis médical

Droit de bénéficier de l’assistance d’un avocat dès le début de la garde à vue et pendant les
interrogatoires (CEDH, CC puis réforme de 2011) -> donc impossible de se servir des déclarations faites
sans présence de l’avocat
Droit de garder le silence : conséquence du principe de présomption d’innocence et du droit de
l’accusé qui en découle de ne pas s’auto-inscriminer : CEDH, 1993, Funke c. France
70
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Droit au respect de sa dignité (loi du 14 avril 2011) ; (permet de limiter strictement la fouille intégrale)
Droit de faire prévenir un proche de la mesure dont il fait l’objet (art. 63-2 du CPP) ;

Droit de se faire examiner par un médecin, respectant le secret professionnel et sa dignité, pour vérifier
si la mesure est compatible avec son état de santé (art. 63-3 du CPP).

Procédure :
1) Seul un OPJ peut placer en garde à vue (62-2 CPP)
2) Le procureur doit être informé

Depuis la loi du 5 mars 2007, les interrogatoires des personnes gardées à vue en matière criminelle
doivent être enregistrés afin d’apporter la preuve du bon déroulement de la mesure (l’instauration
d’une telle précaution fait suite à la condamnation de la France dans différentes affaires pour actes de
tortures ou de traitements inhumains et dégradants commis pendant les gardes à vue – v. CEDH 1992,
Tomasi c. France et CEDH 1999, Selmouni c. France). Un tel enregistrement n’est obligatoire que si
l’interrogatoire est réalisé dans les locaux d’un service ou d’une unité de police ou de gendarmerie.

Régimes dérogatoires de la GAV : 706-73 CPP: principalement la criminalité organisée, proxénétisme


aggravé, terrorisme, trafic de stupéfiants :
- art. 706-88 CPP autorise 2 prolongations supplémentaires de 24 chacune par décision écrite et
motivée du JLD
L’intéressé ne peut s’entretenir avec un avocat qu’à l’issue de la 48 e heure puis de la 72e

Le CC a jugé ces dispositions conformes à la Constitution aux motifs que l’atteinte portée à la liberté
individuelle n’est pas excessive et que les garanties fixées par le législateur assurent le respect du principe
selon lequel la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui n’est pas nécessaire (DC du 2
mars 2004)
Le statut de suspect libre : a globalement les mêmes droits que la personne en GAV (droit d’être
informée de la qualification retenue, etc.).

Code de la justice pénale des mineurs : raccourcit les délais de jugement.


Présomption de discernement à partir de 13 ans / un même juge, un même avocat et un même
éducateur pendant toute la procédure / un jugement sur la sanction en 1 an max… p343

71
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

La détention
Détention dans un établissement pénitentiaire :

Détention provisoire : incarcération judiciaire dans une maison d’arrêt qui peut être prononcée, en
cours d’instruction ou après sa clôture, par le JLD (loi du 15 juin 2000).
En cours d’information, elle concerne la personne mise en examen, à savoir une personne à l’encontre
de laquelle « il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable » qu’elle ait « pu
participer, comme auteur ou comme complice, à la commission » d’un crime ou d’un délit dont le juge
d’instruction est saisi (article 80-1 du code de procédure pénale). Après la clôture de l’information, elle
concerne la personne non définitivement condamnée.

Elle est décidée à l’encontre d’une personne mise en examen « s’il est démontré […] qu’elle constitue
l’unique moyen » de conserver les preuves, d’empêcher une pression sur les témoins ou les victimes, ou
une concertation frauduleuse, de protéger la personne mise en examen, de s’assurer de la présence de
la personne, de mettre fin à l’infraction, ou à un trouble exceptionnel et persistant à l’OP (art. 144 du
CPP ; cf aussi 80-1).

L’incarcération est contestée par voie d’appel ou par un référé-liberté introduit par le détenu (art. 187-
1, al. 1 du CPP) –

La personne amenée devant le JLD doit être informée du droit de se taire, sinon c’est inconstitutionnel
(CC 2021 article 9 DDHC). Pareil devant chambre de l’instruction (juridiction d’appel du juge d’instruction
/ du JLD). CC 2021 (autre décision).

Mesures de sûreté : mesure d’ordre public prise à l’encontre d’une personne en vue de l’empêcher de
commettre une ou des infractions et de protéger la société d’une personne tenue pour dangereuse.
CC et CEDH l’ont jugé conforme.

Détention dans un établissement psychiatrique : 3 conditions de l’hospitalisation sans consentement :


1) sur demande d’un tiers : si des troubles mentaux rendent impossible le consentement du
malade
et que son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance médicale constante (L. 3212-1
CSP)
2) en cas de péril imminent : si un risque pour la santé de la personne a été constaté par un
certificat médical établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement d’accueil (art. L.
3212-1 du CSP).

3) sur demande du représentant de l’État : si le malade compromet la sûreté des personnes ou


porte gravement atteinte à l’ordre public (art. L. 3213-1 du CSP).

Garanties de la personne hospitalisée de force :


72
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

- sauvegarde de sa dignité : l’adoption de mesures d’isolement ou de contention est soumise au


contrôle du JLD (art. L. 3222-5-1 du CSP).
- préservation de sa liberté individuelle : au-delà de 12 jours, l’hospitalisation ne peut se
poursuivre que sur autorisation du JLD (art. L. 3211-12-1 du CSP) ; à tout moment, la personne
hospitalisée de force peut former un référé par simple requête devant le JLD, pour qu’il ordonne sa
sortie immédiate en cas d’irrégularité (art. L. 3211-12 du CSP).

Focus – Le confinement, une privation de liberté individuelle ?


> Porte atteinte à la liberté d’aller et de venir
> Mais la question était de savoir si la restriction à la liberté d’aller et de venir était d’une intensité telle
que la liberté individuelle était atteinte ?
>> CEDH 2021 : non, pas au sens de l’article 5§1 CEDH
>> CE 2021 : non
>> Explication : faible intensité de la mesure et bcp de cas possibles pour pouvoir sortir, donc pas
comme une assignation à résidence

Focus – Crim. 2021 – Plus possible de prononcer peine d’emprisonnement ferme inférieure ou égale à un
mois
(selon loi de réforme de 2019), q de savoir si c’est une loi plus sévère ou non (peine plancher ?) réponse
est non selon juges, car législateur souhaite remplacer ce genre de peine très courte par une peine
alternative (exemple TIG).

Crim. 2021 rappelle que si manquement délibéré au contrôle judiciaire, JLD peut ordonner son placement
en détention provisoire sans avoir à motiver comme en temps normal.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

THEME 7 : LES LIMITATIONS DES DROITS


Si la liberté relève du pouvoir d’auto-détermination de chacun, elle est susceptible de faire l’objet de
nombreux aménagements et restrictions. En effet, les droits et libertés fondamentaux sont relatifs et
doivent être conciliés tant avec les autres libertés individuelles qu’avec des impératifs supérieurs,
notamment l’ordre public. Il appartient ainsi à l’État de mettre en place différents modes d’encadrement
des libertés, allant de la répression à la prévention.

La limitation d’un droit 2 origines :


- l’exercice par quelqu’un d’autre de ses droits
= violations aux obligations positives de l’Etat : mesure pour empêcher toute atteinte des droits des
individus
- l’adoption par l’Etat de mesures de protection de l’intérêt général
= violation aux obligations négatives de l’Etat.

NB : EXAM : pour déterminer la violation ou non d’un droit il FAUT TOUJOURS vérifier la violation par
l’Etat de l’une de ses obligations. Il faut pour ce faire distinguer les droits absolus et non absolus : le
contenu des droits diffère selon qu’il s’agit ou non d’un droit absolu.

NB 2 : une atteinte est une limitation dans la jouissance du droit alors que la violation est la
méconnaissance contraire à ce que prescrit le régime de protection du droit.
Dans le cas des droits absolus, toute atteinte a pour conséquence directe une violation.
IL FAUT TOUJOURS préciser si le droit est absolu ou non avant d’en déduire une éventuelle violation.
Ex : pour démontrer qu’une pratique est contraire à l’interdiction des traitements inhumains il faut :
ETAPE 1 : démontrer l’existence d’une atteinte
ETAPE 2 : exposer le fait que ce droit est un droit absolu
ETAPE 3 : établir qu’il y a violation de ce droit.
Pour les droits non absolus l’existence d’une atteinte n’a pas pour conséquence une violation. Il faut en
outre une atteinte qui ne satisfait pas aux conditions dans lesquelles il peut être porté atteinte à ce
droit : mesure proportionnée de l’Etat ; ou acte d’un individu qui ne rompt pas le juste équilibre entre
les individus.

La question des limitations ne se pose que dans le cadre des droits non absolus.
La limitation d’un droit porte toujours sur l’exercice de ce droit.

A titre de principe les EM ont l’obligation de respecter et faire respecter les DLF.
Il existe 2 catégories de limitations des droits :
- les restrictions : exceptions au principe du principe selon lequel l’Etat est obligé de faire respecter
les droits et libertés
Cela suppose le respect des conditions de protection du droit : mesure proportionnée de l’Etat ; ou acte
d’un individu qui ne rompt pas le juste équilibre entre les individus.

- les dérogations : ici le principe selon lequel l’Etat est obligé de faire respecter les droits et libertés
est inapplicable
Les EM peuvent demander à ne pas être tenu au respect et faire respecter les DLF

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 23 – LES LIMITATIONS NORMALES (Restrictions)

- Limitations : restrictions portées à l’exercice des libertés et des droits qui ne sont pas absolus (aux
fins de conciliation, entre les droits et libertés en présence, nécessaire du fait de leur collision
inévitable) ;
- Limitations normales : restrictions portées dans des circonstances qui ne sont pas exceptionnelles,
logique de proportionnalité

3 conditions permettent d’envisager une restrictions ( =limitation normale) :


1) L’existence de circonstances normales
2) Atteinte ayant pour origine l’action d’un Etat ou d’un individu
3) Un droit non absolu

Si la restriction vient de l’action de l’Etat la condition de la restriction est la proportionnalité de la


mesure de l'Etat. il faut vérifier la proportionnalité de l’atteinte au but poursuivi par l’Etat.

Si la restriction vient de l'action d'un individu (autrement dit l’insuffisance d’action de l’Etat) la condition
de la restriction est l’absence de rupture du juste équilibre entre les 2 droits en cause.
il s’agit de savoir si l’action est un équilibre qui est juste.

NB : chaque convention internationale prévoit une autorité compétente pour contrôler la


proportionnalité.

L’autorité de limitation des libertés


I- La compétence de principe du législateur
En droit interne : le principe de réserve de la loi (art. 4 de la DDHC et art. 34 de la Constitution) prévoit
que l’ingérence de l’État n’est possible que sur le fondement d’une « loi », qui se définit selon 2
critères :
- organiquement : le produit du vote par le Parlement (art. 24 de la Constitution) ;
- matériellement : le domaine des libertés publiques, entre autres (art. 34 de la Constitution)
(remarque : article 38 Constitution : ordonnances possibles mais il faut habilitation législative +
ratification dans un délai imparti) -> si pas de ratification dans délai imparti, alors peut pas être le
fondement à une atteinte à un DLF car a acquis valeur législative par l’écoulement du délai (CC 3 juillet
2020 QPC)

L’empiètement du législateur dans le domaine réglementaire n’est pas censuré (CC, 1982, Blocage des
prix), mais la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence l’est (incompétence négative) ;

Le principe de l’effet cliquet fait obstacle à ce que le législateur puisse modifier la loi pour prévoir,
concernant certaines libertés, un niveau de protection plus faible : CC, 1984, Transparence et pluralisme
des entreprises de presse

75
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

II- La conventionalité de la compétence législative


- En droit international : la restriction à un DLF suppose une base légale : CEDH Sunday Times
1979
l’exigence de légalité (ex. : § 2 des art. 8 à 11) garantit que les restrictions portées aux droits et libertés
soient fondées sur une « loi », qui se définit matériellement par ses qualités d’accessibilité, de précision
et de caractère obligatoire : CEDH, 1990 Huvig c. France et Kruslin c. France).
La loi au sens conventionnel ici n’est donc pas que la loi au sens national (notion autonome). C’est en
fait le droit (législatif, exécutif, judiciaire). Ainsi, seule la « loi » peut priver un individu de sa liberté
(article 5), établir un tribunal (article 6) ou prononcer des peines (article 7).

Les régimes de limitation des libertés


I- Le régime répressif

Il postule que la liberté est première : l’individu use à son gré de la liberté qui lui est reconnue, sauf à
s’exposer à des sanctions en cas d’abus dans son exercice. droit commun des libertés en France.

Les restrictions sont postérieures à l’exercice du droit (ex. : peine prononcée par le juge), de sorte que
les droits et libertés peuvent être exercés sans autorisation préalable ;

Le primat étant la liberté, le régime est indissociable de l’idée de proportionnalité et du contrôle a


posteriori judiciaire des restrictions portées à l’exercice d’un droit.

En tant qu’elle est partagée en autant de membres que comporte la société, la liberté peut et doit être
conciliée avec d’autres libertés ou des exigences d’intérêt général.
Confier au juge le soin de réprimer les infractions en cas d’abus de liberté est un gage de sécurité pour
l’individu, le juge étant statutairement indépendant et son intervention étant entourée de garanties pour
le justiciable.

II- Le régime préventif

Il vise à empêcher préventivement que l’abus ne puisse se réaliser : il s’agit d’un contrôle a priori de
l’exercice des libertés.
Les restrictions sont antérieures à l’exercice du droit, de sorte que l’exercice des droits et libertés peut
être subordonné à l’obtention d’une autorisation préalable ;

Le régime préventif est donc beaucoup moins généreux pour les libertés. Il dénote la volonté des
autorités de contrôler plus intensément et plus efficacement certaines activités. Il faut souhaiter qu’il
ne soit instauré que de manière exceptionnelle. Le Conseil constitutionnel a d’ailleurs estimé que
certaines libertés fondamentales ne peuvent être soumises à un tel régime (DC 1971, dite « Liberté
d’association »).

Le régime repose sur l’idée d’un contrôle a priori de l’exercice des libertés, par les autorités
administratives, pouvant se trouver selon la loi en situation de pouvoir discrétionnaire ou de
compétence liée, afin de protéger l’ordre public ;

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

La mesure de police prise par l’autorité administrative doit être proportionnée à la nature du trouble
qu’elle entend prévenir ou faire cesser et est soumise à un contrôle a posteriori judiciaire étroit, dont
l’objet varie selon les composantes de l’ordre public visées :
1) si l’OP est matériel : l’appréciation de la proportionnalité est fonction des
circonstances de temps et de lieu : CE, 1959, Sté des fils Lutétia
2) si l’OP est immatériel : l’appréciation de la proportionnalité échappe à
l’appréciation de ces circonstances locales : CE, 1995, Morsang-sur-Orge

Exemple de régime préventif = demander autorisation pour une manifestation

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 24 – L’ORDRE PUBLIC

L’ordre public est une notion difficilement saisissable, et définissable, pour deux raisons.
La première est qu’elle est une notion transversale du droit.
La deuxième raison est que l’ordre public est évolutif : le contenu de l’ordre public change avec le
passage du temps qui emporte avec lui la modification des impératifs liés au bon fonctionnement de la
société.

C’est pourquoi en droit administratif, de nombreuses discussions sont relatives à l’existence d’un ordre
public immatériel, qui serait protecteur de la dignité de la personne humaine (CE 1995, Commune de
Morsang-sur-Orge) et de la moralité publique (CE 1959, Société Les Films Lutétia).
En droit international privé, si la Cour de cassation a défini l’ordre public international français comme
l’ensemble des « principes de justice universelle considérés dans l’opinion française dotés de valeur
internationale absolue » (Civ., 25 mai 1948, Lautour),

l’ordre public serait l’ensemble des intérêts dont la protection est essentielle au bon fonctionnement de
la société.

Un motif de protection des DLF

I- La responsabilité de l’Etat de garantir les droits

Pour que l’ordre public soit protégé, l’État doit être responsable de la sauvegarde des droits et des
libertés de chacun. L’exercice de ses droits par l’un entraîne nécessairement une limitation des droits
d’un autre. En témoigne l’article 4 de la DDHC: « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas
à autrui ».
il appartient à l’État d’assurer la sauvegarde d’un ordre respectueux des droits et des libertés de chacun.
Ce faisant, l’État est responsable de la garantie des droits et des libertés.

La Cour EDH juge que la CESDH est l’« instrument constitutionnel de l’ordre public européen » (CEDH,
1995). En effet, la CESDH consacre des droits au bénéfice des individus, mais dont la garantie pèse sur les
États sous la juridiction desquels ils se trouvent.

II- La résolution des conflits entre plusieurs droits

A) La résolution des conflits dans l’ordre juridique national

L’État est responsable, pour assurer le bon ordre sur son territoire, d’arbitrer les éventuels conflits entre
les droits de ces personnes. C’est pourquoi, la CESDH habilite les États à limiter l’exercice d’un droit non
absolu qu’elle consacre afin de garantir les droits d’autrui (§ 2 des articles 8 à 11 de la CESDH).

B) la résolution des conflits dans l’ordre juridique international

Dans l’ordre juridique international, les titulaires de droits sont, à titre de principe, les États. Récemment
l’individu a également été reconnu comme sujet de droit de l’ordre juridique international et s’est ainsi

78
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

vu conférer le bénéfice de droits et libertés consacrés dans des conventions internationales relatives
aux droits de l’homme.
La sauvegarde des DLF repose, en effet, sur l’encadrement de l’exercice des compétences étatiques et a
donc pour effet de limiter la liberté dont il jouit en principe.

Un motif de limitation d’un DLF

I- Un motif de protection de l’intérêt général

A) Une norme principielle

Premièrement, en droit administratif, cet ordre public renvoie à la salubrité, la sécurité et la tranquillité
publiques, au titre desquelles les autorités administratives (notamment locales) ont le pouvoir de police
générale de limiter l’exercice de droits et libertés (article L. 2212-2 du CGCT).

Ex : l’affaire dite « Dieudonné », le maire d’Orléans avait suspendu, aux termes d’un arrêté, la tenue du
spectacle de Dieudonné dans sa ville. Le juge des référés du CE confirme l’ordonnance du TA d’Orléans
rejetant la requête de Dieudonné dirigée contre l’arrêté du maire d’Orléans, au motif qu’une illégalité
manifeste dans l’exercice de ses pouvoirs de police administratif ne saurait être reprochée au maire,
compte tenu du risque d’atteinte à l’ordre public (CE, 11 janvier 2014, M’bala M’bala).

Deuxièmement, en droit constitutionnel, la protection de l’ordre public fait l’objet d’un objectif de
valeur constitutionnel.
Les objectifs de valeur constitutionnelle sont des normes dont l’objet est de limiter l’exercice des droits
et libertés consacrés, quant à eux, dans des principes de valeur constitutionnelle, des PFRLR, dans les
textes du bloc de constitutionnalité.
L’ordre public est donc, en droit constitutionnel, une norme en vertu de laquelle l’exercice des droits et
des libertés constitutionnellement garantis peut être limité, parmi lesquels figurent notamment la
liberté individuelle, la liberté d’aller et venir et l’inviolabilité du domicile (DC 1995).

B) Une norme matricielle

En droit pénal, la protection de l’ordre public se trouve au fondement de l’ensemble de la matière. La


commission d’une infraction pénale est sanctionnée plus ou moins gravement par le code pénal, parce
qu’elle constitue une atteinte aux règles normales de la vie en société.
Ainsi, la liberté individuelle, qui est de principe, peut être limitée par le placement en détention ou
rétention de son titulaire.
La détention remplit traditionnellement deux objectifs qui sont complémentaires : la mise à l’écart de
personnes qui, parce qu’elles ont commis une infraction, représentent un danger pour la société et la
réhabilitation de ces mêmes personnes à la vie en société en leur faisant perdre leur dangerosité.

II- Un motif de protection des valeurs essentielles

A) Une condition de la légalité des actes administratifs

En droit administratif, le Conseil d’État a reconnu que la dignité est une composante de l’ordre public
dans son fameux arrêt Commune de Morsang-sur-Orge (CE 1995).
Il était question dans cet arrêt d’une simple question de légalité de l’arrêté municipal qui avait entendu
assurer la protection de la dignité de la personne humaine.

79
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Il en résulte que la personne humaine dont la dignité était en cause n’était pas celle du requérant
concerné, dont la situation était spécifiquement affectée par l’arrêt municipal, mais bien la communauté
humaine formée de l’ensemble des personnes dont la dignité n’aurait pas été respectée par l’attraction
du lancer de nains.

Il a aussi été soutenu que la moralité publique serait une autre valeur protégée au titre de l’ordre public
en droit administratif. (CE, 18 décembre 1959, Société Les Films Lutétia, n° 36385 et 36428)

Toutefois, certains doutes demeurent quant à la consécration par cet arrêt d’une composante de l’ordre
public relatif à la moralité publique, c’est-à-dire l’existence d’un ordre public immatériel. La raison est
double.
La première est que le caractère immoral ne peut s’apprécier qu’en fonction des circonstances locales
particulières.
La seconde raison est que la doctrine voit dans la jurisprudence la manifestation de différents idéaux, tels
que la protection de la jeunesse, mais qui ne forment pas un ensemble complet.

B) Une condition de validité et de licéité des contrats

1. Les contrats entre personnes privées en droit interne

En droit civil, un contrat, pour être valablement conclu, doit avoir un objet qui n’est pas contraire à
l’ordre public (articles 6 et 1102 du code civil).

2. Les contrats entre États en droit international public


Un enjeu similaire s’observe en droit international public depuis la reconnaissance de l’existence des
normes impératives du droit international, autrement appelées normes de jus cogens (CIJ, 19 décembre
2005, Affaire des activités armées sur le territoire du Congo). I

l s’agit de normes internationales qui, parce qu’elles ont pour objet de protéger des valeurs d’une
particulière importance, sont acceptées et reconnues par la communauté des États comme étant
impératives, c’est-à-dire qu’il n’est pas possible aux États d’y déroger en s’engageant par voie
conventionnelle (CIJ, 3 février 2012, Immunités juridictionnelles de l’État).

Parmi ces normes de jus cogens se trouvent notamment l’interdiction du génocide (TPIY, 14 décembre
1999) l’interdiction de la torture (TPIY, 10 décembre 1998) et l’interdiction du recours à la force armée –
dans les relations entre États (CIJ, 27 juin 1986, Affaire des activités militaires et paramilitaires des Etats-
Unis au Nicaragua).

80
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 25- LE CONTROLE DE PROPORTIONNALITE

Deux types de droits et libertés fondamentaux existent et doivent être distingués : les droits dits absolus,
qui sont des droits qui ne tolèrent aucune limitation (ex. : interdiction des traitements inhumains ou
dégradants, interdiction de la torture, de l’esclavage et du travail forcé, le principe de légalité des délits et
des peines) ; et les droits dits non absolus, qui sont des droits qui tolèrent que leur exercice soit restreint
mais à la condition que cette restriction soit proportionnée (ex. : droit au respect de la vie privée et
familiale, liberté d’expression, liberté d’association, liberté de religion et de conscience, droit d’accès à un
tribunal).
Le contrôle de proportionnalité est donc indispensable pour établir l’existence d’une violation d’un droit
non absolu. La première étape de tout contrôle de proportionnalité réside dans le fait de savoir si le droit
auquel il a été porté atteinte est un droit absolu ou non absolu

Le contrôle de proportionnalité

a. L’objet du contrôle

Quand la question se pose de savoir si un droit a été violé, la question est celle de savoir si l’État a
méconnu son obligation de respecter ou de faire respecter ce droit.

Lorsqu’on dit que l’État a l’obligation de respecter les droits, cela signifie que l’État a l’obligation de ne
pas porter atteinte aux droits absolus et de ne pas porter une atteinte disproportionnée aux droits non
absolus. Il s’agit d’une obligation négative à la charge de l’État.

Lorsqu’on dit que l’État a l’obligation de faire respecter les droits, cela signifie que l’État a l’obligation de
prendre les mesures, suffisantes et adéquates, pour garantir qu’un justiciable exerçant ses propres droits
ou libertés ne porte pas atteinte aux droits absolus, ni ne porte une atteinte excessive aux droits non
absolus, d’un autre justiciable. Il s’agit d’une obligation positive à la charge de l’État.

b. Les étapes du contrôle

A) L’identification du but légitime

La proportionnalité d’une mesure se vérifie à l’aune du but poursuivi par cette mesure. Par exemple, la
restriction portée au droit d’accès à un tribunal par les conditions légales de recevabilité d’une requête
poursuit généralement le but de sécurité juridique et de bonne administration de la justice. L’interdiction
des conventions de gestation pour autrui, dont résulte une restriction à la liberté contractuelle et
d’entreprendre de la mère porteuse, doit être appréciée au regard de la protection de la dignité
humaine.

81
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Encore faut-il que ce but soit un but légitime. Pour savoir si un but peut être considéré légitime, il faut
avoir égard à la norme, conventionnelle ou constitutionnelle, qui consacre le droit auquel il est porté
atteinte.

Parmi les buts identifiés comme légitimes par les dispositions de la CESDH se trouvent (art. 8 à 11, § 2
CESDH) :
- la sécurité nationale
- la sûreté publique
- le bien-être économique du pays
- la défense de l’ordre
- la prévention des infractions pénales
- la protection de la santé ou de la moralité
- la protection des droits et libertés d’autrui

En droit constitutionnel, les normes qui consacrent les droits et les libertés fondamentaux sont parfois
textuelles (ex. : DDHC, Préambule de la Constitution de 1946), mais d’autres sont prétoriennes

Un but est légitime dès lors qu’il fait l’objet d’un motif d’intérêt général, notion (assez vague) qui traduit
le refus du Conseil constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur quant à
l’opportunité d’une mesure législative, ou d’un objectif de valeur constitutionnelle, norme découverte
par le Conseil constitutionnel sans nécessaire fondement textuel qui a pour objet de limiter l’exercice des
droits et libertés garantis par la Constitution.

Parmi les objectifs de valeur constitutionnelle se trouvent :


- la sauvegarde de l’ordre public (DC 1991, Loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme)
- le respect de la liberté d’autrui (DC 1982, Loi sur la communication audiovisuelle),
- le pluralisme des courants d’expression ( DC 1984, Loi visant à limiter la concentration et à assurer
la transparence financière et le pluralisme des entreprises de presse)
- la protection de l’environnement (QPC 2020, Union des industries de la protection des plantes).

B) L’évaluation de la proportionnalité

L’évaluation de la proportionnalité de la mesure étatique au but légitime poursuivi repose sur trois
questions : l’adéquation, la nécessité et la proportionnalité stricto sensu.

La première question consiste à déterminer si la mesure litigieuse permet d’atteindre, c’est-à-dire si elle
concourt ou à tout le moins facilite la réalisation du but légitime identifié. La question est donc celle de
l’adéquation de la mesure pour atteindre le but, autrement appelée question de l’aptitude.

La deuxième question consiste à déterminer si la mesure litigieuse est nécessaire pour atteindre ledit but
légitime. L’action de l’État ne doit pas excéder ce que requiert la réalisation du but.

La troisième question, qui est parfois fondue avec la deuxième, est celle de la proportionnalité stricto
sensu de la mesure, qui est subordonné à l’absence d’alternative, c’est-à-dire d’une autre mesure moins
attentatoire, qui aurait pu être adoptée pour atteindre le même but légitime.

Les contrôles de proportionnalité

I- Les contrôles dans l’ordre juridique national


82
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

A) Le contrôle de constitutionnalité

Le CC opère un contrôle de constitutionnalité, et non de conventionalité des dispositions législatives (DC


1975, IVG). Cela signifie qu’il contrôle la proportionnalité des limites portées par la loi aux droits et
libertés constitutionnellement garantis.
Si le CC a compétence pour contrôler les lois, c’est en raison de la volonté au fondement de la Ve
République de rationaliser le caractère parlementaire du régime. Il s’agit d’encadrer le pouvoir
discrétionnaire du Parlement ;

2 types de contrôle se côtoient selon les droits et libertés en cause.


Le premier est un contrôle entier, c’est-à-dire qui a pour objet de déterminer que la loi n’excède pas ce
que requiert la réalisation du but poursuivi.
Il est mis en oeuvre lorsque la loi contestée limite l’exercice de la liberté individuelle ou la liberté de
communication (QPC du 19 juin 2020, M. Théo S.).

Le deuxième est un contrôle restreint de proportionnalité.


Seules les atteintes manifestement excessives au regard de l’objectif poursuivi sont censurées.
Il en va ainsi lorsque la loi contestée limite l’exercice de la liberté d’entreprendre (DC 2001), de la liberté
contractuelle (ibid., cons. 27), du principe d’égalité (DC 2004), du principe de libre administration des
collectivités locales et de celui de libre disposition de leurs ressources (DC 2003, Loi de finances pour
2004).

B) Le contrôle de conventionnalité

Les juridictions internes judiciaires sont compétentes pour opérer un contrôle de conventionalité des
lois (Chambre mixte, 24 mai 1975, Société Jacques Vabre) ainsi que les juridictions administratives (CE,
Ass., 20 octobre 1989, Nicolo).
Cela signifie qu’elles contrôlent la proportionnalité des limites portées par les dispositions législatives
applicables au litige aux droits et libertés garantis par les conventions internationales relatives aux droits
de l’homme ratifiées par la France.

Le contrôle de conventionnalité opéré par les juridictions ordinaires permet de contrôler, de manière
incidente au litige au principal, deux aspects de la loi qui y est applicable : premièrement, son objet
(contrôle in abstracto) ; deuxièmement, ses effets (contrôle in concreto).

II- Les contrôles dans l’ordre juridique européen

A) Le contrôle de la nécessité dans une société démocratique

Le contrôle de proportionnalité réalisé par la Cour EDH est appelé contrôle de la nécessité dans une
société démocratique. Cela signifie qu’une fois la nécessité de la mesure établie, son adéquation avec
l’exigence démocratique doit encore être vérifiée.
Il s’agit de vérifier qu’aucune autre mesure, davantage protectrice du caractère démocratique de la vie
en société, n’aurait pu être adoptée.
Le contrôle de proportionnalité mis en oeuvre par la Cour EDH se compose donc des trois étapes
traditionnelles : adéquation, nécessité et proportionnalité.

B) Le contrôle de la situation concrète

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Les droits doivent être garantis, en vertu du principe d’effectivité des droits, de manière concrète et
effective, et non pas seulement théorique ou illusoire (CEDH, 9 octobre 1979, Airey c. Irlande).
Le contrôle opéré par la Cour EDH ne porte donc pas sur ce que le droit national prévoit dans l’abstrait,
mais sur ce qui a réellement été mis en oeuvre dans la situation concrète du requérant

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 26 - LES LIMITATIONS EXCEPTIONNELLES (Dérogations)

Dans des circonstances exceptionnelles les libertés et droits fondamentaux peuvent se voir limiter plus
fortement qu’en situation normale. Les nécessités de l’ordre public pèsent en effet plus lourdement.
L’état d’exception demeure régi par le droit et le juge continue d’exercer son contrôle sur les mesures
susceptibles d’être adoptées dans ce cadre. De tels régimes exceptionnels sont prévus tant par le droit
national (article 16, état d’urgence, état de siège) que par le droit international.

Le recours à un régime d’exception implique la suspension du régime libéral normal, et donc la


suspension de la jouissance de droits et libertés fondamentaux.
- Limitations : restrictions portées à l’exercice des libertés et des droits qui ne sont pas absolus ;
- Limitations exceptionnelles : restrictions portées dans des circonstances qui sont exceptionnelles
(ex. : état de siège, état d’urgence, recours aux pouvoirs exceptionnels).
Les limitations exceptionnelles posées par le droit interne
I-Les régimes constitutionnels

A) Les pouvoirs exceptionnels de l’article 16

1. Le recours à l’article 16, un acte de gouvernement


L’article 16 n’a été appliqué qu’une fois entre le 23 avril et le 29 septembre 1961, à l’occasion du
putsch des généraux en Algérie

2 conditions du recours aux pouvoirs exceptionnels de l’article 16 de la Constitution :


1) circonstances exceptionnelles
Elles s’apprécient en raison de leur exceptionnelle gravité et de l’incapacité des pouvoirs publics d’y
faire face ;
2) la consultation du Premier ministre, des présidents des chambres, ainsi que du
Conseil constitutionnel par le chef de l’État

2. Le contrôle des actes pris en application de l’article 16

La décision d’avoir recours aux pouvoirs exceptionnels de l’article 16 est un acte de gouvernement (CE,
1962, Rubin de Servens.
Or, le juge administratif s’attache au critère matériel de l’acte en cause : s’il intervient dans la matière
législative au sens de l’article 34, l’acte est réputé être un acte législatif et son contentieux ne relève
pas de sa compétence. Si l’acte relève de la matière réglementaire au sens de l’article 37, le juge
administratif se reconnaît le droit d’en vérifier la légalité. .

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

B) L’état de siège

art. 36 de la Constitution : « l’état de siège est décrété en Conseil des ministres » et que « sa prorogation
au-delà de douze jours ne peut être autorisée que par le Parlement ». Il n’a jamais été mis en oeuvre sous
la Ve République.

Conditions :
1) « cas de péril imminent résultant d’une guerre étrangère ou d’une insurrection armée » (art. L.
2121 -1 du code de la défense)
2) décrété en conseil des ministres et si dure plus de 12 jours, contrôle par Parlement (autorisation)

conséquence : transfert des compétences de police à l’autorité militaire « pour le maintien de l’ordre
» (art. L. 2121-2 du code de la défense).

II- Les autres régimes d’exceptions

A) L’état d’urgence

Régime légal issu de la loi de 1995


conditions :
1) déclaré par décret du PLR en Conseil des Ministres, selon un pouvoir d’appréciation étendu
(CE, 2005, Rolin)
2) un cas de péril imminent résultat d’atteintes grave à l’ordre public, ou en cas d’évènements
présentant, par leur nature ou leur gravité, le caractère de calamité publique » (loi du 3 avril
1955)

Il peut être prolongé au-delà de 12 jours par la loi, qui doit en fixer la durée définitive ;
Lele refus d’y mettre fin peut être contesté (CE, 2005, Allouache).

Mesures pouvant être adoptées : assignations à résidence (art. 6), perquisitions administratives (art.
11), interdiction de circuler et mise en place de zones de protection (art. 5, 1° et 2°), interdiction de
séjour dans le département (art. 5, 3°), dissolution de groupements (art. 6-1), ordre de fermeture
provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion (art. 8, al. 1), interdiction des
réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre (art. 8, al. 2), ordre de remettre les armes
(art. 9) et réquisition des personnes, biens ou services (art. 10).

Phénomène de banalisation de l’état d’urgence : mouvement d’incorporation dans le droit commun de


mesures adoptées dans le cadre d’un état d’urgence.

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

B) La théorie des circonstances exceptionnelles

Il s’agit des circonstances dans lesquelles les droits et libertés peuvent subir des restrictions plus fortes
qu’en temps ordinaire : CE, 1918, Heyriès ; CE, 1919, Dames Dol et Laurent ayant pour conséquence
d’étendre les pouvoirs de l’administration.

Conditions :
Circonstances d’une particulière gravité, imprévisibilité et de nature à rendre impossible
pour l’administration d’agir conformément à la légalité ordinaire (ex. : 1914- 1918)

La théorie des circonstances exceptionnelles a ainsi été appliquée aux conflits armés de 1914-1918 (CE,
16 août 1915, Delmotte) et de 1940 à 1944 (CE, 16 mai 1941, Koch).

2) Les mesures adoptées par l’administration doivent poursuivre un but d’intérêt général (ex. :
continuité des services publics ou sauvegarde de l’ordre public), être exigées par les
circonstances du moment, être strictement limitées à leur durée et être proportionnées aux
circonstances qui les justifient (CE, 1962, Canal, Robin et Godot).

La théorie des circonstances exceptionnelles a pour conséquence d’étendre les pouvoirs de


l’administration. Elle habilite les autorités administratives à déroger aux règles ordinaires de forme, de
compétence, de procédure et de fond.

Ainsi, l’autorité administrative peut suspendre l’application d’une garantie légale afin d’assurer la
continuité des services publics (CE, 28 juin 1918, Heyriès). L’administration est également autorisée à
créer un impôt non prévu par la loi (CE, Ass., 7 janvier 1944, Lecoq).

Les dérogations doivent en tout état de cause être proportionnées aux circonstances qui les justifient.
La décision Canal du Conseil d’État en est l’illustration : une ordonnance portant création d’une
juridiction d’exception y est annulée au motif que les troubles occasionnés alors par l’action de l’OAS
n’étaient pas suffisants pour justifier la violation des principes généraux du droit pénal résultant de la
création de cette juridiction (CE, Ass., 19 octobre 1962, Canal, Robin et Godot).

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

Les limitations exceptionnelles résultant du droit international

I- L’article 15 de la CESDH

L’article 15 de la CESDH peut exceptionnellement déroger au respect de certaines de ses stipulations en


cas de danger menaçant la vie de la nation.
Il existe une condition formelle à la mise en oeuvre de l’article 15 l’État doit informer le Secrétaire
général du Conseil de l’Europe des motifs qui justifient le recours à des mesures exceptionnelles (CEDH,
1961, Lawless c. Irlande),, ainsi que le champ d’application spatial et temporel de celles-ci (CEDH, 1993,
Brannigan et MacBride c. Royaume-Uni) ;

L’État ne peut exercer son droit de dérogation dans un autre but que celui pour lequel ce droit a été
prévu, à savoir sauvegarder la « vie » ou l’« existence » de la nation. L’article 18 sanctionne à ce titre le
détournement de pouvoir.
La Cour EDH opère un contrôle de nécessité des mesures dérogatoires : les mesures prises par l’État
doivent être indispensables pour faire face au danger public.

Selon l’article 15 § 2, certains droits ne peuvent faire l’objet de dérogation, y compris en temps de
circonstances exceptionnelles. : droits par l’article 2 (droit à la vie, sauf pour les cas de décès résultant
d’un acte licite de guerre), l’article 3 (prohibition de la torture et des traitements inhumains et
dégradants), l’article 4 (prohibition de l’esclavage) et l’article 7 (principe de légalité des délits et des
peines). Il est tentant de déduire de ce régime spécial l’idée d’une hiérarchie entre les droits : en
établissant une liste de droits absolus, l’article 15 définirait le « noyau dur » des droits fondamentaux.

II- L’article 4 du PIDCP

L’article 4 du Pacte international ressemble à l’article 15 de la Convention européenne des droits de


l’homme : L’État qui y a recourt est soumis à un devoir d’information au Secrétaire général des Nations
Unies, dans les mêmes termes que ceux prescrits par l’article 15 § 3 de la Convention européenne.
Sur son modèle, le Pacte énumère les droits indérogeables.
Cette énumération est différente de celle du système européen : l’article 6 (droit à la vie), l’article 7
(prohibition de la torture et des traitements inhumains et dégradants), l’article 8 (prohibition de
l’esclavage), l’article 11 (la prohibition de l’emprisonnement pour dette), l’article 15 (le principe de
légalité des délits et des peines), l’article 16 (le droit à la personnalité juridique) et l’article 18 (le droit à
la liberté de pensée, de conscience et de religion) ne peuvent faire l’objet de dérogation.
Par ailleurs l’article 4 stipule que le recours à la légalité d’exception ne doit entraîner aucune mesure
discriminatoire

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

FICHE 27– LA LUTTE CONTRE LE TERRORISME


Terrorisme : usage de la violence à des fins politiques ;
L’arsenal répressif à l’encontre du terrorisme
Infractions de droit commun : l’art. 421-1 du code pénal emprunte à certaines infractions de droit
commun leurs éléments constitutifs (ex. : atteintes volontaires à la vie, atteintes volontaires à l’intégrité
de la personne, enlèvement, séquestration, vols, extorsions, destructions…) et les réprime au titre du
terrorisme lorsqu’elles sont commises « intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle
ou collective ayant pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur ».

Infractions spécifiques au terrorisme :


- terrorisme écologique (art. 421-2 du code pénal) : utilisation d’une substance de nature à mettre
en péril la santé de l’homme ou des animaux ou le milieu naturel ;
- terrorisme par association de malfaiteurs (art. 421-2-1 du code pénal) : participation
à un groupe formé ou à une entente établie en vue de la préparation d’actes de terrorisme ;
- terrorisme par financement (art. 421-2-2 du code pénal) : fourniture de fonds, de
valeurs, de biens ou de conseils en prévision d’actes terroristes ;
- non-justification des ressources (art. 421-2-3 du code pénal) : ne pas pouvoir justifier
de ressources correspondant à son train de vie en étant en relations habituelles avec une ou plusieurs
personnes se livrant à des actes de terrorisme ;
- recrutement aux fins d’action terroriste (art. 421-2-4 du code pénal) : adresser à une
personnes des offres, promesses, dons, présents, avantages, menaces ou pressions pour qu’elle
participe à un groupement terrorisme ou une entente terroriste ;
- provocation et apologie du terrorisme (art. 421-2-5 du code pénal) : la provocation
peut être publique ou privée, mais doit être directe, et l’apologie doit être publique ;
- entrave au blocage de sites faisant l’apologie du terrorisme (art. 421-2-5-1 du code
pénal) : extraction, transmission ou reproduction de données faisant l’apologie du terrorisme pour
entraver leur retrait ou leur blocage judiciaire ou administratif ;
- consultation habituelle d’un site internet faisant l’apologie du terrorisme ou y
provoquant (art. 425-2-5-2 du code pénal) ;
i. entreprise terroriste individuelle (art. 421-2-6 du code pénal) : fait de préparer la
commission d’une infraction de nature terroriste, en détenant, se procurant, tentant de se procurer ou
fabriquant des objets ou substances de nature à créer un danger pour autrui.

Les modalités de lutte contre le terrorisme


b. Modalités administratives :
état d’urgence : extension, définie dans le temps et dans l’espace, des pouvoirs ordinaires de police
des autorités civiles pouvant être utilisés pour prévenir et lutter contre des actes terroristes, en
limitant la circulation ou interdisant le séjour de certaines personnes (art. 5 de la loi de 1955), en
89
MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

organisation des assignations à résidence (art. 6 de la loi de 1955), en dissolvant des associations ou
groupements liés à une activité terroriste (art. 6- 1 de la loi de 1955), en ordonnant la fermeture de
divers lieux ou commerces (art. 8 de la loi de 1955) ou en permettant des perquisitions (art. 11 de la loi
de 1955) ;

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MODULE II – LES DROITS PROCÉDURAUX THÈME 9 : LES GARANTIES DE PROCÉDURE

droit commun : la loi n° 2017-1510 du 30 octobre 2017 renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre
le terrorisme prévoit trois séries de mesures :
mesures visant à renforcer la prévention d’actes de terrorisme (définition par le préfet d’un périmètre de
sécurité auquel l’accès et au sein duquel la circulation des personnes sont réglementés ; fermeture des
lieux de culte ; mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance ; demande au juge des
libertés et de la détention d’autoriser la visite d’un lieu et la saisie des données qui s’y trouvent) ;
1. mesures concernant les techniques de renseignement, dont l’objet ne peut
être que les communications par voie hertzienne (CC, 2016, Quadrature du Net) ;
2. mesures de contrôle dans les zones frontalières par l’extension de l’art. 78-2
du code de procédure pénale relatif aux contrôles d’identité, autorisant les contrôles d’identité dans un
rayon de 20 km autour des ports et aéroports internationaux désignés par arrêté en raison de leur
fréquentation et de leur vulnérabilité.

c. Modalités judiciaires : deux phases :


i. règles de compétence dérogatoires :
compétence concurrente et spéciale du procureur de la République, du juge
d’instruction, du tribunal correctionnel et de la cour d’assises de Paris en matière de lutte contre le
terrorisme (arts. 706-16 à 706-25-14 du CPP) ;
création du parquet national antiterroriste (loi du 23 mars 2019), détaché du
parquet de Paris, dont la compétence pour la poursuite des actes de terrorisme est concurrente de celle
des parquets territorialement compétents ;
composition et fonctionnement de la cour d’assises de premier ressort comme
appel dans les conditions fixées par l’art. 698-6 du CPP pour la cour d’assises spéciale prévue en matière
militaire.

règles particulières de poursuites et d’instruction : procédure dérogatoire en matière de :


1. contrôles d’identité : les OPJ, sur réquisitions écrites du procureur de la
République, peuvent procéder aux contrôles d’identités prévus à l’art. 78-2, al. 6 du CPP et visiter des
véhicules circulant, arrêtés ou stationnant sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public ;

2. perquisitions : le procureur de la République peut demander au JLD


l’autorisation de perquisitionner certains lieux la nuit (arts. 709-89 et 706-90 du CPP), dérogeant ainsi
au principe de limitation entre 6h et 21h ;

3. procédés d’investigation dans le cadre des enquêtes de police et des


informations judiciaires : interceptions téléphoniques, sonorisations, fixation d’images de lieux ou de
véhicules ou de captations de données informatiques ;

4. garde à vue : possible prolongation supplémentaire par le JLD de 24


heures,
renouvelable une fois (soit un total de 144 heures), s’il ressort des premiers éléments de l’enquête ou
de la garde à vue qu’il existe un risque sérieux de l’imminence d’une action terroriste ou que les
nécessités de la coopération internationale le requièrent impérativement ;

5. détention provisoire : durée totale de 4 ans en cas de mise en examen


du chef de terrorisme (art. 145-2 du CPP).

91
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 10 : L’ÉGALITÉ

THEME 8 : L’EGALITE
FICHE 28 – LE PRINCIPE D’EGALITE
Égalité : droit de toute personne de bénéficier d’un traitement similaire à celui octroyé à une autre
dans une situation semblable (art. 1er DDHC :« les hommes naissent et demeurent libres et égaux en
droits »).
NB : on parle de PRINCIPE d’égalité -> différent du droit et de la liberté, le principe vise la manière dont
vont s’exercer les autres droits et libertés.

QUESTION : Qu’est-ce qu’un principe en droit ? Diff entre principe, droit et liberté ?
Principe : il est une norme qui va jouer sur d’autres normes. Il porte directement sur d’autres normes. Il est plus
objectif que le droit ou la liberté. Le principe est structurant et présente une visée objectivisante.
Droit : fait l’objet d’une définition précise par les normes juridique.
Liberté : DDHC art. 4 : « faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » : la liberté par définition est insusceptible de contenu
déterminé : elle est potentiellement indéterminable du moment que cela ne préjudicie à personne.
Faut-il bannir le mot race de la Constitution ?
On pourrait dire OUI car le principe d’égalité interdit d’établir des races. Mais présence dans la constitution qu’à
travers une interdiction donc on peut dire qu’il n’est pas consacré.

CC 2018 Cédric H : reconnaissance de la valeur juridique du principe de fraternité.

L’égalité devant la loi (égalité de droit)

Égalité devant la loi (égalité de droit ou égalité formelle) : exigence pour les pouvoirs publics de ne pas
exclure une catégorie de personnes du bénéfice d’une règle (art. 1er, Constitution)
Le principe d’égalité est l’un des 3 principes de la loi de Rolland s’imposant à toute activité de service
public
d’un PGD qui impose qu’un traitement similaire soit réservé à des situations similaires.
CE, 1958 : donne la faculté aux pouvoirs publics de retenir un traitement différent si :
1) il est la conséquence nécessaire d’une loi ou s’il existe des différences de situations appréciables
entre les administrés (Denoyez et Chorques CE 1974, affaire du pont de l’Ile de Ré (différences de prix en
fonction de si habitant ou pas)) ou une raison d’intérêt général
2) et si la différence est proportionnée à l’un de ces motifs

NB : au titre de son contrôle de conventionnalité le JA pourra écarter la loi qui viole le principe d’égalité en
ce qu’il est contraire au principe d’égalité garanti par le droit européen. Une QPC est aussi envisageable.

NB 2 : NEANMOINS, le CE n’a pas reconnu l’égalité comme liberté fondamentale au sens du référé-liberté.

Le principe d’égalité est principe de valeur constitutionnelle (CC 1973 Taxation d’office) qui peut être
mobilisé au soutien d’une QPC.

92
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 10 : L’ÉGALITÉ

Un principe fondamental du droit de l’Union européenne qui impose qu’un traitement similaire soit
réservé à des situations semblables et qu’un traitement différent soit retenu dans des situations
distinctes, c’est-à-dire deux obligations (CJCE, 1977, Ruckdeschel).

L’égalité par la loi (égalité de fait)

Préambule de 1946 : les autorités publiques doivent pouvoir permettre la réalisation d’une égalité réelle.
Elle permet d’introduire des mesures compensatoires afin de viser une égalitarisation des conditions de
vie.
Égalité par la loi (égalité de fait ou égalité réelle) : exigence d’intervention positive des pouvoirs publics
pour permettre une justice sociale et une égalité réelle dans les conditions d’existence entre les individus,
qui prend différentes formes selon l’ordre juridique considéré.

Dans l’ordre juridique français :


DDHC 1789 : égalité des individus devant la loi (universaliste)
Préambule de 1946 : + catégoriel, reconnaissance des catégories (l’enfant, la mère, le travailleur, la
personne âgée...) (l’Homme situé)

La loi se fonde sur la faculté des pouvoirs publics, au titre de l’égalité devant la loi, de retenir une
différence de traitement et prend ainsi la forme d’une exigence de proportionnalité avec le but
poursuivi, qui justifie que des situations soient distinguées, dans l’hypothèse où il aurait été fait usage
de cette faculté .
MAIS cette faculté ne se transforme pas en une obligation de traiter différemment des situations
distinctes (CE, 1997, Sté Baxter / CC 2013 mariage pour tous). DONC il ne sera pas possible d’opposer à
l’administration une différence de situations car elle n’a aucune obligation.

Dans l’ordre juridique européen : elle se fonde sur l’obligation de traiter différemment des situations
distinctes, dans la mesure où il serait disproportionné de les traiter de manière semblable (CJUE, 1997,
National Farmers’ Union ; CEDH, 2000, Thilmennos c. Grèce).

Discriminations positives : système de traitement différencié et préférentiel en faveur d’une minorité


visant à dépasser une égalité juridique pour aboutir à une égalité réelle ou une égalité des chances, qui :

Dans l’ordre juridique français : n’est en principe pas admis, puisqu’il va à l’encontre de la conception
universaliste de l’égalité, mais se retrouve par exception au sein du principe de parité (art. 1er, al. 2,
Constitution) favorisant l’accès des femmes aux mandats et fonctions.

En définitive, les discriminations positives ne sont admises en droit français que sur des points précis,
sinon il faut réviser à nouveau : pas de clause générale permettant une discrimination positive.

93
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 10 : L’ÉGALITÉ

Dans l’ordre juridique européen : a été porté par des directives de l’Union européenne en matière
d’emploi et de travail, transposées dans le code du travail (ex. : discriminations au bénéfice des
femmes), sans que cela n’équivaille à une priorité automatique et exclusive à l’embauche, les quotas
étant interdits (sauf pour les travailleurs handicapés).

Exemple : bourses universitaires -> comment les attribuer ? en fonction des résultats / de critères
sociaux / du genre… -> critères combinés et les personnes obtiennent la ressource lorsque points suffisants
(discrimination positive été reconnue aux Etats Unis par l’arrêt Bake USSC 1978 à la condition d’être
proportionnée et de ne pas être fondée sur critère racial)

MAIS attention, les critères retenus doivent être proportionnés et bien choisis car sinon peut aboutir à
créer discrimination à rebours
Pour résumer, c’est comme si course où tlm part au même niveau / course où certains partent avant donc
il faut réguler / et pour discrimination positive, comme si certains qualifiés à l’avance.

Le principe de fraternité a été dégagé en juillet 2018 par une décision QPC. La fraternité a pendant
longtemps été seulement une partie de la devise républicaine, et non un principe ayant une valeur
juridique concrète. La liberté d’aider autrui dans un but humanitaire a aussi été dégagé par la suite, sur
la base du principe de fraternité.

94
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 10 : L’ÉGALITÉ

FICHE 29 – L’INTERDICTION DES DISCRIMINATIONS


Prohibition des discriminations : interdiction de traiter de manière différente deux personnes en raison
d’une différence entre elles découlant d’un critère prohibé (ex. : âge, sexe, orientation sexuelle, origine).
Voir ACTU EU : Students for fair admissions

discrimination directe : lorsque l’objet du traitement réservé à une personne du fait d’un critère prohibé
est moins favorable que celui réservé à une autre personne ;

discrimination indirecte : différence faite sur un critère formellement neutre mais dont les effets sont
susceptibles d’être différents pour deux personnes et d’entraîner un désavantage pour l’une d’elles en
raison de caractéristiques personnelles liées à un critère prohibé.
Exemple : critère de personnes de + d’1m80 pour un travail, pas de discrimination directe MAIS en
pratique aura pour effet de discriminer les femmes.

La CEDH vérifie donc :


1) l’existence d’une discrimination
2) le but légitime poursuivi
3) la proportion entre la mesure et finalité

Dans l’ordre juridique européen :


En droit de la CEDH : seules sont interdites les discriminations – directes ou indirectes – qui sont
disproportionnées au vu du but légitime poursuivi : CEDH, 1968, Linguistique belge), en vertu de :
l’art. 14 de la CEDH : interdiction de la discrimination dans la jouissance des seuls droits conventionnels
;

Protocole n° 12 à la CEDH : interdiction de la discrimination dans la jouissance de tout droit prévu par le
droit interne et conventionnel. Pas signé par la France néanmoins.

NB : l’article 14 a une portée non indépendante : doit toujours être invoqué avec une autre disposition.
MAIS il a une portée autonome : il peut arriver que la Cour note une absence de violation de l’autre
disposition invoquée mais note une violation de l’article 14.

En droit de l’Union européenne : toutes les discriminations directes sont interdites et seules les
discriminations indirectes qui sont disproportionnées sont prohibées : CJCE, 2010, Kleist : fondements :
art. 18 et 19 du TFUE : interdiction des discriminations fondées sur :
- la nationalité
- le sexe
- la race
- l’origine ethnique
- la religion ou des convictions
- le handicap
- l’âge
- l’orientation sexuelle

95
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 10 : L’ÉGALITÉ

l’art. 21 de la Charte des droits fondamentaux : prohibe les discriminations.

Dans l’ordre juridique français :

art. 225-1 et -2 du code pénal : délit de rupture d’une stricte attitude de neutralité à l’égard des
personnes physiques et morales et assimilation du harcèlement et de l’injonction de discriminer faits à
une personne à une discrimination : ex. : art. 222-33 du code pénal sur le harcèlement sexuel.

Les déclinaisons de la non-discrimination :


- Discriminations à raison de la race : prohibition des statistiques ethniques : CC,2007, Loi relative à la
maîtrise de l’immigration.
- Discriminations à raison de l’orientation sexuelle : contrariété avec l’art. 21 de la Charte des droits
fondamentaux de l’UE de la loi qui exclut de manière permanente les hommes homosexuels du don du
sang (CEDH, 2015, Léger) ; contrariété avec l’art. 14, combiné à l’art. 8, de la CEDH de commentaires
haineux postés sous une photographie en ligne d’un couple homosexuel (CEDH, 2020, Liliendahl c.
Islande).

- Discriminations à raison des convictions religieuses : constitue une discrimination indirecte


l’obligation posée dans le règlement intérieur d’une entreprise, de manière générale et indifférenciée,
de neutralité vestimentaire si elle cause un désavantage particulier aux adhérents d’une religion
manifestée par le port de signes religieux visibles, si elle ne peut être justifié par un objectif légitime et si
elle n’est pas suivie de manière cohérente et systématique (CJUE, 2017, G4S Secure Solutions et
Bougnaoui).

Défenseur des droits : autorité constitutionnelle présidée par Claire HEDON, est ordonné à la lutte contre
les discriminations, peut être saisi par toute personne discriminée.

Facilitation de la charge de la preuve en droit du travail : éléments laissant penser qu’il y a une
discrimination peut suffire, ça sera à l’employeur de démontrer qu’il n’a pas établi de discrimination.
En matière pénale, cette règle particulière de preuve ne s’applique pas.

Convention onusienne de 1965 relative à l’élimination de toute forme de discrimination raciale instaure
un comité chargé d’enquêter, etc.

Les statistiques ethniques : très controversé, arguments en faveur (permet de cibler discriminations
positives nécessaires…) et contre (participe au renforcement de communautés différentes + CNIL pas
favorable à la récolte de ces données + CC juge inconstitutionnel (violation article 1 C°).

Emploi du mot « race » : utilisé dans la Constitution / la CEDH… ce terme est controversé en raison de son
utilisation par différentes idéologies racistes. Pas de proposition de mot pour remplacer ce terme
actuellement. Mon pdv : bien de l’inscrire dans le sens où protège de la discrimination (en effet, différent
de la nationalité / et aussi des origines car origines = + culturel alors que race = + physique).

Loi de 2021 : suppression de l’impossibilité pour les hommes gays de donner leur sang

Ecriture inclusive : recours pour excès de pouvoir contre circulaire qui limite écrite inclusive à l’intitulé
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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 10 : L’ÉGALITÉ

des fonctions des agents publics -> mais CE 2019 rejette, affirme que la circulaire se borne à rappeler
respect des règles grammaticales et de synthase en vigueur.

97
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

THEME 9 : LA DIGNITE

La protection de la dignité humaine implique la prohibition des traitements indignes : l’esclavage, la servitude, le
travail forcé, la traite, la torture et les traitements inhumains ou dégradants. La protection contre ces traitements
est absolue, c’est-à-dire qu’elle ne saurait faire l’objet d’une restriction ou d’une dérogation. La protection contre
ces traitements indignes doit également être effective. L’État doit donc prévenir leur occurrence, en adoptant un
cadre juridique adapté et en ne renvoyant pas un étranger qui risquerait de subir de tels traitements dans l’État de
destination. L’État doit aussi réagir en cas d’infliction de traitements indignes, en menant une enquête et en
s’assurant de l’existence de voies de recours effectives permettant d’y mettre un terme.

FICHE 30 – LES ATTEINTES A LA DIGNITE DE LA PERSONNE


Dignité : respect que mérite la personne humaine, qualité inaliénable et indisponible, parce qu’inhérente, à
toute personne humaine. En latin, signifie honneur.

Atteintes à la dignité : la protection de la dignité étant un droit absolu, qui ne tolère donc pas de limite,
toute atteinte emporte violation du droit à la protection de la dignité de la personne.

Une prohibition affirmée des atteintes à la dignité

I- Une pohibition générale


A) Les traitements indignes par nature
Les traitements indignes par nature sont au nombre de 4 : le travail forcé, la traite, la servitude et
l’esclavage (TEST)
Fondements textuels :
- art. 4 de la CEDH
- art. 8 du PIDCP
- art. 5 de la Charte des DFUE
Dès lors que les éléments constitutifs sont réunis, une atteinte à la dignité humaine et une violation du
droit de toute personne de ne pas subir de traitements indignes sont caractérisée.

Rappel : pactes internationaux sont protégés par comité des droits de l’Homme : ne sont pas des
juridictions mais les individus peuvent se plaindre devant eux

Premièrement, l’esclavage est « l’état ou condition d’un individu sur lequel s’exercent les attributs de
propriété ou certains d’entre eux » : CEDH, 2005, Siliadin c. France, définition reprise de l’article 1er, § 1 de
la Convention relative à l’esclavage de 1926.

Code noir de l’époque : esclavage était réglementé par celui-ci, esclaves = objets
Aboli en France en 1794 mais rétabli dans colonies par Napoléon puis aboli en 1848

Deuxièmement, le travail forcé correspond à « tout travail ou service exigé d’un individu sous la menace
d’une peine quelconque et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de son plein gré » (CEDH., 1983,
98
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Van der Mussele c. Belgique) ;

Troisièmement, la servitude est un état de dépendance complète d’une personne envers une autre, qui
implique une négation de la liberté de la première par la seconde : CEDH, 2000, Seguin c. France

Quatrièmement, une situation de traite d‘êtres humains se compose de 3 éléments et désigne le


recrutement, transport, transfert, hébergement ou accueil de personnes (acte), par l’usage de la force, la
contrainte, la tromperie, l’abus d’autorité ou d’une situation de vulnérabilité (moyens) aux fins
d’exploitation (objectifs) : CEDH, GC, 25 juin 2020, S.M. c. Croatie.
Convention de 2005 contre traite des être humains.

Focus – Travail forcé et migrants : CEDH a condamné la Grèce en 2017, estimant qu’elle a manqué à ses
obligations positives de prévenir et de punir la traite d’êtres humains et le travail forcé (migrants employés
dans exploitation de fraises dans de mauvaises conditions, sans sanitaires, sans salaire pendant 6 mois,
humiliation constante). Grèce n’a pas protégé les victimes et n’a pas assuré d’enquête et de procédure
judiciaire effectives car les exploiteurs ont été acquittés au motif que les migrants pouvaient se protéger.

B) Les traitements indignes du fait de leur gravité


D’autres traitements ne sont pas considérés comme indignes par nature, mais comme le devenant dès
lors qu’ils dépassent un certain seuil de gravité : la torture et les traitements inhumains ou dégradants.
Fondements textuels :
- art. 3 de la CEDH
- art. 7 du PIDCP
- art. 4 de la Charte des DFUE

1- Définition du seuil de gravité

élément objectif permettant de tracer le seuil : la nature des souffrances.

Un traitement dégradant : crée chez les victimes un « sentiment de peur, d’angoisse et d’infériorité[…]
propre à les humilier, à les avilir et à briser[…] leur résistance physique ou morale »:CEDH 1978 Irlande c.
RU.

Un traitement inhumain est un traitement causant de « vives souffrances physiques ou morales » (CEDH
2008 Tchember c. Russie) infligées « dans le mépris et sans respect » des sentiments des victimes (CEDH
1998 c. Turquie)

La torture consiste en des « traitements inhumains délibérés provoquant de fort graves et cruelles
souffrances » particulièrement infames (CEDH 2012).
La différence réside ici dans l’élément intentionnel : les souffrances doivent avoir été infligées
intentionnellement.

Ces traitements se différencient donc à deux égards.


Premièrement, ils se distinguent par l’intensité des souffrances infligées. Une véritable gradation se
dessine : les traitements dégradants sont les moins graves des trois, les traitements inhumains le sont un
peu plus, et les cas de torture sont les plus graves de tous.

99
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Deuxièmement, la qualification des traitements diffère selon l’état d’esprit de son auteur : pour qualifier
des traitements de dégradants ou d’inhumains, nul besoin que la personne qui les inflige ait l’intention
de provoquer de tels effets chez la victime (CEDH, 2004 c. Russie).
Pour que des traitements soient qualifiés de torture, la personne doit les avoir infligés
intentionnellement (CEDH, 2000 c. Turquie).
Par conséquent, l’élément objectif de la définition du seuil de gravité devant être atteint dépend du
type de traitement visé mais repose à chaque fois sur la combinaison d’un élément matériel, qu’est le
degré des souffrances infligées, et un élément moral, qu’est l’absence ou non d’intention de les infliger.

élément subjectif visant à abaisser le seuil : la vulnérabilité de la victime.


Plus la victime est vulnérable, plus la protection qui lui est due est élevée, (CEDH 2011, M.S.S. c.
Belgique et Grèce). Les marqueurs de vulnérabilité sont :
- les marqueurs endogènes : l’âge (l’intérêt supérieur de l’enfant), le sexe et l’état de santé CEDH
1989 Soering c/ RU.
- les marqueurs exogènes : la condition de personne étrangère en situation d’illégalité dans un pays
inconnu ; la condition de personne en détention

2- Détermination du seuil de l’atteinte


Pour savoir si elle constitue une violation : prise en compte de l’ensemble des faits de l’espèce : ils
constituent un faisceau d’indices et doivent être considérés selon « leurs effets cumulatifs » : CEDH,
GC, 2016, Mursic c. Croatie).

II- Une prohibition absolue

La protection contre les traitements indignes est absolue, et ce tant pour les traitements indignes par
nature (CEDH 2005, Siliadin c. France) que les traitements indignes du fait de leur gravité (CEDH, 1978,
Irlande c. Royaume-Uni,).

Aussi, aucune restriction ni aucune dérogation n’est permise au droit de toute personne de ne pas subir
des traitements indignes.
Aucune restriction : aucune atteinte portée à ce droit ne peut être justifiée, de sorte que toute atteinte
est constitutive d’une violation du droit.
Aucune dérogation : un État ne peut se prévaloir des clauses de dérogation (article 4 du PIDCP ; article
15 de la CEDH) pour déclarer suspendre temporairement ses obligations en matière de protection
contre les traitements indignes en raison de circonstances exceptionnelles.

Les dispositions prohibant les traitements indignes restent applicables, et donc opposables, en toutes
circonstances.

A) Protection contre l’Etat.

1- La responsabilité internationale de l’Etat


L’obligation négative de l’Etat de ne pas infliger de traitements indigne étant absolue, il ne saurait tenter
de justifier l’atteinte portée au droit de ne pas subir de tels traitement du fait de la poursuite d’un objectif
100
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

donné. Aucun objectif ne peut être légitimement poursuivi lorsqu’un traitement indigne est infligé.
DONC tout traitement indigne infligé par l’Etat emporte la violation des conventions qui les prohibent
et constitue un fondement pour engager sa responsabilité internationale.

2- la responsabilité internationale pénale des agents de l’État


En tant que personne morale, l’État agit par l’intermédiaire de ses agents, dont la responsabilité
pénale internationale peut être engagée dès lors que l’infliction de traitements indignes constitue un
des éléments matériels éventuels du crime de génocide (art. 6 du Statut de Rome), du crime contre
l’humanité (art. 7 § 1 du Statut de Rome) (peut être torture, esclavage, viol, etc., attaque généralisée et
systématique contre population civile) et du crime de guerre en cas de conflit armé international (art. 8
§ 2 du Statut de Rome).

En effet, le crime de génocide, le crime contre l’humanité et le crime de guerre comportent, dans leurs
définitions respectives, un élément matériel visant à réprimer l’infliction de traitements indignes.

Premièrement, le crime de génocide peut consister en une « atteinte grave à l’intégrité physique ou
mentale des membres d[’un] groupe », en une « soumission intentionnelle du groupe à des conditions
d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle » ou en des « mesures visant à
entraver les naissances au sein du groupe », dès lors que ces actes sont commis dans l’intention de «
détruire, tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux » (article 6 du Statut du
Rome ; article 2 de la Convention de Genève pour la répression du crime de génocide de 1951).

Deuxièmement, le crime contre l’humanité peut consister en des actes de « réduction en esclavage », de
« déportation ou transport forcé de population » – acte caractéristique de la traite –, de « torture », de «
viol, esclavage sexuel, prostitution forcée, grossesse forcée, stérilisation ou toute autre forme de violence
sexuelle de gravité comparable », de « persécution » et, de manière générale, de tous les « actes
inhumains de caractère analogue causant intentionnellement de graves souffrances ou des atteintes
graves à l’intégrité physique ou à la santé physique ou mentale », dès lors que ces actes ont été commis
« dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique lancée contre toute population civile et en
connaissance de cette attaque » (article 7 § 1 (c), (d), (f), (g), (h) et (k) du Statut de Rome).

Troisièmement, le crime de guerre peut consister, dans le cadre d’un conflit armé international, en des
actes constitutifs de « torture » ou de « traitements inhumains », qui « caus[ent] intentionnellement de
grandes souffrances ou porte[nt] gravement atteinte à l’intégrité physique ou à la santé » (article 8 § 2
(a) (ii) et (iii) du Statut de Rome), en des « atteintes à la dignité de la personne, notamment les
traitements humiliants et dégradants », « le viol, l’esclavage sexuel, la prostitution forcée » et « toute
autre forme de violence sexuelle constituant une atteinte aux Conventions de Genève » (article 8 § 2 (b)
(xxi) et (xxii) du Statut de Rome). Le crime de guerre peut aussi consister, dans le cadre d’un conflit armé
non-international, en des « atteintes […] à l’intégrité corporelle, notamment […] les traitements cruels et
la torture » ainsi que les « atteintes à la dignité de la personne, notamment les traitements humiliants et
dégradants » (article 8 (c) (i) et (ii) du Statut de Rome). a

B) La protection par l’Etat


L’Etat est aussi tenu par une obligation positive de protéger chaque personne contre tout traitement
indigne pouvant lui être infligé par une autre personne privée, ainsi que par ses agents. (CEDH, 26 juillet
2005, Siliadin c. France).

L’État doit respecter une obligation positive de prévention consistant à adopter un cadre législatif
permettant de protéger toutes les personnes contre les traitements indignes et une obligation positive de
101
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

réaction consistant à adopter les mesures permettant de réprimer la personne ayant infligé le traitement
indigne.

Obligation de prévention
L’État doit adopter un cadre législatif ou réglementaire propre à dissuader toute personne d’infliger des
traitements indignes à une autre.
Plus précisément, il doit « mettre en place une législation pénale concrète pour en prévenir, réprimer et
sanctionner les violations » (CEDH, 11 mai 2011, Ebcin c. Turquie,).

Premièrement, les articles 224-1-A à 224-1-C du code pénal incriminent la réduction en esclavage et
l’exploitation de personnes réduites en esclavage en tant que ces comportements portent atteinte aux
libertés de la personne (liberté d’aller et venir, liberté de travailler, etc.).
Aux termes de l’article 224-1-A, al. 1 du code pénal, « La réduction en esclavage est le fait d’exercer à
l’encontre d’une personne l’un des attributs du droit de propriété ».
Ces infractions sont punies d’une réclusion criminelle de 20 ans, et de 30 ans en présence de
circonstances aggravantes (ex : sur personne vulnérable : mineur par ex)

Deuxièmement, au titre des atteintes à la dignité de la personne, le code pénal sanctionne la traite des
êtres humains. Selon l’article 225-4-1 du code pénal.
.
Troisièmement, sont réprimés les conditions de travail et d’hébergement contraires à la dignité de la
personne, le travail forcé et la réduction en servitude (v. art. 225-13 du code pénal)

Quatrièmement, la torture est réprimée aux termes de l’article 222-1 du code pénal

Obligation de réaction
Premièrement, l’État a l’obligation de diligenter une enquête de manière approfondie et effective sur les
cas allégués de mauvais traitements dont il a eu ou aurait dû avoir connaissance (CEDH, 28 octobre 1998,
Assenov c. Bulgarie). Néanmoins, l’obligation d’enquête est une obligation de moyens

Deuxièmement, l’État a l’obligation de prendre toute mesure concrète et appropriée permettant de


protéger les victimes, réelles ou potentielles, s’il est démontré que les autorités « avaient ou devaient
avoir connaissance des circonstances permettant de soupçonner raisonnablement qu’un individu » était
ou risquait d’être soumis à des traitements indignes (CEDH, 7 janvier 2010, c. Chypre).

SECTION II : Une protection étendue de la dignité (sur la base de l’article 3 CEDH)


= protection par ricochet

En vertu du principe d’effectivité, la protection contre les traitements indignes ne doit pas seulement
être théorique, au risque d’être illusoire, mais doit également être concrète, afin de protéger réellement
les personnes susceptibles d’être soumises à des traitements indignes.

I- Les conséquences indignes de l’éloignement :

A) La protection générale contre l’éloignement


CEDH, 1989, Soering c. Royaume-Uni : M. Soering était détenu au Royaume-Uni, en attente de son
extradition vers les États-Unis, où un acte d’accusation pour assassinat le visait. Son extradition l’exposait
donc au risque d’être reconnu coupable par les juridictions de Virginie, d’être condamné à la peine de
mort et, dans ce cadre, d’être incarcéré dans le couloir de la mort pour plusieurs années, dans l’attente de
son exécution.
102
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Le renvoi de M. Soering l’exposait donc au risque de subir des traitements inhumains ou dégradants,
non pas parce qu’il risquerait de mourir du fait de son exécution judiciaire éventuelle, mais parce qu’il
serait avant cela exposé au « syndrome du couloir de la mort »

La Cour EDH a jugé qu’une décision d’éloignement d’un étranger « peut soulever un problème au regard
de [la prohibition des traitements indignes] s’il existe des raisons sérieuses de croire que la personne en
cause subira dans l’État de destination un traitement contraire » aux exigences conventionnelles.
En ce cas, la mesure de l’État à l’origine de la violation du droit de ne pas subir des traitements indignes
est la décision de renvoi de l’étranger.

Dans la même logique, l’étranger est également protégé dans le cas où une décision de renvoi vers un
État A l’expose au risque d’être renvoyé, par cet État A, dans un État B où il risque de subir des
traitements indignes. Tel était le cas dans l’arrêt CEDH 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce.

Cette protection a été qualifiée de « principe de non-refoulement ».


Il s’agit là d’une qualification en miroir, du fait qu’elle vient en complément du principe de non-
refoulement consacré en droit d’asile. En effet, dans le cas où un étranger dépose une demande d’asile,
la procédure d’asile pourra connaître deux issues différentes : soit elle conduit à la reconnaissance de la
qualité de réfugié de l’étranger, soit elle conduit à la négation de la qualité de réfugié de l’étranger (cf.
fiche sur la protection internationale).
Dans l’hypothèse où la qualité de réfugié est reconnue, l’étranger est protégé par le principe de non-
refoulement consacré à l’article 33 de la Convention de Genève de 1951.

Au contraire, dans l’hypothèse où la qualité de réfugié ne lui est pas reconnue, l’étranger ne sera pas
protégé par le principe de non-refoulement énoncé à l’article 33 de la Convention de Genève de 1951, le
bénéfice de celui-ci étant réservé aux seuls réfugiés. C’est dans cette hypothèse que la protection contre
les traitements indignes, fondée sur les conventions internationales des droits de l’homme, vient ici
prendre le relai du principe de non-refoulement

B) La protection des étrangers malades


La protection des étrangers contre le refoulement, lorsqu’il les expose au risque de subir des traitements
indignes dans l’État de destination, a été déclinée au cas des étrangers malades.
Le risque est que l’étranger souffrant d’une maladie, qu’elle soit physique ou mentale, se trouve privé de
l’accès au traitement et aux soins dans l’État de renvoi, ayant pour effet de provoquer une aggravation
de son état de santé. Les traitements indignes qu’il risque de subir de ce fait pourraient alors être
qualifiés de traitements inhumains ou dégradants.

La Cour EDH a précisé dans son arrêt Paposhvili c. Belgique 2016 qu’« un seuil élevé » doit être atteint,
puisque l’étranger malade doit démontrer que, en cas de retour, il ferait face à un « risque réel d’être
exposé à un déclin grave, rapide et irréversible de son état de santé entraînant des souffrances intenses
ou à une réduction significative de son espérance de vie »

103
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

II- Les conditions indignes de détention

Toute personne, placée en détention ou en rétention, bénéficie de la protection contre les traitements
indignes. Cette protection est d’ailleurs d’autant accrue que l’incarcération de ces personnes les place
dans une situation de particulière vulnérabilité, puisqu’elles sont dépendantes des autorités
pénitentiaires ou administratives.

A) La protection des mineurs placés en rétention administrative


Un mineur est, du seul fait de son âge, considéré comme particulièrement vulnérable. Aussi, les mineurs
étrangers sont considérés comme particulièrement vulnérables « qu’ils soient ou non accompagnés »
d’un parent (CEDH, 13 juillet 2006, Popov c. Russie).

Il en découle une obligation pour l’État de protéger ces personnes mineures, de mettre en place les
procédures adéquates permettant au juge de contrôler de manière prompte pour permettre de
prévenir efficacement les mauvais traitements qui risquent d’être infligés (CEDH 2002 Turquie) et doit
permettre la mise en œuvre d’un « contrôle rigoureux » de la situation, de sorte à évaluer le risque
allégué que le mineur ait subi ou continue de subir des traitements indignes (CEDH 2016 Paposhvili c/
Belgique).

En droit français, ce contrôle est opéré par le JLD (art. L. 741-10 et art. L. 742-1 du CESEDA).

B) La protection face à une situation de surpopulation carcérale


La protection des détenus contre les traitements indignes, du fait de la particularité du contexte auquel
ils sont soumis, suppose la prise en compte de circonstances particulières pour déterminer si les
conditions de détention atteignent le seuil de gravité requis.
Il est tenu compte de l’espace personnel dont dispose la personne incarcérée (CEDH, 2016, Muršić c.
Croatie), des possibilités d’exercice en plein air (ibid), de la quantité de nourriture servie (CEDH 2007,
Modarca c. Moldova) et du degré de salubrité des installations sanitaires (CEDH 2017, Rezmiveș et
autres c. Roumanie).

Une situation de surpopulation carcérale se caractérise par la réunion des indices suivants : CEDH,
2020, J.M.B. c. France : condamnation de la France sur le fondement des articles 3 et 13
- un espace personnel d’encellulement inférieur à 3 m² ;
- des périodes d’exercice en plein air d’une durée très limitée ;
- la quantité insuffisante et la qualité moindre de la nourriture servie ;
- des installations sanitaires insalubres et d’une vétusté ne permettant pas de protéger l’intimité
des détenus.

NB : Dans l’arrêt J.M.B. et autres c. France, la Cour EDH a conclu à la violation par la France du droit de
plusieurs personnes détenues de ne pas subir des traitements indignes, non seulement parce que la
surpopulation carcérale les exposaient à des conditions indignes de détention, mais aussi parce qu’il
n’existait aucun recours en droit français qui leur permettait d’obtenir qu’une instance nationale
remédie et mette un terme aux conditions indignes de détention.

104
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Dans une telle situation, le contrôle prompt et rigoureux du juge des conditions d’incarcération doit
permettre à toute personne incarcérée :
- d’obtenir réparation en cas de violation de son droit de ne pas subir des traitements indignes
(CEDH, 2012, M.C. c. Bulgarie)
- d’empêcher la survenance ou la continuation des traitements indignes allégués (CEDH 2000,
Kudla c. Pologne).

NB 2 : si le JA peut être saisi par la voie d’un référé-liberté, son pouvoir d’injonction ne lui permet pas
d’ordonner des mesures générales et structurelles : CE, 2017, Section française de l’OIP.
Ni le JA ni le JLD ge n’ayant alors compétence pour mettre un terme à des conditions indignes de
détention (Crim., 8 janvier 2020; CC, 2020, M. Geoffrey F. et autres)

La loi du 8 avril 2021 a créé un nouveau recours devant le juge judiciaire pour tous les détenus soumis à
des conditions indignes de détention : nouvel article 803-8, I du CPP prévoit que le contrôle des
conditions de détention relève de la compétence du JLD si le détenu est en détention provisoire et de
celle du JAP si le détenu fait l’objet d’une peine privative de liberté.
Si le juge saisi estime que les conditions de détention sont indignes, il a pour prérogative d’enjoindre à
l’administration pénitentiaire, dans un délai qu’il fixe entre 10 jours et un mois, de prendre les mesures
propres à mettre fin à cette soumission à des conditions indignes de détention.

ACTU CEDH 6 Juillet 2023 BM c/ France : la France est de nouveau condamnée, art. 3 et 13, la Cour prend
acte des améliorations par la France mais les faits sont antérieures à la loi du 8 avril 2021.

105
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

FICHE 31 – DIGNITE DE LA PERSONNE ET BIOETHIQUE


Dignité : respect dû à l’être humain, qualité inaliénable et indisponible, parce qu’inhérente, à toute personne
et être humain.
Bioéthique : étude des problèmes éthiques posés par les avancées biologiques, techniques et médicales.

En tant que composante de l’OP, la dignité impose des limites à l’exercice des droits subjectifs des
individus. Le principe de dignité, appliqué à la bioéthique, est la source d’une protection de la personne
qui a trait tant à sa naissance qu’à sa vie et sa mort.

Un principe difficilement saisissable


I- Un principe « matriciel »
A) En droit international

La première source internationale mentionnant la dignité humaine est la charte de l’ONU.


Puis la DUDH, à l’alinéa 1er de son préambule.
Les PIDCP et PIDESC de 1966 énumèrent également la dignité parmi les valeurs à protéger.

La CESDH ne se réfère pas expressément à la dignité. MAIS, la Cour affirme que « la dignité et la liberté
de l’homme sont l’essence même de la Convention » (CEDH 2002, Pretty c. Royaume-Uni).

B) En droit interne

La dignité est un principe à valeur constitutionnelle : CC 27 juillet 1994 relative à aux lois sur la
bioéthique : fondé sur l’al. 1er du Préambule de la Constitution de 1946.

L’article 16 du Code civil interdit toute atteinte à la dignité de la personne humaine.


L’importance du principe de dignité a également été rappelée par la Cass. : « (…) respect du principe
constitutionnel de sauvegarde de la dignité de la personne humaine » : Civ. 1re, 9 octobre 2001.

Le respect de la dignité de la personne humaine est-il un principe absolu auquel il ne peut être dérogé ?
Certes, l’interdiction des traitements inhumains et dégradants prévue par l’article 3 de la CESDH ne
souffre aucune exception ou possible dérogation. Mais pour sa part, le CC admet de concilier la
dignité avec d’autres principes de même rang constitutionnel (QPC du 16 septembre 2010).

II- Des significations plurielles

A) Le droit au respect de la dignité

Il est possible d’opposer la dignité objective à la dignité subjective, la première étant propre à l’humanité
tandis que la seconde concerne l’individu ou la personne.
Dans cette dernière acception, la dignité est en cause à chaque fois que la corporalité de la personne est
visée, ou lorsque l’individu est traité comme une chose, c’est-à-dire en cas de dégradation du corps
humain ou de réification de la personne
.
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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

B) Le respect de la dignité, limite aux droits subjectifs

La dignité humaine est aussi une composante de l’OP administratif. Elle est utilisée par le JA afin de
limiter l’exercice des libertés individuelles : la dignité permet de justifier des mesures restrictives, visant
à remédier à ce qui est perçu – par l’administration – comme un asservissement de soi.

En particulier dans l’affaire du « lancer de nains » CE 1995 Commun de Morsang-sur-Orge : le respect de


la dignité de la personne humaine est une composante de l’ordre public ; l’autorité investie du pouvoir
de police municipale peut, même en l’absence de circonstances locales particulières, interdire une
attraction qui porte atteinte au respect de la dignité humaine ».

Affaire K.A. et A.D. contre Belgique 2005 : pratiques sadomasochistes.


La Cour rappelle que le « droit d’entretenir des relations sexuelles découle du droit de disposer de son
corps, partie intégrante de la notion d’autonomie personnelle ».
Ainsi, si les faits en question peuvent être regardés comme constituant des traitements inhumains et
dégradants (contraires à l’article 3 de la CESDH) lorsqu’ils sont subis sans consentement, tel n’est pas le
cas lorsque « la victime » se prête volontairement aux pratiques en cause.
Selon la Cour EDH, la dignité humaine ne saurait s’opposer à la liberté individuelle, à partir du moment
où le consentement est donné librement et de manière éclairée.

En résumé en droit français on a une vision objectivante, d’inaliénabilité de la dignité face à l’autonomie
personnelle selon la Cour EDH.
La dignité est aussi présente en droit pénal : infractions d’incitations à la haine raciale ; interdiction de
la contestation des crimes contre l’humanité ; interdiction de l’injure raciste ; traite des êtres humains ;
proxénétismes ; exploitation de la mendicité,

La protection de la vie

I- la naissance de la personne
La décision de devenir ou de ne pas devenir parent est un droit garanti par l’article 8 de la CESDH
(CEDH 2007, Evans c. Royaume-Uni. Ces questions sont partie intégrante de la liberté sexuelle

A) La nature juridique de l’embryon

1- l’embryon n’est pas une personne


C’est à la naissance que l’être est doté de la personnalité juridique : seul l’être né viable est doté de la
personnalité juridique.
Arrêt AP 29 Juin 2001 : rejet de la qualification d’homicide involontaire en cas de suppression d’un
embryon ou d’un foetus par la négligence ou la violence d’un tiers.
CEDH 2004 Vo c. France : la détermination du début de la vie juridique relève de la marge d’appréciation
des EM : les autorités n’ayant aucune obligation au titre du droit à la vie de protéger l’enfant à naître”.

CC, 1994, Lois sur la bioéthique le principe du respect de tout être humain dès le commencement de sa
vie ne leur était pas applicable (aux embryons) ».

2-l’embryon n’est pas une chose comme les autres


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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

CEDH Italie 2015 : l’embryon humain n’est pas un bien, il n’est donc pas possible d’invoquer le droit de
propriété (interdiction d’expérimentations sur embryons en Italie).

Theorie de l’infans conceptus : dès lors qu’un enfant est né vivant et viable, la fiction juridique fait
remonter la vie à la date de sa conception, s’il y trouve avantage ; ainsi, en matière successorale,
l’article 725 du code civil permet à l’enfant non encore né de succéder.

Ce mécanisme d’anticipation suppose, pour jouer, que l’enfant soit né vivant et viable. À défaut d’une
telle naissance, l’embryon ne peut être considéré comme une personne.
Arrêt Perruche du 17 novembre 2000 : reconnaît à un enfant né handicapé une action en réparation
contre le médecin ayant commis une erreur de diagnostic.
DONC sa propre naissance pouvait constituer un préjudice.

MAIS mise en place d’un dispositif légal anti-perruche : loi du 4 mars 2002 : « nul ne peut se prévaloir
d’un préjudice du seul fait de sa naissance »

Condamnation par la Cour EDH arrêt Maurice et arrêt Draon 2005 : l’application rétroactive de ce
dispositif constitue une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens.

La Première chambre civile de la Cour de cassation a par la suite renforcé son opposition à la loi « anti-
Perruche ». Par un arrêt du 8 juillet 2008 : que le texte ne doit pas s’appliquer dès lors que le dommage
est antérieur à l’entrée en vigueur de la loi.

QPC 2010 : a admis l’inconstitutionnalité des dispositions transitoires de la loi « anti-Perruche ».


Autrement dit, en cas de dommage survenu antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 4 mars
2002, l’article L. 114-5 du code de l’action sociale et des familles n’est pas applicable.

B) Conception de l’embryon

1- encadrement de la conception
techniques autorisées :
L’assistance médicale à la procréation (PMA) est encadrée par les lois bioéthiques de 1994) : elle est
réservée aux couples hétérosexuels ou de femmes et aux femmes seules, devant être vivant et en âge
de procréer.

Avant le recours aux techniques d’AMP poursuivait une finalité exclusivement thérapeutique.
Désormais, l’article L. 2141-2 du CSP énonce que « l’assistance médicale à la procréation est destinée à
répondre à un projet parental ».

D’autres conditions doivent être respectées (consentement ;âge; fait d’être vivant pour les demandeurs).
S’agissant du consentement du demandeur : l’accès à ces techniques doit être précédé, selon les articles
L. 2141-2 et L. 2141-10 du CSP, d’entretiens particuliers avec les membres d’une équipe médicale.
La loi impose, à l’issue de ces entretiens, un délai de réflexion d’un mois durant lequel aucun
consentement ne peut être donné. Enfin, le consentement doit être donné par écrit.

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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

S’agissant de l’âge, un décret 2021que la femme peut procéder au prélèvement de ses ovocytes en vue
d’une AMP jusqu’à son 43e anniversaire ; l’homme peut procéder au recueil de ses spermatozoïdes
jusqu’à son 60e anniversaire.

NB : La question pourrait se poser de savoir si cette différence d’âge limite entre hommes et femmes ne
serait pas contraire au principe d’égalité. Le CC décide de manière constante que le principe d’égalité ne
s’oppose pas à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, notamment
liées à l’altérité des sexes. Or, il est certain qu’hommes et femmes sont, au regard de la procréation,
placés dans des situations biologiques différentes.

S’agissant de la condition d’être en vie, la loi du 2 août 2021 a maintenu l’exigence tenant au fait que les
deux membres d’un couple doivent être vivants au moment de la mise en oeuvre de l’AMP.

Autrement dit, le recours à une AMP post mortem demeure interdit.


Ainsi, si l’époux ou le concubin décède, la femme ne peut recourir à une AMP par l’insémination des
gamètes de l’homme décédé ou le transfert des embryons conservés par le couple.
L’interdiction de l’AMP post mortem emporte, en principe, également interdiction de faire transférer les
gamètes ou les embryons à l’étranger, dans un pays autorisant l’AMP post mortem, pour qu’il y soit
procédé. Cette affaire était toutefois particulière en raison de la nationalité de la requérante et du fait
que le processus d’AMP était déjà amorcé au moment du décès.

CE Gonzalez Gomez 2016 : a marqué l’entrée du contrôle in concreto dans le contentieux


En l’espèce, un couple avait procédé à la congélation en France des gamètes du mari. Le mari est décédé. La veuve, de nationalité
espagnole, a alors demandé de récupérer les gamètes conservés en France pour les amener en Espagne, afin de procéder à une
insémination artificielle en Espagne. Les autorités françaises ont toutefois refusé de faire droit à sa demande, au motif que
l’insémination post-mortem est interdite en France (article L. 2141-2 du code de la santé publique) et que tout acte qui reviendrait
à contourner cette interdiction, par exemple en exportant les gamètes dans un autre pays pour y procéder à une insémination
artificielle, est aussi interdit (article L. 2141-11-1 du code de la santé publique). Saisi de la légalité du refus, le Conseil d’État
développe un raisonnement en deux temps. Dans un premier temps, il opère, classiquement, un contrôle de conventionalité in
abstracto des dispositions du code de la santé publique et conclut qu’elles ne méconnaissent pas l’article 8 de la CESDH relatif au
droit au respect de la vie privée et familiale. Dans un second temps, le Conseil d’État ajoute une nouvelle étape à son contrôle, en
vérifiant la conventionnalité in concreto, c’est-à-dire l’effet de ces dispositions appliquées au cas d’espèce. Il relève que la
requérante est de nationalité espagnole et réside en Espagne depuis la mort de son mari, que le mari était gravement malade,
d’où le fait qu’il a fait congeler ses gamètes en France, parce qu’il n’avait pas la capacité de se déplacer en Espagne pour pouvoir
développer un projet familial, et que le mari avait consenti à ce que sa veuve puisse procéder à une insémination en Espagne
après son décès. Au vu de ces circonstances particulières, le Conseil d’État estime que l’application stricte de l’interdiction prévue
par le droit français a porté une atteinte manifestement disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de la
requérante protégé par l’article 8 de la CESDH, tient à l’écart et n’applique donc pas les dispositions du code de la santé publique
visées au cas d’espèce, et enjoint de permettre l’exportation des gamètes vers l’Espagne.

S’agissant des procédés :


L’article L. 2141-1 du CSP définit l’AMP comme l’ensemble « des pratiques cliniques et biologiques
permettant la conception in vitro, la conservation des gamètes, des tissus germinaux et des embryons, le
transfert d’embryons et l’insémination artificielle ».
La fécondation in vivo consiste à inséminer artificiellement l’utérus de la femme avec les spermatozoïdes
de son conjoint, partenaire, concubin ou d’un tiers, tandis que la conception in vitro a pour objet de
féconder, en laboratoire, un ovule avec des spermatozoïdes, puis à réimplanter l’embryon dans l’utérus
de la femme.
Le CSP autorise aussi l’accueil d’embryon, qui consiste pour la femme à recevoir l’embryon congelé issu
d’un autre couple. L’enfant naît ainsi d’un double don de gamètes (ni l’ovule, ni le sperme ne sont issus
d’un des membres du couple ou du demandeur).

L’embryon conçu in vitro ne peut l’être « que dans le cadre et selon les objectifs » d’une AMP (article L.
2141-3 du CSP).
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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Il est désormais admis qu’un couple puisse recourir à la fois à un don d’ovocyte et à un don de sperme.
En outre, la technique de « l’accueil d’embryon » est étendue par la loi du 2 août 2021.

Les embryons peuvent être conservés selon un régime strict. Les membres du couple ou la femme non
mariée peuvent consentir par écrit que soit tentée la fécondation d’un nombre d’ovocytes pouvant
rendre nécessaire la conservation d’embryons dans l’intention de réaliser ultérieurement leur projet
parental (cf article L. 2141-3 du CSP).
Cependant, un couple dont des embryons ont été conservés ne peut bénéficier d’une nouvelle tentative
de fécondation in vitro avant le transfert de ceux-ci sauf si un problème de qualité affecte ces embryons
(ibid.).
Enfin, les membres du couple peuvent consentir par écrit à ce que les embryons, non susceptibles d’être
transférés ou conservés, fassent l’objet d’une recherche dans certaines conditions fixées par l’article L.
2151-5 du CSP.

La durée de conservation des embryons est de 5 ans maximum (article L. 2141-4 du CSP). Les deux
membres du couple sont consultés chaque année afin de déterminer s’ils maintiennent leur projet
parental.

La procréation peut être réalisée au moyen des gamètes du couple. Elle est alors dite « endogène » ou «
homologue ». Mais elle peut être réalisée au moyen des gamètes d’un tiers donneur. Dans ce cas, l’AMP
est dite « exogène » ou « hétérologue ».

9 juin 2023 QPC, M. Frédéric L: l’interdiction d’établissement d’un lien de filiation entre l’enfant et le
tiers donneur ne porte pas atteinte au droit a la vie privée. Les dispositions conformes à la Constitution.

Il peut d’abord s’agir d’un don de gamètes. L’article L. 1244-1 du CSP précise à cet égard que « [l]e don de
gamètes consiste en l’apport par un tiers de spermatozoïdes ou d’ovocytes en vue d’une assistance
médicale à la procréation ». Le don de gamètes est gratuit et anonyme.
À cet égard, le Conseil d’État a jugé que l’anonymat des donneurs de gamètes n’est pas incompatible avec
l’article 8 de la CESDH (CE, 13 juin 2013).

L’AMP peut également être réalisée avec don d’embryon. Le don d’embryon consiste, pour un couple
ayant fait l’objet d’une AMP (ou le membre survivant en cas de décès de l’un des membres), de
permettre l’accueil de leurs embryons conservés par un autre couple en cas de non-persistance de leur
projet parental. Le don d’embryon est un acte exceptionnel, anonyme et gratuit. L’accueil de l’embryon
est subordonné à des règles de sécurité sanitaire. Ces règles comprennent notamment des tests de
dépistage des maladies infectieuses.

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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

techniques interdites :

La maternité de substitution/gestation pour autrui (GPA)


Le droit français interdite la pratique qui consiste à obtenir d’une femme, gratuitement ou moyennant
rémunération, qu’elle conçoive et porte un enfant pour une autre, en s’engageant à l’abandonner à la
naissance pour permettre au couple receveur de faire établir un lien de filiation.
Art. 16-7 Code civil : est nulle toute convention ayant pour objet d’obtenir d’une femme qu’elle
conçoive ou porte un enfant pour un autre.

La GPA qui serait réalisée à l’étranger, ne devrait pas pouvoir produire d’effets sur le sol français. Elle
devrait en principe empêcher la transposition de l’acte d’état civil de l’enfant né d’une GPA à l’étranger.
Mais évolution jurisprudentielle.

Dans un premier temps, la Cass a refusé systématiquement la transcription sur les registres français de
l’acte de naissance établi à l’étranger et résultant d’une GPA (Civ. 1re, 13 septembre 2013).

Dans un deuxième temps, la Cour EDH a condamné la France, considérant que l’interdiction totale
d’établissement du lien de filiation entre un père et ses enfants biologiques nés d’une convention de
GPA à l’étranger, est contraire à l’article 8 CESDH et notamment à l’intérêt supérieur de l’enfant: CEDH,
26 juin 2014, Mennesson c. France et Labassee c. France.

Dans un troisième temps, l’assemblée plénière a jugé que l’existence d’une convention de GPA ne fait
pas obstacle à la transcription à l’état civil d’actes de naissance qui ne sont ni irréguliers, ni falsifiés et
déclarent des faits conformes à la réalité : AP. 3 juillet 2015.

Cette solution ne valait toutefois pas pour le parent d’intention. Par plusieurs arrêts la Cour de cassation
a admis la transcription de la mention d’un acte attribuant la paternité au père biologique, mais non de
celle attribuant la maternité à son épouse, contre la réalité de l’accouchement (Civ. 1re, 5 juillet 2017).
Elle a toutefois autorisé l’adoption, par l’époux du père, de l’enfant né à la suite d’une GPA, si les
conditions légales sont réunies (Civ. 1re, 5 juillet 2017).

Dans un quatrième temps la Cour EDH a rendu un avis consultatif par lequel elle estime que le droit au
respect de la vie privée de l’enfant requiert que le droit interne offre une possibilité de reconnaissance
d’un lien de filiation entre l’enfant et la mère d’intention de l’enfant. (CEDH Avis, 10 avril 2019).

Dans un cinquième temps : AP 4 octobre 2019 : une GPA réalisée à l’étranger ne fait pas obstacle à la
reconnaissance, en France, d’un lien de filiation avec la mère d’intention.
La transcription des actes de naissance étrangers permet en effet de reconnaître ce lien dans le respect
du droit au respect de la vie privée des enfants. Cette solution a ensuite été étendue à la transcription
de l’acte de naissance des enfants désignant le père biologique et le père d’intention (Civ. 1re, 18
décembre 2019 .

NB : aujourd’hui les effets de l’interdiction de la GPA en France sont neutralisés.

Il reste que le législateur a entendu remettre en cause cette jurisprudence de la Cour de cassation :
l’article 47 du code civil prévoit que la transcription ne peut avoir lieu lorsque, notamment, les faits
déclarés dans l’acte étranger ne correspondent pas à la réalité.
La loi du 2 août 2021 a complété cette disposition en ajoutant que cette réalité devait être « appréciée
au regard de la loi française ».
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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Le clonage
Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE), par un avis du 22 avril 1997, a ainsi mis en avant la
contrariété d’une telle pratique avec la dignité de la personne humaine, protégée par l’article 16 du
code civil, et avec l’intégrité de l’espèce humaine, protégée par l’article 16-4 du code civil, étant donné
que le clonage modifie le mode de reproduction de l’espèce humaine et constitue une pratique
eugénique tendant à l’organisation de la sélection des personnes.

Une distinction entre clonage reproductif et clonage thérapeutique apparaît implicitement dans l’alinéa
3 de l’article 16-4 du code civil« [e]st interdite toute intervention ayant pour but de faire naître un enfant
génétiquement identique à une autre personne vivante ou décédée ».
Ce qui est donc interdit c’est uniquement le fait de faire naître un enfant, donc le clonage reproductif.

MAIS le CSP contient une énumération plus large des divers clonages interdits : reproductif (L. 2151-1 du
CSP), conception in vitro d’embryon ou constitution par clonage d’embryon humain à des fins de
recherche (L. 2151-2 du CSP), à des fins commerciales ou industrielles (L. 2151-3 du CSP), et «
également » à des fins thérapeutiques (L. 2151-4 du CSP).

2- l’instrumentalisation de l’embryon

- le bébé-médicament
La loi du 6 août 2004 a autorisé ce que la pratique a nommé le « bébé-médicament » ou « bébé du
double espoir ». Il s’agit de féconder in vitro un embryon, et de l’implanter chez la mère afin qu’à la
naissance soient prélevées des cellules pour soigner son aîné (frère ou soeur) atteint d’une maladie
d’une particulière gravité.

Le recours au bébé médicament est réservé :


1) aux familles où il y a déjà eu naissance d’un enfant malade
pour éviter toute dérive de contrôle des naissances
2) , il faut que l’aîné soit atteint d’une maladie génétique entraînant la mort dès les premières
années de la vie et reconnue comme incurable au moment du diagnostic.
3) C’est donc la survie de l’aîné qui doit être en jeu.

En outre, la réalisation du DPI, auquel les deux membres du couple concerné doivent consentir par écrit,
est soumise à la délivrance d’une autorisation de l’Agence de la biomédecine (article L. 2131-4-1 du CSP),
et la loi érige en délit, sanctionné d’une amende de 30.000 euros et d’un emprisonnement de 2 ans, le
fait de méconnaître l’ensemble de ces dispositions (article L. 2161-2 du CSP ; article 511-21 du code
pénal).

I- L’expérimentation sur l’embryon

Les premières lois de bioéthique ont interdit toute forme d’expérimentation sur l’embryon, interdiction
reprise par la loi du 6 août 2004, qui réserve cependant la possibilité exceptionnelle d’une recherche sur
l’embryon.
Une telle possibilité a été étendue par la loi du 6 août 2013 autorisant sous certaines conditions la
recherche sur l’embryon et les cellules souches embryonnaires à des fins uniquement médicales : cf art
L. 2151-5 du CSP. régime d’autorisation préalable, tandis que les secondes font l’objet d’une simple
déclaration à l’Agence de biomédecine.
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MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Désormais il est admis que les recherches sur l’embryon puissent être menées, non seulement à des fins
médicales, mais également en vue d’améliorer la connaissance de la biologie humaine.

Désormais, la loi n’interdit plus que la modification d’un embryon humain par adjonction de cellules
provenant d’autres espèces

II- La vie de la personne

A) La protection de la personne à travers son corps


1- l’inviolabilité et intégrité du corps humain
L’article 16-1 al.2 dispose que « le corps humain est inviolable » : le droit pénal érige en infractions tous
les comportements attentatoires au corps.

S’agissant des actes de soin, l’article 16-3, alinéa 2 du code civil met en avant le consentement nécessaire
et préalable de la personne.

atteintes légales :
Une atteinte ne peut être effectuée que sous 2 conditions cumulatives :
1) un intérêt légitime prévu par la loi
2) le consentement de la personne.

Le don et l’utilisation des éléments et produits du corps humain


Ils supposent le recueil du consentement préalable du donneur mais ils peuvent être utilisés à une
autre fin médicale ou thérapeutique que celle pour laquelle ils ont été collectés si le donneur en a été
informé et ne s’y est pas opposé (art. L. 1211-2, CSP).
Le don et l’utilisation de ces éléments et produits sont par ailleurs guidés par un principe de gratuité
(article L. 1211-4 du CSP) et un principe d’anonymat (article L. 1211-5 du CSP).

Le CSP met également en oeuvre un principe de précaution : les éléments et produits du corps humain
ne peuvent être utilisés à des fins thérapeutiques si le risque mesurable en l’état des connaissances
pour le receveur potentiel est supérieur à l’avantage escompté pour celui-ci (article L. 1211-6 du CSP).

Néanmoins, certains produits du corps humain ne sont pas soumis à ces principes et peuvent être cédés à
titre onéreux (article L. 1211-8 du CSP). La liste, fixée par décret en CE, inclut les cheveux, les poils, ongles,
dents, le lait maternel, les excrétions, etc.

En ce qui concerne le prélèvement d’organes (articles L. 1231-1 A et s. du CSP), il est fait une distinction
entre le prélèvement sur une personne vivante, dont le consentement exprès doit avoir été donné, et
celui sur une personne décédée, dont seul le refus ne doit pas avoir été exprimé.
S’agissant du prélèvement sur une personne vivante, il ne peut avoir lieu que dans l’intérêt
thérapeutique direct du receveur (article L. 1231-1 du CSP).

114
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

La recherche biomédicale
La recherche biomédicale est très encadrée et suppose le recueil du consentement libre et éclairé de la
personne (art. L. 1121-1, CSP) ;

l’examen des caractéristiques génétiques


Il ne peut être entrepris qu’à des fins médicales ou de recherche scientifique et requiert le
consentement exprès de la personne (art. 16-10, code civil) ;
Exception : l’intervention chirurgicale indispensable à sa survie à laquelle l’intéressé n’est pas à même
de consentir (art. 16-3, code civil) et la vaccination obligatoire si elle est proportionnée à l’objectif de
protection de la santé publique (al. 11 du préambule de 1946) (CC, 2015, Époux L.).

CEDH 2021 : la vaccination obligatoire ne viole pas l’art. 8 CEDH.

les atteintes illégales


Les principes d’inviolabilité et d’intégrité du corps humain sont protégés par l’interdiction de
soumettre la personne à des traitements inhumains ou dégradants : art. 3 CEDH.

S’agissant de l’interdiction de la torture, l’article 222-1 du code pénal punit le tortionnaire d’une peine
de 15 ans de réclusion criminelle.
+ Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants adoptée
par l’assemblée générale de l’ONU le 3 décembre 1984
la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou
dégradants, adoptée le 26 novembre 1987

3- la non-patrimonialité du corps humain


Le principe de non-patrimonialité prescrit une indisponibilité à titre onéreux du corps humain (art. 16-1,
-5 et -6, code civil), y compris de personnes décédées (Civ.1ère, 2010, « Our Body »).

Sur la brevetabilité du vivant : L. 611-18, :principe : me corps humain, aux différents stades de sa
constitution et de son développement ne peuvent constituer des inventions brevetables ».
Mais toute brevetabilité n’est pas exclue, dès lors qu’un gène fait l’objet d’une application particulière
(ex. : médicament). En effet, l’alinéa 2 de l’article L. 611-18 prévoit qu’une invention constituant
l’application technique d’une fonction d’un élément du corps humain peut être protégée par brevet

B) La protection de la personne à travers l’espèce humaine


Le droit de la bioéthique n’entend pas protéger la personne exclusivement dans son individualité ; il faut
également protéger le genre humain contre des comportements qui portent atteinte à son essence.
À cet égard, l’article 16-4 du code civil, issu des lois de bioéthique, affirme 4 principes :
- nul ne peut porter atteinte à l’intégrité de l’espèce humaine
- toute pratique eugénique tendant à l’organisation de la sélection des personnes est interdite et
sanctionnée par une peine de trente ans de réclusion criminelle et une amende de 7.500.000
115
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

euros
- est interdite toute intervention ayant pour but de faire naître un enfant génétiquement
identique à une autre personne vivante ou décédée (v. supra le clonage) ;
- aucune transformation ne peut être apportée aux caractéristiques génétiques dans le but de
modifier la descendance de la personne.
La protection de la fin de vie

I- La mort
C’est à l’instant de la mort que cesse la personnalité juridique (puis ouverture de la succession).
Le décret du 2 dec. 1996 place la détermination de la mort non seulement au niveau du cerveau, mais
aussi à celui du tronc cérébral.

Le suicide
Seule la provocation au suicide est réprimée depuis une loi de 1987.
L’euthanasie
L’euthanasie active est envisagée comme le droit pour une personne de demander à un médecin ou à
un tiers qu’il provoque sa mort afin de mettre un terme à ses souffrances.
On parle également de « suicide assisté », que le droit français ne reconnaît pas : l’euthanasie est
regardée comme un homicide volontaire.
Cour EDH Pretty c. Royaume-Uni 2002 : absence de violation de l’article 2 de la CESDH (droit à la vie),
considérant qu’il ne saurait en découler un « droit à mourir » = large marge d’appréciation des EM.

L’euthanasie passive désignerait le fait de ne pas recourir à ou d’arrêter un traitement afin de ne pas
accabler le malade de soins inutiles (cf article L. 1110-5 du CSP).
Le droit en vigueur consacre à cet égard le refus de l’obstination déraisonnable, c’est-à-dire le refus de
poursuivre un traitement thérapeutique sans espoir réel et sérieux d’obtenir une amélioration de l’état
du malade et qui n’a d’autre objet que de prolonger artificiellement la vie.

La personne en fin de vie a également le droit de refuser un traitement, même lorsqu’un tel choix met
sa vie en danger : article L. 1110-4 du CSP.

L’article L. 1110-5-2 CSP consacre un droit à l’obtention d’une sédation profonde et continue jusqu’au
décès.
Une personne consciente peut exercer ce droit dans deux cas :
- lorsque le patient atteint d’une affection grave et incurable (1) et dont le pronostic vital est
engagé à court terme (2) présente une souffrance réfractaire aux traitements (3)
- lorsque la décision du patient atteint d’une affection grave et incurable d’arrêter un traitement
engage son pronostic vital à court terme (1) et est susceptible d’entraîner une souffrance
insupportable (2)

L’article L. 1110-5-2 du CSP envisage aussi l’arrêt des traitements lorsque la personne est inconsciente :
Le médecin est tenu de respecter les directives anticipées qu’il a formulées, sauf si elles apparaissent
manifestement inappropriées ou non conformes à la situation médicale du patient.
Les directives anticipées sont définies par l’article L. 1111-11 du CSP

116
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

NB : depuis l’ordonnance du CE de 2014 Vincent Lambert le droit de ne pas subir un acharnement


thérapeutique est une liberté fondamentale au sens du référé-liberté.

II- Le mort
S’agissant des prélèvements d’organes sur les personnes décédées : le CSP prévoit ainsi que le
prélèvement d’organes sur un mort est possible dès lors que la personne n’a pas fait connaître de son
vivant son refus d’un tel prélèvement, sachant que ce refus peut être exprimé par tout moyen et est
révocable à tout moment (article L. 1232-1 du CSP).

S’agissant des recherches biomédicales, l’article L. 1121-14 du CSP mentionne qu’« [a]ucune recherche ne
peut plus être effectuée sur une personne décédée, en état de mort cérébrale, sans son consentement
exprimé de son vivant ou par le témoignage de sa famille ».

Quid de l’identification génétique post mortem (utilisée aux fins d’établissement d’un lien de filiation) ?

Aux termes de l’article 16-11 alinéa 2 du code civil, « sauf accord exprès de la personne manifestée de
son vivant, aucune identification par empreintes génétiques ne peut être réalisée après sa mort ».

Néanmoins, la Cour EDH a condamné la France sur le fondement de l’article 8 de la CESDH pour avoir
refusé d’établir la filiation du requérant de manière injustifiée (CEDH, 16 juin 2011, Pascaud c/ France).

Désormais, l’absence de consentement à l’expertise biologique ne peut pas constituer à lui seul un
motif permettant de refuser la preuve biologique.

CC QPC du 30 septembre 2011, M. Louis C., : « en disposant que les personnes décédées sont présumées
ne pas avoir consenti à une identification par empreintes génétiques, le législateur a entendu faire
obstacle aux exhumations afin d’assurer le respect dû aux morts ; qu’il n’appartient pas au Conseil
constitutionnel de substituer son appréciation à celle du législateur sur la prise en compte, en cette
matière, du respect dû au corps humain ; que, par suite, les griefs tirés de la méconnaissance du respect
dû à la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale doivent être écartés »

117
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

FICHE 32 – DIGNITE DE LA PERSONNE ET DROITS SOCIAUX

Le droit à la protection sociale


Droit à la protection sociale : droit fondamental :
Fondements :
- al. 11 du Préambule de 1946 : principe particulièrement nécessaire à notre temps
- art. 34 de la Charte DFUE
- art. 9 du PIDESC

Il est un droit qui ne produit pas d’effet direct à l’égard des particuliers et ne peut pas être utilement
invoqué en tant que tel à l’appui d’un recours interne (CE, 2006, GISTI) ;

Concrétisations en droit interne :

- Solidarité nationale, protection sociale face à tous types de risques liés à l’existence (santé,
vieillesse…), législateur veut éviter phénomènes d’exclusion, code de l’action sociale et des
familles / code de sécurité sociale

- sécurité sociale : SPA (TC, 1974, Sieur Blanchet) de couverture des charges de maladie, de
maternité/paternité et de famille et de protection des travailleurs contre les risques propres à
supprimer leurs revenus (art.L.111-1 du code de la sécurité sociale);

- revenu de solidarité active (RSA) : garantie d’un revenu minimum ayant pour contrepartie
l’obligation de chercher un travail ou de suivre un projet professionnel visant à améliorer sa
condition financière (créé par la loi du 1er décembre 2008) ;

Limites à la portée de ces droits :


Les limites du droit à la protection sociale tiennent, comme pour tout droit, à la protection de l’intérêt
général et à la conciliation avec d’autres droits de même valeur.
Mais elles relèvent aussi des conditions de mise en oeuvre du droit à la protection sociale lui-même.

Ensuite, la jurisprudence, et essentiellement la jurisprudence administrative, établit une distinction


entre les dispositions du Préambule qu’elle considère d’application immédiate et celles qui
nécessitent une intervention législative.
Dans cette seconde hypothèse (par ex. à propos du 12e alinéa : CE, 29 novembre 1968, Tallagrand), elle
refuse de faire droit à une requête fondée sur le droit à la protection sociale dans le but d’obtenir une
prestation sociale non prévue par la loi.

118
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Le droit à l’emploi
Droit à l’emploi (ou droit au travail) : nouvelle formulation de la liberté de travailler – et pas d’un droit à
l’obtention d’un emploi – dont l’effectivité suppose que le législateur mette en œuvre sa compétence
pour permettre au plus grand nombre de personnes d’obtenir ou de se maintenir à un emploi ;

Fondements :
- PPNT : al. 5 du Préambule de 1946
- reconnaissance conventionnelle : art. 6 du PIDESC ; art. 15 de la Charte des DFUE

MAIS qui n’est pas une liberté fondamentale au sens du référé-liberté (CE, 2001, Casanovas).

Ce droit ne produit pas d’effet direct à l’égard des particuliers et ne peut donc pas être utilement
invoqué en tant que tel à l’appui d’un recours interne contre un acte administratif (CE, 2000, Annad) ;

Concrétisations en droit interne : fondement constitutionnel des politiques publiques de lutte contre le
chômage, ayant pour objet de restreindre l’exercice par les employeurs de leur liberté d’entreprendre,
en limitant leur capacité de licenciement, pour protéger le « principe fondamental du droit du travail »
(CC, 2002, Loi de modernisation sociale)

Le droit au logement CF BREVIAIRE pour + de détails


Droit au logement : déclinaison particulière du droit de disposer d’un niveau de vie suffisant pour
assurer sa santé, son bien-être et celui de sa famille (art. 25 § 1 de la DUDH ; art. 11 du PIDESC) et des
conditions de vie dignes (art. 34 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE ; ; il est consacré à sous la
forme des deux normes de protection de la dignité :

Droit fondamental, source de garantie d’une prérogative individuelle :


- droit fondamental « au logement » :
Fondements :
- droit conventionnel : art. 11 du PIDESC ; art. 34 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE
MAIS n’est pas une liberté fondamentale au sens du référé-liberté et qui ne produit pas d’effet direct à
l’égard des particuliers (CE, 2002, Association de réinsertion sociale du Limousin) ;

droit fondamental « à l’hébergement d’urgence »


Fondements :
se distingue du droit au logement par son caractère urgent et provisoire en ce qu’il est une liberté
fondamentale au sens du référé-liberté : CE, 2012, Fofana) ;
objectif de valeur constitutionnelle, découlant du principe de sauvegarde de la dignité humaine, visant
à garantir la possibilité pour toute personne de disposer d’un « logement décent » (CC, 1998, Loi
d’orientation relative à la lutte contre les exclusions).

119
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

- Concrétisations en droit interne :


Interdiction de toute discrimination dans l’accès au logement (loi dite « Mermaz » de 1989 qui anticipe
la reconnaissance de cette garantie par CEDH, 2003, Karner c. Autriche) ;

obligation pour les autorités d’adopter un plan pour l’hébergement d’urgence des personnes sans abri
(art. 21 de la loi de 1994 relative à l’habitat) ;

consécration d’un « droit au logement opposable » (« DALO ») et d’un « droit à l’hébergement opposable
» (« DAHO ») (loi du 5 mars 2007) dont le respect peut être imposé :

- à l’issue d’un recours administratif amiable formé auprès d’une commission départementale
de médiation ;

- par une personne qui n’est pas en mesure de chercher seule, au terme d’un recours
juridictionnel en contestation de la décision de refus.
Le juge administratif pourra, au titre de son pouvoir d’injonction, ordonner le logement ou
l’hébergement de la personne intéressée

- en cas d’inaction, aux termes d’un recours en responsabilité pour faute de l’État.

120
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

FICHE 33 – LA PROTECTION INTERNATIONALE DE LA PERSONNE

Le droit d’asile s’est développé dans l’entre-deux-guerres, il s’applique à toute personne recherchant la
protection d’un autre État que celui dont il est originaire, à raison des persécutions dont il est
susceptible de faire l’objet.
En principe chaque Etat est censé assumer une obligation de protection de ses ressortissants nationaux.
En cas de carence de l’Etat au titre de sa protection nationale, le réfugié peut chercher à demander une
protection internationale (au titre de la convention de Genève de 1951).

Fondements :
- Convention de Genève de 1951
- al. 4 du préambule de la Constitution de 1946

La protection constitutionnelle, prévu dans le préambule de la Constitution, est cantonnée aux


combattants de la liberté. Il faudra démontrer une persécution effective en raison de l’engagement actif
de cette personne en faveur de la liberté. Elle est, de fait, très rarement accordée.

Par ailleurs, la protection subsidiaire, qui est accordée à toute personne dont la situation ne répond pas à
la définition de la qualité de réfugié mais pour laquelle il existe des motifs sérieux et avérés de croire
qu’elle courrait dans son pays un risque réel de subir l’une des atteintes graves suivantes :
- peine de mort ou une exécution
- la torture ou des peines ou traitements inhumains ou dégradants
- pour des civils, une menace grave et individuelle contre sa vie ou sa personne en raison d’une
violence aveugle résultant d’une situation de conflit armé interne ou international (article L.
512-1 du CESEDA).
Protection internationale : régime de protection des personnes au titre de la qualité de réfugié fondée
sur la convention de Genève de 1951 complétée par le protocole de New York de 1967, ou au titre de la
protection subsidiaire, au titre du régime d’asile européen commun (art. 67 et art. 78, TFUE ; directive
« qualification » de 2011 ; directive « accueil » de 2013 ; directive « procédures » de 2013).

La procédure d’éligibilité
I- Accès à la procédure :

A) L’accès à la procédure à la frontière

En principe, toute personne qui se présente à la frontière doit remplir les conditions posées par le
CESEDA, à défaut de quoi un refus d’entrée peut être légalement opposé.
MAIS l’entrée sur le territoire ne peut pas être refusée à un demandeur d’asile au seul motif qu’il n’est
pas en possession des documents normalement exigés d’un étranger.

La demande d’entrer aux fins de l’asile donne lieu au placement de l’étranger en zone d’attente, au
contrôle de la recevabilité de sa demande d’asile au vu du règlement « Dublin III » de 2013.
S’il s’avère qu’un autre Etat est compétent, France peut à ce titre lui refuser l’entrée sur son territoire
(art. L. 213-8-1, CESEDA) – et, le cas échéant, à un examen par un officier de l’OFPRA qui s’entretient
avec le demandeur pour vérifier que sa demande n’est pas irrecevable ou manifestement infondée et
établit un rapport d’entretien, sur la base duquel le ministre de l’intérieur refuse l’entrée ou délivre un

121
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

« visa de régulation » de 8 jours.

Une fois l’entretien réalisé et l’avis de l’OFPRA transmis, deux hypothèses peuvent se présenter.

- le ministre de l’Intérieur peut prendre une décision refusant l’entrée sur le territoire, laquelle
doit être écrite et motivée.
La décision doit indiquer qu’il a le « droit d’avertir ou de faire avertir la personne chez laquelle il
a indiqué qu’il devait se rendre, son consulat ou le conseil de son choix » ( article L. 352-3 du
CESEDA).

- le ministre de l’intérieur prend une décision d’admission sur le territoire au titre de l’asile.
L’intéressé peut alors quitter la zone d’attente et il lui est délivré un « visa de régularisation »,

B) L’accès à la procédure sur le territoire

Lorsque l’étranger se trouve déjà sur le territoire national, généralement de façon irrégulière, et qu’il
souhaite présenter une demande d’asile, il doit se rendre personnellement à la préfecture afin que cette
demande soit enregistrée (art. L.521-1, CESEDA) :
- en procédure « accélérée » : si l’étranger vient d’un pays d’origine sûre, si son récit présente des
incohérences ou des contradictions, s’il dissimule des documents ou refuse de se soumettre à
l’obligation de donner ses empreintes digitales ; ou

- en procédure « normale » : dans toutes les autres hypothèses ; et une attestation de demande
d’asile lui est délivrée et un numéro d’étranger lui est attribué, à compter de quoi il dispose de 21
jours pour saisir l’OFPRA, qui examinera sa demande.

II- Examen des demandes

A) Examen par l’OFPRA

Le classement d’une demande en procédure normale implique que l’OFPRA l’instruise dans un délai de
six mois à partir de l’enregistrement de la demande.
L’OFPRA est tenue de procéder, dans de brefs délais (CEDH, GC, 2011, M.S.S. c. Belgique et Grèce), à un
entretien personnel et confidentiel (art. L. 531-12, CESEDA).
Le demandeur doit justifier le bien-fondé de sa demande au regard des conditions d’éligibilité (cf. ci-
dessous). Le demandeur être assisté d’un avocat et d’un interprète, et à l’issue duquel l’OFPRA rend une
décision d’octroi ou de rejet de la demande d’asile.

B) Le contrôle de la Cour nationale du droit d’asile (CNDA)

En cas de décision négative, spécialement de refus d’octroi d’une protection, le demandeur peut former
un recours contentieux, dans un délai d’un mois, devant la CNDA.
La CNDA statue en premier et dernier ressort. Les décisions de la Cour sont susceptibles de pourvoi en
cassation devant le Conseil d’État.
La CNDA est une juridiction administrative spéciale, compétente pour connaître des recours de plein
contentieux (CE, 1982, Aldana Barrena) introduits à l’issue de la délivrance d’une décision de rejet pas
l’OFPRA, de sorte que la CNDA n’a pas à se limiter à annuler la décision de l’OFPRA mais peut y
122
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

substituer sa propre décision, le cas échéant, à l’issue d’un nouvel examen de la demande d’asile.

La Cour peut prescrire toute mesure d’instruction qu’elle juge utile : expertise des pièces, enquête
auprès de l’Office, des ambassades, du gouvernement français, des organisations non
gouvernementales. La procédure devant la CNDA est écrite, inquisitoire et contradictoire.

Les conditions d’éligibilité

I- La qualité de réfugié

Le réfugié est toute personne qui « craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa
religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions
politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette
crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays » : art. 1 A Convention de Genève + renvoi
par L 511-1 CESEDA

La reconnaissance de la qualité de réfugié suppose la réunion de quatre conditions : un risque de


persécutions l’existence d’un agent de persécution, l’absence de protection dans le pays d’origine et un
motif de persécution.

Élément d’extranéité : le demandeur d’asile doit être hors de son pays d’origine ;

A) Un risque de persécutions

La directive de 2011 dite « qualification » définit la persécution comme un fait

- suffisamment grave du fait de sa nature ou de son caractère répété pour constituer une violation grave des
droits fondamentaux, en particulier des droits auxquels aucune dérogation n’est possible au sens de l’article 15
de la Convention européenne des droits de l’homme (article 9.1, a) ;

- une accumulation de diverses mesures, compris comme une accumulation de violation des droits de
l’homme qui soit suffisamment grave pour affecter un individu de manière comparable aux actes visés au a)
de l’article 9, § 1 (article 9.1, b).
Le demandeur doit faire état de craintes personnelles (individualisation de la crainte) ; actuelles et graves (la
gravité d’un acte dépend soit de sa nature, soit du caractère répété d’une violation des droits fondamentaux
ou d’une accumulation de diverses mesures).
Enfin, les craintes doivent être localisées sur le territoire de son pays de nationalité ou de son pays de
résidence habituelle.

B) L’existence d’un agent de persécution

L’agent de persécution peut être un agent étatique ou toute personne privée si les autorités n’offrent pas
de protection (art. L. 513-2, CESEDA) ;

C) L’absence de protection dans le pays d’origine

123
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Il faut rechercher si le demandeur ne peut bénéficier d’une protection sur place, de la part des autorités ou en
raison, notamment, de la présence d’une organisation internationale assurant cette mission. La protection
peut ainsi être le fait d’une organisation internationale.
L’article L. 513-3 du CESEDA ajoute que la protection sur place doit être effective et non temporaire.

D) Un motif de persécution

La Convention de Genève subordonne la protection internationale au rattachement des craintes à l’un des
cinq motifs qu’elle énumère : la race, la religion, la nationalité, les opinions politiques et l’appartenance à un
certain groupe social.
Ces motifs peuvent être réels ou supposés : interprétation souple par le juge.

II- La protection subsidiaire

Le bénéfice de la protection subsidiaire n’est accordé, le cas échéant, qu’après l’examen de la demande
au regard des critères de la Convention de Genève.

Protection subsidiaire : s’il est constaté que le demandeur d’asile n’a pas la qualité de réfugié, il peut tout
de même bénéficier d’une protection, à titre subsidiaire, s’il risque, en cas de retour dans son pays
d’origine, d’être exécuté ou d’être condamné à la peine de mort.

Le demandeur doit prouver l’existence d’un risque d’atteintes graves ou de menaces graves tenant :
- à la peine de mort ou l’exécution
- à la torture ou des traitements ou sanctions inhumains ou dégradants
- des menaces graves ou individuelles contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une
violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international.

La CNDA exige désormais que la province dont provient le ressortissant se trouve dans une situation de
violence aveugle atteignant un niveau tel qu’il s’y trouverait exposé à une menace grave et individuelle
contre sa vie ou sa personne. La CNDA n’octroie donc plus la protection subsidiaire au seul motif que le
ressortissant étranger arrive d’Afghanistan.

III- L’éviction de la protection internationale

Même si le demandeur remplit les conditions d’éligibilité, il est évincé de la protection internationale
lorsque certaines circonstances l’en rendent « indigne ».

Il s’agit des clauses d’exclusion : article 1F de la convention de Genève : terroristes ; génocidaires :


Sont exclues de la protection les personnes dont « on aura des raisons sérieuses de penser :
- qu’elles ont commis un crime contre la paix, un crime de guerre ou un crime contre l’humanité, au sens
des instruments internationaux élaborés pour prévoir des dispositions relatives à ces crimes ;
- qu’elles ont commis un crime grave de droit commun en dehors du pays d’accueil avant d’y être admises
comme réfugiées ;
- qu’elles se sont rendues coupables d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations
unies » (vise le terrorisme international)

Cela peut poser des questions au regard de la présomption d’innocence.

124
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 11 : LA DIGNITÉ

Par ailleurs, la convention prévoit des clauses de cessation :la convention cesse d’être applicable à toute
personne :
- qui s’est qui s’est volontairement réclamée à nouveau de la protection du pays dont elle a la
nationalité (article 1C1)
- qui, ayant perdu cette nationalité, l’a volontairement recouvrée (article 1C2)
- qui a acquis une nouvelle nationalité et jouit de la protection du pays dont elle a acquis cette
nationalité (article 1C3)
- qui est retournée volontairement s’établir dans le pays qu’elle a quitté ou hors duquel elle
est demeurée de crainte d’être persécutée (article 1C4)
- si les circonstances à la suite desquelles elle a été reconnue comme réfugiée ayant cessé
d’exister,
elle ne peut plus continuer à refuser de se réclamer de la protection du pays dont elle a la nationalité
(article 1C5).

Enfin, l’article L. 511-7 du CESEDA, prévoit la perte du statut de réfugié « lorsque : il y a des raisons
sérieuses de considérer que la présence en France de la personne concernée constitue une menace grave
pour la sûreté de l’État ; la personne concernée a été condamnée en dernier ressort en France soit pour
un crime, soit pour un délit constituant un acte de terrorisme ou puni de dix ans d’emprisonnement, et sa
présence constitue une menace grave pour la société ».

Cette hypothèse permet également le refus du statut (L. 711-6, v. CE, 19 juin 2020, M. K).

La protection temporaire a été créée par une directive de 2001 en cas d’afflux massif de personnes
déplacées. Il s’agit d’un dispositif exceptionnel assurant une protection immédiate et de caractère
temporaire. Ce dispositif, qui n’avait jamais été mis en oeuvre, l’a été pour la première fois à la suite de
l’invasion de l’Ukraine par la Fédération de Russie.

On retrouve des clauses d’exclusion : L 581-5 CESEDA

125
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

THEME 10 : L’INTIMITE ET LA VIE SOCIALE

FICHE 34 – LE DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVEE ET FAMILIALE


Droit au respect de la vie privée et familiale : droit à la protection contre les atteintes
disproportionnées portées à son intégrité physique et mentale et aux éléments relevant de l’intimité,
de l’identité et de la sphère personnelle de la vie d’un individu

Fondements :

- art. 8 de la CEDH : §1 sur le principe et §2 sur les ingérences possibles

- art. 2 et 4 de la DDHC (principe général de liberté) pour la protection de la vie privée

- al. 10 du Préambule de la Constitution de 1946 pour la protection de la vie familiale)

- (art. 9 du code civil).

interprétation évolutive du droit à la vie privée la convention doit être interprétée « à la lumière des
conditions de vie actuelle » CEDH 1978 Tyrer c/ RU).

Article 8 CEDH : §1 sur le principe et §2 : clause d’ordre public : ingérences possibles : conditions :

1) ingérence prévue par la loi :

loi lato senssu (loi ; jp ; règlement etc) : ce qui compte c’est que la norme qui prévoit l’ingérence doit
être compatible avec la prééminence du droit (fondement accessible et prévisible (sécurité juridique)

2) l’ingérence doit être justifiée par un but légitime

3) l’ingérence doit être nécessaire dans une société démocratique = contrôle de proportionnalité par
rapport au but recherché
L’article 8 peut être invoqué dans un litige contre un individu, donc rapport horizontal, mais Etat sera
attaqué devant CEDH car a manqué à l’obligation positive de protection de l’individu

Le droit au respect de la vie privée


I- Une protection étendue
A) Des composantes nombreuses
Cour EDH 2002 Pretty c/ Royaume-Uni : la vie privée est une notion large insusceptible de définition
exhaustive

1- la vie personnelle intime


Le droit au respect de la vie privée protège d’abord l’ensemble des éléments relatifs à l’intimité d’une
personne (Civ. 2e, 26 novembre 1975).
Il s’agit tout d’abord de la liberté sexuelle : droit d’établir et d’entretenir des relations avec d’autres
êtres humains, cela inclut la liberté de l’orientation sexuelle.
CEDH, 1981, Dudgeon c. Royaume-Uni. : l’accomplissement d’actes homosexuels en privé et entre
adultes consentants ne saurait ainsi faire l’objet d’une répression pénale

126
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

La Cour EDH juge aussi que le principe de non-discrimination s’applique à des différences de traitement
fondées sur l’orientation sexuelle : CEDH, 2003, Karner c. Autriche
Par ailleurs, la liberté des pratiques sexuelles bénéficie également d’une protection.
S’agissant des pratiques sadomasochistes, protection au nom de l’autonomie personnelle : CEDH 2005,
KA et AD c/ Belgique.

Dans le cas où la vulnérabilité d’une personne l’expose à des relations sexuelles non consenties, la Cour
EDH met à la charge de l’État une obligation positive d’incriminer le comportement de ceux qui en
abusent et de leur infliger des sanctions pénales. Par ex : Cour EDH 1985, X et Y c. Pays-Bas

Le transsexualisme relève aussi de la protection garantie par l’article 8 de la CESDH, à propos de la


reconnaissance de leur droit à la rectification des actes d’état civil (CEDH, 25 mars 1992, B. c. France)

Cour EDH Goodwin c. Royaume-Uni 2002 : les transsexuels doivent « jouir pleinement du droit au
développement personnel »

La protection de l’image relève aussi de la vie privée intime : Cour EDH Von Hannover c. Allemagne
2004 : l’Etat a une obligation positive d’offrir une protection efficace contre les agissements d’une
certaine presse à sensation.
Egalement la protection du droit à l’image que l’État s’abstienne, sans raison justifiée, de s’ingérer dans
l’exercice de ce droit (CEDH, 11 janvier 2005, Sciacca c. Italie).

Sont également protégés des éléments plus traditionnels de la vie privée :


- la protection du domicile : CEDH, [2001, Chapman c. Royaume-Uni ; en droit interne, DC 1983,
Loi de finances pour 1984), y compris des locaux professionnels (CEDH 1992 c. Allemagne)
- le secret de la correspondance : CEDH, 24 avril 1990, Kruslin c. France, y compris celle des
détenus (CEDH, 21 février 1975, Golder c. Royaume-Uni) la notion de correspondance incluant
les données informatiques (CEDH, 3 décembre 2019, Kirdök c. Turquie, n° 14704/12)
- l’ADN d’une personne : CEDH, 2020, Dragan Petrović c. Serbie,)
- l’ensemble des données à caractère personnel (CEDH, 6 septembre 1978, Klass c. Allemagne).

IMPORTANT : CE arrêt Anticor octobre 2022 : reconnaît un droit à la vie privée aux PM.

2- La vie privée sociale


Le droit au respect de la vie privée garantit le droit à la vie privée sociale : Cour EDH Niemietz 1992 : ce
droit englobe « le droit pour l’individu de nouer et de développer des relations avec ses semblables ».
Ce droit comprend :

- Le droit à l’insertion sociale et professionnelle : CEDH, 2004, Sidabras c. Lituanie


- Le droit à la vie sociale des personnes handicapées : CEDH 1999 Marzari c. Italie ;
- Les litiges d’ordre professionnel
- Les conversations d’un avocat et son client, sur leurs communications orales : CEDH, 2019, Altay c.

127
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Turquie)
- Le droit à l’identité : suppose : La protection de l’identité collective des groupes ethniques et
sociaux (CEDH, GC, 2012, Aksu c. Turquie) ; La condamnation des stéréotypes de genre dans la
répartition des rôles parentaux (CEDH 2012, Konstantin Markin c. Russie).
B) Des limitations strictes

1. L’autorisation de divulgation
Dès lors qu’une personne autorise une divulgation des éléments intéressant sa vie privée, l’atteinte n’est
pas constituée.
Les juges français considèrent qu’il s’agit d’une autorisation spéciale : elle ne vaut en principe que pour
une publication déterminée et que pour des éléments de la vie privée prévus.
MAIS Cour EDH 2009 c.France : l’ingérence dans la liberté de la presse est disproportionnée au but
recherché (société condamnée pour la publication d’un article sur la fortune d’un artiste illustrée par des
photographies dont l’autorisation avait été donnée pour une campagne publicitaire).

2. Le droit à l’information
Le droit de la presse constitue un motif légitime de limitation. Garanti par la loi du 29 juillet 1881 sur la
liberté de la presse et par l’article 10 de la CESDH, le droit de la presse peut entrer en conflit avec le
droit au respect de la vie privée.

La Cass. considère que le respect de la vie privée et le droit à l’information ont la même valeur
normative (Civ. 1re, 9 juillet 2003).
La Cour EDH comme les juridictions nationales utilisent le critère du débat d’intérêt général pour réaliser
la pesée des intérêts.
Dès lors que l’information est nécessaire à l’intérêt général, la divulgation est légitime, sous réserve du
respect de la dignité de la personne (Civ. 1re, 24 octobre 2006). Dans l’hypothèse inverse, elle est illicite.

En conséquence, la vie publique des personnes publiques relève de l’information légitime. Néanmoins,
leur vie privée doit être protégée dès lors qu’elles ne remplissent pas de fonction officielle ou qu’elles ne
sont pas impliquées dans un fait public.
Ainsi, la Cour EDH retient l’absence d’intérêt légitime à connaître l’information et précise, comme cela a
été dit, que toute personne, même connue du grand public, doit pouvoir bénéficier d’une « espérance
légitime » de protection et de respect de sa vie privée (CEDH, 24 juin 2004, Von Hannover c. Allemagne).

II- Des voies d’action effectives

A) La voie civile

Le référé, prévu par l’art. 9, al. 2 du Code civil permet d’empêcher ou de faire cesser une atteinte à la vie
privée. Le juge peut ordonner toutes mesures, dont la saisie et le séquestre de l’instrument à l’origine de
l’atteinte à la vie privée s’il y a urgence et si cette atteinte est d’une « gravité intolérable » (Civ. 1ère,
1997, Le Grand Secret), pour l’empêcher ou la faire cesser ;

Civ. 1ère 2000 : présomption d’urgence est irréfragable lorsqu’il s’agit d’un délit de presse.

Action en réparation : le droit commun de la responsabilité (1240) n’est pas applicable en cas de délits
de presse : uniquement possible d’agir sur le fondement de la loi de 1881 (délai beaucoup plus court).

128
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

En cas de délit de presse, outre l’octroi de dommages-intérêts, l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881
prévoit que la personne mise en cause bénéficie d’un droit de réponse.

B) La voie pénale
1.L’infraction d’atteinte à la vie privée
L’infraction est réprimée au titre de l’article 226-1 du Code pénal :

Le premier délit (1°) vise la captation, l’enregistrement et la transmission de paroles à l’insu d’une
personne, que les paroles le soient dans un lieu public ou privé.
MAIS sont seules visées celles qui concernent les paroles adressées à titre privé ou confidentiel.
Le consentement de l’auteur des paroles empêche la constitution du délit.
Le second délit (2°) sanctionne les atteintes à la vie privée par la voie de l’image.
L’infraction est constituée lorsque l’image d’une personne est fixée, enregistrée ou transmise sans son
consentement. Il est exigé que la personne se trouve dans un lieu privé.
Cass. 21 avril 2020 : l’enregistrement de la parole ou de l’image d’une personne placée en garde à vue
est susceptible de constituer une atteinte à l’intimité de sa vie privée.

L’article 226-2 du code pénal punit des mêmes peines le fait de conserver, porter ou laisser porter à la
connaissance du public ou d’un tiers ou d’utiliser de quelque manière que ce soit tout enregistrement ou
document obtenu à l’aide de l’un des actes prévus par l’article 226-1 ».
La violation du domicile est réprimée à l’article 226-4 du code pénal

2.l’infraction d’atteinte à la représentation de la personne


Aux termes de l’article 226-8 du code pénal, « est puni le d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros
d’amende le fait de publier, par quelque voie que ce soit, le montage réalisé avec les paroles ou l’image
d’une personne sans son consentement, s’il n’apparaît pas à l’évidence qu’il s’agit d’un montage ou s’il
n’en est pas expressément fait mention ».
Ainsi, la représentation de la personne est protégée afin qu’elle ne soit ni déformée ni dénaturée.

3.les violations du secret


l’atteinte au secret professionnel :
L’article 226-13 du code pénal punit d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amendes la
révélation d’un secret par un professionnel.

EXCEPTIONS légales : venant imposer la révélation du secret pour des finalités d’intérêt général telles
que la protection de la santé et de l’intégrité physique (art. 226-14) ou encore de fraude fiscale

Pour l’avocat, les exceptions concernent, par exemple, le cas de suspicion de blanchiment d’argent où il
est dans l’obligation de procéder à une déclaration de soupçon. L’avocat doit adresser celle-ci au
bâtonnier qui décide de la faire suivre à Tracfin (Traitement du Renseignement et Action contre les
Circuits FINanciers clandestins).

CNB : établissement d‘utilité publique (loi de 1990) qui vise à la représentation des différents barreaux.

129
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

l’atteinte au secret des correspondances :


La violation du secret des correspondances est sanctionnée par le code pénal à l’article 226-15

À la suite de la condamnation de la France par les juges strasbourgeois (CEDH, 24 avril 1990, Kruslin c.
France), la loi du 10 juillet 1991 pose le principe suivant : le secret des communications téléphoniques
est garanti par la loi, les interceptions doivent demeurer l’exception.
Il existe deux types d’interceptions de correspondances émises par voie de télécommunications licites :
les interceptions judiciaires et les interceptions de sécurité.

Les interceptions judiciaires sont prévues aux articles 100 et s. du CPP.


Elles sont ordonnées par le juge d’instruction par décision écrite et motivée pour une durée
renouvelable de 4 mois maximum.
Une loi de 2004 permet également que ces interceptions soient ordonnées par le JLD sur demande du
procureur.

Les interceptions de sécurité (ou administratives):


Elles ont « pour objet de rechercher des renseignements intéressant la sécurité nationale, la sauvegarde
des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France, ou la prévention du
terrorisme, de la criminalité et de la délinquance organisées et de la reconstitution ou du maintien de
groupements dissous en application de la loi du 10 janvier 1936 sur les groupes de combats et les milices
privées » (article 3 de la loi de 1991 modifié par la loi de 2004).

Les enregistrements doivent être détruits dans les 10 jours, à moins qu’ils soient en relation avec l’objet
de la loi, dans ce cas, ils seront détruits à partir du moment où ils ne sont plus indispensables. Un PV- est
rédigé.

L’ordre de procéder aux interceptions de sécurité est donné par décision écrite et motivée du PM sur
proposition écrite et motivée du ministre de la Défense, du ministre de l’Intérieur ou du ministre chargé
des douanes. L’autorisation est valable pour une durée de 4 mois renouvelable.

La décision est portée dans un délai maximum de 48 heures à la Commission nationale de contrôle des
interceptions de sécurité (CNCIS) (AAI).

4.fichiers et traitements informatiques


Le code pénal, à son article 226-16, prévoit notamment que « [l]e fait, y compris par négligence, de
procéder ou de faire procéder à des traitements de données à caractère personnel ».

Principe d’interdiction de collecter et de traiter des données sensibles, sauf consentement (loi n° 71-78
du 6 janvier 1978) et droit de rectification et à l’oubli numérique (CJUE, 2019, Google c. CNIL).

Une personne peut d’abord, refuser, pour des motifs légitimes, que des données à caractère personnel
la concernant figurent dans un fichier.
Une personne peut, ensuite, demander à un responsable de fichiers s’il a des informations le concernant
et en cas de réponse positive, en demander communication
Enfin, une personne fichée dispose d’un droit de rectification.

Le droit à l’oubli numérique donne également lieu à une jurisprudence protectrice. La CJUE retient que
lorsque l’exploitant d’un moteur de recherche fait droit à une demande de déréférencement portant
sur des données à caractère personnel, il est tenu d’opérer ce déréférencement sur les versions de
130
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

celui-ci correspondant à l’ensemble des États membres (CJUE, 2019, Google c/ CNIL)

5.l’examen des caractéristiques génétiques

D’abord, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15.000 euros d’amende « [l]e fait de procéder à
l’examen des caractéristiques génétiques d’une personne à des fins autres que médicales ou de
recherche scientifique, ou à des fins médicales ou de recherche scientifique, sans avoir recueilli
préalablement son consentement (…) art. 226-27 du code pénal.

Ensuite est sanctionné le non-respect des finalités légales. L’examen des caractéristiques génétiques
d’une personne ne peut être utilisé qu’à des fins médicales ou de recherche scientifique (articles 226-25
du code pénal et 16-10 du code civil).

III- Protection du fonctionnaire et du salarié

A) Le fonctionnaire

Le principe d’égal accès aux emplois publics : article 6 de la DDHC impose à l’administration de ne pas
écarter un candidat à la fonction publique, sur la seule considération de sa croyance religieuse (CE,
1938, Weis). Par ailleurs, ce principe interdit les discriminations fondées sur les opinions politiques (CE,
Ass., 28 mai 1954, Barel).

Par ailleurs, la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose que « La
liberté d’opinion est garantie aux fonctionnaires. Aucune distinction, directe ou indirecte, ne peut être
faite entre les fonctionnaires en raison de leurs opinions politiques (…)».

Aux termes de l’article 18 de cette loi, , « il ne peut être fait état dans le dossier d’un fonctionnaire, de
même que dans tout document administratif, des opinions ou des activités politiques, syndicales,
religieuses ou philosophiques de l’intéressé ».

Un fonctionnaire doit pouvoir s’exprimer librement et avoir des activités politiques, syndicales,
religieuses ou philosophiques. Toutefois, son opinion ne doit pas être incompatible avec sa qualité de
fonctionnaire. C’est le cas lorsqu’elle vient entraver le fonctionnement normal du service public.

Les fonctionnaires ont une obligation de neutralité dans le service qui vient limiter l’expression de
leurs opinions personnelles. Tous les fonctionnaires doivent la respecter, mais ils seront soumis avec
une rigueur plus ou moins forte selon le grade ou l’emploi occupé.

B) Le salarié

Certains éléments de la vie professionnelle ont été jugés comme des éléments de la vie privée.
Cour EDH 1992, Niemietz c. Allemagne : aucune raison de principe d’exclure les activités
professionnelles ou commerciales de la vie privée.
131
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Cour EDH : la mise sous vidéosurveillance d’employés par un directeur de magasin, sans les avertir au
préalable malgré une obligation légale, est justifiée en raison des soupçons légitimes liés aux pertes
constatées, l’étendue et les conséquences de cette mesure (CEDH 2019, Lopez Ribalda c. Espagne).

Le droit au respect de la vie familiale


I- Le droit de se marier

DC 1993 CC : le principe de la liberté du mariage est une composante de la liberté personnelle.


Fondements :
- article 16 de la DDHC.
- Article 12 CEDH : droit de se marier et le droit de fonder une famille
CEDH 1986 Johnston c/ Irlande : l’article 12 n’implique pas un droit au divorce.
Ce droit comprend le droit de contracter un mariage dans les formes prévues par les lois nationales,
sans exiger en tant que tel d’ouvrir le mariage aux couples de même sexe : CEDH, 2010, c. Autriche.
MAIS à tout le moins :
- d’instaurer une forme alternative de partenariat civil pour les couples homosexuels si le droit
interne ne leur ouvre pas le droit au mariage : le droit à l’union civile est une obligation(CEDH,
2015, Oliari c. Italie) (art. 8) ;
- de faire produire tous ses effets :
o aux modifications du droit interne qui auraient permis d’ouvrir le droit au
mariage
aux couples homosexuels (ex. : art. 143 du code civil après la loi du 17 mai 2013) ;
o au nouvel état civil d’une personne transsexuelle (CEDH, 1986, Rees c. RU).

II- Le droit de mener une vie familiale normale

Fondements :
- art. 8 de la CEDH
- CE 1978, GISTI : PGD (valeur infra législative et supra décrétale) le droit de mener une vie
familiale normale pour l’étranger (= droit au regroupement familial)

Notion de vie familiale : elle se limite au noyau familial, c’est-à-dire aux relations entre les enfants et
leurs parents et entre les petits-enfants et leurs grands-parents, et cesse une fois les enfants devenus
adultes (sauf lien de dépendance, psychologique ou matérielle, ne subsiste avec ses ascendants).

Le droit au respect de la vie familiale présuppose l’existence d’une famille : il ne garantit pas le simple
désir de fonder une famille (CEDH, , 2017, Paradiso et Campanelli c. Italie) et ne consacre donc pas de
droit de procréer (CEDH, 2003, Sijakova c. Macédoine).
Le droit au respect de la vie familiale protège les droits :
- d’entretenir des liens avec les membres de sa famille (CEDH, 2019, Luzi c. Italie) ;
- de vivre avec sa famille (CEDH, 1988, Olson c. Suède) donc strict contrôle de proportionnalité

132
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

pour les enfants placés, Etats doivent favoriser contacts entre parents et enfants placés ;
- au regroupement familial (CC, 1993, Loi relative à la maîtrise de l’immigration).

S’agissant de l’adoption par un homosexuel célibataire : le refus de l’agrément sur le seul motif de
l’homosexualité est prohibé (CEDH, 2008, E. B. c. France)

133
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Focus – La publicité du patrimoine des élus et représentants publics

Les membres du gouvernement doivent adresser à la HATVP une déclaration de leur situation
patrimoniale (et les parlementaires). Ceci a été validé par le Conseil Constitutionnel au motif qu’il existe
un intérêt supérieur : objectif de renforcer les garanties de probité et d’intégrité (=honnêteté) de ces
membres (donc motif d’intérêt général). Permet de prévenir des conflits d’intérêt notamment.

Concernant les magistrats, a été déclaré inconstitutionnel car visait seulement certains magistrats (donc
contraire au principe d’égalité) et a été rejeté concernant les membres du CC au motif que dépourvu de
lien avec le projet de loi organique qui concernait uniquement le statut des magistrats (donc pas eux).

Focus – Le changement de nom / le nom à un enfant né sans vie

Loi de mars 2022 relative au choix du nom issu de la filiation. A partir du 1er juillet 2022, toute personne
majeure peut changer de nom en prenant celui de l’autre parent.
Loi de 2021 permet de donner nom de famille en plus d’un prénom à un enfant né sans vie.

Focus - GPA et vie privée de l’enfant

CEDH 2021 : l’Etat, s’il accorde la nationalité et des mesures de placement de l’enfant avec parents
d’intention, ne méconnait pas la vie privée de l’enfant en refusant d’inscrire lien de filiation sur son
état civil

Focus – Droit à l’image et vidéoprotection

Loi 2011 : une autorité publique ou privée peut installer caméras sur voie publique / lieux ouverts au
public si autorisation du préfet et que le public est prévenu.
Loi 2021 -> drones et caméras embarquées censurées par CC car pas assez de garanties (de limitation
dans temps / espace).

Focus – Les perquisitions

Temporalité : en principe, selon CPP, entre 6h et 21h seulement (exception en cas de proxénétisme
notamment : à toute heure ; + en cas de criminalité organisée, terrorisme, ou stupéfiants : une
perquisition peut débuter avant 6h et après 21h).

Enquête préliminaire : il faut en principe l’assentiment de la personne (mais par exception, sur
motivation du JLD après avis Procureur, possible sans assentiment pour crime ou délit puni de plus de 5
ans d’emprisonnement).

Enquête de flagrance : sans l’assentiment (commission rogatoire délivrée par juge d’instruction)

Intervenant en principe : OPJ (officier de police judiciaire)

Concernant les avocats, médecins… : par un juge uniquement

Focus – La géolocalisation

Prévue par le CPP, CC en 2014 a validé le dispositif en affirmant que les garanties légales existant pour
encadrer l’atteinte à la vie privée sont suffisantes. (conditions de recours et contrôle par l’autorité
judiciaire).
134
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Focus – Ecoutes et retranscriptions des conversations d’un avocat

Article 100-5 du CPP : principe d’interdiction de la retranscription des conversations d’un avocat avec son
client (secret professionnel de l’avocat), seule exception possible = si avocat soupçonné d’infraction (mais
ne peut pas être fait à titre préventif pour la recherche d’indices).

CEDH France 2016 : affirme que l’atteinte au principe de confidentialité des échanges avec le client est
possible dès lors que l’avocat est soupçonné d’avoir commis une infraction

Focus – Loi février 2022 réformant l’adoption

> Ouvre adoption aux couples non mariés


> Vie commune d’un an seulement (et plus 2)
> 26 ans et non 28 ans
> Facilitation de l’adoption plénière (pendant le placement, futurs parents peuvent réaliser actes de
l’autorité parentale)
> Possible de reconnaitre lien de filiation entre mère qui n’a pas participé à la PMA et l’enfant si
séparation et que mère PMA refuse ce lien avec l’autre mère

135
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

FICHE 35 – LA PROTECTION DES DONNEES PERSONNELLES


Donnée personnelle : toute information se rapportant à une personne physique identifiée ou
identifiable (art. 4 § 1, RGPD) qui, comme telle, peut être valorisée économiquement.

Traitement : collecte, enregistrement, organisation, structuration, conservation, adaptation, modification,


extraction, consultation, utilisation, communication, diffusion, rapprochement, interconnexion, limitation,
effacement, destruction des données de manière automatisée (art. 4 § 2, RGPD).

Droit à la protection des données personnelles : composante du droit au respect de la vie privée qui
garantit la transparence du traitement des données et encadre les usages pouvant en être fait.

En réalité la question se pose souvent tient aux conditions de traitement des données et notamment la
question des garanties offertes à l’intéressé.

La consécration du droit à la protection des données personnelles


I- Une constitutionnalisation indirecte

A) L’importance de la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978

1. Une norme de référence


La loi « Informatique et Libertés » de 1978 crée la Commission nationale de l’informatique et des
libertés (CNIL) (première AAI en France) et constitue le réceptacle national des législations
européennes.
Elle ne proclame pas en tant que tel un droit à la protection des données personnelles mais affirme dans
son article 1er que l’informatique « ne doit porter atteinte ni à l’identité humaine, ni aux droits de
l’homme, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques ».

2. Une garantie légale d’exigence constitutionnelle


CC, 2004, Loi relative à la protection des personnes physiques à l’égard des traitements de données à
caractère personnel : loi de 1978 constitue une « garantie légale d’exigence constitutionnelle » : le
législateur ne peut modifier la loi de 1978 que pour renforcer le droit à la protection des données.

B) La reconnaissance constitutionnelle du droit à la protection des données

Le droit à la protection des données découle de la liberté personnelle (art. 2, 4 DDHC) : le droit à la
protection des données personnelles est une composante du droit au respect de la vie privée, qui est
une composante de la liberté personnelle : CC, 2012, Loi relative à la protection de l’identité.

PQ se fonder sur liberté personnelle et non liberté individuelle ?


Car l’article 66 relève du contrôle de l’autorité judiciaire. Or, La CNIL est une AAI, donc contrôle par juge
administratif. Le fondement de la liberté personnelle permet de détacher le droit à la protection des
données de la liberté individuelle et donc de justifier la compétence du juge administratif (DC du 23
juillet 1999)

Nature du contrôle du respect de la protection des données personnelles par le CC ? En effet, 3 types
136
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

de contrôle :

II-Un caractère fondamental en droit européen

A) Le droit du Conseil de l’Europe

La CEDH ne consacre pas expressément de droit à la protection des données personnelles :il est garanti
par

- la « Convention 108 de 1981 : la « Convention pour la protection des personnes à l’égard du traitement
automatisé des données à caractère personnel » : impose un certain nombre d’obligations aux États et
aux responsables de traitement.
Un comité 108 qui surveille son application (mais pas judiciaire) a été mis en place, rend avis et
observations, pas de valeur obligatoire pour les Etats.
MAIS aucun juge ne permet d’assurer son application (la Cour EDH n’est pas compétente) ce qui pose la
question de son effectivité.

- art.8 de la CEDH :a la lumière de ce texte, la Cour protège le droit à la protection des données
personnelles.

Si un régime d’interception en masse de données n’est pas en soi contraire (CEDH, GC, 2021, Big
Brother Watch c. Royaume-Uni), tout traitement de données doit poursuivre un besoin social impérieux
et ses modalités doivent être proportionnées (CEDH, GC, 2008, S. et Marper c. Royaume-Uni).
Il ne faut pas de caractère général, indifférencié et indéterminé de conservation des données.

Cour EDH 4 juillet 2023 Hurbain c/ Belgique : se prononce sur le « droit à l’oubli numérique », en
précisant que « la prétention à l’oubli ne constitue pas un droit autonome protégé par la Convention ».

B) La place dominante du droit de l’Union européenne :

1. Le droit primaire
L’article 16 TFUE proclame le droit à la protection des données personnelles et sa protection tant par
les EM que par les institutions de l’UE. Reconnu comme tel (art. 16, TFUE ; art. 8, Charte des DFUE),

- CJUE, 2014, Digital Rights Ireland,: l’obligation faite aux fournisseurs de communications
électroniques de conserver les données de tous les citoyens n’est pas proportionnée à l’objectif de la lutte
contre le terrorisme.

- Le droit à la protection des données inclut le droit au déférencement sur les moteurs de
recherche (droit à l’oubli numérique) (CJUE, GC, 2014, Google Spain), entre autres.

- CJUE, 2015, Schrems,: un étudiant européen contestait le transfert de ses données par Facebook
vers les États-Unis où il n’existe pas de système de protection équivalant au système européen. La
CJUE considère que la décision de la Commission européenne ayant approuvé l’accord
transatlantique de transfert des données des citoyens européens (« Safe Harbor ») est contraire à
ses droits fondamentaux

137
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Arrêts Schrems II 2020 CJUE : étudiant allemand a contesté par deux fois le transfert des données des
européens des GAFA dont le siège était situé en Europe vers les USA. Dans l’arrêt de 2020, décision de la
commission européenne fondée sur un accord entre UE et USA prévoyant modalités de transfert des
données attaquée par l’étudiant. La CJUE annule cette décision. Le raisonnement de la CJUE est de
considérer que les institutions de l’UE ne peuvent favoriser et autoriser la circulation des données vers
des systèmes qui n’assurent pas un niveau de protection équivalent à l’Europe.

2. Le RGPD
Le RGPD pose un ensemble de principes et d’obligations pour les États et responsables de traitement,
fondé sur la liberté de traitement et de circulation des données encadrée par le nécessaire respect du
principe de proportionnalité.

Le régime de protection des données personnelles


I- Une protection décentralisée

A) Le contrôle par une autorité indépendante

La CNIL procède au contrôle de la protection des données personnelles depuis loi « Informatique et
Libertés » de 1978 ), par 2 voies :
- un contrôle contentieux a posteriori des traitements, au terme duquel elle peut prononcer
des sanctions pécuniaires et des injonctions sous astreinte

- une évaluation consultative a priori en rendant des avis non-conformes sur les projets de lois,
décrets et arrêtés.

B) Le rôle des délégués à la protection des donnée

Le Chapitre IV du RGPD prévoit que dans certaines hypothèses, le responsable d’un traitement de
données désigne un DPO dont le rôle consistera à veiller à la bonne application du RGPD par le
responsable. Il est chargé de :
- réaliser une étude d’impact permettant au responsable de traitement de choisir les
techniques et moyens de protection des données dans son traitement ;
- veiller à ce que le responsable de traitement respecte le RGPD ;
- coordonner et faire le lien entre le responsable de traitement et la CNIL.

II- Une protection différenciée

2 régimes de protection existent, selon le type de données :

- les données sensibles : les données sensibles sont les données relatives à « l’origine raciale
138
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

ou ethnique, les opinions politiques, les convictions religieuses ou philosophiques, l’identité génétique
ou biométrique, la santé, la vie et l’orientation sexuelle (art. 9).
Le traitement de ces données est, à titre de principe, interdit.
Parmi les exceptions se trouve notamment l’expression par la personne concernée de son
consentement « explicite » (art. 9 § 2).

- données ordinaires : les données ordinaires sont toutes les données qui ne sont pas
des données sensibles, dont le régime repose sur le principe de libre traitement des données, dont la
mise en œuvre repose sur la récolte du consentement et la nécessité du traitement.

III- Une protection procédurale

A) Droit à l’information et droit d’accès

(arts. 13 et 15, RGPD) :


- droit à l’information par le responsable de traitement : obligation du responsable de
traitement
d’informer la personne concernée, dès la récolte de ses données, de son identité, de la finalité du
traitement, des motifs qu’il poursuit, des transferts éventuels, de la durée de conservation des
données, et des procédures de recours qui lui sont ouvertes notamment devant la CNIL.

- droit d’accès au traitement : droit d’obtenir du traitement la confirmation des informations


transmises par le responsable de traitement.

B) Droit à la rectification et droit à l’oubli

(arts. 16 et 17, RGPD) :


- droit à la rectification : droit d’obtenir la modification des données inexactes et incomplètes
concernant l’auteur de la demande de modification.

- droit à l’oubli : droit au déférencement sur les moteurs de recherche, pouvant être limité au
titre de la protection de l’accès du public à l’information ou de la santé publique (CJUE, GC,
2014, Google Spain) et aux seules versions européennes du moteur de recherche (CJUE, GC,
2019, Google LLC c. CNIL) (droit au déréférencement limité au territoire de l’UE)

Focus – Application StopCovid – Avis de la CNIL (2020)


Application StopCovid est conforme au RGPD SI :
> Utilisation non obligatoire (et donc l’absence d’utilisation ne limite pas l’accès aux soins)
> Conservation des données limitée dans le temps

Focus – Cookie walls – CE 2020


CE annule une partie des lignes directrices prises par la CNIL qui interdisait le système de blocage d’accès
au site internet en cas de refus d’acceptation des cookies -> la CNIL ne pouvait pas prendre une telle
mesure d’interdiction générale et absolue
139
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

FICHE 36 – LA VIE PRIVEE ET FAMILIALE DES DETENUS


Droit au respect de la vie privée et familiale : droit à la protection contre les atteintes
disproportionnées portées à son intégrité physique et mentale et aux éléments relevant de l’intimité,
de l’identité et de la sphère personnelle de la vie d’un individu.
Détention : situation dans laquelle se trouve une personne privée de sa liberté individuelle, qui justifie
certaines restrictions portées à l’exercice de ses droits fondamentaux au titre de la protection de l’ordre
public

La garantie du droit au respect de la vie privée et familiale des détenus


Droit au respect de la vie privée et familiale des détenus : le bénéfice de ce droit est reconnu aux détenus
C’est surtout sous l’influence de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme que la
vie privée et familiale des détenus a été prise en compte.
En prison, ce droit est lié aux visites familiales et à la possibilité d’avoir une correspondance. Ainsi, la loi
pénitentiaire du 24 novembre 2009 (aujourd’hui le code pénitentiaire) reconnaît expressément le droit à
la vie privée et familiale des détenus, et règle la question des relations avec l’extérieur

Un droit fortement garanti


I- Les garanties internationales et européennes
Les détenus ont droit à un « traitement […] dont le but essentiel est leur amendement et leur
reclassement social » : art. 10 du PIDCP, ce qui suppose que leur soit reconnu le bénéfice du droit au
respect de la vie privée et familiale : art. 17 du PIDCP

Les détenus continuent de jouir du droit au respect de la vie privée et familiale : CEDH 2005, Hirst c.
Royaume-Uni ; art. 8 de la CEDH)

II- Les garanties nationales

Le droit au respect de la vie privée, objet d’un droit garanti par la Constitution : CC, 1999, Couverture
maladie universelle qui le fonde sur l’art. 2 de la DDHC.
Le droit au respect de la vie privée et familiale des détenus est une liberté fondamentale au sens du
référé-liberté (art. L. 521-2 du CJA) ((CE, 7 juin 2019)

Ce droit est protégé par une garantie légale au bénéfice des détenus (loi du 24 novembre 2009) dont le
respect est assuré par le juge judiciaire s’agissant des permissions de sortie (exécution de la peine) et le
juge administratif s’agissant des transferts d’établissement ou de sanctions disciplinaires
(fonctionnement administratif du service public pénitentiaire).

De telles mesures d’ordre intérieur, qui n’étaient à l’origine pas susceptibles de recours, peuvent
désormais faire grief si la nature et la gravité de la décision a eu des incidences concrètes sur la
situation du détenu : CE, Ass., 1995, Marie.

Le CE a admis le principe du droit à conserver une vie familiale en détention : CE, 19 janvier 2005
140
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Les restrictions au droit au respect de la vie privée et familiale des détenus


I- Communications avec l’extérieur

Le droit tenant à la protection des correspondances doit néanmoins se concilier avec des impératifs de
sécurité. Ainsi, les personnes placées en détention provisoire, de même que les condamnés, peuvent
écrire ou recevoir des courriers sans aucune restriction (art. L. 345-1 et L. 345-2 du code pénitentiaire).

Toutefois le courrier est sous pli ouvert, pour en permettre la lecture par les autorités pénitentiaires, sauf dans
les cas où le courrier a été envoyé par le défenseur du détenu ou par une autorité administrative ou une
autorité judiciaire : CC, 2018, Section française de l’Observation international des prisons

Le détenu a le droit de téléphoner à ses proches mais, n’étant pas un droit absolu, son exercice peut
être limité si est respecté le principe de proportionnalité
ex. : interdiction de posséder un téléphone, autorisation nécessaire pour téléphoner à des proches qui
sont pas des membres de famille (art. 39 de la loi du 24 novembre 2009) et possibilité pour les autorités
pénitentiaires d’écouter les conversations à condition de prévenir le prévenu et son correspondant
(art. 727-1 du CPP).

Visites : le détenu a le droit d’entretenir des relations avec les membres de son entourage, ce qui
implique un droit de visite, sans dispositif de séparation, mais, n’étant pas un droit absolu, son exercice
peut être limité à condition que soit respecté le principe de proportionnalité.
ex. : fouille avant et après le parloir si le comportement du détenu la justifie (CE, 30 janvier 2019) et
écoute des conversations à condition de prévenir le détenu et son correspondant (CEDH, 2005, Wisse c.
France).

II- Recours à la vidéo-surveillance

le droit au respect de la vie privée et familiale des détenus s’oppose, à titre de principe, à ce qu’un
détenu soit placé sous vidéo-surveillance, mais, n’étant pas un droit absolu, son exercice peut faire
l’objet de restrictions proportionnées ; les autorités pénitentiaires peuvent avoir recours à la vidéo-
surveillance si la protection de l’ordre le justifie et si des circonstances particulières le rendent
nécessaire au vu du degré de risque d’évasion ou de suicide du détenu (CE, 28 juillet 2016).

Entrée en vigueur du code pénitentiaire avec loi de décembre 2021 confiance institution j : objectif de
simplification en regroupant le droit constant à ce sujet dans un code

141
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

FICHE 37 – LE TRAVAIL EN PRISON


Droit au travail des détenus : droit d’accéder à une activité proposée par l’établissement pénitentiaire
concourant à la réinsertion du détenu, et droit à la formation si le détenu ne maîtrise pas les
enseignements fondamentaux.

Depuis la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, le détenu bénéficie d’un droit à l’activité et
l’administration pénitentiaire doit tout mettre en oeuvre pour lui trouver une activité.

Un régime dérogatoire (pas mêmes droits qu’un salarié de droit commun)

I- Une organisation particulière

travail interne à la prison :


- dans le cadre du service général : travaux liés à l’entretien et au fonctionnement de
l’établissement pénitentiaire (ex. : cuisine, manutention, bibliothèque) ;
- dans le cadre de travaux industriels gérés par le Service de l’emploi pénitentiaire
- par une entreprise privée, en vertu d’un contrat de concession conclu avec l’administration
pénitentiaire.

travail externe à la prison : le détenu peut bénéficier d’un régime particulier de détention qui l’autorise à
quitter l’établissement pénitentiaire pour travailler ou se former.

Processus d’accès à l’emploi : la demande est adressée à la Commission pluridisciplinaire unique


qui rend une décision de classement par laquelle elle :
1) décide d’y satisfaire ou non
2) choisit un poste en accord avec le principe d’égalité de traitement et en tenant compte des
perspectives sur sa réinsertion

NB : la décision de classement est une mesure d’ordre intérieur faisant grief (CE, 2007, M.
Plancehnault).

II-L’exclusion du droit commun du travail


Jusqu’à très récemment, le droit commun du travail ne s’appliquait pas à leur travail, sauf s’agissant de
l’hygiène, de la sécurité et de la durée du travail : cf art. 717-3 CPP mais un « acte d’engagement »
professionnel était mis en place en lieu et place d’un contrat de travail la loi du 24 novembre 2009).

Depuis une loi du 22 décembre 2021, les travailleurs détenus disposent d’un contrat d’emploi
pénitentiaire (CEP). Ce contrat est conclu à l’issue d’un entretien d’embauche entre la personne détenue
et le service général de la prison ou l’entreprise concessionnaire, au plus tard 2 jours après la prise de
poste.

142
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

Le contenu du CEP est quasiment identique à celui d’un contrat de travail de droit commun.

Le renforcement des droits des détenus

I- L’absence d’atteinte aux droits et libertés constitutionnels

Dans deux décisions rendues en 2013 et 2015, le CC a déclaré que les dispositions contestées par les
requérants sont conformes aux droits et libertés garantis par la Constitution :

II- Des droits davantage sauvegardés

Dans une décision rendue le 7 mars 2016, le CE a clarifié les modalités de rémunération en rappelant
leur caractère réglementaire et les conditions de leur opposabilité aux personnes détenues.
Pour le JA, les modalités de rémunération sont relatives à l’organisation du service public pénitentiaire
et présentent, de ce fait, un caractère réglementaire. De plus, pour être opposables aux détenus, ces
modalités de rémunération doivent être portées à leur connaissance

La réforme intervenue avec la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans
l’institution judiciaire et modifiant le code pénitentiaire, entrée en vigueur le 1er mai 2022, est venue
régler les cas d’inégalités entre le travail en milieu pénitentiaire et le travail de droit commun sur
deux points essentiels : la rémunération et les droits sociaux.

Une rémunération minimale est désormais fixée selon la durée de travail et la qualification du poste,
entre 45 et 20 % du salaire minimum interprofessionnel de croissance, soit entre 4,98 € et 2,21 €.
Enfin, certains droits sociaux ont été ouverts aux travailleurs et d’autres ont été renforcés : application
d’une assiette minimale de cotisations pour les droits à l’assurance vieillesse ; affiliation au régime
de retraite complémentaire ; bénéfice des prestations d’assurance maternité, d’assurance invalidité et
d’assurance maladie en imputant la durée du travail effectué en détention sur celui effectué
antérieurement.

143
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

FICHE 38 – LE DROIT A L’ENVIRONNEMENT


Le droit à l’environnement est généralement défini comme le droit, pour les générations actuelles et
futures, de vivre dans un environnement sain.
« l’environnement n’est pas une abstraction mais bien l’espace où vivent les êtres humains et dont dépendent
la qualité de leur vie et leur santé pour les générations à venir » : CIJ, avis, 1996.

EXAM : souvent question de l’effectivité du droit ; titulaire du droit (homme ; planète) ? ; opposabilité :
qui est le débiteur du droit à l’environnement ? ; contenu du droit

Le droit à un environnement sain est aujourd’hui un droit fondamental intimement lié au développement
durable, mais aussi au respect du droit à la vie et du droit à la santé.

L’affirmation du droit à un environnement sain


I- La reconnaissance internationale et européenne

Le premier texte européen à reconnaître expressément le droit à l’environnement est la Convention


d’Aarhus de 1998, ratifiée par la France en 2002.

Quant à la CESDH, elle ne fait aucune référence au droit de l’environnement. Toutefois, la Cour EDH a
déduit la protection du droit à un environnement sain de plusieurs articles de la Convention :

- l’article 2 de la CEDH le droit à la vie implique le droit à un environnement sain (CEDH, 2004,
Öneryildiz c. Turquie)

- l’article 3 de la CESDH : l’interdiction des traitements inhumains et dégradants prévue par


l’article 3 de la CESDH, lorsque la pollution atteint un seuil de gravité particulièrement
important (CEDH, 9 décembre 1994, Lopez Ostra c. Espagne,).

- c’est surtout le droit au respect de la vie privée et familiale ainsi que du domicile, visés à
l’article 8 de la Convention, qui implique le droit à un environnement sain (CEDH,1994, Lopez
c. Espagne)
(autour de la question de ka protection du domicile, situé en l’espèce près d’une station
d’épuration).

II- La reconnaissance en droit interne


Le droit à un environnement sain a été consacré par la loi du 2 février 1995 : L 110-2 du code de
l’environnement. C’est surtout l’adoption, en 2004, de la Charte de l’environnement qui a consolidé ce
droit.
Le CC a déduit de l’article 1 de la charte de l’environnement une obligation de vigilance
environnementale qui s’impose aux pouvoirs publics et, plus généralement, à l’ensemble des
personnes, ce qui conduit à reconnaître l’applicabilité horizontale de la Charte (QPC 2011, M. Michel Z).

le CE jugé qu’il découle des dispositions de l’article 1er de la Charte qu’il appartient au pouvoir
réglementaire de veiller au respect de ce principe lorsqu’il est appelé à préciser les modalités de mise
144
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

en oeuvre d’une loi définissant le cadre de la protection

Le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé constitue une liberté
fondamentale au sens du référé-liberté : CE, ord., 20 septembre 2022.

La protection de l’environnement est un objectif à valeur constitutionnelle : DC QPC 31 janvier 2020,


en tant que « patrimoine commun des êtres humains » déduit du préambule de la charte de
l’environnement. Le législateur peut donc limiter certains droits et libertés dans le but de cet objectif.
NB : l’objectif à valeur constitutionnelle permet au législateur de restreindre des DLF.

QPC 2014 Société Casuca : le préambule de la charte n’institue aucun droit ni aucune liberté qui
pourrait être invoqué en QPC.

Le contrôle du CC en matière de droit à l’environnement est restreint et ne sanctionne que les erreurs
manifestes d’appréciation.

La protection du droit à un environnement sain


I- Les mesures préventives
A) Information et participation des citoyens

S’agissant des personnes publiques : l’article 7 de la Charte de l’environnement confère au public le


droit d’accéder aux informations relatives à l’environnement détenues par les autorités publiques
ainsi que le droit de participer à l’élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur
l’environnement.

Convention citoyenne sur le climat en 2020 : réunion de 150 citoyens tirés au sort qui ont débattu et ont
concouru à l’adoption d’une loi. Objectif était notamment de réduire les émissions de CO2.

S’agissant des personnes privées : la loi « Grenelle II » de 2010 prévoit une obligation d’information
à la charge des entreprises sur la façon dont elles prennent en compte les conséquences
notamment environnementales de leurs activités.

B) Le principe de précaution

Fondé sur l’article 5 de la charte de l’environnement, il consiste en une obligation des pouvoirs publics
d’adopter une attitude proactive, en réaction à un risque potentiel (incertitude scientifique) de
dommage environnemental, pour parer à l’avance aux scénarios les plus pessimistes.
Fondement :
- art. 5 de la Charte de l’environnement de 2004

145
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

- art. L. 110-1 du code de l’environnement) ;


- principe 15 de la Déclaration de Rio de 1992

C) Le principe de prévention

Contrairement au principe de précaution qui suppose un risque potentiel, la prévention postule un


risque avéré. Ce principe est garanti par l’article 3 de la charte de l’environnement.

Mesures en droit interne :


D’une part, par dérogation au droit commun de la responsabilité, le code civil prévoit deux règles de
prévention des préjudices dès lors qu’ils ont une nature écologique : art. 1251 ; art. 1252 du Code civil.
Ainsi, le juge peut prescrire des mesures raisonnables propres à prévenir ou faire cesser le dommage
environnemental.

D’autre part, le code de l’environnement confère au préfet le pouvoir d’obliger un exploitant, en cas de
carence face à une menace imminente de dommage de son fait (ou d’aggravation du dommage), à
prendre à ses frais un certain nombre de mesures de protection (article L. 162-13).

Par ailleurs, le principe de prévention est mis en oeuvre dans le cadre de mesures de police
administrative : police des établissements classés ; police des établissements insalubres etc.
Mesures de prévention : obligation des pouvoirs publics d’adopter les mesures

II- Les mesures curatives

A) La responsabilité civile

Responsabilité civile : droit à la réparation en nature ou, si elle est impossible, par l’allocation de
dommages-intérêts (art.1249 du code civil) du préjudice écologique : Crim., 2012, Erika – c’est-à-dire de
toute « atteinte non négligeable aux éléments ou aux fonctions des écosystèmes ou aux bénéfices
collectifs tirés par l’homme de l’environnement » (art. 1247 du code civil) .
L’article 1249 pose un principe de priorité à la préparation en nature.

Ce préjudice peut être réparé dans le cadre d’une action en justice individuelle ou d’une action de groupe
(art.L. 142-3-1 du code de l’environnement).

S’agissant de la responsabilité de l’Etat : CE, 19 novembre 2020, Grande-Synthe, connaît pour la


première fois des questions relatives à la nature et l’intensité de l’obligation de l’État d’adopter des
mesures pour se conformer à temps aux objectifs de l’Accord de Paris sur le climat : la carence de
l’Etat (analysée comme une décision de refus) a été annulée et le CE a enjoint à l’Etat un certain nombre
de mesures.

TA Montreuil, 25 juin 2019 : reconnaît la faute de l’Etat résultant de ses carences dans la lutte contre la
pollution de l’air.

146
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 12 : L’INTIMITÉ ET LA VIE SOCIALE

TA Paris, 3 février 2021: le juge reconnaît le préjudice écologique comme un principe de la


responsabilité administrative (carence partielle de l’État à respecter les objectifs qu’il s’est fixés en
matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre)

B) La répression pénale

Répression de multiples infractions, telles que le terrorisme écologique (art. 421-2 du code pénal), la
pollution des eaux et de l’air (art. L.216-3 et s. et art. L. 226-9 du code de l’environnement) et la
prévention et la gestion des déchets (art. L. 541-46 et s. du code de l’environnement).

C) La responsabilité internationale

Pour la première fois en 2018, la CIJ a reconnu le caractère indemnisable des dommages
environnementaux en droit international.
La reconnaissance du dommage environnemental surmonte l’obstacle de l’établissement du lien de
causalité entre la violation de l’obligation et le dommage.
Deux chefs de préjudices peuvent ainsi appeler à réparation : d’une part, l’indemnisation de « la
dégradation ou la perte de biens et services environnementaux subie pendant la période précédant la
reconstitution » et, d’autre part, l’indemnisation des frais engagés par l’État au titre de « la
restauration de l’environnement endommagé » (ibid.). En effet, en matière environnementale, la
régénération naturelle de l’environnement ne saurait suffire à permettre un retour

Focus – Arrêt CE 2020 : contentieux de l’excès de pouvoir, JA a annulé décision du gouvernement car
celui-ci a refusé de prendre mesures nécessaires pour se conformer à l’accord de Paris sur le climat. CE
a enjoint au PM de prendre toute mesure utile pour réduire émissions de CO2. Arrêt intéressant sur
l’intérêt à agir, ici commune contre gouvernement, ici conçu de manière extrêmement large.

Focus – TA Montreuil 2019 : JA reconnait faute de l’Etat car carence dans lutte contre pollution de l’air,
donc engage sa responsabilité (reconnu pour la première fois). Requérante n’a pas réussi à démontrer
lien de causalité entre cette faute et la maladie de sa fille MAIS reconnaissance de la faute de l’Etat tout
de même, par son absence d’intervention en matière de lutte contre la pollution. Ici, requérante a agit
pour son intérêt personnel.

Focus – TA Paris 2021 : carence de l’Etat, de nature à reconnaitre sa responsabilité -> JA reconnait de
manière prétorienne la notion de préjudice écologique (qui existe juste en matière civile)

147
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

THEME 11 : NATIONALITE ET CITOYENNETE

FICHE 39 – LA NATIONALITE
Nationalité : lien juridique de rattachement d’un individu à un État dont l’établissement se fait aux
conditions librement, car souverainement, décidées par cet État.
CIJ 1955 Nottebohm :« la nationalité est un lien juridique ayant à sa base un fait social de rattachement
»

Droit à la nationalité : droit d’acquérir une nationalité, et de ne pas se la voir retirer de manière
arbitraire (art. 15 de la DUDH), qui ne constitue pas en tant que tel un droit positif, car il est en
contradiction avec le droit souverain de l’État : CEDH, 2016, Ramadan c. Malte.

Certains modes permettent d’accéder à la nationalité dès la naissance (« attribution » de la nationalité),


d’autres à un étranger de devenir français pour l’avenir (« acquisition » de la nationalité française).

Convention internationale de 1954 relative au statut des apatrides : les Etats n’ont pas le droit de créer
des situations d’apatridie.

L’entrée dans la communauté nationale


I- L’attribution de la nationalité
A) Le droit du sang (jus sanguinsi)

Art. 18 du Code civil : tout enfant né ou adopté, par la voie plénière, par au moins un parent français
est français.
Donc un enfant né d’une GPA à l’étranger dont un parent d’intention est français sera reconnu comme
étant français si la filiation est établie (CE, 2014, Association juristes pour l’enfance).

B) Le droit du sol (jus soli)

La naissance sur le territoire français ne permet pas à elle seule, en principe, l’attribution de la
nationalité française.

- si l’enfant est né sur le territoire français de parents étrangers :


Les parents étrangers d’un enfant âgé de 13 à 16 ans, né en France et qui y réside habituellement
depuis ses 8 ans, peuvent réclamer la nationalité française en son nom ;

Un enfant âgé de 16 ans ou plus, né en France de parents étrangers, qui réside en France et a eu sa
résidence habituelle en France pendant au moins 5 ans, peut réclamer la nationalité française en son
propre nom.

- si l’enfant est né sur le sol français de parents inconnus (art. 19 du code civil), de parents

148
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

apatrides (art. 19-1 du code civil) ou de parents dont la nationalité ne peut pas se
transmettre à l’enfant (art. 19-1 du code civil) : afin d’éviter l’apatridie, il est reconnu comme
étant français
Le jus soli n’est pas un PFRLR (DC 1993).
Limitation à Mayotte : les enfants dont au moins un des deux parents séjourne de manière régulière sur
l’île depuis plus de trois mois avant la naissance peuvent dorénavant demander la nationalité française
(article 2494 du Code civil). Cette particularité de Mayotte est justifiée par l’article 73 de la Constitution

II- L’acquisition de la nationalité

3 modes d’acquisition : naturalisation ; déclaration de mariage ; déclaration d’enfants adoptés ou


recueillis par un français .

A) Le décret de naturalisation

Toute personne âgée de 18 ans, qui réside depuis 5 ans en France est assimilée à la communauté
française peut demander à acquérir la nationalité : diplôme de langue française de niveau B1.
La notion de résidence implique d’avoir en France le centre de ses intérêts matériels (notamment
professionnels) et de ses liens familiaux.

B) La déclaration de mariage

Toute personne mariée à un ressortissant français depuis 4 ans et résidant régulièrement et de manière
ininterrompue en France pendant au moins 3 ans à compter du mariage peut réclamer la nationalité
française. (on cherche à éviter mariages blancs / gris)
Une cessation de la communauté de vie dans les 12 mois suivant l’enregistrement de la déclaration
constitue même une présomption de fraude (article 26-4 du Code civil)

C) La déclaration d’enfants adoptés ou recueillis

Tout enfant adopté, ou recueilli au sens de l’art. 21-12 du code civil, et élevé par un ressortissant
français pendant au moins 3 ans peut réclamer la nationalité française.

L’opposition à l’entrée dans la communauté nationale

I- Une prérogative étatique affirmée

A) Le défaut d’assimilation
En vertu de l’article 21-4 du Code civil, l’assimilation est une condition d’accès à la nationalité en cas de
demande de naturalisation et une cause de refus de son octroi du fait d’un mariage ; elle requiert le
149
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

respect des « valeurs essentielles de la société française » : CE, 2013, Aberkane.

La jP admet que l’accès à la nationalité française puisse être notamment refusé à une personne ayant «
une pratique radicale de sa religion, incompatible avec les valeurs essentielles de la communauté
française, et notamment avec le principe d’égalité des sexes » (CE, 27 juin 2008, Mme Mabchour,), ou
encore entretenant « des liens étroits et continus, en région parisienne et à l’étranger, avec une
organisation islamiste menant une action de propagande en faveur de thèses extrémistes et prônant le
rejet des valeurs essentielles de la société française » (CE, 13 novembre 2006, Hanou) ; également le
refus de serrer la main au préfet (CE, 11 avril 2018, Mme B.)

B) La fraude
La fraude désigne les cas d’actes d’état civil falsifiés, des reconnaissances de paternité de complaisance,
des mariages blancs, voire des adoptions à des fins migratoires, qui conduisent soit au retrait du décret
de naturalisation (art. 27-2 du code civil) soit à l’annulation de l’enregistrement d’une déclaration de
nationalité.
Concernant le mariage, le législateur a même institué une présomption de fraude (article 26-4, al. 3, du
code civil).

II- Un contrôle européen restreint

La compétence de l’État pour définir les contours de sa communauté nationale est reconnue par le droit
international (CJUE, 2010).
Aucun droit à la nationalité en tant que tel ne découle de la Convention : CEDH 2016 Ramadan c. Malte.

Toutefois dans plusieurs affaires, la Cour estime qu’« il n’[est] pas exclu qu’un refus arbitraire d’octroyer
la nationalité puisse, dans certaines conditions, poser un problème sous l’angle de l’article 8 de la
Convention en raison de l’impact d’un tel refus sur la vie privée de l’individu » (CEDH 2017 K2 c/ RU)

La sortie de la communauté nationale


I- La perte de la nationalité
L’article 23-7 du code civil autorise la perte de nationalité de l’étranger qui « se comporte en fait
comme le national d’un pays étranger » s’il a la nationalité de ce pays.
NB : cette disposition n’est pas applicable aux terroristes liés à Daesh, organisation terroriste qui n’est
pas considérée comme un État

II- La déchéance de la nationalité


En cas de condamnation pour un crime ou un délit « constituant une atteinte aux intérêts
fondamentaux de la Nation » d’une personne française par acquisition (art. 25 du code civil), exception
faite du cas où la déchéance aurait pour conséquence de la rendre apatride (art. 25 du code civil).

150
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

FICHE 40 – LES DROITS POLITIQUES


Droits politiques : ensemble de garanties protégeant le droit de participer à l’expression de la volonté
générale (art. 6 de la DDHC).

Les droits liés à l’expression de la souveraineté


I- Le droit de vote

Le droit de vote est le droit de tout citoyen, quel que soit son sexe (principe du suffrage universel depuis
1944 en France), de participer de manière égale à l’élection de ses représentants, à condition :
1) qu’il soit âgé de 18 ans révolus (loi du 5 juillet 1974)
2) qu’il jouisse de ses droits civiques
3) qu’il ait la nationalité d’un EM de l’UE pour participer aux élections européennes et municipales de
la commune où il a élu domicile depuis au moins 6 mois (art. L. 11 du code électoral; art. 88-3 de la
Constitution) ou la nationalité française pour toutes les autres élections (art. 3, al. 4 de la Constitution).

S’agissant des gens du voyage, le CC a déclaré contraire à la Constitution une disposition de la loi du 3
janvier 1969 leur imposant d’être rattachés pendant 3 ans à la même commune pour pouvoir voter.
De même les personnes sans domicile stable peuvent demander à être rattachées à la commune dans
laquelle l’organisme agréé qui les accueille est situé (article 15-1 du code électoral).
Par ailleurs, un régime dérogatoire s’applique en Nouvelle-Calédonie la nouvelle loi réclamant une
durée de résidence sur l’île de 10 ans.
Personnes handicapées : réforme 2019, juridiction ne peut plus se prononcer sur suppression ou non du
droit de vote (personnes sous tutelle…), donc droit de vote

NB : la privation des droits civiques peut être prononcée au titre d’une peine complémentaire mais
n’est jamais peine principale : art. 131-26 du Code pénal.

L’article 3 al. 4 de la Constitution réserve le droit de vote aux seuls nationaux.


Néanmoins, le Traité de Maastricht de 1992 reconnaît le droit de vote des ressortissants européens pour
les élections locales. Le CC DC 1992 a déclaré cette stipulation contraire à la Constitution. La ratification
du traité n’a été possible qu’après révision de la Constitution, par l’ajout d’un article 88-3

II- Le droit d’éligibilité

A) La réglementation nationale

Le droit de se présenter aux élections est strictement réservé aux nationaux : art. 3 al. 4 de la
Constitution.
Art. 22 TFUE : le bénéfice de l’élection dans les communes et au Parlement européen est réservé aux
ressortissants européens même s’ils se présentent dans un autre État que celui dont ils sont originaires.
(ex Cohn-Bendit élu député européen sur une liste en France alors qu’il était de nationalité allemande).

151
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

Par ailleurs, le statut d’élu est soumis à certaines conditions définies par le régime des inéligibilités et
des incompatibilités :
- inéligibilités : source d’une interdiction pour la personne détentrice d’un seul mandat de se
présenter à une élection pour exercer un deuxième mandat sur une même période. L’élection
serait annulée.
- incompatibilités : source d’une obligation de choix pour la personne détentrice de deux
mandats tenue de n’en conserver, pour n’en exercer, qu’un seul sur une même période.

Pour les scrutins se déroulant à la proportionnelle, la loi impose que les listes présentent un nombre
égal d’hommes et de femmes, avec un écart toléré égal à un. Pour les modes de scrutin majoritaire, la
loi met en place un mécanisme d’incitation financière : l’aide publique allouée aux partis politiques
diminue lorsqu’ils ne présentent pas un nombre égal d’hommes et de femmes.

B) Le contrôle restreint de la Cour EDH

L’article 3 du Protocole n° 1 de la Convention énonce que la tenue d’élections libres et démocratiques


est assurée aux citoyens européens. La Cour EDH qualifie ce droit de « principe fondamental dans un
régime politique véritablement démocratique ». Ce texte a été interprété comme reconnaissant le droit
de vote et le droit d’éligibilité.
D’une manière générale, la Cour EDH laisse une large marge d’appréciation aux EM.

La Cour a toutefois dégagé des solutions audacieuses comme l’inconventionnalité de l’interdiction de se


présenter aux élections pour les binationaux (CEDH, [GC], 27 avril 2010, Tanase c. Moldova)

Les droits liés à la participation de la vie démocratique


I- Les partis politiques
Protection de la constitution et de l’adhésion à un parti politique : droit d’association politique (art. 11
de la CEDH), à laquelle est reconnu un statut constitutionnel (art. 4 de la Constitution), participant à la
mise en œuvre du « pluralisme des courants d’idées et d’opinions » (CC, 1990, Loi relative à la limitation
des dépenses électorales et à la clarification du financement des activités politiques) et à la garantie du
fonctionnement démocratique de la société (CEDH, GC, 1998, Parti communiste unifié de Turquie c.
Turquie).

Arrêt Refa Partisi CEDH 2003 : la Cour a en effet accordé un brevet de conventionnalité à propos de la
dissolution d’un parti islamiste « modéré » par la Cour constitutionnelle turque. Elle juge que la dissolution
de ce parti est justifiée au regard de son programme, qui tend à l’application de la charia, en relevant que la
charia est incompatible avec les principes fondamentaux de la démocratie.

II- Les consultations citoyennes


La participation à des consultations citoyennes peut prendre plusieurs formes :
- conférence de citoyens : procédure faisant participer les citoyens au débat public et à l’issue
de laquelle est rédigé un rapport contenant leurs avis et recommandations qui est rendu public et remis
aux instances politiques, sans les lier dans l’exercice de leurs pouvoirs.

152
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

- droit de pétition (art. 72-1, al. 1 de la Constitution) : électeurs d’une collectivité territoriale de
demander l’inscription d’une question à l’ordre du jour de l’assemblée délibérante de la
collectivité.

- référendum décisionnel local (art. 72-1, al. 2 de la Constitution) : référendum ouvert aux électeurs
d’une collectivité territoriale pour décider de la mise en œuvre ou non d’un projet concernant
une affaire locale.

- référendum d’initiative partagée (art. 11, al. 3 de la Constitution) : référendum pouvant être
convoqué à l’initiative concomitante d’1/5 des parlementaires et d’1/10 des électeurs.

- Commission Nationale du Débat Public (CNDP) : AAI qui veille au respect du droit à
l’information et à la participation du public dans l’élaboration de certaines décisions
susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement.

153
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

FICHE 41 – LES DROITS CIVIQUES DES DETENUS


La garantie des droits civiques
I- Une suspension non-automatique
Jusqu’à l’entrée en vigueur du nouveau code pénal en 1994, une condamnation pour une infraction
pénale passible d’au moins 5 années d’emprisonnement entraînait automatiquement et
systématiquement la suspension des droits civiques.

Le nouveau code pénal en 1994 a inversé le principe : la suspension du bénéfice des droits civiques,
désormais l’exception, ne pouvant plus que faire l’objet d’une peine complémentaire, d’une durée limitée,
prononcée par un juge : art. 131-6 du code pénal.
NB : les personnes condamnées avant 1994 restent soumises à l’ancien régime, privant à titre de
principe les détenus du bénéfice de leurs droits civiques (art. 112-1 du code pénal).

II- La possibilité d’une récupération


A) Le relèvement

Les articles 702-1 et 703 du CPP fixent le régime du relèvement : possibilité de demander au Procureur
de la République, ou au procureur général qui saisira la juridiction compétente, de réduire la durée de la
suspension ou de mettre un terme à la suspension des droits civiques du détenu

B) La réhabilitation

Elle est la possibilité de demander le retrait de certaines informations du casier judiciaire, à la suite de et
en conformité avec une décision de rectification (art. 769 du CPP), selon quatre modalités distinctes :
- droit à l’oubli : effacement d’une peine 40 ans après qu’elle a été prononcée ;
- effacement de la privation : effacement de la privation des droits civiques 20 ans après la
libération définitive ou conditionnelle non révoquée ;
- réhabilitation judiciaire : effacement d’une condamnation qui peut être demandée 5 ans après
la libération définitive si le détenu a été condamné à un crime ou 3 ans s’il a été condamné à
une peine correctionnelle
- réhabilitation légale (ou de plein droit) : effacement d’une condamnation en cas de peine
d’emprisonnement inférieur à 10 ans : art. 133-13 : intervient après un délai de 5 ans
(emprisonnement de moins d’un an) ou 10 ans (emprisonnement de 1 à dix ans ou
condamnations multiples à l’emprisonnement de moins de cinq ans cumulées) après la
libération définitive.

L’effectivité limitée des droits civiques

I- La complexité des démarches

A) La lourdeur de la procuration

Le détenu peut demander au JAP une permission de sortir d’une journée pour aller voter. Pour cela, il
doit avoir été condamné à une peine de prison inférieure ou égale à 5 ans ou avoir exécuté la moitié de
sa peine si celle-ci est supérieure à 5 ans (art. D. 145 du CPP; art. D. 363-1 du code pénitentiaire).
154
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

La procuration : article L. 71 du code électoral prévoit que «[t]out électeur peut, sur sa demande,
exercer son droit de vote par procuration »ce qui inclut les détenus.
Le détenu doit s’adresser au greffe de la prison pour qu’un OPJ vienne établir la procuration.

B) L’insuffisance de l’information

La faible participation des détenus aux élections s’explique aussi par la mauvaise qualité de
l’information qui leur est fournie. Or, la direction de l’administration pénitentiaire a l’obligation
d’informer les détenus de leurs droits (art. R. 361-1 du code pénitentiaire.
Toutefois, l’OIP fait état d’une information inadaptée, qui intervient la plupart du temps trop tard pour
laisser aux détenus le temps d’organiser les démarches administratives liées à la procuration.

II- Un contrôle à la portée circonscrite

Cour EDH 2005 Hirst c. Royaume-Uni : les détenus doivent continuer de jouir de tous les DLF garantis
par la Convention compatibles avec leur statut, notamment du droit de vote,

La Cour EDH est intervenue pour condamner les interdictions générales et automatiques des droits
civiques des détenus. MAIS les interdictions qui ne sont pas automatiques, dès lors qu’elles sont
dûment justifiées, sont regardées comme compatibles avec la CESDH.

De même, on peut s’interroger sur la conformité de cette disposition à la Constitution au regard du


principe d’individualisation des peines, puisque la privation systématique des droits civiques des
fonctionnaires a été jugée inconstitutionnelle.
MAIS arrêt du 14 octobre 2012: la Crim. a refusé le renvoi et considéré qu’elle n’est pas nouvelle et
qu’elle ne présente pas un caractère sérieux, étant donné que le détenu peut demander le relèvement
de ses droits civiques.

155
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

FICHE 42 – LE DROIT A UNE BONNE ADMINISTRATION


Droit à une bonne administration : ensemble de garanties visant à protéger le caractère démocratique
de la société et du fonctionnement et des activités de l’autorité administrative, au titre desquels
figurent la transparence, la participation du public et la procéduralisation des relations.

Les garanties substantielles du droit à une bonne administration


I- L’association de l’administré à la prise de décision administrative

A) Le droit de présenter des observations


Il est le droit de tout destinataire d’une mesure, d’être mis à même de faire valoir ses prétentions
auprès de l’autorité administrative qui en est l’auteur. Ce droit met en oeuvre le principe du
contradictoire dans le cadre de la procédure administrative non-contentieuse.
L’obligation de contradiction prévue par les articles L. 120-1 et s. du CRPA s’impose pour tous les actes
individuels soumis à l’obligation de motivation, lorsqu’ils ne sont pas pris à la demande de l’intéressé,
sauf exceptions (ex. : urgence, risque pour l’ordre public, procédure particulière) ;

NB : ces dispositions ne sont pas applicables aux relations entre l’administration et ses agents.
Droit de tout agent faisant l’objet d’une sanction au respect du PDG de principe du contradictoire : CE,
1944, Dame Veuve Trompier-Gravier et de demander communication de son dossier (art. 19 loi de
1983)

B) Les procédures d’enquête publique


Ces procédures assurent « l’information et la participation du public » et « la prise en compte des
intérêts de tiers » par l’autorité administrative qui sera l’auteur de la décision, par la présentation des
observations et propositions recueillies (art. L. 134-2 du CRPA).

II- Transparence de l’action administrative

A) La motivation des décisions administratives


Article L. 211-2 CRPA : l’obligation de motivation vise les décisions individuelles lorsqu’elles sont
défavorables.
La motivation doit être écrite et exposer les considérations de fait et de droit (art. L. 211-5 du CRPA).
Cette obligation cède toutefois dans un certain nombre d’hypothèses : en cas d’urgence absolue ;
d’interdiction prévue par le législateur de divulguer un fait couvert par le secret.

B) Le droit d’accès aux documents administratifs


Il résulte de la loi du 17 juillet 1978 que tout citoyen peut consulter et obtenir une copie de l’ensemble
des documents administratifs non nominatifs produits par les organismes de droit public ou de droit
privé prenant en charge une mission de service public.

Le service concerné a l’obligation de fournir le document, sauf en de rares hypothèses motivées,

156
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

notamment, par le secret de défense nationale, la vie privée (notamment doit à la vie privée de
l’entreprise : CE Anticor 2022.)
Tout document produit ou reçu par l’administration est un document administratif.

Ce droit est de rang constitutionnel (CC, 2020, Unef) sur le fondement de l’article 15 de la DDHC selon
lequel « la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ».

La liberté d’accès aux documents administratifs est garantie par la création d’une AAI : la CADA :L 340-1.
Elle émet un avis sur le caractère communicable du document visé qu’elle notifie à l’administration et à
l’intéressé, pouvant contester.
L’administré dispose d’un délai de 2 mois pour saisir la CADA d’une demande d’avis.
La CADA exerce par ailleurs un pouvoir de sanction en cas de réutilisation des informations publiques en
violation des prescriptions mentionnées au code des relations entre le public et l’administration.

Les garanties institutionnelles du droit à une bonne administration

I- Les autorités administratives indépendantes

Les AAI obéissent à une logique d’indépendance et de transparence de l’activité administrative dans
certains domaines sensibles de la vie sociale.

Certaines exercent parfois un pouvoir réglementaire (pouvoir général et impersonnel). OR,la Constitution
réserve l’exercice de ce pouvoir au Premier ministre (article 21 de la Constitution). Le CC a toutefois
admis la constitutionnalité de l’attribution d’un pouvoir réglementaire à ces autorités, qui ne se conçoit
cependant que comme un pouvoir limité dans son champ d’application et dans son contenu : DC du 17
janvier 1989).

Mais surtout, leur activité se caractérise par un pouvoir d’influence à travers les nombreux avis et
rapports qu’elles publient.
La jurisprudence administrative, en accueillant très libéralement les recours contre les actes dit de soft
law (avis, recommandations, mises en garde…), permet une justiciabilité de ce pouvoir d’influence :
CE, 21 mars 2016, Fairvesta international).

Ces institutions ne relèvent ni du pouvoir judiciaire ni du pouvoir législatif. Elles relèvent de


l’administration d’État.

Lorsque une AAI inflige une sanction, elle se voit appliquer l’article 6 § 1 de la CEDH

Il s’agit toutefois d’autorités indépendantes. Bien que n’ayant pas la personnalité morale, elles ne
subissent la tutelle d’aucune institution étatique et sont également placées en dehors du pouvoir
hiérarchique de l’administration.

Pourquoi est-il nécessaire que les AAI soient indépendantes ?


Réponse dans leur objet : veilleur au respect effectif des droits, or, cela vise à alerter les violations par
l’Etat de ses obligations d’où l’intérêt d’une indépendance.
Les AAI ont 2 missions principales : contrôle ; information.

NB : le Défenseur des droits se trouve toutefois dans une situation différente. Il s’agit en effet d’une
autorité administrative dont l’indépendance trouve son fondement dans la Constitution ;

157
MODULE III – LES DROITS FONDAMENTAUX THÈME 13 : NATIONALITÉ ET CITOYENNETÉ

II-Le médiateur européen

Le Médiateur européen a été institué par le Traité de Maastricht du 7 février 1992. Il est élu par le
Parlement européen pour une période de 5 ans renouvelable et siège à Strasbourg. L’actuel Médiateur
européen est une femme du nom d’Emily O’Reilly.

Le Médiateur européen : est un organe de contrôle qui :


- reçoit les plaintes de tout citoyen de l’Union européenne relatives à des cas de mauvaise
administration dans l’action des institutions de l’Union européenne, à l’exception de la Cour
de justice
- procède aux enquêtes nécessaires
- saisit l’institution visée d’une demande d’avis
- établit à partir de ces éléments un rapport qu’il transmet au Parlement européen et à
l’institution visée, et informe l’auteur de la plainte du résultat de ses enquêtes (art. 228 § 1
du TFUE).

158
MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

THEME 12 : LES LIBERTES DU CORPS

FICHE 43 – LA LIBERTE D’ALLER ET VENIR


Liberté d’aller et venir : droit des ressortissants d’un État de se maintenir et de revenir sur son territoire
et droit de toute personne de se déplacer à l’intérieur du territoire d’un État et entre les différents États.

Liberté de circulation : droit des citoyens de l’UE de se déplacer vers un EM autre que celui de leur
nationalité (liberté de circulation des personnes) et liberté de commercialiser des marchandises,
d’offrir des prestations de services et de créer ou de transférer une société vers un autre État membre
(liberté de circulation des marchandises, liberté de prestation de services et liberté d’établissement).
Une liberté au statut renforcé
I- Une liberté fondamentale
En droit interne :
Cette liberté jouit d’un statut constitutionnel : DC 12 juillet 1979, Ponts à péage et elle est rattachée aux
articles 2 et 4 de la DDHC. Il s’agit d’une liberté distincte de la liberté individuelle qui n’est donc plus
placée exclusivement sous la protection de l’autorité judiciaire en vertu de l’article 66 de la Constitution
(DC du 13 mars 2003, Loi pour la sécurité intérieure).

En droit international : est reconnu dans divers textes :


- La liberté de « circuler librement » au sein d’un État : art. 12, PIDCP ; art. 2 § 1, Protocole n° 4 à
la CEDH)
- La liberté de quitter le territoire d’un État, y compris celui de sa nationalité : art. 2 § 2, Protocole
n° 4 à la CEDH,
- La liberté de se maintenir et de revenir sur le territoire de son État de nationalité : art. 3,
Protocole n° 4 à la CEDH)
- La liberté de circuler entre les États membres de l’UE pour ses citoyens (art. 45, Charte des
DFUE).

Enfin, la liberté d’aller et venir inclut le droit de quitter le territoire d’un État, en sorte que nul ne peut
être illégalement retenu contre son gré de quitter un pays. Toute personne a par ailleurs le droit
d’obtenir un passeport, sauf à rendre ineffective cette liberté de quitter un État (CE, ord., 26 avril 2005,
Said M’Lamali), sauf refus justifié en cas d’atteinte à la sécurité nationale ou la sûreté publique.

II- Une liberté garantie

Conformément à l’article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de régler cette liberté et, par
suite, de la concilier avec les autres droits et libertés ou impératifs de rang constitutionnels.
Toutefois, l’administration peut apporter de nombreuses restrictions à la liberté d’aller et venir dans le
cadre de son pouvoir de police administrative (CE, 1919, Labonne).

La liberté d’aller et venir est placée sous la protection du juge judiciaire et du juge administratif, la
compétence de principe revenant au JA conformément à la jp du CC (DC du 23 janvier 1987).
Cette liberté est en particulier protégée dans le cadre du contrôle des mesures de police administrative.
Le juge judiciaire a une compétence résiduelle et contrôle les atteintes à la liberté d’aller et venir
lorsqu’elles affectent la liberté individuelle au sens de l’article 66 de la Constitution.
Sous l’angle de l’intensité du contrôle juridictionnel, il s’agit d’un contrôle de proportionnalité.
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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

L’effectivité de la jouissance de la liberté d’aller et venir est garantie :


- entre les États, par le droit d’obtenir un passeport (sauf atteinte à la sécurité nationale ou à la
sûreté publique)
- au sein de l’État, par l’interdiction des régimes d’autorisation ou de déclaration préalable (CE,
Ass., 1995, Vedel) et par la gratuité de l’utilisation collective des voies publiques (CE, 1991,
Commune de Bagnères-de-Luchon).

Les gens du voyage

La formule « gens du voyage » est une dénomination administrative qui désigne une population
hétérogène résidant habituellement en abri mobile terrestre ou ayant un mode de vie itinérant en
France.

I- Le déplacement des gens du voyage

A) La persistance d’un régime exorbitant

Le législateur a initialement mis en place un régime restrictif de la liberté d’aller et venir en


conditionnant les déplacements des gens du voyage à la possession de titres de circulation dont la
délivrance et la prorogation impliquent un examen par les autorités de police ou de gendarmerie (loi
du 16 juillet 1912, confirmée par la loi du 3 janvier 1969).

B) La supression du régime exorbitant

Atténuation du régime : l’obligation, qui existait jusqu’alors, de faire viser ces titres de circulation tous
les 3 mois par l’autorité administrative et l’obligation de rattachement ininterrompu de 3 ans dans la
même commune pour pouvoir s’inscrire sur la liste électorale, prévues par ce régime restrictif
exorbitant de droit commun, ont été jugées constituer des atteintes disproportionnées à la liberté
d’aller et venir des gens du voyage, de sorte que les dispositions légales les prévoyant ont été abrogées
(CC, 2012, M. Jean- Claude P.) et que la France a été condamnée par le Comité des droits de l’homme au
titre de la violation de l’article 12 du PIDCP (CCPR, 2014, Claure Ory c. France).

Dans sa délibération du 17 décembre 2007, la HALDE a estimé que ce dispositif « instaure manifestement
une différence de traitement à l’égard des gens du voyage au sens de l’article 14 de la Convention
européenne des droits de l’homme (CEDH) qui interdit toute discrimination dans la jouissance du droit de
chacun à circuler librement ».

L’article 195 de la loi du 27 janvier 2017 est venu abroger La loi du 3 janvier 1969

II- Le stationnement des gens du voyage

A) Les prises de position de la Cour européenne

CEDH, 25 sept. 1996, Buckley c. Royaume-Uni : caravane, dans laquelle vit une famille tsigane, qui avait
acheté le terrain sur lequel était garé le véhicule, doit être regardée comme un domicile au sens de
l’article 8 de la CEDH.
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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

Plus encore, l’article 8 garantit aux membres d’une minorité le droit d’avoir un mode de vie
traditionnel : CEDH 2001, Chapman c. Royaume-Uni : L’article 8 de la CESDH impose ainsi aux États
parties l’« obligation positive de permettre aux Tsiganes de suivre leur mode de vie ».

B) La mise en œuvre du droit au stationnement

La loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, reconnaît le droit au logement
des familles de voyageurs et prévoit la construction d’aires d’accueil dans toutes les communes de plus
de 5000 habitants ;

Plus encore, 3 types de mesures ont été adoptées pour garantir l’effectivité de la liberté d’aller et venir
des gens du voyage (loi « Besson » de 2000) :
- obligation d’aménagement d’aires pour les gens du voyage (art. 2) : elle garantit l’effectivité du
droit au stationnement des gens du voyage consacré en jurisprudence par l’illégalité de toute
mesure consistant à interdire « de façon permanente et absolue le stationnement et le séjour
des nomades sur tout ou partie du territoire d’un département »

- soutien financier de l’Etat dans la réalisation et la gestion de ces aires

- moyens de lutte contre les occupations illicites (art. 9) : seules les communes respectant leurs
obligations peuvent interdire le stationnement sauvage et faire respecter cette interdiction par
le recours à une procédure d’expulsion.

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

FICHE 44 – LA LIBERTE DE CIRCULATION DES ETRANGERS

Le droit des étrangers est un droit de police qui a essentiellement pour objet de régir l’entrée, le séjour
et l’éloignement des étrangers. Il se caractérise par l’emploi des procédés de la police administrative.
L’entrée sur le sol national est notamment subordonnée à l’octroi d’un visa. Le séjour est conditionné par
la délivrance d’un titre de séjour. L’éloignement forcé fait intervenir plusieurs procédures : l’obligation
de quitter le territoire français, l’expulsion et l’extradition.

L’entrée

I- les conditions d’entrée

L’article 77 du TFUE précise que chaque EM doit veiller à ce que les ressortissants des Etats tiers ne
puissent franchir la frontière extérieure sans remplir les conditions d’entrée, ces conditions sont
uniformisées dans le Code frontières Schengen (espace Schengen = à l’intérieur, libre circulation en
principe (sauf si menace grave pour l’OP d’un Etat, dans ce cas contrôle temporaire) mais pour y
pénétrer, conditions uniformisées dans tous les Etats le composant)

A) Des conditions variables selon la durée du séjour


L’étranger ressortissant d’un État tiers à l’UE doit (en principe, car sinon il existe le motif humanitaire) :
1) être en possession d’un document de voyage et d’un visa uniforme, ou d’une autorisation de
voyage s’il est dispensé de l’obligation de visa, tous deux devant être en cours de validité
(CESEDA)
2) justifier de l’objet de son voyage ;
3) présenter un justificatif d’hébergement
4) ne pas être renseigné dans le Système d’Information Schengen (SIS) aux fins de non-admission,
ni ne constituer une menace pour l’ordre public.

B) Le placement et maintien en zone d’attente


L’étranger qui arrive en France par la voie ferroviaire, maritime ou aérienne et qui n’est pas autorisé à
entrer sur le territoire français peut être maintenu dans une zone d’attente le temps strictement
nécessaire à son départ ou le temps qu’il prouve qu’il bénéficie d’une protection internationale (art.
L. 341-1).
NB : Le maintien des étrangers en dehors du régime des zones d’attente n’est pas légal.

Ce maintien est effectué pour une durée de 4 jours pouvant être prorogée de 8 jours à deux reprises sur
autorisation du JLD, périodes à l’issue desquelles l’étranger non réacheminé est automatiquement
admis sur le territoire avec un visa de régularisation ou d’une durée de 26 jours si l’étranger décide de
déposer une demande d’asile.

Plusieurs droits sont reconnus à l’étranger maintenu en zone d’attente :


- il est libre de quitter à tout moment la zone d’attente pour toute destination de son choix
située hors de France, pour autant qu’il y soit légalement admissible.
- L’étranger a ensuite droit à des conditions de nature à sauvegarder sa dignité en lien
notamment
avec l’article 3 de la CEDH
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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

Par ailleurs, il bénéficie de droits procéduraux :


- droit à la notification de la mesure de maintien en zone d’attente
- droit d’être informé dans les meilleurs délais et dans une langue qu’il comprend de ses droits
(assistance d’un interprète, d’un médecin, d’un avocat; droit de communiquer avec toute
personne de son choix)

II- Le contentieux des conditions d’entrée

A) Le contentieux des refus de visa


Tout recours contentieux contre une décision de refus de visa doit être obligatoirement précédé de la
saisine de la commission de recours contre les refus de visa d’entrée.
Le recours administratif devant la commission doit être formé dans un délai de 2 mois.

La CRRV dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour confirmer ou invalider la décision initiale. Le
président de la commission peut rejeter, sans réunir la commission, les recours manifestement
irrecevables ou mal fondés.
Elle peut soit rejeter le recours, soit recommander au ministre des Affaires étrangères d’accorder le visa
demandé, mais elle ne peut pas accorder elle-même le visa.

Le juge peut enfin, à la demande de l’administration, appliquer la technique de la substitution de motifs


afin d’éviter l’annulation de la décision refusant de délivrer un visa (CE,2004, Mme Hallal).
Le juge exerce un contrôle restreint. Il peut prononcer des injonctions.

B) Le contentieux des refus d’entrée

En application du code frontières Schengen, et sous réserve des exceptions qu’il prévoit, les États
doivent refuser l’entrée sur le territoire au ressortissant de pays tiers qui ne remplit pas les conditions
d’accès.
La décision de refus d’entrée doit être notifiée à l’étranger concerné, dans une langue qu’il comprend.

Il appartient à l’étranger donc l’entrée a été refusée de saisir le tribunal administratif dans le ressort
duquel se trouve le siège de l’autorité qui lui notifie le refus, d’un recours en annulation et/ou d’un
recours en référé. La juridiction administrative est seule compétente pour apprécier la légalité de la
décision administrative de refus d’entrée (Cass. 1ère civ., 5 mai 1998).
S’agissant des procédures de référé (CJA, art. L. 521-1 et L. 521-2), la condition d’urgence est
matérialisée par le refoulement de l’étranger à la frontière.

Le séjour
I- Le régime général

A) La délivrance et le retrait du titre de séjour


L’étranger titulaire d’un visa long séjour (VLS) doit en principe demander un titre de séjour àdans les 2
mois de son entrée en France. Plusieurs conditions générales :
- la détention d’un VLS
- l’étranger doit être entré régulièrement en France

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

- la délivrance du titre de séjour est subordonnée à l’absence de menace pour l’ordre public
résultant du comportement personnel de l’étranger

La procédure n’est pas contradictoire : article L. 121-1 du CRPA

le renouvellement du titre de séjour doit être sollicité dans les 2 mois


précédant l’expiration du titre de séjour et peut prendre plusieurs formes de demandes :
- renouvellement du même titre de séjour : l’administration délivre la carte de séjour pluriannuelle
générale (4 ans) à
- changement de statut : la délivrance du nouveau titre est subordonnée aux conditions prévues pour
l’obtention du titre portant la nouvelle mention ;
> carte de résident : en cas de résidence continue et régulière de 5 ans ; et la délivrance est toujours
subordonnée à l’absence de menace pour l’ordre public ;

La prise en considération de la vie privée et familiale vient limiter le pouvoir discrétionnaire du préfet :
lorsque l’étranger ne remplit pas les conditions prévues par les textes pour l’obtention du titre de
séjour, le préfet est tenu de s’assurer qu’un refus ne porterait pas une atteinte disproportionnée à son
droit au respect de sa vie privée ou familiale garanti par l’article 8 de la CEDH (CE, 10 avril 1992).

retrait : acte créateur de droits, le titre ne peut être retiré par le préfet que dans les cas légaux :
- retrait obligatoire : en cas de regroupement familial polygamique, de mesure d’expulsion ou
d’interdiction judiciaire du territoire ;

- retrait facultatif : si l’intéressé a travaillé sans y être autorisé, s’il a fait l’objet d’un
signalement
au SIS, s’il a fait venir son conjoint ou enfants en dehors de la procédure de regroupement familial ou si
sa vie commune avec son conjoint a cessé, s’il ne défère pas aux convocations ou s’il fait obstacle aux
contrôles visant à vérifier le maintien des conditions de délivrance du titre de séjour en cause.

B) Le contrôle du titre de séjour


La délivrance du titre de séjour est subordonnée à des obligations de déférer aux contrôles et aux
convocations : art. L 812-1 CRPA.
Le contrôle du titre de séjour peut intervenir à l’occasion d’un contrôle ou d’une vérification d’identité.

Il peut aussi avoir lieu, lors de ou en dehors de tout contrôle d’identité, à condition
que des « éléments objectifs déduits de circonstances extérieures à la personne même de l’intéressé
sont de nature à faire apparaître sa qualité d’étranger » (art. L. 812- 2, CESEDA) de manière exclusive de
toute discrimination (CC, 1993).

La vérification de la régularité du séjour a toujours lieu dans le cadre de la retenue pour vérification du
droit au séjour (art.L. 813-1, CESEDA) permettant de retenir l’étranger jusqu’à 24 heures, à condition
d’être proportionnée à la restriction de la liberté individuelle qu’elle induit et sous le contrôle de
l’autorité judiciaire (art. 66, Constitution) et plus précisément du JLD.

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II- Les différents titres de séjour

A) les cartes de séjour :

La carte de séjour temporaire (CST), d’une durée maximale d’un an, peut porter différentes mentions et
l’administration se trouve parfois en compétence liée pour la délivrer à certaines catégories d’étrangers
lorsque les conditions sont réunies.

La carte de séjour pluriannuelle – qui peut prendre quatre formes : carte de séjour pluriannuelle
générale et cartes de séjour pluriannuelles « passeport talent », « travailleur saisonnier » et « salarié
détaché ICT (intra corporate transferees) » – est délivrée à l’issue d’une première année de séjour
régulier, sous couvert d’une CST ou d’un VLS valant titre de séjour (VLS-TS), pour un maximum de quatre
ans.
B) la carte de résident

Elle est délivrée à l’étranger qui, notamment, justifie de cinq années de durée de résidence régulière en
France (art. L. 426-17) et est valable dix ans.
Elle confère à son titulaire le droit d’exercer la profession de son choix et est renouvelable de plein droit,
sauf exceptions. Il ne faut pas de polygamie / de condamnation préalable pour violences sur mineurs /
pas de menace pour l’OP.

Focus – Le droit au regroupement familial


Fondements :
- PGD selon CE
- Principe à valeur c° selon CC
- Affirmé par Convention de NY de 1989
- Affirmé par deux directives
Conditions :
1) Possible seulement pour un conjoint majeur (donc il faut être marié)
2) Enfants mineurs (mais préfet peut apprécier situation globale)
3) Etranger demandeur du regroupement doit résider régulièrement en France depuis au moins
18 mois et bénéficier de ressources stables et suffisantes
4) Demande faite à l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (EP administratif )

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

L’éloignement
I-Mesures d’éloignement

A) l’obligation de quitter le territoire français (OQTF)


1. les conditions de l’QTF
Une mesure d’OQTF peut être adoptée dans l’un des 6 cas prévus par L. 611-1 du Ceseda :
- Entrée irrégulière
- séjour irrégulier après expiration du visa
- refus de délivrance ou de renouvellement du titre de séjour
- refus définitif du bénéfice de la protection internationale
- comportement constitutif d’une menace à l’ordre public
- exercice non autorisé d’une activité professionnelle dans le cas où l’étranger séjourne
depuis moins de trois mois en France)

Certains étrangers sont par ailleurs protégés contre l’OQTF (art. L. 611-3).

2. la décision d’OQTF et les décisions accessoires


La décision portant OQTF, qui doit être expresse (CE 2009), est prise par le préfet de département.
La notification de l’OQTF peut être réalisée par envoi postal ou par la voie administrative, c’est-à-dire
en mains propres MAIS les OQTF sans délai doivent obligatoirement être notifiées par voie
administrative.

Surtout, l’exécution de l’OQTF peut être assortie ou non d’une décision portant délai de départ
volontaire (DDV), qui a pour finalité de permettre à l’étranger d’organiser lui-même son départ. L’article
L. 612-1 du CESEDA prévoit que l’étranger ressortissant d’un pays tiers dispose d’un DDV de 30 jours,
qui commence à courir à compter de la notification de la décision,

L’OQTF est abrogée de plein droit lorsque l’étranger se voit accorder une protection internationale.
L’OQTF s’accompagne d’une décision portant désignation du pays de destination : L 612-12 CESEDA.
L’OQTF prise à l’encontre du ressortissant d’un pays tiers peut par ailleurs être assortie d’une décision
portant interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) ou de circulation sur le territoire français.
L’IRTF constitue une mesure de police administrative complémentaire de l’obligation de quitter le
territoire (art. L. 612-6).

3. Le contentieux de l’OQTF
tout recours contentieux contre une décision d’OQTF est suspensif :
La procédure contentieuse varie selon les cas de figure :
- OQTF avec DDV : délai de recours entre 15 et 30 jours – réduit à 48h si suppression de la DDV
- OQTF sans DDV (art. L. 614-6, CESEDA) : délai de recours de 48 h.

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OQTF avec mesure de rétention ou d’assignation à résidence (art. L. 614-7, CESEDA) : délai de recours de
48 h pour saisir le président du tribunal administratif qui forme des conclusions et le tribunal
administratif, en formation collégiale, les examine et doit rendre son jugement dans un délai de 96 h.

- le contrôle de légalité est propre à chacune des décisions en cause :


contrôle normal de la décision d’OQTF et d’IRTF ;
contrôle des conséquences de la désignation du pays de destination ;
contrôle de proportionnalité si risque / mention d’atteinte excessive à la vie privée et familiale du
requérant sur la base de l’article 8 de la CEDH.

B) L’expulsion
L’expulsion est la mesure de police administrative (CE, 1988, Elfenzi) enjoignant à un étranger de
quitter le territoire national et lui interdisant d’y revenir tant qu’elle n’a pas été abrogée, vise à
prévenir la menace que la présence d’un étranger sur le territoire constitue pour l’ordre public, pour la
sécurité publique ou la sûreté de l’État. La mesure d’expulsion a un caractère préventif et non
répressif.

Une décision d’expulsion peut être adoptée si ces conditions sont réunies :

1) pour un des 3 motifs d’expulsion : (dans CESEDA) : menace grave pour l’ordre public / nécessité
impérieuse pour la sûreté de l’État ou la sécurité publique / comportements de nature à porter atteinte
aux intérêts fondamentaux de l’État, ou liés à des activités à caractère terroriste, ou constituant des
actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une
personne déterminée ou un groupe de personnes

2) tout étranger peut être soumis à une mesure d’expulsion, à l’exception des étrangers protégés

L’arrêté d’expulsion est pris au terme d’une procédure d’adoption :

procédure ordinaire :
- convocation de l’étranger pour être entendu devant la commission des expulsions, qui émet
un avis motivé et non conforme, transmis à l’autorité compétente pour prononcer l’expulsion, et
- éventuellement, prononcé de l’expulsion par le préfet ou le ministre de l’Intérieur en l’absence
d’urgence absolue.

procédure en cas d’urgence absolue : l’étranger est privé des garanties procédurales tenant à son
information préalable et à la comparution devant la commission des expulsions.

Peut faire l’objet d’un REP, qui peut être assorti d’une requête en référé-suspension ou en référé-
liberté auquel cas la condition d’urgence est présumée satisfaite à titre de principe.

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C) L’extradition
L’extradition permet à un État de demander à un autre État de lui livrer une personne qui se trouve sur
son territoire pour qu’elle soit jugée et purge la peine prononcée contre elle.
Une décision d’extradition ne peut viser que les étrangers
Le contrôle est double : formel devant la Cour de cassation (régularité de la procédure) et matériel
devant le Conseil d’État (légalité du décret d’extradition)

L’extradition n’est pas permise lorsque le pays ne respecte pas les DLF de la personne : CEDH 1989
Soering c RU.
Le mandat d’arrêt européen (décision-cadre du 13 juin 2002) permet d’éviter la procédure classique et
lourde de l’extradition entre États membres de l’UE.

II- La rétention administrative

A) La décision de placement en rétention.


Le placement en rétention ne peut intervenir que si l’étranger fait l’objet d’une mesure d’éloignement
exécutoire et s’il n’offre pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque de
soustraction à l’exécution : liste des mesures d’éloignement exécutoires : L. 731-2 du CESEDA.

B) Le contrôle de la rétention
La décision de placement ne peut être contestée que devant le JLD.
La prolongation de la rétention administrative au-delà de la période initiale de 48 heures est également
placée sous le contrôle du JLD. Il autorise la première prolongation pour une durée ne dépassant pas 28
jours (art. L. 742-3), puis à nouveau, pour un délai supplémentaire de 30 jours (L. 742-4).

Au-delà de 60 jours, le JLD peut autoriser des prolongations exceptionnelles de la rétention pour une
durée ne dépassant pas quinze jours à chaque fois.

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FICHE 43 – LA LIBERTE SEXUELLE


Liberté sexuelle : composante du droit au respect de la vie privée selon CEDH qui regroupe la liberté de
vivre librement selon son orientation sexuelle et la liberté de changer de sexe, dont l’effectivité est
notamment garantie par l’interdiction des « thérapies de conversion » (loi de 2022).
La liberté de disposer de son corps

I- Le droit de ne pas donner la vie


La décision de devenir ou de ne pas devenir parent est un droit garanti par l’article 8 de la CESDH : CEDH,
10 avril 2007, Evans c. Royaume-Uni).
A) La prévention des naissances

1. La contraception
L’accès aux contraceptifs (loi « Neuwirth » de 1967) a été étendu aux mineurs, sans autorisation des
parents (loi de 1987), qui peuvent obtenir, anonymement et gratuitement, des contraceptifs d’urgence
auprès de centres de planification ou d’éducation familiale (loi « Royal » de 2000).
Depuis la loi du 4 juillet 2001, la prescription et la délivrance aux mineures sans le consentement des
parents sont autorisées.

NB : un pharmacien ne jouit pas d’une « clause de conscience » (Crim., 1998) ni ne peut opposer sa
liberté religieuse (CEDH, 2001, Pichon c. France) pour refuser de délivrer des contraceptifs.

2. La stérilisation à visée contraceptive

Depuis la loi du 4 juillet 2001, seule la stérilisation des seules personnes majeures est possible :
- si elle a « exprimé une volonté libre, motivée et délibérée en considération d’une
information claire et complète sur les conséquences » : art. L.2123-1, CSP

- si l’altération de ses facultés mentales est source de handicap et justifie son placement sous
tutelle ou curatelle, et s’il existe une contre-indication médicale absolue aux méthodes de
contraception classique ou une impossibilité avérée de les mettre en œuvre efficacement (art. L.
2123-2, CSP). Elle suppose une décision du juge des tutelles

La stérilisation sans le consentement de la personne visée constitue un délit si elle est réversible et un crime si
elle est irréversible.

Focus – La castration chimique pour les délinquants sexuels récidivistes : atteinte importante à la vie privée
(liberté sexuelle) donc il convient de vérifier (CEDH et CC l’ont fait) la proportionnalité entre la mesure et la
finalité (qui est de protéger les victimes). La castration devrait notamment être réversible.

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B) L’interruption de grossesse

La pénalisation de l’IVG est suspendue pendant une période 5 ans par la loi de 1975. La loi Pelletier de
1979 dépénalise définitivement l’IVG pratiquée dans les conditions fixées par le CSP.

Sous l’angle européen, la Cour EDH laisse aux États la liberté de reconnaître ou non un droit à
l’avortement tout en manifestant sa volonté d’assurer une pleine effectivité à ce droit dès lors qu’il
est consacré en droit interne. MAIS l’art. 8 de la CEDH « ne saurait s’analyser comme consacrant un
droit à l’avortement » : CEDH, GC, 2010, A.B.C. c. Irlande.

En droit français, deux types d’interruption de grossesses sont à distinguer :

- l’interruption volontaire de grossesse (IVG) : Le droit à l’avortement est reconnu jusqu’à 12


semaines d’aménorrhée (loi «Aubry-Guigou» de 2001), ce délai ayant été prolongé à 14 semaines par une loi
de 22 mars 2022.
NB : sa jouissance n’est plus conditionnée à une situation de « détresse » (loi de 2014 pour l’égalité
réelle entre les femmes et les hommes).
Il est possible depuis loi d’août 2021 de faire une IVG partielle (seulement un embryon si plusieurs) en
cas de risque pour la santé de la mère.

Son effectivité est garantie par la création du délit d’entrave à l’IVG (loi « Neiertz » de 1993) et n’est pas
remise en cause par la clause de conscience du médecin et de la sage-femme dès lors que s’il refuse de
pratiquer l’IVG, il doit « communiquer immédiatement [à l’intéressée] le nom de praticiens […]
susceptibles de réaliser cette intervention » (art. L. 2212-8, CSP).

- l’interruption médicale de grossesse (IMG) : elle peut être pratiquée, sans condition de délai,
en
cas de péril grave pour la santé de la femme ou en cas de risque que l’enfant naisse atteint d’une
affection particulièrement grave reconnue comme incurable : art. L. 2213-1, al. 1, CSP.

II- La liberté sexuelle selon l’orientation sexuelle

Toutes les orientations sexuelles (homosexualité, hétérosexualité, bisexualité) devant pouvoir être
vécues librement, les discriminations fondées sur le sexe, le genre et l’orientation sexuelle sont par
principe interdites. Liberté de vivre selon son orientation sexuelle : droit pour toute personne
d’entretenir des relations sexuelles et de choisir librement ses pratiques sexuelles (CEDH, 2005, K.A. et
A.D. c. Belgique).

Le changement d’identité sexuelle

I- Le changement de sexe anatomique

A) L’intersexualité
L’intersexualité renvoie à la situation dans laquelle le sexe morphologique d’une personne est
indéterminable (hermaphrodites).
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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 14 : LES LIBERTÉS DU CORPS

Une circulaire de 2011 prévoit que lorsque le sexe d’un nouveau-né est incertain, il est préférable
d’éviter la mention de « sexe indéterminé » et d’indiquer « le sexe qui apparait le plus probable ».
B) Le transsexualisme
Il renvoie à la situation dans laquelle les caractéristiques physiques du sexe sont en contradiction avec
les caractéristiques psychiques de l’individu, pouvant conduire à une opération de conversion sexuelle
dans une finalité thérapeutique. Les médecins vont alors modifier le sexe anatomique du transsexuel,
pour le mettre en conformité avec son sexe psychologique.

II- Le changement de sexe juridique

Pendant longtemps, le changement de la mention du sexe à l’état civil était conditionné à une
intervention chirurgicale ayant entraîné une modification du sexe anatomique. Aujourd’hui, il peut y
avoir modification du sexe à l’état civil même en l’absence de modification anatomique (art. 61-5 et art.
61-6, Code civil ; loi de 2016).
Au contraire il aurait à choisir entre la protection de son identité sexuelle et de son intégrité physique,
ce qui serait la cause d’une atteinte excessive à son droit à la vie privée (CEDH, 2020, X et Y c.
Roumanie)

Ce changement de sexe ne produit aucun effet sur les filiations établies avant la modification de l’état
civil (art. 61- 8, code civil) et ne produit d’effet sur les filiations établies après cette modification que si
elle s’est accompagnée d’une intervention chirurgicale (Civ. 1ère, 2020).

Civ. 1e, 4 mai 2017 : refus d’inscrire la mention « sexe neutre » sur l’état civil -> Cass répond en effet
que l’article 34 c° laisse législateur le soin d’encadrer l’état des personnes.c

La liberté du commerce sexuel

I- La prostitution et le proxénétisme

A) La prostitution
Prostitution : pas de définition légale, mais correspond à toute relation de nature sexuelle consentie en
contrepartie d’une rémunération.

Les pouvoirs publics tolèrent ainsi la prostitution mais l’encadrent de façon à ce qu’elle soit de plus en
plus restreinte.
La France a ratifié la Convention des NU pour la prohibition des êtres humains et de l’exploitation de la
prostitution d’autrui en 1960.

L’article 611-1 du code pénal punit « le fait de solliciter, d’accepter ou d’obtenir des relations de nature
sexuelle d’une personne qui se livre à la prostitution (…) » d’une peine de contraventions de 5e classe

B) Le proxénétisme
Le proxénétisme est interdit, peu important que la prostituée y consente (forme d’esclavage moderne)
Constitue un délit le fait de profiter de la prostitution d’autrui en en tirant des bénéfices
art. 225-5, code pénal : 7 ans d’emprisonnement et 150.000 euros d’amende,

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II- L’industrie pornographique

Pornographie : la liberté sexuelle, la liberté d’entreprendre et la liberté artistique des acteurs de films
pornographiques sont limitées au titre :

- de la protection de l’ordre public immatériel, ce qui a été à l’origine de la pénalisation de la


diffusion de messages pornographiques à caractère violent susceptibles de « porter gravement
atteinte à la dignité humaine » (art. 227-24, code pénal).

- de la protection des droits d’autrui :


Autrui visant notamment les enfants, au titre du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, ce qui
justifie le rôle de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM
pouvant imposer le recours à des signalétiques spécifiques et l’obligation de ne diffuser le contenu
pornographiques que sur des chaînes et à des horaires déterminés)

Autrui visant également les personnes adultes, ce qui a justifié la pénalisation du « revenge porn » : art.
226-2-1, code pénal ; CC, 2021, Mme Saadia K.

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THEME 13 : LES LIBERTES DE L’ESPRIT

FICHE 46 – LA LIBERTE DE PENSEE ET DE CONSCIENCE


Liberté de pensée et de conscience : liberté de nourrir une opinion, de tout type, dans son for intérieur,
et de l’exprimer, dont la garantie constitue un des fondements d’une société démocratique (CEDH 1993
Kokkinkakis c. Grèce) et qui fait l’objet d’un droit conventionnel (art. 9 de la CEDH) et d’un PFRLR : CC,
1977, Loi relative à la liberté de l’enseignement.
Une consécration de principe
Fondements :
- art. 1 Constitution : « la France respecte toutes les croyances »
- Art. 9 CEDH : « toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ».
- La liberté de conscience est un PFRLR : CC 1977, Loi relative à la liberté de l’enseignement
I- Le contenu de la liberté

La liberté de pensée peut être vue comme un synonyme de la liberté d’opinion, entendue comme la
liberté d’avoir des opinions de toute nature. Cette liberté implique logiquement de pouvoir les exprimer
sans être défavorisé ou inquiété à cause d’elles.
La liberté de conscience comprend la faculté d’adhérer ou non à des croyances.
L’État ne doit pas exercer de contrainte de conscience ou accorder des avantages déterminés à une
décision de conscience. La liberté de conscience a donc pour conséquence directe la prohibition des
morales officielles.

Un exercice garanti
I- Les modalités d’exercice

A) Le respect de la liberté par l’Etat


Il suppose le respect de deux exigences par les autorités :
- obligation de neutralité : la protection d’une opinion implique que la personne qui

l’exprime ne s’en trouve pas défavorisée (al. 5 du Préambule de la Constitution de 1946), ni inquiétée
(art. 10 de la DDHC), à moins qu’une telle atteinte ne soit proportionnée
- principe d’égalité : égalité devant la loi entre les citoyens (art. 6 de la DDHC), à moins

que la différence de traitement soit proportionnée à un but légitime qui justifie que la situation de
l’intéressé soit distinguée de celle des autres citoyens

(ex. : interdiction du port de signes religieux ostentatoires pour tous les agents dont l’exercice des
fonctions suppose d’être en contact avec le public, auquel cas la limitation est justifiée par l’objectif
légitime de préservation de neutralité du service public au titre du principe de laïcité et est suivie de
manière cohérente et systématique, tel qu’exigé dans CJUE, 2017, G4S, Secure Solutions et Bougnaoui).

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 15 : LES LIBERTÉS DE L’ESPRIT

B) Le respect de la liberté par les personnes privées

1. faculté d’opposer sa liberté de conscience aux tiers


- objection de conscience : droit d’une personne de se démettre de certaines de ses
obligations
légales au titre du respect de ses convictions dû de manière effective (CEDH, 2011, Bayatyan c.
Arménie), à moins que la contrainte d’une personne à l’exécution de ses obligations légales en
contrariété avec ses convictions personnelles soit proportionnée à un but légitime (ex. : devoir de
réserve des fonctionnaires) ;
- clause de conscience : cas prévus par la loi dans lesquels un professionnel a la faculté de
refuser
d’accomplir un acte qui, bien que ressortant de l’exercice de ses fonctions, est contraire à ses
convictions (ex. : médecin en matière d’interruption volontaire de grossesse [art. L. 2212-8 du CSP],
journaliste [art. L. 7112-5 du code du travail] et avocat).
Maire pour mariage de même sexe n’en bénéficie pas.

2. faculté de cacher ses opinions aux tiers


La liberté de pensée et de conscience doit permettre de garder ses opinions secrètes.
Les « convictions religieuses ou philosophiques » sont des données sensibles, dont le traitement est
prohibé (art. 6, I de la loi de 1978 dite « Informatique et libertés ») à titre de principe, sauf consentement
libre et univoque exprimé par l’intéressé ou sa justification par l’intérêt public et autorisé dans les
conditions légales.

II- Les limites à son exercice

La loi du 13 juillet 1990 interdit la négation des crimes nazis.


Les délits de presse, quant à eux, sont sanctionnés par la loi du 29 juillet 1881.
De la même manière, la Cour EDH ne sanctionne pas un État qui a condamné une enseignante ayant tenu
des propos de dénigrement d’une religion (CEDH, 10 octobre 2018, E.S c. Autriche, n° 38450/12)
Les restrictions sont classiquement justifiées par la protection de l’ordre public.

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FICHE 47 – LA LIBERTE D’ENSEIGNEMENT


Liberté d’enseignement : liberté, au croisement de la liberté de pensée et de conscience et de religion,
qui fait l’objet d’un droit conventionnel (art. 18 § 1 du PIDCP) et d’un PFFRLR : CC, 1977, Loi relative à
la liberté de l’enseignement, et qui protège :
- la liberté des enseignants de délivrer et de choisir le contenu de leurs enseignements ; et
- le droit des étudiants de recevoir et de choisir, soit eux-mêmes ou leur(s) parent(s) s’ils sont
mineurs, l’instruction dont ils souhaitent bénéficier.

La portée de la liberté de l’enseignement


Liberté de créer un établissement scolaire pour y enseigner : liberté de créer un établissement dédié à
l’enseignement (établissement de facto privé), dont l’effectivité est garantie par la possibilité d’un
subventionnement par l’État d’une partie de l’enseignement privé (loi dite « Debré » de 1959).
Elle n’est pas une liberté absolue, de sorte que l’annulation des subventions octroyées, voire la
fermeture de l’établissement, peuvent être ordonnées si les enseignements qui y sont dispensés
portent un risque d’atteinte excessive à l’ordre public ou à la protection de l’intérêt supérieur des enfants
qui y sont inscrits.

Droit à l’instruction : droit d’accès à l’établissement d’enseignement de son choix – ou de celui de ses
parents si l’intéressé est mineur – parmi ceux existant (art. 2 du Premier Protocole additionnel à la
CEDH), dont l’effectivité est garantie par le principe de gratuité et de laïcité de l’enseignement public
(lois Ferry de 1881, 1882 et 1896) ; mais elle n’est pas une liberté absolue de sorte que :
- le droit d’accéder à l’établissement de son choix n’implique pas le droit de choisir de ne pas
recevoir une instruction, droit qui entrerait en contradiction avec le principe de l’instruction
obligatoire (loi Ferry de 1882) de 3 à 16 ans (loi de 2019 pour une école de confiance) ;

- le paiement de droits d’inscription modiques peut être exigé s’ils tiennent compte des
capacités
financières des étudiants (CC, 2019, Union nationale des étudiants) de telle sorte à garantir l’égalité
dans l’accès à l’instruction (CE, 2020, Association UNEDESEP).

- le port de signes religieux ostentatoires à l’école est interdit -> loi du 15 mars 2004 (code de
l’éducation)

Liberté des enseignants : liberté des enseignants de délivrer leurs cours et d’en choisir le contenu et les
modalités d’enseignement ; mais elle n’est pas une liberté absolue, de telle sorte que ce choix peut être
encadré par des mesures nécessaires à la poursuite d’un objectif légitime (ex. : intérêt supérieur de
l’enfant) à condition que ces mesures soient proportionnées, dont l’appréciation dépend du type
d’établissement et du public auquel l’enseignant s’adresse ;

Les enseignants-chercheurs bénéficient du principe d’indépendance : PFRLR : CC, 2020, Loi de


programmation de la recherche

Les enseignants du secondaire (comme du supérieur) sont soumis au principe de neutralité des agents
publics, qui découle du principe de laïcité.

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 15 : LES LIBERTÉS DE L’ESPRIT

Libertés des élèves : liberté des élèves de s’informer et de s’exprimer, qui n’est pas une liberté absolue
et peut donc être restreinte par des mesures dès lors qu’elles proportionnées à un but légitime.
La mise en œuvre de liberté d’enseignement

I- Les modalités de mise en œuvre

La loi dite Debré du 31 décembre 1959 a autorisé la subvention d’une partie de l’enseignement privé.
L’école publique est neutre à l’égard des différentes croyances, le personnel doit respecter une
impartialité parfaite. L’instruction civique a remplacé l’instruction religieuse sans que la loi n’entende
empêcher les élèves de recevoir l’instruction religieuse de leur choix.

II- L’incidence de la laïcité

La loi du 15 mars 2004 a interdit le port de tout signe religieux ostentatoire à l’école : art. 141-5-1 du
code de l’éducation.

L’obligation d’assiduité peut se heurter à certaines libertés comme la liberté religieuse.


Le droit à l’instruction ne permet pas d’exiger l’organisation d’un enseignement religieux conforme à
ses convictions (CEDH, 5 février 1990, Graeme c. Royaume-Uni,).

Le Conseil d’État autorise les autorisations ponctuelles d’absence quand celles-ci sont compatibles avec
les tâches inhérentes aux études et respectent l’ordre public.
Ce refus d’accorder une dispense générale d’assiduité au nom des convictions religieuses peut être
justifié par le principe du droit à l’instruction, ce dernier semble donc devenir une obligation d’instruction

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FICHE 48 – LA LIBERTE DE RELIGION ET LA LAÏCITE


La liberté de religion est une déclinaison de la liberté de conscience. Elle implique néanmoins la
possibilité, au-delà de la conviction religieuse elle-même, d’une extériorisation de celle-ci sous la forme
du culte.
Les composantes de la liberté de religion
I- La liberté de choisir sa religion

A) Les textes fondateurs

Fondements :

- Art. 9 CEDH : « Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce


droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction ».

- Art. 10 DDHC « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur
manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ».

- art. 1er de la Constitution de 1958.

- Art. 18 DUDH

B) La liberté de croire et de ne pas croire


1. une liberté absolue
L’État ne peut ni prescrire une religion ni l’interdire, chacun est donc libre de choisir sa confession en
son âme et conscience. L’État doit respecter la diversité des convictions religieuses afin de garantir le
pluralisme au sein de la société. Il s’agit d’une « garantie essentielle de la liberté et de l’indépendance
de l’être humain » : CEDH Kokkinakis c. Grèce 1993.
Liberté de choisir sa religion : liberté de croire ou de ne pas croire, d’adhérer ou non une croyance
religieuse et de changer de religion, qui constitue une liberté absolue s’agissant du for intérieur, c’est-à-
dire que toute atteinte à son exercice en emporte automatiquement la violation.

2. les sectes
La loi du 12 juin 2001 prévoit la dissolution des sectes en cas « d’abus frauduleux de l’état d’ignorance
ou de faiblesse » : articles 223-15-2 et s. du code pénal.

II- La liberté de manifester sa religion

A) Les textes fondateurs


Fondements :
- Art. 9 CEDH
- Art. 10 DDHC
Liberté de manifester sa religion : liberté d’exprimer ses croyances religieuses, ce qui implique de
pouvoir exercer le culte, d’enseigner les principes religieux, de pratiquer cette religion seul et avec
d’autres croyants, et d’observer les rites de la religion considérée, qui n’est pas une liberté absolue
dans ses manifestations extérieures, c’est-à-dire que seules les atteintes disproportionnées portées à

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 15 : LES LIBERTÉS DE L’ESPRIT

son exercice en constituent une violation ;


B) La possibilité d’exprimer sa religion
La manifestation d’une religion peut recouvrir 4 formes : le culte, l’enseignement, les pratiques et les
rites.
Le paragraphe 2 de l’article 9 de la CEDH limite la possibilité d’extérioriser sa foi. Il en va de même de
l’article 10 de la DDHC qui érige le trouble à l’ordre public en limite à la liberté de religion. Il paraît en
effet primordial de concilier des intérêts parfois antagonistes afin de respecter les convictions de
chacun .
Par ailleurs, la liberté de religion comporte la possibilité de convaincre autrui, ou du moins d’essayer de
le faire. Sans cette faculté, la liberté de changer de religion serait ineffective. Cette tentative de
persuasion peut notamment se faire grâce à l’enseignement mentionné à l’article 9 de la Convention
européenne. Si le prosélytisme est ainsi protégé, il l’est sous la réserve de pas être abusif

L’État a aussi l’obligation positive de prendre les mesures propres à assurer le respect de la liberté de
religion des uns face aux atteintes excessives susceptibles d’être ou ayant été portées par d’autres dans
l’exercice de leurs droits, ce qui lui impose d’intervenir – par la voie législative, exécutive et judiciaire –
pour s’assurer un juste équilibre entre les intérêts en présence : CEDH, 2015, Karaahmed c. Bulgarie.

Les garanties de la liberté de religion


I- La laïcité, garantie de la neutralité de l’Etat
Principe de laïcité : le principe de laïcité repose sur 4 principes que doit respecter l’État :

- principe de séparation de toute Église et de l’État depuis 1905 : il n’existe pas de religion d’État
et l’État ne subventionne aucun culte, ce qui ne veut pas pour autant dire qu’il ne peut pas
participer au financement des travaux de conservation et de restauration des édifices dont il
est propriétaire (ex. : loi de 2019 pour la conservation de la cathédrale Notre-Dame) ;

- principe de neutralité du service public : les bâtiments publics et les agents n’arborent aucun
signe religieux (CE a jugé que les accompagnants à l’école sont usager du SP donc pas obligés)

- principe de non-immixtion : l’État ne privilégie, ni n’intervient dans le contenu des croyances,


ce qui ne veut pas dire pour autant qu’il ne puisse pas en réglementer les modalités d’exercice
– ce dont est en charge le Ministère de l’Intérieur en tant que Ministère des Cultes ;

- principe d’égalité entre les croyances : liberté de choix de chaque individu de sa religion et
garantie de l’égalité devant la loi lors de son exercice suivant le principe de proportionnalité

II- La neutralisation de l’expression des croyances religieuses

A) Le port des signes religieux dans l’espace public


Naissance d’obligations pour les particuliers
- interdiction du port du voile à l’école (loi du 15 mars 2004) jugée conforme à la Constitution
(DC 2010)
- interdiction de la dissimulation du visage dans l’espace public (loi du 11 octobre 2010) jugée

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proportionnée à l’objectif du « vivre ensemble » (CEDH 2014, S.A.S c. France) ;

B) Le porte des signes religieux dans l’entreprise


articles L. 1132-1 et L. 1321-3 du code du travail, le salarié ne peut pas faire l’objet de sanctions
disciplinaires en raison de ses opinions politiques ou de ses convictions religieuses.
Le salarié ne peut pas invoquer sa liberté de religion pour se soustraire aux obligations résultant du contrat
de travail : employé de magasin refusant d’être en contact avec de la viande de porc (Cass)

Le règlement intérieur peut imposer le respect du principe de neutralité si cela est nécessaire et
proportionné à la protection d’autres droits ou au bon fonctionnement de l’entreprise (loi du 8 août
2016)

CJUE, 2017, G4S, Secure Solutions ; Bougnaoui :


Première affaire : la Cour estime que la règle interne à l’entreprise qui impose, de manière
générale et indifférenciée, une neutralité vestimentaire s’opposant au port de signes visibles
de convictions politiques, philosophiques ou religieuses ne peut être regardée comme une
discrimination directe.
Elle peut toutefois aboutir à une discrimination indirecte si elle cause un désavantage
particulier pour les personnes adhérant à une religion ou à des convictions données, sous
réserve de ne pouvoir être objectivement justifiée par un objectif légitime et que les moyens de
réaliser cet objectif sont appropriés et nécessaires.
Cette interdiction doit se limiter au strict nécessaire et viser uniquement les travailleurs en
relation avec les clients.

Seconde affaire : la seule volonté d’un employeur de tenir compte des souhaits d’un client de
ne plus voir ses services assurés par une travailleuse portant un foulard islamique ne saurait
être considérée comme une exigence professionnelle essentielle et déterminante mais comme
une discrimination.

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FICHE 49 – LA LIBERTE D’EXPRESSION


La dimension personnelle de la liberté d’expression

Fondements :
- Art. 11 DDHC
- Art. 10 CEDH
- Art. 25 PIDCP
La liberté d’expression peut se définir de manière générale comme la faculté d’exprimer librement ses
opinions, sa pensée, ses convictions de manière orale comme écrite

La liberté d’opinion est le premier aspect de la liberté d’expression. Elle permet d’avoir des opinions et
de les exprimer sans crainte d’être inquiété.
CEDH Handyside c. Royaume-Uni 1976 : la liberté d’expression constitue « l’un des fondements
essentiels ».

MAIS si une personne s’exprime en tenant des propos qui, bien plus que heurter, choquer ou inquiéter
autrui, constituent des propos haineux en contrariété avec les valeurs et principes au fondement de la
CEDH, elle commet alors un abus de droit (art. 17 et 35 de la CEDH) qui fait obstacle à ce qu’elle puisse
se prévaloir de son droit à la liberté d’expression devant la Cour EDH, qui déclare la requête irrecevable
(ex. : sur des propos négationnistes dans CEDH, 2019, Pastörs c. Allemagne)

une limite matérielle : seules les atteintes disproportionnées qui sont portées à l’exercice de la liberté
d’expression sont prohibées, de sorte que l’absence de violation pourra être constatée même si une
atteinte y est portée, dès lors qu’elle est proportionnée.

La dimension sociale de la liberté d’expression


Liberté de communiquer : liberté du public de recevoir et de diffuser des informations (CEDH, 2020,
Petro Carbo Chem), dont découle le droit d’accéder aux documents d’archives publiques (CC, 2017, M.
François G.) et plus généralement d’accéder à l’information (CEDH, GC, 2016, Magyar Helsinki Bizottság
c. Hongrie), dont le champ duquel n’entrent que les informations :
1) dont la nature les attrait à un thème social important
2) dont la disponibilité rend possible leur diffusion
3) dont l’accès est nécessaire à l’exercice de sa liberté d’expression
4) par une personne dont le rôle est d’informer le public (CEDH, GC, 2016, Magyar Helsinki Bizottság c.
Hongrie ; CE, 2020, Association « Pouvoir citoyen »).

CEDH 1987, Leander c. Suède : la liberté d’expression ne permettait pas de consacrer la liberté de
rechercher des informations.

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L’exercice de la liberté d’expression

La liberté d’expression est applicable aux relations entre personnes privées (CEDH, 2020, Tête c.
France), à propos d’une condamnation pour dénonciation calomnieuse, constitutive d’une violation de
l’article 10), mais l’État a également une obligation positive de protéger la liberté d’expression contre
les atteintes que pourraient lui porter des personnes privées (CEDH 2000, Ozgür Gundem c. Turquie)
.
I- Les modalités

Protection de la liberté d’expression : la liberté d’expression est protégée dans différentes relations :

Dans les relations entre un individu et l’État : l’État a l’obligation négative de ne pas porter une atteinte
disproportionnée à la liberté d’expression, par ses mesures exécutives (ex. : décret interdisant la tenue
d’un spectacle), législatives et judiciaires (ex. : condamnation d’une femen pour exhibitionnisme).

II- Les limites

Art. 10 § 2 de la CEDH : la liberté d’expression ne peut être conventionnellement limitée qu’à 3 conditions
:
1) l’ingérence est prévue par la loi
2) l’ingérence vise un but légitime, à savoir notamment la défense de l’ordre public ou des droits et
libertés d’autrui
3) l’ingérence est nécessaire dans une société démocratique.

La Cour européenne juge aussi que l’article 10 § 2 ne laisse guère de place pour des restrictions à la
liberté d’expression dans le domaine du discours politique ou de questions d’intérêt général.

L’État a l’obligation positive de protéger l’exercice par une personne de sa liberté d’expression contre
les atteintes excessives qui peuvent lui être portées par une autre personne dans l’exercice de ses
droits, ce qui suppose la mise en balance des intérêts en présence et de concilier, selon la marge
nationale d’appréciation ; la liberté d’expression, avec :
- la morale : CEDH, 1992, Open Door c. Irlande sur des tracts sur l’IVG
- la liberté de religion : CEDH, 2005, I.A. c. Turquie sur un roman islamophobe
- le droit à la vie privée : CEDH, GC, 2012, Von Hannover c. Allemagne

Dans un certain nombre d’hypothèses, la liberté d’expression primera sur la vie privée : lorsque
l’information sert un événement d’actualité ; lorsque l’information révélée porte sur un débat d’intérêt
général ; lorsque l’élément révélé est anodin

- la dignité humaine : CEDH, 2016, Société de conception de presse c. France


- le droit d’auteur : CEDH, 2013, Ashby Donald c. France

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FICHE 50 – LA LIBERTE MEDIATIQUE (MEDIAS = RELAIS ESSENTIELS DE LA LIBERTE D’EXPRESSION)


La liberté de la presse
Presse : ensemble des publications imprimées et publiées et des moyens d’information quel que soit le
mode d’expression, ainsi que les organes qui détiennent ces moyens et diffusent l’information.
Fondements :
- loi du 29 juillet 1881
+ fondements de la liberté d’expression :
- Art. 11 DDHC
- Art. 10 CEDH
- Art. 25 PIDCP

I- La teneur de la liberté de la presse

Liberté de la presse : liberté, dont la garantie concourt au respect de l’objectif de valeur constitutionnel
de pluralisme des courants d’expression : CC, 1984 et de transparence, la presse jouant le « rôle
indispensable de “chien de garde” de la démocratie : CEDH 1991 Sunday Time c Royaume-Un : 2
volets :
- liberté du destinataire de l’information : liberté de choix du support de l’information ;
- liberté de l’émetteur de l’information : liberté de diffusion (loi dite « Bichet » de 1947), qui
suppose la garantie d’un droit d’accès aux réseaux de distribution

Ainsi, ils bénéficient d’une protection du secret de leurs sources : CEDH Goodwin 1996.

II- l’exercice de la liberté de la presse

A) Les modalités
D’abord, les publications ne peuvent faire l’objet d’une autorisation préalable.
Ensuite, le législateur a l’obligation de respecter les situations acquises (effet « cliquet »).

B) Les limites
Il existe une interdiction de la soumission de la publication à l’obtention d’une autorisation préalable
(CEDH, 2001, Association Ekin c. France), ce qui ne fait toutefois pas obstacle à une obligation de
déclaration préalable permettant l’identification des responsables en cas d’infraction.
Les limites actuelles à la liberté de la presse résident dans la mise en place d’une répression des « abus
» de liberté.
Les délits de presse : délits commis par voie de presse, par la parole, l’image ou l’affichage :

- diffamation [art. 30 de la loi de 1881] : toute allégation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur
ou à la considération de la personne.
Une défense peut être l’exception de vérité ou la bonne foi.
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Sans exception de vérité il peut démontrer sa bonne foi : 3 critères : débat d’intérêt général + base
factuelle suffisante : objectivité suffisante + limite admissible dans la critique.

- injure (art. 29 loi de 1881) : toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui
ne renferme l'imputation d'aucun fait

Les restrictions sont également justifiées par la protection de l’ordre public :


Ordre public matériel
- la provocation à la commission de crimes ou délits : le propos peut être pénalement réprimé
lorsqu’il est suivi d’effets (comportements délictuel visé par le texte).

- l’apologie : ici il s’agit d’accréditer l’idée que certains comportements ne sont pas véritablement
punissables
Ex : Crim 1991 : un disque publié par un parti politique, accompagné d’un commentaire : Hitler est arrivé
par le pouvoir démocratique : Crim sanctionepar apologie de crimes de guerre.

Ordre public immatériel


- Notamment la lutte contre le racisme / discrimination : CEDH 1974 Giersild c Danemark

En France on a un décret-loi de 1939 qui incrimine la diffamation et injure assorti d’un élément raciste
avec la volonté d’inciter à la haine. AUJD la loi de 1881 a été amendée et permet de réprimer les
discriminations.

- Interdiction du révisionnisme : loi Gayssot de 1990 : réprime pénalement la contestation de


l’existence d’un ou plusieurs crimes contre l’humanité : conforme à la Constitution : QPC
2016

De tels propos ne peuvent pas être protégés par la liberté d’expression : la CEDH 2003 : fait application
de l’article 17 CESDH sur l’abus de droit.

Une saisie permet au juge de réprimer une publication d’ores et déjà effectuée en empêchant sa
diffusion par la suite. Il s’agit donc d’un mécanisme de contrôle a posteriori

En cas de délit de presse la victime peut obtenir des DI exercer un droit de réponse à la publication
litigieuse (art. 12 de la loi de 1881).
NB : la loi de 1881 est d’application exclusive (exclusion de 1240)

La liberté de communication audiovisuelle


Fondements :
- art. 10 de la CEDH ; CEDH, 2020, Kharitonov c. Russie
- art. 11 de la DDHC ; CC, 1982, Communication audiovisuelle

- art. 1er de la loi du 29 juillet 1982

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Le contenu de la liberté :
Cette liberté, qui aux objectifs de pluralisme et de tolérance et qui est protégé sous deux angles :

- liberté du destinataire de la communication : liberté de choix de l’information et droit d’accès


au support ;

- liberté de l’émetteur de la communication : liberté de s’exprimer par le biais de techniques


audiovisuelles (radio, télévision, internet), mais qui n’est pas une liberté absolue, de sorte
que son exercice peut être soumis à des conditions proportionnées à un but légitime :

o régime d’autorisation préalable : la possibilité et donc l’autorisation d’émettre


est contingentée à l’attribution d’une fréquence, la décision y étant relative devant être motivée et
susceptible de recours (CEDH, 2007, Glas Nadeja Eood c. Bulgarie);

ocontrôle de l’ARCOM (ex CSA) : l’ARCOM accorde et retire les autorisations


d’émettre et a un pouvoir de sanction pour assurer le respect par les opérateurs de leurs obligations et
du pluralisme des courants d’expression.

CEDH 2022 : recherche d’un juste équilibre entre liberté éditoriale et pluralisme politique

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FICHE 51 – LA LIBERTE ARTISTIQUE


« L’art est à l’homme ce que la nature est à Dieu » (V. Hugo),

La liberté artistique
Liberté artistique : liberté de créer et de diffuser des œuvres de l’esprit, quelle que soit sa forme (écrite,
orale, picturale)

I- Les fondements

- art. 10 de la CEDH
- art. 15 du PIDCP

La liberté de création artistique, ainsi que la liberté d’accès aux oeuvres culturelles, sont des libertés
fondamentales au sens du référé-liberté de L. 521-2 du CJA : CE 23 décembre 2020.

II- Une portée relative


A) La protection par la propriété artistique
La protection des intérêts moraux et matériels découlant de toute production scientifique, littéraire ou
artistique dont il est l’auteur est un droit nécessaire à la libre création artistique.
Découle ainsi un droit à la paternité sur l’oeuvre protégé par l’article L. 121-1, al. 1er du CPI.

En outre, la propriété intellectuelle doit être regardée comme un droit fondamental en ce qui concerne
ses aspects patrimoniaux : la Cour EDH considère que le droit au respect des biens garanti par l’article 1
du Protocole 1 à la Convention, qui s’applique à la propriété intellectuelle (CEDH. 2007)

B) La propriété contre la liberté artistique


Le droit d’auteur n’est pas un droit absolu et la protection d’une œuvre de l’esprit doit parfois être
mise en balance avec la protection des droits et libertés d’autres personnes, tels que :
- la liberté d’expression artistique de l’auteur d’une œuvre composite, c’est-à-dire d’une œuvre
empruntant des éléments originaux à une œuvre de l’esprit protégée par le droit d’auteur
(CEDH, 2013, Ashby Donald et autres c. France) ;

- le droit au respect de la vie privée de la personne dont les éléments de l’intimité et de la vie
personnelle ont été relatés dans une œuvre de l’esprit protégée par le droit d’auteur.

La réglementation des spectacles


I- Les spectacles vivants
Le théâtre bénéficie désormais d’un régime de liberté, sous la limite de l’exercice des pouvoirs de
police administrative générale en cas de trouble à l’ordre public (CE, 19 mai 1933, Benjamin ;, 2014,
M’bala M’bala (affaire Dieudonné) : spectacle aux propos antisémites, provocation à la haine raciale, donc
arrêté préfectoral interdisant ce spectacle, CE valide car risques sérieux de trouble à l'OP

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II- Le cinéma
Le cinéma fait l’objet d’une police spéciale, qui repose sur un régime d’autorisation au niveau national
(art. L. 211- 1 du code du cinéma et de l’image) :
Pour pouvoir diffuser un film, il faut obtenir un visa délivré par le ministre de la culture. La décision
ministérielle est prise après avis d’une commission de classification des oeuvres cinématographiques.

Le CE exerce un contrôle a posteriori sur l’octroi des visas d’exploitation.


L’autorité de police administrative locale a la possibilité d’interdire la diffusion d’un film sur son
territoire alors qu’il aurait reçu un visa d’exploitation nationale (CE 1959, Sté Les Films Lutétia)

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FICHE 52 – LA PROTECTION DES LANCEURS D’ALERTE

La notion de lanceur d’alerte


Lanceur d’alerte : personne physique qui signale ou dévoile, sans contrepartie financière (précisé depuis
2022, avant c’était ‘de manière désintéressée’) et de bonne foi, les informations détenues par son
employeur, dont il a pris connaissance du fait de ses fonctions et qui révèlent une violation grave
d’obligations internationales ou légales ou des menaces pour l’intérêt général (loi de 2022).

I- Une reconnaissance progressive

Il n’existe, à l’heure actuelle, aucun texte contraignant. Tout au plus note-t-on l’existence d’une
recommandation du Comité des ministres du Conseil de l’Europe relative à la protection des lanceurs
d’alerte adoptée en 2014. Ce faisant, il est possible de trouver dans la liberté d’expression le fondement
de « l’alerte éthique » (CEDH, 2008, Guja c. Moldova)

C’est surtout la loi Sapin 2 de 2016 qui a donné une définition du lanceur d’alerte et organisé un statut
protecteur.

Le statut du lanceur d’alerte


Liberté du lanceur d’alerte : protection de la liberté d’expression, et plus particulièrement de la liberté de
diffusion d’informations, exercée par le lanceur d’alerte (CEDH).
I- La procédure d’alerte
La liberté d’expression n’étant pas une liberté absolue, son exercice peut être encadré, à condition que
les étapes de la « procédure d’alerte » ainsi prévue soit proportionnées à un but légitime, telle que la
protection de la liberté d’entreprendre ou le droit de propriété intellectuelle de l’employeur ; la
conciliation entre les droits du lanceur d’alerte et ceux de son employeur a été opérée par le législateur
français dans la loi dite « Sapin 2 », qui prévoit en son article 8, 3 étapes au cours desquelles l’identité de
l’auteur du signalement et des personnes visées par celui-ci reste confidentielle :

- Étape 1 : information du signalement d’une alerte qui entend être donnée au supérieur
hiérarchique, direct ou indirect, à l’employeur ou à un référent désigné par lui ;

- Étape 2 : en l’absence de diligence prise dans un délai raisonnable, le signalement peut être
adressé à l’autorité judiciaire, administrative ou aux ordres professionnels ;

- Étape 3 : à défaut de traitement par les organismes mentionnés dans un délai de 3 mois, le
signalement peut être rendu public.

Dérogation possible : étape 2 et 3 directement en cas de danger grave et imminent ou en cas de risque
de dommages irréversibles

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II- La protection du lanceur d’alerte

La protection du lanceur d’alerte est essentiellement assurée par deux dispositifs issus de la loi Sapin 2.

Protection du lanceur d’alerte : la liberté d’expression du lanceur d’alerte doit pouvoir être exercée de
manière concrète et effective, de sorte qu’il doit être protégé contre les mesures susceptibles de le
dissuader d’opérer le signalement (CEDH), ce que visent deux dispositifs légaux :

Le premier est une immunité pénale : l’article 122-9 du code pénal : le lanceur d’alerte ne peut pas être
tenu pour responsable de la violation d’un secret protégé par la loi à 2 conditions :
1) La divulgation de ce secret est nécessaire et proportionnée à la sauvegarde des
intérêts en cause
2) Elle a été réalisée dans le respect de la procédure de signalement

Le second est la protection contre les représailles éventuelles : interdiction d’écarter la candidature à un
emploi, à un stage ou à une formation et de sanctionner, licencier ou de retenir des mesures
discriminatoires à l’encontre d’un lanceur d’alerte : art. L. 1132-3-3 du code du travail

- CEDH : protège lanceur d’alerte sur fondement de l’article 10 liberté d’expression à condition qu’il soit
de bonne foi, sinon peut être attaqué en diffamation

Grandes affaires impliquant un lanceur d’alerte :

> L’affaire Snowden (programme de surveillance de la NSA, agence de sécurité américaine) : a dénoncé
un système d’écoute en 2013 (mais il est recherché par les USA et risque 30 ans de prison…)

> L’affaire Stéphanie Gibaud (UBS, grande banque) : a dénoncé auprès de l’inspecteur du travail puis du
procureur de la république des pratiques d’évasion fiscale

> L’affaire des Panama Papers, 2016 : révélation de montages offshore par des milliers de chefs d’Etats,
de célébrités, lanceur d’alerte encore inconnu

Remarque sur loi de 2022 : met en place mesures de protection renforcée du lanceur d’alertes contre :

> les représailles : cette loi étend l’irresponsabilité des lanceurs d’alerte (ne pourra être attaqué ni
civilement ni pénalement)
> les procédures baillon : l’amende civile des procédures baillon est portée à 60 000 euros.
> défenseur des droits au cœur du nouveau dispositif : lanceurs d’alerte peuvent directement lui adresser
un signalement

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 16 : LES LIBERTÉS ÉCONOMIQUES
ET SOCIALES

THEME 14 : LES LIBERTES ECONOMIQUES ET SOCIALES

FICHE 53 – LA PROTECTION DE LA PROPRIETE


Droit de propriété : droit de jouir, d’user et de disposer d’un bien, meuble ou immeuble (propriété
matérielle), ou des attributs moraux et patrimoniaux découlant du droit d’auteur attaché à une
œuvre de l’esprit (propriété intellectuelle) (CC, 2015, Société Mutuelle des transports assurances) ;
Fondements :

- art. 1er du Premier Protocole additionnel à la CEDH


- art. 2 et 17 de la DDHC : la propriété est l’un des « droits naturels et imprescriptibles de
l’homme » et un « droit inviolable et sacré » ; CC, 1982, Loi de nationalisation)
- art. 544 du code civil

La Cour EDH condamne les législations internes qui privent d’effectivité le droit de propriété en
pratique. Elle impose aux États l’obligation positive de protéger les biens (CEDH 2004, Oneryildiz c/
Turquie) et de prévoir des modalités procédurales adéquates (CEDH 2020 c. Moldova).

L’étendue du droit de propriété : QPC 2013 : un permis de recherche exclusif de gisements


d’hydrocarbure n’est pas un bien faisant l’objet d’un droit de propriété. MAIS CEDH a une position
différente, considère qu’une licence d’exploitation est patrimonialisée.
CE reconnait qu’un droit de créance indemnitaire constitue un bien.

La limitation du droit de propriété


Limitation : restriction de l’utilisation d’un bien, sans modifier le titulaire du droit de propriété y afférant
Le CC vérifie sont conformes à l’article 2 de la DDHC :
1) Que la limitation répond à un objectif d’intérêt général
2) Proportionnalité de la limite

Exemple : des détenteurs d’actions de sociétés cotées atteignant un certain nombre de parts se sont
plaints car ils étaient obligés de déclarer ces actions sous peine d’être privé de droit de vote pendant 2
ans -> ont critiqué sur fondement du droit de propriété et de son caractère absolu, mais CC rappelle que
la disposition attaquée poursuit un but d’intérêt général (éviter les prises de participation occultes dans
les sociétés cotées) + limite encadrée dans le temps donc pas disproportionné

3) Mais il vérifie aussi que la limitation ne porte pas atteinte à la substance du droit de propriété :
il ne faut pas qu’elle soit d’une gravité telle qu’elle rendrait le droit de propriété ineffectif (par exemple
régime d’autorisation préalable de cession d’immeubles en Polynésie fr)

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 16 : LES LIBERTÉS ÉCONOMIQUES
ET SOCIALES
La privation du droit de propriété
Privatisation : transfert, de manière autoritaire et définitive, de la propriété d’un bien de son propriétaire
initial à un autre, la conséquence étant de modifier le titulaire du droit de propriété en en dépossédant le
premier propriétaire, ainsi privé de l’entièreté de son droit de disposer de son bien, en cas de :

Nationalisation : transfert autoritaire et définitif de la propriété privée à l’État, soumis à :


1) une indemnisation juste et préalable du propriétaire (CC, 1982, Loi de nationalisation) et
2) à ce que la propriété ait acquis les caractères d’un service public (al. 9 du Préambule de 1946 ; CC, 1984,
Loi relative à l’activité et au contrôle des établissements de crédit) ;

Expropriation : privation de la propriété immobilière pour cause d’utilité publique,


1) devant être justifiée par une cause reconnue dans la déclaration d’utilité publique, qui fait l’objet d’un
contrôle du juge administratif mettant en balance les avantages et inconvénients de l’expropriation pour
en déterminer la légalité (CE, 1971, Ville Nouvelle Est)
2) dont le transfert de propriété, décidé par le juge judiciaire, doit donner lieu à indemnisation du
propriétaire par l’État ;

Remarque : il existe une procédure d’urgence dans laquelle la prise de possession a lieu avant le
versement d’une indemnité -> CC a validé

Réquisition : opération par laquelle les autorités civiles ou militaires exigent d’une personne, qui serait
ultérieurement indemnisée, une prestation de service, la fourniture d’objets mobiliers ou l’abandon de
la jouissance d’un immeuble en vue d’assurer le fonctionnement des services publics ou la satisfaction
des besoins publics.

Droit de préemption :
Droit de certaines personnes d’acquérir un bien mis en vente par son propriétaire, en bénéficiant d’une
préférence à tout autre acheteur potentiel,
Le CC vérifie que la privation du droit de propriété est bien motivée par une nécessité publique ou, plus
largement, une utilité publique, et qu’elle donne lieu à une indemnisation juste et préalable.

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MODULE IV – LES LIBERTÉS FONDAMENTALES THÈME 16 : LES LIBERTÉS ÉCONOMIQUES
ET SOCIALES
FICHE 54 – LA LIBERTE D’ENTREPRENDRE ET DE CONTRACTER

La liberté d’entreprendre
Liberté d’entreprendre : liberté d’accéder à une profession ou à une activité économique et liberté dans
l’exercice de cette profession ou de cette activité économique.

Fondements :
- CC, 1982, Loi de nationalisation qui la déduit de l’art. 4 de la DDHC
- liberté fondamentale au sens du référé-liberté : CE , 2001, Commune de Montreuil-Bellay) ;

Garantie de la liberté d’entreprendre :


Effectivité : l’employeur, pour assurer la bonne marche de l’entreprise, peut déterminer si et quand il
est opportun de procéder à un licenciement pour motif économique (CC, 2002, Loi de modernisation
sociale).

L’absence de caractère absolu de la liberté d’entreprendre permet au législateur de l’encadrer sous


réserve que l’atteinte qu’il lui porte soit motivée par un motif d’intérêt général ou une autre exigence
constitutionnelle et qu’elle ne soit pas disproportionnée (DC 2001, Loi relative à l’archéologie
préventive)

Limites : le Conseil constitutionnel contrôle l’absence de disproportion de l’atteinte au regard de


l’objectif poursuivi par le législateur, tel l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre
public qui implique, au titre de la salubrité, la protection de la santé publique (CC, 1991, Loi relative à la
lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme) ou la protection de l’environnement (CC, 2013, Société
Schuepbach Energy LLC).

La liberté contractuelle
Liberté contractuelle : liberté de choisir de contracter, du contenu du contrat, du cocontractant ;

Fondement :
- CC, 2000, Loi de financement de la sécurité sociale pour 2001 la déduit de l’art. 4 de la DDHC) ;

Liberté dont la garantie est assurée par le truchement d’autres droits et libertés, tels que la liberté
d’association (CEDH, 2006, Sorensen et Rasmussen c. Danemark) et le droit au respect des biens (CEDH,
2006, Hutten-Capska c. Pologne) ;

Liberté qui n’est pas absolue, dont l’exercice peut faire l’objet d’atteintes proportionnées, c’est-à-dire
motivée par un motif d’intérêt général, tel l’objectif de sauvegarde de l’ordre public (CC, 2012,
Association Temps de Vie), et qui n’aille pas au-delà de ce que la réalisation de l’objectif poursuivi
requiert (CC, 2013, Loi relative à la sécurisation de l’emploi).

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ET SOCIALES

FICHE 55 – LA LIBERTE D’ASSOCIATION

Association : art.1er de la loi du 1erjuillet 1901 : convention par laquelle deux ou plusieurs personnes
mettent en commun, d'une façon permanente, leurs connaissances ou leur activité dans un but autre
que de partager des bénéfices.

pouvant prendre trois formes :


- association non-déclarée : association dont l’existence n’a pas fait l’objet d’une déclaration en
préfecture et qui n’a donc pas de personnalité juridique, mais à laquelle est reconnue une
quasi-personnalité morale lui permettant de former un recours pour contester la légalité des
actes administratifs faisant grief (CE, 1969, Canaux de la Durance).

- association déclarée : association dont l’existence a fait l’objet d’une déclaration en préfecture
et qui a ainsi acquis la personnalité juridique ;

- association reconnue d’utilité publique : association qui a demandé et obtenu une


reconnaissance officielle de sa contribution à l’intérêt général par décret en Conseil d’État.

Liberté d’association : liberté de créer – de constituer et d’enregistrer – un groupe à but associatif et


liberté d’adhérer – de rejoindre ou non – ce groupe (ex. : syndicat, parti politique) ;
Liberté fondamentale en ce qu’elle est reconnue par une norme fondamentale.co

Fondements :
- PFRLR (CC, 1971, Liberté d’association)
- art. 11 de la CEDH
- art. 12 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE
- art. 22 du PIDCP

La Cour EDH permet à un État de vérifier la licéité de l’action d’une association. La mesure restrictive doit
poursuivre un but légitime ( art. 3 de la loi du 1er juillet 1901)

La liberté de création
Liberté de création d’une association :
L’effectivité de la liberté de constitution d’une association suppose que :
- la création d’une association ne soit pas soumise à autorisation ou déclaration préalable (art. 2
de la loi du 1er juillet 1901) ;

- l’exercice par l’association des actions ressortant de son objet associatif puisse être librement
mené pour réaliser le but associatif, y compris les actions devant les juridictions et consistant à
obtenir des financements (CC, 1984, Loi modifiant la loi du 29 juillet 1982 sur la
communication audiovisuelle) ;

Des restrictions peuvent y être portées si elles sont proportionnées ; ex. : en droit français, la liberté
d’association est restreinte par l’obligation de déclaration simple, de laquelle dépend l’acquisition de la
personnalité juridique (art. 5 de la loi du 1er juillet 1901).

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L’État a l’obligation négative de ne pas porter d’atteinte disproportionnée en encadrant ou restreignant
l’exercice de la liberté d’association (ex. dissolution) : l’atteinte doit être légale – ce qui implique de
vérifier la licéité de l’action de l’association (CEDH, 1998, Sidiropoulos c. Grèce) –, poursuive un but
légitime (art. 11 § 2 de la CEDH) et soit proportionnée (CEDH, 1998, Parti communiste unifié de Turquie
c. Turquie), c’est-à-dire qu’il n’existe pas de mesure alternative qui eût été moins attentatoire (CEDH,
2013, Vona c. Hongrie) ;

Toute association doit poursuivre un but légitime.


L’article 3 de la loi du 1er juillet 1901 dispose en ce sens que « toute association fondée sur une cause ou
en vue d’un objet illicite, contraire aux lois, aux bonnes mœurs (…) est nulle et de nul effet », ce qui
entraîne la dissolution judiciaire prononcée par le juge judiciaire (article 7)

Une dissolution administrative peut être ordonnée dans les conditions prévues par la loi du 10 janvier
1936 : elle intervient alors par décret du PLR en conseil des ministres, dans le cas où les associations :
- provoqueraient à des manifestations armées dans la rue
- auraient pour but de porter atteinte à l’intégrité du territoire national ou d’attenter par la force
à la forme républicaine du Gouvernement
- auraient pour but soit de rassembler des individus ayant fait l’objet de condamnation du chef de
collaboration avec l’ennemi, soit d’exalter cette collaboration ;
- provoqueraient à la discrimination, à la haine ou à la violence envers une personne ou un
groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-
appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée, soit propageraient
des idées ou théories tendant à justifier ou encourager cette discrimination, cette haine ou cette
violence
- se livreraient, sur le territoire français ou à partir de ce territoire, à des agissements en vue de
provoquer des actes de terrorisme en France ou à l’étranger.

Le Conseil d’État entend exercer un contrôle étroit sur les décisions de dissolution d’association

La Cour EDH juge que la dissolution d’une association en raison de son idéologie raciste et xénophobe, ,
n’emporte pas violation de l’article 11 de la Convention (CEDH,2013,Vona c. Hongrie)

La liberté d’adhésion
Liberté d’adhésion à une association : liberté d’adhérer, de refuser de s’affilier et de se retirer d’une
association (CEDH, 1993, Sigurjonsson c. Islande), à laquelle des restrictions proportionnées à la
poursuite d’un but légitime peuvent être portées.

Toute personne a le droit d’adhérer à une association et de demeurer au sein de cette association. Si
une personne remplit les conditions statutaires objectives, un refus ne peut lui être opposé, ni une
exclusion prononcée

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FICHE 56 – LES LIBERTES DE REUNION ET DE MANIFESTATION


Liberté de réunion pacifique : liberté de se réunir, dans l’espace privé et public, et de manifester sur la
voie publique, pour exprimer collectivement des idées et des opinions ou faire valoir des revendications.
La liberté de réunion
Réunion : groupement momentané (≠ association) qui est organisé (≠ attroupement spontané) dans un
lieu déterminé, qu’il soit privé ou public, dans le but d’entendre l’exposé d’idées et d’opinions ou de se
concerter pour la défense d’intérêts donnés (≠ manifestation) (CE, 1933, Benjamin) ; on distingue :
La réunion privée : réunion à laquelle participent les personnes invitées nominativement, ce qui suppose
la présence physique de ces personnes au lieu déterminé ;
La réunion publique : réunion à laquelle participent des personnes conviées de manière impersonnelle
et anonyme, la réunion publique pouvant avoir lieu dans un lieu public comme privé, la présence
physique n’étant pas requise.

Liberté de réunion : liberté d’organiser et liberté de participer à une réunion.

Fondements :
- CC, 1995, Loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité qui la déduit de l’art. 11
de la DDHC (relatif à la liberté de communication des pensées et des opinions)
- art. 11 de la CEDH
- art. 12 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE
- art. 21 du PIDCP
- constitue une liberté fondamentale au sens du référé-liberté (CE, 2007, Ville de Lyon) ;

Liberté dont l’effectivité suppose le respect par l’État de son obligation négative de ne pas en entraver
l’exercice de manière disproportionnée et de son obligation positive de prendre les mesures propres à
en assurer l’exercice libre en cas d’atteinte excessive y étant ou risquant d’y être portée par des
personnes privées (CEDH, 1988).

De façon classique, les restrictions doivent être prévues par la loi (le terme loi peut aussi s’entendre d’une
disposition réglementaire régulièrement publiée) et ne sont licites que si elles sont justifiées par un
intérêt légitime et leurs modalités proportionnées au but à atteindre
Régime de la liberté de réunion : seules les réunions pacifiques sont protégées :

régime applicable aux réunions publiques :


Principe de liberté : les réunions publiques sont libres et ont lieu sans autorisation (art. 1er, loi du 30 juin
1881) ni déclaration préalable (art. 1er, loi du 28 mars 1907)

exceptions soumises à l’exigence de proportionnalité :


Interdiction de la tenue d’une réunion : le maire et le préfet peuvent interdire une réunion au titre de
leur pouvoir de police, à proportion de ce qui est nécessaire pour préserver les risques graves de
trouble à l’ordre public (CE, 1953, Conférence sur le procès Pierre Laval)

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Restrictions sur le déroulement d’une réunion : les réunions ne peuvent pas avoir lieu sur la voie

publique (art. 1er de la loi de 30 juin 1881), ce qui est justifié par la prévention des risques de trouble
à la circulation.

régime applicable aux réunions privées :


Aucune obligation formelle ou substantielle, du fait qu’elles sont théoriquement inoffensives pour
l’ordre public ; mais rien ne s’oppose à ce qu’un maire ou un préfet, au titre de leur pouvoir de police
administrative, en interdise la tenue si cela est justifié et proportionné à la protection de l’ordre public.

La liberté de manifestation
Manifestation : rassemblement de personnes qui utilisent la voie publique dans le but d’exprimer une
volonté collective consistant en l’affirmation publique d’une opinion, de convictions ou de revendications.
I- Une liberté protégée
Fondements :
- CC, 1995, Loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité qui la déduit de l’art. 11
de la DDHC : droit d’expression collective des idées et opinion (modalité de la liberté
d’expression)
- art. 11 de la CEDH
- art. 12 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE)
- art. 21 du PIDCP
- est une liberté fondamentale au sens du référé-liberté (CE, 2007, Solidarité des français) ;

Liberté dont l’effectivité suppose le respect par l’État de son obligation négative de ne pas en entraver
l’exercice de manière disproportionnée et de son obligation positive de prendre les mesures propres à
assurer la sécurité des participants (CEDH, GC, 2012, Austin c. Royaume-Uni) pour éviter qu’il ne soit
dissuadés de participer à la manifestation.

La manifestation se distingue de l’attroupement. L’attroupement est défini par le code pénal comme «
[t]out rassemblement de personnes sur la voie publique ou dans un lieu public susceptible de troubler
l’ordre public » (article 431-1). Il suppose un élément intentionnel (la volonté de troubler) qui n’est pas
constitué par le simple fait que la manifestation a été interdite ou par le fait qu’elle gêne la circulation. La
manifestation se distingue aussi de la grève.

II- Une liberté encadrée

Le décret-loi du 23 octobre 1935, disposait que « [t]ous cortèges, défilés et rassemblements de personnes
et, d’une façon générale, toutes manifestations sur la voie publique », sauf les sorties conformes aux
usages locaux, sont soumis à une obligation déclarative (L 211-2 CSI)
Les dispositions ont été reprises au code de la sécurité intérieure (articles L. 211-1 à L. 211-4 ; articles L.
211-12 à L. 211-14).
Régime de la liberté de manifestation : seules les manifestations pacifiques sont protégées.
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A) Les mesures préventives

- la tenue d’une manifestation est soumise à une obligation déclarative (art. 211-1 du code de
la sécurité intérieure) ;
- si la manifestation est de nature à troubler l’ordre public, l’autorité administrative peut
l’interdire par arrêté notifié aux signataires de la déclaration, à condition que cette d’interdiction soit
proportionnée, c’est-à-dire qu’il n'existe pas de moyen moins contraignant que l’interdiction pour
garantir l’ordre public (CE, 1997, Association « Communauté tibétaine en France »).

l’article R. 645-14 du code pénal punit d’une amende contraventionnelle de 5ème classe le fait pour une
personne, au sein ou aux abords immédiats d’une manifestation sur la voie publique, de dissimuler son
visage afin de ne pas être identifiée dans des circonstances faisant craindre des atteintes à l’ordre
public.

EXCEPTION : manifestations conformes aux usages locaux ou lorsque la dissimulation est justifiée par un
motif légitime (ex : motif médical, prescription réglementaire de port du casque pour les utilisateurs de deux-
roues motorisés, etc.).

B) Les mesures répressives


Incrimination des actes de violence et de dégradation (art. 18-I de la loi de 1995 d’orientation et de
programmation relative à la sécurité), du port d’armes lors d’une manifestation (art. 431-10 du code
pénal), de l’outrage public à l’hymne national ou au drapeau tricolore (art. 433-5-1 du code pénal), de la
tenue d’une manifestation n’ayant pas ou mal été déclarée ou ayant été interdite (art. 431-9 du code
pénal).

Enfin, l’organisation d’une manifestation n’ayant pas fait l’objet d’une déclaration préalable, ayant été
interdite ou résultant d’une déclaration inexacte de nature à tromper les autorités est sanctionnée de 6 mois
d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende (article 431-9 du code pénal).

En revanche, participer à une manifestation non déclarée n’est pas constitutif d’une infraction (Crim.,2022).
En cas de trouble à l’ordre public, le code pénal prévoit la possibilité pour les forces de police de dissiper un
attroupement après deux sommations de se disperser demeurées sans effet adressées par l’autorité
compétente.

C) Les mesures réparatrices

Depuis la loi de 1983, l’État « est civilement responsable » (sans faute) des dégâts et dommages
corporels et matériels résultant des attroupements, la responsabilité étant engagée même si
l’attroupement n’a pas un caractère contestataire (CE, Sect., 13 décembre 2002)

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FICHE 57 – LA LIBERTE SYNDICALE ET LE DROIT DE GREVE


La liberté syndicale
Liberté syndicale : liberté de créer un syndicat et liberté d’adhérer ou non à un syndicat, qui est
une déclinaison particulière de la liberté d’association ;
Fondements :
- CC, 1989, Loi modifiant le code du travail qui l’élève au rang de liberté de valeur
constitutionnelle
- CEDH 1975, Syndical nationale de la police belge c. Belgique qui la déduit de l’art. 11 de la
CEDH
- constitue une liberté fondamentale au sens du référé-liberté CE, 2007, Syndicat CFDT Interco

Liberté dont l’effectivité suppose que le syndicat, une fois créé, puisse agir pour assurer la défense des
intérêts professionnels pour laquelle il a été créé, ce qui suppose :
- la possibilité d’agir en justice : un syndicat peut intenter une action personnelle en vertu de la
personnalité juridique dont il jouit (art. L. 2132-3 du code du travail), une action dans l’intérêt
de la profession (art. L. 2132-3 du code du travail) et une action en substitution de la
personne sujette à un licenciement pour motif économique sans avoir à justifier d’un mandat
(art. L. 1235-8 du code du travail)

- la possibilité de mener des négociations collectives avec l’employeur (CEDH, 2008, Demir et
Baykara c. Turquie), mais elle n’est pas un droit absolu et le droit français en conditionne
l’exercice à un critère de représentativité du syndicat ;

- la faculté d’organiser et de conduire la grève, mais elle n’est pas un droit absolu et son
exercice peut être restreint à condition que la restriction soit proportionnée à un but légitime,
ce qui suppose que les restrictions au droit de grève définissent « aussi clairement et
étroitement que possible les catégories » de personnes affectées par elles (CEDH, 2009, Enerji
Yapi-Yol Sen c. Turquie) ;

- la possibilité de développer des activités au sein de l’entreprise : droit pour les membres d’un
syndicat d’exprimer devant l’employeur leurs revendications au sein de leur entreprise
(CEDH, GC, 2011, Palomo Sánchez c. Espagne).

Régime de la liberté de fonder un syndicat :


conditions de fond : les syndicats doivent, en vertu du principe de spécialité, être créés entre des
personnes qui exercent des professions identiques, similaires ou connexes (art. L. 2131-1 du code du
travail) et doit avoir pour objet la défense des intérêts matériels et moraux, tant collectifs
qu’individuels, de ces personnes (art. L. 2131-2 du code du travail) à condition qu’ils soient licites (Ch.
mixte, 10 avril 1998).

conditions de forme : pour acquérir la personnalité juridique, les statuts du syndicat doivent être
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ET SOCIALES
déposés, avec la liste nominative des dirigeants, auprès de la mairie.
Régime de la liberté d’adhérer à un syndicat :
liberté positive d’adhérer :
- liberté d’adhérer – de devenir et de rester membre – au syndicat professionnel de son choix,
déclinaison particulière de la liberté contractuelle qui postule la liberté de choix de son cocontractant
qui est applicable au contrat syndical ;

- l’effectivité de cette liberté suppose que l’adhésion à un syndicat ne puisse pas être la cause

d’un refus d’embauche (CEDH, 2002, Wilson c. Royaume-Uni) ou d’une mesure disciplinaire (art. L.
1132-1 du code du travail), sans quoi le salarié pourrait être dissuadé d’exercer sa liberté syndicale et ce
dont il découle le droit de cacher à son employeur son appartenance syndicale (Soc., 8 juillet 2009).

liberté négative de ne pas adhérer :


- liberté de n’adhérer à aucun syndicat (CEDH, 2006, Sørensen et Rasmussen c. Danemark ; CC,
1983, Loi relative à la démocratisation du secteur public) ;

- l’effectivité de cette liberté suppose que soit prohibée toute menace ou contrainte exercée
en vue d’inciter le travailleur à se syndiquer, à l’instar des clauses qui imposent à un
employeur de n’engager que des salariés déjà syndiqués ou qui s’engagent à le devenir (CEDH,
1981, Young, James et Webster c. Royaume-Uni).

Le droit de grève
Droit de grève : liberté de cesser le travail exercé, de manière collective et concertée, en vue d’appuyer
des revendications professionnelles.
Liberté de chaque travailleur de choisir ou non de prendre part à la grève organisée, qui sont des
déclinaisons particulières de la liberté de réunion et de manifestation (CEDH, 2010, Trofimchuk c.
Ukraine) et de la liberté syndicale (CEDH, 2009, Enerji Yapi-Yol Sen c. Turquie) ;
Fondements :
- CC, 1979, Loi modifiant les dispositions de la loi « grève à la radio-télévision » l’élève au rang
de principe de valeur constitutionnelle
- CEDH, 2010, Trofimchuk c. Ukraine qui la déduit de l’art. 11 de la CEDH
- liberté fondamentale au sens du référé-liberté (CE, 2003, Mme Aguillon et autres).

Liberté qui n’est pas absolue et peut ainsi faire l’objet de restrictions proportionnées à la poursuite d’un
motif d’intérêt général (CC, 1980, Loi sur la protection et le contrôle des matières nucléaires), ce qui
peut supposer d’interdire l’exercice de leur droit de grève aux agents dont la présence est
indispensable pour assurer le fonctionnement des éléments du service dont l’interruption porterait
atteinte aux besoins essentiels du pays (CC, 1979, Loi modifiant les dispositions de la loi « grève à la
radio-télévision).

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Régime du droit de grève


Conditions pour l’organisation d’une grève :
1) grève dans le secteur public : obligation de préavis de 5 jours, de sorte à concilier droit de grève
et principe de continuité du service public ;

2) grève dans le secteur privé: aucun formalisme

Conséquence de l’organisation d’une grève :


- suspension de la relation de travail : suspension de l’obligation pour le salarié de fournir sa
prestation de travail et de l’obligation pour l’employeur de verser un salaire, sans que cela ne permette
à l’employeur de prendre ou prévoir des primes discriminatoires (art. L. 2511-1, al. 2 du code du travail)
;

- en cas d’infractions commises par les grévistes : le délit d’atteinte à la liberté du travail est
une
faute lourde permettant de licencier le gréviste ; les séquestrations, les situations d’occupation et les
piquets de grève (empêcher les autres d’accéder à l’entreprise) peuvent justifier l’expulsion des grévistes ; la
responsabilité pénale et civile des grévistes peut être engagée.

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TABLEAU DE REFLEXION

Obligations négatives Obligations positives

Atteinte par omission sauf


fardeau insupportable et
excessif.

Ex. français enfermé dans


camp en Syrie pcq était parti
Droits absolus Si atteinte, violation avec un terroriste. Mais droit
absolu de ne pas subir
traitements inhumains et
dégradants. Etat fr devrait
donc sauver la personne. Est-ce
que obligation de rapatrier ?
Si constitue un fardeau
insupportable et excessif, non.
Et donc pas violation du droit.

Atteinte par omission, vérifier


Si atteinte, vérifier que but si rupture du juste équilibre.
légitime + triple test
(proportionnel) Exemple si documentaire
Droits non absolus Netflix sur Pedro qui a droit à
la vie privée : si documentaire
large qui l’inclue, serait ok /
mais si vrmt axé sur lui et que
l’humilie, etc., sera jugé
d’atteinte

Sur le fardeau insupportable et excessif : est discuté en ce moment car recours devant CEDH concernant
femmes et enfants français de djihadistes actuellement détenus en Syrie par les forces kurdes.

DONC on voit que ce n’est pas pcq atteinte au droit qu’il a été méconnu. La réflexion va plus loin que ça.

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