113 - Diouf Mendy Bah
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RÉSUMÉ La filière ovine occupe une place importante au Sénégal. Tout au long de
l’année, le sous-secteur ovin doit satisfaire une demande croissante particulièrement
durant la période de la fête d’Eid El Kébir. Ce qui est à l’origine des spéculations des
prix sur le marché des moutons au Sénégal. Pour permettre à la population d’avoir
accès aux moutons, le Sénégal mise sur les importations à travers le Mali et la
Mauritanie. De ce fait, nous nous sommes intéressés à la dynamique des prix sur ce
marché pour analyser les facteurs qui déterminent les fluctuations des prix. Nous
utilisons deux approches : le protocole Overview, Design concepts, Details pour
décrire le fonctionnement du marché et comprendre les interactions entre les
différents acteurs du marché ; et le modèle Autoregressive Distributive Lags qui
permet d'analyser la relation entre l'offre et les prix de moutons au Sénégal. Les
principaux résultats montrent qu’à long terme comme à court terme les prix des
moutons n'ont pas d'impact significatif sur l'offre. Ce résultat peut s'expliquer par la
méthode de fixation des prix du mouton qui se fait par une négociation directe entre
l'offreur et le demandeur et aussi par la taille de notre échantillon qui est
relativement limitée.
1- Introduction
L’élevage est un secteur qui occupe près de 60% des ménages agricoles et contribue à
la richesse du pays à hauteur de 4,6% du produit intérieur brut (Agence nationale de la
statistique et de la démographie (ANSD), 2018). Ce secteur touche la majorité des
familles rurales. Il est réparti aujourd’hui sur l’ensemble du territoire y compris dans
la capitale Dakar et sa région qui concentre près du cinquième de la population totale.
Cette forte densité s’explique par les effets combinés de l’accroissement naturel de la
population et de la migration.
La filière ovine occupe une place importante et joue un rôle socio-économique très
important. En 2014, l’effectif des ovins est estimé à 6 294 000 soit 38% du cheptel
sénégalais (ANSD, 2018). La capitale Dakar représente le principal pôle de
consommation et sa demande globale tire et oriente l’ensemble de la filière.
Cependant, la région de Dakar n’a pas une vocation pastorale faute d’espace, mais
néanmoins, la région est le principal centre de commercialisation et de consommation
de moutons. La demande annuelle moyenne est estimée à 719 878. Ainsi à l’approche
de la fête de la Tabaski, la demande en moutons est exceptionnellement forte et ne
cesse d’augmenter d’année en année. Pour répondre à cette demande, des flux de
moutons proviennent d’une part de l’intérieur du pays notamment de la zone sylvo-
pastorale (Dahra, Linguère), de la zone nord (Matam, Dioum, Ourossogui, Galoya) et
de la zone est (Missirah, Tamba, Kahone, Kaolack) et d’autre part de l’extérieur du
pays à travers le Mali et la Mauritanie. Ces transits pour approvisionner Dakar
impliquent des charges supplémentaires et ont des répercussions sur les prix observés
sur les marchés. L’objectif de cet article est d’expliquer le fonctionnement du marché
des moutons et de comprendre la relation qui existe entre l’offre de moutons et les
prix. Pour ce faire, nous allons baser notre analyse sur l’approche de système multi-
agent qui permet de comprendre les interactions entre les agents du marché de la
production à la commercialisation et grâce à la modélisation ARDL voir le type de
dynamique qui existe entre l’offre et les prix.
2- Faits stylisés
La fête de la Tabaski est un événement important de la religion musulmane. Elle est
célébrée en sacrifiant des moutons selon les prescriptions islamiques. Ainsi à
l’approche de la fête, la demande en moutons est exceptionnellement forte.
L’offre nationale est insuffisante d’où le recours à des importations massives du Mali,
de la Mauritanie voire du Niger et tourne autour de 56% de la demande.
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¿
niveau de production en l’absence de coûts d’ajustement q t et le niveau des prix
anticipés pat . L’équation (9) est introduite dans l’équation (8). On obtient:
γ
q t−qt −1=δ (α 1 + α 2 ( p + ε )+α 3 z t +ut −qt −1 )+ v t (13)
1−(1−γ ) L t −1 t
Cette forme développée et réduite permet d’obtenir la quantité observée en fonction
des variables décalées, des prix décalés et des autres variables.
q t=π 1 + π 2 p t−1 +π 3 q t−1 + π 4 q t−2 +π 5 z t + π 6 z t−1 + μt (14)
Avec π i=1 , ..., 6 les coefficients de la forme réduite.
π 1=α 1 δγ
π 2=α 2 δγ
π 3=(1−δ )+(1−γ )
π 4 =−(1−δ )(1−γ )
π 5=α 3 δ
π 6=−α 3 δ (1−γ )
4- Méthodologie économétrique
Nous utilisons l’approche Auto Regressive Distributive lags (ARDL) de co-
intégration développée par Pesaran et al. (2001) pour tester l’existence d’une relation
de long terme entre les variables caractérisées par un ordre d’intégration différent. Il
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s’agit de test des limites (bound test) pour une relation de long terme dans un modèle
autorégressif à retards échelonnés ARDL. Nous adopterons cette approche pour
analyser la relation dynamique entre la Production et le prix des moutons au Sénégal.
Cette approche est plus adaptée aux échantillons de petite taille et offrant la possibilité
d’étudier en même temps la dynamique de long terme et les ajustements de court
terme. La démarche consiste en premier lieu, à effectuer des tests de racine unitaire
pour les variables à l’aide des tests de Augmented Dickey Fuller (Dickey et Fuller,
1981) pour étudier leur stationnarité et leur degré d’intégration ; en second lieu, à
analyser le modèle en utilisant la procédure ARDL en vue d’analyser la dynamique de
court et de long terme. La présence de relation de long terme entre les variables est
obtenue en calculant les F-statistiques testant la signification des niveaux décalés des
variables sous la forme de correction d’erreur du modèle ARDL. Le modèle s’écrit:
p p
Δ qt =α 0+ ∑ δ i Δqt −i+ ∑ γ i Δ p t−i + β 1 q t−1 + β 2 pt −1+ ε t (15)
i=1 i=1
des demandeurs. Cependant, il peut y avoir entente c’est dire un accord entre les
producteurs. L’objectif est de limiter ou de supprimer la concurrence sur le marché.
Dans ce fait, les producteurs obtiennent le contrôle du marché. Il vendent leurs
produits à des prix plus élevés que ceux dans la situation de concurrence. Les victimes
seront les consommateurs qui n’ont d’autre choix que d’accepter les prix proposés.
Les producteurs présents sur le marché disposent d’un pouvoir de marché c’est-à-dire
d’une capacité à influencer le prix et les quantités d’équilibre du fait de leur poids sur
le marché. Les pouvoirs publics sont obligés d’intervenir afin de réguler le prix d’où
dans notre cas, l’importation en quantités de moutons de la sous-région.
disponible et éviter le plus les problèmes d’espace dont sont confrontés les Dakarois.
De ce fait, nous avons supposé l’existence de bergeries à l’entrée de Dakar où l’on
rassemble les moutons avant leur présentation dans les différents marchés. Le bétail
est acheminé vers les marchés en empruntant les routes et de même pour les
consommateurs. Ces derniers apparaissent aléatoirement sur les lieux d’habitats. À
quelques jours de la fête et jusqu’au jour j, ils font le tour des marchés pour se
procurer des moutons. Les agents sont situés dans un environnement composé de
plusieurs lieux. Plusieurs variables sont également définies comme paramètre du
modèle : le nombre de moutons dans l’environnement (nombre-moutons), le nombre
de consommateurs (nombre-consommateurs), le nombre d’éleveurs (nombre-
éleveurs), le nombre de marchés (nombre-marché), la distance domicile-marché de
chaque consommateur (distance-domicile-marché), la distance ferme-marché de
chaque éleveur. Le modèle prévoit d’activer le prix d’équilibre à chaque cession de
moutons de l’éleveur au profit de consommateurs ainsi que les différentes interactions
existantes entre les différents marchés et les différents agents qui les constituent. À
noter que l’échelle spatiale du modèle n’est pas précise. La structure du modèle est
présentée de manière simplifiée dans le diagramme de classes Unified Modeling
Language (UML). Le diagramme de classe est une représentation statique des
éléments qui composent le système et de leurs relations.
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de Dakar trois principaux marchés: Dalifort Foirail, Habitats à loyer modéré (HLM) et
Parcelles assainies. Une fois les agents sur le marché, le consommateur choisit le(s)
mouton(s) qu’il désire acquérir et commence un processus de marchandage pour
trouver un prix qui satisfait les deux parties sinon le consommateur devra faire le tour
du marché en question pour trouver un mouton en adéquation avec son revenu.
les prix d’équilibre. On fait l’hypothèse que les éleveurs et les consommateurs au
cours de la journée se rendent au marché et y restent jusqu’à obtenir satisfaction avant
de revenir à leur position initiale (domicile-ferme).
5-2-2-2 Émergence
Les marchés ont une capacité d’attractivité forte à l’état l’initial. Au cours de la
simulation, la structure va changer du fait des interactions entre les agents du marché.
Nous observons un phénomène de satisfaction des agents constituant le marché en fin
de simulation.
5-2-2-3 Perception
Les consommateurs ont la capacité de percevoir les différents marchés à proximité
idem pour les éleveurs. Les consommateurs ont conscience du temps et de la période
(cérémonie, Tabaski), ce qui leur permet de décider s’il est opportun d’aller au
marché.
5-2-2-4 Interaction
Les interactions présentent dans le modèle sont les interactions entre agent
consommateur et agent éleveur, les interactions entre les différents marchés. Quand
un consommateur aperçoit un troupeau de moutons d’un éleveur, il s’en approche et
fait un choix sur le mouton qu’il souhaite acheter. Il s’ensuit un marchandage qui
aboutit à un accord sur un prix. Cependant, ils peuvent ne pas tomber d’accord sur un
prix, dans ce cas le consommateur peut se déplacer vers un autre marché ou voir un
autre éleveur établit sur le même marché que le premier.
5-2-2-5 Stochasticité
Le modèle contient une part de stochasticité à la fois dans la modélisation et dans la
dynamique. Nous avons la position des moutons et des consommations qui est
aléatoire sur un des marchés et sur un des domiciles. Au cours de la simulation, deux
dynamiques intègrent une part d’aléa : le déplacement des moutons sur les marchés
est aléatoire de même que le déplacement des consommateurs au niveau des marchés.
De plus, les interactions existantes entre les agents génèrent aussi une dynamique.
5-2-2-6 Observation
L’affichage principal du simulateur est une économie qui peut représenter une zone
bien précise affichant les types d’occupation de la zone économique (lieu d’habitat,
les fermes et les marchés) ainsi que les consommateurs, les éleveurs et les moutons.
Cet affichage est mis à jour à chaque pas de temps permettant de visualiser la
dynamique des déplacements. Le graphe des interactions entre agents est également
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laquelle nous avons les lieux d’habitat des consommateurs, les lieux d’élevage des
moutons et enfin le lieu de rencontre : le marché.
5-2-3-3 Les sous-modèles
Dans cette partie, nous développons les différentes procédures importantes du
modèle. Elles concernent d’un côté les déplacements des deux agents: consommateurs
et moutons (éleveurs) et d’un autre côté le choix qu’opère le consommateur sur le
marché.
La première procédure concerne l’acheminement des moutons vers les différents
marchés et le déplacement des consommateurs vers ces marchés. L’algorithme est
identique pour ces deux catégories d’agents. Cependant, une fois au marché, leur
objectif diffère, car pour le consommateur, il cherche à maximiser son utilité sous la
contrainte de son revenu alors que pour l’éleveur ce qui l’intéresse c’est comment
maximiser son profit sous la contrainte de ces facteurs de production notamment les
charges supportées de l’élevage à la commercialisation.
La seconde procédure consiste au processus achat/vente des moutons observé sur le
marché. Cependant, nous notons que la décision d’acheter ou de vendre peut dépendre
des facteurs exogènes du marché et qui le plus souvent ont un impact sur la
détermination du prix. D’où le rôle important de l’information. Si l’état du marché est
compatible aux aspirations de l’agent, la décision d’acheter ou de vendre est illustrée
par un signal acheter/vendre. Dans le cas contraire, l’agent devra changer de lieu
autrement dit, il doit changer de vendeur (ou attendre d’autres clients) ou de marché.
montrent une stationnarité des deux séries à niveaux. Nous en déduisons que les séries
sont intégrées à niveau.
En niveau Valeurs critiques au seuil de
Variables
Statistiques du test ADF Probabilités 5%
lnOffre -6,222 0
-3,5484
lnPrix -3,293 0,0007
Tableau 2- Test de stationnarité des séries
6-3 Décalage optimal et estimation du modèle ARDL
Pour sélectionner le modèle ARDL optimal qui nous permet d’obtenir des résultats
significatifs, nous utilisons les critères d’information Akaike (AIC). Nous avons le
graphique suivant qui nous informe sur le modèle ARDL optimal.
Test d’hétéroscédasticité
De ces tests de diagnostic, nous concluons que le modèle ARDL(1,0) n’est pas ni
corrélé, ni hétéroscédastique. Cependant, le modèle ne satisfait pas la condition de
normalité, mais n’empêche pas la validation du modèle.
6-4 Résultats du "Bounds test"
Les résultats de la procédure du bounds tests de Pesaran et al.(2001) donnent le
tableau suivant:
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F-statistique 13,1897 1
7- Conclusion
Dans cette étude, nous nous sommes intéressés à la modélisation de l’offre de
moutons au Sénégal. Nous avons utilisé deux méthodes pour faire cette étude. La
première méthode a consisté à modéliser le fonctionnement du marché des moutons
en utilisant les systèmes multiagents qui nous ont permis de décrire d’une part les
différentes interactions entre les agents du système et de l’autre la formation du prix
des moutons qui résulte des échanges entre offreurs et demandeurs. La seconde
méthode a consisté à appliquer la méthode d’estimation ARDL (Pesaran et al. 2001)
pour modéliser la dynamique de court terme et de long terme.
Une attention particulière a été donnée à la région de Dakar qui constitue le plus grand
centre de commercialisation et consommation de moutons. Nous avons eu recours au
système multi agent pour décrire le fonctionnement du marché. L'objectif a été de
modéliser le comportement de deux agents économiques à savoir le consommateur et
l'éleveur en tenant compte des différentes étapes de cession et des différentes charges
et taxes endossées par les différents intermédiaires du circuit d'approvisionnement.
Ces charges et taxes vont se refléter sur les prix pratiqués dans les marchés de
consommation. Ainsi, nous développons les différentes procédures importantes du
modèle. Elles concernent d'un côté, les déplacements des deux agents :
consommateurs et moutons (éleveurs) et d'un autre côté le choix qu'opère le
consommateur sur le marché.
La première procédure concerne l'acheminement des moutons vers les différents
marchés et le déplacement des consommateurs vers ces marchés. L'algorithme est
identique pour ces deux catégories d'agents. Cependant, une fois au marché, leur
objectif diffère, car pour le consommateur, il cherche à maximiser son utilité sous la
contrainte de son revenu alors que pour l'éleveur ce qui l'intéresse c'est comment
maximiser son profit sous la contrainte de ces facteurs de production notamment les
charges supportées de l'élevage à la commercialisation.
La seconde procédure consiste à la mise en œuvre du processus achat/vente des
moutons observé sur le marché. Cependant, nous notons que la décision d'acheter ou
de vendre peut dépendre des facteurs exogènes du marché et qui le plus souvent ont
un impact sur la détermination du prix. D'où le rôle important de l'information. Si
l'état du marché est compatible aux aspirations de l'agent, la décision d'acheter ou de
vendre est illustrée par un signal acheter/vendre. Dans le cas contraire, l'agent devra
changer de lieu autrement dit, il doit changer de vendeur (ou attendre d'autres clients)
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Bibliographie
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