Démocratie Représentative - Wikipédia

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Démocratie

représentative
démocratie où les citoyens élisent un
petit nombre de représentants dans les
assemblées de prise de décision

La démocratie représentative, le gouvernement représentatif ou le régime


représentatif est un syst ème polit ique dans lequel on reconnaît à une assemblée rest reint e
le droit de représent er un peuple, une nat ion ou une communaut é et de prendre les décisions
la concernant . Elle se dist ingue de la démocrat ie direct e, dans laquelle l'essent iel des
décisions sont prises par l'ensemble des cit oyens.

Dans ce t ype de régime, la volont é des cit oyens s’exprime à t ravers des représent ant s qui
ét ablissent les lois (pouvoir législat if) et les font appliquer (pouvoir exécut if). Dans les
démocrat ies représent at ives cont emporaines, ces représent ant s sont élus.

Usages historiques de l'expression

Cet t e sect ion est vide, insuffisamment dét aillée ou incomplèt e. Vot re aide est la
bienvenue ! Comment faire ?

Monarchie de Juillet
L'expression « gouvernement représent at if » est celle avec laquelle les cont emporains de la
monarchie de Juillet présent ent le régime, qu'ils soient part isans ou opposant s de celui-ci.
Celui-ci est t héorisé dès les années 1820 par les doct rinaires, en part iculier François Guizot ,
avant d'êt re en part ie mis en œuvre dans les années 1830-1840. Selon Guizot , le
gouvernement représent at if repose « sur cet t e vérit é que la souverainet é de droit
n'appart ient à personne », mais correspond en fait à la raison et à la just ice, ce qui suppose
que t out es les décisions soient publiques et ouvert es à la discussion ; que le pouvoir polit ique
soit répart i « en raison de la capacit é d'agir selon la raison et la just ice » — principalement
grâce à l'élect ion — ; et que l'Ét at soit dot é de moyens de connaît re la sociét é, et en
part iculier l'opinion publique, grâce à la libre discussion et à l'élect ion de représent ant s. Les
révolut ionnaires de 1848 opposeront la République au gouvernement représent at if [1].

Motivations

Fin des absolutismes

La démocrat ie représent at ive (appelée aussi gouvernement représent at if)[2] est présent ée
comme une alt ernat ive au despot isme par les philosophes des Lumières.

Opposition à la démocratie directe

Selon le polit ologue Bernard Manin, « les démocrat ies cont emporaines sont issues d'une
forme de gouvernement que ses fondat eurs opposaient à la démocrat ie ». Il illust re son
propos par les considérat ions de James Madison lors de la Révolut ion américaine et
Emmanuel-Joseph Sieyès lors de la Révolut ion française, qui « soulignaient ainsi en des
t ermes t rès proches le cont rast e ent re le gouvernement représent at if ou républicain et la
démocrat ie. Cet t e proximit é est d'aut ant plus saisissant e que des différences mult iples et
profondes séparaient par ailleurs le principal archit ect e de la Const it ut ion des Ét at s-Unis et
l'aut eur de Qu'est-ce que le Tiers-État ? : leur format ion, le cont ext e polit ique dans lequel ils
parlaient et agissaient , leurs concept ions const it ut ionnelles elles-mêmes » [3].

Emmanuel-Joseph Sieyès, à l'époque de la première const it ut ion française dont il fut co-
rédact eur, l'exprime clairement [4] :

« La France ne doit pas être une démocratie, mais un régime


représentatif. Le choix entre ces deux méthodes de faire la loi, n’est
pas douteux parmi nous. D’abord, la très grande pluralité de nos
concitoyens n’a ni assez d’instruction, ni assez de loisir, pour vouloir
s’occuper directement des lois qui doivent gouverner la France ; ils
doivent donc se borner à se nommer des représentants. [...] Les
citoyens qui se nomment des représentants renoncent et doivent
renoncer à faire eux-mêmes la loi ; ils n’ont pas de volonté
particulière à imposer. S’ils dictaient des volontés, la France ne
serait plus cet État représentatif ; ce serait un État démocratique. Le
peuple, je le répète, dans un pays qui n’est pas une démocratie (et la
France ne saurait l’être), le peuple ne peut parler, ne peut agir que
par ses représentants. »

Pour cert ains aut eurs, elle serait plus adapt ée aux nat ions modernes que, par exemple, la
démocrat ie at hénienne. C'est ainsi que pour Benjamin Const ant le syst ème représent at if (on
ne disait pas encore « démocrat ie représent at ive ») permet au plus grand nombre d'êt re libéré
de la gest ion quot idienne des affaires publiques[5] :

« Les individus pauvres font eux-mêmes leurs affaires : les hommes


riches prennent des intendants. C'est l'histoire des nations
anciennes et des nations modernes. Le système représentatif est une
procuration donnée à un certain nombre d'hommes par la masse du
peuple, qui veut que ses intérêts soient défendus, et qui néanmoins
n'a pas le temps de les défendre toujours lui-même [6]. »

Elle est largement plus répandue que la démocrat ie direct e : environ la moit ié des habit ant s
de la planèt e vivent sous un régime de démocrat ie représent at ive.

Souveraineté

En démocrat ie représent at ive, c'est le corps des élus dans son ensemble qui exerce la
souverainet é. Les élus n'ont donc de légit imit é qu'au sein de l'assemblée qu'ils const it uent .
Cet t e caract érist ique explique l'import ance du débat au sein de l'assemblée, de la discussion
censée faire nait re la meilleure solut ion. Elle just ifie la place de l'opposit ion.

Cela implique aussi que chaque élu représent e l'ensemble des cit oyens : la Nat ion et non pas
seulement ses élect eurs. En France, c'est le cas par exemple des déput és, t andis que les
sénat eurs représent ent au cont raire les collect ivit és t errit oriales.

La Nation et le Citoyen
S'il n'est plus syst émat iquement lié à la not ion de communaut é de cult ure, le régime
représent at if est apparu hist oriquement dans le cadre de la souverainet é nat ionale. La Nat ion
doit donc êt re ent endue ici comme un collect if, le corps des cit oyens, qui a pour unique
fonct ion l'exercice de la souverainet é. Le cit oyen est ainsi une forme idéalisée de l'individu qui
se caract érise par son abnégat ion, son absence de préjugés de classe. Dénué d'égoïsme, il
est capable de faire un choix polit ique en fonct ion de l'int érêt général en faisant abst ract ion
des avant ages personnels qu'il pourrait en t irer.

La nat ion ét ant une abst ract ion, sa volont é ne peut êt re exprimée que par des individus qui
parleront en son nom. C'est l'un des rôles des représent ant s élus. Emmanuel-Joseph Sieyès
écrit ainsi : « Il n’y a, il ne peut y avoir, pour un déput é, de mandat impérat if, ou même de
vœu posit if, que le vœu nat ional ; il ne se doit aux conseils de ses commet t ant s direct s,
qu’aut ant que ces conseils seront conformes au vœu nat ional. Ce vœu, où peut -il êt re, où
peut on le reconnaît re, si ce n’est dans l’Assemblée nat ionale elle-même [7] ? » Il écrit encore
que « l’int égrit é nat ionale n’est pas ant érieure à la volont é du peuple réuni qui n’est que sa
représent at ion. L’unit é commence là. Donc rien n’est au dessus de la représent at ion, elle est
le seul corps organisé. Le peuple dispersé n’est pas un corps organisé, il n’a ni un vouloir, ni une
pensée, ni rien comme un[8] ».

Le polit ologue Didier Mineur voit dans cet t e concept ion l'une des origines de la « crise de la
représent at ion », car les représent és n'y ont pas vocat ion à se reconnaît re dans leur
représent at ion[9].

Incapacité des peuples à se gouverner

Mont esquieu : « Comme la plupart des cit oyens, qui ont assez de suffisance pour élire, n’en
ont pas assez pour êt re élus ; de même le peuple, qui a assez de capacit é pour se faire rendre
compt e de la gest ion des aut res, n’est pas propre à gérer par lui-même » [10].

John Adams : « L'idée que le peuple est le meilleur gardien de sa libert é n'est pas vraie. Il est
le pire envisageable, il n'est pas un gardien du t out . Il ne peut ni agir, ni juger, ni penser, ni
vouloir. » [11].

Emmanuel-Joseph Sieyès (corédact eur de la const it ut ion française) oppose le gouvernement


représent at if, qu'il cont ribue à met t re en place, à la démocrat ie (qu'il rejet t e) dans son
discours du 7 sept embre 1789 : voir cit at ion ci-dessus.

Emmanuel-Joseph Sieyès fut un cont radict eur des t héories de Jean-Jacques Rousseau, qui
se prononçait pour la démocrat ie direct e. Opposé à la démocrat ie au sens lit t éral du t erme,
Sieyès ét ait également cont re le suffrage universel, lui préférant le suffrage censit aire. Ce
syst ème d'inspirat ion plout ocrat ique fut int roduit dans la Const it ut ion française et a prévalu
jusqu'en 1848.

Caractéristiques

Vote

Dans un régime représent at if, le vot e est un mode de la désignat ion et pas un t ransfert de
responsabilit é. Les élus t irent leur légit imit é de la délégat ion de la souverainet é de leurs
élect eurs puisque ces derniers n'ont alors plus aucun moyen de cont rôler l'act ion post érieure
de leurs représent ant s. La souverainet é vérit able aliénée en revient donc aux élus
(principalement parlement aires) qui se chargent du débat et des prises de décisions sans s'en
référer à leurs mandant s dont ils sont t ot alement indépendant s en dehors du fait d'élire.

Le vot e n'est donc pas un droit , mais une fonct ion. Ce n'est pas une manifest at ion de la
volont é individuelle, mais une fonct ion exercée au nom de la nat ion.

Hist oriquement , les premiers représent ant s ét aient élus au suffrage censit aire. Un individu ne
pouvait êt re élu qu'en fonct ion de l'impôt qu'il payait (hist oriquement , le cens), et donc de sa
capacit é financière. Le suffrage universel s'est développé par la suit e.

Mandat représentatif

De plus, on a un mandat représent at if, c'est -à-dire que le déput é, une fois élu, est
indépendant de ses élect eurs, il est irrévocable, et n'est pas t enu de suivre explicit ement leur
volont é. Néanmoins, la durée du mandat ét ant t oujours limit ée, l'élu peut penser qu'il doit agir
globalement dans le sens des int érêt s de ses élect eurs, dans l'espoir d'êt re réélu.

Selon John Dewey : la domination du « souci du bien être public »

Dans Le Public et ses problèmes (1927), John Dewey est ime que [12]

« ceux qui s'impliquent dans un gouvernement sont encore des êtres


humains. Ils conservent leur lot de traits ordinaires de la nature
humaine. Ils ont toujours des intérêts privés à servir, ainsi que des
intérêts qui sont propres à des groupes particuliers comme ceux de
la famille, de la clique ou de la classe à laquelle ils appartiennent. Il
est rare qu'une personne s'immerge complètement dans sa fonction
politique ; au mieux la plupart des hommes parviennent-ils à faire
que leur souci du bien être public domine sur leurs autres désirs.
Un gouvernement « représentatif » signifie que le public est
délibérément organisé en fonction de l'intention d'assurer cette
domination. Chez les individus, la double capacité de chaque officier
du public provoque un conflit entre leurs buts et leurs actes
véritablement politiques, et ceux qu'ils ont dans leur rôle non
politique. Lorsque le public adopte des mesures particulières pour
veiller à ce que ce conflit soit atténué et à ce que les fonctions
représentatives aient la priorité sur les fonctions privées, alors les
institutions politiques sont appelées représentatives. »

Limites

Représentativité

L'un des enjeux de la démocrat ie représent at ive est de savoir si les élus « représent ent »
effect ivement leurs élect eurs non seulement au sens polit ique mais aussi au sens
sociologique (comme on parle de la représent at ivit é st at ist ique d'un échant illon dans un
sondage) à savoir dans leur diversit é, t ant au niveau des revenus, des classes sociales ou des
niveaux d'inst ruct ion.

Mode de scrutin

En démocrat ie représent at ive, le mode de scrut in a une influence import ant e sur le choix final
des élus.

La mét hode la plus couramment ut ilisée pour former une chambre est le vot e par
circonscript ions, à scrut in majorit aire. Mont esquieu la défendait ainsi dans son ouvrage De
l'esprit des lois :

« L'on connaît beaucoup mieux les besoins de sa ville que ceux des
autres villes ; et on juge mieux de la capacité de ses voisins que de
celle de ses autres compatriotes. Il ne faut donc pas que les membres
du corps législatif soient tirés en général du corps de la nation ; mais
il convient que, dans chaque lieu principal, les habitants se
choisissent un représentant. »
Ce syst ème pose des problèmes de représent at ivit é du fait du poids démographique des
circonscript ions et des possibilit és de manipulat ion du découpage élect oral. Le vot e
majorit aire t end également à bipolariser le paysage polit ique et à écraser les opinions
minorit aires. Néanmoins il inst aure des majorit és franches qui n'auront pas l'excuse en fin de
mandat d'avoir ét é obligées de composer.

On peut êt re t ent é de répondre à ces difficult és par une modificat ion du syst ème élect oral
en ut ilisant par exemple un scrut in de list e comme le scrut in proport ionnel plurinominal
int égral que l'on ret rouve aux élect ions générales de pays comme l'Espagne ou Israël lors
desquelles le pays t out ent ier ne forme qu'une seule circonscript ion élect orale. Cela soulève
d'aut res problèmes, comme le poids des part is, à qui revient la const it ut ion des list es, la
st abilit é des gouvernement s et la nécessit é de former des coalit ions. Les scrut ins de list e à
la proport ionnelle ont l'inconvénient de faire disparaît re le lien direct élect eur-élu et donc
est omper le sent iment d'êt re effect ivement représent é, puisque selon les modes de calculs,
il n'est pas t oujours possible de savoir quel candidat précis son bullet in de vot e a fait élire.

Le philosophe et polit icien Alain se mont re, dans ses Propos sur les pouvoirs, t rès crit ique sur
le syst ème proport ionnel face au syst ème par circonscript ion (qu'il nomme « scrut in
d'arrondissement »), car il explique qu'avec le second l'élu doit t out à ses élect eurs et peu à
son part i, t andis qu'avec le premier il doit t out à la place dans la list e que lui oct roie son part i
et sera donc t ent é de suivre celui-ci plut ôt que l'élect eur. Le scrut in à vot e unique
t ransférable évit e cet inconvénient , mais au prix d'un dépouillement t rès coût eux.

Conflits d'intérêt

Les int érêt s des représent ant s élus ne coïncident pas nécessairement avec ceux de leurs
élect eurs. Par exemple, il est fréquent que ce soit les représent ant s eux-mêmes qui
dét erminent leurs propres salaires, ou leurs régimes spéciaux de ret rait e.

La concent rat ion de pouvoir polit ique ent re les mains d'une minorit é t end à favoriser la
corrupt ion. Le représent ant , se ret rouvant seul dans sa mandat ure, est souvent part agé ent re
son int érêt individuel et l'int érêt collect if du corps élect oral. Il peut également subir
l'influence des lobbies.

Instabilité

Le changement d'un part i dirigeant à un aut re, ou dans une moindre mesure d'un représent ant
à un aut re, peut causer une rupt ure gouvernement ale subst ant ielle et un changement de lois
et donc de la vie quot idienne des cit oyens.
Partis politiques

On peut considérer les part is polit iques comme un « mal nécessaire » de la démocrat ie
représent at ive, dans la mesure où il est souvent impossible à un candidat de remport er les
élect ions sans se présent er au nom d'un part i polit ique. Ce qui a pour conséquence que, par la
suit e, un représent ant polit ique risque de devoir agir à l'encont re de ses convict ions pour êt re
en conformit é avec la ligne direct rice de son propre part i. De t emps en t emps, il s'agira d'un
compromis mineur. Mais il peut arriver qu'un changement de cap import ant soit exigé d'un
représent ant par son part i, de t elle sort e qu'il n'ait comme alt ernat ives que de démissionner
de sa fonct ion ou de quit t er le part i.

A contrario, le mandat représent at if permet le « nomadisme polit ique » : après les élect ions,
un élu peut démissionner de son part i, voire rejoindre le camp adverse, sans que son mandat
soit remis en cause.

Les part is polit iques ont donc une posit ion singulière : les candidat s doivent représent er les
opinions du part i qui le mandat e auprès des élect eurs.

Coûts de fonctionnement

Beaucoup de ressources sont dépensées pour les élect ions. En out re, le besoin de lever des
cont ribut ions de campagne est suscept ible d'endommager la neut ralit é des représent ant s :
ceux-ci peuvent se sent ir redevables à l'égard des principaux cont ribut eurs et vouloir les
récompenser en leur facilit ant cert aines démarches, par exemple l'obt ent ion de marchés
publics.

Court-termisme

Les penseurs de l'écologie ont ét é conduit s à s'int erroger sur l'inadapt at ion de la démocrat ie
représent at ive aux enjeux écologiques, à cause de ses élect ions incessant es, de son court -
t ermisme, et de son rét récissement à des object ifs ét roit ement nat ionaux. Dominique Bourg
et Kerry Whit eside, dans Vers une transition écologique (2010), proposent de réformer le
syst ème démocrat ique act uel en complét ant la démocrat ie représent at ive par des
inst it ut ions où ce sont les expert s et les ONG qui jouent le premier rôle, non les élus[13].

Critiques

Ét ienne de La Boét ie (1530-1563), dans son Discours de la servitude volontaire, qualifie les
élus de t yrans. Selon lui, ils surpassent en vices et en cruaut és les deux aut res t ypes de
t yrans, à savoir ceux qui obt iennent le pouvoir de manière hérédit aire et ceux qui l'obt iennent
par la force des armes. Il ajout e que les t yrans sont élus en raison de leur prest ige, de leur
grandeur ou t out e aut re qualit é leur ayant permis de séduire le peuple [14].

Jean-Jacques Rousseau (1712-1778), dans Du contrat social, a dressé au chapit re « Des


déput és » une vive crit ique du syst ème parlement aire, alors en vigueur en Grande-Bret agne. Il
considère qu'en se donnant des représent ant s, c'est -à-dire en déléguant le t emps d'un
mandat son pouvoir législat if, le peuple abdique sa souverainet é et renonce à sa libert é. Car
s'il est possible que le peuple veuille ce que veulent ceux qui le représent ent à l'inst ant où il
leur délègue son pouvoir, rien ne l'assure qu'il le voudra t out le t emps du mandat : « Le
souverain peut bien dire : « Je veux act uellement ce que veut un t el homme, ou du moins ce
qu'il dit vouloir » ; mais il ne peut pas dire : « Ce que cet homme voudra demain, je le voudrai
encore » [15]. ». Pour Rousseau, le peuple, au lieu de payer des personnes pour faire les lois,
devrait donc accept er de payer s'il le faut pour les faire lui-même.

Benjamin Const ant (1767-1830), homme polit ique franco-suisse, de convict ion libérale et
favorable au régime représent at if, ent revoyait cependant ses limit es :

« Chez les modernes, au cont raire, l'individu, indépendant dans la vie privée, n'est , même
dans les Ét at s les plus libres, souverain qu'en apparence. Sa souverainet é est rest reint e,
presque t oujours suspendue ; et si à époques fixes, mais rares, durant lesquelles il est
encore ent ouré de précaut ions et d'ent raves, il exerce cet t e souverainet é, ce n'est jamais
que pour l'abdiquer. » (De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes, discours
prononcé en 1819, dans De la liberté chez les Modernes, Livre de Poche, coll. « Pluriel »,
p. 494-496.)

« Le danger de la libert é moderne, c'est qu'absorbés dans la jouissance de not re


indépendance privée, et dans la poursuit e de nos int érêt s part iculiers, nous ne renoncions
t rop facilement à not re droit de part age dans le pouvoir polit ique. Les déposit aires de
l'aut orit é ne manquent pas de nous y exhort er. Ils sont si disposés à nous épargner t out e
espèce de peine, except ée celle d'obéir et de payer ! […] Non, Messieurs, ne laissons pas
faire. Quelque t ouchant que soit un int érêt si t endre, prions l'aut orit é de rest er dans ses
limit es. » (op. cit., p. 512-513.)

Dominique Bourg (né en 1953) et Kerry Whit eside est iment que la démocrat ie représent at ive
se révèle impuissant e face à l'ampleur des défis environnement aux. Selon eux, les principes
sur lesquels elle repose sont int rinsèquement incompat ibles avec la survie de la planèt e. Ils
proposent une refondat ion inst it ut ionnelle en inject ant une bonne dose de démocrat ie
part icipat ive et délibérat ive. L'inert ie des gouvernement s face à l'urgence écologique serait
imput able à not re syst ème de décision collect if. « Prot éger la biosphère exige donc de
repenser la démocrat ie elle-même » [16].
Le sociologue ivoirien Alfred Babo remet en cause l'opport unit é d'organiser des élect ions
président ielles en Afrique, compt e t enu de leur cout élevé, de la violence qu'elles engendrent ,
et de leur faible impact démocrat ique [17]. Il ne remet t out efois en cause ni la démocrat ie ni
son caract ère représent at if, mais il propose d'organiser aut rement la nominat ion du président
de la République.

Histoire

Les démocraties représentatives selon l'ONG Freedom House.

La plupart des démocrat ies act uelles ont adopt é ce syst ème dès leur fondat ion.

Évolutions et variantes

Parmi les variant es nées de la démocrat ie représent at ive, on compt e :

la « démocrat ie du public », concept proposé par Bernard Manin et décrivant à ses yeux
l'évolut ion act uelle de la démocrat ie part icipat ive, caract érisée not amment par une pert e
d'import ance des part is polit iques au profit des médias ;

la « démocrat ie cont inue », promue par Dominique Rousseau ;

la démocrat ie part icipat ive ou « locale », qui consist e à élaborer les décisions collect ives
en ne se limit ant pas aux lieux où se prennent les décisions polit iques ;

la cyberdémocrat ie.

Mise en pratiques
Aucun pays n'est gouverné selon un régime purement représent at if. Tous limit ent par
plusieurs mesures le pouvoir des élus.

Le pluralisme et l’alternance

La t enue d’élect ions à échéances régulières permet de limit er l’aut onomie des élus. Un régime
est démocrat ique quand les gouvernement s et les représent ant s n’hérit ent pas de leur
charge mais sont élus au t erme d’une procédure élect ive, et leur programme est soumis à
l’approbat ion des élect eurs. Le pouvoir est à prendre en ce sens qu’aucune équipe dirigeant e
n’est jamais définit ivement inst allée, qu’aucun programme ne peut êt re t enu pour définit if,
qu’aucune polit ique n’est jamais que provisoirement officielle.

Cet t e ouvert ure, ou plut ôt cet t e disponibilit é du pouvoir est commandée par une philosophie
pluralist e qui fait de l’opposit ion une force aussi légit ime que le sont les gouvernant s en
place. Non seulement t out es les t endances et t ous les int érêt s sont admis à s’exprimer, mais
encore l’espoir est offert à t ous d’accéder au gouvernement et d’en ut iliser les prérogat ives
selon leurs vues. La représent at ion permet de surmont er la division : en défendant la diversit é
des int érêt s, la représent at ion évit e que des groupes d’int érêt s ne viennent menacer les
droit s des minorit és. Et dès lors, plus l’Ét at est grand, plus les avis ont de chance d’êt re
divergent s.

Le syst ème requiert que soient garant is le mult ipart isme, nécessaire pour qu’il puisse y avoir
des élect ions, et la libert é d’expression de l’opinion publique, pour permet t re l’échange et la
délibérat ion. La représent at ion cont ribue à la format ion de la volont é générale, const ruit e
grâce à l'apport des idées de t ous.

Cert aines démocrat ies représent at ives connaissent la séparat ion st rict e des pouvoirs ; dans
d’aut res, not amment celles dans le syst ème de West minst er, le gouvernement est
responsable devant le parlement .

La formation d’une classe politique

La démocrat ie représent at ive est marquée par la nécessit é d’une division du t ravail dans une
économie marchande : en confiant la gest ion des affaires publiques et la représent at ion de
leurs int érêt s aux représent ant s, les individus peuvent vaquer à leurs occupat ions privées,
s’adonner au commerce, et c.

Les procédures de démocratie directe


Il est fréquent de recourir à des procédés de démocrat ie semi-direct e ; il s'agit de permet t re
au peuple, dans les démocrat ies représent at ives, d'int ervenir ou de décider direct ement .
Exemple : recourir au mandat impérat if ou au référendum.

Un régime représent at if peut également admet t re une pet it e dose de part icipat ion direct e
des cit oyens. Une procédure de référendum peut not amment exist er, et peut même êt re
obligat oire pour cert aines décisions, par exemple pour la révision const it ut ionnelle si le
législateur n’est pas également constituant.

Le référendum est généralement peu apprécié des part is polit iques car il est plus
difficilement cont rôlable que les élect ions. Il pose en out re le problème du risque de
dét ournement plébiscit aire.

Les Ét at s vivant sous ce syst ème admet t ent généralement des droit s d’expression, de
pét it ion et de manifest at ion t rès développés. Dans cert ains pays, une proposit ion de loi ou
d’abrogat ion de loi, dit e « d’init iat ive populaire », peut êt re déposée par des cit oyens grâce à
une collect e de signat ures.

La Constitution

La Const it ut ion encadre et limit e les prérogat ive des élus. C'est une sort e de mandat donné
par la populat ion auquel ils ne peuvent déroger. Les modificat ions par le Congrès sont
d'ailleurs problémat iques en mat ière de démocrat ie car la t eneur de cet t e const it ut ion peut
ainsi êt re modifiée sans int ervent ion direct e du peuple.

Notes et références

1. Samuel Hayat, Quand la République était révolutionnaire : citoyenneté et représentation en


1848, Paris, Seuil, 2014, 405 p. (ISBN 978-2-02-113639-5, lire en ligne (https://books.goog
le.fr/books?id=Jd-TBQAAQBAJ) [archive]), p. 33-36.

2. Archives parlementaires de 1787 à 1860, Librairie administrative de Paul Dupont, 1875,


[lire en ligne (https://books.google.fr/books?id=co4LAQAAIAAJ) [archive]].

3. Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif, Flammarion, 1995, rééd. 2012,


p. 12-14.

4. « Sur l’organisation du pouvoir législatif et la sanction royale », in Les Orateurs de la


Révolution française. Les Constituants, Tome I, Paris, Gallimard, 1989, p. 1025 et 1027.
5. Auguste Bertholet, « Const ant , Sismondi et la Pologne », Annales Benjamin Constant,
no 46,‎2021, p. 65-85 (lire en ligne (https://www.slatkine.com/fr/editions-slatkine/75250-b
ook-05077807-3600120175625.html) [archive]).

6. Benjamin Constant, De la liberté des Anciens comparée à celle des Modernes (1819).

7. Emmanuel-Joseph Sieyès, Écrits politiques, Paris, E.A.C, « Dire sur le véto royal ».

8. Emmanuel-Joseph Sieyès, Archives nationales : 284 AP. 5, dossier 1, cité par Pierre
Rosanvallon, Le peuple introuvable, Gallimard, 1998, p. 38.

9. Didier Mineur, Archéologie de la représentation politique : Structure et fondement d'une


crise, Paris, Presses de Sciences Po, 2010, 296 p..

10. Montesquieu, Esprit des lois, 1777 (lire en ligne (https://fr.wikisource.org/wiki/Esprit_des_


lois_(1777)/L2/C2) [archive]).

11. The proposition that the people are the best keepers of their own liberties is not true. They
are the worst conceivable, they are no keepers at all; they can neither judge, act, think, or
will, as a political body. publié en 1786 dans A Defense of the Constitution of Government
of the United States of America (http://www.teachingamericanhistory.org/library/index.as
p?document=789) [archive].

12. John Dewey (trad. Joëlle Zask), Le Public et ses problèmes, Folio, coll. « Essais », 336 p.,
p. 161-162.

13. Nicolas Weill, « Réconcilier démocratie et écologie », Le Monde, 2 avril 2011, lire en ligne
(https://www.lemonde.fr/idees/article/2011/04/02/reconcilier-democratie-et-ecologie_150
2133_3232.html) [archive]

14. Corentin de Salle (préf. Alexander Graf Lambsdorff et Charles Michel), La Tradition de la
Liberté : Tome II – Les Lumières libérales, Forum libéral européen (en), 494 p. (lire en ligne
(http://www.cjg.be/wp-cont/uploads/2015/07/CJG-Trad_Lib_Tome2-Fr.pdf) [archive]),
p. 33.

15. Jean-Jacques Rousseau, Du contrat social, chap. VII, 1.

16. Dominique Bourg et Kerry Whiteside, Vers une démocratie écologique, Le citoyen, le
savant et le politique, Éditions du Seuil / La République des idées, 2010.

17. Alfred Babo, « Faut -il cont inuer d’organiser des élect ions président ielles en Afrique ? » (ht
tps://www.lemonde.fr/afrique/article/2016/09/09/faut-il-continuer-d-organiser-des-electio
ns-presidentielles-en-afrique_4995283_3212.html) [archive], Le Monde,
9 septembre 2016 (consulté le 30 décembre 2016).

Voir aussi
Bibliographie
Daniel Gaxie, La démocratie représentative, Paris, Mont chrest ien, 2003 (4e édit ion), 159 p.

Claude Lefort (1981), L'Invention démocratique. Les limites de la domination totalitaire,


nouvelle édit ion revue et corrigée, Librairie Art hème Fayard, Paris, 1994, 340 p.
(ISBN 2213593728)

Didier Mineur, Archéologie de la représentation politique : Structure et fondement d'une crise,


Presses de Sciences Po, Paris, 2010, 296 p.

Bernard Manin, Principes du gouvernement représentatif (1re éd. 1995) [dét ail des édit ions]
(présent at ion en ligne (ht t p://www.persee.fr/web/revues/home/prescript /art icle/rfsp_ 003
5-2950_ 1995_ num_ 45_ 6_ 403597) [archive]).

Pierre Rosanvallon, Le peuple introuvable : histoire de la représentation démocratique en


France, Paris, Édit ions Gallimard, 1998, 379 p.

Jean-Jacques Rousseau (1762), Du contrat social ou Principes du droit politique, éd. par
Bruno Bernardi, Flammarion, coll. « GF » no 94, Paris, 2001, 256 p. (ISBN 2-08-071058-3)

Sabine Saurugger (dir.), Les modes de représentation dans l'Union européenne, Paris, Édit ions
L'Harmat t an, 2003

Anne-Marie Le Pourhiet (aut eur), Bert rand Mat hieu (aut eur), Ferdinand Mélin-Soucramanien
(aut eur), Dominique Rousseau (aut eur), Représentation et représentativité, Dalloz-Sirey, 2008

Articles connexes
Démocrat ie at hénienne

Démocrat ie direct e

Démocrat ie liquide

Mandat représent at if

Mandat impérat if

Liens externes
« L’esprit ant idémocrat ique des fondat eurs de la « démocrat ie » moderne » (ht t p://classiqu
es.uqac.ca/cont emporains/dupuis_ deri_ francis/esprit _ ant i_ democrat ique/esprit _ ant i_ dem
ocrat ique_ t ext e.ht ml) [archive], Francis Dupuis-Déri 1999

Jérôme Mont ès, « Mouvement s ant i-mondialisat ion : la crise de la démocrat ie


représent at ive », Ét udes int ernat ionales, vol. 32, no 4, 2001, p. 773-782 (ht t p://id.erudit .org/i
derudit /704348ar) [archive], DOI:10.7202/704348ar (ht t ps://dx.doi.org/10.7202%2F70434
8ar)
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