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DOSSIER 685

SOMMAIRE

685
Situations
EXPLORER UNE ADÉNOPATHIE
d’urgence

686
CHEZ L’ENFANT
Hors situations
urgentes
Connaître les signes de gravité est crucial.
689
Examens
complémentaires

L
a palpation de petits ganglions mobiles est fré-
SITUATIONS D’URGENCE 1, 2
quente chez l’enfant. Il s’agit dans la plupart
690 des cas de processus réactionnels limités d’évo- Adénopathies médiastinales
Conclusion lution favorable. Cependant, des adénopathies,
même superficielles, peuvent révéler des maladies Elles peuvent être révélées par un syndrome de
sévères. compression (fig. 1) des voies aériennes, risquant
L’exploration doit être méthodique et rigoureuse de mettre en jeu le pronostic vital et/ou un syn-
Par Irène Jimenez, permettant une orientation étiologique, variable drome cave supérieur (CS).
François Doz, selon le caractère unique ou multiple de l’atteinte La compression des voies aériennes se manifeste
département d’oncologie
pédiatrique, institut Curie,
ganglionnaire. La prescription d’examens complé- souvent par une toux irritative prolongée, une
75005 Paris. mentaires n’est pas toujours nécessaire, elle doit orthopnée, une dyspnée parfois seulement d’effort
irene.jimenez@curie.net être raisonnée et graduelle, selon le contexte cli- au début, puis survenant aussi au repos. L’examen
francois.doz@curie.net nique et son évolution. clinique peut être entièrement normal – la détec-
Hervé J. Brisse, En revanche, les adénopathies profondes, plus tion d’un wheezing est très inconstante –, des signes
département d’imagerie
médicale, institut Curie.
rares, nécessitent une prise en charge sans délai et en faveur d’un épanchement pleural ou péri-
herve.brisse@curie.net des examens spécialisés. Même si, parmi les cardique associé sont possibles.
Antoine Bourrillon, causes d’adénopathies superficielles, les affections Le syndrome CS, quant à lui, est suspecté devant
service de pédiatrie préoccupantes sont proportionnellement peu fré- un œdème facial et des paupières, puis une dilata-
générale, hôpital Robert- quentes, il est important de toujours rechercher tion des veines jugulaires et une circulation vei-
Debré, 75019 Paris
des signes cliniques de gravité et, parmi eux, ceux neuse collatérale thoracique, ainsi qu’une cyanose
et université Paris-Diderot.
antoine.bourrillon@ en faveur d’adénopathies profondes associées, sur- de la partie supérieure du corps. L’hypertension
rdb.aphp.fr tout si elles sont compressives. veineuse cérébrale secondaire peut induire des

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686 DOSSIER Explorer une adénopathie chez l’enfant

Fig. 1 – Radiographie
standard et scanner
thoracique d’un patient
atteint de lymphome T
lymphoblastique médiastinal
antérieur compressif sur les
axes vasculaires et aérique
(A : aorte ; APD : artère
pulmonaire droite ;
BS : bronches souches ;
VCS : veine cave supérieure).

céphalées, une somnolence, des troubles visuels, Adénopathies abdominopelviennes


des syncopes, voire des convulsions et un coma.
D’autres symptômes de compression médiastinale Des adénopathies rétropéritonéales peuvent être
révèlent plus rarement des adénopathies pro- révélées par des œdèmes des membres inférieurs
fondes : dysphagie, dysphonie. par compression de la veine cave inférieure, dont
Tout symptôme évoquant une telle compression le principal risque est sa thrombose complète.
doit faire suspecter une masse médiastinale et La compression des vaisseaux d’un hile rénal peut
impose sans délai une radiographie du thorax. provoquer l’insuffisance fonctionnelle du rein
L’examen tomodensitométrique thoracique objec- concerné, et celle de l’uretère une hydronéphrose.
tive les compressions et précise la topographie et Une invagination intestinale, surtout chez un
l’étendue exactes de la masse médiastinale. Il ne enfant âgé de plus de 3 ans, doit faire éliminer,
doit être réalisé qu’en l’absence d’orthopnée entre autres, une infiltration et des adénopathies
sévère. mésentériques, souvent associées à d’autres gan-
En parallèle à l’enquête diagnostique, l’initiation glions profonds.
des traitements est urgente. Sur le plan ventilatoire, Si on suspecte des adénopathies abdomino-
le transfert en réanimation peut être nécessaire pelviennes, la première imagerie à réaliser est
ainsi que l’évacuation d’épanchements compressifs l’échographie, à la recherche d’une masse associée,
associés (pleural ou péricardique), l’oxygénothéra- de signes d’épanchement péritonéal mais aussi
pie, la ventilation non invasive et plus rarement d’un retentissement rénal bilatéral avec risque
l’intubation. d’insuffisance rénale aiguë par obstacle en cas de
Le diagnostic est facile si la NFS-plaquettes mon- dilatation pyélo-urétérale bilatérale. Si l’échogra-
tre des blastes circulants, souvent associés à des phie confirme la présence d’adénopathies, une
anomalies des autres lignées hématopoïétiques. Il IRM ou une tomodensitométrie sont faites dans un
peut nécessiter des gestes de ponction (en veillant deuxième temps (en tenant compte de la fonction
à ne pas aggraver les symptômes respiratoires) : rénale en cas d’obstacle rénal bilatéral), pour
myélogramme, études biopathologiques de orienter le diagnostic (adénopathies isolées ou
liquides pleural ou péricardique ou étude cytolo- satellites d’une tumeur abdominale) et obtenir un
gique d’une adénopathie périphérique associée. premier bilan d’extension.
En l’absence d’épanchement ou d’adénopathie
périphérique, et en cas de myélogramme normal, HORS SITUATIONS URGENTES
il faut documenter l’atteinte médiastinale en
milieu chirurgical, par biopsie transthoracique à Le terme peu spécifique d’adénopathie recouvre
l’aiguille, voire par thoracoscopie. diverses pathologies et désigne des ganglions lym-
Les corticoïdes sont extrêmement efficaces phatiques augmentés de volume, de plus de 1 cm
en cas de lymphome et de leucémie lympho- de diamètre.
blastiques, mais, débutés avant les examens biopa- Il s’agit d’un tableau clinique fréquent et le plus
thologiques, ils peuvent fausser certains résultats souvent bénin : il est donc important que l’explo-
et compliquer le diagnostic. La décision face à un ration soit bien adaptée à la gravité potentielle.
enfant ayant une masse médiastinale doit être L’interrogatoire et l’examen clinique apportent des
ainsi toujours concertée entre le médecin le prenant informations clés pour le diagnostic et les éventuels
en charge en urgence, l’équipe de réanimation examens complémentaires. Les étiologies sont
pédiatrique et celle d’hémato-oncologie. listées de façon schématique dans l’encadré 1.

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DOSSIER 687

Interrogatoire
Évolution. Sont suspectes de malignité une aug-
1. Étiologie des adénopathies
mentation progressive de la taille, une adénopa- Adénopathies infectieuses
thie isolée persistante sans point d’appel évident
➥ Localisées
ainsi que celle qui régresse puis récidive.
. Adénites à pyogènes : Streptococcus, Staphylococcus
Symptômes associés. On recherche des signes de
. Tuberculose et mycobactéries atypiques
gravité liés à des adénopathies profondes relevant
. Maladie des griffes du chat (Bartonella henselæ)
d’une prise en charge en urgence (cf. supra).
➥ Généralisées
Fièvre, asthénie et altération de l’état général
. Bactériennes : fièvre typhoïde, brucellose, syphilis
ne sont pas spécifiques mais doivent alerter le
. Virales : EBV, CMV, VIH, rubéole, varicelle, rougeole, HSV,
médecin et faire éliminer, entre autres, une origine
adénovirus
tumorale.
. Parasitaires : toxoplasme, leishmaniose viscérale, paludisme
Des douleurs osseuses peuvent accompagner les
. Champignons : histoplasmes, Chrysosporium, coccidioides
leucémies aiguës et les neuroblastomes avec des
métastases ostéomédullaires. Adénopathies tumorales
Prurit et sueurs nocturnes font évoquer le diag- ➥ Hémopathies malignes
nostic de maladie de Hodgkin. . Leucémies (principalement aiguës) : LAL, LAM
Trismus et épistaxis peuvent témoigner d’un carci- . Lymphome de Hodgkin
nome indifférencié du nasopharynx. . Lymphome non hodgkinien (LMNH) : lymphome de Burkitt,
Autres informations utiles : traitements en cours lymphome lymphoblastique T, lymphome B à grandes cellules,
(antibiotiques, anticonvulsivants), mode de vie lymphome anaplasique à grandes cellules
(ingestion de lait cru, contact avec des animaux). ➥ Métastases de tumeurs solides
. Sarcomes : rhabdomyosarcome, sarcome d’Ewing
Diagnostic positif : le plus souvent
. Neuroblastome
simple 3
. Carcinome indifférencié du nasopharynx
Certaines lésions peuvent être confondues avec
des adénopathies superficielles. On les trouve Maladies auto-immunes/lymphoprolifératives
principalement au niveau du territoire cervical ➥ Maladie de Still, lupus systémique, dermatomyosite, histiocytose
(glande salivaire, kyste du tractus thyréoglosse, langerhansienne
lymphangiome kystique, kystes branchiaux ou
dermoïdes, fibromatosis colli ou tumeur bénigne Médicaments
fibreuse du sterno-cléido-mastoïdien) mais aussi ➥ Carbamazépine, phénytoïne, captopril, pénicillines, cotrimoxazole
dans la région inguinale (hernie, kyste du cordon), Autres
ainsi qu’en tous territoires (neurofibromes, lipo- ➥ Maladie de Kawasaki, sarcoïdose, maladies de surcharge
blastomes, lipomes). (Gaucher, Niemann-Pick), affections auto-inflammatoires (fièvre
En cas de doute sur la nature ganglionnaire d’une méditerranéenne familiale et autre fièvres récurrentes, syndrome
masse superficielle, de nombreuses autres lésions FPAPA).
des tissus mous, très rares, peuvent être suspectées :
l’échographie, examen de première intention, est
alors très contributive.
Le caractère localisé (régions anatomiques
contiguës) ou généralisé (2 ou plusieurs régions cutanés en regard). Elles nécessitent initialement
non contiguës affectées) des adénopathies a une un traitement antibiotique adapté (amoxicilline-
importante valeur d’orientation.4-6 acide clavulanique) susceptible de les faire régres-
ser en 3-4 semaines.
Adénopathies superficielles localisées La localisation cervicale est aussi fréquente en
Il est indispensable de chercher une porte d’entrée cas de maladie des griffes du chat, caractérisée
cutanée ou une infection régionale. par une adénopathie unique, douloureuse, de
Les adénopathies cervicales sont la localisation grande taille, souple, et accompagnée de fièvre. Il
la plus fréquente chez l’enfant, leur cause princi- faut toujours être vigilant devant un tableau
pale est l’infection présumée virale des voies d’adénopathies cervicales en l’absence de signe
aériennes supérieures. Dans ce cas, elles sont d’infection virale ou bactérienne : l’examen
habituellement de consistance molle, de petite exhaustif de l’ORL permet de mieux évaluer le
taille, mobiles et sans modification de la peau en cavum, les fosses nasales et les conduits auditifs
regard. En revanche, celles associées à un pyogène (fig. 2).
sont volontiers plus volumineuses, parfois sensi- Les adénopathies sus-claviculaires – toujours
bles, voire douloureuses : elles sont en rapport pathologiques – sont souvent associées à une
avec une angine ou avec une infection cutanée pathologie médiastinale ou abdominale. Les
régionale (pouvant alors s’accompagner de signes adénopathies cervicales basses affleurant le

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688 DOSSIER Explorer une adénopathie chez l’enfant

Fig. 2 – Adénopathies
cervicales froides
métastatiques de grande
taille et dures chez un enfant
atteint d’un carcinome
indifférencié du nasopharynx.
Paquet ganglionnaire cervical
gauche visible cliniquement
(*) et sur l’IRM cervicale (§).
Tumeur du nasopharynx (¥)
associée visible sur l’IRM.

creux sus-claviculaire méritent une vigilance tique de la rubéole. Pré-auriculaire, elles peuvent
particulière vis-à-vis de la gravité de leurs causes être dues à des infections par Chlamydia, adéno-
possibles. virus ou maladie des griffes du chat, ou à une
Axillaires, elles sont en général inflammatoires pathologie orbitaire infectieuse ou tumorale (le
et provoquées par des lésions des membres supé- premier relais de l’orbite est prétragien). Les adé-
rieurs, ou la maladie des griffes du chat. L’aisselle nopathies sous-maxillaires et sous-mentonnières
peut aussi être le siège d’adénites tuberculeuses sont souvent en relation avec des infections de la
ou lymphomateuses. peau en regard, de problèmes dentaires ou de la
Inguinales, elles sont d’habitude secondaires muqueuse buccale.
à des infections des membres inférieurs ou plus Quelle que soit sa localisation, une adénopathie
rarement des organes génitaux externes ou de la isolée persistante impose un diagnostic étiolo-
région péri-anale. Elles peuvent aussi être d’ori- gique.
gine métastatique : tumeurs des membres infé-
rieurs ou des organes génitaux externes ainsi que Adénopathies généralisées
de la région péri-anale. Les infections virales, dont la mononucléose
Autres. Les adénopathies occipitales et rétro-auri- infectieuse (primo-infection par EBV), en sont
culaires sont généralement secondaires à des l’une des premières causes. Les adénopathies siè-
lésions du cuir chevelu (dermatite séborrhéique, gent alors souvent en territoire cervical, occipital,
pédiculose) ; cette localisation est aussi caractéris- rétro-auriculaire, elles sont bilatérales, de grande
taille, sensibles, sans modification de la peau en
regard.
Généralement, elles s’accompagnent de fièvre
CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES ORIENTANT VERS UNE ORIGINE
avec asthénie, parfois rash cutané (surtout après
TABLEAU BÉNIGNE OU MALIGNE
amoxicilline), énanthème pharyngé et dans cer-
Examen clinique Adénopathie évoquant Adénopathie devant faire rechercher tains cas hépatosplénomégalie.
une origine bénigne une cause maligne
Les hémopathies malignes comme les leucémies
Caractéristiques Molle Dure et les lymphomes peuvent aussi se manifester par
Petite Volumineuse des adénopathies généralisées, de même que
Inflammatoire Adhésion plans profonds l’histiocytose langerhansienne ou certaines affec-
Localisation Territoire inguinal ou cervical* Territoire sus-claviculaire tions auto-immunes comme la maladie de Still ou
le lupus érythémateux disséminé.
Évolution Taille stable Augmentation progressive en taille
Adénopathie régressive Adénopathie isolée persistante**
Adénopathie régressive qui réapparaît
Autres éléments d’orientation
Certaines caractéristiques cliniques sont rassu-
Signes généraux Bon état général Altération de l’état général
rantes, d’autres sont alarmantes (tableau).
Porte d’entrée Infection cutanée ou ORL Masse associée Petite taille, mollesse et mobilité sont évocatrices
Caries dentaires d’infections virales.
Syndrome tumoral Absent Présent Une adénopathie isolée, douloureuse d’allure
inflammatoire avec modification des téguments
Signes respiratoires Absents Présents
proches évoque avant tout une origine bactérienne.
Ex. neurologique Normal Anormal En revanche, dure, froide, volumineuse et adhé-
* Attention aux adénopathies cervicales basses affleurant le creux sus-claviculaire. rente aux plans profonds, elle doit alerter et faire
** Quel que soit le site (même inguinal ou cervical). suspecter une origine maligne.

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DOSSIER 689

Notons que les adénopathies des lymphomes ana-


plasiques à grandes cellules (LAGC) peuvent être
douloureuses et inflammatoires. Initialement, 2. Caractéristiques des adénopathies
elles régressent parfois spontanément (encadré 2). et orientation diagnostique
Y a-t-il une porte d’entrée ? Une infection cutanée
ou ORL proche évoque une origine bénigne.  Indolore – petite – molle – mobile
L’association à une masse d’apparition récente doit en faveur d’une  infection virale
faire suspecter une maladie tumorale.
 Isolée – douloureuse – inflammatoire*
Y a-t-il des signes cliniques de gravité ? (à tou-
en faveur d’une  infection bactérienne
jours rechercher) +++
Signes généraux. Altération de l’état général,  Indolore – grosse – dure – adhérente aux plans profonds
asthénie, anorexie, amaigrissement, fièvre font suspecte de  malignité
suspecter une cause tumorale ou infectieuse grave
(tuberculose).
* Attention aux adénopathies des lymphomes anaplasiques à grandes
Signes de compression. Détresse respiratoire, cellules, qui peuvent être douloureuses et d’allure inflammatoire.
syndrome CS, œdème des membres inférieurs,
symptômes de compression médullaire, d’obs-
truction des voies urinaires, ou d’occlusion intes-
tinale imposent une prise en charge urgente. CMV et toxoplasme s’imposent pour éliminer le
Syndrome tumoral. Des adénopathies générali- diagnostic de MNI ou de syndrome mononucléo-
sées avec hépatosplénomégalie évoquent une sique (2 prélèvements à 15 jours d’intervalle), ainsi
mononuclérose infectieuse mais doivent toujours qu’un frottis sanguin. Un tableau de pancytopénie
faire éliminer une hémopathie maligne. et blastes circulants, associé à des adénopathies
Signes d’insuffisance médullaire. Une pâleur, un généralisées, est la forme classique des leucémies
syndrome hémorragique cutanéo-muqueux peu- aiguës. Les lymphocytes activés propres des syn-
vent accompagner ou révéler une hémopathie dromes mononucléosiques peuvent être confondus
maligne ou une tumeur solide avec envahissement avec des blastes. Il est indispensable que l’examen
médullaire. du frottis sanguin soit fait par un examinateur
Des signes neurologiques par compression de expérimenté, pour ne pas poser un faux diagnostic
structures nerveuses doivent faire rechercher une de leucémie aiguë.
lésion tumorale associée. Quelques maladies
infectieuses virales avec adénopathies, comme la Imagerie 2
mononucléose infectieuse, peuvent comporter Il faut procéder pas à pas en fonction de la clinique
des anomalies neurologiques telles que l’ataxie ou et la biologie, et toujours commencer par les exa-
le syndrome de Guillain-Barré. mens simples, que sont la radiographie de thorax
et l’échographie abdominale.
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES En cas d’adénopathies sus-claviculaires, médias-
tinales ou abdomino-pelviennes, un scanner
Ils ne sont pas systématiques. Ils peuvent être néces- cervico-thoraco-abdomino-pelvien est en règle
saires, éventuellement d’emblée, en cas de signe réalisé pour orienter le diagnostic, rechercher un
de gravité. Devant un tableau clinique rassurant de éventuel cancer primitif, et faire le bilan d’exten-
bas risque de malignité, on est volontiers attentiste, sion (sites ganglionnaires, atteintes viscérales,
on contrôle l’évolution après quelques jours et, si localisations osseuses).
besoin, on demande les examens complémentaires En cas de suspicion de lymphome et après avis
dans un second temps. spécialisé, cet examen tomodensitométrique sera
couplé à une FDG-TEP (tomographie par émission
Biologie de positons).
La NFS-plaquettes et les paramètres biologiques de Les adénopathies médiastinales sont volontiers
l’inflammation sont toujours réalisés en premier secondaires à des processus malins (le plus sou-
devant un tableau d’adénopathies généralisées ou vent leucémies aiguës, lymphomes) ; elles sont
localisées persistantes. généralement situées dans le médiastin antérieur
Adénopathies localisées : une IDR ou bien les tests et moyen. D’autres causes sont également possi-
plus spécifiques T-SPOT.TB et/ou Quanti-FERON- bles (tuberculose, sarcoïdose).
TB7 pour les enfants vaccinés par le BCG sont à Les adénopathies profondes abdomino-pelviennes
faire pour éliminer le diagnostic de tuberculose. sont classiquement d’origine infectieuse (adénite
Une sérologie positive à Bartonella henselæ signe mésentérique), mais en situation intra-abdomi-
une maladie des griffes de chat. Un prélèvement nales elles peuvent révéler une pathologie
de gorge pour analyse bactériologique s’impose en maligne : lymphome classiquement, mais aussi
cas de suspicion d’adénite à pyogènes. métastases ganglionnaires de rhabdomyosarcome,
Adénopathies généralisées : les sérologies EBV, neuroblastome ou tumeur germinale maligne.

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690 DOSSIER Explorer une adénopathie chez l’enfant

À retenir tion ganglionnaire ou, souvent après orientation


cytologique, dans certains types de lymphomes
Une adénopathie est un ganglion de plus de 1 cm de diamètre. (notamment lymphome de Hodgkin, LAGC et
lymphomes B à grandes cellules).
De petite taille, molles et mobiles, elles sont habituellement
La documentation histologique doit être faite en
bénignes.
milieu spécialisé, de façon à optimiser les condi-
Si elles sont dures et adhèrent aux plans profonds, elles sont
tions du diagnostic grâce à l’expertise en termes
suspectes de malignité.
d’études morphologiques, à la possibilité d’ana-
Les adénopathies sus-claviculaires et médiastinales sont toujours lyses immuno-histochimiques exhaustives et de
pathologiques. caractérisation moléculaire, à partir d’un fragment
Devant un tableau d’adénopathies généralisées, un processus congelé. Selon les localisations et le diagnostic pré-
systémique doit être recherché. sumé, on a recours soit à une biopsie à l’aiguille,
soit à une adénectomie chirurgicale.
Dans le cas de métastases ganglionnaires de
tumeurs solides, la cytoponction effectuée en
Examens biopathologiques milieu spécialisé oriente le diagnostic et contribue
au stadage, mais la documentation histologique et
Ils s’imposent si les adénopathies sont inquiétantes biologique de la tumeur primitive reste nécessaire.
d’emblée (altération de l’état général, signes de
compression, syndrome tumoral, signes d’insuffi- CONCLUSION
sance médullaire, signes neurologiques) ; localisées
et persistantes ou encore récidivantes. La découverte d’une adénopathie chez l’enfant est
La ponction-aspiration ganglionnaire est un geste un motif fréquent de consultation et un défi pour le
peu agressif, facile du point de vue technique, médecin, puisqu’elle ouvre un vaste champ de
rapide et peu douloureux (anesthésie locale et, en diagnostics possibles. Dans le contexte de l’ur-
l’absence de contre-indication, mélange O2NO). gence, la priorité est la stabilisation du patient puis
Faite par une équipe entraînée, elle est rapide- la mise en place des démarches diagnostiques en
ment informative pour le diagnostic d’une adénite toute sécurité, sachant que dans la plupart des cas
infectieuse ou d’une tumeur maligne, évitant il s’agit d’adénopathies associées aux hémopathies
notamment une biopsie, inutile si infection. malignes. En dehors de ces situations, l’interro-
En cas d’hémopathie maligne, la documentation gatoire et l’examen clinique apportent un grand
biopathologique complète est parfois possible par nombre d’informations.
simple cytoponction pour les lymphomes malins Des maladies variées peuvent être en cause : il est
non hodgkiniens de type lymphoblastique T et nécessaire de connaître leurs modes de présenta-
Burkitt, et sur l’examen médullaire dans le cas des tion pour déterminer la conduite à tenir. Dans la
leucémies aiguës. Une consultation en milieu spé- plupart des cas, ces adénopathies sont bénignes,
cialisé avec ponction cytologique ganglionnaire mais il est important de ne pas méconnaître des
est en tous cas toujours préférable à la biopsie causes graves, avant même l’apparition de symp-
(si celle-ci peut être évitée pour parvenir au diag- tômes urgents et menaçants, quand ils ne sont pas
nostic). présents d’emblée. ●
La biopsie ganglionnaire est réalisée en cas
RÉFÉRENCES
d’échec ou d’interprétation douteuse de la ponc-
1. Orbach D, Brisse H, Estève M, Doz F. Attitude diagnostique
devant une tumeur comprimant les voies aériennes. In:
Labrune P, Oriot D, Labrune B, Huault G. Urgences pédia-
triques. Paris: de boeck-Estem; 2010: 97-100.
QUE DIRE AUX PARENTS/PATIENTS 2. Brisse HJ, Orbach D, Klijanienko J. Soft tissue tumors: ima-
AYANT DES ADÉNOPATHIES SUPERFICIELLES ging strategy. Pediatr Radiol 2010;40:1019-28.
3. Bourrillon A, Faye A. Adénopathies superficielles. In: Pédia-
trie pour le praticien. Paris: Elsevier Masson; 2011: 458-60.
• Les adénopathies superficielles de l’enfant sont très fréquentes 4. Tuerlinckx D. Diagnostic et prise en charge des adénopathies
et correspondent le plus souvent à des causes bénignes. cervicales de l’enfant. Rev Med Gen 2008;849:8-13.

• Les petites adénopathies mobiles de localisation cervicale et inguinale 5. Krause M, Schwizer W. Adénopathies. Forum Med Suisse
2002;38:889-93.
ne sont pas graves chez l’enfant sain.
6. Landman-Parker J. Adénopathies superficielles de l’enfant. In:
• Consultez votre médecin en cas d’adénopathies de plus de 1 cm Labrune P, Oriot D, Labrune B, Huault G. Urgences pédia-
et persistantes. triques. Paris: de boeck-Estem; 2010: 802-6.
7. Sun L, Xiao J, Miao Q, et al. Interferon gamma release assay
• Dans la plupart des cas, la surveillance sera suffisante. in diagnosis of pediatric tuberculosis: a meta-analysis. FEMS
• Parfois, des examens complémentaires doivent être entrepris pour Immunol Med Microbiol 2011;63:165-73.
permettre un diagnostic étiologique et ne pas méconnaître une cause
grave.
Les auteurs déclarent n’avoir aucun conflit d’intérêts.

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