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UNIVERSITY OF YAOUNDE I

FACULTY OF SCIENCE

DEPARTMENT OF ANIMAL BIOLOGY & PHYSIOLOGY

BOA 533

PHYSIOPATHOLOGIE DU SYSTEME GASTRO6INTESTINALE


(By Prof. TAN Paul)

PREMIERE PARTIE : ANATOMIE ET PATHOLOGIE

I) Rappels physiologiques de l’appareil digestif

A) L’œsophage :
1) Définition et anatomie de l’œsophage :
L’œsophage fait partie du segment haut de l’appareil digestif, il se situe entre le pharynx
et l’estomac. Il s’agit d’un conduit musculaire d’environ 25cm, qui transporte le bol
alimentaire en traversant successivement le cou, le thorax, le diaphragme et l’abdomen.
L’œsophage fait suite à l’hypopharynx en débutant par le sphincter supérieur
œsophagien, il achemine le bol alimentaire le long du corps thoracique de l’œsophage
par péristaltisme, et se termine par le sphincter inférieur au niveau du cardia,
permettant ainsi le passage des aliments dans la cavité gastrique.
L’œsophage présente une paroi d’une épaisseur moyenne de 3mm, constituée de
plusieurs couches tissulaires successives.
 La muqueuse est la couche interne de la paroi œsophagienne, elle est
directement en contact avec la lumière du corps œsophagien . Elle est
constituée d’un épithélium stratifié, dépourvu de cellules à mucus.
 La sous-muqueuse est une fine couche de tissu conjonctif riche en vaisseaux
sanguins et en fibres nerveuses associées au plexus submuqueux, dit plexus
de Meissner, contrôlant les sécrétions.

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 La musculeuse est constituée de deux couches musculaires. On retrouve une
couche interne, composée de fibres musculaires circulaires, et une couche
externe, composée de fibres musculaires longitudinales. Entre ces deux couches
musculaires, se trouve le plexus nerveux d’Auerbach qui contrôle la motricité.
 L’adventice est la couche la plus externe de la paroi. Elle est constituée d’une
couche fibreuse riche en cellules adipeuses. Elle enveloppe le corps œsophagien
sur toute sa longueur et permet son maintien aux organes adjacents.

2) Physiologie de l’œsophage :
Le mécanisme de déglutition, qu’il soit volontaire ou réflexe, permet, suite à une
activation des neurones cholinergiques du centre bulbaire de la déglutition, une
adaptation anatomique du complexe bouche-pharynx-larynx. Cette adaptation
morphologique chemine le bol alimentaire vers le sphincter supérieur de l’œsophage.
D’un point de vue physiologique, le sphincter supérieur de l’œsophage présente
une contraction permanente afin de limiter l’entrée d’air dans l’œsophage et de
prévenir également des régurgitations œsopharyngées. Lors de la déglutition, il y a une
inhibition des signaux cholinergiques par le centre bulbaire, ce qui permet une
relaxation ponctuelle du sphincter supérieur favorisant le passage du bol alimentaire.
Cette relaxation est précédée d’une contraction du sphincter supérieur, qui amorce
l’onde péristaltique vers le bas de l’œsophage.
Le cheminement du bol alimentaire dans le corps œsophagien se fait grâce à
l’activité motrice de la musculature. Ce péristaltisme résulte de l’activation du
système nerveux entérique sur les motoneurones excitateurs et inhibiteurs du plexus
d’Auerbach au niveau de la musculeuse.

Il existe deux types de péristaltisme :


- Le péristaltisme primaire : induit par le mécanisme de déglutition.
- Le péristaltisme secondaire : induit par une distension du corps œsophagien.
Le bol alimentaire s’achemine par péristaltisme vers la jonction œsogastrique, zone de
haute pression suite à un épaississement de la musculature œsophagienne au niveau du
sphin cter inférieur de l’œsophage.
Au niveau du sphincter inférieur œsophagien, on retrouve également une
contraction permanente empêchant le contenu gastrique de passer dans
l’œsophage. Mais toute déglutition induit une relaxation transitoire et brève par

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stimulation des fibres inhibitrices utilisant le monoxyde d’azote, permettant ainsi le
passage du bol alimentaire dans la cavité gastrique.
L’œsophage permet par sa position et son élasticité contractile, le cheminement
du bol alimentaire du pharynx jusqu'à l’estomac, tout en assurant une protection
anti-reflux œsopharyngé et gastro-œsophagien à travers la musculature renforcée
et la coordination contractile de ses sphincters supérieur et inférieur.

3) Les pathologies de l’œsophage :


Les maladies de l’œsophage se scindent en deux principales catégories qui
s’apparentent d’une part aux troubles moteurs de l’œsophage telle l’achalasie, et
d’autre part au reflux
gastro-œsophagien.

a) L’achalasie :
L’achalasie est un trouble moteur primitif de l’œsophage, qui correspond à une
absence de l’onde contractile propagée nécessaire au transport du bol alimentaire
vers le bas de l’œsophage et à une hypertonicité du sphincter inférieur
œsophagien. Il en résulte un apéristaltisme œsophagien et une absence de
relaxation du sphincter inférieur qui vont provoquer une dilatation progressive
spontanée de l’œsophage appelée mégaœsophage. Il s’agit d’un trouble moteur qui
entraine un obstacle fonctionnel au transit du bol alimentaire.

1) Epidémiologie :
L’incidence de l’achalasie est estimée aux alentours de 0.5 pour 100000 habitants
par an avec une prévalence de 8 pour 100000 habitants. Peu de données
épidémiologiques françaises sont disponibles et la majorité des études sont d’origines
américaines. L’a chalasie touche indifféremment les deux sexes, elle affecte tous les
âges mais reste néanmoins rare avant 15 ans.

2) Etiologie :
Selon certaines études, l’origine de l’achalasie serait un processus infectieux
conditionné par un terrain génétique favorable. Ceci induirait un processus
inflammatoire et/ou auto -immun provoquant ainsi une dégénérescence neuronale
par apoptose au niveau du plexus d’Auerbach.

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3) Physiopathologie :
Cette pathologie œsophagienne se développe suite à une dégénérescence des
fibres nerveuses post-ganglionnaires au niveau du plexus moteur d’Auerbach, avec une
réduction voire une absence de celles-ci. D’un point de vue histologique, les fibres
nerveuses cholinergiques et adrénergiques sont rarement atteintes. Les anomalies
sont dues à une détérioration voire une apoptose totale des fibres nerveuses
inhibitrices utilisant comme neurotransmetteurs le monoxyde d’azote NO et le peptide
vasoactif intestinal VIP. L’absence de neurotransmetteurs inhibiteurs confère à la
musculeuse œsophagienne un état hypertonique, qui se traduit par un
apéristaltisme et une achalasie du sphincter inférieur
œsophagien. Ce trouble moteur de l’œsophage implique un obstacle fonctionnel au
transit alimentaire qui engendre comme principal symptôme un phénomène de
dysphagie d’évolution progressive selon la dégénérescence du plexus nerveux.

b) Le reflux gastro-œsophagien :
Le reflux gastro-œsophagien est par définition la remontée d’une partie du
contenu gastrique dans l’œsophage. Ce phénomène de reflux du contenu gastrique
est la conséquence d’une défaillance de la barrière anti-reflux située au niveau de
la jonction œso-gastrique. Le reflux est un phénomène physiologique en phase post
prandiale, mais il prend un caractère pathologique avec la survenue de symptômes
et/ou de lésions œsophagiennes.

1) Epidémiologie :
Le reflux gastro-œsophagien touche 15 à 25% de la population générale. Il s’agit
d’une affection chronique avec une symptomatologie quotidienne touchant 8 à
10% des sujets adultes. La prévalence augmente considérablement avec l’âge et
touche plus l’homme que la femme.
Le reflux gastro-œsophagien est à l’origine de 10 à 20% des consultations
médicales en gastro-entérologie.

2) Etiologie :
Le reflux gastro-œsophagien est une pathologie multifactorielle dont l’étiologie
reste à ce jour incertaine. Certaines études orientent vers un caractère génétique

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à transmission héréditaire. Ces études se basent notamment sur la concordance entre
plusieurs caractères
pris en compte sur des cas de jumeaux témoins issus d’une famille avec un
antécédent d’adénocarcinome développé sur l’endobrachyœsophage. Les résultats sont
donc incertains, d’autant plus que certains facteurs tels que la consommation de
tabac, alcool et autres produits, ainsi que l’obésité contribuent à la survenue de ce
type de reflux.

3) Physiopathologie :
Le reflux gastro-œsophagien est principalement dû à une défaillance de la
barrière antireflux. Ce dispositif est défini comme une zone de haute pression
œsophagienne et est constitué du sphincter inférieur de l’œsophage (SIO) jouant le
rôle de sphincter interne et du muscle diaphragmatique jouant le rôle de sphincter
externe. Parmi les anomalies, on retrouve :
 La défaillance fonctionnelle du SIO : les études manométriques œsophagiennes
ont permis de mettre en évidence des variations de pressions du SIO dites
relaxations transitoires du sphincter inférieur de l’œsophage (RTSIO), induites
par des distensions gastriques, et survenant en dehors des déglutitions. Ces
relaxations du SIO s’associent à une ouverture plus rapide pendant une
durée plus longue du dispositif anti-reflux. Outre les relaxations transitoires,
dans certains cas, on peut parler d’une hypotonie du SIO c'est-à-dire qu’il
présente une pression moyenne inférieure à celle mesurée chez un su jet
témoin. Il s’agit d’un autre type de défaillance fonctionnelle du SIO qui en
revanche engendre un reflux gastro -œsophagien lors de pressions
habituellement inférieures à 10mmHg, essentiellement retrouvées lors de cas
d’œsophagite sévère.
 L’altération anatomique au niveau de la pince diaphragmatique : le muscle
diaphragmatique se contracte lors de chaque inspiration et par ce fait, joue un rôle
de renfort au niveau de la zone à haute pression du SIO. Une hernie hiatale se
caractérise par un décalage de la jonction œsophagio-gastrique de la pince
diaphragmatique d’environ 2cm. Cela induit une dissociation du muscle
diaphragmatique du sphincterinférieur, entrainant ainsi une défaillance du dispositif
anti -reflux. Des études récentes ont démontré qu’une hernie hiatale n’entraîne

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pas systématiquement un reflux, mais que cette altération anatomique peut accentuer
les manifestations d’un reflux gastro-œsophagien et favoriser les lésions d’œsophagites.
Le reflux gastro-œsophagien est une pathologie multifactorielle. Parmi les facteurs
pouvant entrer en jeu dans la physiopathologie de ce dernier, nous retrouvons :
 L’altération de la clairance œsophagienne : il s’agit là du pouvoir autonome
de l’œsophage à évacuer son contenu et ainsi réduire la durée d’une exposition à
l’acide gastrique en cas de reflux. Ce phénomène s’effectue en deux temps,
d’une part l’œsophage évacue le contenu acide par péristaltisme gravitationnel
secondaire car non engendré par la déglutition, d’autre part le volume résiduel
est tamponné par la sécrétion salivaire riche en bicarbonates. Ainsi une
défaillance motrice de l’œsophage et/ou une réduction de la sécrétion salivaire
peuvent altérer la clairance physiologique de l’œsophage. Lors de la phase de
sommeil profond, on retrouve une abolition du péristaltisme et de la
déglutition, rendant ainsi la clairance œsophagienne minime et expliquant le
caractère virulent du RGO nocturne.
 Le ralentissement de la vidange gastrique : un ralentissement de la vidange
gastrique peut augmenter à la fois le nombre et la durée d’un reflux. De
plus, une vidange gastrique lente est à l’origine de distensions gastriques,
elles-mêmes responsables des relaxations transitoires du SIO.
 L’altération de la muqueuse œsophagienne : une défaillance de résistance
de la muqueuse œsophagienne n’entre pas dans la physiopathologie du
reflux gastro-œsophagien, mais représente une source favorable au
développement de lésions œsophagiennes induites par le reflux acide.

A) L’estomac :

1) Définition et anatomie :
L’estomac est un segment dilaté du tube digestif, un organe creux en forme de J, qui
permet le stockage et la digestion du bol alimentaire provenant de l’œsophage. Il se
localise dans la partie haute de l’abdomen, sous le diaphragme, en contact avec le lobe
gauche du foie. Il est maintenu dans la cavité abdominale par des ligaments rattachés
au foie, au diaphragme et à la rate.
La morphologie de l’estomac se divise en 4 principales parties :

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- La zone de jonction avec l’œsophage qui détermine le début de la cavité
gastrique est appelée cardia.
- Une portion verticale qui représente les 2/3 supérieurs de l’estomac et se compose
de :
 La grosse tubérosité ou fundus, qui sert de poche à air gastrique
 Le corps de l’estomac ou corpus, qui sert de réservoir et de site sécrétoire.
- Une portion horizontale qui représente le 1/3 inférieur de l’estomac, appelée antre,
qui assure à la fois une fonction sécrétoire, une fonction de broyage et de mélange
du bol alimentaire, ainsi qu’une fonction d’évacuation vers la partie terminale de
l’estomac.
- Une partie terminale, appelée pylore ou sphincter pylorique, constituée d’un anneau
musculaire qui permet le passage du contenu gastrique vers le duodénum et
représente la zone de jonction gastroduodénale.

2) Physiologie et histologie :
a) La paroi gastrique :
Les fonctions de l’estomac sont assurées par les composants de sa paroi. La paroi
gastrique a une épaisseur moyenne de 5mm et se constitue de l’intérieur vers
l’extérieur par la superposition de la muqueuse, d’une sous muqueuse, d’une
musculeuse et d’une séreuse.

- La muqueuse gastrique est la couche tissulaire interne de l’estomac, en rapport


direct avec la lumière stomacale. Au sein de cette muqueuse, on distingue :
 Un épithélium de surface en contact avec la lumière.
 Les cryptes ou plis, formés par les invaginations de l’épithélium dans le
chorion.
 Les glandes gastriques qui différent en fonction de la localisation au sein du
corps gastrique.
 Une fine couche musculaire qui délimite en profondeur la muqueuse
gastrique.

(Voir structure de la coupe histologique de la paroi gastrique) :

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- La sous-muqueuse est formée d’une couche de tissus conjonctifs qui renferment des
vaisseaux et des neurones du système nerveux parasympathique dont le
neurotransmetteur, l’acétylcholine, stimule les glandes gastriques.
- La musculeuse gastrique est constituée de trois couches de muscles lisses
superposées :
 Une couche oblique interne, spécifique de l’estomac ayant pour rôle principal
le brassage intense du contenu gastrique.
 Une couche circulaire intermédiaire.
 Une couche longitudinale externe.
Cette composante musculaire gastrique est stimulée par l’acétylcholine, et permet à la
fois le brassage du bol alimentaire et d’assurer la continuité du péristaltisme de
l’appareil digestif.
- La séreuse est une fine couche transparente recouvrant l’intégralité de l’estomac et
forme ainsi le péritoine viscéral.

b) Les structures sécrétoires :


La muqueuse gastrique renferme les glandes sécrétoires, qui diffèrent selon la
localisation au sein de l’estomac.
On distingue 3 zones de sécrétions différenciées :
- La muqueuse cardiale renferme des glandes mucosécrétantes dites cellules à mucus.
- Au niveau de la grosse tubérosité et du corps de l’estomac, on retrouve les glandes
fundiques droites et peu profondes, dont:
 Les cellules pariétales ou cellules bordantes qui sécrètent de l’acide
chlorhydrique (HCl) et le facteur intrinsèque.
 Les cellules principales ou cellules peptiques qui sécrètent le pepsinogène.
 Les cellules neuroendocrines ou cellules ECL qui sécrètent l’histamine .
- Au niveau de la muqueuse antro-pylorique, on retrouve les glandes pyloriques
contournées et profondes, faites principalement de :
 Cellules mucosécrétantes
 Cellules neuroendocrines ou cellules G, sécrètent de la gastrine, hormone qui
stimule la sécrétion d’acide chlorhydrique par les glandes fundiques ainsi que
la prolifération des cellules ECL à l’histamine.
 Cellules neuroendocrines dites cellules EC sécrétant la sérotonine.
 Cellules neuroendocrines dites cellules D sécrétant la somatostatine.

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Quelque soit le type de muqueuse, on retrouve des cellules mucipares dans toutes les
zones de l’estomac. Le mucus est un gel adhérant à la muqueuse gastrique, riche en
bicarbonates qui permet de neutraliser les protons et donc assure un rôle de protection
de la paroi face à l’attaque acide et enzymatique.

Le tableau suivant résume les différentes sécrétions gastriques en fonction des parties de l’estomac :
Zone gastrique Cellules ou glandes Le produit sécrété

Cardia Cellules mucosécrétantes Mucus


Fundus et grosse Cellules pariétales HCl + facteur
tubérosité Cellules principales intrinsèque
Cellules ECL Pepsinogène
Histamine

Antre-pylorique Cellules G Gastrine


Cellules EC Sérotonine
Cellules D Somatostatine

Le produit ainsi formé par cette multitude de glandes sécrétrices est le suc gastrique. Le
suc est un liquide clair, visqueux et acide. Le débit sécrété est rythmé par les repas. On
compte un volume quotidien moyen de 2 à 2,5L.
Le facteur intrinsèque sécrété par les cellules pariétales est indispensable à l’absorption
de la vitamine B12.
Le pepsinogène est sécrété par les cellules principales sous forme de pepsinogène
inactif, qui est activé en pepsine par les protons au niveau de la lumière gastrique. La
pepsine est une enzyme protéolytique qui permet d’hydrolyser et de fragmenter les
molécules complexes du bol alimentaire en polypeptides simples en vue de leur
digestion ultérieure.

c) Les mécanismes de la sécrétion acide :

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1) Présentation de la cellule pariétale :
La sécrétion d’acide gastrique se fait exclusivement au niveau des cellules pariétales. Ce
sont des cellules volumineuses, pourvues d’un noyau cellulaire repoussé en
périphérie. Elles présentent une structure spécifique :
- Un cytoplasme riche en mitochondries, apportant une grande source en ATP
mitochondrial.
- Un vaste réseau de canalicules internes, formé des invaginations membranaires
au niveau de la lumière du tube stomacal.
- Un transporteur membranaire : la pompe à proton ou pompe H+/K+/ATPase, dont le
rôle principal est d’assurer la sortie des protons au niveau de la lumière stomacale,
qui vont se lier aux ions chlorure Clafin de former de l’acide chlorhydrique HCl.
- Des récepteurs membranaires situés au niveau du pole basal, spécifiques de certains
médiateurs parmi lesquels on compte :
 Récepteur à acétylcholine
 Récepteur à gastrine
 Récepteur à histamine H2
 Récepteur à prostaglandine
La présentation du mode de fonctionnement de la pompe à proton est un point
essentielpour une meilleure compréhension du mécanisme de la sécrétion acide
au niveau de
l’estomac.

2) La pompe à protons :
La pompe à protons est une enzyme transmembranaire située sur la membrane
luminale des cellules pariétales. Il s’agit d’une protéine capable de former un canal
membranaire virtuel favorisant le passage des ions H+
.
D’une façon générale, un échange d’ions à travers une membrane cytoplasmique
s’effectue selon deux principes :
- Soit par une diffusion passive, c'est-à-dire selon le gradient de concentration, où un
ion passe du milieu le plus concentré au milieu le moins concentré. Dans ce cas, le
transfert d’ion s’effectue sans consommation d’énergie par la cellule.
- Soit par une diffusion active, c'est-à-dire contre le gradient de concentration. Ce
principe de contre gradient nécessite une forte consommation d’énergie par la

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cellule. On retrouve ce cas de figure lors du passage membranaire des ions H+
au niveau des cellules pariétales.
La pompe à protons utilise l’ATP comme source d’énergie nécessaire à sa
phosphorylation.
Cette phosphorylation permet son changement de conformation spatiale avec une
alternance entre deux états. Un état E1 dit état non phosphorylé, ayant une faible
affinité pour les ions K+, et un état E2 dit phosphorylé, ayant une forte affin ité pour ces
derniers. Les ions H+proviennent de la dissociation d’acide carbonique (H2CO3),
produit formé à partir de dioxyde de carbone (CO2) et d’eau (H2O) par une anhydrase
au niveau de la cellule pariétale.
Chaque cycle catalytique de phosphorylation conduit à un transfert d’ion H+
vers la lumière gastrique et un ion K+
vers le cytoplasme pariétal. Ce phénomène de transport est également couplé à un
canal membranaire qui permet le transfert des ions K+vers la lumière et de ce fait un
ravitaillement continu des ions K+ nécessaires au fonctionnement de la pompe à
protons. L’échange membranaire des ions K+ est suivi par un passage d’ions Cl
vers la lumière, afin de maintenir un état électriquement neutre dans la cellule.
Le schéma suivant résume le mécanisme de la sécrétion d’acide chlorhydrique par la
cellule pariétale :

3) Les mécanismes de régulations :


Au niveau de la membrane basale des cellules pariétales, se trouvent les
récepteurs à médiateurs de la sécrétion gastrique. Ces médiateurs peuvent être
activateurs ou inhibiteurs et sont véhiculés par voie endocrine, paracrine ou nerveuse.
L’activation de ces récepteurs est couplée à des systèmes de transduction cellulaire
et de transport de l’information jusqu’au pôle luminal de la cellule p ariétale afin
d’activer ou d’inhiber la sécrétion gastrique.
- Stimulation par la gastrine : par voie endocrine, la gastrine est sécrétée par les
cellules G des glandes antre-pyloriques. Elle agit directement par liaison au récepteur
membranaire de la cellule pariétale et indirectement par liaison au récepteur des
cellules ECL stimulant ainsi la sécrétion de l’histamine.
- Stimulation par l’acétylcholine : par voie nerveuse, l’acétylcholine est libérée par les
neurones post ganglionnaires du système nerveux parasympathique. Elle agit
directement par liaison au récepteur membranaire de la cellule pariétale, et

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indirectement par stimulation de la sécrétion de la gastrine par les cellules G et de
l’histamine par les cellules ECL.
- Stimulation par l’histamine : par voie paracrine, l’histamine est produite par les
cellules ECL, elle stimule directement par liaison au récepteur histaminique H2
au niveau de la cellule pariétale.
- Inhibition par la somatostatine : par voie paracrine, la somatostatine est produite par
les cellules D de l’antre pylorique, et représente le principal facteur inhibiteur de la
sécrétion acide. Elle agit directement par liaison au récepteur membranaire au
niveau de la cellule pariétale et indirectement par l’inhibition de la libération
d’histamine par les cellules ECL. La libération de somatostatine reste sous la
dépendance d’une réaction en cascade. En effet, la sécrétion de somatostatine est
favorisée d’une part par une augmentation de la concentration des ions H+ dans la
lumière gastrique, et d’autre part par une hormone duodénale, la sécrétine, dont la
libération est stimulée par l’arrivée des nutriments digérés dans le duodénum.
Un autre phénomène sécrétoire est observé au niveau de la cavité gastrique ; en effet,
les prostaglandines sont synthétisées par les cellules épithéliales de la muqueuse et
assurent un rôle majeur dans l’intégrité de cette dernière. Les prostaglandines
agissent par liaison au récepteur spécifique sur les cellules mucosécrétantes, stimulant
ainsi la production mucine, principale protéine constituante du mucus. Les
prostaglandines sont également des médiateurs de l’inflammation, elles permettent la
dilatation des vaisseaux de la muqueuse
et favorisent un meilleur apport en oxygène pour les cellules. Elles assurent un
rôle de protecteur physiologique de la cavité gastrique.

d) Le cycle physiologique :
L’estomac est un organe central de l’appareil digestif. Son cycle physiologique est décrit
en 3 phases, avec un parallélisme entre d’une part sa motricité et d’autre part la
régulation de ses fonctions sécrétrices.
- A jeun, dite phase céphalique.
A jeun, la sécrétion d’acide gastrique est faible, mais l’absence de bol alimentaire
confère un pH proche de 2 car il agit normalement comme neutralisant. L’activité
motrice à jeun est décrite par le complexe migrant moteur (CMM), dont le cycle
dure de 90 à 120min et se décompose en 3 phases. Absence de contraction lors de la
phase primaire, puis une phase avec des contractions irrégulières et enfin une phase

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finale avec des fortes contractions régulières. L’enchainement de ce complexe
moteur permet l’évacuation générale des particules indigestibles.
Au cours de cette phase céphalique, il existe une régulation nerveuse issue soit
d’une stimulation centrale par excitation du centre bulbaire par des stimuli
sensoriels ou
psychiques tels que la vue, l’odeur ou le goût des aliments, soit d’une stimulation
périphérique comme par exemple une hypoglycémie donnant une sensation de
faim. Ces stimuli du système nerveux parasympathique activent le système
nerveux intrinsèque au niveau du plexus de Meissner de la sous-muqueuse et
induisent la libération d’acétylcholine.
Ce neuromédiateur excitateur va entrainer la réaction en cascade au niveau de la
muqueuse gastrique avec :
 Activation des cellules pariétales : sécrétion d’HCl et facteur intrinsèque
 Activation des cellules principales : sécrétion du pepsinogène
 Activation des cellules G : sécrétion de la gastrine et indirectement de l’histamine
 Activation des fibres nerveuses : stimulation du péristaltisme primaire.

- En post prandial, dite phase gastrique :


L’ingestion d’aliments provoque une distension gastrique qui est, entre-autres, à
l’origine de la sécrétion acide. Le pic de cette dernière est atteint environ une heure
après le début d’un repas. En revanche, l’ingestion d’aliments annule le CMM et induit
une phase de relaxation fundique. En effet il s’agit d’une accommodation gastrique
permettant une augmentation du volume de la cavité gastrique sans augmentation
de pression motrice, favorisant ainsi le remplissage de l’estomac. Ce phénomène
est possible grâce à un ré flexe vago-vagal qui stimule les neurones inhibiteurs à
monoxyde d’azote et du peptide intestinal vasoactif.

Au cours de cette phase gastrique, on retrouve une régulation hormonale induite à la


fois par une distension antrale et par la simple présence des aliments. En effet ce
stimulus va activer le pneumogastrique favorisant la sécrétion de facteurs pro -
gastriques. Il existe néanmoins un mécanisme paracrine de rétrocontrôle au cours
de cette phase gastrique. Un excès d’ions H+ stimule la libération de somatostatine par
les cellules D et va ainsi mettre en avant un phénomène feedback de freinage de la
sécrétion d’acide gastrique.

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Un cycle de digestion gastrique est dépendant de la consistance du bol alimentaire.

Consistance du bol alimentaire Volume de suc gastrique Durée gastrique nécessaire à


produit la digestion

Liquide Faible volume Rapide

Solide Volume important Modérée

Lipide – gras Volume modéré Lente

- La phase intestinale :
L’arrivée du chyme, produit de la digestion gastrique dans le duodénum est
pulsatile, adaptée à la capacité de stockage de ce dernier, avec des contractions
musculaires qui se propagent du haut de l’estomac vers le pylore. La présence du
chyme acide dans le duodénum stimule la sécrétion de sécrétine par les cellules
endocrines de l’intestin grêle. La sécrétine vient alors inhiber la production d’acide
gastrique et amorce par ce biais la vidange gastrique.

3) Les pathologies de l’estomac :


Les études épidémiologiques des affections de l’estomac mettent en avant
plusieurs pathologies d’impacts variés. En effet la dyspepsie représente le motif le
plus courant des consultations en gastro-entérologie avec le reflux gastro-
œsophagien. Les techniques de diagnostic et de thérapie pour cette affection sont
coûteuses à la sécurité sociale mais cette pathologie reste sans gravité ni
complication. En revanche, la gastrite et l’ulcère gastrique sont des pathologies à
caractère plus virulent et peuvent évoluer vers un cancer de l’estomac.

a) La gastrite :
La gastrite est par définition est une atteinte de type inflammatoire de la
muqueuse gastrique. Elle se caractérise d’une part par un infiltrat inflammatoire
au niveau du tissu conjonctif visible par la présence de polynucléaires dans le chorion,
et d’autre part par des lésions épithéliales pouvant causer une at rophie, une
métaplasie ou une dysplasie du revêtement épithélial.

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1) Epidémiologie :
Les gastrites chroniques sont très fréquentes et touchent environ 30% de la
population adulte. En revanche, les cas de gastrites aigües sont rares si on exclut les
gastri tes médicamenteuses dues aux AINS. En effet, les AINS représentent 5% des
prescriptions médicales mais reflètent 25% des effets indésirables indiqués aux centres
de pharmacovigilance .

2) Etiologie :
Les gastrites aiguës sont le plus souvent médicamenteuses notamment par le
traitement au
long courant avec des AINS ou de l’aspirine. On retrouve aussi certains cas de gastrite
aiguë par abus d’alcool ou de tabac.
Les gastrites chroniques sont majoritairement infectieuses dues à Helicobacter
pylori, responsable de 80 à 90% des cas. Ce type de gastrite est souvent
asymptomatique et son diagnostic n’engendre pas systématiquement la mise en place
d’un traitement d’éradication.

3) Physiopathologie :
La gastrite reflète un état inflammatoire et un état lésionnel au niveau de la muqueuse.
La physiopathologie de cette affection dépend de son étiologie.
L’atrophie de la muqueuse gastrique résulte de la perte de la différenciation
cellulaire au niveau épithélial pouvant impliquer la disparition des glandes
sécrétrices. Dans un cas de gastrite à Helicobacter pylori, la gastrite est dite active au
début avec un état inflammatoire marqué, puis devient inactive par une atrophie
des glandes sécrétrices. Cette atrophie implique la disparition naturelle de la bactérie
du fait de l’absence d’acidité dans le milieu.
L’atrophie gastrique de l’anémie de Biermer est très rare mais représente un cas
extrême de régression glandulaire au niveau fundique. Il en résulte d’une part une
achlorhydrie c'est -àdire une abolition sévère de la sécrétion gastrique même avec une
stimulation de celle -ci, et
d’autre part, une disparition de la sécrétion du facteur intrinsèque nécessaire à
l’absorption de la vitamine B12.

15
La prise au long court d’AINS ou d’aspirine va induire une érosion de la muqueuse
le plus souvent au niveau de l’antre et peut évoluer vers un stade hémorragique plus
sévère.
Certains cas d’abus d’alcool ou de tabac engendrent une gastrite avec un état
œdémateux réversible à l’arrêt.

b) L’ulcère gastrique :
L’ulcère gastrique se présente comme une perte de substance touchant les couches les
plus profondes de la paroi gastrique. Cette affection est de localisation gastrique,
elle est caractérisée d’une part, par un cratère ulcéreux atteignant la muqueuse, la
sous muqueuse et la musculeuse, et d’autre part par une réaction inflammatoire
profonde. Cette notion de profondeur le différencie des manifestations d’érosion,
d’abrasion et d’exulcération superficielle qui n’atteignent pas la couche musculaire de
la paroi. Il s’agit d’une affection évoluant par poussées, symptomatiques ou non,
et laissant des cicatrices à la guérison. Autrefois considérée comme fréquente et
chronique, elle se limite aujourd’hui à une seule poussée grâce à une thérapie adaptée
résultant notamment de la découverte d’un germe en cause et du développement
d’une classe médicamenteuse spécifique. Ainsi, l’éradication du germe H. pylori fait
baisser le taux de récidives à environ 6% alors que l’absence d’éradication présente un
taux de récidives de l’ordre de 59%.

1) Epidémiologie :
La prévalence de l’ulcère gastrique est estimée à 2% de la popula tion générale
avec une incidence annuelle de 0.5/1000 avec un sex -ratio de 1. Le pic de fréquence
est observé dans la tranche des 55 à 65 ans avec une mortalité d’environ 2.5% des
patients atteints. L’ulcère gastrique reste néanmoins quatre fois plus rare que
l’ulcère duodénal, mais seul l’ulcère gastrique peut être associé à un cancer.
La prévalence de l’infection à Helicobacter pylori est un facteur épidémiologique
important dans le cas de l’ulcère gastrique ou duodénal. Le seul réservoir connu
de cet agent est l’estomac humain, ce qui suggère une contamination interhumaine
exclusive avec un mode oro-oral ou oro-fécal. Cette prévalence bactérienne dépend de
l’âge et du pays d’origine. En effet, étant donné le mode de contamination, la
prévalence est de l ’ordre de 80% en Afrique, Asie et Europe de l’est, due à un niveau
d’hygiène souvent bas et elle est de l’ordre de 30 à 50% dans les pays développés.

16
2) Etiologie :
L’étiologie de l’ulcère gastrique se scinde principalement en deux grandes entités :
- Le germe Helicobacter pylori est le plus souvent mis en cause, en effet une infection
par H. pylori est retrouvée 7 fois sur dix lors d’un ulcère gastrique. Il s’agit d’un bacille
Gram négatif de petite taille, à croissance lente et très résistant. Il est à la fois mobile
grâce à ses flagelles et adhère à l’épithélium gastrique grâce à ses facteurs
d’adhésion. La bactérie est classée depuis 1994 par l’organisation mondiale de la
santé (OMS) comme agent cancérigène de classe 1 de par son implication dans le
cancer de l’estomac.
- La toxicité des AINS représente la deuxième source d’ulcère gastrique. Lors de
la prise prolongée d’AINS, 12 à 30 % des complications évoluent en ulcère gastrique.
Outre l’infection à Helicobacter pylori et la consommation de médicaments
gastrotoxiques, d’autres facteurs favorisent la survenue d’un ulcère gastrique :
- L’âge, avec un seuil critique de 60 – 65 ans, suite à diminution des prostaglandines
endogènes gastriques.
- Le tabagisme augmente la sécrétion acide et retarde la cicatrisation.
- Le stress physique et psychique potentialise l’ulcérogenèse.
- L’alcool, malgré son rôle stimulant de sécrétion de gastrine, n’est pas à ce jour retenu
comme facteur de risque de la maladie ulcéreuse.

3) Physiopathologie de l’ulcère gastrique


L’ulcère d’une façon générale est décrit comme un déséquilibre entre les facteurs
d’agression et les mécanismes de défense. L’ulcérogenèse de l’ulcère gastrique est
encore sujette à de nombreuses études mais contrairement à l’ulcère duodénal où
les facteurs d’agression prédominent, l’ulcère gastrique est dû à une altération de la
défense pariétale.
La découverte du germe Helicobacter pylori en 1983 parles chercheurs Australiens,
Warren et Marshall, a apporté une nouvelle vision de la physiopathologie ulcéreuse.
Ce germe est à l’origine d’une gastrite chronique. Dans l’ulcère gastrique, la
gastrite est dite de localisation diffuse et se localise
plutôt du côté fundique au niveau du corps de l’estomac. Cette localisation
détermine le profil sécréteur de l’ulcère gastrique comme étant normo ou hypo-
sécréteur suite à la destruction des cellules pariétales situées au niveau du fundus.

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Cette sécrétion anormalement basse peut être la résultante d’autres facteurs tels :
- Une masse cellulaire pariétale plus faible
- Une extension de la gastrite du fundus vers des zones plus hautes avec un état
inflammatoire et atrophique plus sévère
- Une atrophie des cellules ECL à histamine suite à la gastrite
- Une neutralisation de l’acidité par un reflux duodénal alcalin
Après colonisation de la muqueuse gastrique par Helicobacter pylori, son
mécanisme d’attaque se met en place et altère les mécanismes de défense selon
plusieurs processus enzymatiques.
Grâce à une protéase et une phospholipase, elle détruit la structure polymérique
de la mucine, puis détruit le surfactant phospholipidique du mucus. Ce mécanisme
est doublement nocif pour le rôle de barrière du mucus car il devient
structurellement plus faible et moins résistant dans un premier temps, mais il perd
également son hydrophobicité. Il en résulte une perméabilité double aux ions H+
au niveau de la paroi gastrique suite à l’altération structurelle du gel de mucus
adhérant. De plus, la bactérie utilise le surfactant détruit pour se protéger contre la
digestion acide.
La bactérie possède notamment une uréase, nécessaire à la colonisation
bactérienne. En effet cette enzyme permet la production d’ammoniaque à partir
des ions hydrogènes du milieu, afin de maintenir un pH au dessus de 4
indispensable à sa survie. L’ammoniaque produite, inhibe le renouvellement
cellulaire et altère la phase de réparation et de cicatrisation de la muqueuse.
La bactérie possède également des lipopolysaccharides, qui modifient la qualité des
mucines aggravant ainsi l’efficacité du mucus, et par conséquent stimulent la
sécrétion de pepsinogènes.
Certaines souches (50 à 60%) de la bactérie produisent une cytotoxine dite
vacuolisante, capable d’induire des lésions directement dans la muqueuse.
Ainsi par ce schéma complexe d’attaque du germe Helicobacter pylori, s’explique la
notion d’altération des mécanismes de défense lors d’un ulcère gastrique. Cette
défaillance induite de la barrière protectrice gastrique dans un milieu fortement acide
et riche en enzymes va provoquer une perte de substance touchant les couches les
plus profondes de la paroi gastrique, et pouvant provoquer des complications
telles qu’une perforation ou une hémorragie digestive.

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C) Le duodénum :

1) Définition et anatomie :
Le duodénum est le segment premier de l’intestin grêle, qui se compose
successivement du duodénum, du jéjunum et du colon. Le duodénum est un conduit qui
fait suite à l’estomac, il commence au pylore et débouche dans le jéjunum à l’angle
de Treitz. Sa position dans le tractus digestif permet le cheminement du bol
alimentaire transformé en chyme acide par l’estomac. Au sein du duodénum, l’acidité
du chyme est neutralisée au niveau local par une régulation hormonale qui permet une
action sur les sécrétions gastriques et parallèlement une action hépato-pancréatique
nécessaire à l’absorption des nutriments digérés.
Le duodénum est un organe profond du système digestif, dont la forme rappelle
la lettre « C » et épouse le corps supérieur du pancréas. Sa morphologie externe se
présente tel un conduit cylindrique d’une longueur moyenne de 30cm, ponctuée de
3 coudures qui le segmentent en 4 parties distinctes.
- Le premier duodénum ou D1 est en position horizontale, et succède directement au
pylore.
- Le second duodénum ou D2, est en position verticale descendante. Il fait suite au D1
après l’angle duodénal supérieur. Sur la face intérieure du second duodénum, se
trouve l’abouchement de l’ampoule de Vater. Cette ampoule est définie comme
réservoir du canal cholédoque provenant du foie, et du canal pancréatique principal.
- Le troisième duodénum ou D3, est en position horizontale, et succède au D2 après
l’angle duodénal inférieur dit genu inferius.
- Le quatrième duodénum ou D4, est en position verticale ascendante, et
débouche sur le jéjunum au niveau de l’angle de Treitz.
D’un point de vue histologique, la paroi du duodénum est identique à celle de l’intestin
grêle dont il fait partie avec néanmoins quelques particularités. La paroi duodénale est
composée de quatre couches successives avec de l’intérieur vers l’extérieur :
- La muqueuse qui est formée d’un épithélium de surface riche en entérocytes et en
cellules mucosécrétantes, d’un chorion et d’une fine couche musculaire en
profondeur. Elle se caractérise par une alternance de villosités et de cryptes. Les
villosités sont formées par des expansions du chorion dans l’épithélium, alors que les
cryptes sont formées par les invaginations de l’épithélium dans le chorion.
- La sous-muqueuse duodénale qui contient les glandes de Brunner, responsables de la

19
sécrétion alcaline et des cellules neuroendocrines telles que les cellules S qui
sécrètent la sécrétine.
- La musculeuse qui est composée de deux couches musculaires successives, une
couche circulaire interne et une couche longitudinale externe.
- La séreuse qui enveloppe le corps du duodénal et forme ainsi son péritoine viscéral.
Le duodénum est donc le segment initial de l’intestin grêle, siège de la rencontre du
contenu gastrique avec les sécrétions biliaires et pancréatiques.

2) Physiologie du duodénum :
L’arrivée du chyme dans le duodénum correspond à la phase intestinale du cycle
physiologique de la digestion. Du fait de sa position dans le système digestif, le
duodénum n’est pas un lieu d’absorption des nutriments comme dans les parties
basses de l’intestin grêle, mais celui d’une action chimique régulée par des hormones
duodénales.
Dans le duodénum, l’arrivée du chyme à pH acide représente le principal stimulus
de la phase duodénale de digestion. En effet, ce pH acide favorise d’une part la
sécrétion de sécrétine par les cellules S duodénales et d’autre part une sécrétion d’un
mucus alcalin par les glandes de Brunner.
La sécrétine est un antagoniste de la gastrine, hormone gastrique qui stimule à la
fois les cellules pariétales et la libération d’histamine. Elle exerce ainsi un rétrocontrôle
négatif sur les sécrétions gastriques.
La sécrétine agit également au niveau pancréatique par stimulation des acini
pancréatiques.
Lors de la phase intestinale, la stimulation de ces cellules par la sécrétine favorise
la sécrétion d’une solution bicarbonatée qui vien t participer à la neutralisation du pH
acide du chyme.
Cette phase de sécrétion multiple possède un rôle primordial pour le maintien de
l’intégrité de la paroi duodénale, car elle permet à la fois de tamponner le pH
acide provenant de l’estomac mais également d’exercer un rétrocontrôle négatif
sur les sécrétions gastriques par l’effet antagoniste de la sécrétine.
Une autre hormone duodénale intervient au cours de cette phase intestinale.
Contrairement à la sécrétine dont la sécrétion est stimulée par la présence d’un pH
acide, la sécrétion de cholécystokinine est elle stimulée par l’arrivée d’acide gras,

20
acide aminés ou de peptones dans la cavité duodénale. La cholécystokinine a une
action sur deux organes distincts :
- Elle agit sur le pancréas en stimulant la sécrétion d’un suc riche en enzymes
telles que la trypsine, la chymotrypsine, l’amylase et la lipase nécessaires à la digestion
des lipides, protéines et glucides.
- Elle agit au niveau du foie en favorisant la production de la bile, et stimule la
contraction de la vésicule biliaire ainsi que le relâchement du sphincter d’Oddi. Elle
vient par ce fait potentialiser les effets de la sécrétine en provoquant la chasse
biliaire et permet de déverser les sécrétions biliaires et pancréatiques dans le
duodénum.
Le duodénum représente ainsi le compartiment intestinal où se mélange le chyme
gastrique avec les sécrétions biliopancréatiques en vue de la neutralisation du pH acide
et la digestion des nutriments. Le duodénum reste néanmoins le siège d’une
absorption irrégulière et débouche vers le jéjunum, site principal de l’absorption des
nutriments issus de la digestion.

3) Les pathologies du duodénum :


Dans le duodénum, l’affection la plus courante est l’ulcération. Elle peut être soit
typiquement un ulcère duodénal, soit la résultante d’une sécrétion tumorale comme
dans le syndrome de Zollinger-Ellison.

a) L’ulcère duodénal :
Tout comme l’ulcère gastrique, l’ulcère duodénal se présente comme une perte
de substance au niveau de la paroi, atteignant ses couches les plus profondes. Cette
affection est de localisation duodénale et plus précisément dans le bulbe duodénal.
De même que pour l’ulcère gastrique, il s’agit d’une affection évoluant par
poussées, symptomatiques ou non, et laissant des cicatrices à la guérison. Autrefois
considérée comme fréquente et chronique, elle se limite aujourd’hui à une seule
poussée grâce à une thérapeutique adaptée.

1) Epidémiologie :
La prévalence de l’ulcère duodénale est estimée à 8% de la population générale
avec une incidence annuelle de l’ordre de 0.8 à 5/1000. L’ulcère duodénal est
plus fréquent chez l’homme avec un sex-ratio de 3/1. Le pic de fréquence est observé

21
dans la tranche des 45 à 65 ans avec une mortalité d’environ 1% des patients atteints.
L’ulcère duodénal est quatre fois plus fréquent que l’ulcère gastrique mais il n’est pas
associé à un caractère cancéreux.
Tout comme l’ulcère gastrique, la prévalence de l’infection à Helicobacter pylori
est un facteur épidémiologique important dans l’ulcère duodénal. L’absence
d’éradication de ce germe présente un taux de récidive de l’ordre de 67%.

2) Etiologie :
L’étiologie de l’ulcère duodénal se scinde principalement en deux grandes entités :
- Le germe Helicobacter pylori est le plus souvent mis en cause, en effet une infection
par H. pylori est retrouvée 9 fois sur dix lors d’un ulcère duodénal.
- La toxicité des AINS représente la deuxième source d’ulcère duodénal. Lors d e
la prise prolongée d’AINS, 2 à 19 % des complications évoluent en ulcère duodénal.
Outre l’infection à Helicobacter pylori et la consommation de médicaments
gastrotoxiques, d’autres facteurs favorisent la survenue d’un ulcère gastrique :
- L’âge
- Le tabagisme augmente la sécrétion acide et retarde la cicatrisation.
- Le stress physique et psychique potentialise l’ulcérogenèse.
- L’alcool, malgré son rôle de stimulant de sécrétion de la gastrine, n’est pas à ce jour
retenu comme facteur de risque de la maladie ulcéreuse.
- Les sujets du groupe sanguin O non sécréteurs des antigènes spécifiques présentent
un risque de 1.5 à 2.5 fois plus élevé de développer un ulcère duodénal.

3) Physiopathologie :
L’ulcère qu’il soit gastrique ou duodénal, est décrit par un déséquilibre entre les
facteurs d’agression et les mécanismes de défenses. Lors d’un ulcère duodénal, les
facteurs d’agression prédominent provoquant ainsi cette altération profonde de la
paroi spécifique de l’état ulcéreux.

Contrairement à l’ulcère gastrique, Helicobacter pylori est responsable d’une


gastritechronique de localisation antrale qui prédispose à l’ulcère duodénal. Cette
localisation de la gastrite confère le statut normo ou hypersécréteur acide de l’ulcère
duodénal.
Ce statut d’hypersécréteur s’explique en plusieurs points :

22
- Le germe Helicobacter pylori se trouve au niveau antral lors d’un ulcère
duodénal. L’uréase de la bactérie produit de l’ammoniaque en utilisant les ions H+
du milieu modifiant ainsi le pH au niveau antral. Cette modification du pH autour des
cellules G antrale provoque une stimulation permanente de celles-ci entrainant une
hypergastrinémie responsable de la sur-activation des cellules pariétales.
- L’hypergastrinémie induite est notamment responsable d’une augmentation de la
masse cellulaire pariétale. En effet, la gastrine joue un rôle trophique sur la
masse cellulaire estimée, elle double chez plus de 20% des sujets atteints d’un
ulcère duodénal. Plusieurs facteurs sont responsables de cette augmentation trophique
de
la masse cellulaire pariétale avec en premier lieu un excès de gastrine ou un déficit
en somatostatine. Des facteurs génétiques et environnementaux tel que le tabac ou
le stress sont également mis en cause. Cette prolifération excessive de la masse
cellulaire pariétale est directement liée au débit acide maximal.
- Lors d’un ulcère duodénal, on remarque également une augmentation quantitative
des récepteurs muscariniques sur les cellules pariétales fundiques. Cela engendre
une sécrétion acide plus accentuée notamment par stimulation centrale. Cela
détermine également le côté agressif de la sécrétion acide nocturne qui est
sensiblement plus importante lors d’un ulcère duodénal.
Certaines études, telles que la méthode de Fordtran et Walsh et la technique de
Malagelada, sur les sécrétions acides postprandiales démontrent que dans des
conditions physiologiques normales, un sujet atteint d’ulcère duodénal présente
une charge acide délivrée au duodénum trois à quatre fois supérieure à la normale.
Il en résulte une acidité plus importante au niveau du bulbe duodénal suite à un
passage facilité par l’état inflammatoire que provoque la gastrite dans la jonction
gastroduodénale.
Ainsi, même avec un statut normo-sécréteur, la charge acide participe à la genèse
de la lésion ulcéreuse bulbaire d’autant plus que chez un sujet atteint d’ulcère
duodénal la production de bicarbonates par le duodénum est fortement réduite
notamment suite à la lésion de la muqueuse duodénale.
La vitesse de la vidange gastrique joue également un rôle dans l’ulcérogenèse. En effet,
chez les ulcéreux duodénaux, la vitesse de la vidange gastrique est souvent accélérée ne
laissant pas aux bicarbonates duodénaux et aux sécrétions bilio-pancréatiques le temps
nécessaire à la neutralisation du chyme acide.

23
Dans l’ulcère duodénal, la sécrétion acide accentuée n’est pas le seul facteur
d’agression, généralement une agression chloropeptique est mise en cause.
L’étude du rapport débit peptique sur débit acide basal donne schématiquement
3 mécanismes d’attaque :
- Dans 50% des cas, le rapport est supérieur à 80 démontrant ainsi une
hypertonie vagale associée à une sécrétion élevée de pepsine.
- Dans 10% des cas, le rapport est inférieur à 40 et met en évidence une
hypergastrinémie avec une prédominance de la sécrétion acide.
- Dans 40% des cas, le rapport est intermédiaire, synonyme d’une attaque mixte
acidepepsine. L’activité mucolytique de la pepsine est représentée par la mesure
de l’acide sialique, marqueur du mucus dégradé. Cette activité est fortement
augmentée lors d’un ulcère duodénal et le débit de pepsine est souvent corrélé aux
lésions duodénales.
Les sécrétions duodénales de bicarbonates sont stimulées dans les conditions
physiologiques par un pH acide dans le duodénum et par les prostaglandines.
Cependant, la stimulation par des prostaglandines synthétiques ne modifie pas
sensiblement la sécrétion de bicarbonates lors d’un ulcère duodénal. La diminution
de la sécrétion de bicarbonates lors de cette affection n’est donc pas la résultante
d’un défaut de stimulation mais au contraire provient d’une altération cellulaire
profonde aggravée par les lésions ulcéreuses.
La colonisation par Helicobacter pylori engendre un état inflammatoire aigu au
niveau du bulbe duodénal. Les polynucléaires infiltrent la muqueuse augmentant ainsi
sa perméabilité.
De plus, le germe, de par ses enzymes et ses cytotoxines qui varient en fonction des
souches, va lui même engendrer des lésions directes au niveau de la paroi.
Ainsi, la paroi duodénale se retrouve face à une attaque chloropeptique accentuée, qui
crée ce déséquilibre face à des facteurs de défense incapables de contenir cette
agression.

b) Le syndrome de Zollinger-Ellison :
Le syndrome de Zollinger-Ellison s’inscrit dans le cadre de l’atteinte duodéno-
pancréatique du Syndrome de Wermer. Il associe à la fois un ulcère duodénal, un
reflux gastro -œsophagien et une diarrhée. Ces manifestations cliniques sont

24
secondaires à une hypersécrétion acide due à une libération non régulée de la
gastrine par une tumeur endocrine à gastrine dite gastrinome.

1) Epidémiologie :
Le syndrome de Zollinger-Ellison a une prévalence de 2-3 pour 1 000 000 de la
population générale et représente 0.1 à 1% des manifestations d’ulcère duodénal. Cette
pathologie se manifeste dans la tranche d’âge des 30 à 50 ans et touche deux fois plus
les hommes que les femmes. Selon certaines études, la prévalence de ce syndrome est
sous estimée du fait de l’utilisation assez répandue des moyens thérapeutiques traitant
la symptomatologie pure de cette affection d’une part et du caractère silencieux du
gastrinome d’autre part.
Le syndrome de Zollinger-Ellison est tout de même responsable de la plus grande
morbi -ortalité du syndrome de Wermer MEN1 du fait notamment du symptôme
ulcéreux virulent d’une part et des risques liés à la chirurgie pancréatique d’exérèse des
tumeurs sécrétantes d’autre part.

2) Etiologie :
Le syndrome de Zollinger-Ellison entre dans les manifestations pathologiques de la
néoplasie
endocrinienne multiple de type 1 appelée syndrome de Wermer, qui fait suite à
une mutation du gêne MEN1. Cette mutation génétique est à l’origine de l’atteinte de
plusieurs organes :
- Atteinte de la parathyroïde dans plus de 90% des cas induisant une
hyperparathyroïdie.
- Atteinte duodéno-pancréatique et gastrique dans environ 50% des cas donnant une
tumeur neuroendocrinienne.
- Atteinte hypophysaire dans 15 à 42% des cas donnant des adénomes sécrétants
le plus souvent à prolactine.
Le syndrome de Wermer MEN1 développe dans plus de 25% des cas un
syndrome de Zollinger-Ellison avec une localisation tumorale variable.
- Dans 50% des cas, la tumeur est de localisation pancréatique
- Dans 40% des cas, la localisation est duodénale
- Dans 10% des cas, la tumeur est gastrique ou hépatique.

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Quelque soit la localisation de la tumeur, le syndrome de Zollinger-Ellison se manifeste
dans 90% des cas par un ulcère duodénal.

3) Physiopathologie :
Le syndrome de Zollinger-Ellison est corrélé directement au gastrinome induisant
une hypergastrinémie. Ce phénomène se traduit par une stimulation excessive de la
gastrine au niveau des récepteurs spécifiques sur les cellules pariétales et les
cellules ECL au niveau fundique. Il en résulte une hypersécrétion acide spécifique
et caractéristique de ce syndrome :
 On retrouve un débit acide basal supérieur à 10mmol/h qui laisse suspecter
un syndrome de Zollinger-Ellison. Lorsque le débit acide basal est supérieur à
30mmol/h le syndrome est confirmé avec une spécificité de 99% pour ce seuil.
 Une gastrinémie à jeun supérieure à 150pg/mL. (Normale inférieure à 150pg/mL).
 La concentration acide maximale dépasse les 100mmol/h chez plus de 80%
des patients atteints.

La gastrine exerce une action trophique sur les cellules épithéliales gastriques ce qui
favorise le phénomène d’accroissement de la masse cellulaire pariétale et
accentue le caractère hypersécréteur acide.
Cette attaque acide représente le facteur d’agression qui engendre un ulcère
duodénal localisé le plus souvent dans le premier segment du duodénum D1.
Au niveau de l’œsophage, 2/3 des patients présentent un reflux gastro-œsophagien
simple mais pouvant se compliquer dans certains cas d’une œsophagite ou d’une
ulcération nette de l’œsophage.
Le syndrome de Zollinger-Ellison s’accompagne dans 50% des cas de diarrhées
indépendantes de l’affection ulcéreuse, elles peuvent être la seule manifestation
de ce syndrome. Les diarrhées sont de types volumogéniques qui témoignent du
dépassement des capacités de réabsorption de l’intestin grêle face à l’excès du débit
acide sécrété. Elles sont également associées à des stéatorrhées résultant de
l’inactivation des enzymes pancréatiques par un pH duodénal bas.
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(Notez : LA PATHOPHYSIOLOGIE DES ORGANES ANNEXES , (PANCREAS , FOIE ..) FAIT L’OBJET DE L’UE BOA 606)

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