Finances Publiques

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Finances publiques

CHAPITRE PRELIMINAIRE:

Notions de finances publiques et de budget:

Les finances publiques concernent les activités financières de l'État,


des collectivités territoriales et de tous les organismes publics.

Un budget est l'ensemble des éléments permettant à l'État ou aux


collectivités territoriales : d'anticiper leurs recettes et leurs besoins
financiers pour l'année suivante ; d'être autorisés juridiquement à
les mettre en œuvre

L’origine des finances publiques et du budget:

Le système des finances publiques au Maroc a été mis en place dès


la période du protectorat. Cependant, son acception moderne, n’a
vu le jour qu’après la promulgation de la première constitution le 17
Rajab 1382 (14 décembre 1962).

L’origine du budget?

L’objet des finances publiques:

Les finances publiques ont pour objet l'étude du phénomène


financier public dans sa globalité : ressources, charges, trésorerie,
procédure budgétaire et comptable, politique budgétaire… et dont
les principaux protagonistes sont les États, les collectivités
territoriales, les entreprises et des établissements publics ainsi que
les organismes sociaux et internationaux.

Principes d’élaboration des budgets publics:

1-L’annualité:
Cette règle signifie que l’autorisation de recettes et de
dépenses donnée par le parlement n’est valable que pour
une année. Et donc l’exercice budgétaire commence au
1er janvier et s’achève le 31 décembre de la même année.

Trois séries de justifications ont été avancées :

- Pour des raisons politiques, la règle de l’annualité


garantit un contrôle régulier des finances publiques,
évitant qu'un budget dépassant l’année affaiblisse ce
contrôle ou qu’un budget inférieur à un an ne perturbe
le travail gouvernemental.

- Pour des raisons techniques, cette règle impose aux


administrations de produire leurs comptes
régulièrement. De plus, les experts auraient du mal à
établir un budget précis si leurs prévisions dépassent
l'année.

- Pour des raisons économiques, cette règle s'aligne sur le


rythme de vie sociale, permettant à la loi de finances
d'influer sur le cycle économique et d'apporter des
solutions rapides aux crises ou d'en atténuer l'impact.

En pratique, toutes les opérations ne peuvent pas être réalisées dans


l’année civile en raison de la complexité des finances de l’État. Ainsi,
le principe de l’annualité nécessite des adaptations. La question se
pose : à quel exercice rattacher les crédits ouverts et engagés en
2016, mais payés en 2017 ? Deux solutions existent : le système de
l’exercice et celui de la gestion, chacun ayant ses avantages et
inconvénients.

- Le système de l’exercice et le système de la gestion:


Le système de l’exercice rattache à l’année toutes les recettes et
dépenses nées juridiquement durant celle-ci, même si elles sont
réglées après.
Par exemple, les opérations seront rattachées à l'exercice 2016, sans
prise en compte matérielle. Les paiements sont liés à l’année
d’engagement des dépenses pour vérifier que les crédits disponibles
ne sont pas dépassés et éviter des arriérés. Cependant, ce système
complique la clôture précise de l’exercice en raison des retards dans
l’utilisation des dotations.

Le système de gestion, selon la LOLF 130/13, dispose que les


recettes sont enregistrées l'année où elles sont encaissées et les
dépenses, l'année où elles sont mandatées, payées sur les crédits de
cette année.

Dérogations!!

2- Unité:

Prévu par l’article 8 al 2 de la LOLF selon lequel : « Toutes


les recettes et toutes les dépenses sont imputées au
budget général ».

Trois raisons expliquent cette règle:


- Des raisons techniques : la présentation des opérations en
recettes et en dépenses dans un seul document apporte clarté
et rationalité à la perception des finances publiques.
- Raisons politiques, car la multiplication des comptes
complique le contrôle par le pouvoir législatif lors de
l'examen du projet de loi de finances.
- Des justifications pratiques s’ajoutent, car l’unité budgétaire
facilite le rapprochement entre l’exécution et les prévisions de
la loi de finances.

Dérogations:
Le système de l’unité budgétaire admet certaines dérogations en
raison de la diversité des lois de finances et de la distinction entre
plusieurs gestions au sein du budget de l’État, qui se compose de
trois volets : le budget général regroupant les recettes et les crédits
des ministères, les budgets des services de l’État gérés de manière
autonome (SEGMA), et les comptes spéciaux du trésor (CST). Ainsi,
le principe de l’unité permet l’existence de sous-ensembles
homogènes au sein de la loi de finances, chacun ayant des
caractéristiques spécifiques.

1/Diversité des lois de finances :

Si l’unité budgétaire était respectée, tous les éléments financiers de


l’État seraient regroupés dans un seul document. Cependant, la
seule loi de finances de l’année ne suffit pas, car elle peut être
modifiée par une ou plusieurs lois de finances rectificatives tout au
long de l’année.

2/ Diversité des comptes de l’Etat:

- Le budget général : Il s’agit du compte le plus important de la


loi de finances à la fois au niveau quantitatif et qualitatif. Il
correspond aux opérations ordinaires de l’Etat qui ne relèvent
pas d’un régime dérogatoire et retrace seulement les
opérations définitives de l’Etat.

- Les services de l’Etat gérés de manière autonome : Il s’agit de


services de l’Etat non dotés de la personnalité morale, dont
certaines dépenses, non imputées sur les crédits du budget
général, sont couvertes par des ressources propres. L’activité
de ces services doit tendre essentiellement à produire des
biens ou à rendre des services donnant lieu à rémunération .

- Les comptes spéciaux du trésor (CST) retracent des opérations


budgétaires financées par des recettes particulières liées aux
dépenses concernées. Leur régime juridique est complexe, car
certaines règles sont communes : chaque compte spécial avec
des crédits constitue une mission, les crédits sont spécialisés
par programme, et les dépenses de personnel ne peuvent pas
être imputées sur ces comptes. Leur création vise à établir une
corrélation entre certaines recettes et dépenses, à éviter
d’assimiler des décaissements provisoires à des décaissements
définitifs, ou à évaluer précisément le coût d’un service. Bien
que l’effort d’investissement de l’État dans le budget général
(BGE) soit limité, les CST offrent une alternative
quasi-budgétaire qui pourrait relancer l’économie grâce à leur
gestion et à leurs ressources.

- La débudgétisation est une pratique courante qui consiste à


gérer des recettes et des dépenses de l’État en dehors de la loi
de finances. Elle permet à l’État de transférer le financement
de certaines actions à d'autres personnes morales. La loi
organique relative à la loi de finances atténue ce phénomène
en incluant certaines opérations, comme celles de trésorerie
contribuant à l’équilibre financier et les fonds de concours, qui
y échappaient auparavant.

3-L’universalité:

Prévu par l’article 8 al 1 de la LOLF qui dispose : « Il est fait recette


du montant intégral des produits, sans contraction entre les recettes
et les dépenses, l'ensemble des recettes assurant l'exécution de
l'ensemble des dépenses. »

Ce principe stipule que toutes les recettes et dépenses doivent


apparaître dans la loi de finances, sans distinction, chaque recette
pouvant financer chaque dépense.

Cette règle se justifie par deux raisons:

- Des raisons financière: car elle évite les gaspillages et les


dépenses inutiles en interdisant aux services de se procurer
des ressources qui pourraient être dilapidées sans servir
l’intérêt général ;
- Ensuite politiques, car elle facilite le contrôle parlementaire
avec des documents plus complets que ceux de la règle du
produit net.

Deux règles composent ce principe :

- Règle du produit brut : Elle impose que toutes les recettes et


dépenses soient intégralement figurées au budget, sans
omission ni dissimulation. Toute compensation entre recettes
et dépenses est interdite pour garantir au parlement la
connaissance des crédits d’un département ministériel. Ainsi,
le budget marocain exclut la règle du produit net, qui se base
sur une addition de soldes.
- Règle de la non affectation : Elle stipule que toutes les recettes,
qu'elles soient fiscales ou non, doivent être regroupées sans
assignation d’un impôt à une dépense spécifique. Cela
implique qu’aucun lien juridique ne doit exister entre le
recouvrement d’une taxe et son affectation. Le contribuable
ne doit pas savoir précisément à quel usage servir la somme
versée à l’État. Comptablement, cela signifie l’unité de caisse et
l’absence d’utilisation particulière d’une ressource pour
financer une dépense déterminée.

Dérogations:

Certaines recettes peuvent être affectées à des dépenses spécifiques,


d’abord par la technique des fonds de concours. Ces fonds non
fiscaux, versés par des personnes morales ou physiques, permettent
de cofinancer des dépenses d’intérêt public avec l’État. Les
collectivités territoriales, établissements publics, particuliers, ou
États étrangers peuvent faire des versements volontaires pour des
investissements réalisés par l’État (par exemple, une commune peut
donner de l'argent pour acheter un terrain pour un ouvrage public).
L’affectation est donc claire, car l’utilisation des fonds doit
correspondre à l’intention du donateur.
Ensuite, des recettes peuvent être affectées à un fonds spécial du
trésor, hors budget, pour couvrir des dépenses correspondantes,
établissant ainsi une corrélation entre une recette de l’État et une
dépense. Cette affectation concerne uniquement l’État.

Une autre dérogation concerne les taxes parafiscales, qui, comme


les prélèvements sur recettes, sont affectées en dehors du budget de
l’État. Ces taxes, perçues pour des intérêts économiques ou sociaux
au profit d'une personne morale de droit public ou privé, sont
établies par décret sur proposition du ministre des Finances et du
ministre concerné.

4- Principe d'Équilibre:

Le principe de l’équilibre budgétaire stipule que le volume des


charges doit être équivalent à celui des ressources comme l’indique
l’article 1er de la LOLF, bien que son respect reste un objectif
théorique.

Ce principe repose sur deux approches :

- Approche économique : L’équilibre est généralement admis


en période d’expansion, car un excédent permet des marges
de manœuvre en cas de dégradation de la conjoncture. En
revanche, lors d'une récession, l’équilibre budgétaire pourrait
aggraver la situation, les recettes diminuent plus rapidement
que les dépenses.

- Approche politique : La volonté de maîtriser les déficits


budgétaires découle de plusieurs facteurs, notamment d’un
impératif budgétaire. Accepter un déficit élevé reporte le
financement sur les générations futures, rigidifie les dépenses
ultérieures et compromet les priorités nationales. Ainsi, les
décisions budgétaires doivent garantir que les dépenses
publiques soient financées par des ressources propres.
Cependant, des dérogations peuvent survenir en raison de
considérations idéologiques ou de la conjoncture économique et
sociale changeante.

Dérogations:

Le principe de l’équilibre budgétaire doit tenir compte de certaines


réalités économiques ou sociales qui peuvent justifier une approche
interventionniste, permettant à l'État de recourir massivement à
l’emprunt pour financer les dépenses publiques et d'appliquer
diverses pratiques de débudgétisation. L'État abandonne sa
neutralité pour devenir un acteur économique principal, remettant
ainsi en cause le principe de l'équilibre budgétaire. Cette exclusion
repose sur la théorie du déficit systématique, selon laquelle, d’après
Keynes, l’équilibre est maléfique et le déficit bénéfique.

Un équilibre financier peut interdire l'équilibre économique en


période de dépression, aggravant la récession puisque les recettes
diminuent plus vite que les dépenses. Le déficit devient alors
souhaitable pour relancer l'économie. Toutefois, il doit être
provisoire, lié à une conjoncture difficile, et se terminer dès que
l’économie se redresse, faute de quoi le risque inflationniste
augmente. Ainsi, le déficit est toléré en période de crise, mais en
phase d'expansion, un excédent doit apparaître pour combler les
déficits antérieurs.

5- Le principe moderne de la sincérité:

Prévu par l’article 10 de la LOLF 130/13, le principe de la sincérité


budgétaire implique que les prévisions des ressources et des
charges reflètent la réalité économique et financière, et qu'elles
représentent les conséquences attendues de la politique que les
pouvoirs publics souhaitent réellement mettre en œuvre.

Il impose au gouvernement de fournir au parlement les éléments


nécessaires pour vérifier la validité et l'exactitude de la loi de
finances ou des comptes de l'État.
Ce principe vise à garantir la bonne foi dans l'application des règles,
en évitant les pratiques dissimulant des éléments affectant
l'équilibre budgétaire ou présentant des prévisions inexactes.

S'il est appliqué de manière large, il pourrait supplanter d'autres


principes, notamment celui de l'équilibre budgétaire, car
l'insincérité des évaluations de recettes ou de dépenses pourrait
compromettre l'équilibre présenté aux parlementaires avant le vote
des lois de finances.

Grâce à ce principe, toutes les dépenses doivent être prévues


(annualité), toutes les opérations doivent figurer dans le projet
(universalité), être détaillées (spécialité), et apparaître dans un seul
document (unité).

CHAPITRE 1: Différentes catégories de LF

L’Article 2 de la LOLF dispose : « Au sens de la présente


loi organique, on entend par loi de finances :
- la loi de finances de l’année ;
- les lois de finances rectificatives ;
- la loi de règlement de la loi de finances »

La loi de finance de l’année:

Sa définition est donnée par l’article 3 al 1er de la LOLF 130-13 qui


dispose :« La loi de finances de l'année prévoit, évalue, énonce et
autorise, pour chaque année budgétaire, l'ensemble des ressources
et des charges de l'Etat, …… ».

Elle comprend de parties:


- La première partie, de caractère juridique, fixe les conditions
de l’équilibre financier en autorisant la perception des
ressources publiques et l’émission d’emprunts, tout en
établissant les voies et moyens pour garantir cet équilibre. Elle
inclut également les plafonds des principales catégories de
dépenses, tant de fonctionnement que d’investissement.

- La deuxième partie, analytique, prévoit les moyens financiers


alloués aux différents ministères et services pour leurs besoins.
Elle détermine les dépenses du budget général de l’État par
ministère et autorise les opérations des comptes spéciaux du
trésor.

Les lois de finances rectificatives:

Une loi de finances rectificative a pour but de corriger à la hausse ou


à la baisse les dépenses et recettes prévues en loi de finances initiale.
Votée en cours d'année, elle modifie les dispositions des lois de
finances initiales compte tenu de l'évolution de la conjoncture
économique et financière.

Ce procédé peut être justifié par plusieurs raisons:

Des raisons juridiques: toutes les ouvertures de crédit par décrets


d’avances, selon l’article 50 LOLF, doivent être ratifiées.

Des raisons politiques, l’émergence d’une nouvelle majorité


parlementaire peut inciter à voter une loi de finances rectificative.

Pour des raisons économiques, un ajustement des choix budgétaires


peut être justifié par l’évolution de la conjoncture économique.

La loi de règlement:

Conformément à l’article 64 de la LOLF, la loi de règlement évalue


les résultats financiers annuels et approuve les écarts entre ces
résultats et les prévisions de la loi de finances annuelle, complétée
par des lois de finances rectificatives si nécessaire. Cependant, son
vote intervient deux ans après l'exécution du budget, ce qui limite
sa portée.
CHAPITRE 2 : PRÉPARATION DU PROJET DE LOI
DE FINANCES

Les acteurs de la préparation:

Les auteurs du projet de loi de finances sont le Chef de


Gouvernement, qui préside les réunions, le ministre des Finances,
qui coordonne le processus, et les ministres dépensiers, qui
évaluent et proposent les besoins budgétaires de leurs
départements.

- Monopole Gouvernemental
L'initiative de préparation du projet de loi de finances est un
monopole du gouvernement. La Constitution (art. 92) et la loi
organique relative à la loi de finances (art. 46 et 47) se réfèrent
uniquement aux projets de lois de finances, sans mentionner de
propositions d’initiative parlementaire. Cela écarte clairement toute
proposition budgétaire venant du Parlement.

- Restrictions Parlementaires
De plus, l'article 77, alinéa 2 de la Constitution interdit aux
parlementaires de faire des propositions qui diminuent les
ressources publiques ou aggravent/créent une charge publique.
Cela renforce l'idée que seul le gouvernement peut proposer des
projets de loi de finances.

- Compétence du Gouvernement
Le droit budgétaire marocain confère au gouvernement une
compétence exclusive pour la préparation du projet de loi de
finances, en raison de son accès à des experts capables d'intégrer des
objectifs économiques à long terme. La loi de finances représente la
traduction chiffrée de la politique gouvernementale, ce qui justifie
son élaboration par le gouvernement.
- Rôle Primordial du Gouvernement
Le gouvernement joue un rôle central dans la préparation du
budget. Selon l'article 46 de la LOLF :
« Sous l'autorité du Chef du Gouvernement, le ministre chargé des
finances prépare les projets de lois de finances conformément aux
orientations générales ayant fait l'objet de délibérations au Conseil
des ministres. »
De plus, le gouvernement dispose de moyens juridiques et
matériels qui lui confèrent une certaine suprématie par rapport au
pouvoir législatif.

- Interaction entre le Ministre des Finances et les Ministres


Dépensiers
La préparation du budget au Maroc est un processus qui se joue
entre le Ministre des Finances et les ministres dépensiers, mettant
en avant l'importance primordiale du Ministre des Finances dans ce
processus.

La Prépondérance Systématique du Ministre des Finances

Bien que le ministre des Finances n'ait pas de prépondérance de


droit par rapport aux autres ministres, il occupe une position de
supériorité de fait. Sa fonction lui confère une emprise sur ses
collègues lors de la préparation du budget, le plaçant au centre du
processus d’élaboration de la loi de finances, même sous l’autorité
du Chef du Gouvernement.

Toutes les propositions budgétaires des autres ministres passent par


ses services, et il doit contresigner les actes ayant des conséquences
budgétaires. Il peut refuser des demandes de crédits pour préserver
l'équilibre financier, car les ressources estimées par son ministère
conditionnent l’évaluation des dépenses des ministères dépensiers.

De plus, tout décret ou arrêté ayant des incidences financières


nécessite son contreseing, renforçant ainsi son statut de
"super-ministre." En tant que principal responsable des finances du
royaume, il a sous son autorité toutes les administrations fiscales.
Grâce à ces moyens, il exerce un contrôle effectif sur les
propositions budgétaires de ses collègues, bien qu'il ne puisse
préparer le projet de loi de finances qu'avec leur collaboration.

Rôle des autres ministres:

Les autres ministres participent à la préparation du projet de loi de


finances en évaluant les besoins budgétaires de leurs départements
et en formulant des propositions financières en collaboration avec
le ministre des Finances.

Rôle des Parlementaires dans la Préparation du Projet de Loi


de Finances
Le rôle des parlementaires dans la préparation du projet de loi de
finances est minime, bien qu'il ait été renforcé par la LOLF, qui
permet d'instaurer un débat d’orientation budgétaire sur les
grandes lignes du budget projeté pour l’année suivante. Cela
constitue la seule occasion pour les parlementaires d'intervenir en
amont du projet de loi de finances, répondant ainsi au principe
constitutionnel du droit à l’information et mettant fin au monopole
gouvernemental sur les informations économiques et financières.

Ce débat est crucial pour atténuer les tensions lors de la


présentation du projet de loi au vote, tensions souvent dues à des
contraintes temporelles, au retard dans la fourniture d’informations
et à l'absence de communication durant l’année budgétaire.
Cependant, cette avancée, qui améliore la transparence budgétaire
du Maroc, reste relative, car le débat, basé sur un rapport
gouvernemental, est à la discrétion du Chef de Gouvernement et ne
donne pas lieu à un vote.

Procédure de la préparation de la loi de finance:

1- Le calendrier:

La loi de finances de l'année est élaborée par référence à la


programmation budgétaire triennale. Ainsi, le processus de
préparation du projet de loi de finances de l'année englobe les
étapes suivantes :

Avant le 15 mars, le Chef du gouvernement invite par circulaire, les


ordonnateurs à établir leurs propositions de programmations
budgétaires triennales assorties d'objectifs et d'indicateurs de
performance;

Avant le 15 avril, les départements ministériels et institutions


transmettent, au ministère chargé des finances, les propositions de
programmations budgétaires triennales se rapportant à leurs
budgets, aux budgets des services de l'Etat gérés de manière
autonome qui leur sont rattachés et aux comptes d'affectation
spéciale dont ils sont ordonnateurs.

Avant le 15 mai, lesdites propositions sont examinées en


commissions de programmation et de performance;

Avant le 15 juillet, le ministre chargé des finances expose, en


Conseil du gouvernement, l'état d'avancement de l'exécution de la
loi de finances en cours et présente la programmation triennale des
ressources et des charges de l'Etat ainsi que les grandes lignes du
projet de loi de finances de l'année suivante;

Avant le 31 juillet, le ministre chargé des finances expose devant les


commissions des finances du Parlement, le cadre général de
préparation du projet de loi de finances de l'année suivante. Cet
exposé comporte aussi l'évolution de l'économie nationale, l'état
d'avancement de l'exécution de la loi de finances en cours à la date
du 30 juin, les données relatives à la politique économique et
financière et la programmation budgétaire triennale globale.

Invitation, par circulaire du Chef du gouvernement, des


ordonnateurs à établir leurs propositions de recettes et de dépenses
pour l'année budgétaire suivante;
Septembre-début octobre: Centralisation et examen des
propositions des départements ministériels en particulier en ce qui
concerne les recettes, les dépenses, les projets de performance dans
le cadre des commissions budgétaires et montage du projet de loi
de finances et des documents qui l'accompagnent;

Début octobre : Suivi de l'adoption des orientations générales du


projet de loi de finances de l'année au conseil des ministres et
ensuite au conseil du gouvernement ;

Au plus tard le 20 octobre de l'année budgétaire en cours : dépôt


du projet de loi de finances de l'année au bureau de la chambre des
représentants ;

Les 30 jours suivants le dépôt du projet : La Chambre des


représentants se prononce sur le projet de loi de finances de
l'année;

Les 22 jours suivants le vote du projet par la chambre des


représentants ou l'expiration du délai imparti : le Gouvernement
saisit la Chambre des conseillers qui se prononce sur le projet ;

Les 6 jours suivants le vote du projet par la chambre des


conseillers ou l'expiration du délai imparti : Adoption finale du
projet de loi de finances par la chambre des représentants dans le
cadre de la deuxième lecture.
Si au 31 décembre, la loi de finances de l'année n'est pas votée ou
n'est pas promulguée, le gouvernement ouvre, par décret, les
crédits nécessaires à la marche des services publics et à l'exercice de
leur mission, en fonction des propositions budgétaires soumises à
approbation. Dans ce cas, les recettes continuent à être perçues
conformément aux dispositions législatives et réglementaires en
vigueur les concernant à l'exception, toutefois, des recettes dont la
suppression est proposée dans le projet de loi de finances. Quant à
celles pour lesquelles ledit projet prévoit une diminution de taux,
elles seront perçues au nouveau taux proposé.
Le déroulement de la procédure:

Chaque année, pour préparer le projet de loi de finances, le chef du


gouvernement envoie une circulaire aux ministres contenant des
directives pour la programmation budgétaire triennale, y compris
les objectifs et indicateurs de performance.

Les ministres, après avoir reçu la circulaire, préparent les


propositions budgétaires de leurs départements et les soumettent
aux commissions de programmation et de performance, qui
doivent les examiner avant le 15 mai. Ensuite, le ministre des
Finances présente ces propositions en conseil de gouvernement
avant le 15 juillet, puis devant les commissions des finances des
deux chambres du parlement avant le 31 juillet.

La lettre d’orientation du chef du gouvernement, diffusée par le


ministre des Finances, invite chaque ministre à élaborer ses
propositions de recettes et de dépenses. Un cycle de conférences
budgétaires s’ensuit pour discuter des propositions.

Conformément aux dispositions de la LOF, le processus


d’élaboration et d’adoption du projet de loi de finances inclut
désormais deux nouvelles phases :

A- Phase de programmation : Par circulaire, le Chef du


Gouvernement invite les départements ministériels à élaborer leurs
propositions de programmation budgétaire triennale, avec objectifs
et indicateurs de performance. Ces propositions seront examinées
par les commissions de programmation et de performance.
La circulaire du chef du gouvernement:

La circulaire du Chef de Gouvernement:


La circulaire contient des règles de fond et de forme qui
doivent, en principe, être observées par tous les ministres
lors de l’établissement des prévisions budgétaires
concernant leurs services.
Le chef du gouvernement demande aux ordonnateurs de
soumettre des propositions budgétaires sur trois ans, y compris les
dépenses de personnel, de matériel et d’investissement.

Rôle des commissions de programmation et de performance:

Toutes les propositions des ministres sont centralisées au sein des


commissions de programmation et de performance, qui incluent
des représentants du ministère des Finances et des départements
ministériels concernés. Un examen détaillé de ces propositions
commence dans ces commissions, qui doivent statuer avant le 15
mai.

Avant le 15 juillet, le ministre des Finances doit se présenter devant


le conseil du gouvernement pour faire le point sur l’exécution de la
loi de finances en cours, la programmation triennale des ressources
et des charges de l’État, et les grandes lignes du projet de loi de
finances de l’année suivante.

B- Phase de consultation qui se déroule avant le 31 juillet est


marquée par la consultation avec les commissions des finances du
parlement et la diffusion aux ministres de la lettre d’orientation.

La procédure au niveau des commissions des finances du


parlement:

Inclut une présentation, avant le 31 juillet, par le ministre des


Finances sur le contexte de préparation du projet de loi de finances.
Cette présentation couvre l’évolution de l’économie nationale,
l'exécution de la loi de finances actuelle, et la programmation
budgétaire triennale. Bien que cette étape ne donne lieu à aucun
vote, elle permet au parlement d’exprimer ses préférences avant le
vote du budget, tout en engageant un débat public impliquant les
médias, le secteur privé et la société civile.

Diffusion de la lettre d’orientation:


Le ministre des Finances diffuse, avant le 31 juillet, la lettre
d'orientation du chef du gouvernement aux autres ministres pour
les guider dans l'établissement de leurs propositions de recettes et
dépenses pour l'année suivante. Cette lettre fixe des règles de fond
et de forme à respecter et peut inclure des directives sur les
traitements de salaire et l'optimisation des ressources existantes
avant toute demande de postes budgétaires.

C- La phase d’élaboration et d’arbirtrage: Intervient de septembre à


octobre et durant laquelle les ministres dépensiers établissent leurs
propositions budgétaires et les discutent, avec le ministre des
finances, au sein des commissions budgétaires et arbitrage.

La procédure au niveau des ministres dépensiers:

Après réception de la circulaire du chef du gouvernement, chaque


ministre ordonnateur recueille les besoins en crédits de ses services,
centralise les demandes, effectue un tri, et valide des propositions
chiffrées. Ces demandes, accompagnées d'états justificatifs, sont
ensuite envoyées au ministère des Finances selon les modalités et le
calendrier fixés. Le ministère des Finances examine les propositions
et entame des contacts officieux puis officiels avec les autres
ministres.

Les conférences budgétaires:

Le ministre des Finances examine les propositions budgétaires des


ministères, travail effectué par la division du budget, notamment les
services du budget de fonctionnement et d’équipement. Une fois les
éléments chiffrés arrêtés et les dispositions finalisées avec le
secrétariat général du gouvernement, la version définitive du projet
de loi de finances est montée. Après adoption par le conseil de
gouvernement, le projet est soumis au conseil des ministres, présidé
par le Roi.
D- La phase d'adoption commence début octobre avec les
délibérations sur les orientations générales du projet de loi de
finances en conseil des ministres, suivie de son adoption définitive
par le conseil de gouvernement. Après adoption par le conseil des
ministres, la version finale est préparée, imprimée et déposée au
parlement.

CHAPITRE 3: APPROBATION DE LA LOI DE


FINANCE

L’approbation de la loi de finances est un acte d’autorisation donné


par le parlement au gouvernement selon une procédure
particulière prévue par l’article 75 de la constitution et par les
articles 48 et suivant de la LOLF.

Les règles de la procédure de vote du projet de loi de


finances:

1 : L’encadrement strict des délais:

Les délais d’adoption des projets de loi de finances établissent un


cadre temporel spécifique, contrairement aux lois ordinaires. Ce
cadre impose une contrainte au parlement, limitant ainsi ses
pouvoirs, et constitue la première manifestation de la
rationalisation du parlementarisme. Cette question se divise en
trois moments clés : le délai de dépôt, le délai global de vote, et les
délais de lecture et d’examen par chaque chambre.

A- Le délai de dépôt du projet de loi de finances:


The Constitution marocaine de 2011 ne précise pas clairement le
délai de dépôt des lois de finances, donc il faut se référer à la LOLF,
qui fixe ces dates.
- Pour la loi de finances de l’année, l’article 48 de la LOLF
impose un dépôt au plus tard le 20 octobre de chaque année,
mais le gouvernement peut le déposer avant cette date, car
aucune interdiction n’existe dans ce texte. Si ce délai n’est pas
respecté, le Conseil constitutionnel n'a pas jugé cela
inconstitutionnel.
- Pour les lois de finances rectificatives, aucun délai n’est prévu,
mais elles doivent être adoptées avant la fin de l'exercice.
- Enfin, la loi de règlement doit être déposée au cours du
deuxième exercice suivant.

B- Le délai global de vote:

Il serait pertinent de tenir compte de chaque loi de finances dans la


détermination de ce délai.

- Le délai global de vote du projet de loi de finances de l’année


est fixé à 70 jours.

Ce délai semble découler de l'article 48 alinéa 1, qui fixe une date


butoir au 20 octobre, et de l'article 50 de la LOLF, qui renvoie au 31
décembre, date à laquelle le parlement doit se prononcer sur le
projet de loi de finances. Si le parlement ne se prononce pas dans ce
délai, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par
décret.

Le parlement dispose de 58 jours pour se prononcer sur le projet de


loi de finances, selon l’article 49 alinéas 1, 3 et 4. La chambre des
représentants a 30 jours, la chambre des conseillers 22 jours, et les 6
jours restants sont réservés à la première chambre pour statuer en
dernier ressort. Ce délai n'impose pas l'obligation de voter le projet,
le parlement pouvant, en théorie, le rejeter.

C- Les délais de lecture et d’examen par chaque chambre:


Contrairement à l'article 34 de l'ancienne LOF 7/98, où les deux
chambres disposaient chacune de 30 jours pour la première lecture,
la LOLF fixe désormais des délais différents. La chambre des
représentants a 30 jours pour se prononcer sur le projet de loi de
finances. Une fois ce délai écoulé ou après le vote, le gouvernement
soumet le texte à la chambre des conseillers, qui a 22 jours pour se
prononcer, avec les amendements adoptés par la première chambre
et acceptés par le gouvernement. Les deux chambres doivent
respecter ces délais stricts, faute de quoi elles perdent le droit de
continuer l'examen du projet, qui sera transmis à l'autre chambre.

2: Organisation de la discussion budgétaire:

A- La prééminence de la chambre des représentants :

La constitution marocaine de 1996 et la LOF 7/98 ne


mentionnaient pas explicitement la prééminence de la première
chambre. Cependant, cette supériorité semblait émerger de la
pratique, car presque tous les projets de loi de finances étaient
d'abord déposés devant la chambre des représentants. Cette priorité
n'était pas absolue, car le gouvernement pouvait saisir la deuxième
chambre en premier. Aujourd'hui, la constitution de 2011 et la
LOLF 130/13 consacrent formellement la prééminence de la
chambre des représentants.

B- Examen du projet par les commissions parlementaires :

L'article 80 de la constitution de 2011 fonde les commissions


parlementaires. Comme tous les projets de loi, les projets de loi de
finances sont soumis à l'examen des commissions permanentes
avant la séance plénière. Contrairement aux lois ordinaires, qui
passent par des commissions ad hoc, les projets de loi de finances
passent par toutes les commissions permanentes. Parmi elles, la
commission des finances joue un rôle central en raison de sa
spécialisation, tandis que les autres commissions se concentrent sur
l'examen des budgets sectoriels des ministères.

a- La commission des finances :

Une fois le projet de loi de finances présenté par le ministre des


finances devant les deux chambres du parlement, il est transféré à la
commission des finances de la chambre des représentants. Le
président de cette commission convoque ses membres, où tous les
groupes parlementaires sont représentés. Chaque commission peut
envoyer un représentant pour participer à titre consultatif aux
travaux. Le rapporteur de la commission peut aussi convoquer des
membres des commissions concernées par le budget.

Le travail de la commission des finances suit trois phases :

1. Première phase : Le ministre des finances présente à nouveau


le projet de manière plus technique, et un débat s'engage. Les
parlementaires posent des questions et demandent des
documents ou statistiques en lien avec le projet. Le ministre
répond aux questions et observations des membres.
2. Deuxième phase : Examen détaillé du projet article par
article. Le rapporteur lit chaque article avec les commentaires
nécessaires, et les articles complexes sont clarifiés par le
ministre.
3. Troisième phase : Les chefs des groupes parlementaires
proposent des amendements pour améliorer le projet. Ces
amendements sont discutés et votés. Le gouvernement peut
rejeter ceux qui diminueraient les ressources ou créeraient des
charges publiques. Les amendements doivent être soumis par
écrit dans un délai de 5 jours ouvrables. Les rapporteurs des
autres commissions peuvent participer à cette présentation, et
leurs observations sont prises en compte dans le rapport final.

L'approbation du projet de loi se fait après avoir voté sur chaque


partie du texte et les tableaux annexés.

b- Les autres commissions :

Parallèlement à l'étude technique menée par la commission des


finances, chaque commission sectorielle du parlement examine les
projets de budgets sectoriels avec le ministre concerné. Celui-ci doit
présenter le projet de budget de son département devant la
commission, en remettant un dossier contenant notamment :

- Le projet détaillé du budget sectoriel (fonctionnement et


équipement)
- L'exposé sur la présentation du budget fait par le ministre
- D'autres documents exigés par les membres de la commission

Après cette présentation, un débat général sur le budget sectoriel et


les politiques gouvernementales associées s'ouvre. Le ministre doit
répondre à toutes les questions et demandes de clarification des
membres. Toutefois, les commissions sectorielles ne peuvent voter
les budgets sectoriels qu'après le vote des ressources et charges par
la commission des finances.

C- La discussion en séance publique:

Elle se déroule en deux phases, correspondant aux deux parties du


projet de loi de finances. Selon l'article 52 de la LOLF, « la seconde
partie du projet de loi de finances ne peut être soumise au vote
avant la première partie ».

La cour constitutionnelle veille strictement au respect de cette


règle.

a- Discussion de la première partie:

Discussion de la première partie : Après son examen en


commission des finances, le PLF est soumis à la séance plénière
pour achever la procédure législative. Le ministre des finances
commence par un discours sur la situation économique et
financière du pays, suivi des orientations de la politique financière
du gouvernement. Ensuite, le rapporteur général présente un
rapport sur la discussion générale, les articles du PLF, les
amendements proposés et les résultats des votes.

Le projet discuté en plénière est celui amendé par la commission,


pas celui initialement déposé. Les orateurs des groupes politiques
font des observations sur les dispositions du PLF. Ces discussions,
auxquelles le ministre doit répondre, ont souvent un caractère
politique lié à la politique générale du gouvernement.
Le PLF et ses amendements sont discutés article par article. En cas
de pluralité d’amendements, ceux des groupes d’opposition sont
discutés en premier, suivis de ceux du gouvernement et des autres
députés. Les votes sur les amendements se font dans cet ordre. La
chambre des représentants ne peut voter la deuxième partie du PLF
qu'après avoir statué positivement sur la première. Si la première
partie est rejetée, cela entraîne le rejet automatique du projet dans
son ensemble. Les évaluations de recettes font l'objet d'un vote
d'ensemble pour le budget général et les budgets des services de
l’État gérés de manière autonome, ainsi que d’un vote par catégorie
de compte spécial du trésor.

b- Discussion de la seconde partie

La deuxième partie du projet de loi de finances est soumise aux


mêmes formalités que la première. Son vote permet de passer au
vote final du texte. L’article 55 de la LOLF stipule que les dépenses
du budget général sont votées par titre et chapitre, les dépenses des
SEGMA par département ministériel, et celles des CST par
catégorie de comptes spéciaux. Lorsque le projet de loi de finances
est voté par la chambre des représentants, le gouvernement soumet
à la chambre des conseillers le projet tel qu'adopté ou modifié. La
chambre des conseillers dispose de 22 jours pour se prononcer ;
sinon, la chambre des représentants statue en dernier ressort par un
vote à la majorité absolue des membres présents.

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