3. La chromatographie daffinité
3. La chromatographie daffinité
3. La chromatographie daffinité
1. Principe
Dans la chromatographie d’affinité, la séparation des molécules va se faire selon leur capacité
à se lier à un ligand spécifique fixé sur une résine. Toute la subtilité de la technique consiste à
choisir judicieusement le ligand qui est utilisé. Un exemple classique est l’utilisation d’un
anticorps qui reconnaît spécifiquement la molécule à purifier. Lors du dépôt du mélange
contenant la molécule à purifier, seules les molécules possédant de l’affinité pour le ligand
attaché à la résine vont se lier (dans l’idéal, une seule espèce moléculaire). Il faut, bien sûr,
que la résine porteuse soit la plus neutre possible, pour éviter la fixation non spécifique
d’autres espèces moléculaires. Après avoir éliminé le « non-fixé » en lavant la résine avec le
tampon de fixation, la molécule d’intérêt peut être éluée, par exemple en utilisant un tampon
d’élution de haute force ionique, de pH différent, ou comportant une forte concentration d’une
molécule possédant également de l’affinité pour le ligand (libération de la molécule d’intérêt
par compétition pour les sites de fixation). Voir la figure ci-dessous :
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2. Méthodologie
Il faut coupler le ligand sur une résine à chromatographie qui, en tant que telle, n'a pas
d'affinité pour la molécule d'intérêt. Ce couplage ("coupling") doit évidemment se faire sans
dénaturer le ligand pour que ce dernier conserve son affinité. Il existe des gels de couplage
("coupling gels") qui sont des résines préparées d'avance sur lesquelles on peut coupler le
ligand choisi. Ce sont des résines spécialisées destinées uniquement à cet usage. Elle possède
en général un groupement chimique facilement activable
posé au bout d'un bras écarteur. Diverses résines existent avec divers groupements activables
selon la nature chimique du ligand qu'on veut utiliser: bromure de cyanogène ou p-
nitrophényle pour coupler un ligand avec une amine, hydrazine pour un aldéhyde, un thiol
pour un autre thiol.
1) à "activer" le gel pour qu'il puisse former un lien covalent avec le ligand;
3) déclencher la réaction de formation du lien covalent entre le ligand et la résine par des
conditions physico-chimiques appropriées;
4) éliminer les réactifs résiduels en percolant le gel avec un tampon approprié. Le gel est alors
prêt à être utilisé.
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l'activation des groupes hydroxyles du support (l'agarose par exemple) par le bromure
de cyanogène dans une solution dont le pH est finement contrôlé (pH 8,3). Des
groupements imidocarbonates sont formés sur lesquels on peut fixer des ligands
contenant des amines libres, par exemple une protéine par la chaîne latérale de ces
lysines. Les groupes hydroxyles qui n'ont pas réagit sont bloqués par action de
l'éthanolamine ou la glycine.
les groupes hydroxyles du support peuvent être activés par le carbonyl di-imidazole.
l'activation du support peut être faite avec le gtutaraldéhyde qui se polymérise et
forme des chaînes à 5 carbones qui constituent des points de fixation à une certaine
distance de la matrice.
une autre méthode d'activation utilise le chlorure de tosyle et elle permet le couplage
de molécules qui possèdent un groupement aminé, thiol ou phénol.
Pour rendre certains ligands accessibles au site de fixation sur la molécule avec laquelle ils
interagissent, il est nécessaire d'augmenter la longueur de la chaîne carbonée à l'extrémité de
laquelle se situe le groupement activé. Cette chaîne additive s'appelle un bras espaceur.
2.2 Adsorption
L'adsorption se fait évidemment dans des conditions physico-chimiques (pH, force ionique,
etc.) où l'équilibre de la réaction tend fortement vers le maintien de l'interaction ligand-
molécule d'intérêt. Toutes les molécules sans affinité pour le ligand ne se lieront évidemment
pas et élueront rapidement. On lave ensuite la colonne avec le solvant d'adsorption pour
éliminer toute molécule contaminante résiduelle.
La chromatographie d'affinité est la plus délicate à mettre en oeuvre car elle nécessite la mise
au point des conditions expérimentales spéciales pour obtenir un gel correctement activé :
le ligand doit être orienté de manière optimale pour une parfaite reconnaissance
stéréochimique de la molécule que l'on veut séparer
il ne faut pas que le ligand subisse l'action des enzymes, c'est pour celà qu'on utilise
davantage des analogues de substrats (inhibiteurs compétitifs par exemple) que les
substrats eux-mêmes
il faut trouver des conditions d'élution de la molécule fixée au ligand qui préserve sa
fonction biologique
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en conséquence, cette méthode chromatographique est coûteuse
2.3 Désorption
Il existe deux méthodes pour adsorber et éliminer les contaminants, puis pour éluer la
protéine, celles sur colonne et celles en vrac ("batch").
La plus commune est la méthode sur colonne. Il s'agit essentiellement de la technique typique
de chromatographie sur colonne. Après avoir monté la colonne de résine, on y fait percoler le
mélange à séparer. Les molécules d'intérêt s'y adsorberont tandis que les autres sortiront de la
colonne avec le flux de solvant. Ensuite, on élue en faisant percoler un solvant déstabilisant
l'interaction ligand-molécule spécifique pour recueillir celle-ci dans le flux de solvant. La
méthode sur colonne s'utilise surtout pour des chromatographies analytiques ou lorsque le
mélange à séparer est relativement petit.
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de contaminants. La molécule d'intérêt peut alors être désorbée, avec un solvant déstabilisant
l'interaction ligand-molécule spécifique, soit sur colonne, soit par un autre brassage. La
méthode en vrac est bien adaptée aux chromatographies préparatives où de larges volumes
d'un mélange doivent être séparés rapidement sur des résines ayant des débits trop lents en
colonne.
Pour ces dernier, on les suit généralement à 260 nm. Pour avoir une sensibilité accrue on peut
employer, pour les protéines, 190-230 nm, soit la bande d'absoption du lien peptidique.
Cependant ces longueurs d'onde nécessitent des détecteurs beaucoup plus couteux, plus
difficiles d'entretien et plus susceptibles aux interférences. On travaille à ces longueurs d'onde
quand on désire une sensibilité très forte où encore si la protéine d'intérêt ne possède pas de
tyrosine ou de tryptophane.
3. Avantage et inconvénient
L’avantage de cette technique est sa très grande sélectivité potentielle, à tel point que son
utilisation peut parfois permettre une purification suffisante en une seule étape, ce qui est
rarement le cas avec les autres types de chromatographie.
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une forte probabilité de fixer des molécules autres que celle d’intérêt. Le couplage est, lui,
généralement simple, des matériels et techniques bien rodés étant disponibles.
La chromatographie d’affinité est donc très puissante par sa sélectivité importante, mais
souvent plus lourde et plus onéreuse à mettre en œuvre que d’autres types de
chromatographie. Par ailleurs, elle n’est pas adaptée à la purification de grandes quantités de
molécules. En effet, la capacité est fonction du nombre de sites disponibles sur la résine :
lorsque ceux-ci sont saturés, les molécules en surnombre ne seront pas purifiées.
4. Applications
Les chromatographies d'affinité sont abondamment utilisées pour isoler des protéines. De
nombreux types de molécules peuvent être utilisés comme ligand.
Les ligands d'une enzyme peuvent être un cofacteur non hydrolysable de cette enzyme, ou
encore un analogue structural non hydrolysable du substrat. Un glucide peut être un bon
ligand pour une lectine. Inversement, une lectine servira de ligand pour une glycoprotéine. On
peut multiplier à l'infini les possibilités.
De plus, on a trouvé de façon empirique que certains colorants avaient une affinité inattendue
pour certaines protéines. Ainsi, le bleu de dextran peut se fixer réversiblement à certaines
kinases tandis que le bleu de procion a une affinité pour des déshydrogénases utilisant le NAD
comme cofacteur.
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4.2 Isolement des antigènes
Les anticorps sont des ligands très efficaces pour isoler leur antigène spécifique, on parle alors
d'immunoaffinité. L'interaction entre un antigène et son anticorps est très forte, des KD de
l'ordre 10-10 ne sont pas rares. Le défi dans ces chromatographies est de détacher l'antigène
sans l'endommager et, si possible, sans endommager la colonne et l'anticorps qui lui est
attaché. On doit donc employer des conditions douces de détergents (Triton, Tween), de pH,
de forces ioniques...) Les ligands d'une enzyme peuvent être un cofacteur non hydrolysable de
cette enzyme, ou encore un analogue structurel non hydrolysable du substrat.
On a aussi mis au point des méthodes de chromatographie d'affinité pour isoler des acides
nucléiques. Ainsi les ARNm polyadénylés peuvent facilement être isolés par chromatographie
sur des résine d'oligo(dT)-cellulose ou de poly(U)-Sepharose. En effet, à faible force ionique,
la courte séquence de polyadénines au bout 3' des ARNm peut se lier par simple
complémentarité de base à des séquences de d'oligo-désoxythymidine ou de poly-uridine. On
peut ensuite désorber à haute force ionique.