Agrégation - Leçons

Réduction de JORDAN LEMME : Soit f ∈ L(E) nilpotent. Il existe des entiers

d1 ≥ . . . ≥ d` tels que dans une certaine base β de E, Mβ (f )
ÉNONCÉ : soit diagonale par blocs avec les blocs (Jdk )1≤k≤` .

Théorème : Soit f ∈ L(E) de polynôme caractéristique Démonstration. Montrons le lemme par récurrence forte sur
scindé. Notons λ1 , . . . , λr ses valeurs propres. Il existe des en- dim(E) = n.
tiers dj,1 ≥ . . . ≥ dj,`j pour j ∈ {1, . . . , r} tels que dans une
• Pour n = 1, c’est évident.
certaine base β de E, Mβ (f ) soit diagonale par blocs avec les
blocs • Soit n ≥ 2 et supposons le résultat faire pour toute dimension
(Bj,k ) 1≤j≤r inférieure à n.
1≤k≤`j Soit f ∈ L(E) nilpotent d’indice q. On peut supposer 2 ≤ q ≤ n,
où Bj,k = λj Idj ,k + Jdj ,k , en notant Jd la matrice de jordan car si q = 1, f est nul et si q = n, prenant x ∈ E satisfaisant le
définie par : lemme, on a Ef,x = E et la matrice de f relativement à la base

0 ... 0

(x, f (x), . . . , f n−1 (x)) est Jn .
1 0


0 Donnons-nous alors x ∈ E tel que f q−1 (x) 6= 0, 2 ≤ q ≤ n − 1.
En notant (e1 , e2 , . . . , eq ) = (x, f (x), . . . , f q−1 (x)) que l’on com-

... .. 
 
Jd = 
0 1 . ∈ Md (K)

.
. ..
plète en une base (e1 , . . . , eq , eq+1 , . . . , en ) de E. Considérons le
. . ... 0

sous-espace vectoriel F défini par :


0 ... 0 1 0
 

F = {y ∈ E | ∀j ∈ N, e∗q ◦ f j (y) = 0} = ker(e∗q ◦ f j )

\

j<q
DÉVELOPPEMENT :
F est, par définition, de dimension au moins égale à n − q et
LEMME : Soit f ∈ L(E) nilpotent d’indice q. Alors f -stable.
Voyons que F Ef,x = {0}. Soit y = q−1 j=1 λj f (x) ∈ F
j
Ef,x .
T P T
pour tout x ∈ E tel que f q−1 (x) 6= 0 l’espace Ef,x :=
V ect({x, f (x), . . . , f q−1 (x)}) est f -stable, de dimension q. Alors on a :
0 = e∗q (y) = λq−1
Démonstration. Il suffit de remarque que, par nilpotence de f , Puis 0 = e∗q (f (y)) = λq−2 et ainsi de suite jusqu’à 0 =
Ef,x = K[f ](x). Ainsi, il s’agit d’un sous-espace vectoriel de di- e∗q (f q−1 (y)) = λ1 . Ainsi, y = 0 et donc F Ef,x = {0}. Ceci
T

mension q et f -stable par nilpotence de f . implique dim(F ) ≤ n − q et donc dim(F ) = n − q.

Demesmay Yoann 1 Université de Bourgogne Franche-Comté - 2022/2023

Agrégation - Leçons

On a ainsi la décomposition en sous-espaces stables de E : (b) Le nombre de blocs associés à une valeur propre λ est égal
à la dimension du sous-espace propre (multiplicité géomé-
E = Ef,x ⊕ F
trique) de Eλ .
Comme la matrice de f|Ef,x dans la base (x, f (x), . . . , f q−1 (x)) (c) La somme des tailles des blocs associés à une valeur propre
est Jq et qu’en appliquant l’hypothèse de récurrence à f|F , on λ est égal à la multiplicité algébrique de λ du polynôme
obtient le résultat en concaténant les bases trouvées des deux caractéristique.
sous-espaces vectoriels supplémentaires, d’où le résultat par ré-
currence. • La connaissance de la réduite de jordan et d’une de ses ma-
trices de passage nous donne la décomposition de dunford.

Démonstration. En notant χf (X) = rk=1 (X − λk )αk , on a par le

Q

lemme des noyaux couplé au théorème de cayley-hamilton :

E = rk=1 ker(f − λk )αk qui est une décomposition en sous-espaces
L

f -stables de E.
En notant, pour k ∈ {1, . . . , r}, Nk := ker(f − λk )αk , on ap-
plique le lemme précédent à la famille d’endomorphismes nilpo-
tents (fNk − λk IdNk )1≤k≤r . On obtient la décomposition souhaitée
en concaténant les bases (Bk )1≤k≤r trouvées.
Remarques :
• Le premier lemme est survolé pour se concentrer sur le reste de
la preuve. Il faut néanmoins savoir justifier les détails.
• Cette preuve via la dualité n’est pas "constructive" : il faut sa-
voir réaliser une réduite de jordan d’un endomorphisme quel-
conque à polynôme caractéristique scindé.
• Dans la réduite de jordan d’un endomorphisme, on a :
(a) La taille du plus grand bloc associé à une valeur propre λ
est égal à la multiplicité algébrique de λ dans le polynôme
minimal.

Demesmay Yoann 2 Université de Bourgogne Franche-Comté - 2022/2023