2021, 9es journées de la relève en études asiatiques et orientales / 9. Schweizerische Nachwuchstagung der Asien- und Orientwissenschaften
Dans le sillon de l’art contemporain, la production artistique de l’espace géoculturel arabe, c’est-à-dire l’art produit dans les pays arabes et au sein de leur diaspora dans le monde, est pénétrée, depuis le début des années 2000, par des démarches de représentation qui adoptent et adaptent les genres de l’imaginaire. La science-fiction, l’anticipation, le fantastique et la fantasy, ainsi que les contes, les mythes et le réalisme magique, élargissent le traitement du monde ordinaire, notamment du territoire et de l’histoire, qui se retrouvent injectés dans une illusion référentielle produites à partir des réalités qui leur préexisteraient. En faisant évoluer le récit et la représentation dans un univers physique et social entièrement construit, les artistes actualisent les discours tout en renouvelant les contestations au sein du « monde arabe ». Toute l’ambition de cette démarche artistique réside dans le commentaire de l’illusion référentielle qui a pour dessein de formuler des idées, des critiques, tout en invitant au regard des sociétés et des réalités dans lesquelles les artistes s’inscrivent. Est-ce juste un épiphénomène ? Sinon en quoi cela peut-il être symptomatique d’une critique d’une certaine réalité ou d’un présent désenchanté ? À cet égard, l’étude de l’adaptation des genres de l’imaginaire dans le champ de l’art contemporain mérite une attention particulière compte tenu du grand procès de genre qui étend la juridiction des représentations du territoire et de l’histoire de l’espace géoculturel arabe depuis le début du XXIe siècle. La démarche de ces artistes nous amène à croiser ce corpus d’œuvres avec d’autres cas de « futurismes culturels », tels que l’Ethnofuturisme finno-ougrien apparu dans les années 1980 ou l’Afrofuturisme orbitant dans la création contemporaine de certains artistes Afro-américains. Comment l’adaptation des futurités apparaît-elle dans la création artistique ? Qu’est-ce qui fait qu’il y a une singularité arabe ? Que signifie-t-elle ? Plus généralement, est-ce que cette esthétique ne permettrait pas de se détacher voire de rompre avec les codes esthétiques de l’art contemporain arabe qui se sont développées depuis ces trente dernières années ? Enfin, l’analyse des réseaux, des circulations et de l’interaction dans les arts nous amène à écrire une histoire de l’art dans une perspective sociologique. Le système d’interaction artistique d’une création géoculturelle ne fonctionne pas de la même manière qu’un système national ou que celui d’un groupement artistique défini. Des lacunes persistent dans l’écriture de l’art contemporain de ces vingt dernières années. Une première difficulté réside dans l’actualité de la période analysée ; les sources primaires n’ont pas la même consistance que celles des périodes précédentes ; la digitalisation des formats et des échanges nous amène vers des documents dématérialisés. Somme toute, quelles sont les clés pour écrire une histoire de l’art qui serait décentralisée sans être mise au ban ? La spécificité de cette recherche est liée au choix d’une méthodologie d’analyse de l’ensemble des manifestations artistiques qui ont permis aux œuvres de faire événement. Quelles sont les modalités d’inclusion des « futurismes arabes » dans l’histoire de l’art ? Là est toute l’intrigue de cette histoire…