EMC Vasculaire
EMC Vasculaire
EMC Vasculaire
19-0560
Résumé.– Les accidents ischémiques cérébraux (AIC) sont significativement plus fréquents que les
accidents hémorragiques et représentent approximativement 80 % des accidents vasculaires cérébraux.
Ils constituent dans les pays occidentaux une cause importante de mortalité et de handicap chronique,
avec comme conséquence un retentissement socioéconomique important. Les progrès récents, en
particulier ceux de la neuro-imagerie, des explorations ultrasonores et cardiologiques, les résultats des
études épidémiologiques et de l’expérimentation, ont permis d’améliorer considérablement la
compréhension des mécanismes responsables de cette pathologie et le démembrement des nombreuses
étiologies responsables. Les AIC représentent une pathologie hétérogène, dont l’étiologie est dominée
par l’athérosclérose et les embolies d’origine cardiaque ; de très nombreuses autres causes moins
fréquentes peuvent être incriminées et cette diversité étiologique doit être prise en compte pour la mise
en place des méthodes diagnostiques et des mesures thérapeutiques et de prévention adaptées.
© Elsevier, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : A Elbaz et P Amarenco. Accidents ischémiques cérébraux. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0560, 1997, 5 p.
19-0560 Accidents ischémiques cérébraux Angéiologie
2
Angéiologie Accidents ischémiques cérébraux 19-0560
ATHÉROSCLÉROSE DES ARTÈRES CÉRÉBRALES âgé (comme la fibrillation auriculaire non valvulaire) ou
EXTRA- ET INTRACRÂNIENNES comportant un faible risque d’AIC (comme le prolapsus mitral)
Elle est une cause fréquente d’AIC (20-30 % environ). L’ulcération peut être difficile à affirmer. Il est également à signaler
de la plaque d’athérome peut avoir pour conséquence la survenue qu’athérosclérose et pathologie cardiaque coexistent chez de
d’un AIC en libérant des emboles de cristaux de cholestérol et/ou nombreux patients [3], et que la réalisation d’un bilan cardiologique
en entraînant la constitution d’un thrombus fibrinoplaquettaire au ne dispense pas d’une exploration des vaisseaux du cou et vice
contact de la plaque ulcérée, ce dernier pouvant être à son tour le versa.
point de départ d’embolies ou aboutir à l’occlusion artérielle [1].
L’athérosclérose atteint les artères de gros et moyen calibre ; LACUNES
certaines portions du système artériel sont préférentiellement
Les artérioles perforantes de calibre inférieur à 400 µm (branches
touchées. Au niveau des artères carotides, le bulbe, l’origine de la
lenticulostriées, pontiques, thalamiques) peuvent être le siège d’un
carotide interne, le siphon sont plus souvent et sévèrement
épaississement de leur paroi, ou lipohyalinose, secondaire à l’HTA,
atteints [1]. Le risque d’AIC ipsilatéral à une sténose athéroscléreuse
pouvant conduire à l’occlusion de l’artériole et à la constitution
de l’origine de l’artère carotide interne est fonction du degré de
d’un infarctus de petite taille, dit infarctus lacunaire ou lacune
sténose, le risque étant le plus élevé pour les sténoses égales ou
(diamètre de l’infarctus < 15 mm) (15-20 % des AIC) [18]. D’autres
supérieures à 70 %, comme l’ont démontré les études NASCET
mécanismes peuvent être à l’origine d’infarctus lacunaires : un
(North American Symptomatic Carotid Endartrectomy Trial) et
microembole d’origine cardiaque, une plaque d’athérome occlusive
ECST (European Carotid Surgery Trial) [8, 20]. L’athérosclérose peut
à l’origine d’une artère perforante, ou encore un embole à partir
également atteindre les portions initiales des artères cérébrales
d’une plaque d’athérome [9].
antérieures et moyennes. Plus récemment, il a été montré que la
présence de plaques d’athérome ulcérées au niveau de la crosse de
DISSECTIONS DES ARTÈRES CERVICALES
l’aorte augmentait le risque d’AIC, le risque d’embolie cérébrale
ET CÉRÉBRALES
étant corrélé à leur sévérité [2, 33]. L’athérosclérose peut aussi
toucher la circulation postérieure à différents étages ; l’origine de Elles sont responsables d’environ 20 % des AIC de l’adulte
l’artère vertébrale et la portion prévertébrale de l’artère sous- jeune [30], mais peuvent survenir à tout âge. Elles concernent tout
clavière sont les plus souvent et sévèrement touchées, mais la d’abord l’artère carotide interne sus-bulbaire, puis l’artère
terminaison de l’artère vertébrale, le tronc basilaire et l’origine des vertébrale et enfin plus rarement les artères cérébrales. Elles sont
artères cérébrales postérieures peuvent aussi être concernées. Le la conséquence du clivage de la paroi artérielle par un hématome
risque d’AIC en rapport avec l’athérosclérose de la circulation sous-intimal ou sous-adventiciel. Deux facteurs peuvent favoriser
postérieure a été considérablement moins bien évalué que pour la leur survenue :
circulation antérieure.
– un traumatisme artériel déclenché par des mouvements forcés
cervicaux (accident de la voie publique, manipulations cervicales,
EMBOLIES D’ORIGINE CARDIAQUE
sport,...) ;
Classiquement, 15 à 20 % des AIC sont la conséquence d’une – une anomalie artérielle favorisante (dysplasie fibromusculaire,
embolie d’origine cardiaque [31] ; cette proportion est en fait plus maladie de Marfan) peut être retrouvée dans certains cas.
importante chez le sujet jeune (23-36 %, [31]) et chez le sujet âgé de
Le diagnostic suspecté cliniquement devant des signes locaux ou
plus de 60 ans, chez qui les embolies d’origine cardiaque
des signes d’ischémie cérébrale, est confirmé par la mise en
représentent la première cause d’AIC (environ 30 %) (fig 1) .
évidence d’un élargissement de calibre de l’artère disséquée par
Certains arguments cliniques et/ou radiologiques permettent de
un hématome intramural, lequel peut conduire à l’occlusion de
suspecter une origine cardiaque, mais compte tenu de leur faible
l’artère de par son volume, ou du fait du thrombus luminal formé
spécificité, le diagnostic d’AIC d’origine cardiaque repose sur la
en regard. Ce thrombus luminal constitue également une menace
mise en évidence d’une source cardiaque potentielle d’embolie ; il
permanente d’embolie cérébrale. Les examens à réaliser en
dépend donc étroitement de l’exhaustivité du bilan étiologique
urgence, avant l’apparition de signes d’ischémie cérébrale si
réalisé. La fréquence de cette cause impose de réaliser un bilan
possible, sont l’examen ultrasonore des vaisseaux du cou, et
cardiologique adapté en fonction du terrain de survenue de
surtout l’imagerie par résonance magnétique (IRM) couplée à
l’accident (l’âge et les antécédents cardiaques en particulier). En
l’angiographie par résonance magnétique (ARM), l’angiographie
dehors de l’électrocardiogramme systématique à la recherche d’une
conventionnelle n’étant plus réservée qu’aux quelques cas où les
fibrillation auriculaire ou d’une ischémie myocardique en
examens précédents ne confirment pas le diagnostic suspecté
évolution, l’échographie cardiaque est un examen dont l’utilité est
cliniquement, en particulier dans le territoire postérieur.
à discuter au cas par cas, en particulier lorsque l’examen clinique
cardiologique est anormal, suggérant la possibilité d’une
ANGÉITES DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL
cardiomyopathie ou d’une valvulopathie, ou lorsque l’on suspecte
une endocardite ou encore en présence d’une fibrillation Il existe de nombreuses affections inflammatoires pouvant
auriculaire. Devant un infarctus cérébral de cause indéterminée et entraîner une lésion inflammatoire de la paroi des artères
un examen cardiologique normal, l’apport diagnostique de cérébrales. L’examen permettant de porter le diagnostic est
l’échocardiographie transœsophagienne (ETO) n’a pas encore été l’angiographie cérébrale retrouvant un aspect de rétrécissement
définitivement montrée utile d’un point de vue thérapeutique. segmentaire des artères. Elles peuvent s’observer dans le cadre de
L’ETO permet de visualiser avec plus de sensibilité que pathologies variées comme la périartérite noueuse, l’angéite de
l’échocardiographie transthoracique l’oreillette et l’auricule Churg et Strauss, l’artérite de Horton, la granulomatose de
gauches, le septum interauriculaire, l’aorte ascendante et sa crosse. Wegener, l’artérite de Takayashu, le lupus érythémateux disséminé,
Les nombreuses sources d’embolies cardiaques potentielles sont certaines pathologies infectieuses, l’angéite du post-partum, ou être
résumées dans le tableau II. Le risque d’AIC est variable en associées à la prise de toxiques (crack, cocaïne, amphétamines,
fonction du type de cardiopathie ; la responsabilité dans la éphédrine) ; lorsque aucune cause n’est trouvée, on parle des
survenue d’AIC de certaines cardiopathies fréquentes chez le sujet exceptionnelles angéites isolées du système nerveux central.
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19-0560 Accidents ischémiques cérébraux Angéiologie
Anomalies cardiaques ne constituant pas une source définie d’embolie, dont le lien avec les accidents ischémiques cérébraux a été établi, mais comportant un risque de récidive très faible et
dont on ne connaît pas le mécanisme par lequel elles agissent.
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Angéiologie Accidents ischémiques cérébraux 19-0560
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5
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0570
19-0570
Algodystrophie
F Eulry
Résumé.– L’algodystrophie, maladie protéiforme intéressant une région articulaire, est une affection
locorégionale microcirculatoire fonctionnelle par désordre neurovégétatif primitif, ou surtout secondaire
à une étiologie traumatique ou non traumatique, locale ou générale, favorisée dans 30 % des cas par un
terrain anxiodépressif. Elle évolue souvent mais pas toujours en trois phases successives « chaude
pseudo-inflammatoire », « froide ischémique », puis de guérison parfois avec séquelles rétractiles
fonctionnelles péjoratives. Son diagnostic repose sur un faisceau d’arguments cliniques (douleurs,
arthropathie invalidante, troubles vasomoteurs et trophiques), biologiques (absence de signes
biologiques inflammatoires), radiologiques (déminéralisation sous-chondrale retardée sans pincement
articulaire, bandes claires métaphysaires chez le jeune), isotopiques (hyperfixation, hypofixation chez
l’enfant) et évolutifs (guérison, totale ou non, après lutte contre la douleur et la stase circulatoire,
réponse positive aux thérapeutiques vasoactives : calcitonine surtout, blocs sympathiques régionaux à la
guanéthidine, voire buflomédil). De rares observations simulent, ou associent, une thrombose veineuse
ou une artériopathie chronique ou aiguë des membres.
© Elsevier, Paris.
François Eulry : Professeur au Val-de-Grâce, chef du service de rhumatologie, hôpital d’instruction des
Armées Bégin, 69, avenue de Paris, 94160 Saint-Mandé, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : F Eulry. Algodystrophie. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0570, 1997, 4 p.
19-0570 Algodystrophie Angéiologie
plâtrée et rééducation intempestives et douloureuses révèlent ou plantaire. L’atteinte du genou est plus rare avec prise globale ou
provoquent la maladie [6]. Les causes non traumatiques intéressent limitée (condyle, plateau tibial). L’algodystrophie de hanche est
l’appareil locomoteur (arthrites septiques ou non, hémiplégie, encore plus rare, avec impotence fonctionnelle contrastant avec une
radiculalgies, névrome de Morton), plus rarement les appareils mobilité passive relativement conservée et un excellent pronostic.
cardiovasculaire (infarctus du myocarde, artériopathie,
thrombophlébites), pleuropulmonaire, endocrinien et métabolique,
les médicaments (isoniazide, barbituriques), exceptionnellement la Examens paracliniques
grossesse (algodystrophie de hanche). Des facteurs de terrain sont
fréquents : troubles psychologiques, diabète sucré, mais peut-être Il n’y a aucun syndrome biologique inflammatoire. Le liquide
pas l’hypertriglycéridémie considérée pourtant, par certains, synovial est paucicellulaire (inférieur à 1 000/mm3) et aseptique [16].
comme un facteur favorisant possible. La ponction-biopsie synoviale, exceptionnellement utile, noterait
l’absence de cellules inflammatoires et, aux stades initiaux, une
congestion vasculaire pure parfois pseudoangiomateuse, puis
Étude clinique ultérieurement une fibrose progressive.
Les radiographies comparatives, avec incidences adaptées, seront
Après un début progressif ou brutal, sont réunis [2] des signes répétées après quelques semaines, du fait du retard radiologique
articulaires, vasomoteurs et trophiques (tableau II). La douleur, de sur les signes cliniques. Elles restent normales tout au long de
tout type, souvent nocturne, limite ou interdit l’usage du membre l’évolution, dans 70 % des cas de l’enfant et dans 20 % de ceux de
et augmente avec les mouvements. Raideur articulaire et l’adulte [2, 6]. La déminéralisation sous-chondrale est le signe
impotence fonctionnelle peuvent se compliquer précocement de dominant, homogène ou hétérogène, mouchetée ou non, micro- ou
rétractions capsuloligamentaires ou tendinoaponévrotiques parfois macrolacunaire, localisée ou diffuse, sur les articulations
inaugurales et préoccupantes (extenseurs des doigts, aponévrose concernées voire adjacentes ou régionales, même si elles ne sont
plantaire). Un épanchement articulaire est fréquent. pas cliniquement touchées. Chez l’enfant, une bande claire barrant
Parmi les troubles vasomoteurs et trophiques, l’œdème est la métaphyse peut la souligner [2, 6] . Une simple ostéoporose
inconstant, mou ou ferme, rougeâtre ou pâle. L’hyperthermie puis d’immobilisation après traumatisme, sans algodystrophie, donne
l’hypothermie locales sont franches, la seconde fréquente d’emblée les mêmes images. Enfin, les berges articulaires ne sont jamais
chez l’enfant ou l’adolescent. L’hypersudation localisée est très pincées ni érodées, ni condensées. Les parties molles, épaissies au
fréquente. L’hyperesthésie cutanée concerne la moitié des cas, très début, sont parfois anormalement fines ensuite.
évocatrice du diagnostic en l’absence d’autres signes locaux. Dans 95 % des cas [6] la scintigraphie osseuse au MDP-99mTc [12] est
Rougeur ou pâleur et érythrocyanose de déclivité sont anormale aux temps précoces (angioscintigraphie, temps osseux
permanentes, ou réalisent de brèves crises vasomotrices précoce) ou surtout osseux tardifs, bien avant les signes
douloureuses. Les anomalies phanériennes, rares mais évocatrices, radiologiques, intérêt majeur pour le diagnostic précoce. Elle n’a
réversibles après guérison, sont localisées à la région articulaire aucune spécificité. Les anomalies du temps tardif persistent
intéressée : ongles cassants, hypertrichose ou hypopilosité pendant toute l’évolution, et après guérison clinique, alors que
inexpliquées. celles des temps précoces se corrigent. L’hyperfixation par rapport
Les trois phases classiques de la maladie regroupent ces au côté opposé est habituelle, locale, locorégionale ou étendue aux
symptômes. Le tableau de « phase chaude » a une allure clinique articulations sus- et sous-jacentes, mêmes muettes cliniquement.
inflammatoire (douleur articulaire, œdème, rougeur, hyperthermie) Après un traumatisme, l’hyperfixation n’évoque vraiment une
sans jamais de signes biologiques inflammatoires. En phase algodystrophie que si son territoire dépasse celui du trauma
ischémique « phase froide », la peau est froide, dépilée, atrophique responsable d’une hyperfixation localisée, ou bien si elle est
ou œdématiée, cyanosée. La rétraction des parties molles, pure, locorégionale. Une hypofixation est retrouvée dans 70 % des cas
prédominante ou discrète est de mauvais pronostic fonctionnel si de l’enfant, et presque jamais chez l’adulte [2, 6] ; elle se distingue
elle se fixe (équinisme, rétractions des fléchisseurs de la main), de l’hypofixation d’un pied en décharge complète par béquillage,
complication tardive et globalement rare. devenu froid et cyanotique, qui disparaît à la remise en charge, à
la différence de celle de l’algodystrophie [11].
Le syndrome « épaule-main » est volontiers sévère surtout à la
main avec rétraction des doigts rapidement, et assez fréquemment L’imagerie par résonance magnétique (IRM) est moins utile dans
irréductible, mais atteinte rétractile de l’épaule de bien meilleur le diagnostic d’algodystrophie à quelques exceptions près :
pronostic. Au membre inférieur, il s’agit le plus souvent du pied schématiquement [10], en « phase chaude » elle donne de façon
avec risque de rétraction du tendon calcanéen ou de l’aponévrose étendue un hyposignal en T1, rehaussable par le gadolinium, et un
hypersignal en T2 qui, sur la hanche par exemple, intéressent le
col, la tête fémorale et le cotyle, permettant d’écarter une
Tableau II. – Formes cliniques d’allure vasculaire
ostéonécrose aseptique. Dans le même temps, en général, la
de l’algodystrophie.
scintigraphie osseuse est elle-même évocatrice dans les mêmes
Formes exceptionnelles d’allure artériopathique territoires. En « phase froide », les résultats sont contradictoires,
- sans oblitération artérielle
l’IRM serait décevante [17], mais il semble que les formes avec
- exceptionnelle claudication intermittente pseudoartérielle
- ischémie aiguë distale fonctionnelle pure sans thrombose (réversible) hypofixation concernant le pied ne s’accompagnent d’aucune
- avec oblitération artérielle anomalie en IRM [10]. L’intérêt principal de l’IRM nous paraît être
- artériopathie athéromateuse compliquée d’algodystrophie le diagnostic d’une fracture de contrainte associée à
- parfois lors de la chirurgie de revascularisation
l’algodystrophie (sous forme d’un trait en hyposignal intense en
Formes d’allure veineuse T1 et hypersignal en T2, en pleine zone d’algodystrophie), que cette
- sans thrombose veineuse fracture soit la cause ou la conséquence de l’algodystrophie.
- algodystrophie pseudophlébitique
- avec thrombose veineuse Les explorations fonctionnelles de la microcirculation [1] n’ont pas
- algodystrophie concomitante à la thrombophlébite (immobilisation plâtrée), la d’intérêt diagnostique, mais uniquement physiopathologique, sauf
précédant, la compliquant
dans quelques cas de diagnostic difficile.
2
Angéiologie Algodystrophie 19-0570
3
19-0570 Algodystrophie Angéiologie
rester insuffisante pour les mouvements fins, quand ce n’est pas la rééducation en milieu marin ou la crénothérapie. Le soutien
pire. À la phase d’entretien (après le 60e jour) la balnéothérapie, psychologique est régulièrement nécessaire, en particulier chez
l’autorééducation dans la limite de la non-douleur et la l’enfant, à toutes les phases du traitement. La reprise des activités
kinésithérapie, active et passive, prudentes sont nécessaires, voire familiales puis sociales sera progressive.
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spectaculaire par bloc sympathique régional à la gua- du pied. J Radiol 1996 ; 77 : 411-417 gique. Sem Hop Paris 1994 ; 70 : 1049-1057
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[6] Eulry F, Aczel F, Vasseur P, Pattin S, Vicens JL, Flageat [12] Manicourt DH. L’exploration scintigraphique dans sited : MR imaging findings before and after infusion of
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[7] Eulry F, Chazerain P, Magnin J et al. Algodystrophies et [13] Masson CH, Renier JC, Bregeon CH,Audran M. Le trai- [18] Taillan B, Gagnerie F, Gurgueghian B, Euller-Ziegler L,
thromboses veineuses des membres inférieurs : pro- tement des algodystrophies : situation actuelle, propo- Ziegler G. Algodystrophie simulant une ischémie
blèmes diagnostiques. À propos de cinq observations. sitions pour de futurs protocoles. Sem Hop Paris 1994 ; aiguë ; trois nouvelles observations. Ann Med Interne
Rev Rhum Mal Osteoartic 1989 ; 56 : 403-407 70 : 1058-1064 1989 ; 140 : 236-237
4
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0010
19-0010
Anatomie vasculaire
C Latrémouille
Résumé.– Cette étude anatomique permet de préciser les connaissances indispensables des régions
directement concernées par la pathologie vasculaire, en s’intéressant principalement aux axes
vasculaires périphériques, ce qui exclut le chapitre particulier de la vascularisation coronaire. Elle précise
l’anatomie descriptive et les voies d’abord par lesquelles le chirurgien pourra officier. Cette anatomie est
actuellement de mieux en mieux explorée par les progrès des techniques d’imagerie, qui de plus en plus
vont en s’affinant et en s’associant aux nouvelles thérapeutiques que représentent les procédures
endoluminales.
© Elsevier, Paris.
Introduction
1
Cette étude anatomique (fig 1) ne prétend aucunement avoir un
caractère exhaustif, mais devrait permettre de préciser les
connaissances topographiques des principales régions clés du système 2
10
artériel qui, étant les sites préférentiels de la pathologie vasculaire, 3
doivent être parfaitement connues, d’une part des médecins et d’autre 11
4 12
part des chirurgiens notamment vasculaires. Or, l’exploration de cette
anatomie repose de plus en plus sur une imagerie aux possibilités sans 13
cesse grandissantes. 5
Complétant l’artériographie, qui opacifie le contenu des artères,
l’échographie a permis d’analyser les modifications pariétales. Le 6 14
scanner et l’imagerie par résonance magnétique (IRM) donnent des 15
images complètes de la région et précisent les rapports du vaisseau
malade. Ces éléments sont d’autant plus précieux que le chirurgien ne 16
voit pas toujours la région malade : le principe même du pontage est
de passer d’artère donneuse saine en artère receveuse normale, ignorant 17
ainsi les lésions que l’imagerie se doit d’analyser. L’exposé des
connaissances nécessaires pour réaliser des opérations vasculaires porte
donc sur l’interprétation précise des images. 18
19
7
Troncs supra-aortiques 20
8 21
Les trois troncs artériels supra-aortiques, naissant directement de la 22
crosse de l’aorte sont : le tronc artériel brachiocéphalique, la carotide
primitive gauche et l’artère sous-clavière gauche.
9 23
TRONC ARTÉRIEL BRACHIOCÉPHALIQUE
De 5 à 7 cm de longueur et de 12 à 15 mm de diamètre, il se dirige
en haut, à droite et un peu en arrière. Au niveau de l’articulation 1 Anatomie des branches terminales de l’aorte. 1. Artère épigastrique ; 2. artère il-
sternoclaviculaire, il se divise en artères carotide primitive droite et iaque primitive ; 3. artère circonflexe iliaque profonde (iliolombaire) ; 4. artère circon-
sous-clavière droite. Dans 20 % des cas, il est associé dans son origine flexe iliaque superficielle ; 5. artères circonflexes fémorales ; 6. artère fémorale pro-
fonde ; 7. artères jumelles ; 8. artère tibiale antérieure ; 9. artère pédieuse ; 10. artère
avec l’artère carotide primitive gauche.
sacrée moyenne ; 11. artère sous-cutanée abdominale ; 12. tronc hypogastrique ; 13. ar-
tères honteuses externes superficielles ; 14. artère des adducteurs ; 15. artère du qua-
driceps ; 16. artère musculaire moyenne ; 17. artère grande anastomotique ; 18. artère
articulaire supérieure ; 19. artère articulaire inférieure ; 20. tronc tibiopéronier ; 21. ar-
tère tibiale postérieure ; 22. artère péronière ; 23. branche antérieure de l’artère
© Elsevier, Paris
Toute référence à cet article doit porter la mention : C Latrémouille. Anatomie vasculaire. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0010, 1997, 3 p.
19-0010 Anatomie vasculaire Angéiologie
2
Angéiologie Anatomie vasculaire 19-0010
artères spinales. La plus importante des artères radiculomédullaires bifurquer en artères iliaque externe pour le membre inférieur et
est l’artère d’Adamkiewicz, qui naît généralement entre D8 et L2. iliaque interne pour le pelvis. L’artère sacrée moyenne descend en
Elle alimente l’artère spinale antérieure en décrivant une boucle avant de L5 vers le sacrum.
caractéristique en épingle à cheveux. Pour visualiser les branches collatérales de l’aorte abdominale
L’abord de l’aorte thoracique se fait par thoracotomie postérolatérale séparément, il est possible de réaliser les angiographies sélectives
gauche suivant une incision qui commence en arrière entre l’épine correspondantes. Pour mettre en évidence une sténose à l’origine du
de l’omoplate et le rachis et se poursuit vers l’avant selon une courbe tronc cœliaque ou des artères mésentériques, on pratique des
à convexité postérieure, passant à deux travers de doigt en dessous incidences latérales.
de la pointe de l’omoplate. Si le geste est thoracique pur, elle se Les voies d’abord de l’aorte abdominale sont de deux types : soit
poursuit selon une courbe harmonieuse jusqu’à la ligne axillaire transpéritonéal, soit rétropéritonéal.
antérieure, si le geste doit être plus étendu, elle se recourbe vers le La voie transpéritonéale est la voie idéale pour l’aorte abdominale
bas. L’espace intercostal qui donne le meilleur jour sur l’ensemble sous-rénale et les artères iliaques primitives. Elle peut se faire soit
de l’aorte thoracique est le cinquième espace, mais si l’isthme par une incision médiane xyphopubienne, soit par voie transversale
aortique doit être contrôlé, il faut lui préférer le quatrième espace qui expose moins bien les artères iliaques.
intercostal. Si les lésions sont étendues, il faudra ouvrir un autre
La voie rétropéritonéale peut se faire soit par une voie pararectale,
espace intercostal plus bas situé (sixième ou septième), en utilisant
par la voie de Robe ou la voie iliaque externe.
la même incision cutanée. On peut suivre l’ensemble de l’aorte
thoracique dont les niveaux de contrôle dépendront du siège précis
de la lésion. Le clampage, surtout bas situé, peut nécessiter le recours Membre inférieur
à une circulation extracorporelle partielle afin de limiter le risque de
paraplégie (artère d’Adamkiewicz). L’artère fémorale commune se divise au triangle de Scarpa en deux
branches principales : la fémorale superficielle et la fémorale
profonde. Cette dernière est la voie de suppléance et de relais
Artères abdominales préférentiel en cas de sténose de l’axe iliaque et de la fémorale
superficielle. La honteuse externe est en effet anastomosée avec le
L’aorte descendante pénètre dans la cavité abdominale au niveau de réseau des branches perforantes de la fémorale profonde.
D12. La voie d’abord de l’artère fémorale au triangle de Scarpa se fait par
Le tronc cœliaque naît de la face antérieure de l’aorte abdominale au une incision arciforme à convexité externe passant à 2 cm en dehors
niveau de D12-L1. Après un court trajet de 1 à 3 cm, il trifurque du trépied fémoral en connaissant l’existence de la lame
pour donner les artères hépatique commune, gastrique gauche, lymphoganglionnaire qu’il faut récliner en dedans afin de limiter le
coronaire stomachique et splénique. L’artère hépatique commune risque de lymphorrhée postopératoire.
bifurque derrière la tête du pancréas en artère hépatique propre et À partir du canal de Hunter, la fémorale superficielle prend le nom
artère gastroduodénale. La première se dirige vers le hile du foie d’artère poplitée qui chemine à la face postérieure de l’articulation
pour se terminer en ses deux branches terminales, les artères du genou en dessous de laquelle elle donne ses branches terminales
hépatiques gauche et droite. Elle a pour collatérale importante que sont le tronc tibiopéronier et l’artère tibiale antérieure.
l’artère cystique. L’artère gastroduodénale donne à son tour les L’abord de la poplitée haute se fait à la face interne du tiers inférieur
artères gastroépiploïque droite et pancréaticoduodénale inférieure de la cuisse. L’abord de la poplitée basse se fait par une incision
droite. L’artère gastrique droite a une origine variable dans l’axe jambière, en arrière de la crête interne du tibia.
hépatique commune-hépatique propre.
L’artère mésentérique supérieure naît de l’aorte à 1 cm au-dessous
du tronc cœliaque, en regard du bord supérieur de L1. Elle se dirige Conclusion
en avant et caudalement, séparée de la face antérieure de l’aorte par
la veine rénale gauche. Ses branches collatérales sont : l’artère Cette description anatomique concise reprend les différents éléments de
duodénopancréatique inférieure gauche, les branches jéjunales et l’arbre artériel, qui sont le siège préférentiel des lésions
iléales, l’artère colique droite supérieure, l’artère colique droite athéroscléreuses. Elle reprend donc, en précisant à chaque fois les
moyenne et l’iléocolique. différentes voies d’abord, les principales régions que le chirurgien
Les artères rénales droite et gauche naissent de chaque côté de l’aorte vasculaire a l’habitude d’aborder, même si de nouvelles techniques
abdominale en-dessous du point d’origine de l’artère mésentérique thérapeutiques permettent une autre approche de la pathologie artérielle
supérieure, et se trouvent en relation avec le plan veineux qui les par les procédures endoluminales.
couvre par devant. Elles peuvent être en nombre d’une à trois de
chaque côté. Dans ce dernier cas, elles sont représentées par une
artère rénale et deux artères polaires supérieure et inférieure.
Références
Des faces antérolatérales de l’aorte surgissent, un peu en dessous de
la naissance des artères rénales, les artères spermatiques ou [1] Bastide G, Lefèbvre D. Les artères de la cuisse et du genou. In : Chevrel JP ed. Anatomie
clinique. Paris : Springer-Verlag, 1996 ; vol 1 : 427-436
ovariennes qui suivent un trajet descendant et divergeant vers les [2] Bastide G, Lefèbvre D. Les artères de la jambe. In : Chevrel JP ed. Anatomie clinique. Paris :
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[3] Becade P. Le système artériel, constitution et valeur anatomique. Anat Clin 1980 ; 1 :
L’artère mésentérique inférieure naît de la face antérieure de l’aorte. 357-364
Elle donne des branches collatérales pour le côlon gauche et se [4] Bouchet A. Les artères du bras et du coude. In : Chevrel JP ed. Anatomie clinique. Paris :
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collatérales et terminales. Paris : Vigot, 1978
les artères iliaques primitives gauche et droite et l’artère sacrée [9] Pillet J. L’aorte abdominale et ses branches. In : Chevrel JP ed. Anatomie clinique. Paris :
moyenne. Les deux premières sont des troncs divergeants, qui vont Springer-Verlag, 1996 ; vol 2 : 421-439
3
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0120
19-0120
Angiopathies diabétiques
A Grimaldi
A Heurtier
Toute référence à cet article doit porter la mention : A Grimaldi et A Heurtier. Angiopathies diabétiques. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0120, 1997, 6 p.
19-0120 Angiopathies diabétiques Angéiologie
L’étude prospective randomisée du DCCT a confirmé les résultats une glycosylation protéique susceptible de modifier l’expression
d’études antérieures qui avaient montré un risque d’aggravation génique. En effet, cette dérégulation de la synthèse de la matrice
initiale de la rétinopathie ou de la neuropathie lors de extracellulaire, provoquée par une culture initiale en milieu enrichi
l’amélioration rapide de l’équilibre métabolique. Cette aggravation en glucose, persiste après plusieurs passages cellulaires en milieu
transitoire semble se faire sur le mode ischémique avec apparition normoglucosé. Il existerait donc une véritable mémoire génique de
au niveau de la rétine de nodules cotonneux secondaires à une l’hyperglycémie. De plus, l’accumulation de matrice extracellulaire
obstruction artériolaire et développement éventuel d’une s’expliquerait par un défaut de catabolisme par les
polyneuropathie ou d’une mononeuropathie aiguë, parfois métalloprotéases.
spectaculaire mais pratiquement toujours réversible. L’hypothèse
le plus communément avancée pour expliquer cette aggravation ¶ Biochimie
initiale transitoire, est celle d’une chute brusque du flux sanguin Sur le plan biochimique [13], on ne connaît pas encore les mécanismes
capillaire entraînée par le retour à la normoglycémie, provoquant liant l’hyperglycémie aux perturbations fonctionnelles et
l’occlusion de vaisseaux malades [23]. histologiques observées. Toutefois, il est intéressant de remarquer
que les tissus cibles de la microangiopathie diabétique se
[8]
PHYSIOPATHOLOGIE caractérisent par une pénétration libre du glucose intracellulaire si
bien que le taux de glucose intracellulaire reflète le taux de glucose
¶ Hyperglycémie chronique
extracellulaire. Cette hyperglycocytie entraînerait une augmentation
Elle est en effet responsable de perturbations précoces de la des voies métaboliques non insulinodépendantes du glucose. Deux
microcirculation avec sur le plan fonctionnel : voies sont tout particulièrement incriminées : la voie du sorbitol
d’une part, et la glycation protéique non enzymatique d’autre part.
– une augmentation du débit, de la pression et de la perméabilité
capillaires, secondaires à une sécrétion accrue de prostaglandines – La voie du sorbitol-fructose pourrait être responsable d’une
PGE2, PGI2 et de monoxyde d’azote (NO). Toutefois, au niveau pseudohypoxie métabolique (augmentation du rapport
des nerfs, l’œdème endoneural dû à l’hyperperméabilité serait NADH/NAD, augmentation du rapport lactate/pyruvate) et d’une
responsable d’un défaut de la circulation capillaire endoneurale diminution de la NaK-ATP-ase. Elle pourrait être à l’origine de la
avec développement d’une ischémie chronique expliquant la mort précoce des péricytes rétiniens riches en enzymes contrôlant
résistance paradoxale à l’ischémie observée très précocement au cette voie métabolique : l’aldose réductase.
cours de la neuropathie diabétique ; – La glycation protéique serait donc non seulement extracellulaire
– une perte de l’autorégulation hémodynamique avec vasoplégie mais aussi et peut-être surtout intracellulaire. Elle serait
artériolaire d’amont. Cette vasodilatation pourrait être secondaire responsable de la perturbation d’un certain nombre d’activités
au niveau de la rétine à une situation métabolique de enzymatiques telles que la NaK-ATP-ase, mais surtout d’une
pseudohypoxie tissulaire avec production de radicaux libres de modification de l’expression génique avec notamment
l’oxygène. Elle s’expliquerait, au niveau du glomérule rénal, par augmentation de la synthèse de collagène.
l’augmentation de la réabsorption glucosodée tubulaire proximale. La voie du sorbitol peut être inhibée par les inhibiteurs de l’aldose
Quoi qu’il en soit, cette vasodilatation avec perte de réductase et la glycation protéique par l’aminoguanidine. Les
l’autorégulation hémodynamique explique le retentissement sur la études animales ont donné des résultats très encourageants. Les
microcirculation de l’hypertension artérielle ; études chez l’homme, avec les inhibiteurs de l’aldose réductase,
– une tendance thrombogène avec notamment une augmentation ont été plutôt décevantes et l’aminoguanidine semble être à
du facteur de Willebrand synthétisé par les cellules endothéliales l’origine d’effets secondaires obérant les essais cliniques humains.
et une augmentation de la viscosité sanguine parallèle à
FACTEURS MODULATEURS
l’augmentation du fibrinogène responsable en particulier d’une (PROTECTEURS OU AGGRAVANTS) [8]
hyperagrégabilité érythrocytaire.
La responsabilité de l’hyperglycémie chronique est en faveur d’une
¶ Histologie théorie métabolique uniciste. Cependant, la constitution des lésions
est étroitement dépendante de la spécificité tissulaire. Il existe donc
Au niveau histologique, les premières lésions observées sont de des facteurs locaux ou généraux, aggravants ou protecteurs,
deux types : expliquant d’une part la discordance parfois observée entre
– d’une part la mort des péricytes, cellules de soutien enchâssées l’équilibre métabolique et la survenue des complications, et d’autre
dans la paroi des capillaires et communiquant avec les cellules part la dissociation fréquente des complications de rétinopathie,
endothéliales. Ces cellules dérivent histologiquement des cellules de glomérulopathie et de neuropathie.
musculaires lisses et ont des propriétés contractiles. Elles – L’hypertension artérielle est un facteur aggravant essentiel pour
assureraient le maintien du tonus capillaire et contrôleraient la la glomérulopathie diabétique mais aussi pour la rétinopathie et la
prolifération des cellules endothéliales. Notons qu’au niveau des neuropathie diabétiques.
capillaires musculaires, on compte un péricyte pour dix cellules En cas de microangiopathie diabétique, on cherche donc à obtenir
endothéliales, alors qu’au niveau de la rétine, on trouve un péricyte une pression artérielle inférieure à 130/85 mmHg. Les inhibiteurs
pour une ou deux cellules endothéliales. La mort des péricytes de l’enzyme de conversion (IEC) auraient un bénéfice particulier en
aurait donc des conséquences importantes sur le tonus des raison de leur action sur la pression hydrostatique transcapillaire.
capillaires rétiniens et la prolifération des cellules endothéliales ; En réalité, cet avantage n’a été démontré que pour le développement
– d’autre part, une synthèse accrue de la matrice extracellulaire de la glomérulopathie diabétique de type I, mais il n’est pas établi
(collagène, fibronectine, laminine) avec épaississement de la pour la glomérulopathie diabétique du diabète de type II, et encore
membrane basale et expansion du mésangium glomérulaire. Cette moins pour la rétinopathie et la neuropathie, malgré quelques
augmentation de synthèse protéique, par les cellules endothéliales observations cliniques et des expérimentations animales.
rétiniennes et les cellules mésangiales rénales, semble être Quoi qu’il en soit, les IEC ont apporté un argument important à la
secondaire à l’augmentation du glucose intracellulaire provoquant théorie hémodynamique de la microangiopathie diabétique qui fait
2
Angéiologie Angiopathies diabétiques 19-0120
– le décollement partiel du vitré, semble favoriser (pour des Parallèlement aux progrès des traitements hypoglycémiants et anti-
raisons mécaniques ?) la prolifération rétinienne. Au contraire, un infectieux, l’athérosclérose est devenue la principale cause de décès
décollement total du vitré d’ailleurs plus fréquent chez le des diabétiques, bien avant les comas métaboliques et les
diabétique, est un facteur de protection de la prolifération complications infectieuses. En effet, 75 % des diabétiques décèdent
rétinienne. d’accident vasculaire, au premier rang desquels l’ischémie
coronarienne responsable de 50 % des décès. Lorsqu’on prend en
– L’âge (> 50 ans) semble être un facteur indépendant de
compte les facteurs de risque classiques tels que l’âge,
protection vis-à-vis de la rétinopathie proliférante et de la
l’hypertension artérielle, l’hypercholestérolémie et le tabagisme, le
glomérulopathie diabétiques, mais c’est en revanche un facteur de
diabète entraîne un risque relatif modéré de 2 à 3, chez l’homme,
susceptibilité majeure de la neuropathie diabétique, expliquant que
plus important de 4 à 5, chez la femme. En effet, en matière
l’on puisse observer chez des patients de 70 ans, une neuropathie
d’athérosclérose, la femme diabétique perd son avantage naturel
diabétique sévère en l’absence de toute rétinopathie.
sur l’homme avec un sex-ratio hommes diabétiques/femmes
– Le sexe masculin et la grande taille (en raison de la longueur diabétiques entre 1 et 2 alors qu’il se situe dans la population non
axonale ?) seraient des facteurs de susceptibilité de la neuropathie diabétique de moins de 50 ans entre 5 et 10.
diabétique.
En fait, le poids relatif des facteurs de risque vasculaires varie selon
– L’artérite des membres inférieurs, en majorant l’ischémie la topographie artérielle. Ainsi, le diabète entraîne un risque relatif
neuronale, est également un facteur d’aggravation de la d’athérosclérose hiérarchisé : de 1,5 à 2 pour les accidents
neuropathie diabétique. vasculaires cérébraux, de 2 à 4 pour l’insuffisance coronaire, de 5 à
– L’hyperlipidémie serait un facteur d’aggravation de la 10 pour l’artérite des membres inférieurs.
glomérulopathie diabétique, de même que plus généralement En réalité, les lésions anatomiques telles qu’on peut les diagnostiquer
l’ensemble des facteurs de risque d’athérosclérose, y compris les par l’imagerie vasculaire non invasive (ou lors d’études autopsiques)
antécédents familiaux d’athérome et l’insulinorésistance elle-même. sont encore plus fréquentes chez le diabétique : environ 5 fois pour
En effet, si près de 50 % des diabétiques insulinodépendants l’insuffisance coronaire, 8 fois pour l’atteinte cervicocérébrale, 14 fois
développent une rétinopathie sévère, seulement la moitié d’entre pour l’artérite des membres inférieurs.
eux présentent une glomérulopathie clinique. Et si l’incidence
annuelle de la rétinopathie sévère reste stable, autour de 3 % après RÔLE DES FACTEURS DE RISQUE ET DE
20 ans de diabète, celle de la glomérulopathie s’effondre après 20 L’HYPERGLYCÉMIE : CONSÉQUENCES CLINIQUES
ans de diabète pour tomber à 3 ‰ après 30 ans d’évolution.
Pour chaque facteur de risque vasculaire, il importe de répondre
Autrement dit, le diabétique qui n’a pas développé de
aux questions suivantes :
glomérulopathie dans les 30 premières années de sa maladie, a un
risque très faible de la voir apparaître, même si son diabète a
¶ S’agit-il d’un facteur causal ou seulement
toujours été mal équilibré et s’il a une rétinopathie sévère. Il existe
d’un facteur lié à un autre facteur causal,
donc des facteurs de protection ou de susceptibilité de l’atteinte
ou encore d’un facteur d’aggravation ?
glomérulaire. Ces facteurs sont essentiellement d’ordre
génétique [7], car plusieurs études ont montré l’existence d’une À l’évidence, l’hyperglycémie est un facteur causal de la
agrégation familiale de la glomérulopathie diabétique. Les progrès microangiopathie diabétique, de même que l’hypertension
de la génétique moléculaire laissent espérer la détermination artérielle et l’hypercholestérolémie sont des facteurs étiologiques
prochaine des facteurs de susceptibilité de la microangiopathie de l’athérosclérose. Il n’en va pas de même en ce qui concerne les
diabétique (parmi les nombreux gènes étudiés, citons les gènes de liens unissant hyperglycémie et athérosclérose. L’hyperglycémie
l’enzyme de conversion de l’angiotensine, de l’angiotensinogène, apparaît plus ici comme un facteur lié à un facteur causal ou
du facteur de Willebrand, des déterminants de la matrice surtout comme un facteur aggravant majorant l’effet délétère des
extracellulaire, etc). On pourra ainsi dépister les patients à haut autres facteurs de risque au prorata du risque lui-même.
risque de microangiopathie, en particulier de glomérulopathie. En Autrement dit, plus le risque est élevé, plus la majoration par
attendant, force est de proposer à tous les diabétiques un objectif l’hyperglycémie est grande, comme cela a été démontrée par
glycémique les mettant, autant que faire se peut, à l’abri des l’étude MR FIT [19].
complications de microangiopathie.
¶ Existe-t-il un seuil à risque ou s’agit-il
d’un continuum et quel est le niveau global de risque ?
Macroangiopathie diabétique
En matière d’athérosclérose coronarienne, il n’existe pas de seuil à
Par opposition à la microangiopathie qui touche la risque pour la pression artérielle ou pour le cholestérol, mais un
microcirculation, on désigne sous le terme de macroangiopathie continuum avec un risque croissant parallèlement à l’élévation de la
diabétique, l’atteinte des artères musculaires allant de l’aorte pression artérielle et à l’augmentation du taux de low density
jusqu’aux petites artères distales d’un diamètre supérieur à 200 µm. lipoproteins (LDL cholestérol). Lorsqu’il existe un continuum, fixer
3
19-0120 Angiopathies diabétiques Angéiologie
une barre visant à séparer le « normal » du « pathologique » est paroi vasculaire par le diabète. La conséquence pratique est
forcément arbitraire. Il est alors nécessaire pour le clinicien de fixer la importante puisque la majorité des auteurs s’accordent pour traiter
barre d’intervention en fonction du risque vasculaire global du l’hypertension artérielle du diabétique de moins de 60 ans dès que
patient. On peut schématiquement distinguer trois niveaux de risque : la pression artérielle dépasse 140/90 mmHg (après les précautions
et confirmations d’usage : avec un brassard adapté en cas d’obésité,
– un risque faible, ne relevant que de mesures hygiénodiététiques
au repos, en l’absence de facteur de stress, à plusieurs reprises)
et d’une surveillance régulière ;
sans attendre les chiffres de 160/95 mmHg [9].
– un risque moyen, justifiant si les mesures hygiénodiététiques Il n’y a pas, à ce jour, d’argument physiopathologique pour modifier
sont insuffisantes, une prescription médicamenteuse pour des les valeurs seuils du diagnostic d’hypercholestérolémie et
valeurs seuils assez élevées (par exemple 160/95 mmHg pour la d’intervention médicamenteuse. Il n’en va pas de même en ce qui
pression artérielle, 1,60 g/L pour le LDL cholestérol) avec des concerne l’hypertriglycéridémie, bien qu’il s’agisse plus d’un
objectifs adaptés (par exemple, moins de 140/90 mmHg pour la marqueur du risque d’athérosclérose que d’un agent causal. En effet,
pression artérielle, moins de 1,30 g/L pour le LDL cholestérol) ; 20 à 50 % des diabétiques, en particulier des diabétiques non
– un risque élevé (ce qui est le cas de la prévention secondaire et insulinodépendants, présentent une hypertriglycéridémie. Celle-ci
de l’association de trois, ou plus, facteurs de risque distincts). Le évolue souvent parallèlement à l’hyperglycémie et à la surcharge
niveau d’intervention et les objectifs sont alors plus stricts (par pondérale. Elle est due à une augmentation de la synthèse hépatique
exemple, respectivement 140/90 mmHg et moins de 130/85 des VLDL ( very low density lipoproteins ), stimulée par
mmHg pour la pression artérielle, 1,30 g/L et moins de 1 g/L pour l’hyperinsulinisme et à un défaut de dégradation des VLDL
le LDL cholestérol). circulantes par dysfonctionnement de la lipoprotéine lipase aggravé
En ce qui concerne la majoration du risque coronarien par par l’insulinorésistance. L’hypertriglycéridémie s’accompagne donc
l’hyperglycémie elle-même, les études internationales divergent. d’un défaut de la voie métabolique, menant physiologiquement des
Certaines ne montrent aucune corrélation, d’autres au contraire VLDL aux LDL. Témoignent de ce défaut, l’augmentation du taux
démontrent l’existence d’un seuil à risque, mais pour des valeurs de remnants de VLDL (IDL) et du taux de formation de LDL petites
glycémiques nettement plus basses que celles retenues pour la et denses, toutes lipoparticules hautement athérogènes [21], tandis que
définition du diabète. Bien qu’il n’y ait pas d’accord international le HDL2 cholestérol participant à l’épuration du cholestérol tissulaire
sur ces valeurs, on peut retenir 1,20 g/L à jeun et 1,40 g/L à la vers le foie, est diminué. En conséquence, la barre de 2 g/L adoptée
deuxième heure de l’HGPO. Cela dit, contrairement au risque de par les consensus internationaux pour le traitement de
rétinopathie, le risque coronarien n’augmente pas parallèlement au l’hypertriglycéridémie, n’apparaît pas appropriée pour la population
degré de l’hyperglycémie, si bien qu’en matière de diabétique. Bien qu’il n’y ait pas d’accord international, la plupart
macroangiopathie, il semble que le bénéfice soit faible, voire nul des auteurs estiment qu’il faut intervenir pour des valeurs de
lorsque l’HbA1c s’abaisse de 9 à 8 %, voire de 8 à 7 %. Un bénéfice triglycérides supérieures à 1,50 g/L ou de HDL cholestérol inférieur
ne pourrait être démontré que pour une quasi-normalisation de à 0,40 g/L chez la femme, et à 0,35 g/L chez l’homme.
l’HbA1c au-dessous de 6 % (soit une moyenne glycémique au- Complications thrombotiques de l’athérosclérose
dessous de 1,20 g/L). Resterait alors à évaluer le bénéfice
L’hyperglycémie pourrait favoriser les complications
escompté, eu égard au risque encouru d’hypoglycémies.
thrombotiques de l’athérosclérose. Si le déséquilibre du diabète ne
semble pas responsable d’une athérosclérose plus sévère, il
¶ Quelle est la pathogénie de l’athérosclérose pourrait jouer un rôle important dans la survenue des
du diabétique ? complications thrombotiques d’un athérome déjà constitué. En
Remarquons d’abord que le diabète respecte l’inégalité de effet, l’hyperglycémie s’associe à des troubles de la crase sanguine
fréquence de l’athérosclérose selon les populations du globe. Ainsi, prothrombogènes réversibles avec le parfait équilibre glycémique :
le diabétique japonais a un taux faible d’athérosclérose comme la – hyperfibrinémie, augmentation du facteur VIII de Willebrand ;
population japonaise et le diabétique finnois a un taux élevé
– augmentation du facteur VII corrélée à l’hypertriglycéridémie ;
comme la population non diabétique, bien que dans les deux cas,
le diabète soit un facteur de majoration du risque. Le diabète ne – défaut de fibrinolyse.
semble donc pas intervenir directement, mais plutôt en Accélération du vieillissement de la paroi artérielle
potentialisant les facteurs de risque d’athérosclérose, ou en L’hyperglycémie pourrait être un agent causal de l’accélération du
aggravant l’athérome constitué. Le diabète pourrait ainsi intervenir vieillissement de la paroi artérielle (artériosclérose) dont la
de cinq manières différentes. pathogénie fait intervenir :
Association des facteurs de risque – la glyco-oxydation des protéines, en particulier des protéines de
la matrice extracellulaire et notamment du collagène ;
Il comporte fréquemment une association des facteurs de risque
– la dénervation sympathique des vaisseaux due à la
vasculaire. Ainsi, l’hypertension artérielle est 2 fois plus fréquente
dysautonomie diabétique ;
chez les diabétiques que dans la population non diabétique, et
l’hyperlipidémie 5 à 10 fois plus fréquente, tandis que le tabagisme – l’atteinte des vasa vasorum par la microangiopathie diabétique.
est hélas aussi fréquent [10]. Cette artériosclérose serait responsable d’un défaut de compliance
artérielle, participant à l’autoaggravation de l’athérosclérose et
Augmentation de la sensibilité des tissus cibles majorant son retentissement cardiaque. De plus, elle expliquerait
l’atteinte distale artériolaire dont l’association à l’athérome des
Le diabète entraînerait une augmentation de la sensibilité des tissus
grosses artères rendrait compte de la gravité de l’ischémie tissulaire.
cibles (cardiovasculaires) aux facteurs de risque vasculaire.
- Ainsi, l’hypertension artérielle aurait un effet délétère chez le Rôle délétère en cas de nécrose tissulaire
diabétique pour des valeurs de pression artérielle plus faibles que Au cours d’un accident ischémique aigu responsable d’une nécrose
celles observées dans la population non diabétique. Cette tissulaire, l’hyperglycémie pourrait jouer un rôle délétère comme
sensibilité pourrait être due à l’accélération du vieillissement de la cela a été parfaitement démontré chez l’animal rendu diabétique
4
Angéiologie Angiopathies diabétiques 19-0120
avant ligature artérielle. De même, plusieurs études ont montré glomérulopathie diabétique débutante, d’autre part elle témoigne
une corrélation entre l’HbA1C et le pronostic de l’accident d’une souffrance endothéliale diffuse, conséquence du syndrome
vasculaire. Le rôle délétère de l’hyperglycémie s’expliquerait par d’insulinorésistance métabolique. Témoignent également de cette
deux raisons : souffrance endothéliale : l’élévation du facteur de Willebrand,
l’augmentation de la perméabilité capillaire, le défaut d’activité de
– d’une part hémorrhéologique, avec activation plaquettaire
la lipoprotéine lipase, etc [20].
thrombogène, défaut de fibrinolyse et surtout augmentation de la
viscosité sanguine notamment par défaut de déformabilité et Ainsi, une microalbuminurie supérieure à 30 mg/24 heures à
hyper-agrégabilité érythrocytaires ; plusieurs reprises, en l’absence d’autres pathologies
uronéphrologiques et de déséquilibre aigu du diabète, comporte
– d’autre part métabolique, avec augmentation de la production un risque de mortalité coronarienne multiplié par 3 dans les 10 ans
locale de lactates aggravant l’acidose et l’hypoxie tissulaires. De suivants. Elle est d’ailleurs souvent associée à une hypertrophie
plus, l’augmentation des acides gras libres accompagnant le ventriculaire gauche.
déséquilibre du diabète, favorise les troubles du rythme cardiaque
en cas d’ischémie myocardique. ¶ Complications de l’athérosclérose
Cela justifie de ne pas aggraver l’hyperglycémie par une perfusion
Elles ont également un certain nombre de particularités cliniques
glucosée lors de la survenue d’un accident vasculaire et de
chez le diabétique en dehors de leur gravité même, marquée par
chercher au contraire un équilibre glycémique optimal (glycémie
une mortalité globalement double de celle du non diabétique.
entre 1,20 et 1,60 g/L) en cas d’ischémie critique des membres
inférieurs, d’infarctus du myocarde ou d’accidents vasculaires
Accidents vasculaires cérébraux
cérébraux avec une surveillance pluriquotidienne (6 à 8 fois/j) de
la glycémie capillaire, compte tenu du risque de l’hypoglycémie Ils sont plus rarement hémorragiques chez le diabétique en dépit
sur ces terrains (trouble du rythme cardiaque, crise comitiale). de l’augmentation de la fréquence de l’hypertension artérielle. En
revanche, les micro-infarctus responsables de lacunes semblent
PARTICULARITÉS CLINIQUES plus fréquents chez le diabétique, en particulier en cas
DE LA MACROANGIOPATHIE DIABÉTIQUE d’association diabète et hypertension artérielle [3].
5
19-0120 Angiopathies diabétiques Angéiologie
Il en est de même en ce qui concerne les pontages coronaires et les nécessité par une gangrène du pied [16]. L’artérite des membres
angioplasties, avec toutefois une mortalité périopératoire environ inférieurs du diabétique se révèle en effet trop souvent par un
double (5 % versus 2,5 %) et un risque de resténose après trouble trophique avec début de gangrène secondaire à un
angioplastie plus élevé [22]. traumatisme même minime (frottement dans la chaussure, ongle
mal taillé blessant l’orteil voisin, ongle incarné, absence de
Artérite des membres inférieurs protection des talons lors de l’alitement prolongé, etc). La survenue
Elle se révèle parfois par une claudication intermittente avec sa d’un tel trouble trophique avec nécrose ischémique, impose
douleur constrictive en étau, imposant l’arrêt de la marche. En toujours l’hospitalisation du patient pour explorations vasculaires
réalité, cinq fois sur six cette douleur fait défaut en raison de la (échographie doppler, mesure de la pression transcutanée en
coexistence d’une neuropathie diabétique. La survenue d’une oxygène et artériographie) qui permettront une décision
douleur nocturne des membres inférieurs peut faire évoquer une thérapeutique de sauvetage. En effet, la gangrène, même limitée,
artérite au stade III justifiant une exploration artérielle n’est jamais secondaire à une microangiopathie diabétique ; elle
(échodoppler, si besoin artériographie), avant l’apparition d’un témoigne toujours d’une atteinte des artères musculaires, même
trouble trophique (stade IV). Mais il peut s’agir d’une douleur s’il s’agit d’artères de petit calibre, et elle doit donc bénéficier, à
neuropathique à prédominance nocturne. Cependant cette douleur, chaque fois que cela est possible, d’une revascularisation. Un geste
loin de s’aggraver, cède plutôt à la marche. Elle est bilatérale, d’amputation « a minima » fait sans exploration vasculaire, risque
volontiers à type de brûlure, de dysesthésie, de décharge de ne jamais cicatriser et d’entraîner une aggravation secondaire
électrique, voire de broiement. Les pouls sont perçus, parfois de l’ischémie avec amputation majeure.
bondissants. Les pieds sont chauds. La trophicité de la peau et des
phanères est respectée. En cas de doute, l’exploration par
échodoppler et la mesure de la pression transcutanée en oxygène Conclusion
permettent de faire la part de l’ischémie.
Outre l’association fréquente à une neuropathie responsable du La prévention de la microangiopathie diabétique passe par
caractère indolore de l’ischémie, l’artérite des membres inférieurs l’équilibration du diabète avec pour objectif des glycémies
du diabétique est caractérisée par sa topographie : une fois sur trois préprandiales inférieures à 1,40 g/L et une HbA1c inférieure à 7,5 %.
elle est proximale, bien corrélée aux facteurs de risque classiques Cet objectif peut être atteint grâce à une optimisation du traitement
(hypertension artérielle, hyperlipidémie, tabagisme), une fois sur nécessitant une éducation spécialisée des patients. La prévention de
trois elle est distale, siégeant au-dessous du genou et une fois sur la macroangiopathie diabétique est moins codifiée. Elle nécessite une
trois globale, proximale et distale. Par chance, même lorsqu’elle est thérapeutique plurifactorielle cohérente cherchant à corriger à la fois
distale, une artère au-dessous de la cheville reste le plus souvent l’hypertension, l’hyperlipidémie, l’hyperglycémie, les troubles de la
perméable. La palpation d’un pouls pédieux n’élimine donc en rien crase sanguine. Elle se heurte souvent à un défaut de compliance des
l’existence d’une artérite sévère des axes jambiers sus-jacents, mais patients. Bien que le bénéfice sur le risque cardiovasculaire global du
il est sûrement un des meilleurs arguments pronostiques de traitement de l’insulinorésistance par des mesures hygiénodiététiques
l’artérite diabétique. En effet, cette persistance permet de réaliser soit aujourd’hui bien établi, le bénéfice des traitements
des pontages distaux (utilisant la veine saphène interne dévalvulée médicamenteux (metformine ou thiazolidinediones), reste à
in situ ou inversée), dans le cadre d’un sauvetage de membre démontrer.
Références
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6
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0610
19-0610
Anomalies de l’hémostase
et tests biologiques
I Elalamy
C Lecrubier
MM Samama
Résumé. – Différentes circonstances de découverte d’une diathèse hémorragique chez un patient
mènent à un interrogatoire et un examen clinique. Ils doivent être complétés par des tests biologiques
spécialisés afin de caractériser l’étiologie. Les pathologies de l’hémostase primaire relèvent de plusieurs
mécanismes : altérations de la paroi vasculaire, perturbations quantitatives et/ou qualitatives des
plaquettes, maladie von Willebrand constitutionnelle ou acquise. Les circonstances de survenue d’un
syndrome hémorragique sont importantes à connaître. En fait, il s’agit le plus souvent d’une découverte
fortuite lors du bilan classique d’hémostase.
Nous envisageons les altérations biologiques pouvant être responsables d’un syndrome hémorragique
clinique.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Elalamy I, Lecrubier C et Samama MM. Anomalies de l’hémostase et tests biologiques. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits
réservés), Angéiologie, 19-0610, 2000, 8 p.
19-0610 Anomalies de l’hémostase et tests biologiques Angéiologie
Prise médicamenteuse Liste exhaustive des traitements pris dans les 10 der- - Traitements anticoagulants
niers jours - Antibiotiques
- AINS
- Antiagrégants plaquettaires
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Angéiologie Anomalies de l’hémostase et tests biologiques 19-0610
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19-0610 Anomalies de l’hémostase et tests biologiques Angéiologie
hémorragique cutanéomuqueux peut s’estomper à l’âge adulte ; responsable de la diminution de la formation du complexe
toutefois, une anémie ferriprive fréquente peut témoigner de la prothrombinase à la surface plaquettaire, entraînant une réduction
persistance de saignements occultes. La maladie est caractérisée de ses propriétés procoagulantes. La dissociation entre l’élévation
par une absence d’agrégation des plaquettes quel que soit significative des produits de dégradation du fibrinogène et des
l’agoniste utilisé. Elle est liée à un déficit en sites d’amarrage du taux normaux de D-dimères semble un bon test de dépistage en
fibrinogène : les complexes GPIIb-IIIa ou intégrines a2bb3 dont il cas d’absence de réponse plaquettaire à l’adrénaline. Une autre
existe 40 000 à 80 000 copies par plaquette normale. Ce chiffre est particularité clinique de cette thrombopathie est l’absence
réduit à 20 % dans le type II, forme atténuée, et à 5 % dans le type d’efficacité des transfusions plaquettaires pour contrôler les
I, forme sévère, la plus fréquente. Il existe des variants où épisodes hémorragiques.
l’anomalie du complexe est strictement qualitative. L’étude
– Syndrome de Scott.
fonctionnelle in vitro montre une activation plaquettaire limitée à
Les plaquettes présentent une anomalie d’exposition des
un changement de forme et réaction sécrétoire conservée avec une
phospholipides membranaires conduisant à un défaut d’activation
libération d’adénosine triphosphate (ATP) pratiquement normale.
de la coagulation plasmatique (ralentissement de la cinétique
La rétraction du caillot est nulle. La biologie moléculaire permet
d’activation de la thrombine). Le test de consommation de la
l’étude des anomalies génétiques associées (mutations ponctuelles).
prothrombine permet aisément d’évaluer l’activité coagulante des
En France, la maladie est le plus fréquemment observée chez les
plaquettes en mesurant la prothrombine résiduelle qui doit être
Gitans, groupe ethnique à forte endogamie et/ou favorisée par la
normalement inférieure à 10 %. Le mode de transmission est
consanguinité.
autosomique récessif.
– Anomalie de la réponse au collagène.
Dans la population asiatique, une faible proportion de sujets est Thrombopathies acquises
déficiente en glycoprotéine GPIV (CD36), l’un des récepteurs du
Elles sont très fréquentes et bien souvent découvertes fortuitement.
collagène, sans conséquence clinique ni biologique. Des
observations ponctuelles de déficit en GPIa-IIa ou en GPVI ont Le caractère acquis est à évoquer devant l’absence d’antécédents
aussi été rapportées. hémorragiques personnels ou familiaux signalés lors de
l’interrogatoire.
• Altérations des voies de signalisation plaquettaire Les médicaments sont le plus fréquemment à l’origine de ces
altérations fonctionnelles plaquettaires avec en premier lieu, les
– Anomalies de la voie des prostaglandines (aspirin-like syndrome). anti-inflammatoires non stéroïdiens dont l’aspirine (souvent en
Dans les plaquettes, un déficit enzymatique de la cyclo-oxygénase automédication), puis les antiagrégants comme la ticlopidine ou le
1 ou prostaglandine-H2 synthétase 1, enzyme constitutive, entrave clopidogrel. La liste des thrombopathies iatrogènes est bien
la synthèse du thromboxane A2. entendu non exhaustive et on peut citer les antibiotiques
– Anomalie de la réponse à l’adénosine diphosphate (ADP). (pénicilline, céphalosporines), les diurétiques, les inhibiteurs
Elle est voisine, par ses caractères biologiques, de la thrombopathie calciques, certaines chimiothérapies, les anesthésiques, les
acquise induite par la ticlopidine ou le clopidogrel. antidépresseurs tricycliques, le dextran, les hypolipémiants, et
même l’alcool.
– Troubles de la microvésiculation.
Des cas d’anomalie de la génération de microparticules D’authentiques pathologies peuvent entraîner des perturbations
plaquettaires, sans altération de l’activité prothrombinasique, ont secondaires de la réponse plaquettaire :
été rapportés. – syndromes myéloprolifératifs et préleucémiques ;
• Pathologies des granules plaquettaires ou de leur sécrétion – dysglobulinémies ;
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19-0610 Anomalies de l’hémostase et tests biologiques Angéiologie
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Angéiologie Anomalies de l’hémostase et tests biologiques 19-0610
30 à 60 Subaiguë
Les coagulopathies de consommation ou CIVD sont rencontrées
dans de nombreux contextes pathologiques et sont caractérisées 60 à 120 Fruste
par une diminution de la concentration de fibrinogène et des autres
facteurs de la coagulation, avec une génération accrue de profond en facteurs (fibrinogène, V, VIII, II), la thrombopénie
thrombine et une activation importante de la fibrinolyse. Les souvent marquée, et même la diminution significative des
fibrinogénolyses primitives sont exceptionnelles avec un syndrome inhibiteurs physiologiques comme l’antithrombine ;
de défibrination exclusif. Les étiologies des CIVD sont très
– l’activation de la fibrinolyse réactionnelle par l’accélération de
nombreuses (tableau VI). Sur le plan étiopathogénique, plusieurs
l’activité fibrinolytique globale et un raccourcissement significatif
facteurs sont impliqués. La libération de grandes quantités de
du temps de lyse du caillot de sang total ou d’euglobulines (test
facteur tissulaire à partir des lésions parenchymateuses, et même à
de Fearnley ou de von Kaulla). On a également une diminution
partir des cellules mononucléées, constitue le détonateur de la
des taux de plasminogène plasmatique (tableau VII) ;
cascade de la coagulation. Certains organes sont particulièrement
riches : cerveau, prostate, utérus et poumon. Les lésions de – la mesure des D-dimères, fragments spécifiques de la fibrine
l’endothélium vasculaire sont aussi responsables d’une hypoxie stabilisée par agglutination de particules de latex et qui sont élevés
majorant la souffrance cellulaire et générant d’importantes et qui sont élevés ;
quantités de radicaux libres (syndromes d’écrasement, – la génération de complexes solubles issus de l’association de
traumatismes étendus, néoplasie). Les agents agresseurs monomères de fibrine avec des molécules de fibrinogène ou des
endothéliaux sont multiples : complexes immuns, endotoxines, fragments de dégradation de la fibrine et/ou du fibrinogène
acidose, enzymes granulaires leucocytaires (élastases, protéases). empêchant ainsi la polymérisation de la fibrine.
Des CIVD sont aussi décrites dans les hémangiomes géants Un véritable score de la CIVD peut être établi sur les critères
(syndrome de Kasabach-Merritt). biologiques et cliniques pour évaluer la sévérité et l’évolution de
La consommation des différents facteurs de la coagulation et la ce syndrome complexe (tableau VIII).
mise en jeu des systèmes de régulation aboutissent à un Le traitement essentiel est avant tout étiologique après avoir
dépassement des moyens de contrôle. Ce véritable orage vasculaire déterminé la cause de cette coagulopathie disséminée. Il est bien
est caractérisé au plan clinique par la coexistence de saignements entendu associé à la correction ponctuelle par un traitement
en « nappe », surtout en contexte chirurgical, ou cutanéomuqueux symptomatique visant à compenser les pertes (plasma frais congelé
avec des ecchymoses en « carte de géographie », d’hémorragies aux sécurisé, fibrinogène, plaquettes), modérer l’hypercoagulabilité
points de ponction. (concentrés d’antithrombine, héparine). Les antifibrinolytiques
Les manifestations cliniques thrombotiques de la microcirculation (acide tranexamique, aprotinine) sont réservés au traitement des
entraînent ainsi des comas neurologiques, une insuffisance rénale fibrinogénolyses primitives.
par nécrose corticale, une détresse respiratoire, des ulcérations
digestives multiples, des ischémies distales des membres. Le HÉMOPHILIE
diagnostic biologique doit s’attacher à évaluer :
L’hémophilie A (déficit en facteur VIII) touche un cas sur 5 000 et
– l’hyperconsommation par l’allongement des temps de l’hémophilie B (déficit en facteur IX) 1 cas sur 30 000 naissances de
coagulation globaux (TQ, TCA, TT) et le déficit plus ou moins sexe masculin.
7
19-0610 Anomalies de l’hémostase et tests biologiques Angéiologie
Tableau VIII. – Diagnostic différentiel d’un syndrome de défibrina- Tableau IX. – Sévérité de l’hémophilie.
tion.
Hémophilie sévère facteur < 1 %
Atteinte Fibrinogénolyse
CIVD
hépatique primitive Hémophilie modérée 2 < facteur < 5 %
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0090
19-0090
Athérosclérose : description,
mécanismes et étiologie
L Capron
B Wyplosz
Résumé. – Combinaison d’une sclérose et d’un athérome, sous la forme de plaques dans l’intima des
artères de gros et de moyen calibres, l’athérosclérose est de loin la maladie artérielle humaine la plus
fréquente. Elle est responsable de la quasi-totalité des maladies ischémiques du myocarde et d’une
bonne partie de celles qui touchent le cerveau et les membres inférieurs. La formation de la plaque simple
est l’aboutissement d’une lente succession de remaniements de l’intima. La lésion est alors susceptible
de rompre pour engendrer la thrombose qui permet sa progression rapide et la survenue d’accidents
ischémiques aigus. La pathogénie est aujourd’hui dominée par le constat que la plaque est un foyer
d’inflammation chronique. L’étiologie s’axe naturellement sur l’identification des agressions qui
allument et entretiennent l’inflammation athéroscléreuse. Il s’agit des facteurs de risque établis et
modifiables, comme l’hypercholestérolémie, l’hypertension artérielle, le diabète sucré ou la
consommation de tabac, mais aussi d’autres influences, notamment immunitaires et infectieuses, qui
sont en cours d’évaluation.
© 1999, Elsevier, Paris.
Service de médecine interne, Hôtel-Dieu, 75181 Paris cedex 04, France ; unité de biologie des interactions
cellulaires, URA-CNRS 1960, Institut Pasteur, 75724 Paris cedex 15, ,France. inverse dans les artères musculaires qui sont toutes les autres
Toute référence à cet article doit porter la mention : Capron L et Wyplosz B. Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0090, 1999, 10 p.
19-0090 Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie Angéiologie
artères du réseau. Aux artères élastiques est dévolue la fonction de utérine ; principalement formés dans les zones où l’écoulement du
transformer le flot discontinu du sang éjecté par le ventricule sang est tourmenté (courbures, branchements, bifurcations
gauche en flot pulsé mais continu à la périphérie : pour ce faire, artérielles), on les interprète comme des renforcements
elles emmagasinent du sang pendant la systole qu’elles restituent physiologiques de la structure artérielle aux endroits où
durant la diastole. Les artères musculaires distribuent le sang en s’appliquent de fortes contraintes hémodynamiques. Le
adaptant son débit aux besoins des organes destinataires. vieillissement artériel normal comporte une extension et une
L’ajustement requis du calibre artériel est assuré par la expansion des épaississements intimaux. Leur signification
vasomotricité. pathogénique est essentielle : chez les humains, c’est sur eux que
Cellules conjonctives, les cellules musculaires ont une remarquable se greffe le processus d’athérosclérose [41, 57].
capacité d’adapter leurs principales fonctions (contractilité,
production de matrice extracellulaire, prolifération) aux ADVENTICE
circonstances locales, normales et anormales. Il en résulte une vaste
gamme de phénotypes dont les mieux définis sont : le phénotype L’enveloppe externe est un tissu conjonctif classique qui assure
contractile (ou myodifférencié) caractéristique du muscle artériel l’arrimage de l’artère aux organes de voisinage et assure
normal adulte et le phénotype sécréteur (ou myodédifférencié), l’innervation et, en partie, la vascularisation de sa paroi. Les
avec perte de la fonction contractile mais acquisition de capacités vaisseaux des artères humaines (vasa vasorum) ne franchissent la
mitotiques et synthétisantes (production de matrice), qui se frontière externe de la média (lame limitante élastique externe) que
rencontre au cours du développement artériel et dans divers états dans l’aorte thoracique. La média (comme l’intima) de toutes les
pathologiques comme l’athérosclérose. autres artères est normalement avasculaire : la nutrition du seul
tiers externe y dépend des vasa vasorum, alors que celle des deux
tiers internes dépend de ce qui diffuse depuis la lumière artérielle
INTIMA
au travers de l’intima.
La couche interne forme l’interface du sang et de la paroi artérielle.
Elle est composés d’une assise unique de cellules endothéliales
jointives reposant sur une très fine zone sous-endothéliale Description de l’athérosclérose
dépourvue de cellules, doublée en profondeur par une épaisse
lame d’élastine, la limitante élastique interne, qui forme la frontière Les plaques d’athérosclérose se développent dans la zone sous-
entre l’intima et la média. Les cellules endothéliales, du fait de leur endothéliale de l’intima, suivant une séquence dont les étapes ne
situation, assurent trois fonctions principales. sont encore que supposées. L’incertitude justifie de décrire d’abord
– L’endothélium est une couche thromborésistante : il maintient la la plaque simple, c’est-à-dire formée et mûre pour entrer dans le
fluidité du sang au contact de la paroi, au travers de diverses cycle des complications, puis ce qui l’a précédée (lésions
activités qui le situent au cœur de toutes les étapes de l’hémostase préathéroscléreuses) et ce qui peut lui succéder (complications). La
(temps plaquettaire, coagulation, fibrinolyse). classification synthétique des lésions d’athérosclérose établie par
Stary [56] et adoptée par l’American Heart Association (AHA), avec
– L’endothélium est une barrière de perméabilité qui filtre et quelques amendements [ 5 8 ] , sert actuellement de référence
contrôle la pénétration de composants sanguins (molécules, mais (tableau II).
aussi cellules) destinées à nourrir les parties internes de l’artère
(endartère) et à en assurer la défense.
PLAQUE SIMPLE (TYPE V)
– L’endothélium est un régulateur de la vasomotricité artérielle
par la sécrétion de substances contractantes (comme l’endothéline
ou le thromboxane A2) et relaxantes (comme la prostacycline ou le ¶ Athérosclérose = athérome + sclérose
monoxyde d’azote [NO]) qui agissent sur le muscle de la média La plaque simple ou fibroathérome (type V de Stary, ou Va de
sous-jacente. l’AHA), qui sert de base à la description, tire son nom du fait
En certains endroits du réseau artériel, la zone sous-endothéliale qu’elle est « mature » sans être visiblement compliquée (cf infra).
de l’intima est occupée par une accumulation de cellules Sur une coupe transversale de l’artère, la plaque est régulière (lisse)
musculaires lisses et de matrice conjonctive [57]. Ces épaississements mais excentrée, n’occupant qu’un secteur de la circonférence de
fibromusculaires de l’intima, qui peuvent être diffus ou focaux l’intima (fig 1). On y distingue deux composants d’où vient le nom
(coussinets), sont normaux : présents chez tous les humains, ils se même d’athérosclérose : un athérome central mou (du grec
développent à partir des premières semaines de la vie intra- athêrôma : loupe de matière graisseuse), ou cœur lipidique,
Tableau II. – Classification des lésions d’athérosclérose, avec les principales caractéristiques de chaque type. Les huit types de Stary [56]
sont mis en parallèle avec les six types de l’American Heart Association [58].
Type Stary Type AHA Nom Définition
I I Lésion initiale Dépôt de lipides dans un épaississement fibromusculaire de l’intima, au sein de cellules
spumeuses (macrophages) isolées
II II Strie graisseuse Nombre important de cellules spumeuses (macrophages et cellules musculaires) accumu-
IIa IIa - portée à la progression lées dans l’intima. Lésion visible à l’œil nu sous forme de ponctuations et de stries
IIb IIb - résistante à la progression
III III Préathérome ou lésion intermédiaire Apparition de lipides extracellulaires
IV IV Athérome Première lésion dite avancée, avec formation du cœur lipidique par ramassement des
lipides intra- et extracellulaires
V Va Fibroathérome ou plaque simple Individualisation de la chape fibreuse
VI VI Fibroathérome compliqué Plaque compliquée par rupture (plaque dite instable), pouvant donner lieu à la constitu-
VIa - thrombohémorragique tion d’un thrombus mural et (ou) d’une hémorragie (hématome) à l’intérieur de la plaque
VIb - thrombotique
VIc - hémorragique
VII Vb Lésion calcifiée Plaque avancée, lourdement calcifiée
VIII Vc Lésion fibreuse Plaque avancée(1), principalement formée de collagène. Lipides absents
(1) : L’appartenance de ce type (VIII de Stary, Vc de l’AHA), à l’athérosclérose est contestable. Ce pourrait certes être une forme d’involution terminale de la plaque, « étouffée » par la sclérose. Il pourrait autrement s’agir d’une
maladie artérielle distincte, l’artériosclérose ou sclérose pure de la paroi, sans dépôt lipidique.
2
Angéiologie Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie 19-0090
[helper] pour les deux tiers et CD8 cytotoxiques [killer] pour l’autre
2 tiers) [60]. Dans la sclérose, les cellules musculaires sont plus
nombreuses (environ 65 %) que les monocytes (environ 25 %) et
les lymphocytes (environ 10 %). La répartition est différente dans
la périphérie de l’athérome : autour de 60 % pour les monocytes,
30 % pour les cellules musculaires, et 10 % pour les lymphocytes.
Rupture Thrombose D’autres types cellulaires sont présents en petit nombre :
Hématome polynucléaires, plasmocytes et mastocytes.
Spasme
Les lipides de la plaque sont non seulement extracellulaires, dans
1 3 le cœur lipidique, mais aussi intracellulaires, sous la forme de
vacuoles truffant le cytoplasme de cellules dites spumeuses.
Groupées au pourtour du cœur lipidique, leur origine est double :
monocytaire et musculaire [22]. Il n’y a pas d’activité mitotique dans
une artère adulte normale ; en revanche, 1 à 2 % des cellules de la
plaque sont en cycle de prolifération. Il s’agit de cellules
musculaires, de monocytes-macrophages et de lymphocytes T [43].
Progression Incorporation
4 La prolifération est équilibrée par la mort (nécrose et apoptose)
des mêmes types cellulaires [2].
Embolies
À la différence de l’endartère normale qui est avasculaire, la plaque
Occlusion
est irriguée par des microvaisseaux dont le nombre et la densité
1 Rupture et évolution de la plaque d’athérosclérose. sont proportionnés à son volume. Ils dérivent pour une part du
La plaque de type IV (athérome) ou V (fibroathérome), figurée en 1, entre dans un cy-
cle d’instabilité qui aboutit à la rupture de la chape fibreuse (2). La plaque rompue développement des vasa vasorum de l’adventice et pour une autre
(type VI) déclenche une thrombose (de volume variable) et, de manière facultative, un de chenaux directement connectés à la lumière de l’artère [68]. Il y a
hématome (hémorragie à l’intérieur de la plaque) et un spasme de la média artérielle donc deux endothéliums dans la plaque : celui de la lumière de
(3). L’accident peut provoquer (flèche grise) des embolies à distance ou une occlusion l’artère, qui couvre la chape fibreuse, et celui, beaucoup plus
sur le site de rupture, à l’origine possible d’une ischémie de l’organe irrigué. L’orga- étendu en surface, des microvaisseaux.
nisation du thrombus, menant à son incorporation dans la plaque et à sa cicatrisation,
clôt le cycle quand l’artère ne s’est pas occluse (4). Ce dénouement, favorable dans
l’immédiat car il ramène la lésion au stade V, se solde par une augmentation ¶ Localisation des plaques
du volume de la plaque (progression) en proportion de la quantité de thrombus
Comme les épaississements fibromusculaires de l’intima, les
et d’hématome incorporés. Cependant, la plaque est de nouveau capable de parcourir
un autre cycle d’instabilité, dont l’issue pourra ne pas être aussi heureuse. L’épais- plaques se situent généralement dans les endroits où l’écoulement
sissement lent et progressif de la plaque est un autre mode possible de progression (flè- du sang soumet la paroi artérielle à des contraintes particulières.
che grise), sans participation d’une rupture de plaque. Les sites le plus communément atteints sont : l’aorte (crosse,
Reproduit d’après [6], avec l’aimable autorisation des éditions Arnette Blackwell. segment abdominal) ; les premiers segments des troncs supra-
aortiques et des artères coronaires épicardiques, carotides internes,
enchâssé dans une gangue ferme de sclérose (de sklêrôs : dur). Les iliaques, rénales, mésentériques, fémorales et poplitées ; la
lipides du cœur athéromateux sont pour la plupart organisés en terminaison des artères vertébrales et le tronc basilaire. L’atteinte
cristaux. Il s’agit de phospholipides (pour environ 30 %) et de des artères pulmonaires n’est pas exceptionnelle ; elle est plus
cholestérol (environ 70 %) sous forme libre (60 %) et estérifiée fréquente en cas d’athérosclérose aortique et surtout
(40 %). Le cœur lipidique est aussi nommé centre athéronécrotique d’hypertension artérielle pulmonaire [40]. Certaines artères de
car il contient une abondance de débris cellulaires. Il arrive qu’une moyen calibre sont en revanche habituellement respectées : artères
même plaque en contienne plus d’un. La sclérose circonscrit mammaires internes ; artères des membres supérieurs en aval de
l’athérome. Dans sa partie séparant le cœur lipidique de la lumière l’axillaire et des membres inférieurs au-dessous du milieu de la
artérielle, elle dessine la chape fibreuse, dont l’épaisseur est très jambe (bien qu’il y existe des épaississements fibromusculaires de
variable. On appelle « épaules » de la plaque les zones où la chape l’intima). Une pure explication hémodynamique ne peut pas
se raccorde à l’intima saine. La matrice scléreuse est principalement entièrement rendre compte de la distribution de l’athérosclérose
formée de collagènes (environ 60 % des protéines totales de la dans le réseau artériel.
plaque), surtout de types I et III [44]. En masse, les parts relatives de
l’athérome et de la sclérose diffèrent beaucoup d’une plaque à LÉSIONS PRÉATHÉROSCLÉREUSES
l’autre, mais la sclérose prédomine toujours largement sur
l’athérome, dans un rapport d’au moins trois parts pour une [33]. Quatre types de remaniements de l’intima précèdent la plaque
Au moins dans les artères coronaires, la prépondérance de la simple de type V (fig 1). L’étude systématique de Stary, fondée sur
sclérose subsiste même en cas de xanthomatose près de 700 autopsies, en a fourni une description précise,
hypercholestérolémique familiale homozygote (où la qualitative et quantitative, dans la bifurcation de l’artère coronaire
cholestérolémie dépasse 30 g/L, soit 77 mmol/L) [34]. Sous la gauche entre la naissance et l’âge de 40 ans [56]. L’épaississement
plaque, la média est amincie et l’adventice est modérément épaissie fibromusculaire de l’intima est la structure physiologique sur
avec fréquemment un infiltrat cellulaire mononucléé. laquelle se greffe la genèse graduelle de la plaque [41, 57].
3
19-0090 Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie Angéiologie
aussi présents et une vascularisation de la média sous-jacente est n’est pas justifiée car la calcification est constante et n’a pas
souvent déjà visible. Le type II apparaît dans les artères coronaires d’influence néfaste prouvée sur le cours de la maladie ischémique.
vers l’âge de 5 à 10 ans et atteint sa prévalence maximale, 54 %, Le calcium se trouve essentiellement dans la zone fibreuse de la
dans la tranche d’âge de 10 à 14 ans. On l’observe dans l’aorte de plaque qui s’en enrichit à mesure qu’elle vieillit, aboutissant au
tous les individus où il se développe dès la vie intra-utérine [41]. type VII de Stary (Vb de l’AHA). Plutôt qu’un simple dépôt
L’évolution du type II est imparfaitement comprise : certaines stries minéral passif, il s’agit d’une véritable ossification active, comme
se stabilisent et même régressent, tandis que d’autres évoluent vers l’indique la caractérisation de protéines osseuses au sein des
les stades plus avancés de l’athérosclérose. Cela est pris en compte plaques (ostéopontine, protéine morphogénique osseuse).
dans la classification qui distingue le type IIa (porté à la Contrairement à d’autres artères (comme l’aorte, les siphons
progression) et le type IIb (résistant à la progression), sur des carotides ou les artères des membres inférieurs), les artères
critères morphologiques imprécis et non validés. Il n’est pas coronaires sont épargnées par la calcification d’artériosclérose [7],
possible d’assimiler les stries aux plaques, mais raisonnable de non liée à l’athérosclérose, touchant la média (médiacalcose de
considérer que les stries sont des précurseurs sans doute Mönckeberg) ou de lame élastique externe. La présence de
nécessaires, mais certainement insuffisants des plaques : toutes les calcifications y est donc spécifique de l’athérosclérose, ce qui
plaques dérivent vraisemblablement d’une strie, mais toutes les permet la détection radiologique des plaques coronaires. La
stries ne deviennent certainement pas des plaques [6]. signification pathologique de la calcification est incertaine. Son effet
n’est pas nécessairement nuisible : en augmentant la rigidité des
¶ Préathérome (type III) et athérome (type IV) plaques, elle pourrait les rendre moins susceptibles de se fracturer ;
L’apparition de flaques lipidiques extracellulaires dans l’intima, à les plaques rompues sont moins riches en calcium que les plaques
proximité des cellules spumeuses, caractérise le préathérome (type intactes [12].
III ou lésion intermédiaire). Les lipides extracellulaires et les
cellules spumeuses se ramassent en un cœur lipidique pour former ¶ Anévrisme
l’athérome (type IV). Préathérome et athérome s’observent à partir L’aorte abdominale sous-rénale est la localisation la plus commune
de la puberté dans les artères coronaires. La formation d’une chape d’anévrismes que l’on dit scléreux ou dégénératifs. L’anévrisme
fibreuse épaisse et bien définie caractérise le passage du type IV au s’associe à une athérosclérose souvent avancée, mais on discute
type V. Les deux se distinguent par des nuances morphologiques, encore beaucoup des liens de conséquence ou de coïncidence
mais ont en commun la capacité de devenir instables et de rompre existant entre les deux anomalies [7]. L’anévrisme pourrait être un
(cf infra). effet de l’athérosclérose, à considérer comme une exagération du
¶ Banalité anatomique de l’athérosclérose remodelage : pour absorber la masse de la plaque, l’anneau artériel
doit se dilater afin de préserver le calibre de la lumière ; si le
Dans la bifurcation coronaire gauche, l’installation des lésions se
processus dépasse son objectif et détermine un amincissement trop
fait en plusieurs phases : une vague dans la petite enfance pour le
prononcé de la paroi artérielle, un excès de distension peut en
type I, qui se raréfie ensuite ; une vague à pente raide durant la
résulter, avec formation d’un anévrisme. La dilatation anévrismale
puberté pour le type II ; une vague à pente plus douce pour les
pourrait, autrement, être le résultat d’une maladie de la paroi
types III et IV à partir de l’adolescence, mais continue jusqu’à l’âge
artérielle distincte de l’athérosclérose, mais simplement associée à
adulte. À l’âge de 40 ans, 95 % des individus examinés par Stary [56]
elle (tant elle est banale). Il s’agirait d’un affaiblissement touchant
avaient une lésion préathéroscléreuse ou athéroscléreuse : type II
la matrice de la média et diminuant sa résistance à la pression
dans 29 % des cas ; types III, IV ou V dans 66 % des cas. Ces taux
exercée par le sang ou à l’inflammation locale (cf infra) [52]. Un
soulignent la banalité des remaniements de l’intima coronaire :
défaut inné des protéines fibreuses (élastine, collagène) qui la
presque tous les adultes en sont atteints, mais une minorité aura à
constituent en serait le facteur favorisant. Le fait que des sites
souffrir d’ischémie dans le territoire myocardique concerné.
favoris de l’athérosclérose, comme les artères coronaires ou
L’athérosclérose ne devient une maladie que dans la mesure où
l’origine des artères carotides internes, soient très rarement
certaines plaques se compliquent et progressent.
anévrismaux plaide en faveur de la coïncidence, sans toutefois
exclure complètement la conséquence, car la réponse de la paroi
COMPLICATIONS DE LA PLAQUE artérielle à l’athérosclérose peut varier suivant les conditions
¶ Sténose anatomiques et hémodynamiques locales.
4
Angéiologie Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie 19-0090
À tout moment de son évolution, il peut se détacher pour former von Rokitansky soulignait que le dépôt s’épaissit par l’apposition
une embolie qui ira occlure une artère d’aval. Ce mécanisme est de strates successives et présente dans certains cas un processus
fréquemment en cause dans l’athérosclérose de l’artère carotide de vascularisation similaire à ce que l’on observe lors de
interne ou de l’aorte abdominale. On appelle « embolie de l’organisation d’un thrombus mural cardiaque. La théorie de
cholestérol » le détachement de microemboles de matériel l’incrustation concédait un rôle essentiel à une « dyscrasie »
athéromateux pur ou mêlé à des plaquettes et de la fibrine sanguine de nature incertaine. Elle trouva vite ses opposants : la
(microembolie thromboathéromateuse). plaque est recouverte par un endothélium, ce qui était jugé
incompatible avec l’agglomération directe de substances sanguines
Le thrombus peut croître jusqu’à occlure l’artère. Le risque d’une
sur l’intima, car on ne concevait pas alors que l’endothélium pût
telle issue est d’autant plus élevé que la lumière artérielle est
repousser pour couvrir un tel dépôt. Dans les années 1860, à Berlin,
rétrécie. Cependant, le degré d’obstruction (thrombus exclu) est
Virchow revint à l’idée, précédemment rejetée par von Rokitansky,
non seulement lié à la plaque elle-même, mais aussi au spasme
que la maladie ( endarteritis chronica deformans sive nodosa ,
(contraction de la média, notamment déclenché par la sécrétion
[endartérite chronique déformante ou noueuse]) est due à des
des plaquettes) et à l’hématome (cf infra) qui peuvent s’y ajouter à
modifications inflammatoires touchant l’intima. L’épaississement
l’occasion de la rupture. Cela fait que même des plaques
résultant était considéré comme une prolifération du tissu
apparaissant petites à l’angiographie peuvent provoquer une conjonctif artériel qui, passé un certain degré, aboutit, par défaut
occlusion artérielle aiguë, d’autant moins bien acceptée par nutritif, à la dégénérescence graisseuse et à la calcification. Parmi
l’organe irrigué qu’il n’a pas pu y être préparé par le les facteurs d’irritation causant l’inflammation, une importance
développement d’une circulation collatérale préventive de particulière était attachée aux agressions mécaniques liées à
l’ischémie. l’écoulement du sang, rendant compte en partie de la localisation
Qu’il ait ou non entravé l’écoulement du sang, le thrombus sert de des plaques.
pansement à la plaque rompue, permettant sa cicatrisation. La
rétraction puis l’organisation du thrombus aboutissent à sa ¶ Imbibition et domination du cholestérol
métamorphose athéroscléreuse et à son incorporation dans la
plaque ainsi réparée, avec accumulation de tissu scléreux, En 1908, cherchant les facteurs d’irritation artérielle postulés par
développement de microvaisseaux et dégénérescence graisseuse [18]. Virchow, le Russe Ignatovski trouva qu’un régime carné
déterminait un athérome expérimental chez le lapin. En 1913,
À la faveur d’une rupture de plaque, du sang peut passer de la Anitschkov et Chalatov démontraient la responsabilité du
lumière artérielle à travers la brèche pour former un hématome cholestérol dans le phénomène et établissaient le modèle
(ou hémorragie) pariétal. Un tel épanchement sanguin, de taille expérimental d’athérome qui a été le plus utilisé depuis.
variable, est presque constamment observé au contact des ruptures D’inflammatoire, l’athérosclérose devenait une maladie
de plaques avec thrombus. L’hématome, s’il est volumineux, peut métabolique et une gigantesque activité de recherche en a découlé.
provoquer une obstruction artérielle importante et contribue Les statines, à la fin des années 1990, ont été son couronnement.
souvent, en s’ajoutant au thrombus et au spasme, à la survenue En inhibant la synthèse du cholestérol, ces médicaments diminuent
d’une occlusion artérielle aiguë. de 20 à 30 % sa concentration plasmatique et influencent
La rupture de plaque est au cœur du processus athéroscléreux : favorablement le cours de la maladie coronaire : diminution de
l’incidence en prévention primaire [17, 53] et amélioration du
– elle tient une place de premier rang dans la survenue des pronostic en prévention secondaire [47, 48, 61].
accidents ischémiques graves et, sans doute aussi, dans la
progression des lésions ; Dans le même temps, l’incrustation de Rokitansky survivait plus
ou moins chichement sur l’idée, ranimée en 1946 à Cardiff par
– elle est la question principale que les recherches sur les Duguid [ 1 8 ] , que l’incorporation des thrombus participe à
mécanismes de la maladie doivent résoudre. l’accroissement des plaques. La thrombose était surtout considérée
comme l’épisode terminal de l’histoire des plaques, menant à des
accidents ischémiques aigus, utilement contrecarré par des
Mécanismes de l’athérosclérose médicaments antithrombotiques (aspirine, héparine, etc) et
thrombolytiques. L’inflammation de Virchow, quant à elle, tombait
dans l’oubli, bien qu’elle eût été à l’origine de l’immense essor
Même simplifiée, la description qui précède montre la complexité connu par la théorie lipidique.
de l’athérosclérose. Il est malaisé d’en trouver une explication
unificatrice qui rende compte de tout le cheminement parcouru ¶ Renaissance de l’inflammation
entre un épaississement normal de l’intima et la rupture meurtrière
d’une plaque. La masse des publications consacrées au sujet Les statines, si elles ont récemment couronné la théorie lipidique,
pourrait laisser croire au chaos. Toutes sont en fait sous-tendues l’ont aussi mise en position d’être épuisée : il y a toute raison de
par quelques théories maîtresses. Il est intéressant de les considérer croire qu’elle ne mènera pas beaucoup plus loin, et pourtant la
d’abord sous leur angle historique [8], c’est-à-dire suivant les question pathogénique n’est pas entièrement résolue. Depuis les
arguments qui y ont mené, à une époque où la modestie des années 1970, le relais de la théorie lipidique a été progressivement
moyens de recherche, alors limités au seul microscope optique, repris par la théorie inflammatoire, en un mouvement qui
interdisait de s’égarer dans les détails. finalement apparaît comme un juste retour aux sources. L’entrée
des cellules musculaires artérielles sur la scène de l’athérosclérose
en 1960 [26] , puis le constat qu’une lésion de l’endothélium
HISTORIQUE DES GRANDES THÉORIES provoque une réaction fibromusculaire de l’intima menèrent Ross
et Glomset à proposer, en 1976, l’hypothèse de la « réponse à une
¶ Incrustation et irritation agression » (response to injury) [46]. Ce faisant, ils rattachaient à
l’athérosclérose les mots mêmes qui définissent l’inflammation :
Von Rokitansky (Vienne, 1852) a formulé la première théorie réaction de réparation développée par un tissu vivant en réponse
structurée de l’athérosclérose en proposant que la plaque résulte à une agression. De plus, en soulignant le rôle d’un facteur de
d’un dépôt sur l’intima de produits dérivés du sang, consistant croissance libéré par les plaquettes sanguines au contact de la paroi
principalement en fibrine. Ayant écarté l’idée qu’il puisse s’agir artérielle lésée ( platelet derived growth factor [PDGF]), ils
d’un exsudat causé par une irritation (inflammation) de l’artère, remettaient aussi l’incrustation au goût du jour. Amplement
5
19-0090 Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie Angéiologie
amendée par rapport à cette première reformulation, la théorie expriment le phénotype myodédifférencié, c’est-à-dire sécréteur
inflammatoire domine aujourd’hui à nouveau [45] . Outre sa (ou synthétisant) et proliférant. Étudiés depuis 40 ans [26], ces trois
plausibilité, elle réconcilie les deux grands courants d’idée, comportements « sclérogènes » des cellules conjonctives de la
lipidique et thrombotique, qui furent longtemps des rivaux plaque (migration, prolifération et production abondante de
inégaux. matrice) sont sous la dépendance de nombreuses modulations
endocrines, et surtout paracrines (émanant d’une cellule voisine
d’autre nature telle un monocyte-macrophage, un lymphocyte T
INFLAMMATION ET ATHÉROSCLÉROSE
ou une cellule endothéliale), autocrines (émanant d’une cellule
À simplement la regarder (cf supra), la plaque présente les quatre musculaire voisine) et même intracrines (émanant de la cellule
attributs principaux de l’inflammation chronique : infiltrat musculaire elle-même) qui sont exercées par des molécules
monocytaire et lymphocytaire, sclérose conjonctive, prolifération inflammatoires (facteurs de croissance et cytokines, en
cellulaire, prolifération vasculaire [5] . L’inflammation devient particulier) [50]. Le rôle capital des cellules musculaires a mené à
chronique quand l’agression se répète ou se perpétue. Dépassant considérer l’athérosclérose comme étant par essence une maladie
son but réparateur, elle peut alors devenir source de dégâts du muscle artériel : la théorie monoclonale conçoit la plaque
tissulaires. Vue sous cet angle, la pathogénie de l’athérosclérose comme une tumeur musculaire lisse. Elle se fonde sur l’observation
s’ouvre au vaste domaine des interactions cellulaires (leucocytes, (Benditt, Seattle, 1977) que les cellules musculaires d’une plaque
cellules conjonctives) et moléculaires (facteurs de croissances, ont toutes le même génotype (monotypie) et peuvent donc toutes
cytokines, chimiokines, intégrines, eicosanoïdes comme les être les filles d’une unique cellule mère (monoclonalité) qui, à la
thromboxanes ou les leucotriènes, formes activées de l’oxygène) manière d’une cellule cancéreuse, aurait subi une transformation
de l’inflammation. Ces entrelacements multiples tissent privilégiant sa prolifération et sa dominance. La monotypie a été
aujourd’hui la toile de la recherche sur l’athérosclérose, considérée confirmée, mais elle pourrait être le résultat d’une sélection
comme une perturbation des relations entre deux tissus, la paroi secondaire plutôt que d’une mutation primaire [51]. L’explication
artérielle et le sang. Les acteurs cellulaires en sont les résidents de tumorale s’accorde bien avec la vascularisation des plaques, mais
la plaque (endothélium, cellules musculaires, monocytes- moins avec leur localisation multifocale ou leur caractère
macrophages, lymphocytes T) avec toutes leurs productions inflammatoire.
moléculaires. Les plaquettes sanguines, mises en avant dans les
¶ Lipides et inflammation
travaux qui ont relancé la théorie inflammatoire [46], paraissent
n’intervenir que tardivement, quand la plaque rompt, pour Au sein des inflammations artérielles (maladies de Horton, de
enclencher la thrombose. Takayasu, de Kawasaki…), le dépôt lipidique est la singularité la
plus remarquable de l’athérosclérose. Le mot dépôt n’est cependant
Le champ ouvert par la réinjection de l’inflammation dans
pas adapté. Il s’agit d’une accumulation active. Le cholestérol y
l’athérosclérose est immense, impossible à décrire ici dans tous ses
prédomine, mais les types d’acides gras qui l’estérifient montrent
détails. Les quelques regards qui suivent ne cherchent qu’à en
que, par comparaison avec l’état qu’il a dans le sang, il a subi un
illustrer la richesse constamment en progrès.
métabolisme (une transformation) cellulaire avant de s’agglutiner
en athérome, c’est-à-dire qu’il n’a pas simplement sédimenté à la
¶ Endothélium et inflammation manière du calcaire dans le tartre d’une conduite d’eau. Dans ses
Les couches endothéliales de la plaque (celles des microvaisseaux transporteurs sanguins principaux, les lipoprotéines de basse
qui l’irriguent, et celle qui borde la lumière de l’artère où elle est densité (low density lipoproteins [LDL]), l’oléate prévaut sur le
implantée) sont les lieux de passage obligé des cellules linoléate de cholestérol dans un rapport de 30 pour 70, alors que
inflammatoires (monocytes et lymphocytes) pour aller du sang dans la plaque (type V), la répartition est inverse avec un rapport
dans l’intima. L’endothélium joue donc un rôle essentiel de de 60 pour 40. L’inversion est plus nette encore dans les stries
« recruteur » et de « garde-barrière » dans l’alimentation du foyer lipidiques (type II) où le rapport est de 80 pour 20 [25]. Les cellules
inflammatoire athéroscléreux, fondé sur une multiplicité de qui métabolisent (réestérifient) le cholestérol apporté dans l’intima
signaux moléculaires [30] . Cela peut mener à considérer que par les lipoprotéines sont les macrophages et les cellules
l’athérosclérose est primitivement une maladie de musculaires. La transformation spumeuse qui en résulte n’est bien
l’endothélium [ 4 5 ] , déclenchée et entretenue par son expliquée que pour les premières. Contrairement à la voie finement
dysfonctionnement qui perturbe non seulement les interactions des contrôlée du récepteur des LDL, le système éboueur (scavenger)
leucocytes sanguins et de la paroi artérielle, mais aussi la dont les macrophages sont pourvus y fait pénétrer les lipoprotéines
régulation de son tonus musculaire et de sa thromborésistance. À riches en cholestérol au prorata de leur concentration
l’opposé, on peut voir l’endothélium comme un simple relais, extracellulaire. Les récepteurs éboueurs impliqués captent non pas
exprimant les perturbations de l’intima plus profonde pour y les LDL « natives » (telles qu’elles circulent dans le sang), mais les
importer les défenses nécessaires venues du sang. Ce rôle de LDL chimiquement modifiées, et tout particulièrement celles qui
rempart protecteur (plutôt que de « cheval de Troie ») est illustré ont subi une oxydation [59]. La production de formes activées de
par le fait que la disparition de la barrière endothéliale couvrant la l’oxygène (radicaux libres) est une voie finale commune de
plaque caractérise l’instabilité (vulnérabilité) qui mène aux l’inflammation qui joue donc sans doute un rôle essentiel dans la
complications les plus graves (fig 1). captation et la transformation du cholestérol par les macrophages
des plaques. Les LDL oxydées interviennent dès les tout premiers
stades de l’athérosclérose : le processus a été observé dans l’aorte
¶ Sclérose et inflammation
fœtale [41]. La transformation spumeuse des cellules musculaires
Caractéristique essentielle de l’inflammation chronique, la sclérose lisses, moins bien éclaircie, pourrait faire intervenir l’acquisition
est le composant prédominant des plaques. Elle est présente dans d’un phénotype macrophagique avec expression de récepteurs
l’intima avant même l’enclenchement du processus athéroscléreux éboueurs [38], l’infection par un Herpès virus [28], ou le contact avec
(épaississements fibromusculaires de l’intima) [ 4 1 , 5 7 ] et des plaquettes sanguines [35] (en relation avec l’incorporation du
l’accompagne tout au long de son développement. La calcification thrombus et de l’hématome constitués à l’occasion d’une rupture
progressive qui s’y associe jusqu’au type VII de Stary (tableau II) de plaque). À partir du préathérome (lésion intermédiaire de type
peut aussi être vue comme une marque de l’inflammation III), la mort des cellules spumeuses et la libération de leur contenu
chronique, dont c’est une modalité classique (calcification dans l’espace extracellulaire contribuent sans doute pour une
dystrophique de nécrose). La matrice fibreuse de la plaque, bonne part à la formation du centre athéronécrotique.
essentiellement collagénique, est produite par les cellules La classification séquentielle des lésions (tableau II) (fig 2) et la
musculaires qui ont migré depuis la média et qui, pour la plupart, longue imprégnation des esprits par la théorie lipidique incitent
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Angéiologie Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie 19-0090
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19-0090 Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie Angéiologie
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Angéiologie Athérosclérose : description, mécanismes et étiologie 19-0090
Telle est aujourd’hui l’idée qui connaît le plus de succès car elle Avenir de l’athérosclérose
légitime toutes les voies de recherche, si antagonistes qu’elles
puissent être. Cela est confortable, mais semble une tautologie : Vieux de plus de deux siècles [8], le désir médical de comprendre
mises à part les affections héréditaires monogéniques à pénétrance l’athérosclérose pour la maîtriser est en partie réalisé. Les
invariable, existe-t-il une maladie qui ne soit pas multifactorielle ? 20 dernières années ont été marquées, du côté pratique, par la
La pathologie est par essence multifactorielle : la cause nécessaire confirmation des médicaments antithrombotiques et
d’une maladie (comme une exposition à Helicobacter pylori) n’est l’établissement des statines et, du côté conceptuel, par la
pas suffisante à l’éclosion de la maladie (comme un ulcère de renaissance de la théorie inflammatoire. Comme modalité
l’estomac). Il y faut des circonstances, liées aux gènes et à pathogénique, l’inflammation a les grands avantages d’unifier les
l’environnement, qui autorisent l’enchaînement complet de l’agent efforts de recherche et de poser la question étiologique en termes
à son fait. Comme la plupart des maladies, on doit envisager que simples. L’identification des agressions en cause est encore partielle
l’athérosclérose est monofactorielle : elle a une cause dont l’impact avec les facteurs de risques conventionnels, mais des espoirs
final, qui peut être nul, modeste ou majeur, est le résultat d’une naissent de nouvelles explications comme l’infection. Si la piste se
masse d’influences que l’on qualifie, elle, de multifactorielle. Le confirmait, la voie s’ouvrirait à des approches originales de
cholestérol, ou une anomalie plus subtile des lipides dont la traitement et de prévention, avec même une perspective potentielle
cholestérolémie serait un reflet grossier, pourrait bien être cette de réelle éradication. L’actualité de l’athérosclérose sera
cause, mais la porte reste ouverte à d’autres candidats comme passionnante à suivre dans les prochaines années. Elle pourrait être
l’intervention de microbes spécifiques [9]. une maladie sans grand avenir.
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10
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0630
19-0630
Résumé.– La recherche d’une cause cardiaque potentiellement emboligène doit être systématique
devant tout accident embolique. Une origine cardiaque est retrouvée dans la grande majorité des cas
lors des embolies des membres et lors de 15 à 20 % des accidents cérébraux. Un interrogatoire et un
examen attentif permettent le plus souvent une orientation. L’échographie transthoracique et
transœsophagienne, le holter électrocardiogramme (ECG) sont les examens clés de l’enquête
étiologique. Malgré ces investigations, 5 à 10 % des accidents emboliques restent inexpliqués.
© Elsevier, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : C Chapelon-Abric. Causes cardiaques des embolies. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0630, 1997, 3 p.
19-0630 Causes cardiaques des embolies Angéiologie
phase de réduction, les embolies de régularisation survenant cérébral, une fibrillation auriculaire chronique, une fibrillation
essentiellement dans les 8 premiers jours chez des patients mal auriculaire contemporaine de l’infarctus, une surélévation de ST
anticoagulés. supérieure à 2,4 et une hypertension artérielle [12]. À la phase
tardive, les accidents emboliques sont corrélés avec la présence
VALVULOPATHIES d’un anévrysme ventriculaire ou d’un pseudoanévrysme. Celui-ci
s’accompagne d’un accident embolique dans 38 % des cas.
¶ Rétrécissement mitral
CARDIOPATHIES CONGÉNITALES
Le rétrécissement mitral représente la valvulopathie la plus
emboligène, et ce en dehors de tout trouble du rythme. Une ¶ Chez l’enfant
complication embolique émaille son évolution dans 10 à 20 % des
Les cardiopathies cyanogènes sévères chez l’enfant de moins de 2
cas. Ces embolies sont multiples, répétitives et peuvent siéger sur
ans peuvent être à l’origine d’accident vasculaire cérébral. Un
n’importe quel territoire. Les plus fréquentes et les plus graves sont
accident paradoxal, à partir de la circulation cave, peut s’observer
les embolies cérébrales, en particulier sylviennes, avec un risque
au cours de tous les shunts droite-gauche, lors de la persistance du
majeur de récidive. Le risque est d’autant plus grand qu’il existe
canal artériel et en présence d’un foramen ovale perméable.
des échos de contraste spontanés dans l’oreillette gauche [7].
¶ Chez l’adulte
¶ Prolapsus valvulaire mitral
Une perméabilité du foramen ovale souvent associée à un
Le prolapsus valvulaire mitral semble s’associer à une fréquence anévrysme du septum auriculaire devra être recherchée
accrue d’accident embolique, en particulier d’accident ischémique systématiquement chez l’adulte, en l’absence d’autres causes par
transitoire, d’infarctus cérébral, d’amaurose, d’occlusion de l’artère une échographie cardiaque de contraste. Les fréquences de ces
centrale de la rétine semble-t-il par hyperactivité plaquettaire. La malformations sont dans la population générale respectivement de
rupture de continuité endothéliale favorise l’agrégation 27 à 35 % des cas et de 1 % des cas. Une embolie paradoxale à
plaquettaire, la formation du complexe fibrine-thrombine. À tout partir d’une thrombose veineuse de membre inférieur doit être
cela s’associe des arythmies paroxystiques plus fréquentes. De ce suspectée s’il existe un foramen ovale ou une communication
fait, des prescriptions empiriques d’aspirine ont été proposées [4]. interauriculaire avec shunt droite-gauche [13] et ce, à l’occasion
d’une élévation des pressions dans la cavité droite. La recherche
THROMBOSES SUR PROTHÈSE VALVULAIRE [2, 4, 11]
d’une phlébite par échodoppler des membres inférieurs (voire une
phlébographie), d’une embolie pulmonaire par scintigraphie
Les thromboses sur prothèse valvulaire surviennent chez 5 à 25 %
pulmonaire de ventilation-perfusion est nécessaire.
des patients, à l’origine d’accidents emboliques dans à 1 à 4 % par
an. Cette fréquence varie en fonction des séries, du recul, du type EMBOLIES DE L’ENDOCARDITE INFECTIEUSE [2, 4, 11]
de prothèse, mais aussi en fonction de la position de la prothèse.
En effet, les embolies s’observent plus fréquemment lorsque les L’endocardite infectieuse se complique d’embolies artérielles dans
prothèses sont en position mitrale par rapport à la position 15 à 20 % des cas, pourcentage nettement inférieur à celui observé
aortique, surtout s’il s’y associe une AC/FA. Les embolies sont lorsqu’il n’existait pas d’antibiotiques (70 à 97 % !). Les risques sont
nettement plus fréquentes dans le territoire cérébral. Les accidents inférieurs lorsqu’il s’agit de formes subaiguës (embolie clinique
emboliques sont moins fréquents avec les bioprothèses. Ainsi, dans 6 à 35 % des cas), alors qu’elle est présente dans 60 % des cas
certains auteurs proposent pour tenter de réduire le risque des formes aiguës [16]. Tous les organes peuvent être intéressés. Les
embolique, d’associer au traitement anticoagulant, de l’acide localisations emboliques préférentielles sont les reins (56 %), la rate
salicylique à dose faible (100 mg/j) [15]. (44 %), le cerveau (33 %), en particulier au niveau de l’artère
cérébrale moyenne et de ses branches. Les occlusions des grosses
BOURRELETS VALVULAIRES artères sont rares, sauf s’il s’agit d’endocardites fungiques ou à
Staphylococcus aureus.
Les bourrelets valvulaires définis par une expansion tissulaire fine Du fait de la lenteur de recouvrement des végétations par
très mobile peuvent s’observer sur des valves natives et des l’endothélium (6 mois), les accidents emboliques peuvent survenir
prothèses valvulaires. Leur présence est un facteur emboligène [17]. des semaines, voire des mois après l’éradication du processus
infectieux, avec un risque tardif de 5 %.
INFARCTUS DU MYOCARDE
[9]
CARDIOMYOPATHIES
L’infarctus du myocarde à sa phase initiale est à haut risque
d’accidents emboliques qui surviennent chez 2 à 4 % des ¶ Cardiomyopathies dilatées [4]
patients [4, 12]. Plus de 50 % d’entre eux sont diagnostiqués durant
les 5 premiers jours. Les études autopsiques montrent la présence Toutes les cardiomyopathies dilatées, quelle que soit leur cause,
d’un thrombus mural dans 44 % des cas, essentiellement au niveau peuvent se compliquer d’accident embolique. Ce risque augmente
de la pointe du ventricule gauche. En cas d’infarctus septal, le parallèlement à l’aggravation de la dysfonction ventriculaire
thrombus peut siéger au niveau des deux ventricules. Un accident gauche, particulièrement si le malade est en AC/FA [4] . Le
embolique est noté chez 10 % des patients décédés d’infarctus, diagnostic est facile et repose sur l’échocardiographie.
localisé dans 50 % des cas au niveau de l’encéphale. Les autres
localisations fréquentes sont les reins, la rate, la bifurcation aorto- ¶ Cardiomyopathies du post-partum
iliaque et l’artère fémorale. La présence d’un thrombus est corrélée ou syndrome de Meadows
à l’étendue de la nécrose myocardique et sa localisation antérieure ; Cette cardiomyopathie rare, sous nos climats, est à sa phase aiguë
elle est très rare en revanche lors des nécroses inférieures. Les à haut risque emboligène, un accident étant observé dans plus de
facteurs prédictifs d’accidents emboliques cérébraux sont à la 20 % des cas. Cela justifie un traitement anticoagulant
phase initiale, un infarctus antérieur, des antécédents d’accident systématique [10].
2
Angéiologie Causes cardiaques des embolies 19-0630
La présence d’échos spontanés intracavitaires associés à l’AC/FA, Malgré des investigations bien conduites, il est, dans 5 à 10 % des
le rétrécissement mitral, une prothèse valvulaire, un cas, impossible de connaître la source de l’embolie. À l’inverse
dysfonctionnement ventriculaire gauche augmentent chacun parfois, chez un même patient, coexistent plusieurs pathologies
significativement le risque d’accidents emboliques [4]. emboligènes comme une prothèse valvulaire cardiaque, une AC/FA,
et une anticoagulation inefficace.
Actuellement est en cours d’évaluation le doppler transcrânien qui,
Embolies tissulaires [2]
en révélant la présence de HITS (échos emboliques unidirectionnels
transitoires observés au niveau des artères cérébrales) permettrait
Les embolies tissulaires sont beaucoup plus rarement en cause : peut être de définir des patients à haut ou bas risque [15].
– myxome : tumeur bénigne de l’oreillette essentiellement gauche, La prévention repose sur une anticoagulation efficace et/ou un
a un risque embolique élevé (30 à 50 % des cas) ; traitement antiagrégant plaquettaire.
Références
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3
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0620
19-0620
Résumé.– Nous avons résumé les effets de la restriction du sel, des diurétiques, des inhibiteurs de
l’enzyme de conversion de l’angiotensine-I, des antagonistes calciques, des dérivés nitrés et des
bêtabloquants (non sélectifs, sélectifs, avec vasodilatation) sur la circulation périphérique et les
vaisseaux. Les effets hémodynamiques périphériques (le débit sanguin et la résistance vasculaire
périphérique) et les conséquences fonctionnelles et structurelles sur la paroi vasculaire (endothélium,
hypertrophie vasculaire) ont été mis en évidence. Les changements de la compliance systémique et
régionale, induits par les médicaments, et l’influence sur la morphologie de l’onde artérielle ont été
résumés. Pour chaque classe de médicaments, nous avons décrit en bref le mode d’action et le(s)
mécanisme(s) par le(s)quel(s) la circulation artérielle et/ou veineuse est influencée. En dernier lieu, les
effets indésirables sur le plan vasculaire périphérique ont été discutés.
© Elsevier, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : DL Clement. Conséquences vasculaires des traitements cardiologiques. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0620, 1998, 3 p.
19-0620 Conséquences vasculaires des traitements cardiologiques Angéiologie
d’effet significatif sur la compliance. Le diamètre de l’artère brachiale lents (L-channels ). Les trois types d’antagonistes calciques (1,4-
et la vélocité des ondes (PWV : pulse wave velocity) ne changent pas dihydropyridines, phényléthylamines, benzothiazépines) sont fixés
ou très peu sous traitement. Peut-être ce phénomène est-il dû à une par la α1-subunité du L-canal. Il faut se rappeler que d’autres
contre-régulation aux changements du volume, par le système récepteurs (α-adrénergiques) sont également sensibles aux
rénine-angiotensine-aldostérone ou par le système nerveux antagonistes calciques. Dans les territoires vasculaires musculaires,
sympathique. les antagonistes calciques provoquent une forte vasodilatation,
Les effets des diurétiques sur les reflets des ondes dans les artères nettement plus importante sur le système artériel que sur le système
n’ont pas été étudiés suffisamment pour pouvoir aboutir à des veineux [7]. Une veinoconstriction réflexe est parfois observée. La
conclusions claires. L’effet des diurétiques se situe surtout sur le plan baisse des résistances périphériques entraîne une augmentation
d’une réduction du volume plasmatique et extracellulaire et du débit réflexe de la fréquence cardiaque. Certains effets vasculaires ou
cardiaque dans les premières semaines suivie d’une réduction des cardiovasculaires indésirables ont été rapportés : vertiges, flushs
résistances périphériques. Certains diurétiques comme la cutanés, céphalées, hypotension posturale mais surtout œdèmes
spironolactone [6] paraissent entraîner une vasodilatation importante ; périphériques [10].
cela paraît être le cas, mais dans une moindre mesure, pour
l’indopamide. Pour les autres diurétiques, la possibilité est loin d’être EFFETS SPÉCIFIQUES DES ANTAGONISTES CALCIQUES
évidente. SUR LA CIRCULATION PÉRIPHÉRIQUE
Il n’y a pas d’effets indésirables sur le plan vasculaire des Le diamètre artériel et la compliance ont été fréquemment mesurés
diurétiques, abstraction faite d’un effet diabétogène (plus ou moins après l’administration d’antagonistes calciques. Dépendant de la
réversible) et d’une élévation de la cholestérolémie et de la dose administrée, le diamètre de l’artère brachiale se trouvait élargi.
triglycéridémie à long terme. Pour l’artère carotidienne des données contradictoires ont été
décrites. L’action était indépendante de l’action purement mécanique
Conséquences vasculaires induite par le changement de la pression artérielle. On a démontré,
pour différents dérivés dihydropyridines, une nette augmentation du
des inhibiteurs de l’enzyme débit sanguin dans les membres et les artères carotidiennes. L’action
de conversion de l’angiotensine I des antagonistes calciques sur l’endothélium est plutôt neutre. La
compliance artérielle se trouve favorablement influencée par les
EFFETS GÉNÉRAUX ET MODES D’ACTION
antagonistes calciques. L’administration aussi bien aiguë que
Les IEC-I ont comme effets une réduction de la postcharge, une chronique augmente la compliance systémique et brachiale
réduction des résistances périphériques (vasodilatation) sans effets (distensibilité et compliance). Sans doute, la réduction de la pression
significatifs sur la fréquence cardiaque ou le volume circulant et l’élargissement des diamètres vasculaires jouent un rôle ; peut-
(resetting des barorécepteurs). La vasodilatation est aussi bien être la relaxation des cellules vasculaires lisses, indépendante de la
artérielle que veineuse, associée parfois à une augmentation limitée pression, contribue-t-elle à l’évolution favorable de la compliance ?
du débit cardiaque [8]. Ces données ont été confirmées pour différents types d’antagonistes
Les modes d’action comprennent une réduction de l’angiotensine II (dihydropyridine et autres). Enfin, les contours de l’onde artérielle
endogène vasoconstrictive, stimulante de l’aldostérone, l’inhibition sont influencés favorablement par les antagonistes calciques. Pour la
de la dégradation de la bradykinine [9] et une stimulation des nifédipine et l’isradipine, on a démontré que la partie systolique
prostaglandines vasodilatatrices. tardive de l’onde de pression est influencée de façon plus
significative dans les artères centrales que dans les artères
EFFETS DES IEC-I SUR LA FONCTION ET LA
périphériques.
STRUCTURE DES GROSSES ARTÈRES [2]
Chez l’homme, l’élasticité de l’artère brachiale s’améliore sous IEC-I.
Le diamètre augmente d’une manière indépendante de la pression
artérielle. Cet effet favorable est peut-être dû à une réduction de
Conséquences vasculaires des dérivés
l’hypertrophie des cellules vasculaires lisses de la paroi vasculaire. nitrés
Ainsi y a-t-il amélioration de la fonction endothéliale. Ces résultats
se retrouvent aussi au niveau des artères carotidiennes. Un autre EFFETS GÉNÉRAUX ET MODE D’ACTION
aspect important induit par les IEC est la diminution du
« média/lumen ratio » des artères de résistance. L’action des dérivés nitrés (la nitroglycérine, l’isosorbide dinitrate...)
Les IEC-I semblent réduire, dans des modèles animaux, la formation sur les vaisseaux périphériques s’effectue directement sur les fibres
des athéromes dans les grosses artères (par exemple, l’aorte musculaires lisses, par vasodilatation non spécifique. Néanmoins, par
thoracique). Cette protection est dépendante de la fonction un mécanisme réflexe (stimulation sympathique), on observe une
endothéliale. vasoconstriction dans certains vaisseaux (surtout circulation
splanchnique). La dilatation se situe par préférence au niveau
La compliance des artères carotidiennes est améliorée sous
veineux, réduisant ainsi la précharge cardiaque. Concernant la
l’influence des IEC.
dilatation artérielle, elle est plus faible et se voit principalement au
Les IEC-I réduisent la portion systolique tardive de l’onde artérielle niveau des grosses artères et dépend des doses utilisées. La réduction
dans les artères carotidiennes, plus que dans les artères du bras de la résistance périphérique est donc faible et compensée par
(brachiale, radiale), ce qui suggère que l’effet sur la circulation augmentation du débit cardiaque ou, en moindre mesure, par
centrale et le ventricule gauche est plus important que sur les artères vasoconstriction artérielle.
périphériques.
Il paraît évident que ces effets vasculaires positifs vont de pair et EFFETS SPÉCIFIQUES DES DÉRIVÉS NITRÉS SUR LA
amplifient l’effet positif des inhibiteurs de l’enzyme sur CIRCULATION PÉRIPHÉRIQUE [1, 15]
l’hypertrophie cardiaque.
Chez l’homme, l’administration des dérivés nitrés influence
significativement la compliance artérielle et la morphologie de l’onde
Conséquences vasculaires artérielle, ce qui se reflète par une réduction parfois importante de la
des antagonistes calciques pression artérielle systolique [12]. Des études non invasives par
échodoppler ont démontré dans l’aorte, l’artère brachiale et les
EFFETS GÉNÉRAUX ET MODES D’ACTION artères carotidiennes, une dilatation accompagnant une réduction de
L’action des antagonistes calciques se situe aussi bien au niveau du la pression, ce qui suggère un mécanisme qui implique directement
tissu cardiaque que vasculaire. Rappelons très brièvement que le site la paroi vasculaire. Dans les grosses artères, un mécanisme de
d’action majeur des antagonistes calciques se localise sur les canaux dilatation de haut flux ne se déclare pas, parce que la résistance
2
Angéiologie Conséquences vasculaires des traitements cardiologiques 19-0620
régionale et la vélocité cross-sectionnelle ne changent pas sous bêtabloquants lipophiles, qui pénètrent le système nerveux central et
traitement nitré mais la réduction de la pression systolique ne diminuent le tonus sympathique vasomoteur d’origine centrale, ce
s’explique pas seulement par un changement de diamètre. En effet, qui entraîne une diminution de la résistance vasculaire périphérique,
le traitement par dérivés nitrés a comme conséquences un réduisant la vasoconstriction directe.
changement d’élasticité des grosses artères et une augmentation de
la compliance, exprimée par une plus forte pente de la relation EFFETS SPÉCIFIQUES DES BÊTABLOQUANTS SUR LA
pression-volume. La compliance systémique et celle de l’avant-bras CIRCULATION PÉRIPHÉRIQUE
sont augmentées après dérivés nitrés. Pour les vélocités des ondes,
on a décrit des valeurs constantes ou diminuées après dérivés nitrés. L’action des bêtabloquants sur la compliance des grosses artères chez
l’homme dépend du type de bêtabloquant : ceux non sélectifs n’ont
La morphologie de l’onde artérielle change aussi sous l’influence des
d’effet ni sur la distensibilité ni sur la compliance ; les sélectifs, en
dérivés nitrés [ 1 3 , 1 4 ] . L’observation la plus claire est que la
général, ont un effet plus prononcé sur la compliance et la
nitroglycérine diminue l’amplitude de l’onde reflétée dans la
distensibilité. À long terme, les bêtabloquants avec ASI et
périphérie ; la deuxième partie de l’onde artérielle peut même
caractéristiques vasodilatatrices augmentent aussi la distensibilité et
disparaître. À des doses thérapeutiques, on observe une réduction
la compliance. Les bêtabloquants sans action vasodilatatrice ne
de l’onde reflétée sans dilatation artériolaire importante. Parce que
causent pas seulement une plus haute résistance périphérique mais
l’onde artérielle a une autre morphologie au niveau de l’aorte (l’onde
aussi des ondes « réflectées » plus augmentées. Les ondes de pression
reflétée est plus centrale), la réduction de la pression artérielle
carotidiennes sont caractérisées par une augmentation de l’onde de
systolique sous dérivés nitrés est plus exprimée dans l’aorte et le
pression systolique tardive. Tout à l’inverse, les bêtabloquants avec
ventricule gauche que dans les artères périphériques (où on mesure
action vasodilatatrice diminuent l’onde de pression systolique
par routine la pression artérielle). Ainsi, l’onde artérielle carotidienne
tardive dans les artères carotidiennes. En conséquence, les
sous-estime la réduction de la pression systolique provoquée par la
bêtabloquants avec action vasodilatatrice semblent présenter une
nitroglycérine [11] . Le nitroprussiate a les mêmes effets que la
capacité plus prononcée que d’autres pour diminuer la pression
nitroglycérine avec, en plus, une dilatation artériolaire et une
systolique centrale (l’aorte et le ventricule gauche).
réduction de la résistance périphérique.
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3
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0510
19-0510
Résumé.– Les douleurs des membres inférieurs ont des causes multiples et parfois intriquées. Lorsqu’une
gangrène distale est installée, l’origine artérielle ne fait pas de doute. Le diagnostic est déjà plus difficile
en cas d’ulcérations des membres inférieurs où l’origine peut être veineuse, artérielle ou microcirculatoire
parfois liée à une vascularite. Si l’amyotrophie guide vers une pathologie neurogène, si l’enraidissement
articulaire oriente vers une cause ostéoarticulaire, les pièges sont nombreux et un œdème douloureux de
cheville, dont on peut croire à l’origine veineuse, peut être dû à une algodystrophie.
© Elsevier, Paris.
Introduction
échodoppler échodoppler
Nous essaierons dans ce chapitre de progresser de manière très oxymétrie
pragmatique vers le diagnostic plutôt que d’établir une longue liste
étiologique. Il importe de déterminer tout d’abord si la marche est
artérielle veineuse
douloureuse (fig 1), s’il existe ou non une claudication.
artériopathie oblitérante* insuffisance veineuse
On peut classer en cinq grands cadres étiologiques l’origine d’une superficielle et profonde*
poplité piégée
marche douloureuse (tableau I). Un interrogatoire minutieux peut syndrome des loges syndrome de Cockett
bien souvent orienter vers une origine artérielle, veineuse, insuffisance veinolymphatique
ostéoarticulaire, musculotendineuse ou nerveuse.
La claudication intermittente douloureuse n’est pas caractéristique
de l’artériopathie oblitérante (tableau II). Une origine veineuse ou
marche douloureuse
un canal lombaire étroit peuvent être des pièges amenant à des gestes
de revascularisation parfois inutiles.
Éric Hachulla : Professeur des Universités, service de médecine interne du professeur Bernard Devulder,
hôpital Huriez, CHRU, 2, avenue Oscar-Lambret, 59037 Lille cedex, France. localisée au mollet ;
Toute référence à cet article doit porter la mention : É Hachulla. Douleurs des membres inférieurs et des extrémités. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0510, 1997, 8 p.
19-0510 Douleurs des membres inférieurs et des extrémités Angéiologie
— facteurs de majora- marche rapide sur plan station debout terrain accidenté, pression, certains mou- certains mouvements
tion incliné prolongée, chaleur certaines mobilités vements d’étirement ou (Lassègue, Léri)
articulaires, contre résistance,
— facteurs de soulage- arrêt de la marche, surélévation du certaines positions immobilisation, AINS, repos, AINS
ment vasodilatateurs membre, tonique articulaires, infiltration
veineux, contention immobilisation, AINS,
infiltration
— persiste au repos 0 0 0 0 0
(sauf stade III ou IV) (sauf troubles (sauf arthrite)
trophiques)
Boiterie 0 0 ++ + +
Tableau II. – Principales causes des claudications intermittentes douloureuses et particularités cliniques.
Artériopathie oblitérante • Au stade de la claudication intermittente (stade II de Leriche et Fontaine), le malade va ressentir une douleur typiquement au mollet mais
parfois au pied ou à la cuisse. Celle-ci survient uniquement à la marche d’autant plus que la marche est rapide ou le terrain en côte
l’obligeant alors à s’arrêter. La douleur disparaît en quelques minutes après l’arrêt (signe de la boutique). Il s’agit d’une douleur à type de
striction ou de brûlure, elle survient habituellement pour une distance identique appelée périmètre de marche.
• Le siège de la douleur de la claudication intermittente, habituellement unilatérale, peut être fessier, localisé à la cuisse, au mollet ou à la
plante du pied selon le niveau de l’atteinte artérielle.
Insuffisance veineuse • L’insuffisance veineuse profonde primitive ou post-thrombotique peut être à l’origine d’une claudication intermittente douloureuse du
membre inférieur débutant typiquement au mollet, irradiant vers la cuisse voire la hanche mais ne cédant pas immédiatement après l’arrêt
de la marche.
• La surélévation du membre accélère la disparition des symptômes.
Canal lombaire étroit • Il s’agit d’une authentique claudication, les douleurs ont une topographie radiculaire, voire pluriradiculaire et s’accompagnent de
paresthésies, de dysesthésies ou de crampes.
• Les symptômes surviennent en station debout, sont plus importants à la descente des escaliers qu’à la montée. La flexion lombaire
soulage les signes plus que l’arrêt de la marche. Les déplacements en bicyclette ne provoquent aucun symptôme du fait de la lordose qui
élargit le canal lombaire et limite la compression radiculaire.
Coxarthrose et gonarthrose • La douleur est spontanée, discrète, progressivement croissante, accentuée par la marche et certains mouvements, calmée par le repos et
s’accompagne d’un enraidissement progressif de la mobilité articulaire.
• La topographie de la douleur de hanche peut être trompeuse : aine, fesse et face postérieure de la cuisse, face antérieure de la cuisse, face
externe de la cuisse ou face interne de la cuisse dans sa partie haute.
• La gonarthrose entraîne plutôt une douleur déclenchée par la montée et la descente des escaliers, parfois la position assise prolongée. Le
signe du rabot et le toucher rotulien postérieur douloureux orientent vers un origine fémoropatellaire.
Récup = 61,86 %
2
Angéiologie Douleurs des membres inférieurs et des extrémités 19-0510
La douleur est spontanée, siège à la face postérieure de la cuisse et Les symptômes cliniques ont été rapportés dans le tableau II. La
descend dans le creux poplité, la jambe et le pied avec une intensité douleur est liée à une atteinte mono- ou plus souvent
variable, du simple élancement à la douleur atroce. Elle est pluriradiculaire. Rarement constitutionnel, le canal lombaire rétréci
exagérée par la toux ou l’éternuement (origine discale), lorsque le est surtout la résultante d’un conflit entre une protrusion discale
patient se lève ou se retourne dans son lit. L’appui antalgique porte ou le développement d’une arthrose interarticulaire postérieure et
sur le côté sain, l’autre côté étant demi-fléchi. Il existe souvent une l’étui dure-mérien. Ce conflit étant dynamique et la taille du canal
raideur rachidienne, une douleur provoquée par la pression du variant avec la position de la colonne lombaire, le diagnostic de
sciatique lui-même, par élongation du nerf au cours de la canal lombaire étroit peut être difficile. L’EMG montre de façon
manœuvre de Lasègue ou par pression latérovertébrale. habituelle une souffrance pluriradiculaire. Les radiographies
Une hypoesthésie dans le territoire cutané correspondant, mais standards du rachis lombaire peuvent visualiser une arthrose
surtout la diminution du réflexe achilléen sont autant de signes interapophysaire postérieure volumineuse, un trouble de la
objectifs. Les deux types principaux de lombosciatique intéressent statique ou une cyphose. L’imagerie par résonance magnétique
les racines L5 et S1 avec leur topographie respective : fesse, cuisse, (IRM) et le scanner sont très utiles pour apprécier la taille du canal
face externe de jambe, dos du pied et gros orteil pour L5 ; face mais ces examens sont réalisés couché et parfois seule la
postérieure de la cuisse et de la jambe, talon et plante du pied saccoradiculographie réalisée debout peut révéler le site exact du
pour S1. rétrécissement lombaire.
Le diagnostic de sciatique discale est d’abord clinique. Dans les
formes typiques et d’évolution rapidement favorable, aucun autre AUTRES RADICULALGIES
examen n’est nécessaire. Dans les formes atypiques ou si la
La douleur du membre inférieur est traçante et descendante, il peut
symptomatologie est traînante, alors l’imagerie permet un
exister des paresthésies, des élancements, des troubles de la
diagnostic morphologique :
sensibilité. La distribution métamérique de la douleur (fig 3) reflète
– rachis lombaire face + profil et cliché L5-S1 centré de face ; l’atteinte radiculaire ou tronculaire.
C2
C3
C2 C4
C3 C5
C6
Plexus cervical C4
C5 C2
T1
T1 C2
Circonflexe T2 C6 Circonflexe T2
T3 T3
Nerfs intercostaux T4 C7
T4
T5
T5 T6
Radial T6
T8 T7
T7
T8 T10 T9
Musculocutané T9
Musculocutané T12 T11
Brachial cut int T10 L1
Brachial cut int L2
Abdominogénital T11 L3
L4
T12
Radial
Cubital L1 C8 S3 L5
Cubital S4 S2 S1
Médian C7
Génito- S2,3
crural L2 Médian
Obturateur Fessiers
L3
Génitocrural
fémorocutané
Crural
L4
Obturateur
Petit sciatique
Crural
S1
3 Distribution métamérique des racines nerveuses et systématisation des territoires nerveux aux membres inférieurs.
3
19-0510 Douleurs des membres inférieurs et des extrémités Angéiologie
4
Angéiologie Douleurs des membres inférieurs et des extrémités 19-0510
Cancer associé ++ + 0
Atteinte musculaire Faiblesse musculaire à prédominance Faiblesse musculaire à prédominance Faiblesse musculaire proximale avec
proximale proximale rapide atteinte distale
CPK Elevées jusqu’à 50 fois la normale Elevées de 10 à 50 fois la normale, par- Elevées jusqu’à 10 fois la normale, par-
fois normales fois normales
EMG Atteinte myogène (parfois non spéci- Atteinte myogène Atteinte myogène souvent signes non
fique) spécifiques : potentiels polyphasiques,
potentiels de fibrillation
Périartérite noueuse Myalgies intenses et diffuses présentes dans 50 % des cas ; amyotrophie intense et rapide ; faiblesse musculaire.
Altération de l’état général, fièvre, arthralgies ou arthrites.
Multinévrites fréquentes.
Lupus érythémateux systé- Myalgies diffuses (50 % des cas) et faiblesse musculaire proximale accompagnent les arthralgies ou arthrites présentes dans 80 % des cas.
mique Les douleurs musculaires sont parfois favorisées par un traitement associé : myopathie cortisonique, antipaludéens de synthèse.
Sarcoïdose Formes musculaires avec amyotrophie, formes pseudopolymyositiques exceptionnelles mais la biopsie de quadriceps est d’une grande
rentabilité diagnostique.
Mixed Connective Tissue Myalgies (80 % des cas) : dans 10 à 20 % des cas, le tableau clinique peut évoquer une polymyosite avec élévation des enzymes musculaires
Disease (syndrome de Sharp) et syndrome myogène à l’EMG.
Syndrome myalgies- Début quelques semaines à 2 ans après le début d’un traitement à base de L-trypophane (interdit de vente depuis 1990 mais encore présent
éosinophilie dans certaines préparations diététiques) ; éosinophilie > 2 000/mm3
Myalgies (100 % des cas) diffuses, en quelques jours, prédominent sur les avant-bras mais aussi les muscles des épaules, des cuisses et
paravertébraux ; consistance œdémateuse ou indurée du muscle à la palpation.
EMG : électromyogramme.
Les causes médicamenteuses et l’hypothyroïdie sont les deux Douleurs des membres inférieurs
situations les plus fréquentes.
d’origine ostéoarticulaire
Dans d’autres cas, il peut s’agir d’une myosite inflammatoire
(tableau VI). La faiblesse musculaire est ici plus fréquente que la L’atteinte de l’appareil locomoteur est une cause fréquente de
douleur. douleurs des membres inférieurs. La marche est souvent anormale
Les myalgies ont parfois une origine systémique (tableau VII). et s’accompagne de boiterie, caractère qui n’existe pas chez
l’artériopathe en dehors de troubles trophiques associés. La cause
Dans d’autres cas les myalgies ont une origine infectieuse :
la plus fréquente est l’arthrose.
– toutes les infections virales peuvent être en cause donnant des
PATHOLOGIE DE LA HANCHE ET DU GENOU
myalgies fébriles : grippe, infections à coxsackie, parvovirus B19,
cytomégalovirus, virus d’Epstein-Barr, etc ; La topographie variable des douleurs de hanche ou du genou fait
qu’il n’est pas toujours facile de rapporter une douleur de la jambe
– la toxoplasmose peut être à l’origine de myalgies parfois diffuses
à son origine articulaire.
et s’accompagnant d’adénopathies superficielles cervicales qui
persistent quelques semaines ou parfois quelques mois ; La hanche peut donner des douleurs de topographie variable :
aine, fesse et face postérieure de la cuisse, face antérieure de la
– la trichinose entraîne des myalgies diffuses persistant parfois cuisse, face externe de la cuisse ou face interne dans sa partie
plusieurs mois, s’accompagne d’un œdème périorbitaire avec haute. Le genou peut aussi donner des douleurs de topographie
conjonctivite, d’une fièvre à 40 °C, l’ensemble survient 8 à 15 jours variable : face antérieure ou postérieure du genou, face latérale du
après l’ingestion de porc mal cuit et s’accompagne de troubles genou, voire face antérieure de la cuisse.
digestifs avec céphalées. La sérologie permet souvent le diagnostic. La figure 4 permet d’orienter le diagnostic étiologique d’une
L’apparition de myalgies à l’effort évoque certains diagnostics plus douleur de la hanche ou du genou. Les radiographies standards,
rares liés à un déficit enzymatique de la glycogénolyse ou voire la scintigraphie ou l’IRM, constituent des examens clés du
mitochondriale (tableau VIII). diagnostic.
5
19-0510 Douleurs des membres inférieurs et des extrémités Angéiologie
Déficit en phosphofructokinase = Maladie plus fréquente chez l’homme, l’intolé- Élévation du taux de CPK
glycogénose de type VII ou rance à l’exercice débute dans l’enfance, devient
maladie de Tarui = maladie héré- gênante à l’adolescence et se manifeste par des
ditaire à transmission autoso- myalgies et des crampes des membres inférieurs
mique récessive avec fatigue importante et parfois nausées, vomis-
sements.
La myoglobinurie est inconstante. Absence d’élévation de la lactacidémie à l’effort
qui fait apparaître une crampe.
EMG : silencieux au moment de la crampe, parfois
tracé myogène.
Biopsie musculaire avec étude enzymatique.
Déficit en enzymes mito- Déficit en carnitine-palmityl- Les accès douloureux sont particulièrement Élévation des CPK à l’effort ou après plusieurs
chondriales transférase = maladie héréditaire déclenchés par l’exercice violent et par le régime jours de jeûne.
à transmission autosomique riche en acides gras.
récessive à prédominance mascu- Les myalgies et les crampes s’accompagnent de Augmentation importante de la lactacidémie à
line myoglobinurie. l’effort.
La gêne est faible en cas d’exercice modéré ou en Élévation du taux de cholestérol et des triglycé-
régime normal. rides.
Histologie musculaire avec étude enzymatique.
Arthrose Arthrite
douleurs spontanées, discrètes, progressivement croissantes, accentuées douleurs à prédominance nocturne avec limitation rapide et
Pathologie par la marche et certains mouvements, calmées par le repos importante de la mobilité
limitation préférentielle de la rotation interne, de labduction et de
articulaire l'extension si coxarthrose
douleurs à la montée et à la descente des escaliers ou en position assise
prolongée si gonarthrose
radiographies radiographies
si doutes : scintigraphie - IRM
ponction articulaire :
inflammatoire, infectieuse, microcristalline
4 Arbre d’orientation diagnostique d’une douleur du membre inférieur rapportée à une pathologie de la hanche ou du genou.
IRM : imagerie par résonance magnétique.
6
Angéiologie Douleurs des membres inférieurs et des extrémités 19-0510
PATHOLOGIE DE LA CHEVILLE
causes
L’arthrose de la cheville est rare et souvent post-traumatique. ostéoarticulaires
L’arthrite de la cheville peut être isolée et révéler une sarcoïdose
ou un rhumatisme inflammatoire chronique. tumeurs osseuses arthrose digitale* tendinopathies et
chondrome rhizarthrose* ténosynovites
L’algodystrophie est un piège car elle peut être secondaire à un ostéome ostéoïde hallux valgus
traumatisme minime parfois oublié. En phase de début pseudo- pied creux*
inflammatoire, l’œdème, la rougeur cutanée, la douleur et la polyarthrite*
limitation articulaire sont classiques. Plus tardivement, la rougeur synovite* algodystrophie
fait place à une pâleur cutanée avec cyanose, la douleur reste
présente avec l’œdème et une limitation de la mobilité articulaire. ostéonécrose
pseudarthrose
Plus tardivement encore, la douleur peut avoir disparu mais
l’œdème peut persister. L’articulation garde souvent une mobilité
limitée. C’est à ce stade que le diagnostic différentiel avec un
œdème veineux ou lymphatique peut être difficile. Les Douleurs des extrémités tumeur glomique
radiographies standards et la scintigraphie rectifient le diagnostic.
radiographies standards, voire la scintigraphie. Aux mains, * atteinte parfois isolée des collatérales digitales
7
19-0510 Douleurs des membres inférieurs et des extrémités Angéiologie
Nerf cubital (syndrome • Paresthésies des 4e et 5e doigts de la main avec parfois hypoesthésie et déficit des interosseux
du canal de Guyon) • La compression du nerf peut être dans la gouttière épitrochléo-olécrânienne ou au poignet
Pied
Nerf sciatique poplité • Steppage accompagné plus ou moins de paresthésies du pied après une posture prolongée
externe • Compression du nerf au col du péroné
Nerf interdigital des • Provoque une claudication intermittente du pied. La douleur ne survient que lorsque le patient est chaussé, le pied un peu serré, en
pieds (maladie de revanche elle n’apparaît jamais pied nu. Cette douleur est souvent fulgurante, siège précisément entre la 3e et la 4e tête métatarsienne,
Morton) s’accompagne d’une irradiation électrique vers les orteils, soit vers la pulpe soit de façon plus caractéristique sous l’ongle.
• La pression de l’interligne entre le 3e et 4e métatarsien entraîne une vive douleur qui est liée à la présence d’un fibronévrome du 3e nerf
interdigital plantaire. La compression latérale du pied fait remonter ce petit fibronévrome entre les têtes des métatarses et l’expulse comme un
noyau de cerise (signe de Mulder).
• Le diagnostic est surtout clinique, l’IRM de l’avant-pied peut montrer le fibronévrome en cause.
• Les microtraumatismes répétés (sport sur sol dur, hauts talons, trouble de la statique du pied) favorisent la constitution du névrome.
l’arthrose digitale et la rhizarthrose sont des diagnostics faciles. La Le diagnostic de pathomimie est souvent difficile. Il peut s’agir de
polyarthrite se caractérise par une tuméfaction des articulations, microtraumatismes provoqués des extrémités, d’œdème lié à une
une augmentation de la chaleur locale, un enraidissement des position déclive prolongée d’un membre, ou lié à l’utilisation d’un
mobilités articulaires et surtout un réveil nocturne plus volontiers garrot. La conséquence peut être une authentique algodystrophie
en deuxième partie de nuit, un dérouillage matinal qui dépasse 30 confortant le quidam dans sa pathologie.
minutes et peut durer parfois plusieurs heures. Les
spondylarthropathies peuvent donner des douleurs des pieds à
type de talalgies en couronne. Une arthrite d’orteil s’accompagnant Références
d’un aspect d’orteil en saucisse évoque particulièrement soit une
arthrite réactionnelle soit un rhumatisme psoriasique.
[1] Bouvenot G, Devulder B, Guillevin L, Queneau P, Schaffer A. Pathologie d’organe.In :
Les neuropathies périphériques peuvent entraîner des douleurs Pathologie médicale. Paris : Masson, 1996 : 291-374
distales qui débutent aux pieds ou aux mains, source de [2] Cusset C, Antoine JC, Rousset H. Algies diffuses. In : Rousset H, Vital-Durand D eds.
paresthésie, de picotements, de brûlures diurnes ou nocturnes (cf Diagnostics difficiles en médecine interne. Paris : Maloine, 1990 : 9
supra). [3] De Gennes C. Algies diffuses : orientations diagnostiques. In : Godeau P, Herson S, Piette
JC eds. Traité de médecine. Paris : Médecine Sciences-Flammarion, 1996 : 1-82
Les syndromes canalaires sont la conséquence d’une compression [4] Hachulla É, Flipo RM, Hatron PY, Devulder B. Maladies inflammatoires. Paris : Masson,
localisée sur un trajet nerveux (tableau X). Le syndrome du canal 1992
[5] Pérez-Cousin M, Hachulla É. Artériopathie oblitérante des membres inférieurs. In : Bouve-
carpien se caractérise par sa fréquence. Il est parfois intriqué avec not G, Devulder B, Guillevin L, Queneau P, Schaffer A eds. Pathologie médicale. Paris :
un syndrome du défilé thoracobrachial. Masson, 1996 : 125
8
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0110
19-0110
Dyslipidémies
JM Brun
S Rudoni
Résumé. – De nombreuses études épidémiologiques ont montré le rôle athérogène des lipoprotéines de
basse densité (low density lipoproteins [LDL]), en particulier sous leurs formes oxydées. Dans la plupart
des hypercholestérolémies, l’augmentation du taux des LDL s’accompagne d’une diminution des
lipoprotéines de haute densité (hight density lipoproteins [HDL]), dont le pouvoir protecteur vis-à-vis de
l’athérosclérose est bien admis. L’hypertriglycéridémie, par elle-même, mais aussi par l’hypo-HDL-émie
et les anomalies qualitatives des LDL qui l’accompagnent, ainsi que les troubles de l’hémostase induits,
est un facteur de risque vasculaire qu’il faut également prendre en compte. D’autres marqueurs de
risque, tels que la présence en excès de la lipoprotéine (Lp[a]), et l’hyperlipidémie postprandiale peuvent
jouer un rôle dans l’athérothrombogenèse. Enfin, l’existence de facteurs de risque associés, tels que le
tabagisme, l’hypertension artérielle ou le diabète, aggravent considérablement le risque
cardiovasculaire. Si les résultats des grandes études d’intervention primaire et secondaire ont nettement
montré l’efficacité des hypolipidémiants dans la réduction du risque cardiovasculaire, nous ne devons
pas ignorer les résultats intéressants des études d’intervention diététique. Si la communauté médicale
est actuellement unanime pour traiter les hyperlipidémies en prévention secondaire et primaire, le
problème auquel nous sommes confrontés est celui de la compliance du patient à un traitement qui doit
être a priori pris à vie, et de l’assurance qu’un contrôle satisfaisant des paramètres lipidiques sera
obtenu. En effet, plusieurs études indiquent que la prise en charge des hyperlipidémies reste médiocre.
Une véritable éducation du patient hyperlipidémique s’avère indispensable non seulement pour lui
permettre une application réaliste des conseils diététiques mais aussi pour obtenir sa motivation
personnelle, seule garantie d’une compliance satisfaisante, au long cours. La prise en charge
thérapeutique des patients hyperlipidémiques a pour objectif une prévention du risque vasculaire global.
Elle doit ainsi tenir compte du type d’anomalie lipidique observé, mais aussi des autres facteurs de risque
associés, dans le cadre d’une collaboration pluridisciplinaire.
© 1999, Elsevier, Paris.
Introduction de l’année 1994, 46 311 décès par infarctus du myocarde ont été
comptabilisés. Dans l’étude MONICA, la mort subite est la première
manifestation ischémique dans 61 % des cas chez l’homme et dans
Les cardiopathies ischémiques représentent la première cause de 74 % des cas chez la femme [36]. L’amélioration de la mortalité
mortalité avec 6,26 millions de décès annuels dans le monde, sur un coronaire chez les patients hospitalisés reflète essentiellement les
chiffre total de 50 millions [60]. Les accidents vasculaires cérébraux, progrès réalisés dans la prise en charge de l’infarctus en milieu
avec 4,4 millions de décès par an, représentent la deuxième cause. Si
hospitalier (thrombolyse précoce, angioplastie, antiagrégants...). En
au cours des dernières années, la mortalité coronaire a diminué dans
revanche, l’absence de diminution du nombre des décès avant l’accès
les pays industrialisés, elle apparaît en très nette augmentation sur
des patients à l’hôpital souligne les grandes carences de la prévention
l’ensemble du globe et plus particulièrement dans les pays ayant vu
primaire. Ainsi, il apparaît clairement que le traitement efficace des
une occidentalisation de leur mode de vie. Parmi les facteurs en cause
dyslipidémies est une étape essentielle de la prise en charge globale
dans le développement rapide des maladies cardiovasculaires, les
du patient, aussi bien en prévention primaire que secondaire. Il est
hyperlipidémies apparaissent au premier plan. C’est ainsi que dans
bien démontré que les LDL sont les Lp les plus athérogènes. Les
l’étude EUROASPIRE (European action on secondary prevention
HDL ont un effet protecteur vis-à-vis de l’athérosclérose et la
through intervention to reduce events), réalisée chez 3 569 patients
diminution de leur taux est corrélée à une augmentation du risque
de neuf pays européens, ayant présenté un accident ischémique
cardiovasculaire. Il apparaît également d’après les données de la
coronaire, l’hypercholestérolémie est présente chez 71 % des patients
européens et 73 % des patients français [35]. En France, lors littérature des cinq dernières années que l’hypertriglycéridémie est
un facteur de risque cardiovasculaire coronarien dans les deux sexes,
indépendant du taux de cholestérol [5, 45], de même que la présence
dans le plasma, en quantité importante, de la Lp(a). Enfin, un rôle
Jean-Marcel Brun : Professeur des Universités, praticien hospitalier, chef de service.
Sabine Rudoni : Chef de clinique-assistant. délétère est reconnu à l’hyperlipidémie postprandiale.
Service d’endocrinologie, diabétologie, maladies métaboliques, centre hospitalier universitaire de Dijon,
Après un bref rappel sur le métabolisme des Lp, les mécanismes
© Elsevier, Paris
Toute référence à cet article doit porter la mention : Brun JM et Rudoni S. Dyslipidémies. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0110, 1999, 9 p.
19-0110 Dyslipidémies Angéiologie
et/ou de thrombose seront étudiés avant d’envisager les effets des LDL de petite taille et denses (densité supérieure à 1,038)
bénéfiques des thérapeutiques en prévention primaire et secondaire. (pattern B). Plusieurs études ont mis en évidence une association
entre la présence de LDL denses et le risque coronaire [6, 85]. Les
LDL petites et denses sont particulièrement riches en triglycérides
Métabolisme des lipoprotéines et il est clairement établi que l’hypertriglycéridémie s’accompagne
d’une augmentation significative du nombre de particules LDL
petites et denses. Dans l’étude SCRIP (Stanford coronary risk
MÉTABOLISME GÉNÉRAL
intervention project), 90 % des sujets ayant des LDL denses avaient
Les lipides sont solubilisés dans le plasma grâce à une fraction des triglycérides plasmatiques supérieurs à 1,81 mmol/L [59]. Dans
protéique : l’apoprotéine. La particule constituée est appelée Lp. cette même étude, une amélioration des scores angiographiques,
Toutes ces Lp contiennent un noyau central formé de cholestérol sous traitement hypolipidémiant, n’était observée que chez les
estérifié et de triglycérides, une couronne périphérique formée patients ayant initialement des LDL denses [59]. Les LDL denses,
d’apoprotéine, de phospholipides et de cholestérol libre. Il existe enrichies en triglycérides, apparaissent plus athérogènes, en raison
cinq classes de Lp qui diffèrent selon leur contenu lipidique et le de leur oxydabilité accrue et de leur captation préférentielle par
type d’apoprotéine : les récepteurs scavenger des macrophages, donnant naissance aux
cellules spumeuses dont l’accumulation forme la strie lipidique, lit
– les chylomicrons ; du développement de la plaque d’athérosclérose [7].
– les Lp de très faible densité ( very low density lipoproteins Les LDL oxydées interviennent à la fois dans l’athérome (formation
[VLDL]) ; de plaques lipidiques focales), et dans l’artériosclérose
– les Lp de densité intermédiaire (intermediate density lipoproteins (modifications de la paroi vasculaire avec l’âge) [26, 44, 90]. Cette
[IDL]) ; oxydation physiopathologique provient en partie de la richesse
relative de ces Lp en acides gras polyinsaturés, en particulier
– les Lp de basse densité (LDL) ; l’acide linoléïque. La modification oxydative des LDL
– les Lp de haute densité (HDL). s’accompagne d’une fragmentation de l’apoB100. La LDL modifiée
Après absorption des graisses alimentaires, le chylomicron n’est alors plus reconnue par son récepteur spécifique ApoB/E,
constitue la première Lp circulante. Sous l’action de la Lp lipase, il mais plutôt par un récepteur dit scavenger présent à la surface des
est transformé en une molécule plus petite et moins riche en monocytes et des macrophages. Ce dernier n’est pas rétrorégulé, à
triglycérides : le remnant. Ce dernier est reconnu par un récepteur la différence du récepteur ApoB/E des LDL natives, ce qui aboutit
spécifique de l’apoE au niveau hépatique où il est dégradé. Le foie à l’accumulation massive des Lp dans ces cellules en surcharge,
fabrique de nouvelles Lp, les VLDL, qui sous l’action de la Lp désignées sous le nom de cellules spumeuses. Elles correspondent
lipase, se transforment en IDL. Ces dernières sont reconnues au macroscopiquement à la strie lipidique, lésion initiale de
niveau hépatique par un récepteur spécifique des apoB/E, et sont l’athérosclérose. [27]. Ces stries lipidiques sont retrouvées chez des
catabolisées. D’autres IDL sont transformées en LDL par la lipase enfants à partir de l’âge de 10 ans. Les LDL modifiées acquièrent
hépatique. Ces LDL sont reconnues par le même récepteur. Leur des propriétés biologiques délétères. En particulier, elles exercent
catabolisme, aboutissant au dépôt intracellulaire de cholestérol une cytotoxicité directe sur les cellules endothéliales en modifiant
libre, a pour conséquence de réprimer la synthèse intracellulaire l’action de l’oxyde nitrique qui régule le tonus vasculaire et inhibe
de cholestérol. Les HDL sont fabriquées par le foie, mais l’adhésion leucocytaire et plaquettaire. Les LDL modifiées
proviennent également en partie de l’hydrolyse directe des modulent la synthèse de nombreuses cytokines et facteurs de
chylomicrons et des VLDL. Ces HDL vont capter le cholestérol croissance proathérogènes au niveau des macrophages et des
libre membranaire des cellules périphériques et le ramener au foie cellules musculaires lisses [28, 71]. L’augmentation des taux circulants
où il sera catabolisé en acides biliaires et éliminé dans le cycle de LDL favorise le vieillissement vasculaire en accélérant
entérohépatique. Il faut souligner l’importance des apoprotéines : l’épaississement diffus de la paroi. Il est constaté une augmentation
ce sont elles en effet qui sont reconnues par le récepteur spécifique de la fixation du calcium dans les fibres élastiques, facteur
des membranes basales cellulaires. Certaines ont des rôles important de la perte de l’élasticité des vaisseaux [70]. Par ailleurs,
particulièrement importants. Ainsi, l’apoC 2 est le cofacteur l’enrichissement cellulaire en Lp athérogènes augmente la synthèse
d’activation de la Lp lipase ; l’apoA-I, surtout présente dans les d’élastase par les cellules musculaires lisses. D’autres facteurs de
HDL-2, active la lécithine cholestérol-acyl transférase, enzyme clé risque associés à ces anomalies lipidiques aggravent les
du transport reverse du cholestérol. Cette apoA-I est liée au HDL-2, phénomènes oxydatifs, en particulier le tabagisme [74].
fraction antiathérogène du cholestérol. À l’inverse, l’apoB,
constituant essentiel des LDL, est en quelque sorte un marqueur ¶ HDL-cholestérol
de la fraction athérogène du cholestérol. Dans les
La relation inverse entre le niveau de HDL-cholestérol et le risque
hypercholestérolémies, le taux des LDL et leur temps de séjour
cardiovasculaire est largement démontrée par toutes les grandes
dans le plasma augmentent, ce qui favorise leur oxydation.
études épidémiologiques prospectives. Il est à noter que cette
relation inverse est particulièrement forte chez la femme, comme
[1, 31, 57, 83, 89]
RÔLE DANS L’ATHÉROME l’a montré l’étude de Framingham [25]. Ainsi, il apparaît clairement
que les sujets présentant une diminution du HDL-cholestérol ont
¶ LDL-cholestérol un risque cardiovasculaire accru [52].
Il est établi depuis longtemps, grâce à de nombreuses études
épidémiologiques, dont celle de Framingham et l’étude MRFIT ¶ Triglycérides
(Multiple risk factor intervention trial ), que le taux de LDL- Il existe aujourd’hui un consensus international établissant des
cholestérol est un facteur de risque cardiovasculaire puissant. À liens solides entre triglycérides et maladie cardiovasculaire
côté des anomalies quantitatives du LDL-cholestérol, de [5, 14, 15, 18, 41, 46, 61, 88]
. L’étude de Framingham a notamment
nombreuses données se sont accumulées, au cours des dernières individualisé un sous-groupe à haut risque coronarien associant
années, sur le rôle potentiellement athérogène de certaines hypertriglycéridémie et taux bas de HDL-cholestérol [24]. La baisse
modifications qualitatives des LDL, en particulier les modifications du HDL-cholestérol accompagne en effet la plupart des
de leur taille et leur oxydation. hypertriglycéridémies. L’hypertriglycéridémie entraîne de plus des
On décrit globalement deux types de particules LDL : des LDL de modifications athérogènes de la structure des LDL. Bien que les
grande taille, légères, de densité inférieure à 1,038 (pattern A), et liens entre triglycérides et maladies cardiovasculaires ne soient pas
2
Angéiologie Dyslipidémies 19-0110
aussi forts que ceux qui existent avec le LDL-cholestérol, la relation athérogènes et thrombogènes. En effet, l’hypertriglycéridémie
entre risque vasculaire et hypertriglycéridémie a bien été admise s’accompagne d’une augmentation des VLDL-remnants qui sont
depuis 1991 [61, 88]. préférentiellement captés par les récepteurs scavenger des
L’hypertriglycéridémie est, dans toutes les études macrophages, donnant naissance aux cellules spumeuses.
épidémiologiques, un important facteur de risque en analyse L’hypertriglycéridémie s’accompagne, par ailleurs, d’une
univariée. Cette relation persiste dans toutes les études quand le augmentation des LDL denses enrichies en triglycérides. En outre,
niveau de cholestérol est pris en compte. En revanche, elle disparaît l’hypertriglycéridémie, par l’intermédiaire d’une activation de la
le plus souvent lorsque l’on tient compte de plusieurs autres cholesterol ester transfer protein (CETP) entraîne un enrichissement
facteurs de risque associés (glycémie, HDL, tension artérielle, en triglycérides des HDL, avec pour conséquence un accroissement
poids...). Ce résultat tient à la difficulté des études de leur catabolisme et une diminution de leur efficacité dans la
épidémiologiques en matière de triglycérides. La triglycéridémie voie de retour du cholestérol [51, 68].
est en effet un paramètre peu stable, dont la distribution n’est pas Il apparaît probable que le dosage de triglycérides, après charge
normale. Le dosage des triglycérides est techniquement moins en lipides, soit un bien meilleur marqueur du risque
fiable que celui du cholestérol et est environ trois fois plus variable cardiovasculaire. Une association entre la triglycéridémie, après
d’un instant à l’autre au cours du nycthémère et d’un jour sur charge en lipides, et le risque coronaire est retrouvée dans
l’autre. De plus, bon nombre d’études épidémiologiques n’ont pas plusieurs études [32, 43, 48, 63]. Les charges en lipides pourraient être
été faites à jeun. Enfin, ces études ont regroupé des pathologies intéressantes pour dépister les patients présentant une
hétérogènes dans lesquelles les hypertriglycéridémies sont le plus hypertriglycéridémie postprandiale, alors que leur niveau de
souvent associées à de nombreux autres facteurs de risque. triglycérides à jeun reste normal. Ces derniers ont, en effet, un
L’hypertriglycéridémie est un facteur de risque plus ou moins fort risque cardiovasculaire accru.
suivant la pathologie et la population concernée. Ainsi, les
triglycérides apparaissent souvent, en analyse multivariée, comme RÔLE DANS LA THROMBOSE
un facteur de risque chez la femme. Le risque est toujours plus
élevé dans les sous-groupes dont le niveau de HDL-cholestérol est L’oxydation des LDL augmente l’agrégabilité plaquettaire, ce qui
bas (< 40 mg/dL). entraîne une diminution de la sérotonine intraplaquettaire et une
augmentation de la biodisponibilité de la sérotonine.
Les données les plus récentes sont celles de la dernière méta-
L’hypersérotoninémie favorise la prolifération cellulaire et la
analyse de Austin [45] , qui porte sur 17 études prospectives
vasoconstriction [8]. Une vasoconstriction plus importante stimule
intéressant 46 400 hommes et 10 864 femmes avec un suivi de 8 ans.
l’activité de l’enzyme responsable de la synthèse d’histamine ;
En analyse univariée, toute élévation de 1 mmol/L (0,87 g/L) des
l’hyperhistaminémie augmente la perméabilité vasculaire et
triglycérides augmente le risque coronaire de 32 % chez l’homme
modifie en retour la tonicité vasculaire. L’augmentation de la
et de 76 % chez la femme. Après ajustement sur l’ensemble des
production de ces facteurs tissulaires favorise la formation de
paramètres, y compris le HDL-cholestérol, les triglycérides restent
thrombus en regard de la plaque athéromateuse, a fortiori si elle
un facteur de risque indépendant : toute élévation de 1 mmol/L
est à risque fissuraire. Les plaques les plus exposées à la fissuration
augmente le risque coronaire de 14 % chez l’homme, et de 37 %
sont celles qui ont un cœur riche en lipides extracellulaires
chez la femme. Cela rejoint les conclusions de l’étude de
(> 40 %). Ce type de plaques est fréquemment rencontré au niveau
Framingham [25] où les sujets qui font le plus souvent un infarctus
des artères coronaires. Les grandes fissurations de plaques
du myocarde sont ceux qui ont une hypertriglycéridémie avec une
conduisent à la perte de l’enveloppe qui laisse échapper le contenu
diminution du HDL, et celles de l’étude PROCAM (Prospective
lipidique. Le cratère formé se comble partiellement d’un thrombus.
cardiovascular munster study) où un suivi de 4 849 hommes,
Ce dernier phénomène survient plus volontiers au niveau de
pendant 8 ans, confirme que les triglycérides représentent un
l’aorte et des carotides, source d’embolie distale [29].
facteur de risque coronaire indépendant [4]. À taux de cholestérol
total, LDL et HDL-cholestérol équivalents, les sujets ayant un taux D’autre part, l’hypertriglycéridémie paraît favoriser la
de triglycérides supérieur à 2 g ont un risque coronaire augmenté thrombogenèse, dans la mesure où elle s’associe à une
de 50 % par rapport à ceux qui ont un taux inférieur à 1,50 g. augmentation du facteur VII, de l’activité coagulante du facteur X
et du PAI1 (inhibiteur de l’activateur du plasminogène). Par
Par ailleurs, de nombreuses études de régression de plaques
ailleurs, les VLDL augmentent l’expression de l’activité
comme l’étude CLAS (Cholesterol lowering atherosclerosis study),
procoagulante des monocytes[12].
l’étude Nicardipine, l’étude MARS (Monitored atherosclerosis
regression study), l’étude POSCH (Program on the surgical control
of hyperlipidemia ), ont mis en évidence une association entre
l’hypertriglycéridémie et/ou les Lp riches en triglycérides d’une
Dyslipidémies
part, et la progression des plaques d’athérosclérose, d’autre part [11,
19] . En outre, l’hypertriglycéridémie apparaît, dans plusieurs
HYPER-LDL-ÉMIES
travaux, comme un facteur de resténose des greffons de pontage Elles sont principalement rencontrées dans l’hypercholestérolémie
coronaire. familiale, (type IIa de la classification de Fredrikson), mais il existe
Les études d’intervention nous apportent aussi un éclairage des formes acquises. Les formes familiales homozygotes
intéressant. En effet, dans l’étude d’Helsinki, la diminution de (1/1 000 000 cas) et hétérozygote (1/500 cas) sont essentiellement
l’incidence d’accidents coronaires n’est observée que dans le liées à des mutations du récepteur des LDL. On décrit plus de
groupe de patients présentant initialement une hyperlipidémie 50 mutations différentes qui aboutissent à quatre grandes classes
mixte avec augmentation conjointe du cholestérol total et des d’anomalies : absence de récepteurs, défaut de transport, défaut de
triglycérides [55]. Dans la Stockholm ischaemic heart disease study, la liaison aux Lp, défaut d’internalisation des LDL [9]. Ces anomalies
diminution des décès d’origine ischémique n’est observée que chez ont pour effet d’augmenter la concentration sanguine des LDL. Les
les patients ayant initialement des triglycérides supérieurs à VLDL sont sécrétées par le foie et transformées en IDL. Chez le
1,31 g/L, et apparaît plus marquée chez ceux ayant une réduction sujet normal, les IDL sont pour moitié transformées en LDL, et
du taux de triglycérides, sous traitement, supérieure à 30 % [23]. pour moitié captées par des récepteurs hépatiques. En cas de
Globalement dans cette étude, la diminution du risque déficience de ces derniers, les IDL ont un temps de séjour
cardiovasculaire apparaît proportionnelle à la baisse du chiffre de plasmatique augmenté, elles se transforment en LDL qui seront
triglycéridémie. captées et dégradées plus lentement.
Plusieurs données expérimentales laissent penser que Il existe d’autres anomalies génétiques, telles que l’hyper-bêta-
l’hypertriglycéridémie pourrait avoir des conséquences lipoprotéinémie familiale (type III de la classification de
3
19-0110 Dyslipidémies Angéiologie
Fredrikson). Dans cette forme, une apoB100 anormale est le plasminogène. La Lp(a) entre en compétition avec ce dernier
responsable d’une mauvaise reconnaissance des LDL par leurs pour la liaison aux cellules et à la fibrine. La Lp(a) inhiberait ainsi
récepteurs et d’un ralentissement de leur catabolisme avec les possibilités d’activation du plasminogène. Ces effets ont bien
accumulation d’une Lp de densité intermédiaire se traduisant par été démontrés in vitro [91]. En diminuant l’activité de la plasmine,
une augmentation parallèle des taux de cholestérol total et de la Lp(a) pourrait inhiber l’activation du transforming growth factor
triglycérides dans les dosages plasmatiques beta (TGF-bêta) et favoriser ainsi la prolifération, la migration et
On décrit également une hyper-LDL-émie chez des sujets porteurs l’activation des cellules musculaires lisses et vasculaires. Les
de l’isoforme allélique e4 du gène de l’apoE. Les sujets porteurs de isoformes de plus petite taille prédominante auraient une affinité
l’allèle e4 auraient une clairance des remnants augmentée avec, en plus élevée pour la fibrine, et par conséquent, un effet
rétrocontrôle, une diminution du nombre des récepteurs B/E et antifibrinolytique plus prononcé [3]. Chez 94 % des sujets, il existe
une augmentation secondaire des LDL plasmatiques. une hétérozygotie allélique, et l’effet antifibrinolytique serait lié au
Il existe par ailleurs une mutation de l’apoE2 touchant la région de rapport existant entre la concentration des deux isoformes et leur
fixation aux récepteurs, entraînant également une affinité relative pour la fibrine vis-à-vis du plasminogène.
hyper-LDL-émie [76]. Il n’existe actuellement aucune thérapeutique susceptible de
Les hyper-LDL-émies peuvent être associées à une diminuer isolément et spécifiquement le taux de Lp(a). Deux
hypertriglycéridémie par augmentation des VLDL dans le cadre études récentes [54, 84] ont montré qu’une diminution du taux de
d’une hyperlipidémie mixte ou combinée (type IIb de Fredrikson). LDL seul, grâce à un traitement par statine, permet de stabiliser,
Dans ces dyslipidémies, au risque athérogène des LDL s’ajoute voire de faire régresser l’athérosclérose coronarienne chez des
celui des triglycérides. sujets initialement porteurs d’un taux élevé de Lp(a).
HYPO-HDL-ÉMIES
Traitement des dyslipidémies
Les HDL sont hétérogènes, particulièrement dans leur composition
en apoA. L’apoA1, apoprotéine essentielle des HDL-2 est un
et prévention de l’athérosclérose
marqueur de protection cardiovasculaire. Elle exerce un rôle
antioxydatif vis-à-vis des LDL. Dans l’hypo-HDL-émie, c’est le Les études interventionnelles de ces 15 dernières années, et en
taux d’HDL-2 qui est le plus souvent diminué avec augmentation particulier les plus récentes, nous ont apporté des renseignements
relative des autres sous-fractions des HDL. L’hypo-HDL-émie est précieux pour la prise en charge des patients hyperlipidémiques,
très souvent associée à une hypertriglycéridémie et/ou une hyper- en prévention primaire et en prévention secondaire.
LDL-émie. Certains déficits génétiques en apoA1 entraînent une
hypo-HDL-émie isolée ; celle-ci est fortement athérogène. ÉTUDES DE PRÉVENTION PRIMAIRE
4
Angéiologie Dyslipidémies 19-0110
d’infarctus du myocarde et/ou d’angine de poitrine, a nettement n’est observé que chez les patients ayant initialement un taux de
montré, dans le groupe traité par simvastatine, une réduction très LDL-cholestérol supérieur à 1,25 g/L. Ainsi, l’étude CARE permet
significative de la mortalité coronaire (– 42 %), des événements une meilleure définition du patient à traiter qui apparaît être celui
coronaires majeurs (– 34 %), mais aussi de la mortalité totale présentant un LDL-cholestérol supérieur à 1,25 g/L [72].
(– 30 %) [34]. Ainsi, l’étude de 4S, en démontrant dans la population
traitée une réduction non seulement de la mortalité ÉTUDES DE RÉGRESSION
cardiovasculaire, mais aussi de la mortalité globale, a mis fin à une
polémique mettant en doute l’efficacité réelle des Leurs caractéristiques sont résumées dans le tableau I. Toutes ces
hypolipidémiants. La méta-analyse de quatre études de prévention études montrent une régression de l’athérosclérose
secondaire réalisée avec la pravastatine (pravastin limitation of significativement plus importante dans le groupe traité que dans
artheriosclerosis in the coronary artery study [PLAC] I, PLAC II, le groupe témoin.
regession growth evaluation statin study [REGRESS], Cardiac Il est frappant de constater, dans toutes les études de régression de
arhythmia pilot study [CAPS] met en évidence une réduction très plaques d’athérome, une discordance entre la réduction modérée
significative de 62 % des infarctus mortels et non mortels, une des plaques d’athérome, sous traitement hypolipidémiant, et la
réduction de 46 % de la mortalité totale, et une diminution des diminution nette des événements cliniques cardiovasculaires [13]. En
accidents vasculaires cérébraux mortels de 62 % [22, 47, 65, 66]. Un des outre, plusieurs études anatomopathologiques font apparaître que
faits les plus marquants de cette méta-analyse est l’observation 70 % des infarctus du myocarde sont liés à des sténoses inférieures
d’un effet précoce du traitement par pravastatine, dans la mesure à 50 %, alors que les sténoses graves supérieures à 70 % ne
où les courbes de survenue d’accidents coronaires entre les patients représentent que 15 % des cas de nécroses myocardiques [39]. C’est
traités et non traités s’écartent dès le sixième mois. Ces résultats à partir de ces observations qu’ont été définies les notions
plaident pour une action propre des statines sur la plaque anatomopathologiques de plaques d’athérosclérose, à risque élevé
d’athérosclérose, la fonction endothéliale et la thrombose qui ou faible d’accidents ischémiques aigus. Les plaques
s’ajouterait à son action hypocholestérolémiante. En effet, plusieurs d’athérosclérose à risque élevé sont constituées d’un cœur lipidique
études in vitro ont montré que les statines réduisaient la riche, d’une capsule fibreuse fine et fragile, et d’une augmentation
multiplication et la prolifération des cellules musculaires lisses. du nombre des macrophages. Elles sont particulièrement fragiles
Chez l’animal, les statines augmentent le collagène avec pour avec un risque de fissuration élevé. Lorsqu’une telle plaque
conséquence une stabilisation des plaques d’athérosclérose. Une d’athérosclérose se fissure, une thrombose se produit localement
diminution de la réponse inflammatoire (et plus particulièrement aboutissant à l’obstruction aiguë de l’artère. Les plaques
macrophagique) est observée, in vitro, sous l’effet d’athérosclérose à risque représentent 10 à 20 % des lésions, mais
d’hypolipidémiant. D’une part, certains hypolipidémiants ont une sont responsables de 80 à 90 % des événements cliniques. Une
action antithrombogène. D’autre part, l’hypercholestérolémie étude anatomopathologique publiée en 1997, réalisée chez
s’associe à une dysfonction endothéliale avec une diminution de la 113 hommes décédés d’infarctus du myocarde, fait apparaître que
vasodilatation induite. Sous traitement hypocholestérolémiant, il les ruptures de plaques sont essentiellement observées chez les
est constamment observé une amélioration nette de la fonction patients ayant un taux de cholestérol élevé et un rapport
endothéliale avec restauration d’une vasodilatation induite cholestérol total/HDL-cholestérol augmenté [20]. L’effet précoce des
normale [86]. Tous ces résultats amènent à se poser la question de hypolipidémiants et plus particulièrement des statines sur la
savoir s’il ne serait pas utile de traiter, en prévention secondaire, réduction d’événements cliniques semble être aussi lié à une
tous les patients par une statine. La récente étude Cholesterol and modification de la structure des plaques d’athérosclérose qui ont
recurent events trial (CARE) permet en partie de répondre à cette tendance, sous traitement, à devenir plus stables et à risque de
question. En effet, cette étude multicentrique de prévention fissuration faible. En effet, il est observé, sous traitement
secondaire ayant étudié 4 159 sujets aux antécédents d’infarctus du hypolipidémiant, une diminution significative des lipides au sein
myocarde porteurs d’une hypercholestérolémie modérée de la plaque, ainsi qu’un épaississement de la capsule fibreuse.
(cholestérol total inférieur à 2,40 g/L et LDL-cholestérol moyen
1,39 g/L), a mis en évidence une diminution significative des ÉTUDES D’INTERVENTION ET POPULATIONS
événements coronaires mortels ou non de 24 % (p = 0,002), une PARTICULIÈRES
diminution des infarctus du myocarde mortels de 37 % (p = 0,01)
et une diminution de la nécessité d’un geste (pontage ou ¶ Chez les femmes
angioplastie) de 27 % (p = 0,0001) [36, 37]. Lorsque l’on analyse plus
précisément les résultats en tenant compte du taux initial de LDL- L’étude de Framingham a nettement mis en évidence un lien entre
cholestérol, on s’aperçoit que l’effet du traitement par pravastatine les lipides et le risque cardiovasculaire chez la femme [25]. Dans la
Tableau I. – Études de régression de l’athérosclérose [16, 21, 25, 29, 33, 53].
BECAIT REGRESS PLAC I MAAS
Nombre de patients 81 653 320 341
Effet du traitement
LDL-cholestérol -2% - 29 % - 28 % - 31 %
Amélioration du diamètre + 64 % + 67 % + 67 % + 69 %
artériel
BECAIT : Bezafibrate coronary atherosclerosis intervention trial ; MAAS : Multicentre antiatheroma study ; PLAC I : Pravastatin limitation of atherosclerosis in the coronary artery study ; REGRESS : Regression growth evaluation statin study.
5
19-0110 Dyslipidémies Angéiologie
population féminine, la relation inverse entre le HDL-cholestérol la population non diabétique. Nous attendons avec intérêt les
et le risque cardiovasculaire est particulièrement forte, alors que résultats d’études prospectives en cours, visant à déterminer si le
l’association positive entre le LDL-cholestérol et le risque traitement des anomalies lipidiques propres au diabète
d’accident coronaire est plus faible, bien que significative. Par (hypertriglycéridémie, hypo-HDL-émie) est susceptible de réduire
ailleurs, les triglycérides sont chez la femme un facteur de risque le risque cardiovasculaire du patient diabétique [15].
indépendant [2]. Les résultats des études de prévention secondaire
ayant inclus des femmes, comme l’étude 4S ou l’étude CARE, PRISE EN CHARGE THÉRAPEUTIQUE
montrent un bénéfice sur la réduction de la morbidité et de la
mortalité cardiovasculaires aussi importante chez la femme que ¶ Place de la diététique
chez l’homme [64, 72]. En revanche, les données sur les études de
prévention primaire, chez la femme, sont rares. L’étude de Si les résultats des grandes études d’interventions primaire et
prévention primaire de Miettinen et Turpeinen, à l’aide d’un secondaire ont nettement montré l’efficacité des hypolipidémiants
régime hypocholestérolémiant, objective une réduction significative à réduire le risque cardiovasculaire, nous ne devons pas ignorer
du risque cardiovasculaire, aussi bien chez l’homme que chez la les résultats intéressants des études d’intervention diététique.
femme [58]. Jusqu’à présent, les grandes études de prévention Plusieurs travaux ont clairement montré que les régimes riches en
primaire médicamenteuse, telles l’étude LRC-CPPT (Lipid research fruits et légumes réduisaient la mortalité coronaire de 24 % [49], et
clinics coronary primary prevention trial) et l’étude d’Helsinski ou la survenue d’accidents vasculaires cérébraux de 26 % [38]. Ces
WOSCOPS, ne comportaient pas de femmes. Cependant, la récente résultats confirment ceux de l’étude des sept pays, qui avait montré
étude de prévention primaire AFCAPS/TEXCAPS qui comprenait une mortalité coronaire plus faible dans les pays ayant une
997 femmes a mis en évidence un bénéfice clinique significatif chez alimentation riche en végétaux [50]. L’effet protecteur des fruits et
les femmes traitées par lovastatine. Ainsi, si le bénéfice d’un légumes pourrait être lié à leur richesse en vitamines antioxydantes
traitement hypolipidémiant est clairement montré en prévention et en fibres [69, 77, 80]. Il se pourrait aussi que la richesse en arginine
secondaire, chez la femme, il apparaît hautement probable en de certains aliments (noix, poissons, protéine végétale) puisse
prévention primaire. rendre compte de leur effet cardioprotecteur, en favorisant la
production locale d’oxyde nitrique (NO) [79]. L’étude de prévention
¶ Chez les sujets âgés primaire menée par Miettinen et Turpeinen a montré qu’un régime
hypocholestérolémiant réduisait le taux plasmatique de cholestérol
En ce qui concerne le traitement hypolipidémiant des sujets âgés,
de 10,5 % et la mortalité cardiovasculaire de 50 %, sur un suivi de
les études des sous-groupes de patients de plus de 60 ans des
12 années [58]. L’étude de prévention secondaire Lyon diet heart
études 4S et CARE ont nettement mis en évidence un bénéfice
[64, 72] study a mis en évidence une réduction de 70 % de la mortalité
clinique . Ainsi, il apparaît licite de traiter toute
coronaire chez les patients sous régime méditerranéen, riche en
hypercholestérolémie, même chez un sujet âgé, en prévention
acide a-linolénique, en l’absence de toute modification significative
secondaire. En revanche, en prévention primaire, les données
du taux des lipides plasmatiques [30]. Ces résultats indiquent que
d’étude sont peu nombreuses. Si l’analyse d’un sous-groupe de
l’alimentation est susceptible d’avoir des effets positifs dépassant
l’étude WOSCOPS, de patients âgés de plus de 55 ans, met en
une simple action sur les Lp plasmatiques (susceptibilité des Lp à
évidence une réduction significative des accidents
l’oxydation, fonction endothéliale, thrombose…). Ainsi, la part que
cardiovasculaires dans le groupe traité, il faut cependant
doit prendre la diététique dans la prévention des maladies
reconnaître que ces patients n’étaient pas très âgés, dans la mesure
cardiovasculaires est essentielle aussi bien en prévention
où ils avaient tous moins de 64 ans [78]. Ainsi, même si l’analyse de
secondaire que primaire. Mais il faut savoir que l’application des
Gordon et Rifkind à partir des données des études de Framingham
mesures diététiques par le patient ne sera effective que si une
et MRFIT laisse penser qu’un traitement de l’hypercholestérolémie
éducation efficace et motivante lui est proposée.
en prévention primaire, dans la population âgée, aboutirait à une
réduction des événements cardiovasculaires aigus, nous ne Des résultats similaires sont obtenus dans la Lifestyle heart
disposons pas encore de la certitude de grandes études study [62]. Les patients soumis à un régime hypocholestérolémiant
d’intervention [40]. et riche en fibres ont arrêté de fumer et pratiquent une activité
physique régulière. Ils présentent après 1 an, une régression
¶ Chez les diabétiques significative des lésions coronaires angiographiques.
6
Angéiologie Dyslipidémies 19-0110
Tableau II. – Valeurs seuils de décisions thérapeutiques définies par le groupe de l’ANDEM.
Valeur d’instauration Valeur d’instauration
Catégorie de patients ayant une élévation
du traitement Valeur cible du traitement Valeur cible
du LDL-cholestérol
diététique médicamenteux
Prévention primaire des hommes de moins de 45 ans
pas d’indication
ou des femmes non ménauposées n’ayant aucun ≥ 2,20 g/L (5,7 mmol/L) < 1,60 g/L (4,1 mmol/L)
en première intention
autre facteur de risque
Prévention primaire des hommes de moins de 45 ans ≥ 2,20 g/L (5,7 mmol/L)
ou des femmes non ménauposées n’ayant aucun malgré une diététique < 1,60 g/L (4,1 mmol/L)
autre facteur de risque après échec de la diététique suivie pendant 6 mois
* Chez les sujets jeunes avec antécédents d’accident vasculaire cérébral (AVC) ou d’infarctus, cet objectif peut être abaissé à 1 g/L.
Ces objectifs peuvent, à l’inverse, être considérés avec nuance, chez les sujets âgés à espérance de vie réduite.
HVG : hypertrophie ventriculaire gauche
correctement contrôlés [56]. L’étude EUROASPIRE met en évidence, importants. De nombreuses études épidémiologiques ont montré le rôle
dans la population européenne étudiée, que 52 % des patients athérogène des LDL, en particulier sous leurs formes oxydées, telles que
hypercholestérolémiques traités en prévention secondaire n’ont pas l’on les trouve dans la plupart des hypercholestérolémies. Ces anomalies
normalisé leur bilan lipidique [35]. Une étude américaine récente lipidiques s’accompagnent souvent d’une diminution des HDL, et
montre que les prescriptions d’hypolipidémiants sont inadéquates surtout de la fraction HDL-2, dont le pouvoir protecteur vis-à-vis de
ou insuffisantes dans 38 % des cas [82]. Par ailleurs, le niveau de l’athérosclérose est bien admis. L’hypertriglycéridémie, par elle-même,
compliance des patients, déjà faible dans les études contrôlées, est mais aussi par l’hypo-HDL-émie et les anomalies qualitatives des LDL
extrêmement bas dans la population générale. Le manque qui l’accompagnent, et par les troubles de l’hémostase qu’elle induit,
d’informations données aux patients et la quasi-absence est un facteur de risque vasculaire qu’il faut également prendre en
d’éducation sur la diététique et les facteurs de risque sont compte. D’autres marqueurs de risque tels que la présence en excès de
vraisemblablement une des explications à cette faible compliance. la Lp(a) et l’hyperlipidémie postprandiale peuvent jouer un rôle dans
L’éducation du patient sur les facteurs de risque apparaît l’athérothrombogenèse. Enfin, l’existence de facteurs de risque associés,
indispensable si l’on souhaite qu’il adhère à la prise en charge tels que le tabagisme, l’hypertension artérielle ou le diabète, aggravent
thérapeutique. Des conseils antitabac donnés de « façon intensive » considérablement le risque cardiovasculaire. Les grandes études de
permettent d’obtenir l’arrêt de l’intoxication tabagique chez 60 % préventions primaire et secondaire ont bien montré qu’un traitement
des patients, contre 28 % dans un groupe recevant des conseils adapté des dyslipidémies réduit la morbimortalité cardiovasculaire, en
« classiques » [21].
particulier coronarienne, et la mortalité globale. Les modalités de prise
en charge thérapeutique des patients hyperlipidémiques doivent tenir
Conclusion compte du type d’anomalie lipidique observé, mais aussi des autres
facteurs de risque associés. La prévention du risque vasculaire global
Les facteurs de risque de l’athérosclérose sont de mieux en mieux implique une collaboration pluridisciplinaire entre cardiologues,
identifiés. Parmi ceux-ci, les dyslipidémies jouent l’un des rôles les plus angiologues, hypertensiologues et endocrinologues.
Références ➤
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19-0110 Dyslipidémies Angéiologie
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9
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0020
19-0020
Embryologie vasculaire
L Houyel
Résumé.– Les angioblastes, précurseurs des cellules endothéliales vasculaires, apparaissent dès le 17e
jour de vie intra-utérine à partir du mésoderme de la splanchnopleure, au niveau des îlots sanguins.
Ceux-ci fusionnent pour former les vaisseaux embryonnaires (vasculogenèse). L’angiogenèse, formation
de cellules endothéliales à partir de vaisseaux déjà existants, participe ensuite au développement
vasculaire. Ces deux mécanismes sont régulés par des facteurs de croissance présents au niveau des
cellules endothéliales elles-mêmes. Le système vasculaire se développe de façon centrifuge. Les premiers
arcs aortiques apparaissent dès le 23e jour de vie intra-utérine. Les veines se développent à partir du 26e
jour de vie intra-utérine. Les lymphatiques apparaissent un peu plus tard, à la cinquième semaine du
développement embryonnaire. Le système vasculaire embryonnaire est achevé vers le deuxième mois de
vie intra-utérine.
© Elsevier, Paris.
Lucile Houyel : Cardiopédiatre, service de chirurgie des cardiopathies congénitales (Professeur Claude
Planché), hôpital Marie-Lannelongue, 133, avenue de la Résistance, 92350 Le Plessis-Robinson, France. craniocaudal mais ne sont jamais tous présents simultanément. Il
Toute référence à cet article doit porter la mention : L Houyel. Embryologie vasculaire. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0020, 1997, 7 p.
19-0020 Embryologie vasculaire Angéiologie
2
Angéiologie Embryologie vasculaire 19-0020
4 10
Développement du système veineux
5
9 L’embryon de 4 mm (horizon XII) possède trois paires de veines
6 principales (fig 3) : deux systèmes veineux à l’origine extra-
embryonnaires, les veines vitellines ou omphalomésentériques, qui
8 drainent le sang du yolk sac (vésicule vitelline ou sac vitellin) vers
le sinus venosus, et les veines ombilicales, qui prennent naissance
dans les villosités choriales et ramènent à l’embryon le sang
7 oxygéné à travers le placenta, et le système de drainage veineux
principal, les veines cardinales, qui drainent le corps de l’embryon
proprement dit [6].
2 Système des arcs aortiques embryonnaires [1]. Les arcs destinés à disparaître sont
indiqués en gris clair. 1. Deuxième arc aortique ; 2. aorte ventrale ; 3. artère pulmo-
naire droite ; 4. artère vertébrale ; 5. artère sous-clavière droite ; 6. artère mammaire VEINES VITELLINES
interne ; 7. première artère intercostale ; 8. artère intercostale supérieure ; 9. septième
artère intercostale intersegmentaire ; 10. aorte dorsale ; 11. sixième arc aortique ; 12. Ce sont les premières veines à apparaître. Elles prennent naissance
quatrième arc aortique ; 13. troisième arc aortique ; 14. premier arc aortique. dans le mésoderme de la splanchnopleure, dans la paroi de la
vésicule vitelline. Elle forment un plexus veineux autour de l’anse
intestinale primitive ou futur duodénum, puis entrent dans le
DESCENTE DU CŒUR DANS LE THORAX septum transversum avant de former, avec les veines ombilicales,
le sinus veineux primitif (fig 4, A). Les veines vitellines, structures
À un stade très précoce de l’embryogenèse, le truncus se trouve à paires à l’origine, se développent en dedans des veines ombilicales.
une distance d’environ deux segments (équivalents de deux Au niveau du septum transversum, leur trajet est interrompu par
vertèbres) en amont du premier somite. Dans le cœur définitif, les la prolifération des cordons hépatiques, conduisant à la formation
dérivés du truncus se trouvent au niveau de la cinquième vertèbre d’un important réseau veineux, les sinusoïdes intra-hépatiques (fig
thoracique, ce qui correspond à une distance de 13 vertèbres. Cette 4, B). La portion proximale de ces veines est aussi appelée canaux
migration se produit en deux phases : une phase lente (embryon hépatocardiaques. Avec l’involution de la corne gauche du sinus
2-14 mm) et une phase rapide (embryon 14-17 mm). Durant cette veineux, la veine vitelline gauche disparaît, et la circulation de la
dernière phase, le quatrième arc migre du niveau de la première moitié gauche du foie est reprise par la veine vitelline droite, qui
vertèbre cervicale au niveau des quatrième ou cinquième vertèbres
thoraciques [ 1 , 5 ] . Cette descente du cœur dans le thorax
s’accompagne de changements dans la forme des artères, 1
aboutissant à la disposition définitive des vaisseaux cervicaux.
2
L’aorte dorsale gauche est raccourcie de la longueur de quatre 12
corps vertébraux entre le sixième arc et l’artère sous-clavière, 3 11
amenant le canal artériel (résidu du sixième arc gauche) au même 10
niveau que cette dernière. L’aorte dorsale droite se retrouve étirée
et dégénère. Enfin, la portion initiale des troisième et quatrième
4
arcs droits s’allonge pour devenir le tronc artériel
brachiocéphalique et migre vers la carotide primitive gauche, se 9
situant donc au sommet de la crosse aortique. La portion ventrale 5
du quatrième arc, interposée entre le tronc artériel 8
brachiocéphalique et la jonction avec le sixième arc est largement 6
7
résorbée.
L’aorte définitive est donc formée à partir de quatre segments 3 Circulation veineuse intra- et extra-embryonnaire à la fin de la quatrième se-
embryonnaires : maine de vie intra-utérine (modifié d’après Clark EB, Van Mierop LHS. Development
of the cardiovascular system. In Moss’ Heart disease in infants, children and adoles-
– le premier, entre la valve aortique et la carotide primitive gauche, cents. Édité par Addams FH, Emmanouilides GC, Riemenschneider TA. Baltimore :
Williams and Wilkins, 1989). 1. Veine cardinale commune ; 2. veine cardinale anté-
dérivé du sac aortique ;
rieure ; 3. arcs aortiques ; 4. artère carotide interne ; 5. cœur ; 6. veine vitelline ; 7. ar-
– le second, entre la carotide primitive gauche et l’origine du canal tère vitelline ; 8. veine et artère ombilicale ; 9. chorion ; 10. villosité choriale ; 11. veine
cardinale postérieure ; 12. aorte dorsale.
artériel, dérivée du quatrième arc aortique gauche ;
3
19-0020 Embryologie vasculaire Angéiologie
6
2
7
5
11
10
11
8
9
12
14
3 13
4 Développement des veines vitellines et ombilicales (modifié d’après [6]. 1. Sinus veineux ; 2. bourgeon hépatique ; 3. duodénum ; 4. veine ombilicale ; 5. veine vitelline ; 6.
veine cardinale ; 7. sinusoïde hépatique ; 8. canal hépatocardiaque ; 9. canal veineux d’Arantius ; 10. portion hépatique de la veine cave inférieure ; 11. veines sus-hépatiques
(vitellines) ; 12. veine porte ; 13. veine mésentérique supérieure ; 14. veine splénique.
A. Quatrième semaine.
B. Cinquième semaine.
C. Deuxième mois.
D. Troisième mois.
4
Angéiologie Embryologie vasculaire 19-0020
du foie, mais rapidement des connexions se forment avec les Initialement, l’extrémité caudale de l’embryon est drainée par deux
sinusoïdes intra-hépatiques (fig 4, B). Dès l’horizon XIII (5 mm) veines cardinales postérieures longitudinales et symétriques, en
tout le sang veineux ombilical passe à travers le foie, et les portions dehors et en arrière du mésonéphros ou corps de Wolff (deuxième
proximales des veines ombilicales, situées entre le sinus veineux et ébauche rénale). Entre la cinquième et la septième semaine du
le foie, ont disparu. Le reste de la veine ombilicale droite disparaît développement, apparaissent trois groupes de veines
également, et la majorité du sang du placenta arrive aux sinusoïdes supplémentaires : les veines sous-cardinales, les veines
hépatiques par la veine ombilicale gauche. Lorsque la corne droite sacrocardinales, et les veines supracardinales.
du sinus veineux devient dominante, une communication directe, Les veines sous-cardinales apparaissent en dedans du
créée par un élargissement des sinusoïdes hépatiques, se crée entre mésonéphros, en position paramédiane. Des anastomoses se
la veine ombilicale gauche et le canal hépatocardiaque droit (future forment alors de chaque côté entre la veine cardinale postérieure
portion sus-hépatique de la veine cave inférieure) : le ductus et la veine sous-cardinale correspondante. Avec la croissance du
venosus, ou canal veineux d’Arantius, qui permet au sang veineux mésonéphros, les veines sous-cardinales droite et gauche se
placentaire de court-circuiter le foie (fig 4 C, D) . Ce canal rapprochent et une anastomose se forme entre elles, en avant de
s’oblitérera à la naissance pour former le ligament veineux l’aorte (fig 6). Cette dernière donne naissance à la veine rénale
hépatique, et la veine ombilicale gauche s’oblitérera également gauche. La veine sous-cardinale gauche involue, à l’exception de
pour former le ligament rond. sa partie distale qui devient la veine gonadique gauche. Le sang
VEINES CARDINALES
veineux du côté gauche est donc dérivé vers la veine sous-
cardinale droite qui devient le segment pararénal de la veine cave
Principal système de drainage veineux de l’embryon, les veines inférieure, situé entre l’abouchement de la veine rénale gauche et
cardinales sont constituées par les veines cardinales antérieures ou le foie. Dans le même temps, une nouvelle anastomose veineuse,
précardinales, drainant la partie céphalique de l’embryon, et les née de la confluence des sinusoïdes intra-hépatiques, permet la
veines cardinales postérieures drainant la partie caudale de continuité du segment pararénal de la veine cave inférieure avec
l’embryon et apparaissant un peu plus tard. De chaque côté, les son segment sus-hépatique, dérivé de la veine vitelline droite, en
veines antérieure et postérieure se rejoignent pour former la veine formant le segment intra-hépatique de la veine cave inférieure. Si
cardinale commune ou canal de Cuvier, avant de pénétrer dans le l’anastomose entre les deux veines sous-cardinales ne se développe
sinus veineux juste en dehors des veines ombilicales. pas normalement, le retour veineux de la partie inférieure du corps
¶ Développement des veines cardinales antérieures ne se dirigera pas vers la portion intra-hépatique de la veine cave
inférieure mais d’autres chenaux veineux se développeront,
La partie distale des veines cardinales antérieures (droite et aboutissant à une « continuité azygos de la veine cave inférieure ».
gauche) se développe en même temps que le cerveau, donnant
Les veines sacrocardinales vont drainer le sang veineux des
naissance aux sinus veineux intracrâniens (sagittal, sigmoïde et
membres inférieurs. L’anastomose entre la veine sous-cardinale
caverneux) et aux veines jugulaires internes. Les veines jugulaires
droite et ces veines va former le segment distal de la veine cave
externes se développent beaucoup plus tardivement, à partir du
inférieure (fig 5, A). L’anastomose entre les veines sacrocardinales
plexus veineux facial. Les veines des membres supérieurs se
elles-mêmes donnera naissance à l’artère iliaque primitive gauche.
drainent initialement par l’intermédiaire d’une veine
La veine sacrocardinale gauche, en aval de cette anastomose, et
intersegmentaire dans la veine cardinale postérieure. Avec la
l’anastomose entre la veine sacrocardinale gauche et la veine sous-
descente du cœur dans le thorax, les membres supérieurs sont plus
cardinale gauche disparaissent.
haut situés et la veine intersegmentaire se draine dans la veine
cardinale antérieure ; elle persistera sous le nom de veine Après l’involution des veines cardinales postérieures (chez
sous-clavière. l’embryon de 6 semaines), les veines supracardinales se développent
Relativement tard dans la formation de l’embryon, lorsque celui-ci et reprennent leur fonction, en drainant le sang veineux des parois
mesure 20 à 22 mm de long (7 semaines de vie intra-utérine), une thoracique et lombaire du corps par l’intermédiaire des veines
anastomose se développe entre les veines cardinales antérieures, intercostales. Dans la région thoracique, les veines intersegmentaires
qui donnera naissance au tronc veineux innominé ou tronc veineux qui se drainaient dans les veines cardinales postérieures se drainent
brachiocéphalique (fig 5). La plupart du sang provenant du côté dans les veines supracardinales, et des anastomoses se développent
entre les veines supracardinales droite et gauche, passant en arrière
gauche de la tête et du cou est ainsi déviée vers la droite,
de l’aorte et en avant de la colonne vertébrale. Dans la région
conduisant à l’involution de la partie distale de la veine cardinale
lombaire, les veines supracardinales s’anastomosent avec les veines
commune gauche (sa persistance : veine cave supérieure gauche).
sous-cardinales, en amont de l’anastomose inter-sous-cardinale, et
La partie proximale de la veine cardinale commune gauche et la
avec les veines sous-cardinales.
partie proximale de la corne gauche du sinus veineux deviennent
le sinus coronaire. Entre les deux ne subsiste qu’un cordon fibreux, Du côté gauche, la veine supra-cardinale est interrompue entre les
le ligament de Marshall. La partie terminale de la veine cardinale troisième et quatrième artères intersegmentaires (fig 5, B) . Les
postérieure gauche, et une petite partie de la veine cardinale seconde et troisième veines intersegmentaires se drainent donc dans
antérieure gauche qui se jette dans le tronc veineux innominé, la veine intercostale supérieure gauche, cette dernière provenant à la
subsistent sous la forme d’un petit vaisseau, la veine intercostale fois de la veine supra-cardinale gauche, de la partie proximale de la
supérieure gauche. La veine intercostale supérieure droite se draine veine cardinale postérieure gauche, et de la partie de la veine
dans la veine azygos. La veine cave supérieure définitive est cardinale antérieure gauche située entre l’abouchement de la veine
formée par la partie proximale de la veine cardinale antérieure cardinale postérieure et du tronc veineux innominé. Les quatrième à
droite et la veine cardinale commune droite. La division entre ces septième ou huitième veines intercostales se drainent dans la veine
deux segments originels est marquée par l’abouchement de la supra-cardinale gauche, qui se draine par une anastomose
veine azygos, dont la partie proximale dérive de la partie transversale dans la veine azygos. Les huitième à onzième veines
proximale de la veine cardinale postérieure droite. intercostales se drainent dans la veine supracardinale gauche pour
former la veine hémiazygos, qui se draine aussi dans la veine azygos.
¶ Développement des veines cardinales postérieures À droite, les deuxième et troisième veines intercostales se drainent
Il est beaucoup plus complexe. dans la veine azygos par l’intermédiaire d’une veine similaire,
5
19-0020 Embryologie vasculaire Angéiologie
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5 Développement de la veine cave inférieure (VCI), de la veine azygos et de la veine cave supérieure (modifié d’après [6]).
A. À la septième semaine. 1. Anastomose des veines cardinales antérieures ; 2. veine cardinale antérieure ; 3. veine cardinale commune ; 4. veine cardinale postérieure ;
5. veine sous-cardinale ; 6. segment pararénal de la veine cave inférieure ; 7. veine sacrocardinale ; 8. veine gonadique gauche ; 9. veine rénale gauche ; 10. segment hé-
patique de la veine cave inférieure ; 11. veine supracardinale.
B. À terme 1. Tronc brachiocéphalique veineux gauche ; 2. veine cave supérieure ; 3. veine azygos ; 4. segment hépatique de la VCI ; 5. segment pararénal de la VCI ; 6.
segment sacrocardinal de la VCI ; 7. veine iliaque primitive gauche ; 8. veine spermatique gauche ; 9. veine hémiazygos ; 10. sinus coronaire ; 11. veine intercostale su-
périeure gauche.
intercostale supérieure droite. Les quatrième à onzième veines de développement [6]. L’origine des vaisseaux lymphatiques est
intercostales droites se drainent dans la veine supracardinale droite encore controversée : naissance à partir du mésenchyme
qui, avec la partie proximale de la veine cardinale postérieure, périveineux, ou à partir d’évaginations sacculaires de
forme la veine azygos. l’endothélium veineux [1, 6] . Ils forment initialement six sacs
lymphatiques, deux jugulaires à la jonction des veines sous-
Développement clavière et cardinale antérieure, deux iliaques à la jonction des
veines iliaque et cardinale postérieure, et deux à la racine du
du système lymphatique mésentère (sac rétropéritonéal ou mésentérique, et citerne
Le système lymphatique se développe en relation étroite avec le lymphatique). Les vaisseaux lymphatiques se développent et
système veineux [1], mais plus tardivement, à la cinquième semaine drainent la lymphe des membres, de la paroi thoracoabdominale,
6
Angéiologie Embryologie vasculaire 19-0020
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6 Développement de la veine cave inférieure, de la veine azygos et de la veine cave supérieure (modifié d’après Dupuis C, Kachaner J, Freedom RM, Payot M, Davignon A.
Cardiologie pédiatrique. Paris : Flammarion Médecine Sciences (2e édition), 1991 : 124-136). 1. Veine cardinale commune ; 2. veines cardinales antérieures ; 3. veine ombi-
licale ; 4. veine vitelline ; 5. veine sous-cardinale ; 6. veine cardinale postérieure ; 7. mésonéphros ; 8. sinus veineux ; 9. veines supracardinales ; 10. anastomose de la veine
sous-cardinale et vitelline ; 11. anastomose de la veine sous-cardinale ; 12. anastomose entre les veines cardinales antérieures ; 13. segment rénal de la veine cave inférieure ;
14. veines sacrocardinales ; 15. veine gonadique gauche ; 16. veine rénale gauche ; 17. segment hépatique de la veine cave inférieure.
A. À la quatrième semaine.
B. À la sixième semaine.
de la tête et du cou, à travers les canaux lymphatiques thoraciques Les veines pulmonaires se développent en même temps que les
droit et gauche, jusque dans les lacs et la grande citerne. Le canal artères, au contact de la paroi de l’oreillette gauche à laquelle elles
thoracique définitif se développe ensuite. seront plus tard incorporées.
Développement Références
des la circulation pulmonaire
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(embryon de 7 mm) pour former le composant post-branchial des ment. Role in myocyte proliferation and capillary angiogenesis. Circ Res 1993 ; 72 : 7-19
artères pulmonaires [1], qui se connectera ensuite au sixième arc [5] Goor DA, Lillehei CW. Congenital malformations of the heart. Embryology, anatomy, and
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aortique, formant les artères pulmonaires définitives. Les vaisseaux [6] Langman J, Sadler TW. Embryologie médicale. Paris : Pradel, 1996
bronchiques se développent plus tardivement (20 à 32 semaines). [7] Zetter BR. Angiogenesis: state of the art. Chest 1988 ; 93 (suppl) : 159S-166S
7
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0640
19-0640
Résumé.– L’athérosclérose est une maladie ubiquitaire, et il est assez fréquent, lorsque l’on consulte
pour un symptôme provenant d’un territoire artériel, que d’autres soient touchés de façon
asymptomatique. On estime ainsi que 50 à 70 % des décès tardifs après une chirurgie carotidienne sont
dus à une atteinte coronarienne peut-être passée inaperçue au moment de la consultation. On sait, par
ailleurs, que ces mêmes patients sont porteurs, dans 11 % des cas, d’un anévrisme de l’aorte
abdominale, dont la fréquence est estimée à environ 2 % des cas dans la population générale, lorsque
celle-ci est sélectionnée sans critère particulier. Il est donc important de bien connaître la fréquence des
associations lésionnelles de la pathologie vasculaire, afin de déterminer au mieux le choix des différents
examens utiles au diagnostic.
© Elsevier, Paris.
Jean-Noël Fabiani : Professeur des Universités, chirurgien des Hôpitaux. En cas d’atteinte carotidienne, le danger est de développer un
Éric Chemla : Interne des hôpitaux de Paris. accident vasculaire cérébral (AVC) dont le risque est strictement
© Elsevier, Paris
Service de chirurgie cardiovasculaire, unité de chirurgie vasculaire, hôpital Broussais, 96, rue Didot,
75014 Paris, France. proportionnel à la pression artérielle [25]. Les facteurs de risque
Toute référence à cet article doit porter la mention : JN Fabiani et É Chemla. Stratégie de la conduite des examens chez le patient polyvasculaire. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0640, 1998, 7 p.
19-0640 Stratégie de la conduite des examens chez le patient polyvasculaire Angéiologie
corrélés à l’atteinte carotidienne (surtout la carotide interne) ont Quelle est l’attitude à prôner devant une atteinte coronarienne, en
été étudiés, et la différence a été faite entre sténose et occlusion vue de dépister une éventuelle localisation carotidienne ? Il faut
carotidienne. Le tabac, les antécédents familiaux d’AVC, l’obésité, savoir si le chirurgien doit uniquement évaluer le risque
l’HTA, le diabète ainsi que le cholestérol sanguin total et la préopératoire chez un malade nécessitant un geste sur les artères
triglycéridémie sont les plus corrélés au risque de sténose de la coronaires, ou s’il se doit de rechercher à tout prix une autre
carotide interne. Le risque d’occlusion, quant à lui, est plus corrélé localisation de l’athérosclérose. Becker rapporte huit études
au tabac et au diabète [12]. Les degrés de liaisons épidémiologiques totalisant 10 421 malades ayant eu une circulation extracorporelle
entre les différents facteurs de risque et la localisation de (CEC) pour chirurgie coronarienne où les taux d’accident
l’athérosclérose ont été comparés [5], et l’on remarque que le diabète ischémique transitoire (AIT) ou d’AVC variaient de 0,51 à 5,61 % [2].
est le facteur dont le risque est le mieux corrélé avec l’atteinte Une chirurgie combinée carotide-coronaire est envisageable sans
carotidienne, alors que l’HTA est plus corrélée avec l’atteinte que la morbidité ou la mortalité soit considérablement
coronarienne. augmentée [50]. Il semble qu’il faille donc, du fait des contraintes
économiques de la médecine moderne, sélectionner au mieux les
ARTÈRES DES MEMBRES INFÉRIEURS
patients coronariens à qui il faudra effectuer une exploration
carotidienne. Ainsi Hertzer et son équipe définissent les critères de
Cacoub et Godeau rapportent que le tabac, l’âge et l’HTA sont les sélection suivants : âge supérieur à 50 ans, existence de souffle
plus corrélés au risque d’oblitération aorto-iliaque chronique cervical, et / ou antécédent(s) neurologique(s) focaux [22]. Salasidis
d’origine athéromateuse [7]. L’étude de Framingham a évalué, de a étudié, sur une population de 387 patients devant avoir une
façon prospective en suivant 5 209 patients, la liaison revascularisation coronarienne non urgente, la fréquence d’une
épidémiologique du diabète, de l’HTA, du cholestérol sanguin total atteinte carotidienne sévère. Une échographie doppler
et du tabagisme sur l’incidence de l’angor, de l’artérite des systématique a montré que 8,5 % de ces patients présentaient une
membres inférieurs et des AVC. Cette étude a conclu que ces quatre sténose de la carotide interne supérieure à 80 %. Cette étude
facteurs de risque étaient très fortement corrélés aux trois maladies, sélectionne une population à haut risque chez qui il faut proposer
avec une nette prédominance pour les AVC et l’artérite des une échographie doppler des troncs supra-aortiques avant une
membres inférieurs, alors que pour l’atteinte coronarienne l’HTA revascularisation coronarienne : âge supérieur à 60 ans, présence
et le cholestérol sanguin total présentaient une corrélation plus d’une artériopathie oblitérante des membres inférieurs, antécédent
forte [19]. d’endartériectomie carotidienne [38]. Les critères de ces deux études
sont concordants et montrent que : l’âge, le symptôme ou les
antécédents neurologiques, ainsi qu’une autre localisation de
Associations lésionnelles l’athérosclérose constituent des facteurs de forte probabilité
d’atteinte carotidienne associée à l’atteinte coronarienne. L’examen
L’athérosclérose touche tous les territoires artériels, et lorsqu’un à prescrire sera, alors, une échographie doppler des troncs supra-
territoire est atteint de façon symptomatique d’autres peuvent l’être aortiques, suivie d’une artériographie si l’on envisage un geste sur
de façon asymptomatique. les carotides.
2
Angéiologie Stratégie de la conduite des examens chez le patient polyvasculaire 19-0640
On sait que l’incidence de l’atteinte coronarienne chez les malades sous-groupe IIb. Cette étude a, par ailleurs, montré que chez les
adressés pour le traitement chirurgical d’une atteinte carotidienne patients ayant une maladie coronarienne avérée, en plus d’une
est très élevée [9]. L’espérance de vie à long terme de ces malades atteinte carotidienne, le traitement interventionniste des lésions
est fortement grevée en cas d’atteinte coronarienne, puisque coronariennes (chirurgie ou angioplastie) ramenait l’espérance de
l’infarctus du myocarde est responsable de 50 à 70 % des décès vie de cette population à haut risque à celle des patient atteints
tardifs [9, 16, 28]. Par ailleurs, si l’endartériectomie carotidienne d’une sténose carotidienne sans atteinte coronarienne et sans
diminue considérablement le risque de survenue d’AVC, la facteur de risque. Mackey a donc proposé un algorithme
mortalité à long terme de ces patients demeure élevée et est d’évaluation de l’atteinte coronarienne chez les patients devant être
principalement due à des événements sans rapport avec l’atteinte opérés d’une lésion carotidienne (fig 2). L’évaluation se fera par
carotidienne (fig 1). Newman [34], en 1988, relevait au cours d’une un test d’effort qui, s’il est positif, sera complété par une
revue de la littérature 41 études ayant portées sur le sujet. Il montre coronarographie.
qu’environ 50 % des malades ayant des lésions carotidiennes à
opérer présentaient des lésions coronariennes symptomatiques.
¶ Association à un anévrisme de l’aorte abdominale
Dans une récente étude, Mackey [29] a identifié la population à
risque coronarien dans une cohorte de 614 patients devant être L’incidence des anévrismes de l’aorte abdominale, chez les patients
opéré d’une sténose carotidienne. La population a été divisée en présentant une sténose significative d’une ou des carotides, semble
deux groupes et la survie a été étudiée à 30 jours, 5 ans, 10 ans et être supérieure à celle retrouvée dans la population générale
15 ans. Le groupe I regroupait les patients avec des antécédents lorsque celle-ci n’est pas sélectionnée selon des critères particuliers.
coronariens et le groupe II celui sans antécédent, on distinguait On estime la fréquence des anévrismes de l’aorte abdominale, chez
dans ce dernier groupe : le sous-groupe IIa, patients avec des les patients ayant une atteinte carotidienne à 11 %, alors qu’elle
facteurs de risque et le sous-groupe IIb, patients sans facteur de serait de 1 à 2 % dans la population générale tout-venant [6, 8]. Les
risque. La survie à 30 jours était identique dans les deux groupes. études réalisées sur l’association carotides-anévrisme de l’aorte
Ce n’est qu’au bout de 3 ans d’évolution que les différences abdominale montrent qu’il est intéressant, tant sur le plan
apparaissaient : La survie dans le groupe I était inférieure à celle épidémiologique que sur le plan économique (faible surcoût), de
du groupe II et la principale cause de surmortalité était d’origine rechercher un anévrisme de l’aorte abdominale dans le bilan d’une
cardiaque. La différence de mortalité dans les sous-groupes IIa et sténose carotidienne, soit au cours de l’échographie soit au cours
IIb n’apparaissait qu’au bout de 5 ans d’évolution, en faveur du de l’artériographie préopératoire [8, 41]. Par ailleurs, les analyses
3
19-0640 Stratégie de la conduite des examens chez le patient polyvasculaire Angéiologie
4
Angéiologie Stratégie de la conduite des examens chez le patient polyvasculaire 19-0640
5%
Autre événement
vasculaire Morbité cardiovasculaire
Mortalité totale
Si + : coronarographie si - Stop
A Amputation Majoration de
majeure la claudication IDM, AVC Mortalité
4% 16 % 20 % à 5 ans
Coronarographie = lésions 30 %
Pontage distal
7%
Origine cardiovasculaire Autre
Angioplastie Lésions intermédiaires Pas de lésion 75 % 25 %
ou chirurgie
Amputation majeure Revascularisation
20 % répétée
26 %
Épreuves recherchant l'ischémie 5 Épidémiologie et devenir d’un échantillon de la population générale âgée de plus
de 55 ans.
IPS : index de pression systolique. IDM : infarctus du myocarde. AVC : accident vas-
culaire cérébral.
Épreuves appréciant la viabilité myocardique EN CAS D’ARTÉRITE DES MEMBRES INFÉRIEURS (fig 6)
5
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4 1
3 3
1
3 1 2
2 2
A B C
6 Associations lésionnelles.
A. Risques d’atteintes périphériques chez un patient consultant pour une pathologie coronaire. 1. Lésions coronaires ; 2. artérite (16 %) ; 3. dilatation aortoabdominale
(20 %) ; carotides (4 à 8 %).
B. Risque d’associations lésionnelles chez un patient consultant pour un anévrisme aortoabdominal. 1. Anévrisme aortoabdominal ; 2. artérite (85 %) ; 3. coronaires (36-
58 %).
C. Risque de lésions associées chez un patient consultant pour une pathologie carotidienne. 1. Lésions carotidiennes ; 2. anévrisme aortoabdominal (11 %) ; 3. coronaires
(50 %).
d’ischémie critique, la moyenne d’âge et l’incidence des facteurs à 10 % d’intervention carotidienne dans une étude portant sur des
de risque (surtout le diabète) sont supérieures à celles observées malades ayant les lésions obstructives aorto-iliaques chroniques [26].
dans les autres atteintes vasculaires [27, 28]. L’attitude en vigueur à Cependant, il faut noter que dans la plupart des cas les malades
l’hôpital Broussais a été déjà décrite (cf supra). avaient des antécédents d’AIT ou d’AVC. Il semble, encore une
fois, qu’il faille privilégier le dépistage clinique et le recueil des
¶ Association à un anévrisme de l’aorte abdominale antécédents carotidiens avant de proposer un doppler des troncs
(fig 6B) supra-aortiques.
Si l’association anévrisme-artérite est très fréquente (85 % des cas),
l’association artérite-anévrisme l’est bien moins, puisqu’elle est
estimée à environ 6 % des cas [39]. Il ne semble donc pas licite de
proposer une échographie abdominale chez tous les patients
atteints d’une artérite des membres inférieurs ; certains auteurs ont Conclusion
donc proposé de définir une population à haut risque d’association
artérite-anévrisme mais sans grand succès [39]. Il semble donc que
La connaissance de l’épidémiologie des lésions polyartérielles est
l’aortoartériographie proposée à tous ces malades dans le bilan
importante à connaître, afin de proposer les investigations les
préopératoire soit suffisante, et qu’il ne faille l’associer avec une
plus appropriées à chaque localisation, cela afin d’éviter des
échographie ou un scanner abdominal qu’en cas de suspicion
examens inutiles dont certains peuvent entraîner des
d’anévrisme.
complications non négligeables. La fréquence de certaines
associations lésionnelles doit être connue par le médecin
¶ Association à une atteinte carotidienne (fig 6C)
prescripteur. Certaines prises en charge peuvent, en effet, être
Il semble que cette association soit plus fréquente que la radicalement bouleversées du fait de la découverte d’une
précédente, puisque Kieffer l’a estimée à environ 15 % conduisant localisation asymptomatique de l’athérome.
6
Angéiologie Stratégie de la conduite des examens chez le patient polyvasculaire 19-0640
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7
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0070
19-0070
Hémorrhéologie
MR Boisseau Principes, physiopathologie et applications
Résumé.– L’hémorrhéologie est l’étude du flux sanguin. Normalement, le sang, sous l’impulsion
cardiaque, s’écoule dans les macrovaisseaux sous l’aspect du flux laminaire organisé en lames
télescopiques. Les contraintes ou shear stress, provoquent une vélocité plus grande des lames centrales
qu’en périphérie. Les cisaillements des lames entre elles, forts à la paroi, diminuent vers le centre. Il y a
donc un gradient des taux ou vitesses de cisaillements, shear rate, définissant un profil de vitesses
caractéristique d’un flux donné et du cisaillement infligé à la paroi et à l’endothélium, ainsi activé. Les
hématies se disposent et se déforment dans les lames. Les pulsations du flux, l’écoulement aux
embranchements perturbent le profil, créant des zones stagnantes où les shears très diminués
permettent l’adhésion des leucocytes et le développement de plaques athéroscléreuses.
L’hyperfibrinogénémie et l’hyperagrégation érythrocytaire font apparaître des rouleaux et agrégats dans
les lames à bas shear rate (axiales), changeant le profil des vitesses et perturbant les sécrétions
endothéliales (premier site d’action des agrégats). Dans la microcirculation, les veinules postcapillaires,
à débit ralenti et hématocrite élevé, sont perturbées par l’hyperagrégation des hématies (deuxième site
d’action), alors que l’endothélium y est très actif. L’action des amas d’hématies sur ces deux sites se
retrouve au cours des polyglobulies et des dysglobulinémies, dans l’hypertension, les maladies
vasculaires, où l’hémoconcentration et l’inflammation expliquent l’hyperviscosité. Les plasmaphérèses,
l’hémodilution, les médications correctrices de l’hyperfibrinogénémie, de l’hyperagrégation des
hématies, de l’inflammation, s’adaptent à ces états. Sont aussi concernées l’occlusion veineuse de la
rétine, l’ischémie et l’insuffisance veineuse chronique. La drépanocytose, où les hématies sont peu
déformables et adhésives, représente le type cellulaire des maladies rhéologiques. Le diabète offre
l’ensemble de désordres du flux et cellulaires.
© Elsevier, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : MR Boisseau. Hémorrhéologie. Principes, physiopathologie et applications. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0070, 1997, 8 p.
19-0070 Hémorrhéologie Angéiologie
grand ami de la France où il travailla longtemps, a isolé la utilisation en lieu et place de la vitesse de sédimentation, en tant
biorrhéologie pour l’étude du vivant et le sang principalement. On que mesure plus précise, car prenant en compte l’ensemble de la
doit terminer cette liste, non exhaustive, en citant Merlen (1912, réactivité associée des macromolécules responsables de la densité
1986), qui développa en France l’étude de l’unité fonctionnelle du plasma.
microcirculatoire, en insistant sur les aspects rhéologiques. Dans le tube vasculaire la viscosité prend sa place pour le calcul
Aujourd’hui, l’hémorrhéologie fait partie des structures de base de du débit d’écoulement, selon la loi de Poiseuille-Hagen (loi dont
la connaissance dans les champs de la physiologie circulatoire, de on peut extraire les valeurs du shear stress et du shear rate) :
l’angéiologie et de la biologie de la thrombose.
Dp ⋅ pr
4
1
Q= ×
8L g
∆p est le gradient de pression motrice le long du tube, L la
Physiologie : le flux sanguin longueur, r le rayon et η la viscosité. On voit que le diamètre et la
viscosité sont en position inverse, ainsi la vasomotricité est le
VISCOSITÉ PLASMATIQUE paramètre qui s’adapte à la viscosité pour la compenser ; ceci est
une régulation fondamentale.
¶ Notions générales Par des principes antérieurs, Isaac Newton, en 1686... démontra
que le shear rate est proportionnel au shear stress et que la viscosité
Intuitivement, on comprend que le plasma est plus « visqueux »
était une constante, d’où la notion de liquide newtonien, comme
que l’eau. Sa charge liquidienne est supérieure du fait des
l’eau et le plasma. Mais ceci ne se vérifie pas pour le sang total...
macromolécules qu’il contient, provoquant une résistance
qui n’est pas newtonien !
intrinsèque à l’écoulement, ou flux, par le phénomène de
frottements ou cisaillements. En effet, si l’on considère un tube
rigide, l’écoulement s’organise en couches plasmatiques
concentriques (fig 1), glissant les unes sur les autres, sous l’effet de VISCOSITÉ DU SANG TOTAL
la pression cardiaque, comme les cylindres d’un télescope,
caractérisant le flux laminaire. La lame liquidienne proche de la Le sang comporte certes le plasma, mais aussi les cellules
paroi est quasi immobile, alors que les lames centrales, ou axiales, circulantes, qui ont un rôle, bien évidemment, dans l’équilibre du
ont un maximum de vélocité. Chaque lame développe un profil des vitesses, car elles se lient, dans certaines conditions aux
frottement ou cisaillement (shear stress) sur la lame adjacente, qui facteurs plasmatiques (thyxotropie) et, par ailleurs leurs qualités
est d’autant plus élevé que l’on est proche de la paroi. La différence spécifiques varient, en particulier dans les conditions
de shear entre les lames, ou gradient des taux de cisaillement ou pathologiques (déformabilité).
encore appelée gradient des vitesses de cisaillement ou shear rate,
est plus marquée à la paroi qu’au centre du vaisseau, définissant ¶ Phénomène de thyxotropie
un profil des taux ou vitesses de cisaillement, qui représente la et anomalies du profil de vitesses de cisaillement
globalité du frottement du sang sur la paroi, soit l’impact
Éthymologiquement ce terme, thyxos, signifie propriétés de tissu
d’activation par les contraintes (Ct), par exemple sur les cellules
élastique. Le sang entre dans cette catégorie, c’est-à-dire qu’il se
endothéliales.
déforme sous une pression appliquée (ici tendant vers la fluidité,
La résistance frictionnelle du flux est la viscosité qui est le quotient une viscosité basse), mais il retourne à son aspect initial de
du shear stress (contraintes de cisaillement) sur le shear rate « solide » si la pression se relâche.
(gradient des taux ou vitesses de cisaillement). La viscosité est le
À pression normale, élevée dans les macrovaisseaux, soit shear rate
paramètre de référence en hémorrhéologie.
élevé ou encore à hautes vitesses de cisaillement (> 50 s-1), les
Shear stress ~ mPa ! cellules, rouges essentiellement, se disposent dans le flux laminaire,
Viscosité ~ mPa ⋅ s ! = − 1
Shear rate ~ s ! épousant les lames cylindriques (fig 1, 2, 3). Donc le caractère
Un millipascal-seconde est égal à une centipoise, soit 0,1 dyne·s·cm-2. newtonien persiste. En revanche, si le shear rate diminue, pour des
Les unités du shear rate sont en secondes réciproques (s-1). L’eau a vitesses de cisaillement inférieures à 20 s-1, les hématies subissent
une viscosité égale à 1 à 20 °C et de 0,69 à 37 °C : l’abaissement de le phénomène d’agrégation en se liant au fibrinogène et les
la température augmente la viscosité. La viscosité du plasma est, agrégats dissocient l’harmonie des lames. Cela se produit d’abord
en moyenne, de 1,30 à 37 °C et de 1,70 à 20 °C. Cette grande pour les lames les plus axiales. Le profil des vitesses perd son
sensibilité explique l’expression des phénomènes rhéologiques à harmonie, ce qui est important car les frottements à la paroi sont
basse température et sur les parties découvertes du corps et aux modifiés, en réalité diminués et la viscosité augmente, faisant
extrémités. perdre au sang son caractère newtonien. Ainsi le sang est un tissu
élastique, fluide à hautes vitesses de cisaillement, tendant à
La viscosité plasmatique dépend donc de la concentration des
l’opposé, du fait de l’accumulation d’agrégats d’hématies, à être
macromolécules, soit avant tout le fibrinogène. L’hyper-
immobile et visqueux pour les pressions très basses, comme au
fibrinogénémie conditionne l’hyperviscosité, mais d’autres
cours de la stase. Ceci pour des hématocrites systémiques aux
molécules peuvent agir : les α2-macroglobulines et les
alentours de 45 %, ce qui n’est pas le cas des microvaisseaux où
gammaglobulines. Parmi elles, l’augmentation des immuno-
l’agrégation des globules rouges prend une autre signification.
globulines M (IgM) élève rapidement la viscosité du plasma.
Le fait le plus important dans les macrovaisseaux est la
modification du profil des vitesses, qui diminue ou modifie
¶ Mesures au laboratoire
malencontreusement le cisaillement à la paroi, donc qui altère
La mesure de la viscosité plasmatique est facile et rapide, à l’activation des cellules endothéliales (shear dependence). Le tableau
condition que la température de l’échantillon soit bien maîtrisée I montre le nombre et l’importance de ces activations.
par l’appareil. Ses variations étant parallèles à celles du fibrinogène L’hyperviscosité, l’hyperfibrinogénémie jouent sur ces sécrétions
et d’autres molécules inflammatoires, on a pu proposer son en modifiant le profil de vitesses.
2
Angéiologie Hémorrhéologie 19-0070
v'
Ct
T'<T C t'
C t' < C t
T T'
B D
1 Flux laminaire.
A. En l’absence de flux pulsé, pour une pression motrice normale, les couches plasmatiques se disposent en lames concentriques (aspect de télescope).
B. Les taux de cisaillement (ou vitesses de cisaillement) sont plus élevés sur les lames à la paroi (shear rate) que dans la région axiale (τ’, d’où τ’< τ). D’où la notion de
gradient de taux ou vitesses de cisaillement. Ainsi est défini un profil de taux de cisaillement, caractéristique d’un flux donné dans une artère ou une veine.
C. Viscosité normale, fibrinogène normal. En sang total, les hématies se disposent dans les lames, se déforment et contribuent à la fluidité du sang.
D. Anomalies du profil de taux de cisaillement : la viscosité élevée ou le fibrinogène élevé permettent la constitution d’agrégats au niveau des lames à faible taux de ci-
saillement. L’endothélium est moins « cisaillé », subit moins les frottements du sang.
1. Agrégation érythrocytaire.
3
19-0070 Hémorrhéologie Angéiologie
2
B
C D
2 Modifications du flux sanguin au niveau des bifurcations (A et B). Des zones de recirculation ou stagnantes se créent en certains points de la paroi, proches des bifur-
cations, qui sont électifs pour l’athérogenèse, car de faible cisaillement et permettant que des cellules blanches adhèrent à l’endothélium et pénètrent dans la paroi. Ce phéno-
mène s’accentue au fur et à mesure de la croissance de la plaque. Des zones stagnantes et des vortex sont aussi présents dans les valvules veineuses (C et D).
A. Plasma skimming.
B. Différents courants aux bifurcations. 1 : plaque ; 2 : trajet des monocytes.
C. Sténose artérielle. 1 : plaque.
D. Valvules. 1 : vortex.
rouges : leur forme (géométrie), leur viscosité interne (densité, La déformabilité des hématies permet leur étirement à forte
concentration de l’hémoglobine) et leur vie enzymatique (n’ayant pression, au sein des lames concentriques, ce qui contribue à rendre
pas de noyau, la vie de la cellule dépend uniquement de son stock le sang plus fluide. Cette action est donc liée à la qualité de la
d’enzymes, vie de 120 jours). Une altération sur chacun de ces cellule.
groupes de paramètres entraînera une perte de la déformabilité et Les leucocytes sont très rigides et passent rarement dans les
une difficulté à passer dans les capillaires. capillaires, mais plutôt dans les shunts et conduits un peu plus
4
Angéiologie Hémorrhéologie 19-0070
Capillaires
A 0,1s-1
GR dispersés désorientés non déformés cisaillement modéré
VPC
Ht
1s-1
GR dispersés orientés non déformés cisaillement élevé
B
3 Circulation dans l’unité microcirculatoire. L’hématocrite s’effondre à l’entrée ar-
tériolaire (phénomène de Fahraeus). Les hématies se regroupent en fins agrégats au
centre de l’artériole. Les veinules postcapillaires ont un débit très ralenti, les héma-
ties s’y accumulent, des agrégats plus volumineux s’y forment et l’hématocrite rejoint
les valeurs systémiques. Ce secteur est particulièrement sensible aux désordres rhéo-
logiques.
A. Versant artériolaire. Effet Fahraeus.
B. Versant veinulaire. Effet des pressions basses. 100s-1
GR dispersés orientés déformés cisaillement très élevé
gros où, de toute façon, ils ralentissent l’écoulement des hématies
disposées en longues files d’attente derrière eux. Cette rigidité,
1 000 fois supérieure à celle des hématies, augmentée par leur
activation par des agonistes et les cytokines, a été retenue comme
pouvant altérer l’irrigation microcirculatoire des tissus en ischémie,
en particulier le myocarde. Les plaquettes ont un rôle négligeable
pour la régulation du flux, du fait de leur taille réduite. En
revanche, elles sont très sensibles à la dysrégulation endothéliale ; 4 Illustration de la formation des agrégats érythrocytaires en fonction des taux de
elle-même liée au shear. cisaillement. À bas taux ou basses vitesses de cisaillement, les « rouleaux » ou « piles
d’assiettes » des hématies se forment, grâce à la présence du fibrinogène. La viscosité
¶ Mesures au laboratoire augmente, le sang redevient « solide », il n’est plus newtonien (d’après le professeur
Lelièvre, CNRS).
La viscosité du sang est établie par l’utilisation de viscosimètres de
type Couette, rotatifs, où un cylindre, plan ou en cône, tourne dans
une cuve, reproduisant les cisaillements du sang circulant. Lorsque La déformabilité peut être mesurée directement en mesurant le
les rotations sont lentes, les gradients de cisaillement sont faibles temps de passage des hématies à travers des filtres de porosité
et inversement. La viscosité est mesurée pour des valeurs de shear connue, mais ces mesures sont difficiles à réaliser et à interpréter.
rate de 1 à 10 s-1, de 10 à 50 et supérieur à 100. Elle s’élève pour les De ce fait, on calcule la déformabilité des érythrocytes en utilisant
taux de cisaillement bas, surtout pour les valeurs d’hématocrite et les valeurs de viscosité du sang total à haute vitesse de
de fibrinogène élevées, montrant le rôle de la formation d’agrégats cisaillement, par les formules de Dientenfas et de Quemada.
et la perte de l’aspect newtonien de l’écoulement.
Ces notions générales rhéologiques sont à replacer dans les deux
L’agrégation des hématies fait l’objet, du fait de son importance, systèmes circulatoires. Au niveau de la microcirculation, des
d’une mesure identifiée, depuis quelques années. C’est en fait elle, notions nouvelles liées à la capacité d’adhésion des cellules
qui représente le facteur important de la thyxotropie, qui joue dans circulantes sont aussi à prendre en compte.
le viscosimètre à bas gradient de cisaillement. Les hématies non ou
faiblement cisaillées (fig 4) se disposent en pile d’assiettes, grâce
DEUX GRANDS SYSTÈMES CIRCULATOIRES
au fibrinogène qui s’allie à elles dans une relation biophysique, de
type osmotique, sans mettre en jeu de récepteurs, effectivement
absents à la surface des hématies. De ce fait, la liaison se dissocie ¶ Circulation systémique : macrorrhéologie
sous l’effet des shears plus élevés. Les globules vont et viennent
dans ce système, formant des réticuli de rouleaux d’hématies La rhéologie conditionne la pression artérielle, la résistance
(phénomène de « rouleaux ») ou d’agrégats plus compacts. Le périphérique et l’activité plaquettaire
point qui fait le lien avec la pathologie est qu’il y aura d’autant Dans les vaisseaux artériels et veineux de gros calibre, la pression
plus d’agrégats, qu’ils seront d’autant plus rapides à se constituer, sanguine est élevée et le flux laminaire prédomine. Les globules
plus compacts et difficiles à dissocier, que le fibrinogène et rouges sont alignés et déformés. Les leucocytes et les plaquettes
l’hématocrite sont plus élevés. Les appareils permettent de mesurer sont évacués. Ce système prédomine jusque dans les vaisseaux de
le temps d’agrégation, l’intensité et le shear stress nécessaire à 100 µm et caractérise la circulation artériolaire. En fait, le système
dissocier les agrégats et les rouleaux (seuils de dissociation). est, dans une certaine mesure et surtout dans certaines
5
19-0070 Hémorrhéologie Angéiologie
localisations, pulsatile. Les pulsations provoquent des phases où une « vie » de la plaque, cellulaire, inflammatoire et endothéliale,
les lames se dissocient et des agrégats se forment. C’est le cas en conduisant à la formation de la « glue » (gruel), labile au-dessous
particulier de la crosse de la saphène externe, où l’imagerie de la coque fibreuse. Dans ces zones, les plaquettes s’activent et ne
moderne discerne la formation d’agrégats. sont plus maîtrisées.
Le profil des taux ou vitesses de cisaillement conditionne Les valvules veineuses (fig 2D) sont naturellement des zones de
l’activation constante de l’endothélium, qui sécrète des produits recirculation avec plusieurs séries de vortex. À leur niveau et
vasoactifs (NO [oxyde nitrique], PGI2, endothéline), modulant en surtout lorsqu’elles sont ectasiées, les agrégats se forment,
permanence le diamètre des vaisseaux et régulant, de ce fait, à la l’endothélium est actif et un « nidus » fibrinoplaquettaire est
fois la tension artérielle et la viscosité. présent. Le rôle des valvules, en regard de ces conditions
La résistance périphérique est donc dépendante du rapport circulatoires, est primordial pour la genèse des thromboses
suivant, dérivé des lois de Poiseuille-Hagen : veineuses. Il existe d’autres zones à risque sur l’arbre veineux,
telles que les veines borgnes du mollet. De manière générale la
Q = ~ Pa − Pv ! × 1
R stase veineuse produit les mêmes effets.
où R = g 4 S D
L
r N
Au total, si les « frottements » du sang assurent une protection
constante de l’arbre artériel, a contrario, de nombreuses conditions
Q : débit ; Pa - Pv : gradient de pression entre artères et veines ; R : existent où cette protection disparaît, favorisant le développement
résistance ; L : longueur ; r : rayon ; N : nombre de conduits ; η : des plaques athéromateuses et la genèse des thromboses.
viscosité.
Si r diminue (vasoconstriction), la résistance augmente ¶ Microcirculation : microrrhéologie
intensément. Si la pression motrice diminue (à cause du cœur ou
dans des secteurs à basse pression) la viscosité immuable η, doit Le domaine microcirculatoire se situe au-dessous de 100 µm et
être maîtrisée par une élévation de r (vasodilatation). comporte un ensemble considérable de microvaisseaux,
développant une surface très étendue d’interaction avec le sang.
Ces produits de l’endothélium vasculaire, shear dépendants, sont
Le lit endothélial, appliqué au sang circulant, est estimé à 3 kg, ce
aussi actifs sur les plaquettes sanguines. C’est avant tout le NO et
qui représente un « organe », voire une glande exoendocrine
la PGI2, ou prostacycline, qui ont la propriété de sous-réguler les
importante.
récepteurs plaquettaires tels que le GPIIbIIIa. Il a été démontré que
l’apport de NO diminue la potentialité d’agrégation plaquettaire C’est à Merlen que l’on doit d’avoir intégré la microcirculation,
ex vivo et de même l’altération du profil de vitesse. Il faut admettre quel que soit le domaine considéré, comme une unité fonctionnelle
que les plaquettes sont constamment « désactivées » par microcirculatoire (tableau II). On doit considérer deux versants et
l’endothélium lui-même soumis à une qualité de cisaillement. Le le lit capillaire. Le versant artériel est dévolu à la vasomotricité, à
schéma suivant doit être admis : la perfusion de l’unité par les artérioles précapillaires. Le versant
veineux a une activité endothéliale très riche, surtout au niveau de
(I) Profil correct du shear rate endothélium cisaillé la veinule postcapillaire (VPC) et a une action plus
« parenchymateuse ».
agrégation des hématies normale
fibrinogène normal Caractères circulatoires proprement dits
hématocrite normal
Deux faits caractérisent la circulation dans les microvaisseaux : le
plaquettes non activées NO, PGI2 débit très ralenti et la perte du flux laminaire. Le débit est à l’entrée
de 0,5 cm/s mais chute considérablement dans les capillaires. De
(II) Profil anormal du shear rate
ce fait, le débit est de 0,01 cm/s dans les VPC, ce qui est le record
endothélium mal
cisaillé de lenteur d’écoulement pour l’organisme. Ce fait primordial
explique la relation intime possible entre l’endothélium de ce
hyperagrégation des hématies secteur et les cellules circulantes.
hyperfibrinogénémie
hauts hématocrites À l’entrée de la microcirculation sur le versant artériel,
vicosité plasmatique élevée l’organisation en flux laminaire disparaît et est remplacée par le
système à couche plasmatique (fig 3) . En fait, l’hématocrite
plaquettes activées moins de NO s’effondre à l’entrée des artérioles, abaissant la viscosité sanguine
(mais pas la plasmatique), ce qui permet de mieux faire pénétrer
En de nombreux points de l’arbre des macrovaisseaux les hématies (phénomène de Fahraeus). Celles-ci s’agrègent au
la circulation laminaire est dysrégulée centre du vaisseau et les rouleaux, ainsi formés, sont entourés
Au niveau des bifurcations artérielles (fig 2A) la répartition des d’une couche de plasma. Ici l’agrégation, pour des hématocrites
hématies est irrégulière, des agrégats se forment, entraînant plus aux alentours de 10 %, est salutaire et sa disparition (par des
de globules ou de plasma dans une artère fille (plasma skimming). solutés hypoagrégants perfusés trop en abondance) est cause
Surtout des courants se dissocient et certaines parties des d’hypoxie. À l’opposé, un flux d’aval fait d’agrégats trop cohérents
embranchements sont moins cisaillées, du fait de flux rétrogrades perturbe la perfusion de l’unité, ces amas ayant tendance à passer
et de zones stagnantes. À ce niveau, où le flux est ralenti, par des shunts (vol circulatoire). En fait, la vasomotricité permet
l’endothélium sensibilisé, les leucocytes sont capables d’adhérer à d’adapter le vaisseau aux conditions rhéologiques. Malgré cette
la paroi et de la pénétrer. C’est en particulier le cas des monocytes, adaptation, la pression et les cisaillements restent élevés sur le
d’où le développement électif des plaques d’athérosclérose dans secteur artériel, ce qui permet la sécrétion shear dépendante et le
ces endroits, le facteur rhéologique étant un des facteurs passage des hématies dans les capillaires.
importants de l’athérogenèse. Sur le versant veineux, les VPC « attendent » d’être remplies par
Cela est encore plus vrai au niveau des sténoses artérielles où des des capillaires dits nourriciers. Le débit étant très lent, ce
zones de recirculation, ou vortex, se mettent en place permettant remplissage permet une remontée de l’hématocrite vers les valeurs
des contacts endothélium-cellules circulantes (fig 2B, C). Il exite de la circulation systémique (40 %). Ceci favorise les agrégats
6
Angéiologie Hémorrhéologie 19-0070
L’activation des cellules endothéliales se fait par la chute du shear, l’arrivée de cytokines, d’agonistes
inflammatoires (histamine, bradykinine) et de produits bactériens (LPS, fMLP, endotoxine). Applications en pathologie
PCA : protéine activée ; t-PA : tissue plasminogen activator ; PAI-1 : plasminogène antérieure inhibiteur n° 1 ;
ICAM : intercellular adhesion molecule ; VCAM : vascular cell adhesion molecule ; PAF : platelet activating factor ; IL :
interleukine ; TGF : transforming growth factor ; PDGF : platelet derived growth factor. DÉSORDRES RHÉOLOGIQUES ET MACROVAISSEAUX
En dehors du fait que les désordres rhéologiques accentuent
érythrocytaires, nombreux et importants dans les VPC, repoussant l’athérogenèse, les macrovaisseaux artériels et veineux sont
les globules blancs et les plaquettes vers l’endothélium. Les VPC sensibles à l’hyperagrégation érythrocytaire (premier secteur
sont très sensibles à l’hyperagrégation, assimilée à celle du sang d’action de l’hyperagrégation érythrocytaire) qui perturbe les
systémique veineux brachial du fait de la similitude de sécrétions pariétales et la vasomotricité. Au cours de l’hypertension
l’hématocrite. À l’opposé, si les hématies se désagrègent, comme artérielle, le trouble est présent ainsi que l’augmentation constante
elles peuvent le faire sous l’effet de l’inflammation et en particulier du fibrinogène. La viscosité sanguine est d’ailleurs diminuée, chez
des radicaux libres oxygénés, les hématies éparpillées encombrent ces patients, par les inhibiteurs calciques et de l’ECA (enzyme de
les capillaires et adhèrent à l’endothélium. Il s’agit donc d’un conversion de l’angiotensine), médications de l’hypertendu.
secteur sensible sur le plan rhéologique où un équilibre doit être Le rapport entre la viscosité plasmatique élevée et les thromboses
trouvé entre l’agrégation assurant le transit des hématies vers les artérielles a fait l’objet de nombreuses études épidémiologiques,
veines en aval et des gros agrégats pouvant bloquer la circulation particulièrement pour l’accident vasculaire cérébral (AVC). Des
et contribuant à l’hypoxie et à l’activation de l’endothélium. résultats ont été obtenus par l’étude de l’hyperfibrinogénémie, en
général associée et cause principale de l’hyperviscosité.
Néanmoins, les phénomènes appréhendés par la mesure de la
Fonctions endothéliales viscosité sont plus larges.
Normalement sur l’ensemble du lit vasculaire et sur les VPC, Le désordre rhéologique est un facteur important d’aggravation de
l’endothélium développe une action protectrice (tableau III), du fait l’ischémie artérielle, particulièrement au niveau des membres
des cisaillements et de l’absence d’agonistes ou de cytokines dans inférieurs, aggravant la faible diffusion de l’oxygène et favorisant
le milieu ambiant. Le NO et la prostacyline sont les agents l’amputation.
principaux, ainsi que l’expression de la thrombomoduline, L’hyperviscosité est une cause favorisante de la thrombose
récepteur de la thrombine, dont l’association permet l’activation veineuse profonde, du fait de la formation d’agrégats et d’amas
de la protéine C. La chute des pressions défait le shear et l’action fibrinoplaquettaires dans les valvules et certains secteurs veineux
protectrice des cellules endothéliales commence à disparaître. en stase.
L’hypoxie et des cytokines telles qu’IL1 (interleukine 1) et TNFα Au total, la prise en compte, chez le patient, de l’hématocrite et du
(tumour necrosis factor), des agonistes tels que le PAF (platelet taux du fibrinogène, représente une démarche d’exploration
activating factor), l’histamine, des produits endotoxiniques, font rhéologique dont il ne faut jamais se priver au lit des malades.
apparaître des fonctions adhésives et coagulantes de l’endothélium.
Deux faits dominent cet état : l’adhésion des leucocytes et la DÉSORDRES RHÉOLOGIQUES ET MICROCIRCULATION
perméabilité augmentée, avec fuite de liquide et de petites
¶ Désordres rhéologiques en hématologie
molécules (albumine).
On conçoit le role important, mais non exclusif du flux sanguin et Troubles volémiques
des cisaillements pour le lit endothélial. Au cours de l’ischémie, la Deux situations existent, soit l’augmentation de la masse sanguine
perte des cisaillements et l’expression de l’agrégation par une production cellulaire augmentée, soit une hémo-
érythrocytaire accentuent ces phénomènes, d’où l’importance de concentration par perméabilité augmentée, associée à une
7
19-0070 Hémorrhéologie Angéiologie
production accentuée de fibrinogène d’origine inflammatoire. hématies), favorisent les lésions des microvaisseaux, en particulier
L’augmentation de la masse sanguine rouge, polyglobulie de par vol circulatoire, c’est-à-dire en favorisant le passage des
Vaquez, entraîne des manifestations liées aux microvaisseaux : agrégats par les shunts sous-jacents aux anses capillaires.
troubles visuels, vertiges, surdité brusque. Ces manifestations sont
primordiales pour juger de l’évolution de la maladie de ¶ Désordres rhéologiques et ischémie par l’aval
Waldenström, où la viscosité plasmatique augmente sous l’effet des
Existe-t-il des maladies rhéologiques pures directement liées à
IgM et fait indiquer les plasmaphérèses. Des états voisins sont
l’hyperagrégation érythrocytaire ? C’est vraisemblable, par
observés au cours des myélomes, des inflammations chroniques,
exemple des surdités brusques sont souvent accompagnées de ces
des fortes hyperfibrinogénémies, ainsi qu’au cours des
désordres. De même l’occlusion de la veine centrale de la rétine ou
hyperlipidémies. Les plasmaphérèses, la démarche d’hémodilution
certains vertiges. Dans ces cas, l’hématocrite et le fibrinogène élevé,
trouvent leur place au cours de ces évolutions. Souvent, les
la viscosité plasmatique et l’agrégation érythrocytaire accentuées
médications actives dans ces états diminuent le taux du fibrinogène
sont à prendre en compte pour indiquer l’hémodilution ou la
et réduisent la perméabilité (ticlopidine, hypolipémiants).
plasmaphérèse.
Troubles cellulaires Il existe un tableau, le syndrome polycythémique, survenant plutôt
chez l’homme après 40 ans, où la masse sanguine montre une
La déformabilité très perturbée des globules rouges au cours de la réduction du volume plasmatique (contraction du volume
drépanocytose fait de cette maladie une affection rhéologique. La plasmatique) et non pas une vraie polyglobulie, au cours duquel
perfusion capillaire s’effectue mal, des agrégats indissociables sont les accidents thrombotiques artériels sont plus fréquents, tels les
présents dans les secteurs osseux et les aires endothéliales sont AVC ou les accidents coronariens. Curieusement, les organes
activées. De plus, les drépanocytes sont hyperadhésifs et s’accolent nobles, tels que le rein, sont protégés au cours de ces états. Le
aux cellules endothéliales. Ces troubles, décrits récemment, tabagisme accentue ces troubles.
apparaissent importants pour expliquer les récidives des crises
d’occlusion et d’hémolyse. Ces phénomènes, moins caricaturaux,
sont observés dans le diabète mal équilibré, le syndrome de Zieve Conclusion
et au cours de l’ischémie, de l’anoxie en présence de radicaux
libres. Un concept peut être évoqué : les hématies moins Les maladies rhéologiques sont rarement très apparentes (overt
déformables s’agrègent moins ou de manière désordonnée et ont syndromes) comme au cours de la maladie de Vaquez, mais plutôt
tendance à bloquer les capillaires et à adhérer à l’endothélium des voilées (covert syndromes), facteurs de réelle aggravation, surtout au
VPC. cours des maladies vasculaires dégénératives. Il faut y penser car
déjà l’observation simultanée de l’hématocrite et du fibrinogène élevés
¶ Désordres rhéologiques et ischémie par l’amont est une démarche rhéologique. De plus, si l’on y prend garde, on
La plaque athéroscléreuse, provoquant la sténose, provoque dans constate que beaucoup de traitements ont une visée rhéologique :
le lit microcirculatoire d’aval des périodes d’ischémie-hypoxie puis hémodilution, plasmaphérèse, médications anti-inflammatoires,
de reperfusion, du fait de spasmes transitoires. Les shear sont donc vasoactives, hypolipémiantes, hypofibrinogénémiante, correctrices de
perturbés et l’endothélium activé par l’hypoxie, des agonistes la perméabilité ou de l’hypertension.
plaquettaires (TXA2, 5HT) et leucocytaires (PAF) et les radicaux
oxygénés produits au moment de la reperfusion. Les désordres
rhéologiques aggravent considérablement ces états. Cela est valable Références
pour les trois secteurs : cœur (angor instable, infarctus), AVC et
artériopathies dégénératives des membres inférieurs. [1] Boisseau MR. Microcirculation. Paris : John Libbey Eurotext, 1992
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d’amont, essentiellement l’hyperpression veineuse. Les troubles [4] Lowe GD. Blood rheology in vitro and in vivo. Baillieres Clin Haematol vol 1, n° 3 : 597-636
rhéologiques, associés quasi constamment (hyperagrégation des [5] Vayssairat M, Carpentier P. Microcirculation clinique. Paris : Masson, 1996
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0600
19-0600
Résumé.– Les différentes thérapeutiques hormonales utilisées chez la femme dans les indications de
contraception ou de traitements substitutifs de ménopause (THS) ont des effets vasculaires tout à fait
différents qu’il importe de connaître pour poser les indications thérapeutiques. Les estroprogestatifs
employés en contraception sont contre-indiqués chez les femmes à risque métabolique ou vasculaire. Les
progestatifs pregnanes sont intéressants dans ces indications et mieux supportés que les
microprogestatifs. Le THS confère un effet favorable vraisemblable vis-à-vis du risque de maladie
coronarienne. Cet effet peut être expliqué par des actions de l’estradiol sur des marqueurs du risque
vasculaire (fractions lipidiques, protéines de coagulation). Des actions directes sur la paroi artérielle sont
maintenant décrites impliquant des mécanismes d’action au niveau de l’endothélium et des fibres
musculaires lisses. Les différentes voies d’administration de E2 et les différents progestatifs utilisés dans le
THS ne sont pas équivalents à ces différents niveaux.
© Elsevier, Paris.
dépend donc de leur nature, de la composition des produits employés et Élévation angiotensinogène
du mode d’administration. Prise de poids
TA : tension artérielle ; TG : triglycérides ; VD : vasodilatation ; LDL : low density lipoproteins ; HDL : high density
lipoproteins.
Résultats des principales études
épidémiologiques faire diminuer l’incidence de ces accidents : dans la cohorte des
infirmières de Boston, le taux d’accident coronarien (publié en
1990) a un risque relatif de 1,7 [0,4-7,6] dans la tranche 30 à 34 ans
CONTRACEPTIONS ORALES (tableau I)
des femmes sous pilule et de l’ordre de 1 dans les tranches d’âge
Les études de cohorte des praticiens anglais ont montré une au-delà de 35 ans. La fréquence des maladies artérielles et de
augmentation du risque relatif (RR) de maladies vasculaires l’hypertension est proportionnelle au contenu progestatif de la
artérielles d’environ quatre fois pour la mortalité par infarctus du pilule et la fréquence des accidents d’origine veineuse est surtout
myocarde et par hémorragie méningée et de deux fois pour les proportionnelle à la dose d’éthinylestradiol (EE) [10]. La diminution
accidents vasculaires cérébraux d’origine thrombotique [24]. Pour les progressive des posologies d’EE et de progestatif des pilules,
pathologies thromboemboliques veineuses, ce risque relatif associée à l’exclusion des femmes ayant des contre-indications
s’échelonnait entre deux et huit fois dans les études cas-contrôles [6]. vasculaires et métaboliques à ce type de contraception explique
L’exclusion progressive des femmes ayant des contre-indications à très vraisemblablement la diminution du nombre d’accidents. Des
ce type de contraception, c’est-à-dire un facteur de risque articles récents ont cependant souligné l’importance du respect des
métabolique (hyperlipémie, diabète) ou vasculaire (hypertension contre-indications en montrant une exagération du RR de
artérielle, risque thromboembolique, cardiopathie), a permis de thrombose veineuse avec les pilules comportant des progestatifs
de troisième génération [28]. Ces progestatifs ont été réputés moins
androgéniques et de ce fait ont amené à prescrire ces pilules sans
tenir compte des contre-indications classiques et en particulier des
© Elsevier, Paris
Florence Rollot, Anne Gompel : Service de gynécologie obstétrique, hôpital de l’Hôtel-Dieu, 1, place du
Parvis-Notre-Dame, 75181 Paris cedex 04, France. antécédents familiaux de thromboses veineuses non explorés. C’est
Toute référence à cet article doit porter la mention : F Rollot et A Gompel. Hormones et risque vasculaire. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0600, 1997, 5 p.
19-0600 Hormones et risque vasculaire Angéiologie
en effet dans ce cadre qu’une recherche de déficit congénital en norstéroïdes à faibles doses ou microprogestatifs sont considérés
facteurs de coagulation (antithrombine III, protéine C, protéine S, comme dénués de retentissement vasculaire. Leur mauvaise
résistance à la protéine C activée) est justifiée [27]. La présence d’une tolérance gynécologique en limite cependant l’emploi [12].
telle anomalie contre-indique définitivement l’utilisation Les dérivés pregnanes, acétate de chlormadinone ou de
d’estroprogestatifs en contraception. cyprotérone et les dérivés norpregnanes, acétate de nomégestrol et
promégestone, sont neutres vis-à-vis des marqueurs du risque
TRAITEMENT HORMONAL SUBSTITUTIF
DE MÉNOPAUSE vasculaire chez les femmes normales [5, 7] . Nous n’avons pas
l’expérience de l’utilisation des deux derniers produits chez les
Chez la femme, la fréquence de maladies cardiovasculaires
femmes à haut risque thromboembolique mais un recul important
augmente avec l’âge et s’accélère avec la ménopause par rapport à
avec les premiers dans une série de femmes lupiques (dont 30 %
l’homme, la femme restant très protégée des maladies
avec antiphospholipides) et /ou avec antécédent de phlébite.
cardiovasculaires avant l’âge de 50 ans. Un nombre assez
D’autres équipes ont ce recul chez les femmes avec déficits
important d’études de cohorte et cas-contrôles ont montré une
congénitaux en protéines de coagulation [2, 12].
diminution de moitié environ du risque de maladies coronariennes
chez les femmes recevant un THS [26] mais il s’agit toujours
ESTROGÈNES ET PROGESTATIFS UTILISÉS
d’études d’observation (et non randomisées). La plupart de ces EN TRAITEMENT SUBSTITUTIF DE MÉNOPAUSE
études sont d’origine américaine et portent sur des populations de
femmes ayant un risque cardiovasculaire plus important que celui
¶ Estrogènes
des femmes françaises et ayant utilisé un traitement estrogénique
par estrogènes conjugués d’origine équine. Aucune étude n’est Les estrogènes conjugués d’origine équine sont largement utilisés
actuellement disponible avec l’estradiol 17β par voie hors de France. Ces molécules, extraites de la jument, comportent
extradigestive, majoritairement employé en France [19]. De plus, la différents dérivés estrogéniques dont certains sont physiologiques
durée d’administration, la composition, la posologie de progestatif chez la femme, estradiol, estrone, mais également des molécules
utilisé varient par rapport aux habitudes françaises, les progestatifs d’origine purement équines comme l’équiline et l’équiniline et des
les plus utilisés étant soit des dérivés norstéroïdes comme la dérivés hydroxylés de ces produits. L’association ainsi générée est
noréthistérone, soit un dérivé pregnane, l’acétate de assez puissamment estrogénique. L’estradiol 17β, qui est l’hormone
médroxyprogestérone. Parmi les études épidémiologiques naturelle active chez la femme, est largement utilisé en France, soit
disponibles, aucune n’a porté encore sur l’utilisation de sous forme orale micronisée, soit sous forme d’ester, le valérate
progestérone naturelle ou d’autres dérivés pregnanes. Par ailleurs, d’estradiol, également d’administration orale, soit par
des publications récentes ont aussi rapporté une aggravation du administration extradigestive percutanée (Estrogelt, Oestrodoset,
risque thromboembolique veineux sous estrogènes conjugués. Estrevat) ou par voie transcutanée c’est-à-dire à l’aide de patchs.
Ces produits sont associés de manière séquentielle, cyclique ou
Nature des molécules utilisées dans continue à un progestatif. Les progestatifs utilisés en traitement
substitutif de ménopause sont des dérivés de la
le traitement hormonal chez la femme norméthyltestostérone peu utilisés en France sauf dans des
CONTRACEPTIFS associations comme Trisequenst ou Kliogestt. D’autres dérivés
sont plus utilisés en France : soit la progestérone naturelle
¶ Estroprogestatif micronisée (Utrogestant) soit des dérivés de la 17
L’estrogène de synthèse est toujours l’éthinylestradiol. Il s’agit d’un hydroxyprogestérone ou pregnanes, Lutéran 5t, Colprone 5t,
estrogène puissant dont la substitution par un groupement éthinyl Duphastont (rétroprogestérone). Les norpregnanes (Lutionext,
en 17α ralentit considérablement le métabolisme. Son accumulation Luténylt ou Surgestonet) sont également utilisés [19].
au niveau du tissu hépatique et son métabolisme ralenti rendent
compte d’un effet estrogénique très puissant. C’est ainsi que l’on
explique les modifications secondaires à la prise orale d’EE sur un Hormones et marqueurs
certain nombre de marqueurs du risque vasculaire dont la synthèse du risque vasculaire
est hépatique. Il existe donc une activation de la coagulation et de
la fibrinolyse qui conduisent à une hypercoagulabilité qui peuvent FRACTIONS LIPIDIQUES
expliquer les accidents aigus observés sous pilule d’origine
veineuse mais aussi d’origine artérielle. Les progestatifs associés à L’inhibition de la lipase hépatique par les estrogènes pris per os,
l’EE sont des dérivés de la norméthyltestostérone encore appelés quelle que soit leur nature, est d’autant plus marquée qu’il s’agit
norstéroïdes. Ces progestatifs ont également une action sur les d’un produit plus estrogénique et donc de l’EE. Cet impact se
fractions lipidiques et les protéines de coagulation dans le sens manifeste par une diminution de l’épuration hépatique du HDL2-
d’une hypercoagulabilité. Il apparaît cependant que le mécanisme cholestérol (high density lipoproteins) et donc d’une élévation de
des accidents cardiovasculaires observés sous contraception orale cette fraction dans le plasma, d’une augmentation des VLDL (very
n’est pas de type athéromateux, mais essentiellement low density lipoproteins) et donc des triglycérides. Le cholestérol
thrombotique, peut-être avec une atteinte pariétale avec des zones total et le LDL-cholestérol s’abaissent sous traitement. Les
de prolifération endothéliales associées à des thrombi [17]. Les progestatifs de type androgénique ont un effet inverse sur la lipase
études plus récentes portant sur les examens nécropsiques des hépatique. Ces progestatifs androgéniques sont les norstéroïdes et
femmes décédées par accident vasculaire sous pilule montrent qu’il l’acétate de médroxyprogestérone (MPA) avec un effet dose
n’y a pas d’athérome galopant mais, au contraire, une relative dépendant qui apparaît plutôt à 10 mg par jour qu’à des doses
protection par rapport aux femmes n’ayant pas pris la pilule. plus faibles pour le MPA. Les autres progestatifs pregnanes ou la
progestérone naturelle semblent neutres vis-à-vis de la lipase
¶ Contraceptions progestatives hépatique comme l’étude PEPI (Postmenopausal Estrogen/Progestin
Les norstéroïdes à fortes doses ont un effet procoagulant et ont Interventions) l’a montré [29]. D’autres effets des estrogènes sur le
donc les mêmes contre-indications que les estroprogestatifs. Les métabolisme hépatique des LDL ont été décrits, avec une
2
Angéiologie Hormones et risque vasculaire 19-0600
Des marqueurs plus récents sont encore peu étudiés. L’élévation EDRF : endothelium derived relaxation factor.
de la Lp(a) (lipoprotéine[a]) à la ménopause semble liée à
l’augmentation du risque d’athérome. Les estrogènes par voie orale sur le plan du risque vasculaire. Quelques essais randomisés
ou extradigestive l’abaissent [18]. Il semble que les progestatifs aient montrent une modification atténuée de la prise de poids sous
également un effet dans ce sens mais très peu d’études existent à traitement substitutif. En ce qui concerne l’action sur le
l’heure actuelle. métabolisme glucidique, l’estradiol extradigestif améliore la
Cependant, la plupart des auteurs s’accordent pour penser que les sensibilité à l’insuline, la réponse pancréatique à une charge
modifications des fractions lipidiques sous traitement ne rendent glucosée. Les estrogènes conjugués ont un effet dose dépendant,
compte que d’une partie minoritaire de l’effet protecteur du THS stimulant l’insulinorésistance à forte dose mais semblant
de ménopause (25 % ?). l’améliorer à plus faible dose. Le progestatif associé est important
dans cet effet, la progestérone naturelle et les progestatifs
pregnanes utilisés en France n’auraient pas d’effet significatif sur
COAGULATION
l’insulinorésistance. En revanche, les norstéroïdes annulent ou
L’EE et les norstéroïdes sont susceptibles de modifier les facteurs inversent l’effet bénéfique de l’estradiol.
de coagulation d’origine hépatique en augmentant leur synthèse, Dans les études contrôlées, il n’y a pas de modification de la
et en particulier le fibrinogène et le facteur VII particulièrement pression artérielle moyenne. Cependant, on note des réactions
impliqués dans le risque athérogène. Ils diminuent aussi idiosyncrasiques, c’est-à-dire qu’environ 30 % des femmes
l’antithrombine III et la protéine S. deviennent hypertendues sous traitement substitutif,
Les estrogènes utilisés dans le traitement substitutif de ménopause essentiellement par voie orale [3, 14].
ont des effets différents : la plupart des auteurs retrouvent une
ACTIONS EXPÉRIMENTALES
baisse du fibrinogène quel que soit le traitement substitutif utilisé
aux doses actuellement préconisées (estrogènes conjugués
¶ Action antiathérogène
0,625 mg/j, estradiol 17β 2 mg). Les autres marqueurs ont été
moins étudiés. La résultante après administration d’estrogène par Un certain nombre de modèles animaux ont été utilisés. Il s’agit
voie orale serait donc un effet favorable sur les marqueurs du d’études chez le rat, le porc ou chez la guenon Macaque Rhésus.
risque artériel, en particulier le fibrinogène, des résultats L’ensemble de ces études, que nous ne pouvons détailler ici, a
inconstants sur l’élévation du facteur VII qui reste un marqueur de permis de montrer que l’estradiol était protecteur vis-à-vis de la
risque artériel et un effet d’activation de la fibrinolyse. Mais strie lipidique, lésion de référence en terme de maladie
parallèlement aussi les modifications vont dans le sens d’une athéromateuse. Tous les types d’estrogènes semblent protecteurs et
activation de la coagulation (baisse modérée de l’antithrombine III, l’équipe de Clarkson a même montré, chez le macaque, que
de la protéine S). Par voie extradigestive, l’estradiol entraîne très l’administration de produits de synthèse (EE et norgestrel) baisse
peu de modifications. Une seule étude rapporte à long terme (1 le HDL-cholestérol mais est capable de diminuer significativement
an) une baisse modérée de l’antithrombine III [19]. Il est difficile à la surface des plaques d’athérome. Cet effet est également retrouvé
l’heure actuelle de conclure sur les effets cliniques de l’ensemble avec l’estradiol 17β [1].
de ces modifications biologiques d’autant qu’elles s’associent à des Les progestatifs sont susceptibles d’atténuer cet effet bénéfique, que
effets directs sur la paroi vasculaire qui commencent seulement à ce soit dans le modèle de singe ou de lapin [13]. Très récemment, on
être décrits. a rapporté que l’administration continue de MPA (actuellement
préconisée pour éviter la survenue de règles sous traitement
substitutif de préférence à l’administration séquentielle) pourrait
AUTRES ÉLÉMENTS DU RISQUE VASCULAIRE
faire disparaître l’effet protecteur des estrogènes [2].
Il faut aussi rajouter dans l’évaluation du risque ou du bénéfice Quelques études in vivo, de résultats d’ailleurs éventuellement
vasculaire des hormones leur action sur le métabolisme glucidique, contradictoires, évoquent une action antioxydante des estrogènes
le poids, la pression artérielle. Les estroprogestatifs de synthèse sur le métabolisme LDL [4, 25]. La plupart des données à ce niveau
ont un effet favorisant sur la prise de poids, l’insulinorésistance et sont obtenues d’expériences in vitro. La baisse de l’oxydation des
la néoglucogenèse au niveau hépatique, l’augmentation de LDL serait une action puissamment antiathérogène compte tenu
synthèse de l’angiotensinogène et l’augmentation moyenne des des effets délétères attribués aux LDL oxydés (tableau II).
chiffres de pression artérielle.
L’administration d’estradiol s’opposerait à la redistribution des ¶ Action de vasodilatation (tableau III)
graisses de type androïde observée en l’absence de traitement Un certain nombre de modèles expérimentaux d’études in vitro
substitutif à la ménopause, ce qui est un résultat a priori favorable sont actuellement développés permettant d’étudier l’action des
3
19-0600 Hormones et risque vasculaire Angéiologie
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Angéiologie Hormones et risque vasculaire 19-0600
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5
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0605
19-0605
Hyperhomocystéinémie
P Cacoub
P Hausfater
N Jacob
Résumé. – Depuis une quinzaine d’années, les données s’accumulent sur des modèles cellulaires in
vitro, des modèles expérimentaux, et à partir d’études cliniques, suggérant qu’une augmentation
modérée de l’homocystéinémie est un facteur de risque vasculaire indépendant. Dans ce chapitre sont
abordés les différents arguments expérimentaux, biochimiques, cliniques et thérapeutiques impliquant
l’hyperhomocystéinémie dans le développement d’une athérosclérose précoce, et de thromboses
artérielles ou veineuses.
© 1999, Elsevier, Paris.
Cystéine Cystéine
Métabolisme de l’homocystéine 1 Métabolisme simplifié de la méthionine.
1. Cystathionine bêta-syntase ; 2. 5-10-méthylène-THF-réductase ; 3. 5-méthyl-
L’HCY est synthétisée au cours du métabolisme de la méthionine, THF-homocystéine-méthyl-transférase ; 4. bétaïne-homocystéine-méthyl-trans-
au carrefour des voies de la transsulfuration et de la reméthylation férase.
(fig 1) . Les principaux facteurs limitants sont les activités
enzymatiques de la CBS et la MTHFR et de leurs cofacteurs plus élevée chez l’homme. Les normales d’HCY totale sont de 10 à
vitaminiques (folates, vitamine B6, vitamine B12). Une ou plusieurs 15 µmol/L, mais varient d’un laboratoire à l’autre (technique de
anomalies enzymatiques conduiront à une augmentation de l’HCY dosage, choix des populations témoins), imposant pour chaque
totale plasmatique [3, 22]. L’HCY plasmatique augmente avec l’âge, étude une population témoin appariée pour l’âge et le sexe [3, 6]. Le
les médicaments interférant avec le métabolisme des folates, le taux dosage d’HCY, après test de charge à la L-méthionine, a été
de créatininémie, la dégradation de la fonction hépatique, et est proposé pour dépister les formes hétérozygotes au cours
desquelles les taux d’HCY basale peuvent être modérément élevés,
voire normaux [6] . Toutefois ce test pose certaines difficultés
Patrice Cacoub : Professeur des Universités, praticien hospitalier service de médecine interne d’interprétation (définition des valeurs normales et pathologiques,
Pierre Hausfater : Chef de clinique-assistant, service de médecine interne
délai séparant l’ingestion de la méthionine et le dosage de l’HCY
© Elsevier, Paris
Toute référence à cet article doit porter la mention : Cacoub P, Hausfater P et Jacob N. Hyperhomocystéinémie. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0605, 1999, 4 p.
19-0605 Hyperhomocystéinémie Angéiologie
Au cours de l’homocystinurie homozygote par déficit enzymatique rapidement l’apparition de lésions endothéliales myo-intimales
total, le diagnostic pose peu de problèmes (taux plasmatique avec cellules musculaires lisses dans l’intima.
d’HCY supérieur à 300 µmol/L et activité enzymatique Dans les premières études cliniques [21] , chez des patients
indétectable). Les conséquences pathologiques sont caricaturales sélectionnés (athérosclérose symptomatique, avant l’âge de 55 ans,
avec une athérosclérose extensive avant l’âge de 20 ans et des sans facteur de risque vasculaire associé), l’HCY était élevée chez
thromboses artérielles et veineuses multiples conduisant au décès 23 à 47 % des patients présentant des lésions des troncs supra-
précoce des patients. Cette pathologie est exceptionnelle dans la aortiques ou une artériopathie oblitérante des membres inférieurs,
population générale et n’a que peu d’impact en termes de santé et 10 à 24 % des patients avec atteinte coronaire, contre 7 % dans
publique. Les déficits hétérozygotes posent une problématique très les populations témoins. La plupart de ces études avaient des
différente. L’HCY basale peut être normale ou peu augmentée et limites méthodologiques, notamment leur caractère rétrospectif ou
alors le test de charge en méthionine prend toute sa valeur. La transversal, avec mesure de l’HCY après la survenue d’un accident
mesure directe de l’activité de la CBS in vitro dans des fibroblastes vasculaire (coronarien, cérébral ou des membres inférieurs), ce qui
en culture ou dans les lymphocytes est possible [6, 18] mais ne peut, ne permettait pas de faire la part entre une hyperhomocystéinémie
dans l’état actuel des choses, être proposée comme test de routine. primitive favorisant le développement de l’athérosclérose et des
Théoriquement, l’activité de la CBS est nulle chez le sujet thromboses artérielles, ou une hyperhomocystéinémie secondaire
homozygote et est de 50 % chez le sujet hétérozygote. En fait, les survenant après les accidents artériels eux-mêmes liés à d’autres
mesures pratiquées chez les patients montrent des taux d’environ facteurs.
30 % chez l’hétérozygote, suggérant une hétérogénéité allélique Les données récemment publiées de plusieurs études prospectives
s’exprimant au niveau phénotypique. L’activité enzymatique de la [10, 27]
permettent de répondre à ces légitimes objections et de
CBS est mesurée en quantifiant la cystathionine radioactive confirmer que l’hyperhomocystéinémie modérée est un facteur de
produite par les fibroblastes dermiques en culture ou les risque vasculaire indépendant. La Physician’s Health Study [27] est
lymphocytes activés des malades à partir d’une quantité de sérine une étude cas-témoin appariée, réalisée au sein d’une cohorte de
radioactive connue. McGuil et al [16] ont fait une analyse des 15 000 hommes, médecins américains, initialement exempts d’atteinte
résultats du dosage de l’HCY de base et après test de charge en coronaire, avec un suivi prospectif de 5 ans. L’HCY plasmatique
méthionine et de la mesure de l’activité de la CBS, dans plusieurs basale mesurée à l’entrée dans l’étude était significativement plus
études comportant une population de témoins et une population élevée dans le groupe des 271 sujets qui présenteront un infarctus
d’hétérozygotes obligatoires. Ces auteurs ont montré qu’aucune aigu du myocarde durant le suivi, que dans un groupe témoin
méthode employée seule ne peut différencier les hétérozygotes apparié. En raisonnant sur les valeurs moyennes d’HCY, le risque
obligatoires des témoins du fait du recouvrement des valeurs relatif d’infarctus était de 1,18, équivalent à une augmentation du
individuelles, suggérant l’utilisation de plusieurs méthodes en risque de 18,2 % pour chaque dépassement de l’HCY d’une déviation
parallèle pour définir ces sujets. Des études récentes ont permis de standard. Si l’on analyse les résultats en termes de cas exposés, c’est-
cloner le gène codant pour la CBS. Il a été ensuite possible de à-dire de sujets présentant à l’entrée dans l’étude une augmentation
détecter des anomalies moléculaires au niveau de ce gène chez des de l’HCY au-dessus de 15,8 µmol/L (moyenne plus deux écart-
sujets homozygotes, mais aussi chez des hétérozygotes à risque de types), l’hyperhomocystéinémie était retrouvée chez 11 % des
complications thromboemboliques. Plus d’une quinzaine de malades contre 2 % des témoins (risque relatif = 3,1). Il n’y avait pas
mutations du gène de la CBS ont été identifiées [ 2 4 ] . Ces de corrélation entre l’hyperhomocystéinémie et les autres facteurs de
descriptions ont, non seulement un intérêt diagnostique, mais aussi risque vasculaire.
thérapeutique, car certaines mutations sont associées à la bonne
réponse à une surcharge en vitamine B6. On peut ainsi espérer que Dans l’étude de Selhub et al [25], émanation de la cohorte de
les progrès de la génétique et de la biologie moléculaire Framingham, portant sur 1 041 sujets (418 hommes, 623 femmes,
permettront, dans un futur proche, un dépistage « direct » des âgés de 67 à 96 ans), le pourcentage de sujets avec une sténose
sujets à risque par recherche de l’anomalie moléculaire du gène de carotidienne en échographie doppler augmentait de façon linéaire
la CBS, avec des conséquences thérapeutiques préventives ciblées. avec les taux d’HCY, passant de 25 % pour une HCY à 8 µmol/L à
plus de 50 % pour une HCY dépassant 18 µmol/L. Ces différences
Depuis une quinzaine d’années, les données s’accumulent sur des restaient hautement significatives après ajustement de l’âge, du
modèles cellulaires in vitro, des modèles expérimentaux, et à partir sexe, du taux d’high density lipoprotein (HDL cholestérol), de la
d’études cliniques, suggérant qu’une augmentation modérée de pression artérielle systolique et du tabagisme. L’augmentation du
l’HCY est un facteur de risque indépendant pour le développement risque de sténose carotidienne apparaissait même chez les sujets
d’une athérosclérose précoce, et un facteur de risque de thrombose avec une HCY « normale » par rapport aux témoins, suggérant
artérielle ou veineuse. que les critères habituellement utilisés pour définir
l’hyperhomocystéinémie (taux supérieur à la moyenne plus deux
écarts-types des sujets témoins) pourraient être reconsidérés.
Hyperhomocystéinémie, D’autant que des résultats proches ont été retrouvés dans d’autres
athérosclérose et thromboses études pour le risque d’infarctus du myocarde, d’épaississement
artérielles de la paroi carotidienne, de sténose carotidienne déterminée par
angiographie, et d’accident vasculaire cérébral transitoire ou
Les modèles expérimentaux, présentant des lésions vasculaires constitué [7, 20].
proches de celles que l’on voit chez l’homme dans les cas de déficit Une étude prospective et contrôlée au Royaume-Uni, à partir d’une
homozygote en CBS, reposent sur l’administration par voie cohorte de plus de 5 000 hommes âgés de 40 à 59 ans suivis depuis
parentérale aux animaux (lapins, babouins, rats) d’HCY thiolactone 1980 [20], a également trouvé une augmentation significative des
qui s’hydrolyse spontanément en HCY. Les animaux développent taux d’HCY plasmatique chez les sujets ayant fait un accident
des plaques fibreuses, différentes des habituelles plaques vasculaire cérébral ischémique par rapport aux témoins appariés
fibrolipidiques, associant une hyperplasie des cellules musculaires (13,7 versus 11,9 µmol/L, p = 0,004). Le risque relatif augmentait
lisses, des dépôts et épaississements des matrices extracellulaires, parallèlement aux taux d’HCY. L’HCY était un facteur de risque
et une fragmentation de la limitante élastique interne qui se indépendant des autres facteurs de risque vasculaire.
dissèque longitudinalement. L’administration concomitante de Une seule étude contrôlée finlandaise trouve des résultats
doses importantes de cholestérol et d’HCY thiolactone entraîne une divergents [1], à partir d’une cohorte de 7 424 hommes et femmes,
amplification marquée des lésions et une modification des âgés de 40 à 64 ans, suivis depuis 1977, en ne trouvant pas de
altérations fibrosclérotiques vers des lésions fibrolipidiques. différence significative d’HCY chez les sujets faisant un infarctus
L’administration intraveineuse chronique d’HCY provoque myocardique ou un accident vasculaire cérébral ischémique.
2
Angéiologie Hyperhomocystéinémie 19-0605
Les données concernant l’artériopathie des membres inférieurs sont modifications prothrombogènes des facteurs de la coagulation [14].
comparables, bien que moins nombreuses. Plusieurs travaux [10, 17] Les cellules endothéliales présentent des vacuolisations, des
ont montré que les patients présentant une artériopathie oblitérante fragmentations nucléiques et de la nécrose fibrinoïde. L’HCY induit
des membres inférieurs, avaient des taux d’HCY plus élevés que une apoptose des cellules endothéliales, une prolifération des
les témoins. Les patients avec une hyperhomocystéinémie avaient cellules musculaires lisses, associée à des perturbations des
une évolutivité plus importante de leur artériopathie [28]. synthèses du collagène et des matrices glycoprotéiques
extracellulaires, aboutissant à une fragmentation des fibres
élastiques et des calcifications pariétales [30]. L’HCY, par le biais des
Hyperhomocystéinémie et espèces oxygénées réactives, provoque l’oxydation des
thromboses veineuses lipoprotéines low density lipoprotein (LDL), favorisant leur
captation par les macrophages et les cellules musculaires lisses.
Au cours de la maladie veineuse thromboembolique, le nombre L’exposition prolongée de culture de cellules endothéliales à l’HCY
d’études est beaucoup plus faible mais les liens avec une entraîne une diminution de la production de monoxyde d’azote [26].
hyperhomocystéinémie modérée semblent étroits. Dans les L’HCY inhibe l’expression à la surface endothéliale de la
premières études [3], la prévalence d’une hyperhomocystéinémie thrombomoduline, active la protéine C et le facteur V, inhibe la
basale ou après charge en méthionine était significativement plus production du facteur de Willebrand et augmente l’activité
élevée chez les patients avec maladie thromboembolique veineuse procoagulante du facteur tissulaire [23].
que chez les témoins appariés pour l’âge et le sexe. L’interprétation
n’était pas simple car de nombreux patients avaient d’autres
facteurs de risque de thrombose (traitement œstroprogestatif,
tabagisme, syndrome myéloprolifératif, thrombocytémie
essentielle, anticoagulant circulant, etc). Conséquences thérapeutiques
Plus récemment, Den Heijer et al [8] ont étudié 185 patients ayant possibles
présenté des thromboses veineuses récidivantes et 220 témoins. Une
hyperhomocystéinémie basale ou après test de charge en méthionine,
était retrouvée chez 25 % des patients contre 9 % des témoins (risque La surcharge vitaminique (acide folique, vitamine B6), à doses
relatif = 3,1, risque ajusté = 2,0). Le risque de thrombose veineuse modérées et donc sans risque métabolique, permet de normaliser
augmentait progressivement avec l’augmentation des taux d’HCY : de les taux HCY plasmatiques, même en l’absence de carence. Il est
2,7 pour une HCY à 16,2 µmol/L (80e percentile), à 3,1 pour une HCY probable que l’apport en excès de ces différentes vitamines,
à 22 µmol/L (95e percentile). Comme pour le développement de cofacteurs des enzymes clés du métabolisme de l’HCY, permette
l’athérosclérose, il n’y a donc pas forcément un seuil d’HCY chez les sujets hétérozygotes d’augmenter l’activité déficiente de
plasmatique net au-delà duquel le risque augmente. Comme pour ces enzymes, et donc de normaliser les taux d’HCY. Il est déjà
d’autre facteurs de risque de thromboses veineuses profondes, deux démontré que la supplémentation alimentaire en folates et
des études publiées retrouvaient fréquemment (40 à 54 %) chez les thiamine permet de diminuer significativement les taux d’HCY [11].
patients hyperhomocystéinémiques un autre facteur de risque Une méta-analyse récente suggère un rôle bénéfique d’une
prothrombotique. Dautres travaux portant sur les thromboses supplémentation en folates, à des posolgies quotidiennes de 1 à
veineuses ou artérielles ont souligné la grande prévalence d’une 2 mg [5]. Le véritable problème, non encore résolu, est de savoir si
hyperhomocystéinémie dans ces contextes [3, 29].
la normalisation ou l’abaissement des taux d’HCY pendant une
période prolongée peut diminuer le risque vasculaire, en termes
d’événement clinique (accident vasculaire cérébral, coronarien ou
Physiopathologie des atteintes des membres inférieurs), ou en termes de modification objective
vasculaires associées (échodoppler des carotides). Plusieurs études prospectives de
à l’hyperhomocystéinémie prévention secondaire sur ce thème ont (ou vont) démarrer
prochainement [9] et devraient apporter des réponses claires à ces
L’élévation prolongée des taux d’HCY plasmatique entraîne des questions aux conséquences potentiellement majeures pour la santé
lésions des cellules pariétales vasculaires, du tissu conjonctif, et des publique.
Références ➤
3
19-0605 Hyperhomocystéinémie Angéiologie
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4
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0530
19-0530
Toute référence à cet article doit porter la mention : Y Castier, C Saliou, P Julia et JN Fabiani. Ischémie aiguë des membres. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0530, 1997, 5 p.
19-0530 Ischémie aiguë des membres Angéiologie
¶ Causes médicamenteuses
Étiologie Elles ne sont pas négligeables. Il s’agit de l’ergotisme, de la prise
au long cours d’estroprogestatifs, d’injection intra-artérielle de
certains médicaments (drogue vasoconstrictive, produits
EMBOLIE
sclérosants veineux, barbituriques). L’allergie à l’héparine tient une
Les embolies représentent la première cause d’ischémie aiguë des place à part, elle doit être recherchée dans tous les cas
membres [18]. Le membre inférieur est cinq fois plus souvent atteint, d’oblitération vasculaire aiguë survenant chez un patient traité par
en général au niveau des bifurcations du fait du changement brutal héparine.
du calibre artériel. Les territoires les plus touchés sont dans l’ordre :
la bifurcation fémorale, l’artère poplitée, l’étage aorto-iliaque. Au ¶ Compression extrinsèque
niveau du membre supérieur l’artère humérale est le siège
On peut citer : artère poplitée piégée, kyste adventiciel poplité,
préférentiel des embolies.
syndrome des loges, syndrome du défilé thoracobrachial, tumeur
L’origine est cardiaque dans 90 % des cas [5] : au voisinage d’un axe artériel.
– arythmie complète par fibrillation auriculaire (60 à 70 %),
survenant le plus souvent dans le cadre d’une cardiopathie ¶ Autres cas
d’origine ischémique (l’incidence du rhumatisme articulaire aigu
ayant nettement diminué) ; – Artériopathie non athéromateuse des gros troncs (maladie de
Takayashu, périartérite noueuse) et des artères de petits calibres
– infarctus du myocarde (20 %), le thrombus est le plus souvent (maladie de Buerger, sclérodermie).
situé à l’apex du ventricule gauche (VG) et survient après un
infarctus transmural antérieur. L’embolie artérielle se produit en – États d’hypercoagubilité sanguine : syndrome myéloprolifératif,
général dans le premier mois après l’infarctus (14 jours, en néoplasie, lupus érythémateux aigu disséminé, déficit en facteurs
moyenne) ; de l’hémostase (antithrombine III, protéine C ou S).
– d’autres causes moins fréquentes : anévrysme cardiaque,
CAS PARTICULIERS
endocardite bactérienne, tumeur cardiaque (myxome), thrombose
des valves cardiaques mécaniques, cardioversion.
¶ Traumatisme vasculaire [19]
L’origine est extracardiaque dans 5 à 10 % des cas ;
La plaie artérielle peut être franche, la solution de continuité
– anévrysmes (aorte abdominale, iliaque, poplité, sous-clavier,
intéressant les trois tuniques (intima, média, adventice). Elle peut
axillaire) ;
être contuse, il s’agit alors d’une rupture sous-aventicielle de la
– lésions d’athérosclérose ulcérées ou végétantes ; média ou de l’intima. Les ruptures intimales isolées sont très
– embolie à partir d’un site d’implantation d’une prothèse importantes à connaître car elles respectent souvent la perméabilité
thrombosée ; immédiate, la thrombose aiguë pouvant survenir dans un
deuxième temps par dissection ou décollement du lambeau
– embolie paradoxale ; intimal.
– embolie septique ;
¶ Dissection aortique [22]
– complications d’un cathétérisme artériel ;
À partir de la rupture (porte d’entrée), la dissection se propage
– tumeur de l’aorte (exceptionnel).
vers l’aval et vers l’amont. Toutes les artères naissant de l’aorte
Dans 5 à 10 % des cas, la cause reste inconnue dans la plupart des peuvent être intéressées, déterminant autant de territoires
séries [5]. ischémiés. Le mécanisme habituel de ces complications vasculaires
périphériques est une compression extrinsèque de l’orifice artériel
THROMBOSE (lumière) par le faux chenal ou par le décollement intimal. C’est
l’oblitération de la lumière d’une ou des artères iliaques qui est à
l’origine des ischémies des membres inférieurs au cours de la
¶ Occlusions d’artères athéromateuses
dissection aortique.
C’est la première cause de thrombose artérielle in situ, survenant
le plus souvent au niveau des segments les plus sténosés de
l’artère. Plusieurs facteurs favorisants sont à connaître : hémorragie Diagnostic
intraplaque, hypovolémie, polyglobulie, bas débit cardiaque,
traumatisme [13] . En général, ces patients ont développé une Le diagnostic d’ischémie aiguë des membres est clinique.
circulation collatérale et l’ischémie est moins sévère, néanmoins
Les cinq signes essentiels sont : la douleur, l’abolition des pouls, la
celle-ci peut être grave et révélatrice de la maladie sous-jacente.
pâleur, les paresthésies et la paralysie. L’abolition des pouls distaux
est la règle. Les pulsations juste en amont de l’obstruction peuvent
¶ Thromboses d’anévrysmes être anormalement fortes. Dans le cas d’une embolie, les pouls
Elles représentent la deuxième cause de thrombose artérielle in d’aval sont parfois normaux au début de l’évolution, transmis par
situ. L’accident le plus fréquent étant la thrombose d’un anévrysme un embole frais. La douleur est en général intense, de début brutal,
poplité qui est un accident grave, de traitement difficile (la lésion localisée, englobant le groupe de muscles au-dessous du niveau de
anévrysmale ayant de façon presque constante embolisé à bas bruit l’occlusion. Le membre est pâle, froid et les veines sont vides et
au cours de son évolution) [15]. La thrombose d’un anévrysme collabées.
fémoral, iliaque ou aortique peut également être à l’origine d’une Les signes neurologiques sont inconstants, lorsqu’ils sont présents,
oblitération artérielle aiguë. ils témoignent de la gravité de l’ischémie. Les paresthésies avec
2
Angéiologie Ischémie aiguë des membres 19-0530
Examens complémentaires,
prise en charge
1 Artériographie montrant un aspect typique d’occlusion par embolie de la fémo-
La prise en charge optimale d’une ischémie aiguë des membres rale superficielle.
nécessite une structure disponible 24 heures sur 24 avec une
coopération radiomédicochirurgicale effective afin d’envisager la
chirurgical des vaisseaux à désobstruer. En présence d’un pouls
revascularisation dans les meilleures conditions.
fémoral, l’artériographie doit être systématique et pourra être
Certains examens sont systématiques et doivent être réalisés en réalisé dans le même temps qu’un acte thérapeutique endoluminal.
urgence : numération-formule sanguine, glycémie, ionogramme Il faut retenir que, dans tous les cas, une opacification des
sanguin, créatinine et urée plasmatique, recherche de vaisseaux d’un membre peut être facilement obtenue au bloc
myoglobinémie et de myoglobinurie, dosage des créatinine-kinases opératoire.
(CPK), groupe, Rhésus, recherche d’agglutinines irrégulières [RAI],
Quant aux examens à visée étiologique comme l’échographie
bilan d’hémostase complet (international normalised ratio [INR],
cardiaque transœsophagienne qui recherche une cardiopathie ou
taux de céphaline activée, fibrinogène, plaquettes),
un thrombus intracardiaque, ils seront réalisés après la
électrocardiogramme (ECG). L’échographie doppler fait également
revascularisation effectuée.
partie de cette liste, car elle est rapide à réaliser et apporte des
renseignements précieux [4]. L’examen doppler contribue à la
quantification du degré d’ischémie, permettant la mesure des
pressions distales en doppler continu ainsi que l’enregistrement du Traitement
flux veineux. Il apporte une aide au diagnostic topographique de
l’ischémie en précisant le siège de l’occlusion et la qualité de la Il s’agit d’une urgence médicochirurgicale dont la prise en charge
réentrée. L’échographie permettra, dans le bilan étiologique, de optimale sera réalisée en unité de chirurgie vasculaire. Le
rechercher une source de thrombose (anévrysme ou piège localisé), traitement médical comporte l’anticoagulation par héparine à dose
de même qu’une source potentielle d’emboles comme un efficace par voie intraveineuse qui sera débutée dès le diagnostic
anévrysme de l’aorte abdominale. Elle évaluera également la posé. Son but est de limiter l’extension de l’occlusion artérielle afin
qualité de la paroi artérielle au site occlus, l’existence ou non d’une de préserver la collatéralité et le réseau distal, et de favoriser la
sténose calcifiée, par exemple. fibrinolyse physiologique. Il est de règle d’y adjoindre des drogues
L’artériographie lorsqu’elle est pratiquée, offre cinq pôles d’intérêt : vasodilatatrices, surtout chez les patients artéritiques. La
elle montre l’aspect de l’occlusion (fig 1) , visualise l’état des réanimation comporte la correction des troubles hydro-
vaisseaux d’amont, apprécie la qualité du réseau collatéral, établit électrolytiques et de l’acidose métabolique, elle sera guidée par
un pronostic sur la possibilité de restauration artérielle et peut l’état clinique et le résultat des examens biologiques. L’emploi
mettre en évidence, en cas d’origine embolique, un certain nombre d’antalgiques puissants est nécessaire au confort du malade.
d’emboles (homo- ou controlatéraux) cliniquement latents [3].
L’artériographie ne doit entraîner aucun retard thérapeutique qui DIFFÉRENTES MÉTHODES THÉRAPEUTIQUES
pourrait être fatal, notamment lorsque le patient présente des
Le chirurgien vasculaire dispose de nombreux moyens
signes sensitivomoteurs à son arrivée, et que l’opacification ne peut
thérapeutiques. Son choix dépend de la sévérité de l’ischémie, de
être obtenue immédiatement. Le cas le plus typique étant celui de
l’état du réseau artériel, de l’origine probable de l’oblitération
la paralysie ischémique par embolie du carrefour aortique venant
(thrombose in situ ou embolie) et de l’état général du patient.
compliquer une cardiopathie. En effet, le diagnostic est évident, et
le geste chirurgical d’embolectomie en urgence est le seul à même
de préserver le risque vital. ¶ Embolectomie chirurgicale
En général, devant une histoire embolique typique sur artères L’embolectomie par cathéter de Fogarty [9], introduite en 1963, a
saines et l’absence de pouls fémoral, l’artériographie conven- transformé le pronostic des embolies artérielles. Cette technique
tionnelle ne présente que peu d’intérêt. De plus, elle pourra être est simple, rapide, efficace et peut être réalisée sous anesthésie
supplée au bloc opératoire par une angiographie après abord locale. Elle permet une désoblitération rétrograde et antérograde
3
19-0530 Ischémie aiguë des membres Angéiologie
aussi étendue que nécessaire. La voie d’abord est dictée par la situ localisée, la thromboaspiration associée à une angioplastie,
clinique [23]. Pour les membres inférieurs, on aborde en général le précédée si besoin d’une courte fibrinolyse in situ est une
trépied fémoral au niveau de l’aine, ou bien l’artère poplitée technique de remplacement intéressante chez des patients à haut
distale. Pour le membre supérieur c’est l’artère humérale au niveau risque chirurgical [4].
de la gouttière bicipitale interne, ou au pli du coude qui est le plus Cette technique présente l’avantage d’un moindre traumatisme de
souvent abordée. l’endothélium par rapport à l’utilisation de la sonde de Fogarty.
Le cathéter de Fogarty (dont le diamètre est adapté au calibre du Elle est plus rapide, moins dangereuse, moins coûteuse et présente
vaisseau) est introduit par l’artériotomie, après contrôle proximal beaucoup moins de contre-indications que la fibrinolyse in situ [4].
et distal du vaisseau. Après avoir traversé le caillot, le ballonnet
est gonflé doucement et le cathéter retiré avec prudence, le ¶ Chirurgie restauratrice
gonflage étant interrompu dès qu’apparaît une résistance au retrait. Les pontages artériels en urgence sont indiqués, en première
La réapparition du flux artériel et des pouls distaux ne dispensent intention, dans certains cas de thrombose sur artères
en aucun cas d’un contrôle artériographique sur table. Cette pathologiques, ou, en seconde intention, après réalisation des
technique est utilisée en première intention par la plupart des techniques endovasculaires.
équipes, dans les cas d’embolies récentes aorto-iliaques, fémorales,
humérales et axillaires sur artères saines. La réalisation de ces pontages nécessite de trouver un axe donneur
et un axe receveur, avec un lit d’aval satisfaisant. Le trajet du
¶ Fibrinolyse in situ pontage peut être physiologique ou extra-anatomique. Le choix des
matériaux à utiliser (veines, polytétrafluoéthylène [PTFE],
Le traitement fibrinolytique a bénéficié, ces dernières années, des Dacront) est fonction de la localisation de l’oblitération. Pour les
progrès de la radiologie interventionnelle. Dotter et al [7] ont décrit, occlusions iliaques le pontage pourra être aortofémoral, croisé
pour la première fois en 1974, la technique de fibrinolyse locale fémorofémoral ou axillofémoral. Pour les occlusions poplitées, ils
intra-artérielle au contact du thrombus, la voie veineuse seront réalisés au mieux à l’aide de la veine saphène interne en
périphérique ayant été abandonnée en raison de ses complications. position fémoropoplité ou fémorojambiers.
La thrombolyse intra-artérielle est réalisée après ponction de Dans le cas particuliers de la dissection aortique, lorsque l’ischémie
l’artère fémorale, selon la technique de Seldinger. Un système de est unilatérale, le traitement consiste à effectuer un pontage
cathéters coaxiaux permet la délivrance du fibrinolytique (en fémorofémoral ; en cas d’ischémie bilatérale, la revascularisation
général l’urokinase) à des doses variables, selon les divers est alors assurée par un pontage axillobifémoral.
protocoles [16], au contact du thrombus. Cette technique impose le
respect strict de ses contre-indications à savoir : celles de la ¶ Gestes associés
fibrinolyse elle-même, l’ischémie sensitivomotrice (délai d’action
trop long) et les occlusions huméroaxillaires (en raison du risque Aponévrotomies
réel d’embolie dans le territoire vertébrobasilaire, à partir de Un œdème important après le geste de revascularisation est
thrombus se formant le long du cathéter dans une artère sous- responsable d’une augmentation de pression dans les loges
clavière avec un flux ralenti). musculaires (surtout dans la loge antérieure). Cela empêche le
Les indications principales sont : les occlusions aiguës récentes retour veineux, et une circulation distale adéquate au niveau du
(inférieures à 15 jours) des pontages fémoropoplités, certains membre menacé membre ischémié. Les aponévrotomies de
sauvetages de membres chez des patients porteurs d’occlusions décharge permettent de diminuer la pression dans le compartiment
fémoropoplitées longues sur artères pathologiques, en musculaire, et donc d’améliorer la circulation distale en ouvrant
préopératoire dans les thromboses des anévrysmes poplités [21]. On les loges ostéofibreuses. La principale complication de
peut associer à la fibrinolyse une thromboaspiration en cas de l’aponévrotomie est le sepsis qui risque de compromettre le
thrombus résiduel, ou une angioplastie en cas de sténose membre ischémié, mais aussi la vie du patient.
athéromateuse préexistante. La fibrinolyse intra-artérielle peut Ses indications varient selon les équipes chirurgicales, quasi
aussi être associée à la chirurgie pour pallier à une embolectomie systématiques pour certains [6], plus rares pour d’autres [13]. Un
incomplète [10, 17]. Récemment Armon et al [1] ont rapporté de bons enregistrement des pressions intramusculaires peut aider à la
résultats après utilisation de fibrinolyse avec pulse-spray chez décision, une valeur supérieure à 30 mmHg impose la
100 malades. La technique de pulse-spray permet d’accélérer la décompression de manière urgente. En cas d’interventions
thrombolyse par administration de l’agent fibrinolytique sous précoces, elles seront faites à ciel ouvert à l’approche de la sixième
haute pression dans le thrombus. heure d’ischémie. Ces aponévrotomies doivent être larges et
intéresser les quatre loges musculaires (antérieure, externe,
¶ Thromboaspiration postérieures, profondes et superficielles) ; on réalise deux incisions
antéroexterne et postéro-interne qui s’étendent du genou à la
La thromboaspiration par voie percutanée est une technique qui a
malléole.
été utilisée pour la première fois par Greenfield et al en 1960 [11]
pour l’aspiration d’un caillot de l’artère pulmonaire. En 1978, Lavage de membre
Horvath et al [14], puis Sniderman en 1984 [20], l’ont utilisée avec
succès dans le traitement d’embolies distales survenant après Le lavage de membre a des indications précises : ischémie grave
angioplastie. Cette technique nécessite pour être employée une (sensitivomotrice) vue tardivement et/ou ischémie de territoire très
bonne connaissance des procédures endovasculaires. Le principe important (carrefour aortique). Il est réalisé, après canulation
consiste à aspirer le thrombus par l’intermédiaire d’un cathéter artérielle, avec du sérum physiologique ou bicarbonaté ou des
introduit par voie percutanée (Désilett) présentant un orifice solutés de reperfusion (solution de Fabiani). L’axe veineux étant
unique. L’orifice distal est mis au contact du thrombus, une ouvert pour évacuer le retour du liquide de lavage, on perfuse 1 L
seringue de 50 mL permet de récupérer le thrombus fragmenter de sérum par membre inférieur.
par effet ventouse. L’ensemble de la procédure est réalisée sous
anticoagulation à dose efficace. Amputation
Les indications sont les occlusions à l’étage fémoropoplité (partie L’amputation doit parfois être réalisée d’emblée lorsqu’il existe des
terminale de la fémorale superficielle et trépied jambier) récentes signes d’ischémie dépassée, en particulier lorsque le pronostic vital
(moins de 10 jours), courtes (inférieures à15 cm), sur artères saines du patient est mis en jeu.
ou pathologiques. Elle est parfaitement adaptée au traitement des Insistons sur le fait qu’une artériographie est indispensable après
occlusions emboliques du trépied jambier. En cas de thrombose in tout geste de revascularisation quelle que soit la technique
4
Angéiologie Ischémie aiguë des membres 19-0530
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5
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0520
19-0520
Résumé.– Définis comme une inflation du liquide interstitiel, les œdèmes prédominent souvent aux
membres inférieurs et peuvent être localisés ou diffus. Les œdèmes généralisés relèvent d’une cause
systémique à l’origine d’une élévation de la pression hydrostatique capillaire, d’une diminution de la
pression oncotique des protéines ou d’une augmentation de la perméabilité capillaire. Ils
s’accompagnent toujours d’une réduction de la natriurèse. Les causes cardiaques, hépatiques et rénales
sont les plus fréquentes, mais il existe également des œdèmes généralisés relevant de cause digestives,
médicamenteuses, endocriniennes. Le traitement symptomatique repose avant tout sur la restriction
sodée, mais le recours aux diurétiques est souvent nécessaire. Les œdèmes localisés témoignent d’une
anomalie locorégionale à l’origine d’une diminution du drainage lymphatique ou d’une augmentation
de la pression capillaire. Il s’agit essentiellement d’œdèmes d’origine veineuse ou lymphatique dont la
contention et le drainage déclive constituent un traitement symptomatique toujours nécessaire.
© Elsevier, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : JM Kerleau et H Lévesque. Œdèmes des membres inférieurs. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0520, 1997, 6 p.
19-0520 Œdèmes des membres inférieurs Angéiologie
Ve i n u l e
cartonnée, voire inflammatoire.
Vaisseau lymphatique
35 Pression hydrostatique plasmatique 25 Le retentissement fonctionnel de ces œdèmes est variable. Il peut
1 Pression oncotique interstitielle 1 aller de la simple plainte d’ordre esthétique jusqu’à la gêne à la
marche, voire la perte d’autonomie chez le sujet âgé. Une
20 L / 24h Capillaire 18 L / 24h
impression de lourdeur des membres inférieurs et de tension de la
peau des extrémités sont ses expressions les plus courantes.
Une rétention hydrosodée majeure peut s’accompagner
d’épanchements des séreuses : cavité péritonéale, plèvre et
Capillaire lymphatique
péricarde. Il s’agit toujours d’un liquide stérile, pauvre en protides
2 L / 24h et en nombre de cellules. L’association d’œdèmes diffus,
d’épanchements des séreuses et d’œdèmes viscéraux (pulmonaire)
réalise le tableau clinique d’anasarque.
1 Mouvements d’eau et de substances dissoutes à travers la membrane capillaire
et leurs déterminants. Un certain nombre de signes cliniques et biologiques
accompagnent les œdèmes généralisés. Quand le secteur interstitiel
fonctionnelle) qui majore la rétention de sodium alors que le rein a s’expand, une oligurie avec réduction de la natriurèse (<
un fonctionnement normal (œdème secondaire). 10 mmol/j) apparaît. Lorsque l’hyperhydratation concerne
Les mécanismes régulateurs sont complexes ; ils font intervenir l’ensemble du secteur extracellulaire (plasmatique et interstitiel),
l’angiotensine II et l’aldostérone sous l’influence de la rénine, mais la baisse de l’hématocrite et de la protidémie traduit
également la baisse des prostaglandines (PGI2, F2, G2). La mise en l’hémodilution. La baisse de l’osmolalité extracellulaire peut
jeu de l’hormone antidiurétique et du facteur atrial natriurétique favoriser une hyperhydratation globale avec ses manifestations
est également importante mais plus tardive. cliniques (céphalée, asthénie, troubles de la vigilance, nausée,
vomissement) et biologiques habituels (hyponatrémie,
APPROCHE CLINIQUE hypo-osmolarité).
Œdèmes généralisés
Débit cardiaque
élevé
Thyrotoxicose Insuffisance cardiaque
Anémie
Béribéri Protéinurie HTP + insuffisance hépatique
FAV Cœur
Foie
Cirrhose
Débit cardiaque HTP non cirrhotique
bas
insuffisance cardiaque globale Rein
insuffisance cardiaque droite isolée Syndrome néphrotique
- péricardite Syndrome néphritique
- embolie et maladie artère pulmonaire Insuffisance rénale
- bronchopathies
2 Œdèmes généralisés : arbre décisionnel. HTP : hypertension portale ; FAR : fistule artériovéineuse.
2
Angéiologie Œdèmes des membres inférieurs 19-0520
efficace favorisant la rétention rénale de sodium. On retiendra que Autres hypertensions portales
c’est l’insuffisance ventriculaire droite qui constitue le déterminant
Beaucoup plus rarement peuvent s’observer des œdèmes des
essentiel des œdèmes d’origine cardiaque. Les premiers signes de
membres inférieurs lors d’hypertension portale globale
la surcharge hydrosodée sont, avant les œdèmes, la prise de poids
(thrombose des veines sus-hépatique ; syndrome de Budd -
et l’oligurie. Les œdèmes vont épargner classiquement le thorax,
Chiari, maladie veino-occlusive du foie, bilharziose hépatique) ou
les membres supérieurs et la face. Ils s’associent aux autres signes
segmentaire (tumeur pancréatique, pseudokyste comprimant ou
d’insuffisance cardiaque droite, hépatalgie, tachycardie,
obstruant le tronc porte sous-hépatique) sans cirrhose du foie
turgescence des veines jugulaires, hépatomégalie sensible à bord
associée.
inférieur mousse, reflux hépatojugulaire. En fonction de l’étiologie,
on rencontrera également des signes d’insuffisance ventriculaire
gauche. ¶ Œdèmes généralisés uronéphrologiques
Ces œdèmes cardiaques sont en rapport : soit avec une insuffisance
Syndrome néphrotique
ventriculaire droite compliquant une insuffisance cardiaque gauche
(d’origine ischémique, hypertensive, valvulaire, cardiomyo- Défini par une protéinurie (> 3 g/24 h), une hypoalbuminémie
pathique, etc), soit avec une insuffisance cardiaque droite sans (< 30 g/L) et une hypoprotidémie (< 60 g/L), le syndrome
insuffisance cardiaque gauche lors de l’existence de maladie néphrotique ou syndrome de néphropathie glomérulaire est l’une
péricardique, de complications de maladie de l’artère pulmonaire des causes cardinales de syndrome œdémateux généralisée.
(embolie, fibrose, etc) ou de l’appareil pulmonaire proprement dit L’inflation hydrosodée dans le secteur interstitiel est classiquement
(bronchopathie chronique obstructive, etc). mise sur le compte de l’hypoalbuminémie consécutive à la
protéinurie et à l’hypercatabolisme protidique, dépassant les
Insuffisance cardiaque à débit conservé capacités de synthèse protéique du foie. La diminution de la
pression oncotique vasculaire engendre une accentuation des
Les grosses fistules artérioveineuses, le béribéri, les anémies
mouvements liquidiens transcapillaires, au détriment du secteur
sévères, la thyrotoxicose, certains états infectieux, la maladie de
plasmatique, et une hypovolémie réelle ; cette dernière activant les
Paget et la grossesse normale peuvent être à l’origine d’un
mécanismes de la rétention rénale de sodium. Mais des éléments
syndrome œdémateux par insuffisance cardiaque à débit élevé.
récents, réninémie et aldostéronémie basses avec un volume
Dans ces situations cliniques, le volume sanguin artériel efficace
plasmatique normal, amènent à s’interroger sur la réalité de cette
est diminué du fait de la baisse primitive de la résistance
approche classique. Lors de certaines glomérulopathies membrano-
périphérique totale. L’hypotension artérielle active les systèmes
prolifératives ou extramembraneuses s’accompagnant d’un
sympathique et rénine-angiotensine-aldostérone, et favorise la
syndrome néphrotique, l’initiateur de la rétention sodée rénale
rétention hydrosodée rénale. Le volume sanguin total, tout comme
serait une augmentation de la réabsorbtion tubulaire de sodium,
le débit cardiaque, sont augmentés créant un syndrome
comme dans la glomérulonéphrite aiguë.
hypercinétique (insuffisance cardiaque à débit élevé). Le débit
sanguin rénal et la filtration glomérulaire sont préservés, voire Ces œdèmes néphrotiques touchent l’ensemble de l’organisme, en
augmentés ce qui tend à limiter l’importance des œdèmes. Un tel particulier les membres supérieurs et la face.
syndrome hypercinétique peut également être constaté au cours La recherche d’une protéinurie d’abord à la bandelette urinaire,
de la cirrhose hépatique. puis au dosage pondéral urinaire du nycthémère, les anomalies du
contenu protéique plasmatique (électrophorèse des protéines)
¶ Œdèmes généralisés hépatiques viendront affirmer le diagnostic de syndrome néphrotique.
L’absence ou l’existence d’une hypertension artérielle, d’une
Cirrhose hépatique hématurie et d’une insuffisance rénale en précisera le caractère pur
Lors de la cirrhose du foie, quelle qu’en soit la cause, la survenue ou impur. La ponction-biopsie rénale permettra un diagnostic
d’œdèmes des membres inférieurs et d’une ascite est l’une des nosologique précis (glomérulopathies primitives) et sera
modalités de décompensation de l’affection et constitue un facteur déterminante dans l’attitude thérapeutique.
de mauvais pronostic.
Syndrome néphritique
Le mécanisme des œdèmes de la cirrhose est plurifactoriel.
L’insuffisance hépatocellulaire est à l’origine d’un défaut de L’œdème fait partie des symptômes observés à la phase initiale
synthèse protéique, d’une hypoalbuminémie et d’une baisse de la des glomérulonéphrites dont le prototype est la glomérulonéphrite
pression oncotique des protéines essentiellement plasmatique. aiguë postinfectieuse. Dans ce type d’affection, il existe une
L’hypertension portale associée, peut s’accompagner d’une ascite anomalie du néphron, encore mal connue, à l’origine d’une
importante, elle-même à l’origine d’une hyperpression abdominale rétention sodée primitivement rénale. Du fait que l’expansion
et d’une diminution du retour par la veine cave inférieure. réalisée n’a plus d’effet sur la réabsorption tubulaire de sodium, il
Un syndrome hypercinétique où la baisse de la résistance existe une augmentation progressive du volume extracellulaire et
périphérique totale est due aux diverses anastomoses l’œdème sera surtout secondaire à l’hyperpression hydrostatique
artérioveineuses, aux angiomes stellaires et à l’érythrose palmaire, intravasculaire. La baisse de la pression oncotique des protéines
s’observe également dans la cirrhose et contribuerait à la rétention plasmatiques secondaire à une protéinurie modérée n’a qu’un rôle
hydrosodée. L’existence d’une néphropathie avec rétention rénale adjuvant. Le rétention hydrosodée explique la fréquence de
de sodium surviendrait très précocement dans l’évolution de la l’hypertension artérielle observée.
maladie ; son existence est démontrée chez le chien mais sa Les œdèmes néphritiques sont en tout point semblables à ceux du
pathogénie reste à élucider. syndrome néphrotique. Il s’y associe une hématurie le plus souvent
Les caractéristiques cliniques des œdèmes de la cirrhose hépatique macroscopique, une protéinurie souvent modérée, une
sont superposables à celles des œdèmes cardiaques ; la hypertension artérielle (HTA) et une insuffisance rénale organique.
prédominance aux membres inférieurs pour des raisons L’oligurie est fréquente et la natriurèse faible. Des signes
« hydrostatiques » est encore cependant plus nette. Il n’existe pas extrarénaux (articulaires, cutanées, etc) peuvent être observés selon
de reflux hépatojugulaire ou d’atteinte faciale. La palpation du foie la nature de la maladie.
retrouve souvent une hépatomégalie indolore ferme, à bord La brutalité de l’inflation hydrosodée engendre parfois un œdème
inférieur tranchant. Il s’y associe des signes cliniques et pulmonaire. Le recours à la biopsie rénale, qui constitue un
paracliniques d’insuffisance hépatocellulaire et d’hypertension élément diagnostique, pronostique et préthérapeutique
portale. déterminant, est presque toujours nécessaire.
3
19-0520 Œdèmes des membres inférieurs Angéiologie
4
Angéiologie Œdèmes des membres inférieurs 19-0520
le godet, dont la recherche est douloureuse. Leur fréquence varie ¶ Œdèmes généralisés et gynécologie
selon les produits, mais cet effet indésirable concerne toutes les
molécules. Il apparaît au début du traitement et régresse lors de – La grossesse normale s’accompagne fréquemment (1 fois/3)
son arrêt. Il est plus fréquent en cas d’association à un dérivé nitré d’œdèmes qui sont multifactoriels. La rétention hydrosodée est
ou un autre vasodilatateur. À l’inverse, un diurétique ou un consécutive à l’augmentation des taux d’œstrogènes, de
inhibiteur de l’enzyme de conversion en diminuera l’importance. minéralocorticoïdes et d’angiotensinogène. Elle est accentuée par
Les dérivés nitrés et les sympatholytiques peuvent également l’hypoprotidémie physiologique et par la gêne mécanique au
induire des œdèmes modérés, surtout en cas d’insuffisance retour veineux de la partie inférieure du corps.
veineuse et d’insuffisance cardiaque congestive associée. – Lors du syndrome prémenstruel, un syndrome œdémateux
fugace, secondaire à l’hyperœstrogénie relative, peut s’observer.
Modification de la réabsorption rénale de sodium
– Dans la toxémie gravidique, des œdèmes des membres
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont des inhibiteurs des
inférieurs s’associent à l’hypertension artérielle. Ils accompagnent
prostaglandines qui peuvent favoriser la rétention sodée. La
la protéinurie et doivent faire craindre une complication
survenue d’œdème est plus fréquente avec la phénylbutazone. Les
éclamptique.
gluco- et minéralocorticoïdes, le minoxidil et le diazoxide
augmentent la rétention hydrosodée.
Les œstroprogestatifs entraînent un hyperréninisme. L’insuline à APPROCHE THÉRAPEUTIQUE
forte dose par voie veineuse peut exceptionnellement entraîner la Compte tenu de la multiplicité des situations cliniques que nous
formation d’œdèmes. venons d’énumérer, il n’est pas possible de détailler le traitement
La toxicité rénale de la ciclosporine peut se traduire par un étiologique de tous les œdèmes généralisés. Il doit cependant
syndrome œdémateux. constituer l’objectif essentiel de la démarche thérapeutique. Il est
conditionné par la qualité et la rigueur de la démarche
Apport direct de sodium diagnostique observée.
Les pénicillines à fortes doses par voie veineuse, les alcalinisants et Dans l’attente de sa mise œuvre, il sera nécessaire de mettre en
les pansements gastriques à base de sodium constituent des place des mesures symptomatiques. La composante commune de
apports sodés importants qui peuvent être, tout comme la plupart de ces situations cliniques étant une augmentation de la
l’administration rapide de perfusion de solutés salés, la cause rétention rénale de sodium, tenter de la limiter sera le but du
d’œdèmes. Le lithium favorise la rétention sodée par compétition traitement symptomatique. Un repos au lit relatif (afin de tenter de
tubulaire. réduire l’hyperaldostéronisme secondaire), une restriction sodée,
puis le traitement diurétique pourront être proposés. Rappelons
¶ Œdèmes généralisés et endocrinologie que tant qu’il n’existe pas d’hyperhydratation intracellulaire et
d’hyponatrémie la restriction hydrique n’a pas de justification.
– L’œdème de l’hypothyroïdie n’est pas un œdème mais un
myxœdème. Il s’agit d’une infiltration diffuse du derme profond
de la face et de la racine des membres par des glycosaminoglycanes Œdèmes localisés
hydrophiles. Cependant, il s’y associe parfois des œdèmes par
surcharge sodée secondaire à la baisse de la filtration glomérulaire, des membres inférieurs
elle-même favorisée par l’hypersécrétion d’hormone antidiurétique
à l’origine d’une hyponatrémie de dilution. APPROCHE PHYSIOPATHOLOGIQUE
– L’hyperthyroïdie peut s’accompagner d’œdèmes transitoires à L’œdème localisé est la conséquence de la présence en excès de
sa phase initiale qui pourront perdurer en cas de survenue d’une liquide dans un territoire du secteur interstitiel. La perturbation
insuffisance cardiaque. Au cours de la maladie de Basedow, le myx- localisée des mouvements liquidiens transcapillaires et d’un ou de
œdème prétibial réalise une infiltration localisée des mollets, plusieurs de leurs déterminants sont les seuls mécanismes
nodulaires ou en placard, qui ne doit pas être confondu avec un physiopathologiques impliqués.
œdème.
En effet, dans la plupart des cas, l’importance de la rétention
– L’hypercorticisme peut s’accompagner, du fait de l’hyper- hydrosodée n’est que très modérée, et insuffisante pour avoir un
minéralocorticisme, d’un syndrome œdémateux toujours modéré. retentissement volémique nécessitant l’intervention des
Lors d’une hypersécrétion d’hormone antidiurétique isolée, mécanismes régulateurs notamment rénaux. L’origine de ces
rappelons qu’il est inhabituel d’observer des œdèmes. En effet, s’il perturbations peut être une obstruction veineuse responsable d’une
existe une rétention d’eau libre, la rétention sodée est généralement hyperpression hydrostatique capillaire d’amont (thrombose
absente d’où la persistance d’une natriurèse. veineuse), une gêne à la circulation lymphatique (lymphœdème
5
19-0520 Œdèmes des membres inférieurs Angéiologie
6
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0590
19-0590
Résumé.– Les maladies cardiovasculaires représentent la pathologie la plus fréquente du sujet âgé
(défini au-delà de 80 ans) et ces affections ne peuvent que s’accroître en raison de l’augmentation de
l’espérance de vie et du développement parallèle de lésions athéroscléreuses symptomatiques.
La pathologie carotidienne en est une facette essentielle ; les maladies cérébrales représentent 12 % des
décès et si l’atteinte polypédiculaire est d’une fréquence inhabituelle chez le sujet âgé, une
revascularisation carotidienne cependant, selon les normes retenues des consensus européens et
américains, ne comporte pas plus de risque que chez les sujets de moins de 80 ans.
L’ischémie critique est le stade habituel qui justifie une revascularisation chez le sujet âgé. À l’échelon
proximal, les indications de procédure endovasculaire aorto-iliaque ont réduit les indications
conventionnelles de pontage extra-anatomique ; à l’échelon distal, la dilatation, et de nouvelles
techniques chirurgicales avec prothèse annelée, chambre anastomotique distale veineuse pour améliorer
la compliance, transfert libre vasculaire de recouvrement et de lambeau nourricier ont transformé le
pronostic fonctionnel, conservant l’appui dans la majorité des cas.
Dans les anévrismes de l’aorte, une mortalité de 12 % en chirurgie élective conventionnelle faisait
rechercher d’autres voies de traitement : les prothèses endovasculaires, quoique manquant de recul,
représentent sûrement la solution présente et future, en particulier lorsque le terrain cardiovasculaire
rend rédhibitoire une mise à plat-prothèse.
Les lésions occlusives du carrefour viscéral sont particulièrement fréquentes chez le sujet âgé ; déjà les
procédures endovasculaires permettent de traiter sans les risques d’une chirurgie directe, des lésions
occlusives symptomatiques. Reste à définir leur place, en prévention d’une ischémie digestive
rédhibitoire, ou de conservation néphronique.
© Elsevier, Paris.
Jean-Michel Cormier : Professeur UER, Broussais, clinique de la Défense, 16, boulevard Emile-Zola,
92000 Nanterre, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : JM Cormier. Pathologie vasculaire du sujet âgé. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0590, 1998, 5 p.
19-0590 Pathologie vasculaire du sujet âgé Angéiologie
A B
D
1 Atteintes cervicoencéphalique : patient de 83 ans.
A. Sténose intrapétreuse et hyperserrée du siphon gauche.
B. Sténose à 80 % du bulbe carotidien droit et sténose intrapétreuse.
C. Sténose vertébrale droite (occlusion gauche).
D. Sténose du tronc basilaire.
2
Angéiologie Pathologie vasculaire du sujet âgé 19-0590
celle-ci ne pourra être décidée que sur un bilan exhaustif visant à cervicoencéphaliques est retrouvée dans 20 % des cas, une atteinte
apprécier un risque neurologique et vital qui doit être inférieur à cardiaque dans 50 % des cas, dont 25 % avec antécédent d’infarctus
3 % [2]. du myocarde en cas d’artériopathie symptomatique [4].
La première étape du bilan est donc cardiaque : recherche par La stratégie thérapeutique est adaptée au terrain.
l’interrogatoire, l’examen clinique et l’électrocardiogramme (ECG) Dans les atteintes proximales , les pontages extra-anatomiques
d’une valvulopathie, d’une cardiopathie ischémique patente, stable axillofémoral ou fémorofémoral étaient la proposition retenue pour
ou évolutive, complétée par une échographie et une scintigraphie réduire l’agression chirurgicale par rapport à l’intervention
myocardique. « anatomique » que représente une prothèse aorto-uni- ou
Un audit neurologique, une angio-IRM (imagerie par résonance bifémorale. De plus en plus, les dilatations angioplastiques iliaques
magnétique) cérébrale (ou une TDM [tomodensitométrie] ou ilioaortiques deviennent un choix préférentiel [17, 26, 35], les contre-
cérébrale) seront complétés par une scintigraphie isotopique indications lésionnelles reculant avec les progrès du matériel ; en
cérébrale avec et sans Diamoxt pour juger des zones particulier, l’utilisation d’endoprothèse supprime le risque de
d’hypoperfusion et des réserves cérébrales. complication (dissection, thrombose aiguë), ou de résultat
Ce n’est qu’au terme de ce bilan, et si le risque opératoire est jugé incomplet fréquent sur ces artères très calcifiées.
inférieur à 3 %, que sera poursuivi le bilan par une artériographie Une revascularisation de la fémorale profonde par un pontage entre
des troncs supra-aortiques ; de plus en plus, et a fortiori en cas la terminaison de l’iliaque externe et la fémorale profonde est le
d’insuffisance rénale, on peut se limiter à une angio-IRM cervicale plus souvent possible pour traiter une occlusion de la fémorale
ou un scanner tridimensionnel carotidien cervical ; ceux-ci commune : une endartérite calcaire d’amont, une endartérite
autorisent, si leur résultat coïncide avec ceux du doppler et de calcaire proximale de la fémorale profonde n’empêchent pas la
l’échographie, à se dispenser d’une opacification vasculaire dont le réalisation du pontage.
risque lié au cathétérisme est certes mineur, mais à cet âge, majoré Pour une atteinte fémoropoplitée, un pontage iliopoplité [16] reste
par les sinuosités de la crosse aortique et l’existence fréquente, de l’indication thérapeutique conventionnelle pour traiter les
lésions athéromateuses, notamment de la crosse aortique. occlusions longues de la fémorale superficielle ou de la poplitée
En revanche, l’âge change peu la stratégie chirurgicale : haute associées à une sténose de la fémorale commune, association
– l’état polypédiculaire cependant rend compte de l’intolérance habituelle, mais là également, les thérapeutiques
plus fréquente du clampage carotidien, nécessitant l’insertion d’un endovasculaires [1, 6] sont électivement choisies pour traiter une
shunt ; sténose isolée ou des sténoses étagées, voire même une occlusion
courte fémoropoplitée.
– les artères, de diamètre souvent large, se prêtent volontiers à une
Les revascularisations distales autorisent un sauvetage de membre
endartériectomie par éversion, lorsque les lésions sont limitées au
à 2 ans dans plus de 80 % des ischémies critiques [24], la place de
bulbe ;
l’endovasculaire étant réduite par rapport aux revascularisations
– à l’opposé, des lésions calcifiées et étendues plaident pour une par pontage prothétique se terminant sur une chambre veineuse
revascularisation par pontage, plus fréquemment prothétique de compliance : cuff de Miller ou patch de Taylor. La pérennisation
(PTFE [polytétrafluoroéthylène]) que veineux, en raison de des pontages veineux fait toujours retenir la saphène comme
l’épaississement pariétal de la carotide primitive et de la matériau de pontage électif, mais les veines du sujet âgé sont
détériorisation des veines saphènes, siège d’endophlébite ou de souvent inutilisables (endophlébite, ectasie) ; la prothèse réduit
dilatations variqueuses contre-indiquant donc leur utilisation. l’agression chirurgicale [ 2 8 ] et diminue le risque de
La dilatation angioplastique avec endoprothèse [12, 25] des troncs cytostéatonécrose liée au prélèvement saphénien, en particulier
supra-aortiques représente un progrès majeur chez des patients chez le diabétique.
ayant en particulier une atteinte ostiale des trois axes La perméabilité secondaire des prothèses est certes aléatoire au-
cervicoencéphaliques excluant la possibilité d’un pontage extra- delà de la 4e année (66 %), mais le membre peut être conservé dans
anatomique ; l’approche endovasculaire évite une sternotomie 80 % des cas, en cas de thrombose tardive [24].
médiane avec le danger de clampage de la crosse aortique souvent
calcifiée qui risquait d’être rédhibitoire, les contre-indications à un
tel abord, de plus, étant fréquentes tant pour des raisons Anévrisme de l’aorte
cardiaques que respiratoires.
Une mortalité, après mise à plat-prothèse d’un anévrisme de l’aorte
sous-rénale, de 10 à 12 % chez les sujets de plus de 80 ans (contre
Ischémie critique 2 % avant cet âge en chirurgie élective) [9], rendait réticent pour une
intervention préventive, et l’indication opératoire était réservée aux
Chez l’octogénaire, l’artériopathie des membres ne pose problème
anévrismes volumineux, évolutifs, ou compliqués. L’avènement de
qu’au stade d’ischémie critique, encore qu’une claudication
l’endovasculaire modifie cette attitude : une endoprothèse aortique
intermittente, invalidante, puisse rendre l’inconfort de vie tel, qu’il
(fig 2) représente une agression mineure quels que soient l’âge et
justifie une revascularisation, les possibilités thérapeutiques liées
le terrain, exposant à un risque opératoire inférieur à 3 - 5 %, à
aux procédures endovasculaires élargissant les indications dans ce
condition d’en respecter scrupuleusement les limites et les écueils.
contexte.
Ces limites sont représentées par les possibilités de l’implantation :
Chez un sujet âgé, le bilan vasculaire est donc suscité par une il est nécessaire qu’il y ait un collet supérieur, juxtarénal,
claudication serrée invalidante, des douleurs de décubitus, un suffisament long et étroit pour permettre l’ancrage de
ulcère ischémique, une gangrène. Le profil lésionnel est caractérisé l’endoprothèse ; chez le sujet âgé, il existe volontiers une
par la fréquence des lésions étagées, l’atteinte occlusive aortopathie ectasiante remontant aux rénales, ou un collet très
prédominant au-dessous du genou ; mais il est rare qu’un axe large, calcifié, contre-indiquant cette procédure. L’introduction de
artériel de jambe ne soit pas respecté, ce qui rend compte de la la prothèse nécessite un axe iliaque sans plicature, non calcifié,
rareté d’une impossibilité de revascularisation en sauvetage de ayant un diamètre de plus de 7 mm, conditions inconstamment
membre. retrouvées, chez les femmes en particulier ; à l’opposé, les iliaques
Le bilan ne présente pas de particularité : il sera locorégional et primitives peuvent être le siège d’une ectasie ou d’une méga-
systémique, l’atteinte des autres territoires pouvant devenir artère descendant jusqu’au carrefour iliaque externe hypogastrique,
prioritaire ou interférer dans la décision et la stratégie et de telles conditions lésionnelles contre-indiquent également la
thérapeutique : une sténose significative des artères procédure prévue.
3
19-0590 Pathologie vasculaire du sujet âgé Angéiologie
B C
C’est souligner l’importance d’un bilan, parfaitement réalisé par – une sténose très serrée d’une artère rénale, notament de l’artère
un scanner hélicoïdal tridimensionnel, avec coupes tous les 3 mm rénale droite, d’abord chirurgical plus délicat, ou une sténose de la
au niveau du carrefour viscéral, du carrefour aortique, et une mésentérique supérieure à retentissement hémodynamique,
artériographie réalisée avec un cathéter gradué permettant les peuvent être traitées préalablement, ou simultanément par
mensurations précises des diamètres des collets et des iliaques. dilatation angioplastique.
En revanche, les écueils évolutifs d’une endoprothèse [27, 7]
interfèrent peu dans la décision opératoire : le risque de fuite est
minime, laquelle peut être contrôlée ultérieurement par un geste Lésions occlusives du carrefour
complémentaire ; les risques d’évolutivité anévrismale du collet, et viscéral
de désinsertion ou de migration de l’endoprothèse, jouent d’autant
moins que le patient est plus âgé.
ARTÈRES RÉNALES
Le manque de recul de cette procédure rend cependant compte
des réserves encore soulevées, dans l’attente des résultats des Une meilleure connaissance de l’histoire naturelle des sténoses de
études multicentriques entreprises. l’artère rénale permet de prévoir le risque néphronique [18, 34] : au-
Lorsque le bilan lésionnel n’autorise pas l’implantation d’une delà de 75 ans, 42 % des patients autopsiés ont une sténose de plus
endoprothèse, l’indication opératoire repose sur la comparaison de 50 %. Par ailleurs une occlusion évolutive de l’artère rénale pour
entre le risque évolutif et le risque opératoire, en tenant compte de une sténose à 80 % est à redouter dans 5 % des cas à 1 an, dans
l’espérance de vie. Dans cette discussion, des arguments 11 % à 2 ans, et une sténose serrée à 80 % des deux artères rénales
statistiques sont fondamentaux [33, 5] : un anévrisme de 50 mm de risque d’aboutir dans les 2 ans à l’insuffisance rénale et à la dialyse.
diamètre ne comporte un risque annuel de rupture que de 5 %, Or, celle-ci a un pronostic catastrophique chez les gens âgés, la
mais il est de 20 % si l’anévrisme mesure plus de 70 mm ; ce risque faisant récuser au-delà de 80 ans. Le pontage iliorénal dans cette
est cependant cumulatif d’année en année et est inéluctable en cas indication très précise de sauvetage néphronique était l’indication
d’anévrisme évolutif [22]. Une indication de mise à plat-prothèse conventionnelle retenue [ 1 5 ] ; actuellement, la dilatation
chez un sujet de plus de 80 ans n’est donc retenue qu’en tenant angioplastique avec endoprothèse tend à devenir un choix
compte de ces différents paramètres, qui influencent d’autant plus préférentiel [30], sa gravité étant moindre, et ses contres indications
la décision qu’existe un contexte cardiaque ou polyartériel, lésionnelles rares, appréciées par un bilan comportant échographie,
augmentant le risque opératoire. scanner hélicoïdal tridimensionnel et artériographie.
En dehors du risque de complication cardiorespiratoire, les
complications digestives sont plus particulièrement à redouter chez ARTÈRES DIGESTIVES
le sujet âgé opéré d’un anévrisme de l’aorte abdominale sous-
rénale : les tissus sont plus sensibles à l’ischémie d’un bas débit, la L’opacification systématique du carrefour viscéral, lors du bilan
paroi colique est fragilisée par le vieillissement [3] qui diminue la d’une artériopathie des membres inférieurs ou des troncs supra-
trame musculaire et élastique. Les risques d’ischémie colique et de aortiques, a montré qu’une atteinte tritronculaire sévère des artères
translocation bactérienne sont donc augmentés chez le sujet âgé, digestives (sténose supérieure à 80 % ou occlusion) était retrouvée
justifiant, au décours de la mise à plat-prothèse, la recherche chez 7,8 % des patients [21]. Il a été prouvé, que chez ces patients
systématique de cette complication. asymptomatiques, le risque évolutif d’un infarctus du grêle
inaugural rédhibitoire était majeur [ 1 9 , 11 ] , justifiant une
Pour diminuer le risque opératoire, différentes propositions sont à
revascularisation préventive lorsque le terrain et l’espérance de vie
retenir :
autorisaient une telle agression sans risque, la revascularisation
– la mise à plat-prothèse peut être remplacée par une exclusion préventive ayant une mortalité périopératoire de 1 %. Dans le
polaire supérieure de l’anévrisme, associée à un rétablissement de même contexte lésionnel, le risque d’une ischémie du grêle et
la continuité par prothèse aortobifémorale [32]. Une embolisation surtout d’une ischémie colique a été particulièrement étudié au
iliohypogastrique peut secondairement être effectuée quand décours d’une intervention chirurgicale sur l’aorte sous-rénale avec
l’anévrisme iliaque, revascularisé à contre-courant, reste circulant ; une mortalité de 50 à 100 % [8, 20, 13, 14], ce même risque est à redouter
4
Angéiologie Pathologie vasculaire du sujet âgé 19-0590
au décours d’une intervention chirurgicale lourde exposant aux de membre, pour les atteintes proximales et périphériques,
variations hémodynamiques (il en est de même chez les dialysés), respectivement les pontages extra-anatomiques et les
ce contexte constitue également une indication licite à une revascularisations distales sont réalisés depuis plus de 30 ans, et
revascularisation préventive [8, 10, 31]. leurs résultats peuvent être appréciés avec suffisamment de recul ;
Aucune étude n’a été faite pour étendre ces indications au-delà de les progrès techniques ont encore perfectionné les techniques pour
80 ans. En revanche, chez un patient symptomatique (angor améliorer leur perméabilité à distance. Mais actuellement, les
digestif, amaigrissement) l’indication ne souffre pas de discussion, revascularisations conventionnelles entrent en compétition avec
les modalités de revascularisation étant soit un pontage l’alternative endovasculaire : les résultats à distance de celle-ci sont
iliomésentérique, soit une dilatation angioplastique avec maintenant suffisamment précis pour être proposés à l’échelon
endoprothèse, la dilatation angioplastique isolée donnant une proximal, mais il manque le recul à l’échelon distal, d’autant que de
proportion de récidive précoce majeure en particulier lorsque existe nouvelles endoprothèses là également doivent améliorer les résultats.
une courbure juxtaostiale à angle droit de la mésentérique Pour la chirurgie carotidienne ou pour la chirurgie des anévrismes
supérieure. Là également le manque de recul pour la dilatation de l’aorte abdominale sous-rénale, les données statistiques avec recul
avec endoprothèse [29] ne permet pas de poser des indications sont suffisantes pour faire des propositions thérapeutiques et des
préventives par cette procédure sur des données statistiques. choix de technique chirurgicale. En revanche, pour le carrefour
viscéral, les seuls éléments nouveaux apportés sont une meilleure
connaissance de l’histoire naturelle de ces lésions par le doppler et
Conclusion l’échographie, mais un recul sera nécessaire pour confirmer les
indications éventuelles en précisant surtout le contexte qui justifie
La pathologie vasculaire du sujet âgé pose des problèmes d’indication un geste thérapeutique et permet de choisir le mode de
et de stratégie thérapeutique de plus en plus fréquents. En sauvetage revascularisation.
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0580
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Pascal Priollet : Chef de service, service de médecine vasculaire, hôpital Saint-Joseph, 185, rue Raymond-
Losserand, 75674 Paris cedex 14, France. troncs veineux profonds. La localisation des varices à la région
Toute référence à cet article doit porter la mention : P Priollet. Pathologie veineuse et grossesse. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0580, 1998, 6 p.
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vulvaire est fréquente et caractéristique chez la femme enceinte. sclérose soit préférée à la chirurgie si une nouvelle grossesse est
Ces varices vulvaires sont parfois douloureuses mais leurs souhaitée, en réalité une intervention peut être conseillée avant la
complications rares. fin des maternités, en particulier lorsque la grossesse antérieure
s’est accompagnée d’importants problèmes veineux.
¶ Varicosités
Indolores ou sensibles, elles peuvent prendre une extension
impressionnante. Elles siègent préférentiellement dans les Thromboses veineuses superficielles
territoires péri- ou sous-malléolaires et au niveau du dos du pied.
Elles régressent après la fin de la grossesse mais dans des Aisément reconnues devant un cordon rouge, chaud et
proportions imprévisibles. douloureux, intéressant un segment d’une veine superficielle des
membres inférieurs, les phlébites superficielles de la grossesse
BILAN LÉSIONNEL compliquent des varices souvent volumineuses. Un doppler et une
échographie sont nécessaires car la coexistence d’une thrombose
Les manifestations liées à une insuffisance veineuse superficielle, veineuse profonde segmentaire n’est pas exceptionnelle (20 à 30 %
quelle qu’en soit la nature, ne requièrent pas de bilan lésionnel des cas en dehors de la grossesse). Ces phlébites superficielles
autre que clinique, puisque la marge thérapeutique est limitée et relèvent classiquement de l’association d’un traitement anti-
se résume à des mesures exclusivement médicales depuis que la inflammatoire local et d’une contention élastique. Une autre option
chirurgie des veines superficielles est abandonnée au cours de la serait la prescription d’une HBPM pour une durée limitée (1 à
grossesse. L’indication des scléroses, tout à fait exceptionnelle, est 3 semaines), mais le fait que l’utilisation des HBPM ne soit pas
généralement réservée aux menaces de ruptures variqueuses ou validée pendant la grossesse est un obstacle à cette prescription.
d’hémorragie variqueuse. Quant à l’indication d’un geste chirurgical, en urgence, sous la
forme d’une ligature de crosse ou d’une crossectomie, sous
TRAITEMENT DE L’INSUFFISANCE VEINEUSE anesthésie locale, en cas de thrombose veineuse superficielle
SUPERFICIELLE ascendante avec menace d’extension aux troncs veineux profonds,
elle n’est plus que rarement portée.
Il est purement symptomatique et vise à faire passer sans incident
le cap de l’accouchement.
Les conseils d’hygiène de vie sont d’autant plus efficaces qu’ils sont
appliqués tôt, dès l’apparition des premiers troubles, voire dès le Phlébites pelviennes
début de la grossesse si l’on a l’expérience d’une grossesse
antérieure mal supportée d’un point de vue veineux. Elles sont rares mais d’autant plus graves qu’il s’agit de
La régression souvent spectaculaire des symptômes après thromboses septiques. Dans un tiers des cas, elles
l’accouchement, et le très faible risque de complications graves s’accompagneraient de signes cliniques ou paracliniques d’embolie
permettent de rassurer les patientes quant au devenir de leur état septique. Le taux de mortalité associé avec les phlébites pelviennes
veineux et de faire plus aisément accepter des mesures a été estimé par Derrick et al à 18 par million de grossesses.
contraignantes mais transitoires : La prévalence des phlébites pelviennes est faible et diversement
appréciée selon les auteurs : dix cas dans une série de 5 693
– la station debout ou assise jambes pendantes prolongée doit être accouchements pour Brown et Munsick, un cas seulement chez
évitée au profit de la position assise, jambes surélevées, et du repos 2 372 patientes suivies prospectivement durant la grossesse et le
au lit ; post-partum pour Derrick et al. En revanche, si l’on isole le groupe
– la surélévation des pieds du lit de 15 à 20 cm est une mesure des femmes qui après la grossesse ont souffert de complications
efficace ; infectieuses, la prévalence des phlébites pelviennes est plus élevée,
atteignant 1 à 2 % selon les séries.
– le repos systématique en décubitus latéral gauche en fin de
grossesse peut y être associé ; Le diagnostic est généralement évoqué devant une fièvre du post-
partum résistant aux antibiotiques, associée à des douleurs
– la marche, la gymnastique au sol, la flexion des chevilles sont abdominales sous-ombilicales, tandis que l’utérus est gros et peu
autant d’exercices physiques qui améliorent le fonctionnement de mobilisable et les veines pelviennes douloureuses au palper le long
la pompe veineuse des mollets ; de la paroi du petit bassin, lors du toucher vaginal. Différentes
– le contrôle optimal de la courbe pondérale est également méthodes ont été proposées pour réaliser l’opacification sélective
important ; des veines génitales, mais la fiabilité diagnostique de ce type
d’examen est très discutée. En revanche, les performances actuelles
– la contention élastique est la mesure la plus efficace et aussi la
du doppler et de l’échographie justifient la réalisation systématique
plus anodine. Elle doit s’exercer précocement. En revanche, le type
de ces examens en cas de phlébite pelvienne. L’efficacité de
et la force de la contention doivent être adaptés à chaque cas
l’héparine est par ailleurs un test diagnostique.
particulier. Les collants de grossesse à ceinture extensible, les bas
autofixants et les chaussettes de contention sont aujourd’hui
acceptables d’un point de vue esthétique tout en étant efficaces ;
– les traitements veinotoniques prescrits par voie orale ou
Thromboses veineuses profondes
appliqués localement sont un appoint souvent utile vis-à-vis des (TVP)
manifestations fonctionnelles, mais ils ne sauraient prendre le pas
sur les conseils d’hygiène de vie et la contention qui demeurent les DONNÉES ÉPIDÉMIOLOGIQUES ET PATHOGÉNIE
deux éléments principaux du traitement.
Les TVP sont rares mais graves au cours de la grossesse, tant pour
BILAN ET TRAITEMENT APRÈS LA GROSSESSE
la mère que pour le fœtus. L’incidence exacte des embolies
pulmonaires au cours de la grossesse, et plus encore des TVP, est
À distance de la grossesse, généralement 3 mois après difficile à formuler car le diagnostic de ces accidents est loin d’être
l’accouchement, un nouveau bilan lésionnel est nécessaire afin toujours porté avec certitude. Une incidence comprise entre 0,07 et
d’assurer le traitement des varices qui n’auraient pas régressé. Les 0,09 % a été avancée. Globalement, ces accidents veineux
indications du traitement sclérosant ou de la chirurgie seront surviennent pour un tiers au cours de la grossesse et pour les deux
portées selon les critères habituels. Bien que traditionnellement la tiers dans le post-partum [18].
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Angéiologie Pathologie veineuse et grossesse 19-0580
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L’héparine non fractionnée est classiquement le traitement des TVP ENQUÊTE BIOLOGIQUE
de la grossesse [18]. Elle ne franchit pas la barrière placentaire. Elle
La grossesse et la période de l’accouchement et du post-partum
est administrée initialement par voie intraveineuse à la seringue peuvent donner à une anomalie constitutionnelle ou acquise de
électrique. Une dose de charge de 50 U/kg est recommandée. La l’hémostase l’occasion de s’exprimer, éventuellement pour la
dose quotidienne est ensuite calculée sur la base de 15 à 20 U/kg/h première fois (tableau III). Il est donc logique de proposer une
puis adaptée selon les résultats des tests biologiques : TCA (temps enquête biologique systématique aux patientes souffrant ou ayant
de céphaline activateur) qui doit être compris entre deux et trois souffert d’une TVP au cours de la grossesse ou du post-partum,
fois le temps du témoin ou héparinémie qui évalue l’activité non seulement lorsqu’il existe des antécédents familiaux de
anticoagulante de l’héparine vis-à-vis de la thrombine ou du maladie thromboembolique, lorsque les épisodes thrombotiques se
facteur Xa, la zone thérapeutique se situant entre 0,2 et 0,5 UI/mL. répètent ou que les territoires veineux atteints sont inhabituels
La femme enceinte peut opposer une résistance relative à l’action (mésentérique, par exemple) mais également lorsque l’accident
de l’héparine et requérir une dose plus élevée qu’en dehors de la veineux paraît isolé.
grossesse. Après une durée arbitraire de 5 à 10 jours, l’héparine Une anomalie acquise de l’hémostase sous la forme d’un
par voie sous-cutanée peut prendre le relais de la perfusion anticoagulant circulant de type antiprothrombinase peut être
continue. Elle est répartie en deux ou trois injections par jour et sa facilement mise en évidence par l’allongement du TCA. Cet
posologie adaptée pour que l’héparinémie se situe entre 0,2 et anticoagulant circulant se rencontre dans certaines formes de lupus
0,3 UI/mL. L’héparinothérapie doit être poursuivie jusqu’à la fin dont la symptomatologie clinique est souvent réduite mais au
de la grossesse. La dose d’héparine est habituellement fortement cours desquelles, en revanche, d’autres anomalies hématologiques
réduite ou son administration interrompue environ 6 heures avant sont souvent présentes : thrombopénie, anémie hémolytique avec
l’accouchement pour la reprendre 6 heures plus tard. Il a été test de Coombs positif, réaction syphilitique faussement positive
proposé que l’accouchement des patientes qui reçoivent de et présence d’anticorps anticardiolipines.
l’héparine sous-cutanée durant la grossesse soit électivement La recherche d’une anomalie constitutionnelle de l’hémostase est
déclenché 24 heures après l’arrêt de l’anticoagulant [1]. Lorsque le également nécessaire [4]. La grossesse est, avec la prise d’une
risque thromboembolique paraît très élevé, il a été recommandé de contraception estroprogestative, souvent la circonstance qui donne
convertir l’héparine sous-cutanée en héparine intraveineuse, et l’occasion à un déficit en AT III de s’exprimer. Environ 75 % des
d’interrompre cette dernière 6 heures avant l’accouchement [1]. accidents veineux surviennent avant l’accouchement,
L’analgésie péridurale est contre-indiquée si l’héparine n’a pas été contrairement à ce qui est observé chez les patientes indemnes de
arrêtée 12 heures auparavant. Après l’accouchement, déficit en AT III où la majorité des phlébites intervient dans le
post-partum.
l’héparinothérapie est poursuivie (héparinémie entre 0,2 et
0,3 UI/mL), soit pour une durée qui ne doit pas être inférieure à Les déficits en protéine C et en protéine S peuvent également
6 semaines, soit jusqu’au relais par les AVK, une fois réduits les donner lieu à des accidents veineux thromboemboliques durant la
risques d’hémorragie du post-partum, c’est-à-dire 1 semaine après grossesse ou plus volontiers, en ce qui concerne les déficits en
protéine S, dans le post-partum. Le déficit en protéine C découvert
l’accouchement. Toutefois, les AVK contre-indiquent l’allaitement
chez la femme enceinte rend nécessaire le dosage de la protéine C
à l’exception de la warfarine (Coumadinet) qui n’est pas sécrétée
chez le conjoint. Si le conjoint est porteur du même déficit (ce qui
dans le lait maternel.
est possible en raison de la fréquence génétique du déficit), l’enfant
Outre les inconvénients locaux (douleurs, hématomes) des est exposé au risque de déficit homozygote en protéine C
injections répétées et les risques hémorragiques inhérents à tout responsable d’un tableau gravissime de purpura fulminans
traitement anticoagulant, l’héparine au cours de la grossesse peut néonatal. Un dépistage anténatal peut être proposé dans ce cas
avoir d’autres inconvénients. Elle peut être cause d’ostéoporose qui précis. Le diagnostic de déficit en protéine S est difficile, car le taux
n’a été rapportée comme cliniquement symptomatique que chez de cette protéine diminue de façon physiologique durant la
les patientes traitées par une dose d’au moins 20 000 U/j pendant grossesse. Le dosage doit donc être contrôlé 1 mois après
plus de 6 mois [11]. Elle pourrait également être à l’origine de l’accouchement. En revanche, le diagnostic de déficit en AT III ne
thrombopénie immunoallergique détectable par la surveillance pose pas de problème durant la grossesse. Néanmoins, les dosages
hebdomadaire de la numération des plaquettes. d’AT III, de protéine C et de protéine S sont influencés par les
traitements anticoagulants et il est souhaitable de réaliser les
Les HBPM sont au moins aussi efficaces, en dehors de la grossesse, prélèvements sanguins avant toute thérapeutique. Sinon, le taux
que l’héparine standard, sans risques hémorragiques plasmatique d’AT III peut diminuer de 15 à 20 % sous
supplémentaires. Cela est notamment vrai dans le traitement des héparinothérapie efficace. Les protéines C et S sont, pour leur part,
phlébites proximales où les HBPM ont été utilisées en une seule abaissées sous un traitement anticoagulant par voie orale, car elles
injection par jour (Logiparine) [13] ou en deux injections par jour sont vitamines K dépendantes. Une nouvelle anomalie héréditaire
(Fraxiparinet) [17]. Les HBPM ont aussi des avantages potentiels sur de la coagulation, la résistance à la protéine C activée, a été mise
l’héparine standard dans le traitement des phlébites de la femme
enceinte. La première observation rapportée de thrombose Tableau III. – Facteurs déclenchants lors du premier épisode de
veineuse de la grossesse traitée par une HBPM date de 1986 [19]. thrombose (d’après J Conard, Hôtel-Dieu, Paris, 1994).
Ces héparines ont une activité antithrombotique équivalente et,
Déficits Antithrombine III Protéine C Protéine S
comme l’héparine standard, ne franchissent pas la barrière n = 48 n = 56 n = 49
placentaire. De plus, leur biodisponibilité est plus élevée avec une 28 F, 20 H 32 F, 24 H 24 F, 25 H
durée de vie plus longue autorisant parfois une seule injection par
Estroprogestatifs 12 % 7% 8%
jour. Elles pourraient s’accompagner d’une réduction du risque
d’ostéoporose et d’une réduction du risque de thrombopénie. En Grossesse 23 % 28 % 18 %
revanche, la surveillance de ce traitement fait appel à la mesure de Chirurgie 17 % 18 % 4%
l’activité anti-Xa. L’évaluation des HBPM se poursuit au cours de
Alitement 13 % 11 % 10 %
la grossesse et leur indication n’est pas encore validée en cas de
TVP développée chez la femme enceinte. Traumatisme, effort 14 % 16 % 34 %
Quelle que soit la nature de l’héparine utilisée, une contention Non retrouvé 21 % 20 % 26 %
élastique adaptée est indispensable en cas de TVP avant comme
F : femmes ; H : hommes.
après l’accouchement.
4
Angéiologie Pathologie veineuse et grossesse 19-0580
en évidence en 1993 [5, 6]. Très vite, la mutation responsable de cette également 75 mg/j d’aspirine jusqu’à la 36e semaine de grossesse.
anomalie biologique a été découverte [2]. Il s’agit d’une mutation Au terme de ces 34 grossesses chez 32 femmes, 29 enfants vivants
sur l’arginine en position 506 au site de clivage du facteur V par la devaient naître ; cinq fausses couches étaient à déplorer, trois
protéine C activée. Désormais, un test simple de biologie d’entre elles en cas de syndrome des antiphospholipides avec ou
moléculaire permet de rechercher l’anomalie sans qu’il soit sans lupus associé et deux chez des patientes porteuses d’un déficit
indispensable de passer par l’étape du test biologique [6]. Surtout, en protéine S. Aucune complication thromboembolique n’était
la résistance à la protéine C activée paraît très fréquente puisqu’elle enregistrée au cours de cette étude. Aucune thrombopénie ou
concerne environ 20 % des patientes ayant souffert de thrombose hémorragie grave n’était à déplorer. En revanche, une patiente
veineuse et 3 à 5 % de la population générale dans une étude souffrait d’un tassement vertébral d’origine ostéoporotique alors
hollandaise [20]. Dans une étude suédoise, cette même anomalie qu’elle n’avait pas d’autres facteurs de risque d’ostéoporose. Enfin,
était présente chez 33 % des patients aux antécédents de thrombose sept césariennes étaient faites sans complication hémorragique,
et 5 % des témoins [20]. Il s’agit donc d’une anomalie beaucoup plus tandis que six femmes accouchaient sous analgésie péridurale, là
fréquente que les déficits congénitaux, désormais traditionnels, en encore sans complication. Cette étude souligne l’intérêt des HBPM
protéine C, protéine S et AT III. L’implication au cours de la durant la grossesse et leur efficacité, y compris en cas de troubles
grossesse de la résistance à la protéine C activée n’est pas encore de l’hémostase, à l’exception peut-être du syndrome des
bien documentée, mais paraît relativement modeste. antiphospholipides. Un point reste toutefois en discussion : c’est
celui de savoir si une dose fixe peut être ou non utilisée pendant la
TRAITEMENT PRÉVENTIF grossesse. Les auteurs n’ont pas eux-mêmes tranché puisque après
avoir suggéré l’adaptation des doses, ils notent la possibilité de ne
Le traitement préventif des patientes enceintes ayant des
pas dépasser une dose quotidienne de deux fois 5 000 UI/j de
antécédents de TVP n’est pas encore parfaitement standardisé [18].
Fragminet.
La contention élastique est obligatoire. Sinon, le traitement
habituellement recommandé, en l’absence d’anomalies En cas de déficit en AT III, le traitement curatif des TVP de la
constitutionnelles de l’hémostase, est une héparine non fractionnée grossesse associe héparine par voie intraveineuse à doses efficaces
sous-cutanée à petites doses (5 000 UI) à raison de 2 injections/j et concentré d’AT III afin d’obtenir un taux d’AT III supérieur à
jusqu’au milieu du troisième trimestre, puis une héparine sous- 80 % ; le relais est pris ensuite par l’héparine sous-cutanée jusqu’à
cutanée à doses efficaces jusqu’à la fin de la grossesse. Une l’accouchement. Après l’accouchement, l’héparine sous-cutanée est
alternative pourrait être, soit une contention élastique seule en associée à des concentrés d’AT III durant la première semaine puis
l’absence d’anomalie de l’hémostase, surtout si les antécédents ne le relais est pris par les AVK.
comportent qu’un seul accident thromboembolique, soit une Le traitement préventif lors d’une grossesse chez une patiente
contention élastique associée à partir du 3e trimestre à une HBPM ayant une anomalie de l’hémostase est adapté à chaque cas. Si la
en une seule injection par jour mais cette dernière formule n’a pas patiente n’a pas d’antécédent de thrombose veineuse, les
été validée [15] . Une publication récente, en provenance du principaux paramètres à déterminer sont la date de début de
Royaume-Uni, a testé une HBPM (la Fragminet) comme traitement traitement, le type de traitement (héparine standard ou HBPM) et
préventif chez 32 femmes enceintes totalisant 34 grossesses à haut la dose (« préventive » ou « curative »). Le début du traitement
risque d’accident thrombotique [14]. Des facteurs de risque de peut être envisagé soit avant la conception, soit dès le diagnostic
thrombose étaient deux fois d’un déficit en protéine C. Des de grossesse, soit lors du troisième trimestre seulement, ou bien
antécédents thrombotiques veineux étaient reconnus 26 fois. Dans encore uniquement s’il existe un facteur de risque surajouté tel que
six cas, il s’agissait d’antécédents artériels. Seize fois il existait des l’alitement. En cas d’utilisation d’une HBPM, il a été proposé
antécédents de fausses couches. Les patientes ayant souffert d’un d’adapter la dose d’HBPM afin de maintenir l’activité anti-Xa entre
épisode de thrombose durant la grossesse sans anomalie de 0,1 et 0,25 U/mL [15].
l’hémostase étaient traitées par héparine non fractionnée pendant
5 à 7 jours, puis par HBPM. Les patientes ayant un antécédent de L’incidence sur les grossesses ultérieures et la contraception d’un
thrombose coïncidant avec une contraception orale ou une passé de TVP doit être précisée. La grossesse peut être autorisée
grossesse sans anomalie de l’hémostase étaient traitées par HBPM malgré des antécédents de TVP, y compris en cas d’interruption
débutée 4 à 6 semaines avant le terme où s’était produite la partielle de la veine cave inférieure, sous réserve d’une enquête
thrombose durant la dernière grossesse. Quant aux femmes ayant biologique complète, d’un traitement préventif et d’une
des antécédents thromboemboliques associés à des anomalies de surveillance clinique et ultrasonique rigoureuse.
l’hémostase ou des antécédents thrombotiques récidivants, elles Les TVP de la grossesse sont une contre-indication définitive à la
étaient traitées par HBPM avant même la conception ou contraception estroprogestative. Les dispositifs intra-utérins sont
immédiatement après un test positif de grossesse. La Fragminet classiquement contre-indiqués si les patientes sont sous
était administrée à la dose de 5 000 UI, 1 fois/j chez les femmes anticoagulants, mais il ne s’agit là que d’une contre-indication
pesant moins de 100 kg et 2 fois/j dans le cas contraire. Les relative. Les méthodes locales (diaphragmes, spermicides,
patientes faisaient elles-mêmes leurs injections. La mesure de préservatifs) doivent être utilisées en association sinon elles sont
l’activité anti-Xa et des plaquettes était réalisée une fois par mois insuffisamment efficaces. Une contraception par microprogestatifs
durant la grossesse. Les femmes enceintes ayant un syndrome des se discute si le risque thrombotique est faible chez les femmes
antiphospholipides et un antécédent de fausse couche recevaient n’acceptant pas les méthodes locales.
Références ➤
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19-0580 Pathologie veineuse et grossesse Angéiologie
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0030
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Résumé. – Le rôle de l’appareil circulatoire est le transport du sang d’un secteur de l’organisme à
l’autre. La circulation artérielle est un système à haute pression. La physiologie artérielle repose sur
l’étude de nombreux paramètres, tels que la vitesse d’écoulement du sang dans les artères, le débit
artériel, la pression artérielle, les résistances vasculaires, l’énergie d’un fluide, l’hémorhéologie et
l’endothélium vasculaire. Ce système complexe est régulé par des mécanismes locaux et généraux.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Principes de la physiologie artérielle Tableau I. – Caractéristiques comparatives des artères et des veines.
Artères Veines
INTRODUCTION
Compliance Faible Forte
C’est sous l’aspect global qu’il faut envisager les objectifs de Élastance Forte Faible
l’appareil circulatoire. Il a pour but de transporter rapidement du Pression dynamique Forte Faible
sang d’un secteur de l’organisme à un autre afin d’échanger des Résistance à l’écoulement Forte Faible
éléments indispensables ou utiles à la vie contre des éléments à
éliminer ou à transformer. Le moteur essentiel de cette dynamique
est représenté par le cœur. La grande circulation ou circulation – régulation statique pour le système veineux = vaisseaux
systémique prend en charge l’irrigation des tissus périphériques ; capacitifs :
la circulation artérielle y transporte le sang et c’est elle que nous volume = pression/élastance (résistance à la distension des
étudierons ; la microcirculation est le secteur des échanges ; le parois) ; DQ = DP/E.
retour veineux s’effectue vers le cœur droit. La petite circulation
ou circulation pulmonaire permet au cœur d’organiser les échanges La compliance DQ/DP est l’importance de l’augmentation du
sanguins avec l’air ambiant. volume DQ qui entraîne une augmentation de pression DP ; elle
est plus faible pour les artères que pour les veines. L’élastance est
Le système à haute pression s’étend du ventricule gauche en l’inverse de la compliance (E = DP/DQ) et se trouve plus élevée
systole aux artérioles ; il comprend donc essentiellement le système pour les artères.
artériel. Le maintien d’une pression élevée permet d’assurer une
perfusion sanguine, quelles que soient les conditions
hémodynamiques et physiologiques en général. RAPPELS ANATOMOPHYSIOLOGIQUES
La physiologie artérielle est caractérisée par :
¶ Répartition de la volémie
– une pression sanguine élevée : 120-80 mmHg ;
– un contenu faible : 10 à 15 % du volume total sanguin de La figure 1 montre l’exemple de la répartition volémique pour un
l’organisme, et ce contenu est relativement stable ; homme de 75 kg. Le volume total de sang contenu chez le sujet
normal représente environ 7 % de son poids total (5 L pour un
– du sang saturé en oxygène. homme de 75 kg) ; de cette façon, le volume total peut circuler
La régulation vasculaire est dynamique pour le système artériel et approximativement une fois par minute. Malgré leur section totale
statique pour le système veineux (tableau I) : importante, les capillaires sont courts et ne contiennent que 4 à
6 % de la volémie ; les artères en contiennent 12 à 14 % ; les veines,
– régulation dynamique pour le système artériel = vaisseaux et surtout les veines de petit diamètre, en contiennent les deux
résistifs : tiers (64 %). La circulation pulmonaire contient 9 à 10 % de la
débit Q = pression/résistance à l’écoulement ; Q = DP/R ; volémie ; le cœur en diastole en contient 6 à 7 % (tableau II) [37].
Toute référence à cet article doit porter la mention : Boccalon H et Léger P. Physiologie de la circulation artérielle. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Angéiologie,
19-0030, 2000, 15 p.
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7 Enregistrements si-
multanés d’un électro-
cardiogramme et de
courbes de pressions
intra-artérielles ; les
pressions moyennes sont
représentées sur la droite
du tracé des pressions
instantanées (reproduit
d’après H Guénard). 1.
Aorte initiale ; 2. artère
fémorale ; ddp : diffé-
rence de potentiel.
9 Relation pression-volume de
l’aorte d’un adulte (trait plein) et d’un
sujet âgé (trait pointillé) ; la compliance
¶ Facteurs de variations de la pression artérielle est diminuée avec l’âge. La compliance
veineuse est importante (reproduit
Elle s’abaisse légèrement en position debout ; elle est plus basse d’après JB West).
chez la femme. Elle s’élève avec l’âge : avant 10 ans, la systolique
est inférieure à 100 mmHg ; à 50 ans, la systolique est à 150 et la
diastolique inférieure à 95 ; une systolique supérieure à 160 mmHg
et une diastolique supérieure à 100 mmHg définissent une
hypertension artérielle.
La pression artérielle moyenne s’abaisse de l’aorte vers la
périphérie, ce qui permet un gradient de pression et donc un débit.
La pression différentielle augmente du fait d’une augmentation de
la systolique et, à un moindre degré, de l’abaissement de la
diastolique.
La vitesse de propagation de l’onde pulsatile de pression artérielle
est une onde de choc correspondant à un transfert d’énergie Les vaisseaux n’obéissent pas à cette loi ; ils résistent à l’élongation
(plusieurs m·s–1) ; elle est beaucoup plus rapide que la vitesse d’autant plus qu’ils sont étirés ; ils deviennent de moins en moins
d’écoulement artériel, qui correspond à un transfert de matière, le compliants. La courbe pression-volume de l’aorte est représentée
sang. par la figure 9. L’augmentation du volume s’accompagne d’une
La transmission de l’onde de pression est d’autant plus rapide que élévation rapide de la pression, ce qui aboutit à une relation quasi
la compliance artérielle est faible ; ceci est amplifié depuis l’aorte exponentielle. Au début de la courbe, la loi de Hooke paraît être
vers les petits vaisseaux, de même que par la présence d’athérome. respectée par les fibres élastiques. Puis l’artère atteint la limite de
Relation pression et débit artériel : à l’origine de l’aorte, l’onde de son élasticité car les fibres collagènes entrent en jeu ; leur tension
débit précède l’onde de pression ; le sang circule jusqu’à ce que la est importante pour une faible augmentation de longueur [8, 53]. La
différence de pression hydrostatique existe, tant que la résistance courbe pression-volume tend à être plus rapide avec l’âge. Les
périphérique ne s’y oppose pas ; en distalité, l’onde de pression veines, à l’inverse, acceptent les variations de pression sans
précède l’onde de débit. augmentation importante de volume.
Impédance vasculaire : dans le cas de débit continu, la résistance des
parois vasculaires est la seule force qui s’oppose au débit ; dans le ¶ Réservoir de pression
cas d’un débit pulsatile, la résistance est représentée par Les artères systémiques se comportent comme des réservoirs de
l’association du frottement contre la paroi vasculaire, de l’élastance pression du fait de leur fonction élastique (fig 10). Le ventricule
de la paroi et de l’inertie sanguine. gauche chasse le sang dans l’aorte qui se distend. Puis le ventricule
gauche se relâche pendant la diastole. La tension pariétale aortique
RELATION VOLUME/PRESSION OU COMPLIANCE chasse alors le sang vers les capillaires. Cet effet physiologique a
été décrit par Windkessel. Il permet à la pression artérielle
¶ Compliance des parois artérielles d’osciller autour d’une pression artérielle moyenne de 90 mmHg
sans jamais atteindre 0 [36].
Dans les conditions physiologiques, la compliance artérielle est
Si le système artériel était rigide, les pressions seraient très élevées
faible et donc l’élastance élevée. Cette propriété, couplée à la
au moment de la systole et la pression serait égale à 0 en diastole.
résistance artérielle, explique l’amortissement progressif
La crosse aortique se comporte comme un réservoir de pression, ce
systolodiastolique et la transformation du débit périodique
qui est utilisé pour amortir les surpressions des coups de piston
ventriculaire gauche en débit artériolaire permanent.
ventriculaires. La pression dans un tube élastique traduit la tension
Avec l’âge, la compliance artérielle diminue, du fait du exercée par les parois de ce tube sur le contenu liquidien. La
remplacement des fibres élastiques par du tissu collagène ; ainsi la pression interne peut augmenter du fait :
pression systolique s’élève (fig 8).
Selon la loi d’élasticité de Hooke, lorsqu’un corps homogène est – d’une augmentation du volume liquidien ;
étiré, la tension élastique est proportionnelle au degré d’élongation. – d’une contraction majorée des parois vasculaires ;
5
19-0030 Physiologie de la circulation artérielle Angéiologie
10 Effet Windkessel.
A. Lors de l’éjection ventriculaire, la paroi élastique de l’aorte se distend
pour emmagasiner puis restituer une quantité d’énergie de pression.
B. L’air d’un réservoir de pression est comprimé à l’éjection, puis décom-
primé au remplissage, amortissant ainsi les oscillations de pression et du
débit (reproduit d’après RF Rushmer).
6
Angéiologie Physiologie de la circulation artérielle 19-0030
stimulation
12 Relation pression- 13 Enregistrements effectués au
débit au niveau des artè- niveau d’une artère fémorale de chien :
res d’une oreille de lapin, création d’un gradient de pression de
lors des différents ni- par la progression de l’onde de pres-
veaux de stimulation sion et du débit pulsatile ; il existe un
sympathique. Lorsque la reflux négatif de l’onde de débit (re-
stimulation augmente, produit d’après DA McDonald).
la courbe se déplace vers
la droite, sa pente dimi-
nue et la pression est
plus élevée (pression cri-
tique de fermeture) (re-
produit d’après JB
West).
7
19-0030 Physiologie de la circulation artérielle Angéiologie
*
A
8
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Angéiologie Physiologie de la circulation artérielle 19-0030
Shear rate
expliqués par des ponts de protéines entre hématies adjacentes [6]. 24 Relations entre la viscosité relative et l’hématocrite du sang total. Pour une va-
leur normale d’hématocrite, le sang est trois à quatre fois plus visqueux par rapport
Cela dépend du type de protéines : fibrinogène, a_-macroglobuline, à l’eau ; pour des valeurs supérieures d’hématocrite, la viscosité augmente de façon
immunoglobuline M (IgM) [34]. La viscosité du sang et du plasma importante (d’après JB West).
dépend de la température [35] ; elle augmente de 2 à 3 % lorsque la
température diminue de 1 °C. – une modification de la déformabilité des globules rouges.
L’hématie est constituée d’une membrane flexible de lipoprotéine Lorsque le diamètre vasculaire est faible, on observe l’effet
encerclant un fluide riche en hémoglobine, visqueux [6]. Fahraeus-Lindquist [17] (fig 25). Dans ce cas anatomique, une
La déformabilité du globule rouge implique la tension de la colonne de globules rouges se forme au centre du vaisseau ; le
membrane et un déplacement de fluide interne (fig 23). Elle plasma se trouve au bord, afin de faciliter le glissement des
suppose donc des propriétés viscoélastiques de la membrane et hématies par rapport aux parois. C’est ainsi que les capillaires
une viscosité intracellulaire [10, 30]. musculaires ont un hématocrite abaissé à 20 %.
Une augmentation de la viscosité sanguine peut être engendrée
Techniques de mesure
par :
– une augmentation de l’hématocrite (fig 24) ; • Viscosimètre à tube capillaire [32]
– une augmentation ou des variations des composants Il détermine le débit au travers d’un tube fin et n’est applicable
macromoléculaires du plasma ; que dans le cas de fluides newtoniens.
11
19-0030 Physiologie de la circulation artérielle Angéiologie
ENDOTHÉLIUM VASCULAIRE
Substances vasorelaxantes
• Prostacycline PGI2
26 Endothélium et vasomotricité : substances vasorelaxantes et vasoconstrictives. Elle est synthétisée à partir de l’oxyde arachidonique par une
Ach : acéthylcholine ; BK : bradykinine : His : histamine ; Nor : noradrénaline ; Ser : prostacycline synthétase. La prostacycline provoque une
sérotonine ; ADP : adénosine diphosphate. vasorelaxation par une augmentation d’acide adénosine
monophosphorique cyclique (AMPc) intracellulaire [38].
• Viscosimètre à rotation [32]
• Monoxyde d’azote
C’est l’instrument de choix pour déterminer la rhéologie d’un
élément non newtonien tel que le sang. Il a l’avantage de cisailler Anciennement dénommé EDRF (endothelium derived relaxing
la plus grande proportion de fluide étudié à une force de factor), puissant vasodilatateur synthétisé à partir de L arginine par
cisaillement presque uniforme. Le prototype en est le viscosimètre l’intermédiaire de la NO synthétase constitutive (type III) [23, 39], le
de Couette, constitué de deux cylindres concentriques ; l’un NO active la guanylate cyclase du muscle lisse, ce qui augmente la
entraîne l’autre par le biais du fluide étudié. concentration de l’acide guanosique monophosphorique cyclique
(GMPc) et entraîne une relaxation en diminuant la quantité de
• Tests de déformabilité globulaire [6, 10, 14] calcium cytosolique libre.
Ils consistent à faire passer les hématies au travers de pores plus
fins. La relation avec la condition in vivo est à résoudre.
• EDHF (endothélium dérivé d’« hyperpolarising factor »)
Molécule non encore déterminée mais provoquant une
¶ Hyperviscosité plasmatique et sanguine hyperpolarisation du muscle lisse vasculaire en agissant sur les
canaux potassiques calcium-dépendants [52].
Elle est liée à l’augmentation de la densité plasmatique par
concentration élevée en macroglobulines (augmentation du Substances vasoconstrictives
fibrinogène en particulier). Les causes peuvent en être
l’inflammation et la contraction du volume plasmatique. Au niveau
• Endothéline
artériel, la plaque d’athérome est le siège d’inflammation, de
génération d’interleukine 6 (IL6), d’activation de macrophages et Peptide endogène vasoconstricteur synthétisé, à partir d’une
de monocytes circulants. Le fibrinogène est davantage synthétisé. « big » endothéline, par une endotheline converting enzyme (ECE) [55].
Les facteurs de risque cardiovasculaires favorisent cette L’endothéline peut activer un récepteur ETA (couplé à une protéine
inflammation, ainsi que la perméabilité des parois vasculaires (d’où G) au niveau des cellules musculaires lisses qui provoque alors
fuite des liquides vers les tissus). une vasoconstriction, ceci survenant lorsque la concentration
L’hyperviscosité plasmatique augmente les résistances d’endothéline est élevée. Lorsque la concentration d’endothéline
périphériques et provoque des agrégats érythrocytaires. Ceci peut est plus faible, elle se lie au récepteur ETB qui stimule la
être à l’origine d’occlusions veinulaires plus ou moins étendues production de NO et de prostaglandine.
dans les muscles et la peau.
Le viscosimètre capillaire peut s’adresser à l’étude du • Anions superoxydes
comportement plasmatique. L’agrégation des hématies peut être Ils inactivent le NO [44].
12
Angéiologie Physiologie de la circulation artérielle 19-0030
13
19-0030 Physiologie de la circulation artérielle Angéiologie
Les récepteurs auriculaires sont de deux types (A et B). Les • Chémorécepteurs centraux
récepteurs A sont sensibles aux variations de pression et les
récepteurs B aux variations d’étirement. La stimulation de ces Une hypercapnie provoque une stimulation de ces récepteurs qui
récepteurs induit une bradycardie et une vasodilatation, et conduit engendre une vasoconstriction. Ces récepteurs sont aussi sensibles
à une chute tensionnelle et à une chute du débit cardiaque. aux variations de pH sanguin, une chute du pH provoquant une
Les récepteurs ventriculaires sont des récepteurs à l’étirement. Leur vasoconstriction.
stimulation a un effet inotrope négatif réflexe par voie vagale :
La dualité du contrôle de la circulation périphérique par le système
réflexe de Bezold-Jarish (bradycardie importante, vasodilatation).
intrinsèque et extrinsèque permet d’ajuster, en fonction des
nécessités, les débits des perfusions régionales et locales.
• Chémorécepteurs périphériques [31]
Situés au niveau de l’arc aortique et du sinus carotidien, ils sont
sensibles à des variations de PO2, PCO2 et pH. Une hypoxie
stimule ces chémorécepteurs et provoque une vasoconstriction. Conclusion
• Hypothalamus
La circulation artérielle n’occupe que le dixième de la volémie, mais
L’intégrité de l’hypothalamus est nécessaire au bon fonctionnement assure de façon efficace et harmonieuse la transmission motrice de
des réflexes cardiovasculaires. l’éjection ventriculaire gauche vers la microcirculation. Pour assurer
L’hypothalamus peut être séparé en deux zones : une zone ce transport rapide vers les tissus, la pression est élevée et le débit est
antérieure qui, stimulée, provoque une chute tensionnelle et une pulsatile. Les propriétés élastiques des parois artérielles normales
bradycardie, et une zone postérieure qui provoque une tachycardie permettent d’amortir cette pulsatilité et d’assurer une composante
et une hypertension. continue au débit pulsatile. Les différentes propriétés physiologiques
Au niveau de l’hypothalamus, il existe aussi un centre de des parois artérielles, rhéologiques, du sang, parviennent à assurer un
régulation de la température. La stimulation par le froid entraîne équilibre hémodynamique à ce système vasculaire. La régulation de ce
une vasoconstriction cutanée et, inversement, le chaud provoque fonctionnement obéit à plusieurs facteurs parmi lesquels le rôle fixé
une vasodilatation. par l’endothélium artériel n’est pas le moindre. Il est actuellement
possible de mesurer les paramètres physiologiques artériels en ayant
• Cortex cérébral recours à des procédés non vulnérants ; il est possible de les appliquer
Il exerce un effet dans la régulation du débit sanguin. Une émotion à l’homme et, dans les cas pathologiques, aux malades. De ce fait,
provoque une vasodilatation cutanée et muqueuse alors que la l’étude de la physiologie artérielle s’est très largement ouverte aux
peur, par exemple, va engendrer une vasoconstriction. cliniciens.
14
Angéiologie Physiologie de la circulation artérielle 19-0030
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15
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0050
19-0050
Toute référence à cet article doit porter la mention : C Janbon, I Quere et V Soulier-Sotto. Physiologie de la circulation lymphatique. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0050, 1997, 5 p.
19-0050 Physiologie de la circulation lymphatique Angéiologie
2 Lymphatique initial.
LYMPHATIQUE INITIAL
2
Angéiologie Physiologie de la circulation lymphatique 19-0050
Sur l’ensemble du réseau lymphatique, des ganglions sont placés 4 Schéma général du système lymphatique.
en forme de relais. La lymphe pénètre dans le ganglion, par le 1. Veine sous-clavière ; 2. canal thoracique ; 3. efférent ; 4. afférent ; 5. capillaire ;
collecteur afférent à la convexité de ce dernier, et ressort par le hile 6. collecteur ; 7. veine ; 8. capillaire ; 9. artère ; a. foie ; b. intestin ; c. lymphocyte ;
du ganglion, siège du départ du collecteur efférent. L’ensemble de d. ganglion ; e. valves ; f. lymphatique initial.
ces collecteurs, tant à la convexité que sur le hile, sont équipés de
valvules anti-reflux [7]. À l’intérieur du ganglion, le tissu lymphoïde liquide interstitiel dans le capillaire lymphatique où la pression est
est organisé en follicules périphériques qui sont la zone de sensiblement plus haute, la plupart du temps, que dans le secteur
différenciation des lymphocytes B. Le paracortex est le lieu de interstitiel ? Dans le cas des capillaires sanguins, les échanges se
différenciation des lymphocytes T. La lymphe circule dans les sinus font par un jeu de pression intra- extravasculaire selon la deuxième
périphériques et radiaires qui sont munis d’un endothélium dont loi de Starling qui fait intervenir l’équilibre des forces entre la
les parois associent des cellules macrophagiques. Le rôle du pression hydrostatique intravasculaire et tissulaire et la pression
ganglion lymphatique est majeur : oncotique sanguine et tissulaire. Ce mécanisme est parfaitement
– dans la filtration et l’épuration de la lymphe avec présentation reconnu pour les capillaires à paroi continue, il l’est moins pour
antigénique par les cellules macrophagiques des sinus ; les capillaires fenêtrés, d’autant moins que les fenêtres sont plus
larges.
– dans l’activation des cellules folliculaires et la production de
Le lymphatique initial est caractérisé par le manque d’adhérence
cellules B mémoire ;
entre les cellules endothéliales et l’attache des fibrilles au tissu
– dans l’activation des lymphocytes T paracorticaux. interstitiel. Les jonctions sont ouvertes pendant le remplissage des
lymphatiques initiaux par l’afflux de liquide repoussant les
cellules [13]. La fréquence de ces ouvertures varie avec l’activité du
Formation de la lymphe tissu environnant. De façon plus occasionnelle, le remplissage peut
se faire par mécanisme vacuolaire, notamment pour les
FORMATION
chylomicrons. Les jonctions interendothéliales s’ouvrent lorsque la
pression tissulaire est basse et permettent le remplissage. Elles se
La composition de la lymphe préganglionnaire indique que la ferment dès que la pression vasculaire est élevée, permettant la
lymphe est un simple liquide interstitiel, résorbé au voisinage du vidange. Lorsque la pression tissulaire hydrostatique augmente,
capillaire lymphatique [9]. Quel est le mécanisme qui dirige le l’écoulement de la lymphe augmente jusqu’à ce que la pression
3
19-0050 Physiologie de la circulation lymphatique Angéiologie
4
Angéiologie Physiologie de la circulation lymphatique 19-0050
l’analyse histologique des canaux lymphatiques notamment membres. De plus, la contraction rythmique du lymphangion,
initiaux, soit de la visualisation par cathétérisme des voies grâce aux fibres musculaires lisses, est accentuée par l’étirement de
lymphatiques principales chez le chien ou chez le rat, après celui-ci sous l’effet du drainage lymphatique superficiel, réalisant
création d’œdèmes inflammatoires. une véritable contraction réflexe lympholymphatique. Le drainage
L’exploration lymphatique clinique, à l’état normal, est peu lymphatique manuel réalise donc, d’une part une dérivation du
développée. La visualisation des canaux lymphatiques initiaux flux lymphatique par des voies anastomotiques, mais d’autre part
peut se faire par cathétérisme percutané des canaux lymphatiques une activation du réseau lymphatique sous-cutané.
et opacification par le Iotrulant. Les renseignements sont ici Par ailleurs, un des temps essentiel du drainage lymphatique
purement morphologiques et n’ont aucune prétention manuel est la vidange dans les ganglions proximaux. L’étude de la
fonctionnelle. La lymphoscintigraphie utilise, en revanche, les physiologie circulatoire lymphatique confirme le rôle de réservoir
capacités du système lymphatique à drainer les macromolécules. et de concentration de la lymphe joué par le ganglion dont
Cet examen consiste, en effet, à injecter, par voie sous-cutanée, un l’absence retentit très fâcheusement sur l’évacuation du liquide
colloïde (macromolécule) marqué au technétium, et à étudier le lymphatique.
transit de la radioactivité le long du membre. Le renseignement L’action produite par la contention élastique est du même ordre.
apporté est ici vaguement morphologique, mais surtout La contraction musculaire provoque la compression des canaux
fonctionnel, donnant des renseignements sur le temps de transit lymphatiques surtout superficiels, et donc leur contraction et
du produit radioactif entre l’extrémité et la racine du membre. l’évacuation de la lymphe. Cela explique pourquoi il est
L’écueil principal auquel se heurte l’exploration physiologique de particulièrement important de réaliser des exercices musculaires
la circulation lymphatique est que l’introduction d’un marqueur avec la contention en place, et pourquoi elle est peu utile au repos,
dans la circulation lymphatique génère, de façon à peu près notamment la nuit. Il paraît donc utile de garder à l’esprit ces
obligatoire, des phénomènes inflammatoires perturbant la fonction notions physiologiques pour mieux comprendre, et mieux
lymphatique, qui est justement d’évacuer les cellules et les indiquer, non seulement les explorations mais également la
macromolécules générées par le phénomène inflammatoire. Le test thérapeutique du lymphœdème.
de Landis qui mesure la perméabilité capillaire non seulement
veineuse, mais également lymphatique, est troublé dans son
interprétation par le fait que l’albumine injectée est par elle-même
susceptible d’engendrer des phénomènes d’inflammation locale Conclusion
pour les raisons déjà exposées (cf supra).
Les notions physiologiques utiles pour comprendre l’exploration La circulation lymphatique et la lymphe assurent donc une triple
sont, d’une part, les phénomènes de résorption et d’évacuation des fonction. Tout d’abord la préservation de l’équilibre hydrique de
macromolécules protéiques, d’autre part, la concentration de la l’organisme en relation étroite avec les autres éléments de l’unité
lymphe dans les ganglions. microcirculatoire. Cependant, on l’a vu, les capacités de drainage sont
Le traitement du lymphœdème est essentiellement réalisé par le limitées. Au-delà de ces limites apparaît l’œdème riche en protéines.
drainage lymphatique manuel et la contention. Les médicaments Ensuite s’installe une fonction de drainage soit des produits du
dits « lymphagogues » ne jouent qu’une part très minime dans la métabolisme cellulaire, soit des graisses absorbées par la villosité
fonction lymphatique. Le drainage lymphatique est actif grâce à intestinale. Enfin, le rôle du système lymphatique est la défense
deux notions anatomophysiologiques. La morphologie du système contre les agressions microbiennes par l’intermédiaire des
lymphatique associe un réseau superficiel et profond ainsi que de lymphocytes B et T et la génération d’anticorps antimicrobiens.
multiples anastomoses, lymphaticolymphatiques et lymphati-
coveineuses qui permettent de comprendre que la lymphe peut
s’écouler par des voies anastomotiques entre les deux réseaux et Remerciements.– Je suis très reconnaissant au Docteur Largier pour son aide précieuse dans
par des voies controlatérales anastomotiques notamment pour les les schémas de cet article.
Références
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Schattauer Verlag, 1983 d’échange et de retour. Boots Dacour 1984 : 21-27 1-160
5
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0040
19-0040
Résumé. – Les veines permettent le retour du sang des capillaires vers le cœur droit. Le volume du sang
veineux, qui correspond à environ deux tiers de la volémie totale, constitue une réserve constamment
disponible pour s’adapter aux conditions hémodynamiques. La distensibilité veineuse et les propriétés
vasomotrices font des veines un système capacitif capable de stocker et de restituer du sang à la
demande. Ce volume représente également un stimulus essentiel pour la régulation de la volémie
sanguine totale, par le biais des volorécepteurs du système à basse pression.
Le réseau veineux appartient au système à basse pression de la circulation sanguine. Le gradient de
pression linéaire dans les veines étant faible, plusieurs mécanismes physiologiques aident le retour
veineux. Une force motrice est générée en permanence par la différence de pression entre les veinules
(pression générée par le ventricule gauche) et la pression veineuse centrale (qui est maintenue basse par
la pompe ventriculaire droite). Les mécanismes accessoires (pompe musculaire, respiration, valvules)
prennent toute leur importance dans certaines situations physiologiques, comme le passage en
orthostatisme, la marche, la polypnée.
Les régulations de la vasomotricité veineuse et de la vasomotricité artérielle sont régies par des
mécanismes similaires, mais peuvent intervenir de façon dissociée, régulant ainsi la filtration capillaire,
essentielle au fonctionnement de certains organes.
© 2000 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Mots-clés : veines, volémie, système à basse pression, système capacitif, retour veineux, pompe
musculaire, vasomotricité.
Introduction INTIMA
Les veines ont une structure générale similaire à celle des artères – les veines de gros calibre sont riches en collagène, ce qui les rend
et sont composées de trois tuniques : l’intima, la média et peu déformables, mais plus résistantes.
l’adventice.
ADVENTICE
Laurent Belhassen : Assistant hospitalier universitaire. L’adventice a une structure fibreuse lâche. Elle reçoit les
Serge Adnot : Professeur des Universités, praticien hospitalier.
Département de physiologie, service d’explorations fonctionnelles, hôpital Henri-Mondor, 51, avenue du
terminaisons nerveuses sympathiques et parasympathiques qui
Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil cedex, France. contrôlent la veinomotricité.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Belhassen L et Adnot S. Physiologie de la circulation veineuse. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Angéiologie,
19-0040, 2000, 5 p.
19-0040 Physiologie de la circulation veineuse Angéiologie
VIC
-22 mmHg
TSP
500 mL
TSC 300 mL
500 mL
-10 mmHg
CD
TPHS
800 mL 1800 mL
VMI
2
Angéiologie Physiologie de la circulation veineuse 19-0040
Pompe
Pression musculaire
dynamique Battements
artériels
Pression Retour
veineuse veineux
centrale Valvules 2
Respiration Gravité
4 3
3 Facteurs contribuant au retour veineux.
A B
RETOUR VEINEUX
Pompe cardiaque
Elle est le déterminant majeur du retour veineux. La contribution
cardiaque intervient à la fois lors de sa contraction et lors de sa
relaxation. Lors de chaque systole, le cœur permet le maintien du
gradient de pression dynamique qui permet la progression de la
colonne sanguine. Cependant, la pression dynamique à la sortie
des capillaires n’est pas suffisante pour assurer le retour veineux,
notamment en orthostatisme. Le ventricule droit, en pompant le
sang vers les poumons, abaisse constamment la pression veineuse C
centrale. En fin de systole, la pression dans le ventricule droit est
inférieure à la pression dans l’oreillette droite (pression veineuse 4 Schéma du fonctionnement de la pompe musculaire.
centrale). Le sang est donc aspiré vers le ventricule droit lorsque la A. Repos : au repos, le sang circule dans les réseaux veineux profond et superficiel
tricuspide s’ouvre. Ainsi, une dysfonction ventriculaire droite et communique entre les deux réseaux par les perforantes. 1. Veine perforante ; 2.
muscle ; 3. veine profonde ; 4. veine superficielle.
isolée (infarctus ou tamponnade) peut entraîner très rapidement B. Contraction musculaire : lors de l’exercice, le sang est chassé du réseau profond
une stase veineuse par augmentation de la pression veineuse par la contraction musculaire, et le retour veineux se fait uniquement par le réseau
centrale et diminution des gradients de pression. superficiel (flèches).
C. Relaxation : lors de la relaxation, les perforantes s’ouvrent et le réseau profond
Dépression intrathoracique se remplit. À tout moment, le reflux sanguin est empêché par les valvules veineu-
ses (flèches).
La dépression intrathoracique (variant de − 4 mmHg à − 8 mmHg)
est également essentielle et agit constamment pour augmenter le
gradient de pression veineux. La respiration module la pression Accessoirement, le battement d’une artère d’un pédicule vasculaire
intrathoracique et la pression intra-abdominale, rôle qui devient aide à faire progresser le sang contenu dans les veines adjacentes
majeur en cas d’hyperventilation. À chaque inspiration, la contenues dans la même gaine que l’artère, alors que les valves en
diminution de la pression intrathoracique aspire le sang vers évitent le reflux.
l’oreillette droite, tandis que l’augmentation de la pression intra-
abdominale évacue le sang veineux vers le thorax, alors le système
Pesanteur
valvulaire empêche un reflux vers les membres inférieurs.
Inversement, la manœuvre de Valsalva peut interrompre Elle ne joue d’effet positif sur le retour veineux qu’en ce qui
complètement le retour veineux en augmentant de façon concerne les veines cervicoencéphaliques (et les veines des
importante les pressions intracavitaires. membres supérieurs quand ceux-ci sont surélevés). La pesanteur
empêche donc le reflux dans les veines cervicales en position
Muscles orthostatique, et leur système valvulaire est peu développé.
Les muscles ont une action dynamique importante sur le retour
veineux pendant l’exercice (fig 4). Leur participation peut atteindre ¶ Retour veineux et fonction cardiaque
30 % de l’énergie nécessaire au retour lors d’un exercice intense [9].
En se contractant, ils expriment les veines intramusculaires et, pour Comme nous l’avons vu, la pompe cardiaque est un déterminant
une moindre part, les veines juxtamusculaires (en exerçant une majeur du retour veineux grâce à un double mécanisme propulsif
compression latérale). Ils sont aidés dans cette tâche par le système et aspiratif. Le gradient de pression entre les veinules et l’oreillette
valvulaire qui empêche presque tout reflux vers l’amont ou vers droite permet la progression de la colonne sanguine. Quand la
les veines superficielles. À l’inverse, pendant la relaxation pression dans l’oreillette droite augmente, le retour veineux
musculaire, les veines profondes se remplissent à partir des veines diminue, puis s’annule (fig 5). Quand la pression dans l’oreillette
superficielles ou directement à partir des capillaires. C’est cette droite diminue, le retour veineux augmente pour atteindre un
action qui a permis de qualifier les muscles des membres inférieurs plateau quand la pression auriculaire droite (POD) devient
de pompe sanguine périphérique. inférieure à la pression intrathoracique, les veines intrathoraciques
3
19-0040 Physiologie de la circulation veineuse Angéiologie
Retour 100
veineux
L.min-1 90
2 80
70
60
50
1 40
30
20
10
POD (mm Hg) 0
vfs vtp vdp
-4 0 4 8
Repos Marche
5 Relation reliant pression auriculaire droite (POD) et retour veineux. Le retour vei- 6 Évolution de la pression veineuse dans les membres inférieurs lors de la marche.
neux croît avec la diminution de la POD pour atteindre un plateau correspondant Vfs : veine fémorale superficielle ; vtp : veine tibiale postérieure ; vdp : veine dorsale du
à une limitation du débit par un collapsus des veines intrathoraciques. pied.
4
Angéiologie Physiologie de la circulation veineuse 19-0040
Les mécanismes détaillés de la régulation de la vasomotricité fait l’objet La synthèse de NO par les cellules endothéliales est également
d’un autre article. Nous ne faisons donc ici qu’énumérer les principaux stimulée par les forces de cisaillement (shear stress) qui résultent
facteurs intervenant dans cette régulation, en insistant sur les du frottement du sang contre l’endothélium. Le shear stress est
particularités propres aux veines. Paradoxalement, si peu d’équipes proportionnel à la viscosité et au débit sanguin, et inversement
scientifiques se consacrent spécifiquement à l’étude des mécanismes proportionnel au cube du rayon de la veine. Or, les vitesses sont
cellulaires de régulation du tonus veineux, la majeure partie des études peu élevées dans les veines, et la viscosité y est plus élevée que
ayant pour thématique l’athérome sont réalisées sur les cellules dans les artères. La résultante en termes de shear stress n’a pas été
endothéliales issues de veines ombilicales humaines (qui sont étudiée jusqu’à présent, mais il est probable que la régulation flux-
relativement faciles à obtenir). Ainsi, la plupart des résultats publiés dépendante du diamètre des veines soit moins essentielle que celle
sur des expériences réalisées in vitro sur des cellules endothéliales des artères [8].
seraient applicables à la circulation veineuse également.
Les autres facteurs intervenant dans la régulation de la
La balance des actions sympathiques et parasympathiques est
vasomotricité veineuse sont potentiellement nombreux, mais n’ont
essentielle à la régulation de la vasomotricité veineuse. L’effet du
pas fait, à ce jour, l’objet d’études spécifiques. Il s’agit
sympathique est globalement vasoconstricteur, et résulte de la
somme des effets a-adrénergique (constricteur) et b-adrénergique essentiellement des prostaglandines (vasodilatatrice comme la
(relaxant) de la noradrénaline sur les cellules musculaires lisses prostacycline ou vasoconstrictrice comme le thromboxane A2), de
vasculaires. Le parasympathique, qui agit par l’intermédiaire de l’angiotensine, de l’endothéline, de la sérotonine et de l’histamine,
l’acétylcholine, a un effet biphasique, relaxant puis constricteur, qui des kinines (comme la bradykinine), de la dopamine [5] . De
a récemment été élucidé. La relaxation est due à la stimulation des nombreux facteurs extrinsèques sont également capables de
cellules endothéliales sur leurs récepteurs muscariniques M3 qui moduler le tonus des veines et donc le débit dans certains
induit la production de monoxyde d’azote (NO) qui relaxe le territoires. Le plus connu et le mieux étudié est le tabac, qui peut
muscle lisse [1] . L’effet constricteur est dû à l’effet direct de entraîner une vasoconstriction rapide et réversible des veines du
l’acétylcholine sur la cellule musculaire lisse. dos de la main [3], et potentiellement d’autres territoires.
Références
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5
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0100
19-0100
Physiologie de l’hémostase
I Elalamy
MM Samama
Résumé. – L’hémostase fait intervenir un ensemble de mécanismes qui assure la prévention des
saignements spontanés, l’arrêt des hémorragies en cas de rupture de la continuité de la paroi du
vaisseau et la réparation de la brèche vasculaire. Ce processus physiologique comprend l’hémostase
primaire avec le temps vasculaire et le temps plaquettaire, et la coagulation plasmatique proprement
dite. Toutes ces étapes sont intimement intriquées et sont suivies de la fibrinolyse qui complète le
rétablissement de la continuité de la paroi vasculaire lésée. Un équilibre harmonieux de cette balance
hémostatique entre facteurs procoagulants et anticoagulants est nécessaire pour éviter la survenue de
thromboses ou d’hémorragies.
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Physiologie de l’hémostase primaire médiateurs et la nature des mécanismes mis en jeu ne sont pas
tous élucidés. L’activation plaquettaire et la libération de
substances vasoactives (thromboxane A2 [TxA2], sérotonine) au
L’hémostase primaire fait intervenir quatre acteurs principaux : la
contact de lésions athéroscléreuses, par exemple, contribue à la
paroi vasculaire, les plaquettes, le facteur von Willebrand (FvW) et
formation de microthrombi et au dysfonctionnement de la
le fibrinogène.
microcirculation. Les prostaglandines (PG) telles que la PGE1 et la
PGI2 sont vasodilatatrices et antiagrégantes.
TEMPS VASCULAIRE
Le temps vasculaire correspond à la vasoconstriction réflexe
L’endothélium vasculaire, avec ses capacités de synthèse de immédiate, mais transitoire, des vaisseaux lésés. L’interaction
multiples médiateurs, constitue une interface dynamique plaquettes-endothélium vasculaire est ici essentielle. Les plaquettes
répondant localement à divers stimuli, cellulaires ou solubles, du assurent en effet l’intégrité des parois vasculaires par colmatage
compartiment vasculaire. De nombreux agents physiques tels que des brèches spontanées ou provoquées et permettent une
les forces de cisaillement, ou humoraux comme les cytokines, vasoconstriction efficace grâce à l’apport, au niveau de la lésion,
contribuent activement à la participation endothéliale aux de sérotonine et de TxA2 douées de propriétés vasoconstrictrices.
différents processus physiopathogéniques [4] . L’endothélium,
occupant une position frontière, est particulièrement soumis aux TEMPS PLAQUETTAIRE
influences répétées provenant du compartiment sanguin et de ses
constituants. Il joue un rôle déterminant dans le maintien de Les plaquettes jouent un rôle primordial dans l’hémostase
l’homéostasie et participe de façon active à la régulation de primaire. Leur participation requiert l’intégralité de leurs diverses
nombreux processus physiopathologiques dont l’angiogenèse, fonctions que nous détaillerons après un bref rappel
l’inflammation et l’invasion tumorale. Il module aussi l’hémostase morphologique.
grâce au FvW, au facteur tissulaire, à l’activateur tissulaire du
plasminogène (t-PA) et à son inhibiteur, le plasminogen activator ¶ Anatomie plaquettaire
inhibitor (PAI). La rupture d’une plaque athéroscléreuse entraîne la En 1882, Bizzozero et Hayem ont identifié les plaquettes à de petits
mise à nu des surfaces thrombogènes, activant alors de multiples éléments circulant dans le flux sanguin, issus de la fragmentation
partenaires du compartiment vasculaire tels que les plaquettes, les d’érythrocytes et de leucocytes. Elles furent longtemps considérées
monocytes-macrophages et les cellules musculaires lisses. Leurs comme des artefacts puis comme de simples éponges, tout juste
interactions complexes conditionnent l’évolution de cette lésion : capables de transporter les facteurs de la coagulation [1]. Les
progression de l’athérome, thrombose murale réparatrice, recherches au cours de ces dernières décennies ont permis de leur
thrombose occlusive responsable d’ischémie aiguë. L’ensemble des attribuer un rôle central dans la constitution du thrombus. Les
plaquettes sanguines participent à divers processus
physiopathologiques tels que l’hémostase, la thrombose,
Ismaël Elalamy : Maître de conférences des Universités, praticien hospitalier. l’inflammation ou la dissémination métastasique de certains
Meyer-Michel Samama : Professeur Émérite d’hématologie.
Service d’hématologie biologique, Hôtel-Dieu, 1, place du Parvis-Notre-Dame, 75181 Paris cedex 04,
cancers [14]. Leur réponse est modulée par de nombreuses enzymes
France. assurant la transduction du signal. Les plus importantes sont les
Toute référence à cet article doit porter la mention : Elalamy I et Samama MM. Physiologie de l’hémostase. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés), Angéiologie,
19-0100, 2001, 6 p.
19-0100 Physiologie de l’hémostase Angéiologie
Mitochondries, glycogène Source énergétique – les granules alpha (a), plus gros et plus nombreux que les granu-
les d, qui renferment des protéines adhésives telles que le FvW, le
AA : acide arachidonique ; ADP : adénosine diphosphate ; ATP : adénosine triphosphate ; Fg : fibrinogène ; fibrinogène, la thrombospondine (TSP) et la P-sélectine (GMP-140
TxA2 : thromboxane A2.
ou CD62). Ils renferment aussi des facteurs de croissance comme
phospholipases (PL) A2 et C, la cyclo-oxygénase (Cox), l’ade- le platelet derived growth factor (PDGF), le facteur V (proaccélérine)
nylcyclase, les protéines kinases et les protéines tyrosines kinases. et le facteur VIII (antihémophilique A) de la coagulation, des
Les plaquettes sont de petites cellules anucléées de 2 à 3 µm de chemoattractants tels que le facteur IV plaquettaire (F 4P), la
diamètre ayant, au repos, la forme d’un disque biconvexe. Elles b-thromboglobuline (b-TG) ou le neutrophil activating peptide 2
proviennent de la fragmentation de leurs précurseurs médullaires, (NAP-2). Leur membrane contient des sites a 2b b 3 et de la
les mégacaryocytes [8]. Leur nombre, chez l’homme, varie de 150 à GMP-140 ;
400 x 109 cellules/L de sang et leur durée de vie est de 8 à – les lysosomes qui renferment des enzymes hydrolytiques :
10 jours [14]. La figure 1 illustre l’ultrastructure d’une plaquette essentiellement des protéases et des glycosidases acides. La
sanguine. Les plaquettes comportent différentes structures protéine CD63 est exprimée lors de l’activation plaquettaire et elle
permettant d’assurer leurs multiples fonctions (tableau I) : serait d’origine lysosomiale [11] ;
– à la périphérie, le glycocalix, constitué de mucopolysaccharides – les mitochondries et les grains de glycogène qui constituent la
(MPS), est le premier site d’interaction des plaquettes avec source d’énergie principale de la plaquette via la phosphorylation
l’environnement extérieur. Face aux MPS endothéliaux, les oxydative et la glycolyse (tableau I).
plaquettes sont donc repoussées de la face endoluminale de la
paroi vasculaire par opposition des charges négatives ; ¶ Réponse plaquettaire
– la membrane plasmique, comme celle des autres cellules, obéit
au modèle général de mosaïque fluide [15]. Elle est constituée Après la blessure vasculaire, la mise en jeu des plaquettes est
essentiellement d’une matrice de phospholipides disposés en multifactorielle et les mécanismes restent encore mal connus.
bicouche et distribués de façon asymétrique. L’activation plaquettaire est un processus complexe qui est mieux
compris sur le plan macroscopique que sur le plan moléculaire. La
Ainsi, les sphingomyélines sont essentiellement situées sur le réponse plaquettaire se déroule en plusieurs étapes intimement
feuillet externe, tandis que les phosphatidyléthanolamines (PE), les intriquées.
phosphatidylsérines (PS) et les phosphatidylinositols (PI) sont
situés sur le feuillet interne, les phosphatidylcholines (PC) étant – La brèche vasculaire, mettant à nu le sous-endothélium non
réparties entre les deux feuillets de la membrane. Le maintien de mouillable, expose les fibres de collagène qui représentent le
cette asymétrie est assuré par une protéine particulière, déclencheur physiologique essentiel de l’hémostase primaire [14].
l’« aminophospholipide translocase ». Les PE, particulièrement L’adhésion des plaquettes au collagène est possible grâce aux ponts
riches en acide arachidonique (AA) sont hydrolysées par la formés d’une part, par le FvW contenu dans le plasma, les corps
2
Angéiologie Physiologie de l’hémostase 19-0100
3
19-0100 Physiologie de l’hémostase Angéiologie
Cox-1 Cox-2 aussi être appréhendée sous forme dynamique. Elle comporte
PGHS-1
PGHS-2
PGHS-1
Localisation subcellulaire Réticulum endoplasmique, peu dans l’enveloppe nucléaire Enveloppe nucléaire, peu dans le réticulum endoplasmique
ubiquitaire Cellules nucléées
4
Angéiologie Physiologie de l’hémostase 19-0100
PS 70 3 25 mg/L
(antihémophilique B) en IXa. Le FXa est nécessaire à la formation
TFPI 42 2 0,1 mg/L de prothrombinase qui transforme la prothrombine en thrombine
Deuxième CFH 65 22 60 à 110 mg/L (IIa).
Le FIXa, en présence de FVIIIa (antihémophilique A), de
AT : antithrombine ; CFH : cofacteur de l’héparine ; PS : protéine S ; PC : protéine C ; TFPI : tissue factor pathway
inhibitor. phospholipides et de calcium, constitue un premier complexe
enzymatique (complexe antihémophilique) qui est l’activateur
intrinsèque du FX ou la tenase des Anglo-Saxons, qui amplifie
Facteur tissulaire-Vlla Système contact
l’activation du FX en FXa.
Puis, le FXa permet la formation d’un second complexe
Xa enzymatique, la prothrombinase, constituée par le FXa, des
Prothrombinase phospholipides, du calcium et du FVa. Ce dernier est issu de
Voie extrinsèque Voie intrinsèque
l’activation du FV par le FXa et surtout par les premières traces de
thrombine formée.
Activation de la prothrombine Différents tests sont alors proposés pour explorer ces facteurs et
les étapes diverses de ces cascades enzymatiques (tableaux VI
et VII).
Voie commune
Thrombine
5
19-0100 Physiologie de l’hémostase Angéiologie
Tableau VII. – Facteurs explorés par les principaux tests de la protéine C en protéine C activée (PCa) qui est alors capable
d’hémostase. d’inhiber les catalyseurs de la cascade de la coagulation, les
facteurs Va et VIIIa. Dans l’inactivation du facteur VIIIa, le
Temps de saignement Plaquettes, facteur Willebrand, paroi facteur V joue un rôle de cofacteur qui est déficient dans le cas du
vasculaire
facteur V muté (facteur V Leiden).
Temps de céphaline plus activateur PK, KHPM, XII,
V, X, II, I Cette boucle de rétroaction démontre la complexité du phénomène
XI, IX, VIII et son caractère dynamique, en parfait équilibre. La thrombine
coagulante génère elle-même un anticoagulant, la PCa.
Temps de Quick VII, V, X, II, I
Le système réticuloendothélial hépatique, avec les macrophages,
Temps de thrombine I
joue aussi un rôle important dans la phagocytose des molécules
activées et dans la limitation du processus de la coagulation.
Le système de la protéine C est représenté par la protéine C, son La fibrinolyse complète le rétablissement de la continuité de la
cofacteur la protéine S et la thrombomoduline endothéliale. La paroi vasculaire et son étude a fait l’objet d’un article dans cette
thrombine, en présence de thrombomoduline, permet l’activation revue.
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6
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0550
19-0550
Le pied diabétique
J Martini
H Boccalon
JP Tauber
Résumé.– Le pied diabétique est une complication particulièrement fréquente et grave du diabète avec
D Lefebvre
une prévalence comprise entre 4 et 10 % et dont l’évolution reste marquée par le risque d’amputation.
Sur un plan physiopathologique, la neuropathie, responsable d’une perte de la sensibilité, favorise les
lésions traumatiques et, associée à des déformations, favorise l’apparition du mal perforant plantaire.
L’ischémie secondaire à l’artériopathie est source de lésions nécrotiques, dont l’exploration fait appel à
des examens non invasifs (doppler, TcPO2) et complétée éventuellement par une artériographie dans
l’optique d’un geste de revascularisation. L’infection joue un rôle aggravant dans le processus évolutif de
la lésion.
La prise en charge des plaies est basée sur l’association de moyens thérapeutiques complémentaires,
incluant entre autres les soins locaux, l’antibiothérapie, l’appareillage, la chirurgie conservatrice. Les
substituts de greffe sont des atouts supplémentaires dans la réduction du nombre d’amputation. Le
traitement spécifique de l’artériopathie passe par des techniques de revascularisation de plus en plus
performantes. La recherche d’un contrôle métabolique strict du diabète doit être systématique. La
stratégie de prise en charge est définie en fonction du grade de la plaie, du niveau d’ischémie et de la
présence d’une infection. L’organisation de la prise en charge au sein de structures spécialisées, par une
équipe multidisciplinaire, permet d’optimiser la qualité des soins et de réduire l’incidence des
amputations lourdes. Enfin, la prévention reste une étape essentielle dans la réduction de l’incidence des
lésions et du nombre des amputations. Elle passe par une formation des patients aux mesures de
prévention et un programme de suivi régulier, incluant l’examen systématique des pieds.
© Elsevier, Paris.
Introduction 60 000 patients par an, dont la moitié serait hospitalisée [25]. La
gravité est liée principalement aux amputations, dont le taux est
Les ulcérations du pied chez le diabétique constituent encore un
multiplié par 15 dans certaines populations [2, 19]. En Finlande,
véritable problème de Santé publique. Cette pathologie est responsable
Siitonen retrouve un risque 10 à 13 fois plus élevé dans la
d’une morbidité et d’une mortalité importantes associées à un coût
population diabétique [52]. Classiquement, 15 % des diabétiques
élevé. Bien que les mécanismes physiopathologiques (neuropathie,
vont subir une amputation au cours de leur vie et 50 à 70 % des
artériopathie et infection) impliqués dans l’apparition et l’aggravation
amputations non traumatiques sont réalisées chez des
de la plaie soient mieux connus, le retard diagnostique et l’absence de
diabétiques [56], ce qui correspond en France à 15 000 amputations
prise en charge globale expliquent encore, trop souvent, la gravité des
par an. Le taux de réamputation est considérable et estimé à 56 %
lésions. L’amélioration du pronostic passe surtout par une démarche de
à 5 ans, avec un taux de survie à 5 ans entre 40 et 50 % [2, 36]. Les
prévention basée sur le dépistage des pieds à risque, l’éducation des
facteurs de risque d’amputation sont le sexe masculin, l’ancienneté
patients diabétiques et la surveillance de l’état vasculaire. Le traitement
du diabète, la présence d’une médiacalcose, la notion d’une
doit faire appel à une approche multidisciplinaire médicochirurgicale où
microangiopathie, le degré d’hyperglycémie à jeun et post-
le patient doit jouer un rôle actif.
prandiale [36, 44, 51]. Le coût de cette pathologie représente 20 % des
dépenses de santé liées au diabète [60]. Il est dû pour une grande
Épidémiologie part au nombre et à la durée des hospitalisations estimées entre 14
et 45 jours [25]. Récemment, Van Houtum, aux Pays-Bas, a évalué ce
La prévalence des lésions du pied chez le diabétique se situe entre coût à 10 531 livres sterling par patient pour une durée moyenne
4 et 10 % dans les pays anglo-saxons [5, 46]. Elle atteint 15 % après d’hospitalisation de 41,8 jours [55].
l’âge de 80 ans [45]. En France, cette pathologie toucherait 50 à
Toute référence à cet article doit porter la mention : J Martini, H Boccalon, JP Taubert et D Lefebvre. Le pied diabétique. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0550, 1997, 6 p.
19-0550 Le pied diabétique Angéiologie
bien établi puisqu’elle est présente chez plus de 80 % des patients La macroangiopathie est caractérisée par un athérome qui est plus
porteurs d’ulcères et rendue responsable de 60 à 80 % de ces fréquent chez le diabétique. La présence d’une claudication
lésions [5, 8] . Les composantes sensitivomotrices et végétatives artérielle est multipliée par quatre dans la population diabétique [43]
participent au développement de l’ulcère neuropathique, bien que la neuropathie réduise la symptomatologie. Le risque
classiquement appelé « mal perforant plantaire ». La perte de la d’ulcères vasculaires chez le diabétique est d’autant plus important
sensibilité thermoalgique est responsable de lésions traumatiques que d’autres facteurs de risque sont souvent associés : tabac,
indolores et du retard diagnostique par perte du signal d’alarme hypertension artérielle (HTA), hypercholestérolémie. Les artères le
qu’est la douleur. L’atteinte proprioceptive associée à l’atteinte plus souvent concernées par les atteintes d’athérome chez le
motrice avec amyotrophie des muscles interosseux et le déséquilibre diabétique sont la fémorale profonde et les tibiales antérieures et
entre les muscles fléchisseurs et extenseurs entraînent des postérieures. La paroi artérielle est le siège d’une médiacalcose,
déformations du pied et la création de nouveaux points d’appui. responsable d’une diminution de la compliance artérielle et de la
Ces zones d’hyperpression sont localisées préférentiellement au présence de calcifications.
niveau plantaire (proéminence des têtes métatarsiennes, pulpe des La microangiopathie est caractérisée par un épaississement de la
orteils déformés en marteau) ou en regard des articulations membrane basale capillaire aboutissant à l’occlusion. Aucune étude
interphalangiennes. L’hyperpression localisée, accentuée par la n’a pu établir de relation entre microangiopathie et ulcération ou
perte de la mobilité articulaire, et le défaut de sudation secondaire gangrène, bien qu’il existe une hypertension capillaire [53].
à la neuropathie végétative vont favoriser l’apparition d’une En présence d’un ulcère, l’artériopathie et la neuropathie sont
hyperkératose réactionnelle ou callosité. Cette dernière est souvent associées. Bien que le lien entre la neuropathie et les
responsable de microtraumatismes tissulaires (érosion, cisaillement) complications macrovasculaires reste inexpliqué, il semble que la
qui, associés à une ischémie tissulaire distale, favorisent la médiacalcose, l’épaississement de la paroi vasculaire ainsi que la
constitution progressive d’une ulcération. L’ischémie tissulaire peut dénervation sympathique facilitent la survenue des complications
être en partie rattachée à l’ouverture des shunts artérioveineux et à vasculaires [53].
la perte de la régulation posturale du flux capillaire, conséquences
Au plan hémorrhéologique, il existe une augmentation de la
directes de l’atteinte végétative [22]. Ces anomalies microcirculatoires
viscosité sanguine que l’on peut prendre en compte au plan
s’accompagnent de lésions histologiques à type d’épaississement de
thérapeutique [28].
la paroi des capillaires par prolifération des cellules endothéliales
responsables d’une occlusion de la lumière des vaisseaux [17, 53]. DIAGNOSTIC ET DESCRIPTION DE LA PLAIE
Cliniquement, la plaie d’origine neuropathique, qui siège
préférentiellement au niveau plantaire, est une ulcération indolore, Les troubles trophiques ischémiques peuvent être représentés, soit
atone, de couleur grisâtre, sans dépôt fibrineux ni nécrose et par une gangrène sèche limitée, soit par une gangrène humide avec
entourée d’un halo d’hyperkératose. Son évolution naturelle se fait surinfection et diffusion vers les tendons, soit par une angiodermite
vers l’extension en profondeur avec apparition de pertuis et de nécrotique, évoluant vers une ulcération cutanée douloureuse. La
caverne, puis vers une surinfection des tissus profonds (gaine zone de nécrose est entourée d’érythème ; elle peut siéger au
tendineuse, os et articulation) [16]. niveau du gros orteil, à la face interne du 1er métatarse, au bord
externe du 5e orteil, au talon. Le pied peut être chaud en raison de
PIED DE CHARCOT la neuropathie associée.
Le pied de Charcot est la conséquence clinique ultime de la Les particularités de l’examen clinique artériel chez le diabétique
neuroarthropathie diabétique. Sa prévalence est estimée de manière sont les suivantes :
très variable entre 0,1 % et 7,5 % [48]. Il est caractérisé par des – si la claudication précède le trouble trophique ischémique, elle
déformations majeures avec une perte de l’architecture classique peut se manifester sous forme d’une métatarsalgie qui peut en
du pied, dont le développement se fait en deux phases. La imposer pour une affection rhumatismale. Sa prévalence chez le
première, ou phase aiguë, est marquée par une destruction osseuse diabétique est comprise entre 0,2 % et 10,9 % [40]. Associée à une
avec fractures spontanées et luxations du tarse et du métatarse. La neuropathie, elle peut s’exprimer par un engourdissement, une
fragilité osseuse responsable de ces fractures est la conséquence de sensation d’anesthésie, un besoin de stopper la marche, plutôt que
la neuropathie végétative ; le flux sanguin, accéléré par l’ouverture par une douleur ;
des shunts artérioveineux, stimulant l’activité ostéoclastique. À la
– les pouls distaux sont absents chez 15 et 19 % des diabétiques,
suite de stimuli mineurs mais répétés, le pied prend un aspect
alors que le pouls pédieux n’est pas retrouvé dans 10 % des cas
pseudo-inflammatoire et douloureux qui fait évoquer à tort le
dans la population générale [40] ;
diagnostic d’ostéomyélite ou d’infection des tissus profonds. La
seconde phase est la phase de reconstruction et de consolidation –en raison d’une médiacalcose, détectée chez 15 à 34 % des
des déformations (cals hypertrophiques). Il existe le plus souvent sujets [40], la rigidité des artères rend la mesure de la pression
un affaissement de la voûte plantaire et une rétraction des orteils. artérielle à la cheville impossible ou donne des valeurs surestimées
Le pied prend un aspect cubique. La radiographie retrouve une dans un tiers des cas. Cette mesure n’est pas fiable dans 50 % des
structure osseuse anarchique avec perte des repères anatomiques. cas [4]. Cependant, l’indice systolique de pression artérielle de
Le pied de Charcot, à risque majeur d’ulcération, pose un problème cheville est pathologique (≤ 0,80) chez 9 à 12 % d’une population
de prise en charge difficile [48], d’autant que l’atteinte bilatérale est de diabétiques, confirmant la forte prévalence de l’artériopathie
présente chez environ 10 % de ces patients [31]. malgré la surestimation de la pression artérielle [41, 43]. La mesure
de la pression à l’orteil et la mesure de l’indice 1er orteil/ cheville
Plaie ischémique reflètent mieux la présence d’une artériopathie distale [11].
2
Angéiologie Le pied diabétique 19-0550
Devant un tableau d’ischémie permanente, (douleur de décubitus augmentation de la TcPO2 (70 % des cas) et du flux superficiel
de l’avant-pied ou, plus souvent troubles trophiques ischémiques (30 % des cas). Dans le cas d’artériopathie survenant chez le
des orteils), la mesure de la pression d’oxygène par voie diabétique, la TcPO2 n’est pas modifiée par la verticalisation
transcutanée (TcPO2) est actuellement l’examen de choix ; les (réponse myogénique locale) ; le flux superficiel ne varie pas ou
paramètres hémodynamiques sont effondrés à ce stade et ne sont peut augmenter, ce qui témoigne d’une disparition du réflexe
plus discriminatifs. Les valeurs habituellement citées sont : veinoartériolaire lors de la verticalisation.
normale > 50 mmHg, sévère < 30 mmHg (avec discussion d’une De fait, les explorations de la microcirculation des membres
revascularisation) ; dès qu’elle est < 10 mmHg, il s’agit d’une inférieurs chez le diabétique artériopathe doivent encore être
ischémie critique dont le pronostic est sévère à court terme. S’il considérées comme appartenant à la recherche clinique.
existe une infection, il convient de répéter la mesure après
disparition de l’infection car les valeurs sont faussées. Des tests de Infection
stimulation peuvent être utilisés tels que la verticalisation du
membre inférieur [4]. L’infection est rarement un facteur causal dans l’apparition des
La valeur prédictive de la TcPO2 quant au pronostic d’une ischémie lésions. Elle joue en revanche un rôle aggravant, favorisé par la
permanente du pied chez le diabétique a été étudiée [1]. Lorsque la brèche cutanée et le déséquilibre glycémique qui provoque des
TcPO2 est ≥ 30 mm Hg, le traitement médical, les soins locaux et si altérations de la fonction leucocytaire et de l’immunité cellulaire [20].
nécessaire une amputation mineure assurent de bons résultats dans Son caractère torpide puis rapidement extensif explique à la fois le
plus de 80 % des cas. Lorsque la valeur de la TcPO2 est < 30 caractère tardif du diagnostic et la gravité des lésions. La
mmHg, la revascularisation est discutée avec amélioration dans surinfection est ainsi à l’origine de la plupart des hospitalisations.
plus de 80 % des cas. Le risque de survenue d’ulcères chez le Sur le plan bactériologique, la flore est souvent polymicrobienne
diabétique défini par l’étude de la neuropathie et de la où l’on retrouve de façon plus fréquente le staphylocoque doré, les
macroangiopathie est corrélé au test du monofilament d’une part, bacilles à Gram négatif, et les germes anaérobies [39]. Le type de
et à la TcPO2 < 30 mmHg d’autre part [41]. germe dépend de la profondeur de la plaie, de l’extension de la
cellulite et son identification impose un prélèvement de qualité par
L’artériographie doit avoir pour but d’étudier les possibilités de
curetage du fond de l’ulcère, la ponction à l’aiguille d’une
revascularisation, en montrant les zones d’intérêt avec, en
collection purulente ou la biopsie osseuse qui reste le prélèvement
particulier, la fémorale profonde et la distalité jusqu’aux orteils.
de référence [59].
Les particularités des lésions artérielles détectées à l’artériographie
chez le diabétique sont : OSTÉITE
– occlusions multisegmentaires ; Si le diagnostic d’une ostéite est primordial pour la prise en charge
– atteinte de la collatéralité ; ultérieure de la plaie, il reste encore difficile. Il est communément
– fémorale profonde fréquemment atteinte, multisténosée ; posé sur la découverte d’un contact osseux à l’examen clinique en
raison des limites de la radiographie standard [23]. Si certains
– oblitération des artères de jambe, puis des artères du pied ;
examens isotopiques spécialisés ont une bonne sensibilité dans le
l’artère péronière est celle qui reste le plus longtemps perméable.
dépistage de l’ostéomyélite, l’imagerie par résonance magnétique
En raison du risque rénal chez le diabétique, l’artériographie doit (IRM) nucléaire semble être un progrès dans le diagnostic
être précédée d’une réhydratation et d’une alcalinisation. Il topographique et l’extension de l’infection [14, 50].
convient d’éviter une chirurgie vasculaire majeure immédiatement
après l’artériographie. La technique d’angiographie numérisée ou
bien l’occlusion par ballonnet permet de diminuer la quantité
Axes thérapeutiques
d’iode injectée. Chez les malades présentant une insuffisance TRAITEMENT LOCAL
rénale, l’angio-IRM et le doppler couleur devront trouver leur
Les soins locaux doivent suivre les étapes physiologiques de la
place.
cicatrisation (détersion, bourgeonnement, épidermisation). Lors de
Lorsque l’opacification des artères du pied n’est pas convenable, la phase initiale de détersion, le débridement joue un rôle essentiel.
l’audition d’un signal doppler au niveau d’une artère distale doit Il consiste à réaliser un parage de la plaie, en éliminant
faire insister quant à l’obtention d’une meilleure image. l’hyperkératose et les tissus remaniés, à drainer les collections
liquidiennes et les pertuis [49]. En général réalisable au lit du malade
ÉTUDE DE LA MICROCIRCULATION ou en consultation, il peut être chirurgical si l’atteinte tissulaire est
trop extensive. Les étapes ultérieures visent à maintenir les plaies
Lors de la pratique clinique, les tests utilisés sont la mesure de la
propres et humides par l’utilisation d’antiseptiques incolores ou
TcPO2 et la mesure du flux superficiel par débimétrie doppler laser.
de sérum physiologique privilégié par certaines équipes devant le
L’enregistrement simultané de ces deux paramètres a été pratiqué risque cytotoxique des antiseptiques [38]. Dans tous les cas, une
au niveau des pieds des diabétiques présentant des troubles hygiène parfaite s’impose [56], rendant indispensable la participation
neurotrophiques plantaires [7]. Après une ischémie provoquée, le active du patient et le plus souvent l’aide d’une infirmière. La
débit superficiel augmente alors que la TcPO2 diminue ; ceci peut protection de la plaie fait appel à des compresses absorbantes non
correspondre à une dérivation du débit nutritionnel vers les adhérentes ou aux pansements gras. Les pansements adhésifs sont
anastomoses artérioveineuses ; la neuropathie supprime la proscrits en cas d’ischémie, devant l’extrême fragilité cutanée et le
vasoconstriction des anastomoses et peut être responsable d’une risque de lésions iatrogènes, pour privilégier les bandes extensibles.
hyperémie (microcirculatoire superficielle) avec hypoxie (par vol La surveillance rapprochée de la plaie impose un changement de
anastomotique). Cette hypoxie réactionnelle à l’ischémie peut pansement quotidien.
favoriser l’apparition de troubles trophiques.
Le réflexe d’adaptation vasculaire lors de la verticalisation des ANTIBIOTHÉRAPIE
membres inférieurs est caractérisé par une diminution du flux L’atteinte polymicrobienne impose une antibiothérapie à large
superficiel et de la TcPO2 au niveau de l’avant-pied. Il n’en est pas spectre couvrant les anaérobies. Puis son adaptation tient compte
de même pour certains cas d’artériopathie [9] ; il existe une du type de germe identifié, de l’antibiogramme, de la sévérité de
3
19-0550 Le pied diabétique Angéiologie
4
Angéiologie Le pied diabétique 19-0550
Oxygénation hyperbare
Tableau I. – Estimation de la gravité des lésions du pied
L’oxygène hyperbare est un appoint au traitement médical et diabétique [57].
chirurgical avec des effets bénéfiques dans des cas sélectionnés.
Grade 0 Pas de lésion ouverte, mais présence possible d’une déformation osseuse
L’action se manifeste au niveau de la prolifération des fibroblastes, ou d’hyperkératose
de la stimulation de l’angiogenèse, du dépôt de collagène, de la
Grade 1 Ulcère superficiel sans pénétration dans les tissus profonds
diminution des globules blancs, de l’épithélialisation, favorisant
ainsi la cicatrisation [12]. Grade 2 Extension profonde vers le tendon ou l’os, les articulations
La pression d’oxygène idéale pour bien cicatriser n’est pas Grade 3 Tendinite, ostéomyélite, abcès ou cellulite profonde
déterminée [6] . Cependant, la TcPO 2 ≥ 40 mmHg est la plus Grade 4 Gangrène d’un orteil. Gangrène massive ou de l’avant-pied le plus
généralement utilisée et la cartographie de la TcPO2 reste la souvent associée à une infection plantaire
meilleure méthode d’évaluation de l’hypoxie tissulaire et de ses Grade 5 Gangrène massive du pied associée à des lésions nécrotiques et à une
possibilités de correction par l’oxygénothérapie hyperbare. infection des tissus mous
5
19-0550 Le pied diabétique Angéiologie
partie aux structures spécialisées, mais aussi à l’ensemble des handicap). L’organisation des soins basée sur une approche
professionnels de santé intervenant dans le cadre du suivi [47]. multidisciplinaire au sein de centres spécialisés a fait la preuve de
son efficacité. Le dépistage précoce des lésions et leur prise en charge
en urgence permettent une amélioration du pronostic. Mais ce
résultat implique une sensibilisation des patients et des
Conclusion professionnels de santé à la notion de risque lésionnel, qui impose
des mesures de prévention spécifiques et un programme de suivi à
La gravité du pied diabétique est liée à la fréquence des amputations long terme. La formation du patient et l’examen systématique des
et des conséquences qui en découlent (hospitalisations prolongées, pieds permettent de répondre à cet objectif.
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0650
19-0650
Résumé.– Les accidents ischémiques cérébraux (AIC) représentent une cause importante de morbidité,
de mortalité et de handicap et sont à l’origine d’un coût socioéconomique important. Or cette pathologie
souffre encore d’une considérable méconnaissance et d’une attitude souvent fataliste de la part de
l’ensemble des métiers de santé. Les progrès importants, en particulier thérapeutiques, réalisés dans ce
domaine doivent nous conduire à adopter une stratégie globale efficace et résolument active que nous
résumerons en trois points. Éducation et information à l’échelle du grand public et des métiers de santé,
afin de permettre une reconnaissance rapide des AIC, préalable indispensable aux étapes suivantes :
prise en charge spécialisée urgente afin d’obtenir une fiabilité diagnostique satisfaisante, de réaliser les
examens indispensables avant la mise en route du traitement adapté à leurs résultats, et de permettre la
prise en charge par une équipe multidisciplinaire expérimentée ; traitement et prévention secondaire en
fonction des résultats des nombreux essais thérapeutiques randomisés publiés. Il est probable que les
modalités du traitement curatif des AIC évoluent considérablement dans les années à venir avec
l’avènement de la thrombolyse. De nombreux arguments permettent d’espérer que ces
recommandations aboutiront à une réduction de la morbidité et de la mortalité associées aux AIC, et par
conséquent du coût socioéconomique de cette pathologie.
© Elsevier, Paris.
Introduction Compte tenu de l’étendue du sujet, l’objet de cet exposé sera de tracer
les grandes lignes d’une conduite générale face aux AVC de nature
Les accidents vasculaires cérébraux (AVC) représentent la deuxième ischémique (AIC).
cause de mortalité dans le monde, après les affections cardiaques [19].
En France le nombre de décès par AVC est évalué à 50 000/an [6]. Aux
États-Unis, en 1991, 500 000 personnes ont eu un AVC ; dans 80 % Éducation et reconnaissance des AVC
des cas, il s’agissait d’un accident ischémique cérébral (AIC) [1]. Bien
que la mortalité par AVC soit en diminution dans de nombreux pays,
Les AVC sont définis par l’« installation d’un déficit neurologique
les AVC représentent toujours une cause importante de morbidité, et
d’origine vasculaire présumé » [6]. Lorsque le déficit est en rapport
de handicap secondaire, moteur, cognitif et/ou psychologique. Si en
avec l’occlusion transitoire ou prolongée d’un vaisseau, on parle
termes de pathologie cardiovasculaire au sens large, il est maintenant
d’AIC. Le diagnostic d’AVC reste un diagnostic de présomption
prouvé que les mesures de prévention primaire représentent une étape
jusqu’à la réalisation des examens d’imagerie cérébrale. Toutefois, le
essentielle permettant d’obtenir des bénéfices considérables, la prise en
caractère brutal du mode d’installation doit faire évoquer, en premier
charge des AVC et la prévention secondaire ont été longtemps négligées
lieu et avant toute autre étiologie, le diagnostic d’AVC. L’existence
du fait d’un certain fatalisme [5] . Les progrès diagnostiques et
de certains syndromes bien définis sémiologiquement et de
thérapeutiques récents, l’amélioration de la compréhension des
caractéristiques, dont l’identification nécessite souvent un certain
différents facteurs de risque et des mécanismes pouvant favoriser la
degré d’expérience, fournit des arguments supplémentaires, mais en
survenue d’un AVC, doivent conduire, de nos jours, à la définition et
aucun cas formel.
la mise en place d’une stratégie globale de prise en charge des AVC,
intégrant les résultats les plus récents, en particulier ceux des essais La reconnaissance de l’accident doit être rapide afin de permettre
thérapeutiques randomisés. L’American heart association (AHA) [1] et d’instaurer les mesures urgentes adéquates ; elle implique un effort
le groupe européen de consensus ad hoc [11] ont récemment proposé des d’éducation et de formation qui doit se faire à deux niveaux
recommandations pour les grandes lignes de cette stratégie ; elles complémentaires.
peuvent être résumées en trois points : éducation, prise en charge,
traitement et prévention. Il est probable que le développement de À L’ÉCHELLE DU GRAND PUBLIC
nouvelles thérapeutiques, au premier rang desquelles se trouve la
La prise en charge efficace d’un AIC implique que celui-ci soit
thrombolyse dont les indications sont actuellement en cours
identifié et signalé rapidement, et probablement dans le plus bref
d’évaluation, contribueront à modifier considérablement le panorama
délai possible dans un avenir proche (condition indispensable à la
dans les années à venir [3, 21].
thrombolyse), par le patient, son entourage ou toute autre personne
présente lors de la survenue de l’accident. Des campagnes
Alexis Elbaz : Neurologue, Inserm unité 360, hôpital de la Salpêtrière, 75651 Paris cedex 13, France.
d’information devraient permettre de divulguer des messages
© Elsevier, Paris
Pierre Amarenco : Professeur des Universités, praticien hospitalier, service de neurologie, hôpital
Lariboisière, 2, rue Ambroise-Paré, 75475 Paris cedex 10, France. basiques tels les suivants : « Qu’est-ce qu’un AVC ? Quand le
Toute référence à cet article doit porter la mention : A Elbaz et P Amarenco. Stratégie de prise en charge des accidents ischémiques cérébraux. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0650, 1997, 4 p.
19-0650 Stratégie de prise en charge des accidents ischémiques cérébraux Angéiologie
suspecter ? Qui avertir même en cas de symptômes transitoires ? n’apparaîtra que plus tardivement et pourra être mise en évidence
Pourquoi une prise en charge urgente ? » [11]. Les bénéfices de telles par la réalisation d’un deuxième scanner non injecté de surveillance
campagnes ont été étudiés [2]. dans un délai de 48 à 72 heures. Le scanner permet également
d’éliminer une autre cause de déficit neurologique, en particulier une
À L’ÉCHELLE DES MÉTIERS DE SANTÉ tumeur cérébrale.
Les mêmes messages doivent être divulgués parmi les différents La réalisation d’un scanner cérébral sans injection est impérative
métiers de santé (corps médical et paramédical). Les professionnels avant la mise en route de tout traitement : il s’agit d’un dogme, qui
pouvant être confrontés à la prise en charge de patients présentant aujourd’hui, plus que jamais, à l’époque de l’introduction de
un AVC doivent être capables d’en reconnaître les signes majeurs et nouvelles molécules agressives, ne doit en aucun cas être oublié.
de réaliser rapidement une évaluation de base. Dans un contexte
idéal, cette évaluation et les premiers gestes pourraient être faits ¶ Électrocardiogramme
tandis que le patient est transporté au centre hospitalier, qui pourra Systématique, il permet d’identifier un trouble du rythme cardiaque ;
d’ailleurs être averti de l’arrivée du patient, afin de programmer les il est important de savoir le répéter, ou de le remplacer par une
examens nécessaires et de réunir le personnel spécialisé si possible [1]. surveillance cardioscopique continue, car il peut s’agir d’un trouble
du rythme paroxystique. Il peut également montrer des signes en
faveur d’un d’infarctus du myocarde (IDM) ancien ou en évolution,
Prise en charge d’un patient d’insuffisance cardiaque ou de certaines cardiopathies. La
présentant un accident radiographie thoracique permet également d’obtenir des
renseignements importants.
ischémique cérébral
¶ Échodoppler des vaisseaux du cou
Tout patient présentant un tableau compatible avec le diagnostic et doppler transcrânien
d’AVC doit être adressé en urgence en milieu hospitalier équipé d’un
plateau technique adéquat. Également systématique, il apporte dans de nombreux cas des
renseignements intéressants quant au mécanisme impliqué
UNITÉS CÉRÉBROVASCULAIRES (athérome, mise en évidence d’une occlusion intracrânienne,
dissection) et aux perturbations hémodynamiques résultantes. De
La prise en charge des patients présentant un AVC dans des plus, ses résultats pouvant avoir des conséquences directes sur la
structures spécialisées cérébrovasculaires a été spécifiquement prise en charge thérapeutique, il doit pouvoir être réalisé en urgence :
recommandée par l’AHA et le groupe européen de consensus ad il peut objectiver une sténose serrée ou une occlusion artérielle pour
hoc [1, 11] ; elles représentent un environnement idéal pour de lesquelles une baisse de la tension artérielle induite par un traitement
multiples raisons. Elles permettent la réalisation rapide et efficace pourrait aggraver l’accident, il peut orienter vers le diagnostic de
des examens nécessaires grâce à l’infrastructure existante, dissection et justifier la pratique d’une angiographie pour la
l’instauration des thérapeutiques adaptées dans des délais brefs, la confirmer.
surveillance des patients dans une structure de type soins intensifs,
l’orientation rapide vers des services de neurochirurgie ou des
¶ Échographie cardiaque
services de chirurgie vasculaire lorsqu’elle est nécessaire. De plus,
grâce à la présence de neurologues expérimentés, elles permettent Elle ne doit pas être systématique. L’existence d’un trouble du
d’aboutir à une plus grande fiabilité diagnostique ; la présence de rythme paroxystique, d’une anomalie à l’auscultation cardiaque
personnel paramédical spécialisé (infirmières, kinésithérapeutes, (souffle valvulaire), ou un antécédent d’IDM récent faisant suspecter
orthophonistes, psychologues, assistantes sociales) est un atout un thrombus intracardiaque, ainsi que la suspicion d’endocardite
considérable de ce type de structure. Une étude récente a montré infectieuse ou la survenue d’AIC récidivants, doivent conduire à la
que la mortalité à 4 mois après l’accident était réduite de 28 % chez réalisation de l’échographie cardiaque en urgence. La voie
les patients ayant été hospitalisés en unité cérébrovasculaire par transœsophagienne permet la visualisation de l’oreillette et de
rapport aux patients hospitalisés en service médical non l’auricule gauches, du septum interauriculaire et de l’aorte
spécialisé [17]. De même, elles permettent d’obtenir une réduction du ascendante avec une plus grande sensibilité que la voie
temps d’hospitalisation et de la sévérité du handicap à moyen transthoracique. Dans les cas où l’examen cardiologique et
terme [22], d’où des conséquences importantes en termes de coût [4, 8]. l’électrocardiogramme sont normaux, l’échocardiographie doit être
Lorsque le patient peut être adressé dans ce type de structure, cette discutée au cas par cas, et ne doit être faite systématiquement que
solution doit être envisagée en priorité. Malheureusement, en France dans le cadre de protocoles de recherche, car les conséquences
et en Europe, le nombre de ces unités reste encore trop limité, et leur thérapeutiques des anomalies éventuellement dépistées ne sont
développement doit être favorisé ; une solution alternative est actuellement pas définies.
d’adresser ces patients à des équipes neurologiques spécialisées [11].
¶ Biologie
EXAMENS COMPLÉMENTAIRES
Un bilan biologique de base incluant numération formule sanguine
Un certain nombre d’examens sont indispensables et doivent être (NFS), plaquettes, vitesse de sédimentation (VS), hémostase,
réalisés le plus rapidement possible car la prise en charge ultérieure permettra de dépister une hémopathie ou un état
dépend étroitement de leurs résultats [1, 11]. Leur objectif est de : d’hypercoagulabilité ayant pu favoriser l’accident. Il faudra toujours
penser à chercher une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD)
– reconnaître la nature ischémique et non hémorragique de
en cas de cancer connu.
l’accident ;
– de rechercher des facteurs étiologiques ; ¶ Autres examens
– d’éliminer d’autres cause de déficit neurologique. Ils sont à discuter au cas par cas.
¶ Scanner cérébral : éliminer une hémorragie Imagerie par résonance magnétique (IRM)
avant tout traitement
Elle peut objectiver des accidents de petite taille et explorer le
Le scanner cérébral sans injection est l’examen clé. Il permet territoire vertébrobasilaire ; elles est également intéressante dans le
d’éliminer, avant tout, un accident hémorragique. En cas d’AIC, le diagnostic des dissections artérielles. Il est malheureusement
scanner sera le plus souvent normal dans les premières heures ; exceptionnel que cet examen soit réalisé en première intention. On
l’hypodensité parenchymateuse dans le territoire artériel ischémié, peut prévoir que, dans quelques années, l’examen de première
2
Angéiologie Stratégie de prise en charge des accidents ischémiques cérébraux 19-0650
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19-0650 Stratégie de prise en charge des accidents ischémiques cérébraux Angéiologie
de 25 %. La dose à utiliser (variant de 30 mg, dose non disponible en emboligène responsable d’AIC, en l’absence de contre-indication.
France, à plus de 1 g) est encore l’objet de discussions [15], mais il L’indication est formelle dans le cas de la fibrillation auriculaire
semble qu’une dose intermédiaire (300 mg), mieux tolérée sur le plan secondaire à une valvulopathie [7]. Dans le cas de la fibrillation
gastrique que les doses plus importantes, ait de nombreux auriculaire idiopathique, la prescription d’un traitement par AVK,
partisans [7], sans qu’il n’y ait de véritable consensus. Une étude a longtemps controversée, semble maintenant justifiée en cas
démontré une efficacité supérieure de la ticlopidine par rapport au d’antécédent d’AIC, du fait d’un risque important de récidive, et
placebo [14], avec une réduction d’AVC, d’IDM et de mort vasculaire cela d’autant plus qu’il existe d’autres facteurs de risque de
de 30 % ; le risque de neutropénie, parfois très sévère, conduit de récidive (facteurs de risque vasculaires, insuffisance cardiaque,
nombreux auteurs à ne l’utiliser qu’en deuxième intention après âge) [23]. L’anticoagulation doit rester modérée (Coumadinet ou
l’aspirine, en cas d’échec, d’effets secondaires ou de contre- Previscant, visant un international normalized ratio [INR] entre 2 et
indication [7]. En tout état de cause, une surveillance de la numération 3). En cas de contre-indication, un traitement antiplaquettaire
formule sanguine tous les 10 jours pendant les 3 premiers mois du représente la solution alternative.
traitement par ticlopidine est absolument nécessaire. La persantine a
également été montrée supérieure au placebo dans une étude [10], ¶ Prévention secondaire des lacunes
avec une réduction du risque d’AVC et de décès de 15 %. La place
du clopidogrel [9], reste à définir. Le principal facteur de risque des lacunes est l’HTA ; leur prévention
repose donc sur le traitement antihypertenseur, auquel est
Chirurgie carotidienne (sténose carotidienne symptomatique) généralement associé un traitement antiagrégant plaquettaire [7](les
grands essais thérapeutiques ayant de toute façon toujours inclus
Deux études, ECST et NASCET [12, 20], ont montré le bénéfice de des lacunes).
l’endartériectomie pour les sténoses carotidiennes évaluées
angiographiquement à plus de 70 %, chez des patients satisfaisant à
des critères bien définis (AIC homolatéral à la sténose, non
invalidant, survenu de 4 à 6 mois avant, en l’absence de cardiopathie Conclusion
emboligène ou de sténose intracrânienne, ou de réduction de
l’espérance de vie à moins de 5 ans), avec une réduction relative de Malgré la fréquence des AIC, leur létalité élevée, la sévérité et la
risque d’environ 50 % lorsque la morbidité postchirurgicale est prise fréquence du handicap qui peut en résulter et la charge
en compte. ECST a montré que la chirurgie n’apporte pas de bénéfice socioéconomique qu’ils représentent, les AIC souffrent encore d’une
pour les sténoses inférieures à 30 % [12]. Concernant les sténoses ignorance importante de la part du public et d’une attitude défaitiste,
modérées (30-69 %), les résultats préliminaires d’ECST ne montrent sceptique, voire nihiliste, de la part des métiers de santé. Ces obstacles
pas de bénéfice statistiquement significatif de la chirurgie [13]. Il est à doivent être surmontés par la divulgation de messages d’information
souligner que ces résultats sont valables uniquement pour les simples, en particulier auprès des sujets à risque cardiovasculaire
patients présentant une sténose carotidienne symptomatique, (antécédents personnels, HTA, etc), de leur entourage, mais aussi à
conformes aux critères d’inclusion relativement stricts appliqués l’échelle de l’ensemble de la population ; les modalités de ces mesures
dans ces études et lorsque l’endartériectomie est réalisée par des doivent être discutées dans le cadre d’une véritable stratégie de Santé
équipes ayant une morbidité postchirurgicale inférieure ou égale à publique qu’il est nécessaire de mettre en place dans les pays
celles des deux études (5 à 6 %). industrialisés. L’éducation est le préalable aux étapes suivantes de cette
stratégie globale (modalités de prise en charge, traitement à la phase
¶ Prévention secondaire des AIC d’origine cardiaque aiguë et prévention secondaire) pour lesquelles des recommandations
peuvent être faites à partir des résultats d’études scientifiques. Ces
– Traitement de la cardiopathie emboligène. mesures, associées à la prévention primaire, devraient permettre
– Traitement anticoagulant : le traitement oral (antivitamine K, d’obtenir des bénéfices directs aussi bien à l’échelle individuelle, qu’au
AVK) est indiqué chez les patients porteurs de cardiopathie niveau de la société dans son ensemble.
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0130
19-0130
Résumé.– Le tabagisme, principalement la cigarette, est une des causes majeures de la survenue des
accidents vasculaires. Les mécanismes de cette nocivité sont multiples. Avec l’hypercholestérolémie et
l’hypertension artérielle, il est responsable des lésions d’athérosclérose des gros troncs artériels, dans
toutes leurs localisations. Il exerce également des actions vasoconstrictives, thrombogènes et il peut être
à l’origine de troubles du rythme ventriculaire. L’arrêt du tabac est donc impératif en cas d’accidents
vasculaires de tous les types et de toutes les localisations. Le bénéfice est toujours présent et souvent
rapide, tant en prévention primaire que secondaire. Malgré la présence du risque et la connaissance de
sa gravité, plus de 50 % de ces sujets continuent paradoxalement à fumer ; la raison en est maintenant
connue : le tabagisme est une dépendance qui doit être prise en charge et traitée comme telle.
© Elsevier, Paris.
Introduction
Le rôle du tabac, avant tout de la cigarette, dans la genèse des accidents nicotine
vasculaires d’origine artérielle est très important ; il a été
scientifiquement établi depuis les années 1960. Le tabagisme est un des
trois principaux facteurs de risque vasculaire, en association avec ganglions sympathiques
l’hypertension artérielle (HTA) et les troubles du métabolisme des médullosurrénale
lipides ; au deuxième rang viennent la surcharge pondérale, la
terminaisons sympathiques
sédentarité, les différentes formes de diabète. Lorsque plusieurs de ces
éléments sont présents, ils multiplient leurs effets nocifs.
Centre de tabacologie, policlinique, hôpital Henri-Mondor, 51, avenue du maréchal de Lattre de Tassigny,
94010 Créteil cedex, France. comme primordial.
Toute référence à cet article doit porter la mention : G Lagrue et A Maurel. Tabagisme et maladies vasculaires. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0130, 1997, 6 p.
19-0130 Tabagisme et maladies vasculaires Angéiologie
HTA catécholamines
cholestérol
hypoxie tabac
tabac microangiopathie
facteurs génétiques
lésions endothéliales hypersensibilité des plaquettes
insulinorésistance/
adhésivité
hyperinsulinisme
adhésion plaquettes agrégabilité
troubles lipidiques
tabac trouble de la perméabilité
LDH
(goudrons, carcinogènes) capillaire
HDL
facteurs génétiques
prolifération
des cellules des muscles accumulation de lipides
lisses accumulation de macromolécules élastase tabac
de conjonctif (collagène)
destruction des fibres élastiques
troubles hémorhéologiques
fibrose de la paroi
plaque athérosclérose déformabilité GR Ht leucocytes fibrinogène
tabac
adhésion plaquettes
emboles plaquettaires hyperviscosité
nicotine
Par des mécanismes encore mal connus et divers, il se produit chez vitamine E, qui sont significativement réduits chez les fumeurs [5].
les fumeurs des perturbations plasmatiques et globulaires, facteurs Ainsi, les mécanismes par lesquels le tabac est responsable d’une
d’athérosclérose et d’accidents thrombotiques [6]. Ce sont : atteinte vasculaire sont-ils multiples ; il agit sur les différents
processus responsables de l’athérogenèse, des accidents
– des modifications plaquettaires avec hyperagrégabilité,
thrombotiques et des troubles du rythme cardiaque (fig 2).
hyperadhésivité et augmentation du facteur IV plaquettaire ; il faut
en rapprocher l’augmentation du taux de thromboxane urinaire ; Ces diverses anomalies sont en corrélation avec l’intensité du
tabagisme. Elles disparaissent rapidement après l’arrêt de
– une élévation du taux de fibrinogène plasmatique, un des
l’intoxication.
principaux marqueurs du risque athérogène ;
– un trouble de l’équilibre lipidique, avec baisse du cholestérol
HDL (high density lipoprotein) et élévation des LDL oxydés ;
– une polynucléose et une polyglobulie, une diminution de la
Complications vasculaires
déformabilité érythrocytaire, qui sont tous des facteurs du tabagisme
d’hyperviscosité sanguine et d’accidents ischémiques.
Les fumeurs à forte consommation ont une altération du goût et L’athérosclérose tabagique atteint surtout les artères de gros et
de l’odorat ; il en résulte une modification du type de leur moyen calibres.
alimentation : en général, ils consomment plus de viandes cuisinées
grasses et en sauce, mangent plus salé et plus sucré et boivent plus ARTÉRIOPATHIE DES MEMBRES INFÉRIEURS
d’alcool que les non-fumeurs ; leurs apports en fruits et légumes et
donc en vitamines E et C sont moindres ; dans l’ensemble, se Le rôle du tabagisme est majeur dans l’artériopathie des membres
retrouvent toutes les caractéristiques d’une alimentation inférieurs : 90 % des sujets atteints sont de gros fumeurs ; le risque
athérogène ; ceci est confirmé par les taux plasmatiques des croît proportionnellement avec l’ancienneté et l’importance du
substances oxydantes, de la vitamine C, du bêtacarotène, de la tabagisme. Une consommation de 20 cigarettes par jour multiplie
2
Angéiologie Tabagisme et maladies vasculaires 19-0130
3
19-0130 Tabagisme et maladies vasculaires Angéiologie
Tableau I. – Effets du tabac chez l’homme (cigarettes avec inhalation) (d’après Benowitz [2]).
Modifications durant la consommation Suppression par blocage adrénergique Reproduction par injection de nicotine
de cigarettes (avec inhalation)
tachycardie oui (α + β) oui
débit cardiaque ↑ ? oui
Actions hémodynamiques
contractilité ventriculaire ↑ ? oui
vasoconstriction cutanée oui (α) oui
10 Poursuite du
tabagisme 54 % 53 % 31 %
0 arrêt 10 % 11 % 8%
PAD
Effets positifs de l’arrêt du tabac
20
L’arrêt du tabac est toujours bénéfique, tant en prévention primaire
10
que secondaire, même s’il y a déjà eu un accident [14]. Le bénéfice
0
est évident chez les sujets atteints d’artériopathie des membres
inférieurs : tous les traitements restent inefficaces tant que le
tabagisme n’a pas pu être interrompu. Il en est de même
-10 0 30 60 90 120 -10 0 30 60 90 120
lorsqu’une intervention, soit un pontage, soit une angioplastie, a
Temps en minutes été nécessaire. Les chiffres de l’étude de Powell [12] illustrent de
4 Variations aiguës du pouls, de la pression artérielle systolique (PAS) et de la façon très éclatante l’importance de l’arrêt de la cigarettte pour le
pression artérielle diastolique (PAD) après que le sujet ait fumé une cigarette (d’après pronostic ultérieur ; ceci concerne l’artériopathie des membres
Benowitz [2]). inférieurs, mais aussi la survenue d’accidents coronariens et la
mortalité, qui, sur 10 ans, est multipliée par cinq si le sujet a
d’accidents cardiaques que ces derniers et leur mortalité par continué à fumer (fig 5).
d’autres affections est deux fois plus importante : l’absence de Pour les accidents coronariens, les faits sont aussi évidents. Dans
tabagisme aurait représenté un gain supérieur à celui apporté par l’étude en cours Euraspire, chez des sujets hospitalisés pour un
le traitement de l’HTA. Le tabac est un inducteur enzymatique évènement coronarien, il y a 42 % de fumeurs et 36 % d’ex-
puissant, il peut ainsi diminuer les taux sériques de certains fumeurs. Les conseils d’arrêt du tabac ayant été donnés, 6 mois
bêtabloquants. Cependant, il n’en est pas de même avec un plus tard 25 % de ces sujets sont encore fumeurs, l’arrêt ayant été
bêtabloquant cardiosélectif, le métoprolol ; dans ce cas, les validé par mesure du CO dans l’air expiré ; 60 % de ces patients,
hypertendus fumeurs ont une moindre morbidité cardiovasculaire malgré le risque expliqué et connu, ont donc poursuivi ou repris
que ceux traités par diurétiques. Mais chez les non-fumeurs, la leur tabagisme.
morbidité est dans l’ensemble trois fois moins élevée. Enfin, le fait L’étude Procam [1] a évalué la part du tabagisme dans le risque
de fumer constitue un élément négatif vis-à-vis de l’observance du cardiovasculaire absolu (RCVA), qui prend en compte l’ensemble
traitement de l’HTA et des règles hygiénodiététiques : c’est là une des facteurs de risque présents. Sur 8 ans d’évolution, chez
des caractéristiques habituelles du comportement tabagique. l’homme de 40 à 60 ans, le risque d’infarctus du myocarde passe
Ces effets nocifs peuvent même être observés en cas de tabagisme de 3,9 % à 9,1 % en cas de tabagisme, soit un risque relatif (RR)
passif, si l’exposition à la fumée des autres est importante et multiplié par 2,4. L’excédent de mortalité des fumeurs est dû dans
prolongée. 60 % des cas à un accident cardiovasculaire.
4
Angéiologie Tabagisme et maladies vasculaires 19-0130
grammes ou cigarettes/adulte/jour
coronarienne et de revascularisation percutanée. Le suivi moyen a
tabac total
été de 4 ans et demi (au maximum 16 ans) sur 5 450 sujets. Lors de 6
l’intervention, 22 % des sujets étaient fumeurs et la découverte cigarettes
clinique de leur affection coronarienne est survenue en moyenne
4
10 ans plus tôt que chez les non-fumeurs : 63 % d’entre eux ont
continué à fumer ou rechuté après l’intervention ! La poursuite du
tabagisme augmente le risque de survenue d’un infarctus (RR x 2
2,1) et la mortalité générale (RR x 1,76). Les auteurs ont calculé le
bénéfice de l’arrêt du tabac en termes d’augmentation de survie :
elle est de 3 % à 5 ans et de 6 % à 10 ans. Après pontage coronarien, 0
les faits observés par Voors [15] sur 415 patients suivis pendant 1875 1900 1925 1950 1975 2000 2025 2050
15 ans sont très comparables. Pour l’infarctus du myocarde, chez
les sujets ayant continué à fumer, le RR est de 2,5 alors que pour
6 Évolution de la vente de cigarettes sur 100 ans (sources SEITA - Hill C, Epidé-
miologie du tabagisme en France. Press Med 1996 ; 25 : 959-962).
ceux qui ont cessé, le RR est peu différent des non-fumeurs. Pour
la récidive de la sténose chez les fumeurs, le RR est de 2,5 à 1 an et
de 5 à 5 ans ! Le tabagisme, lorsqu’il est important, doit donc être considéré
comme une maladie chronique, une véritable toxicomanie ; comme
pour toute toxicomanie, il a une évolution naturelle qui en règle
générale porte sur plusieurs décennies. Aucun arrêt n’est possible
Attitude pratique si le fumeur n’a pas une motivation personnelle forte et profonde.
« Jamais la connaissance d’un risque n’a suffi à elle seule à modifier
Les faits sont clairs et la conclusion paraît simple. L’arrêt du tabac un comportement ».
est impératif chez tout fumeur ayant une complication vasculaire Pour les affections vasculaires, les échecs sont nombreux (cf
ou cardiovasculaire, quelle que soit sa localisation. Le risque ayant supra) : plus de 50 % des patients, malgré leur atteinte vasculaire,
été longuement expliqué et commenté et les incitations avant l’arrêt continuent à fumer. En ce domaine, les incitations brutales, voire
ayant été faites avec toute la fermeté nécessaire, le résultat actuel les menaces, sont toujours inefficaces, inadaptées, voire
est incompréhensible ; toutes les études concordent : plus de la dangereuses, pouvant avoir l’effet inverse du but recherché [8].
moitié de ces sujets continuent à fumer. La raison de cette situation
apparemment paradoxale est maintenant connue depuis une Les difficultés rencontrées ont trois causes principales.
dizaine d’années. En 1988, le volume annuel du Surgeon general – La motivation de ces sujets, qui n’ont pas réussi à arrêter malgré
« nicotine addiction » a bien établi les faits suivants, confirmés par les risques évidents, est curieusement faible, comme le révèle la
tous les travaux de ces dernières années : pratique des autoquestionnaires usuels. Elle est inférieure à celle
– le tabac, et tout particulièrement la cigarette, induit une des fumeurs sains, venant spontanément dans les consultations
dépendance ; spécialisées : les moyens de renforcer cette motivation sont encore
très mal connus.
– la nicotine est la principale substance responsable de cette
dépendance ; – Un état dépressif ou des troubles de la série anxieuse, telles
paniques, phobies, anxiété généralisée sont souvent associés à la
– cette dépendance est liée à des mécanismes comportementaux et maladie vasculaire, parfois préexistants et secondairement
pharmacologiques, qui sont identiques à ceux de toutes les drogues aggravés. Les liens entre dépendance tabagique et états dépressifs
illicites dites « dures » (héroïne, cocaïne, amphétamines...). sont bien établis. Chez les sujets avec antécédents de dépression
Ainsi, le tabagisme est un comportement renforcé par une ou état dépressif actuel, le tabagisme est plus fréquent et la
dépendance dont la nicotine est responsable. dépendance tabagique plus importante : les chances de succès sont
La cigarette industrielle, en favorisant l’inhalation de la fumée, réduites de plus de 50 %. Au décours du sevrage, une aggravation
permet l’absorption très rapide de la nicotine et sa fixation en de la dépression est souvent observée, ce qui est alors un facteur
moins de 10 secondes sur des récepteurs nicotiniques cérébraux, de récidive. Dans cette situation, l’association d’un traitement
avec survenue de toutes les sensations psychologiques antidépresseur est indispensable [7].
responsables du renforcement positif du comportement, c’est-à- – Chez ces fumeurs à forte consommation, la dépendance
dire de la dépendance psychologique. La dépendance physique est physique est toujours importante : elle nécessite le recours au
plus tardive et ne survient que chez les fumeurs à forte traitement de substitution nicotinique, seul moyen réel de réduire
consommation ; elle est caractérisée par une sensation pénible de l’intensité du syndrome de manque ; celui-ci constitue toujours la
manque, de besoin irrrésistible de reprendre une cigarette, chaque principale crainte à l’arrêt et est la cause des échecs à court terme.
fois que le sujet est privé fût-ce, que quelques heures de son apport Il est encore trop souvent dit que la nicotine est contre-indiquée
de nicotine ; elle doit être évaluée cliniquement par le questionnaire chez les sujets à risque vasculaire, mais lorsqu’ils fument, ils
de Fagerström, le nombre de cigarettes étant un indice infidèle [3]. continuent non seulement à absorber la nicotine de leurs cigarettes,
À mesure que la dépendance physique augmente, le plaisir n’est mais encore tous les toxiques associés. Chez ces sujets à haut
plus retrouvé que pour de rares bouffées. Ainsi la cigarette, par ses risque, un arrêt sans recours au traitement de substitution
effets psychoactifs puissants et rapides, est-elle devenue en moins nicotinique serait évidemment préférable ; mais s’ils ont échoué ou
d’un siècle le mode quasi exclusif de consommation du tabac, soit rechuté, un apport de nicotine est indispensable. En raison de ses
plus de 95 % des fumeurs (fig 6). Hélas, c’est également le type le effets cardiovasculaires, son utilisation doit se faire avec beaucoup
plus dangereux de consommation, car les toxiques de la fumée de de précautions : les doses doivent rester inférieures à celles fournies
tabac sont très rapidement absorbés et diffusent dans tout par la cigarette ; il est donc indispensable de doser la cotinine
l’organisme [6]. sérique ou urinaire, marqueur spécifique de la quantité de nicotine
5
19-0130 Tabagisme et maladies vasculaires Angéiologie
absorbée durant les 2 ou 3 jours précédents. Il est ainsi possible de Mais l’arrêt n’est qu’une première étape : il faut prévenir les
suivre l’évolution du sevrage par traitement nicotinique avec des rechutes qui, en l’absence d’un soutien et d’un accompagnement
dosages successifs de cotinine et d’ajuster les doses de nicotine prolongé, sont fréquentes. En ce domaine, les stratégies
nécessaire pour atténuer le syndrome de manque et rendre le comportementales et cognitives devraient avoir une place
sevrage aigu plus confortable [10]. L’arrêt de la cigarette doit importante : la gestion du stress, l’affirmation de soi, les stratégies
impérativement être total ; toute cigarette fumée comporterait un de résistance, la prévention des états dépressifs peuvent être
risque de surdosage en nicotine et diminuerait les chances de réalisées grâce à ces psychothérapies dont l’efficacité a été
succès. Le bénéfice est alors évident : d’une part la quantité de maintenant parfaitement démontrée. Tous les médecins doivent
nicotine fournie par le traitement est inférieure à celle des donc maintenant apprendre à évaluer et à prendre en charge le
cigarettes, d’autre part il n’y a plus d’absorption de goudrons, ni tabagisme de ces malades, comme ils ont appris à le faire
de CO, facteur d’hypoxie et donc responsable d’accident antérieurement pour l’HTA et l’hypercholestérolémie, en liaison
ischémique. Avec ces précautions, la nicotine peut être utilisée chez avec les spécialistes de ces troubles. De la même façon, pour les
ces patients, en leur permettant de se libérer de leur intoxication cas difficiles, ils doivent recourir à ces nouveaux spécialistes que
tabagique et ainsi d’améliorer le pronostic de leur maladie [9]. sont les tabacologues.
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6
Encyclopédie Médico-Chirurgicale 19-0540
19-0540
Ulcères de jambe
P Agache
Résumé.– Cet article traite de l’aspect clinique et des signes d’accompagnement, de la physiopathologie
et du traitement des ulcères de jambe, définis comme des ulcérations chroniques sans tendance à la
guérison et distinctes des gangrènes et des maux perforants plantaires. La plupart des ulcères de jambe
sont liés à une incontinence veineuse dont le syndrome postphlébitique n’est pas l’unique cause.
D’autres sont le résultat d’une thrombose extensive des microvaisseaux cutanés en relation avec une
artériosclérose généralisée ou une hypertension artérielle. Plus rares sont les ulcères liés à une artérite
oblitérante au stade d’ischémie critique ; ceux que l’on appelle souvent « ulcères mixtes » étant des
ulcères veineux sur membre artéritique. Les ulcères ci-dessus mentionnés sont les seuls étudiés. Une liste
détaillée des autres étiologies est fournie, comprenant notamment les causes infectieuses, les
vascularites et les maladies de système, avec quelques suggestions indicatrices pour le diagnostic
clinique.
© Elsevier, Paris.
Toute référence à cet article doit porter la mention : P Agache. Ulcères de jambe. Encycl Méd Chir (Elsevier, Paris), Angéiologie, 19-0540, 1997, 6 p.
19-0540 Ulcères de jambe Angéiologie
2
Angéiologie Ulcères de jambe 19-0540
4 Greffe en pastille sur un ulcère recouvert de bourgeons charnus (photo Van 5 Ulcère d’origine veineuse, postphlébitique, au sein d’une lipodermatosclérose de
Landuyt). morphologie et de topographie caractérisiques. L’ulcère prétibial est probablement se-
condaire à la dermoépidermitz microbienne (photo P Amblard)
3
19-0540 Ulcères de jambe Angéiologie
TRAITEMENT DE LA LIPODERMATOSCLÉROSE
4
Angéiologie Ulcères de jambe 19-0540
8 Angiodermite nécrotique.
Après compression de la SI
Temps de remplissage : 9 s Temps de remplissage 30s
Après compression de la SI
Temps de remplissage : 7 s Temps de remplissage 7 s
¶ Choix des traitements et stratégie des examens L’ulcère est le résultat d’une thrombose récente et extensive de la
paracliniques microcirculation cutanée (capillaires distendus gorgés de sang
coagulé et noyés dans une nappe nécroticohémorragique) survenue
Le traitement commence toujours par une contention avec au sein de vaisseaux altérés par un athérome diffus : sclérose sous-
rééducation de la marche. À lui seul, il permet la cicatrisation de endothéliale et de la média refoulant l’intima et rétrécissant la
l’ulcère et la régression significative de la LDS en quelques lumière. Des thromboses anciennes localisées sont observées ça et
semaines ou mois. Si l’on veut éviter le port d’une contention à là. Il est possible qu’une angiodermite nécrotique complique un
vie, il importe de corriger les troubles hémodynamiques. En cas de ulcère de jambe d’origine veineuse. Cela se manifeste par
thrombose des troncs profonds objectivée par le doppler, on ne l’apparition d’une nécrose (noirâtre) sur les bords ou le fond de
peut rien faire. Lorsque les troncs profonds sont perméables mais l’ulcère, et d’une douleur spontanée.
dévalvulés, une reconstruction valvulaire peut être envisagée. La
Le traitement comporte le repos au lit. Les pansements quotidiens
localisation des perforantes incontinentes par l’échodoppler est
tentent prudemment d’enlever la nécrose au bistouri après
souhaitable si l’on veut tenter de les supprimer par la chirurgie ou
application d’un anesthésique local. Puis l’ulcération est
la sclérose. Enfin, le stripping crural de la saphène interne n’est
soigneusement recouverte afin de garder son humidité.
indiqué que si sa participation au remplissage trop rapide de la
L’autohémothérapie locale serait curative en plus de son effet
peau a été démontré par la photopléthysmographie.
antalgique [29]. On a également préconisé l’exérèse en bloc des
Comme traitement médicamenteux adjuvant, on cite actuellement lésions suivie de greffe [19]. Le traitement général comporte des
les thérapeutiques antiradicalaires locales ou générales [26], les antalgiques et des médications tentant de limiter l’extension du
phlébotoniques, l’aspirine. Le stanozolol (fibrinolytique) semble processus : aspirine, médications anti-sludge, hémodilution surtout.
inutile [14]. Les vasodilatateurs peuvent aggraver la lésion par détournement
du sang vers des vaisseaux plus perméables. L’oxygènothérapie
hyperbare serait bénéfique.
Ulcères d’origine artériolaire
ou artérielle ULCÈRE DE MARTORELL [18]
(ULCÈRE DES HYPERTENDUS)
Les gangrènes ont un aspect bien particulier et sont exclues de cet
article. Cependant, il est des ulcères liés à l’insuffisance d’apport Survenant chez des sujets d’âge moyen ou mûr et hypertendus,
sanguin. La circulation cutanée n’étant pas terminale mais ces ulcères siègent électivement sur les régions prétibiales et
anastomotique, la carence d’apport est liée à une thrombose antéro-internes du tiers inférieur de jambe. Ils sont volontiers
extensive, une thrombose localisée étant immédiatement suppléée bilatéraux. Leur aspect est variable, nécrotique ou atone (fig 9). Ils
et l’infarctus cutané étant impossible. sont très douloureux. L’hypertension est ancienne et en général
compliquée de lésions rétiniennes. L’histologie montrerait des
ANGIODERMITE NÉCROTIQUE
(ULCÈRE ARTÉRIOLOSCLÉREUX) [9]
5
19-0540 Ulcères de jambe Angéiologie
lésions artériolaires : paroi épaissie par une prolifération intermittente, un index de pression systolique distale inférieur à 1.
endothéliale, hyalinose sous-intimale et épaississement de la Pour engendrer ou aggraver des lésions, il doit être inférieur à 0,4 ;
média. Des thromboses organisées seraient parfois observées. il est alors classiquement associé à des douleurs de décubitus et à
Aucune autre étiologie ne doit être retrouvée pour pouvoir porter une érythrose de déclivité. Le traitement de l’artérite doit bien
ce diagnostic ; en particulier il ne doit pas y avoir d’athérome entendu être alors mis en œuvre.
généralisé. Un critère diagnostique important est la suppression
de la douleur et la cicatrisation par correction de l’hypertension.
Conclusion
Ulcères artéritiques
Deux types d’ulcères sont concernés sous cette dénomination : des Les ulcères de jambe posent encore aujourd’hui des problèmes de
ulcères d’origine veineuse ou autre, aggravés ou rendus incurables diagnostic et de thérapeutique. Si l’origine veineuse reste
par le processus artéritique, et des ulcères de jambe apparus sans prédominante dans nos régions, il est important de ne pas
autre facteur étiologique que l’artérite. méconnaître une autre étiologie ; une photopléthysmographie normale
doit conforter ce doute [22]. Cet examen paraît le plus apte à dénouer
La participation artérielle peut être invoquée lorsque l’ulcère l’écheveau des divers reflux, car il s’adresse directement au tissu
stagne alors que le facteur causal est supprimé. Cette éventualité malade. Il permet en outre de décider de l’utilité ou non d’un
est fréquente chez des personnes âgées présentant un ulcère stripping saphénien. Les examens par sonde doppler et échodoppler
d’origine veineuse. On parle alors d’ulcères mixtes. L’aspect ne trouvent leur utilité que pour des décisions thérapeutiques
clinique est celui de l’affection initiale, le terrain artéritique chirurgicales plus complexes. Les examens fonctionnels de la pompe
contribuant seulement à la chronicité et à l’incurabilité. Bien du mollet ont surtout un intérêt pronostique. La thérapeutique de
entendu le pronostic dépend des deux facteurs étiologiques. première intention reste la contention associée à la rééducation de la
Les ulcères artériels ont une localisation sélective sur la région marche. Dans tout ulcère, la recherche d’une artérite associée est de
achilléenne et la crête tibiale, probablement par facteur déclenclant rigueur. Dans tous les cas également, la qualité du traitement local
traumatique. Ils sont volontiers creusants, sphacéliques, à bords à est essentielle. Elle dépend en grande partie de l’infirmier qui doit
pic et très douloureux. L’existence d’une nécrose serait indicatrice être éduqué par le médecin après que ce dernier se soit familiarisé
d’une artériolite athéromateuse associée. avec les problèmes courants des soins locaux d’ulcères. Enfin, il est
Le diagnostic d’artérite est confirmé par la palpation des pouls, une exigence médicale à ne pas oublier : le rappel de vaccination
l’auscultation vasculaire, l’existence d’une claudication antitétanique.
Références
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6
¶ 43-004
Les techniques de base en chirurgie vasculaire concernent les chirurgiens vasculaires en formation, mais
aussi tous les chirurgiens qui, dans leur spécialité, doivent disséquer à proximité des vaisseaux (curage
ganglionnaire) ou anastomoser des vaisseaux (greffe d’organe, lambeaux). Le chirurgien peut aussi être
confronté à une plaie vasculaire lors de la dissection, ou à une compression vasculaire. Le but de cet article
est de présenter les techniques de base dont la connaissance est nécessaire pour opérer les vaisseaux.
Nous décrirons en particulier l’instrumentation spécifique, les techniques de dissection, de ligatures et
d’anastomoses des vaisseaux. Cependant, la chirurgie ne se résume pas à l’intervention. Être bon
techniquement ne suffit pas. Il est essentiel d’avoir défini auparavant la stratégie opératoire grâce à une
bonne connaissance de la pathologie et en s’appuyant sur des examens d’imagerie. Cela permet
d’anticiper les temps difficiles et de choisir parmi plusieurs tactiques possibles en fonction de l’état général
du malade. La connaissance de l’anatomie chirurgicale guide l’exposition. Enfin, les gestes techniques ne
s’apprennent plus uniquement au bloc opératoire, mais en s’entraînant sur des modèles.
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Mots clés : Chirurgie vasculaire ; Techniques de base ; Artère ; Prothèse ; Anastomose ; Fil polypropylène
Plan ¶ Intervention 18
Préparation du chirurgien 18
¶ Introduction 1 « Self-control » 18
Installation 18
¶ Matériel 1 Incision 18
Pinces à disséquer 2 Dissection 18
Ciseaux 2 Principes du pontage 19
Porte-aiguilles 2 Contrôle 19
Clamps 2 Fermeture et drainage 19
Spatule de Robb et anneaux de Vollmar 5
¶ Entraînement 19
Écarteurs 5
¶ Conclusion 19
Fils et aiguilles 6
Teflon feutre et pledgets 6
Colles 7
Lunettes grossissantes et éclairage 7 ■ Introduction
¶ Techniques de base 7
Il y a sans doute autant de techniques de dissections, d’anas-
Passer un fil 7
tomoses, qu’il y a de chirurgiens. Il existe une multitude de
Couper le fil 7
clamps et d’écarteurs et chaque chirurgien a ses secrets pour
Position de l’aiguille sur le porte-aiguille 8 s’exposer au mieux.
Faire un nœud 8 Le but de cet article est de décrire des techniques reproducti-
Ligature-section des vaisseaux 8 bles. Il est certain que le lecteur peut utiliser dans son service
Prélèvement de la veine grande saphène 9 des techniques très différentes, mais tout aussi efficaces. Nous
Artériotomie 11 donnons ici des notions générales et il faut se reporter aux
Anastomoses 12 chapitres spécifiques de l’EMC pour trouver une technique
Thromboendartériectomie 16 opératoire en particulier.
Réintervention au triangle de Scarpa 17
Embolectomie à la sonde de Fogarty 17
■ Matériel
Certains chirurgiens réalisent l’ensemble des interventions
avec une pince de De Bakey et une paire de ciseaux de Mayo. Il
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43-004 ¶ Techniques de base en chirurgie vasculaire
A A
B
B
C
Figure 1. Mors des différentes pinces à disséquer utilisées de façon
courante.
A. Pince de De Bakey.
B. Pince de Resano.
C. Pince de Cushing. C
Figure 2. Ciseaux.
A. Metzenbaum.
B. Potts.
est cependant utile d’avoir des instruments adaptés à la chirur- C. Potts coudés sur le plat.
gie réalisée. Il est donc important de feuilleter les catalogues des
différentes firmes d’instruments pour se familiariser avec ceux-ci
et appréhender leur immense diversité. Ciseaux de Metzenbaum (Fig. 2A)
La pince à disséquer et les ciseaux doivent avoir la même Les ciseaux de Metzenbaum ont une pointe arrondie et
longueur. La longueur d’instruments est adaptée à la profondeur atraumatique. Ils sont fins et permettent une dissection précise.
du champ opératoire. Le chirurgien demande à l’instrumentiste Ils ne sont pas très puissants et donc mal adaptés en cas de
un instrument pour sa main droite. L’instrumentiste doit sclérose importante.
« armer la main gauche » avec un instrument adapté. Les
ciseaux de Metzenbaum appellent une pince type De Bakey ou Merveilleux
Resano, un porte-aiguille appelle une pince type Cushing Il s’agit d’un ciseau équivalent aux ciseaux de Metzenbaum
destinée à reprendre les aiguilles. mais plus fin et un peu plus pointu. Il est particulièrement
adapté à la dissection des vaisseaux de petit diamètre comme les
Pinces à disséquer (Fig. 1) artères de jambe.
Ciseaux de microchirurgie
Pince de De Bakey (Fig. 1A)
Les ciseaux de microchirurgie sont assez peu utilisés en
C’est la pince de base et la plus utilisée. Elle permet d’attraper vasculaire, car l’absence d’anneau les rend peu adaptés à la
les tissus de manière efficace avec peu de glissement grâce à ses dissection. Ils peuvent se substituer aux ciseaux de Potts sur les
mors en rangées intercalées. Cependant, cette pince est trauma- petites artères. Ils permettent aussi de dénuder la paroi d’un
tisante (elle laisse son empreinte sur les vaisseaux) et assez greffon saphène avant l’anastomose.
pointue (d’où un risque de perforer un vaisseau fragile). Utilisée
lors de la suture, elle permet de bien présenter l’artère, car elle Ciseaux de Potts (Fig. 2B)
ne glisse pas. En revanche, l’aiguille a tendance à tourner entre Il ne s’agit pas de ciseaux de dissection. Ils permettent de
les mors. compléter l’artériotomie qui a été initiée au bistouri lame 11. Ils
sont coudés et leur extrémité est pointue. Ils existent en
Pince de Resano (Fig. 1B) différentes tailles et angulations, en particulier contre-coudés et
coudés sur le plat (Fig. 2C) pour s’adapter aux différentes
La pince de Resano peut sembler « rustique » avec sa large
angulations.
extrémité. Elle repose sur le principe du matelas à clous. La
pression est répartie sur de multiples points. Elle permet de
prendre le vaisseau en « masse », c’est-à-dire dans son ensemble,
Porte-aiguilles
sans glissement mais sans traumatisme, comme en témoigne Les porte-aiguilles existent en différentes longueurs avec des
l’absence d’empreinte sur le vaisseau. Elle peut être utilisée lors mors plus ou moins larges et épais. Des plaquettes en carbure
de la suture pour des fils de diamètre supérieur ou égal au 4/0 de tungstène peuvent être fixées sur les mors et contribuent à
(fermeture des aponévroses et des tissus sous-cutanés). un meilleur maintien de l’aiguille. Le porte-aiguille type Mayo-
Hegar est large et solide et convient pour des aiguilles de 1/0 à
Pince de Cushing ou Adson (Fig. 1C) 4/0. Le porte-aiguille type Crile-Wood, plus fin, est utilisé pour
des aiguilles de 4/0 à 6/0. Le porte-aiguille Ryder, à extrémité
Souvent appelée « bout doré », car ornementée d’un placage très fine est adapté pour des aiguilles allant du 4/0 à 6/0 et
doré, ses mors sont presque plats et ressemblent à ceux du jusqu’au 8/0 pour le micro-Ryder. Il est important de s’entraîner
porte-aiguille. C’est la pince pour coudre. Elle permet de saisir à décliqueter le porte-aiguille en restant immobile pour ne pas
l’aiguille avec précision, sans rotation. Elle permet de pincer agrandir les trous d’aiguille. Le pouce et le quatrième doigt sont
doucement la paroi artérielle sans la traumatiser. Elle ne permet passés dans les anneaux et l’index est positionné sur le corps.
pas une prise ferme car les tissus glissent entre les mors. Elle est Pour débloquer la crémaillère, le pouce peut éventuellement
idéale pour les fils de 4/0 à 7/0. sortir de l’anneau pour pousser légèrement sur la branche. Le
quatrième doigt reste toujours dans l’autre anneau. Le porte-
aiguille de microchirurgie à branches rondes permet des
Ciseaux (Fig. 2) mouvements de rotation entre les doigts. Celui de Castroviejo
à crémaillère est très utilisé pour les aiguilles de 7/0 et 8/0.
Ciseaux de Mayo
Les ciseaux de Mayo sont arrondis à leurs extrémités, et donc Clamps
atraumatiques. Il s’agit de ciseaux puissants qui permettent Il existe une grande variété de formes et de tailles et il existe
difficilement la dissection de vaisseaux de petit diamètre. pratiquement un clamp pour chaque situation. Cela pourrait
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Techniques de base en chirurgie vasculaire ¶ 43-004
A B C D
Figure 4. Clamps usuels.
A. Satinsky.
B. À angle.
C. Aortique semi-courbe ou « cuillère ».
D. Bulldog.
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43-004 ¶ Techniques de base en chirurgie vasculaire
A B
Figure 5. Clampage artériel par lacs Silastic® ou vessel loop (A, B). Le lacs
est passé autour d’une collatérale pour éviter qu’elle ne reflue et pour qu’il
garde sa position.
Figure 7. Clampage artériel par une bande d’Esmarch (A, B). Cette
technique permet de ne disséquer que la face antérieure de l’artère et de
limiter la blessure des veines adjacentes.
Compression
En cas de plaie artérielle ou veineuse, alors que le contrôle
artériel d’amont et d’aval n’est pas acquis, ou lors de la cure
d’un anévrisme rompu ou d’une plaie artérielle traumatique, le
contrôle de l’hémorragie peut être réalisé en comprimant le
vaisseau au doigt ou à l’aide d’une compresse, montée sur une
pince longuette ou d’une « noisette » sur une pince de Kelly. La
dissection du vaisseau peut être poursuivie permettant de le
clamper.
Clampage endoluminal
Lors de la cure, par exemple, d’un faux anévrisme sur
l’implantation fémorale d’une prothèse, il est possible de
clamper la prothèse, puis d’ouvrir l’anévrisme et d’aveugler le Figure 8. Clampage endoluminal des artères fémorales superficielle et
reflux de l’artère fémorale superficielle et de l’artère fémorale profonde par des sondes de Fogarty munies d’un robinet à trois voies lors
profonde, à l’aide de sondes de Fogarty munies de robinets à de la cure d’un faux anévrisme fémoral.
trois voies (Fig. 8). En effet, le contrôle de l’artère fémorale
superficielle et de l’artère fémorale profonde peut être difficile
si ces vaisseaux sont masqués par le faux anévrisme. Lors de la chirurgie du trépied fémoral, le clampage iliaque
Lors de la cure d’un anévrisme aortique, le reflux par les d’amont peut être obtenu par voie endovasculaire lorsque
artères iliaques peut être supprimé par la mise en place de l’artère est très calcifiée. Il existe cependant un risque de rupture
sondes de Foley (éventuellement pédiatriques) (Fig. 9). Cela du ballonnet de la sonde de Fogarty sur des plaques calcifiées.
évite le contrôle des axes iliaques et leur clampage qui peut être Il peut être plus prudent de monter tout d’abord un guide, puis
source de complications lorsque ces vaisseaux sont très calcifiés, un introducteur à valve et enfin un ballon d’angioplastie pour
et permet de plus l’injection de sérum hépariné vers l’aval. obtenir l’occlusion.
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Techniques de base en chirurgie vasculaire ¶ 43-004
A B
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43-004 ¶ Techniques de base en chirurgie vasculaire
Valves et écarteurs
Pour écarter les tissus, on utilise le plus souvent l’écarteur de
Farabeuf qui existe en différentes longueurs et largeurs.
L’écarteur de Langenbeck (Fig. 11A) est plus ergonomique et A B
accroche mieux les tissus. Figure 12. Réalisation d’une suture sur artère très calcifiée. L’artère est
Les valves de Leriche ou de Deaver existent en différentes préperforée avec une aiguille triangulaire (A) puis le surjet est poursuivi
longueurs et largeurs et sont indispensables, en particulier dans avec une aiguille ronde en repassant dans le même trou (B).
des voies d’abord rétropéritonéales.
Lors de la chirurgie aortique, une valve fine et longue est
positionnée transversalement le long de la veine rénale gauche
et une valve moins profonde et plus large permet de récliner
l’intestin grêle. 3 2 1
Bras de Martin
Ce bras que l’on fixe à travers les champs à la table est muni
de deux articulations et l’on peut y fixer un écarteur de Farabeuf
ou une valve de Leriche (Fig. 11B). Il remplace un aide.
L’utilisation de deux ou trois bras de Martin, permet, si on les
associe à un écarteur pariétal autostatique type Ricard ou
Gosset, de faire toute la chirurgie abdominale.
Contrairement à un aide, les bras de l’écarteur restent Figure 13. Suture artérielle renforcée par une bandelette de Téflon
parfaitement statiques. Cela peut constituer un inconvénient si feutre. La suture prend successivement la paroi artérielle (1), le Téflon (2)
le bras comprime un vaisseau ou l’uretère. puis la prothèse (3).
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Techniques de base en chirurgie vasculaire ¶ 43-004
Colles
L’utilisation de colle peut être une partie inhérente de la
technique chirurgicale comme dans les dissections aortiques.
Elle peut aussi rendre de grands services en prévention des
hématomes ou pour contrôler une hémorragie active. Les colles
seront probablement de plus en plus utilisées, mais leur coût est Figure 15. Technique de passage d’un fil ou d’un lacs autour d’un
un frein à ce développement. Par exemple, dans une thoraco- vaisseau à l’aide du dissecteur. Le fil doit être tendu comme la corde d’un
lombotomie, il est possible de pulvériser de la colle (Tissucol®, arc et présenté au dissecteur à l’aide d’une pince.
Evicel®) dans le décollement rétropéritonéal, pour limiter le
risque d’hématome postopératoire. On peut aussi coller préven-
tivement les anastomoses (surfaces sèches), en particulier sur
une aorte fragile pour la renforcer, ou sur une anastomose
utilisant une prothèse en PTFE pour éviter le saignement par les
trous d’aiguille au déclampage (Coseal®).
“ Points forts
Enfin, la colle peut permettre de régler certaines situations
• Le geste chirurgical doit être anticipé afin de prévoir le
difficiles d’hémorragie au déclampage par déchirure de l’artère.
On peut alors reclamper et encoller l’anastomose (Bioglue®,
matériel adéquat.
Coseal®, Evicel®) ou utiliser directement la colle (Flowseal®) en • Un clamp idéal est atraumatique, ne glisse pas, est
s’aidant éventuellement de compresses utilisant une combinai- adapté à la taille du vaisseau et à la fragilité de la paroi et il
son de collagène et de colle biologique (Tachosil®). procure une bonne occlusion du vaisseau.
• L’installation du patient et du chirurgien conditionne le
Lunettes grossissantes et éclairage bon déroulement de l’intervention.
• Du temps doit être accordé à l’exposition qui permet
L’utilisation de lunettes grossissantes améliore le confort
une chirurgie de reconstruction plus aisée.
opératoire du chirurgien. Elles sont indispensables pour la
réalisation d’anastomoses sur des artères de petit diamètre,
• Le fil vasculaire de choix est un monofilament non
comme les artères de jambe. L’utilisation de lunettes nécessite résorbable de polypropylène.
un apprentissage. Il faut donc les utiliser régulièrement même • La colle est un élément d’avenir qui peut permettre de
si l’on n’est pas l’opérateur principal. Le choix de ses lunettes renforcer les anastomoses sur parois fragiles ou de
est primordial. L’image est nette à une certaine distance focale. compléter une hémostase difficile.
Il faut donc choisir cette distance pour ne pas se trouver à
opérer trop près du malade et pouvoir utiliser les lunettes dans
un champ opératoire profond. Un grossissement élevé réduit la
luminosité et l’étendue du champ opératoire. Un grossissement pas au bout du fil. Le fil est tendu comme la corde d’un arc, et
de 2,5 préserve une bonne luminosité et un champ opératoire c’est cette partie qui est passée dans le dissecteur (Fig. 15). Une
étendu. Ce grossissement peut cependant s’avérer insuffisant sur traction sur le fil permet de s’assurer que la prise est correcte.
des artères de 1,5 mm. Le prix des lunettes est très variable. On Le dissecteur peut alors être retiré. Une astuce pour contrôler
trouve actuellement sur Internet des lunettes de qualité à des une collatérale postérieure, comme par exemple l’artère hypo-
prix raisonnables. gastrique ou la fémorale profonde, consiste à faire le tour de
La qualité de l’éclairage est évidemment primordiale. Le l’artère en amont et en aval de cette collatérale (par exemple de
scialytique (étymologiquement « qui coupe les ombres ») doit l’iliaque primitive et de l’iliaque externe). Le dissecteur est
être habituellement placé derrière l’épaule gauche de l’opérateur. positionné autour de l’artère d’amont et l’une des extrémités du
Le scialytique à éclairage par light-emitting diode (LED) constitue vessel loop est passée de l’aide vers soi. Puis le dissecteur est
un réel progrès. Les nouveaux casques utilisant des LED alimen- positionné autour de l’artère d’aval et l’autre extrémité du vessel
tées par piles ou batteries sont très puissants et surtout légers. loop est passée de l’aide vers soi encerclant ainsi la collatérale
Certaines LED peuvent même se fixer directement sur les postérieure (Fig. 16) pour permettre de positionner un clamp.
lunettes grossissantes.
Couper le fil
■ Techniques de base Ce geste revient habituellement à l’aide ou à la panseuse. Le
principal risque est que les ciseaux ne coupent pas bien. Il est
donc essentiel que les ciseaux soient parfaitement immobiles
Passer un fil lors de la section. En effet, si l’on coupe le fil avec un mouve-
Le tour du vaisseau est réalisé à l’aide des ciseaux, puis on ment de retrait des ciseaux, le vaisseau est arraché dans le cas
passe un dissecteur. Le dissecteur ne sert donc pas à disséquer. où les ciseaux ne couperaient pas. Cela est particulièrement vrai
La préhension du fil ou du lacs se fait au bout de la pince, mais pour une suture sur une veine. Il n’est pas nécessaire d’incliner
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43-004 ¶ Techniques de base en chirurgie vasculaire
A B C D
Figure 16. Contrôle a minima d’une collatérale artérielle postérieure (A à D).
A B C D E
Figure 17. Positions de l’aiguille sur le porte-aiguille en fonction du geste à réaliser.
A. Position « digestive » à deux tiers/un tiers au bout du porte-aiguille.
B. Position « vasculaire » à un demi/un demi au bout du porte-aiguille.
C. Position un tiers/deux tiers pour une plus grande précision.
D. Aiguille à la partie moyenne du porte-aiguille pour passer une plaque calcifiée.
E. Position de l’aiguille en revers. Celle-ci est dans l’axe du porte-aiguille permettant un mouvement de translation.
les ciseaux. Au total, les ciseaux sont à l’horizontale, parfaite- brins sont croisés au départ, le geste aboutit à la formation d’un
ment immobiles et sectionnent le fil de polypropylène à nœud plat (Fig. 18A, B). Il est recommandé de faire des nœuds
environ 10 mm du nœud. Il n’y a enfin aucun intérêt à couper plats pour lier les vaisseaux. Pour l’arrêt d’un surjet au niveau
très court les brins du nœud d’un surjet de fil résorbable d’une anastomose, il est préférable de faire des demi-clés [7] en
puisque celui-ci disparaîtra. alternant le sens des demi-clés et éventuellement le fil tracteur.
Un nœud classique consiste à croiser les brins, à réaliser un
Position de l’aiguille sur le porte-aiguille premier nœud qui sera plat par un mouvement de pronation
puis une demi-clé par un mouvement de supination, ces deux
(Fig. 17)
nœuds étant réalisés avec le même fil tracteur puis à réaliser un
L’aiguille comporte une pointe et un talon et l’on apprend troisième nœud en changeant de fil tracteur (Fig. 18C). Pour les
souvent en chirurgie digestive à tenir l’aiguille à sa jonction anastomoses en polypropylène, il est conseillé de faire six
deux tiers-un tiers, la pointe orientée vers l’avant du porte- nœuds (les nœuds supplémentaires n’améliorant pas la sécurité)
aiguille. En chirurgie vasculaire, il n’y a pas de position type. La et de sectionner le fil entre 7 mm et 10 mm après le dernier
position de l’aiguille dépend de la situation (Fig. 17A). Plus on nœud.
prend l’aiguille près de la pointe et plus on est précis, mais cela Lors de la réalisation du nœud, l’index ou le médius descen-
empêche de faire une prise large. Cette prise de l’aiguille près de dent le nœud au contact du vaisseau. À aucun moment il ne
la pointe est indiquée pour une suture fine. À l’inverse, une doit y avoir de traction sur le vaisseau qui risque de se rompre
prise près du talon permet des prises larges au prix d’une perte s’il est de petit diamètre. Le vaisseau doit donc rester parfaite-
de précision. Cela est indiqué lors de la fermeture pour suturer ment immobile.
des tissus mous.
L’aiguille est positionnée à l’extrémité du porte-aiguille, sauf Ligature-section des vaisseaux
si l’artère est très calcifiée. L’aiguille est alors positionnée à la Nous irons de la technique la moins sécurisée vers la techni-
partie moyenne du porte-aiguille (comme lors de l’utilisation de que la plus sécurisée (Fig. 19).
fil d’acier pour fermer le sternum) (Fig. 17B).
L’anastomose comporte des points en coup droit et en revers. Non sécurisée (Fig. 19A)
Le revers n’est pas la position miroir du coup droit. En revers,
l’aiguille se situe presque dans l’axe du porte-aiguille (Fig. 17C). Deux pinces sont positionnées sur le vaisseau puis celui-ci est
Dans cette position, le passage de l’aiguille dans l’artère ou la sectionné. Le fil est passé autour de la pince de manière à faire
prothèse peut se faire par un mouvement de translation d’avant le nœud au-dessus de la pince. Il n’est pas nécessaire, en cas de
en arrière et non pas de rotation comme en coup droit. prise élective du vaisseau, de desserrer la pince lorsque l’on fait
le nœud, tel que l’on a l’habitude de le faire en cas de prise large
(exemple : épiploon ou mésocôlon). Cette technique peut être
Faire un nœud (Fig. 18) dangereuse, car si la pince est retirée précocement et si le nœud
Ce geste est considéré comme un geste de base et pourtant il casse, il peut y avoir hémorragie par rétraction du vaisseau.
n’existe pas de preuves scientifiques en faveur d’un nœud
parfait [5]. Chaque chirurgien a ses habitudes. Il faut distinguer Sécurisée d’un côté (Fig. 19B)
les demi-clés et le nœud plat, le même geste permettant de Souvent, l’un des deux côtés du vaisseau qui est sectionné est
réaliser ces deux nœuds. Si les brins ne sont pas croisés au plus difficile à rattraper en cas de lâchage de la suture. Le côté
départ, le geste aboutit à la formation d’une demi-clé. Si les dangereux est lié de manière sécurisée. Ainsi, un côté est
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Techniques de base en chirurgie vasculaire ¶ 43-004
A B
1 3 5
2 4 6 7 C
Figure 18. Les différents nœuds.
A. Nœud plat.
B. Demi-clé.
C. Blocage des nœuds en alternant le fil tracteur.
d’abord ligaturé éventuellement avec une boucle passée, puis moyenne, un nœud est fait sur une face, puis une boucle, puis
une pince est positionnée en face et le vaisseau sectionné. Dans un nœud sur l’autre face. La mise en place d’un clip en amont
ce cas, le risque hémorragique existe lors du positionnement du peut sécuriser cette suture.
nœud sur le côté déjà sectionné. Les gros vaisseaux, tels que l’aorte et les artères iliaques,
peuvent être liés avec un lacs en PTFE, qui a l’avantage de
Sécurisée pouvoir être laissé en place (Fig. 19F). Un surjet de polypropy-
lène peut venir renforcer l’extrémité libre. On peut également
Les nœuds sont faits alors que le vaisseau n’est pas coupé. Si
placer une rangée d’agrafes vasculaires en amont d’un surjet de
l’on casse le fil, il ne se passe rien. Le vaisseau est sectionné
polypropylène en particulier en milieu septique, connaissant le
entre deux fils tracteurs, puis les fils sont sectionnés (« les
risque de rupture d’une simple ligature du moignon artériel. Les
vaisseaux d’abord »). Les nœuds peuvent être remplacés par des
pinces sont habituellement des pinces TA ou GIA avec agrafes
clips, éventuellement doublés. Il faut positionner le clip, comme
rouges et blanches. En revanche, les agrafes ne sont pas
le nœud, sur une partie du vaisseau bien disséquée. Le clip qui
indiquées sur les artères calcifiées en raison du risque de
est poussé dans une zone non disséquée risque de glisser, mais
déchirure du vaisseau.
aussi de « clipper » une branche nerveuse qui n’aurait pas été
Les clips autobloquants de type Hemolock® permettent une
visualisée.
ligature efficace des vaisseaux non calcifiés, en particulier en
Sécurité maximale (Fig. 19C) laparoscopie.
Une pince fine est d’abord positionnée sur le vaisseau, puis Prélèvement de la veine grande saphène
les nœuds sont réalisés comme dans le cas précédent. L’intérêt
de cette pince est d’aider au positionnement des fils. Une fois Il est très souvent nécessaire de prélever la veine grande
retirée, on est certain d’avoir suffisamment de place pour saphène pour réaliser un pontage. Il est essentiel de réaliser la
sectionner le vaisseau. veille de l’intervention un échomarquage. Il est important de
préciser si celui-ci est réalisé en position debout, couché, couché
Suture artérielle dangereuse (Fig. 19D) avec garrot. Un diamètre de 2,5 mm à 3 mm est nécessaire (en
position debout ou avec garrot). Si la veine saphène est de trop
La suture de l’artère sous-clavière dans le thorax par voie
petit diamètre, un autre matériel de pontage est recherché.
cervicale est dangereuse. L’artère est clampée à l’aide d’un clamp
L’autre intérêt de l’échomarquage est de pouvoir inciser la peau
type Satinsky. Un surjet aller en U est d’abord positionné, puis
juste en regard de la saphène, évitant ainsi des décollements,
le retour se fait par un surjet classique. Les fils sont noués, mais
source d’hématome et de nécrose cutanée, et de marquer les
gardés longs, le clamp est retiré. S’il n’y a pas d’hémorragie, les
principales collatérales pour réaliser les incisions à ce niveau. La
fils peuvent être sectionnés.
veine saphène est habituellement abordée, selon un trajet
interne, au niveau du triangle de scarpa, ou au niveau de
Ligature appuyée (Fig. 19E)
l’abord poplité ou jambier. Il est possible de réaliser une incision
Une ligature doit être appuyée si l’on craint un dérapage continue, mais il est préférable de préserver des ponts cutanés
possible du nœud. L’artère est d’abord aiguillée à sa partie qui aident à la fermeture. Ces ponts peuvent être de petite taille
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Figure 19. Techniques de ligature-section des vaisseaux de la plus fil, résorbable ou non, est positionné sur la partie proximale des
dangereuse à la plus sécurisée. collatérales, car des clips pourraient s’arracher lors de la
A. Non sécurisée. tunnellisation ultérieure de la veine. Le fil ne doit pas être
B. Sécurisée d’un côté. positionné trop près de l’ostium de la collatérale, car il faut
C. Sécurité maximale. Une pince est mise en place sur le vaisseau non prévoir la dilatation ultérieure du greffon veineux. Un clip peut
sectionné puis les nœuds sont faits de part et d’autre à distance de la pince être positionné sur le côté distal et les collatérales sectionnées
et le vaisseau est coupé en dernier à la place de la pince. (si la veine est laissée in situ, il n’est pas nécessaire de section-
D. Suture artérielle dangereuse. L’artère est clampée par un clamp de ner les collatérales, et seul un clip peut être positionné). Le tour
Satinsky et on réalise un surjet en U et un surjet classique au retour. de la veine est fait au ciseau, puis un lacs Silastic® est passé
E. Ligature appuyée. L’artère est aiguillée à sa partie moyenne puis un autour d’elle de manière à pouvoir la mobiliser. Elle peut aussi
nœud est fait sur chaque face. être mobilisée avec les doigts. Il ne faut pas pincer la veine elle-
F. Ligature par un lacs, renforcée par un surjet. même avec une pince pour ne pas endommager l’endothélium
(no touch technic) et il faut la disséquer en préservant le tissu
graisseux adjacent [8, 9]. Il est aussi possible de prélever la veine
.
(environ 1 cm). Par l’incision, la veine saphène est libérée sur par technique vidéoassistée.
sa face antérieure sous le pont cutané, puis le doigt est passé Du bleu de méthylène est mis en place sur l’une des faces de
sous ce pont cutané (Fig. 20). la veine (on peut aussi utiliser un crayon dermographique) pour
Une nouvelle incision cutanée est réalisée. La sous-peau est limiter le risque de twist de la veine lors des manœuvres de
sectionnée au bistouri électrique, la veine sous-jacente étant tunnellisation. Dès que la veine est sectionnée, il faut inciser
protégée par le doigt glissé dans l’incision (les deux paires de l’extrémité d’aval avec un ciseau de Potts pour marquer le sens
gants nécessaires en chirurgie vasculaire évitent ici de se brûler). de circulation du sang. Du sérum hépariné est injecté dans la
Cette technique permet de retrouver rapidement la veine veine. Il est préférable de ne pas dilater la veine avant son
saphène par la nouvelle incision. Les collatérales sont liées. Le utilisation [8]. Une pression douce, veine clampée, permet de
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45°
A B
Figure 22. Techniques d’artériotomie longitudinale.
A. Perforation directe de l’artère par la lame tranchant en avant et inclinée
à 45°.
B. Ouverture couche par couche à la lame 11, tenue à l’endroit.
B
Figure 21. Fermeture d’une artériotomie transversale (A, B). Elle est
faite entre deux clamps à angle plutôt qu’entre deux lacs, ce qui permet
de rapprocher les deux berges.
“ Point fort B
Le prélèvement saphène Figure 23. Élargissement de l’artériotomie à l’aide d’un aortic punch
• Importance de l’échodoppler préopératoire pour (A, B).
vérifier la perméabilité de la veine, son diamètre, marquer
son trajet pour éviter les décollements source
d’hématome et de nécrose cutanée et marquer les de mettre en place des clamps de manière à éviter une tension
principales collatérales pour guider les incisions cutanées. excessive sur les berges de la plaie (Fig. 21).
• La veine doit être manipulée de façon atraumatique
pour éviter de léser l’endothélium, ce qui compromettrait Artériotomie longitudinale (Fig. 22)
la perméabilité du pontage. Chaque fois qu’il existe un doute sur la nécessité de réaliser
• La veine saphène doit être marquée sur sa face un pontage, ou un geste plus complexe qu’une désobstruction
antérieure pour éviter les twists lors de la tunnellisation. à la sonde à ballonnet, il convient de réaliser une artériotomie
longitudinale. L’artère peut être perforée par la lame 11 tenue
avec le tranchant en avant et inclinée à 45° (Fig. 22A). L’artère
peut aussi être ouverte couche par couche avec la lame 11 tenue
Artériotomie cette fois à l’endroit (Fig. 22B). Sur les artères de petit diamètre,
comme les artères de jambe ou du pied, il est préférable
Artériotomie transversale d’utiliser un bistouri ophtalmique qui est beaucoup plus fin.
L’artériotomie est essentiellement utilisée pour la réalisation Pour réaliser une anastomose et après avoir agrandi l’artérioto-
d’une désobstruction artérielle d’origine embolique, à la sonde mie aux ciseaux de Potts, il est habituel de réséquer une pastille
de Fogarty. Il s’agit d’une artériotomie transversale réalisée sur artérielle pour augmenter la largeur de l’anastomose à l’aide des
une artère sensiblement normale. Le risque de sténose lors de la mêmes ciseaux. Il est cependant plus simple d’utiliser un
fermeture de l’artériotomie transversale est négligeable, il n’y a emporte-pièce type aortic punch de diamètre 4 mm ou 5 mm
donc pas lieu de mettre en place un patch. L’artériotomie peut (Fig. 23). Ces punchs sont utilisés pour réséquer une pastille
être fermée par des points séparés en débutant par les deux artérielle sur l’aorte ascendante pour l’implantation proximale
extrémités ou par deux hémisurjets en débutant, là aussi, par les des pontages aortocoronariens. Ces punchs peuvent être utilisés
extrémités et en terminant à la partie médiane de l’artère. Si le sur des prothèses pour réaliser un trou de diamètre précis pour
clampage était réalisé à l’aide de lacs Silastic®, il est préférable réimplanter une branche collatérale.
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B
Figure 24. Fermeture d’une artériotomie longitudinale sur patch par
B
4/4 de surjets (A, B).
“ Points forts
• Ne pas disséquer au dissecteur. D
• Importance de la position de l’aiguille sur le porte-
aiguille qui doit être adaptée à la profondeur du champ et Figure 25. Principes généraux d’une anastomose vasculaire.
à la souplesse de l’artère. A. L’artère doit être piquée de dedans en dehors pour plaquer la plaque
• La position de l’aiguille en revers n’est pas la symétrique d’athérome.
B. La position de l’aiguille sur le porte-aiguille varie en fonction de la
du coup droit.
profondeur du champ opératoire.
• En cas de chirurgie en urgence, si un pontage peut être
C. Utilisation successive des deux mains nécessaire au passage des points.
envisagé, l’artériotomie doit être longitudinale. La main droite effectue une rotation puis la main gauche vient récupérer
• Si on pratique une artériotomie longitudinale, il est l’aiguille et termine la rotation.
habituellement préférable de la fermer sur patch pour D. Geste de talonnage à proscrire. La main droite ne doit pas présenter
éviter une sténose. l’aiguille à la main gauche en faisant une rotation sur place.
• Ne pas oublier l’héparinisation générale avant le
clampage.
passer est très faible. La réalisation d’une endartériectomie au
• Privilégier un clampage antéropostérieur en cas d’artère niveau du site d’anastomose fragilise l’artère et favorise la
calcifiée sur sa face postérieure. survenue de faux anévrismes [10].
• Lors d’un clampage latéral, il faut vérifier l’absence de Seront décrits les principaux types d’anastomose : termino-
flux avant de faire l’artériotomie. Ce clampage est contre- terminale, terminolatérale.
indiqué en cas de calcifications artérielles importantes.
Principes généraux (Fig. 25)
L’artère doit être piquée de dedans en dehors pour plaquer la
plaque d’athérome contre la paroi, alors que piquer de dehors
Anastomoses en dedans expose au risque de décoller une plaque (Fig. 25A).
Les anastomoses sont pratiquement toujours réalisées par des Cette règle n’est évidemment pas absolue, en particulier si
surjets. Elles peuvent être réalisées par des points séparés, chez l’artère est peu athéromateuse. Il faut éviter de mobiliser la
l’enfant, pour permettre la croissance du vaisseau et lors de la paroi de l’artère en la pinçant avec la pince Cushing. Il faut la
réalisation de microanastomoses, car le nombre de points à repousser pince fermée pour ne pas endommager la paroi.
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A
Figure 29. Réalisation d’un surjet en « parachute ».
A. Le surjet « parachute ».
B. La prothèse doit être positionnée parallèle à l’artériotomie. Il existe un côté plus favorable que l’autre pour coudre.
C. Suture plus délicate au talon. L’anastomose est débutée à la pointe avec réalisation du nœud et poursuite en « parachute » au talon.
Thromboendartériectomie
Une fois l’artériotomie longitudinale réalisée, le plan d’endar-
tériectomie apparaît le plus souvent spontanément. Si tel n’est
pas le cas, il est possible de pincer la paroi artérielle à l’aide
d’une pince de Cushing et de débuter le plan d’endartériectomie
à l’aide d’une lame de bistouri 11 (Fig. 31), en choisissant un
plan externe. L’endartériectomie est ensuite poursuivie avec le
bout mousse d’une spatule de Robb. En amont, la plaque peut
être sectionnée au ciseau de Potts et éventuellement fixée si elle
contient des débris athéromateux susceptibles d’emboliser. En
Figure 30. Suture de la palette viscérale lors de la cure d’un anévrisme aval, suivant le vaisseau, l’arrêt d’endartériectomie peut se faire
de l’aorte thoracoabdominale en débutant par la rénale droite et en allant soit en pente douce (endartériectomie carotidienne), soit sans
en coup droit vers le tronc cœliaque. arrêt spontané de la plaque. Celle-ci doit alors être sectionnée
au ciseau de Potts, puis fixée par des points de Kunlin
(Fig. 32A). Un point est passé de part et d’autre de l’arrêt de
plaque de dedans en dehors et les nœuds sont réalisés à
Suture latérolatérale
l’extérieur de l’artère. Il est aussi possible de réaliser un surjet
Ce type d’anastomose est très peu employé. Il peut s’agir par pour fixer la plaque (Fig. 32B). L’artériotomie peut être refermée
exemple d’un pontage distal séquentiel avec une anastomose directement ou sur un patch autologue ou prothétique.
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A B
C D
Figure 33. Réintervention au scarpa (A à D). Dissection d’une prothèse
A B en polyester. Il existe une coque de sclérose qui entoure la prothèse.
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contrôle est réalisée en positionnant un introducteur 6F dans Si une intervention est très longue, il faut savoir faire des
l’artère. L’existence de thrombus dans l’artère tibiale postérieure pauses. Il faut aussi avoir prévu de pouvoir faire appel à un
ou tibiale antérieure nécessite un abord jambier ou de position- second chirurgien.
ner un guide 0,018 dans cette artère puis d’utiliser une sonde
de Fogarty travaillant sur guide. Pour la désobstruction des
artères de jambe, il est souvent plus facile de réaliser une « Self-control »
thromboaspiration avec un cathéter-guide 6F, 90 cm. Le résultat Certains chirurgiens, parfaitement agréables lors d’une
peut être complété par une injection locale de 250 000 UI réunion, deviennent agressifs en entrant dans le bloc opératoire.
d’urokinase. L’artériotomie est refermée par deux hémisurjets ou Cela est habituellement une conséquence du stress normal qui
des points séparés de polypropylène. Les lacs en Silastic® créent envahit tout être humain lors de la préparation à l’action.
une tension sur les berges de l’artériotomie et sont donc Invectiver ses aides et son instrumentiste est une attitude non
remplacés par des clamps, une légère poussée sur ceux-ci professionnelle, qui n’améliore en aucun cas les choses. Il est
permettant de rapprocher les berges. donc essentiel que le chirurgien apprenne à se maîtriser dès son
En ce qui concerne l’embolectomie du membre supérieur, apprentissage. Certains chirurgiens sont naturellement calmes.
quatre règles doivent être respectées. Une incision de 2 cm Les autres, qui gardent leur calme et leur sang-froid dans des
médiane à l’avant-bras immédiatement sous le pli du coude est circonstances difficiles, ont travaillé sur eux-mêmes. Une bonne
suffisante, car elle permet de contrôler l’artère humérale et ses préparation de l’intervention réduit le risque de se trouver dans
branches de division. La sonde de Fogarty ne doit pas aller en une situation délicate et permet d’imaginer les difficultés
amont de l’artère vertébrale, si la position du thrombus le auxquelles on risque d’être confronté et comment les résoudre.
permet, pour limiter le risque d’embolie dans cette artère. La
sonde ne doit pas être passée dans les artères de l’avant-bras si
le reflux est correct, car ces artères sont très spastiques et Installation
peuvent se thromboser en postopératoire. Enfin, un hématome Pour les interventions réalisées régulièrement, l’installation
postopératoire est fréquent et est prévenu par la mise en place doit faire l’objet d’un protocole écrit accompagné de photos ou
d’un pansement compressif. de schémas pour les infirmières de bloc opératoire. Sinon, il est
préférable que le chirurgien soit présent dès cette phase. Cela
permet par exemple de vérifier qu’un pied de table ne viendra
pas empêcher la réalisation d’une angioplastie associée à un
“ Point fort
pontage. Le malade doit toujours être positionné sur la table de
manière à être le plus près possible du chirurgien pour que ce
dernier n’opère pas les bras en extension. Par exemple, en cas
Règles de l’embolectomie de chirurgie aortique, chirurgien à gauche, le malade doit être
• L’artériotomie est plutôt transversale. sur le bord gauche de la table. Si des décubitus latéraux
• Il faut toujours mesurer la distance entre l’artériotomie importants sont nécessaires, il faut vérifier, avant la mise en
place des champs, la bonne position des appuis. Une compres-
et le point anatomique clé avant de descendre une
sion peropératoire prolongée non dépistée engendre des com-
Fogarty.
plications neurologiques et/ou des nécroses musculaires. Il est
• La sonde de Fogarty doit être passée jusqu’à ce qu’elle utile de marquer la voie d’abord à l’aide d’un feutre en dessi-
ne ramène plus de thrombus à deux reprises. nant les repères anatomiques. La fermeture est facilitée si l’on a
• Au membre supérieur, il ne faut pas descendre la pris soin de tracer des traits perpendiculairement à la voie
Fogarty dans les artères de l’avant-bras si le reflux est d’abord, ce qui évite des décalages, source de retard de cicatri-
correct. sation ou de désunion.
• Au membre supérieur, il faut réaliser un pansement Le champ opératoire doit être large de manière à permettre,
compressif, car il y un fort risque d’hématome. en cas de difficultés inattendues, l’élargissement de la voie
d’abord vers le haut ou vers le bas, de pouvoir accéder à d’autres
sites donneurs pour un pontage (exemple : artère fémorale
controlatérale) ou de prélever une veine saphène (exemple :
deux membres dans le champ en traumatologie vasculaire).
■ Intervention
Le temps le plus important de l’intervention n’a pas lieu au Incision
bloc opératoire, mais dans le bureau du chirurgien. Il s’agit de Le chirurgien doit apprendre à opérer assis, habituellement
définir la stratégie opératoire, de la même manière qu’un pilote sur une selle chirurgicale dont la hauteur est réglable à l’aide
définit un « plan de vol ». Les examens d’imagerie préopératoire d’une pédale. Cela nécessite une certaine habitude. À l’inverse,
sont nécessaires pour essayer d’éviter la survenue d’une mau- il est difficile d’opérer debout lorsque l’on a pris l’habitude de
vaise surprise peropératoire. En particulier, l’échographie et la s’asseoir. Le dicton « grand chirurgien : grande cicatrice » devrait
tomodensitométrie permettent d’étudier les calcifications être remplacé par « grand chirurgien : cicatrice adaptée ». Il est
artérielles. Il faut définir des stratégies alternatives si l’on pense souvent possible de réduire la taille des incisions, ce qui se fait
que certains temps opératoires peuvent poser des problèmes. habituellement au détriment du confort opératoire. Il est
important, lorsque l’on décide de réaliser une petite incision, de
pouvoir s’agrandir en cas de difficultés opératoires.
Préparation du chirurgien
Si l’on compare la chirurgie au saut à la perche, certaines
interventions mettent la barre à 4 m. De la même manière que
Dissection
conduire une voiture peut se faire de façon presque « automa- Les chirurgiens en formation ont tendance à disséquer à
tique », il en sera de même pour cette intervention. En revan- vitesse constante. La connaissance de l’anatomie chirurgicale
che, lorsque la barre est à 6 m, chaque détail compte et la permet de distinguer des temps de dissection sans risque qui
concentration doit être optimale. Le chirurgien doit alors se peuvent être rapides (exemple : la face antérieure de l’artère
comporter comme un sportif de haut niveau. Il faut réfléchir à fémorale commune), et des temps où l’artère croise des élé-
l’installation du patient, planifier les différents temps opératoi- ments nobles et où il faut donc ralentir (exemple : repérage du
res et leur rythme afin d’éviter les clampages prolongés, vérifier XII lors de l’abord de la carotide interne, repérage de l’uretère
si ceux-ci ne nécessitent pas d’instruments particuliers. lors de l’abord de l’axe iliaque).
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Il existe deux grandes techniques de dissection : la section et tissulaire. Les études randomisées n’ont pas montré l’intérêt du
la discision. La section consiste à couper les tissus pour ouvrir drainage aspiratif [12, 13]. Il faut donc se concentrer sur l’hémo-
le plan. Le plan de dissection de l’artère se situe au contact de stase et la lymphostase.
celle-ci, permettant d’apercevoir les vasa-vasorum de l’adventice.
Les chirurgiens peu expérimentés ont tendance à rester à
distance du vaisseau. Or, il n’existe pas de plan de dissection à
ce niveau. Il est essentiel que le chirurgien exerce une traction
sur l’artère pendant que l’aide exerce une traction sur les tissus
“ Points forts
avoisinants, laissant pénétrer de l’air dans le plan périadventiciel
• Les quatre questions à se poser avant la réalisation d’un
(souvent appelé chemise de l’artère). Les tissus sont repoussés à
pontage :
l’aide des ciseaux fermés. La courbure du ciseau suit la courbure
de l’artère. Cette technique est reproductible. En cas de dissec- C quel est le site donneur ?
tion d’une zone dangereuse, le ciseau est tenu immobile et la C quel est le site receveur ?
section est limitée. En cas de section d’une collatérale ou de C quel sera le trajet de tunnellisation ?
plaie d’un vaisseau, celle-ci est limitée et immédiatement C quel matériel sera utilisé (veine, prothèse, etc.) ?
réparée par un fil fin. Lorsque l’on repousse les tissus, ciseaux • Le « plan de vol » doit être défini avant le temps
fermés, le geste est parfaitement contrôlé. Repousser les tissus, opératoire pour éviter les surprises.
ciseaux entrouverts est en revanche plus dangereux. • Importance des examens morphologiques et
La discision consiste à écarter les lames des ciseaux. Souvent, notamment du scanner pour évaluer les calcifications et
les chirurgiens en formation ont peur de couper, et préfèrent repérer les zones accessibles à une suture.
cette technique, qui risque d’aboutir, avec un geste encore mal • Importance de l’installation du malade sur la table
contrôlé, à de grandes déchirures sur les vaisseaux, difficiles à opératoire.
réparer. Plus on a peur, et plus il faut oser couper. • La dissection doit se faire par section plutôt que par
Le vaisseau cible du pontage est parfois difficile à localiser discision.
parce qu’il n’est pas battant, en particulier s’il est profond • Le drainage aspiratif n’a pas démontré son intérêt.
(abord médiocrural de l’artère fémorale profonde), ou de petit
diamètre (artère fibulaire), ou si les repères anatomiques sont
modifiés (réintervention). L’utilisation d’une sonde Doppler
stérile permet de découvrir rapidement le vaisseau, en évitant ■ Entraînement
des décollements inutiles.
On a longtemps appris la chirurgie par compagnonnage.
L’abord de l’artère se fait par cette technique de section et de L’heure de bloc opératoire, comme l’heure de vol sur un avion,
refoulement des tissus ciseaux fermés. Ce faisant, on atteint la coûte très cher. C’est dire que les chirurgiens, comme les pilotes,
face postérieure de l’artère que l’on dissèque en veillant à ne pas doivent apprendre leur métier sur des simulateurs. Heureuse-
désinsérer une collatérale postérieure. Lorsque le tour de l’artère ment, en chirurgie vasculaire, l’entraînement ne nécessite pas de
est fait, il est possible de la charger sur un lacs à l’aide d’un moyens sophistiqués, car il s’agit avant tout de l’entraînement
dissecteur. En aucun cas, le dissecteur n’est utilisé pour à l’anastomose. Pour se faire, il suffit de fixer avec un sparadrap
disséquer. une prothèse sur son bureau et d’anastomoser en terminotermi-
nal ou terminolatéral un autre segment de prothèse. Lorsque la
gestuelle est acquise, il faut se chronométrer pour réaliser une
Principes du pontage anastomose où les points sont fins et réguliers, sans « oreille »,
Le chirurgien doit répondre à quatre questions avant d’aller en moins de 10 minutes. Les points à travailler sont :
au bloc opératoire : localisation de l’anastomose proximale, • ne pas reprendre l’aiguille à la main ;
• ne pas effectuer le passage de l’aiguille de la pince à disséquer
localisation de l’anastomose distale, trajet de tunnellisation,
vers le porte-aiguille en l’air, mais posé sur un plan dur ;
conduit utilisé. Les explorations préopératoires permettent
• ne pas « talonner ».
d’étudier les calcifications artérielles et le diamètre d’un matériel
C’est à la main gauche qui tient la pince de Cushing de
veineux. récupérer l’aiguille qui vient de perforer l’artère et d’effectuer le
passage coup droit-revers de l’aiguille.
Contrôle Pour simuler une anastomose en profondeur, ce qui va
modifier l’angle d’attaque du porte-aiguille et par là même la
La perméabilité du pontage peut être contrôlée avec une position de l’aiguille sur le porte-aiguille, il suffit d’entourer la
sonde Doppler stérile. Un bon pouls dans le pontage ne signifie prothèse de rangées de hauteur croissante de livres.
pas qu’il est perméable. Il peut en effet s’agir d’un pouls de
butée. Une artériographie peut être réalisée avec un amplifica-
teur de brillance numérisé. Le pontage peut être ponctionné, ■ Conclusion
après la mise en place d’une bourse, avec un cathlon 18 G ou Tous les chirurgiens, quelle que soit leur spécialité risquent,
un introducteur 4 ou 5 F relié à une longue tubulure de au cours de leur carrière, d’être amenés à gérer une plaie
manière à ce que le chirurgien puisse se placer derrière un artérielle et à disséquer des vaisseaux. La connaissance des
paravent plombé. techniques de base en chirurgie vasculaire doit faire partie de la
formation initiale de tout chirurgien.
Au-delà de la connaissance de la technique, il est essentiel
Fermeture et drainage d’avoir défini auparavant une stratégie opératoire et des
La fermeture est effectuée plan par plan, par surjet avec du fil stratégies alternatives.
résorbable. Il est important de ne pas décaler les berges de la L’entraînement à la suture sur simulateurs est indispensable
plaie, ce qui est facilement évité si l’on a pris soin de marquer pour acquérir rapidement la dextérité et la rapidité chirurgicale.
l’incision avec des traits perpendiculaires. La peau peut être .
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43-004 ¶ Techniques de base en chirurgie vasculaire
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Lermusiaux P., Millon A., Della Schiava N. Techniques de base en chirurgie vasculaire. EMC (Elsevier
Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-004, 2011.
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¶ 43-008
Substituts vasculaires
N. Chakfé, F. Dieval, Y. Georg, F. Thaveau, A. Lejay, C. Bajcz, S. Rinckenbach,
J.-F. Le Magnen, J.-G. Kretz, B. Durand
Avec leur introduction dans les années 1950, les substituts vasculaires ont inauguré la chirurgie
vasculaire moderne. De nombreux concepts ont été proposés par les fabricants avec des succès variables.
À l’heure actuelle, la greffe veineuse autologue reste le substitut vasculaire de choix pour les
revascularisations des artères de petit calibre. Les substituts vasculaires synthétiques sont principalement
construits à partir de deux biomatériaux : le polytétrafluoroéthylène sous forme microporeuse et le
polyéthylène téréphtalate sous forme textile. Les substituts synthétiques sont performants pour les
revascularisations des artères de moyen et gros calibres mais offrent encore des résultats médiocres pour
les revascularisations des artères de petit calibre. La connaissance des différents concepts de substituts
vasculaires et de leurs évolutions est indispensable pour permettre un choix optimal en pratique clinique.
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43-008 ¶ Substituts vasculaires
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Substituts vasculaires ¶ 43-008
Substituts synthétiques
Depuis leur apparition au début des années 1950, peu de
matériaux ont été utilisés pour leur construction. Le PTFE et le
PET se sont largement imposés comme matériaux pour leur
construction du fait de leurs résistances à la dégradation dans
l’organisme. De nombreux concepts ont été étudiés pour
proposer un substitut artériel idéal. La multiplicité actuelle des
modèles prouve que ce but n’est pas encore atteint.
Prothèses en polytétrafluoroéthylène
Le PTFE a été développé sous forme textile et microporeuse.
PTFE textile
Il a été proposé il y a 30 ans par Edwards [49] sous forme de
prothèses tissées ou tricotées. Ces prothèses ont été abandon-
nées suite à l’observation d’effilochages sur les lignes
d’anastomose.
Polytétrafluoroéthylène microporeux
Le PTFE microporeux (ePTFE) a été commercialisé dans les
années 1970. Il a connu un succès croissant comme substitut
des artères de petit calibre, notamment pour les pontages
fémoropoplités et axillofémoraux. Ce matériau se présente sous
forme de nodules transversaux reliés entre eux par des microfi-
brilles longitudinales. Le ePTFE est fabriqué à partir de poudre
de PTFE mélangée à un solvant, le naphtalène. Ce mélange est
ensuite compacté sous de très hautes pressions puis extrudé à
travers une filière produisant un tube droit compact. La
structure microporeuse est obtenue par l’exposition du PTFE
extrudé à une température supérieure à celle du point de fusion
(au minimum 327 °C) pour que les cristallites s’organisent en
une structure microporeuse. Ce procédé, le frittage, accroît
fortement la résistance mécanique. Cette structure microporeuse
de base a pu être modifiée pour permettre de proposer différents
types de modèles. Certains modèles se caractérisent par la
présence d’une fine couche de ePTFE enroulée sur la surface
externe pour en augmenter la résistance mécanique (Fig. 2). Le
recouvrement de la surface interne de la prothèse par du
Figure 1. Hétérogreffe bovine traitée.
carbone a été proposé pour en diminuer la thrombogénicité [50]
A. Macroscopie.
(Fig. 3). Cependant, cet avantage théorique n’a jamais été
B. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 30) :
confirmé en pratique clinique [51]. La fixation d’héparine sur la
face externe.
surface interne a également été proposée avec des résultats
C. Microscopie électronique à balayage (grossissement original × 30) :
cliniques encourageants [52] qui ont été confirmés dans une
surface luminale.
étude comparative randomisée [53]. Ces prothèses sont disponi-
bles avec un support externe annelé ou spiralé afin d’augmenter
dégénératives qui est évaluée à 7 % à 3 ans, les taux de perméa- leur résistance à la plicature et à la compression externe. La
bilité primaire et secondaire des pontages fémoropoplités à 5 ans présence d’un support externe n’a pas fait non plus la preuve
étant respectivement de 54 % et 76 %. de son efficacité en terme de performances cliniques [54]. La
réalisation de modèles sous différentes formes géométriques
Prothèses hybrides telles que les diamètres dégressifs pour la réalisation des fistules
L’idée de leur concepteur, Sparks, était de créer une néoartère d’hémodialyse ou la réalisation d’une collerette distale générant
autogène par l’infiltration tissulaire de deux filets de PET placés un effet vortex au niveau des anastomoses a été proposée pour
autour d’un mandrin de silicone enfoui dans le tissu sous- créer des conditions hémodynamiques optimales dans des
cutané de la zone du pontage. Après un délai de maturation de indications d’utilisation particulières. Les prothèses intégrant
quelques semaines, le mandrin était retiré et le pontage était une colerette en ePTFE à leur extrémité distale ont démontré
réalisé en anastomosant les deux extrémités du néoconduit ainsi des résultats comparables à ceux des colerettes d’interposition
formé sur les artères en amont et en aval de l’obstacle arté- veineuse pour la réalisation de pontages fémoropoplités sous-
riel [44]. Ce concept a été très rapidement abandonné du fait de articulaires [55, 56] et ont également été proposées pour la
sa très mauvaise stabilité mécanique à long terme, responsable réalisation de pontages fémoropoplités supra-articulaires [57].
de dilatations et de ruptures. En effet, l’infiltration tissulaire du Ces substituts se sont imposés pour le remplacement des
PET étant constituée essentiellement de collagène en l’absence vaisseaux de petit calibre en l’absence de greffon veineux
de tissu élastique et de cellules musculaires lisses, ce néoconduit autologue, malgré leur faible compliance et leur faible infiltra-
ne possédait aucune des propriétés élastiques de l’artère normale tion cellulaire [58, 59]. En effet, chez l’homme, contrairement à
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Substituts vasculaires ¶ 43-008
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43-008 ¶ Substituts vasculaires
Figure 6. Prothèse en polyester tricotée comportant un support Figure 8. Prothèse en polyester tricotée recouverte de sels d’argent.
externe.
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Substituts vasculaires ¶ 43-008
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43-008 ¶ Substituts vasculaires
Infectabilité
Critères de choix d’une prothèse vasculaire
L’infectabilité et la résistance à l’infection du biomatériau
Thrombogénicité constituant une prothèse vasculaire sont deux éléments impor-
tants dans des indications à haut risque infectieux telles que les
La thrombogénicité d’une prothèse doit être la plus faible pontages infra-inguinaux, pontages qui sont le plus souvent
possible lorsqu’elle est utilisée pour des revascularisations réalisés pour une indication de sauvetage de membre dans un
nécessitant des substituts de diamètres inférieurs ou égaux à contexte d’ulcérations ou de nécroses distales surinfectées. De
6 mm et qui présentent de surcroît un faible débit intraluminal manière générale, les principales études qui ont comparé
du fait du lit d’aval le plus souvent réduit. Fiore et al. [102] ont l’infectabilité des prothèses en PET à celle des prothèses en
comparé la perméabilité à 30 jours de différents types de ePTFE ont conclu à une meilleure résistance à la colonisation
prothèses implantées en remplacement de la veine cave supé- bactérienne des prothèses en ePTFE [111, 112]. Cependant, on
rieure ou de la veine cave inférieure chez le chien, et ont conclu observe des résultats inconstants puisque si des études expéri-
à une plus grande thrombogénicité des tubes en PET que celle mentales in vivo ont conclu à la moindre infectabilité des
des prothèses en ePTFE. Goldman et al. [103] ont comparé la prothèses en ePTFE, d’autres ont conclu à la moindre infectabi-
thrombogénicité de pontages fémoropoplités en PET, en ePTFE lité des prothèses en PET [113], voire même à une infectabilité
et en veine saphène autologue réalisés chez l’homme par la variant avec la durée d’implantation de la prothèse [114]. Il
mesure de la rétention de plaquettes marquées après 1, 3 et n’existe donc pas de consensus clair sur le choix de tel ou tel
7 jours d’implantation. L’indice moyen de thrombogénicité des type de biomatériau dans un contexte à haut risque infectieux.
prothèses en ePTFE était significativement inférieur à celui des Cependant, nous pouvons retenir qu’en cas d’implantation
prothèses en PET, ces deux indices étant significativement d’une prothèse en milieu infecté, il est recommandé d’utiliser
supérieurs à celui des veines autologues. Shoenfeld et al. [104] systématiquement une homogreffe artérielle, même si des cas
ont comparé la thrombogénicité de prothèses en PET, en ePTFE sporadiques de succès d’implantation de prothèses en PET
et en veine ombilicale humaine traitée par l’évaluation de la imgrégnées de matrices résorbables et d’antibiotiques ont été
fixation plaquettaire sur un modèle de shunt ex vivo. Ils ont rapportés. Nous pouvons également recommander d’utiliser des
conclu à une thrombogénicité du PET plus importante que celle prothèses en ePTFE pour la réalisation de pontages prothétiques
du ePTFE, ainsi qu’à une majoration de l’activation plaquettaire en milieu non infecté, mais chez des patients à haut risque
dans le circuit en présence de PET. Eldrup-Jorgensen et al. [105] infectieux du fait de lésions trophiques distales.
ont évalué la thrombogénicité de prothèses de 4 mm de
diamètre en PET, en ePTFE et en veine ombilicale humaine Biostabilité
traitée, par l’étude de l’activation plaquettaire sur des shunts ex La biostabilité du matériau constituant une prothèse vascu-
vivo de différents débits. Ils ont également montré que le PET laire est une propriété importante pour limiter les risques tardifs
activait l’agrégation plaquettaire de manière bien plus impor- de dégénérescence pouvant conduire à des complications telles
tante que le ePTFE et la veine ombilicale humaine, quel que soit que la dilatation et les ruptures prothétiques. Cette propriété est
le débit du shunt. Callow et al. [106] ont également conclu à la très importante pour les pontages soumis à de fortes contraintes
thrombogénicité du PET plus importante que celle du ePTFE sur tels que les pontages sus-inguinaux. Cette complication est
un shunt ex vivo. Cependant, une réduction de la thrombogé- beaucoup plus rare sur les pontages sous-inguinaux du fait des
nicité des prothèses en PET imprégnées peut être obtenue par la moindres sollicitations mécaniques et des taux de perméabilité
fixation directe d’agents antithrombotiques, soit directe- plus réduits dans cette localisation. La biostabilité d’une
ment [107], soit par l’intermédiaire d’une matrice d’imprégnation prothèse n’est pas seulement le fait du biomatériau en lui-
résorbable [108]. Ces techniques n’ont pas réellement encore fait même mais aussi du concept sous lequel il est utilisé. L’analyse
la preuve de leur efficacité en clinique. Il est donc clair de la littérature nous montre que la biostabilité d’un modèle de
qu’aucun substitut artériel synthétique ne présente les qualités prothèse n’est pas toujours prédictible. En effet, les tests qui
d’antithrombogénicité des substituts autologues, encore faut-il sont appliqués aux prothèses vasculaires avant leur mise sur le
que ces derniers soient traités, conservés et manipulés de marché sont essentiellement descriptifs et non prédictifs [115]. Il
manière la moins traumatisante pour en préserver l’endothé- est donc important de suivre tout nouveau modèle de prothèse
lium. En l’absence de substitut biologique autologue pour les vasculaire pour détecter précocement une tendance à la dégra-
pontages de petits calibres, il est habituel de privilégier l’utilisa- dation. Cette attitude entre dans le cadre général de la matério-
tion des substituts en ePTFE. vigilance. Nous avons pu montrer avec nos travaux qu’il est
non seulement primordial de déclarer tous les incidents ou
Cicatrisation accidents survenant sur des implants, mais également de les
La cicatrisation et l’incorporation des prothèses vasculaires analyser pour pouvoir déterminer les causes de leurs échecs.
sont un phénomène complexe et encore incomplètement Cependant, malgré l’existence de lois européennes bien définies
connu. L’un des principaux facteurs favorisants de la cicatrisa- dans le cadre de la matériovigilance, le nombre de déclarations
tion des prothèses est leur porosité, ce facteur étant déterminant rapportant des incidents ou des accidents est très largement
pour permettre la recolonisation tissulaire. L’importance de la inférieur à la réalité. La première directive européenne sur la
porosité a été rapidement mise en évidence avec les travaux de matériovigilance dans le domaine du matériel médical a été
Wesolowski [109], ce facteur étant toujours pris en compte pour prise le 20 juin 1990 (90/385/CEE, JOCE n° L189/17) et a été
la construction des nouveaux substituts vasculaires. Sur les modifiée le 14 juin 1993 (93/42/CEE, JOCE n° C172, 12 juillet
modèles expérimentaux, la cicatrisation et l’incorporation 1993). Cette directive établit clairement l’obligation de déclarer
tissulaire des prothèses vasculaires sont satisfaisantes puisqu’elles tout défaut dans les caractéristiques ou les performances d’un
génèrent une capsule interne constituée de collagène et cou- dispositif médical qui soit potentiellement susceptible de
verte d’un néoendothélium biologiquement fonctionnel. conduire à la mort ou à une altération majeure de la santé des
Cependant, ce résultat n’est jamais observé chez l’homme chez patients. Tous ces incidents doivent être déclarés à une autorité
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Substituts vasculaires ¶ 43-008
compétente qui devra prendre les mesures nécessaires afin du PET [122, 123] . Le PET recouvert d’un fluoropolymère ne
d’informer le fabricant du dispositif incriminé ou son représen- procure pas de meilleurs résultats cliniques que le ePTFE [124].
tant au sein de la communauté européenne. Une évaluation du L’utilisation de l’un ou l’autre de ces deux matériaux peut donc
dispositif est demandée, si possible en impliquant le fabricant, être proposée indifféremment. Devine et al. [53] ont obtenu de
afin de permettre aux autorités sanitaires d’établir les mesures meilleurs résultats avec une prothèse en PET incorporant de
de précautions nécessaires. Les chirurgiens ont par conséquent l’héparine dans sa matrice d’imprégnation qu’avec une prothèse
l’obligation de déclarer tous les incidents et de conserver les en ePTFE.
prothèses explantées afin de permettre les investigations qui Enfin, dans les indications de pontages fémorojambiers, les
doivent idéalement être réalisées par un laboratoire indépen- résultats des pontages prothétiques sont décevants, même en
dant. Il est important de diffuser l’information sur la matério- cas d’utilisation de techniques d’interpositions veineuses
vigilance à la communauté médicale pour permettre une anastomotiques telles que les collerettes de Miller [125, 126].
augmentation du nombre de cas déclarés. En effet, seule la L’utilisation d’une homogreffe artérielle représente une alterna-
collecte d’un grand nombre d’explants permettra de fournir des tive. Cependant, ses résultats sont plus proches de ceux des
données épidémiologiques interprétables permettant de diffé- prothèses que de ceux de la veine saphène autologue [29].
rencier des échecs sporadiques de comportements dégénératifs
plus endémiques. L’analyse structurelle des explants médicaux Choix d’une prothèse dans les revascularisations
doit répondre à notre sens à des impératifs stricts de qualité et sus-inguinales
de confidentialité.
Comme nous l’avons vu précédemment, l’évolution des Les prothèses textiles tissées ou tricots chaîne en PET se sont
prothèses vasculaires s’est faite par l’introduction permanente de largement imposées pour ce type de chirurgie. Actuellement, la
nouveaux concepts. Certains concepts ont fait la preuve de leur majorité des chirurgiens les utilisent sous leur forme imprégnée
efficacité, d’autres ont été abandonnés du fait de l’insuffisance avec de bons résultats cliniques [94-96]. L’utilisation de prothèses
de certaines de leurs propriétés, et tout particulièrement de leur de gros calibre en ePTFE est plus marginale avec cependant de
biostabilité. Il serait idéal de pouvoir prédire la stabilité à long bons résultats cliniques [127].
terme d’une nouvelle prothèse avant l’utilisation clinique par la
réalisation de tests mécaniques in vitro les plus représentatifs
possible des conditions physiologiques auxquelles elles seront ■ Perspectives d’avenir
soumises après leur implantation. De telles prédictions nécessi-
Les perspectives d’avenir des substituts incluront tout d’abord
teront également une meilleure connaissance des conditions
l’amélioration des produits actuellement disponibles. Ces
physicochimiques et hémodynamiques auxquelles sont soumis
améliorations devront porter sur leurs trois propriétés principa-
les différents matériaux utilisés pour la construction d’une
les que sont la biocompatibilité, l’antithrombogénicité et la
prothèse vasculaire. Chaque fois qu’un nouveau modèle ou
stabilité. L’amélioration de la biocompatibilité et de l’anti-
concept de prothèse vasculaire est utilisé en clinique humaine,
thrombogénicité des prothèses vasculaires pourrait être obtenue
celui-ci devrait être l’objet d’une surveillance répondant à une
par des traitements de surfaces tels que le greffage de polymères
organisation similaire à celle des centres de pharmacovigilance.
par plasma, le greffage de charges électriques négatives, ou de
Seule cette attitude peut permettre de dépister précocement des
carbone. Ces propriétés pourront être également modulées en
échecs et d’en évaluer l’incidence et éventuellement les causes.
incorporant à la prothèse au moment de son implantation des
En effet, toutes les complications ne sont pas rapportées dans la
produits actifs tels que des éléments cellulaires ou des facteurs
littérature et lorsqu’elles le sont, c’est avec un délai moyen de
de croissance. Les progrès de l’ingénierie tissulaire permettraient
une à deux années. De plus, l’analyse physicochimique systé-
soit de produire in vitro de véritables artères différenciées à
matique d’explants humains, quelle qu’en soit la cause
partir d’éléments cellulaires humains qui pourraient être
d’explantation, permettrait également de dépister une évolution
réimplantées chez le patient donneur, soit de développer des
marquée d’un concept vers la dégradation avant même que
nanostructures mimant l’architecture fibrillaire du vaisseau et
surviennent les premières complications cliniques.
permettant ainsi de guider sa recolonisation [128, 129].
L’amélioration de la stabilité des substituts vasculaires passera
Critères de choix d’une prothèse vasculaire par de meilleures connaissances des phénomènes de vieillisse-
en fonction de son indication ment des structures polymériques à long terme ainsi que par
une optimisation des processus de fabrication. Les programmes
Choix d’une prothèse dans les revascularisations de matériovigilance sont également très importants pour
sous-inguinales surveiller la stabilité de tout nouveau concept de substitut
vasculaire qui sera introduit sur le marché.
Le choix du type de prothèse synthétique en l’absence de .
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43-008 ¶ Substituts vasculaires
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1, place de l’Hôpital, BP 426, 67091 Strasbourg, France.
Faculté des sciences et techniques, Université de Haute-Alsace, Mulhouse, France.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Chakfé N., Dieval F., Georg Y., Thaveau F., Lejay A., Bajcz C., Rinckenbach S., Le Magnen J.-F., Kretz J.-G.,
Durand B. Substituts vasculaires. EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Techniques chirurgicales - Chirurgie vasculaire, 43-008, 2010.
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¶ 43-012
Les techniques endoluminales de traitement de l’athérome reposent maintenant sur des procédures bien
codifiées et des matériels dont les caractéristiques sont standardisées. Elles peuvent être pratiquées en
salle d’opération aussi bien qu’en salle de radiologie interventionnelle. Introducteurs, guides et cathéters
autorisent l’accès à tous les territoires artériels. Les caractéristiques des cathéters d’angioplastie
transluminale (profil, compliance) doivent être bien connues. Différentes architectures d’endoprothèses
s’adaptent à la sinuosité des vaisseaux et à la force radiaire requise selon la lésion à traiter, alors que le
développement d’endoprothèses couvertes élargit leur champ d’application. La place et l’intérêt des
techniques endovasculaires, par rapport au traitement médical et à la chirurgie, font l’objet d’un
consensus dans la majorité des indications. Le chirurgien doit donc bien les maîtriser, d’autant qu’il peut
aussi les utiliser en complément d’une chirurgie conventionnelle ou être confronté à leurs complications
immédiates ou secondaires.
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¶ 43-020
Explorations peropératoires
en chirurgie vasculaire
J. Marzelle, P. Desgranges, E. Allaire, F. Luizy, H. Kobeiter, J.-P. Becquemin
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43-020 ¶ Explorations peropératoires en chirurgie vasculaire
Figure 5. Angioscopie.
A. Différents moyens de limiter le flux d’irrigation : angioscopie rétrograde (1) ; blocage du flux par un ballon occlusif : angioscopie iliaque (2.1), fibre munie
d’un ballonnet occlusif (2.2) ; compression des collatérales par l’aide : clampage de la poplitée distale contre la face postérieure du tibia (3.1), clampage de
la poplitée haute contre le condyle fémoral (3.2).
B. Images d’angioscopie : plaque ulcérée (noter la solution de continuité de l’intima et le thrombus marginé) (B1) ; dissection après angioplastie : la plaque
est fracturée (à 9 h), du thrombus commence à se former et on distingue un aspect jaunâtre correspondant à la média exposée (B2).
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Traitement endoluminal d'un anévrisme aortique par endoprothèse couverte.
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Angioplastie protégée et mise en place d'endoprothèse de la carotide droite.
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Encyclopédie Médico-Chirurgicale 43-022
43-022
Médicaments antithrombotiques
en chirurgie vasculaire
SX Racine Résumé. – La thrombose artérielle représente la première complication de la chirurgie vasculaire. Aux lésions
CM Samama préexistantes des vaisseaux sanguins pathologiques s’ajoutent celles liées à la chirurgie (mise à nu du sous-
endothélium, stase sanguine au clampage, ischémie locale) qui induisent les mécanismes d’activation
plaquettaire et la thrombinoformation. Les antithrombotiques et notamment les antiagrégeants ont
longtemps été associés à l’augmentation du risque hémorragique. Actuellement, les études montrent qu’ils
n’augmentent pas les complications hémorragiques mais diminuent la mortalité périopératoire tout en
augmentant la durée de vie de certains types de pontages (notamment prothétiques).
© 2001 Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Toute référence à cet article doit porter la mention : Racine SX et Samama CM. Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire. Encycl Méd Chir (Editions Scientifiques et Médicales Elsevier SAS, Paris, tous droits réservés),
Techniques chirurgicales – Chirurgie vasculaire, 43-022, 2001, 9 p.
43-022 Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire Techniques chirurgicales
Aspirine Activation
Plaquette activée plaquettaire Héparines
vWf et AVK
¶ Thiénopyridines (ticlopidine et clopidogrel) Les HBPM sont administrables en une ou deux injections
journalières. Outre les contre-indications liées au risque
Les thiénopyridines (ticlopidine [Ticlidt] et clopidogrel [Plavixt]) hémorragique de tout antithrombotique, l’insuffisance rénale contre-
inhibent l’agrégation plaquettaire induite par l’adénosine indique les HBPM pour une clairance de la créatinine inférieure à
diphosphate (ADP) mais aussi celle induite par le collagène et la 30 mL/min.
thrombine [28]. Chez les patients porteurs d’une artériopathie des
membres inférieurs, le clopidogrel développe une activité Elles peuvent être utilisées en mode préventif ou curatif dans le
antithrombotique supérieure à celle de l’aspirine [9]. Le clopidogrel cadre de la maladie thromboembolique veineuse et l’angor instable.
tend à présent à remplacer la ticlopidine dans la prévention de la Leur utilisation est mal définie dans le cadre de la chirurgie
thrombose des endoprothèses coronaires, en association avec vasculaire.
l’aspirine. Une seule injection par jour est nécessaire en mode préventif sans
contrôle de l’activité anti-Xa. En revanche, en mode curatif, le dosage
¶ Inhibiteurs des récepteurs glycoprotéiques IIb/IIIa de l’activité anti-Xa au pic de l’activité (4 heures) est recommandé.
(GP IIb/IIIa) Elle doit être comprise entre 0,5 et 1 UI-anti-Xa/mL pour obtenir
une anticoagulation efficace pour la majorité des molécules.
L’abciximab (Réoprot), le tirofiban (Agrastatt) et l’eptifibatide
(Integrilint) et ses dérivés, en se fixant aux récepteurs ¶ Antivitamines K
glycoprotéiques Gp IIb/IIIa des plaquettes, entrent en compétition
avec le fibrinogène et accessoirement le facteur von Willebrand [24]. Les AVK diminuent la synthèse des facteurs II, VII, IX, X et deux
Le blocage de ces sites empêche les plaquettes d’agréger. Ils n’ont inhibiteurs physiologiques que sont les protéines C et S, en
pas d’indication pour l’instant en chirurgie vasculaire, mais sont interférant avec l’activité du cofacteur de la vitamine K vis-à-vis de
utilisés dans l’angor instable réfractaire et dans le cadre d’une la gammacarboxylase hépatique. Les AVK nécessitent un délai
angioplastie coronaire en association avec l’aspirine et l’héparine [10]. d’action de quelques jours avant de développer une efficacité. Pour
cela, il ne sont jamais prescrits seuls en première intention mais
¶ Héparines toujours en relais d’une anticoagulation par héparine. La
surveillance du traitement repose sur la mesure de l’international
Les héparines sont classées en deux groupes : l’héparine non normalized ratio (INR) qui doit être compris le plus souvent entre 2
fractionnée (HNF) et les héparines de bas poids moléculaire et 3.
(HBPM). L’HNF agit par l’intermédiaire de l’antithrombine (AT).
Elle inhibe la thrombine (IIa) et dans la même proportion le facteur ¶ Thrombolytiques
Xa (rapport Xa/IIa égal à 1). Dans une moindre mesure, elle interagit
également avec les facteurs IXa, XIa et XIIa [44]. Les héparines de bas Les thrombolytiques ont pour fonction de lyser le caillot sanguin
poids moléculaire (HBPM) inhibent de manière prépondérante le récemment formé (moins de 2 semaines). Leur mode d’action
facteur Xa (rapport anti-Xa/anti-IIa entre 2 et 5 selon les molécules). commun est d’activer le système fibrinolytique physiologique en
Leur meilleure biodisponibilité par voie sous-cutanée rend compte transformant le plasminogène inactif en plasmine active, ceci
d’une efficacité et d’une tolérance supérieures à celles de l’HNF. entraînant une dégradation de la fibrine, aboutissant à une lyse du
L’HNF est administrable par voie intraveineuse à la dose de 300 à thrombus. Les trois principales molécules utilisées en chirurgie
500 UI/kg/j, après une dose de charge de 300 UI/kg afin d’obtenir vasculaire sont la streptokinase (SK) d’origine streptococcique et
une anticoagulation efficace. L’administration en continu doit faire immunogène pour l’homme, l’urokinase (UK) isolée à partir de
l’objet d’une surveillance par le temps de céphaline activée (TCA) l’urine humaine et l’altéplase (recombinant-tissue-type plasminogen
qui doit être supérieur ou égal au double du témoin. L’HNF calcique activator [rt-PA]) obtenue par génie génétique. Les doses
est injectable par voie sous-cutanée. De même efficacité que l’HNF administrées sont plus faibles que celles utilisées dans l’infarctus du
sodique, seule sa pharmacocinétique change. En effet, son pic myocarde pour la thrombolyse locorégionale artérielle.
d’efficacité est obtenu 40 minutes après l’injection sous-cutanée pour Pour la SK, il faut débuter par 250 000 UI en bolus puis
une durée moyenne de 6 heures. L’HNF sodique a son pic 100 000 UI/h pendant 24 heures. Pour l’UK, il faut débuter par
plasmatique dans les minutes qui suivent l’injection du bolus, mais 4 400 UI/kg en 10 minutes, puis relayer par une perfusion
sa demi-vie étant de 90 minutes, il est nécessaire de recourir à intraveineuse pendant 12 à 24 heures par 2 000 UI/kg/h. Dans le
l’injection intraveineuse continue si l’anticoagulation doit être cas d’une impossibilité à poursuivre le bolus local par une perfusion
maintenue. intraveineuse, il faut poursuivre par HNF à la dose de 500 UI/h,
2
Techniques chirurgicales Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire 43-022
Dipyridamole Identiques à celles de l’aspirine en ce qui concerne le risque hémorragique. Pour les fortes doses, fractionner les prises car vasodilatation brutale pos-
sible.
Clopidogrel Allergie, insuffisance hépatocellulaire sévère, lésion hémorragique évolutive, Ne pas utiliser dans les premiers jours d’un infarctus du myocarde, d’un
allaitement. angor instable, de la pose de stent, d’un pontage aortocoronarien et d’un
AVC ischémique de moins de 7 jours. Association à des médicaments anti-
thrombotiques et insuffisance rénale : prudence.
Ticlopidine Idem que pour l’aspirine. Arrêt 10 jours avant intervention chirurgicale, association antithrombotiques,
théophylline (surdose), pentoxifylline (hémorragie), phénitoïne (surdose).
Surveillance NFS (leucothrombopénie et PTT).
Anti-GP IIb/IIIa Allergie à la molécule ou à ses composés (exemple : la papaïne pour le Évaluation bénéfice-risque, administration simultanée d’aspirine et héparine,
Réoprot), lésion hémorragique, ATCD d’AVC hémorragique de moins de 2 surveillance en milieu de surveillance intensive.
ans, TC ou intrarachidien de moins de 2 mois, lésion cérébrale tumorale,
malformative ou anévrismale, HTA incontrôlée. Coagulopathie, thrombo-
pénie, vascularite, rétinopathie vasculaire, insuffisance hépatique ou rénale.
HNF/HBPM Absolue : allergie, thrombopénie, lésions tissulaires hémorragiques, coagulo- Risque hémorragique si association à d’autres antithrombotiques, corticothé-
pathie sauf CIVD non liée à l’héparine, endocardite infectieuse aiguë (sauf si rapie à forte dose ou supérieure à 10 jours (interaction médicamenteuse).
prothèse mécanique), postopératoire de neurochirurgie, AVC hémorragique.
Relative : association à d’autres antithrombotiques. HBPM : insuffisance
rénale avec clair créat < 30 mL/min.
AVK Absolue : allergie à la molécule ou à ses dérivés, lésion hémorragique, Si risque thrombotique, utiliser les AVK en relais avec une anticoagulation
neurochirurgie, chirurgie ophtalmologique, insuffisance hépatocellulaire ou efficace (héparine) du fait du temps de latence de l’efficacité des AVK.
rénale (clair créat < 20 mL/min), ulcère gastroduodénal récent ou évolutif,
varices œsophagiennes, HTA maligne (diastolique > 12 mmHg), AVC (sauf
embolie systémique).
Association miconazole, phénylbutazone et AINS pyrazolés, salicylés à forte
dose
ATCD : antécédent ; AVC : accident vasculaire cérébral ; TC : traumatisme crânien ; clair créat : clairance de la créatininémie ; IHC : insuffisance hépatocellulaire ; NFS : numération-formule sanguine ; PTT : purpura thrombotique
thrombopénique ; AVK : antivitamine K ; HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée ; AINS : anti-inflammatoire non stéroïdien ; CIVD : coagulation intravasculaire disséminée ; HTA : hypertension
artérielle.
Tableau II. – Modalités de surveillance des antithrombotiques et lieu de réalisation technique : au laboratoire ou au chevet du malade.
HNF (à dose curative) Temps de céphaline activée > 1,5 fois le témoin (+)
ACT : Hemochront, Actalyket, ACTIIt > 400 et < 600 secondes (+)
Thrombo-élastogramme (r+k) élevé, Am normale (+)
NFS car risque de thrombopénie
AVK : antivitamine K ; HBPM : héparine de bas poids moléculaire ; HNF : héparine non fractionnée ; NFS : numération-formule sanguine ; ACT : activated clotting time ; INR : international normalized ratio ; Am : amplitude maximale ;
(r + k) : temps de réaction + temps de coagulation.
4 heures après la thrombolyse, à condition que le fibrinogène soit perception du pouls, point de ponction, signes hémorragiques), la
supérieur à 1 g/L et le TCA inférieur à deux fois le témoin. Pour biologie (temps de prothrombine [TP], TCA, numération-formule
le rt-PA, il faut débuter par un bolus locorégional de 10 mg en sanguine [NFS], plaquettes, fibrinogène par 6 heures pendant
1 minute puis de 45 mg/h pendant 2 heures. Contrairement aux 24 heures) et éventuellement le doppler. La survenue d’un
précédentes molécules, l’HNF est démarrée à l’arrêt de l’altéplase syndrome hémorragique, d’un hématome au point de ponction
à la dose de 1 000 UI/h et adaptée en fonction du TCA. La ou un taux de fibrinogène inférieur à 1 g/L doivent faire arrêter la
fibrinolyse n’est arrêtée qu’après l’assurance de l’absence totale thrombolyse.
de thrombus, l’héparine en relais n’ayant pour but que
d’empêcher la formation de nouveaux thrombi. La surveillance Les principales indications, contre-indications et modes de
est réalisée par la clinique (chaleur et coloration cutanée, surveillance sont précisés dans les tableaux I et II.
3
43-022 Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire Techniques chirurgicales
Utilisation des antithrombotiques élevés avec les HBPM qu’avec l’HNF. Enfin Wilson et al [54], utilisant
les HBPM, ont comparé l’influence de l’anticoagulation en fonction
en fonction du type de chirurgie des sites d’injection, périphérique ou intra-aortique, et des moments
d’administration, avant ou après le clampage. Bien qu’aucun patient
Dans ce chapitre sont présentées les principales études sur n’ait développé de thrombose distale, les prélèvements sanguins ont
l’utilisation des antithrombotiques en fonction du type montré une activité anti-Xa basse en aval du clampage aortique si
d’intervention chirurgicale (tableau III). Pour chaque site opératoire l’administration est réalisée après le clampage. En revanche,
sont détaillées les pratiques thérapeutiques en fonction de la l’activité anti-Xa est plus élevée dans le groupe recevant l’héparine
classification de la conférence de consensus nord-américaine sur en intra-aortique avant le clampage par rapport au groupe recevant
l’utilisation des antithrombotiques en chirurgie vasculaire. Celle-ci a l’héparine en périphérie, aussi bien sur des prélèvements
classé, après une revue de la littérature, les recommandations systémiques qu’en aval du clampage.
thérapeutiques en trois catégories (tableau III) [26] suivant le niveau En postopératoire, l’aspirine est la molécule antiagrégeante la plus
avantage/inconvénient des agents antithrombotiques [29]. couramment utilisée. En effet, de nombreux facteurs facilitent la
formation du thrombus [8] : zone de turbulence du flux sanguin,
CHIRURGIE DE L’AORTE
absence d’endothélium d’où mise en contact du sous-endothélium
avec le sang entraînant une activation de l’hémostase. Les taux de
Le risque de thrombose après chirurgie de l’aorte est faible car le cisaillement élevés de la circulation artérielle donnent aux plaquettes
débit aortique très élevé rend difficile la fixation des composés un rôle prépondérant par rapport aux facteurs de la coagulation.
plaquettaires. Ceci n’est plus vrai pendant le clampage aortique, du Dans ce contexte, les antiagrégeants sont les molécules de choix.
fait de la stagnation du sang dans un cul-de-sac vasculaire, des
Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de
lésions traumatiques de l’endothélium vasculaire dues au clampage
chirurgie aortique :
et de l’ischémie locale. Toutes ces conditions favorisent la formation
locale d’un thrombus. La solution qu’apporte l’héparine au – l’aspirine administrée à la dose de 81 à 325 mg/j réduit l’incidence
phénomène de thrombose au moment du clampage de l’aorte n’est de l’infarctus du myocarde (A1) ;
peut-être que théorique. Thompson et al [50] , dans une étude – les AVK (associés ou non à l’aspirine) ne sont pas à utiliser au
multicentrique randomisée sur 284 patients, ne retrouvent pas de long cours (A1) ;
différences significatives entre le groupe recevant 5 000 UI d’HNF
avant le clampage et le groupe non anticoagulé en termes de – l’aspirine à la dose de 81 à 325 mg/j (associés ou non au
complications thrombotiques et hémorragiques périopératoires. En dipyridamole à la dose de 75 mg, trois fois par jour) est
revanche, le bénéfice de l’héparine apparaît vis-à-vis de l’infarctus recommandée dans les pontages artériels prothétiques ou pour tous
du myocarde avec une réduction de la morbidité (1,4 % versus les types de pontages fémoropoplités (B1) ;
5,7 %) et de la mortalité (2 % versus 8,5 %). – l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel
Dans la chirurgie de l’aorte, l’anticoagulant de référence est l’HNF. (B1) ;
Habituellement, l’administration par voie intraveineuse est basée sur – un pontage sur une artère d’un diamètre supérieur à 6 mm ne
un bolus avant le clampage, suivie d’un entretien en continu ou faite nécessite pas l’utilisation d’antithrombotiques en postopératoire
de bolus répétitifs, le but étant d’obtenir une anticoagulation efficace (C1). (L’association avec l’aspirine réduit la morbidité et mortalité
avec un TCA double de celui du témoin. L’obtention de ce niveau cardiovasculaires, cf première recommandation classée A1.)
d’anticoagulation nécessite un bolus initial de 100 à 150 UI/kg
d’HNF et de répéter théoriquement la dose de 50 UI/kg toutes les
45 minutes pendant toute la durée du clampage. CHIRURGIE VASCULAIRE ARTÉRIELLE PÉRIPHÉRIQUE
D’après Qhigley et al [ 4 3 ] , le monitorage de la coagulation
¶ Ischémie aiguë des membres inférieurs
peropératoire tel qu’il est pratiqué habituellement par une prise de
sang périphérique est inadapté. Dans une étude observant le temps La pathologie artérielle chronique représente certes la première
de coagulation activée (activated clotting time [ACT]) après injection cause d’ischémie artérielle aiguë, mais le traumatisme et l’occlusion
d’héparine dans une chirurgie de l’aorte, les auteurs montrent que aiguë vasculaire occupent également une place importante dans ce
le prélèvement sanguin réalisé en amont du clampage a un ACT domaine, avec une thérapeutique associée lourde car dépendante
plus long que celui prélevé en aval du clampage. Mais l’efficacité de des autres lésions liées au traumatisme ou aux tares viscérales
l’anticoagulation dépend du type de molécule utilisé et aussi du site (cardiaque, neurologique, thoracique...). En cas de traumatisme
d’injection. Kroneman et al [33], dans une étude comparative étudiant sévère, l’anticoagulation est contre-indiquée car s’associent souvent
les HBPM et les HNF au cours de pontages aortobifémoraux, ne une hémorragie, une coagulation intravasculaire disséminée et/ou
retrouvent pas de différences entre les deux groupes concernant la une fibrinolyse massive, avec un déficit qualitatif et quantitatif
perte sanguine ou le risque thrombotique. Cependant, l’avantage majeur en facteurs de la coagulation et de l’hémostase primaire. Le
revient aux HBPM (daltéparine) en ce qui concerne la traitement est orienté vers une chirurgie réparatrice en cas de
reproductibilité de la cinétique plasmatique. En effet, la section, lacération ou compression artérielle externe. Dans le cas
pharmacocinétique des HBPM dans le temps est beaucoup plus d’occlusion artérielle aiguë de type thromboembolique, le traitement
stable que celle de l’HNF. Ainsi, il semble que l’anticoagulation par consiste à réaliser une désobstruction vasculaire par sonde de
HNF dans la chirurgie de l’aorte est aléatoire en comparaison de Fogarty, ou mieux par thromboaspiration (moins traumatisante pour
l’utilisation des HBPM. Ceci est confirmé par l’étude de Melissari et l’endothélium vasculaire). Dans la situation d’un échec de la
al [38], dans laquelle le taux et la durée de l’activité anti-Xa sont plus désobstruction artérielle par sonde endovasculaire, l’utilisation de
Tableau III. – Niveaux de recommandations des études par la Société américaine de chirurgie vasculaire.
4
Techniques chirurgicales Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire 43-022
thrombolytiques in situ a démontré son efficacité sans augmentation antiagrégeants après l’intervention. L’association aspirine-
de la morbidité. Dotter et al [19], dans une étude multicentrique, dipyridamole n’apporte pas de bénéfice en termes de thrombose
montrent que l’injection de SK in situ en amont d’une obstruction entre le groupe traité et celui non traité.
artérielle a un succès de reperfusion significativement supérieur à L’aspirine et le dipyridamole augmentent-ils le risque
une injection intraveineuse systémique. L’étude multicentrique hémorragique ? Une étude multicentrique [36] portant sur les patients
STILE comparant les bénéfices de la chirurgie vasculaire versus ayant bénéficié d’un pontage veineux, fémoropoplité montre une
l’utilisation de thrombolytiques dans les ischémies aiguës de augmentation du nombre d’hématomes en regard de la cicatrice
membres, d’origine non embolique, montre que la revascularisation opératoire. Dans cette étude, le groupe traité par antiagrégeant a
chirurgicale est supérieure à la fibrinolyse lorsque les symptômes reçu plus de transfusions que dans le groupe contrôle. Ce résultat
ischémiques durent depuis plus de 15 jours [47]. Dans la situation où s’oppose à l’étude multicentrique randomisée de Becquemin et al [5]
ces symptômes datent de moins de 2 semaines, la fibrinolyse sur le même type de pontage sous dipyridamole seul. En effet, dans
enregistre un taux plus faible d’amputations. La fibrinolyse devrait
cette étude, il n’y a pas de différence dans les deux groupes en ce
être utilisée avant qu’une restructuration endothéliale ne se
qui concerne le risque hémorragique tout en obtenant moins de
développe.
thromboses par rapport au groupe témoin.
L’utilisation de l’héparine doit être associée, en même temps que le
Une analyse rétrospective sur 2 000 patients à partir de 11 études
geste chirurgical, en l’absence de thrombolyse ou après l’utilisation
randomisées montre que les traitements antiagrégeants diminuent
de la thrombolyse. En postopératoire et en l’absence de contre-
de manière significative (p < 0,0001) le risque de thrombose avec un
indication aux antithrombotiques, il faut utiliser les mêmes
recul de 19 mois [1].
thérapeutiques antithrombotiques et aux mêmes doses que pour la
chirurgie vasculaire programmée. Les héparines préviennent la formation de la thrombose artérielle
mais la dose, le site d’administration (voie systémique ou locale) et
¶ Chirurgie de reconstruction vasculaire périphérique le moment de l’administration par rapport au clampage dépendent
de l’habitude chirurgicale. L’agrégation plaquettaire induite par les
Les prothèses vasculaires artérielles synthétiques présentent un plus HNF n’est pas retrouvée avec les HBPM [4]. Cette donnée plaide
grand risque de thrombose que les pontages veineux [52]. Veith et théoriquement en faveur des HBPM en chirurgie vasculaire. L’étude
al [51] ont comparé, dans une étude randomisée multicentrique de Samama et al [45] montre, dans le groupe traité avec l’HNF, un
pendant 6 ans, les complications des pontages artériels en matériel risque de thrombose postopératoire plus élevé qu’avec les HBPM
synthétique (polytétrafluoroéthylène [PTFE]) par rapport à des lors des pontages artériels périphériques (HNF versus enoxaparine,
greffons veineux. Il en résulte, de manière significative, moins de 22 % versus 8 %, p = 0,009) avec un risque hémorragique plus faible
complications dans le groupe greffon veineux en termes de dans le groupe HBPM.
rethrombose (p < 0,001). Ce résultat est valable pour toutes les études
comparatives similaires [20, 37]. Les AVK sont des anticoagulants puissants (fig 1). Les résultats des
études sont contradictoires en termes de mortalité et morbidité, mais
L’hyperplasie intimale est une des complications principales il semble que le risque hémorragique imputable aux AVK soit plus
aboutissant à l’échec des pontages artériels. Il se crée une zone élevé, comparativement à celui induit par d’autres médicaments
thrombogène par les turbulences liées au mauvais écoulement antithrombotiques
[2, 17]
. Néanmoins, une étude portant sur 12 ans
sanguin et par la fragilité de l’endothélium pouvant laisser à nu le montre que le pontage artériel a une durée de vie supérieure dans
sous-endothélium. Ceci induit l’adhésion plaquettaire et active les le groupe traité par rapport à celui non traité [32].
facteurs de la coagulation. Bien que quelques études animales aient
montré une diminution de l’hyperplasie intimale sous traitement L’association de faibles doses d’antiagrégeants plaquettaires et
antiagrégeant, d’autres études expérimentales chez l’animal [7, 12] et d’AVK a pour but théorique d’augmenter l’efficacité de l’action
thérapeutiques chez l’homme [25] n’ont pas retrouvé de résultats antithrombotique tout en diminuant les risques hémorragiques. Une
semblables. étude multicentrique portant sur 458 patients recevant soit 325 mg/j
d’aspirine, soit l’association aspirine et AVK (pour obtenir un INR
La thrombogénicité de la surface du matériau employé rentre
entre 1,5 et 2,8), après un pontage fémorotibial, fémoropoplité ou
également en ligne de compte. En effet, la réendothélialisation est
fémoropédieux sur un suivi de 4 ans, ne montre pas de différence
plus rapide, plus complète et de meilleure qualité sur les greffons
en termes de complications hémorragiques entre les deux groupes.
veineux que sur les prothèses en Dacront ou en PTFE. Pumphrey et
En revanche, cette étude révèle que la prise médicamenteuse au long
al [42] ont montré que des plaquettes marquées à l’indium 111 étaient
cours des anticoagulants oraux est aléatoire car des contrôles d’INR
moins nombreuses sur la surface de greffons veineux que sur les
pontages en Dacront ou en PTFE. À l’inverse, l’association ont montré fréquemment un sous-dosage [30]. Pour s’assurer de la
dipyridamole-aspirine diminue cette fixation des plaquettes de viabilité d’un pontage, il faut tenir compte de la bonne compliance
manière plus importante dans le groupe prothèses que pour les au traitement antithrombotique du patient.
pontages en greffon veineux. Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de
Une troisième complication est liée au débit circulant dans le chirurgie vasculaire périphérique :
pontage. Pour des diamètres supérieurs à 6 mm, il n’y a pas – l’aspirine administrée à la dose de 81 à 325 mg/j réduit l’incidence
d’indication pour une thérapeutique antiagrégeante. Les occlusions de l’infarctus du myocarde (A1) ;
des pontages aorto-iliaques, fémoraux et des artères rénales sont
beaucoup moins fréquentes que celles des pontages distaux. En – les AVK (associés ou non à l’aspirine) ne sont pas à utiliser au
revanche, les pontages artériels offrant un débit inférieur à long cours (A1), sauf (classé B2) en cas de pontage distal associé à
200 mL/min ou les pontages croisant une zone de plicature un risque de thrombose ;
(exemple, le creux poplité) sont à haut risque de thrombose et – l’aspirine à la dose de 81 à 325 mg/j (associés ou non au
doivent bénéficier d’un traitement par antiagrégeant [26]. dipyridamole à la dose de 75 mg, trois fois par jour) est
Ce traitement doit être débuté le plus tôt possible avant recommandée dans les pontages artériels prothétiques ou pour tous
l’intervention chirurgicale. Clyne et al [13] montrent, dans une étude les types de pontages fémoropoplités (B1) ;
randomisée, qu’un traitement associant dipyridamole avant et
– l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel
pendant l’intervention, et aspirine-dipyridamole après le pontage,
(B1) ;
diminue de manière significative le risque de thrombose à
6 semaines pour les prothèses artérielles alors que, pour les greffons – en cas de thrombus ou d’embole artériel après une
veineux, la différence n’est pas significative. Kohler et al [31], dans thromboembolectomie, il faut utiliser l’héparine à dose efficace puis
une étude avec une méthodologie similaire, ont administré des faire un relais par les AVK (C1).
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43-022 Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire Techniques chirurgicales
6
Techniques chirurgicales Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire 43-022
18 mois après une angioplastie, que l’utilisation de 100 mg d’aspirine gynéco-obstrétricale et carcinologique abdominopelvienne, ainsi que
ne bloque que 60 % de l’activité plaquettaire, mais qu’aucun patient la chirurgie orthopédique, notamment de la hanche, présentent un
n’a développé de complication thrombotique [40]. risque élevé de thrombose veineuse. Cependant, la chirurgie de
Plus récemment a été développée l’utilisation des inhibiteurs des l’aorte représente un risque thromboembolique qui doit être
récepteurs plaquettaires GP IIb/IIIa, comme l’abciximab, considéré au minimum comme modéré (chirurgie abdominale et du
l’eptifibatide et le tirofiban, pour les interventions coronariennes bassin) nécessitant une prévention de la MTEV. En revanche, le
percutanées. Le but de ces molécules est de prévenir les risque lié au terrain classe le plus souvent le patient de chirurgie
complications cardiaques ischémiques au cours des angioplasties vasculaire en risque modéré ou élevé.
coronariennes, des athérectomies ou lors de la pose de stent. Les Le risque modéré est représenté par l’âge supérieur à 40 ans, la
anti-GP IIb/IIIa doivent être utilisés en association avec de l’aspirine présence de varices, une contraception œstroprogestative, une
et de l’HNF. Cependant, aucune étude n’a été publiée sur leur insuffisance cardiaque, un alitement périopératoire supérieur à
utilisation en chirurgie vasculaire non cardiaque. On peut se 4 jours, une infection, le post-partum et l’obésité.
demander si le risque hémorragique ne peut pas l’emporter en Le risque élevé lié au terrain est surtout associé à une pathologie
utilisant à la fois deux antiagrégeants plaquettaires (aspirine préexistante sévère (cancer évolutif, anomalies de certains facteurs
+ inhibiteur GP IIb/IIIa) et un anticoagulant (HNF) pour une de la coagulation comme les protéines C, S, AT III, la présence
intervention vasculaire sur les gros vaisseaux artériels. d’anticoagulants circulants, hémopathie, etc), mais surtout un
Le manque de résultats en recherche clinique montre bien la antécédent de MTEV.
difficulté du choix d’une molécule et de son dosage, mais surtout de Bien qu’aucune conférence de consensus ne précise les modalités de
l’utilité des antithrombotiques dans l’angioplastie non coronarienne prise en charge de la MTEV en chirurgie vasculaire, ce type de
qui semble pourtant indispensable par le risque thrombotique chirurgie est à risque modéré (sauf en cas de risque élevé lié au
qu’engendre le matériel vasculaire synthétique. terrain). La prévention de la MTEV débute par les moyens
Recommandations de la conférence de consensus nord-américaine de mécaniques. La déambulation précoce, la surélévation des membres
chirurgie de l’angioplastie percutanée transluminale : inférieurs, les bas de contention (sauf en cas de pontage artériel des
membres inférieurs), voire la mise en place d’une compression
– l’héparinisation doit être efficace pendant le clampage artériel intermittente plantaire ou du mollet représentent des techniques peu
(B1) ; coûteuses et ayant une réelle efficacité. L’autre versant thérapeutique
– l’aspirine associée à la ticlopidine sont recommandées pour les est l’utilisation de médicaments comme les HBPM, les AVK (surtout
angioplasties fémorales et artérielles périphériques (B2) ; aux États-Unis), le danaparoïde sodique (Orgarant) qui n’a une
AMM que pour la chirurgie orthopédique, carcinologique et les
– l’aspirine doit être administrée avant et après les angioplasties thrombopénies induites par l’héparine, les autres molécules comme
aortiques et iliaques (C1). l’hirudine, les pentasaccharides et le mélagatran sont en cours
d’évaluation.
Quoi qu’il en soit, les thérapeutiques antithrombotiques artérielles
Problèmes particuliers utilisées en postopératoires d’une chirurgie vasculaire sont utilisées
à dose curative (aspirine, HBPM, HNF, etc) avec une hémostase plus
proche du versant hémorragique que du versant thrombotique.
ANTITHROMBOTIQUES ET RISQUES
Néanmoins, au-delà de cette période postopératoire précoce, le
THROMBOEMBOLIQUES VEINEUX PÉRIOPÉRATOIRES
EN CHIRURGIE VASCULAIRE risque de MTEV est lié au terrain plus qu’à la chirurgie. Si à ce stade
aucune thérapeutique antithrombotique artérielle au long cours n’est
La maladie thromboembolique veineuse repose sur l’atteinte d’au envisagée (AVK, antiagrégeants, etc), le risque de MTEV devient
moins un des éléments suivants que sont une lésion de prépondérant pour la chirurgie vasculaire intéressant les membres
l’endothélium vasculaire (étirement ou compression veineuse), la inférieurs (tableau IV).
stase veineuse (alitement, plâtre, mauvais retour veineux
postchirurgie pelvienne ou des membres inférieurs, etc), et
l’hypercoagulabilité (activation des médiateurs de l’inflammation ANESTHÉSIE LOCORÉGIONALE
post-traumatique, infection, etc). Plusieurs types de risques sont à ET TRAITEMENTS ANTITHROMBOTIQUES
prendre en compte de manière indépendante, l’association de ces Il faut distinguer deux types d’ALR. Tout d’abord, il y a les ALR
différents facteurs augmentant le risque de maladie médullaires (péridurales et rachianesthésies). La survenue d’un
thromboembolique veineuse (MTEV). Le risque chirurgical ne hématome liée à une anesthésie médullaire est de l’ordre de
semble pas être majeur en chirurgie vasculaire. En effet, la 1/150 000 en l’absence de trouble de la coagulation. Cette incidence
conférence de consensus de l’Assistance publique-hôpitaux de augmente en présence d’antiagrégeant ou d’anticoagulant. Les
Paris [14] n’a pas retenu ce type de chirurgie. La chirurgie viscérale, conséquences d’un hématome dans cette région contre-indiquent
Tableau IV. – Prévention des maladies thromboemboliques veineuses (MTEV) en chirurgie vasculaire, en l’absence de traitement antithromboti-
que artériel associé.
Risque de MTEV faible (situation peu courante en chirurgie vasculaire) Déambulation précoce
Risque de MTEV modéré : âge > 40 ans, varices, contraception œstroprogestative, HBPM à dose modérée ± bas de contention (sauf pontage des membres inférieurs) +
insuffisance cardiaque décompensée, alitement périopératoire > 4 jours, infection, post- déambulation précoce
partum, obésité
Risque de MTEV élevé : cancer évolutif, anomalies de certains facteurs de la coagula- HBPM à dose élevée + bas de contention (sauf pontage des membres inférieurs) +
tion : les protéines C, S, AT III, anticoagulants circulants, hémopathie, antécédent de déambulation précoce
MTEV
Problèmes particuliers Les bas de contention ne sont pas à utiliser pour les pontages artériels des membres
inférieurs (surtout distaux) : risque de bas débit artériel ; idem pour la surélévation des
jambes
Si des thérapeutiques antithrombotiques artérielles (HNF, aspirine, etc) sont utilisées à
dose curative en postopératoire d’une chirurgie vasculaire, les médicaments anti-MTEV
ne doivent pas être surajoutés (risque hémorragique)
7
43-022 Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire Techniques chirurgicales
Pontage périphérique :
- greffon veineux Héparine pendant le clampage AVK inutiles (sauf pontage fémoropoplité)
- prothèse synthétique Héparine pendant le clampage AVK et/ou aspirine et/ou dipyridamole
AVK : antivitamine K.
formellement l’anesthésie médullaire en cas d’anomalie de Reste le cas particulier des blocs en regard du site opératoire
l’hémostase. L’aspirine doit être arrêtée 10 jours avant l’intervention, (exemple : le bloc cervical, cf supra), ceux-ci ne posent aucun
les AINS en moyenne 48 heures (si le patient ne doit pas arrêter son problème en termes d’hématome compressif, et le bloc cervical en
aspirine, un relais par flurbiprofène peut être envisagé que l’on particulier n’a jamais démontré de risque hémorragique supérieur
arrête 24 heures avant l’intervention), pour les HBPM, maintenir un par rapport à l’anesthésie générale.
délai de 24 heures entre la dernière injection et l’anesthésie, attendre
un délai de 4 heures après le retrait du cathéter de péridurale avant
de reprendre l’héparine. Pas d’ALR si un INR sous AVK est
supérieur à 2 ou dans les 24 heures d’une fibrinolyse, dans ces deux Conclusion
cas précis et en cas d’urgence chirurgicale ne permettant pas une
anesthésie générale, il faut apporter des facteurs de coagulation ou
du fibrinogène pour pouvoir effectuer une ALR médullaire. Globalement la chirurgie vasculaire peut se limiter à l’utilisation de
L’autre type d’ALR correspond aux blocs nerveux. Généralement, deux ou trois antithrombotiques pour les techniques chirurgicales les
les blocs très superficiels ne perforant pas les vaisseaux ne plus courantes (tableau V).
présentent pas de réel danger (dans l’hypothèse d’un hématome, L’héparine reste la molécule à utiliser dans la période périopératoire
celui-ci est rarement compressif). En ce qui concerne les blocs plus avec une préférence pour les HBPM plutôt que l’HNF. Dans le cas des
profonds qui traversent la masse musculaire (exemple : le bloc pontages prothétiques, l’aspirine prévient efficacement la thrombose.
sciatique), ceux-ci s’apparentent aux mêmes dangers que les Ceci n’est pas formellement démontré pour les greffons veineux. Dans
injections intramusculaires en ce qui concerne la survenue d’un tous les cas, l’aspirine utilisée en chirurgie vasculaire diminue le risque
hématome. Dans ce cas, les précautions concernant les d’accident vasculaire cérébral ischémique et les complications morbides
antithrombotiques doivent être identiques à celles concernant les et mortelles de l’infarctus du myocarde, sans que le risque
ALR médullaires. hémorragique soit plus élevé.
8
Techniques chirurgicales Médicaments antithrombotiques en chirurgie vasculaire 43-022
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