Impact Des Eaux Souterraines Sur Le Patrimoine Bâti
Impact Des Eaux Souterraines Sur Le Patrimoine Bâti
Impact Des Eaux Souterraines Sur Le Patrimoine Bâti
Olivier Fouché
Résumé
Dans les relations entre la ville et les eaux naturelles, l’attention des gestionnaires et des
scientifiques a été focalisée par l’impact de l’urbanisation sur les eaux de surface, en
particulier l’aggravation du pic de ruissellement et la détérioration de la qualité des cours
d’eau due au lessivage des surfaces urbaines et aux rejets. Cependant, l’urbanisation affecte
aussi la recharge des aquifères (terrains poreux et perméables, i.e. aptes à l’écoulement de
l’eau souterraine, au rôle de réserve naturelle d’eau douce), et ceci de deux façons : 1. en
changeant les chemins et les taux de recharge ; 2. en modifiant la qualité des eaux de
recharge.
Ainsi naissent des perturbations du niveau piézométrique et du régime d’écoulement
souterrain qui sont à la fois complexes et différées par rapport à leurs causes. En effet, les
constantes contrôlant la réponse hydraulique des aquifères sont les plus grandes parmi toutes
les composantes du cycle hydrologique : l’atteinte d’un nouvel équilibre peut prendre des
années. Les changements seulement passés en revue ici sont relatifs à l’état et à l’usage
antérieur du sol et sont difficiles à quantifier. Mais on décrira surtout leur effet boomerang :
le changement hydrogéologique impacte l’urbanisation elle-même et plus précisément la
stabilité et l’intégrité des structures et des installations. Parmi les structures affectées par la
remontée de nappe, on trouve les fondations et les espaces souterrains des bâtiments, les
chaussées, tunnels routiers et tranchées couvertes, les équipements d’assainissement comme
les collecteurs, stations de relevage, puisards, fosses sceptiques, etc. Le battement de nappe
engendre des sollicitations cycliques qui dégradent les structures souterraines et produisent
par exemple l’entrée d’eaux claires parasites dans les réseaux et l’inondation des parkings.
On doit désormais envisager la situation où la nappe (masse d’eau souterraine) principale
s’élève à tel point que si tous les pompages d’alimentation cessaient (réduction de la demande
en période de crise économique, qualité diminuée en dessous du tolérable), le niveau
piézométrique dépasserait le niveau antérieur au développement industriel. Tendant vers cette
situation extrême, on assiste déjà à une remontée générale de la nappe dans certains secteurs
urbanisés comme la Seine-Saint-Denis. C’est pourquoi une cartographie du risque remontée
de nappe est en train de se développer. Au-delà, la remontée de nappe aggrave les autres
risques naturels. Un haut niveau de nappe implique une grande sensibilité aux extrêmes
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20 Journées Scientifiques de l’Environnement – Environnement entre passé et futur : les risques à
l’épreuve des savoirs, 10-12 février 2009
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20 JSE – Environnement entre passé et futur : les risques à l’épreuve des savoirs
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climatiques, une pluviométrie très forte engendrant des inondations par crue de nappe,
inondations par en-dessous pouvant affecter des ouvrages souterrains dans un premier temps,
puis la surface urbaine. La sécheresse suivie du retour à une forte teneur en eau dans le sol
provoque l’aléa de retrait-gonflement dans les zones riches en argiles, aléa qui affecte
l’ensemble du patrimoine bâti. L’eau souterraine atteignant des niveaux géologiques
sensibles à la dissolution ou des cavités naturelles préexistantes provoque affaissements et
effondrements.
Les pathologies observées sur les ouvrages de génie civil incluent des désordres dans la
structure et des défauts dans le dispositif de protection de l’ouvrage à l’égard de l’eau
(étanchéité, drainage). Ces désordres réduisent de façon imprévue la durabilité des matériaux
et des structures et finalement la durée de vie de l’ouvrage. Ils apparaissent souvent dès la
période des travaux, mais parfois longtemps après la mise en service. Quand on cherche à les
expliquer a posteriori, on s’aperçoit que les désordres sont souvent liés à une mauvaise
exécution de l’ouvrage, parfois dus à un dimensionnement insuffisant, plus rarement à une
évolution du terrain ou des conditions d’exploitation qui sont en fait prévisibles en termes de
gestion. Pour faire face aux risques associés à la remontée de nappe, entretien et surveillance
des ouvrages sont les maîtres mots. Le développement de techniques d’auscultation des
ouvrages et de diagnostic, de procédures d’inspection, de recensement et d’évaluation des
réparations exigées, est une nécessité urgente dans l’objectif de la conservation du
patrimoine bâti.
Mots-Clés : nappe, recharge, risque, désordres, diagnostic.
1. Introduction
Le patrimoine bâti subit en sa partie émergée l’épreuve du temps au double sens de son âge et
des intempéries de l’atmosphère. Mais il est aussi victime, dans ses fondations en sous-sol,
des fluctuations d’humidité du terrain. Cette variabilité de la teneur en eau s’exprime à travers
deux aléas naturels qui affectent le bâti : la sécheresse et l’inondation par crue de nappe. Ces
deux aléas s’expriment dans le terrain ou à sa surface suite au fonctionnement naturel du cycle
de l’eau et sont en relation directe avec l’aléa climatique. Un aléa moins fréquent et moins
connu est la remontée tendancielle de nappe consécutive à la désindustrialisation. C’est cet
aléa d’origine anthropique, qui est une phase transitoire vers un nouvel équilibre, que nous
présentons à partir d’exemples en le différenciant de la crue de nappe.
Le cas type de la remontée de nappe est l’ennoyage des terrains miniers exploités en galeries
souterraines, consécutif à l’arrêt de l’activité. Il conduit par différents mécanismes à
l’accroissement des surfaces subissant l’inondation ou susceptibles d’être inondées dans des
zones souvent très peuplées. L’exemple moins connu que nous traitons ensuite est celui d’un
département qui avait une forte concentration industrielle avant de subir depuis une trentaine
d’années une reconversion vers les usages immobiliers, la Seine-Saint-Denis. On rappelle
ensuite sur un cas-type de projet de construction les dispositions prises vis-à-vis de l’aléa crue
de nappe associé à l’onde de crue dans la vallée de la Seine. Enfin, on envisage succinctement
la problématique des eaux parasites dans les réseaux d’assainissement.
Depuis la crue de nappe dans la vallée de la Somme en 2001, on s’attend à l’inondation… par
en-dessous. Le BRGM a alors entrepris une cartographie de vulnérabilité à cet aléa couvrant le
territoire national à l’échelle 1 / 100 000. Si les effets en surface sont les mêmes qu’une
inondation classique, la crue de nappe se manifeste d’abord par l’inondation des espaces
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La morphologie du secteur est marquée par la vallée encaissée de l’Orne qui se jette à contre-
pendage dans la vallée de la Moselle, entaillant ainsi le relief de cuesta caractéristique de l’Est
du Bassin de Paris. La partie basse de la ville est située en rive droite de l’Orne et occupe la
convexité d’une boucle de la rivière, donc la partie sud de la plaine alluviale du lit majeur. La
cote du terrain naturel dans la vallée descend de 178 m à 172 m d’amont en aval du site.
Les formations géologiques de couverture sont des remblais superficiels de 0,50 m à 3,50 m
d’épaisseur, des alluvions modernes argileuses de 0,50 m à 2,50 m d’épaisseur, et des
alluvions modernes grossières d’une épaisseur de 0,90 à 4,10 m inversement proportionnelle à
celle des alluvions argileuses. Le substratum géologique est constitué en amont par la base de
la formation ferrifère, et en aval par les grès sous-jacents à une cote comprise entre 165,20 m
et 167,20 m. La formation géologique ferrifère constitue le soubassement de la colline située
au sud : l’essentiel du gisement exploité se trouve donc, du point de vue topographique, au-
dessus de la vallée. L’eau qu’il contient exerce sa pression sur l’eau s’écoulant à la base de la
formation ferrifère qui alimente alors la nappe alluviale par percolation latérale et ascendante.
Ceci explique pourquoi l’ennoyage des galeries et du massif rocheux constituant la colline a
provoqué une élévation de la cote piézométrique de la nappe d’accompagnement de la rivière
et l’inondation des caves. L’inondation normale de la plaine en période de crue de l’Orne s’en
trouve aussi aggravée car l’exhaure minière induisait un rabattement de la nappe.
Afin de maîtriser de façon pérenne l’impact hydraulique de l’ennoyage des mines sur le bâti
de surface, les études ont montré la nécessité de créer un nouveau point de débordement du
réservoir minier et d’implanter un système de captage et d’évacuation gravitaire des eaux de
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mine vers l’Orne (figure 2). Les conditions hydrauliques d’abaissement du niveau d’eau dans
le réservoir minier sont :
• Le seuil de débordement actuel du bassin sud par la galerie de Moyeuvre située en rive
gauche est à la cote 172,43 m NGF, avec un débit d’exhaure minimum de 0,5 m3/s associé
à la cote piézométrique 172,72 m dans le réservoir minier, un débit d’exhaure maximum de
4,3 m3/s associé au niveau d’eau 173,51 m dans le réservoir, et un débit dépassant 7,0 m3/s
(cote 173,80 m) pour une crue de période de retour 5 ans.
• La cote de la crue centennale de l’Orne mesurée à Moyeuvre-Grande est à 174,04 m NGF ;
• Le nouveau seuil de débordement doit ramener le niveau d’eau dans le réservoir minier à
une cote inférieure à 170,50 m NGF, cote au-dessus de laquelle les caves les plus basses
commencent à être inondées ;
• Compte-tenu de la configuration du site, les eaux de mine captées par les ouvrages à créer
devront être acheminées et rejetées en aval dans l’Orne à une cote qui ne peut pas être
inférieure à 167,50 m NGF ;
• Les futurs ouvrages devront capter les eaux de mine à partir de travaux miniers abandonnés
mais encore accessibles et dont on est sûr qu’ils communiquent avec l’ensemble du
réservoir minier ;
• En période de crue de l’Orne, le réservoir minier doit être isolé de la rivière dès qu’elle
risque de refouler, par l’ouvrage d’évacuation, dans le réservoir dont le niveau d’eau se
retrouve au-dessous de l’Orne.
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Un code de calcul a permis de simuler les interactions du système complexe réservoir minier –
nappe alluviale – rivière et de prévoir avec une précision satisfaisante le débit et le niveau de
l’Orne au droit du seuil de débordement à dimensionner ainsi que le débit de débordement et
le niveau du réservoir minier, avec ou sans fermeture du futur ouvrage. L’hypothèse de
dimensionnement finalement retenue correspond à un ouvrage de capacité supérieure à
l’ouvrage actuel, avec un seuil fixé à la cote 169 m NGF, soit 3,43 m plus bas que le seuil
actuel, pour un débit maximum de 10 m3/s qui correspond à une lame d’eau de 1,45 m au-
dessus du seuil. En cas de fermeture de l’ouvrage, le réservoir minier stocke l’eau et son
niveau s’élève : la durée maximale de dépassement de la cote 170,50 m serait alors de 5
semaines d’après les simulations, le temps que l’ouvrage puisse être à nouveau ouvert et que
le réservoir minier se vidange dans l’Orne.
En vue d’identifier une galerie adéquate pour servir d’ouvrage d’évacuation, une campagne de
reconnaissance du réseau des galeries minières ennoyées a été conduite par un véhicule sous-
marin motorisé (Remote Operated Vehicule, ROV) porteur d’une caméra vidéo et de divers
instruments de navigation et de mesure.
Un modèle 3D de la structure géologique et du réseau des galeries de mine a été réalisé selon
un parallélépipède de 400 m de côté et de 80 m de hauteur au moyen des plans miniers, de la
banque de données du sous-sol du BRGM, du levé topographique détaillé du secteur et de
deux sondages carottés, avec une incertitude de 0,50 m sur le géoréférencement global. Il a
permis d’extraire, selon toutes les directions utiles, des coupes géologiques à l’échelle 1/500
ainsi qu’une visualisation en écorché oblique. Cela s’est avéré un excellent outil de
communication et d’explication vis-à-vis des donneurs d’ordre, de l’Administration, des élus
locaux et de la population concernée.
Les futurs ouvrages souterrains comprendront (figure 3) une galerie principale d’exhaure de
230 m de long et un branchement vers une descenderie de mine. Une des principales
difficultés qui sera rencontrée lors de la réalisation réside dans le fait que le radier est situé 5 à
6 m sous le niveau d’eau dans le réservoir minier, ce qui impose d’effectuer un rabattement de
nappe avant de pouvoir commencer les travaux : il s’agit de rien moins que de pomper à 8
m3/s pendant 1,5 mois en période d’étiage.
Quant au chenal de surface, il aura une longueur totale de 470 m et comportera :
• Le chenal au sens strict, en parois moulées dans la plaine alluviale, puis recouvert pour en
réduire l’impact visuel ;
• Un ouvrage amont équipé de deux vannes automatisées associées à un bâtiment de contrôle
afin de fermer l’ouvrage en cas de crue de l’Orne ;
• Un franchissement sous voie ferrée de 44 m de longueur creusé au tunnelier à air comprimé
(diamètre 3,30 m) avec mise en place de voussoirs en béton préfabriqués clavés au terrain
par coulis de mortier, réalisé sans interruption du trafic ferroviaire...
Les travaux préparatoires ont débuté en juin 2001 et la durée des travaux a été de 24 mois. Le
coût total de l’ensemble des études et des travaux était évalué à 15 millions d’euros.
Cet exemple résumé d’après Wojtkowiak et al. (2002) montre l’importance de l’aléa remontée
de nappe consécutif à la cessation d’une activité industrielle. Il pourrait servir d’avertissement
pour mettre en place à l’avance dans chaque situation particulière un dispositif de remédiation
adapté au risque, sans attendre de constater les désordres pour mobiliser des moyens qui sont
alors forcément disproportionnés.
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C
Figure 3 : Ouvrages de surface pour l’évacuation des eaux de mine dans la
rivière Orne – A. Coupe de la nouvelle galerie d’exhaure ; B. Section-type du
chenal d’évacuation des eaux ; C. Coupe de l’ouvrage sous voie ferrée.
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L’hydrogéologie de la Seine-Saint-Denis est marquée par la présence d’une nappe perchée sur
les plateaux et les buttes-témoins qui circule dans le Travertin de Brie, alimentée uniquement
par la pluviométrie, et par un aquifère multicouche régional dans la Plaine de France, le Pays
de France et la Vallée de la Marne. Cet aquifère est libre (figure 4) dans les Alluvions et le
Marno-Calcaire, captif (figure 4) dans la partie inférieure des Sables de Beauchamp et les
Marnes et Caillasses en raison de la présence d’un niveau d’argile sableuse situé dans la partie
médiane des Sables de Beauchamp. Un autre aquifère captif circule en profondeur dans les
Sables de l’Yprésien, très épais dans le Département en raison de la structure « en cuvette » du
bassin (Diffre, 1969 ; Berger et Marquet, 1983).
La forte productivité de ces aquifères a favorisé l’exploitation de pompages par puits forés
surtout pour les besoins de l’Industrie. L’arrêt des pompages s’est traduit par une remontée
spectaculaire de la nappe dans le secteur de la Plaine-Saint-Denis et ses abords.
Une importante superficie du département ne peut être affectée à l’avenir que par des
phénomènes naturels (pluviométrie pour les plateaux et crue dans les vallées).
• Les plateaux et les buttes
Il s’agit du massif de l’Aulnaye, des plateaux de Montreuil et de Noisy-le-Grand. A ce jour,
nous n’avons pas de données précises sur les variations du niveau statique de la nappe qui
circule dans le Travertin-de-Brie, excepté dans le secteur de Montreuil dit des « Murs à
Pêches ». Par rapport à la seule cartographie qui a pu être établie, une élévation de l’ordre de 2
m est envisageable à l’avenir.
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• La vallée de la Marne
Dans ce secteur, situé au sud du département, ce sont surtout les crues de la rivière qui agiront
sur le niveau de la nappe alluviale. L’événement - bref - de l’onde de crue n’a pu être
enregistré que sur le site de la Pointe de Gournay (Neuilly-sur-Marne).
• La Plaine de France
C’est le secteur sur lequel les données sont les plus abondantes et pour lequel il existe des
données de référence historique : la carte hydrologique de M. Delesse. Cette carte a été établie
en 1862 sur le département de la Seine, à la demande du Baron Haussmann, alors Préfet de ce
département. Elle a été réalisée à l’aide de relevés effectués dans des puits maraîchers, très
nombreux à cette époque.
Nous avons établi une carte d’iso-différence du niveau statique de la nappe phréatique entre
les données de 1862 et les données de 2006 (équidistance des courbes : 2 m). Si l’on considère
que le niveau d’eau de Delesse correspond au niveau maximal que la nappe phréatique puisse
atteindre, les valeurs indiquées sur la carte seront négatives dans le cas où le niveau actuel est
inférieur à celui de 1862 ou positif dans le cas contraire (Fouché et Hirschauer, 2007).
Pour quelques rares secteurs, le niveau actuel est supérieur à celui de 1862 :
• la zone proche de la Seine : ceci s’explique par le fait qu’en 1862, le niveau du fleuve était
plus bas qu’actuellement ;
• la commune de Blanc-Mesnil : aucune explication ne peut éclairer ce constat hormis que
cette commune est située à la limite de la carte de Delesse.
La zone est de La Courneuve et d’Aubervilliers et la zone située à l’est de ces communes (Le
Bourget, Drancy, Bobigny et Pantin) se trouvent à l’intérieur de la courbe –4 m, avec des îlots
à –6 m. Ce phénomène de dépression parait lié à la présence d’importants pompages à
Bobigny et surtout à Romainville (puits situés aux limites de Pantin).
Sur les versants de la Butte Pinson (Villetaneuse, Pierrefitte, Stains, Epinay), des courbes à -4
m et –6 m sont à signaler. Hors, il n’y a jamais eu de pompages intensifs sur ces dernières
communes. Le gradient hydraulique de la carte Delesse étant très élevé (m/km), nettement
supérieur à celui observé dans la Plaine de France, nous pensons que la carte Delesse intéresse
en réalité dans ce secteur la nappe qui s’écoule dans les Masses et Marnes de Gypse sur les
marnes. A l’occasion de plusieurs études effectuées dans cette zone, nous avons pu constater
une nette différence de niveau statique entre la nappe phréatique et celle du Marno-Calcaire de
Saint-Ouen cartographiée sur le reste du document. En conséquence nous pensons que ce
secteur n’est pas soumis à un risque particulier de remontée de nappe.
Les secteurs dans lesquels les pompages AEP sont les plus développés, situés en dehors du
département de la Seine n’avaient pas été cartographiés par Delesse. Cependant, nous y avons
effectué de nombreuses études dès l’origine du LREP et sans effectuer une étude exhaustive
des données, nous pouvons indiquer que le niveau de la nappe phréatique a peu évolué depuis
une trentaine d’années si l’on excepte les fluctuations naturelles liées aux pluviométries
extrêmes. Il est possible d’expliquer ce phénomène par le fait qu’une grande rigueur est
employée dans l’équipement des puits. Il est en effet essentiel, pour les exploitants, de bien
séparer les eaux qui circulent dans les Sables de l’Yprésien des eaux souterraines de qualité
moyenne voire médiocre de la nappe phréatique. Les pompages d’AEP, pérennes, sauf
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accidents pouvant affecter la nappe de l’Yprésien, semblent donc n’avoir aucune incidence sur
la nappe phréatique.
3.3 Conclusions
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La plupart des désordres de tranchées couvertes sont liés à une mauvaise exécution de
l’ouvrage et apparaissent le plus souvent en phase de travaux. Mais certains apparaissent plus
longtemps après la mise en service : ils sont dus à une erreur de dimensionnement, ou au
vieillissement des matériaux, ou encore à une évolution du terrain ou des conditions
d’exploitation de l’ouvrage. Enfin, certains sont liés à la conception elle-même.
Désordres structuraux, désordres liés à l’étanchéité et au drainage
• Déviation entre panneaux causée par une mauvaise implantation ou un mauvais guidage ;
• Armatures apparentes dans le cas où l’enrobage est insuffisant ou par altération du béton ;
• Fissures et fractures dues au sous-dimensionnement, au retrait du béton ou aux efforts plus
importants que prévu ;
• Ségrégation du béton ; inclusion de matériaux pollués.
• Absence, disfonctionnement ou altération du système de drainage interne (colmatage des
drains, dégradation…) causée par une mauvaise conception, un défaut d’entretien, ou la
nature chimique des eaux drainées ;
• Percolation d’eau au niveau des joints entre les panneaux (défauts d’étanchéité) ou des
fissures ;
• Stagnation des eaux causée par l’absence ou un défaut du dispositif de collecte des eaux.
Exemples
Pendant les années 1990, des arrivées d’eau se produisirent dans une trémie routière à Lille.
La structure de l’ouvrage consistait en un cuvelage construit entre palplanches utilisées pour
le soutènement provisoire. La nappe étant haute, la stabilité du radier avait été assurée par des
micropieux mais ceux-ci furent réalisés après le radier par forages à travers des espaces
réservés dans le radier (figure 8), puis replissage au-dessus des micropieux par un mortier. La
structure de chaussée au-dessus du radier était plutôt mince (10 à 15 cm). Les investigations
menées ont conclu que l’entrée d’eau se faisait par les réservations des micropieux. Il
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s’agissait donc d’une erreur de conception de l’ouvrage dans sa relation à la nappe dont les
effets avaient toute chance de se multiplier à l’avenir. Des travaux de modification ont donc
été réalisés.
Figure 7 : Coupe schématique d’une fouille avec rabattement de nappe dans les
formations géologiques de Paris. (Schéma prêté par le Burgéap).
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B
Figure 8 : A. Coupe schématique de l’ouvrage en trémie de Lille ; B. Schéma
général du radier ancré par des tirants d’ancrage ou clous.
En 2005 ont été constatées pendant plusieurs mois des venues d’eau sur la chaussée de
l’échangeur A86 / A14 au PM 2050, à une distance de 2 m du piédroit central. Le débit
observé était faible (environ 1 m3/h) et l’eau s’écoulait sur la chaussée pour rejoindre le réseau
d’assainissement situé le long du piédroit nord. Mais l’enrobé de la chaussée commençait à
s’arracher (sur une longueur de 0,20 m au moment du diagnostic) et une fissure peu apparente
prolongeait le décollement sur une longueur inférieure à 1 m. Le détail de la coupe du PM
2050 (figure 9) indiquait la présence d’un écran d’étanchéité transversal de 0,50 m d’épaisseur
en ciment bentonite, défini comme écran souple. Par-dessus, une poutre en béton puis le
radier, avec interposition d’un joint Water-Stop. Le défaut d’étanchéité provenait de ce joint
ou de la liaison écran souple / radier. Les investigations comportant des forages verticaux dans
la chaussée confirmèrent les arrivées d’eau sous pression. Puis une campagne au géoradar
montra qu’il n’existait pas de vide sous la chaussée. Enfin, l’ouverture d’une fouille à la
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jonction semelle / radier confirma l’entrée de l’eau au niveau d’une plaque de polystyrène
interposée entre le radier et la semelle : c’est donc une dégradation précoce et imprévisible du
dispositif d’étanchéité qui était responsable, dont il est difficile de dire si elle est due à un
défaut ponctuel d’exécution ou à une négligence dans la conception.
Parmi les pathologies, il citera enfin un problème qui peut rester très discret pendant une
période longue d’exploitation, le colmatage des drains d’une chaussée drainante comme par
exemple l’A86 à Bobigny (figure 10). Quelques mois après leur mise en fonctionnement,
certains drains proches de la station de relèvement « Préfecture » ont vu le dépôt d’épaisseurs
centimétriques de calcite sur les parois des regards et les échelons d’accès (figure 11).
L’origine du colmatage est à rechercher dans la nature chimique de l’eau : dans l’exemple, on
a trouvé une eau sulfatée et bicarbonatée calcique de dureté totale très élevée TH = 114°F
(titre hydrotimétrique en degré Français) alors que les eaux de la nappe du calcaire de Saint-
Ouen ont une dureté moyenne TH = 60°F. Dans ce cas, cette dureté anormalement élevée était
due aux sulfates. Le point représentatif de cette eau dans un diagramme CO2 total = f (Ca2+) se
situe au-dessous des courbes d’équilibre y compris pour une température de 11°C
(température ambiante de l’eau de la nappe). C’est pourquoi cette eau est nettement calcifiante
et pourrait à long terme (rien n’a été fait pour y remédier depuis le constat il y a dix ans)
provoquer l’obturation par entartrage du dispositif de drainage. Par ailleurs, ce phénomène
s’accentue en période d’augmentation de la température et quand la pression exercée sur le
fluide diminue.
Il s’agit donc ici d’une altération lente et prévisible du système de drainage interne de
l’ouvrage, dont les effets n’ont pas encore été considérés comme assez graves pour mériter
une intervention qui sera lourde car elle touchera à la structure même de la chaussée.
Conclusion
Il ne suffit pas que l’ouvrage soit bien construit, il faut que chaque élément constituant
l’ouvrage soit entretenu. Cet entretien de l’ouvrage ne passe pas seulement par l’entretien
courant (désherbage, curage des caniveaux…) mais aussi par une inspection périodique de
l’ouvrage (partie génie civil et équipement). Ces inspections peuvent prévenir l’apparition de
certaines pathologies qui diminuent la durée de vie de l’ouvrage. Malgré l’essor important
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connu par les tranchées couvertes dans les 30 dernières années en zone urbaine, elles restent
marginales (exemple : la tranchée sous-fluviale de Nogent-sur-Marne inspectée en 2005) par
rapport aux tunnels. Actuellement, il n’existe pas de recommandations pour l’inspection de
ces ouvrages et la plupart des procédés d’étanchéité ne sont développés et normalisés que pour
les tunnels. Une opération IQOA lancée par la Direction Générale des Routes depuis les
années 1990 a pour but de produire des recommandations pour l’inspection, la surveillance et
la réparation des ponts, des murs, des tunnels, et des tranchées couvertes routières.
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4.2 Exemple de projet de tranchée couverte avec chaussée drainante sous nappe
On présente ici le cas des tranchées couvertes de Bobigny, avec trois ouvrages au niveau de la
Préfecture, du carrefour des Six Routes et du site Repiquet, qui ont été réalisées en chaussée
drainante. L’objectif de l’étude était d’estimer le débit par différentes méthodes pour des
conceptions différentes de l’ouvrage.
Dispositions constructives pour protéger l’ouvrage de l’impact de la nappe
En phase de construction (figure 12), la stabilité du fond de fouille vis-à-vis de l’effet renard
sous forte pression hydrostatique est assurée à la fois par le dimensionnement de la fiche du
soutènement et par un bouchon étanche sous le fond de fouille pour limiter le débit à drainer à
une valeur très faible. Deux techniques sont utilisées selon la profondeur d’intervention :
• On terrasse sous l’eau, entre les rideaux de soutènement, jusqu’à une profondeur en-
dessous du fond de fouille projeté, puis on comble cet espace en coulant sous l’eau un
béton qui constituera après prise un bouchon étanche assurant par son poids la stabilité à la
sous-pression : 1 m d’épaisseur de béton équilibre la pression de 2 m d’eau et la technique
n’est pas utilisée au-delà de 2 m d’épaisseur ;
• Pour une épaisseur supérieure, la relève est prise par le radier injecté (figure 13) qui évite
d’approfondir le fond de fouille et qui peut atteindre jusqu’à 5 m d’épaisseur : cela
implique déjà une profondeur importante de la fiche de soutènement pour encager le béton
injecté et un volume d’injection très important, d’où la limite en épaisseur.
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Lorsque la profondeur du fond de fouille est encore plus grande, ainsi que son dénivelé avec
le niveau piézométrique de la nappe, on doit avoir recourt à l’ancrage du soutènement dans un
substratum très peu perméable comme à Lyon par exemple, le granite ou la molasse. Toutes
ces dispositions constituent un barrage complet à l’écoulement de la nappe.
Contexte hydrogéologique
La succession stratigraphique est représentée sur une coupe géologique (figure 14) faite
d’après les reconnaissances de terrain, qui donne l’épaisseur de chaque formation géologique,
son faciès, ainsi que le niveau piézométrique de la nappe. Sur le tracé, deux aquifères
principaux sont présents :
• Le Marno-calcaire de Saint-Ouen constitue le premier aquifère continu et assez puissant et
correspond à la nappe phréatique dite générale dans la Plaine de France, et est le seul à
intéresser ici les tranchées couvertes ;
• Les Marnes et Caillasses forment un aquifère qui est en charge (captif) et dont le mur est
constitué : soit par les premiers mètres de cette formation qui sont à faciès marneux, soit
par l’écran argileux médian de la formation des Sables de Beauchamp.
Le tracé routier présente une orientation sensiblement parallèle au sens général d’écoulement
de la nappe, SW-NE. Les essais de perméabilité de type Lefranc ont fourni les valeurs
suivantes : pour la tranche supérieure du Marno-calcaire de Saint-Ouen, à faciès dominant
marneux, K = 10-7 à 10-5 m/s, et pour la tranche inférieure, plus calcaire, K = 10-5 à 10-4 m/s.
Sur ce tracé, une évolution en remontée de la nappe a été observée, due en grande partie à
l’arrêt progressif des pompages industriels depuis une trentaine d’années. C’est pourquoi on a
considéré comme niveau maximal actuel de la nappe dans les calculs un niveau proche du
niveau maximal historique pré-industriel, celui de la carte hydrogéologique établie en 1862
par Delesse. On a supposé que ce niveau maximal n’est pas encore atteint et qu’on est environ
1,5 m en-dessous. Par ailleurs, des fluctuations importantes ont été enregistrées, notamment
entre avril 1994, début des travaux, et avril 1995 où la nappe est remontée par endroits de 2 m
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sans que l’on sache exactement pourquoi et quelle part y ont pris les travaux en cours. Depuis
cette date et jusqu’à 2001, pic climatique, la nappe a poursuivi sa remontée progressive et a
gagné encore 2 m.
Contexte géotechnique
La synthèse géotechnique des reconnaissances a conduit à un découpage du tracé de
l’autoroute A86 en 4 zones se distinguant par l’avancée de la dissolution des niveaux gypseux
présents à l’origine dans les formations géologiques des Marnes et Caillasses, du calcaire de
Ducy, du Marno-calcaire de Saint-Ouen et de la quatrième masse du gypse Ludien et des
marnes infragypseuses.
• Zone I. Cette zone est caractérisée par l’absence de gypse dans le Marno-calcaire de Saint-
Ouen et le Ducy ; cette disparition totale du gypse a généré un léger affaissement des
couches géologiques compensé au niveau du terrain naturel par des dépôts alluviaux ;
• Zone II. Dans le Marno-calcaire de Saint-Ouen et le Ducy, un lessivage des bancs gypseux
a engendré une disparition presque totale du gypse ; mais des anomalies ponctuelles (zones
décomprimées ou cavités remblayées) ont été mises en évidence dans les Marnes et
Caillasses ;
• Zone III. Cette zone correspond à un risque plus élevé associé à la dissolution du gypse ;
elle se distingue en effet de la zone II par la persistance de niveaux gypseux dans le Marno-
calcaire de Saint-Ouen et le Ducy ; de plus, elle est influencée par la rupture d’anciennes
cavités dans la partie supérieure des Marnes et Caillasses (et aussi dans les Sables de
Beauchamp) et par une réduction d’épaisseur de cette formation par disparition du gypse ;
• Zone IV. Cette zone est caractérisée par l’absence totale de gypse dans le Marno-calcaire
de Saint-Ouen et le Ducy, mais des Marnes et Caillasses présentant dans leur partie
supérieure des cavités franches ou des zones décomprimées (mais pas dans les Sables de
Beauchamp).
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reste de la surface, avec 8 couches de terrain superposées, caractérisées par leurs valeurs de
perméabilité verticale et horizontale.
Les conditions aux limites de potentiel dépendent du niveau de la nappe et on a envisagé trois
variantes (tableau 1) :
Tableau 1: Cote atteinte par la Seine lors de trois crues historiques.
La tranchée est modélisée par des parois en béton d’épaisseur 0,80 m et de perméabilité 10-8
m/s pour les parois moulées, les parois préfabriquées et les parois au coulis. Quant aux parois
injectées de largeur 4 m, on leur donne une perméabilité de 5.10-6 m/s. La cote d’arrêt des
parois est adaptée selon deux cas :
• Cas 1 : parois moulées ou préfabriquées dans le Saint-Ouen supérieur (figure 15).
• Cas 2 : parois moulées ou préfabriquées dans le Saint-Ouen supérieur prolongées dans les
sables fins (figure 16) par des parois au coulis (tranchée de la Préfecture) ou des jambes de
pantalon et des écrans injectés (ouvrage de Repiquet).
Tableau 2: Cote atteinte par la Seine lors de trois crues historiques.
Le tableau 2 confirme l’idée que l’on pouvait se faire sur l’influence des divers facteurs : le
débit diminue selon la variante du modèle en raison des différentes épaisseurs de nappes
prises en compte. De plus, le débit drainé diminue quand la profondeur des parois augmente.
Le décalage des isopièzes par rapport à l’état initial (figure 17) dans le cas des parois courtes
s’explique par l’effet du drainage des eaux dans la tranchée.
Dans le cas des parois longues, on observe deux types de décalage (figure 17) :
• Décalage à l’état final entre les isopièzes à l’amont et à l’aval de la tranchée, qui met en
évidence l’effet barrage créé par la « boite » (figures 18 et 19).
• Décalage entre l’état initial et l’étét final : abaissement du niveau en un point donné qui
peut s’expliquer par le drainage dû à la tranchée.
On remarque que dans les parois longues, l’effet de drainage (abaissement de la nappe) est
moins important que pour les parois courtes (0,50 m au lieu de 1 m environ), ce qui est
cohérent avec les débits calculés. Cette interprétation est valable pour les variantes 2 et 3.
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Figure 18 : Effet d’une paroi moulée sur l’écoulement de la nappe, plan / coupe.
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Un obstacle est resté devant l’interprétation de cette modélisation : il existe trois stations de
pompage, une à Repiquet, une à Six-Routes, et la dernière à Préfecture. Ces stations sont
dotées de plusieurs pompes d’une capacité de 320 l/s. Les eaux pompées sont un mélange
entre des eaux de nappes et des eaux de pluie. Mais nous n’avons pas pu obtenir le débit réel
pompé dans la nappe. En effet, d’après le gestionnaire du système de pompage, celui-ci a été
largement surdimensionné et il n’a pas été jugé nécessaire de mesurer le débit.
Figure 19 : Effet barrage créé par la paroi amont d’une tranchée couverte.
Considérons un projet type en zone résidentielle : un bâtiment R+7 dont l’emprise au sol
couvre les 625 m2 de la parcelle, avec deux niveaux de sous-sols. Le niveau du sous-sol
inférieur se situe à environ 5 m de profondeur par rapport au terrain dit naturel (TN) qui
présente une surface plane et horizontale. La parcelle est actuellement occupée par une cour
intérieure entourée de bâtiments d’activités, d’habitations ou de garages en rez-de-chaussée ou
R+1 sans sous-sol.
Le site se trouve sur la commune de Boulogne-Billancourt, dans la plaine alluviale de la
Seine. Selon les études disponibles à proximité du site et d’après la carte géologique au
1/50 000 (figure 20), les terrains intéressés par le projet sont représentés par les formations
géologiques suivantes :
• Remblais : terre végétale, sables, matériaux de démolition et autres matériaux liés aux
aménagements antérieurs ;
• Alluvions modernes : dépôts limoneux, argileux et sableux, avec des niveaux tourbeux ;
Kh = 10-5 m/s et Kv = 5.10-7 m/s ;
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• Alluvions anciennes : sables plus ou moins grossiers et graves, avec rognons de silex,
galets de calcaire et craie, qui occupent la basse terrasse ; Kh = 3.10-3 m/s, Kv = 10-4 m/s ;
• Marnes de Meudon : marnes calcareuses grisâtres, sans fossiles ;
• Craie à silex : calcaire blanc et tendre stratifié de lits de silex noirs.
Les eaux de la tranche supérieure de la craie, en équilibre avec celle des alluvions, constituent
une nappe à Kh = Kv = 10-3 m/s qui se maintient légèrement plus haut que le niveau de la
Seine, soit en période normale vers 27 m NGF. La nappe est en relation plus ou moins directe
avec la Seine. Les niveaux d’eau observés peuvent donc s’élever ou s’abaisser selon le
battement saisonnier qui est lié à l’alimentation directe de la nappe par les eaux météoriques,
et selon l’amortissement des ondes de crue de la Seine dans l’aquifère (figure 21).
Selon les données du Service de la Navigation, les niveaux des crues de la Seine ont atteint les
cotes indiquées dans le tableau 1 au Pont de Billancourt, distant d’environ 500 m du site. La
retenue normale de la Seine au droit de ce pont est de 26,39 m NGF.
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Le raccord au réseau d’assainissement des pompages permanents installés pour dénoyer les
ensembles immobiliers représente un apport important aux stations d’épuration. La méthode
alternative à développer est la réinjection des eaux d’exhaure sur le pourtour des fondations
(figure 23) des immeubles nouvellement construits, comme cela a été mis en œuvre sur le
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projet Mozart (tour de 23 étages) qui est venu achever la rénovation complète sur 20 ans de la
plaine d’Issy-les-Moulineaux, initialement industrielle, aujourd’hui à usage tertiaire ou
d’habitation.
L’aquifère d’alluvions sur craie y est très productif (transmissivité de l’ordre de 5.10-2 m2/s).
Les trois niveaux de sous-sols de la tour EDF construite sur ce site en 1971, dont le radier
inférieur est actuellement noyé sous 3 m de nappe, seront conservés dans la nouvelle tour
Mozart. La construction s’était déroulée en 1971 sous un pompage de 5000 m3/h, ce qui peut
expliquer pourquoi les alluvions sont particulièrement crues (pauvres en fines) d’après les
sondages actuels.
En revanche, en 2007 a été faite une enceinte périmétrique aux trois niveaux de sous-sols
existants, au moyen de techniques diverses (là où c’est possible, paroi au coulis non armé dite
molle, sinon colonnes de jet grouting prolongées par des lignes d’injection profondes),
enceinte ancrée à 25 m de profondeur (-10 m NGF) sous les alluvions anciennes, dans une
couche de craie beaucoup moins perméable que la craie fissurée sus-jacente (Monnier, 2007).
Cela a permis de limiter le débit global de pompage résiduel à 107 m3/h pour le rabattement
contractuel (6,55 m) en situation de nappe basse, ou 146 m3/h pour le rabattement (8,95 m) en
nappe haute (crue quinquennale, dite « crue chantier »), soit environ la moitié de ce qui avait
été calculé au moyen d’un modèle FeFlow sur la foi d’essais au micromoulinet et d’une
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Un réseau endommagé peut subir l’entrée intempestive d’eaux claires parasites permanentes
qui aggravent la dégradation des joints et contribuent à l’usure voire à une érosion des
ouvrages.
L'essentiel de ces ECPP sont vraisemblablement des eaux de pluie ou de fuites d'AEP
infiltrées dans le sol puis drainées par le massif de sable et gravier qui entoure les conduites
d'assainissement, ce qui leur permet d'entrer dans le réseau dès qu'elles y trouvent une faille.
Cela peut être aussi dans certains cas de l'eau de nappe lors du battement saisonnier ou d'une
remontée qui peut être exceptionnelle ou tendancielle. Une entrée d’eau (figure 24) a lieu dès
que la nappe remonte suffisamment pour noyer le réseau par en-dessous et mettre en charge sa
paroi extérieure, ou que le taux d’infiltration par le haut à travers le terrain sus-jacent est
localement élevé. De plus, l’entrée d’eau par une fissure ou un joint dans un réseau favorise
ensuite le développement racinaire des végétaux (figure 25) qui achève de déstructurer
l’ouvrage endommagé.
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On cherche à identifier les ECPP grâce à des mesures au cours du Schéma directeur
d’assainissement (SDA). On estime qu’en moyenne, 30 % des eaux qui parviennent aux
stations d’épuration sont des ECPP, ce qui implique un surcoût important lors du traitement.
Par ailleurs, le raccord au réseau des pompages permanents installés pour dénoyer les
ensembles immobiliers représente un apport important aux stations. Ces eaux d’exhaure sont
relativement saines et peuvent donc être considérées comme des ECPP. La méthode
alternative à développer est la réinjection des eaux d’exhaure (Bize et al., 1972) sur le
pourtour des fondations des immeubles nouvellement construits, comme cela a été mis en
œuvre sur le projet Mozart (tour de 23 étages).
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Le concept que nous appellerons « injection et infiltration dirigée » ne repose pas sur une
infiltration immédiate, mais sur la mise en œuvre d’un volume de rétention qui correspond à
une pluie de 36 mm. Il pourra s’agir de noues, de fossés, d’éléments circulaires en béton, etc.
Ce principe ne nécessite donc pas la présence d’une perméabilité importante mais demande
cependant la réalisation d’essais préalables.
L’étude (Fouché et Hirschauer, 2007) s’est appuyée sur la carte géologique dressée par le
BRGM, affinée à l’aide des sondages issus de la base de données ACCESSGEO du LREP.
Cette carte, associée au faciès des couches a permis de définir les zones pour lesquelles un
ajout d’eau ponctuel peut engendrer des désordres à caractère géotechnique. Il s’agit :
• de tous les horizons gypseux pour lesquels un lessivage d’eau non saturée en sulfates peut
engendrer des cavités à court terme (quelques années) : les eaux pluviales sont exemptes de
sulfate et par conséquent, très agressives par rapport à ce minéral ; rappelons que le gypse
est soluble dans l’eau à raison de 2,2 g/l ; cette propriété est largement démontrée à
l’occasion de fuites de réseaux qui, dans le cas de conduite d’eau en particulier, génèrent
rapidement des cavités (échelle de temps : l’année).
• des versants qui, outre la présence de sols argileux instables car un accroissement de la
pression interstitielle dans les argiles augmente le risque de glissement et de résurgence
incontrôlée à l’aval, sont entaillés par des carrières de gypse à ciel ouvert et souterraines ;
• des carrières souterraines qui sous minent les plateaux, surtout le plateau d’Avron.
Nous avons séparé deux familles d’ouvrages d’infiltration dont le comportement sera de
nature physique différente. Par convention, ces deux familles sont :
• les ouvrages d’infiltration intéressent les terrains superficiels : puisards, noues, bassins
d’infiltration employés pour infiltrer les eaux dans des sols non saturés. Par sécurité, de tels
ouvrages devront être distants d’au moins 5 m des bâtiments (l’entraînement de particules
peut générer de faibles tassements ponctuels autour de l’ouvrage) ;
• les ouvrages d’injection : il s’agit de puits forés profonds descendus jusqu’aux sables de
Beauchamp dans la Plaine de France ou jusqu’au substratum dans la vallée de la Marne.
Ces ouvrages ponctuels dont la profondeur peut atteindre 10 à 20 m intéressent des
horizons très perméables situés sous la nappe et par définition des sols saturés dont
l’hydrodynamique est connue. Ces ouvrages sont utiles en cas d’emprise foncière limitée.
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Le zonage proposé ne tient pas compte de la présence de remblais dans lesquels l’infiltration
est déconseillée, ce qui signifie que l’infiltration ne peut être mise en œuvre qu’en-dessous de
ceux- ci. Quatre zones ont été délimitées :
a) Infiltration et injection proscrites ;
b) Infiltration superficielle proscrite mais injection autorisée par puits forés dans les
Alluvions Anciennes de la Marne et/ou dans le Marno-calcaire de Saint-Ouen ;
c) Infiltration autorisée dans les terrains superficiels et injection profonde proscrite ;
d) Infiltration superficielle et injection profonde autorisées dans le marno-calcaire de
Saint–Ouen et les Alluvions Anciennes de la Marne.
L’étude réalisée a permis d’évaluer la faisabilité géotechnique de l’injection et de l’infiltration
dirigée des eaux pluviales dans les sols sur l’ensemble du département de la Seine-Saint-
Denis. La cartographie proposée correspond à notre connaissance des sites qui peut
s’améliorer et au contexte réglementaire qui évoluera en fonction de l’édition des PPR
mouvements de terrain.
7. Conclusions
Les perturbations du régime d’écoulement souterrain en milieu urbain sont à la fois complexes
et différées par rapport à leurs causes. Les changements passés en revue ici sont relatifs à
l’état et à l’usage antérieur du sol. On a décrit leur effet boomerang : ils impactent la stabilité
et l’intégrité des installations urbaines. Parmi les structures affectées par la remontée
tendancielle de nappe ou par la crue de nappe, on trouve les fondations et les espaces
souterrains des bâtiments, les chaussées, tunnels routiers et tranchées couvertes, les
équipements d’assainissement comme les collecteurs, stations de relevage, puisards, fosses
sceptiques, etc. Le battement de nappe engendre des sollicitations cycliques qui dégradent les
structures souterraines et produisent l’entrée d’eaux claires parasites dans les réseaux et
l’inondation des parkings. On doit désormais envisager la situation où la nappe (masse d’eau
souterraine) principale s’élève à tel point que si tous les pompages d’alimentation cessaient
(réduction de la demande en période de crise économique, qualité diminuée en dessous du
tolérable), le niveau piézométrique dépasserait le niveau antérieur au développement
industriel. C’est pourquoi une cartographie du risque remontée de nappe est appelée à se
développer.
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Bibliographie
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http://www.ades.eaufrance.fr.
Banque des données du sous-sol (BSS). Informations brutes géologiques et techniques relatives à des
ouvrages souterrains déclarés par application du Code minier : http://infoterre.brgm.fr.
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avec une nappe souterraine. Bulletin du BRGM, 2-III-(3/4).
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