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7 journées de recherches en sciences sociales
INRA – SFER – CIRAD à Agrocampus Ouest
(Centre d’Angers), les 12 et 13 décembre 2013
MAGHNI Billal
Doctorant en sciences économiques
Université Abderrahmane Mira de Béjaïa – Algérie
Septembre 2013
Résumé
Dans un contexte de concurrence accrue sur le marché mondial des produits agricoles,
l’ambition affichée par l’Algérie depuis le début des années 2000 de développer son
agriculture se trouve confrontée à des prix minimisés par les différentes formes d’aides
apportées par les gouvernements des pays développés à leurs secteurs agricoles. Dès lors, le
soutien de l’Algérie à son agriculture s’avère à la fois nécessaire et justifié, pourvu que cela
n’entrave pas l’allocation optimale des ressources et n’entraine pas l’Algérie dans une
politique de protectionnisme excessif. A travers cet article, nous analysons l’évolution du
Taux Nominal de Protection (TNP) des principaux produits agricoles durant la décennie 2000.
Nous exposons également les différentes formes de soutien apportées par l’Etat à chacun de
ces produits. L’analyse des TNP révèle un niveau excessif des prix nationaux par rapport aux
prix mondiaux de la plupart des produits agricoles. Ce constat contraste avec le niveau et la
diversité des aides apportées par l’Etat au secteur agricole. Par ailleurs, la comparaison des
TNP et les droits de douane appliqués sur l’importation des produits agricoles montre que la
protection tarifaire à la frontière ne représente qu’une part minime de l’écart entre les prix
nationaux et mondiaux. Tout cela concorde pour conclure que le niveau des prix s’explique
principalement par une faible concurrence sur le marché local due à une offre largement
insuffisante par rapport à une demande satisfaite quasi-exclusivement par les importations.
Cela révèle également l’inefficacité des politiques menées pour l’amélioration de la
compétitivité de l’agriculture algérienne en raison d’importantes lacunes d’ordre institutionnel
qui caractérisent le processus de mise en place des mesures de soutien.
1
Abstract
2
Introduction
Sur un marché concurrentiel, la réduction des prix par une exploitation agricole suite à
une baisse des coûts de production et/ou de commercialisation, induite par une innovation
technologique, entraine une amélioration de la productivité dans l’ensemble du secteur. En
effet, les autres exploitations se voient contraintes d’aligner leurs prix afin de préserver leurs
parts de marché en adoptant la nouvelle technologie introduite par la concurrence. Par contre,
lorsque le secteur agricole subit une baisse des prix de l’extérieur sans transfert de
technologie, il n’en résultera pas une amélioration de la productivité mais uniquement une
baisse des prix relatifs des produits agricoles. Cela entrainera alors un transfert de
l’investissement depuis le secteur agricole vers le secteur industriel et celui des services.
La baisse de la production agricole qui en résulte, ou du moins son ralentissement, impliquera
un accroissement des importations des produits alimentaires du pays et donc une accentuation
de sa dépendance alimentaire. De plus, il en résultera un déplacement de la main-d’œuvre
dans le même sens que celui de l’investissement et par là même un exode rural, étant donné la
faiblesse sinon l’absence de l’investissement industriel et tertiaire dans les régions rurales. Ce
phénomène serait en outre à l’origine d’une aggravation de la pauvreté rurale et urbaine.
1
NORTON R.D., «Politiques de développement agricole : Concepts et expériences », FAO, Rome, 2005, p. 51.
2
NORTON R.D., Op. Cit., pp. 47-48.
3
Cet article vise à mettre en lumière la concordance ou la contradiction entre
l’évolution du niveau des prix nationaux et des mesures éventuelles de soutien des produits
agricoles. A cet effet, on passera en revue dans un premier temps l’évolution de la politique
agricole en Algérie et analyserons ensuite conjointement l’évolution du taux nominal de
protection (TNP) des principaux produits agricoles tout au long de la décennie 2000 ainsi que
les mesures de soutien accordées par l’Etat à l’agriculture. Les données et les explications
relatives au soutien de l’Etat à l’agriculture ont été collectées auprès du Ministère de
l’Agriculture et du Développement Rural (MADR), de la Direction Générale des Douanes
ainsi qu’auprès de la subdivision des services agricoles.
3
Bedrani S., « L'expérience algérienne d'autogestion dans l'agriculture », Cahiers du CREAD n°23-24, 3ème et
4ème trimestres 1990, pages 19-65.
4
agricoles privées non exploitées furent nationalisées. L’annexion de ces terres à accru
davantage la superficie des exploitations agricoles déjà exagérée par l’agrégation des fermes
coloniales en d’importants domaines, dits Domaines Agricoles Socialistes (DAS). Cela a
amoindri les chances de consensus au sein des exploitations4.
Le PAS expira dès la fin des années 1990 et la situation financière de l’Algérie
s’améliora sensiblement grâce à l’augmentation du prix du pétrole. Cela a permis la mise en
place d’un projet de développement du secteur agricole à travers le Programme National de
Développement Agricole (PNDA) rebaptisé Programme National de Développement Agricole
et Rural (PNDAR) en 2002. Ce programme avait pour principaux axes la reconversion des
sols (à travers notamment le déplacement des cultures céréalières vers des zones plus
favorables et l’utilisation des terres aux conditions rudes à des usages moins exigeants tels
l’arboriculture rustique, la viticulture et les petits élevages) ; l’amélioration du rendement et
de la productivité du travail dans les filières stratégiques (céréales, lait, pomme de terre);
l’extension de la surface irriguée ; la mise en valeur des terres par les concessions dans les
zones de montagnes, de piémonts, les terres steppiques et les zones sahariennes ; le lancement
4
Bedrani S. et Bourenane N., « L’expérience algérienne de planification : le cas de l’agriculture », Cahiers du
CREAD n°5, 1er trimestre 1986, pages 95-119.
5
Djenane A., « Ajustement structurel et secteur agricole », Cahiers du CREAD n°46-47, 4ème trimestre 1998 et
1er trimestre 1999, pages 123-134.
6
Pluvinage J., « Contribution à l'analyse des premiers résultats de la réorganisation des exploitations agricoles
algériennes (1987) », Cahiers du CREAD n°23-24, 3ème et 4ème trimestres 1990, pages 287-296.
7
Djenane A., Op. cit.
8
Pluvinage J., Op. cit.
5
d’un programme de reboisement et enfin, l’amélioration des revenus des agriculteurs via des
soutiens financiers9. Ce programme a certes eu des résultats positifs en termes de croissance
de la production et de l’emploi agricoles, mais cela demeure loin des résultats escomptés et la
mise en place du programme fut caractérisée par une aberrante discrimination, un manque
d’équité, de transparence et d’adaptabilité aux différentes catégories d’agriculteurs 10.
La Politique de Renouveau Agricole et Rural lancée en 2009 est censée remédier à ces
lacunes. Plus large et plus ambitieuse que les programmes précédents, cette politique souligne
l’urgence de redynamiser l’agriculture algérienne afin d’assurer la sécurité alimentaire mais
également pour en faire un moteur de la croissance économique. La première phase de cette
politique s’inscrit dans le cadre du plan quinquennal 2010-2014. Elle s’articule autour d’un
Cadre Incitatif et de trois piliers principaux que sont : le Renouveau rural, le Renouveau
agricole et le Programme de Renforcement des Capacités Humaines et de l’Assistance
Technique (PRCHAT). Le Renouveau rural a pour objectif le développement et
l’amélioration des conditions de vie dans les régions rurales à travers la satisfaction des
besoins de leurs populations en matière d’emploi, de logement et de viabilisation. Cela est
en effet une condition sine qua none pour un développement stable et durable de l’agriculture
menacée par l’exode rural et la baisse continue de la proportion de la main d’œuvre active
agricole dans la population active totale. Le Renouveau agricole quant à lui se concentre
surtout sur les critères économiques du secteur de l’agriculture. Il a pour objectif principal la
modernisation et l’intensification de la production à travers une approche d’intégration et de
renforcement des filières en amont et en aval. Le troisième pilier, le PRCHAT, se fixe pour
objectif le développement et la remise à niveau des compétences de tous les intervenants. Il se
concentre notamment sur la modernisation des techniques d’administration agricole, un
investissement conséquent en matière de formation et de vulgarisation agricole, la Recherche
& Développement, ainsi que le renforcement des services sanitaires du secteur agricole.
Contrairement aux trois piliers, le Cadre incitatif relève exclusivement du pouvoir de l’Etat. Il
s’agit de l’amélioration des mesures législatives, de la politique de financement public du
secteur agricole, de la régulation des marchés ainsi que le suivi du mécanisme de contrôle et
de protection du consommateur11.
9
Bessaoud O., « L'agriculture et la paysannerie en Algérie », Ed. CRASC-ENAG, Alger, 2004, pp. 17-18.
10
Laoubi K.et Yamao M. « The Challenge of Agriculture in Algeria: Are Policies Effective ? », Economic Studies,
Agriculture and Fisheries, No.12, March 2012, pp.69-72.
11
« Le renouveau agricole et rural en marche : revue et perspectives », MADR, mai 2012.
12
« Le renouveau agricole et rural en marche : revue et perspectives », MADR, mai 2012, p. 09.
6
indicateurs de soutien. Deux critères ont été respectés pour la sélection de cet échantillon : la
valeur moyenne de la production de chaque produit durant les trois dernières années étudiées
doit représenter au moins 1% de la valeur moyenne de la production agricole totale du pays ;
en outre, la somme de la production de l’ensemble des produits doit être au moins égale à
70% de la valeur de la production agricole totale13. Ces valeurs sont présentées dans le
Tableau 01 ci-après.
Tableau 01
Viande
Autres Pomme Viande Viande
Produit Blé Pomme Datte Raisin Orange de Œufs Lait Total
céréales de terre bovine ovine
volaille
Part dans la
production 10,15% 1,10% 8,28% 2,72% 9,95% 3,39% 3,80% 5,51% 6,57% 11,07% 2,78% 5,26% 70,58%
totale
Source: calculées par l’auteur à partir de données tirées du site web de la FAO
Le taux nominal de protection d’un produit i a été calculé selon la formule suivante14 :
Le Tableau 02 en annexe synthétise les TNP de l’ensemble des produits tout au long
de la décennie 2000.
13
« Manuel sur l’Estimation du Soutien aux Producteurs », OCDE, 2010, p. 110 - 111.
14
Flatters F., « Measuring the Impacts of Trade Policies: Effective Rates of Protection », Mimeo.com, Inc., New
York, 2005, p.02.
15
Le calcul du prix mondial (Pm) se fait en déduisant du prix à la frontière les marges commerciales de manière
à ce qu’il soit comparable au prix au départ de l’exploitation. Toutefois, le prix à la frontière diffère selon la
situation commerciale nette de l’Algérie par rapport au produit en question. En théorie, lorsque le pays est
importateur net d’un produit, le prix à la frontière correspond au prix CAF. De ce prix CAF augmenté du coût de
manutention et de transport du produit entre la frontière et le marché de gros intérieur, on devrait ensuite
déduire les coûts de manutention et de transport entre l’exploitation et le marché de gros du pays d’origine
ainsi que les coûts de transformation du produit agricole en produit importé. Disposant des prix à l’exploitation
de chaque pays pour l’ensemble des produits ainsi que des matrices de commerce extérieur de l’Algérie, le prix
mondial pris en considération dans cet article correspond à la moyenne pondérée des prix à l’exploitation de
chacun des partenaires commerciaux de l’Algérie. Lorsque le pays est exportateur net d’un produit, le prix à la
frontière utilisé est le prix FAB, duquel devraient êtres déduits les coûts de manutention et de transport de
l’exploitation au point d’embarquement ainsi que les coûts de transformation du produit agricole en produit
exporté. Ces derniers n’ont pas été pris en considération dans le calcul du Pm pour les deux produits (datte et
viande de volaille) pour lesquels l’Algérie présente une situation commerciale nette excédentaire et ce, en
raison de l’absence des données. Les prix FAB ont été calculés comme la moyenne pondérée du rapport entre
la valeur FAB et la quantité du produit exporté par l'Algérie vers chacun de ses partenaires commerciaux.
7
II.1. Le soutien à la céréaliculture
L’observation des graphiques 01.a. et 01.b. ci-après révèle une évolution quasi-
synchronisée des TNP du blé et des autres céréales16. D’importantes fluctuations caractérisent
cet indicateur durant la décennie 2000. Toutefois, l’analyse de l’évolution des prix des
céréales permet de distinguer les fluctuations du TNP dues à l’évolution des prix mondiaux et
celles expliquées par des modifications des prix nationaux. Le début des années 2000, période
de lancement des programmes de développement agricole et rural (PNDA puis PNDAR) est
caractérisé par un accroissement du TNP pour l’ensemble des céréales dû à une augmentation
plus que proportionnelle des prix nationaux par rapport aux prix mondiaux. Le TNP marque
ensuite un remarquable trend baissier jusqu’à l’année 2007/2008. Cette baisse s’explique par
la hausse des prix mondiaux durant cette période. A partir de 2009, on relève une reprise
importante mais ponctuelle de la protection des céréales puisque le TNP va recommencer à
baisser en 2010. L’augmentation sensible du TNP en 2009 est due à une importante variation
simultanée et opposée des prix nationaux et des prix mondiaux.
Il est important de souligner l’effet négatif de telles fluctuations sur les céréaliculteurs
locaux. L’investissement dans cette filière risque en effet d’être freiné par l’incertitude qui en
découle. Ces fluctuations peuvent en outre nous renseigner sur le type de protection mise en
place par l’Etat. En effet, lorsque la protection est dominée par des mesures tarifaires ad
valorem à la frontière, la sensibilité du TNP pourrait être neutralisée, ce qui n’est pas le cas de
la filière céréalière en Algérie.
600,0
500,0
400,0
TNP Blé (%)
300,0
Pm Blé (USD)
200,0
Pn Blé (USD)
100,0
0,0 Années
16
Orge, avoine et sorgho.
8
Graphique 01.b. : Evolution du taux nominal de protection (TNP) des
TNP (%) autres céréales en Algérie durant la décennie 2000
Prix (USD/tonne)
500,0
400,0
100,0
0,0 Années
-100,0
9
Tableau 03
Bénéficiaire Agriculteur Etablissement de collecte et d'usinage de semences
Action Infrastructure de stockage Infrastructure Stockage sous
Matériel d'usinage
financée des semences à la ferme de stockage froid
Plafond du
500 000 2 000 000 3 000 000 4 000 000
soutien (Da)
Tableau 04
Bénéficiaire Individuel Collectif
Moissonneuses batteuses 40% 50%
Tracteurs* 30% à 40% 35% à 50%
Equipements tractés 30% 40%
* Varie selon la puissance
Source: Décision n° 537 du 10 septembre 2009
10
Graphique 02: Evolution du taux nominal de protection (TNP) du lait et
TNP (%)
des viandes bovines et ovines en Algérie durant la décennie 2000
400,0
350,0
300,0
250,0
TNP Lait (%)
200,0
TNP Viande ovine (%)
100,0
50,0
0,0 Années
Les mesures de soutien visant à réaliser cet objectif concernent cinq (5) types d’actions :
Les mesures relatives aux quatre premiers types d’actions sont synthétisées dans les
tableaux 05, 06, 07 et 08 ci-après.
11
Tableau 05
Acquisition de matériels et d’équipement spécialisés d’élevage
Action soutenue Niveau de soutien (%) Plafond (Da)
Equipement et installation
d’abreuvoirs automatiques 30 40 000
(tuyauterie comprise)
Acquisition d’équipements pour
fromagerie artisanale à base de lait 30 500 000
de chèvre ou de brebis
Cuve de réfrigération
30 265 000
de 250 – 1000 litres
Matériel Chariot trayeur 30 85 000
laitier Equipement de salle
30 750 000
de traite
Lactoduc 30 450 000
Source : réalisé par l’auteur d’après la décision FNDIA n° 2023 du 15 décembre 2008
Tableau 06
Réalisation d’infrastructures spécialisées pour la collecte
Action soutenue Niveau de soutien (%) Plafond (Da)
Cuve réfrigérante d’un
30 160 000
volume de 500 litres
Cuve réfrigérante de
30 315 000
1000 à 2000 litres
Cuve réfrigérante de
30 550 000
2000 à 6000 litres
Source : réalisé par l’auteur d’après la décision FNDIA n° 2023 du 15 décembre 2008
Tableau 07
Transport du lait
Action soutenue Niveau de soutien (%) Plafond (Da)
Acquisition de citerne
réfrigérante d’un volume 30 270 000
de 500 à 1000 litres
Acquisition de citerne
réfrigérante d’un volume 30 420 000
de 1000 à 6000 litres
Source : réalisé par l’auteur d’après la décision FNDIA n° 2023 du 15 décembre 2008
Tableau 08
Contrôle de la qualité du lait
Action soutenue Niveau de soutien (%) Plafond (Da)
Acquisition d’une valisette de
contrôle des paramètres 30 35 500
physico-chimiques du lait
Achat de génisses pleines ou
vaches laitières pleines auprès
25 60 000
d’opérateurs conventionnés
avec l’Etat
Source : réalisé par l’auteur d’après la décision FNDIA n° 2023 du 15 décembre 2008
12
II.2.2. La protection et le développement des patrimoines génétiques des espèces
animales
Cet objectif est poursuivi à travers un soutien apporté à deux types d’actions :
Outre ces mesures de soutien, les producteurs et les collecteurs de lait de vache
bénéficient respectivement d’une prime de 12 et de 5 Da par litre vendu 17 dans le cadre du
FNRPA. Une prime variant entre 2 et 4 Da/l est également accordée aux transformateurs
fabriquant du lait pasteurisé conditionné.
17
Données collectées auprès du MADR.
13
Graphique 03 : Evolution du taux nominal de protection (TNP) de la datte
TNP (%) en Algérie durant la décennie 2000
80,0
60,0
40,0
20,0
0,0 Années
-20,0
-40,0
-60,0
- La réhabilitation des palmerais : un soutien de 30% plafonné à 1 200 Da par plant remplacé
est accordé pour l’arrachage de vielles plantations. De plus, l’amendement du sol est soutenu
à hauteur de 10 000 Da/ha pour une superficie maximale de deux hectares ;
18
Maladie mortelle du palmier.
14
moyenne, proche du tarif douanier de 30% appliqué à l’importation du moins jusqu’à l’année
2009.
120,0
TNP Oeufs (%)
100,0 TNP Viande de volaille (%)
Linéaire (TNP Viande de volaille (%) )
80,0
60,0
40,0
20,0
0,0 Années
-20,0
-40,0
-60,0
-80,0
-100,0
Source: réalisé par l'auteur
La production d’œufs n’est visée par aucune mesure de soutien. Par contre, la viande
de volaille bénéficie du soutien de l’Etat à l’aviculture dans le cadre du FNDIA à hauteur de
20% plafonné à 1 000 000 Da pour l’aménagement des bâtiments d’élevage et l’acquisition
d’équipement d’abattage, de transformation et conditionnement. L’acquisition d’équipements
spécialisés pour l’élevage de dindes est également soutenue à hauteur de 30% plafonné à
160 000 Da.
15
établissements de stockages, susceptibles de spéculer sur la marchandise, sont tenus de
répondre à tout appel à déstocker provenant de l’Etat.19.
250,0
200,0
150,0
100,0
50,0
0,0 Années
Des trois cultures représentées sur le graphique 06, il apparait que la viticulture est de
loin la moins protégée de la concurrence internationale. On relève également que l’évolution
des TNP des trois produits est caractérisée par une stabilité des prix relatifs durant la seconde
moitié de la période étudiée, contrairement à la période précédente marquée par d’importantes
fluctuations. Enfin, il y a lieu de noter que l’orange fut largement le produit le mieux protégé
atteignant un pic de près de 300% en 2009.
19
Données et explication collectées auprès du MADR.
16
Graphique 06 : Evolution du taux nominal de protection (TNP) de
l'orange, de la pomme et du raisin en Algérie durant la décennie 2000
TNP (%)
300,0
250,0
50,0
0,0 Années
-50,0
-100,0
Diverses mesures de soutien sont accordées pour ces cultures dans le cadre du FNDIA.
Trois de ces mesures bénéficient à l’agrumiculture pour :
- L’arrachage de vielles plantations : 70 Da/souche est accordé aux agriculteurs dans la limite
de 18 000 Da ;
Enfin, la viticulture bénéficie d’un soutien de 60% pour la création de vignoble avec
un plafond variant selon le type de plants acquis et selon que la plantation soit effectuée en
palissage classique ou en pergola. Le même taux de soutien est appliqué à la production de
plants avec un plafond également variable.
Par ailleurs, l’ensemble des cultures bénéficient d’un soutien de 20% du prix sur
l’acquisition et l’utilisation des engrais.
20
http://www.minagri.dz/images/affiche/rfig%20fr.jpg
21
Les appellations "RFIG" et "ETTAHADI" sont l’équivalent en arabe des mots "Accompagnateur" et
"Challenge".
17
subordonné au respect de l’échéance du crédit avec une prorogation exceptionnelle de six
mois. Par contre, le crédit "ETTAHADI"22 est un crédit d’investissement pour lequel l’Etat ne
paie l’intégralité des intérêts que si le remboursement du principal intervient pendant les trois
premières années de l’emprunt. Dans les autres cas, l’emprunteur paie 1%, 3% ou
l’intégralité du taux d’intérêt selon qu’il ait remboursé le crédit entre la quatrième et la
cinquième année, entre la sixième et la septième année ou à partir de la huitième année. Par
ailleurs, il est important de souligner que, la décision de l’octroi ou non des crédits par la
BADR n’est fondée que sur l’étude économique du projet du postulant et de sa solvabilité
conformément aux pratiques bancaires de l’économies de marché sans aucune influence de la
part de l’Etat23.
Les négociations sur l’adhésion de l’Algérie à l’OMC étant toujours en cours, il est
utile de mesurer l’importance des droits de douane dans le soutien des prix des produits
agricoles.
Le tableau 09 porté en annexe synthétise les tarifs douaniers et les taxes appliqués à
l’importation des produits agricoles pour lesquels on a calculé les TNP en 2010. Ceux-ci
furent les même depuis 2002, date d’harmonisation du code des tarifs douaniers, à l’exception
des tarifs préférentiels appliqués sur certains produits depuis l’entrée en vigueur de l’accord
d’association avec l’UE le 1er septembre 2005 et l’adhésion de l’Algérie à la ZALE 24 le 1er
janvier 2009. Cependant, les TNP calculés pour l’année 2010 ne seront comparés qu’avec les
droits de douanes étant donné que les taxes sont appliquées également sur les produits
locaux25. Cela est représenté sur le graphique 07 ci-après.
La représentation graphique montre clairement que l’écart des prix relatifs des produits
agricoles compensé par la protection douanière est minime à l’exception du raisin dont le tarif
douanier dépasse largement le TNP. Cette situation s’explique par le fait que l’application du
tarif douanier de 30% arrive à peine à combler l’écart entre le prix national et le prix mondial
du raisin.
22
Avenant n°3 à la convention du 31 mars 2011 entre le MADR et la BADR relative au crédit d’investissement
"ETTAHADI".
23
Information puisée auprès du MADR
24
Zone Arabe de Libre Echange
25
Flatters F., Op. cit.
18
Graphique 07 : Comparaison des droits de douane et du TNP des
produits agricoles en Algérie durant l'année 2010
350,0
300,0
Droit de douane sur les semances (%)
250,0
Niveau de protection
TNP (%)
200,0
150,0
100,0
50,0
0,0 Produit
Conclusion
En effet, bien que le soutien à l’agriculture soit nécessaire pour assurer la pérennité de
l’activité agricole, il peut fausser l’allocation optimale des ressources en créant des distorsions
aux incitations à l’investissement au sein même du secteur agricole. Ainsi, en dépit d’une
tentative d’alignement des taux de soutien accordé dans le cadre du FNDIA, la variabilité de
plusieurs paramètres tels que le nombre d’actions soutenues dans chaque filière, leurs coûts,
les conditions exigées ainsi que le plafond fixé pour le soutien accordé donneraient
19
nécessairement lieu à des arbitrages dans le choix d’investissement, ce qui favoriserait
certaines filières au dépends des autres. Ces distorsions risquent de pénaliser les activités pour
lesquelles l’agriculture algérienne présente réellement un avantage comparatif, clé d’une
meilleure spécialisation et donc du développement des exportations.
En outre, il est nécessaire de souligner que la majeure partie du TNP calculé pour les
produits agricoles en Algérie, lorsqu’il est positif, constitue un transfert de richesses des
consommateurs vers les producteurs agricoles. En effet, les niveaux excessifs de protection
pénalisent sensiblement les consommateurs et sont souvent le résultat d’une offre insuffisante
et d’une faible concurrence sur le marché des produits agricoles plutôt que d’un soutien de
l’Etat aux prix agricoles.
L’analyse qui précède montre certes un effort de la part de l’Etat pour soutenir
l’agriculture. Toutefois, les modalités de paiement du soutien laissent place à une critique
dans la mesure où le soutien de l’Etat donne lieu à un paiement ex post c’est-à-dire qu’il
n’intervient qu’après constatation de la concrétisation totale ou partielle des actions soutenues
conformément aux normes établies par les instituts techniques agricoles spécialisés. En effet,
l’article 11 de la Décision N° 2023 du 15 décembre 2008 inclut l’attestation de Service Fait
dans les documents nécessaires pour l’exécution du paiement. Le Service Fait est défini par
l’article 12 de la même décision comme "l’acte administratif par lequel le Directeur des
Services Agricoles atteste que les travaux et/ou fournitures dont l’investissement a été
autorisé avec le soutien de l’Etat ont été effectivement exécutés et totalement réalisés en
conformité avec les dispositions édictées dans le cahier des charges.". Cela pourrait
s’expliquer par le souci de l’Etat quant à la qualité de l’investissement et de la production
agricole soutenus mais surtout pour une allocation saine et une gestion optimale des
ressources budgétaires. Toutefois, ces objectifs pourraient être atteints et une meilleure
efficience du soutien pourrait être obtenue par un financement échelonné et en temps réel des
actions soutenues avec un meilleur accompagnement de l’agriculteur dans son projet.
20
Références bibliographiques
Textes législatifs
- Avenant n°3 à la convention du 31 mars 2011 entre le MADR et la BADR relative au crédit
d’investissement "ETTAHADI" ;
-Circulaire n°385 du 28 juin 2010 sur le développement des productions céréalières, Direction
des Services Agricoles de la Wilaya de Tizi-Ouzou ;
Articles et ouvrages
-Djenane A., « Ajustement structurel et secteur agricole », Cahiers du CREAD n°46-47, 4ème
trimestre 1998 et 1er trimestre 1999 ;
-Flatters F., « Measuring the Impacts of Trade Policies: Effective Rates of Protection »,
Mimeo.com, Inc., New York, 2005 ;
-Laoubi K.et Yamao M. « The Challenge of Agriculture in Algeria: Are Policies Effective ? »,
Economic Studies, Agriculture and Fisheries, No.12, March 2012 ;
Tableau 02
Années 2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010
TNP Blé (%) 137,6 133,4 160,5 109,4 110,5 128,3 88,5 27,0 25,2 278,9 203,4
TNP Autres Céréales (%) 41,6 65,2 91,1 95,2 160,5 81,1 75,4 -4,6 119,1 180,9 135,2
TNP Lait (%) 39,2 74,2 46,0 41,4 21,0 26,2 34,1 6,7 5,2 38,8 21,8
TNP Œufs (%) 100,7 28,0 37,6 13,1 22,4 24,6 26,2 -1,7 25,3 39,5 72,8
TNP Orange (%) 115,0 -66,6 225,5 160,3 170,0 231,8 228,0 226,5 275,2 210,8
TNP Pomme (%) 124,4 207,6 167,3 153,6 201,0 116,3 105,2 119,7 134,3 112,2
TNP Pomme de terre (%) 197,0 104,0 239,2 86,4 89,9 100,4 76,5 185,0 174,2 209,4 162,6
TNP Viande ovine (%) 190,1 56,8 254,8 262,4 279,4 226,5 283,0 259,6 269,9 375,6 271,6
TNP Viande bovine (%) 295,2 60,1 184,3 208,0 127,7 96,8 50,6 223,9 131,9 95,1 62,5
TNP Raisin (%) -60,4 -52,0 42,3 67,0 138,2 6,0 -0,5 30,2 9,6 19,6 1,7
TNP Viande de volaille (%) -26,3 11,1 -58,6 -17,0 -64,4
TNP Datte (%) -40,8 -35,6 -13,7 -26,3 -17,9 -7,7 9,1 14,5 23,7 58,5
Source: calculés par l’auteur à partir de données tirées du site web de la FAO
Tableau 09
semence 1003.00.10 5% 5% 5% 7%
Orge
autres 1003.00.90 15% 7,5% (20 000 T)* 15% 7% 15 Da/q****
semence 1004.00.10 5% 5% 0% 7%
Avoine
autres 1004.00.90 15% 0% (1500 T)* 0% 7% 15 Da/q****
semence 1007.00.10 5% 5% 0% 7%
Sorgho
autres 1007.00.90 15% 15% 0% 7% 15 Da/q****