Ressourcés Minérales de L'Afrique Du Nord: Pement. Les Principaux Gisements de Plomb de La Tunisie Et de La

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RESSOURCÉS MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD

Les gisements métallifères de l'Afrique du Nord ont été connus dès


les débuts de la civilisation méditerranéenne1. Les arsenaux carthagi
nois utilisaient les métaux de la région. Des inscriptions puniques men
tionnent des fonderies de cuivre, peut-être aussi des fabricants
d'ustensiles. M. Stéphane Gsell remarque que, si au m* et au iv" siècle
les armes sont rares dans les sépultures, on y trouve cependant des
cisailles en fer, des hameçons en bronze, des cuillers, des pelles, des
miroirs, des boîtes en plomb pour le fard, des coupes, des lampes de
même métal, tout un mobilier qui indique un stade avancé dans l'évolu
tion métallurgique. Le Djebel Ressas (la montagne de plomb dont
Flaubert parle dans Salammbô), près de Carthage, les gîtes du Zacear,
près de Miliana, le Djebel Hadid, près de Mogador, ont certainement
été connus et exploités par les Phéniciens.
Sous la domination romaine, l'extraction marqua un certain dévelop
pement. Les principaux gisements de plomb de la Tunisie et de la
province de Constantine furent exploités, de même les minerais de fer
des Nefzas et du Zacear. Dans tous ces gisements, aujourd'hui concédés,
on retrouve les vestiges des travaux entrepris par les « metallarii » de
la Rome impériale, excavations, galeries, descenderies.
Par contre, malgré l'abondance des termes tels que Ressas (plomb),
Hadid (fer) dans la toponymie africaine, il ne semble pas que les Arabes
aient utilisé les ressources minérales au mieux de leurs intérêts. La
production était loin de suffire à la consommation. Dès le commence
ment du xvie siècle, les armateurs marseillais portaient en Alger du
fer en barres et en fil et, de tout temps, les Anglais, les Hollandais, les
Vénitiens importaient dans les pays barbaresques des munitions et des

1. Sur les ressources minérales de l'Afrique du Nord, la bibliographie est


copieuse. Consulter principalement : Dussert, Étude sur les gisements métallifères
de l'Algérie. Paris, 1910, in-8, 175 p., 12 fig. coupes, 4 pl. cartes. — Id., Étude sur
les gisements de fer de l'Algérie. Paris, 1912, in-8, 256 p., 21 fig. coupes, 3 pl.
cartes. — Berthon, L'Industrie minérale en Tunisie. Tunis, 1922, in-8, 262 p., 87 fig.
coupes, nomb. phot., une pl. carte à 1 : 1 000 000. — Savornin, État actuel des
connaissances sur la géologie du Maroc français (Bull. Soc. de géog. d'Alger et
de l'Afrique du Nord, 1" trim. 1922, n* 88, p. 238-265, 4 fig. cartes). — De Mon
taueon, Le sous-sol du Maroc (L'Économie nouvelle, août 1923, n° 8, p. 442-450;
sept. 1923, n° 9, p. 477-482). Dans une note tirée à la polycopie (7 avril 1919),
M' Brives a donné un excellent résumé des ressources probables du Maroc. Je
dois la connaissance de cette note à l'obligeance de Mr Auoustin Bernard. —
On trouvera un bon tableau d'ensemble du sujet dans Joleaud, Les richesses
minérales de l'Afrique du Nord — Maroc, Algérie, Tunisie — (Bull. Soc. Encou
ragement Industrie nationale, 1920, p. 427-435, 6 fig. phot., 1 carte à 1 : 5 000 000).
152 ANNALES DE GÉOGRAPHIE.

armes. L'Afrique du Nord, au point de vue minier, était presq


« La mine, a écrit Mr Gautier, est une des infériorités les plu
de l'Islam1. »
Dès la conquête, la France poursuivit l'étude des richesses naturelles
dans les territoires occupés. Les prospecteurs suivirent les armées. En
1830, Rozet signale les filons de fer et de cuivre de Mouzaïa2. Le pre
mier traité sur la richesse minérale de l'Algérie date de 1849 ; mais les
explorations de son auteur, H. Fournel, remontent aux années
1843-1846. Dès 1849, des concessions sont accordées, principalement
pour l'extraction des métaux d'un prix élevé et dont la métropole est
dépourvue. En 1855, Ghar Rouban3 extrait quelques tonnes de galène.
Les mines de Kef oum Theboul* produisent 3660 t. de minerais
cuivreux en 1851, 7500 t. en 1858. La même année, des périmètres
avaient été concédés pour minerai de fer. Mais l'exploitation ne date
que de 1865 avec les expéditions du Benisaf et du Mokta-el-lladid. La
pureté des minerais, la teneur en fer, la proximité de la mer leur
livrèrent les marchés anglais et français à une époque où le procédé
Bessemer exigeait des sortes riches, sans phosphore, ni soufre, ni
arsenic. L'un des premiers administrateurs du Mokta-el-IIadid, l'ingé
nieur Paulin-Talabot, était également administrateur des aciéries de
Firminy, des charbonnages de la Grand Combe, du chemin de fer
du P.-L.-M., de la Compagnie transatlantique. Les Allemands n'ont pas
créé l'intégration métallurgique.
Cependant la situation de l'industrie minière demeurait stagnante.
Les essais de mise en valeur des gîtes de Temoulga, de Rouina, du Zac
ear réussirent en raison de la hausse passagère du fer ; mais les résultats
obtenus au début furent plutôt décourageants. L'essor ne date que de
1900. Il est la conséquence de l'abaissement des tarifs de chemin de fer
et de l'évolution économique qui a précipité l'Europe vers l'industrie
métallurgique.
Grâce aux demandes considérables de la sidérurgie européenne, les
prospecteurs ont parcouru sans relâche l'Algérie et la Tunisie ; actuelle
ment ils portent tous leurs efforts vers les territoires nouvellement
pacifiés du Maroc. Grâce à leurs travaux, l'inventaire des ressources
minérales se poursuit chaque jour. Mais il est, pour le moment, suffi
samment avancé pour que l'on puisse en donner les caractéristiques
principales.

1. É.-F. Gautier, L'Algérie et la Métropole. Paris, 1920, p. 124.


2. Les noms géographiques se trouvent dans l'Atlas des Colonies françaises
Paul Pelet. Paris, A. Colin, 1902. Deux petites cartes sont jointes à cet article
(p. 158 159), pour les gisements de minerais de fer et les phosphates. Pour les
autres gisements, nous les indiquerons par leur distance d'une grande ville.
Mouzaïa, 15 km. Nord de Médéa.
3. 45 km. au Sud-Ouest de Tlemcen.
4. 10 km. au Sud de La Calle.
RESSOURCES MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD. 153

I. — Les Combustibles minéraux.

Bien que l'Afrique française renferme dans son sous-sol des richesses
considérables, elle est presque complètement'dépouvue de combustibles
minéraux. Cette pénurie a été la cause principale du retard que nous
avons constaté dans le développement de l'industrie minière.
La houille a été exploitée dernièrement près de Nemours et de
Dellys en Algérie et près de Medjez-el-Bab 1 en Tunisie, mais les gise
ments ne sont pas suffisants pour engager l'avenir. Dans la zone litto
rale, la puissance du Rouiller est insuffisante pour garantir une indus
trie charbonnière ; seul, le Riff, dont l'exploration géologique est à
peine commencée, pourrait recéler des combustibles.
Cependant, en 1907, G. B. M. Flamand avait constaté l'existence de
petites veines de charbon à Kenadsa, dans les grès houillers de la
pénéplaine carboniférienne, à 25 km. de Colomb-Béchar. Vu la faible
épaisseur de la formation à l'affleurement, la découverte n'avait guère
intéressé que les géologues. La guerre, en privant l'Algérie des char
hons anglais et américains, attira l'attention des chemins de fer sur ce
petit bassin. L'exploitation fut décidée. Une ligne ferrée relia bientôt
la mine à Colomb-Béchar, le terminus de la voie oranaise. La produc
tion a atteint 5 000 t. en 1918 ; elle n'a guère augmenté depuis.
Malgré le bon marché de la main-d'œuvre pénitentiaire, le prix de
revient est fdrt élevé (115 fr. la tonne) et la houille fort poussiéreuse.
En 1922, le Cardiff revenait meilleur marché à Kenadsa que le charbon
pris à pied d'œuvre. La houille de Kenadsa a une importance locale :
elle peut être un secours pour alimenter les chaudières au terminus
saharien de la voie oranaise, en cas de pénurie des charbons euro
péens. Peut-être des tonnages plus intéressants se trouvent-ils, en
prolongement du bassin, dans le S.E. marocain, vers les oasis du
Tafilalet.
Semblablement les gisements de lignite ne sont guère plus impor
tants. La mine de Marcene'2 est arrêtée, celle du Smendou, au Nord de
Constantine, fournit annuellement 1800 t. En Tunisie, les chantiers de
Djebibina3 sont fermés; seul le bassin du cap Bon, avec une production
annuelle de 22000 t., peut être considéré comme une réserve appré
ciable dans les périodes de crise.
Les pétroles ont suscité de grandes espérances. Jusqu'ici, elles ne
se sont pas réalisées. Malgré la multiplicité des manifestations hydro
carburées, disséminées sur tout le territoire de la Berbérie, malgré les
capitaux considérables engagés dans les recherches, on peut dire que

1. Sur la Medjerda, à 45 km. au Sud-Ouest de Tunis.


2. 12 km. au Sud de Cherchai.
3. 45 km. au Nord de Kairouan.
134 ANNALES DE GÉOGRAPHIE.

les lois de l'accumulation du naphte ne sont pas déterminées. E


les travaux effectués à l'Ain Rehal, au Djebel Kechabta, qu
dépression des lacs de Tunis et d'Achkeul, et à Slouguia sur
Tunis au Kef, ces travaux n'ont donné aucun résultat. Au
indices ont été signalés dans le Gharb autour d'Arboua, su
du Sebou, au Zerhoun. Dans le massif de Selfat, près de Pe
pétrole a été rencontré par un sondage à 73 m. ; on a pu réunir
litres d'huile lourde ; mais le bassin paraît sans importance ind
Semblahlement en Algérie, malgré'les millions dépensés
sociétés anglaises et françaises. Le sondage d'Aïn Zeît, dan
après avoir fourni 7 000 1. en 1893, semble près de l'épuise
sondages de Messila et de Tilouanet1, actuellement en a
livrent pas au commerce plus de 1300 barils paran (137
Enfin des indices sont connus dans la province de Constant
Beida2 et au Djebel Gueb 3; ils n'ont jamais été explorés.
L'existence du pétrole dans l'Afrique du Nord est donc d
Malheureusement, les sondages n'ont pas été entrepris ave
rigueur scientifique. On dit souvent qu'on n'a pas trouvé
dans l'Afrique du Nord ; il serait plus exact de dire qu'on l'
ché. Des cartes géologiques, à grande échelle, font encore comp
défaut. Les sociétés exploitantes doivent s'employer, avant t
à les établir. Ces bases solides une fois déterminées, M. DallonH
d'explorer là surtout où se révèlent les phénomènes de dia
notamment au voisinage du Trias.

H.— Les minerais chers.

C'est également dans le Trias ou dans son voisinage qu'il faut ch


cher les minerais chers, c'est-à-dire les minerais qui subissent, s
place, un traitement spécial destiné à les enrichir et dont le prix
assez élevé pour supporter le transport en sac. Ils s'expédient
petites quantités et constituent rarement le chargement complet
navire.

Les gîtes de zinc et de plomb sont beaucoup plus nombreux, dans


l'Afrique du Nord, que les gisements de fer; mais ils ne comportent
jamais un tonnage important. Ils paraissent en relations avec des argiles
multicolores et salifères qui remontent au Trias, soit que la minéralisa
tion soit directement liée à ces roches, soit qu'elle résulte des disloca

1. 22 km. au Sud-Ouest de Relizane,


2. 65 km. au Sud-Ouest de Soukharas.
3. 45 km. au Sud de Soukharas.
4. M. Dalloni, La géologie du pétrole et la recherche des gisements pétrolifères
en Algérie. Alger, 1922, in-8, 324 p., 48 fig. et 1 pl. carte. — B. Yvanovitch, La
géologie du pétrole au Maroc [Bull. Soc. géol. de France, t. XXII, 1922, p. 234-245,
4 fig. coupes et cartes).
RESSOURCES MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD, 153

tions terrestres de cette époque. Le Trias, pense Mr Drives *, constitue le


véritable fil conducteur du prospecteur. La faible puissance de la forma
tion, qui ne s'enfonce jamais très loin en profondeur, explique le volume
réduit de ces gisements et leur répartition géographique. Us sont plus
nombreux en allant d'Ouest en Est, car le Trias recouvre des surfaces
plus importantes en Tunisie et dans le département de Constantine que
dans le reste de l'Afrique du Nord.
Au Maroc, malgré les nombreux permis de recherches, les indices
n'ont décelé jusqu'ici aucun gîte industriel. On a abandonné les
recherches de zinc effectuées dans la région des Beni-Snassen et sur
le plateau des Beni-M'tir. Semblablement pour le plomb ; il n'a guère
été exploité que dans le Riff, près de Melilla. Peut-être la pacification
du Haut-Atlas et du Sous nous réserve-t-elle d'heureuses surprises,
car les tribus berbères utilisent et traitent le métal pour les usages
domestiques et guerriers.
En Algérie et en Tunisie, le plomb et le zinc sont souvent associés,
mais il y a toujours supériorité de tonnage pour le second de ces mine
rais. Ainsi à Maaziz2, dans le département d'Oran, Ouarsenis3 et
Sakamody4, dans le département d'Alger. Dans le département de
Constantine, le phénomène est encore plus remarquable. On compte dix
mines produisant plus de 300 t. de zinc, tandis que deux mines seule
ment produisent plus de 300 t. de plomb. Parmi les premières citons
Kef Semmah3 (7013 t. de zinc en 1920), Hammam N'Baïla6 (4379 t.),
Chellaia7 (2619t.), Djebel Anini8 (1 838 t.), Djebel Gustar9 (1609 t.),
Aïn Arko10 (1137 t.), et parmi les secondes, Djebel Feiten11 (3234 t. de
plomb et 378 t. de zinc) et surtout Mesloula12 (6300 t. de plomb). Pour
1922, la production totale de l'Algérie a atteint 14180 t. de minerais de
plomb et 35000 t. de minerais de zinc.
En Tunisie, les réserves sont plus importantes. Dans l'ensemble,
depuis les débuts de l'exploitation, les expéditions ont atteint au
Ie janvier 1922 -.6566691. de minerais de plomb et 602883 t. de minerais
de zinc. Le tonnage est presque entièrement constitué par dix-huit
mines dont les principales sont le Djebel Ressas, près de Tunis,

1. A. Bcuvf.s, Contribution à l'étude des gîtes métallifères de l'Algérie. Alger,


1918, in-8, 112 p., 42 fig. coupes et cartes.
2. A 45 km. à l'Ouest de Tlemcen.
3. A 65 km. au Sud-Ouest de Miliana.
4. A 35 km. au Sud d'Alger.
5. A 25 km. au Nord-Ouest de Sétif.
6. A 25 km. au Sud-Est de Guelma.
7. A 10 km. au Nord de Batna.
8. A 27 km. au Nord-Ouest de Sétif.
9. A 20 km. au Sud de Sétif.
10. A 45 km. au Nord d'Aïn Beïda.
11. A 20 km. au Sud-Ouest de Constantine.
12. A 60 km. au Nord-Ouest de Sétif.
156 ANNALES DE GÉOGRAPHIE.

Béchateur près de Bizerte, le Khanguet près de Béjà, le Dj


Presque toujours le zinc est associé au plomb. Cepend
Auane1, Bazina2, Djebel Hamera3 n'exploitent que du pl
ben Amar4 que du zinc.
L'Afrique du Nord produisait avant guerre 60 000 t. de
plomb et 120000 t. de minerais de zinc. Pour le zinc pr
cette production était d'une certaine importance sur le
péen, car la production mondiale de zinc métal ne dépasse
de tonnes par an. Par suite des nombreuses concessions
la Société de la Vieille Montagne, la Belgique était le plu
des mines de zinc ; par contre, la plus grande partie de
plomb était traitée dans les usines françaises.
Les autres minerais n'ont guère d'importance pour
africaine.
Le cuivre a été prospecté dans la région littorale près
près de Djijelli, près de la Galle. La seule mine en exploitatio
guère plus de 500 t. par an.
Le manganèse a été signalé dans l'extrême Sud tun
Kroumirie. Pendant la guerre, les demandes de la mé
décidé l'attaque des affleurements de fer magnétique de
dans le département d'Oran, et de leurs voisins dans la ré
au Maroc. Ces gîtes sont localisés à la base des calcaires
dans les schistes sous-jacents, métamorphisés par des fdo
Les travaux actuels ont démontré l'extension d'un gisem
sibilités industrielles.
Pour les mêmes raisons, l'exploitation des minerais d'antimoine a
été activement poussée pendant la période des hostilités. De 1000 t.
environ avant guerre, l'extraction a atteint 28400 t. en 1916. Actuelle
ment les deux mines d'Hammam N'Baïl3 et de El Hammimat6 produi
saient ensemble 3000 t. par an.
Enfin, on a retrouvé au Maroc au contact des granités d'Oulmès, les
filons d'étain, connus des armateurs rouennais dès le xvie siècle. Les
prospections en cours ont révélé un tonnage intéressant.

III. — Les Minéraux pondéreux.

Le fer. — Au congrès géologique de Stockholm, les réserves ferri


fères de l'Afrique du Nord ont été estimées à 125 millions de t. cer

1. A 15 km. à l'Ouest de Béja.


2. A 30 km. au Sud-Ouest de Mateur.
3. A 30 km. à l'Est de Tebessa.
4. A 15 km. à l'Ouest de Béja.
5. A 25 km. au Sud-Est de Guelma.
6. A 65 km. à l'Est de Batna.
RESSOURCES MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD. 157

laines et à 75 millions de t. probables, au total 200 millions de t. Ces


évaluations sont certainement inférieures à la réalité. Les quatre
mines situées aux confins algéro-marocains, l'Ouenza, le Bou Kadra,
le Djebel Djerissa, le Slata contiennent, à elles seules, plus de
125 millions de t. D'autre part la pacification du Maroc, des pros
pections plus suivies révéleront de nouvelles richesses : quatre
sociétés exploitent déjà les mines du Riff et les reconnaissances se
préparent à envahir le Sous où l'on sait l'activité des frères Maness
man avant la guerre. Enfin le développement de la circulation terrestre
permettra la mise en valeur de gîtes jusqu'alors délaissés : l'ouverture
de la ligne Bougie-Sétif, par exemple, assurera l'évacuation des minerais
situés dans la Kabylie des Babors. Dès maintenant, les réserves de
l'Afrique du Nord dépassent de 200 p. 100 les chiffres fixés par le
Congrès géologique en 1910.
Les gisements de minerai de fer se trouvent répartis dans une
bande qui se rapproche de la mer en allant de l'Est vers l'Ouest
(fig. 1). En Tunisie et dans la province de Constantine, les masses
ferrifères de l'Ouenza, du Bou-Kadra, du Djerissa, du Slata en sont
éloignées de quelque 250 km. ; la zone minéralisée se rapproche de
100 km. dans le département d'Alger avec les gisements du Zacear et
de Rouina ; elle devient côtière au Benisaf, dans le département d'Oran,
et à Melilla au Maroc.
Exceptionnellement le minerai se trouve dans la roche éruptive
(granités de Collo) ; les gisements de nature filonienne sont plus nom
breux (Dahra, environs de Blida, région de Cherchel). Mais les gise
ments les plus importants sont en relation avec des calcaires, soit dans
les terrains métamorphiques anciens (Mokta-el-Hadid près de Bône,
Sous marocain), soit dans les terrains secondaires (Lias des Babors, du
Zacear, de Benisaf, de Melilla), soit dans l'Aptien des confins algéro
marocains (Ouenza, Djerissa).
Les minerais algériens comportent surtout des carbonates et des
hémalites très riches (48 à 60 p. 100 de fer). Ils sont généralement
purs de tout phosphore, rarement arsenicaux, souvent mangauésés. Ces
qualités les rendent très propres à la fabrication des fontes Bessemer,
des fontes de luxe.
Aussi, depuis 1902, la Grande-Bretagne consomme-t-elle près des
deux tiers de la production africaine. L'Allemagne reçoit un tiers des
expéditions environ. Les minerais arsenicaux de Douaria et de Rouïna
sont dirigés comme fret de retour des charbonniers sur Philadelphie où
ils sont traités dans les usines spéciales. Des quantités beaucoup plus
faibles, 30000 t. environ par an, partent en France à destination de nos
usines du Centre et en Italie à destination des usines électriques de la
région de Turin. Enfin, en 1923, d'importants tonnages sont arrivés,
par Dantzig, en Silésie polonaise. La faiblesse de notre change, la pureté
PRINCIPAUX GISEMENTS de MINERAI de FER

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160 ANNALES DE GÉOGRAPHIE.

de nos minerais leur permet de lutter contre les magnétite


Avant la guerre, la Tunisie exportait chaque année 500 000 t.
environ, l'Algérie, 1350000 t., le Maroc, 300000 t. Les exportations de
1922 sont sensiblement égales à celles de 1913. Après la mise en valeur
de l'Ouenza, ces chiffres sont susceptibles d'être doublés très rapide
ment; ils seront triplés quand le nouveau programme de chemins de
fer sera réalisé.
Les phosphates. — Si grande que soit l'importance des ressources
métalliques de l'Afrique du Nord, elle est cependant très inférieure aux
réserves en phosphates de chaux. Leuï découverte date de cinquante
ans à peine. En 1873, Philippe Thomas, vétérinaire de l'armée, signa
lait, le premier, l'existence d'une zone phosphatée près de Boghari;
douze ans plus tard, en 1885, il révélait, le premier encore, l'existence
de la bande phosphatée'au Nord des chotts du Djerid, dans l'extrême
Sud tunisien. Cette découverte assurait à la France, pour de longues
années, le monopole de la production des phosphates dans l'ancien
monde. Sur 3196000 t. de phosphates consommées en 1913, 2450000 t.
provenaient de nos possessions africaines, soit 2 millions de t. de
Tunisie, le reste des gisements constantinois.
Les phosphates de la Tunisie, de l'Algérie et du Maroc ont été
déposés, au début, dans les mers suessoniennes ou un peu plus récentes.
Ils font partie des craies phosphatées étendues sur l'Afrique du Nord,
depuis la mer Rouge jusqu'à l'Atlantique. Aucune autre contrée n'offre
un exemple pareil de continuité. Cette zone débute en Égypte où elle
est exploitée entre Gosseir sur la mer Rouge et Keneh sur le Nil ; on la
retrouve dans les oasis du désert libyque à Kharza et Dakhla ; des
affleurements ont été signalés en Cyrénaïque dans le Djebel Nefoussa, au
Sud-Ouest de Tripoli; enfin elle pénètre en Tunisie où la prospection a
révélé des masses considérables1.
Depuis 1896, plus de 23 millions de t. ont été exportées, principale
ment par les gisements de Metlaoui (15 millions de t.), Redeyef
(1200000 t.), Kalaa-es-Senam (1600000 t.), Kalaa Djerda (3500000 t.),
Rebiba (300000 t.).
Rien que leur exploitation ait été retardée par les défauts de la
circulation terrestre, les gisements constantinois ne paraissent pas
cependant de valeur inférieure : gisements du Djebel Onk au Sud de
l'Aurès ; gisements du Dyr et du Kouif sur le prolongement des masses
tunisiennes de Kalaa es Senam ; gisements de M'sila de Bordj Redir dans
la région deTocqueville; gisements de Mzolaau Sud des Babors (fig. 2).
Mais d'Est en Ouest, les dépôts perdent de leur importance. Les

1. Les principaux gisements de phosphates ont été mis en place sur notre carte :
pour l'Algérie et la Tunisie, d'après la carte de L.' de Launay, Gîtes minéraux et
métallifères, III, p. 689; pour le Maroc, d'après la Carte géologique de L. Gentil à
1 : 1 500 000. Paris, Larose.
RESSOURCES MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD. 161

affleurements signalés par Philippe Thomas, autour de Roghari, n'ont


fourni aucune roche de valeur industrielle. Dans le département d'Oran,
aucun dépôt n'a été signalé; cependant il n'est pas douteux que les ves
tiges des anciennes formations phosphatées, disparues par érosion, ne
soient la raison de l'excellence des terres situées autour de Sidi-bel
Abbès.
Au Maroc, la zone phosphatée est connue autour d'Oudjda, de
Meknès, de Petitjean, de Dar el M'toungui. Sans doute il serait encore
imprudent d'estimer la valeur de ces gisements. Mais les travaux de
ces dernières années permettent d'affirmer la richesse de la zone qui
s'étend entre deux points extrêmes situés à 400 km. de distance, entre
Oued Zem (200 km. S. E. de Casablanca) et Chichaoua (100 km. E. de
Mogador). Cette zone se prolonge vraisemblablement plus au Sud. A
eux seuls, les phosphates du Tadla forment le tiers du bassin. Leur
valeur dépasse certainement le milliard de tonnes. Mr Le Chatelier,
professeur au Collège de France, estime que leur puissance dépasse le
tonnage total des autres gisements en exploitation dans l'Afrique du
Nord1.
Les réserves en phosphates de la Berbérie ne sont certainement pas
inférieures à cinq milliards de tonnes ; c'est le tonnage reconnu de la
minette lorraine. La France, grâce à l'Afrique du Nord, est la seconde
puissance du monde pour ses richesses en phosphates de chaux ; elle
vient immédiatement après les États-Unis, dont les gisements sont géné
ralement de teneur plus riche.
Les qualités des phosphates africains sont, en effet, fort variables.
La teneur en phosphate de chaux varie, dans les sortes utilisables, de
50 à 80 p. 100. Mr Joleaud a remarqué qu'au voisinage des côtes de
l'ancienne mer éocène, là où domine la faune des poissons littoraux,
la teneur en phosphate est plus élevée : ainsi les gisements de Chi
chaoua au Maroc, du Djebel Onk dans le Sud constantinois, de Metlaoui,
de Redeyef dans le Sud tunisien. Plus au Nord, les gisements des
Hauts-Plateaux, plus éloignés de l'ancienne ligne de rivage, contiennent
des fossiles moins abondants d'espèces littorales et quelques restes de
poissons de haute mer ; ils sont également de teneur moins élevée en
phosphates : ainsi, El Boroudj au Maroc, le Kouif et le Dyr près de
Tebessa, Kalaât-es-Senam et Kalaa Djerda en Tunisie. Plus au Nord
encore, dans les gisements les plus septentrionaux, autour de Sétif et
de Tocqueville, les espèces littorales font défaut ; celles de haute mer
sont plus communes, les phosphates sont encore plus pauvres. Enfin
dans le Tell tunisien ou constantinois, dans la plaine de Meknès, où
abondent les poissons de haute mer, la teneur en phosphates de chaux

1. Sur les articles de Le Chatelier, consulter XXX'-XXXI' Bibliogr. géogr., 1920


1921, n° 1475.

ANN. DÉ GÉOG. — XXXIII* ANNÉE. U


162 ANNALES DE GÉOGRAPHIE.

descend au-dessous de 30 p. 100. Ces gisements sont inex


industriellement et cependant leur influence est considér
terres arables des environs.
Un moment ralentie par la guerre, l'exploitation a repris avec inten
sité. La production de 1922 accuse 2 millions de t. pour la Tunisie,
500000 t. pour l'Algérie,.83000 t. pour le Maroc. Bien qu'à ses débuts,
l'exploitation des gisements marocains se développe rapidement. Elle a
atteint 190001. en 1923. Le Directeur de l'Office des phosphates estime
que, prochainement, le centre de Kourigha, le chemin de fer et les
quais de Casablanca pourront être outillés pour exploiter 450000 t. par
an, soit 1500 t. par jour. A part un très faible tonnage transformé en
superphosphates dans les usines africaines, 58 p. 100 de la production
algérienne ont été expédiés en Allemagne, en Grande-Bretagne et dans
les Pays-Bas; le reste a été dirigé sur la France; 40 p. 100 de la
production tunisienne ont été envoyés en France, le reste en Angle
terre, en Belgique et en Italie. La production marocaine est en entier
consommée en France. Avant guerre, les phosphates africains étaient
activement concurrencés par les phosphates américains. Les sortes de
Floride, plus riches, arrivaient à Saint Nazaire. La lourdeur du fret,
depuis la guerre, a arrêté ce mouvement commercial.
Les demandes en 1922 ont été aussi fortes qu'en 1913. L'Algérie a
expédié 70 p. 100 de sa production sur l'étranger, bien que l'Alle
magne, grande consommatrice de ces engrais pour les terres glaciaires
de ses plaines septentrionales, ait restreint ses achats. Nul doute
que nos exportations doivent connaître des chiffres beaucoup plus consi
dérables. La mise eu valeur des gisements constantinois et marocains
permettra de faire face, sans difficulté, à l'augmentation de la clientèle.

IV. — La circulation des minerais et des phosphates.

Faute de combustibles indigènes, l'Afrique du Nord n'exploite pas


ses richesses minières. Les minerais sont articles d'exportation. Cepe
dant, de nombreux projets ont été établis pour créer, près des ports, des
métallurgies littorales où les minerais de l'intérieur seraient travaillé
avec des charbons anglais et allemands. C'est par une conceptio
analogue qu'ont été créés en France les hauts fourneaux du Boucau, d
Trignac, de Boulogne, plus récemment ceux de Caen et de Rouen
Pendant la guerre, les études ont été poussées fort loin dans le but
d'établir des usines autour de Bougie et de Bône. Les prix élevés du
charbon et du fret, après la paix, n'ont pas permis de réaliser de telle
espérances. D'autre part, l'absence presque complète d'énergie électriqu
est un obstacle pour l'emploi des fours, qui sont d'un usage courant
dans les Alpes italiennes, également dépourvues de combustibles. Dan
l'état actuel de nos connaissances, et tant que le coke restera le maîtr
RESSOURCES MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD. 163

du haut fourneau, le problème de la métallurgie africaine demeurera


insoluble.
Semblablement, malgré la proximité et l'abondance des pyrites
espagnoles du bassin de l'Huelva, malgré les facilités de recevoir l'acide
sulfurique nécessaire, l'Afrique du Nord exporte ses phosphates et
importe des superphosphates. Les colons se sont émus, des usines ont
été fondées sur le littoral à Casablanca, à la Maison carrée, à Bône, à
Tunis. Mais la production est loin de satisfaire à la demande. Pour sa
part, l'Algérie a importé, en 1922, 65000 t. de superphosphates,
2600 t. d'engrais à bases de phosphates, 1048 t. d'engrais phosphatés
divers, 418 t. de scories de déphosphoration. A vrai dire, les terres riches
de la Berbérie, principalement aux confins algéro-marocains, ont moins
besoin d'engrais que les sols épuisés de la France, ou les terres froides
de l'Allemagne du Nord, mais il demeure que les phosphates africains,
comme les minerais, sont surtout destinés à la clientèle européenne.
Il est regrettable que la plus grande partie de la production des
phosphates, la presque totalité de la production en minerais de fer,
soient exportés à l'étranger au détriment de la métropole. La raison de
cette anomalie se trouve dans les lois qui régissent le cabotage national.
Pour dédommager les armateurs de l'obligation qui leur est imposée
par l'inscription maritime de constituer leur équipage avec un mini
mum de 90 p. 100 de marins français, l'État leur concède le droit
exclusif des frets entre ports français et algériens. D'où les différences
suivantes. En 1913, la tonne de minerai de fer payait d'Alger à Mar
seille, 12 à 13 fr.; sur Saint-Nazaire, 11 fr. ; sur Dunkerque, 12 fr. ;
tandis que par vapeur anglais ou allemand, les frets étaient pour
Middlesborough, Imingham ou Newcastle, 8 fr. 20 ; pour Rotterdam,
8 fr. 80 ; encore dans ce dernier port, le navire était-il favorisé par la
vitesse de déchargement qui peut atteindre 2000 t. par jour.
L'exploitation des minerais africains est intimement liée aux ques
tions de circulation. D'autre part, nous avons vu que les richesses
minières augmentent d'Ouest en Est ; semblablement pour la produc
tion. Au Maroc, si le nombre des permis de recherches est considérable,
aucune concession n'est instituée en dehors des mines de fer du Riff et
des phosphates du Tadla qui sont gisements domaniaux. Le départe
ment d'Oran compte 14 mines concédées et 20 permis de recherches ; ces
chiffres sont de 23 et 33 dans le département d'Alger ; de 81 et 198 dans
le département de Constantine ; de 116 et de 892 en Tunisie. Strictement
localisés au Tell, dans le Riff, en Oranie et dans le centre algérien, les
gisements s'étendent sur les Hauts Plateaux et même dans l'Atlas saha
rien en Numidie et en Tunisie. De là la dilficulté des transports dans
ces régions de la Berbérie : trajets plus longs et plus accidentés.
Au Maroc il n'était pas encore question de chemins de fer, que les
sociétés exploitant les minerais de Melilla étaient déjà reliées au port
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par une voie ferrée. La ligne à voie normale des phosphat


sert la région de Marrakech-Casablanca avec embranchemen
Zem, sera en service avant le Tanger-Fez ou le Rabat-Oudjda
En Oranie, la future ligne de Margnia à Nemours facilite
tation des minerais de Maaziz, et des Beni-Snassen. Dans l
d'Alger le doublement de la ligne Affreville-Alger a pour
exportations de minerais de Rouïna et du Zacear. Mais c'es
dans la province de Constantine que la politique ferroviaire
ment liée à l'exploitation des ressources minérales. La p
lignes futures sont destinées à la desserte des mines. La lig
les gisements du Mokta-el-Hadid au port de Bône fut ouverte e
fut la première de l'Algérie. La future ligne de Msila à Bordj-b
est destinée à l'évacuation, par le port de Bougie, des phosp
région de Tocqueville. La ligne Bougie-Sétif, dont les trava
tructure sont adjugés, assurera l'évacuation des minerais de
Kabyliedes Babors. La politique ferroviaire du Sud constan
plus difficile à réaliser. La ligne de Tebessa à Bône par Sou
Duvivier est insuffisante pour le trafic intense des phosphates
du Kouif, des mines de fer de l'Ouenza, plus tard du Bou-Ka
partie Sud, l'infrastructure est trop légère pour les trains lour
la section Soukharas-Medjez-Sfa, les profils sont trop accidenté
circulation des trains de 500 t., communément employés po
chandises pondéreuses. Le gouvernement de l'Algérie a don
la construction d'un grand central minier, qui desservirait les
fer et les phosphates, actuellement abandonnés, du Djebel-O
sant aux phosphates du Dyr et du Kouif la ligne actuelle de
La ligne en projet éviterait les accidents montagneux des e
Soukharas et arriverait en plaine, un peu au Sud-Est de Du
Medjez-Sfa.
En Tunisie, ce sont les mines qui ont permis de gager les capitaux
nécessaires pour la construction des voies ferrées et qui fournissent les
principales ressources nécessaires à leur exploitation, non seulement
par les matières diverses qu'elles exportent, mais aussi par les four
nitures diverses qu'elles reçoivent de l'extérieur. C'est l'exploitation
des phosphates de Mellaoui et de Redeyef qui a décidé la construc
tion de la ligne Gafsa-Sfax, l'exploitation du gisement d'Aïn-Mou
lares a été la raison de la prolongation vers l'Extrême-Sud de la
ligne Sousse-Kairouan. Les minerais de fer du Djebel-Djerissa et du
Slata, les phosphates de Rebiba, de Kalaa-es-Senam, de Kalaa Djerda
ont décidé la dérivation de la ligne Tunis-le-Kef sur la frontière algé
rienne. Ce sont les minerais de Nefzas et de Douaria qui entretiennent
la ligne Bizerte-Tabarca. Le tonnage des minerais et des phosphates
représente, à lui seul, 10 p. 100 environ du trafic sur le réseau exploité
par la Compagnie du Bône-Guelma, 92 p. 100 sur celui de la Compa
RESSOURCES MINÉRALES DE L'AFRIQUE DU NORD. 165

gnie des phosphates et du chemin de 1er de Gafsa. La mine et le


chemin de fer appartiennent à la même Société.
La production des mines insuffle une vitalité remarquable aux
ports de la Berbérie. Les minerais africains figurent pour un chiffre
important au bilan des exportations : 10, 4 p. 100 en Algérie; 83 p, 100
en Tunisie.
Au Maroc, Melilla n'est qu'un port minier, pour la sortie des mine
rais de fer ; dans un avenir prochain, Mogador sera le port des phos
phates de Chichaoua, et Casablanca le port des phosphates du Tadla.
Cet important tonnage compensera les pertes du trafic voyageurs,
dérivé sur Rabat, quand le Tanger-Fez sera construit.
En Algérie, la situation côlière de plusieurs gisements a décidé les
Sociétés concessionnaires à construire des ports particuliers. Plus de la
moitié des minerais de fer africains s'embarque en dehors des ports
nationaux : Benisaf en Oranie; Breïra, Larrath, Gouraya dans le Tell
algérien, Mansouriah en Numidie. Mais par ailleurs, les minerais
encombrent le port d'Alger : 540000 t., près du tiers des exportations,
ont été expédiés en 1913. Ils ont décidé l'agrandissement des bassins et
l'augmentation des darses. A Bougie, les richesses du sous-sol de la
Kabylie fournissent l'élément le plus important et le plus régulier du
commerce d'exportation (75 000 t. sur 256 000 t.). Bône doit sa prospé
rité à l'exploitation des gisements du Mokta-el-Hadid. Avant l'ouverture
de la mine, la ville comptait 10000 hab., elle en compte 41000 actuelle
ment. Son port exporte 200000 t. de phosphates, 16 900 t. de minerai
de plomb, 250001. de minerai de zinc : il s'organise pour l'évacuation
des minerais de l'Ouenza et du Bou-Kadra, des phosphates du Kouif,
du Dyr et du Djebel Onk.
En Tunisie, ce sont les richesses minérales qui ont organisé les
ports. Bizerte est équipée pour charger 500 t. de minerai par heure. Les
appareils de la Goulette, le port de Tunis, permettent de stocker
60000 t. de minerai; et la Société de Saint-Gobain a installé, pour
l'embarquement des phosphates de Rebiba, des appareils de levage
d'une puissance américaine. Enfin dans le Sud, la Compagnie des phos
phates de Gafsa peut charger trois vapeurs de 3000 t. chacun, par jour,
deux à Sfax et un à Sousse.
Bientôt, toutes ces installations seront insuffisantes. Comme pour les
chemins de fer, le gouvernement est sans cesse obligé d'étudier de nou
veaux projets d'agrandissement. Ils sontà peine réalisés, qu'ils ne corres
pondent plus à la prospérité toujours plus grande de l'industrie minière.

Conclusion.

Quand on visite l'Ouenza, on remarque parmi les bâtiments, les


machineries, les chevalements, les cités ouvrières tout l'équipement de
166 ANNALES DE GÉOGRAPHIE.

la mine moderne, une humble masure, modeste dans sa for


ses dimensions ; c'est la première laverie du minerai de c
l'émouvant souvenir de la première exploitation. On raco
premier concessionnaire du gisement de cuivre, pressé de
droits sur le gisement de fer, — la valeur du permis était de
répondit à l'ingénieur des mines : « A quoi bon, quel est l'
viendra jamais exploiter du fer à l'Ouenza ? »
A ce moment de l'évolution de l'industrie, l'une des min
puissantes de la Tunisie était échangée contre un fusil de
munitions. C'était l'époque où les prospecteurs, du type an
s'en allaient par le bled à la recherche du cuivre, du plomb
Ces temps héroïques sont révolus. De l'un de ces pionniers,
a tracé un savoureux portrait. Les derniers d'entre eux o
Numidie et la Tunisie pour s'élancer à la conquête de l'Atla
Aujourd'hui l'industrie minière de l'Afrique du Nord est
difficultés de l'enfance ; son adolescence présente déjà les
d'une vitalité remarquable; dès maintenant elle permet d'e
vie extrêmement prospère. Si l'exploitation connaît d'autr
des capitaux considérables, souvent en pure perte, ont ét
pour la conquête des gisements, l'influence civilisatrice de
étendue sur tout le pays. Les mines décident le tracé d
voies ferrées; elles améliorent les ports, en créent de nou
la prospérité du port minier du Benisaf suscite l'établiss
ligne Tlemcen-Benisaf qui colonise les régions traversées.
mines sont les agents de l'humanité à la conquête de la st
désert. Grâce à des travaux d'adduction d'eau, des cités ouv
été établies dans la brousse marocaine près d'El Boroudj,
désertiques des chotts du Djerid en Tunisie.
Depuis plusieurs années, les redevances payées par les ex
de Gafsa contribuent largement à l'équilibre du budget t
gouvernement algérien escompte pareillement des bénéf
rables de la mise en valeur de l'Ouenza. Le Protectorat mar
son dernier emprunt sur les ressources phosphatières du
exploite directement.
L'Afrique du Nord a joué un rôle de premier plan dans l
l'ancienne Rome, parce que ses ressources agricoles const
grenier où puisait la cité antique. Actuellement, la Franc
toujours de quoi se ravitailler en blé, en viande, en vin. C
situation économique est loin d'être dominée uniquement
duction agricole. Les richesses du sous-sol ont été invent
sieurs d'entre elles sont exploitées. La mine a modifié les g
de l'Afrique du Nord.
J. Levainville.
i" novembre 1923.

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