Fiche 2
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TRAVAUX DIRIGES
Le droit est généralement appréhendé comme un corps de règles extérieures à la volonté des individus
et dont la méconnaissance entraine une sanction socialement organisée.
En ce qui concerne l’Administration, elle fait l’objet d’une double approche. Du point de vue organique,
elle est perçue comme l’ensemble des personnes publiques formant l’Etat. Du point de vue fonctionnel,
elle est envisagée comme l’ensemble des activités prises en charge par les démembrements du pouvoir
exécutif en vue du maintien de l’ordre public et de la satisfaction des besoins d’intérêt général.
Dès lors, le droit administratif peut être appréhendé comme l'ensemble des règles juridiques applicables
à l’Administration et aux personnes privées agissant au nom ou pour le compte d'une personne publique.
Ces règles émanent de diverses sources qui se rattachent aussi bien au droit interne (public et privé) qu'au
droit international et au droit communautaire.
L’objet de cette séance est précisément d'amener les étudiants à s'interroger sur les différentes sources
du droit qui régit l'Administration. Il s’agira plus particulièrement d’une initiation à la méthodologie de la
dissertation en droit administratif.
I. METHOLOGIE DE LA DISSERTATION
Une dissertation est une démonstration et non un récit. En présence d’un sujet, l’étudiant doit respecter
cinq étapes sans en négliger aucune.
Comprendre le sujet c’est identifier à la fois la question posée et les champs de connaissances à utiliser.
Il faut donc isoler la question sous-jacente, et sélectionner le contexte des arguments à utiliser pour y
répondre.
- la première est la confusion entre analyse juridique et synthèse des faits. Très peu de sujets portent sur
la synthèse des faits et pourtant l’expérience a démontré que la plupart du temps beaucoup d’étudiants
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s’adonnent à une description, une récitation à peine réussie d’une partie du cours ou d’un ouvrage. Dans
l’analyse juridique l’accent est mis sur les normes, sur le droit administratif alors que la synthèse se livre
à un résumé de la genèse ou des caractéristiques d’un organe ou d’une action;
- la seconde confusion serait d’assimiler la synthèse factuelle et le débat. La synthèse factuelle nécessite
une description rapide mais précise de la question, une évaluation analytique de ses causes, une mise en
évidence rétrospective de ses conséquences. Un jugement polémique ou des propositions de modifications
ne sauraient nullement être les bienvenus. Au contraire, un sujet qui porte sur un débat invite à présenter
la démonstration comme une discussion, une série d’arguments, simplement illustrés en second plan par
des données factuelles. Dans beaucoup de copies, des étudiants se hâtent d' exposer des points de vue,
des critiques, des opinions personnelles, des jugements de valeurs ou encore à analyser l’efficacité ou la
non pertinence de tel ou tel autre principe ou règle de droit. La plus grande prudence s’impose pour
deux raisons au moins. D’abord l’objet du droit administratif général (le cours) est d’exposer le cadre
juridique de l’action administrative c'est-à-dire les règles juridiques applicables à l’Administration et leurs
sources, les ordres juridiques susceptibles de contrôler l’Administration et la répartition des compétences
entre eux, le principe et la portée du principe de la soumission de l’Administration au droit. Il s’agit donc
d’une approche essentiellement juridique destinée à initier l’étudiant à la connaissance des règles écrites
et jurisprudentielles applicables à l’Administration. Ensuite une vraie démarche intellectuelle est celle qui
permet de distinguer entre deux phases : une phase de compréhension des phénomènes et une phase de
discussion des phénomènes. La deuxième année est plutôt consacrée à la compréhension de l’approche
juridique qui sera complétée plus tard en quatrième année par la science administrative ;
- enfin la troisième confusion consisterait à substituer un diagnostic à un pronostic. Le diagnostic insiste sur
la genèse, l’historique ou encore l’état actuel de la question alors que le pronostic (sujet rare) met l’accent
sur l’évolution possible d’un sujet.
Les connaissances se trouvent dans le cours mais encore une fois il est insuffisant, il est complété par les
connaissances acquises en travaux dirigés qui sont également insuffisants. Par conséquent, il convient de
compléter ces connaissances par des notes personnelles que l’étudiant confectionne à partir de la
bibliographie générale et spéciale du cours.
- une analyse juridique, même purement technique, s’exerce toujours dans un certain contexte. Il faut donc
être capable de rattacher le thème d’étude à des données plus générales, dans la matière même du
droit administratif ;
-la recherche des idées et des connaissances en droit explore au moins deux voies. Tout d’abord, la
connaissance générale de la règle de droit en vigueur ; ensuite, l’application de la règle de droit à des
situations réelles.
À l’issue de ce rassemblement de matériaux, il est nécessaire de se poser deux questions : n’ai-je traité
que le sujet ? (détection des hors sujet). Ai-je traité tout le sujet ? (vérification des omissions).
- les plans analytiques ou logiques : Ils sont les plus simples et ressemblent parfois à des plans types
(statut/fonction ; différences/ressemblances ; nature/régime; conditions/effets; sens, portée/valeur);
- les plans synthétiques ou plans d’idées : ce sont les plus délicats à construire. Ils doivent cependant être
recherchés pour leur force de conviction et leur clarté. Ils exposent une thèse que l’on défend à l’aide de
trois ou quatre arguments qui font l’objet des diverses parties du devoir. Il faut avoir terminé le plan pour
construire l’introduction.
- d’une attaque destinée à attirer l’attention (citation, anecdote, paradoxe) et à la placer immédiatement
au cœur du sujet ;
- de l'explication du sujet qui consiste à mettre les termes de celui-ci ensemble pour déterminer la
compréhension qu'il faut en avoir ;
- des éléments de droit comparé ou des aspects historiques s’ils peuvent éclairer le sujet ;
- de la justification du plan à l'aide des grandes idées autour desquelles seront organisées les sous-
parties ;
- de l'annonce du plan, c'est-à-dire des titres qui vont constituer les deux parties des développements.
Il n’y a pas d’introduction type, mais il n’y a pas de bonne introduction qui ne suive ce schéma.
La durée impartie pour traiter un sujet d’examen ou de devoir ne permet jamais à un étudiant
normalement constitué de rédiger l’intégralité de la composition au brouillon. Seule l’introduction réclame
un tel investissement de temps.
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Malgré cette absence de filet, il reste à se conformer à certains usages.
L’orthographe (morphologie, syntaxe, ponctuation) est supposée connue de tous les étudiants. Les
abréviations sont strictement proscrites. Les sigles sont tolérés pour les institutions dont l'identification ne
pose pas problème.
Le vocabulaire, notamment juridique, est précis. Les mots doivent être employés dans leur sens
couramment admis.
Le style “plat” mais clair, est préférable au style brillant, mais creux, ambigu ou incompréhensible. La
présentation matérielle du devoir peut être un soutien de la clarté des idées. L’écriture doit être lisible et
proportionnée. Le devoir doit être mis en page (titres pour les deux parties, espacements pour les sous
parties et transitions, paragraphes à chaque changement d’argument). Toute copie exigeant, sur ces
points, un effort inhabituel du correcteur sera directement ou indirectement pénalisée.
En ce qui concerne la conclusion, elle n’est pas obligatoire mais il faut savoir qu’il est toujours utile
de conclure pour montrer que le sujet a été traité et bien traité.
Enfin, prévoir une dizaine de minutes pour se relire est indispensable. Cette étape se passe de longs
commentaires mais peut faire gagner bien des points.
II. BIBLIOGRAPHIE
1. Ouvrages et thèse
2. Articles
- Abd. A. D. KÉBÉ, « Le déclin de l’exorbitance du droit administratif sénégalais sous l’effet du droit
communautaire », disponible sur www.afrilex.u.bordeaux4
- A. BOCKEL et ali, « Chronique d’Administration publique », Annuaire du Tiers Monde, Volume II, 1983,
p. 165 ;
- Ch. DEBBASCH, « Le droit administratif, droit dérogatoire au droit commun ? », Mélanges René
Chapus, Paris, Montchrestien, 1992, p. 128 et s ;
- D. LOSCHAK, « Le principe de légalité, mythes et mystifications », AJDA, 1981, p. 387 ;
- D. SY, « L’évolution du droit administratif sénégalais », EDJA, n° 67, octobre-novembre-décembre
2005, p. 39 et s.
- F. BEROUJON, « Évolution du droit administratif : avancée vers la modernité ou retour aux temps
anciens », RFDA, mai -juin 2008, p. 449 ;
- E. SCHMITD, « Droit administratif et justice administrative. Permanence et Renouveau. Principes de
base d’une réforme du droit administratif », RFDA, Mai-Juin 2008, p. 427.
- F. MELLERAY, « Le droit administratif doit-il redevenir jurisprudentiel ? Remarques sur le déclin
paradoxal de son caractère jurisprudentiel », AJDA, 2005, p. 67.
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- G. BRAIBANT, « Du simple au complexe : quarante ans de droit administratif », EDCE, n°45, p. 409
et s ;
- G. VEDEL, « La Loi des 16-24 Août 1790 : Texte ? Prétexte ? Contexte ? », RFDA, Septembre-
Octobre 1990, p. 12-25.
- G. VEDEL, « Le droit administratif et les autres disciplines, les zones frontières », RDP, 1998, p. 951
et s.
- J. CHEVALLIER, « Le droit administratif droit de privilège », Pouvoirs, n° 46, 1988, p. 57 ;
- J. CHEVALLIER, « Du principe de séparation au principe de dualité », R.F.D.A, Septembre- Octobre
1990, pp. 26-37 ;
- J. L. MESTRE, « Les fondements historiques du droit administratif français », EDCE, n° 34, 1982-1983,
p. 65.
- J. M. NZOUANKEU, « L’érosion du droit administratif face aux assauts du droit privé. Remarques sur
les effets pervers de la concurrence entre le droit administratif et le droit privé au Sénégal »,
communication à la 4ème édition des « Rencontres de Dakar », Colloque sur le thème Droit
administratif : convergence ou concurrence des disciplines juridiques, Dakar, Université Cheikh Anta
Diop, 10-11-12 juillet 2019.
- P. MOUDOUDOU, « Les tendances du droit administratif dans les États d'Afrique noire francophone",
EDJA, n° 81, mai-juin 2008, p. 37.
- S. Y. LATH, « Les caractères du droit administratif des États africains de succession française. Vers un
droit administratif africain francophone ? », RDP, n°5, 2011, p. 1254.
- Y. GAUDEMET, « L’exportation du droit administratif français. Brèves remarques en forme de
paradoxe », Mélanges Philippe Ardant, Paris, LGDJ, 1999, pp. 432-441.
- J.-M. PONTIER, « Qu'est-ce que le droit administratif ? », AJDA, 2006, (extrait), p. 1937.
- S. M. B. NIANG, Étude des rapports entre le droit communautaire et le droit administratif des Etats membres
de la CEDEAO et de l’UEMOA, Thèse, UGB, 2020, (extrait), p. 274.
Document n° 1 : J.-M. PONTIER, « Qu'est-ce que le droit administratif ? », AJDA, 2006, (extrait), p. 1937.
La question de savoir ce qu'est le droit administratif n'est pas celle des sources de ce droit, mais ces dernières
retentissent sur ce qu'il est. Les normes communautaires, notamment, infléchissent ce droit (mais également les
autres), le transforment de l'intérieur (au point, selon certains, de le dénaturer), l'enrichissent aussi, apportant
de nouveaux concepts, de nouvelles notions, qui s'insèrent dans le droit administratif, faisant de celui-ci un
droit de contenu et de règles techniques plus que de principes.
Etonnant droit qui ne cesse de faire l'objet de querelles sur son utilité comme sur son objet, sur le rôle de la
jurisprudence dans sa perpétuation, bien que le temps ait en partie atténué les critiques et les interrogations,
mais qui sont toujours prêtes à renaître, comme si, à l'échelle des juristes, on reproduisait, à propos de ce droit,
la tendance très française aux grandes querelles de principe.
Etrange droit, car ce « droit de l'administration » n'est pas seulement le droit applicable, avec les réserves
énoncées, à l'administration, il est également, aspect beaucoup moins mis en valeur, un droit produit par
l'administration. Le droit administratif est, pour une partie non négligeable et difficilement quantifiable, un
droit sécrété par l'administration. Quoi que l'on veuille, les « normes » émises par elle sont source de droit,
modèlent le droit qualifié d'administratif. S'il s'agit d'une évidence, il faut cependant rappeler, car l'on aurait
tendance à l'oublier, que toutes les normes émises par l'administration ne font pas l'objet de recours devant
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le juge, cela ne concerne même qu'une infime partie de ces règles. La pratique par les administrations modèle
ces règles, les adapte en permanence, les interprète. Le sens de la règle est d'abord donné par
l'administration. Pour le citoyen, la règle applicable est d'abord celle que l'administration applique, telle
qu'elle l'applique, en tenant compte, éventuellement, des demandes qui lui sont adressées par les administrés.
Or le réalisme impose de constater que les agents publics se fient d'abord aux instructions de l'administration
et les décisions du juge, lorsqu'elles sont appliquées (ce n'est pas toujours le cas) le sont lorsqu'une instruction
l'a indiqué, soit en moyenne plus d'un an après. Quand mesurera-t-on la place de ces instructions et circulaires
dans la définition, l'interprétation et l'exécution de la règle ? Et, dans certains pays, même démocratiques, les
actes émis par l'administration, ou certaines administrations (locales par exemple), ne sont pas susceptibles de
contrôle, que ce soit par un juge spécifique ou par le juge que nous appelons judiciaire. La directive
administrative, au sens large (et français) du terme, n'est pas seulement un instrument de l'action administrative,
elle rétroagit sur la règle.
On ne peut se contenter de parler du droit administratif tel qu'il existerait idéalement, en prenant le principe
ou la règle, car ce serait contradictoire avec la notion de droit administratif telle que nous l'avons développée
en France. Il n'existe pas de droit administratif dans sa pureté que l'on pourrait opposer à une pratique qui
s'écarterait plus ou moins du modèle. Le droit administratif est le produit de mouvements incessants entre
l'administration, le juge, sans oublier le législateur, et la doctrine elle-même, qui contribue à infléchir ce droit.
Le droit administratif est nécessairement un droit vivant, en perpétuelle recomposition et reconstruction.
Etrange droit, encore, que ce droit administratif qui, tel que nous l'entendons en France, ne cesse d'évoluer, se
retirant de certains domaines, en gagnant bien d'autres. Et l'on peut se demander s'il ne se perd pas en
s'étendant, s'il ne disparaît pas en se démultipliant et en se spécialisant en droits de plus en plus spécifiques
qui ont pris ou prennent progressivement leur autonomie par rapport au droit administratif (urbanisme,
marchés publics, etc.) que l'on est obligé, de ce fait, de qualifier de « général », en se morcelant, en devenant
une composante parmi d'autres au sein d'un droit dit « transversal » (par exemple, le droit de l'environnement,
avec un droit administratif de l'environnement).
L'extension du champ du droit administratif peut être un trompe-l'oeil et signer sa dissolution ou son absorption
par d'autres droits. Dans d'autres champs des disciplines juridiques certains, apparemment compréhensifs à
l'égard du droit administratif, ou réceptifs à ce dernier, parce qu'ils le reconnaissent, en sont en réalité des
destructeurs ou des fossoyeurs, dans la mesure où ils ont tendance à en faire une annexe du droit privé. C'est
ce que certains « privatistes » sont prêts à faire avec, par exemple, le « droit public de la concurrence », qui
ne serait qu'une branche d'un droit plus large, naturellement privé, le droit de la concurrence. Mais peut-être
cela ne fait-il que refléter ce vaste mouvement dans le monde qui, à notre époque, valorise l'action des
personnes privées et dévalue celle de l'Etat.
Le droit administratif ne peut plus être ce qu'il fut parce que, entre autres raisons, l'Etat et, par voie de
conséquence, l'administration n'ont plus l'incontestabilité, la légitimité, la lisibilité, qu'ils eurent. Le doute et
même, pour employer la terminologie et l'analyse de Paul Ricoeur, le soupçon, n'est pas seulement
métaphysique, idéologique, psychologique, il est politique et administratif, s'appliquant à ce qui apparaissait
aux Français des générations précédentes comme une référence immuable, l'Etat et, par suite, son
administration. L'un et l'autre paraissaient déterminés et figés, sinon pour l'éternité, du moins pour une grande
durée, leur transformation et leur difficile adaptation jettent le trouble. Le droit administratif a été
principalement le droit protecteur de l'Etat et de son administration, en faisant la part de ce qu'il convenait
de reconnaître comme droits aux administrés. Ces droits sont devenus de plus en plus exigeants et insistants,
tandis que le droit de l'Etat devenait moins affirmé et moins saisissable.
Mais ce droit est rassurant, également, par son aptitude à se transformer, à se renouveler, à se recomposer
sans cesse en fonction des politiques définies par les gouvernants et des évolutions de la société dont il est un
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kaléidoscope, en fonction, également, des autres droits qui l'imprègnent et l'influencent. De ce fait il est difficile
de dire ce que sera le droit administratif, mais on peut au moins retenir quelques traits du droit administratif
d'aujourd'hui.
Ce droit tend à ne plus être seulement un droit de l'administration mais à devenir un droit des citoyens, parce
que protecteur de ces derniers. Et, pour s'inscrire dans une distinction qui ne peut évidemment prétendre à
l'exhaustivité et encore moins à l'exclusivité, mais qui demeure utilisable, celle entre les droits de et les droits
à, ce droit administratif qui est le nôtre est devenu aussi, du fait notamment du législateur, le droit d'un droit
à, celui des citoyens à l'administration, si possible « de qualité ».
Mais ce n'est peut-être pas ce trait qui caractérise le mieux le droit administratif français, car il est partagé
par les droits administratifs d'autres pays, qui nous ont peut-être précédés sur ce point. Qu'est-ce donc que le
droit administratif français ? La spécificité du droit administratif français se situe sur trois points.
Le droit administratif demeure d'abord ce qu'il a été, ce qui l'a défini, ce qu'il ne peut pas ne pas être, un
droit de dérogation. Mais ce droit est dérogatoire, non point seulement, ni peut-être principalement, par des
prérogatives dites exorbitantes (l'exorbitance étant en question), sans qu'il soit nécessaire de préciser par
rapport à quel droit (l'expression de « droit commun » étant très discutable et l'exorbitance pouvant jouer à
l'intérieur même du droit administratif), mais par des sujétions qui le sont tout autant, les unes et les autres
étant conditionnées, déterminées, par une finalité, l'intérêt général.
Le droit administratif est, ensuite, devenu par excellence le droit de confrontation des droits, qu'il s'agisse du
droit public ou du droit privé, des branches du droit public entre elles, des droits administratifs spécialisés
eux-mêmes et, naturellement, du droit interne et du droit communautaire, du droit interne et du droit
international. Mais cette confrontation signifie tout autant interactions qu'opposition.
Plus encore, le droit administratif français est un droit d'équilibre (par définition instable) des droits, droits de
l'Etat et droits des autres personnes morales, droits de l'Etat et droits des citoyens, faisant la part de ce qu'il
faut reconnaître à ces derniers sans oublier la matrice originelle qui le constitue. Et si l'image de la balance
est celle qui représente traditionnellement la justice, le juge administratif est celui qui met en balance ces droits
respectifs, qui corrige le mouvement d'une balance penchant autrefois nettement du côté de l'Etat et que
certains, aujourd'hui, voudraient voir pencher du côté des citoyens. Mais le droit administratif ne peut perdurer
dans son être que s'il parvient à tenir ces deux exigences.
Document n°2 : S. M. B. NIANG, Étude des rapports entre le droit communautaire et le droit administratif des
Etats membres de la CEDEAO et de l’UEMOA, Thèse, UGB, 2020, (extrait), p. 274.
L’originalité de l’intégration juridique ouest-africaine est essentiellement due aux solutions novatrices
apportées par ses pères fondateurs qui ont su faire de la CEDEAO et de l’UEMOA des ordres juridiques
spécifiques quant à leur nature et leurs principes de base. Dès les origines de leur construction, les
Communautés d’intégration ouest-africaine ont affirmé la spécificité du contexte dans lequel se construit
progressivement un ordre juridique communautaire. Cette position des auteurs des traités de la CEDEAO et
de l’UEMOA se justifie dans la mesure où les organisations communautaires sont un genre sui generis oscillant,
de par leurs divers aspects, entre une organisation internationale classique et un État. La force avec laquelle
le droit communautaire pénètre les ordres juridiques nationaux est sans précédent. Dans le domaine du droit
administratif, l’influence du droit communautaire semble être un des phénomènes les plus perturbateurs des
principes de base sur lesquels les États ouest-africains ont construit leurs systèmes de droit public.
Il apparait dès lors que l’ouverture au droit communautaire pose un véritable problème d’évolution et de
transformation du droit administratif des États ouest-africains. L’avènement d’un processus de
communautarisation du droit des États membres de la CEDEAO et de l’UEMOA a complétement bouleversé
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les données fondamentales à partir desquelles le droit administratif s’est construit depuis plus d’un demi-
siècle. Le droit communautaire, d’esprit libéral, cherche à reconstruire le droit administratif des États membres
à partir des exigences de libéralisation qui fondent la construction du marché commun ouest-africain.
L’influence qu’exerce le droit communautaire a pour effet une évolution du droit administratif des États
membres vers la prise en compte de ces exigences de libéralisation. Cette influence a conduit certains auteurs
à parler de transformation, de mutations ou encore de nouvelles tendances du droit administratif des États
ouest-africains. Or, comme le suggérait L. DUGUIT, pour étudier l’évolution d’une matière juridique, il est
nécessaire de passer par ses sources et fondements afin de comprendre la philosophie et les principes
fondamentaux qui lui donnent sa structure actuelle et lui insufflent ses principales caractéristiques. En
appliquant cette méthodologie à l’étude de l’évolution du droit administratif des États ouest-africains, on
aboutit à un double constat : l’influence du droit communautaire ouest-africain a entrainé une adaptation
progressive des sources et fondements du droit administratif des États membres de la CEDEAO et de
l’UEMOA (...).