Theorie de L'infraction Et de La Sanction

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THEORIE DE L’INFRACTION ET DE LA SANCTION

Dispensé à l’Université Catholique de Yaoundé


Année 2021/2022
Pr Hervé Magloire MONEBOULOU MINKADA, Agrégé de Droit privé et des
Sciences Criminelles,
Enseignant à l’Université de Douala.
Tel : 679783741 /699127018
Plan du cours

Introduction

PREMIERE PARTIE : THEORIE DE L’INFRACTION

TITRE 1 : THEORISATION DES INFRACTIONS A REGIME COMMUN

CHAPITRE 1 : LES INFRACTIONS DE DROIT COMMUN

SECTION 1 : LA THEORIE DE L’ETAT DE DROIT

Para 1 : L’economie de la théorie sur l’Etat de droit


Para 2 : Les infractions de droit commun saisis par l’Etat de droit

SECTION 2 : LA SUBSTANCE DES INFRACTIONS DE DROIT COMMUN

Para 1 : Une définition positive


Para 2: Une définition négative

CHAPITRE 2 : LES INFRACTIONS TRANSNATIONALES

SECTION 1 : LA THEORIE EXPLICATIVE DES INFRACTIONS TRANSNATIONALES

Para 1 : L’élément d’extranéité


Para 2 : L’internationationalisation des droits pénaux nationaux
SECTION 2 : LE CONTENU DES INFRACTIONS TRANSNATIONALES

Para 1 : La substance des infractions transnationales


Para 2 : Le régime des infractions transnationales

TITRE 2 : THEORISATION DES INFRACTIONS A CARACTERE TERRORISTE

1
CHAPITRE 1 : LA CONTROVERSE DOCTRINALE SUR LA REPRESSION DU TERRORISME

Section 1 : LA DOCTRINE DE L’ADMISSION DU DROIT COMMUN DANS LA REPRESSION DU


TERRORISME

Section 2 : LA DOCTRINE DE L’EVICTION DU DROIT COMMUN DANS LA REPRESSION DU


TERRORISME
CHAPITRE 2 : LA CARACTERISATION DES INFRACTIONS TERRORISTES

SECTION 1 : LES ACTES TERRORISTES, UNE INSTRUMENTALISATION DES INFRACTIONS DE


DROIT COMMUN
SECTION 2 : L’ACTE TERRORISTE, UN CRIME IDEOLOGIQUE CONTRE L’ETAT

SECONDE PARTIE : THEORIE DE LA SANCTION

TITRE 1 : LA THEORIE DE LA SANCTION DANS SON ENTENDEMENT


CHAPITRE 1 : LA THEORIE SUR L’EXISTENCE DE LA SANCTION PENALE
SECTION 1 : L’ADMISSION DE LA SANCTION PENALE COMME REPONSE A L’INFRACTION
Para 1 : Les supports idéologiques
Para 2 : La matérialisation
SECTION 2 : L’exclusion de la sanction pénale comme réponse à l’infraction
Para 1 : La doctrine excluant la sanction pénale comme réponse à l’infraction
Para 2 : Les alternatives de la sanction pénale comme réponse à l’infraction
CHAPITRE 2 : LA THEORIE SUR LES FINALITES DE LA SANCTION PENALE
SECTION 1 : La sanction pénale pour punir
Para 1 : Les supports idéologiques
Para 2 : La matérialisation de la punition
SECTION 2 : La sanction pénale pour resocialiser
Para 1 : Le fondement doctrinal de la resocialisation
Para 2 : La matérialisation de la resocialisation
TITRE 2 : LA THEORIE DE LA SANCTION PENALE DANS SON DEPLOIEMENT
CHAPITRE 1 : LA SANCTION PENALE ENTRE IMPORTANCE ET INDIFFERENCE
SECTION 1 : L’IMPORTANCE DE LA SANCTION PENALE EN DROIT PENAL NATIONAL
Para 1 : La lecture du droit pénal général à partir de la sanction pénale

2
Para 2 : La lecture de la procédure pénale à partir de la sanction pénale
SECTION 2 : L’INDIFFERENCE DE LA SANCTION PENALE EN DROIT INTERNATIONAL PENAL
Para 1 : une indifférence dans l’existence du droit international pénal
Para 2 : Une indifférence dans le déroulement de la procédure pénale internationale
CHAPITRE 2 : LA SANCTION POUR LE DELINQUANT OU POUR LA VICTIME
SECTION 1 : LA SANCTION PENALE POUR LE DELINQUANT
Para 1 : L’orientation de la sanction pénale sur le délinquant
Para 2 : Le déploiement du délinquant dans la sanction pénale
SECTION 2 : LA SANCTION PENALE POUR LA VICTIME
Para 1 : La prise en compte de la victime dans la sanction pénale
Para 2 : L’influence matérialisée de la victime sur la sanction pénale

Introduction

L’infraction et la sanction ont toujours été étudiées dans une approche


normative. Elle consiste à partir des textes en principal et de la jurisprudence
en complément pour saisir ces composantes du droit pénal. Cette approche
normative va être mise de côté au profit de l’approche théorique. Elle consiste
à insister sur les considérations idéologiques, en vue d’expliquer et de justifier
les choix du législateur. Une définition des concepts s’impose pour en cerner le
contenu.

La notion d’infraction est polysémique. Quatre sens vont être explorés. Le


premier concerne la définition de l’infraction en politique criminelle. C’est
une violation de la loi au sens large = la normativité. Il peut être question de la
loi civile, pénale, et administrative. Ce qui entraîne : infraction civile, infraction
pénale et infraction administrative. L’infraction comme violation de la
normativité ne se confond pas avec la déviance comme violation de la
normalité. C’est un comportement contraire à la norme sociale. Le deuxième
sens du terme infraction est en droit pénal coutier africain. Ici, l’infraction

3
était certes une atteinte à l’ordre établi. Cependant le fondement de
l’infraction n’est pas le mauvais usage de la liberté ou la dangérosité ; mais
plutôt l’influence qu’un mauvais avait sur l’individu. La société devrait donc
prendre les mesures necessaires pour sauver le délinquant. Et dans le cas où ce
sauvetage n’était pas possible, il fallait éloigner le délinquant de la
communauté ou l’éliminer physiquement. Et le troisième sens du terme
infraction est rapprochable des cores crimes ou crimes contre l’humanité. Ce
sont des atteintes graves aux fondements de l’ordre international. Les crimes
contre l’humanité remettent en cause la paix et la sécurité internationale
(crime de guerre et crime d’agression) et la dignité humaine (crime contre
l’humanité et crime de génocide). Et le quatrième sens du terme infraction
correspond aux actions ou omissions prévues et réprimées par la loi pénale.
Cette derniere définition cadre avec l’enseignement, qui sera hebergé en droit
pénal général.

Quant à la sanction, elle désigne une peine ou une mesure de surêté applicable
au responsable d’une infraction. La peine suppose que l’infracteur est
conscient et lucide pendant la comission de l’infraction. Et la mesure de surêté
s’applique à une personne inconsciente pendant la commission de l’infraction.

Théoriser l’infraction et la sanction consiste à lire dernière ces mecanismes la


philosophie et la pensée ou l’idéologie qui les structurent. Il faudra au soir de
cette lecture, materialiser les types d’infractions et de sanctions pour coller le
discours à la réalité. En suivant l’intitulé de l’enseignement, la théorie de
l’infraction (première partie), va précéder celle de la sanction (seconde partie).

PREMIERE PARTIE : THEORIE DE L’INFRACTION

La théorie de l’infraction peut être abordée en deux sous axes : la théorisaton


des infractions à régime commun et à caractère terroriste.
4
TITRE 1 : THEORISATION DES INFRACTIONS A REGIME COMMUN

Théoriser les infractions à régime commun revient à ressortir la doctrine


explicative de leur bien fondé. Cette précision sur le plan des idées sera suivie
d’une étude de ces infractions dans la realité. L’analyse portera sur les
infractions de droit commun (Chapitre 1) d’une part et les infractions
transnationales (Chapitre II) d’autre part.

CHAPITRE 1 : LES INFRACTIONS DE DROIT COMMUN

Selon Merle et Vitu, l’infraction de droit commun est celle qui est
soumise aux règles de fond, de compétence judiciaire ou de procédure
généralement applicables aux crimes, aux délits ou aux contraventions (R.
Merle et A. Vitu, Traité de droit criminel, Paris, Cujas, t. 1, 6e éd., 1989, n° 375).
Partant de cette définition, toutes les infractions soumises à un régime
particulier se trouvent placées hors du domaine des infractions de droit
commun. Relativement à la théorie de l’infraction, il convient de saisir les
infractions de droit commun à par de la théorie de l’Etat de droit, puis
s’appesantir sur leur substance.

SECTION 1 : LA THEORIE DE L’ETAT DE DROIT

Para 1 : L’economie de la théorie sur l’Etat de droit

L’État de droit est un concept juridique, philosophique et politique. Il implique


la prééminence du droit sur le pouvoir politique dans un État, ainsi que
l'obéissance de tous, gouvernants et gouvernés, à la loi. C'est une approche
dans laquelle la puissance publique est soumise au droit, fondé sur le principe

5
du respect de ses normes juridiques, chacun étant soumis au même droit, que
ce soit l'individu ou bien la puissance publique.

La notion est proche mais différente de celles de Rechtsstaat, en allemand,


et rule of law, en anglais qui elles-mêmes sont très différentes l'une de l'autre.
L'état de droit peut être défini de façon très générale comme chez les juristes
français du début du XXe siècle où il est soumission de l'État au droit, ou bien
selon des modalités plus techniques comme celles définies par l'Autrichien
Hans Kelsen qui le définit avant tout par le respect de la hiérarchie des
normes juridiques. De manière différente, l'état de droit dans une vision
proche du rule of law est une théorie qui affirme que l'État doit se soumettre
aux droits fondamentaux de l'homme : les juristes et théoriciens français font
jouer à la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 un rôle
essentiel dans le contenu de l'état de droit. On peut distinguer
conceptuellement trois types d’État : l'État de police où le pouvoir d'État
produit la loi et la met en œuvre, l'État légal où l'État et l'administration sont
soumis à la loi votée par le Parlement et l'État de droit où les lois sont soumises
à des exigences supérieures qui sont mises en œuvre par une cour
constitutionnelle. Mais cette distinction ne doit pas faire oublier que
l'expression état de droit peut être utilisée pour qualifier l'État légal.
Historiquement la IIIe République en France était un État légal alors que
la Ve République est un état de droit en raison du contrôle de
constitutionnalité qu'elle a introduit. Et l'état de droit peut être décrit ou
prescrit sans que la formule soit utilisée.

Para 2 : Les infractions de droit commun saisis par l’Etat de droit

La théorie sur l’Etat de droit apporte certains enseignements explicatifs des


infractions de droit commun. Le premier enseignement est qu’avec l’Etat de

6
droit, le sujet « Etat » n’a pas de crainte sur son existence. C’est pourquoi, il
accepte de se soumettre au Droit et d’être justiciable. Et parce que l’existence
de l’Etat n’est pas en cause, ce dernier peut s’investir pour protéger les autres
valeurs de la société : les personnes et les biens. Titulaire par le Contrat social
du monopole incriminalibus, l’Etat va édicter des infractions de droit commun
et prévoir les juridictions de droit commun compétentes. Il convient de
s’appesantir sur la substance des infractions de droit commun.

SECTION 2 : LA SUBSTANCE DES INFRACTIONS DE DROIT COMMUN

En quoi consistent les infractions de droit commun ? La réponse à cette


question commande d’adopter une définition positive et négative.

Para 1 : Une définition positive

Les infractions admises dans le droit commun se posent par opposition à


celles exclues du droit commun. En clair, toutes les infractions qui ne relèvent
pas d’un régime spécial constituent les infractions de droit commun. Il s’agit
des crimes, délits et contraventions conformément à l’article 21 CP. La
particulicarité de ces infractions est d’être connues par les juridictions de droit
commun. C’est une juridicition à compétence générale pour statuer sur tous
types de litiges, sauf lorsqu’une compétence spéciale est expressément
attribuée à une autre juridiction.
Par ailleurs, il existe des infractions de droit commun à régime spécial à
l’instar des infractions de presse et le détournement des biens publics
supérieur à 50 millions. Le tribunal criminel spécial créé en 2011 connaît du
détournement des biens publics. Il importe de dire plus sur les infractions de
7
presse. Ce sont des actes réprimés par la loi pénale et commis au moyen de la
presse. Cette dernière désigne l’ensemble des journaux et magazines
périodiques. Il convient d’avoir une approche large de l’expression presse. Elle
doit englober les supports classiques et contemporains permettant de
véhiculer une information. C’est pourquoi, l’élément fondamental pour la
commission d’une infraction de presse est l’exigence d’une certaine publicité.
Les canaux suivants permettent d’effectuer cette publicité : le journal, la radio,
la télévision, le cinéma, le livre, une affiche, des paroles prononcées en public,
internet, etc. à l’inverse de son homologue français par une loi de 1881, le
législateur camerounais n’a pas dressé une liste autonome des infractions de
presse. On les retrouve disséminer dans le code pénal. Les infractions de presse
tout de même en particulier d’avoir pour identité le moyen utilisé pour les
commettre. Il est question de la « voie de communication sociale », où la
presse joue un rôle. Sont érigés en infraction de presse au Cameroun : fausses
nouvelles (art 113 cp), publications des informations interdites (art 198, 109,
224 et 300 cp), atteinte au moral de l’armée (art 154 nouveau cp), dénonciation
calomnieuse et diffamation (articles 304 et 305 cp).Lire sur la question :
J.Djeukou, « Droit de l’homme et liberté de la presse au Cameroun :
contribution à l’étude des droits de la presse », Afrilex N° 04,
http://www.afrilex.u.bordeaux4.fr.
Les infractions de presse ont en particulier les règles de fond. Pour ce qui
est de la personne pénalement responsable, le principe est celui de la
responsabilité pénale en cascade. Il permet de considérer comme présumé
responsable le directeur de publication, l’éditeur, le rédacteur en chef ; et à
défaut l’imprimeur, vendeurs, distributeurs et afficheurs. Au plan processuel,
l’action publique se prescrit par 04 mois ; parce qu’une poursuite tardive n’a
pas de sens. La comparution immédiate est interdite. Et le procureur de la

8
république ne peut poursuivre que sur plainte préalable de la victime. La mise
en détention provisoire est interdite.

Para 2: Une définition négative

Pour mieux assoir l’étendue des infractions de droit commun, il importe


de préciser celles qui sont exclus du droit commun. Les infractions exclus du
droit commun sont celles qui obéissent à un régime spécifique ou d’exception
concernant les règles de fond, de compétence ou de procédure. Entrent cette
classification : les infractions politiques et militaires. Cette délimition est
effectuée par la doctrine (F. Desportes et F. Le Gunehec, Droit pénal général,
Paris, Economica, 10e édition, 2003, p. 145 et s). Le législateur camerounais
dans un texte national (CPPC) a exclu du droit commun : l’infraction
politique (643); et dans un texte international (Accord de coopération en
matière de justice entre le Gouvernement de la République française et le
Gouvernement de la République unie du Cameroun), il a exclu l’infraction
politique (article 46) et l’infraction militaire (article 47).Une précision de ces
notions s’impose pour des besoins de clarté.

–les infractions politiques : La détermination de la nature politique d’une


infraction commande de mobiliser deux critères. Selon le critère objectif, ce qui
compte c’est la conséquence de l’infraction. Ainsi une infraction est politique,
lorsqu’elle porte atteinte à l’existence, l’organisation ou le fonctionnement de
l’Etat. On peut illustrer avec les délits électoraux, les atteintes à la sureté de
l’Etat. Selon le critère subjectif, ce qui compte c’est le mobile qui motive
l’auteur. Est par exemple politique, l’assassinat d’un Chef d’Etat.
–les infractions militaires : Les infractions militaires sont des actes prévues et
réprimés dans le code de justice militaire. Le texte récent en la matière est la
9
loi N° 2017/012 du 12 juillet 2017 portant code de justice militaire. Une
infraction est subjectivement militaire parce qu’elle est commise par un
militaire. C’est le cas des infractions de droit commun commises par un
militaire. Et une infraction est objectivement militaire en cas de violation du
code de justice militaire. C’est l’hypothèse de la désertion, du refus
d’obéissance, de l’abandon de poste…la spécificité des infractions militaires est
dans leur sanction par une juridiction autre que les juridictions de droit
commun. Il s’agit du Tribunal militaire. La conséquence est que les textes sur la
forme et le fond échappent aux règles de droit commun.
La particularité des infractions de droit commun est que tous les éléments
constitutifs se trouvent à l’interieur du territoire national. Tel n’est pas le cas
des infractions transnationales.

CHAPITRE 2 : LES INFRACTIONS TRANSNATIONALES

Les infractions transnationales sont des infractions de droit commun prévues et


réprimées par chaque Etat au regard de la valeur protégée, mais ayant une
envergure internationale. Ils se caracterisent par : l’élément d’extranéïté, et
l’internationationalisation des droits pénaux internes. Le présent enseignement
se bornera à examiner la théorie explicative des infractions transnationales
(section 1) et le contenu de celles-ci (section 2).

SECTION 1 : LA THEORIE EXPLICATIVE DES INFRACTIONS TRANSNATIONALES

Para 1 : L’élément d’extranéité

Le premier critère caractérisant les crimes transnationaux est l’élément


d’extranéïté. C’est la qualité de ce qui est étranger. L’élément d’extranéïté peut

10
être appréhendé sous deux angles. Le premier renvoie à ce qui est exterieur à
la souveraineté d’un Etat. C’est le cas de la haute mer notamment considéré
comme un espace ne relevant de la souveraineté d’aucun Etat. C’est dans cette
perspective qu’a été qualifié le premier crime dit international : la piraterie
maritime au 17e siècle1. Le second angle aborde l’element d’extranéïté comme
cet « elément qui fait rencontrer une souveraineté étrangère 2. Dans cette
approche, l’élément d’extranéité rend possible la compétence de plusieurs
systèmes juridiques de différents Etats touchés par le crime. C’est l’hypothèse
avec un meurtre qui touche : l’Etat de nationalité de l’auteur, l’Etat de
nationalité de la victime, et l’Etat où se trouve l’auteur ou la victime après le
crime. Il peut en résulter soit un conflit positif, soit un conflit négatif de
compétences3. Le plus important, dans l’élément d’extranéïté, c’est la difficulté
pour un seul Etat à réprimer le responsable du crime. Il faut compter sur la
coopération pénale interétatique. Elle permet de cerner le second critère
contribuant à l’identification des crimes transnationaux. Il est question à la
vérité de la conséquence du premier critère.

Para 2 : L’internationationalisation des droits pénaux nationaux


Le second critère permettant d’idenfier les crimes transnationaux
consiste dans l’internationationalisation des droits pénaux nationaux.
Internationaliser veut dire dépasser le cadre national, pour couvrir plusieurs
Etats. La particularité de l’internationalisation du droit pénal réside dans la

1
B. Dubner, The Law of International Sea Piracy, La Haye, Martinus Nijhoff Publishers, 1980, 176 p. ; S.
Glaser, Droit international pénal conventionnel, t. I, Bruxelles, Bruylant, 1970, p. 152-162 ; V. Pella, « La
répression de la piraterie », R.C.A.D.I., 1926-V, vol. 15, p. 149-275 ; A. Rubin, The Law of Piracy, 2e éd., New
York, Transnational Publishers, 1998, 485 p. ; J. Sundberg, « Piracy », in International Criminal Law, vol. 1 :
Crimes, C. Bassiouni (dir.), 2e éd., Ardsley / New York, Transnational Publishers, 1999, p. 803-817 ; M.
Voelckel, « La piraterie est-elle un crime de droit des gens ? », Annuaire du droit de la mer, 2000, t. V, p. 93-
121.
2
C. Lombois, Droit pénal international, Paris, Dalloz, 2e éd., 1979, p. 12.
3
I. Fouchard, « De l’utilité de la distinction entre les crimes supranationaux et transnationaux : traduire les
processus d’incrimination complexes alliant droit international et droits pénaux internes», op. cit., p. 4.
11
mise en place d’une technique permettant de rapprocher les droits pénaux
nationaux au moyen des conventions internationales. On parle du processus
d’internationalisation des droits pénaux. Pour reprendre Claude Lombois, « on
reste bien en présence des seuls intérêts nationaux protégés pénalement. Mais,
ces divers intérêts, tous identiques, sont menacés solidairement par une
criminalité qui s’internationalise. À quoi répond adéquatement une
internationalisation de la lutte contre la criminalité 4». L’explication de
l’internationalisation des droits pénaux internes est dans l’internationalisation
de la criminalité. Face à des crimes perpétrés, à dessein, sur plusieurs
territoires étatiques ou sur des territoires ne relevant de la juridiction pénale
d’aucun État, les États ont dû reconnaître qu’ils avaient tous, individuellement,
un intérêt à compléter et renforcer les cadres juridiques de leur coopération. Il
s’agit de l’hypothèse que l’on peut qualifier d’utilitariste 5, qui a conduit à un
processus d’internationalisation des droits pénaux internes, au sens où les
crimes sont incriminés et punis selon les droits internes mais conformément à
un régime juridique spécial prévu par le droit international 6. C’est le droit
pénal international. Il recouvre ainsi les aspects internationaux des droits
pénaux étatiques tant sur le volet matèriel que procédural 7. sur cette base, les
crimes transnationaux s’entendent des crimes de droit interne,
internationalisés conventionnellement, qui oblige les Etats parties à établir en
droit interne leur compétence pour arrêter, poursuivre ou extrader l’auteur
d’un comportement que ces États ont décidé de réprimer collectivement. Le
code pénal camerounais de 2016 reçoit les crimes transnationaux.

SECTION 2 : LE CONTENU DES INFRACTIONS TRANSNATIONALES


4
C. Lombois, Droit pénal international, op.cit., p.12.
5
Ce terme est utilisé ici au sens littéral, sans préjudice de la théorie utilitariste du droit pénal.
6
I. Fouchard, « De l’utilité de la distinction entre les crimes supranationaux et transnationaux : traduire les
processus d’incrimination complexes alliant droit international et droits pénaux internes», op. cit., p. 8.
7
M. Henzelin, Le principe de l’universalité en droit pénal international, Bruxelles, Bruylant, 2000, p. 11.
12
Para 1 : La substance des infractions transnationales

Une reception des crimes transnationaux dans le code pénal revient à


admettre que certaines infractions qui s’y trouvent sont prévues dans les
conventions internationales. Ces conventions traduisent une volonté de
plusieurs Etats de coopérer pour lutter contre la criminalité d’une part, et
l’exigence d’une harmonisation des droits pénaux nationaux. La doctrine
pénale s’est interessé à l’énumération des crimes transnationaux définis en
droit international. Il en est ainsi : le faux-monnayage, la piraterie maritime, le
trafic de stupéfiants et de substances psychotropes, les infractions et certains
autres actes survenant à bord des aéronefs, la capture illicite d’aéronefs, les
actes illicites dirigés contre la sécurité de l’aviation civile, les crimes contre les
personnes jouissant d’une protection internationale, la prise d’otages, les actes
illicites contre la sécurité de la navigation maritime, les infractions contre la
sécurité du personnel des Nations Unies, les attentats terroristes à l’explosif, le
financement du terrorisme, la criminalité transnationale organisée, la traite des
personnes en particulier des femmes et des enfants, le trafic illicite de migrants
par terre, air et mer, la vente et prostitution d’enfants et pornographie mettant
en scène des enfants, la corruption ou encore, les actes de terrorisme
nucléaires8.

Para 2 : Le régime des infractions transnationales

En présence d’une infraction transnationale, il se pose la question de la


juridiction compétente, et celle de la forme que prend la coopération
judicidiaire pénale internationale.

8
I. Fouchard, « De l’utilité de la distinction entre les crimes supranationaux et transnationaux : traduire les
processus d’incrimination complexes alliant droit international et droits pénaux internes», op. cit., p. 13.
13
Pour ce qui est de la juridiction compétente, il convient de préciser que les
infractions transnationales sont des infractions par nature nationales. Elles ne
sont pas à confondre avec les crimes supranationaux. Ces derniers
correspondent aux violations les plus graves des normes fondamentales du
droit international donnant lieu à une responsabilité pénale individuelle
directement régie par le droit international 9. Le crime supranational est un
crime qui se situe au-dessus des Etats et s’impose à eux 10. Le caractère
supranational du crime correspond ainsi au fait qu’il est directement inscrit en
droit international et que la responsabilité pénale individuelle à laquelle il
donne lieu découle directement du droit international. Le caractère
supranational du crime renvoie également aux valeurs et intérêts qu’il tend à
protéger, qui dépassent ceux des États eux-mêmes, à savoir la paix et sécurité
internationales et la dignité humaine. Sur le plan juridictionnel, un crime
supranational rend possible, la double compétence de la juridiction national et
d’une juridicition internationale pénale. Or l’infraction transnationale sera
toujours connue par une juridiction nationale.

Pour ce qui est de la coopération judiciaire internationale entre Etats, les


outils de la coopération sont : l’extradition, l’entraide judiciaire, la délégation
de la poursuite, et l’exécution des décisions pénales étrangères. Par
extradition, il faut entendre la remise par l’Etat requis (celui à qui la demande
est présentée), d’une personne qui se trouve sur son territoire et qui est
poursuivie ou condamnée dans l’Etat requérant (celui qui demande), en vue
d’un jugement ou de l’exécution de la peine.Et l’entraide judiciaire renvoie à
toutes mesures ordonnées par l’Etat requis pour faire évoluer une enquête

9
I. Fouchard, « De l’utilité de la distinction entre les crimes supranationaux et transnationaux : traduire les
processus d’incrimination complexes alliant droit international et droits pénaux internes», op. cit., p. 18.
10
Le dictionnaire Salmon définit en ce sens l’adjectif supranational comme ce « qui est situé au-dessus de
l’Etat ; qui a une autorité supérieure à celle des Etats ; qui est indépendant de l’Etat » : J. Salmon (dir.),
Dictionnaire de droit international public, Bruxelles, Bruylant, 2001, p. 1064.
14
pénale ouverte dans l’Etat requérant. Sont visés : la notification des documents
officiels, la recherche des moyens de preuve par des perquisitions, des fouilles,
des saisies, l’expertise, l’audition et la confrontation des personnes, la remise
des dossiers, des renseignements, des pièces à conviction ou de documents, la
remise d’objets de valeur en vue de la confiscation ou de restitution à l’ayant
droit. Quant à la délégation de la poursuite, elle consiste pour l’Etat requérant
compétent pour exercer l’action pénale, à confier cette tâche à l’Etat requis
pour des raisons d’opportunité ou des motifs liés au meilleur reclassement
social de la personne poursuivie. Enfin, l’exécution des décisions pénales
étrangères autorise l’Etat requis, à mettre en application une mesure pénale
prononcée par les autorités judiciaires de l’Etat requérant sur le territoire de
l’Etat requis. Cela veut simplement dire, qu’une sanction pénale prononcée
dans un Etat (Etat requérant) est mise en œuvre par un autre Etat (Etat requis).
Les infractions transnationales permettent d’activer la coopération judiciare
pénale sous la forme soit de l’extradition, soit l’entraide judiciaire, soit de la
délégation des poursuites.

TITRE 2 : THEORISATION DES INFRACTIONS A CARACTERE TERRORISTE

La définition de l’infraction terroriste divise les Etats à raison de la


perception que les uns et les autres ont sur la question. Pour les uns, l’acte
terroriste est un moyen de défense des peuples opprimés contre l’oppression
du pouvoir de l’Etat.Pour les autres, l’acte terroriste est un moyen d’attaque
contre le pouvoir de l’Etat, et une remise en cause des institutions étatiques.
Cette controverse est si endurcie que les Etats n’arrivent pas à s’accorder pour
ériger l’acte terroriste en crimes contre l’humanité, via une résolution des
Nations Unies. Nonobstant ce clivage, il demeure que les effets destructeurs de

15
l’acte terroriste en font une menace, qui fonde les Etats, unilatéralement ou en
groupe, à adopter les mesures pour y faire face.Le Cameroun n’est pas étranger
à ce débat. Il a pris part pour l’incrimination des actes terroristes aussi bien au
niveau des instruments nationaux qu’internationaux. Au plan national, il a été
adopté la Loi N° 2014/028 du 23 décembre 2014 portant répression des actes
de terrorisme. Une définition énumérative des actes terroristes est prévue à
l’article 2. Seulement, le Cameroun n’a pas unilatéralement aménagé une
forme de coopération judiciaire internationale contre le terrorisme. Au plan
international, les Etats d’Afrique centrale (Cameroun, Centrafrique, RDC,
Gabon, Guinée Equatoriale, Sao Tome et Principe, Tchad) ont conclu la
Convention entre les Etats membres du Comité des Chefs dePolice de l'Afrique
centrale (CCPAC) en matière de luttecontre le terrorisme, le 27 mai 2004. Par la
suite, a été adopté le Règlement n° 08/05-ueac-057-cm-13 portante adoption
de la convention relative à la luttecontre le terrorisme en Afrique centrale, le 7
février 2005.
Dans le cadre de la CCPAC, l’acte terroriste est défini par la technique
énumérative. l’article 2 dispose : « (a) Tout acte ou menace en violation des lois
pénales de l'État Partie susceptible de mettre en danger la vie, l'intégrité
physique, les libertés d'une personne ou d'un groupe de personnes, qui
occasionne ou peut occasionner des dommages aux biens privés ou publics, aux
ressources naturelles, à l'environnement ou au patrimoine culturel, et commis
dans l'intention ; (i) d'intimider, provoquer une situation de terreur, forcer,
exercer des pressions ou amener tout gouvernement, organisme, institution,
population ou groupe de celle-ci, à engager toute initiative ou à s'en abstenir, à
adopter, à renoncer à une position particulière ou à agir selon certains principes
; ou (ii) de perturber le fonctionnement normal des services publics, la
prestation de services essentiels aux populations ou de créer une situation de

16
crise au sein des populations ; ou (iii) de créer une insurrection générale dans un
État Partie. (b) toute promotion, financement, contribution, ordre, aide,
incitation, encouragement, tentative, menace, conspiration, organisation ou
équipement de toute personne avec l'intention de commettre tout acte
mentionné au paragraphe a (i) à (iii) ».

CHAPITRE 1 : LA CONTROVERSE DOCTRINALE SUR LA REPRESSION DU


TERRORISME

Les Etats ne s’accordent pas sur la doctrine permettant d’expliquer la


repression du terrorisme. Pour certains, les règles de droit commun suffisent
pour reprimer les actes terroristes (section 1). Et pour d’autres, les règles de
droit commun doivent être évincées ou écartées pour reprimer les actes
terroristes (section 1).

Section 1 : LA DOCTRINE DE L’ADMISSION DU DROIT COMMUN DANS LA


REPRESSION DU TERRORISME

Pour les uns, la loi portant répression du terrorisme est certes une norme
sévère, mais de droit commun. C’est la thèse de l’indifférence de la loi anti-
terrorisme et sa soumission à l’Etat de droit, ainsi qu’aux droits de l’homme. Il
ressort que la loi anti-terroriste est une loi ordinaire dans un Etat de droit, bien
que les exceptions subsistent. Carl Schmitt, quant à lui, laisse subsister des
ennemis dans la politique puisque sa guerre est permanente. (…). L’Etat qu’il
décrit, est proche de celui dans lequel nous vivons ; tant les ennemis sont
érigés en infracteurs de droit commun. Justement, le droit commun est
aujourd’hui empreint de normes qui sont extraordinaires et dérogatoires
opérant là encore une mutation. En effet, les juristes pénalistes assistent
impuissants à un déballage de lois consacrant la notion même d’ « ennemi »
17
alors même que les droits de la défense n’ont jamais autant eu le vent en
poupe. La loi portant répression du terrorisme est une norme dérogatoire du
droit commun ou extraordinaire. Mais elle coexiste avec le droit commun.
Selon Schmitt, la loi anti-terroriste est une loi extraordinaire coexistant avec le
droit commun dans un Etat de droit.

Section 2 : LA DOCTRINE DE L’EVICTION DU DROIT COMMUN DANS LA


REPRESSION DU TERRORISME

Une autre thèse est défendue par un contemporain. C’est le Professeur


allemand : Gunther Jakobs. Pour lui, il est nécessaire que le droit pénal de
l’ennemi soit efficient dans un Etat de droit, pour prendre le relai du droit
commun en cas de défaillance, selon des considérations non raciales ou
ethniques, mais bien au regard de considérations fonctionnelles pour défendre
ce qu’il nomme « la sécurité cognitive ». Il observe à côté du droit pénal de
l’ami, un droit pénal de l’ennemi faisant office de relai. Il y a ainsi dans un Etat
de droit, deux droits parallèles : un droit pénal du délinquant pour les
situations ordinaires d’une part et un droit pénal de l’ennemi pour les
situations extraordinaires d’autre part. On pourrait affirmer la thèse du relai au
sein de l’Etat de droit. Selon Gunther Jakobs, la loi anti-terroriste est une loi
extraordinaire relayant le droit commun dans un Etat de droit. Quant à la thèse
de la substitution, elle est défendue par Clausewitz. Il va distinguer deux
moments : celui du politique où il cesse d’y avoir des ennemis pour laisser place
à des délinquants, maquillant un pouvoir de guerre en un pouvoir punitif ; et le
moment belliciste qui ne connait que des ennemis. De la sorte, la découverte
d’un ennemi au sein de l’Etat fonde le passage de l’Etat de droit à un Etat
absolu. La loi portant répression du terrorisme devient un outil hors contrôle,
pourvu qu’elle permette l’élimination de l’ennemi. En un mot, tous les moyens

18
sont bons, pourvu qu’ils participent à l’élimination de l’ennemi et l’Etat n’a pas
de compte à rendre. D’après Clausewitz, la loi anti-terroriste est une loi qui
substitue le droit commun et fonde le passage à l’Etat absolu.

CHAPITRE 2 : LA CARACTERISATION DES INFRACTIONS TERRORISTES

Par caractère, il faut entendre les traits permettant d’identifier quelque chose,
et surtout de la distinguer des choses voisines. Les actes terroristes ont pour
caractéristiques, d’instrumentaliser les infractions de droit commun d’une
part (section 1); et d’être un crime idéologique contre l’Etat (section 2) d’autre
part.

SECTION 1 : LES ACTES TERRORISTES, UNE INSTRUMENTALISATION DES


INFRACTIONS DE DROIT COMMUN
Pour porter atteinte à l’Etat, les terroristes utilisent les actes qualifiés
d’infractions de droit commun. Pour s’en convaincre, il importe d’observer que
la définition des actes terroristes par le législateur communautaire recourt à
une formule générique « tout acte », conformément à l’article 2 du CPPAC. Or
le principe de la légalité criminelle impose de préciser l’élémentmatériel prévu
par le législateur. À partir de l’expression « tout acte », il n’est pas possible de
savoir de quel acte concrètement il s’agit. Seulement, en partant du résultat
atteint, il est possible de remonter aux infractions de droit commun, qui
permette de les réaliser. Ces infractions de droit commun doivent être dans la
loi pénale de chaque Etat partie à la convention (CPPAC), telle que l’illustre
l’expression « tout acte ou menace en violation des lois pénales de l'État Partie»

19
de l’article 2 CPPAC. Le texte renseigne sur les actes terroristes en fixant de
manière précise la valeur protégée et l’intention criminelle.
Les dispositions suivantes de l’article 2 informent sur les valeurs
protégées : «(a) Tout acte ou menace en violation des lois pénales de l'État
Partie susceptible de mettre en danger la vie, l'intégrité physique, les libertés
d'une personne ou d'un groupe de personnes, qui occasionne ou peut
occasionner des dommages aux biens privés ou publics, aux ressources
naturelles, à l'environnement ou au patrimoine culturel, ».Il ressort de cette
disposition que les valeurs protégées sont : la vie, l’intégrité physique, la
liberté, les biens privés et publics. En outre, l’élément intentionnel des actes
terroristes est connu. il apparaît dans l’article 2 CPPAC en ces termes : « et
commis dans l'intention ; (i) d'intimider, provoquer une situation de terreur,
forcer, exercer des pressions ou amener tout gouvernement, organisme,
institution, population ou groupe de celle-ci, à engager toute initiative ou à s'en
abstenir, à adopter, à renoncer à une position particulière ou à agir selon
certains principes ; ou (ii) de perturber le fonctionnement normal des services
publics, la prestation de services essentiels aux populations ou de créer une
situation de crise au sein des populations ; ou (iii) de créer une insurrection
générale dans un État Partie…». Il découle des éléments qui précèdent, qu’il
n’existe pas une liste des infractions terroristes. Seulement, toutes les
infractions de droit commun dont le résultat et l’intention sont prévues à
l’article 2 du CPPAC sont qualifiées d’actes terroristes. Par exemple, l’acte
terroriste=meurtre d’un Ministre+revendication de changer le gouvernement.
À l’observation de l’élément intentionnel, les actes terroristes constituent des
crimes idéologiques.

SECTION 2 : L’ACTE TERRORISTE, UN CRIME IDEOLOGIQUE CONTRE L’ETAT

20
L’acte terroriste est un crime idéologique d’une part parce que le
terroriste agit comme un ennemi de l’Etat ; et d’autre part parce que le mobile
est la destruction de l’Etat.
Le terroriste agitcomme un ennemi de l’Etat sur la base de sa nature.
Lever l’équivoque sur la nature du terroriste, entre délinquant et ennemi,
commande de préciser la distinction ontologique et terminologique de ces
concepts. Il s’agit en général de la question sur le visage du criminel. Ce dernier
peut être soit un délinquant, soit un ennemi. Si le délinquant est la figure la
plus en vue, l’ennemi aussi a toujours existé. Le délinquant désigne le criminel,
qui viole la loi dans l’Etat de droit. L’application de la sanction pénale à son
encontre est fondée sur le mauvais usage de la liberté ou l’inconscience. Si
possible, la resocialisation peut être une finalité de sa sanction. Le juge lui
appliquera en conséquence une peine ou une mesure de sûreté pour le
récupérer. La doctrine dans cette optique a trouvé une métaphore
suffisamment expressive : « le droit pénal de l’ami » pour exprimer l’opposé du
« droit pénal de l’ennemi ». En clair, le délinquant porte atteinte à certaines
valeurs que l’Etat protège, sans remettre en cause l’Etat lui-même. En image, le
délinquant détruit les biens d’une personne, sans détruire la personne elle-
même. A l’inverse, l’ennemi renvoie au criminel, qui viole la loi dans l’Etat
absolu. C’est un criminel lucide, qui fait certes un mauvais usage de la liberté,
mais y ajoute la volonté détruire l’Etat. L’ennemi s’attaque à l’idéologie de
l’Etat, à son identité et donc à la vision sociétale de l’Etat. Et c’est à juste titre
que l’Etat se sentant menacé, riposte par la logique de guerre. L’Etat veut
survivre face à un ennemi qui veut saper ses fondements. Il mettra en place un
droit pénal dit de « l’ennemi ». Il apparait que le terroriste soit proche du
visage de l’ennemi que de celui du délinquant. Le fait pour le législateur
21
d’entretenir un flou entre les deux visages peut être vu par certains comme
une originalité camerounaise. Toutefois, le législateur camerounais n’a pas la
paternité de la réponse terroriste. Criminel idéologique, avec l’ambition
d’attenter aux fondements idéologiques de l’Etat, le terroriste se pose en
réalité comme un ennemi de l’Etat. Aussi, l’ennemi est défini comme celui qui
n’offre aucune garantit quant à sa conduite future ; il veut détruire l’ordre
juridique et il vit dans un état de guerre permanent.
Le mobile de l’acte terroriste est la destruction de l’Etat au regard de
l’élément intentionnel. Dans les autres infractions, les valeurs protégées ne
sont pas l’Etat parce que l’Etat les protège. Il est question de la personne
physique ou morale et les biens. Dans l’acte terroriste, l’intention est de
détruire l’Etat dans sa substance et ses composantes. C’est l’idée qui ressort de
l’élément intentionnel de l’acte terroriste. Ces visages de l’Etat ressortent par
le décryptage de l’élément intentionnel. « et commis dans l'intention ; (i)
d'intimider, provoquer une situation de terreur, forcer, exercer des pressions ou
amener tout gouvernement, organisme, institution, population ou groupe de
celle-ci, à engager toute initiative ou à s'en abstenir, à adopter, à renoncer à
une position particulière ou à agir selon certains principes ;». Ce fragment de
l’article 2 du CPPAC vise le gouvernement, la population, les institutions. Le
gouvernement désigne l’équipe des Ministres mise en place par le pouvoir
exécutif dans un Etat pour conduire une politique. La population renvoie à
l’ensemble des personnes physiques visant au sein de l’Etat. Elle constitue la
composante sociologique de l’Etat. Il n’y a pas d’Etat sans population.

Et les institutions correspondent à l’Administration publique. Ce sont des


organisations orientées vers la réalisation de l’intérêt général en conjuguant
=puissance publique et service publique. «…ou (ii) de perturber le

22
fonctionnement normal des services publics, la prestation de services essentiels
aux populations ou de créer une situation de crise au sein des populations ; ou
(iii) de créer une insurrection générale dans un État Partie ». Il découle de ces
termes, une fois de plus, les notions de « services publics », « services
essentiels aux populations». L’élément qui permet de faire disparaître la
structure de l’Etat dans sa version présente est l’insurrection. Par définition,
c’est un soulèvement armé qui vise à renverser le pouvoir établi.Si le pouvoir
établi est renversé, c’est parce que l’idéologie ou la façon de voir la vie en
société ainsi que l’organisation sociale en place n’arrange pas le terroriste. Il
s’inscrit en dissidence et recourt à la terreur pour se faire entendre et si
possible atteindre ses objectifs.

SECONDE PARTIE : THEORIE DE LA SANCTION

« (…..on ne gouverne pas les hommes avec les parole seulement ils ne sont pas
des anges ils ont une âme et un corps (….) et si l’on ne trouve pas le moyen
d’imprimer à l’homme une crainte salvatrice de la loi en infligeant des peines à
l’infraction. Soyez sûr que la loi sera violée ». Louis BODIN, la philosophie des
lois au point de vue chrétien. Didier et CIE 1860, pages 178) »
« De même le droit pénal est moins une espèce particulière de la loi que la
sanction de toutes les autres »Jean Jacques Rousseau du Contrat social. Ces
citations illustrent de la place centrale que la sanction occupe dans le respect
de la règle de droit même s’il diffère des règles de droits dépourvues de
sanction (droit souple). Dans le cadre de cette étude l’accent sera mis sur la
règle de droit assortie de sanction ; parce qu’elle est la raison d’être du droit
pénal. Deux axes vont permettent de conduire les developpements : la théorie
de la sanction dans son entendement (titre 1) et dans son déploiement (titre 2).

23
TITRE 1 : LA THEORIE DE LA SANCTION DANS SON ENTENDEMENT
Par entendement, il faut envisager le discours théorique sur quelque chose,
l’entendement de la sanction pénale renvoi au discours permettant de cerner
sa raison d’être. Entreront dans l’entendement, la théorie sur l’existence et
celle sur les finalités de la sanction pénale.

CHAPITRE 1 : LA THEORIE SUR L’EXISTENCE DE LA SANCTION PENALE


L’existence de la sanction est en tension entre son admission et son exclusion.
Il en découle les théories explicatives selon l’option dans laquelle on se trouve.

SECTION 1 : L’ADMISSION DE LA SANCTION PENALE COMME REPONSE A


L’INFRACTION

Para 1 : Les supports idéologiques


Pourquoi adopter la sanction pénale comme réponse à l’infraction ? La réponse
à cette question est consubstantielle à la nécessitéet à la genèse du droit
pénale ainsi qu’a sonévolution. Certaines phases méritent d’êtrerappelées pour
asseoir cette idée

-Le discours sur la naissance du droit pénal : le droit pénal est né de l’instinct
de vengeance qui réside en tout être humain. Toute personne qui subit le mal
est tenté de rendre le mal à l’auteur du premier acte on parle de la réaction
vindicative spontanée. Par la suite, le groupe de la victime d’un acte
s’engageait à rendre le mal soit à l’auteur d’un acte soit à son proche pour
calmer la victime. Au regard de la disproportion dans le mal rendu, les
communautés se sont entendus pour adopter des forfaits à verser a la victime,

24
c’est le régime des compensations dans le stade de la vengeance privé. Cette
justice pénale privée se caractérisait donc par un prix que l’auteur de
l’infraction devait verser à la victime. Avec l’avènement de l’état ; le droit de
punir est devenu le monopole de cette personne morale sur le fondement des
théories du contrat sociale : HOBBES (LE LEVIATHAN), MAX WEBBER a pu à
juste titre affirmer que « l’Etat a le monopole de la contrainte légitime », c’est
le stade de la justice publique. De tout ce qui précède on retient que la
sanction pénale doit être admise parce que l’Etat doit punir les auteurs des
infractions, c’est ce qu’a matérialisé le courant de la nécessité du droit pénal.
Le porte-parole de cette philosophie est CESARE BECCARIA qui a systématisé le
Principe des nécessitésdans le chapitre II « Droit de punir, un traité des délits
et des peines 1764 » il ressort de ce chapitre que « c’est la nécessité qui a
contraint les hommes à céder une petite partie de leurs libertés dans le dépôt
public pour engager les autres à la défendre, c’est l’assemblage de toutes ces
petites portions de libertés qui constitue le droit de punir . Tout ce qui s’écarte
de cette base est abusif ». Dans le chapitre III (conséquences), il conclut « les
lois seules peuvent fixer la peine des crimes ». Il apparait que le principe de la
nécessité est à l’ origine du droit de punir. Ce droit se matérialise par
l’obligation pour le législateur de prévoir les incriminations et les peines, son
corolaire est le principe de la légalité criminel (nullum crimen, nulia poena,
sine lege).

Para 2 : La matérialisation
L’admission de la sanction pénale comme réponse à l’infraction renvoi
simplement à l’admission du droit pénale comme discipline structurant la vie
en société. Mais il convient de souligner l’évolution qu’a connue le droit pénal
sous la conjugaison de l’influence moderniste et post moderniste.

25
-L’existence à l’époque moderne d’un droit pénal étatisé : l’époque moderne
est celle ou l’Etat se présente comme le seul acteur à même de secréter une
règle de droit pouvant s’appliquer sur le territoire national, on a pu parler de
monisme juridique ou d’étatisation du droit. Le credo de ce courant se résume
dans la formule suivante « il n’ya de droit que dans l’Etat » (CARRE DE
MALBERG) et les promoteurs de cette philosophie sont : KELSEN, CARRE
DEMALBERG …. Le droit pénal n’a pas échappé à cette influence et le droit
pénal moderne se caractérise par les principes qui l’étatise : La Territorialité, la
Souveraineté et la légalité fermée. La territorialité suppose que toute norme a
non seulement une histoire, mais s’applique surtout à un territoire. En
synthèse, seul la République édicte la loi pénale et la loi pénale de la
république saisie tout fait commis sur le territoire tant par les nationaux que les
étrangers. Cfre Art 10 du code pénal gabonais. La souveraineté se traduit par
la liberté dont jouit chaque Etat des valeurs sociales qu’elle sacralise et les
protéger par les incriminations correspondantes. On dit que l’Etat dispose d’un
monopole incriminalibus. La légalité fermée en droit pénale suppose que les
infractions ne sont prévues que par la loi d’un Etat. Même s’il existe des
conventions internationales, elles n’ont aucune valeur juridique tant que l’Etat
n’a pas pris une loi nationale pour les réceptionner.

-L’existence à l’époque post moderne d’un droit pénal désétatisé : l’époque


post moderne se caractérise par la fin du monopole de l’Etat dans l’élaboration
d’une règle de droit contraignante. Des acteurs non étatiques nationaux ou
internationaux exercent les attributions dans la création de la loi pénale. C’est
une idée qui trouve son fondement doctrinal dans le passage du monisme au
pluralisme juridique. Les promoteurs de cette évolution sont : Delmas Marty

26
Mireille (Le pluralisme ordonné) Geneviève Koubi (des – ordres juridiques)
Van de Kerchov et François Ost (Le systeme juridique entre ordre et desordre)
En droit pénal, le post modernisme a été soutenu par Miche MASSE et
François TULKENS. Cette dernière affirme « l’hypothèse qui est la mienne est
celle d’une influence déterminante du droit communautaire (Europe) sur le
droit pénal lui-même dont les fondements comme la souveraineté ou la
territorialité sont appelés à être revisités. L’internationalisation de la réaction
pénal traduit dans le champ pénal une rupture épistémologique qui aussi peut
être importante que celle qui est intervenu à la fin du 19 ème siècle et a donné
naissance à ce que l’on a appelé l’avènement du droit pénal moderne ». A
l’opposé du droit pénal moderne le droit pénal post moderne se résume en un
mot : la désétatisation, ses déclinaisons sont : la déterritorialisation, le recul de
la souveraineté, et la légalité ouverte du droit pénal.
La déterritorialisation se manifeste par l’internationalisation du droit pénal.
Elle est observable à travers les infractions présentant un élément d’extranéité
d’une part et les infractions choquant la conscience universelle d’autre part.
Le recul de la souveraineté est observable par l’émergence d’autres acteurs
compétents dans l’incrimination mais qui ne sont pas réduit à un Etat, on veut
pour preuve, l’incrimination en réseau (Droit des affaires). Le législateur pénal
international (qui peut produire des normes de portées nationales) exemples :
conventions des nations unies sur la torture, (et de portées internationales) le
statut de la Cours Pénale Internationale (C.P.I). La conséquence de cet
éclatement du monopole incriminalibus est la légalité ouverte en droit pénal
(pluralités des organes légiférant et identité fonctionnelle de la légalité.

SECTION 2 : L’exclusion de la sanction pénale comme réponse à l’infraction

27
Il existe une doctrine portant l’idée d’exclusion de la sanction pénale comme
réponse à l’infraction. La plus-value de ces doctrines au delà de sa critique
réside dans la réalité des alternatives à la sanction pénale comme réponse à
l’infraction.

Para 1 : La doctrine excluant la sanction pénale comme réponse à l’infraction

-la défense sociale nouvelle : La théorie de la défense sociale nouvelle a été


pensée par Filippo Gramatica à la moitié du 20e siècle. Elle se présente comme
une correction des excès de Prins. L’idée de base est que : « L’individu est
premier par rapport à l’Etat et seul digne à être protégé. Et l’Etat est un
moyen pour garantir la coexistence harmonieuse et la protection des droits
des individus ». Ce qui impose à l’Etat a un devoir de socialisation. Il faut voir
dans cette socialisation une harmonisation de cette tendance à l’égoïsme avec
la nécessité de vivre en société.
Gramatica résume sa théorie dans la formule suivante : « le système
pénal doit être aboli. A la place, il faut instituer un système de défense
sociale ».Le système pénal doit être aboli au terme d’une analyse critique de
la notion de délinquant, de peine et d’infraction. Le délinquant est un produit
artificiel de la criminalisation primaire ou secondaire. La peine découle d’une
conception autoritaire de l’Etat, n’améliore pas le rapport entre l’individu et la
société, et ne produit un effet de prévention générale plus par la peur que par
l’adhésion volontaire de l’individu. Et l’infraction ne renseigne pas
suffisamment sur l’anti-socialité de l’individu. Pour toutes ces raisons, il faut
substituer le système pénal par le système de défense sociale, socle de sa
politique criminelle.

28
-la politique pénale abolitionniste : Louk Hulsman développe la doctrine
abolitionniste. Selon lui, l’Etat n’a pas à intervenir de manière autoritaire pour
mettre en harmonie les intérêts individuels et généraux. Il faut laisser le soin
aux individus de négocier l’alignement. Il en arrive une telle conclusion au
terme de la critique du système pénal et du système de défense sociale. Les
deux systèmes promeuvent l’intervention autoritaire de l’Etat sur l’individu. Les
autorités étatiques définissent les normes de conduites. Bien plus ni les indices
d’anti-socialité, ni l’infraction ne peuvent garantir les droits des individus.
Hulsman a relevé le poncepilatisme du système pénal : c’est une machine
bureaucratique où il n’y a aucun responsable. Le système pénal est
incontrôlable, parce qu’il est constitué de différents sous-systèmes peu
coordonnés entre eux. Le système pénal vole le conflit aux personnes
intéressées et produit une seule chose : la souffrance. Les auteurs et les
victimes se trouvent devancer par le ministère public, qui vole leur conflit. Et la
souffrance que produit le système pénal se matérialise par les condamnations
faisant le condamné, la famille endurant un préjudice moral et matériel parfois,
la stigmatisation sociale participant à une victimisation secondaire. En
alternative, Hulsman propose un autre système. Il constitue sa participation à
la politique criminelle

Para 2 : Les alternatives de la sanction pénale comme réponse à l’infraction

-les alternatives dérivées de la défense sociale nouvelle : La politique


criminelle de Gramatica a pour support technique : le système de défense
sociale. Son support idéologique est que : « tous les individus sont des individus
à socialiser, et non certaines catégories d’individus ». Ce qui distingue
Gramatica de Prins, pour qui les individus dangereux et irrécupérables doivent

29
être éliminés pour la survie de la société. Gramatica rejette ainsi la notion de
dangerosité. Il propose de remplacer l’infraction par l’anti-socialité. C’est
l’inadéquation de l’individu à l’ordre social. Elle déterminée par les experts
bio, médicaux, psycho, sociaux, à partir des expertises scientifiques. La loi
pénale survie. Cependant, elle détermine l’existence des indices, mais la
science détermine la nature et la mesure de l’anti-socialité. On parle d’indices
d’anti-socialité. Dès lors qu’ils sont établis, le juge saisit les experts pour
établir la responsabilité morale. A côté de celle-ci subsiste la responsabilité
civile. Elle permet à l’auteur de l’acte réparer le préjudice subi par la victime.
Le juge a une mission : mettre en adéquation l’individu et la société. En
conséquence, il dispose des mesures de défense sociale suivantes : amendes,
mises au travail pour la collectivité, l’enfermement, et la formation idéologique
ou professionnelle. On constate un changement dans la substance du droit
pénal. D’un droit pénal sanctionnateur, Gramatica pose un droit pénal
socialisateur.
Marc Ancel critique Gramatica le recours à l’indice d’anti-socialité. C’est
une notion qui ne protège pas les droits de l’individu comme l’infraction. Il
ressort une réification de l’être humain. Ce dernier devient un cobaille de
laboratoire, dont l’explication du comportement passe par une observation au
microscope. Toute chose qui ignore la dimension versatile et sibylline de l’être
humain. On ne peut pas tout expliquer scientifiquement sur l’être humain
comme on le fait avec une maladie.

-les alternatives dérivées de la politique criminelle abolitionniste : la politique


criminelle abolitionniste renvoie à l’ensemble des réponses au phénomène
criminel, inspirées de la théorie abolitionniste. Elle se résume en un système de
substitution au système pénal. Dans cet univers, l’infraction est remplacée par
la situation-problème. C’est le résultat de l’accord entre les parties qui ont un
30
conflit et qui exprime l’objet de leur désaccord.La réponse à la situation-
problème n’est pas une peine, mais une mesure de défense sociale.
Cependant, la particularité de cette mesure est la négociation entre les
parties. Elle doit porter sur la définition de la situation problème d’une part et
sur la solution (médiation, compensation et conciliation) d’autre part. A la
place de la société et de la loi (Gramatica et Prins) Hulsman propose la
communauté. Ce sont des groupes sociaux où il y a une interdépendance
effective et reconnue entre les membres. Cette interdépendance va aider les
parties à solutionner leur problème, et non le pouvoir contraignant de l’Etat.
Pour parvenir à cet objectif, certains mouvements de politique criminelle
doivent être adoptés :
–la décriminalisation : on distingue la décriminalisation primaire (supprimer les
incriminations) et secondaire (supprimer les applications) ;
–la dépénalisation : c’est la suppression des peines. Elle se distingue de la
désescalade pénale : c’est une tendance à la diminution de la sanction pénale.
Ex : la correctionnalisation ou la contraventionnalisation, substitution des
mesures de défense sociale à certaines peines.

–la déjuridiciarisation : c’est le fait de recourir à des formes de justice non


judicaires (arbitrage, …).

Critique de Hulsman : Si on peut reconnaitre à Hulsman, le mérite de dénoncer


les dysfonctionnements du système pénal d’une part et la proposition des
alternatives à l’application de la sanction pénale, on peut aussi questionner la
pertinence de son absolutisme. Peut-on réellement trouver à toutes infractions
des alternatives à la sanction pénale au point de prétendre à la disparition du
système pénal ? La réponse est négative. On peut admettre pour les atteintes
aux biens des alternatives à la peine : l’indemnisation. Mais il est difficile

31
d’obtenir une indemnisation proportionnelle pour les atteintes corporelles et à
l’honneur. En cas de meurtre d’un proche, peut-on se contenter d’une
indemnisation ? En cas de viol d’un proche peut-on recourir à la médiation, à la
conciliation ou à l’arbitrage ? Ce questionnement illustre qu’un monde sans
système pénal n’est pas pour demain.

CHAPITRE 2 : LA THEORIE SUR LES FINALITES DE LA SANCTION PENALE


Les finalités de la sanction pénale sont les objectifs qu’elle poursuit. De façon
classique, la sanction pénale oscille entre « punir » (section 1) et « resocialise »
(section 2).

SECTION 1 : La sanction pénale pour punir

Para 1 : Les supports idéologiques


Plusieursdocuments ont en commun l’orientation de la sanction pénale vers la
punition du délinquant qui s’entend par l’infliction d’une souffrance à l’auteur
de l’infraction, on parle parfois de justice pénale retributive parce que le
délinquant a posé un acte contraire à la loi pénale, en contrepartie, il doit subir
la sanction pénale pour garantir la stabilité sociale. L’idée de justice pénale
retributive a été promue par deux tendances :
La répression vindicative : l’idée majeure est que la sanction pénale permet
d’éviter que l’absence de punition engendre le mépris à l’égard de la victime et
diminue son honorabilité. De la sorte, permet de rétablir l’équilibre des
relations humaines avec les forces occultes qui gouvernent le monde.la
répression vindicative est défendu par la pensée Romaine (AULU- GELLE) En
droit canonique la même idée est reprise par la loi du talion (œil pour œil, dent
pour dent)
32
La répression retributive: l’idée force ici est que la peine est un outil de
cohésion sociale. En effet, PLATON repris par St THOMAS D professait que : le
crime, opérant une rupture intolérable dans l’ordre du monde, l’ordre doit être
restauré par l’application de la peine. ARISTOTE considérait la peine comme un
moyen pour établir l’équilibre rompu par le crime, quant à DURKHEIM, il
estimait que la répression en dissolvant les émotions collectives provoquées
par un crime maintien la cohésion sociale.
Si ces auteurs justifient l’application de la sanction pénale par l’objectif de
maintenir la cohésion sociale, Emmanuel KANT s’y oppose. Pour lui,
l’application de la sanction pénale est motivé par un impératif catégorique, cela
signifie que la sanction pénale doit êtreappliquéemême en l’absence de
cohésion sociale, on parle de l’école de justice absolu, c’est une idée qu’il a
illustré dans (L’Apologue de l’île abandonnée) on peut tout de mêmeinterroger
l’école absolu d’Emmanuel KANT sous l’angle du réalisme. Le droit en général
et le droit pénal étant des sciences sociales, il peut être illusoire d’envisager
l’existence d’une sanction pénale déconnecté des réalités sociales.

Para 2 : La matérialisation de la punition


La sanction pénale de nos jours se matérialise par des outils permettant de
l’identifier dans un dispositif normatif, et à l’examen de la loi pénal la sanction
peut être une peine ou une mesure de sureté.
La matérialisation de la sanction comme peine : l’observation des peines dans
les lois pénale prend en compte l’idée de rétribution de vengeance et de
perfectionnement du délinquant. La peine privative de liberté à vie, la peine de
mort illustre la répression vindicative et retributive. L’idée est qu’on ne prend
pas en compte la resocialisation du délinquant.

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Les mesures de suretés assimilées à la peine : la défense sociale positive
prévoit les mesures pour illustrer la punition. Ce courant renvoi parfois aux
mesures éliminatives ; emprisonnement, mise à mort, internement dans un
asile, détention perpétuelle. Il existe aussi des mesures sociales : éloignement
dans un endroit, exclusion dans certaines professions, classement dans une
famille honnête

SECTION 2 : La sanction pénale pour resocialiser

Para 1 : Le fondement doctrinal de la resocialisation


La resocialisation signifie qu’une personne est d’abord sortie de la société
parce qu’elle a posé un acte désapprouvé et qu’après un certain temps, cette
personne retourne dans la société. Pourquoi donner à l’être humain la chance
de revenir dans la société après la commission d’une infraction ? La réponse à
cette question est à rechercher dans la doctrine de la resocialisation. Certaines
idées permettent de résumer cette doctrine :
L’amendement : c’est à PLATON qu’on doit cette notion, selon lui, la peine ne
doit pas se limiter uniquement à l’objectif de rétribution, elle doit aussi
permettre l’expiation de l’auteur de l’infraction. Cela veut dire faire sortir en
l’auteur de l’infraction le mal qui l’a poussé à la commettre. Mais
l’amendement Platonicien articule une sanction sévère parce qu’il s’agit de
marquer le corps par des mesures qui pourront produire spirituellement un
effet positif, c’est pourquoi la sanction pénale repose sur le fouet, certaines
tortures humiliantes, l’exposition à la porte du temple. On reproche à cette
sécurité sa non proportionnalité.

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La miséricorde : MABILLON estime que la sanction pénale doit permettre le
retour du délinquant dans la société, mais ce retour passe par la réforme du
régime pénitentiaire, l’auteur propose un régime cellulaire ; des promenades
aux grands aires, la nourriture suffisante pour garantir l’épanouissement du
délinquant, il s’agit d’un préalable préparatoire de la resocialisation. Pour ce
qui est des conditions sociales de réadaptation du détenu, MABILLON prône le
travail car une prison sans occupation est capable de favoriser
l’endurcissement des détenus, MABILLON souhaite aussi l’organisation des
visites aux détenus dans l’optique de cerner leur histoire et les motivations de
l’infraction. Sur la base de ces données, il est possible d’élaborer un véritable
programme de resocialisation, de même, tout détenu a droit à la nourriture
spirituelle.
La réfection perfectionnelle : l’idée ici est que la peine est un moyen de
correction et d’amélioration du délinquant. Le délinquant doit être puni dans la
mesure où il a mérité et parce qu’il a pêché « punitur quia peccatum est » et
parce qu’il a mérité « punitur ne peccetur » : comme l’a souligné Etienne
GARCON, « la doctrine de la rédemption pénètre dans le domaine de la justice
».
Para 2 : La matérialisation de la resocialisation
L’expression resocialisation s’impose de manière diffuse lorsque certaines
conditions sont remplies : la première est qu’il ne faut pas être en présence des
sanctions incompatible avec la resocialisation ; c’est le cas de la peine de mort
et de la condamnation à vie. En revanche, l’objectif de resocialisation devient
obligatoire en présence d’une privation de liberté à terme. En fait, lorsqu’on
condamne une personne pour un temps, la durée de la condamnation épuisée
s’impose la question du retour de la personne condamné par la société. Pour
ne donc pas être surpris, il convient d’enclencher la préparation de la

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resocialisation pendant la durée de la condamnation. Mais cela suppose qu’on
soit en présence d’un délinquant lucide et prêt à regretter les conséquences de
ces actes. Ce qui n’est pas le cas du délinquant sujet des mesures de suretés.

Les mesures de suretés curatives : ce sont les mesures prononcées à l’encontre


d’un délinquant présentant un état dangereux et nécessitant un traitement,
dans cet hypothèse, les mesures susceptibles de guérir la dangerosité de ce
délinquant permettront son retour dans la société c’est à dire sa
resocialisation ; c’est ce qui est visée par l’internement d’un dément dans un
établissement psychiatrique et les alcooliques ou les drogués dans les centres
de désintoxication.

TITRE 2 : LA THEORIE DE LA SANCTION PENALE DANS SON DEPLOIEMENT


Par déploiement il faut entendre la mise en œuvre de quelque chose, et le
déploiement de la sanction pénale amène à observer la mise en œuvre de
celle-ci. Il s’agit au-delà du discours théorique d’observer le rôle pratique que
joue la sanction pénale dans l’univers juridique. Il apparaît que la sanction
pénale oscille entre importance et indifférence (chapitre 1) et entre le
délinquant et la victime (chapitre 2).

CHAPITRE 1 : LA SANCTION PENALE ENTRE IMPORTANCE ET INDIFFERENCE


Le statut de la sanction pénale change selon qu’on est en droit pénal national
et en droit international pénal. Cette sanction est importante en droit pénal
national (section 1), et indifférente en droit international pénal (section 2).

SECTION 1 : L’IMPORTANCE DE LA SANCTION PENALE EN DROIT PENAL


NATIONAL

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Para 1 : La lecture du droit pénal général à partir de la sanction pénale
Le droit pénal général se situe dans les disciplines normatives des sciences
criminelles. C’est une discipline qui a pour objet l’infraction, ces
comportements, les règles encadrant la responsabilité pénale et les sanctions
applicables. On constate que la sanction pénale occupe une place majeure au
regard du rôle qu’elle joue dans la structuration de cette discipline.
La sanction pénale joue un rôle dans la définition en extension de l’infraction
en droit pénal général : en effet, il existe deux façons de définir l’infraction, à
côté d’une définition en compréhension, il existe une définition en extension.
En compréhension, l’infraction renvoi à une action ou une omission prévue et
réprimée par la loi pénale, cette définition ne permet pas de cerner les
composantes ou catégories de l’infraction. Pour y arriver, il faut recourir à une
définition en extension. Elle permet de cerner les catégories de l’infraction et
selon la division tripartite, il est possible de distinguer les crimes, les délits, et
les contraventions et cette division est fonction de la gravité de la sanction
pénale. Les crimes présentent une gravité de haute intensité ; les délits sont de
moyenne de moyenne intensité et les contraventions sont de base intensité au
regard des sanctions qui les accompagnent.
La sanction pénale joue un rôle dans la hiérarchisation des peines : par
hiérarchisation, il faut entendre l’existence d’un ordre établie. La
hiérarchisation des peines suppose qu’on peut établir un ordre par échelle de
gravité. Cela est possible en observant le quantum de la sanction pénale de la
plus grave à la moins grave. On distingue les peines criminelles et
contraventionnelles. Cette hiérarchisation importe parce qu’elle est porteuse
d’un message non seulement sur les valeurs protégés, mais aussi sur le risque
auquel s’expose le délinquant en puissance.

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Pour ce qui est des valeurs en fonction de la gravité de la sanction pénale on
peut distinguer les valeurs très importantes et moins importantes selon
l’arrimage à la trilogie crime, délits, contravention.
Concernant le risque auquel s’expose le délinquant une gradation est possible à
partir de la division tripartite, crimes : risques très élevés, délits : risques
élevés, contraventions : risques moins élevés
En bref, la sanction pénale permet d’identifier les catégories et la gravité de
l’infraction. Elle étend aussi son influence sur la procédure pénale.

Para 2 : La lecture de la procédure pénale à partir de la sanction pénale

La procédure pénale se présente aussi comme une discipline normative, on


l’appelle encore le droit pénal de forme. Par définition, la procédure pénale
désigne l’ensemble des règles encadrant la constatation des infractions,
l’instruction préparatoire, la poursuite et le jugement des délinquants.
L’analyse s’appesantit au préalable sur la procédure pénale nationale à
l’exclusion de la procédure pénale internationale. Dans ce registre, la sanction
pénale est aussi déterminante, le fait de diviser l’infraction en crime, délit et
contravention produit également des conséquences sur la procédure pénale.

La compétence matérielle des juridictions : les crimes et délits connexes sont


de la compétence du TGI, les délits et contraventions sont de la compétence du
TPI.
Les phases de la procédure : en cas de crimes, les phases de la procédure
pénale sont : l’enquête, l’instruction ou l’information judiciaire obligatoire et le
jugement. En cas de délit, les étapes sont : l’enquête, l’information judiciaire ou

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instruction facultative et le jugement.En matière contraventionnelle, les phases
se composent de l’enquête et du jugement.
Les autorités de la procédure : les officiers de police judiciaire s’occupent de la
matérialité de l’enquête. Le ministère public est l’autorité hiérarchique de
l’enquête, quant au juge d’instruction, il est chargé d’ouvrir une instruction
judiciaire ou de mettre en examen une affaire et le juge prononce la décision.
Dans l’ensemble, la sanction pénale en droit et procédure national
influence la structuration de ces disciplines, c’est pour cette raison qu’on peut
affirmer son importance. À l’inverse, la sanction pénale est indifférente en droit
pénal international.

SECTION 2 : L’INDIFFERENCE DE LA SANCTION PENALE EN DROIT


INTERNATIONAL PENAL

Para 1 : une indifférence dans l’existence du droit international pénal

Le droit pénal international est la branche du droit criminelle qui s’occupe


des infractions internationales, il est question des infractions attentatoires aux
valeurs chères à la communauté universelle, l’expression la plus achevée de ce
droit est la création de la CPI le 17/07/1998.
L’existence de cette branche du droit n’a pas été déterminée par l’importance
de la sanction pénale. En clair, la sanction pénale ne joue aucun rôle dans
l’élaboration et la structuration du droit pénal international, il en est ainsi pour
deux raisons :
-La sanction pénale n’est pas le critère d’existence de l’infraction
internationale. En effet, les infractions internationales sont celles qui jugent.

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C’est pourquoi les justices pénales de tous les pays peuvent être solidaires dans
la répression des infractions internationales.
-La sanction pénale ne joue aucun rôle dans la distinction des infractions
internationales : contrairement au droit interne ou la sanction pénale a permis
d’éclater l’infraction en crime, délit et contravention, on constate que
l’infraction internationale est une catégorie unique et même si des distinctions
existent entre des infractions internationales, elles concernent le MODUS
OPERANDI et la cible visée. Mais sur le plan formel, il émerge une unicité de la
catégorie infraction internationale, cette unicité est garanti par la nature des
valeurs protégées. C’est ainsi que le génocide, le crime contre l’humanité, le
crime de guerre et le crime d’agression ne présentent des différences qu’au
niveau de leur mode opératoire et des cibles visées. Mais toutes ces infractions
ont en commun une « attaque généralisée et systématique », c’est ce qui peut
expliquer l’identité de la sanction. En illustration, le statut de la CPI prévoit que
la peine encourue pour tout est de trente (30) ans d’emprisonnement.

Para 2 : Une indifférence dans le déroulement de la procédure pénale


internationale

L’observation du déroulement de la procédure pénal devant les juridictions


pénales internationales témoignent d’une non-prise en compte de la sanction
pénale. En effet, la poursuite des infractions, la compétence des juridictions ne
sont pas conçues en fonction d’une gravité graduelle des infractions comme on
peut l’observer en procédure pénale interne. En effet, cela s’explique par
l’existence d’une seule catégorie pénale au titre d’infraction en droit pénal
international, c’est le crime contre l’humanité. Il peut prendre plusieurs formes
mais sans changement de nature, sur cette base on comprend l’inutilité e

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rechercher une pluralité de juridiction et d’autorité pour la répression d’un
même fait. Depuis le tribunal de NURENBERG jusqu'à la PI, il est constant que
l’instruction et la poursuite des crimes contre l’humanité n’est pas fonction de
la gravité de la sanction pénale.

CHAPITRE 2 : LA SANCTION POUR LE DELINQUANT OU POUR LA VICTIME


La sanction pénale est-elle au service du délinquant ou de la victime ? À
l’observation des instruments du droit pénal, il arrive que la sanction pénale
soit orientée vers le délinquant (section 1) et parfois vers la victime (section 2).
SECTION 1 : LA SANCTION PENALE POUR LE DELINQUANT

Para 1 : L’orientation de la sanction pénale sur le délinquant


La sanction pénale a été définie comme une mesure prononcée contre
l’auteur d’une infraction. Son fondement est dans la réaction de la société
contre un individu qui attente aux valeurs qu’elle protège. La sanction pénale
doit donc être subie par le délinquant, d’où vient-il qu’une sanction pénale
prenne en compte le sort du délinquant ? La réponse est dans les deux raisons
suivantes :

L’individualisation de la peine : elle se définit comme l’adaptation de la peine


aux caractéristiques individuelles du délinquant, chacun étant particulier dans
sa nature et les raisons n’étant pas les même pour commettre une infraction, il
est nécessaire de cadrer la sanction pénale aux circonstances particulières de
l’auteur de l’infraction. C’est une évolution qui est partie de l’ancien régime ou
on reprochait à la peine de ne pas être proportionnelle à la faute de
l’infraction. Le système classique préconisé par BECCARIA et MONTESQUIEU
ont plaidé pour l’égalité des peines selon les catégories en présence, l’idée se

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résumait en ceci « la même peine pour le même crime » au 19ème siècle
l’école néoclassique remet en cause le principe de l’égalité des peines pour
soutenir celui de l’individualisation des peines. Des auteurs comme GUIZOT,
ROSSI, JOUFROY, ORTOLAN résument la pensée de l’école néoclassique par la
maxime « punir pas plus qu’il n’est juste, pas plus qu’il n’est utile » pour eux la
répression doit être modéré et tendre à la défense de la société. Mais c’est à
BENTHAM « Théorie des peines traditionnelles françaises, 1825, P83 » qu’on
doit une des théorisations de l’individualisation judiciaire. Selon cet auteur, il
convient de laisser une certaine liberté au juge non pas pour aggraver la peine
mais pour la diminuer dans les cas qui font présumer que l’individu est moins
dangereux ou moins responsable.
L’humanisation de la sanction pénale : la notion d’humanisation signifie rendre
supportable à l’homme et l’humanisation de la sanction pénale signifie la
modulation de la sanction pénale pour qu’elle soit supportable à l’homme.
Mais qu’est ce qui fait la particularité de l’homme pour qu’on cherche à
humaniser sa sanction ? La réponse se trouve dans la notion de dignité. la
dignité humaine est une qualité inséparablement lié à l’êtremême de l’homme,
ce qui explique qu’elle soit la même pour tous les hommes et n’admet pas de
degré ; KANT « fondement de la métaphasique desmajeurs P112-113 »
observait que « dans le règne des fins, tout a un prix, une dignité. Ce qui a un
prix peut être remplacé par quelque chose d’autre à titre d’équivalent, au
contraire, ce qui est supérieur à tout prix, ce qui par suite n’admet pas
d’équivalent c’est ce qui a unedignité ». Ainsi, les choses ont un prix et
l’homme a une dignité. Il est vrai que le délinquant a commis une infraction qui
l’éloigne de la société ; mais il continu à être un homme et par conséquent
d’avoir une dignité. C’est ce qui constitue le fondement même des droits de
l’homme condamné structurant l’humanisation de la sanction pénale. L’article

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10 du pacte internationale relatif aux droits civiles etpolitiques garantie « le
droit pour toute personne privé de liberté d’être traité avec humanité et le
respect inhérente à la dignité humaine ». Cette constitutionnalisation de
l’humanisation emporte des obligations à la charge de l’Etat dans le traitement
pénitentiaire.

Para 2 : Le déploiement du délinquant dans la sanction pénale


Les modalités d’individualisation de la peine du délinquant : il existe trois
formes d’individualisation de la peine : l’individualisation légale,
l’individualisation judiciaire et l’individualisation administrative seront
examinés.
L’individualisation légale est celle dérive de la loi. Ici le législateur essaye de
classer les individus par catégorie en prévoyant les peines qui seront
prononcées. Les critères de cette individualisation sont : l’élasticité des peines
et les circonstances atténuantes ou aggravantes. En réalité, l’individualisation
légale est une fausse individualisation. La raison est que la loi ne connait pas
que les faits et ignore les criminels. Pour le législateur il n’y a que les crimes et
non les criminels.
L’individualisation judiciaire quant à elle permet au juge d’apprécier le
quantum de la sanction pénale en fonction de la personnalité du délinquant, et
il ne retiendra que la peine correspondant à son appréciation. En effet, le juge
est mieux placé pour apprécier la personnalité du délinquant parce qu’il l’a en
face de lui. Les critères lui permettent d’individualiser sont : le jeune âge, la
maladie mentale, le degré de professionnalité criminelle, le motif de l’acte.
Toute fois en pratique on déplore que le juge s’en tienne beaucoup plus aux
faits et ne cherche pas à découvrir la personnalité du délinquant avant de
prononcer la peine.

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L’individualisation administrative : l’administration pénitentiaire au cours de
l’exécution de la peine peut apprécier les changements intervenus dans le
comportement du condamné. Si celui-ci a brillé par un bon comportement, il
peut bénéficier des aménagements de la peine à l’instar de l’affectation d’une
cellule de haute sécurité à une de moyenne ou base sécurité, la semi-liberté, la
corvée….
Les modalités d’humanisation de la peine du délinquant : l’humanisation de la
peine renvoi à l’humanisation des conditions de détention. Elle touche aussi
bien l’aspect physique que moral. Au sens pénal, l’humanisation veut dire la
prise en compte de la santé physique du détenu, elle intègre l’alimentation,
l’habillement ainsi que l’hygiène et la santé. Au plan moral, l’humanisation est
réalisée par l’épanouissement de l’esprit du détenu. Pour y arriver
l’administration pénitentiaire doit veiller à la réalité des activités sportives,
culturelles religieuses et le maintien des liens avec la famille.

SECTION 2 : LA SANCTION PENALE POUR LA VICTIME

Para 1 : La prise en compte de la victime dans la sanction pénale


La sanction pénale est en principe orienté vers le délinquant, la victime n’est
pas sa priorité, cependant lorsqu’on envisage la justice restauratrice en matière
pénal ; on peut utiliser la sanction pénale pour préserver les intérêts de la
victime. La justice restaurative est celle qui cherche à restaurer c’est à dire
rétablir l’équilibre qui a été rompu à cause de l’infraction. Pour y arriver, la
justice pénale restaurative prend en compte la finalité de la justice civile à
savoir la réparation du préjudice subi par la victime de l’infraction .il s’agit là de
la victime pries comme personne privé. Mais la victime peut aussi être abordé

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comme une personne publique .dans ce cas, la justice pénale restauratrice est
possible au moyen de l’analyse économique du droit pénal en général et la
sanction pénale en particulier sont utiliser comme des instruments pour
atteindre un résultat économique d’une part et pour inciter le comportement
du délinquant d’autre part.

Para 2 : L’influence matérialisée de la victime sur la sanction pénale


-La victime personne physique influe sur : La détermination de la peine. Dans
le cadre des infractions matérielles, la victime joue un rôle important parce que
la sanction pénal est fonction du préjudice qu’elle subit. On dit que l’infraction
est fonction du résultat palpable. L’infraction du résultat palpable qui permet
de mettre en exergue la centralité de la violence dans la détermination de la
peine est l’infraction de violence. Sur les circonstances aggravantes : la qualité
de la victime peut être à l’origine de l’aggravation de la peine du délinquant ; il
en est ainsi lorsque la victime est un mineur ou une femme enceinte. Sur la
nature de la peine : il existe à côté de la batteriede peines orientées contre le
délinquant des peines qui prennent en compte l’intérêt de la victime, c’est le
cas de la sanction réparation. C’est ne sanction qui a deux visages. Le premier
consiste à faire impression sur le condamné tout en recherchant sa
resocialisation .le second aspect consiste à faire prendre conscience au
condamné qu’il doit réparer le préjudice subi par la victime s’il veut profiter des
faveurs de la loi. En cas d’inexécution de l’obligation d’indemniser, le
délinquant peut être condamné à une peine d’emprisonnement ou une
amende. A la vérité, la peine est tournée vers le délinquant mais la victime en
profite accessoirement. En guise d’illustration on peut citer la contrainte
pénale, elle oblige le condamné à réparer les dommages causés par l’infraction
s’il veut obtenir sa libération. Par ailleurs, l’influence de la victime est décisive

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dans la détermination de la nature même de la peine. C’est ainsi que l’accord
de la victime peut permettre la dénaturation de l’infraction et par conséquent
la réduction du quantum de la sanction pénale. L’exemple est dans la
correctionnalisation, c’est un mécanisme qui permet au juge de retenir une
qualification délictuelle alors qu’on est en présence d’un crime. Mais cela n’est
possible que s’il ya un accord entre l’auteur, la victime et le juge.
-La victime personne morale. La personne morale victime d’une infraction peut
être privée ou publique. La personne morale privé renvoie aux sociétés
commerciales, elles n’intéressent pas la présente analyse. Quant à la personne
morale publique, elle fait référence à l’Etat. L’Etat victime d’une infraction peut
influencer sur le prononcé de la sanction pénale en obtenant l’éviction celle-ci.
Cela est possible par le mécanisme de la transaction et de restitution du corps
du délit. Par la transaction, un fonctionnaire représentant de l’Etat trouve un
accord avec l’auteur de l’infraction permettant d’obtenir un règlement
financier pour éviter l’activation de la procédure pénale. La transaction permet
ainsi de mettre un terme par anticipation au déclenchement de l’action
publique et en contrepartie l’Etat victime de l’infraction se trouve dédommagé.
Les administrations susceptibles de transiger avec l’auteur de l’infraction sont
les Douanes, les Impôts, les Eaux et Forêts… si la transaction tue par
anticipation l’action de l’action publique, tel n’est pas le cas de la restitution du
corps du délit. C’est un mécanisme qui doit être appréhendé dans une
dynamique de partenariat entre l’arrêt des poursuites et la restitution du corps
du délit. Ce mécanisme a été inventé en droit camerounais par l’article 18 de
la loi de 2011portant création du Tribunal Criminel Spécial. Le but de ce
mécanisme est de retrouver les biens distraits en contrepartie, l’auteur de
l’infraction bénéficiera de l’arrêt des poursuites contrairement à la transaction,
l’arrêt des poursuites intervient lorsque l’action publique est déclenchée, mais

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c’est un mécanisme imparfaitement conçue parce qu’il offre une garantie
partiel à ses partenaires. Si l’Etat à la certitude de recouvrer ses biens ; le
délinquant n’a toujours pas l’assurance qu’il sera libéré. Il convient donc de
repenser le dispositif en cohérence avec l’analyse économique d’une part et Le
pacta sunt servanda d’autre part. il convient d’observer que la Cour criminelle
spécialisée du Gabon, créée pour réprimer la corruption et les détournements
des hauts commis de l’Etat, n’a pas prévu l’arrêt des poursuites contre
restitution du corps du délit.
Conclusion
L’étude de la théorie explicative de l’infraction et de la sanction a permis
d’examiner l’esprit de la loi pénale, au-delà de la lettre. La particularité de ces
théories est dans la recherche de l’équilibre. Si l’enseignement a visé la théorie
de l’infraction et de la sanction, une discipline voisine partage le souci de
cerner derrière les instruments l’idéologie : il s’agit du droit pénal comparé.

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