Dossier Concours C1
Dossier Concours C1
Dossier Concours C1
SESSION 2024
ENJEUX OLYMPIQUES
En centrant son dossier 2024 sur les Jeux Olympiques, Sciences Po Grenoble-UGA
invite les candidates et les candidats à s’approprier les questionnements, démarches et
savoirs qu’un IEP met en œuvre face à un tel événement, autrement dit sa façon de saisir un
fait d’actualité aux feux croisés de l’interdisciplinarité. C’est à une mise en perspective
historique et critique que doit conduire la préparation de ce dossier. L e fait que Grenoble
appartienne au cercle restreint des villes olympiques (une quarantaine) et que la mémoire de
ses JO d’hiver ait été ravivée lors du cinquantenaire de 2018, prédispose au bilan à long
terme, sur l’empreinte de l’événement dans l’identité d’une ville comme sur ses impacts
1
urbanistiques, touristiques ou écologiques (doc. 10). Dès lors, ce n’est pas la maîtrise de la
chronique sportive – et encore moins des fiches sur les champions et leurs records – qui est
attendue des candidats mais la capacité à adopter l’angle de lecture pertinent sur les images
produites par les JO. Par exemple, quand, à Pékin (2008), le sprinter Usain Bolt, triple
médaillé d’or, fait un tour d’honneur sur la piste après chacune de ses victoires, on notera
qu’il porte haut les couleurs de la Jamaïque, qui accède ainsi à une visibilité mondiale
au-delà des clichés usuels, et que les semelles dorées Theseus II qu’il brandit assurent à
Puma, son fournisseur, un spot publicitaire suivi par 2,3 milliards de téléspectateurs. De
même, constater l’échec sportif des Français aux JO de Rome en 1960 (5 médailles, pas de
titre) doit aussitôt déboucher sur une étude du débat public – L’Équipe comme Le Monde
multipliant les diatribes jusqu’à y voir la marque de décadence de la France – et sur la
réaction de l’État gaullien : renforcement du rôle du haut-commissariat à la Jeunesse et aux
Sports, qui s’attelle à un plan d’équipement national, organisation des JO de Grenoble pour
promouvoir l’industrie de la neige et gagner le marché mondial des sports d’hiver dans les
stations françaises de nouvelle génération.
Le sport suscite les passions. Une critique radicale du spectacle sportif s’est installée.
Elle cherche à déchirer le paravent olympique couvrant les violations des droits de l’homme,
de Berlin (1936) à Pékin (2008), en passant par Mexico et la répression du mouvement
étudiant sur la place des Trois Cultures (1968). C’est aussi la dépolitisation qui est fustigée
dans ce divertissement de masse susceptible de faire diversion face aux enjeux politiques,
dans la lignée du Panem et Circences. Le dossier attire par conséquent l’attention sur le rejet
que suscitent les JO, et notamment la marchandisation de la marque (doc. 11). Le candidat
doit connaître les conflits de valeurs, les argumentaires antagonistes. Il ne s’agit nullement
de prendre parti mais de savoir mettre en problème les enjeux de l’olympisme, c’est-à-dire
identifier les tendances contradictoires à l’œuvre, à commencer par la tension entre la
course au gigantisme portée par l’émulation entre pays hôtes et les exigences de sobriété en
contexte de crise environnementale. Le présent dossier aborde plusieurs de ces
problématiques au travers d’un panel de documents et d’analyses.
1
Art. 50 : « aucune sorte de démonstration ou de propagande politique, religieuse ou raciale n’est autorisée
dans un lieu, site ou autre emplacement olympique. »
2
Art. 2 : « agir dans le but de renforcer l’unité du mouvement olympique, de protéger son indépendance, de
maintenir et promouvoir sa neutralité politique et de préserver l’autonomie du sport. »
2
résonance des conflits du monde (doc. 3). Telle est l’ambiguïté constitutive des JO : le
discours et le cérémonial les revêtent d’une forme de sacralité et, cependant, cette mise en
spectacle en font un événement éminemment sécularisé, aux prises avec les problèmes de
l’époque.
3
changement physique de leurs sportifs au sein de véritables usines à champions. Le cas des
Wondermädchen est-allemandes (« formidables petites prodiges ») en était devenu
l’exemple type – les performances des nageuses suscitant admiration à l’Est, mais
scepticisme et sarcasme à l’Ouest. Le culte de la performance nourrit le tragique olympique,
avec son taux d’échec structurel (doc. 6), avec des vies modelées pour un moment de gloire
au prix de la souffrance et d’une instrumentalisation dont la gymnaste Nadia Comaneci, la
« petite communiste qui ne souriait jamais », est devenue l’emblème (doc. 7), à rebours des
success stories mises en avant. Le dopage n’est pas l’apanage d’un camp, comme l’a illustré le
scandale Ben Johnson en 1988. L’élitisme est inhérent au projet olympique puisqu’il s’agit du
concours sportif suprême. Pierre de Coubertin rêvait que les Jeux fassent advenir une
« chevalerie sportive », dans le cadre des valeurs olympiques de désintéressement. Jusqu’aux
années 1980, les JO ont de la sorte été réservés aux amateurs avant que la révolution
Samaranch n’autorise l’entrée en lices des professionnels, accélérant la transformation du
modèle économique de l’olympisme (doc. 9).
Le dossier suivant plonge donc au cœur des enjeux olympiques au fil d’une série de
documents – cette introduction comprise – que chaque candidat aura pris soin d’approfondir
et de s’approprier, en s’appuyant sur sa culture générale et en restant attentif à l’actualité.
4
SOMMAIRE
Doc. 1 : Comité International Olympique, Jeux Olympiques, « Principes 6
fondamentaux », Lausanne, 1966, p. 13-14.
Doc. 4 : Yoav Dubinsky, «The Olympic Games, nation branding, and public 17
diplomacy in a post-pandemic world: Reflections on Tokyo 2020 and beyond
», Place Branding and Public Diplomacy, n° 19, 2023, p. 387-388.
Doc. 7 : Lola Lafon, La Petite Communiste qui ne souriait jamais, Paris, Actes 30
Sud 2014, p. 84-87.
Doc. 9 : Robert A. Baade et Victor A. Matheson, « Going for the Gold: The 36
Economics of the Olympics », Journal of Economic Perspectives, vol. 30, n° 2,
Spring 2016, p. 201-204; 206-210; 213-214 [traduit de l'anglais par Sophie Panel].
Doc. 10 : André Suchet, « Les ruines des jeux olympiques de Grenoble 1968. Le 41
tremplin de saut à ski de Saint-Nizier-du-Moucherotte et ses fantômes »,
Techniques & Culture, 2016, n° 65-66, Réparer le monde, p. 435-436.
5
crédit photo : Luc Boegly
Document 1 :
6
I
PRINCIPES FONDAMENTAUX
l Les Jeux Olympiques ont lieu tous les quatre ans. Ils réunissent, en
un concours sincère et impartial, des amateurs de toutes les nations.
Aucune distinction n'y est admise, à l'égard d'un pays ou d'une per
sonne, pour des motifs de race, de religion ou d'attaches politiques.
Il
7
6 Ne sont admis à concourir aux Jeux Olympiques que les amateurs
répondant à la définition précisée à l'article 26 ci-après.
7 Ne sont qualifiés pour représenter les couleurs d'un pays aux Jeux
Olympiques que les nationaux de ce pays.
Les Jeux sont des compétitions entre individus et non entre nations,:..
,. Etant donné que le mouvement olympique est apolitique. les termes «pays» ou «nation•
dans les présentes règles s'appliquent également à une région géographique. zont> ou territoire.
dans les li111ites de laquelle un Comité Olympique reconnu par le Comité International Olym
pique déploie son activité ou fonctionne.
La reconnai�sance d\m Comité Olympique dans une telle région géographique :
1. n'implique pas sa reconnaiss�1nce politique. ceci n'étant pas de la compétence du Comité Inter
national Olympique :
2. ne peut avoir lieu que si celle région. zone ou territoire a bénéficié d'un gouvernement stable
pendant une période raisonnable.
12
8
Document 2 :
9
Le Comité international olympique avait attribué les Jeux à
Berlin. en r93r, quand l'Allemagne vivait encore sous le régime de
la République de Weimar. Adolf Hitler les méprisait alors, mais à
mesure qu'il se rapprochait du pouvoir, Goebbels était parvenu à
le convaincre de son utilité pour la propagande. Le culte du corps
parfait à travers celui de la gymnastique, l'exaltation de l'idéal
harmonieux offert au regard par la statuaire inspirée de l'Antiquité
grecque, la mise en valeur des musculatures héroïques participaient
de l'idéologie proclamant la supériorité de la prétendue race
aryenne.
[...]
10
Hitler avait promis qu'il n'y aurait pas d'exclusion raciale et ils
l'ont cru. Ou ils ont feint de croire qu'il se plierait à la Carte
olympique stipulant dans ses principes fondamentaux l'interdiction
de toute discrimination. Une capitulation qui en annonce d'autres. La
consigne avait été donnée d'attendre la fin des olympiades pour
appliquer les lois raciales de Nuremberg aux sportifs avec la rigueur
requise. A la veille de l'ouverture, le chancelier du Reich avait été
jusqu'à accéder à la demande du compte Henri de Baillet-Latour,
président du Comité international olympique, de retirer des accès aux
lieux publics les panneaux sur lesquels on pouvait lire:
11
12
Document 3 :
13
· La géopolitique contemporaine résulte de la division du monde en
États de plus en plus nombreux qui mobilisent leurs ressources pour
affirmer leur place dans la compétition mondiale. Ces divisions et
répartitions des États dans chaque continent se sont complexifiées
à partir du XIXe siècle en Europe et dans ses prolongements avant
de s'étendre au reste du monde. C'est dans ce contexte que Pierre
de Coubertin propose dès 1894 une organisation et des manifesta
tions tous les quatre ans au couts desquelles les sportifs représentant
leurs propres pays s'affrontent dans un système dirigé par le CIO. Ce
système a depuis évolué pour devenir ,;1.ujourd'hui l'organisation inter
nationale qui rassemble 1e plus grand nombre de nations .et propose
la plus grande entreprise de spectacle au monde, en s'appuyant sur
une puissante dramaturgie mondiale capable de cristalliser une charge
émotionnelle contemp�raine. Ainsi, si les clubs sportifs, puis les fédé
rations nationales et internationales ont précédé l'olympisme et ont
permis aux sports d'être des attracteurs d'organisation sociale, c'est
bien l'olympisme qui a joué le rôle d'intermédiaire culturel de la
mondialisation pour en devenir l'un de ses acteurs.
Ce constat est bien plus complexe que les intentions affichées insis
. tant sur la nécessité d'une neutralité politique du Mouvement olym
pique, dont la charte olympique rappelle les principes fondamentaux:
« favoriser une société pacifique soucieuse de préserver la dignité
humaine, le respect des droits de l'Homme et le refus de toute discri
mination >1. Plus que vers la neutralité, les Jeux se sont aussi orientés à
plusieurs reprises vers la recherche « d'une paix temporaire» dans la
tradition grecque de la « trêve olympique » en prétextant le ca(actère
unificateur du sport. Dans cette perspective, l'ONU a adopté.en 1993
une résolution visant à cesser les hostilités pendant la tenue des Jeux,
qui n'a pas eu de véritables effets sur les conflits, même si elle a été
respectée à Sarajevo en 1994, pendant les Jeux d'hiver de Lillehammer
en Norvège.
Le prétendu apolitisme de l'olympisme reste néanmoins bien
éloigné de la réalité et des rapports de force qui s'opèrent entre les
nations. L'interdiction officielle de la politique dans les Jeux concerne·
surtout les athlètes qui ne doivent pas exprimer leur opinion, mais elle
n'empêche pas les prises de parole des chefs d'États et de gouverne
ments, qui sont massivement présents lors des cérémonies d'ouverture.
Plus globalement, l'histoire de l'olympisme, née dans l'Europe des
nations, montre à l'évidence qu'il n'a pu rester à l'écart de trois crises
majeures, celle de l'entre-deux-guerres iiée i Ta morÎ.téedu fas-ëisme et·
du marxisme, celle de l'après-guerre avec le partage du monde et la
constitution d'ensembles géopolitiques idéologiquement concurrents,
celle enfin des années 1980 avec la mondialisation de l'économie et
l'emprise du marché sur les Jeux. A tous ces niveaux, l'olympisme
a failli à son projet original qui valorisait la_ neutralité politique,
l'amateurisme et la pratique de l'excellence plus que le spectacle; il
est devenu un substitut incapable de résister au déferlement natio
naliste et à i'ultra-libéralisme économique. Concevoir l'olympisme et
ses manifestations comme se situant en dehors des questions géopo
litiques revient à occulter les rapports de force réels entre les États
.
qm sont les ferments de la géopolitique olympique, même s'il reste un
' '
moyen de gouvernance mondiale jamais égalé.
14
Les analyses historiques soulignent que l'olympisme est d'abord un
reflet des relations internationales. Les guerres mondiales ont inter
rompu les Jeux et les vaincus en ont été écartés pour un temps: c'est
seulement en 1924, aux Jeux d'hiver de Chamonix et aux Jeux d'été.
de Paris, que l'Autriche est réintégrée dans l'olympisme; l'Allemagne
doit attendre ceux d'Amsterdam en 1928 pour être à nouveau admise'
à concourir. La présence du politique atteint son apogée aux Jeux de
Berlin en 1936 lorsqu'Hitler les utilise pour une parade du nazisnïe.
Après la Seconde Guerre mondiale, aux Jeux de Londres en 1948,
· les vaincus, Allemands et Japonais, sont encore écartés. L'Allemagne
- mais seulement de l'Ouest - et le Japon sont réintégrés dans le club
olympique à Helsinki en 1952 où l'URSS s'affronte au bloc occidental
, dans le contexte de la guerre froide. Ce contexte favorise les tensions,
et les boycotts se multiplient. A Melbourne en 1956, la Chine commu
niste qui p.rend ses distances avec l'"(JRSS, mais aussi l'Espagne, les
Pays-Bas, la Suisse en protestation contre la répression soviétique à
Budapest, et l'Égypte, le Liban, l'Irak, en raison de la crise de Suez,
refusent de participer. Les Jeux suivants, ceux de Rome en 1960 et de
Tokyo en i964, sont ceux de la détente, mais ceux de Mexico s'ins
crivent dans la contestation de l'année 1968, avec les poings lev�s,
gantés de noir, et les têtes baissées des athlètes américains Tommie
Smith et John Carlos. Les quatre olympiades suivantes sont à nouveau
des reflets sombres des relations internationales. Munich en 1972
est le théâtre du drame sanglant de l'attaque du commando terro
riste palestinien Septembre noir contre les athlètes israéliens - onze
membres de l'équipe olympique israélienne ont été assassinés; puis
suivent trois nouveaux JO boycottés, Montréal par les pays d'Afrique
pour dénoncer la poursuite de relations sportives avec l'Afrique du
Sud par des pays occidentaux (en l'occurrence la Nouvelle-Zélande en
rugby), Moscou par de nombreux pays occidentaux suite à l'invasion
de l' Afghanistan par les troupes soviétiques, Los Angeles par l'lJRSS et
ses alliés répondant ainsi au boycott précédent . Le retour à la normale
s'effectue aux Jeux.de Séoul en 1988; la nouveauté vient ensuite de
l'entrée de la Chine qui remplace l'URSS dans la course aux médailles
avec les États-Unis.
Les affiliations des nations reconstituées après la fin de l'URSS
renforcent encore la puissance du CIO qui parvient à rassembler l'en
semble des États du monde. Depuis le milieu des années 1980, l'olym
pisme abandonne le principe de l'amateurisme largement bafoué
par les athlètes d'État côté soviétique et universitaires côté améri
cain et s'ouvre à l'économie mondiale. Cette ouverture s'accentue
depuis 2004 en raison de la révolution numérique et du géomarketing
médiatique, soulignant la dépendance du mouvement aux multinatio-
nales établies et émergentes.
Si l'olympisme est un reflet des relations internationales et des
mutations économiques et technologiques, il reste acteur et médiateur
des relations diplomatiques et l'acteur décisif dans le choix des villes.
Dans ce jeu, le soft power devient une nouvelle forme de puissance
jouant �ur la séductio;plus qu;sur la �;-ercition. L; « diploma�ie du
ping-pong» qui a permis le rapprochement entre la Chine et les Etats
Unis en pleine guerre du Vietnam est souvent évoquée, mais plus insi
dieux est l'usage des images multiples de l'olympisme qui, diffusées
à l'échelle mondiale, façonnent une représentation de la planète. Ces:
images n'ont pas un simple rôle d'information, en présentant les résul
tats des athlètes nationaux, elle_� énoncent aussi un état du monde et
contribuent à le promouvoir.
15
Les textes fondateurs de l'olympisme, affirmant que le mouvement
doit être et rester apolitique, ne résistent pas à l'analyse et sont démen
tis par les faits. Dès les premiers JO, la compétition entre les nations
et la confrontation des identités nationales montrent que l'apolitisme
est irréalisable. Les guerres mondiales, l'avènement du communisme
et du fascisme en Europe renforcent la place du politique et la guerre
froide de l'après Seconde Guerre mondiale accentue le phénomène.
L'olympisme est d'abord confronté à la guerre de 1914: Coubertin
choisit alors d'installer le mouvement en pays neutre, à Lausanne en
Suisse. En rupture avec le principe de la rotation des Jeux, il envisage
même de fonder une nouvelle Olympie au bord du lac helvétique, mais
ce projet n'aura pas de suite. Après quatre ans de combats et de tran
chées, le terrain «neutre» du sport ne résiste pas aux séquelles de la
guerre et les vainqueurs ref�sent de rencontrer les vaincus entre 1919
et 1925. Que ce soit lors des Jeux interalliés de 1919, des JO d'Anvers
en 1920, des JO de Paris en 1924 ou des rencontres internationales de
football, les Allemands et leurs alliés, mais aussi l'URSS sont exclus
des compétitions.
En France, les rencontres internationales de football suivent les
fluctuations du ministère des Affaires étrangères. L'équipe nationale ne
rencontre d'abord que les pays alliés ou neutres puis, après les accords
de Locarno, elle participe aux compétitions avec les pays d'Europe
centrale: Hongrie dès 1924, Autriche en 1925, Yougoslavie en 1926,
Tchécoslovaquie en 1928, et effectue une tournée dans les Balkans
en 1932 8• C'est seulement après l'admission de l'Allemagne à la Société
des Nations que les relations sportives franco-allemandes reprennent.
L'absence des pays vaincus est compensée par l'arrivée de nouveaux
membres au CIO. Les Jeux d'Anvers en 1920 rassemblent 29 nations
et 2 626 participants, ceux de Paris en 1924 en comptent respectÎve-
ment 44 et 3 089, et ceux d'Amsterdam en 1928, 46 et 2 883. Les Jeux
de Los Angeles comme ceux de Saint-Louis en 1904 voient en raison
de la distance une baisse des effectifs (la plupart des compétiteurs sont
Européens et le voyage vers les États-Unis est long et onéreux), mais
. ceux de Berlin en 1936 battent les records d'affluence de l'entre-deux
guerres (49 nations et 3 963 athlètes). Dans ces années d'après-guerre,
le CIO doit faire face au risque du régionalisme sportif et du_c:_qmmu
nisme, qui mettent en cause son principe d'universalisme.
16
Document 4 :
17
Place Branding and Public Diplomacy (2023) 19:386–397
https://doi.org/10.1057/s41254-021-00255-x
CASE STUDY
Revised: 6 November 2021 / Accepted: 13 December 2021 / Published online: 10 January 2022
© The Author(s), under exclusive licence to Springer Nature Limited 2022
[...]
* Yoav Dubinsky
yoavd@uoregon.edu
18
The Olympic Games, nation branding, and public diplomacy in a post‑pandemic world: Reflections… 387
19
388 Y. Dubinsky
20
Document 5 :
21
AU
D OTS RS EI E R E G A R D
La régulation globale
du sport international :
les organisations
sportives
internationales sont-elles
un sujet
de diplomatie
?
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Entretien avec Jean-Loup Chappelet
Professeur honoraire à l’Institut de hautes études
en administration publique (IDHEAP, Université de Lausanne).
71
22
DOSSIER
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gouvernements – création de
traités sans la coopération des États l’AMA –, puis pour la manipulation
de résultats – Convention de Macolin
donc les États, par exemple le Parte-
sur la manipulation de compétitions
nariat international contre la corrup-
sportives en 2014 –, et enfin pour
tion dans le sport (IPACS) qui réunit
les pots-de-vin – affaire Diack-
le CIO, représentant le mouvement
IAAF1 traitée par le Parquet national
sportif, l’Organisation de coopération
financier français. Les prochaines
et de développement économiques
étapes devraient concerner la
(OCDE), l’Office des Nations unies
question du harcèlement et celle du
contre la drogue et le crime (ONUDC)
manque de durabilité dans le sport
et le Conseil de l’Europe. Le CIO a éga-
– sports motorisés, événements qui
lement des relations particulières avec
gaspillent les ressources ou qui ont des
l’ONU, notamment depuis qu’il a été
impacts sociaux jugés négatifs (arts
accepté comme observateur perma-
martiaux mixtes).
nent à l’Assemblée générale. Il a ainsi
un bureau et un représentant perma-
nent à New York. Il a aussi, depuis peu,
un délégué à l’Unesco car la France,
1. NDLR : Lamine Diack, athlète sénégalais
la Grèce et d’autres pays essayent de
et président de l’Association internationale
faire ajouter les idéaux olympiques à des fédérations d’athlétisme (IAAF) de 1999
la liste du patrimoine immatériel de à 2015, année où il est mis en examen pour
corruption et blanchiment, puis suspendu
l’humanité. de ses fonctions.
72
23
La régulation globale du spor t int ernational
Ces relations entre le sport lutte qui continue entre les États-Unis
et la politique vivent-elles et la Russie. Il y a – eu – du dopage
actuellement un tournant ? Ou en Russie, mais il y en a – eu – aussi
est-on, selon vous, dans une forme aux États-Unis – Lance Armstrong,
de continuité historique ? Jon Jones, Harry Reynolds, etc. –, et
c’est un phénomène finalement très
J ean -L oup C happelet – Assu-
répandu dans le sport professionnel
rément, il y a un tournant dans la
en général, mais dont on parle beau-
mesure où l’ONU semble avoir délégué
coup moins. La United States Anti-
au CIO le domaine du sport sous Ban
Doping Agency (USADA) est en pointe
Ki-moon et António Guterres, après la
sur le dopage russe : elle organise des
période Kofi Annan, qui avait nommé
« sommets » à ce sujet, intervient
des conseillers pour le sport – poste
dans les médias, etc., mais n’oublions
occupé par Adolf Ogi, puis Wilfried
pas qu’elle est la seule agence états-
Lemke – et créé le Bureau pour le
unienne concernée par le sport et
sport au service du développement
financée par le gouvernement fédéral.
et de la paix, supprimé en 2017. Reste
Le Comité olympique des États-Unis
la question de ce que fait ou devrait
et les fédérations nationales ne dis-
faire l’Unesco, qui est l’organisation
posent, pour leur part, d’aucune sub-
onusienne officiellement chargée du
vention publique.
sport comme vecteur d’éducation et
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de culture – physique. Elle est respon-
Comment voyez-vous le futur de
sable de la conférence des États parties
la gouvernance internationale
à la Convention internationale contre
du sport ? Doit-on revoir sa
le dopage dans le sport de 2005, mal-
construction juridique ?
heureusement dotée de moyens déri-
soires au vu de l’ampleur de sa mission. Jean-Loup Chappelet – En l’absence
Les autres secteurs manquent encore de gouvernement mondial – et d’une
plus de moyens depuis le retrait des « hard law » universelle –, la gouver-
États-Unis. nance internationale du sport doit
reposer sur une régulation à travers
L’influence d’organisations des codes transnationaux volon-
comme le Conseil de l’Europe, la tairement acceptés par les parties
création de l’IPACS ou la gestion prenantes – « soft laws » – et parfois
de l’affaire de dopage russe ne appuyés par du droit et / ou des trai-
montrent-elles pas que la réforme tés internationaux – en matière de
de la gouvernance sportive dopage, de violence, de manipulation
internationale s’apparente à un de résultats, de corruption. Sinon,
espace de lutte géopolitique ? c’est la gouvernance du marché. On
est alors davantage dans le spectacle
J ean -L oup C happelet – Oui, une
sportif, dans l’« entertainment », que
nouvelle guerre froide s’est instaurée
dans le sport comme on l’entend
dans le sport, et l’on peut interpréter
en Europe.
l’affaire du dopage russe comme une
73
24
Document 6 :
25
Dossier
l
Sébastien Fleuriel,
université de Lille 1, es Jeux olympiques prêtent aisément le flanc aux ana-
Centre lillois d’études lyses dithyrambiques comme aux critiques antilibérales
et de recherches les plus farouches, et portent à leur acmé la tension para-
sociologiques et doxale entre célébration exaltée pour certains et dénoncia-
économiques tion révoltée pour d’autres. Du côté du mythe, on se ressour-
cera dans la lecture de la Charte olympique et des valeurs
inlassablement psalmodiées, ainsi que dans l’ensemble des
comptes-rendus hagiographiques – du genre La fabuleuse
histoire des Jeux olympiques 1 – accessibles au rayon « sports »
des librairies. Du côté de la critique, on piochera dans Halte
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savoir/agir 33
26
Dossier
Les Jeux olympiques
commencer qu’en tenant à distance les analyses les plus sim- 4. Ces dénonciations ont
pris leur ampleur à la
plistes portant sur ces derniers. Il y a tout lieu de s’interroger suite de l’ouverture
sur ce que masquent en réalité les dénonciations régulière- définitive des Jeux
ment polarisées sur les méfaits de l’argent 4 . C’est qu’à force olympiques aux pratiques
sportives professionnelles
de désigner toujours le même coupable, on finit par faire à partir de 1988 par
oublier une réalité sociale rarement décrite pour ce qu’elle dit, décision du Comité
et qui a trait aux conditions réelles de participation de tous international olympique
sous la présidence de
les acteurs et dont le pire réside dans la négation même des J.A. Samaranch. Cette
rapports de subordination et de domination, effectivement ouverture, profitable aux
à l’œuvre dans le travail de production de performance ; le athlètes à première vue,
n’a pas contribué à faire
tout sous couvert, précisément, de l’humanisme des Jeux. diminuer les inégalités
entre eux, bien au
contraire… Les différences
Une production instituée de l’échec de rémunération, de
conditions de travail,
On ne devrait jamais oublier que la partition olympique de préparation à la
correspond certes à la mise en musique médiatique d’une performance, de statut
entre les différents
quantité de délégations nationales d’athlètes, de volontaires acteurs n’ont jamais été si
ou de bénévoles, toujours en croissance et orchestrée par le importantes.
Comité international olympique (CIO), mais aussi et surtout, 5. S . Fleuriel, 2006, « Le
travail dénié et les Jeux
au sens littéral du terme, à une stricte division des rôles selon olympiques : entre
une segmentation qui ne doit rien au hasard. Et on néglige passions et intérêts »,
trop souvent que dans cette partition-là, les aspirations des Sociétés Contemporaines,
3, 85-103.
uns ou des autres, les investissements consentis pour parti-
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34 savoir/agir
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Dossier
Les Jeux olympiques
savoir/agir 35
28
Dossier
Les Jeux olympiques
Objectifs
Organisation Célébration Obtention de
Type de personnel performances professionnels NR Total
efficace des valeurs atteints
Élus fédéraux 23,5 41,2 29,4 - 5,9 100
Encadrement technique 18,4 23,3 47,2 4.3 6,7 100
Médical et paramédical 4,3 39,1 34,8 13 8,7 100
Administratif, autre 10 35 40 - 15 100
Ensemble 15,4 28,5 43,1 5,3 7,7 100
X2=16,4 p = 0,171
36 savoir/agir
29
Document 7 :
30
Document : Lola Lafon, La petite communiste qui ne souriait jamais , Paris, Actes Sud
2014, p. 84-87.
Vera est délicieusement dangereuse. Sa parole a surgi, forte et intelligible lors du Printemps de
Prague, elle a manifesté contre l’invasion soviétique et signé le Manifeste des deux mille mots. Véra
est une fée musclée. Dans sa cachette, une forêt de Moravie où elle se terre, harcelée par le nouveau
pouvoir en place, elle s’est entraînée, seule, sur un tronc d’arbre renversé qui lui sert de poutre.
Mais les JO approchent et on ne peut pas se passer d’elle, alors on l’invite à sortir de sa forêt, tout
est pardonné…
Quand la délégation tchèque rentre dans le stade lors de la cérémonie d’ouverture à Mexico, la
foule bouleversée scande « Li-ber-té Tché-co-slo-va-quie Ve-ra » sur son passage. Vera dévore les
épreuves […] le public est debout, exalté d’avoir assisté à la victoire de Caslavka, les journalistes
commentent cette médaille d’or qui devrait lui échoir dans quelques instants. Et ils passent
inaperçus les trois individus en costume gris, assis non loin de la table des juges, qui se dirigent vers
la Soviétique, Larissa Petrick, et la félicitent. Mais pas des Tchèques, dont l’entraîneur prend Vera
dans ses bras et la console de cette allégeance de dernière minute faite aux Soviétiques par les
apparatchiks tchécoslovaques. Les deux gymnastes devront partager leur titre et leur médaille.
Vera se redresse. Elle profane l’ordre donné, encore une fois. Et ils sont sans doute très peu parmi
les millions de téléspectateurs, si peu qui sauront déchiffrer le message implacable qu’envoie Vera
aux autorités tchèques, quand, aux premières notes de l’hymne soviétique, elle baisse
ostensiblement les yeux. […] Devant les caméras du monde entier, Vera tourne le dos au drapeau
rouge qui s’élève lentement. Adieu Vera.
A l’Ouest, on est très très choqué que la médaille d’or lui ait échappé, ces malhonnêtetés olympiques
sont impardonnables. Et la classe de Caslavska, son courage face à l’oppresseur, on ne l’oubliera
jamais. Exclure l’URSS ? On l’a proposé au Comité, mais ça serait dommageable pour le sport,
après tout, ils ont une réserve de gymnastes étonnantes. Les Jeux de Munich approchent et on parle
d’une surprise phénoménale du côté soviétique […] Olga K est cette aucune-autre-jeune-femme-
au-monde. […]
O.L.G.A qui fond en larmes devant les objectifs et accumule les erreurs absurdes lors de son
passage aux barres asymétriques à Munich. […] Une Soviétique pleure ! Ce ne sont pas toutes des
robots ! La communiste trop émotive qui a tout foiré pleurniche en direct et en couleur, pour le
plus grand délice des magazines américains qui s’entichent de cette Russe si peu guerrière. Mais dès
le lendemain, remise, elle vient donner ce qui était promis. […]
Montréal 1976. Olga a vingt-et-un ans. Par miracle, la petite est restée petite. Epuisée d’avoir dû
répondre aux sollicitations de l’État soviétique qui la promène de galas en dîners depuis quatre ans,
sa peau est ternie du manque de sommeil. On noue ses cheveux filandreux de nœuds rouges […].
Il faut bien ça, des nœuds rouges, pour gagner quelques instants de plus, car, l’Autre, la nouvelle
Roumaine, a tout juste quatorze ans, et elle est Adorable.
31
Document 8 :
32
9
Broadcasting the Olympics
Harry-Arne Solberg and Chris Gratton
Over the past three decades, television has become the engine that
has driven the financial growth of the Olympic Movement and raised
its profile exponentially (Preuss, 2006). At the start of the second
decade of the twenty-first century, communication broadcast rights and
sponsorship revenues account for 85 per cent of the Olympic Move-
ment’s total income, most of which is distributed among the interna-
tional sport federations (IFs), national Olympic committees (NOCs) and
Olympic Solidarity (Peña, 2009). Of this total financial pool broadcast
revenues have become the single largest source.
The situation today, however, is very different from half a century ago.
For instance, the 1936 Berlin Games were the first ever Olympic Games
to be televised. This viewing only occurred in and around Berlin, with
a total of 138 viewing hours and 162,000 viewers. Twelve years later,
the 1948 London Olympics were the first to attract Games broadcast
rights, with the BBC paying a fee of US$3000. This broadcast offered 64
total hours of programming and attracted more than 500,000 viewers,
all residing within a 50-mile radius of London (Olympic Marketing Fact
File, 2008).
Since then, we have seen rapid development. In 1956 the Olympic
Winter Games (from Cortina, Italy) were broadcast live for the first
time. Two years later, television rights issues were incorporated into the
Olympic Charter. The current Olympic Charter (IOC, 2011, p. 90) covers
media coverage of the Olympic Games in Rule 48 with the sentence: ‘All
decisions concerning the coverage of the Olympic Games by the media
rest within the competence of the IOC.’ In 1964, satellite broadcast
coverage was used for the first time to relay images overseas. In 1972,
147
33
148 Broadcasting the Olympics
the Japanese network NHK provided the television feed for broadcast-
ers to choose the coverage they wanted, which represents the model for
today’s host broadcast organization.
From 1972 to the present, the Olympics has seen continual growth
in its television audience to make it one of the most watched television
events on the planet today. At the 2000 Sydney Olympic Games, the
IOC introduced Total Viewer Hours (TVH), a new method to measure
Olympic television audiences. This was mainly because this approach
was similar to the way television audiences for the other international
sports events, such as the Football World Cup, were measured. The
broadcast of the Sydney Games generated 36.1 billion TVH and reached
3.7 billion viewers in 220 countries.
The quantity of programming has increased substantially over the
years, as seen in Table 9.1. This table also shows that the Summer
Games receive substantially more broadcast hours and more viewers
than the winter Games. Table 9.2 indicates that worldwide coverage
of the Olympics expanded greatly throughout the 1960s and 1970s, a
period in which many sports featured more prominently on television.
In this day and age, however, Olympic broadcasters not only offer
programmes on traditional television but have also taken up opportuni-
ties created by new media technology, such as offering live programmes
through the Internet, mobile phones and multiple television channels.
This process started during the first decade of the twenty-first century
and developed rapidly. The IOC launched its own Internet channel in
2008, which was available on the YouTube platform for 77 countries in
Asia, Africa and the Middle East, where the Olympic Games Internet
rights had not been sold.
During the 2008 Beijing Games, the IOC’s official website and other
related websites drew 105 million unique viewers, while there were more
Source: http://www.olympic.org/Documents/IOC_Marketing/OLYMPIC_
MARKETING_FACT_FILE_2011.pdf.
34
Harry-Arne Solberg and Chris Gratton 149
1936 Berlin 1
1948 London 1
1952 Helsinki 2
1956 Melbourne 1 1956 Cortina 22
1960 Rome 21 1960 Squaw Valley 27
1964 Tokyo 40 1964 Innsbruck 30
1968 Mexico City n/a 1968 Grenoble 32
1972 Münich 98 1972 Sapporo 41
1976 Montreal 124 1976 Innsbruck 38
1980 Moscow 111 1980 Lace Placid 40
1984 Los Angeles 156 1984 Sarajevo 100
1988 Seoul 160 1988 Calgary 64
1992 Barcelona 193 1992 Albertville 86
1996 Atlanta 214 1994 Lillehammer 120
2000 Sydney 220 1998 Nagano 160
2004 Athens 220 2002 Salt Lake City 160
2008 Beijing 220 2006 Turin 200
2010 Vancouver 220
Source: http://www.olympic.org/Documents/IOC_Marketing/OLYMPIC_MARKETING_
FACT_FILE_2011.pdf.
than 21 million views on the IOC digital channel. Globally, the Beijing
Games attracted more than 265 million video views and in excess of
1.2 billion page views on official rights holding Internet and mobile
phone platforms. During the 2010 Vancouver Winter Games, total
global output across traditional media, free-to-air and pay television,
reached 24,000 hours. Internet and mobile communications reached
26,000 hours, which was at least a 100-fold increase from the 2006 Turin
Games, when new media rights were exploited in only 23 countries.
Mobile video downloads at Vancouver reached two million, more than
six times the 301,000 for the 2008 Beijing Games (Pickles, 2010). This
underscores the global growth of new media and social media, and suc-
cessful utilization of these platforms by the IOC and Olympic Games
organizers.
The website of the American broadcaster NBC attracted 46 million
unique users during the 2010 Winter Games, an increase of 33 million
compared with the 2006 Turin Games. The NBC’s mobile platform
attracted 87.1 million page views, 52 million more than during the
Beijing 2008 Games, and provided two million mobile video streams,
which was a six-fold increase on the Beijing Games (Pickles, 2010).
35
Document 9 :
36
Les Jeux olympiques d'été sont l'un des événements sportifs les plus importants au monde, avec plus de
10 000 athlètes représentant 204 pays, 300 épreuves individuelles dans 28 sports différents, plus de 10
millions de billets vendus aux spectateurs et une audience télévisuelle mondiale qui se compte en
milliards. [...] Si la plupart des téléspectateurs s'intéressent d'abord à la compétition entre les athlètes, la
bataille entre les villes pour être sélectionnées pour accueillir ces événements peut être tout aussi
féroce. Bien que les villes candidates aient de nombreuses raisons de vouloir accueillir l'événement,
aucune ne semble plus répandue que le désir d'en tirer des gains économiques.
Dans cet article, nous explorons les coûts et les avantages de l'accueil des Jeux olympiques. [...] La
conclusion qui s'impose est que, dans la plupart des cas, les Jeux olympiques sont une proposition
perdante pour les villes hôtes ; ils ne génèrent des bénéfices nets positifs que dans des circonstances
très spécifiques et inhabituelles. En outre, le bilan coût-bénéfice est plus défavorable aux villes des
pays en développement qu'à celles du monde industrialisé.
[...] Une première série de dépenses importantes concerne les infrastructures destinées à accueillir la
vague de touristes et d'athlètes qui déferlera sur la ville choisie. Le Comité international olympique
exige que la ville hôte des Jeux d'été dispose d'un minimum de 40 000 chambres d'hôtel pour les
spectateurs et d'un village olympique capable d'accueillir 15 000 athlètes et officiels. En outre, la ville
doit disposer de moyens de transport internes et externes permettant d'acheminer les touristes vers la
ville elle-même, puis vers les différents sites sportifs de la région. La capacité hôtelière à elle seule peut
constituer un défi majeur. Rio de Janeiro, qui est déjà l'une des destinations touristiques les plus
populaires d'Amérique du Sud, a dû construire plus de 15 000 nouvelles chambres d'hôtel pour les Jeux
d'été de 2016. Si les investissements dans l'industrie hôtelière peuvent en théorie porter leurs fruits à
long terme une fois les Jeux terminés, les dépenses importantes engagées pour répondre à un pic
d'affluence de deux semaines peuvent entraîner une grave surcapacité une fois l'événement terminé. Par
exemple, après les Jeux olympiques d'hiver de 1994 à Lillehammer, en Norvège, 40 % des hôtels à
service complet de la ville ont fait faillite (Teiglund 1999).
Les Jeux olympiques exigent également des dépenses pour des infrastructures sportives spécialisées.
En raison de la nature quelque peu confidentielle de nombreuses épreuves, la plupart des villes ne
disposent pas des installations nécessaires pour accueillir toutes les compétitions, surtout si l'on
souhaite disposer de vastes points de vue pour les spectateurs. Même les métropoles des pays à haut
revenu peuvent avoir besoin de construire ou d'agrandir un vélodrome, un natatorium, un complexe de
saut à ski ou un anneau de patinage de vitesse. En outre, les stades de football modernes sont
généralement incompatibles avec une piste olympique de taille normale, car l'inclusion d'un espace
pour une telle piste entraînerait une séparation trop importante entre les supporters et le terrain de jeu.
[...]
37
Une fois les installations mises en place, les Jeux nécessitent des dépenses pour la gestion des
événements, les cérémonies d'ouverture et de clôture, et la sécurité. Les Jeux olympiques sont depuis
longtemps une cible pour les terroristes et ont été le site d'attaques meurtrières en 1972 à Munich et en
1996 à Atlanta. Depuis le 11 septembre 2001, les coûts de sécurité ont sévèrement augmenté
drastiquement. Pour les Jeux de Sydney en 2000, ils se sont élevés à 250 millions de dollars, tandis que
quatre ans plus tard, à Athènes, les dépenses de sécurité ont atteint 1,6 milliard de dollars, soit quatre
fois le budget initial, et sont restées proches de ce chiffre au cours de la dernière décennie (Matheson
2013).
[...] Enfin, il est important de noter que les Jeux olympiques ont toujours généré des coûts finaux
supérieurs aux budgets initiaux. De 1968 à 2012, tous les Jeux olympiques ont fini par coûter plus cher
que les estimations de départ. L'événement médian dépasse de 150 % le budget initial, les plus mauvais
élèves - Montréal 1976 et Sarajevo 1984 – ayant dépassé de plus de dix fois les estimations initiales
(Flyvbjerg et Stewart 2012). Les organisateurs de Londres 2012 ont remporté l'appel d'offres en 2005
avec une estimation de 2,4 milliards de livres sterling, qui a été revue à la hausse deux ans plus tard
pour atteindre 9,3 milliards de livres sterling. Puis, lorsque les coûts finaux se sont élevés à seulement
8,77 milliards de livres sterling, les organisateurs ont affirmé de façon grotesque que l'événement avait
été réalisé en dessous du budget (BBC 2013).
Tout grand projet de travaux publics tel que les Jeux olympiques peut entraîner une augmentation à
court terme de l'activité économique dans la période précédant l'ouverture [...] et constituer une forme
de politique budgétaire expansionniste. Il est révélateur de constater qu'au moment même où le
gouvernement de David Cameron au Royaume-Uni faisait la promotion de l'austérité budgétaire dans le
sillage de la grande récession, le même gouvernement vantait les effets stimulants de l'augmentation
des dépenses publiques pour les préparatifs des Jeux olympiques de Londres (Mullholland 2012).
[...] Les études d'impact réalisées avant les Jeux olympiques prédisent souvent des gains économiques
importants. Un rapport d'InterVISTAS Consulting (2002) sur les Jeux olympiques d'hiver de 2010 à
Vancouver prévoyait 10,7 milliards de dollars canadiens d'augmentation de la production économique
et la création de 244 000 emplois. Huit ans plus tôt, le gouvernement de l'Utah prévoyait 4,8 milliards
de dollars (en dollars de 2002) et 35 000 emplois créés pour Salt Lake City. [...] Ces prédictions sont
rarement confirmées a posteriori lorsque les économistes examinent les données. [...] Baumann,
Engelhardt et Matheson (2012) ont examiné les chiffres mensuels de l'emploi dans son ensemble ainsi
que dans diverses industries spécifiques telles que le commerce de détail et les loisirs entre 1990 et
2009 dans l'Utah, en se basant sur l'emploi dans plusieurs États adjacents pour contrôler les tendances
régionales au moment des Jeux olympiques. Ils n'ont constaté aucune hausse de l'emploi, que ce soit
avant ou après les Jeux olympiques ; et s'ils ont relevé une augmentation statistiquement significative
pendant les Jeux proprement dits, cette augmentation ne représentait que de 4 000 à 7 000 emplois, soit
environ un quart à un dixième du chiffre avancé par les autorités de l'Utah. Si l'on considère que le
gouvernement fédéral a dépensé 342 millions de dollars directement pour les Jeux olympiques de 2002
et au moins 1,1 milliard de dollars supplémentaires pour l'amélioration des infrastructures avant les
Jeux, cela représente environ 300 000 dollars de dépenses du gouvernement fédéral par emploi créé.
[...] Ces résultats donnent du crédit à la règle implicite souvent utilisée par les économistes qui étudient
les méga-événements : si l'on souhaite connaître le véritable impact économique d'un événement, il
suffit de prendre les chiffres avancés par les organisateurs et de déplacer la virgule d'un cran vers la
gauche.
38
Ces résultats soulèvent la question suivante : Pourquoi les études d'impact économique réalisées avant
les Jeux résistent-elles rarement à un examen approfondi après les Jeux ? Une réponse évidente est que
ces études d'impact sont souvent commanditées par des groupes qui ont un intérêt direct dans leur
résultat, et ces groupes choisissent des entreprises qui sont susceptibles de produire un résultat
favorable. [...] Même lorsqu'une estimation très positive des retombées olympiques n'est pas l'objectif
explicite d'une étude d'impact économique, la méthodologie utilisée dans la plupart des études présente
des lacunes qui biaisent l'effet économique à la hausse. Tout d'abord, les études d'impact économique
ignorent souvent l'effet de substitution qui se produit lorsque les résidents locaux transfèrent leurs
dépenses vers les Jeux olympiques au détriment d'autres biens de l'économie locale. Si l'étude
comptabilise l'achat d'un billet par un résident local pour un événement olympique sans tenir compte de
ce qu'il aurait acheté en l'absence des Jeux, l'impact des Jeux sera surestimé. C'est pourquoi les
économistes qui étudient l'effet des événements sportifs sur les économies locales préconisent souvent
d'éliminer complètement les dépenses des résidents locaux.
Le troisième défaut majeur de l'analyse standard de l'impact économique avant les JO est le problème
du choix du multiplicateur approprié pour les dépenses. Il est évident qu'un certain niveau de dépenses
touristiques sera réinjecté dans l'économie, les entreprises et les travailleurs locaux dépensant une
partie de la manne olympique qui leur parviendra. L'industrie hôtelière fournit un excellent exemple.
Même les détracteurs des Jeux olympiques, comme Porter et Fletcher (2008), reconnaissent que les
Jeux olympiques entraînent généralement une augmentation substantielle du prix des chambres.
Toutefois, les salaires versés aux réceptionnistes et au personnel d'entretien d'un hôtel sont susceptibles
de rester à peu près inchangés. Lorsque les revenus d'un hôtel augmentent sans que les coûts de
main-d'œuvre n'augmentent en conséquence, la rémunération du capital augmente tandis que la
rémunération de la main-d'œuvre diminue en pourcentage des revenus. Selon que les hôtels (ainsi que
les chaînes de restaurants, les agences de location de voitures, les compagnies aériennes et autres
entreprises similaires) sont gérés par des firmes nationales ou internationales, cette augmentation des
bénéfices des entreprises ne reste pas dans la ville d'accueil, mais quitte la région dans laquelle les
bénéfices ont été réalisés.
Si les gains monétaires de court terme directement liés aux Jeux olympiques sont généralement
insuffisants pour couvrir les coûts d'organisation des Jeux, les bénéfices intangibles à court terme
doivent également être pris en compte. Les villes hôtes ressentent souvent un effet de bien-être à la fois
pendant la période précédant les méga-événements et dans leur sillage. […] Plusieurs études ont tenté
de quantifier les bénéfices immatériels des Jeux olympiques en recourant à la méthode de la valuation
contingente, qui consiste à construire une série de questions d'enquête conçues pour obtenir la valeur
monétaire que les gens accordent à la réalisation ou à la non-réalisation de certains événements. En
utilisant cette approche, Atkinson, Mourato, Szymanski et Ozdemiroglu (2008) ainsi que Walton,
Longo et Dawson (2008) [...] ont constaté que les habitants de Londres et de l'ensemble du
Royaume-Uni manifestaient une forte disposition à payer pour accueillir les Jeux, au-delà des coûts
associés à la participation à l'un ou l'autre des événements. La valeur immatérielle totale estimée pour
les résidents britanniques dans les études s'élevait à environ 2 milliards de livres sterling (soit environ
3,4 milliards de dollars au taux de change en vigueur au moment de l'étude). Ce montant est
évidemment considérable, mais reste bien inférieur au coût de l'organisation des Jeux.
39
Pourquoi continuer à accueillir les Jeux olympiques ?
Si les Jeux olympiques n'ont qu'une faible chance d'apporter aux villes hôtes des bénéfices nets positifs,
pourquoi les villes continuent-elles à se battre pour accueillir ces événements ? Trois possibilités au
moins se présentent. Premièrement, même si l'effet global de l'organisation des Jeux est généralement
négatif, les grands projets font toujours des gagnants et des perdants. La candidature (finalement non
retenue) de Boston à l'organisation des Jeux d'été de 2024 a été portée par des dirigeants des secteurs de
la construction lourde et de l'hôtellerie, les deux secteurs de l'économie qui avaient le plus à gagner de
l'accueil des Jeux olympiques par la ville.
Deuxièmement, les préoccupations économiques peuvent ne jouer qu'un rôle mineur dans la décision
d'un pays d'organiser ou non les Jeux olympiques. Le désir d'organiser les Jeux peut être motivé par
l'ego des dirigeants ou par la démonstration de la puissance politique et économique d'un pays. Il est
difficile d'expliquer autrement les dépenses de 51 milliards de dollars de la Russie pour les Jeux de
Sotchi en 2014 ou l'investissement de 45 milliards de dollars de la Chine pour les Jeux olympiques
d'été de Pékin en 2008. Dans les pays où le gouvernement n'est pas responsable devant les électeurs ou
les contribuables, rien ne l'empêche de s'engager dans des dépenses inutiles qui enrichissent un petit
groupe d'industriels privés ou de dirigeants sans qu'il y ait de répercussions. Lors de la candidature pour
les Jeux olympiques d'hiver de 2022, quatre des villes de démocraties occidentales libérales qui avaient
initialement manifesté leur intérêt pour l'organisation des Jeux - Oslo, Stockholm, Cracovie et Munich -
se sont retirées de l'appel d'offres après que les électeurs locaux eurent exprimé leur opposition, laissant
le Comité international olympique choisir le régime autocratique qui organiserait l'événement : Pékin,
en Chine, ou Almaty, au Kazakhstan. […]
Enfin, il est possible d'attribuer une partie des échecs économiques des Jeux olympiques à la
"malédiction du vainqueur", le résultat de la théorie des enchères selon lequel, lorsque les parties font
des offres sur un bien de valeur incertaine (comme des droits sur des concessions pétrolières offshore),
le vainqueur aura tendance à être l'enchérisseur le plus enclin à surestimer la valeur du bien - ce qui
signifie qu'il risque d'être systématiquement déçu.
40
Document 10 :
41
André Suchet
1. Francesco Pastorelli « Les ruines de Turin », Alpens-cène CIPRA, 2010 : 94 : 16-17. Alberto Custodero, « Turin et son site Olympique fantôme
», Courrier International 1004, 28 janvier 2010 (reproduit de La Repubblica, 5 janvier 2010).
42
préoccupée des acteurs, des images et des rapports à l’espace (Di Méo 1998, Gumuchian 1991,
Gumuchian et al. 2003) et d’une approche renouvelée du terrain 2, proche d’une ethno-géo-
graphie (Collignon & Retaillé 2010, Volvey et al. 2012), croisée aux apports d’une approche
historiographique du site 3 pour connaître les faits qui sont à l’origine de ces images et de ces
projections d’acteurs, ce travail engage une réflexion sur les ruines des installations sportives.
Cette étude prend appui sur le cas du site de Grenoble, c’est-à-dire le tremplin de Saint-
Nizier-du-Moucherotte 4, fierté des Jeux Olympiques d’hiver 1968 (Arnaud & Terret 1993)
– une construction de l’architecte et alpiniste français Pierre Dalloz, assisté de l’architecte et
sauteur à ski allemand Heini Klopfer (tremplin de 112 m, dit aussi tremplin du Dauphiné ou
grand tremplin olympique de Grenoble 5). Le coût total des travaux s’élève vraisemblablement
à l’époque à 5,9 millions de francs. Son financement est assuré par l’État à 80 % et par la ville
de Grenoble à 20 % 6. Après les Jeux, l’installation reste en activité une dizaine d’années. Il ne
s’agit donc pas du cas le plus éphémère qui soit en comparaison à d’autres installations olym-
piques qui n’ont servi qu’un ou deux hivers. Plus précisément, comme envisagé au moment des
Jeux, le tremplin attire des épreuves nationales, puis des épreuves internationales de la Coupe
du monde de saut à ski jusqu’en 1981, mais après cette date aucune activité n’est maintenue
sur le site. Faute d’usage la ville de Grenoble qui prévoyait de consacrer 100 000 francs chaque
année à son entretien décide de ne pas honorer cette prévision. Le syndicat intercommunal,
majoritairement contrôlé par Grenoble, créé en 1966 pour s’occuper du tremplin (d’abord du
chantier puis de l’organisation des activités) est dissous. La petite commune de Saint-Nizier-
du-Moucherotte reste seule propriétaire de l’installation. Soumis à la nature et au temps, le site
tombe en ruine et de facto plus aucune activité n’y est possible.
1. vs
2. Étude de terrain réalisée de manière discontinue entre 2010 et 2013 en marge d’une thèse de doctorat engéographie à propos des dynamiques
sportives de nature et du tourisme de montagne dans les Pyrénées au regard de la situation dans les Alpes, thèse préparée à l’Institut de
géographie alpine de l’université de Grenoble, anciennement université Joseph Fourier (Suchet 2012).
3. Archives municipales de Grenoble (principalement sous-série 3R et série M) ; archives municipales de Saint-Nizier-du-Moucherotte (boites
1w29, 1w30 et 1w31) ; documentation du COLJOG ; le reportage télévisé L’avenir du tremplin olympique à Saint Nizier du Moucherotte,
archives INA, FR3 (collection: JT Rhône-Alpes soir) 8 nov. 1998, et site internet www. jo-grenoble.fr/grenoble-olympique/.
4. Le tremplin se trouve sur la commune de Saint-Ni-zier-du-Moucherotte (1 083 habitants, 998 per-manents) qui lui donne son nom
d’usage. Sur les dernières décennies, cette bourgade du massif du Vercors, toute proche de Grenoble, entourée des stations de sports
d’hiver très actives de Villard-de-Lans et Lans-en-Vercors, est passée géographique-ment d’une fonction touristique (autrefois station
climatique et station de sports d’hiver dont il ne reste que peu d’équipements) à une fonction rési-dentielle d’habitat périurbain de
Grenoble agglo-mération (voir à ce sujet Corneloup et al. 2014).
5. Le petit tremplin (90 m) des épreuves olympiques est construit simultanément à Autrans (ainsi que deux tremplins école de 15 et 25 m plus un
tremplin inter-médiaire de 60 m). Le site, prévu pour un usage spor-tif régional, continue d’être utilisé été comme hiver, notamment par le pôle espoir
de la FFS. Voir à ce sujet : Communiqué du maire Gabriel Tatin, Les tremplins au cœur des préoccupations, www.autrans.fr/tremplins.html.
6. Le remboursement de cette somme ne s’achève que 30 ans plus tard, en 1995.
43
Le tremplin de saut à Ski de Saint-Nizier-du-Moucherotte construit pour
les épreuves des Jeux Olympiques d’hiver 1968.
Iconograhie: © A.Suchet.
44
Document 11 :
45
46
crédit photo : Renaud Chaignet