Chapitre 35
Chapitre 35
Chapitre 35
VECTORIEL
Dans ce chapitre, nous sortons (enfin) du cadre vectoriel, où toutes les droites et tous les
plans passent par l’origine pour parler enfin de points et plus uniquement de vecteurs, et
donc retrouver le cadre de la géométrie «classique».
Nous montrerons notamment comment utiliser certaines des notions d’algèbre linéaire en
géométrie.
Vous ne rencontrerez probablement jamais la moindre question à propos des sous-espaces
affines en seconde année, mais ce chapitre est tout de même l’occasion de clarifier enfin
la distinction point/vecteur qu’on a passée sous silence en algèbre linéaire, mais aussi de
manipuler quelques concepts d’algèbre linéaire dans un cadre où l’intuition géométrique
peut nous aider à prendre du recul.
Pour se faire une intuition, imaginons le cas de R2 . Dans toute l’algèbre linéaire, nous
avons toujours vu un élément de R2 comme un vecteur.
Pourtant un couple de réels peut également être vu comme un point du plan, c’est ce
que vous avez fait au lycée. Et alors, à tout couple (A, B) de points du plan correspond un
−→
unique vecteur, le vecteur AB.
Et inversement, si on se fixe A un point du plan et u~ un vecteur du plan, alors il existe un
−→
unique point B tel que AB = u~ (c’est le translaté de A par u~ ).
La structure affine de R2 (qui peut aisément être généralisée à n’importe quel espace
vectoriel) consiste à voir les éléments de R2 non plus comme des vecteurs mais comme des
points, tout en gardant à l’esprit qu’à un couple de points de R2 correspond un vecteur
(dans R2 lui aussi).
Intuition
Translater de a puis de b,
Proposition 35.2 : On a τ0E = idE et pour (a, b) ∈ E 2 , τa ◦ τb = τb ◦ τa = τa+b . c’est translater directement
En particulier, τa est bijective et τa−1 = τ−a . de a + b.
1
2 CHAPITRE 35 : SOUS-ESPACES AFFINES D’UN ESPACE VECTORIEL
Définition 35.3 – On appelle sous-espace affine d’un espace vectoriel E toute En abrégé
partie F de E de la forme τa (F ) = {a + u, u ∈ F } où a ∈ E et F un sous-espace A l’instar de sous-espace
vectoriel de E. vectoriel qui est abrégé en
Un tel ensemble F = τa (F ), également noté a + F est appelé sous-espace affine de sev, on abrégera sous-espace
affine en sea.
E passant par a et de direction F .
−−−→ M2
AM 2 = v~
a+F
A
−−−→
AM 1 = u~
−−−→ M1
M3 AM 3 = w
~
z
v~
F
O y
x u~
w
~
FIGURE 35.1 – Un sous-espace affine de R3 : c’est un plan qui passe par A, et ce n’est pas
Point ?
un sous-espace vectoriel car il ne contient pas O = (0, 0, 0).
On appelle ici point un élé-
ment de E, c’est donc aussi
Ainsi, à la donnée d’un sous-espace vectoriel F et d’un point a correspond un unique un vecteur de E, mais on
sous-espace affine, qui est a + F . a plutôt envie de le voir ici
En revanche, il n’est pas clair du tout qu’à un sous-espace affine, on puisse associer un comme un point.
unique couple (a, F ) formé d’un point et d’un sous-espace vectoriel.
Il est même très facile de se convaincre sur la figure ci-dessus que le sous-espace affine
passant par M 1 et de direction F est le même que le sous-espace affine passant par A et de
direction F .
Le lemme suivant vient préciser ceci :
Lemme 35.4. Soient a, a 0 ∈ E, et soient F , F 0 deux sous-espaces vectoriels de E.
Alors a + F = a 0 + F 0 si et seulement si F = F 0 et a 0 − a ∈ F .
Démonstration. I Supposons que a + F = a 0 + F 0, avec a, a 0 deux points de E et F , F 0 deux
sous-espaces vectoriels de E.
Puisque a 0 ∈ a 0 + F 0 = a + F , il existe u ∈ F tel que a 0 = a + u.
Et donc a 0 − a = u ∈ F .
Notons que si E est de dimension finie, alors tout sous-espace affine est aussi de dimension
finie, mais on peut aussi avoir des sous-espaces affines de dimension finie d’un espace
vectoriel de dimension infinie (et nous allons en rencontrer tout de suite).
Enfin, un sous-espace affine de dimension nulle est de la forme a + {0E } = {a} : c’est un
point.
3 D’un point de vue formel,
Dans toute la suite du chapitre, lorsqu’on voudra faire la distinction entre points et vecteurs3 ,
on notera les vecteurs avec des flèches. ce sont les mêmes objets, à
−→ savoir des éléments de E.
Et alors si A et B sont deux points, on désignera par AB l’unique vecteur u~ de E tel que
B = A + u~ , c’est-à-dire u~ = B − A, le signe moins correspondant bien ici à celui qu’on a
l’habitude d’utiliser dans un espace vectoriel.
Il est alors trivial de vérifier la relation de Chasles : soient A, B, C trois points de E. Alors
−→ −→ −−→
AB + BC = (B − A) + (C − B) = C − A = AC.
∃u ∈ F , M = A + u ⇔ M ∈ A + F = F.
Nous avons prouvé que si y0 est une solution de (E) (c’est-à-dire n’importe quel élément de
S) alors S = {y0 + y, y ∈ S0 }, où S0 est l’ensemble des solutions de l’équation homogène
associée.
Or nous avons également prouvé que si A est une primitive de a,
Enfin, dans le même état d’esprit «solution particulière plus solution de l’équation homo-
gène», citons bien entendu l’ensemble des solutions d’un système linéaire AX = B.
En effet, nous avons déjà dit que si X 0 est une solution particulière du système, alors toutes
les solutions sont de la forme X 0 + X , avec X ∈ Ker(A) une solution du système homogène
AX = 0.
Si nous avons besoin de l’existence d’au moins une solution, c’est uniquement pour éviter
que l’ensemble des solutions soit vide, l’ensemble vide n’étant pas un sous-espace affine de
E.
Ce résultat vient donc généraliser le résultat classique qui affirme que le noyau d’une
application linéaire est un sous-espace vectoriel.
Exemple 35.8
Nous montrerons d’ailleurs en TD qu’en dimension finie, tous les sous-espaces affines sont
de ce type.
G G G
F
F
FIGURE 35.2 – L’intersection d’une droite et d’un plan (affines) est soit vide, soit réduite à
un point (= de dimension 0), soit une droite (= de dimension 1).
Donnons une condition nécessaire et suffisante pour que l’intersection de deux sous espaces
affines soit non vide .
−→ A
AB
B u~ ∈ F
v~ ∈ G
M = A + u~ = B − v~
G
A Danger !
La notion de parallélisme est
Définition 35.11 – Soient F et G deux sous-espaces affines de E, de directions définie à partir d’inclusions
respectives F et G. sur les directions, pas sur
les sous-espaces affines eux-
1. Si F ⊂ G, on dit que F est parallèle à G. mêmes !
2. F = G, on dit que F et G sont parallèles6 . 6 Ce qui revient à dire que
F est parallèle à G et G est
La terminologie est un peu surprenante au premier abord, car la relation binaire «être parallèle à F.
parallèle à» n’est pas symétrique. Remarque
Par exemple, dans le premier et le dernier cas de la figure 2, F est parallèle à G, sans que Pour des raisons de dimen-
G soit parallèle à F. sion, un plan ne peut jamais
être parallèle à une droite.
Notons en revanche que la relation «être parallèle à» est symétrique si on la restreint à
l’ensemble des sous-espaces affines de E de dimension fixée k (par exemple l’ensemble des
droites, l’ensemble des plans, etc).
En effet, si F et G ont même dimension, et que l’un (disons F) est parallèle à l’autre ( G),
alors on a l’inclusion F ⊂ G. Mais ces directions sont de mêmes dimensions, donc F = G, et
donc F et G sont parallèles.
Le parallélisme est une notion affine (= concernant les points), et non une notion linéaire
(=concernant les vecteurs). On ne peut pas parler de parallélisme de deux vecteurs. En
revanche, on peut parler de leur éventuelle colinéarité.
Deux vecteurs u et v sont colinéaires si et seulement si Vect(u) et Vect(v) sont parallèles.
Mieux : u et v sont colinéaires si et seulement si il existe un sous-espace affine de direction
Vect(u) parallèle à un sous-espace affine de direction Vect(v).
Exemple 35.13
Une droite ne peut être parallèle à un plan que si elle est incluse dans ce plan, ou si
elle ne le rencontre pas.
Corollaire 35.14 – Deux sous-espaces affines parallèles sont soit disjoints soit confondus.
Démonstration. Par la proposition précédente, s’ils ne sont pas disjoints, alors ils sont inclus
l’un dans l’autre, et donc égaux.