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Fiscalité de l’entreprise

Introduction

¤ Le droit fiscal se résume par :

 Sa technicité : du fait de sa grande organisation et de son nombre de règles impliquant


des connaissances spéciales et générales.

 Sa complexité : l’Administration produit sa propre doctrine vue que ses agents n’ont
pas les compétences d’aborder la norme fiscale. On parle même de balkanisation du
fait de sa complexité.

 Son instabilité : la norme fiscale évolue en permanence en raison des tendances. En


effet, l’impôt, en tant qu’outil politique économique usé à des fins spécifiques, incite à
certains comportements pas nécessairement économiques.

§1. Définitions de l’impôt

L’impôt est un concept ancien, remontant aux premières civilisations babyloniennes, d’où
le fait qu’il soit une réalité presque éternelle : dès lors qu’il existe un pouvoir politique un
minimum organisé, celui-ci use du pouvoir d’imposer afin de fonctionner. Le fiscaliste
Maurice Cozian disait : « Les impôts existent, ils sont de tous les temps et de tous les
lieux ».

Pour autant l’impôt est difficile à définir : c’est une notion complexe et le détenteur du
pouvoir fiscal utilise généralement une terminologie qui ne correspond pas forcément à la
nature du prélèvement en question afin de le faire accepter par la population. Colbert disait à
ce propos : « L’art de prélever l’impôt consiste à plumer les oies sans trop les faire crier ».
Par exemple, l’impôt sur le revenu, la taxe sur la valeur ajoutée et la contribution sociale
généralisée font partie de la même catégorie juridique, soit celle de l’imposition de toute
nature. En droit, on distingue deux grandes catégories principales.

A. Les impositions de toute nature :

Les impositions de toute nature relèvent de la compétence du législateur alors que les
autres prélèvements, pour l’essentiel, relèvent de la compétence du pouvoir réglementaire.

1. D’un point de vue doctrinal :

De façon classique et selon le Professeur Gaston Jèze (1929), l’impôt se définit comme
une prestation pécuniaire, régulière et obligatoire, sans contrepartie directe, destinée à
couvrir les charges publiques.

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 En tant que prestation pécuniaire : l’impôt consiste dans le prélèvement d’une somme
d’argent. A titre exceptionnel toutefois, il est possible de réaliser un paiement en
nature : l’article 1716 bis du Code général des impôts prévoit que les droits de
mutation peuvent être acquittés auprès de l’Administration par remise d’objet en cas
de nécessité – c’est une dation en paiement.

 En tant que prestation régulière : l’impôt est encadré par des modalités juridiques
fixées à l’avance. L’impôt ordinaire, organisé dans le temps, peut être toutefois
complété par l’impôt extraordinaire dans des circonstances exceptionnelles (ex :
guerre), lequel est organisé par une loi de finances ou une loi de finances
rectificatives.

 En tant que prestation obligatoire : l’impôt a un caractère contraignant passible


d’entraîner une sanction. Il ne suppose donc pas un consentement individuel mais il y
a un consentement collectif présumé et donné par la voie des représentants. Les élus
de la Nation, soit les parlementaires, sont en effet les seules habilités à voter les lois de
finances sans qu’il n’y ait en principe de discussion entre les contribuables et
l’Administration même si des négociations peuvent avoir lieu de façon informelle
selon l’importance du contribuable.

 En tant que prestation sans contrepartie directe : l’impôt n’a pas pour contrepartie une
dette de l’Administration vis-à-vis du contribuable. Cette absence de contrepartie est
contraire à la vision de Montesquieu, lequel voulait que l’impôt soit un échange entre
le citoyen et le gouvernement. Traditionnellement, le principe de l’universalité
budgétaire s’applique bien que de nos jours de plus en plus de recettes soient
directement affectées à certaines dépenses (CFR cours de L2 Finances Publiques).

 En tant que prestation destinée à couvrir les charges publiques : l’impôt permet
d’assumer le financement des différentes dépenses de l’État et des collectivités.
Désormais, en plus des charges publiques, l’impôt revêt une fonction économique et
sociale. Il est détourné de son objectif budgétaire car on lui assigne progressivement
d’autres missions (ex : redistribution, incitation ou dissuasion de comportements et
investissements1).

 L’inflation des exceptions n’invalide pas cette définition de principe, mais dans la
pratique elle est de moins en moins consensuelle.

2. D’un point de vue constitutionnel :

Les impositions de toute nature se définissent par un critère : par la compétence du


législateur. A cet égard, le cinquième alinéa de l’article 34 de la Constitution dispose : « la
loi fixe les règles relatives à l’assiette, aux taux et aux modalités de recouvrement des
impositions de toute nature. » De même, les articles 4, 5 et 34 de la loi organique relative
1
Une niche fiscale est une dépense fiscale à laquelle l’Etat ou une collectivité va consentir (ex : abattement des impôts) en
contrepartie d’un comportement considéré comme positif (ex : déclaration du travail des femmes de ménage)
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aux finances (LOLF) du 1er août 2001 évoquent le caractère législatif des impositions de
toute nature.

L’article 14 de la DDHC indique quant à lui : « Tous les citoyens ont le droit de
constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution
publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité,
l'assiette, le recouvrement et la durée. » Cet article s’inspire du consentement aux nouveaux
impôts qui était recherché lors des Etats-généraux quand le roi n’était pas assez fort pour les
imposer.

3. Du point de vue du Conseil d’État :

Au regard de la jurisprudence du Conseil d’État et du Conseil Constitutionnel, les


impositions de toute nature recouvrent deux éléments :

o Les impôts : quatre critères permettent de les identifier :


1) Le prélèvement est définitif et obligatoire
2) Le prélèvement peut assurer le financement des personnes morales de droit public
ou de personnes morales de droit privé chargées de missions de service public (ex :
caisses de sécurité sociale)
3) Le prélèvement est réalisé sans lien direct avec le fonctionnement du service
4) Le prélèvement ne donne lieu à aucune contrepartie directe au profit du
contribuable

o Les taxes fiscales : elles sont perçues de manière obligatoire par l’État ou les
collectivités à raison du fonctionnement d’un service public déterminé. Elles sont
soumises au même régime juridique que les impôts et les redevances, bien que la
contrepartie puisse être hypothétique/potentielle2 (le service public peut être utilisé ou
non par le contribuable). Trois critères permettent de distinguer les taxes fiscales des
redevances :

1) La taxe est exigée des usagers effectifs mais aussi des usagers potentiels du service
(ex : taxe d’enlèvement des ordures ménagères)

2) Il n’existe aucune équivalence financière entre le montant de la taxe et le coût du


service (la plupart du temps, le montant payé ne correspond pas à celui du service
rendu)

3) La taxe a un caractère obligatoire que ne présente pas la redevance

Dans une décision du 30 décembre 1991, le Conseil Constitutionnel a défini les


impositions de toute nature : celles-ci recouvrent « tout prélèvement obligatoire qui ne
constitue ni une redevance pour service rendu ni une cotisation sociale et dont le régime
relève de la compétence du législateur au sens de l’article 34 de la Constitution ».
2
≠ la redevance n’est payée que par les usagers effectifs du service (voir partie ci-dessous)
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B. Les prélèvements donnant lieu à contrepartie directe :

Les cotisations sociales et les redevances pour services rendus sont présumées donner lieu
à une contrepartie directe au bénéfice du contribuable.

1. Les cotisations sociales :

Ce sont des prélèvements obligatoires destinés à acquérir des droits3 à des prestations
sociales (ex : retraite, maladie, chômage, familiale, etc) en cas d’aléa. Ce système est fondé
sur le principe de l’assurance et s’inspire du modèle de la prévoyance instauré par le
chancelier allemand Bismarck.

A côté de ce financement à destination sociale, ont été introduites la contribution sociale


généralisée (CSG) et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS), qui sont
quant à elles des impositions de toute nature selon le CE et le CC : ce sont des impôts sur le
salaire dont la recette est directement affectée à la protection sociale. La CJUE a tout de
même estimé que la CSG relevait en fait des cotisations sociales, et la Chambre sociale de la
Cour de cassation a répondu en 2012 que c’était les deux.

2. Les redevances pour services rendus :

Ce ne sont pas des prélèvements obligatoires ni des impositions de toute nature : il s’agit
de ressources qualifiées de non-fiscales. Ces ressources sont abondées par les usagers
effectifs d’un service public (ex : redevance audiovisuelle en cas de détention d’un
téléviseur) ou les utilisateurs d’un ouvrage public (ex : péage pour passer un pont).

§2. La typologie des ressources publiques

Le juriste est taxinomiste (il classifie) vis-à-vis des multiples prélèvements. On va se


contenter de distinguer deux grandes catégories.

A. Les ressources fiscales :

Ce sont les ressources cruciales pour le budget de l’État dans la mesure où elles
représentent environ 90% de l’ensemble des recettes de l’État. La loi de finances pour 2019
évaluait les recettes fiscales nettes à environ 274 milliards d’euros. Le projet de loi de
finance rectificative pour 2023 estime les recettes à 328,2 milliards d’euros auquel il faut
retirer les cotisations européennes et ce qui est versé aux collectivités locales. Le total des
ressources nettes du budget général est évalué à 293,7 milliards d’euros. Ce chiffre quoiqu’il
en soit sera faux car il est pratiquement impossible d’évaluer de façon précise le rendement
de l’État. Le Code général des impôts distingue les impôts directs des impôts indirects.

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Dont ils peuvent bénéficier s’ils y sont éligibles
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Plusieurs conséquences découlent de cette dichotomie, notamment en matière de compétence


juridictionnelle.

1. Les impôts directs :

Ces impôts sont établis nominativement et sont payés directement par celui qui y est
assujetti (le redevable). Ils s’identifient au travers de plusieurs indices :

 Ils sont en général recouvrés par l’Administration des contributions directes

 Ils relèvent de la compétence du juge administratif en cas de contentieux

 Ils sont recouvrés par voie de rôle, c’est-à-dire en fonction d’une liste nominative des
contribuables concernés

~ Du côté de l’État, ils représentent environ 40% des recettes fiscales de la Nation, soit
environ 104 milliards d’euros en 2019. Il s’agit de :

o L’impôt sur le revenu des personnes physiques : il est direct4, progressif (selon
l’importance du revenu annuel), synthétique (de l’ensemble des revenus de la
personne) et personnel5. Il représentait environ 70 milliards d’euros de recettes en
2019 et concerne environ 50% des français6. Le caractère progressif est matérialisé par
l’existence de 5 tranches, soit cinq paliers évolutifs en fonction des années. Voici un
schéma pour en saisir la logique :

¤ Tranche 1 : sont imposés à 0% ceux dont les revenus se situent entre 0 et 10 000€

¤ Tranche 2 : sont imposés à 11% ceux dont les revenus se situent entre 10 000 et
30 000€

¤ Tranche 3 : sont imposés à 30% ceux dont les revenus se situent entre 30 000 et
70 000€

¤ Tranche 4 : sont imposés à 41% ceux dont les revenus se situent entre 70 000 et
160 000€

¤ Tranche 5 : sont imposés à 45% ceux dont les revenus sont supérieurs à 160 000€

/!\ Le taux n’est pas directement déduit sur le montant du salaire (ex : on ne se
contente pas de prendre 41% du salaire qui dépasse le seuil d’assujettissement de
70 000€). Le revenu peut tout d’abord être découpé par parts en fonction du nombre
de personnes dans le foyer. En outre, le système ci-dessus fait qu’on va décomposer le
4
Pour les fonctionnaires, c’est directement prélevé sur salaire et il y a par la suite un correctif. Ainsi l’Etat perçoit les recettes
aussitôt.
5
Bien que généralement on impose par foyer
6
43% en 2020
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revenu en tranches : sur un salaire de 110 000€, la première part de 9 999€ sera
imposée à 0%, la seconde de 10 000 – 29 999€ à 11%, la troisième de 30 000 –
69 999€ à 30% et la dernière de 70 000 à 110 000€ à 41%.

o L’impôt sur les sociétés : il concerne pour l’essentiel les sociétés de capitaux voire,
sur option, certaines sociétés de personnes 7. Cet impôt est dit progressif puisqu’il est
échelonné en trois tranches/paliers : une tranche « à taux réduit » de 15% (lorsque le
chiffre d’affaires est entre 0 et 36 120€), une tranche de droit commun (à 28% en 2020
et 26,5% en 2021) et une troisième tranche (à 31% en 2020 et 27,5% en 2021) dès lors
que le chiffre d’affaires de la société est supérieur à 250 millions d’euros.

o L’impôt sur la fortune immobilière8 : cet impôt direct, progressif, synthétique et


personnel porte sur le patrimoine immobilier des personnes physiques. En 2021, le
seuil d’assujettissement est de 1,3 millions d’euros net et cet impôt représentait 2
milliards d’euros en recettes de l’État en 2019. Il existe cette fois six tranches de
progression (sachant que deux concernent des paliers en-dessous du seuil
d’assujettissement et ne sont donc payés cumulativement que si celui-ci est atteint).

~ Du côté des organismes de sécurité sociale, les impôts perçus représentent environ
25% de leurs recettes totales. Ce quart des recettes fait écho au régime de l’assurance
puisque cela signifie que partie des impôts des affiliés à la sécurité sociale sert à la solidarité
intergénérationnelle. Les principaux impôts directs perçus par ces organismes sont :

o La contribution sociale généralisée


o La contribution sur le remboursement de la dette sociale
o La contribution sociale sur les bénéfices : elle est perçue directement sur les bénéfices
des entreprises.

~ Du côté des collectivités locales, les impôts directs sont leurs principales ressources.
o La taxe foncière : il y en a une sur les propriétés bâties et une sur les propriétés non
bâties
o La contribution économique territoriale : pour les activités professionnelles non
salariées des personnes physiques ou morales
o La taxe d’habitation : elle devrait disparaître en 2023

2. Les impôts indirects :

Les impôts indirects frappent certains actes ou opérations qui peuvent être répercutés par
l’assujetti légal9 sur le consommateur final du service (qui paie la taxe). Par exemple,
l’assujetti légal peut être le vendeur d’un téléphone, tandis que le consommateur final est
l’acheteur qui paie la TVA dans le prix d’achat, TVA qui doit ensuite être reversée par le

7
En effet, celles-ci relèvent plutôt de l’impôt sur le revenu des personnes physiques (des associés)
8
Qui a remplacé l’ISF
9
Qui n’est pas le contributeur effectif : il récolte la taxe mais ne le paie pas
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vendeur au service à qui il la doit. Les impôts dépendent donc des dépenses engagées par le
consommateur. Plusieurs indices permettent d’identifier les impôts indirects :

1) Ils sont en général recouvrés par l’Administration générale des contributions indirectes

2) Ils relèvent en principe de la compétence du juge judiciaire pour les contentieux, bien
que la TVA relève dans la pratique du juge administratif car elle rend compte de la
moitié des ressources fiscales de l’Etat (souci de sécurité)

3) Ils ne sont pas recouvrés par voie de rôle mais au comptant (l’assujetti légal récolte la
somme et la reverse au terme d’une période définie) et spontanément (sans attendre
que l’Administration ne lui demande)

~ Du côté de l’État, ils représentent environ 70% des recettes fiscales de la Nation, soit
172 milliards d’euros en 2019. Les plus importants sont :

o La Taxe sur la Valeur Ajoutée : c’est un impôt indirect, réel et proportionnel


représentant environ 94,7 milliards d’euros en 2023. C’est un impôt quasi-généralisé
sur la dépense dont le taux de droit commun est de 20%, le taux réduit est de 5,5% et
le taux intermédiaire est de 10%.

o La Taxe Intérieure sur la Consommation des Produits Energiques : elle représente


environ 18,8 milliards d’euros en 2023 et environ 13 milliards reversés aux
collectivités locales.

o D’autres prélèvements existent et représente près de 40 milliards d’euros.

~ Du côté des organismes de sécurité sociale, on compte parmi les impôts indirects :
o Les accises sur le tabac
o Les accises sur les alcools
o Les accises sur les boissons non-alcooliques
o La TVA affectée à la sphère sociale : une petite partie de la TVA affectée aux tabacs
et alcools revient aux organismes de sécurité sociale.

~ Enfin, du côté des collectivités locales les impôts indirects sont en fait des recettes
résiduelles.

B. Les ressources non-fiscales :

Parmi les ressources non-fiscales, il y a lieu de distinguer entre celles qui constituent des
prélèvements obligatoires de celles qui ne présentent pas un caractère obligatoire.

1. Les prélèvements obligatoires non-fiscaux :

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Les cotisations sociales recouvrent des prélèvements obligatoires qui abondent les caisses
des organismes de protection sociale. Elles représentent environ 40% des prélèvements
obligatoires et environ 70% des ressources de la protection sociale. Ces cotisations se
fondent sur une logique d’assurance inspirée du modèle allemand, soit de l’idée d’un
versement de cotisations obligatoires en vue d’ouvrir des droits à prestation sociale à
condition qu’un risque se concrétise.

Les cotisations sociales reposent sur une logique d’assurance. Elles sont nées en
Allemagne.

Elles demeurent fondamentalement importantes dans le système fiscal français mais la


part de ces cotisations tend à baisser dans le financement de la protection sociale au profit
des prélèvements fiscaux. L’idée est de basculer de la solidarité nationale à la solidarité
intergénérationnelle.

2. Les prélèvements non-obligatoires :

Certains prélèvements ne sont pas considérés comme obligatoires dans la mesure où ils
correspondent à une décision volontaire de la part de celui qui les acquitte. En effet, ces
prélèvements constituent la contrepartie d’un service rendu. On parle alors de redevance
pour service rendu ou de taxe non-fiscale.

Du point de vue des finances publiques, ces redevances sont classées dans la catégorie
des « recettes diverses », laquelle comprend aussi les recettes générées par l’exploitation des
établissements publics ou encore les revenus des domaines publics (ex : reversement d’une
somme pour la sous-concession des plages privées). Les établissements publics peuvent
aussi avoir ces revenus.

§3. Le concept de droit fiscal

Historiquement, l’impôt s’imposait par la force : c’était un acte de sujétion. Au-fur-et-à


mesure le droit a rencontré l’impôt et l’apparition du droit fiscal a marqué un recul de l’idée
de soumission ou tout du moins a-t-il assuré une protection contre l’arbitraire, la spoliation.

Un des grands points de départ prend sa source en Angleterre, au Moyen-âge : le roi Jean
sans Terre a essuyé une révolte de la part de ses barons excédés par les contraintes militaires
et financières. Il leur a alors concédé la Magna Carta. Cette charte du 15 juin 1215 contient
un article relatif au consentement et au contrôle par le Conseil Commun du Royaume
nécessaires tant pour la création d’un impôt que pour son montant. Naissent alors les notions
de régularité et de légalité de l’impôt.

En France, la véritable apparition du droit fiscal remonte à la Révolution puisqu’elle est


concrétisée dans les articles 13 et 14 de la DDHC. La Constitution de 1791 consacre la
compétence du corps législatif pour fixer les dépenses publiques, établir les contributions
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publiques et en déterminer la nature, la quotité, la durée et le mode de perception. De même,


faire la répartition de la contribution directe entre les départements du Royaume, surveiller
l’emploi de tous les revenus publics et s’en faire rendre compte par ceux qui les gèrent
relèvent du législateur.

Pour autant, l’impôt était déjà discuté sous l’Ancien Régime, puisque le monarque ne
disposait pas toujours d’un pouvoir absolu en matière fiscale : cela dépendait de la force de
son autorité (cela a permis l’apparition des Etats-généraux).

Dans son acception moderne, le droit fiscal est la discipline qui recouvre l’ensemble des
règles d’imposition mais aussi de procédure fiscale et d’organisation de l’Administration
fiscale. Cette branche du droit est de plus en plus considérable car elle-même donne lieu à de
multiples sous-branches (ex : droit fiscal général, droit fiscal international, droit fiscal des
affaires, droit fiscal de l’entreprise, etc). On assiste qui plus est à une hyperspécialisation du
droit fiscal en ce sens qu’il faut répondre aux impératifs de la complexité de la discipline.

Le droit fiscal de l’entreprise recouvre l’ensemble des règles de l’imposition qui régissent
l’imposition de l’entreprise et les dispositions qui ont trait aux procédures fiscales auxquelles
l’entreprise peut être soumise.

§4. Les sources du droit fiscal

Les sources formelles du droit fiscal sont de quatre sortes : constitutionnelles, légales,
infra-légales et internationales. Quant aux sources informelles/matérielles, il s’agit de la
jurisprudence et des recommandations de l’OCDE.

A. La source constitutionnelle du droit fiscal :

Le bloc de constitutionnalité10 (Constitution, DDHC, Préambules de 1958 et de 1946,


Lois fondamentales de la République, Charte de l’Environnement). Le Doyen Louis Favoreu
parle de « constitutionnalisation du droit », phénomène particulièrement prégnant dans le
droit fiscal.

Cette constitutionnalisation est naturelle car la matière fiscale relève fondamentalement


des règles énoncées dans la Constitution. Elle est aussi défensive dans la mesure où les
principes constitutionnels vont être invoqués afin de protéger de l’arbitraire des institutions.
Enfin, elle est également structurelle ou institutionnelle puisqu’il y a une répartition des
compétences entre l’État et les collectivités infra-étatiques (ex : en Nouvelle-Calédonie, il
n’y a pas d’impôt sur le revenu, de l’exemption d’impôt sur les sociétés, à Wallis-et-Futuna
pas d’impôt local, etc11).
10
Expression employée par Claude Emeri puis repris par Louis Favoreu. Le bloc de constitutionnalité fut notamment l’objet d’une
analyse du Professeur Marcel Prélot à propos de la décision du Conseil Constitutionnel du 16/07/1971 qui donnait valeur
constitutionnelle à la liberté d’association en conformité au Préambule de la Constitution et à ses renvois, laquelle renouvelle
totalement le contrôle constitutionnel.
11
Logique du paradis fiscal
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A la lumière des dispositions du bloc de constitutionnalité, un certain nombre de


principes fiscaux ont été dégagés :

 Le principe d’égalité en matière fiscale : ce corollaire se fonde sur le principe de


l’égalité devant la loi de l’article 6 et du principe d’égalité devant les charges
publiques de l’article 13 de la DDHC. Ainsi, les personnes placées dans la même
situation ne peuvent être soumises à un traitement fiscal différent. Pour autant, il existe
des dispositifs fiscaux dérogatoires (ou discriminatoires) qui sont encadrés par deux
conditions : il faut que la différence de traitement soit justifiée par un motif d’intérêt
général en rapport avec l’objet de la loi fiscale et qu’elle soit proportionnée à l’objectif
recherché (ex : taxe carbone de 2009 visant à dissuader de polluer12).

 Le principe de nécessité de l’impôt : il se déduit des articles 13 et 14 de la DDHC13. Il


implique trois conséquences : la légitimation de l’impôt, la légitimation des
prérogatives exorbitantes dont dispose l’Administration fiscale (ppp contre le débiteur
de l’impôt voire des tiers14) et la lutte contre la fraude fiscale15 (dispositifs légaux et
fiscaux dérogatoires plus répressifs que dans le droit commun).

 Le principe d’annualité de l’impôt : il provient d’une loi des finances annuelle dont les
règles sont applicables l’année à venir et vise à ce que l’impôt soit prévisible pour
permettre au contribuable de s’organiser librement selon les taux en cours par activité.
Ce principe est caractérisé par la procédure parlementaire formelle qui se concrétise à
travers la loi de finances dont le vote doit se faire avant l’exercice fiscal à venir. Il
repose sur le principe du consentement de l’impôt (art 14 de la DDHC) et le principe
d’annualité budgétaire (art 1 et 6 de la LOLF).

 Le principe d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi fiscale : ce principe voudrait que


le contribuable comprenne et puisse avoir aisément accès à la loi fiscale. Aussi est
exigé du législateur qu’il adopte des dispositions fiscales précises et non-équivoques
(C. Const. 29/12/2005). Dans les faits, l’accessibilité est relativement compliquée (à
cause de la numérotation des articles) et l’intelligibilité quasiment nulle
(l’Administration doit aider ses propres agents à comprendre).

 Le principe de non-rétroactivité de la loi fiscale : c’est en fait un pseudo-principe,


régulièrement présenté comme ayant valeur constitutionnelle, qui se fonde sur la règle
de non-rétroactivité de la loi pénale découlant du principe de légalité des délits et des
peines (art 8 de la DDHC), sur le principe de non-rétroactivité de l’acte administratif
12
La même année, elle avait été censurée sur la base de l’égalité par le Conseil Constitutionnel dans la mesure où cette taxe
prévoyait un nombre important de dérogations mises en place pour la majorité des industries polluantes, ce qui rendait l’objectif
d’intérêt général inefficacement atteignable.
13
Ce principe de nécessité se retrouve aussi dans l’article 17 relatif à la propriété, lequel est invoqué en droit administratif lors
d’expropriation ou même en droit civil lors de toute atteinte au droit. De même en droit pénal, le principe de nécessité de la peine
est fondé sur l’article 8.
14
Ex : le débiteur du débiteur (ses fonds iront directement à l’Administration fiscale ≠ action oblique en droit des contrats avec
laquelle les fonds ne vont pas directement dans les poches du créancier mais retournent à ceux du débiteur intermédiaire)
15
Ayant justement valeur constitutionnelle en vertu du principe de nécessité
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(CE 25/06/1948 « Journal de l’Aurore ») et sur le principe de non-rétroactivité des


règles contractuelles n’étant pas d’ordre public (art 2 du Code civil). En vérité, en
matière fiscale, ce principe n’a de valeur qu’en matière répressive16 (CE 18/12/1998).
Du reste, au nom de la sécurité juridique, la rétroactivité est possible si elle est
justifiée par un motif d’intérêt général suffisant et ne porte pas atteinte à l’autorité de
la chose jugée. De même, elle est possible si elle atténue la loi répressive ancienne.

/!\ En 2008, le Comité Balladur visant à rééquilibrer et moderniser les institutions,


avait proposé d’ajouter à l’article 34 de la Constitution l’idée selon laquelle sauf motif
d’intérêt général, la loi ne dispose que pour l’avenir. Cette idée n’a pas été retenue
dans la réforme constitutionnelle mais elle est encore régulièrement formulée, ce qui
fait que certains la considèrent comme étant à valeur constitutionnelle.
 L’ensemble de ces principes a vu son effectivité considérablement renforcée en 2008
par la réforme de la QPC : le justiciable peut désormais soutenir auprès de son juge,
dans le cadre d’une instance en cours, qu’une disposition législative porte atteinte aux
droits et libertés que garantit la Constitution. Le juge doit alors saisir le Conseil
Constitutionnel à moins qu’une réponse n’ait déjà été posée par le passé ou que la
juridiction suprême de son ordre qu’il a saisie s’y oppose (Cour de Cassation ou
Conseil d’Etat).

B. Les sources légales :

Les règles d’imposition sont fixées pour l’essentiel par le législateur soit dans les lois
ordinaires soit dans les lois financières (lois de finances annuelle, lois de finances
rectificatives, lois de financement de la sécurité sociale). L’article 34 alinéa 5 de la
Constitution prévoit en effet que la loi fixe a minima les règles concernant l’assiette, le taux
et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature.

En ce qui concerne les règles de procédure, la jurisprudence du Conseil Constitutionnel


conduit à opérer une distinction :

 Les règles dites non-contentieuses : celles qui sont relatives à l’établissement et au


recouvrement de l’impôt relèvent de la compétence du législateur parce qu’elles sont
jugées indissociables de l’impôt lui-même (C. Const. 02/12/1980).

 Les règles relatives à la procédure contentieuses : elles relèvent de la compétence du


pouvoir réglementaire parce qu’elles sont dissociables de l’impôt lui-même et
s’appliquent aux contestations que formule le contribuable.

A l’origine, la législation fiscale est seulement rassemblée dans le Code général des
impôts. Depuis 1982, le Livre des procédures fiscales (LPF) codifie les relations du
contribuable avec l’Administration et expose les règles de procédure qui permettent de

16
Sanction fiscale, pénale, ou les deux
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calculer, de contrôler et de recouvrer l’impôt ainsi que les garanties et voies de recours
offertes au contribuable.

Tous deux comportent une partie législative et une partie réglementaire.

C. Les sources infra-légales :

1. Les actes réglementaires :

Très tôt, la Cour de Cassation avait affirmé le principe de la compétence exclusive du


législateur en matière fiscale (Cass. Civ. 22/02/1825). En réalité, le pouvoir réglementaire
dispose d’un rôle déterminant : comme pour les lois ordinaires, au travers des décrets
d’application, il est garant de la mise en œuvre des lois fiscales. S’agissant du droit fiscal,
c’est au gouvernement de prendre tous les actes nécessaires en vue d’assurer la bonne
application de la loi fiscale. Il est également responsable de la bonne exécution du budget
(pour qu’il puisse mettre en place sa politique et exercer ses prérogatives).

L’article 37 de la Constitution prévoit que le pouvoir réglementaire ait également une


compétence résiduelle au domaine de la loi. Les règlements autonomes ont tout de même une
compétence notoire dans la procédure fiscale contentieuse, l’organisation de
l’Administration fiscale et l’organisation des juridictions fiscales. Depuis la réforme de 2008,
l’Administration fiscale est structurée de façon plus efficiente car elle est chapeautée par la
Direction Générale des Finances Publiques et la Direction Générale des Douanes et des
Droits Indirects.

2. Les prises de position de l’Administration fiscale :

Elles recouvrent deux mécanismes qui sont tous deux dotés d’une portée normative
contraignante qu’on ne retrouve pas d’autres branches du droit.

a. La doctrine administrative :

C’est une production normative qui a pour objet principal d’interpréter les dispositions
fiscales et d’en expliciter les modalités d’application. Pour l’essentiel, il s’agit des
instructions publiées par l’Administration fiscale à l’adresse de ses agents en raison de la
technicité excessive de la matière :

o Les circulaires : émises par le Ministère des Finances ou le Ministère des Budget
o Les instructions fiscales : émises par l’Administration fiscale elle-même
o Les réponses ministérielles : émises par les ministres aux parlementaires qui les ont
questionnés puis codifiées

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 Depuis septembre 2012, une nouvelle documentation17 a été élaborée, consolidée,


régulièrement actualisée et mise en ligne au bulletin officiel des finances publiques
afin d’améliorer l’accessibilité à la loi fiscale.

 L’Administration publie aussi ses propres projets, lesquels lui sont opposables dès lors
qu’ils sont mis en ligne.

De façon générale, l’article L.80A al 2 du LPF dispose que la doctrine administrative est
opposable par le contribuable de bonne foi à l’Administration à condition que celle-ci ait fait
connaître ladite doctrine et qu’elle ne l’ait pas rapportée (remise en cause). Cela signifie que,
quand bien même l’interprétation donnée par l’Administration serait contraire à un texte
hiérarchiquement supérieur, le contribuable est fondé à s’en prévaloir.

b. Le rescrit fiscal :

Le rescrit est une procédure qui permet au contribuable d’obtenir l’avis de


l’Administration sur une situation concrète. Cette technique existe aussi dans les pays anglo-
saxons et au Pays-Bas sous la qualification de « tax ruling ». L’article L.80B du
LPF distingue deux types de rescrits :

1) Le rescrit individuel : permet à un contribuable d’interroger directement


l’Administration sur sa situation personnelle. Si l’Administration décide de lui
répondre, elle est tenue par la réponse faite au contribuable de bonne foi, lequel pourra
la mettre en œuvre et sera à l’abri de tout redressement. L’article L.80B 2° à 7° prévoit
aussi que pour certains rescrits (ex : rescrit qualification de revenus18, rescrit prix de
transfert19), si elle ne répond pas dans un délai déterminé (en général 3 mois), le
contribuable est également garanti contre une remise en cause de sa situation.

/!\ En plus des rescrits généraux, il existe des rescrits visés par des textes spéciaux :
c’est l’exemple du rescrit abus de droit qui permet au contribuable de soumettre à
l’Administration un projet de montage juridique pour savoir s’il est valable ou non 20.
En effet, d’ordinaire, l’Administration peut passer par une procédure pour abus de
droit aux fins de remettre en cause un montage dont les éléments sont tous licites mais
pas sa finalité (ex : éluder l’impôt) et, le cas échéant, d’imposer des pénalités avec
intérêts de retard.

17
Elle a abrogé l’ancienne
18
Un revenu doit-il être déclaré ? Comment ? Si pas de réponse : pas de déclaration du revenu.
19
Dans les opérations intragroupes (opérations réalisées entre les sociétés d’un même groupe), le paiement du prix en échange
d’un bien ou d’une prestation doit se faire à sa valeur de marché. La matière taxable étant donc transférée, l’Administration est
vigilante sur le prix de transfert de ladite transaction. Le rescrit porte alors sur la fixation du prix au lieu où va être transférée la
marchandise. Si pas de réponse : le montage proposé par la société fait l’objet d’une réponse favorable.
20
Si réponse : pas de redressement possible même si illicite. Si pas de réponse dans les 6 mois : montage valable
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2) Le rescrit publié : depuis 200621, lorsque la réponse est susceptible d’intéresser


plusieurs contribuables, l’Administration a la possibilité de publier le rescrit afin de la
diffuser largement et d’être moins sollicitée pour une même question.

D. Les sources internationales :

1. Les conventions internationales :

Les conventions passées entre États peuvent être bilatérales ou multilatérales. Certaines
ont directement un objet fiscal quand d’autres visent le droit fiscal de manière incidente.

a. Les conventions fiscales internationales :

Les conventions fiscales peuvent être passées par un État avec un autre État, une
organisation internationale (OI) ou un territoire disposant d’une souveraineté fiscale totale ou
partielle sans être un État (ex : Hong Kong, Polynésie française). Cette définition est
exceptionnelle car en droit international public, un traité international se résume à un contrat
entre États et/ou OI.

~ Historiquement, ces conventions fiscales ont eu trois raisons majeures :

1) Protéger les ressortissants qui vont résider ou exercer des activités dans deux ou
plusieurs pays en leur garantissant un traitement non-pénalisant voire un traitement
similaire à celui des autochtones.

2) Éviter les phénomènes de double-imposition (ex : taxation d’un même objet fiscal
(groupe de sociétés éparpillées, travailleur ayant des revenus de source étrangère)
dans deux territoires différents) dont il existe deux catégories :
¤ La double-imposition juridique : la même personne est imposée deux ou plusieurs
fois à raison du même élément (ex : revenu22, patrimoine).
¤ La double-imposition économique : deux ou plusieurs personnes différentes qui sont
imposées à raison d’un même flux financier ou d’un même fait générateur
d’imposition (ex : l’actionnaire est imposé sur son bénéfice/revenu perçu sur les
dividendes de la société alors que celle-ci est déjà imposée au titre de l’impôt des
sociétés).

/!\ La plupart des conventions fiscales internationales, notamment celles établies sur le
modèle de la convention ECDE, ne ciblent que la double-imposition juridique.

3) Lutter contre la fraude et l’évasion fiscale par des mesures d’harmonisation (ex :
interdiction d’opposer certaines règles comme le secret bancaire ou le titre au

21
Auparavant, toute réponse de l’Administration faite à un contribuable ou des contribuables demeurait secrète et ne pouvait donc
être invoquée par un tiers (y compris celui se trouvant dans la même situation juridique que celui qui avait posé la question)
22
Par exemple, le résident français qui a un revenu de source italienne peut être imposé une fois à raison de l’ensemble de ses
revenus en France et une seconde fois par l’Italie sur la base des revenus qui en émanent
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porteur23) ou de coopération fiscale administrative (ex : échange de renseignements,


procédure d’aide ou assistance au recouvrement des créances d’un individu qui s’est
servi du phénomène de la frontière pour dissimuler des actifs).

 Quid de la potée des conventions fiscales internationales ?

Lorsqu’elles sont régulièrement ratifiées et sous réserve de réciprocité, elles ont une place
supra-législative dans la hiérarchie des normes. Toutefois, dans son arrêt d’assemblée
« Schneider Electric » du 28 juin 2002, le Conseil d’État a indiqué qu’elles sont soumises au
principe de subsidiarité : la situation du contribuable est appréciée au regard de la loi
interne avant d’être envisagée au regard de la convention fiscale. Celle-ci n’est donc
appliquée que quand il s’agit d’exclure la loi interne dont le sens où l’interprétation lui est
contraire.

Notons que les conventions fiscales n’ont pas forcément un effet favorable au
contribuable car elles peuvent être plus rigoureuses que la loi interne : par exemple, une
provision pourtant déductible en droit fiscal interne ne l’était pas en application de la
convention fiscale internationale et l’Administration était en droit de faire valoir celle-ci (CE
« Société BNP Paribas » 12/06/2013).

b. Les conventions internationales non-fiscales :

Différences conventions internationales peuvent avoir des compétences au plan fiscal


alors que ce n’est pas leur objet. C’est par exemple le cas de la Convention européenne de
sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales, celle-ci étant très
souvent invoquée par les contribuables soit contre le principe-même de l’impôt soit contre la
procédure appliquée (ex : calcul, prélèvement).

Plus précisément, c’est l’article 6§1 qui est le plus souvent mis en avant. Puisqu’il
garantit le droit au procès équitable, il vise les droits et obligations civiles et les sanctions
pénales. La CEDH elle-même a pourtant indiqué dans un arrêt « Ferrazzini c/ Italie » du 12
juillet 2001 que les impositions ne constituent pas des contestations portant sur des droits et
obligations à caractère civile au sens de l’article 6§1. En revanche, les sanctions pénales et
fiscales, dès lors qu’elles ont un caractère punitif, peuvent justifier l’utilisation de ce
fondement.

Pour une partie de la doctrine et de la jurisprudence (juridictions de l’ordre judiciaire), les


pénalités infligées par l’Administration doivent tenir compte du comportement du
contribuable, alors que d’autres (ex : le Conseil d’Etat, le Conseil Constitutionnel) rappellent
que l’existence de l’échelle de sanctions suffit à garantir la conformité avec le texte européen

23
C’est un titre qui ne permet pas d’identifier son titulaire mais dont le porteur peut se servir pour faire valoir des droits (ex : ses
parts dans une entreprise ; un billet de banque). Autrefois en France, les associés d’une entreprise pouvaient disposer de titres au
porteur qui garantissaient totalement leur anonymat et leur permettaient ainsi de se soustraire à la fiscalité. Aujourd’hui, les
associés d’une société sont dans l’obligation de se déclarer quand bien même ils utilisent le procédé des titres au porteur ou sont
partie d’une société anonyme.
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(C. Const. 17/03/2011). La CEDH semble tendre dans le même sens que ces derniers : pour
elle, l’article 6§1 suppose seulement que la décision de l’autorité administrative soit
susceptible d’un contrôle postérieur de la part d’un organe judiciaire de pleine juridiction 24
(CEDH « Segame c/ France » 07/06/2012).

D’autres textes sont également régulièrement invoqués par les contribuables : l’article 14
(qui prohibe les discriminations et renvoie au principe d’égalité devant la loi ainsi qu’à la
liberté de religion)25, l’article premier du premier protocole additionnel (qui protège le droit
de propriété / droit au respect de ses biens et permet de contester le caractère confiscatoire
de l’impôt ainsi que les lois de validation rétroactive)26 et l’article 4 du 7ème protocole (qui
consacre le principe non bis in idem mais ne vise que les infractions considérées comme
pénales)27.

En plus de cette Convention, les accords de l’Organisation Mondiale du Commerce


(OMC) peuvent aussi être invoqués en matière fiscale. Puisque l’objet de l’OMC est de
faciliter les rapports commerciaux en en s’opposant à tous les obstacles qu’ils rencontrent
comme les droits de douane. En outre, l’OMC énonce des règles qui veillent au bon
fonctionnement du commerce international (ex : prohibe les aides d’Etat déguisées pour les
exportations et les discriminations au profit des entreprises nationales).

Ainsi, en 1984, lorsque les États-Unis mettent en place le système de Foreign Sales
Corporation (société de ventes étrangères) qui repose sur l’interposition entre l’exportateur
américain et son client étranger d’une ou plusieurs filiales enregistrées dans des paradis
fiscaux pour rendre plus compétitif l’exportateur américain du fait de la faible imposition,
l’UE les ont attaqués et ont gagné devant le Panel en 1999 (juridiction de l’OMC) puis
devant l’Organe d’appel en 2000. Le dispositif ayant été condamné, la loi du 15 novembre
2000 l’a remplacé par un autre qui permettait d’exclure de la base taxable des entreprises
américaines les revenus extra-nationaux. Ce dispositif a ensuite été complètement supprimé
après deux nouvelles actions devant les juridictions de l’OMC.

Les sources du droit fiscal sont donc de plus en plus larges et n’ont de prime abord pas de
lien direct avec la fiscalité.

2. Le droit de l’UE :

24
Sur les éléments de faits et de droits susceptibles de remettre en cause ladite décision
25
La France a été condamnée pour entrave au mouvement des témoins de Jéhovah car elle avait imposé les dons manuels des
fidèles perçus par l’association alors que d’autres groupes religieux ne faisaient pas l’objet du même contrôle (CEDH 30/06/2011)
26
Censure des lois de validation rétroactive au motif qu’elles portent atteinte au droit de propriété sans que soit rapportée un motif
impérieux d’intérêt général (CE 21/10/2011) ;
Une taxe sur les hauts revenus supérieure à 75% est confiscatoire (C. Const. 29/12/2012)
27
Abondance de la jurisprudence en droit fiscal à partir de ce principe : le 11 septembre 2019, une série d’arrêts de la Chambre
criminelle de la Cour de Cassation a été rendue pour rappeler que celle-ci n’est pas compétente pour statuer sur la réserve émise
par la France au moment de la ratification du protocole n°7 et préciser que les contribuables en faute pouvaient être condamnés de
manière cumulative tant sur le plan administratif au titre d’une sanction fiscale que sur le plan pénal, dès lors qu’il ne s’agit pas
d’une même infraction (ex : en matière de fraude fiscale, blanchiment d’argent). La Cour confirme donc la réserve
d’interprétation du Conseil Constitutionnel sur la réserve émise par la France, lequel considérait en effet que le cumul ne devait
viser que les infractions les plus graves (donc jamais des contraventions).
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Le principe de subsidiarité implique que l’UE n’ait pas de prérogative en matière fiscale.
En effet, en matière d’imposition directe, les États jouissent de leur souveraineté nationale
(l’impôt étant l’expression du caractère régalien de l’Etat) 28 et de leurs propres politiques
d’impositions dépendamment de leurs objectifs respectifs (ex : ressources internes ou
concurrence internationale29). En revanche, en ce qui concerne l’imposition indirecte, il y a
une harmonisation de la TVA puis de certaines accises pour défendre les opérations
transfrontalières et donc éviter les influences sur la liberté de circulation et l’échange de
biens et services.

En ce qui concerne l’impôt direct, il peut y avoir des accords dès lors qu’il y a
unanimité des États. De plus, à travers les articles 28 et 30, l’UE récupère une compétence
depuis ses origines car sont prohibés les droits de douane et les taxes d’effet équivalent. Les
impositions discriminatoires sont également interdites (article 110 du TFU).

L’influence du droit européen se manifeste par d’autres mécanismes juridiques qui


contrôlent l’impôt, comme la réglementation des aides publiques à destination de certains
secteurs ou services publics. En effet, lorsque l’État cherche à favoriser une entreprise
nationale en utilisant le moyen des avantages fiscaux, cette réglementation peut être
invoquée pour le bien-être de la concurrence (articles 107 et suivants du TFUE). A ce titre, le
règlement du 18 décembre 2013 renforce l’encadrement des aides d’État et vise
spécifiquement les dispositifs fiscaux de faveur dont il réduit le montant. Par ailleurs, sur le
fondement des articles 115 et 352 du TFUE, se mettent en place des dispositifs de
coordination des systèmes fiscaux nationaux :

 L’article 115 : prévoit que le Conseil, par adoption à l’unanimité avec procédure
spéciale, peut harmoniser ou mettre en place des règles tendant au rapprochement des
lois, règlements et dispositifs administratifs relatifs aux impôts directs lorsque ceux-ci
ont une incidence directe sur l’établissement et le fonctionnement du marché intérieur.

 L’article 352 : envisage l’adoption par le Conseil de dispositions appropriées pour


atteindre les objectifs visés par les traités dans le silence de ceux-ci.

 Certaines mesures ont vu le jour ou sont à l’étude comme le renforcement de la


coordination des règles en matière d’imposition à la sortie 30 (pour éviter les
discriminations et/ou doubles-impositions) et le renforcement de la coordination des
dispositifs anti-abus (pour que les dispositifs qui préviennent la fraude et l’évasion
fiscales ne soient pas utilisés directement ou indirectement pour limiter la libre
circulation).
28
Même si d’une certaine façon c’est contredit par la disparition de la souveraineté monétaire
29
CJCE « Inspire Art » 30/09/2003 : le « law shopping » (le fait de s’implanter dans l’Etat où la législation est la plus attrayante)
n’est ni abusif ni frauduleux même s’il passe par des montages parfaitement superficiels (avoir son siège social implanté là où
l’activité n’est pas exercée)
30
Imposition sur les personnes physiques mais surtout morales qui quittent le territoire du système juridique dans lequel elles sont
nées et devraient cesser d’exister/être liquidée (exit tax). Or la liquidation implique le paiement des impositions et des plus-values
latentes : au moment où l’entreprise transfère son siège dans un autre pays, l’Administration fiscale lui impose une plus-value sur
ses biens alors qu’elle ne les a pas vendus ce qui peut être plutôt dissuasif.
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En ce qui concerne la fiscalité de l’entreprise, plusieurs textes ont été adoptés :

o Le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et à leurs filiales (directive
2003)

o Le régime fiscal commun pour les fusions, scissions et apports d’actifs (directive
2005) : il vise les opérations de restructuration qui servent de support à des opérations
de mobilité intra-européenne (ex : pour la fusion, si la société absorbée et la société
absorbantes sont de deux Etats différents, l’absorbation entraîne la perte d’un
contribuable dans l’un d’entre eux).

 Dans les deux cas, il y a au nom de la mobilité intra-européenne une lutte contre les
dispositifs qui portent atteinte à la liberté circulation et à la liberté d’établissement.

 Le principe de confiance légitime (CJCE 24/09/2006) permet au contribuable d’avoir


confiance dans l’Administration fiscale quant à ses prises de position vis-à-vis du
bouleversement de sa situation. Si des dispositions sont déjà prévues dans le droit
national (ex : doctrine, rescrit), d’autres du droit européen s’imposent. Rappelons que
le droit de l’UE peut être directement appliqué par ses bénéficiaires et s’applique à
leur profit (principe d’effet direct ; CJCE « van Gend Loos » 05/02/1963) et que les
dispositions du droit européen priment sur celles du droit national même si cela n’est
pas prévu dans les traités (principe d’effet de primauté ; CJCE « Costa c/ Enel »
15/07/1964).

E. Les sources matérielles du droit fiscal :

Certaines sources indirectes vont influencer le Droit, dont le droit fiscal.

1. La jurisprudence :

La force créatrice du juge se manifeste à travers sa compétence en matière


d’interprétation (en donnant du sens au Droit il le fait évoluer) et son intervention dans le
silence de la loi (façonne des règles juridiques lorsque rien n’est prévu sinon déni de justice).

La jurisprudence fiscale est spécifique notamment parce que le contentieux fiscal est
divisé entre l’ordre administratif et l’ordre judiciaire. De plus, elle a un rôle paradoxal en ce
sens que les textes fiscaux sont extrêmement précis et laissent très peu de latitude au
juge pour autant qu’il puisse faire preuve d’audace en-dehors de ce qui est prévu par les
textes. En effet, le Conseil d’État a en effet élaboré un certain nombre de théories générales
ex nihilo dont les applications sont nombreuses, comme la théorie de l’acte anormal de
gestion (ex : quand le chef d’entreprise prend une décision pour son entreprise qui n’a pas
été faite dans l’intérêt de celle-ci). La Cour de Cassation n’est pas en reste car elle a

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également forgé des théories dont la théorie de l’abus de droit fiscal (Cass. Civ.
20/08/1867).

2. L’OCDE :

L’Organisation de coopération et de développement économiques vise principalement à


assurer la prospérité économique globale en promouvant les échanges internationaux et
l’économie de marché. Elle émet des recommandations et offre une assistance technique aux
États qui le souhaitent.

L’OCDE a acquis une certaine expertise et une sorte d’autorité morale. Elle dispose d’un
comité des affaires fiscales qui élabore un certain nombre de modèles et références. Ces
derniers sont repris par les États et/ou suivis par les entreprises et donc accèdent à la vie
juridique par voie de reproduction et/ou d’adhésion, ce malgré leur absence de valeur
contraignante initiale. Cela n’est pas sans rappeler la lex mecatoria, soit ce corpus de règles
internationales issues de la pratique du commerce international (usages privés) et de sources
publiques transcendant les États (ex : principes généraux du droit du commerce international
(force obligatoire du contrat31 et bonne foi32), principes du droit savant) : cette lex mecatoria
est juridique puisque les contrats peuvent y être soumis (Cass. Civ. 1ère 22/10/1992).

Ainsi, certains principes émanant de l’OCDE sont devenus des standards juridiques qui
en tant que tels ne sont pas obligatoires mais dont le juge peut s’inspirer pour constater un
mauvais comportement. Notamment sur le plan de la coopération fiscale internationale, ces
principes ont servi d’outil pour sanctionner les paradis fiscaux.

§5. La complexité du droit fiscal

Le droit fiscal de l’entreprise porte sur l’entreprise, en tant qu’entité économique ou


ensemble de moyens matériels et immatériels, humains et financiers, dont la finalité est la
réalisation d’une activité lucrative. Autrement dit, il ne s’agit pas d’une notion juridique.
L’entreprise n’est pas un sujet de droit mais est nécessairement appréhendée par le Droit.

Cette nébuleuse peut revêtir les formes les plus diverses (ex : entreprise individuelle,
société, groupement, groupement de société, GIE, fiducie, etc), avoir des poids économiques
variables et localisations éparses (ou non). Au sein de chacune des formes juridiques, il y a
des statuts et entités juridiques différents. En outre, certains véhicules juridiques sont peu ou
mal définis (ex : fonds d’investissement) et certains mécanismes juridiques sont complexes
(ex : fiducie).

Le droit fiscal en est complexifié en conséquence : en plus des règles complexes du droit
fiscal qui appréhendent l’activité de l’entreprise, il existe des stratégies concurrentielles qui
passent par l’optimisation fiscale.
31
Pacta sunt servanda (« les engagements rendent esclaves »)
32
Bona fides
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PARTIE I – La fiscalité de l’entreprise

La fiscalité de l’entreprise recouvre deux aspects essentiels.

Titre I : Le grand principe d’imposition de l’entreprise

C’est l’aspect d’ordre général qui s’articule autour de deux axes.

Chapitre 1 : La gestion de l’entreprise

Sous réserve de respecter les lois et les règlements applicables, l’entreprise jouit en
principe d’une liberté de gestion. Autrement dit, le chef de l’entreprise organise son
entreprise selon son envie. L’Administration va néanmoins disposer d’un certain nombre
d’instruments qui lui permettent de contrôler la gestion de l’entreprise.

SECTION 1 : La liberté de gestion de l’entreprise

Le principe de réalité du droit fiscal voudrait que le droit fiscal ne tienne pas compte de
la situation du contribuable mais l’impose comme les autres. Or, dans les faits, il en va
autrement. En effet, le principe de liberté de gestion de l’entreprise permet au fondateur de
l’entreprise de choisir la forme ou l’organisation qui lui paraît la plus opportune. De même,
en termes de gestion, les décisions qui semblent être les meilleures relèvent de son
appréciation. Cette liberté repose sur la liberté d’entreprendre (principe constitutionnel) et la
liberté du commerce et de l’industrie (principe général du droit).

Cela implique en principe que l’Administration et le juge n’aient pas à s’immiscer dans
les affaires de l’entreprise même si les choix retenus ont pour conséquence de minorer
l’impôt : c’est le principe de liberté gestion ou appelé aussi principe de non-immixtion. En
vertu de ce dernier, le contribuable est libre de mettre en place une stratégie fiscale offensive
(ex : choisir la voie la moins imposée). La loi doit pour ce faire garantir « la possibilité
offerte pour le contribuable d’évaluer avec un degré de prévisibilité raisonnable le montant
de son impôt selon les diverses options qui lui sont offertes » (C. Const. 29/12/2005) : cela
implique que soit strictement encadrée la rétroactivité des lois mais aussi toute approche de
l’Administration (ex : l’Administration ne peut pas reprocher à une personne physique
imposée à l’IRPP à un taux supérieur à l’IS de choisir une société soumise à l’IS ;
l’Administration ne peut pas interdire à une entreprise de recourir à l’emprunt même si elle
a suffisamment de fonds propres pour mener une opération33).

La fiscalité devient donc pour le chef de l’entreprise un paramètre déterminant ses choix
de gestion. Cette réalité d’optimisation est ancienne mais de nos jours se confronte
1) au poids de l’impôt est très important,
2) à la concurrence internationale de plus en plus forte

33
L’emprunt permettant de déduire de l’impôt sur les bénéfices les intérêts d’emprunt
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3) à la multiplication des dispositifs de faveur qui rendent intéressants de rechercher


l’organisation qui est la plus favorable en termes de fiscalités.

Dépendamment des secteurs, certaines entreprises sont désavantagées par rapport à d’autres
et n’ont pas les mêmes moyens d’exercer aussi largement leur liberté de gestion.

Quoi qu’il en soit, chaque entreprise est fondée à mettre en œuvre une stratégie de gestion
qui tient compte en amont de la fiscalité et plus particulièrement de l’impôt car il existe :

1) Une fiscalité subie : un certain nombre d’obligations fiscales qui sanctionnent le


contribuable (et donc influent la politique d’affaires (ex : fixation du prix du produit)

2) Une optimisation fiscale : les choix stratégiques du dirigeant (ex : recours à la société
et à quel type) vont avoir des conséquences fiscales pour l’avenir.
 La gestion fiscale de l’entreprise se définit par une ou des action(s) visant à réduire sa
charge fiscale par le recours à des choix réfléchis qui tiennent compte de l’économie
espérée et du risque encouru.

Certes, le droit fiscal est une contrainte pour l’entreprise mais tant qu’il n’y a pas
d’illicéité, les choix de gestion ne peuvent être critiqués. Par exemple, le contribuable n’est
jamais tenu de tirer de ses affaires le maximum de bénéfices (CE 07/07/1958). De même, le
principe de non-immixtion a pour corollaire la notion d’erreur de gestion (ex : mauvaise
décision conduisant à une baisse du bénéfice imposable comme un mauvais investissement)
laquelle ne peut être sanctionnée.

Cependant, l’Administration avait créé pendant un temps la notion de risque


excessif34 pour sanctionner les entreprises (ex : leur refuser des déductions) mais le Conseil
d’Etat, dans sa décision du 13 juillet 2016, l’a écartée.

SECTION 2 : Le contrôle de la gestion de l’entreprise

§1. Les instruments de contrôle de la liberté de gestion

A. Les Centres de Gestion Agréés :

Le contribuable lui-même choisit d’y recourir. Il s’agit d’organismes qui s’adressent aux
PME afin de leur apporter une assistance dans certains aspects de leur vie économique et
fiscale. Plus précisément, ces centres ont pour l’essentiel une triple mission : assistance en
matière de gestion, assistance en matière de prévention des difficultés des entreprises et
assistance en matière fiscale. Ces centres s’adressent aux entreprises quels que soient leur
activité (ex : commerciale, industrielle, artisanale, agricole), leur forme et leur régime
d’imposition. Les titulaires de bénéfices industriels et commerciaux, même s’ils ne sont pas
professionnels (ex : bailleur d’un immeuble meublé), peuvent adhérer à un centre de gestion
agréé.
34
Achat de 1000 tonnes de charbon que l’entreprise savait qu’elle ne pourrait pas revendre ne devait être déduit de l’imposition
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Les Centres de Gestion Agréés revêtent obligatoirement la forme d’une association,


laquelle doit obtenir un agrément de la part de l’Administration fiscale (du directeur des
services fiscaux du département). Ces entités bénéficient en plus de l’assistance d’un
inspecteur des impôts qui quant à lui répond aux questions fiscales qui lui sont posées par les
entreprises adhérentes. Celles-ci remettent chaque année un dossier au centre de gestion
pour retracer leur situation économique et financière. Sur la base de ce dossier de gestion, le
centre assure une mission de prévention et de surveillance pour vérifier la cohérence des
documents remis par rapport aux déclarations fiscales effectuées, à défaut de quoi il conseille
d’y remédier.

Le centre garantit également de l’information (ex : sur les réformes fiscales annuelles) et
de la formation (ex : conférences, séminaires) pour que les contribuables adoptent une
politique fiscale cohérente. L’analyse des informations économiques, comptables et
financières qui est réalisée permet en outre de prévenir les difficultés de entreprises voire les
aider dans les démarches à accomplir. Les centres jalonnent les entreprises et, en cas de
grosse difficulté, peuvent les informer du fonctionnement de la procédure de sauvegarde –
c’est un mécanisme qui permet aux entreprises de régler leurs difficultés afin de leur éviter
de se retrouver avec des passifs exigibles supérieurs aux actifs (entraînant le dépôt de bilan
auprès du juge).

Vis-à-vis de l’Administration fiscale, les centres n’établissent pas ni ne certifient les


comptes ni non plus ne dénoncent les comportements des entreprises adhérentes mais
incitent celles-ci à répondre de leurs créances. C’est pourquoi, puisque c’est gage de bonne
conduite, dans certains cas, des abattements d’impôt légers sont prévus pour les entreprises
adhérentes (voire des majorations pour celles qui ne sont pas adhérentes). A contrario, le fait
de persister dans un mauvais comportement malgré les recommandations d’un centre ne
permet plus de se retrancher derrière la bonne foi.

B. La correction des erreurs comptables :

Aux termes de leur exercice comptable, les entreprises ont l’obligation d’établir des
documents comptables tout en respectant le principe de l’intangibilité des écritures
comptables35.

Traditionnellement, l’Administration fiscale dispose du pouvoir de rectifier les écritures


comptables jusqu’à la date de prescription, soit la troisième année qui précède l’exercice en
cours (art L.169 du LPF). Il s’agit initialement d’un pouvoir unilatéral conféré à
l’Administration auquel il a été reproché de créer une inégalité entre l’Administration et le
contribuable. Par conséquent, le juge a décidé d’accorder au contribuable un droit à l’erreur
(CE 07/02/1930). Autrement dit, le contribuable peut solliciter la correction de ses propres

35
Elles ne peuvent plus être modifiées une fois rédigées : ce principe traverse tant le droit civil, que commercial que fiscal (art
L.123-12 du Code de commerce ; art 54 du Code général des impôts)
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erreurs, à condition de démontrer la matérialité de l’erreur et le montant de la correction à


apporter. Il peut ainsi déduire les impositions auxquelles il s’est exposé par erreur.

L’erreur comptable doit être une véritable erreur : elle se distingue donc de la notion
mauvaise décision de gestion. En effet, l’erreur comptable renvoie à une erreur conduisant à
la violation de la norme comptable (le choix n’appartient pas à l’agent qui est soumis aux
écritures) alors que dans la décision de gestion, l’agent opte librement parmi les différentes
possibilités qui lui sont offertes (ex : de faire/inscrire un amortissement ou non, d’en
déterminer la durée).

Autrement dit, l’erreur comptable est donc commise par un contribuable qui méconnaît
sans le vouloir une règle comptable obligatoire alors que la décision de gestion recouvre une
opération volontaire de l’agent qui n’enfreint aucune décision. Ainsi, en 1979, Daniel Fabre
le commissaire du Gouvernement indique : « l’erreur comptable est une défaillance
involontaire dans le récolement36 ou dans la traduction comptable de données de fait 37 dont
l’enregistrement comptable ne laisse place à aucune option ». Le commissaire définit par
contre la décision de gestion comme « la décision de procéder à une écriture ou un ensemble
d’écriture comptables dont la passation est facultative, ou de fixer le quantum de ces
écritures en utilisant une marge de choix que les prescriptions légales laissent ouvertes. »

En outre, l’erreur comptable peut être invoquée aussi bien par l’Administration fiscale
que par le contribuable alors que la décision de gestion est opposable aux deux (ils ne
peuvent s’en prévaloir pour corriger).

/!\ L’absence de sanction du contribuable qui commet une erreur comptable favorise les
fraudes. Pour pallier ce risque, le juge a inventé la notion d’erreur comptable délibérée
(aussi appelée décision de gestion irrégulière). C’est le fait de prendre un choix volontaire
qui contrevient à la règle comptable applicable, soit d’une violation consciente (ex : oublier
des charges pour améliorer l’apparence de sa solvabilité aux fins d’obtenir un prêt puis
déclarer son erreur à l’Administration). Cette erreur n’est pas opposable à l’Administration :
celle-ci peut corriger ladite erreur et exiger les impayés alors que le contribuable ne pourra se
prévaloir de l’erreur y compris si elle a été commise à des fins non fiscales pour se soustraire
à des surplus d’imposition.

 Quid du dispositif légal du droit à l’erreur ?

La loi du 10 août 2018 a consacré un dispositif du droit à l’erreur pour toute déclaration
faite à l’Administration fiscale, aux caisses sociales, aux douanes, etc... L’idée est de
permettre au contribuable de bonne foi de régulariser sa situation sans encourir de pénalité (il
ne paiera que le surplus d’impôt impayé). Contrairement au droit à l’erreur jurisprudentiel,
ce dispositif légal suppose que le contribuable soit d’abord repris par l’Administration (il n’a
pas souligné son erreur en amont) et qu’il sollicite ensuite le bénéfice de l’erreur.

36
Informations déclarées
37
Avoir donné les chiffres d’un compte plutôt qu’un autre
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§2. Les techniques de remise en cause de la liberté de gestion de l’entreprise

L’Administration fiscale dispose d’outils qui lui permettent de remettre en cause les
conséquences fiscales d’une opération ou d’un montage qui a priori est licite.

A. La théorie de l’acte anormal de gestion :

Cet outil permet de sanctionner une décision de gestion qui n’aurait pas été prise dans
l’intérêt de l’entreprise (ex : l’abandon d’une créance sans contrepartie). Cette technique
joue le plus souvent en empêchant la déduction fiscale qui devrait résulter de la minoration
de l’actif qui en découle.

L’Administration fiscale peut alors faire comme si l’opération litigieuse n’a pas eu lieu
(ex : faire comme si la créance abandonnée a été payée et donc l’impose).

1. Le domaine de l’acte anormal de gestion :

La théorie de l’acte anormal de gestion s’applique à la seule imposition des bénéfices :


elle n’est pas opposable aux autres impôts (ex : TVA). Cette théorie vise à garantir que les
décisions prises par l’entreprise l’aient été dans son intérêt (ou intérêt social dans le cadre
des sociétés). C’est une conception prétorienne des juges administratifs qui repose sur
l’article 39 du Code général des impôts, lequel définit les charges déductibles des
entreprises. L’acte anormal de gestion consiste le plus souvent à refuser les déductions
fiscales de certaines opérations. L’article 38 portant sur les bénéfices fiscaux est aussi parfois
invoqué (ex : lorsqu’il y a une renonciation à un profit motivée par des raisons étrangères à
l’intérêt de l’entreprise) : ce fondement est toutefois discuté en doctrine.

Ce principe repose sur la règle selon laquelle la vie des affaires a pour unique fondement
la recherche de profit. Toute opération qui ne s’inscrit pas dans la recherche de profit a pour
vocation d’être sanctionnée au plan fiscal.

Il y a nécessairement un acte anormal de gestion lorsque celui-ci est accompli dans


l’intérêt exclusif d’un tiers (ex : dirigeant, débiteur, société du groupe). Au plan fiscal, une
définition classique affirme que « doivent être réputés normaux tout acte et toute opération
concourant à la réalisation de l’objet économique en vue duquel l’entreprise a été créée »38.
Par conséquent, doit être considérée comme normale la gestion de l’entreprise dont les
opérations lui confèrent une contrepartie effective. Cette contrepartie effective peut tenir
dans l’existence d’un prix conforme à la valeur du bien vendu ou de la prestation de service
rendu, étant précisé qu’il n’y a pas d’exigence en termes de nature de la contrepartie (ex :
avantage économique (se procurer de nouveaux débouchés, prise de contrôle d’un marché)
avantage financier (aide à une filiale utile à l’activité)) ou de temporalité.

~ Il y a donc deux types d’actes anormaux de gestion :


38
Pierre Rivière, commissaire du Gouvernement (1983)
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 Lorsque l’entreprise supporte une charge étrangère à son intérêt : l’acte anormal
consiste pour l’entreprise en le fait de supporter des dépenses personnelles au profit
des membres de l’entreprise (dirigeant, chef, associé)39 ou plus rarement de tiers40.

 Dans la seconde hypothèse, la jurisprudence fiscale indique qu’une telle opération


peut être justifiée à condition que l’entreprise démontre qu’elle y trouve son intérêt
propre41 (pas du groupe de sociétés) : par exemple, la participation pour une société de
participer à l’apurement du passif d’une autre société du groupe à l’étranger qui est
motivée par l’intérêt de maintenir son renom commercial n’est pas un acte anormal de
gestion (CE 01/06/1983).

/!\ Les opérations réalisées dans l’intérêt de l’entreprise mais qui ne sont pas
conformes à la valeur de marché (ex : indemnités excessives versées à certains
associés pour les fidéliser ; avantage pour conserver le dirigeant de la société
démarché par un concurrent) ne sont pas des actes anormaux car ils ont une
contrepartie dont l’entreprise peut rapporter la preuve.

/!\ En matière de groupe de sociétés, en tant que tel l’intérêt du groupe ne suffit pas
mais il demeure un élément permettant l’appréciation avec plus de souplesse de
l’intérêt de la société auteur de l’acte.

 Lorsque l’entreprise renonce à un profit ou qu’elle accepte un profit minoré par


rapport à celui auquel elle pouvait prétendre : ce renoncement peut être effectué au
bénéfice de ses membres42 ou d’un tiers43. Il est considéré comme une libéralité
consentie par l’entreprise qui relève de la qualification d’acte anormal de gestion :
l’Administration impose donc sans tenir compte de l’avantage réalisé. En effet, ces
stratégies sont souvent utilisées pour éluder l’impôt (transfert des bénéfices dans des
législations à fiscalité privilégiée ou dans des entités déficitaires). Dans ces situations
également, l’intérêt du groupe n’est pas un fait justificatif mais induit une appréciation
plus souple de l’intérêt de l’entreprise.

2. La répression des actes anormaux de gestion :

Au cours du contrôle de l’entreprise par l’Administration, si celle-ci prouve l’existence


d’opérations réalisées sans contrepartie ou pour des contreparties ne correspondant pas à leur
valeur réelle, l’entreprise peut soit contredire les faits soit ne rien dire et le supplément
d’impôt qui n’a pas été appelé est réintégré. Dans ce cas-là, l’entreprise démontre qu’il y a
bien une contrepartie économique ou financière pour faire tomber la qualification d’acte
39
Ex : charges d’entretien de l’immeuble apporté par l’un des membres alors que la société n’est que locataire ; loyer excessif ;
rémunération excessive d’un compte courant ou taux d’intérêt supérieur à la réglementation de l’avance en compte courant
40
Ex : fait de supporter les charges d’entreprises auxquelles l’entreprise est liée ; majoration de prix de transfert dans des
transactions intra-groupes par rapport aux prix réels du marché ; versement de subventions à une filiale ; être garant d’un
emprunt pour une société du groupe qui n’a pas de lien direct avec son économie
41
Ex : la disparition de telle société du groupe entraînerait pour la concernée des difficultés d’approvisionnement
42
Ex : vente d’un bien ou service à un prix inférieur à sa valeur vénale (ex : l’entreprise propriétaire de l’immeuble propose un
loyer plus faible que la valeur de marché pour son associé)
43
Ex : lorsque l’entreprise consent un abandon de créance ou facture des services à un prix inférieur
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anormal de gestion. Ainsi, le bénéfice imposable demeure inchangé. A contrario, le bénéfice


imposable est majoré soit par correction des charges déductibles soit par majoration du profit
imposable.

Il existe une présomption d’anormalité lorsqu’un avantage est consenti à un agent avec
lequel le contribuable n’est pas juridiquement lié.

/!\ L’acte anormal de gestion pourrait a posteriori être soulevé par un associé ou le
parquet pour caractériser un abus de biens sociaux (concerne uniquement les sociétés de
capitaux et les SARL) ou un abus de confiance (droit commun pénal).

 La théorie de l’acte anormal de gestion peut-elle remettre en cause la liberté de


gestion ?

L’emploi excessif de dépenses de promotion d’une entreprise ne peut justifier une


condamnation par l’Administration fiscale sur le fondement de l’acte anormal de gestion (CE
23/01/2015). Par conséquent, la théorie de l’acte anormal ne peut être utilisée pour
sanctionner une erreur de décision.

B. La théorie de l’abus de droit fiscal :

A l’origine jurisprudentielle, la Cour de Cassation s’étant fondée sur les principes


généraux du droit fiscal pour la forger (Cass. Civ. 20/08/1867), cette théorie a été reprise par
le législateur puis codifiée dans le Livre des Procédures Fiscales. Depuis, elle a été de
nombreuses fois modifiée dont notamment après une nouvelle décision jurisprudentielle.

L’abus de droit consiste en le fait de contourner le droit sans violer les prescriptions
légales et réglementaires normalement applicables à une situation donnée. La théorie de
l’abus de droit vise à remettre en question des montages juridiques dont les éléments ne sont
pas illicites mais dont la motivation globale est d’éluder l’impôt. A l’origine cette théorie
qualifie ou requalifie des conventions ayant vocation à dissimuler la portée réelle de certains
actes lorsque les auteurs cherchent à mettre en échec la norme fiscale par un acte fictif ou
une simulation : ainsi, la loi du 13 janvier 1941 affirmait que l’Administration était en droit
« de restituer son véritable caractère à une opération litigieuse ».

L’abus de droit fiscal va néanmoins s’émanciper grâce au Conseil d’État dans son arrêt
« Société Janfin » du 27 septembre 2006 : le juge pose un principe général de répression de
la fraude à la loi qui s’applique hors le cadre de l’article L.64 du LPF. A la suite de cette
décision, une Commission Fouquet est nommée et propose un certain nombre
d’aménagements dudit article en conséquence.

1. Les éléments constitutifs de l’abus de droit fiscal :

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S’inspirant des travaux de la Commission Fouquet, l’article L.64 du LPF donne une
définition générale de l’abus de droit fiscal qui reprend celle posée dans l’arrêt « Société
Janfin ». Dès lors, la théorise vise 1) à corriger le caractère fictif de l’opération et 2) à
sanctionner la fraude à la loi fiscale.

L’Administration a donc pu remettre en cause la qualification ou les opérations d’un


contribuable lorsque ceux-ci n’ont été inspirés par aucun autre motif « que celui d’éluder ou
d’atténuer les charges fiscales de l’intéressé ». Ce texte continue à s’appliquer pour les
procédures notifiées jusqu’au 31 décembre 2020.

En effet, depuis le 1er janvier 2021, l’article L.64 A du LPF s’applique. Désormais, le
motif d’éluder l’impôt n’a plus à être exclusif : il suffit qu’il soit principal. De même, ce
texte ne vise plus des impôts mais de façon générale les charges fiscales de l’intéressé
(ensemble des créances d’impôt et par extension aux faits générateurs, à l’exigibilité, à
l’assiette, à la liquidation et au prélèvement de l’impôt). Enfin, ce texte s’applique aux actes
et non aux seules conventions.

Intégrant les apports de la jurisprudence, il touche tant les actes qui ont un caractère fictif
que ceux qui procèdent à l’application conforme des textes mais inspirés par un motif
tendant à éluder l’impôt. Le champ d’application de l’article est donc considérablement
étendu.

a) La simulation :

En droit fiscal, la simulation est un mensonge destiné à tromper l’Administration des


impôts (Florence Deboissy). Hormis son objet, elle recouvre les mêmes manifestations qu’en
droit privé. Autrement dit, la simulation caractérise une situation dans laquelle la sincérité
d’une opération est mise en défaut par un montage juridique.

Selon une conception extensive, la simulation est la création d’une apparence destinée à
masquer la réalité. L’idée est d’utiliser à l’intention des tiers un mécanisme juridique faisant
naître l’illusion d’une opération en réalité imaginaire (ex : acte fictif44, mensonge concerté
entre cocontractants dissimulant le contrat reflétant leur volonté réelle derrière un contrat
apparent45).

b) La fraude à la loi :

44
Ex : production par le chef d’entreprise d’une fausse facture pour déduire de la TVA auprès de l’Administration
45
Article 1321 du Code civil : la convention ostensible mais insincère masque la convention sincère mais secrète. Ainsi, par la
voie de la clause, la contrelettre peut permettre à un débiteur d’échapper ou de tromper l’Administration fiscale. Elle a en effet a
trois fonctions : détruire les obligations de l’acte apparent (le rendant purement fictif mais faisant croire à l’Administration que le
débiteur a payé pour se rendre insolvable), modifier l’acte ostensible (ex : transformer un contrat de vente en donation pour
optimiser sa situation fiscale) et déplacer les effets de l’opération d’un patrimoine à un autre (interposition de personne (ex : pour
permettre à un médecin d’être bénéficiaire d’un legs de l’un de ses patients alors qu’il n’en a pas le droit en plaçant dans le
contrat un intermédiaire)).
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La fraude à la loi consiste en le fait d’utiliser des moyens en apparence légaux mais avec
une finalité illégale qu’est de contourner un texte impératif 46. C’est le « péché des surdoués
de la fiscalité » (Maurice Cozian). Les articles L.64 et L.64 A du LPF47 vise deux
conditions : le contribuable doit avoir recherché « le bénéfice d’une application littérale de
textes ou de décisions à l’encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs » et son acte doit
avoir été motivé par la volonté d’atténuer ou d’éluder la charge fiscale qu’il aurait dû
normalement supporter.

Jusqu’à la loi de finances pour 2019, il fallait que l’acte n’ait été inspiré par aucun autre
motif que celui d’éluder la loi. Désormais dès qu’un motif principalement fiscal existe cela
suffit.

Naturellement il est légitime de condamner les techniques sophistiquées d’évitement de


l’impôt, néanmoins l’abus de droit suscite des inquiétudes vis-à-vis de la pérennité du
principe de la liberté de gestion et donc de l’optimisation fiscale à plus forte raison car il est
difficile d’interpréter réellement l’intention de l’auteur des textes fiscaux. A ce titre, une
partie de la doctrine dénonce une forme de « shamanisme fiscal ».

En ce qui concerne l’objectif fiscal de l’auteur de l’opération, le Conseil Constitutionnel


avait estimé dans un premier temps que les dispositions d’une loi de finances qui tendent à
sanctionner les montages réalisés dans le but d’éluder l’impôt étaient contraires à la liberté
de gestion et devaient être censurées. Finalement, en 2019, la même logique de sanction a
finalement été admise par le Conseil Constitutionnel.

2. La sanction de l’abus de droit fiscal :

L’abus de droit vise à rendre l’opération inopposable à l’Administration ou à sa


requalification avec perception des impositions qui sont dues. En effet, s’il n’est pas
sanctionné par la nullité48 c’est parce que l’Administration n’y a pas d’intérêt (elle doit
pouvoir percevoir les droits) : celle-ci peut choisir entre le fait d’imposer l’acte apparent ou
d’utiliser la théorie de l’abus de droit pour faire comme si l’opération frauduleuse n’a pas eu
lieu afin d’imposer l’acte caché. La preuve du véritable caractère de l’opération incombe
toutefois à l’Administration fiscale et elle peut être renversée : si le Comité de l’abus de
droit49, que l’Administration peut consulter, se range de son côté par avis conforme, le
contribuable devra prouver la légitimité de l’opération qu’il a réalisée.

46
Construction sophistiquée (ex : organiser un montage artificiel en se plaçant dans le champ fiscal d’une convention
internationale dont on ne devrait normalement pas relever)
47
Les deux articles coexistent pour permettre l’application de la loi dans le temps
48
De même la simulation de l’article 1321 du Code civil n’est pas sanctionnée par la nullité mais de la faculté alternative pour les
tiers de se prévaloir de l’acte apparent ou de l’acte caché (dont ils doivent démontrer l’existence : c’est l’action en déclaration de
simulation)
49
Organisme initialement prévu en vue de protéger le contribuable contre l’arbitraire de l’Administration (art L.64 LPF)
/!\ Les décisions de ce comité ne lie pas l’Administration fiscale et si celle-ci ne se conforme pas à ses avis elle devra démontrer le
bienfondé de ses rehaussements d’impôt
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Si l’abus de droit est démontré, l’opération apparente est inopposable à l’Administration


et est requalifiée avec prélèvement des impositions dues avec intérêts de retard (~0,20% par
mois50) et pénalités, soit une amende de 40 à 80% des sommes éludées selon le degré de
participation active du contribuable (mauvaise foi) et selon le bénéfice retiré. Des poursuites
pénales supplémentaires peuvent s’ajouter en cas de constatation d’une fraude à la loi.

Pour s’en prémunir, le contribuable peut recourir à la technique du rescrit abus de droit de
l’article L.64 B du LPF. L’opération sera alors opposable à l’Administration en cas de non-
réponse de sa part dans le délai prévu.

/!\ Dans la pratique, sur l’application de la théorie de l’abus de droit, la jurisprudence et


l’Administration sont mesurées pour éviter tout abus de la part de cette dernière.

Chapitre 2 : La prise en compte de la forme juridique de l’entreprise

La législation contemporaine marque de plus en plus le fait que le droit soit un


instrument au service d’objectifs patrimoniaux, financiers, techniques, économiques, etc… et
ce notamment vis-à-vis de l’entreprise. La forme de celle-ci dépend notamment des objectifs
poursuivis par les fondateurs ou contrôlaires.

SECTION 1 : Les problématiques économico-juridique dans le choix de la structure de


l’entreprise

Avant de choisir la forme juridique de son entreprise, il convient de s’interroger sur


l’activité de l’entreprise, l’identité de ses partenaires et les moyens de financement.

§1. Le recours aux personnes morales

La société, contrat impliquant la réalisation d’apports en vue de réaliser des bénéfices


qui vont être répartis entre les associés, permet d’obtenir la personnalité morale : c’est une
technique d’organisation du partenariat51, de l’entreprise52 et du patrimoine53 (Pothier).

En outre, la société permet de répondre aux besoins de financement qui dépassent


souvent les moyens dont disposeraient un entrepreneur individuel et même un groupement
de personnes. Des capitaux pourront être en plus drainés par l’offre au public de titres
financiers : celle-ci consiste soit à utiliser la publicité pour s’adresser à un public indifféré
soit à recourir un intermédiaire (ex : banque) pour vendre les titres auprès du public. Il est

50
Article L.1727 du Code des impôts
51
Fonction historique première (ex : des sociétés babyloniennes, phéniciennes, romaines) : il s’agit pour des professionnels de se
regrouper afin d’exercer en commun une opération, leur activité et/ou pour assumer ensemble un risque (ex : financement d’un
navire pour une opération maritime)
52
La société présente des avantages sur le plan juridique, fiscal et financier
53
Optimisant la gestion des biens et droits de la société (ex : les biens immobiliers d’une SCI) avec souplesse patrimoniale bien
plus grande
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possible également d’obtenir l’inscription des titres sur un marché réglementé et donc de
diffuser à grande échelle les titres de la société (recours au marché).

A. Les associés :

La structure sociétaire permet de prendre en considération les aspirations de ses parties


prenantes tout en rassemblant les associés dirigeants (qui recherchent le contrôle/maîtrise de
la société) et les associés bailleurs de fonds (qui attendent les remboursements ou visent le
retour sur investissement) dont les vocations sont différentes.

En droit économique, le contrôle recouvre le pouvoir lié à la détention de titres ou à


d’autres techniques : le contrôlaire peut se comporter en propriétaires sur des actifs qui ne lui
appartiennent pas. Ainsi, celui qui a la majorité des droits de vote décide comme s’il avait la
totalité des titres54 dès lors que sa participation en termes de capital le lui permet
(investissement de la moitié du capital + 1€). En droit des groupes et/ou dans le cadre des
sociétés qui offrent au public des titres financiers, la notion de contrôle est encore plus
fondamentale : l’effet de levier55 favorise le phénomène majoritaire.

Selon le Doyen Georges Ripert, les Révolutions industrielles ont été permises par la SA,
ce « merveilleux instrument du capitalisme moderne », notamment en raison des grands
investissements structurants qui ont été rendus possibles par cet instrument.

B. Les dirigeants :

S’agissant des dirigeants, la société peut leur permettre de bénéficier d’avantages sociaux
inhérents à leur qualité (ex : salaire, rémunérations indirectes (assurance maladie, retraite),
etc). Les salaires sont pour l’entreprise déductibles des bénéfices imposables.

§2. Le recours à l’entreprise individuelle

Lorsque le dirigeant n’a pas une volonté de croissance importante, l’entreprise


individuelle peut offrir un certain nombre d’avantages sociaux, fiscaux, procéduraux (ex :
par rapport à la comptabilité) et patrimoniaux accompagnés de devoirs. Les avantages de
l’entreprise individuelle apparaissent d’autant plus appréciables que depuis quelques années
il existe des mesures protectrices pour le patrimoine personnel du chef de l’entreprise : la loi
du 1er août 2003 a mis en place l’insaisissabilité du domicile du chef de l’entreprise puis la
loi du 15 juin 2010 portant sur l’EIRL permettant au chef de l’entreprise de créer un ou des
patrimoine(s) d’affectation pour une ou plusieurs activité(s) professionnelle(s) 56. Les
créanciers du chef de l’entreprise n’ont donc plus de droit de gage général.

54
Dans les sociétés cotées en bourse les petits actionnaires ne participent pas aux votes (abstention de droit)
55
Méthode LBO : prendre le contrôle des sociétés en ayant un apport minoritaire par rapport au bénéfice obtenu en termes de
contrôle dans plusieurs sociétés du groupe pour in fine en prendre le contrôle
56
Depuis le 1er janvier 2013, il peut y avoir autant de patrimoines d’affectation que d’activités
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Le projet de loi relatif à l’activité professionnelle indépendante, voté en première lecture


avec modification par le Sénat le 26 octobre 2021, tend à créer un nouveau statut juridique
unique qui se veut protecteur de l’entrepreneur indépendant : la séparation du patrimoine
professionnel et de son patrimoine personnel sera automatique (l’EIRL sera donc abolie pour
être remplacée par ce mécanisme)57. Une allocation de travailleur indépendant serait en plus
offerte si l’activité n’est plus viable.

SECTION 2 : Les incidences fiscales de la forme juridique de l’entreprise

§1. Les différents types d’impôts

S’agissant de l’inventaire des différents aspects fiscaux qui seront pris en


considération lorsque la forme juridique de l’entreprise est choisie, il existe quatre grands
types d’impôts.

1. Les impôts portant sur les profits et les gains retirés par le contribuable :

~ Il faut distinguer :

 Les impôts qui résultent en général d’une activité professionnelle : par exemple
l’impôt sur les sociétés, les bénéfices industriels et commerciaux, les bénéfices
agricoles, les traitements et salaires et les plus-values professionnelles.

 Les impôts qui revêtent une dimension patrimoniale : par exemple les revenus de
capitaux, les plus-values privées et les revenus fonciers.

2. Les impôts frappant l’activité indépendamment de savoir s’il y a un gain :

La TVA ou les accises sur certains produits sont des impôts dus qu’il y ait ou non
d’enrichissement effectif au bout de l’opération tant que celle-ci est qualifiée d’économique
(ex : existence d’une plus-value sur le produit vendu par rapport à son prix d’achat auprès
du fournisseur).

3. Les impôts portant sur le patrimoine :

Sont concernés l’impôt sur la fortune immobilière, la taxe foncière, la cotisation foncière
des entreprises et la taxe de 3% sur la valeur vénale des immeubles détenus par des entités
juridiques après ponderance immobilière via des personnes morales, fiducies et autres
institutions comparables58.

57
C’est une remise en cause totale du principe d’indivisibilité du patrimoine
58
Certains biens immobiliers ne sont pas détenus directement par le véritable propriétaire (ex : une entité étrangère) lorsqu’il a la
volonté de dissimuler son identité. Cette dissimulation est permise par des groupes et fiducies, échappant à l’impôt à l’immobilier.
Dans ce cas, soit il y a une révélation complète de l’identité du propriétaire auprès de l’Administration fiscale, soit l’anonymat est
préservé mais le propriétaire doit payer la taxe de 3% sur la valeur de l’immeuble.
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/!\ Le patrimoine ne concerne pas uniquement la propriété : un contribuable peut être


assujetti à raison de la jouissance d’un bien. C’était le cas de la taxe d’habitation ou lorsqu’il
y a une assimilation de celui qui a la jouissance du bien au propriétaire de celui-ci (car il est
difficile de le déterminer).

4. Les impôts frappant des opérations données indépendamment de l’aspect patrimonial


ou d’un éventuel gain/bénéfice réalisé :

Il s’agit principalement :

o Des droits de mutation : lorsqu’il y a une transmission (ex : par donation, succession,
etc) il y a généralement des droits de mutation à payer qui sont des impôts frappant
l’opération.

o Des droits d’enregistrement : l’enregistrement de certaines opérations juridiques


auprès de l’Administration fiscale (ex : une création de SCI) donne lieu à la perception
de droits proportionnelle à la valeur des parts.

o Des droits ou des taxes fixes : ces frais touchent certains actes innomés (ex :
obligation, prorogation de délai, transformation de société).

§2. Les conséquences du choix du régime d’imposition

Face à une entreprise, la grande summa divisio qui se pose concerne sa forme juridique.

A. Les régimes fiscaux applicables aux sociétés :

Certaines sociétés sont assujetties à l’impôt sur les sociétés (IS) et d’autres non.

1. Les critères déterminant le choix :

La forme juridique choisie va déterminer l’assujettissement à l’IS. En vertu de l’article


206-1 du Code général des impôts et en application du droit commun, sont soumises à l’IS
les sociétés de capitaux (sociétés par action (SAS, SA, SCA)) ainsi que les sociétés
coopératives et leurs unions tout comme les sociétés d’exercice libéral.

A l’inverse, sont soumises à l’impôt sur le revenu (IR) les sociétés de personnes. Quant à
la SARL, de droit commun elle est soumise à l’IS mais peut opter pour l’IR. Elle est une
société de capitaux parce qu’elle est à risque limité mais aussi elle emprunte aux sociétés de
personnes : elle est institue personnae, est une société fermée et n’a pas de capital minimum
requis. A contrario, l’EURL est soumise à l’IR régime de droit commun mais peut opter IS.

Par ailleurs, les personnes morales peuvent être imposables sur l’option à l’IS en fonction
de leur activité : l’ensemble des sociétés de personnes peuvent opter de façon définitive
pour un assujettissement à l’IS (art 206-3 du Code général des impôts (CGI)). D’autres
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personnes morales sont assujetties à l’IS de façon obligatoire (ex : les associations réalisant
des opérations lucratives (art 206-2 du CGI)).

Aussi, sont exonérés au titre de l’IS un certain nombre de personnes morales : de façon
schématique, ce sont les personnes morales de droit publique et les organismes sans but
lucratif (ex : fondations, fiducie) 59. En outre, certains groupements de sociétés qui
s’installent dans des zones particulières bénéficient d’exonérations d’IS temporaires : c’est le
cas lorsque lesdits territoires relèvent d’un régime fiscal spécifique (ex : zones de
revitalisation rurale, zones urbaines sensibles, zones franche-urbaines, bassins redynamisés,
Corse, quelques départements d’outre-mer). En effet, le législateur lève parfois le levier
fiscal pour inciter les sociétés à s’implanter dans des zones sensibles qui sont handicapées du
fait de leur distance ou de leur économie.

2. Les conséquences fiscales du choix :

L’assujettissement ou non à l’IS va déterminer la base imposable et entraîner d’autres


conséquences.

a. La détermination de la base imposable :

Le résultat est imposé directement au nom de la personne morale et le montant va


dépendre de l’application des taux prévus par la loi. Par exemple, si une société qui comporte
deux associés et qui réalise 100 000€ de bénéfice est soumise à l’IS, elle est imposée à taux
réduit sur la première tranche à 15% (entre 0 et 36 120€) puis sur la seconde tranche à 26,5%
(entre 36 120€ et 100 000€).

Si la société n’est pas soumise à l’IS, elle verra son résultat directement imposé entre les
mains de ses associés : on attribue à chaque associé une quote-part au bénéfice qui
correspond à leur participation respective dans le capital. La quote-part intègre le patrimoine
de chaque associé et sera imposée au titre des revenus de celui-ci, faisant appliquer les
tranches légales. Les associés sont réputés avoir appréhendé l’intégralité des bénéfices : peu
importe que les bénéficies n’aient pas été réellement perçus (ex : les gains ont pu être mis en
réserve plutôt que distribués), ils seront imposés pareillement pour empêcher que l’on essaie
de soustraire les profits à l’imposition.

 Qu’est-ce qui est le plus rentable ?

Cela dépend de la situation économique de la société voire des associés au sein de la


même structure. En tout état de cause, le montant de l’impôt effectivement supporté dépend
soit du seul résultat de l’entreprise (IS) soit du bénéfice mais aussi des autres revenus des
associés60 (IR).

59
Qui échappent à l’impôt, d’où le fait qu’elles soient souvent dévoyées dans des buts d’évasion fiscale
60
Variables entre eux
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 Quid des pertes ?

Les pertes font l’objet d’un traitement fiscal. Les règles qui s’appliquent donnent lieu à
distinguer les pertes à caractère professionnel ou extraprofessionnel.

 Pour les sociétés soumises à l’IS, seule la personne morale est titulaire du déficit
général et peut l’utiliser sans limitation de durée (en faisant des reports en avant61 ou
carry forward) pour minorer son imposition. La personne morale peut également
minorer ses pertes pour faire des reports en arrière (créances de carry back) : il fait
apparaître au profit de l’entreprise une créance dégagée de la différence entre l’impôt
effectivement versé et un impôt théorique après imputation de la perte de l’exercice
sur les bénéfices non distribués des trois derniers exercices. Il s’agit de faire ici
comme si les pertes subies dans le futur ont été faites dans le passé aux fins de
maintenir de la trésorerie dans l’entreprise : l’Administration fiscale se retrouve donc
avec une créance d’impôt qui lui est opposée en ce sens qu’elle récupérera moins
d’impôt sur les bénéfices des cinq exercices suivants.

 Pour les sociétés non soumises à l’IS, les déficits issus d’une activité professionnelle
sont imputables sur le revenu global des associés en fonction de leur participation
respective au capital. Chaque associé sera donc imposé sur ses revenus en déduisant
dessus sa part des pertes de la société. En revanche, les déficits d’une activité non-
professionnelle sont reportables sur les revenus des associés uniquement de même
source/catégorie des années ultérieures (ex : les pertes de BIC62 de la société ne
peuvent être imputées que sur d’autres BIC et non pas des BNC 63 ni des BA64). La
durée d’imputation est de 5 ans sur les BNC et de 10 sur les BIC, après quoi il y a
forclusion.

b. Les autres conséquences du régime d’imposition :

Elles ont trait à la rémunération des dirigeants sociaux : ces derniers ont un statut
assimilable à celui des salariés et la rémunération qui leur est allouée constitue une charge
déductible, de même que les charges sociales afférentes. S’agissant des sociétés non
soumises à l’IS, la rémunération des dirigeants n’est pas considérée comme une charge
déductible car l’entité est regardée comme transparente.

En ce qui concerne le régime des plus-values, il peut y avoir une distinction fondamentale
entre :

61
Les pertes d’un exercice pourront être imputées sur les résultats des exercices suivants. Cela signifie que la société ne sera pas
imposée l’année de son déficit mais qu’en plus, elle pourra reconduire par tranches les retombées de ces pertes sur les exercices
suivants aux fins de réduire les impôts à venir.
62
Bénéfices industriels et commerciaux
63
Bénéfices non-commerciaux (ex : droits d’auteurs, activité libérale, exploitation d’un office, exploitation lucrative non
rattachée)
64
Bénéfices agricoles (exploitation de biens ruraux directs ou indirects)
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o Les plus-values à long terme : elles sont soumises à un régime de taxation réduit afin
d’encourager les opérations d’entreprise qui s’inscrivent dans la durée. Ici, la
détention du bien est supérieure à 2 ans.

¤ Dans les sociétés soumises à l’IS : certaines plus-values sont exonérées (ex : titre de
participation65), d’autres sont imposées au taux réduit de 19% (ex : titre de société
après pondérance immobilière ou locaux professionnels) voire à 15% (ex : produits
de la propriété intellectuelle).

¤ Dans les sociétés non-soumises à l’IS : les plus-values sont imposées à un taux
réduit de 12,8% en plus des prélèvements sociaux à hauteur de 17,2% (pour un total
de 30%).

o Les plus-values à court terme (ex : spéculations) : elles sont davantage imposées car
traitées comme un résultat ordinaire. Ici, la détention du bien est inférieure à 2 ans.

¤ Dans les sociétés soumises à l’IS : les plus-values sont fiscalement considérées
comme des revenus et imposées au taux légal de l’IS66.

¤ Dans les sociétés non-soumises à l’IS : les plus-values sont fiscalement considérées
comme des revenus mais imposées au taux légal de l’IR dans la catégorie
correspondante.

 Le critère général de la détention de l’actif (du bien) de 2 ans est la durée de droit
commun mais peut varier selon les biens (ex : prise en compte des valeurs comptables
d’amortissement67).

 Pour l’imposition, les plus-values sont établies après compensation avec les moins-
values sur l’actif.

 Quid du régime social des dirigeants ?

Il existe deux régimes de protection sociale du dirigeant différente avec naturellement des
conséquences en termes de coûts pour l’entreprise différentes :

 Le régime des salariés et assimilés : l’entreprise paie le salaire et cotise au titre de


l’assurance sociale. Les cotisations (charges) patronales, permettant de payer le
dirigeant, s’élèvent à 50% du salaire net68.

65
Sauf quote-part de 12%
66
Rappel : 26,5% pour le taux commun et 15% pour le taux réduit
67
Lorsqu’un bien se déprécie dans le temps du fait par exemple de l’usage : chaque année, la valeur de dépréciation pourra être
déduite du bénéfice imposable
68
Contre environ 22% pour les cotisations salariales
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 Le régime des travailleurs non salariés : il existe trois grands types de


cotisations (maladie, retraite, allocations familiales). Normalement le taux de
cotisation est plus faible car le dirigeant n’a pas le droit au même niveau de prestation.

 Contrairement à l’entreprise individuelle dans laquelle il n’y a pas de choix offert au


dirigeant, en société il peut y avoir des arbitrages : dans les sociétés par actions, le
régime des salariés est imposé au dirigeant, tandis que dans les sociétés de personnes,
le dirigeant est en principe soumis au régime des travailleurs non salariés. Dans la
SARL, si le gérant est associé majoritaire il relève du régime des travailleurs non
salariés alors que dans le cas contraire il relève du régime des salariés69.

B. Les régimes fiscaux applicables aux entreprises individuelles :

Au démarrage d’une activité, il est fréquent que les créateurs d’entreprise choisissent
l’entreprise individuelle dont la constitution est plus facile, moins coûteuse et non-assujettie
à l’IS. Le bénéfice de l’entreprise individuelle est imposé au titre des revenus du chef de
l’entreprise, selon les différentes catégories d’imposition et donc la nature de l’activité.

En raison du principe de transparence fiscale de l’entreprise, de la même manière que les


sociétés non soumises à l’IS, il peut être intéressant de recourir à ce type d’entreprise dès lors
que le taux marginal70 d’imposition est inférieur à celui de l’IS. En outre, l’imputation des
déficits de l’entreprise se fait sur un revenu global et pas cette fois sur un revenu catégoriel.

Il est possible avec une entreprise individuelle de profiter du statut de la micro-


entreprise qui permet un mécanisme simplifié et des charges forfaitaires.

Le chef d’entreprise quant à lui est automatiquement assujetti au régime du travailleur


non salarié. La base de calcul des cotisations est ici le résultat global de la société (et pas la
quote-part de la société comme dans autres sociétés non soumises à l’IS).

Un autre inconvénient dans l’entreprise individuelle est qu’il est plus difficile de tirer
profit des revenus de l’entreprise ou des sommes qu’elle engage car ces opérations ne sont
pas déductibles. Comme elle n’a pas de personnalité juridique, le dirigeant ne peut pas par
exemple se louer à lui-même un local pour défiscaliser les loyers.

De plus, les dispositifs fiscaux de faveur permettant de déduire des revenus de


l’investisseur les opérations réalisées au sein de sa propre société (ex : pour les PME
européennes) ne s’appliquent pas dans les entreprises individuelles.

69
Si le gérant est associé à 50% mais se comporte comme un dirigeant de fait (qualifié comme tel par le juge), à la demande de
l’Administration, il peut relever du régime des travailleurs non salariés.
70
Taux d’imposition le plus élevé auquel on est assujetti
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PARTIE II – L’optimisation fiscale de l’entreprise

L’optimisation fiscale peut s’effectuer par des procédés légaux ou illégaux aux fins
d’améliorer sa situation fiscale.

Titre I : Les procédés d’optimisation fiscale

Les termes d’optimisation, d’évasion, d’expatriation ou de fraude recouvrent des réalisés


propres bien qu’ils aient des définitions qualifiées de flottantes.

 L’évasion fiscale : c’est le fait de transférer de la matière taxable à l’étranger où elle


ne sera peu voire pas imposée sans expatriation effective du contribuable lui-même.
Par conséquent, il s’agit pour celui-ci de profiter de la répartition des compétences
fiscales entre les différentes souverainetés en vue d’optimiser sa situation. Pour
certains, l’évasion fiscale s’oppose à la fraude en ce sens qu’il n’y a pas d’illicéité,
alors que pour d’autres elle implique un caractère d’illicéité. Les rattachements que
réalise le contribuable devront donc être regardés selon s’ils sont artificiels (c’est
illicite) ou s’ils sont effectifs (ce n’est pas juridiquement répréhensible). Par exemple,
au sein d’un groupe de sociétés, pour que l’évasion soit légale, il faut donc qu’il y ait
des prix de transfert conformes à la valeur des opérations effectivement réalisées et
vers des sociétés existantes réellement.

 La fraude fiscale : c’est une infraction pénale définie à l’article 1741 du Code général
des impôts et qui consiste en le recours de procédés frauduleux en vue d’éluder tout ou
partie de l’impôt qui est dû (ex : fausses factures pour récupérer de la TVA et/ou
réduire sa base taxable, dissimulation de revenus ou éléments de patrimoine à travers
de montages complexes comme une société fictive, organisation frauduleuse de
l’insolvabilité pour échapper au recouvrement de l’impôt).

 L’optimisation fiscale : désormais souvent utilisée dans les manuels comme un


synonyme de l’évasion fiscale ou de l’abus de droit, elle rend compte en fait de
l’ensemble des procédés qui permettent de réduire ou d’éluder l’impôt.

¤ Les procédés les plus rudimentaires : il y a ceux qui consistent en le fait de ne pas
déclarer ses impôts ou de se tromper volontairement dans sa déclaration :
l’Administration fiscale va en principe s’en apercevoir, d’autant que maintenant elle
est largement informée, dispose de logiciels l’aidant à recouper les informations et
propose des déclarations pré-remplies. De même, la production et usage de faux est un
procédé rudimentaire peu efficace qui peut de surcroît entraîner une sanction fiscale en
plus d’une condamnation pénale.

¤ Les procédés les plus élaborés : il y a ceux qui consistent à utiliser des techniques
juridiques peu, mal ou pas du tout encadrées, quoiqu’ils puissent être remis en cause
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par la théorie de l’abus de droit fiscal. C’est par exemple le fait de se servir de
l’endettement pour minorer ou épuiser la base taxable (ex : dans un groupe, une
société qui réalise des bénéfices peut délocaliser ses bénéfices dans une société
déficitaire ou dans une entité enregistrée sur une zone européenne dans laquelle
l’imposition est plus faible comme l’Irlande).

Chapitre 1 : Les procédés d’optimisation fiscale internes

On ne verra en vérité que les procédés licites.

SECTION 1 : Les procédés d’optimisation fiscale en France

Contre toute attente, il peut être très intéressant d’utiliser certains régimes fiscaux
préférentiels offerts par le droit français. Il s’agit de faveurs législatives nombreuses et
accordées à des activités, localisations ou contribuables déterminés (ex : statut d’auto-
entrepreneur, investissement dans les départements d’outre-mer ou les zones franches,
principe de spécialité législative pour les départements d’outre-mer, dispositifs fiscaux
réservés à des zones agricoles défavorisées, franchise d’impôt pour les entreprises qui
s’installent dans des banlieues sensibles, etc). Ces dispositifs n’ont rien de nouveau :
certaines traces ont traversé l’Antiquité et l’Ancien Régime (ex : les franchises d’impôt
accordées par le Seigneur aux villes soit pour calmer des révoltes soit pour attirer des
marchands). De multiples dispositifs de faveur sont mis en place pour les territoires
insulaires, les zones agricoles, les zones franches. Un grand nombre de localités permettent
d’avoir des avantages fiscaux afin de réduire les différences avec les grandes localités.

SECTION 2 : Les procédés d’optimisation fiscale impliquant une délocalisation du


contribuable

La délocalisation consiste à recourir à la mobilité internationale : un agent (personne


physique ou morale) s’affranchit des contraintes juridiques ou fiscales qui s’imposent à lui
dans son État de résidence en le quittant au profit d’un autre plus favorable. Puisque le droit
international public fonde une répartition géographique des souverainetés et donc des
compétences juridiques des États, le franchissement de la frontière suppose d’échapper aux
règles fiscales du territoire sur lequel elles s’appliquent (principe de territorialité de l’impôt).

La délocalisation constitue une technique d’optimisation fiscale efficace et licite à


condition qu’elle soit effective (corresponde à la situation matérielle du contribuable en
question) et qu’elle respecte les conditions juridiques posées tant dans l’Etat de départ que
dans celui d’accueil.

~ S’agissant des personnes physiques, celles-ci sont en principe assujetties à l’impôt en


France dans les conditions posées par les articles 4 A et suivants du CGI : les personnes qui
ont leur domicile fiscal en France sont passibles de l’impôt sur le revenu en raison de
l’ensemble du revenu. L’article 4 B précise la nature de domicile fiscal en France : sont
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considérées comme étant domiciliées en France les personnes qui y ont leur foyer ou leur
lieu de séjour principal (+ de 6 mois), celles qui y ont une activité professionnelle principale,
celles qui y ont le centre de leurs intérêts économiques et celles qui sont des fonctionnaires
mais exercent leurs missions à l’étranger. En revanche, les personnes physiques dont le
domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leur seul
revenu de source française.

~ S’agissant des sociétés, il n’existe pas de texte correspondant à l’article 4 B du CGI,


néanmoins des références peuvent être trouvées dans :

 Le CGI : l’article 209 1° vise les bénéfices réalisés dans les entreprises exploitées en
France et ceux dont l’imposition est attribuée à la France par une convention
internationale relative aux doubles-impositions.

 Les conventions fiscales conclues par la France : une personne est résidente en France
si, en vertu de la législation française, elle y est soumise à l’impôt à raison de son
domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature
analogue. Si une personne morale est implantée dans deux ou plusieurs États
contractants elle sera généralement considérée comme résidente de l’État où se trouve
son siège de direction. Plus précisément, c’est le siège réel qui a vocation à prévaloir
et c’est la loi fiscale du lieu où il se trouve qui s’applique 71 : c’est le juge qui a un
pouvoir souverain pour apprécier le siège réel (Cass. Com. 12/12/1972).

Ainsi, les articles 1837 du Code civil et L.210-3 du Code de commerce indiquent que
la société dont le siège social est en France est soumis à l’impôt français et posent la
présomption d’efficacité du siège statutaire sauf si son caractère fictif est démontré (le
siège réel lui est alors opposable par les tiers qui démontrent le caractère fictif du siège
statutaire). Selon l’UE, le siège social d’une société peut être librement transféré et les
sociétés bénéficient conformément à l’article 54 du TFUE de la règle de l’assimilation
aux personnes physiques en ce qui concerne l’exercice de la liberté de circulation.

/!\ En droit international privé, lorsqu’il y a conflit de lois territoriales ou de juridictions


pour une même affaire, en fonction de l’espèce, la justice d’un seul État sera compétente
pour en connaître. En droit international public en revanche, puisque l’affaire touche la
souveraineté-même de l’État, pour elle seule plusieurs Etats peuvent retenir leur compétence.
Par conséquent, ils préfèrent signer des conventions internationales fiscales afin de mieux
déterminer les bases imposables.

Chapitre 2 : Les procédés d’optimisation fiscale transnationaux

SECTION 1 : Le recours aux régimes fiscaux privilégiés

71
Ex : Convention fiscale franco-algérienne du 17/10/1999, laquelle permet à l’Administration fiscale d’interpréter à sa lumière
les autres conventions
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La notion de régime fiscal privilégié renvoie à deux réalités complémentaires. Au sens


courant du terme, un régime fiscal privilégié est un système fiscal préférentiel offert à une
cométaire de contribuable ou encore un dispositif dérogatoire s’appliquant en vertu de la
délocalisation d’un agent. Par extension, sont désignés ainsi les États ou les territoires qui
proposent de tels régimes.

Au sens juridique du terme, l’article 238 A du CGI considère que sont soumis à un régime
fiscal privilégié les contribuables assujettis à une imposition de 40 % inférieure à celle qui
s’applique en France. Avant le 1er janvier 2020, on considérait que ce chiffre était de 50 %.
Avant le 1er janvier 2006, on parlait d’impôt notablement moins élevé. Ce texte est envisagé
essentiellement comme un instrument de lutte contre les paradis fiscaux.

Naturellement, c’est à l’Administration qui se prévaut de cette qualification d’apporter la


preuve que le bénéficiaire des paiements ou l’établissement financier où les paiements ont
été opérés est bien soumis à une fiscalité privilégiée au sens du droit français. Dans un arrêt
du C.E du 21 mars 1986, il a été précisé que la condition du bénéfice s’apprécie au regard de
l’entité juridique elle-même et non de la localité. Le commissaire du gouvernement a ajouté
que la comparaison doit être précise et ne peut se borner à une référence à des taux moyens.

L’Administration a l’obligation de déterminer la charge fiscale effectivement supportée par


l’agent puis d’évaluer toute chose égale par ailleurs le montant de l’impôt que le bénéficiaire
supporterait en France.

L’entreprise française peut enregistrer une entité juridique dans un État ou un territoire où
une filiale va bénéficier d’un régime fiscal privilégié puis elle va transférer de la matière
taxable dans cet État ou dans ce territoire.

Des avantages organisationnels sont présents mais des contraintes réglementaires et fiscales
voient le jour.

Titre 2 : La sanction des procédés d’optimisation fiscale abusif.


Cette sanction passe par 2 canaux : les techniques classiques du droit et la lutte contre les
paradis fiscaux.

Chapitre 1 : Les techniques classiques du droit fiscal

La lutte contre l’optimisation fiscale abusive emprunte des voies diverses. On peut distinguer
celle qui ont une origine nationale de celles qui émanent des institutions internationales.

SECTION 1 : Les dispositifs nationaux de lutte contre l’optimisation fiscale abusif (RFP)

Paragraphe 1 : La lutte contre l’évasion fiscale internationale.

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Au-delà de la sanction des contribuables qui recourt à des États non-coopératifs, le droit
français a mis en place des outils juridiques qui encadrent l’utilisation des régimes fiscaux
privilégié.

A. L’encadrement des opérations fondée sur le recours des régimes fiscaux privilégiés.

L’article 238 A vise les opérations en lien avec un régime fiscal privilégié. Ce texte donne
une définition de la notion qui s’applique évidemment au dispositif de cet article mais qui
s’applique aussi à d’autres dispositifs connexes en l’occurrence ceux des articles 57, 209 B,
123 Bis ou encore 155 A du CGI.

Cet article 238 A vise les transferts d’actifs fictifs ou excessifs. En tant que tel ce dispositif
n’est pas illégal. L’article 238 A va chercher à contrecarrer les stratégies d’optimisation
fiscale qui sont fondées sur la déductibilité de paiement ou du transfert d’actif fictif ou
abusif.

L’idée est que des sommes payées ou dues par un contribuable français à des entités
domiciliées à l’étranger et soumise à un régime fiscal privilégié ne seront pas admises
comme charge déductible sauf si le débiteur apporte la preuve que ces dépenses
correspondent à des opérations réelles et qu’elles ne présentant pas un caractère anormal ou
exagéré. La société française aura l’obligation de démontrer que le paiement réalisé
correspond à la réalité de l’opération et que le prix n’est pas anormal ou abusif.

Pour lutter contre des constructions abusives ou artificielles, le texte pose une présomption
simple de non déductibilité. La portée de cette présomption est double : les opérations
alléguées pour justifier les dépenses litigieuses sont présumées fictives et les virements
réalisés sont présumés anormaux ou exagéré.

Le contribuable qui souhaite déduire de ses résultats d’impositions françaises doit démontrer
la matérialité des opérations qui justifie le paiement. Il va devoir en plus démontrer que cette
prestation a été payée à sa valeur, une absence de paiement anormal ou abusif. Si il y arrive
alors il y a une déduction des sommes en question. Si il n’y parvient pas, il ne pourra pas se
prévaloir de la déduction fiscale qu’il invoque. L’action est opposable entre les parties mais
inopposable à l’Administration.

L’article 238 A ne vise pas à prohiber les transferts d’actifs avec le régime fiscal privilégié, il
cherche à garantir la sincérité des transactions des relations juridiques.

S’agissant des critères posés pour l’application de ce texte, on retrouve trois conditions
cumulatives :

- le débiteur doit être assujetti à l’impôt français.

- Sont visées les charges financières au sens large.

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- Les transferts d’actifs doivent s’opérer au profit d’un assujetti à RFP au sens de l’article
238 A.

B. Les dispositifs connexes

Plusieurs instruments de lutte contre l’évasion fiscale internationale se fonde sur la définition
de l’article 238 A al.2.

En ce qui concerne le régime des sociétés financières contrôlées, ce régime est posé par
l’article 209 B du CGI. Il s’inspire d’un dispositif américain et a été introduit en droit
français par la loi de finances pour 1980. Ce texte permet de rattacher à la base taxable d’une
personne morale assujetti à l’impôt sur les sociétés les bénéfices et revenus positifs des
entreprises et des entités juridiques qu’elle contrôle lorsque celle-ci bénéficie d’un régime
fiscal privilégié au sens de l’article 238 A al.2.

Le soucis de ce texte est sa conformité au droit international et européen. Ces dispositions ne


sont pas applicables si l’État ou l’entité juridique est établi dans un État de l’UE et si
l’exploitation de l’entreprise ou la détention des droits qui permettent de contrôler la
personne morale ne peuvent être regardés comme constitutifs d’un montage artificiel.

L’idée est d’appréhender plus efficacement des montages fondés sur des structures relais,
vouées à transférer de la matière taxable.

En ce qui concerne le régime anti-abus de la personne physique, il s’agit de l’article 123 bis.
Ce dispositif a été institué par la loi de finance de 1989, il se présente comme un mécanisme
comparable à celui des sociétés étrangères contrôlées. Sont alors concernées, les personnes
physiques domiciliées en France qui détiennent directement ou indirectement 10 % au moins
des parts, actions, droits financier, droit de vote dans une entité juridique établis à l’étranger
soumis à un régime fiscal privilégié.

Dans sa rédaction, le texte n’est plus applicable si l’entité s’inscrit dans un État membre de
l’UE sauf à ce que l’Administration rapporte la preuve d’un montage artificiel dont le but
serait de contourner la législation fiscale française.

Si les conditions d’application sont réunis, le texte emporte imposition des bénéfices ou
revenu positif de l’entité extérieur réputés constituer un revenu de capitaux mobiliers de la
personne physique.

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